:*».r^TA..> !-».'i ^ i .-■ ^HfH<^1i ^-'-_w'-^ , J ,, M^'-s*.. .^" . '■ .:.**^. X Vf^' -*: /■ "^». m L-^^ v> •5 ^ t »*;^vi\.iife. THE LIBRARY OF THE UNIVERSITY OF CALIFORNIA LOS ANGELES ^^ -^H Fm :^-^ 'h *' L'UNIVERS. •« «« »« 9« »« •« • • HISTOIRE ET DESCRIPTION DE TOUS LES PEUPLES. r T •? fT IB — CHINE MODERNE. rARIK — TVPOr.RAPHIC DK riRHIN PinOT FRERKS, RIK JACOB, 5fi CHINE MODERNE or DESCRIPTION HISTORIQUE, GEOGRAPHIQUE ET LITTERAIRE DE GE VASTE EMPIRE, IVAPHfiS DES DOCUMENTS CHINOIS. PREMIERE PARTIE, GfiOGRAPHIE, ORGANISATION POLHIQUE ET ADMINISTRATIVE DK LA CHINE, LANGUES, PHILOSOPHIE . PAR M. G.JPAUTHIER, VEMBRE DE I'l.USlEl'RS SOCIET^^ SAV*NTES. SECONDE PARTIE, ARTS, LITTERATURE, MOEURS , AGRICULTURE, HISTOIRE NATURELLE, INDUSTRIE, ETC. PAR M. BAZIN, PROFl^SKUR DE CnrNOIS A I.TCOLE DES LASOLES ORIENTALbS. PARIS, FIRMIN DIDOT FRERES, EDITEURS, IMrRIMECRS DE l-'lNSTITllT DE FRANCE, urn ; » CO «, 5fi. M DCCC LIII. t L'JJNIVERS. le grand ouvrnge cliinois intitule : Re- cueildes staluisadministratifsdela dy- nastie reg7iante,avtc cartes el plans{*), livre 87 et suivants , Section yTu-ti, ou Description de la terre. La division territoriale de )a Cliine a change sous les difi'erentr qui ['out gouvernee; c'est dynasties meiiie un usage adniis que la nouveile dynastie |)arvenue au pouvoir modilie la distri- )ution et la circonscriptioa des provin- ces par un premier acte de souverai- nete. La division de la Chine en quin/.e provinceSj comme on la trouve encore indiquee dans la piupart des geogra- phies europeennes, est celle qui existait il y a deux cents ans, sous la dynastie la denomination des lieux {Kien-tcli'i-jrin- kS). 6° Positions geographiques ; configura- lions des lieux ; localites remarquables {Hing- cki). 7° Moeurs et usages {Foilng-sou).', ^" Villes fbrtifiees, elangs et fosses {Tching-lciit). 9° Ecoies, etablissemcnts lidcraircs {Ht8- hiao). 10° Tableaux de population [Hoii-klieoh). 11° Receiisement des lerres cultivees et en friclie {Tlddn-foii). 11° AdmiiiisUation civile (Tcht-koudn). 13" Montngnes et fleuves {Chdn-tchoudn). i4° Vesligcs d'antiquiles {Koii hi). 1 5" Forteresses et moyens de defense {Koiidii-yai), i()" Ponts et gues (Tsin-lidng). 17" Digues et jetees {Ti-yen). 18° Tombeaux ou tertres et monumenls {Ling-mou). 19" Temples et salles consacres au cube par le gouvernement {Tse-mido). 20" Temples et monasteres dessectes de Fo et du Tao ^Sse-koiidn). 21" Fonctionnaires qui se sont dislingues dans radrainislration de la province ( Ming- liodri). 22° Homities et choses celebres {Jin-wS). 23' Bandits et vagabonds celebres (Lieoti- yii). 24° Femmes illustres par leur noblesse ou leur verlu {Li^wiih). a5* Saints et immortels (Sian-clit). a6° ProduiU du sol {Thoh-ultan). (*) ;;^ }^ -^ 1^ )i( Ta-thmg. fioei-iien-dioti, public a Peking, en 1 8 1 8, in-f». CHINE MODERNE. I* ties Ming (*) et dans le commencement lie la dynastie aotuelle , epoque a la- ijiielle remontent les premieres notions tli; la Chine commimiquees a I'Europe p ir les missionnaires catholiques. La Chine actuelle est divisee en dix- it nit prooinces, qui comprennent tout le vaste territoire de Tancien empire (^hinois, renferme dans les iimites que nous avons indiquees ailleurs (t. I, |). 5 et suiv.). De ces dix-huit provin- ces, dont plusienrs offrent une eteii- due et une population egales a celles de la France, dependent encore d'ira- menses territoires heaucoup moins peu- pies, situes dans les coiitres limitro- phes de la Chine, et que la dynastie regnante, d'origine tartare , s'est ad- joints depuis deux cents ans , soit par la conquete, soit par I'influence seule de sa civilisation, qui est incontestable- ment la plus avancee de toutes celles qui couvrent les vastus regions de i'Qrient. Par ses possessions de I'Asie centrale, !;i Chine, situee a I'extremite du conti- nent asiatique, oil elle a \-ieilli isolee de- puis plus de quatre mille ans, comme d>ins un monde a part, touche a I'em- pire de Russie , ne d'hier, et qui deja pourrait I'envahir; par sa suzerai- nete sur le Thibet, elle touche aux possessions de I'empire Britaunique: deux voisinages plus dangereux. pour elle, nation industrieuse et riche , que toutes les hordes tariares contre les- quelles elle eleva jadis ce fameax rem- part de cinq cents lieues de longueur, qui deviendrait impuissant contre I'avi- dite civiliseedeses nouveaux voisins. Voici comment les geographes offi- ciels chinois qui ont public, en 1818, le grand Recue'il des statuts admi- nlstratlfs de la di/nas/ie regnante, arec cartes et plans, decrivent les principales divisions politiques de leur vaste empire, et les principaux fleuves qui I'arrosent : « La capitale {King-sse) est situee (*) Cest ladivisionsuiviedans la graiide geo- graphic des Ming, iiitilulee Td-niiiig-i-tlwung- ichi, en 40 cahiers el 90 livres, qui a servi de base a ceile de la dynastie regnante. Cest aiissi la division snivie dans \ Alias sinicus du P, Martini , dans la Description .an {Tse- tsen-klian, ou chef principal) des Klie- eurfi-kfie {K/ialk/ia), se dirige a Test, traverse M-pou-fwu, Hou-lun-pe'i-eurli, Ya-kfie-sd, fait un detour au sud-est , traverse les trois clans de Ou-lousou- mou-tan {Ourousamouden) , Ile-hnmg- kiang (Sagfialien) et Ngai-kiun ; ii se reunit avec le fleuve Hoentlioung. « Le Ykn-fio (riviere d nombreux de- lours) est une riviere du Tcfie-kiang et du Kiang-sou j elie se perd dans le grand lac nomme Tai-lioii. « L-^ Yu-kiang se perd dans le lac Kfwung-tse. « Le Yu lioang-lio (fleuve jaune YH) traverse les provinces de C/ian-toutig et de Tcfii-li; il s'introduit successivement dans le Y-lio , le Wen ho, le fVeltio et le Tcfiang-fio , et se reunit au Tien. « Le Sdug-kliien-fio (fleuve du del des mUriers) sort du Cfiansi,te dmge (*) En mantchou Soungari. a Test, parcourt la province de Tchi-li, fait un detour au snd-est, et traverse la capitale a I'ouest, ou il forme le Young- ting-fio (fleuve efernellement flxe)] il se reunit aussi au Tien. « Le Tcfie-kiang sort du Ngan-fioe'i, se dirige a Test, traverse la province du meme nom , et se jette dans la mer. « Le Min-kiang sort du Fo-kien, se dirige a Touest, ou il entre dans la mer. « Le Youe-kiang a trois branches : la branche occidentale (Si-kiang, nomme J'igi'e par les E^uropeens, a son embouchure dans le golfe de Can- ton) sort du Yiin-ndn, se dirige a Test, traverse les provinces de Kouei- tcfxeou , Kouang-si et Kouang-toung , et se reunit a la branche septentrionale (Pe-kiang) et a la branche orientale ( Toung-kiang) avant de se jeter dans la mer. « Les rmeres Sse-ling-khe (Selingga) et Tcfia-pou-ko (Dzabkan) sont situees chez les bergers nomides, du noiu de Kfie eurfi-khe {Kluilkha). La riviere 'J'a-kfie-mou coule dans le Thang nou- ouliangfial. La riviere Kfie-eurfi-tlisi- sse [Vlrticfi] a son cours dans le pays de Kopto. La riviere /-/j^ celle de Td- li-niou, coulent dans le territoire de I-li. Celles qui sont a I'ouest du fleuve au sable d'or (Kin-cha fdang), ihx nom de I.an-tsang [vasfe etendue d'eau d grancks vagues), de Kfie-sa-ou-sou , (le Ya-lou-tlisang-pou , coulent toutes dans le Thibet. » POSITIONS ASTRONOMlODliS DKS LIMITES DE L'Ji.MPlRE. « A I'orient du meridien de Pe-king , le territoire qu'habitent les trois clans ou tribus , au milieu de la mer, dans une grande ile {Tarrakdi ou Segalien;, est situe a 31° 20' de longitude orien- tale. A I'ouest du meme meridien, K/ie- cfii-ko-eurh {Kacfiegar) , a j'occident des monts Tfisoung-ling , est situe a 47° de longitude occidentale. Vers le nord, Tcfiang-nou-ou-liang-hai, To- lo-sse-ling, sont a 56° 40' de hauteur du pole nord (a 56° de latitude nord) ; au niidi, Yai-fcfieou de Khioung- tcfieou-fou (ile flai-ndn), de la province de Kouang-toung, est a 18" 23' de hauteur du pole nord. Ce qui fait que L'UNIVERS. de Test a Toncst [I'empire chinois, en 1818], embrasse uiie elendued'environ H" (niille ncuf cent cinquante lieues de Vingt-cinq au degr^ (*)]; et du midi au ttord , it comprend 38° [neuf cent cin- quautc lieues] (**). » Celte inimeuse domination des em- pereurs chinois, que ies geographes offlciels de I'empire resument ainsi avee orf^ueii, est plus nominale qu'ef- fective dans Ies contrees barbares qui avoisinent la Siberle et le Turkestan; mais n^anmoins cet empire chinois- tartare est le plus vaste, le plus popu- leux et le plus anclen empire du monde, A ces trois litres differents il merite done eniinemment I'attention des geo- f^raphes, des hommes d'Etat et des iiis- torjens. Nous ajouterons ici quelques obser- vations a I'esquisse nn pen trop concise des geograpbes cbinois qui precede. L'aire de I'empire cbinois, si Ton en excepte peut - €tre r elle de I'empire russe, a cause de la Siberie , est la plus etendue, la plus vaste de la terre. II n'en est aucune qui possede autant de cotes inaritimes sur un ocean, il est vrai, tres-dangereiix, mais par cela m^me renfermant plus d'obstacles aux agres- sions de flottes etrangeres. Le grand Ocean est, pour la Cbine, une grande et admirable frontiere (surtout si le gou- vernement cbinois possedait jamais une marine comme Ies £tats europeens) , de plus de mille lieues de developpement. Au nord, I'empire cbinois conJine a la Siberie russe. Ce sont Ies montagnes que Ies Chinois nomment chaines du repos eleve exterieures {/li-hing-gan- Ihig), et quelques geograpbes europeens, monts StanovQi, Yablo/moi, Alpes daouriennes y qui forment la limite la plus sententrionalede la domination chi- noise du cote de ia mer d!Okhotsk{***). (*) Plus du cinquieme de la circonference du globe. {*') Ta-tsing-hoei'tien-thou, L. 87, f* 3-5. ('**) Un traite passe, on 1 69 r , entre la Chine CI la Russie, a Nertchlnsk , a determine ces litnites de la Hianicre siiivante : Le fleuve Jmour ou San;halien-oula (en chinois He- loun^-kiang, /leave i/ii dragon iioir) et toute la MoHRolie demeiircnt anx Chinois. La chainc dc Staitovoi {ai-hing-gan-ling), habitee Les monts Altai (en cbinois , Kin-chan, montscTor) forment sa limiteseplentrio- nale, la ou I'Irticb et I'Obi prennent leur source. A I'ouest, ou les geograpbes cbinois placent les Go-sa-k/ie ou Kosahs , sont ies frontieres occiden- tales de I'empire cbinois. Ces Gosakhe sont les Kh'ghiz , ou Karakirgkiz du Turkestan. Le lac Balkach , sur cette extreme frontiere, appnrtient encore a I'empire chinois. C'est du versant sep- par des Toungous, les iins independants, les aulres tributaires de I'lin on de I'aiitrc em- pire, fi\e la limite septentrionale entre I'lni- pire (-liinois et ren)| etjlise •' avee I'assistance du gouveruement chinois. « Le pretre qui reside a Peking et les Irois « autres qu'ony attend selon les conveni ions, « seront logcs dans le Kouan, ou edifice ei- « dessiis menlionne... II sera perniis aux " Russes d'adorer leur dieu, selon les rites de « leur religion. Ou recevra encore dans celte « maison quatre jeunes etudiants, et deux «« d'un age plus avance, sachant les langues « russe et latine, que I'ambassadeur desire « laisser a Pe-king , pour apprendre les lan- « gues du pays. lis seront nourris aux fiais « de I'empereur, et auront la libertc de re - •< tourner dans leur pays, aussitot qu'ils au- « ront fini leurs etudes. » C'est par cetle clause adroite , de la part du plenipotentiaire de la Russie, que cetle derniere puissance s'est menage un grand moyen d'information en Chine, et s'est ou- vert le chemin de la eapitale de cet empire, eniierement ferme aux autres puissances eu- ropeennes. CHINE MODERNE. tentrional des diverges chatnes de mon- taf^nes qui forment cette immense frontiere que sortent plusieurs grands flcuves pour se rendre dans la mer po- hiire, a travers la Siberie, et quelques- iins au couchont , dans la mer d'Aral. Les monts Celestes [Thian-clian) dont la direction, comme celle des mitres chaines de nioiitagnes que nous avons Mientionnees ci-dessus, ..t generale- nient et principalement d'orient en Occident; les viont)i Celestes, dis-je , qui separent la Soungarie de la petite Houckharie , aboulissent sur la cliaine des liolov'-tcujli (ou monts Bulor) , (|ui joignent les monts Alto.i a VHindou- Kouch. lis constituent la frontiere occidentale des possessions cliinoises de I'Asie centrale avec le Badakchan, Vll'nuloH-kouck ., le pays de Kafirs ^ le royainne di' Kacliemire et de Lahore, qui avoisinent le petit Thibet dependant de la Chine. Les hautes ehaines de VfJimdlai/a, qui separent le Mepal et le Boutau du lirand Thibet, constituent une des frontieres les plus iuiposantes et les plus siires que la main du Createur ait jetefs entre des nations. Au sud- ouest, I'empire chinois confine a I'em- pire birman et au royaume mam {Youd-ndn) ou Cochinchine, dont la civilisation est en pra'ide partie chi- noise. Une petite riviere et inie mu- raille assez faible separent la Chine du royaume de Toung-king et du Laos. Comme la Chine ancienne, la Chine proprement dite differe essentiellement, sous tons les rapports, des autres pos- sessions de Tempire dont nous venons de decrire les limites; il est, par rela meme, indispensable, pour ne pas don- ner une fausse idee des Glioses, de di- viser I'empire chinois en Chine projyre et en Dependances ou possessions chi- noises. Quoique ces dernicres soient de benucoup superieures en etendue a la Chine propre, bornee au midi et a Test par la mer jaune, a i'ouest par la f^rande muraille , et au nord par le Ko- konoor, le Thibet et I'empire birman, sous les autres rapports , ces posses- sions lui sont tres-inferieures, etant pour la plupart des contrees sauvages ou desertes , habitees par des popula- tions barbares ou pen civilisees, d'ou cependant s'echapperent autrefois ces grandes armies qui firent tfetnbie*' I'Europe et I'Asie. Les habitants de ws contrees different done des habitant? de la Chine propre en moeurs et en ci- vilisation, comme ils en different en races et en lan^ages. Ces deux divisions de I'empire sont aussi opposees I'une a i'autre que I'extreme civilisation et 1 ex- treme barbarie. II v a lieu d'etre surpris de I'unite qui preside au gouvernement de cet immense empire, compose d e- leinents si het^rog^nes. Dans les societes anciennes conim^ dans les societes modernes, en Orient comme en Occident, les villes capitale? ont toujours ete considerees comme de la plus haute importance. C'est la qu'est le rover de Taction et de la pensee qui rayonnent dans toutes les directions •, c'est le siege du pouvoir legislatif , ad- ministratif et executif , et par conse- quent le moteur qui imprinie le mou- voment et la. vie a tout le corps social , qui lui impose ses formes et sa direc- tion. Aussi le plus souvent iMiistoire d'un peuple a ete absorbee dans celle de sa capitale, quoique a tort scion nous ; car I'histoire de Rome , toutc grande qu'elle a ete , a eu le fatal in- convenient de laisser dans I'oubli une tres-i-'rande portion du genre humain, qui certes, pour avoir ete gouvernee par la ville efernelle, ne meritait pas moins sa place dans I'histoire. Avant que de faire connaitre en de- tail chacune des dix-huit provinces qui constituent I'empire chinois propre- ment dit, et les territoires qui en de- pendent, nous commencerons, ainsi que I'ont fait les redacteurs de la grande Geographie impericde et ceux du Re- cueil des statuts administratifs de I'empire, avec cartes et plans, prece- demment cites, par donner une des- cription de Pe-king, la Cour du Nord, que les ecrivains chinois nomment |)lus souvent Ring-sse, Capitale, Chun-thien- ioxx^mieprincipaleobeissantaucieli"). (*) Les aiitoriles que nous avons principa- lement suivies dans cette notice sont le Ta- thsing-i-dioitng tchi, et I'ouvrage chinois tra- diiit par le P. Hyacinthe Bitchouriii, qui I'a accompafjued'un "magnifique plandeP*--////^, leve, en 1 8 1 7, par des officiers russes, et dont nous publions une reduction revue sur im L'UNIVKRS. DESCRIPTION DE PK-KING. Selon des observations astronomiques faites a Pi'-king par les missionnaires franoais, la latitude de cette ville a ete determinee a 39° 42" 15" nord, et sa lon- gitude a 114° est du moiidien de Paris. Elle est sitiiee dans la partie septen- trionale de la province de Tchi-li, a quatre cents H (quarante lieues) de la grande niuraille (*) : a trente It (**) a I'ouest s'eieve une chaine de liautes montagnes, qui se dirigent du nord au sud-ouest , et d'ou sortent de petites rivieres qui arrosent une partie de la plaine; Tune d'elles entre dans la resi- dence imperiale. Sa partie septentrio- nale se separe en plusieurs bras, envi- ronne le palais imperial, forme plusieurs lacs, la plupart artificiels, entoure loute la ville c/iiiioise, et, reunie en un seul bras sous le nom de Canal de trans- port {Yun-ho), elle se jette dans le fleuve septentrional (Pe-ho), a plus de vingt-cinq li a I'est de Pe-king. Cette ville (que Ton nonmie aussi Ctmn-thien-foK , « J Ule du premier ordre ou departementale obeissant au del, » ) se divise en deux parties distinc- tes : I'une est la Fitle interieure {Ne'i- tching ) , I'autre la Fille exterieure [fVai-tching). La premiere contient encore une autre ville, entouree de mu- railles, que Ton nomme Tille imperiale {Hoang-tching), au sein de laquelle se trouve encore une troisieme ville, ceinte de murs, que Ton nomme Fille interdite {Tseukinrtching) (***). plan chinois de la meme capitate. L'oiuTagc chinois traduit par le P. Hjacinlhe a pour litre Chin-jouaii-cln-Ho, « Notice abregee de la residence imperiale, • en i6 livres, dont I'auteiir se notnnie Oii-tcliang-youan. II fut public en 1788, sous le regne de Kliian- loiing. N'ayant pas le lexle chinois a noire disposition, nous avons etc oblige de nous en rapporter presque conslamment a la tra- duction du P. Hy.icinllie (traduction franijaise de M. Feny de Pigny). (•) On Irouvera une vue de Pe-king dans noire premier volume, pi. 65. (•*) Nous continuerons a employer cette denomination cliinoise pour mcsure de dis- tance, en preveuanl que Ton en compte aSo pour un degre, et ro pour une ancienne lieue de France. (•*•) Voy. Ic Plan, pi. r. ASPECT GKITRRAL. La situatiorv de Pi'-king peut ^tre en- visagee sous deux rapports : sous le point de vue politique et sous le point de vue physique. La province de Tchi- li, dans laquelle .se trouve Pe-king, n'est point centrale (*), si I'on ne con- sidere que la Cliine proproment dite, mais elle semble avoir ete destinee par la nature a devenir le siege d'un puis- sant empire. Quand un danger est pro- chain et toujours menacant, la vigi- lance doit etre sans cesse" eveillee et la protection active : c'est ce qui fait que, dans de pareils cas, la sdrete d'un pays est mieux assuree quand le gouverne- ment siege pres dos lieux menaces : voila pourquoi, aux deux extremites du monde, Pe-king et Paris furent clioisis originairement pres des frontieres sei> tentrionales des deux empires pour les proteger centre leurs ennemis du INord, les Tartareset lf;'s Anglais. L'aspect exteneurde/'e-A7/«f/ est for- midable, disent lesauteurs delagr;uide Geogruphie imperiale ('*); son terri t oi re est tres-etendu ; la vaste iner I'entoure a I'orient; une grande chaine de nion- tagnes {Tai-hang) forme sa limite occi- dentale; les nombreux defiles fortifies des Picsjoyeux (//j/oMngf) protegcntsa frontieredii nord ; au inidiil s'appuiesur le sol de I'empire, et se trouve entoure de toutes parts conime d'une ceinture. Pe-king (***) est situeau milieu d'une (*) II est rare que la capitale d'un empire soit placee au centre du territoire. Paris, Londres, St-Pctersbourg, Vienne, etc., ne soni pas des vilies centrales. Le choix qui a ete fail de ces positions pom- siege du goii- vernement, a ele quelquefois du au hasard , d'autres fois ce sont des considerations poli- tiques on mililiiires qui les onl determinees. (**) Kiouan I, f" 1. (*") I^ P. Hyacintbe : Description de Pc- kin. Get archiniandrile russe, qui a demeure quatorze ans dans cette ville, aurait pu en donner iiiie description plus dctaillee et plus instructive peut-ctre que celle qn'il a livrce au public, la(pielle n'est guereque la traduction abregee de I'ouvrage cbiiiois precedeniment cile. Ce sont quelques maigres extraits, toute- fois beauroup moins interessants que celui-ci, qui out fait dire Icgerement a Malle-lirua ; « Les gcograpbies chinoises ne sont que d'a- " rides nomenclatures cpii ne nous appren- CHINE MODERNE. 9 vaste plaine sablonneuse et fangeuse ' en plusieurs endroits. Les temples qui se trouvent hors fie ses nuirs, par leur immensite ; les monasteres , par leur magnilicence ; les cimetieresdes grands, par leur exposition pittoresque, fornie- raient d'admirables points de vue, sans I'usage qii'ont les Chinois d'ensevelir Feiirs edilices dans les enclos de leurs fours (*), ce qui detruit toute la ma- jeste exterieure des lieux les plusdignes d'admiration. Les campagnes environ- nantes, couvertes de moissons en ete, ofifrent dans leur inegalite montuense des paysages varies dont Teffet plait a Toeil ; mais en hiver, elles sont defigu- rees par les ravins, par les excavations et par les collines. La ville ellc-nieme, du haut des nionts qui la doniinent au loin , se presente comme si elle etait au milieu d'une epaisse foret ; cet eftet est produit par la disposition oblique des bouquets de bois attenant aux diffe- rents cimetieres, puis des arbres plan- tes en avenue, pres des couventa et de I'enceinte de la ville. Lorsque le voya- geur approcbe de la capitale du cote du nord, la hauteur des murailles arrete son regard impatient. Les formes ex- traordinaires et gigantesques des tours surprennent par leur nouveaute; mais des qu'on a penetre dans rinterietir de Fe-king^ I'otonneinent absorbe tout sentiment. On n'apercoit point de ces beaux, de ces superbe.s edilices, et ces rues propres et regulieres qui font Por- nement principal des capitales desEtats de I'Europe. Au lieu de rues se decou- vrent de longues files de marcbandises etalees; au lieu d'hotels et de palais, un melange de boutiques, d'auberges et de convents. On rencontre rarement " nent que pen ile chose. » Une grogra- pliie comme la Geograpliie imperiale , com- posee de plus de trots cents volmues, line wide nomenclature. ! Les ccrivains devraient bleu eire si'irs de ce qu'ils disent avaiil de porter si legerement des jugements si tran- cliaats. (*) Ell Chine les apparlenients sont !)alis dans rintcrieiir d'niie cour, et qiioUpiefois , apres avoir Iranchi le seuil exierieiir, on a encore a franchir deux ou Irois porles co- cheres pour arriver aux appartemenls inte- rjeiirs. m^me, dans les rues de premier ordre, quelques palais ou quelques cours dc justice. Les bailments de cette espece, de meme que les maisons des habitants, sont dans de petites rues, dans d'etroits passages. A la verite, les principales rues , et meme le plus grand nonibre des rues communes, sont assez larges et assez droites, mais, dans quelquf s endroits, les maisons sont mal alignees et delabrees; ailleurs, se trouvent des puits au milieu meme des rues, qui sont, en sOUtre, bordees d'egouts infects (*). En general, I'inegalite, le mauvais en- tretien des rues, ou plutot des sentiers qu'on est oblige de suivrc dans les rw^?.^ est un juste sujet de blame contre la police chinoise; et l'iiisup|iOrtable puan- teur d'urine(**) qui sort des trous pra- tiques dans les petites rues, presque a chaque recoin, est une chose qui im- plique contra'.liction lorsqu'on songe a I'extreme delicatesse des Chinois sur les autres objets. Mais comme la partie anterieure de chaque boutique ou ma- gasin est disposee d'une facon particu- liere et avec des ornenients varies selon la nature di's marcbandises qu'on y vend , cette diversite de constructions, embellies par le cinabre, le bleu dc montagne, le vernis et la dorure, conmie aiissi par I'arrangement symetrique et remarquable des marcbandises, enlin les arcs de triom|)he qui decorent les places publiques, ces cboses-la, dis-je^ attirent souvent I'attention de I'ctran- ger, et lui font oublier les desagrements dont j'ai parle. Parmi les plus beaux endroits qui puissent s'offrir aux regards du public, on cite le lac Thai-i-tchi (***), avec I'lle de marbre, et les sommets ravissants du mont A'ing-chan. {****), ainsi que la magnifique entree qui se trouve au sud; mais I'acces de ces endroits est in- terdit. 11 n'y a autour de Pe-king au- cune riviere navigable, et qui merite (*) II n'y a pas iongtemps que Paris offrait encore aux yeux de pareils egouts. {'*} Paris encore n'a riena envicr aPe-king sous ce rapport, niaigre les mesures que Ton a dija essajees de prendre contre im tel in- convenient. (*") N-^ 77. ("") IN" 73. w L'UJSIVERS. d'etre nbrtiril^e. t?n seut petit canal, honors du nom de riviere, Y'u-ho, tra- verse la ville, et encore ies eaiix qu'il apporte nesont-elles destin^^es qu'a ali- inenter Ies etangs et Ies canaux du pa- lais. Les linbit.ints dti illOins ont de IVail a discretion, mais en general cette Kill , dans I'interieur de la ville , se trouve ^tre salee, et il faut envoyer au (lela des barrieres pour se procurer de I'eau douce et pptobld. Les puits qu'on trouve au d^la des barrieres du nord donnebt une eau parfaite en tout {ioint. Ainsi P^-king n'a qu'a se louer des avantages de son emplacement et des proportions colossales de ses inurailles ; inais, d'autre part, cette ville ne reooit (|ue par le sud-est toiite sa subsistance; le 'Cittalde transport {Ymi-ho) par oil .Tirivent dans Pe-klng les vivres et le combustible , se dessahe qiielquefois :i la suite des grandes chaleurs ; et dans le temps des discordes civiles, il est fa- cile d'en fermer le passage; cette der- niere circonstance, qui met cette capi- tnlc pour ainsi dire a la merci de la force exterieure , fut une des principa- les causes de la chute de la dynastic youan, ou mongole. Apres avoir decrit I'aspect general de Pe-king et de son territoire, il nous ireste a jeter un coup d'oeil sur la dis- tribution interieure de cette capitale de I'enipire. La dynastic tartare trespure {ta-thsmg), qui regne aujourd hui en Chine, aussitot qu'elle se .fut a-ffermie sur le trone des Ming, imposa a cette capilnle son organisation militaire, en la divisant en /luit bannieres ou corps d'armee, qui sont tous repartis dans Tinterieur de la ville pour la defense du palais imperial. La banniere jaune oc- cupe un quartier silue entre hporte (le la vicloire vertueuse {te ching-men){*) et la porte de la grande perfection {feoutchingmen) (**) dans la ville in- terieure ; la banniere jaune a bordures occupe le quartier oriental de la ville exterieure. La banniere blanche oc- cupe le quartier oriental de la ville in- fe'rieure entre le mur d'enceinte et la porte du soleil levant {Jtchao-yang- O N« r63 du Plan, n N* 1 36. men) (*)•, une autre ftawne^r^ blanche a bordures occupe le quarlier occiden- tal de la ville interieure. La banniere rouge occupe le quartier sud-est de la ville interieure, et la banniere rouge avec l)ordures le quartier sud-ouesti La banniere bleue occupe le quartier central de la partie ouest de la ville exterieure ,* la banniere bleue avec bordures est situee pres de la porte de la guerre proclamee { sioua?i • wou- ^ men) (**). Les sections de la ville ont etc eta- blies d'apres cette repartition en quar- tiers niilitaires. Sous le rapport de Tad- ministration civile, la ville int^rieuri a et^ divisee conjointementavecia ville dite exterieure, en cinq quartiers, qui tous dependent, non pas d'un prelet de police, mais du ministere de la justice. Dans le ressort de ces quartiers se trouvent plusieurs arrondissements. Par exemple : le quartier du centre a neuf de ces arrondissements; le quar- tier de Test cinq ; le quartier sud sept ; le quartier ouest six , et le quartier nord neuf. Ces quartiers dependent de la police pour la partie militaire. ToPOGRAPniF. BE Pe-KINO. LcS murs de la lille de la cour {King- tching) (***), qui fornient presque un carre parfait, ont quarante /idecircon- ference ou quatre lieucs, et trente-cinq picflscinq pouces de hauteur (****). La. Fille imperiale (floang-tching), situee dans I'interieur de la precedente, a dix- huit li de circonference; la muraille (*) No 126. (") N" ii'l Cette situation des bannieres est Ircs-rertMile , mais elle n'a rien de |ht- inanenl. Leiir enipl;icpmei»t est figure siu' ies plans chinois de Pc-king, par les teintcs di- verses de leur denomination. (***) Non conipris la ville exterieure, qui est figuree sur lu plan, sous le chiflVe romaiii IV. (****) Ta-tlising-i-thounglclii; Kiouan /, f° I. L'ouvrage chinois traduil par le P. Hya- cinlhe ajoute que les murs ont soixante-deux pieds de largeiu- a la base, el einquanle au sommet ; auxquels il faut encore ajoiiler cin(| pieds huil dixiemes pour lescreiieaux ou pa- rapets a embrasures. Tintkoitski dil ("Voyage a Pe-king, tome II , p. 1 3o) que ces murs n'ont que a i pieds d'epaisseur. Pour que le lecteur puisse se former une idee plus exacte CHINE MODERNE. tl d'encelnte ii 2325 tchang [7,750 metres] de dcveloppement. La fUie interdite {Tseu-kin-tching) , le Kremlin de Pe- king, est situee dans Tinteriear de la Fiile imperiale ; elle a siSc li de circoii- ference. Sa murailled'enceinte a de clia- ctin des deux cotes, sud etnord, 236 ichttHg et 2 pieds chinois de longueur i}87 metres environ], et de chacun des deux cotes, est et ouest, 302 tchang, l) pieds chinois [1,009 metres] (*). I. VlLLE BOLGE INTEBDITE [Tseu-kin-tching] . Gettepartieintcrieure de Pe-king{**), fessentiellement destinee h la residence de I'empereur et de sa oour, a quatre portes, une de chaiiiio cote de son en- ceinte carree. A voir la distribution in- terieure de cette enceinte fortifiee, la beaute, la grandeur et le nombre des edifices synxitriquement isoles qifelie rcnferme, on la prendrait pour une ville de palais construite par la ba- guette magique d'une fee enchanteresse. On ne trouverait pas, dans aucune ville du monde, \\n ensemble aussi vaste, aussi imposant, aussi merveilleux d'e- dilices royaux et d'un aspect aussi pit- toresque. Un coup d'oeil jete sur le plan pris a vol d'oiseau en donnera une idee (***). des lieux decrils, nous figiirons ici les diver- ses enceintes de Pti-king proprenieni dit : King-sse. Hoang-lching. Kin- telling, ville inlerdile. Ville imperiale. Ville proprement dite. (*) Td-tlislng-l-thoiing-tchi, K. I., f. a. (**) Voy. le Plan, pi. i, Section I. (***) Voy. la traduction citee dii V. Hya- cinthe Bitclionrin. Toutelapartieexterieureestentouree d'un large canal, dont les bords sont releves perperidiculairement eh granit. Sur la rive opposee, situee entre la for- teresse et les eaux du canal, a ete bati de trois cotes, a Texclusion du cote sud, un corps prolonge de bStiment qui s'eleve jusqu'a la moitie de la hauteur du mur. Les terrasses, les glacis et JeS esplanades de la forteresse sont con- verts d'une airede briqiiesdites briques de ville, tandis que le chemin qui con- duit droit aux grandes salles est forme par de gros morceauxde pierre grise ct blanche. L'interieiir de la ville sacree su divise en trois parties J orientale, moyenne et occidentale. La partie moyenne occupe tout I'espace qui s'e- tend de la porte sud a la porte nord, et renferme un palais uomme Palais im- perial, subdivise en plusieurs vaste.s palais distincts, dont chacun a un nom et une destination particuliere. II regiie une symetrie parfaite pnrmi les edifices grands et petits , soit dans les palais , soit dans les parties ou quartiers d'o- rient et d'occident ; et, quant a la hau- teur respective des bfitiments, on y re- marqne encore un plan regulier et bar* monieux. Pour eviter des longueurs, nous diviserons chacune des trois par- ties de la T'ille interdite en deux sub- divisions : le nord et le sud. Le sud de la partie orientale renferme diverses chambres de justice et autres hotels d'un genre analogue; le nord n'offre aux yeux que des palais pour I'heritier presomptif et pour le sejour passager de I'empereur, ainsi que des temples. Le sud de la partie occidentale ren- ferme aussi les hotels de differents lui- nisteresetautresadministrations, pnrmi lesquelles est celle de I'intendance de la cour avec tous les batiments qui en de- pendent. Le nord de cette partie ne renferme que des batiments pour les femmes, ou des serails pour les plaisirs de I'empereur, puis des pavilions pour le sejour momentane qu'il lui plait d'y faire, et enfin des temples. Nous com- mencerons done I'examen de I'interieur de la Fille interdite ou sacree par la partie sud du quartier central; voici ce qu'il y a de plus remarquable (*) : (*) route I'enceinte iateijeuie carree figii* L'UNIVERS. ( 1*. Wou-mett.)Poiie nu'rkUonalc . Elle a trois en litres , d est surnionteo (luiic tour k deux (Hages sur neuf spirales. Devant ccttP porlc sont ilu (•i>t<^ dc Test un cadran liinaire , cl du crtli' dc I'oiiesl lui cadran so- laire. Sur les llancs de tette tour, dans des galcries ouverfes a I'oupst, se trouvc une timbale, ct au\ angles sont de liautes lours ii jour. Les foiictionnaires publics appartenant soit a I'ordre civil , soil a I'ordrc niilitairo, so rendent au palais ct en revicnuent par le passage de Test ; il n'y a (|ue les princes du sang inip<5rial qui aient droit de passer par le passage do rouest. Cliaque jour la cloche et la timbalc retentissent durant la marclie de I'eiupereur se reudant au conseil ; a sa sortie et lorsqu'il passe par la porlc du midi , la cloche tinte , et lorsqu'on offre le sacrilice dans le grand temple, on fait relentir la tim- balc. Lorsque les troupes, apri's une expedi- tion heureuse, rentrent en triomphe et vont au palais presenter le^ prisonniers , Tenipe- reur se rend sous iaporle mdhdionale pour acbever la ccrdmonic de la reception des- dits prisonniers. C'est pri'S de cettc mftme porte qu'annuellement , le premier jour de la tlixitme lune, sont dislribu^s des calendriers pour I'annce suivanle. C'est aussi sur la place qui s'^tend au delli de cette porle, que sont distribues les presents que rcnipercur fait aux princes etrangers et a Icurs ambassa- deurs, ainsi qu'a ses vassaux. ( 2. Tai-ho-mcn. ) Porle de la souveraine Concorde. Cette jwrte a neufenfre-colonnc- menfs (**). Elle consiste pioprenient en trois Portails. I,'esralier de de^ ant , de niCnie que escalier de derrifcro, offre trois sorties dans le portail du milieu ; les deux portails late- raux n'ont , k leur escalier , qu'une sorlie chacun. Au nord de cette porte ct dans la m^me direction est situc : (3. Le Tai-fio-lian) ou la salle du trone (***) de la souveraine Concorde. Pavilion des- tin<5 aux assemblees imporfanles et aux jours d'apparat. Le soubassement est haul de vingt ree sur le plan n° i avec I'indication I, nommee en cliinois Tseu-ldn-tching, ville rouge intcrdile, est ce que les Europeens nouimeiit indiatinctement Palais imperial. (*) N" du plan , pi. F ; voycz Ta-thsinq-i-thoxtng- tchi, K. I, r. V, et la Dcucriptinn de I'e-King citcc. ■» ("j On Jugc, en Chino , dc l.i grandeur des cdi- lice* d'apriis le noinbre des pnlre-colonnoincnls. (***) I.e tmnechinnis (iu/i.quc nous tradiiisons par talle dii tnhie, slgnilio nroprenicnt uiit- salle vuste et elevpe, oii se trouvc place vn trdne pour rocevoir rempereur d.ins Icl Jour de cCrliinonic. Co terinc s'applique aussi a I'lvlilicc enlicr ou pavilion dans |p- quel se trouvc la salle tian. Une tolle salle nc sert Jamais que pour doiuier audience pendant une henrc oudcux. dans telle ou telle eii rcinstanee speeifice. On appolle aussi lian quel^pies temples, par la rai- *on que \n idoles dc I'o on Bolddha v sont vues assises sur un lr6ne, la face lourni^c au'sud, coinme lesont Ic» cmpcrcurt mimes lorsqu'il.s donnent au- dience. pieds, et tout I'ddifice a anitdix piedsde hau- teur. Il a (iHze entre-eoloiuiemeiits de lon- gueur, sur cin(| de laigeur avec une double avance et avec des prones ou jiatins aux an- gles. Le perron qui conduit ii cette salle d'au- dience est bordd de balustrades en marbre blanc ; il se divise en cinq escaliers, chacun des<|nels a tro s rampes et truis palieis, oil sonl (lix-liuit tiepieds , deux grandes ccailles de lortue et deux ibis, tons en bronze et ser- vant a brrtler des parfimis; cnfm deux ca- drans, I'un solaire, rautie lunaire. L'einpereur se rend a cet edifice au pre- mier jour de I'an pour reccvoir les felicita- •* tionsd'usage ; puis au solstice d'liiver, puis au jour anniversaire de sa naissance et jiour les audiences solennelles (*). Il y vient encore lorsque tons les grands de sa cour y donnent un festin , lorsipie le g^nt'ralissiuie dc ses troupes doit prendre cong^ de lui, lors(|u'ou examine les Ifan-lin ou docteurs de 17«.v- tilul imperial, et pour entendre I'expies- sion de la reconnaissance des foiictionnaires qui lui sont pr(5senles apri's avoir (5te nom- mes a ([uelque nouvel emploi. Devaul la salle , sur la terrasse , est un lieu oil les officiers civils el militaires font la ce- r6monie des geuullexioHS , cercinonie pour laquclle out etd disposes , sous la forme de lertres, des espi^ces de piddestaux eu bronze, oil est gi avfe rindicalion du degrd qui coii- vient ii chaque rang depuis le premier jns- qu'au neuvieme. II en a etd fait par ligne pour cliaquc rang a Test et a I'oiiest de la voie impcriale, ou de la chaussee de piene ; a Test, pour l<'s ofliciers civils; a rouest, pour les cliei's millfaires. Cliacune de ces lignes vi-t faite pour dix pcrsoniics. (4. Tchoumj-ho-lian.) Salle du Ironede la inoyenne Concorde. En sortant de la salle pr<5cedente on arrive dans celle-ci en suivant (•) (Vest aussi dans cette salle du irune que leui- pereur de la Cliinp recoil les auibassadcurs des puis- sances (Hrang^rcs, c, puldiee par Nif.ciiuff; Paris, I68H, in-f". Nous la reproduisons ici ,'pl. s\ en obser- vant que cettc vue a etc tiouvee tres-cxaete no ans f)lus laril par I'liistorien dc la derniSrc ambassade loll.indaise vers rempereur de la Chine, en i7bi et I79:i, par Vaw Braam Mouckgeest. I'hdadelpliie, 1707, 1 \ol. in-1" avec pi., t- l, p. le;;. f.elte vue de IsiEiriioFF represenle \a facade inferieiire du pa- lais imperial. One autre vue de la salle du trdne ou d'audience du nieiuc palais (pi. e) a 6li public'e daas la lieliiHon du votimje de Ysbrants Ides, ambas- sadenr du czar deMoscovic en Clinie , en ibos. Cette vue differe lellenient de la precOdeiile, que Ton pent supposer que ee n'est pas la uieine salle d'audience ct les mOnics bAtlnient.s qui y sonl re- prcsentes. Dans la sixiemc planche, on volt li>.'ii- rcr sur Ic premier plan , au milieu de la cour du palais, ic cortege de rintroduclion dc I'aniba.ssadcur ino.scovitc dans la .salle d'audience. ..^A I.es vditures, en forme dc palanquin , que Ton volt dans la gravurc n" c et trainees ou porlees par des el(^phanls, des ehcvnux ou des nnilets, sent en- core en nsage. Ce sont de pareilles voitures qut tranporlent au palais Imperial les ambassadenrs etrangers et aulres pcrsonnes de distinctioo. CHINE MODERNE. 13 toujoms la direction dii nord ; die a trois eiitre-colonnenienfs do longueur sur autant dc largeur; c'esl-a-dire que c'ost iin pavilion carre, siirnionte a la corniche d'une avance quadrangidaire, au-dessus de laquelle s'deve iNi toit rond. Les perrons au nord etaii sud onl chacun trois issues; ceux de I'onest , une _ seule. A Test et a I'ouest se trouvent deux 'ailes contigues, chacunededeux entre-( olon- nemenfs et qui servent de garde-nieuhles pour les objefs en bronze. L'empereur vient dans cette salle exami- ner les pri^res concernant les sacrilices , les bles et les instruments aratoires prepares pour la ceremonie du labourage. C'est la aussi qu'on lui prcsente le tableau des ge- nealogies de sa Camille. ( 5. Pao-ho-tian.) Salle du trone de In Concorde protectrice. C'est , toujours dans la m^nie direction au nord , nne troisieme salle du tr6ne de neuf entre-colonnements, avec une double avance , terminee aux an- gles par des proues on pat ins. Le perron de la facade est aussi a trois rampes et en parfiute symetrie avec le perron de la salle ou du pavilion de la sonveraiue Concorde; le perron tourne au nord a trois rampes avec trois rei)os. L'empereur se renosee au niidi. Vers le nord hisloriqiie. se trouvent le deparlement uiterieur des Ons. au nord ct ii lest sc rencontrcnt en diffOrcnu ('qutpages de la loui et le ilcpai lenient ,,„^;„, „„^ ,„^,,.^^ ^^ ,„ ^o„^ e, ,g oepd^ 'impn-iai illlcrieur des finances. des substances mcdicinales. (7. Wen-hoa-lian.) Salle du i rone des (ii. Tounrj-hoa-men.)Porlefieaneor'ien' fleurs lilteraires. Sa facade eslexposee au tale de la ville inlcrdite. sud. L'escalier a neuf inarciies. C'esllaque (12. Wou-iny-lian.) Salle du trdne. k reujpen'ur, dans la secoude lune, se rend Touest de la porte de la Concorde occiden- unefois lannec pour interpreter les livres ^a/c. Elle a un liantescalierde neuf marches sacres. et des porles de trois entre-colonnements ; sa (8. Tchouan-sin-tian.) Autre salle du lacade est tournee au sud. Ce pavilion est tr6ne oil Ton porte des offrandes et oil Ton entoure d'un fosse sur leciuel on a jete liois olTre des sacrifices au fen inslituteur des pouts de pierre. Il consiste en deux corps princes el des souverains (le grand pliilo- de logisoii Ton conserve les planches en l)oi,s soplie KuoLNG-TsEu), aux savants et aux qui serveut a I'impression des livres, coaime maitres qui ne sont plus. A Test de cettc les ci/cAes dans les imprimerieseuropeennes. salle est un puits convert, donl I'eau, apres Derriere ces corps de logis, au nord, se tiou- celle de la source appelee de jaspe, est re- \eat\esalcliers des rcliciirs{Yu^te-(hang), putee la meilleure. ou plutotdesbrocheursde I'imprimerie iaipe- (0. Wen-youan-lihe. ) Bihliofheque impe- riale qui est ctablie dans cet edilice. rialc. Ce biUiment, qui est derriere le pre- a I'ouest de ces batiinents ou trouve : cedent, consiste en trois corps ile logis de (13. Chatuj-i-kian.) Le deparlement des six enlrc-colonnements chacun, converts de vfetements imp^riaux. lis y sonl confeclinn- luilc d'un vert sombre. Devanl la salle du „^g selon les rites et conserves en garde- trrtne se trouve une citerne carree revelue robe. Dans I'inlerieur se Irouve une salle du en pierres el Iraversee |)ar un pont de pierre. tr6ne divis^e en deux corps de logi.s, oil .se L'eau y est amen(^e par le canal lu-Iio. On reunit la commission chargee de traduire conserve dans cette salle du Irone un exem- igs livres sacr6s de Bouddhu (*). plaire de la grande collection intitulee : Li- vres complels des quatre magasins : Ssc- *"A'nnaies!. .' .' ." .' ." . .' I '..'.' . '. '. '. '. I'^a khoU-thsiouan-cllOU (*), collection la plus Hustoires' g6n6rales '. '. \\vM Ilistoiresparliciilli'res l,4M ,^\ r, ,. 11 ..• 1. »•■.• . Histolres ni61des sts (*) Cette collection , que \empeTem Ahtan-loung Rocueil des ordonnance.s et d«s decisions fit coinmencer en 1773, et qui, selnn son expression, linneriiles 1474 dcvait composer rcMf lotxfnifr mi7/e KO??<;«f«, n'est BicraDlnes '. '. '»4» pas encore achcTce. On continue a I'imprinicr; nous noc'iinients liis'toriquW ''."... . i» avons eu un Instant enlre les lualns le catalogue en Kotices dc districts uarticiiUers sm quatre volumes publii's 4 /Jr-A)?)r7 par ordrede I'ciu- rhronolcle ... M pereur, des livres qui compos^c roiil telle collection G(:-ographic et relations de ' voyages , des- M.Neumanua donned apres le/a-r/j^^s,«3-//oc;- Ouvraaes classigues ou reqardes commc sacres , lieliijion , philosophie et autres. sciences. avec ions les commenlaires qui y sonl reUUifs. F.colc de Confucius i.es* volumes. Science mililaire la.-. \jt Livre des chanqemeiUs (W\ns). . ■ . I 74s Jurisprudence 94 Ijt Livre des Jnnales (Clioii-king). ... otto Econoroie politique i»s Le/jiTed« /'ers; Oil-king^ 94i MWecine i,9i.( Le /.iiTc des /{«<« 'Tcheou-li, Ml, Ll-ki) . a,ies Astronomic et arlthmi:aiquc 643 Vc lAvre des annates de l/>ii(\ou-fou.) L' Tntendance de la cour. Ce b&tinient se trouve an nord de la Porte de /leurs occidentales (Si-hoa-men, n° ]8.) La facade est tourn^e du cote de I'o- rient. Cette administration consiste en trois covrs et sept bureaux; elleadans ses attri- butions le rfeglement des recettes et des de- f lenses de la cour, les sacrilices, les banquets, es recompenses, les aniendes, et tout ce qui tient aux arls, aux metiers et a I'induslrie. (IG. Koua7ig-tchott-sse.)Commissariat des vivres, sur la meme ligne que rinlendancc de la cour, a rexlremite nord. C'est le pi in- cipal magasin de la couronne. On y depose tons les objets appartenant aux six depots de I'intendance de la cour : I'argent, les Cour- rures, les etoffes de sole, les babits, le tiic et la porcelaine. (17. Nan-hmn-tian.) Salle du trone, si- tu<5e contre la muraille du sud. On y voit rdunis les portraits des souverains des pre- cddenfes dynasties. Non loin de cette salle on trouve an nord : (18. Si-hoa-men.) I>a Porte Jleurie de r Occident, de la Ville rouge interdite, ayant trois ou> ertures lermecs par des portes deliois rouge, ou peintesen rouge, garnies de clous dor^s; celle du milieu, comme dans les autres portes, ne s'ouvre que pour I'em- pereur(*). (19. Khian-thsing-men.) La Porte de la purete celeste. Elle a cinq entre-colonne- nients, trois issues, et I'escalier qui est en avant, le m6me nombre de ranipes, cliacune de neuf marcbes. Devant Tescalier sont pla- ces deux lions de grandeur colossale. L'em- pereur s'y rend ordinairement pour se fairc rapporter et pour decider les affaires de I'fi- tat. (20. Khian-thsing-lioung.) Palais de la purete celeste. II a neuf entre-colonnements en longueur et cinq en largeur. L'empereur s'y rend lorsqu'il veut d(^lib6rer sur un objet quelconque avec les grands de sa cour, ou voir les fonctionnaires presentes soit pour des places, soit pour de I'avancemcnt. C'est Ik que, cbaque annee, an jour de I'an, l'em- pereur regoit et traite les princes. C'est la que dans la cinquautieme annee dn r^.gne nonund Khang-hi (en 1711 ), l'empereur donna un festin solennel auquel furent invi- supprim6e, et qu'a sa place, 11 fut eric, en issi , une commission pour composer la biojjrapliie de l'empereur JiN-TiisouNG-Joui-Ti, luort en isao. Quant aux Itvresdc Bouddha, ils .sont depuis long- temps traduits dc la langue sanskrite en chinois et en langue UUbctainc. (*) Voyez la pi. a, qui offre une vue de cette porto |{e I'Ouest prise 4 rintirienr. t^s tons les vieillards de soixante ans et plus, soit fonctionnaires, soit simples paiticiiliers. L'empereur Khian-loung donna au.ssi une f^te semblable dans le ni^me palais, en 1 785, mais le noml)re des convies fut deux fois plus grand. Les nonagenaires furent admis a la table meme de I'empeieur, oil ils niang^rent en se tenant deboiit. L'empereur leur paria avec bienveillance et leui' lit des presents inagnifKpies. ('21. Kiao-tha'i-tian) Salle du trone, si- tuee au nord du palais precedent. Elle est construitc sur le module de la Salle du trone de la Concorde moyenne. Ou y con- serve les sceaux de l'empereur, au nombre de vingt-cinq. Au nord de cette salle est situ^ : (22. Kiun-ningkoung .) Le Palais de rimpdratrice, de neuf entre-colonnements de longueur. (23. Kiun-)ring-men. )hsi Porte du palais de I'imperatrice, derri^re laquelle est le jardin imperial. Obs. Cost dans le palais pr<*c6dent que reside I'im- piiralrice, et le jardin est destined a ses promenades. Ce Jardin est tout reuipli de pavilions elegants, de temples ct de bosquets. Deux de ces bosquets sont places au milieu de di'ux lacs, el un autre est forme sur la cime d'une monlagnc artificiellc en roclicrs, montagne dans laquelle a etc? pratiquee une groltc ou caverne portant inserits de la main imperialc ecs niols : Source dr.ioiis est la sallf (111 tioiie, aiissi tlivisi''c on est peuplee aujnurd'liui de clii- nois qui yont forme de nombrenx etablisse- menfs de commerce. Kile est divisee sur le plan en deux arrondissemcnis : la partie orientale et la partie occidenfale. I'.uiriE oiuENTALE. — LPS edificcs et les lieux les plus remarquables de ce quartier, en com- mencant par le sud , sont : (60. Tai-thsing-mcn.) La Porte de la grande pur el e: ellc a trois entrees. Devant cette porfe est une place quadrangnlaire en- vironnee d'une balustrade de pierres grises. En dehors de cette porte sont deux lions de granit, et unpeu plus loin deux larges pierres elevees, oii Ton doit descendre de cheval; c'est ponrquoi on Ics nomme Hia-ma-phai. II n'est perniis qu'aux pieions de traverser la place. A droite et a gauche s'c^tendent deux lou^ues ailes de bitimenf s , dont chacune a cent dix entre-colounenionts du sud au nord , et apres avoir double Tangle , on Irouve que cha(|ne aile a encore trente-qnatre entre-co- lonnements faisant lace au nord. C'est dans ces corps de logis que se rassemblent les em- (') Ta-thsing-i-thouiig-tchi , K. I , folio 2. 2* Uvrauon. (Chink modebnk.) ploydsdesdifferentes administrations : savoir, les employes des cours heraldique ct mill- laire.tant ceux qui sont deja en fonction que ceux qu'on doit dire ; les employes de la cour de justice pour assister au grand Juge- ment d'automne; enfiu les employes dela cour des ceremonies pour examiner les com- positions des (^l^ves aspirant au grade de ba- chelier et de licenci(5. Directement en face, et au nord de la porte prccedente, on trouve : (Gl. Thian-'un-men) , la Porte du repos celeste, ayanf cinq issues. Au-dessus de cette porte s'eleve inie tour a deux stages, qui a nenf entre-colonnements de longueur, c'est propiement la porte de la Ville impdriale; devant cette porte a ete creuse un canal sur lequel sont jetes sept ponts de niarbre , dont cinq vis-a-vis des cinq issues de la porte, et les deux antres a droife et a gauche des jiie- niiers, a une distance moycnne. F.n avant des ponts s,'elevent deux hautes colonnes, et deux aulres semblables au deli de la porte a droite et a gauche; chacune d'un seul bloc de marbre blanc, niais d'un travail grossier. Ces colonnes sont indiquees sur le plan jjar (le.s points. La porte que Ton trouve ensnite et que Ton nomnic Porte des prin- cipes (02. Touan-men), a ete construite sur le m6me plan ({ue la precedente. {(>:i. Ta'i-miao.) hc^- Grand temple que Ton remarque a droite est dedic aux anc(>tres de la famille rcgnante. II est convert de tuiles jaunes et entoure d'nne haute muraille. 11 a trois grandes poites dans sa partie inlerieure, et deux antres du c6fe de la facade, qui sont indiquees sur le plan. Les portes de I'int^rieur, coiistruites sur des soubassements elev^s, ont cin(| entre-colonnements avec un double toit. Toufes les colonnes y sont de bois daigle ( aquilea arbor ) ; I'escalier a trois rampes, bordees chacune d'une balustrade en marbre; ceini qui esttourne directement au sud et les deux cscaliers lateraux ont chacun cinq ram- pes. La premiere compte quatre marches, la seconde cinq, et la troisi^me onze; les rampes laterales neuf. A la fin de I'ann^e , au jour du grand sacri- fice, les deux plus ages d'entre les princes, en ciccompagnant ceux de la maison iin- periiile , olfrent dans ce temple le sacrifice prescrit devant les tablet tes sacrees des anc^ ires des enipereurs et des imperalrices , c'est- a-dire, au pere, h Taieul ct au bisaienl de I'empereur regnant. Au temps des oblations qui se font pour les quatre saisonsde I'ann^e, on ne rend les bonneurs que dans le palais du milieu. Les souverains maStres (c'est ainsi que Ton nomme les taWettes portant les noms des ancfilres decodes) des anc6tres exclus du grand temple n'ont aucune part aux obla- tions. Le palais du milieu a neuf entre-colonne- ments cx>mnie lc palais de devant. La salle 2 18 L'UNIVERS. en est c<»mnninc noiir tous les souvcrains, et, mHuidaiit, oil a Otabli entre eux dos divisions suivaiit lfs sur le canal. Dans le principal temple de ce convent, elevc on I'honneur de Fo on Bodd- UHA , on conserve le portrait de I'empereur Khian-loung ■ \\ y a dans la m^me enceinte trois convents , qui peuvent 6tre consider^ comme iie formant qu'un seul monast^re , qiioi(|ue s^par^s par des murailles. On voit par des inscriptions qui se trouvent snr d'an- ciennes cloches, que, sous la dynastie de Ming, on y traduisait et on y impriniait les livres sacres du Thibet. Ce monastere a en- core aujourd'hui une imprimeiie tliib^taine. ( 73. King-chan) C'est la monfagne de la cnpitale , autrement nominee : montagne des dtx mille annces {Wan-soin-cJian). Elle est situee a la sortie de la porte septentrio- nale de la ville inferditc. Elle commande le palais imperial et Ini sert en mfime temps de point de vue et d'abri contre les vents du nord. Le mur qui entoure cette colline a deux li de circonCerence. En |)assant par la porte qui fait face a celle de la ville sacree pour gagner la colline , on trouve un Edifice nia- gnifique , et dune architecture admirable; c'est derri^re ce h^timent que s'elevc la col- line avec ses cinq somniets symetriqiiement disposes de Test a I'oiiest, et sur lesquels ont ^t^ places autant de pavilions , dont aut*^s de la capitate, et qui se nonime le pavilion du petit vent d'mUonme. Ce pavilion ou pliitiH les quatre parties dont il se compose sont entourt^es fl'eau , tant en dedans qu'en dehors. En ^te la surface de ces eaux est couverte comme d'un tapis de n6nupbar et de chataigniers d'eau. Qiiehiuefois I'empereur dans ses mo- ments de loisir vient s'y promener en bateau, et en h ver il s'y rend pour voir patiner les ■soldats, qu'il r^ompense selon le degr6 d'ha- bilet^ qu'ils ont d^ploy^e. II y a m6me en liiver un jour d^ign^ pour cet exercice (*) . (*) Voycz pi. 10. Cetle planche est tirie du f^oyage a Pe-kintj de M. Dciriilgnes Ills. Void coinraent'll raconte l.i scene de I'excrcice dii patin dont il fiit t^- iiioin : « R.iincni^s dans le Jnrdin oil ^tait Teiiipe- • reur, nous y trunvitines bcniicoup de pcrsonncs, •■ mats toutes appartenant au palais. Les ranf;s « ttaicnt ronfondus ; mandarins, coiilis, eticlnvcs, • tpu« se pou«aicnt 4 I'mvl pour nous consid(ircr. " Nous rtnies pour la prenil^re fois des Chinois patl- " ner ; lis s'en ac(|uiltent fort bien ; mats leurs patlns •• Be TalsBl pas ccuii d'Kuropc, et Ic (er Maat trop (81. Kin- ao-iti-toitng .) Pont en marbre blanc construit sur le lac, ayant seize pieds (le largeiir ft environ deux cents pas de lon- gueur. II a nenf arclies et est borde de garde- Coiis ('galenient en marbre. A cbaqiie entree de ce i)ont s'eleve une porte triompliale dont les forts baltants en bois sont peinls en cinabre. (82. Tchingkouang-tian) Salle du trdne silude prte de ce mfime pont. Elle est entou- ree d'une haute muraille circulaire a cr6- neaiix , et audessus de laquelle elle 8'«5l6ve en forme de conpole, comme pour tigurer la voQte c<5leste. On dit que du temps des Kin (de 1 123 a 1260) il se tronvait en ca- lieu trois cedres blancs; il n'en reste plus qu'un au- jourd'hui ; il est trte-haut et ses branches sont tres-etcndues. (83. Young- an-sse. ) Monast^re du repos 4ternel. 11 est situe au sommet d'une lie co- •< en dessous du taloD, lis ont de la peine & s'arrAter. « La forme et la monture du patIn est k peu pris la M m6nie que la n6lre, excepts que le for se relive •< carrt'ment a I'avant. L'l'paisseur du fer est d'une " ligne , et la larj^eur, de six a .sept ; il est mal trem- '■ PC. On alt.iclie fortement ces patins au pled rt d « la Jauibe avcc • dats de rempcrcur peuvent .sculs patiner; nous >■ n'avons jamais vu d'autres Chinois le falre. « Nos mandarins, sachant que les Hollandais s.i- v vaient patiner, inviterent I'ambassadeur i \f faire; «• il s'en excusa ; MM. Van-Iiraam le Jeune et Dozy o seulement cuururent pendant quelque temps sur « la glace. ■• Durant ce spectiicle , nous etions enloiiri^s des « principaux seigneurs de la cour, assis sur des ■< traineanx , ou pliit6l sur des civiferes eouvertes de ^ pcaux ; I'un d eux etait jeune et fort bien de fl- " gore; des mandarins .i boutons bleu clair et i " plumes de paon s'cnipressaient autour de lui et '< dirlgeaient mime son traineau ; mais trois coups ■■ de boite avant annonc(i I'empereur, ilse leva avcc « preclpitallon et se rellra a pied. " .S. M. eiant entree dans im palanquin de couleur « jaunc, supporte par deux granus dragons dorSs, " on la lit avanccr sur la glace. I'lusieurs manda- <■ rins ayant le boutnii rouge et la plume de paon " entouraicnl sa cliai>c, el bcaucoup d'autres se te- ■< naient un peu en arriere sur les cfllcs. lis avaient « tons des habits de pcllcterles, le poll tourne en « dehors. Nous etions debuut , comme lout le monde, « ayant le chapeau sur la tite. On cuuunen(a par " Jeter une (jrosse boule blanche parnie d'une poi- << gn^e en bnis, que des Chinois habilles de Jaune « refurent pour sc la Jeter entre eux. I,es patineurs «■ s'avancerciit ensuite ; I im d'eux , qui venalt rapi- « dement, ayant Cte retouu par un des assistants << ilstomberent tous les deux, ainsi que lous ceux qui « les suivaient. » l.e second dc I'ambassade hollandaisc (qu'acconi- pagnait M. Dcguignes) donne plus de details, dans la relation de son voyage ( s vol. ln-4", avec plan- ches. Phlladclpbic , I7»7), sur I'excrcice decrit ci- dessus : <• Alors on vil venir. deux 4 deux , des soldats qui « couraient en tenant un arc et une ntche, et qui, « en passant par la porte , tlraient , I'un sur la boule « de cuir et I'autre sur une espece de chapeau de « la raeme substance, qui (itait post sur la glace, A <> nne petite distance de la porte. lis furent suivis par <• une troupe de jcunes gargons et d'enfanis arni^s <• ^galenient d'un arc el d'une fltclie, dont lis firent ■' le mime u.sage que les soldats. 1,'ordre accompa- « gna cet exercice, et presquc tous furent assez " adroits pour toucher le but, quoiqu'en marchant •• tres-vite et en se dessinant comme les tireurs •< d'arc a I'europi'enne. Les enfanti surtout nootr^- K rent une grandc dexterity. " CHINE MODERNE. 21 niqne offrant partoiit a la viie les pierres admirables de la montagne Keng-yeOu que fit elever la dynastie des Soung, dans la ville nommee aujourd'liui Kai-foitng-foii de la province dn ffo-nan. Les materiaux de cette montagne furent transport(s par terre a Pd- king sous la dynastic des Kin. Cette lie est placee an nomlire des Iniit beantes dc Pe-king sous la denomination de Omhrages printa- niers dc Vile de marbrc- Elle offre I'aspect d'nne colline en pente douce, coiiverte de bosquets, d'cditices soniptueux, de temples nomi)reux ct dc pavilions elegants ; le soni- inet est couronne par uu obclisque blanc appcle pai-tha, appellation propie au\ mo- nast^res bouddhiques. Sous la dynastie nion- gole (('260-1341), a la hauteur moyenne de la montagne etaient trois salles du trrtne , et sur le somniet une ((uairienie plus \asto que les autrcs. On contemplait de la les vues admirables que ce jardin prescnte sur tons les points et sous tons les aspects. La dynas- tie actuelle a change I'ancien noni de I'ile en y fondant un monastere pour les Lamas on pr6lres bouddhistes du Thibet , et a la place de I'ancienne et vasie ralle du trone elle a 6rige le saint obelisque on la sainte lour, la sainle pijraiiiide, avec cinq mats pour hisser les drapeaux , le premier et le quinze de cha(]ue mois. L'obelisque eties batiments du monastere bouddhi(iue out et6 eriges en I65t et repares a neuf en 1679. Le convent a etc restauie de nouveau en 1745, et c'est a cette derni^re epotjue qu'on lui a donn6 le nom qu'il porle aujourd'hui. (84. Sian-lhsan-than.) Temple consacrd a Vinvenlcur de lasoie. Ce temple est situe a Tangle nord-est du jardin de I'ouest, et il tut fonilc en 1742. Pr^s de cc temple est un autel de forme quadrangulaire, la facade tournt^e au sud. Cet autel a qiiarante pieds de diametre et quiitrc pieds de liaut. Sur le devant est un perron avec quatre rampes, chacune de neuf marches. Au has, du c6te nord-ouest, est la fosse aux victimes. Au sud- est est le temple dedie a I'inventeur de la sole, la facade tournee a I'ouest- Cette fagade a trois entre-colonnements. Les portes de ce temple sonl peintes en cinabre, et le toil est convert de tuiles vertes ; le soubassement est eleve. A Test de I'autel se trouve une ter- rasse carree destinee a la recolte des feuilles de murier, ayant trente-deux pieds de dia- metre et quatre de hauteur. Devant cette terrasse est un jardin tout plante de mil- riers, et derriere est un palais destine a ren- fermer les instruments relatifs a la culture de la sole, et des costumes. Il est forme de cinq entre-colonnements, ayant sa facade exposce au sud, avec un perron a trois ram- [>es, cha<;une de cinq marches. Les deux pa- ais lateraux ont trois entre-colonnements chacim ; celui qui se trouve derriere en a cinq, et les palais situes a Test et a I'ouest ont thacun trois entre-colonnements; tons sont couTcrtsde tuiles jaunes veniissces. C'est dans ce lieu qu'on offre tons les ans un sa- crifice, le premier jour du dernier mois du printemps (avril). L'imperatrice regnante vient en personne accomplir cetle ceremo- nie, ou bien elle se fait representer par ime des fenmies du souverain. Le batiment oil Ton conserve et ou Ton fait eclore les vers a sole est expose an sud; il a vingt-sept entre- colonnements. La muraille qui environne I'autel a seize cents pieds de tour. {'ih-Ou-loiing-ting.) Les cine/ pavilions des dragons, situes a rexlremitc nord du lac. Us sont construits dans I'oau en ligne directe de Test a I'ourst. Chacun d'cux a un nom par- ticulier, outre leur d(5uomination conmiune. Us ont el6 construits en 1460. (86. Tchang-fou-sse.) Monastere a Tangle nord-ouest du lac et des cinq [>avillons des dragons. Derriere ce couvent sont encore (pjelques edifices. (87. Si-thian-fan-lsing-lchang.) Monas- th-e renfermant les livres sucres du Thi- bet, et situe a Tangle nord-est dn lac. (88. Thian-lchmi-thang .) Temple du Sei- gneur du del, ayant appartenu aux u>is- sionnaires francais. II y avait pres de c« temple une verrerie qui en dependait ; elle n'existe plus depuis longtemps (*). L'eglise est surmontee de la croix. (89. Si-'an-men.) Porte du repos occi- dental, a I'ouest de la ville iniperiale. (90. Ti-an-mcn ) Porte du nord de la m^me enceinte. in. NEl-TCniNG. — VIM.K ISTERIECRE. Cette partie de Pe-kiny (**) est la ville proprement dile; elle renferme trois cent quatre-vingt-quatre grandes rues et viugt- neuf petites. Les grandes rues ont g6nerale- ment vingt-qiiaire pas de largeur, et les pe- tites douze. cette ville, qui prescnte la forme d'uu carre regulier, conime presque toutes les villes chinoiscs, est entouroe d'une en- ceinte continue, construite en hriques dites de ville, et composee de deux murs paral- leles en talus, dontl'intervalli' est rempli par de la terre glaise comprimce. Du cdte exte- rieur cette njuraille a des bastions saillanLs, distants Tun de Tautre d'une portee de fusil. Ces basUons sont quadranguhdres; ils out environ soixante pieds de diamfetre, et s'6le- vent a la m6me hauteur (jue le mur. Sur la ])late-forme de chaque bastion sont des corps de garde pour les sentinelles. Les portes d'en- tr^e de la ville ne sont autre chose qu'un passage vortte perce dans Tepaisseur de la muraille. Les panneaux de ces portes sont reconverts de madriers epais doubles k I'exterieur de plaques de fer. Au-dessus des (*) Le p. Hvacinthe reinarquc a ce siijet qii'l! no se trouve pliis un scul missionnairc francais dans ce monastere; il n'y a f|M'iin franciscain portugai* charge de veiller ii I'cntrelicn de» b&timentii. C'l Voyez le plan, planclje i. 23 L'LMVKRS. portrs, siir la miiraille, on a ronstruit |de8 lo«r», qui consistent en iin Mifirc ayant la toinic (I'lin paralldlosrammc h deux on ^ trois ctasps , avpc iin toit double ow triple (*). L'aspeit dii dehors et la forme iiiteiicure de ces lours sont coinpl^temput en liarmonie avec les regies observ«»es dans la construc- tion des autres bitiments. Les porles du cAt('cxt('rieursont entonnVj; dun petit fort semi-circulaire , (pii a la niOnie liaiiteur que les niuraillcs. Les tours (pii s'el^vent snr ce fort ont, de trois c6tes, plusieurs etages d'einbrasures pour des bouches k feu. II exLste des tours semblables aux angles des murs de ville, mais sans port e inlerieure ; ces derni^res ont, sur le toit , un enfonce- tnent dans lequel on allume solt un fanal, 8oit des feux servant dc signaux. PAKTiE ORJENTALE. C'cst dans cettc partie dc la ville que sont les divisions mantrlioue , Uiongole et cliinoise de la banniere bleue et tie la banniere blanche a bordure. En voici les Heiix les plus remarquables : (91. Tching-yang-mcn.) Porle tournde dircctement an snd, appelee anssi pojYe qui pvMde [Thsinn-men). II existe trois )iassages dans les fortifications en demi-lune ne cette porte. L'em[)ereur seul a le droit de passer |)ar celui du sud pour alier oflrir des sacrifices ; le penple sort par les denx autres passage* > Tun i Test , I'autre a Touesl. (92. Khi-phan-khiai.) Grande place toute pav6e en briques de ville , entourec d'une palissadc en pierre ; du c6te de Test et dn cAU de I'ouest s'^tendent deux longs bA- timents qui sont devenus des series de bou- tiques. An nord-est de cette place se f rouvent les ddificcs consacr^ aux differents minist^res «jHi gouvernent les alTaires de I'empire, dans 1 ordre suivant ( ils ont tous la facade tournde J» I'ouest ) : 93. Tsoung-jm-fou) Rdgence des princes . Cette haute cour se compose d'un president etde deux conseillers, tous trois princes du sang. Les copistes sont presque tous Chinois de naissanc*. Les princes du sang ne sont justiciables que de ce seul tribunal , ne pou- vant fttre jugcs que par leurs pairs. (94. Li-pou.) Gourdes comptes on des offices. Cette cour a deux pr^idents et qua- tre conseillers, moitid Mantchoux, moitit; Chinois de naissance (**). Ce minist^rp a quatre bureaux ; ii a pour attributions de regler les rites et les c^r^monies, et d'or- (•) Voyei pi n. I^s toiu infi^rieurs ne sont autre clio-ic qiip dM rebords qui , solidemPDl li(^s au corps princip.nl (le IVdlflcc, forincnt un assez large pour- tour couvcrt La pi. ix , llrce de lambassade de lord Macartney, repn^sente une des porte.s occlden- tales de cette partie de P«-liln(f. (•■) Dans les autres uiinisleres ou tribunaux on trouTe ce nitfme nombre dc nieinbres et ce intuir pjirtagc egal de I'autorite enlre leu Chinois et Its Mantchoux. donnancer les nominations des employes ou fonctionnaires de I'Etat ddsignes par I'em- pereur. (95. Hou-pou.) Minist^re des finances. II est compos6 de six membres et de qua- torze bureaux; il a . dans sa c(>m()etence , outre tout ce (pii tlent a la perception des imp<)ts et aux depenses de 1 £tat , tous les procte concernant la possession des terres. (90. fA-pott.) Minisli>re des rites. II est compost de quatre bureaux. C'est ce rainis- ti^re tpii r^gle les oiremoiiies , etc. (97. Ping-pou.) Ministcre de la guerre. Il est compose dc quatre bureaux. Sa juri- 'i-sse-nian-piao , public en iTis, avec la preface de I'empereur K/iarig-hi en fat-simile, el le nom de tous les Han-lin qui ont contribue a sa re- daction. Tous les ouvrages composes , rtJdlges ou compiles par ce corps savant sont imprimis aux frais du gou- vernement par les presses imp^rialcs, souvent avec une grande magnificence, toujours avec une grande correction. 1,'enipereur les distribue en pre.senis aux ministrcs, aux princes, aux grands de I'erapire, aux presidents des tribunaux , aux gouverneurs de province, aux plus cel^brcs lettres. I'armi les livres chinois de la Bibliotlieque royale de Paris, il en est qui ont Hi donnas par I'empereur Khang-hi lui-m^me aux rois.sionnaires francais ponr-recevoir celte destination. (Voyez Lettres du P. de fontanef a M. Thevenot , i69s.) 34 L'UNIVERS. (112. Yu-Uistn-wang-fou.) Palais du prince Yu-thsin. (113. Tchoung-wen-men.) Porte rn^ri- dinnnlc vers test de la ville interieiire. ( 114. Phtto-tseu-ho) Lac, sitiic ik Tangle &iid-est de la ville, pr^ du niur d'cnceintc. 11 est eiivironn(i de hoai et de saules plcu* reiirs. (115. Kouan-s'tnng-thai) Tour de I'Oh- servaloire. Get t'dilice fut fonde en 1 279 par Ic preaiier empereur mongol <|ni legna en Chine. (Voy. t. 1, p. 350.) Dans Tenceinte des bilimenls de robservatoirc est la salle du trdne, oil se treuvaient aulrefoi.s tons les ins- truments de mathcinaliqnes, rassembles sous la dynastie niongole par I'astrononie A'o- chcou-tsing (t. 1, p. 3G3). Sons la dynastie actuelle (en 1673), comiHC les antiens instru- ments n'elaient deja plus en «itat de servir, il en a ^t6 fait six nouveaux par ordre du gou- vernement. On observe tons les jours et en toutes saisons le cours des astres et les me- tfSores c^lesles a rob.servatoire de P^-king (*). (») Notre pi. xit offre ime vue dc ccl Ob.servaloirc. Vtiici cuiiiiiient le P. l,ccoiiite. a la fin du dix-scp- tiiMiicsiecle, d(icrit, dans ses Memoires, I'observa- loire de I'e-king , riont il a aussi donn6 tine vue : " Aprts 6lie entitis dans nne coiir d'line mediocre Rrandeur, on nous mnntra un petit corps de logis oi'i demeurtnl ccu\ ;i qui on a conli6 la ganle qui sont neccssaires pour sen bieu servir. « Get Observaloire , peu considerable par les an- cicnnes macliines beaucoup moins rncore par sa si- tuation, par sa figure et par le batiment, est, 4 present, enrlchi dc plusieurs instruments de bronze que le P. Verbiest y a places, lis sont grands , bien (1(6. Koung-yoiinn.) College des exa- tnens. Outre les employes , les inspecteurs et fundus, ornSs partout de figures de dragons, trfts- bien dispost-s pour I'usage qu'on en doit faire; et si la finesse des divisions rcpundail au rcste de I'ou- vrage, et qu'au ticu de pinnules, on y appliquat des lunettes , seton la miuvelle mdtbode de lAeadenric royale, nous n'aurions rien en cette maliere qui leur pilt 6trc compart. Mais qiiel(|uc soin que ce Pfcre ait pris de faire diviser exactement les cerclcs, I'ou- vrier cbinois, ou s'est beaucoup neglige, ou n'a pu suivre Udelcuient ce qu'on lui avail marque; dc sorte que Je compterais plus sur un quart de ccreic de la [afon ilc nos bous ouvriers de Paris, qui n'au- rait ijuun pied et dcmi de rayon , que sur ceiui de six pieds qui est /» la tour. « Peut-eirc qu'on sera bien aise d'en voir tout d'un coup la disposition dniis une figure, he des.sin que J'en ai fait est tres-confornie a I'origiual ; et m6nie, bien loin que la gravure ie flatte, coniuie il arrive presque toujours en matiiire de portraiLs et de tallle-douce , Je puis dire qu'ellc n'cn cxprimc pas toute la beautc. « Kn void la description : « I" Sphere amiilluire zodiaeale de six picds de dlamitre. « Cette sphere portc sur quatre tCtes de dragons , dont les corps, apres divers replis , s'arrfttenl aux cxtreiniti's dc deux poutres d'airain mises en eroix, afin de soutenir tout Ic poids de la maebine. Ces dragons, ou'on a cboisis parini les autres auiiiiaiix, parcc qu'ils composent les armes de I'empereiir, sont representes selon les idees que les Cbinois s'cn formenl, cnveloppes de nuages, converts, aii-dessiis des cornes, d'une longiie cbcvelure, portant iiiic barbe loutfuc sous la iiiaelioire infericure, les yeux ailumes, les dents longiies ct aigut's , la giieiiic bSante et voinissanl toujours un torrent de llaiiuues. Ouatrc lioneeaux de meuie matit^re sont charges des cxtri;mil<'-s des poutres, dont les tCtes se hausseni ou so baissent, selon I'usage (|u'on en veut faire , par le moven des vis qui y sont engag(*es. Les eercles sont rfivisiJssur leurs surfaces exterieure etintei icure en Sflo degrt's; obaque degrc en 60 minutes par des lignes transvcrsales , et les minutes de dix en dix secondes par le nioyen des pinnules qu'on y ap- plique, i" Sphere c'giiinoxiale de six pieds de diamitre. « Cette spliere est soiilenue par un dragon qui la porte sur son dos eourb(? en arc, dont les <|Malre griftes, qui s'elendent en quatre endroiLs opposes, saisissent les cxtremilt's du piedeslal , forint' , cuinme le precedent, par deux poutres croisdes ft angles droits et terininOes par quatre pelils lions, qui ser- vent a le iiieltre de niveau. Le de.ssia en est grand et bien execute. s" Horizon azimutal de six pieds de diamitre. « Cct instrument, qui sert a prendre les azimuts, n'est composd que d'un large eerele posC de niveau dans toute sa surface. I.a double alidade, qui en fait lediametre, emirt tout Ic linibe, selon les degres de I'hori/.on qu'on y veut marquer, et einporte avec soi un triangle yi/«ire, dont le snmmet passe dans la tete d'un arbrc elevii perpendieulairement sur le centre du m6inc horizon. Quatre dragons replies courbent leur tele sous Ic liiube inferieur dc cc grand eerele pour Taffermir. Deux autres, enlor- tillt^s autour de deux pelites colonnes , s'c^levent en I'air, cbaeun de son cCtU . presque en denii-cerele, jusqu'a I'arbrc du milieu , ou its s'elevent incibranla- blement, aUn de rendrc le triangle tout a fait im- mobile. 4" Grand quart de eerele de six pieds de rayon. I' Cette portion de eerele est divis^c de dix en dix secondes. Le plouib qui marque .sa situation verticale peso une livre , ct pend du centre par le moven d'un fil de cuivre tr6s-delicat. I.'alidade est mobile et coule aisement sur le liinbe. I'n dragon repli^ et entour^ ile nuages va de toutes parts saisir les bandes de I'inslrument , de peiir qu'elles ne sortent de leur plan couiiiiuu. Tout le corps du quart de eerele est en I'air, traversci par le centre d'un arbre liumobilc , autour duquel il tourne vers les parlies du del qu'on veut observer ; et parcc que sa pesan- CHINE MODERNE. 26 les valets, ce college contient plus de dix milie individus qui viennent y subir des examens a I'cffet d'obtenir le grade de Docteur. (117. aian-lianfj-thseu.) Temple €ie,y€ en riionneur d'lionimes illuslres. 118. Palais d'un prince du sang. (119. Thouncj-thang.) Temple de Test qui appartenait aux missionnaires portugais , et que le gouverneaicnt chiuois a acliete pour le demolir. ( 120. Teng-chi.) Marcheaux lanternes. C'est le nom d'une grande rue, originairement le premier lieu de divertissement de Pe-king. Des deux c6t6s s'61evaieiit des boutiques reni- plies d'objets precieux. Sous la dynastie des Soung , le Marclie aux lanternes s'ouv'rait d^s Iciir pourrait causer quelqiic lit'iiioiissement, ou le fairc sortir de sa situation verticale, deux arbrcs s'elevcnt par les c6t(?s, afferuiis en bas de deux dia- i;nns et lies a I'arbre ilii milieu par des nua.?cs qui seinblent descendrc dc I'air.Tout rouvragc est solidc ct bicn entendu. »' ScTlant dont le rayon at environ de Iniit pieds. « Ci'tte fisiire representc la sixieme parlie d'un grand cerclc porte sur un arbre , dont la base fonue une espeoc de lar!;e bassin \idc , qui est affe riui par des dragons et traverse dans le milieu d'une colonne de broii/e , siir I'extreinite de laquelle on a enfjag^ une niai'liiiie piopre a faeilitcr par ses roues le mou- veuicnt de linstruuient. C'est sur cette niacliinc que porte , par son milieu , une pelile Iviw er.-.c ile cuivre qui representc un des rayons du sextant ct qui le lient iinuiobiUuienl altaclie.Sa partie supt^rieure est tcrminee par un gros cylindre, c'est le eentre au- tour duquel tournt; I'alidade; I'lnfericure s'etend en- • vu'on d'une coudec au dcia du liuibc, pour dunner prise a la mou/le qui scrt a I'clever ou a I'abaisser. selon I'usage qu'on en veut faire. Ces grandcs et lourdcs niacbines sont ordinaircment difOciles a niouvoir. et servenl plutOt d'orneuients sur les plates-formes des observatoires que d'instrumenls pour les observateurs. G° (.lobe celeste de six pieds de diumetre. « Voici, a luon sens, re qu'il y a de plus beau et de niieuv execute parmi les instruments dont je parle. I.c corps du globe est dc fontc , tres-rond et p.irfaitenient uni : les etoiles bicn formecs ct placees selon leur disposition naturelie, ct tous les eercles d'une largeur el d une upaisscur proporlionnee. Au reste , il est si bic'n suspeudu, que la nioindre im- pression le determini- au inouvement circulaire , et (iu'un enfant le pent uietlre a to;'te sorte d'eleva- tion , quo. qu'il pi-sc I'lus de deux uiil'e livres. Cne large base d'airain, formee en ecrele ct videe en ca- nal dans lout son contour, porle sur quatre points e,'alenienl dislauls quatre dragons informes, dont la elievelure heriss^e soutienl en I'air un horizon niagnili(|iie par sa largeur, par la nmlliliule dc ses ornemenls et par la delicatesse de I'ouvrage. Le me- ridien qui soulicut I'axe du globe est appny6 sur des nuages qui sortent du centre de la base, enlre les- quels 11 eoulc par le uioyen de quelques roues ca- c liees, dc sorte qn'il emporte avec lul le ciel, pour liii donner l'el(5valinn qu'il deniande. Outre eela, I'horizon , les dragons et les poulres de bronze qui se croisent dans le centre do bassin , se meuvcnt comme on veul, sans fairc cliangor de situation a la base, qui demcure toujours immobile : cc qui donue la faeilitc de placer I'bori/.on de niveau ct de lui faire coupcr le globe precisement par le milieu. Jc ne ponvais assez admirer que des gens , ^loignes de nous de six miile lieues, cnsscnl pu fairc un'ou- vrage de cette force; ct j'avoue qiu"^ si tous les eer- cles qui sonl charges de divisions, avaient ele re- touches par nos onvriers , on ne saurait rien desirer en cette nialiere de plus parfait. An reste , toutes ces machines sont environnces de dcgres dc niarbrc tallies en aniphilhtalre pour la commodite de I'ob- servateur, parce qu'ellcs ont, la plupart, plus de dix pieds d'(!l traduit et on y iniprime les livres en langiie thibetaine, mongole, mant- choue et cliinoise. (133. Young -ho-koung.) Monastcre des Tangoulains (*). C'etait autrefois le palais oil denieuraitrempcreur3'o?our expliqiier les livres sa- cr^. Les vieux cypres que I'on voit en ce lieu ont M plant«S. Ai- fan- koung-kouan.) Hotel des etrangers , ordinairement aj)pele Hotel des l/Uatre regions barbares (Sse-i-kouan). Ce soiit les Turks , les Taiigutains , les habitants des iles Lieou-khieo^i , les Siamois et autres peuples de roccident de la Cliine anlvant a Pe-kiiig pour acquilter le tribut, qui des- cendent a cet liotel. On I'arrangea aussi en 1816 pour y recevoir I'ambassade anglaiso. 169. Palais d'un prince imperial avec un grand pare. { 160. Si-tchi-men. ) Porte occidentale. Cette porte est remarqnable par ses fortifi- cations quadrani;ulaiies. (161. Soui-youan'koilan.) Monasth'e fond^ sous la dyiiastie des Ming. Du pre- mier au dixienie jour de cliaque nouvelle ann^e , il y a foire et promenade a ce rno- liastere ; on y trouve un concoiirs immense de personnes de toutes conditions. (162. Hou-kosse.) Monasfdrc bouddhique oil I'on tient une foire le 7 et le 8, le 17 et le 18, le 27 et le 28 de chaque mois. Les mar- chandises y affluent de toutes les parties de la ville. Ce monasldre fut construit du temps ference, celui du milieu 232 2/j , et celui du bas 250. Il est revCtu de carreaux de briques; la balustrade qui I'entoure a 420 balustres. Les escaliere du sud ct du nord ont trois rampes: ccux de Test et de I'ouest n'en ont qu'une. Les rampes de l'etage intcrieur ont dix degres, ceiix ouces de lon- gueur, 6 pieds de hauteur et 2 d'epaisseur. A la partie nord de ce mur d'enceinte il y a trois portes avec six colonnes; a Test, a I'ouest et au sud une seule porte pour chaque c6t^ avec deux colonnes. Les colonnes, I'arclii- Irave et ie seuil sont de marbre blanc, les panneaux sont de bois dur enduit de cinabre. Au nord-est, en dehors des portes du nord, est un phareau sommet d'un mikt; au nord- oiiest est la fosse aux victimes ; il s'y trouve aussi cinq vases a bri^ler des parfun)s. Le mur d'enceinte exlerieur a 420 pieds de lon- gueur de chaque c6te, 8 pietls de hauteur, et 2 pieds 4 pouces d'epaisseur; la forme de ses portes est la meuK! que celle des portes du mur exterieur. Pres des portes de I'ouest et de Test sont deux fosses aux victimes. Derriere c^tte muraille, pres de la porte dusud, est le Temple dedie au tres-snblime g^nie de la terre { Honang ti-tchi-chiu)y dont la fti^de contient cinq entre-colonne- ments. Ce temple est couvert detuilcsjaunes, et il est entoure d'une muraille qui a 440 pieds de tour et 11 de bant, avec une seule poite au nord. Derriere la porte occidental du mur exlerieur est le depOt sacrilicatoire , i)uis rofdce des victimes , puis le dep6t d'instru- menfs et de vases sacrcs, et un autre en<'ore pour les instruments de musi(jue; chacun de ces bilimenls est forme de cinq entre-colon- nements; entin, deux ponts couverts. Un pen plus loin, vers I'ouest, est I'abattoir ou I'on immole les animaux sacres, a droite et a gauche duquel sont deux puits cou- verts. Au nord-est est \e palais de la piirifica- iion ( Tchai-koung) , la facade tournte a I'o- rient; elle est formee par sept entre-colon- nements construits sur un soubassement ^leve; les balustres sont de pierre, et I'esca- lier est de cinq rampes. A droite et a gauche de ce temple s'etendent deux salles du tr6ne, ou plutdt deux ailes ayant cinq entre-colou- iiements cliacune. Les portes int^rieures do 30 L'UNIVERS. ce piilais orrjipont frois (Mitre-coloniiemonts; it eii existe encore mie autre de cliaqiie cMi. Le mur exH^riour de ce palais a 1,100 picds 2 |H)nres de tour; trois portc s toiiriM^es a I'o- rient, au nord-oiiest desquelles est line tour avec uiie cloclie. C'est en 1530 que ce temple a Ho fonde. (172, 173, 174, 175.) Fortes orientalesde la ville exterieure. ( 176. Lieou-li-tchang.) Fabrique dc faience et ;«//ert<',ouroncuitrargilocn cinq "couleurs differentes, seion la distinction des c^mmandes. La dynastie aclueile a insfitu6 deux commissjures permanents ponr la reiiie de cette fal)ri(iue. Kile ne sert plus maintc- nant que d'entrepOt aux produits des autres luileries. Los hricpies , les tuiles , la faience se t'abriquentdans lesmonts de Touest, sur des dessins donnas. (177, 178.) Fortes occidentales de la ville exterieure. (179 Fa-youan-sse .) Monastfere fondd en 645, a Test et k I'ouest duquel selrouveiit deux obdisques d'environ lOOpieds de liau- teur, (^rig<^s par deux gen^raux cliinois qui , depuis , se revolt^rcnt. (180. Thao-jan-t fling. )lAen de plaisancc que les lettr^ et les fonctionnaires publics visitent Wquemment comme lieu de prome- nade. C'esl maintenant un mouastcre. 11 est situ^ sur unc Eminence d'oii Ton a des points de vue cbarmants. Les lieux qui environnent ce monast^re consistent en teitres ou piaines couvertes de maisons et en mar(^cages cou- verts de roseaux verdoyants. ( 181. Hd-loung-than.) Autel du dragon noir. C'est le nom d'lm lemnle oii I'empe- reur va demander de la pluie aans les scclie- resses , et du beau temps pendant les pluies trop abondantes. II y a deux autres autels du mi^me nom sur le territoire de Pe-king , Tun situe a I'ouest, sur une montagne, et I'autre plus eloign^. Cet autel ou temple est plac^ au milieu d'un lac creusc de main d'liomme dans une forme carr^e. ( 182. Sien-noung-than.) Atitel du pre- mier cultivateur. On I'appelle encore ^M janliiis ilv la J-'leur occi- , .11 s«' trouve uii dl.iii}; loiupli de iutuii|*liaisi los Jiirdins d'liiw clartc Iran- uuille ( T/ising-niinijyouan ), situes au pietl (If la monlngne (Ic la source de Jade (iii- IhsinuiiiKlnin ), que rompt'iciir Khang-hi lilniiislrime la di\-ncuvii;me annec de son ri^ixe ('); le toiiil)caii dii cour raiimontation do la capilale , en l?.2'J,sous la direction de ra&trononie et malliunatic iea Ko-cheou-king (\a\t7. vol. 1", p. 363), dequalre lieues de ionjjiiour, avec cinq ^tluses do picrre. A cliaciuie de res (^cluses sont proposes cent qualre-vingts lioiumes, el trois cents grosses uarques sunt entretenucs sur ce canal pour le transport du bid. Au sud est un nionastferc (|ue Ton nomme on'inairement Tranquillite mcridionale, apparlenant aux Tao-sse , entretenu aux frak du gouvernement. Tons les ans, au pre- mier jour de In cinquietne Itnie, il sefaitune procession sacerdotalcdela Y'lfleexlertcure a re niima.sltre, avec des banni^res et des eneen.soirs (que Icdiable, ajoute le P. Hya- cinllie, leur a appri:? sans doutc a fabriquer et k employer conune font les clir6liens ! ). PALAIS IMPiJtIAL DE YOU\N-MINr.-VOI'A:i OU JARDINS u'l'NF. cLaRTE I'AnFAITE. Ce palais, ou plut(it retle collcrlion de palais, a deja acquis one telle cclelirite en Kurope (pie nous ne poiivons nous dispenser d'eu donner une description un pen ddtaillt^. I.es enipereurs de la dynastic des Ming, dit un iiiissioiinaire Tran^^is (*•), avaicnt ieurs narcs el Ieurs maisons de |)laisance a une (ieue el d(>mie de la capitate, du c6t(^ du midi. L'endroil qu'ils avaientchoisi (^tait bien Imisc, bien arrost' et bien aert^, pour y rt'u- nir loiis les agr(^ments de la (•ampagne. Les princes de la dyiiastie niesenle u'en ont plus voulu, et lis ont fail clioix , a I'oucst de Pd- king, d'une jilaine qui, 6lant au pied des inoiitagnes, a un air plus pur et des eaux plus vives. Ce fut I'emperenr Young-Uhing , fds du cdlfcbre Khang-hi , contenipuraiii et emule de Louis \IV, qui a Tail con&truire les Jar- aime braucoiip ce site; 11 arait rnvlc d'en fairc m laatwn do plmsiiiior ; iiiais rrtl(|m-llc ot l.i cnututne, qui unt Unt d'einpirc »iir I'esprit des Cliinoifi , sc Mini iipjiiisiT-cason goi'itct 4 «in ilcsir. I n rmpereur "'■ hiilir ton palait , rt il ne pent pas ■' aucun de ceiix qu'ont kabite* set J. (■; la-tttuuy-i-thoung-tchi ,%.. i , f« tn. r*) U P. UcrblUoQ . Uttrn tdiflnntet. dins d'une clartd paf/aiie ( Vmian-ming' ijou(in) (liins Tespace do vingt annexes. L'em- pereur cliinois ne dul |)as do|)enser nioins d'aigent a cetle creation de faiitaisie que Louis XIV h Versailles. Le frt^re Alliict, mis- sionnaire jdsuitc, n(j a Ddle en I'ranclic- Conitd, et peintre en litre de rempereiir Kien-loung , en a donne, dans lo recueil des Leltves mijiantes*, une description tres- ddtailk^e, dont nous extrayons les passages suivants : « On a 61evd , dans le vaste terrain de ce pare , di s montagnes liautes .seiilement de 2u ju.Mpi'a 60 et 00 pieds, ce qui t'ornie une in- fmitii de petils vallons. Des canaux d'une eau claire, pro\enant des liaules montagnes qui douiinont remplacement des jardins , ar- ro.sent le fond de ces vallons , et api^s s'fitre divises vont se rejoindre en plusieure en- droits pour former des bassins , des etangs et des mers. « Les montagnes, les collines, Ieurs pentes sont couverles d'arbres a flours, si connnuiis a la c;liine. Les canaux n'ont aucun aligne- ment ; les pierres rusti(|ues qui les bonlcnt sont po.see^ avec tant d'arl qu'oii dirail que c'est I'ouvrage de la nature. Tanl6t le canal s'(Hargit, tantdt il est rcsserre, ici il serpente : les bonis sont semtis de tleurs qui sortent lilalienne. On le decora de Mt-belles eaux ; i! \ a des ni^es de fort l)on gMt , et la grnnde , an dire des niiKsionnaires , •Miendr.iit If parall^le avec celles de Ver- (Milie<< el tie Saint-Ciond. I.orsqne rcmjierenr est Mir son trrtne ( tons les ^lifices , quels <\\\'\\i soient , destine h recevoir remperenr, He Wt-ce qu'une senio fois, ont, en Chine, line Mile d» trrtne), il Toit des deux cAt^ deux grandes pyraniides avec lenrs acoom- pgnemenls , et , devant Ini , un ensemble de jets d'eau distribii^s avec art et donnaiit nn jeu qui repr^nle I'espice de cuerre que 80!»t censes se faire le« poissons , les oiseaux ct les auimaux de tonte esp^ce (ini sent dans les bassins, sur les bonis et au soninit't des rocliers, plac<^, c€ senible, par liasard et for- niant un iK^micycle d'antant pins agr^able qu'il est plus rustique et plus sanvage. 1^8 c{iiiioi8 ont |)crsoniiili6 Ics douze beures du jour par douze aniniaux ; le P. Be- noist imagina, sur ct>lte donni^e, de fairs une borlogc d'eau continue, en ce sens que chaqiie ligure des douze lieures vomit un jet d'eau pendant scs deux lienres , el il a place ce buh'et liydrauliqne au bas de la seconde maison. Ce I'utun des travaux qui lui coQta le plus de peine. La grande G^ographie impMale que nous poasMODS, publiee avant les a^irandisse- mentsel les emboli issements executes a I'aide des missionnaires fran(,ais, ne coiisacreque (piel(pies liiines h. la description de Youan- ming-youan. << Dans le milieu de cesjardins, y cst-il dit(*), est la grande salle du trdne de la droiture hhllunte et lumineiixc ; k Test est la salle du (rone de I'adminis/ru- tion diligente; c'esl la oil renqwreur vaque en tout temps aux affaires de I'Etat. » L'^tendue de terrain occupd par Yoiinn- ming-youan n'est pas d^terminte j>onr nous d'une mani^re certaine. Le P. Gerbillon , un des missionnaires francais qui lev^rent la carte de la Chine, sous le r6gne de Khang- hi, hii donne dix lieues de circonference. Van Braani (**) dit qu'on lui a assure^ que ce lieu dr plaisance des enq)ereurs chinois avait 300 It on 30 lieues de circonference, ce qui doit ttre d'uue grande exag(^ration. Voici comment cet amhassadeur en second de la Com|)agnie hollandaisc parle de re palais : " Aprcs avoir niarclie un quart d'lii'ure le longdu grand cliemin, nonssonmies |>arve- Mtt^ un vaste et mugnilique palais(***) au de- f*) Ta-tktinri-i-thoung-tchi . K. I, f" lo verso. *"!} '*•"• '* r<;laUon (III I'ni/age de l'amba$sadfde »*V'>«»|i«lin<' det Inilrt oiirntales hollandaiset rert I trnprrrur ilr lu Chine, en ITOI et nt^^. PIJ. '«•«.•^.^•' "' •?• ' ■ ■■■• T ■ - • .'tstiiv. < " .iilc do lord *'•'' ' 1 istvie dcla **',. ,.. ' '" arrive h ce p^iiai- lilt »u (jfuruc Mauntou, apri's avoir tra- vant duqnel est une place trfes-consid^rable. Sur cliacnn des cdUis de cette place est une cour pav^ et asse/. spacieuse, qui corres- pond a Tune des ailes du bAtiment. Ces ailes semblent destinees k loger les olTiciers de la couret Ics mandarins inlerieurs. Denx piedes- taux de marbre blanc, placds dans la cour, portent denx tr^grands lions de bronze, et qui |)euvent passer ponr 6lre bien ex6cut^3 par I'arliste , parce qu'ils le sont d'apr^s les idtk's que les Chinois se forment de cet ani- mal inc^nnu a leur pays n Le premier salon , plac^ au levant du bAtiment, est fort grand et garni debeancoup de lanternes k la chinoise. Au milieu , sur une estrade,est im fauteuil ou tr6ne imperial. Aprits avoir traverse ce salon, nous nous sommes tronvc^s snr une cour interieure pa- v6e et de forme carr<^e. A» nord et a I'ouest elle olTre , dans les bdtiments qui la bordent , une vue aussi belle et aussi riche que celle de I'ost, par laqnelle nous etions arrives, tandis que le cOte sud n'a que la grande porte d'entr«^e et a cliacun de ses c6t6s des loge- ments de domestitpics. « Int(^rieurement a c«tte porte qni corres- pond a la fa^ide du nord, et comme pour la cx)uvrir, est un roclier considerable d'unscul bloc place sur un banc de pierres. Le trans- port de ce rocher doit avoir occasionnt^ une jieiue etun travail immenses, ainsi que I'o- peration de le mettre sur sa base, car il forme nne masse prodigiense par son volume et par sa pesantenr. Des inscriptions de la main m£- me de I'empereur, et de celle de plusienrs aulrcs personnes du pins haut rang, a I'imi- tation du prince, di'corent et embellissent ce rocher detoule part. Dans quel(|ues points on y a mis de pelits arbres et des (leurs. « Cette cour montre, au milieu de la fa- cade septentrionale, deux |)etits cerfs et deux grues de bronze, dont Tex^cution est me- diocre. Le batiment , au nord , renferme un salon d'audience impt-riale, ayant un tr6ne au centre et des lanternes k tons les points. Wotre conductcur nous a fait reinarqner, du c6te gauche du trOne, contre la muraille, le carrosse dont le lord Macartney a fait pre- sent k I'empereur Tann^e dernierc. Il est peint avec une grande deiicatesse, partaite- nient verni , et tout le train en est dore ; les harnais et le reste mCme de I'^quipage sont dans le coffre m6me de la voiture que recou- vcrs^ trois coiirs carries , cnvlronnies de batimenti .si^parta les uns des autres. I,a salle est placec sur line plalc-fonnc de (rranit elevde de quatre nieds au- des5us du niveau de la eour. Son toit avanci est »oulenu de ch.tque tOtt' par deux ranffs de colonnes de bois. J.c hit de ces eolonnes est peint et \ernissfi et le cliaplteaii onie de eartouclics et de devises tr^ - brillaiunient colori«is , et porlant tous dec dragon.s dont Ics pieds sont amies de cinq iiriUea ( carartfre dislinellf du dragon iiup<'rial ). .. ( Helation auUientiqiie de Vambussade du roi de la (.randc-Krctatine pres de lempereur de la I /line, etc.; traduction franeaise, I. m, n. n»:et edit, anftalse, t. ii , p. tsr ) CHINE MODERJNE. 35 vre une grande chemise de toile. J'aper7. catalogue de cette grande bibliotheque, et pour se procurer, a prix d'argent, tous les livres que le temps avait epar- gnes. Les plus habiles lettres furent reunis pour meltre en ordre cette grande collection. Ce fut dans les pro- vinces meridionales que le plus grand nombre des livres envoyes a la biblio- theque ff'^^n-youdn fut recueilli. A cette ^poque, les livres existant dans cette bibliotheque formaient plus de vingt mille classes (*), ou environ un million de livres {Kiouan), dont la plupart s'etaient conserves caches dans les bi- bliotheques sous les dynasties Sofoig et mongole. La sixieme annee tching- toung (1441), le catalogue des livres de cette bibliotheque presentait un total de quarante - irois mille deux cent et tant de volumes {tsi). Par la suite, ces livres ne furent pas conserves soigneu- sement. Bien des annees apres qu'ils eurent ete derobes , la 33' annee loin- 11 (1605), on (it le catalogue des livres conserves que Ton avait pu reunir, et qui etaient en petit nombre. Depuis lors, les guerres et les incendies s'etant succede, la plupart de ces anciennes editions ont ete perdues ou disper- sees (**). Population de Pe-king. Nous n'avons trouve dans aucun li- vre chinois une indication, mSme ap- proximative, de la population de Pe- king. Le P. Gaubil , qui a fait une description de cette grande ville , lui donne 2,000,000 d'habitants. D'autres missionnaires du dernier siecle , qui avaient aussi reside longtemps a Pe- king, lui attribuent une population de 3,000,000 d'^mes. ViLLES PRINCIPALES FORTIFIEES(***). Apres le chef-lieu du departement vien- nent : 1° Liang-hiang, chef-lieu de canton, 2° Kou-ngan, id. 3° Young-thsing, id. (*) CIn'-c/iod-tclu'-tsdi-ko-chi , yo-eulk- wen-yu-pou. (") Tai-tlising-i-lhoung-tclii , k. i, f xg. (***) Toules les villes eii Chine, aiixquelles on donne ce noin ( tclung signifie propre- ment nmrailles), sont entourees de murs , et generalemcnl de fosses pour les defendre centre rennemi. CHINE MODERNE. 41 4° Toung-gan, id., fosses. 6° Hiang-ho. id. 6° Thoung, chef-lieu d'arroyid. 7° San-ho, chef-lieu de canton. 8" f^rou-fhsing, id. 9" Paoti, id. 10° Tchang-ping, chef-lieu A'arron- dissement , fosses exterieurs de 9" 450'"° de largeur. 11° Chun-i , chef-Heu de canton, fosses de 12"" GOO""" de largeur, creu- ses sous les Ming. 12° Me-yun, chef-lieu de canton , fosses exterieurs. 13° Hoai-jeou, id. 14° Tcho , chef-lieu 6'arrondisse- ment , fosses de 6'" 300""° de largeur. 15° /"rtH^-c/ion, chef-lieu de canton, fosses exterieurs. 16° Pa, chef-lieu d'arrondissement. 17° fren-gan, chef-lieu de canton, fosses de 9" 450'"'" de largeur. 18° Ta-tcldng, chef-lieu de canton, fosses de 18'° 900""° de largeur. 19° Paoting, chef-lieu de canton. 20° Ki, chef-lieu A' arrondissement . 21" Ping-kou, chef-lieu de canton, fosses de 6"" 300'°"" de largeur. 22° Tsim-hoa, chef-lieu d'arrondisse- ment, fosses de 9"' 450 de largeur, creu- ses et revetus de pierres sous les Ming. 23° Ta-hing , chef-lieu de canton. 24° Youen ping , id. Colleges. Le departement de Chun- ^/jjen compreuait, en 1744, lors de la premiere edition de la grande Geogra- phie imperiale, 24 colleges (A/o)(/jy. HI, y° 12, et sqq.) , reparlis dans les prin- cipales villes , et ou Ton enseigne les doctrines de I'ecole de Khoung-tneu (Confucius); cinq instituts ou colleges iyoiien), consacres a I'enseignement des doctrines des bouddhistes et des Tdo- sse. Le plus grand nombre de ces col- leges ont ete fondes sous les dynasties des Soung, des Tartares occidentaux , des Mongols et des Ming. Population en 1743. Contribuables chefs defamilleinscritsaux roles. 142,670 Colons militaires 14,874 Terbes cultivees en 1743, 59,879 king, equivalant a 356,280 Aec^. Impots fonciers, en argent, 202,989 Hang, ou 1,623,91 2 /ra?ic.5. — en nature , ris 352 c/a ou /tec^. — en legumes noirs 3,510 chi, id. MoNTAGNES ct RiviEBES. On compte 182 montagnes plus ou moins remar- quables, et dont la Geographie impe- riale donne la description geographique et historique , y compris quelquefois la hauteur verticale; 19 montagnes moins elevees [ling), access ibles aux voyageurs ; 6 vallees profoudes {thoiing) ; 65 fleuves (hd); 10 lacs, {hoft), etc. Antiquites. 36 villes anciennes, en- tourees de murs, dont la plupart ont ete fondees sous les Han, vers le commen- cement de notre ere ; 10 anciennes villes du 3« ordre ; 40 autres petites villes an- ciennes; 2 anciens campements mili- taires {kiiin), etablis dans le sixieme siecle de notre ere; 9 anciens forts {tclirn et ivei) pour la garde des fron- tieres; 1 vieux bourg remontant au commencement de la monarchic chi- noise (*) ; 6 palais anciens {koting); 27 anciennes tours (^/irti)i a plusieurs etages a jour , et dont I'une , nom- inee la tour ou pagode d^or {hodng kin thai), remonterait, selon la Geogra- phic imperiale ( ** ) , au quatrieme siecle avant notre ere; 5'autres anciens edifices a plusieurs etages (,ledu); 2 anciens observatoires ; 2 anciens tem- ples [thdng); 14 anciens pavilions (/iHgr); 1 ancien karavanserai {kidi)', 3 anciennes hotelleries {koiian); 13 anciens pares {youdn), au nombre des- quels on compte le pare aux cerfs {hU- youdn); le pare aux fleurs d'abricotiers {hing-hod-youdn) ; le pare des chStai- gniers {ii-youdn); le pare des dix mille printemps {w^n-tchUn-youdn) ; le pare de la feuille du riz {mi-kid-youdn); le pare des miiriers (s^ng-youdn). DouANES. Le departement de C/JM»- thien compte vingt-huit douanes prin- cipales, ou etablissements defensifs oil Ton percoit des droits d'entree et de sortie, et beaucoup d'autres etablisse- ments de ce genre, qui servent en meme temps a defendre les passages des fron- tieres, tels que des campements mili- taires, des forteresses , des marches et des postes pour recevoir les mandarins voyageurs : ces dernieres ont toutes ete etablies sous la dynastie des Ming. Nous (*) TaUhsing-i-thoung-tcId , k. 4, f° 35 verso. (**)Ibid.,f 36 verso. L'UNIVERS. ftrons remarquer ici que I'etablisse- nMOt de ees postes en Chine date du ligne de la dynastie det ^^ing, de i 3(i8 ■ IS84 de notre ere. Ports. II y avail en 1744 dans le atime departeinent, 54 ponts {k/iiad} , dont I'un, sitiie a Test de la ville de Tbunggati, siir le fleiive Tchdo-ma, est nonime le pont de hiiit li de lon- gueur (environ 3 kilometres). La plu- nart de ces ponts ont ete construits sous la dynastie des Ming, rsous neglifjeons les ^ues , les digues et les ecluses {toil, «, tchu). ToMBEAUX. Parmi les tombeaux ce- lebres , h% plus anciens ne reniontent qua la dynastie des /Ian, vers le com- mencement de notre ere. Temples. On compte 33 grands teniples, eleves en I'lionneur, Tun de I'ancien empereur Hodng-ti; les autres, en I'lionneur du Genie, qui apaise eterneltement lesflots (yoitng ting hd- chtn-mido), de divers empereurs des dy- nasties bistoriques, de differents herbs et personnages celebres, etc. Mo?(ASTERES. On compte aussi SO monasteres bouddhiqties, dont /ndt ont et6 fondes sous les Thang \ un sous les Lia6; trois sous les Kin; sept sous les Mongols; douze sous les Ming; et huit sous la dynastie regnante. Les monas- teres des Tao-sse ne sont qu'au nombre de 4, dont trois reniontent a la dynas- tie des A'/h, I'autre aceiledes Mongols. L'un de ces monasteres ( le M^n-hoa sti, le monastere oil I'on cueille les fleurs) est b/lti avec des enormes blocs de pierre; on le nommait autre- fois le temple des mille / o. II fut cons- truit en 1575 de notre ere. II y a le « nionasterede \a pagode blanc/ie » {pe- thdsse), dont la forme ressemble a une banniere; le monastere de la Source de la hi et celui des trois pagodes [sdn-t/id sse), bStis sous les I'/iang (64.S) ; le monastere de la cha- rity et de la compassion ; le monas- tere du rq)os celeste; le monastere de la^toMe Aouan-yin, daus le temple dUqMl OD voit une ancienne statue iu- djenne de la deesse; le monastere du pur Ian ; le monastere de la vertu et dei bonnes wwres, que Ton nommait autrefois le monastere des saints qui ont refu et qui coiu*r»ent la felicite du del : ce dernier fut fonde par les Mongols (1329), et restaure sous les Ming; il renferme trois tours beaucoup plus anciennes ; le monastere de la source de Fn ; le monastere des dix mille vies ; les monasteres du nuage de la hi, de la rner de la hi, du repos de la vie : devant le temple de ce der- nier, fonde sous les Mongols, on voit deux figuiers d'Inde, nonimes par les Chinois po-lo, que la tradition raconte avoir ete apportes de Tlnde ; le monas- tere de la montagne odorante, fonde dans le 10* siecle de notre ere, et re- construit de nouveau dans le milieu du 12* : on y trouve une riche bibliotheque due en grande partie a la munificence de I'empereur Khang-hi. Le monastere tao-sse du nuage hlanc, au sud-ouest de Pc-klng, ctaitnomme autrefois le Palais du Tcil-ki ou piie- MIEB PRINCIPE. II fut fonde sous les Ain, et restaure sous les Ming. Le plus ancien de tons ces monaste- res est celui du « temple de briques, » situea pres d'lme lieue a I'estde lloai- jeou, lequel existaitdeja du temps des Han, sous le nom de monastere de la source des nuages eteudus ( ihdn- thsiouan-sse). Fo?iCTIONNAIRES PUBLICS CELE- BRES. Ces fonctionnaires sont au non'- bre de 95; les plus anciens'remonte it a la dynastie des Ilan. lis se sont tous distingues par leurs talents , leur de- sinteressement, leur amour du peupk et leur devouement au bien public. HOMMES ET FA ITS CELEBRES. CettC section de la Grande Geographie impe- riale ne peut etre en aucune facon re- sumee dans ces colonnes. Kous'dirons seulement que les faits et gestes de 351 hommes celebres y sont decrils, dont 207 pour les dynasties qui ont precede la dynastie tartare mantchoue actuellement regnante, et 144 pour la dynastie mantchoue, au nombre desquels sont 24 princes. PASSAGERS ou VOYAGEUBS CELE- BRES. Quatre seulement sont enume- r^s ; l'un qui vivail a I'epoque des trois royaumes (de 221 a 264 de notre ere); un autre sous les Soung ; le troisieme sous les Mongols, et enlin le quatrieme sous les Ming. CHINE MODERNE. 43 Femmes illustres. On en comple 96, dont 52 out vecu sous la dynastie actuelle. Toutes se sont distinguees par des vertus extraordinaires, au noinbre desquelles on place, non-seulement celle de rester (ideles a leur epoux de- cede, mais encore la resolution de ne pas lui survivre. La plupart de ces femmes celebres ont ete declarees hcm- tement honorables par des decrets im- periaux. Saints et immobtels. Notre de- pcirtement n'en compte que /««7, nom- bre bien iiiferieur a celui des homines et des femmes celebres. Phoduits natubels du sol. On trouve des mines de set dans le canton de Ning-ho; celui de Tsl'm-hod produit du fer; plusieurs autres fabriquent des etoffes de sole avec lesquelies ils payent leurs impots; le canton de Tchang- ping produit du cristal de ruche. Le sol de ce departement produit en ou- tre la fameuse plante non)mee/t;i seng^ qui, dit-on, prolonge la vie, et qui se pave excessivement cher, plus que son poids d'or; A^s fruits de plusieurs es- peces , des chataigniers , des melons , des jujubes {tscio) , des raisins ; des p^- chers, des saules, des pivoines, des plantes potageres de diverses especes ; des pierres precieuses transparentes comme le verre (lieou-H). II y a aussi des mines de charbon de terre{mei) dans les cantons de Yoiien-ping et de Fdng-chdn; on trouve aussi la pierre qui sert a peindre les sourcils {hod- laei-chi) dans le voisinage du premier de ces cantons. Parmi les objets d'in- dustrie on remarque des queues de leopards et des arcs ernes de comes. 2« Depabtement. Young -ping- FOU (*). Ce departement, situe a 55 lieues a Test de Pe-fdng, a 34 lieues de Test a I'ouest , et 22 du sud au nord ; il com- prend un arrondissement et sept can- tons. Situation et coivfigubation geo- gbaphique. Le departement deFow/jj/- ping s'appuie sur de nombreuses moii- tagnes, et I'eau I'entoure comme d'une ceinture. Au nord et a Test, il est borne par la grande muraille ; et au midi, par les golfes de Liao-toung et de Tchi-li. MCEUBS ET USAGES. Les habitants de ce departement ont beaucoup d'ener- gie et de droiture. Ceux qui cultivent les terres sont laborieux et economes ; les lettressont tres-enclins a la renom- mee; les mechants ne laissent voir que la surface de leurs vices. Les laboureurs consacrent tous leurs efforts a la cul- ture des terres, et ils ne sont point adonnes a la debauche et a la fourbe- rie ; ils ne se laissent point entrainer au mal par I'appat du gain ; ils recon- naissent que la secheresse et la pluie dependent du ciel (*). Le sol en culture est peu fertile et donne pen de produits. Les arts et les sciences y sont tres-peu cultives. ViLLES PBINCIPALES : 1° Young-ping^ ville de l"'"^ ordre, chef-lieu du departement; elle a pres d'une lieue de circonference , 4 portes, et des fosses de 15'" 750""" de largeur, revetus de briques sous les Ming. 2° Tsien-gan, chef-lieu de canton, 3 portes; fosses de 9™ 450'"°' de largeur. 3" Fou-ning ^ chef-lieu de canton, 4 portes; fosses de 15'" TSO'""" de lar- geur. 4° Tchang-li , chef-lieu de canton , 4 portes ; fosses de 12"" 600""" de largeur. 5° Lo , chef-lieu A' arrondissement ^ 4 portes ; fosses de 9"' 450""" de largeur. 6° Lo-ting, chef-lieu de canton, 4 portes; fossses de 9"' 450"'"' de largeur^ 7° Yu-tien., id. 8° Foung-jiin, chef-lieu de canton, 4 portes ; fosses de 6'" 300'"'" de largeur- Colleges et etablissemens lit- TEBAiBES. 11 y a un college dans cha- cune des villes enumerees ci-dessus. Ceux de la premiere et de la quatrieme ont ete fondes sous les Mongols; ceux de la deuxieme, de la troisieme et de la septieme sous les Ming ; les autres sous les Liad et les Kin. II y a aussi un college a Lou-loung, faubourg de Young-ping, fonde sous les Ming; un autre dans la ville de Chan-hat) pres de la grande muraille, sur la frontiere du Liao-toung, fonde aussi sous les Ming. II y a aussi deux autres grands etablissenients d'instruction publique^ (*) Tai-thsing-i'toung-tchi , k. 9. (*) Tai-thsing-i*toang-tcln , k. 9, f 4«' ft L'UNIVERS. fondes sous les Ming, pres du faubourg cantonal de Lou-hung, et pres de la douane occidentale de la ville de Lo. Population en 1743. Coutribuables chefs def.imilleinscr. aux roles. 127,393 Tkbbes cultiveks. 34,505 A. 95 m, ou 205,310 hectares. Imi'Ots konciehs, en argent : nj,151 /. 5 ts. = 835,132 /r. — en nature , riz : 13,951 chi ou hectolitres. Legumes noirs, 4,002 id. Fein 95,607 cho ou bottes. MONTAGNES ET FLEUVES. MOOta- gne8(*)128, dont une, la inoutagne Tou, a 30 li de hauteur ; collines 7; versants 6; iles importantes 3; gran- des cavernes 2; (leuves et rivieres 46; Laies 2. Antiquites. Anciennes villes inu- rees, la plupart mentionnees par les liistorieris des JIan (quelques-unes le sont par Khoung-tseu , dans son liis- toire de la principaute de Lou), 36 ; ancien camp, 1 ; anciens forts destines a proteger les frontieres, 6 ; ancien pa- lais, 1 ; ancienne forSt maintenant obs- truee, 1 ; anciennes tours ou pagodes, 4. La tradition fait rcmonter la construc- tion de Tune de ces tours a I'empereur ff^'ou-ti, des Han (140 ans avant no- tre ere) : cette derniere est situee a Test de Lou-loung. DOUANES, 15. Autres etablissements destines a per- cevoir les taxes, 20. Arenas pour des exercices publics, 4 ; Etablissements de postesappartenant au gouvernement, et datant de la dy- nastic des Ming, 8. Fonts, 18. Le plus grand nombre de ces ponts sont tres-remarquables par leur lon- gueur et la solidite de leur construc- tion. Sous quelques-uns les bateaux ne passent qu'en ete et en automne. Dans rorigine, ils etaient construits en bois flottants : on les a construits depuis en pierre. (*) Les moDtagnes, comme la plupart des nonw en Chine, ont une signification qui, a elle scule , raractcrise I'objet nomme. Les descriptions qui en sont faites principale- ment sous le rapport geologique et minera- ogique, si elles ne sont pas toujours nuiles, lausent beaucoup a desirer. ToMBEAux. Les anciens tombeaux celebres ne sont qu'au nombre de trots, dont deux remontent a plus de inille ans avant notre ere; tel est celui de Tchao- wang, roi de I'Jitat de Yen, situe dans la viile caiitonale de Yu-tieyi. Temples. Ces derniers, la plupart fondes sous les Ming, ne sont qu'au nombre de cinq. Monasteres. Boufldhiques, 9. Id. Tao-sse , 3. lis ont ete fondes pour la plupart sous les Ming. Mandarins celebres. On en compte, depuis les Han jusqu'a la dy- nastic actuelle, douze; et sous la dy- nastie regnante, six. Un de ces fonctionnaires , natif de Tchang-gan, nomme Thien-jin-hoei, qui vivait en 650 de notre ere, et qui etait juge criminel de Ping-tcheou, dans une annee de longue secheresse, obtint par ses prieres une grande pluie. Les biens de la terre ayant fructifie, les po- pulations exprimerent leur joie par le chant suivant : « Notre pere et notre ni^re nous ont elevlce w-V„V ' V!.* .* y.,'.,',.',." "^'^' "" de toute espece. Anciennement on avait FASSAGERS VOVAGEUBS celebbes. '1 7 • f\n n'^n /.«..„^»o « ' v.'li.cDnna. gumomme ce pavs e royaume des ri- Un n en compte qu un seal sous les ^ * / 1 ' • • t i*v- * Mongols ; il s'e nolnma.i. m-kin, ; „e «, „f^, « "^E'^ ^Sr' 'ireTo, se nourrissait que de riz cu t, et etait ;^^«'"?«'"|S ei es cuoses iiueraires ont tres-verse dans les livres, qu'il connais- ^' f V-'''''§« ^ °'^"l^f beaucoup la po- sait parfaitement pulation ; on peut la comparer , sous Fkmmes celebbes. Depuis I'epoque T '""T'} ' -r " ■'"'^'f ' habitants de des trois royaumes (221), Sn en com, te 'i* V ' ?' /^"T' '^'l'' '«/«.V"'"« 32. La premiere fut Kenerale d'armee ?' i«" (patne du plnlosopbe Mcng- en second. Cette heroine de la famille '''''f^ ^^'."^ T' ^°"^ '^'"' 'm P"*"' }oue;i fut, comme notre Jeanne d'Arc. ""^f '^ ne cherchent pomt querelle aux tres-intelligente et tres-sage, disent f^"*?" ^'^ ont a cet egard les mceurs les anteurs chioois ^^ homines de 1 antiquite. Us sont ANACiiORETES.'on en compte 4 fes-portes a la priere, et ils ont une PRODHTS DU sol ET iNDUSTBiE ^'^^" conhaucc dans les espnts et les Fer; iloJj\:s de sole, de I'espece dil ^^^^^ ^*'^- taffetas ; plante medicinale nommee JjS^^^^^^'^^fP^^^s = , ^, , /jioaHj;.TS PBINCIPAUX 17 TOMBEAUXCELEBBES 28 Trois d'entre eiix appartiennent a I'ancienne d\ nastie des Tcheou; un tem- ple^ est .itlenant. IeUPLES CRLEBBES 12 On remarquele temple des Trolsjrre.. miert empereiirs, a l>sl du clicf- ieu; celui du grand \u ; celui dt- V Esprit du Jleuve llou-lo, dans lequel on olfredes •acrifices deux fois par an, au prin- O Conferei 1. 1, p. g4 et suir. ERS. temps et en automne ; il fut fond6 dans le IS' siecle. MoNASTEBES. Bouddhiques, It. Id. de Tao-sse 3. Dans I'nn des monasteres bouddhi- ques situe a Pinterieur de la porte orien- talede7'c7n';?g'-///)gr,etque Ton noninie le « Monastere du firand F6.,y- fond6 en 586 de notre ere, on remarque un beau por- tique de neufentre-colonnements acinq etajies, dont la hauteur est de cent trente pieds chmois. Au milieu de ce porti- qiie est une statue en cuivre de Bond- aha, haute de 70 pieds chinois. Ce mo- nastere a ete restaure par Khang-hi. Plusieurs de ces monasteres remontent au 5* et au 6' sieele de notre ere. IMandabins celebbes. Depuis les Ilan CO HoMMES celebbes, id.. 107 P'emmes celebbes , id 27 Anachobetes celebbes 5 Pboduits et iM)iisTBiE. Nids d'oi- seaux, poires, champignons d'arbres; planles medicinales, etc. 7«DePABTEMENT. CHUN-TE-FOn(*). Ce departement, situe a cent lieues au sud-ouest de Pe-king, a 28 lieues de Test a Touest, et 1 5 du midi au nord ; il comprend neui cantons. COMFIGUBATION GEOGEAPHTQUE. La parlie nieridionale de ce departe- ment louche a la province du Ild-ndn; il s'appuieau nord-ouestsur des mon- tagnes escarpees. Le canton de Kiu-lou est un lieu de passage pour toutes les parties de I'empire. MoEUBS ET USAGES. Lc caracl^rc des habitants de ce departement est tres-li- beral el eenereu.x ; le labourage et la culture du milrier sont la nrincipale occupation des habitants ; ils ainient aussi beaucoup a se livrer a relnde des leltres, et ils sont singiilierement af- fectes de la lenteur de leur avanceinent. Le peuple est d'un commerce ngreable et facile; il ne s'occupe que d'agricuN ture; il n'est point querelleur et prO'' cedurier. Le riche el le pauvre ont beaucoup degardx I'un pour raiitre(**). Villes pbincipales: 1° Chun-te, chet-licu du departe- (*) Tai-tluing-i-thoung-tclii , k. i6, (") Ibid., fob 5. CHINE MODERNE. 51 merit, a 1 3 /i de circonference, 4 por- tes; fosses de 15" 750""° de largeur. 2° C^«-^o, chef-lieu de canton, 2 portes ; fosses de 6'" 300'°°" de largeur, creuses sous les Ming. 3" Ndn-ho , chef-lieu de canton, 4 portes; fosses de G" 300°"" d* largeur, creuses sous les Mongols. 4° Ping-hiang, chef-lieu de canton, 6 portes; fosses de 6"" 300°"" et plus de largeur, creuses sous les Ming. 5° Kiu-lou, chef-lieu de canton, 4 portes; fosses de 6"" 300°"" de largeur, creuses sous les Ming. 6° Kouang -tsoung, chef- lieu de canton, 4 portes; fosses de G" 300°'°' de largeur, creuses sous les Ming. T Thang-chan, chef-lieu de can- ton, 2 portes ; fosses de 6'° 300'°"'de lar- geur, creuses sous les Ming. 8° Nei-kiu, chef-lieu de canton^ 4 portes; fosses de 6'° SOO'""" de largeur, creuses sous les Ming. 9° Jin, chef-lieu de canton, 3 portes; fosses de 9°" 450""° de largeur, creuses sous les Mongols , revetus en briques et en pierres sous les Ming. 10° Hing-tai, chef-lieu de canton. Colleges. 11, dont un dins chacun des chefs-lieux. lis furent etablis sous les Soiing, sous les Mongols, et sous les Ming. Population en 1743. Contribnables chefs de famille inscrits 902,942 Colons niilitaires 1,866 Terbes cdltivees ; 51,403 king 36 meou, = 305,847 hectares. Impots FONCiERS, en argent: 215,598 Hang, 8 tsiin , 7 fen ■= 1,724,784 francs. Moktagnesktgbandscoursd'eau. Montagnes 41 Fleuves et rivieres 15 Grand canal d'irrigation creuse sous les Tliang (Td-thdng-khiH.) Lac Ta-lou, dans lequel se perdent trois rivieres. Antiquites. Anciennes fortifications de villes. . .21 Tours ou pagodes 6 Quelques-unes sont anterieures au 2' siecle avant notre ere. DOUANES 15 POSTES 2 PONTS IMPORTANTS 14 TOMBEAUX CELEBBES , 20 , dont 2 remontent au temps des Tcheou. Temples celebbes, 11. L'un de ces temples est erige en I'honneur de I'em- pereur Yao; un autre en Thonneur de I'empereur Koiiang-xvou des Ilan. MoNASTEBES, 7, fondcs sous ks Thang, les Soung et les Mongols. Mandabins CELEBBES, depuis I'e- poque des trois royaumes 37 HOMMES CELEBBES, depuiS ICS Han 39 FemMKS CELEBBES, id 16 Pboduits et INDUSTRIE. £toffes de sole, poterie, coutellerie, pierres d'or- nenieut, pierres de louche pour eprou- ver Tor {ivenc/ii), snble a polir le jaspe, fer dans le canton de Cha-ho, vin dans celui de Nan-ho. 8« Departem^. Kouang-ping-fou (*). Ce departement , situe a 95 lieues sud-ouest de Pe-king, a 16 lieues de Test a I'ouest, et 13 du sud au nord; il comprend un arrondissement et neuf cantons. Coisfiguration geogbaphique. Ce departement louche au sud-ouest a la province de Chan-toung , a I'ouest a celle du Hd-ndn; le fleuve Tchang et d'autres grands eours d'eau le tra- versent dans la direction de I'ouest a Test et du sud au nord. Mceurs et coutumes. Le sol de ce departement est ouvert; les usages sont m^les; mais le caractere general des habitants est une vivacite d'esprit, une humeur audacieuse et entreprenante singuliercs. Ce caractere leur etait deja connu dans le premier sieclede notre ere. En outre, ils sont d'un naturel bien- veillant et genereux ; ils se livrent pria- cipalement au labourage eta la culture du milrier; ils aiment aussi beaucoup les etudes litteraires. Le sel est tres-re- pandu dans ce departement, au sol du- quel il se trouve m^le ; aussi ce sol est- il tres-propre a nourrir des troupeaux. ViLLES PBINCIPALES : 1° Kouang-ping , chef-lieu du de- partement, ayant neuf li de circonfe- rence, 4 portes, et des foss6s de 37°" 800°™ de largeur, qui furent creuses sous les Ming. (*) TaUhsing-i-thoung-tchi, k. 17. 53 L'UNI T KhioU'icheoit, chef-lieu de can- ton, 4 portes; riviere formant fosses de 12" 600"" de largeur, creusee sous le dernier empereur des Ming. 3" Fehhiang, chef-lieu de canton, 4 portes. 4" Ki-isi, chef-lieu de canton, 4 portes; fosses de 15- loO"" de largeur, creuses sous les Ming. 5" Kouang-ping, chef-lieu de canton, 3 portes; fosses de G" 300""" de lar- geur, creuses sous les Ming. fi" fJan-tan, chef-lieu de canton, 4 nortes; fossesdcG" SCO""', creuses sous les Minq. 7" Tching-gan, chef-lieu de canton, 3 portes; fosses de 6" 300"", creuses sous les Ming. 8° fret, rhef-lieu de canton, 4 portes ; fosses exterieurs creuses sous les Kin et les Mongols. 9" Tlising-ho, chef-lieu de canton, 3 f)ortes; fosses exterieurs creuses sous es Ming. 1 0° r.veM, chef-lieu A'arrondissement, 4 portes; fosses de 6" 300'"°" de largeur, creuses sous les Ming. 1 r Young-nien, chef-lieu de canton. Colleges 15, la plupartfondessous les Kin et les Ming. PoPL'LATiON en 1743. Contribuables chefs de famille inscrits 359,724 Colons militaires 10,913 Terbes ci;LTlVEEs:7i,353 Ai/?g'94 meou, := 424,555 lieclares. Impots voyciEYisen argent: 359,555 hang 8 tsiCn, = 2,876,440 /;-aHC.9. MO>TAGNES ET RIVIEBES. ISIontagnes 13. De ce nombre est la niontagne de la clarte penetrante , {thsOung niing chdn), sur laquelle est un temple eleve en I'honneur de CKs- prit de cette montagne. Rivieres 11 ANTiQUiTES.Anciennes fortifications de villes 42; beaucoupde ces villes ont une origine qui reraonte a la dvnastie des Tcheou. Autres anciens monuments 18, dont 7 tours ou pagodes. DOUANES 22 POSTES 3 PoNTS, 14. Un de ces ponts, situe en dehors de la porte occidentale de Han-tan, fnt construit, selon la tradi- tion, a IVpoque des guerres qui deso- VERS. lerent la fin de la dynastie des Tcheou, dans le 3'' siecle avant notre ere. PlOlIES ET JETEES 22 TOMBEAUX CELEBHES 37 Temples, 13. On remarque dans le nombre le temple du celebre Thseng- tseu (*), disciple de Khoung-tseu, situ6 au midi de la ville cantonaie de f'f'^ei ; celui des Trois sages ; celui desQCwwe* vieritoires. MoNASTiJREs. Bouddhiques — Tao-sse 2 Au nombre des premiers est le « mo- nastere de I'empreinte figuree de Boud- dha » ( ThoH-ming-sse) , fonde sous les Thang. Mandarins celebres 64 HOMMES CELEBHES 85 Voyageurs celebbes. Sous les Hail et les Thang 2 FEMMES CELEBBES 28 AnACHORETES CELEBRES 2 PrODUITS du SOL ET INDT'STRIE. Taffetas de sole, etoffe et feutre de laine, vetements huiles, racine de./?«- sing, riz de marais, uenufar, plante qui produit une couleur bleue pour la tem- ture {Idn, indigo ?), pierres lines, aimant {tsiu-chi), porcelaine fine, nioutons. 9* Departement. Ta-mtng fou (**). Ce departement, situe a 112 lieues au sud-ouest de Pe-king, a 12 lieues de Test a I'ouest, et 36 du sud au nord; il comprend un arrondissement et sept cantons. Configuration geographique. « Le sol de ce departement est eleve et « montagneux; les montagnes arretent « les rivieres de tous cotes, » disent des vers chantes sous les Soung; Use presente eleve comme une digue, il y a ueaucoup de torrents et de gues a fran- chir. Les rivieres se reliententre elles, ets'y cachent en quelque sorte comme dans mille refuges. A Test, il touche a la province de67m;i-^owng',- a I'ouest, a celle du Honan; au nord il s'appuie sur le fleuve Tchang, qui presente beau- coup de dangers. IMoEURs ET couTUMES. Lcs moeufs des habitants , selon Sse-ma-tsien, se rapprochaient autrefois (il y a 2,000 ans) heaucoup de celles cles petits (*) Conferez 1. 1, p. i83. ('*) Tal-tlising-i-tlioting-tclu , k. z8 et ig. CHIjNE moderne. 58 royaumes de Liajig et deLow. Les ha- bitants, selon le meme historien, sont reserves et graves, et attaches a leurs principes. lis sont durs et robustes, et ont I'humeur eniinemment guerriere; les homines connaissent a fond le la- bourage et la culture des mdriers; ils eucouracent beaucoup les etablisse- inents litteraires. Leurs mceurs sont tres-bonnes generalement; eiles sont comme inspirees par le souffle moral de I'antiquite. ViLLES PRINCIPALES: 1° Ta-ming-fou, chef-lieu du depar- tement, ayant 8 li de circonference , 4 portes, et des fosses exterieurs de 23"" P25°>'» (Je largeur, creuses sous les Ming, en 1400 de notre ere, et revdtus de bri- ques en 1535. 2° Tai-ming, chef-lieu de canton, 3 portes; fosses de 3°" 900""" de largeur, creuses sous les Ming. 3° fi-^ei, chef-lieu de canton, 6 por- tes; fosses de 7°" SGO'""- de largeur, creuses sous les Ming. 4° Nan-lo, chef-lieu de canton, 4 portes; fosses de 3"" 150'""'de largeur, creuses sous les Mongols et revetus de briques sous les Ming. 5" Thsing-foung, chef-lieu de canton, 4 portes; fosses de 9"" 450"'°" de largeur, creuses sous les Ming, repares ct re- vetus de briques sous la dynastie ac- tuelle. 6° Thoung-ming , chef-lieu de can' ton, 4 portes; fosses de 18" 900""°, creuses sous les Ming, revetus de briques et repares sous la dynastie actuelle. 7° A'ft?, chef-lieu d'arrondissement ; raurailles anciennes en terre, de 24 li de circonference, 4 portes; fosses de 3'° 150""" de largeur, etablis sous les .Soung. 8° Tchang-hiouen, chef-lieu de can- ton, 4 portes; fosses de 14'" 490""" de largeur, creuses sous les Ming, revetus de briques et repares plusieurs fois sous la dynastie actuelle. Colleges, 12, dont 2 fondes sous les Mongols, et 10 sous les Ming. Population en 1743. Contribua- bies chefs de faniille inscrits, 422,960. Tebres clltivees : 65,888 king .50 nieou, = 392,331 hectares. LMPOTSFONCiEBse/i argent: ZIS, '287 Hang 9 tsi^n, = S,0i6,'2d(i francs. hiPOTS ToycmtiS ennatui'e : millet, 42 cht, on hectolitres ; froment, 42 cAi. MONTAGNES et BIVIEBES : iMontagnes 13, dont I'une est nommee la montagne aii sable d'or; une autre, la montagne des nuages blanrs ; une autre , le sommet de la salle d'etude. A propos de cette derniere montagne, situee a une lieue au nord de Tchang- hiouen, la tradition rapporte que Khoung-tseu y passa queique temps a enseigner sa doctrine. II y a main- tenant un temple fonde sous les Ming, de 1457 a 1465 de notre ere. Fleuves et rivieres, 11, au nombre desquels on compte I'ancien Houng-h6 qui a trois branches (*), le J^P'ei-hd, le Tchang-hd. On trouve aussi dans ce departement le lac Si-h6u, ou lac occi- dental , qui a plusieurs centaines de vieou d'etendue. II est situe au sud- ouest de Kai-tcheou. Dans les anciens temps les eaux s'ecoulaient ; mais elles se sont ensuite accuraulees et ont forme un lac. Antiquites. Anciennes fortiflca- tious de villes, 49. dontun grand nom- bre existaient au temps des Han. Autres monuments, 42, au nombre desquels sont 8 tours ou pagodes dont plusieurs remontent a 3 siecles avant notre ere. DOL ANES 20 Points, 10. La plupart etablis sous les Ming. Digues et jetees 20 TOMBEADX CELEBBES, 30, dont 12 sont de personnages celebres ante- rieurs a la dynastie des Han. Le pre- mier est celui de Thsdng-kie, auquel les Chinois attribuent linvention de leur ecriture (**); il est situe a 35 li a I'ouest de Nan-lo ; on y compte aussi celui de Tseu-lou, disciple de Khoung- TSEU, et ceux d'autres disciples de ce philosophe et de Meng-tseu. Temples, 16, au nombre desquels est celui de Tseu-lou, fonde sous les Ming; la plupart des autres ont ete aussi fondes a la meme epoque. (*) Voy. sur les differenls cours du fleuve Hodng-ho, t. I, p. 373-4. (**) Yoy. sur ce personnage iin ouvrage de l't a 50 lieues sud-ouest de Pe- king; il a 10 lieues de Test a I'ouest, et 9 du sud au nord ; il comprend deux cantons ; il embrasse a I'ouest les monts TaUing. MoEiiRs ET couTDMES. Lcs iDoeurs des habitants sont simples et pures. Les homines se livrent au labourage et a la culture des milriers; iis sont ^conomes et diligents; ils out le ca- ractere eininemment liberal et gene- reux. Villes pbincipales : r Tlng-tcheou , chef-lieu de Var- rondissement , a 2 lieues et 1/2 de cir- conference, 4 portes , des fosses de 31" 500"" de largeur, creuses sous les Ming. r Chin4si, chef-Heu de canton , 3 portes. 3° Kio-yang, chef-lieu de canton ^ 5 portes. Colleges. 3, un dans chaque chef- lieu , fondes tons trois sous les Soung. Population en 1743. Contribuables chefs de fanulle inscrits, i:i6,451. Terres CULTIVEES. 8,360 king 96 meou, =: 49,747 hectares. Impots fonciers en argent, 94,714 Hang 5 tsien, ■= 757,712 francs. Montagnes et bivieres : — Montagues 11 — Fleuves et rivieres 9 1 laCf noinme lac du puits celeste, a 4 lieues et 1/2 au sud-est du chef-lieu de I'arrondissement; il a 6 lieues de circonference. Antiquites. Anciennes villes forti- fi6es, tours, etc 15 Douanes, postes, etc 7 PONTS 4 Digues ET jetees 4 Tombeaux celebbes 3 Temples id 3 Monastebes bnuddhiques. ... 2 Mandabins celebbes 42 HoMMES id 24 Femmes id 11 Anachobetes id 1 Pboduits et industbib. ;ttoffes de soie pour robes, prunes, vases de terre. ir gouvebnement ; le kiang- NAN (*), aujctird'hui provinces de kiang-sou et de NGAN-HOEi. Cette ancienne grande province, qui en forme actuellement deux, est de- criledans la Geographic iinperiale, im- mediatement apres la precedente et celle de Ching-king ou Moukden ( re- servee pour la description de la Tarta- ric et de la Mongolie), quoiqu'elle en soit separee par celle de (Jhantoung. La ville capitaie de cette ancienne province , Kiang-ning , plus connue sous le nom de Nan-king, capitaie du midi, comuie Pe-king signifie capitaie du nord, est a 240 lieues au niidi de Pe-king, et le Kidng-ndn embrasse une eiendue rie 1G3 lieues de Test a Touest, et 170 du inidi au nord. (*) Tal-tImng-i-tIisoung-tchi,V. 37-56. CHINE MODERNE. ft Ce gouvernement comprend seize departemenfs, sept arrondissements et soixdnte-deux cantons; plus quatre arrondissements et cinquante cantons qui ressortissent directement a Tchi-li, ce qui fait 16 villes de I'^ordre, 10 du 2e, et 112 du 3« ; en tout 138 villes for- tifiees. Configuration geogbaphtque. A Test, la nier baigne ses cotes deplus de cent lieues d'etendue, au midi ; elle con- fine au grand Inc {Tdl-hoti) qui la se- pare de la province de Tche-kidng ; a I'ouest, elle est bornee par les provinces du HoA-koudny et du Hd-ndn, et au nord par celle de Chdn-ioHmg . Les princrpales montagnes sont: la monta- gne nommee Tckotmg, situee au nord- est de Ndn-ktng ; la montagne ^od«g' ou jaune, situee a 23 lieues au nord- Guest de Hoei-icheoufoii ; les deux montngnes nommees Liang; eel les nom- mees T.siao^ Hien, et Ho. Les principaux fleuves sont le grand Kidng {Td-kidng), \e H6ang-h6 ou fleuve jnune, le Hoa'i, le Thslng-li6 et le Yiin-hd ou grand canal de transports. Lesprincipaux lacs sont : le Thdo-hoii, qui a douze lieues de cir- conference; le Tdi-hott, qui a 38 lieues de diarnetre, et qui est environne de montagnes pittorcsques. Population en 1743 (*). A. Con- tribuables chefs de famille inscrits des Ai«7 departemcnts et des /roj.v arrondis- sements dependants du receveurou tre- sorier general dela province de Kidng- soii 2,917,707 B. Contribuables chefs de familleins- crits (ieshuit departements et des cinq (*) Dans la description de la provnice do Tc/ii-li, nous avons repiodiiit les sections : P0P13I-ATION et rsiPOTS TERRiTORiAux dc cha- qiie departement , telles que les donne le Tai-i/isiiig-i-tAoiino--tcfii, edit. imp. de 1744, dont nous tiaduisons ce qui nous parait le plus important a connailre. Pourabreger des details qui peuvent etre dune certaine uti- lite, mais qui sont en meme temps fort arides pour des lecteurs europeens, nous nous bor- nerons dorenavant a la reproduction de ces mcmes sections generates pour chaque pro- vince, en y ajoulanl le residiat des recense. menis officiels de 1812, traduits du Tai- thstng-lioei-tien, edilion imperiale de 181 8, pub'.iee a Pe-king-, dont nous donnerons les details a la section du Ministere des finances. arrondissements de la province de Ngdn-hoei 1 ,435,566 Impot TEBBiTORiAL. A et B. Tcr- res cultivees des seize departements et des hint arrondissements dependants des deux receveurs generaux de la pro- vince de Kidtig-soU et de celle de Ngdn- hoei : 1,023,568'' 24'" = 6,090,231 fleet. Terres des colons militaires, 45,032'' 51" = 267,943 hect. Impots fonciers en argent, ensemble 5,248,930 lidng, — 41, 9di MO francs. Argent provenant de diverses sour- ces, 72, 120/. = 576,960 /ronc«. Impots en nature: riz 3,001, 684 chi ou hectolitres. P'roment, 78,712 chi ou hectolitres. Legumes, 3 1 ,728 chi ou hectolitres. Bottes de foin, 28,226. Population en 1812. A. Province de Kidng-soU, individus 37,843,501. B.ProvincedeiV• a Pe-king situe plus au nord. DeTau- « tre cote da Kiang , le chef-lieu est « Sou-tcheou, la plus gracieuse et la « pluspolie des cites. Tout favorise la (*) A.nnales de la Propagation de la foi, septembre 1844, p. 429. M L'UISIVLRS. « nilture de ce beau pays, la fertility n du sol comine i'activite intellijiente « tie ses habitants, les pliiies tVequen- « tes (|uj I'arrospiit aussi hien que les I. iioiiiiireiises rivieres qui le sillonrient « en tons sens. INcnnnioins, ni I'indus- « trie vrainient prodii^ieiise des Nanki- « nois, ni la fecoridite inepdisable du « terrain, ne peuvent sutlire a alimen- « ter la population, qui est encore plus . considerable ici que dans toute au- « tre province. Pour fournir a sa con- « somniation amiuelle, on lire iHie « prande quantite de riz du /lou- « kouang , auquel le Kiang-nan em- • prunte aussi la plupart de ses bois « de construction. » A. DEPABTEMESTS DE LA PBOVINCE DE KIANG-SOU , 8. I" DePAKTEMENT. KlANG-NlNG-fOU ou Ndn-king {*). Ce de.partement, situe a 244 lieuesau midi de I'e-king, a 34 licues de Test a Touest, et 38 du midi au nord; ii com- prend sept cantons. MoEURs ET liSAOES. Le sol de ce departeinent est uni et decouvert, et les flciives qui deseendent des monta- gnes, larites et profonds; c'est pour- quoi les habitants, dans les choses de la vie, attachent be;iucoup d'inipor- tance a ce qui est grave, solide et droit (**). Rarenient ils s'abandonnent a la ruse, au mensonge et a la faussete. Leurs moeurs sont patientes, et le^ let- tres, qui surpassent tons les autres en talents, se font une grande renommee dans I'opinion publique par la purete et {'elegance de leur style. Le territoire est etendu et les talents aussi. Les homnies superieurs appliquent leur intelligence a observer les rites, respec- tent ce qui est respectable; les hom- ines du commuQ appliquent leurs for- (*) Tai-thsing-i-thoitng-tchi, k. 38. (") Oil voil par ce passage , traduil liUe- ralemfiil, tpie les Chiiiois ailribiient une in- fluence Ires-ieelle aux ciimnstances geologi- 3ues et climalcriques sur I'honinie ; et celte ocirine, Ircs-recente en Europe, est fort an- cieniie dans un pay* on Von n'a jamais se- paie riiomnie dc I'ensemble barnionitpie du monde physique et de la solidarile imiver- selle des eires. ces physiques au labourage et k la plan- tation des milriers. Ils ont les mfimes usdiies aujourd'hui qu'ils avaient an- ciennement. \ ILLES PRINCIPALES. 1» Ktdng- - tiing^ ou ISdn-king (*), chef- lieu du departement ; elle a 9 lieues et demie de circotiference (96 //), neuf portes monumentales,plusieurs beaux ponts. — Elle est de figure tres-irreguiiere, si- tueea 60 lieuesde la mer, et a une lieuedu grand (leuve Yamj-tHeu-kiang , qui peut porter des vaisseaux de haut-bord, et qu'o'it remonte depuis quelques annees les flottes anglaiseset fran(;;aises. On non)me aussi cette ville Kia-llng ou la Collitte (for. 2° Kieou-young, chef-lieu de can- ton;l /i de circuit, 5 portes; fosses autour des nnirs d'enceinte. 3" Li-choui, chef-lieu de canton, une demi-lieue de circuit, 6 portes; enceinte de fosses rev^tus de pierres sous les Ming. 4° Kao-chun, chef-lieu de canton. S" Kiang-pou , chef-lieu de canton. 6° Lou-ho, chef-lieu de canton, 6 ti de circuit, 6 portes; fosses creuses sous les Ming. 7" Chang-youen, chef-lieu de can- ton, 6 li de circuit; fosses creuses sous les Ming. La premiere des villes enumerees ci- dessus , la plus grande de I'empire apres Pe-klng, est trop celebre en Eu- rope, pour ne pas ajouter ici quelques detailsaceux, beaucoup tropconcis, que donne la Grande Geographie imperiale chinoise. Le P. Watthieu Ricci, qui la visita lorsqu'elle 6tait encore la resi- dence imperiale des empereurs de la dynastie des Ming, a la cour de Pun desquels il fut admis en 1601 (**), en fait une magnifique description. « Cette ville, dit-il, au jugement des Chinois, surpasse en beaute et en grandeur tou- tes les autres villes du monde. Et cer- tes, elle peut etrejugee inferieure a peu d'autres. Car elle est pleine de tres- grandspalais, temples, tours et ponts : ' toutes lesquelles choses neaninoins (') Voy. dans le t. I, pi. 55, une vue de celte grande ville. (**) L'eniperenr qui regnait alors elait Chhi-tsoung-Uien-it, dernier enipereur de la dynaslie des tMing. Voy. t. I, p. 407-411. CHINE MODERNE. 61 sont presque surmontees par celles de notre Europe de pareille espece, mais elle surpasse eii d'aiitres choses plus les notres. Elle excelle aussi en tem- perature d'air, en i'ertilite de terrain, en bonted'esprits, en douceur demoeurs, en elegance de iangage , et en multi- tude d'habitants de toutes qualites, du vulgaire, des gens de lettres et des ma- gistrats , dont les derniers sont a com- parer a ceux de Pe-king en nombre et en dignite , d'autant plus que I'ab- sence du roi rend cette egalite ine- gale. « Cette ville est aussi environnee de trois murailles ; la premiere est celle du palais royal, en veri*-e tres-magnifi- que. Ce palais est aussi entoure de trois murs en forme de citadelle, et de fos- ses creuses en rond, qui sont tous rem- plis d'eau. II a de circuit quatre ou cinq milles d'ltalie. Et certes j'ose dire qu'il n'y a roi en aucune partdu monde, qui ait un plus beau palais, non-seu- lement conferant chaque partie I'une avec I'autre, mais encore faisant com- paraison du tout au tout. L'autre mu- raille environne derechef ce meme pa- lais et la plus grande et principale partie de la ville. Elle est entr ou- verte de douze portes (il n'y en a plus que nenf maintenant), lesquelles sont garnies de barres de fer et munies de canons places dedans la ville a I'oppo- site d'icelles. Cette seconde muraille comprend pareillement en son circuit dix-huit milles d'ltalie (*). La troisieme muraille exterieure n'est pas continue partout; mais aux endroits oCi Ton a juge qu'il pouvoit y avoir quelqiips dangers, I'art a supplee les defenses de la nature. A peine peut-on savoir com- bien elle a de circuit. Encore qu'en I'en- clos de cette muraille y ait de grands entre-deux de jardins, niontagnes, bois et lacs , neaiimoins la plus grande par- tie d'icelui est tres-peuplee. « Cette seule ville est gardee par quarante mille soldats de garnison or- (*) Ce sont des milles de 60 au degre. Les 18 milles d'ltalie equivalent done a 7 lieues 1/2. La circonfeience de 96 li ou 9 lieues ifi donnee par la Giographie imperiale au mur d'enceinte exterieur de Nan-king, qui est la troisieme muraille decrite par le P. Kicci, n'est done pas exageree. dinaire. La riviere coule vers les parties occidentales d'icelle , et on pourroit douter si I'utilite qu'elie apporte de- core davantage la ville, que la recrea- tion et le phiisir qu'on en tire, ne lui donne de beaute. Et non-seulement elle coule le long des murs, mais encore plusieurs canaux d'icelle, que leurs an- cetres ont artificieuseinent creuses , sont conduits en la ville et donnent en- tree en icelle a plusieurs grands ba- teaux. C'est pourquoi anciennement elle a ete nommee la capitale detout le royaume, et le siege commode des an- ciens rois durant plusieurs siecles. Et encore que le roi ait depuis transporte sa demeure a Pe-king (pour mieux sur- veiller et repousser les Tartares Mant- choux qui menacoient et conquirent bientot son empire), neanmoins cette ville n'a rien perdu de sa splendeur ou frequentation : ou s'il lui defaut quel- que chose, on pent de la juger qu'<'lle a autrefois ete encore plus somptueuse et plus digned'admiration (*). » Le P. Le Comte, qui visita Ndn-king pres de cent ans plus tard , la trouva deja dechue de sa spkndeur. « On voit encore quelques vestiges de ses anclen- nes murailles, dit-il, et il semble que ce soient plutot les homes d'une pro- vince que celles d'une ville. Quand le.s empereurs y tenoient leur coiir, il est certain que le nomhre de ses habitants etoit inOni. Sa situation, son port, la fertilite des terres qui I'environnent, les canaux qui facilitent le commerce, tout cela contribuoit a sa splendeur. Depuis ce temps-la elle a beaucoup de- chu de son premier etat ; cependant si Ton compte ses faubourgs et les habi- tants de ses canaux, il s'y trouve encore plus de monde qu'a Pe-king. Et, quoi- que les collines incultes, les terres la- bourees, les jardins et les vides consi- derables qu'on voit dans son enceinte, en diminuent la grandeur, ce qui est habite fait neanmoins une ville d'une prodigieus€ etendue. « Les rues en sont mediocrement larges, mais bien pavees; les maisons (*) Hisloire de I'expedition chreslienne en la Chine, etc., rcdigee par le P. Trigaut. Tra- duite du latin en fraucais. Paris, 1618, p. 447 et suiv. 6f L'UNIVERS. basses ct propres, les boutiques riches n fournies de toutes sortcs d'etoffes et d'autres oiivra{;cs de prix. C'cst la que les docteiirs les plus fameux et les man- dorins hors de charge vlcnnent ordi- nairemeiit s'^tablir ; les bibliotheques en soiit nombreuses, ct les livres choi- sis; {'impression plus belle; lesouvriers plus habiles; le lanjage plus pur, et I'accent nieilleur que nuile part. « II y a encore diverses choscs qui la rendent celebre parmi les Chinois. « La premiere est le fleuve Ki6ng sur lequel elle est situee (*), ie plus grand, le plus profond, et le plus na- vigable de tous ceux qui arrosent rc/n- pirede la Chine. 11 a vis-i-visde la ville pres d'une demi-lieue de large. « La seconde est I'observatoire royal, place sur une haute colline. On y avoit autrefois pratique une plate-forme et dresse des machines propres aux ob- servations; mais les instruments ont ^t^ transport's a Pe-king, et Ton n'y voit plus que qiielques bStiments an- ciens, et une grande salle cnrr'e, nou- vellement bdtie ea reconnoissance de rhonneur que I'empereur Khanglii a fait a la ville de la visiter. » ToUE DE POBCELAINE , pres de N&n-klng {**). « La troisieme* est la grande tour ou la Tour de porcelaine. II y a liors de la ville, et iion pas au dedans, romme quelques-uns I'ont ecrit, un temple que les Chinois nomment le Temple de la reconnaissance {***), b3li il y a 300 ans (de 1403 a 1425) par I'empereur Young-lo (****). II est eleve O Le P. Le Comle se trompe ; ce n'est pas le K'tdng mfiine qui passe a Ndn-king, inais >in de ses affliieuls; ie grand fleuve Tdkidng en est, coinnie nous I'avons dit, eloigue d'enviroii uue lieue. (") Voy. la Planche i^de ce volume. (•••) En cbinois Ta-pao-ngaii-sse. Le Tem- ple tie la gratitude et de la reconnaissance extremes. Taii/uing-i-t/ioung-lc/ii, k. aq, f» 3 1 verso. (**")C'e»t encore ici uneerrearrc'est pen- dant la peiiode daiinees de legue nommee roung.lo,de L'en.pereur Tailing tsou-wenti, ati Ming, que ce moiiumeut fut reconstruit sur le n.«;nie emplacement ou en exislait ua precedi-nl eleve sous les T^in, de 2 (Macao, niai 1844, p. 262), celte tour aurait juste 829 tela 4 fen 9/10 de hauteur, ou io3 m. 635 mm. Ce qui est beaucoup plus vraisemblable et se rapprorhe de la hauteur approximative don- uee par le P. Le Comte. Lors de rexpeditioi) anglaise de 1842, le lieutenant Filz- James mesura la lour de porce- laine el lui Irouva 261 pieds anglais de hau- teur, et 96 pieds 10 puuces de diamelre a sa base ; ce qui, reduit en metres, donne 79 m. 55o mm. pour la hauteur, et 29 m. aSg mm. de base. Ce genre de monuments, tres-nombreux en Chine, n'y date que de I'epoque de Tin- trodiiclion du houddhisme vers le commen- cement de notre ere. Quoi(|u'ayant pris a quelques egards la forme de rarchileclure chinuise, ces monuments n'en ont pas moins conserve leiir curactere origiuaire d'edifices a uombreux elages (toujours impairs, variant de cinq a treize), represenlant symbolique- menl, dans les idees bouddhiques, les spheres superposees des cieux. On ue trouve plus de ces monuments dans I'liide, ou ils ontete delruils apres I'expulsion des bouddhistes; mais on en a decouvert recemment des ves- tiges dans le Caboul, dans rAfganistan, c'est- a-dire, dans I'ancien empire indo-baclrien, dont la population a I'cpoqiie de leur erec- tion professait la religion bouddhique, la- quelle religion s'est eiendue autrefois dam une graude partie de I'Asie occidentale. CHINE MODERNE. 63 y en a deux, I'un qui nait de la muraille, I'autreqiii la couvre), les toils, dis-je, soiit de tuiles veites, luisantes et ver- niss^es; la charpente qui paroit en de- dans est peinte et chargee de pieces diff'^reniment engagees les uiies dans les autres; ce qui n'est pas un petit orne- meiu pour les Chinois. II est vrai que cette loret de poutres, de tirants, de pi- gnons, de solives, qui regnent de toutes parts, a je ne sais quoi de singulier et de surprenant; parce qu'on concoit qu'il y a dans ces sortes d'ouvrages du travail et de la depense, quoiqu'au fond cet embarras ne vienne que de I'igno- rance des ouvriers qui n'ont encore pu trouver cette belle siniplicite qu'on re- fnarque dans iios batiments, et qui en fait la solidite et la beaute. « La salle ne prend Jour que par ses portes ; il y en a trois a I'orient, extre- menient grandes, par lesquelies on en- tre dans la fameuse tour dont je veux parler, et qui fait partie de ce temple. Cette tour est de figure octogone, large d'environ 40 pieds, de sorte que cha- que face en a quinze. Elle est entouree par dehors d'un mur de mSuie figure, eloigne de quinze pieds, et portant, a une mediocre bauteur, un toit de tuiles ver- nissees qui paroit naitre du. corps de la tour, et qui forme au-dessous une galerie assez propre. La tour a neuf Stages, dont chacun est orne d'une cor- niche de trois pieds a la naissance des fenfires, et distingue par des toils sem- btables a celuidela galerie; acela pres qu'iis ont beaucoup moins de saillie , parce qu'iis ne sont pas soutenus d'un second mur ; ils deviennent menie beau- coup plus petits a mesure que la tour s'eleve et se retrecit. « Le mur a au moins sur le rez-de- chaussee douze pieds d'epaisseur, et plus de huit et demi par le haul. II est incruste de porcelaine posee de champ ; la pluie et la poussiere en ont diminue la beaute; cependant il en reste encore assez pour faire juger que c'est en ef- fel de la porcelaine, quoique grossiere; car il y a apparence que la brique, de- puis troiscents ans que cet ouvragedure, n'aurait pas conserve le meme eclat. « L'escalier qu'on a pratique en de- dans est petit et incommode, parce que les degrds en sont extrSmement hauls ; chaque 6tage est form6 par de grosses poutres mises en travers,qui portent un plancher et qui forment une chambre dont le lambTis est enrichi de diverses peintures ; si neanmoins les peintures de la Chine sont capables d'enrichir un appartement. Les murailles des etages superieurs sont percees d'une infinite de petites niches qu'on a remplies d'ido- les en bas-reliefs, ce qui fait une espece de marquelage tres-propre : tout I'ou- vrage est dore et parait de marbre ou de pierre ciselee. Mais je crois que ce n'eSt en effet qu'une brique moulee et posee de champ, car les Chinois ont une adresse merveilleuse pour impri- mer toutes sortes d'ornemenls dans leurs briques , dont la terre, extreme- merit fine et bien passee, est plus pro- pre que la notre a prendre les figures du nioule. « Le premier etage est le plus eleve; mais les autres ont la m^me hauteur entre eux ; j'y ai comple cent quatre- vingt-dix marches, presque toutes de dix bous pouces, que je mesurai exac- tement; ce qui fait cent cinquante-huit pieds. Si on y joint la hauteur du mas- sif, celle du neuvieme etage qui n'a point de degres, et le couronnemenl, on irouvera que la tour est elevee sur le rez-de-chaussee de plus de 200 pieds. « Le comble n'est pas une des moin- dres heautes de cette tour; c'est un gros mat qui prend au plancher du 8* etage, et qui s eleve plus de trente pieds en dehors. II parait engage dans ime large bande de fer de la meme hauteur, tournee en volute et eloignee de plu- sieurs pieds de I'arbre; de sorte qu'elle forme en lair une espece de cone vide et perce a jour, sur la pointe duquel on a pose un globe dore d'une grosseur extraordinaire. Voila ce que les Chi- nois appellent la « Tour de porcelaine. » Quoi qu'il en soit , c'est assurement I'ouvrage le mieux entendu, le plus so- iide et le plus magniUque qui soit dans rOrient. Du haul de la tour on de- couvre presque toute la ville, et surtout la grande colline de I'observatoire qui est a une bonne lieue de la (*). » (*) Memoires sur l etat present de la Cliine^ par le P. Louis Le Couiie; 3* letlre. Paris, 1701. 64 L'UNIVERS. Lore dc I'expedition anglaisfl de 1842 rfnns les eaiix «le .\dn-king, la tour de porcehiine fut I'objet principal de la curiosile des Europeens, qui endom- majjereiit tellement a coups de marteau el de ciseaii le revetemcnt exterieur en porcelaine, que le pleiiipotentiaire an- glais, si renomnie a juste titre par son esprit de loyaute et d'equite, erut con- fenable d'a'ffecter une somme d'argent pour r^parer les degradations faites a cet edilice (*). Des I'origine, halt chalnes de fer, auxquelles etaient suspendues 72 clo- chettes d'airain, partant du faite de la tour, descendaient sur chncun des liuit angles en saiilie, et de la 80 autres clo- . ehettes etaient suspendues aux angles des toits de chaque etage, depuis le neuvieme jusqu'au premier. Kt en de- hors des neuf etages etaient aussi sus- pendues 128 lampes ; en has, dans le f)avilion octogone, et dans le centre de a pagode, etaient suspendues 12 autres lampes de porcelaine. Au son)met etainet places deux grands bassins de cuivre, pesant 600 kilogrammes, et un vase celeste pesant 300 kilogrammes. Colleges. Cedepartenient en a. . 10 Celui de NAn-king fut foiide en 1381 lous les Ming, pouretrel'etablissement destine a donner Teducation aux Jilsdu royaume, c'est-a-dire aux fils de I'em- pereur et des autres princes du sang. Cette destination lui fut retiree des le commencement de la dynastie tartare r^gnante; it n'a plus ete des iors qu'un college departemental. Celui de Chang- youeii, fonde sous les Soung. de 1034 •a 1038 de notre ere, comme college de- partemental, fut elev^ au rang de col- fege royal au commencement de la dy- ■astiedesjWtn^,- il est redevenu college cjmtonal. Les autres, presque tous fon- des sous les Ming, sont des colleges cantonaux. MONTAGNF.S ET BIVIEBES. — Montagnes 64 Plusieurs de ces montagnes sont re- nommees pour avoir et6 visitees par des empereurs qui y ont laissedes sou- ▼enirs. II y a la montagne blanche {Pe-chAn) , celebre par la retraite d'un (*) Oiinese Repository, mars 184^ Tao-sse; la montagne de*cuivre( ThoHng- cfidn)., ainsi nommee parce qu'autre- fois on en extrayait du cuivre; il y en a plusieurs dans le m^me cas; elle est situee a 7 licue.s au sud-est de ^'dn^ king, ct a pres de 2 lieues de tour; la monta^nedela pagode du phenix '/ownjy- tdi-chdn), sur laquelle est une tour ou pagode de ce nom; la montagne du lac {HoU-chdn), pres de Adn-king, et au sommet de laquelle est un grand lac; la montagne du temple des anc^tres (rsoM- thdng-chdn), a une lieue et demieau midi de Ndn-king, oil un temple de ce nom fut construit sous les Soung ; la montagne de rindien {(hi^n-tchu-c/idn), ainsi nom- mee par suite de la retraite qu'y fit un bonze indien en 675 de notre ere ; la montagne du lac de I'Esperance {Jf-'dng- hou-chdn), etc. — Fleuves et rivieres 17 — Lacs remarquables 17 Grands affluents , canaux , marais , etc 59 lies 11 Antiquites. Anciennes fortifica- tions de villes, 50. Palais, anciens tem- ples , pavilions , forteresses , grandes menageries , tours , autels , arcs de triomphe, residences, etc 102 Dans ce nombre on remarque, « I'Au- tel du labourage » (Kheng-thdn), situe a Test de Cfiang-youen, eleve sous les Soung du nord, Pannee 443 de uotre ere ; <■ I'Autel du genie de la terre et des grains, sous les Tcin » {Tcin-che- tsi-thdn), eleve par I'empereur' yowa«- ti des Tcin (317-323 de notre ere). Ce fut cet empereur qui transporta sa cour ou sa residence habituelle de Uo-nAn- foit, ville departementale de la province du II6-ndn, oil elle etait auparavant, a Kidng-ning ou Ndn-king, ce qui fit donner a ses successeurs le nom de Tcin orientai.'x, cette derniere resi- dence etant plus orientate que la pre- miere. Cet autel est en dehors de la ville nommee Kou-tou, du canton de Chang youen; « V Autel de la terre et du « ciel resplen-iissant » {Ming-thi^n-thi- than) , eleve en dehors de la porte Houng-toou de la ville de Chang-youen, par le premier empereur des Ming ( 1 308) qui, d'apresle Ming-kingfching-tchoH- tchi, « Description accompagnee de car- tes et de plans de la ville capitale des CHLNE ftlODERNE. 65 Miny, » considerait le del comme le pere, et la Terre comme la mere de ceux qui regnent, et qui, ne trouvant aucune difference dans la raison des sacrifices qu'on doit leur offrir, leur eleva un seul et meme Autel, afin qu'on leur sa- crifiat en meme temps et dans le memo lieu ('). Le mole de cet autel a quatre ouvertures, et il est entoure d'uii nuir d'enceinte, rouije,'de peu d'eievation, en dedans duqiiel est un second mur. L'.lu- iel ou mole est eleve au milieu ; au som- met du mole se trouve « le temple des « sacrifices, » devant lequel etait un palais qui est maintenant en ruine (**). (•) Tai-thsing-i-thouiig-tclii, k. 3f) , P la (**) Nous ne pouvous nous empccher de leniarquer ici, a propos dece dernier Autel, than, (pie M. Bazin est encore tomho dans une erreur grave, en prelendant (Preface de sa traduction du Pipa-kl, p. XVI) (pie « do « grandes transformations s'etaie/il ope'rees « e/aiis le ciilte national tics Chinois » sous la dynaslie des Ming, comme, selon le meinc sinologue (Journal asiaticpie, nov. 1839, P- 3{)7, et Appendice a la Irad. de la C/iine de Davis), du temps de Confucius, de grancles alterations avaient etc faites a ce iniiine culte par le philosophe. Nous avons deja prouve ailleurs (Escjiiisse il'une liistoire de la pliilo- sopttie cliinoise, p. 41, I'aris, 1844, el I'ie de Confucius, dans le Dictionnaire des sciences plii/usoplti(/ues, par une societe de professeurs de pliilosophie. Paris, Hachette, 1844), (jue cette derniere accusation (-tail, du nioins en ce (jui coucerne les fails articulc-s, sans au- cune espece de fondemeut. Nous regreltons d'etre oblige de dire que la nouvelle all(:ga- lion de M. Baziii u'est pas mieux fondee. Voici la preuve qii'il doune des pretendues grandes transformations du culte chinois sous les Ming : « Il exislait a Pe-king , <■ dil-il, au comnieucement de la dynastie « des Hing, un temple qu'on appelail Tliien- uji-than, « temple du ciel et de la terre, » « dans lequel chaque annee, au solstice d'lii- « ver, les pelits-fils de (iengiskan offraient ■< des sacrifices au ciel et a la terre. Ce tem- « pie subsisla jusqu'a la 9* anutie Kia-tsing « de la meme dyuastie (i53o), epoque a la- « quelle I'empereur Clii-tsoung institua des « riglements pour les sacrifices distincts que « I'on doit ojfrir au ciel et a la terre. Le « temple commun du ciel et de la terre ful « demoli par ordrc de Clii-tsoung. Ou cons- it Iruisit alors deux \e\m^\QS scpares, le tem- « pie du Ciel et le temple de la Terre. » II 5* Lioraison. (Chine modehne.) On compte aussi dix grandes tours ou plates-formes {thai), aii nombre des- resulte de celte citaliou texfuelle: 1° qu'au commencement de la dynastic des Ming, il existait a Pc-king un temple qu'on appelait temple du ciel et de la terre; 7.° qu'il ful demoli a Pepoque on Clii-lsoung fit rendre un culte dislinrt au ciel et a la lerre. Mais il u'eu resiilte nuUement qu'a cette (jpocpic il se soit operc de grandes transforma- tions dans le culte national, comme le soulienl M. Ka/.in ; la conseciueuce n'esl au- cunenient renfermee dans les premisses. 11 y a mieux : c'csl que Peuipereur C/ii-tsoung, loin de transformer le culte des Cliiiiois ; loin - de lui faire suliir de grandes modifications, ney?^ simplenient (pie de le retahlir, pour le fail en question, dans \a forme primitive (ju'il avail deja sous les Tcheou (Voy. le Tciteuu- li), et que son ancelrc Tai-tsou, le fondaleur de sa propre dynastie, avail, lui, modifie, i54 aus auparavaut, a I'exemple des cmpereurs Kouang-svou-ti des Han, el Htouan-tsoung des Tliang. Ce ful, eu effet, cet empcreur, sorti des rangs les plus obscuis d'un eouveul de I'.oiizes, * qui, aiiisi qu'on le voit par le passage du Ming-king-tcUing-thou-cIti, citi; dans le texle, vraisemljlableineut domin(3 par une pensee boiiddhique , comme les empe- reurs ci-dessus nommes, reunit en un seul le culle du Ciel et celui de la Terre, qui (itaient separes avant lui. Les petitsfils de Gengiskan ne pouvaient done pas, ainsi que le dit M. Bazin, offrir, comme chefs supremes de FE- tat et de la religion , des sacrifices au ciel et a la terre, dans un seul et meme temple, puis- que ces de6x cultes ne furenl reunis qu'apres la chute de leur dynastie. (Je fait est positi- vement afllrme dans le Tai-thsing-i-tlioung- tctii, k. 1, f" 4 verso (edil. de 1744), oil il esl dit, a propos de V Autel Ki-ko-thdn, ou Autel de la priere pour obtenir les fruits de la terre en abondance : ■< Cet Autel est le « Temple de la grande immolation {td-hiang- « tidn), situe dans I'enceinlc de 1' Aulel du Cieh « Cha(jue annee, au commencement de la >< uouvelle lune du premier mois, on y ofiVe re- « verencieusemeul un sacrifice au Chang- ti^ « pour I'implorer en faveur des grains de la «« terre de I'annee. Dans la periode joung-lo « des Ming (i4o3-i425), on reunit en un seul « le sacrifice du Ciel et celui de- la Terre ; ou « construisit ce temple qui lut nomine le « Temple du grand sacrifice {id-ssc-tidn'). « Dans la 9® annee Kia-tlising (i53o), on « divisa remplaceinent en deux parties : I'une « meridionale et I'aulre seplentrionale. Dans * Voy. 1. 1, pp. 376 et 38;. L'UNIVERS. quellfs esl « la tour dii fanal « {Ming ho fhdhy constniite d;ins le 3' sicck- de notre ere, siir uii lieu el^^e pres de Chang-youen; « ies tours de Va lecture des livres de Tchao-ming {Tchad ming Um-chou-iluh), situees, I'uue pres de la m^me ville, et Tautreii une iieiie et de- inie au surest de Keou-yo&ng: « la tour du phenix » {foUng hodng thai), situee au midi de .\An-king, construite fn 437 de notre ere ; la « tour de la jus- tice » (t //tdlQ, situee au sudouest de Kieou-young , et construite sous Ies Thang. On remarque encore parmi Ies an- ciens monuments, le palais du Tdi-ki, ou premier priiicipe des choses {Tdi- ki tlen) (*), situe au nord de Chang- youeriy et construit de 37(5 i\ 397 de no- ire ere; il fut reconstruit de nouveau en 513; il fut brille depuis par des sol- dats, puis reconstruit en 558. DouANES. £tablissements grands et petits 36 PosTES pour Ies mandarins 4 Fonts 41 Digues ET JETEEs 16 TOMBBAUX CELEBRES 58 De ce nombre sont Ies tombeaux de plusieurs empereurs celebres. Temples 28 De ce nombre sont : « le temple du f>hilosophe Khoung-tseu, » situe a 3 ieues a Test de la ville cantonnle de Aao-chnn; le « temple des ministres qui ont eu des merites eclatants » {Ming-komg tchin rnido), fonde en 1 387 de notre ere ; le « temple de Tching , « la partic meridionale, on conslruisit \'Ju- « tel (ill Ciel, et le temple (celiii dii grand sa- « crifice, qui n'elait liii-m^me que celiii du " Ciel et de la Terre reunis) fut alors consa- « ere i la priere, pour oblenir Ies fruits de • la terre en abondaiire, etc. » En rapporlant res autorites, ce n'est pas que nous pretendions ici que le culle chinuis n'a subi aucune modificalion depuis I'originc de la monarchic. Nous ferons connaitre scs vvialions a I'article Culle et Religious r/es Cliinois, de ce volume; nous avons seulement Toulu demontrer qu'il ne faut pas «e hAter de porter des allegations a la legcre sur des passa^ pris au hasard, et qui eu dcfinidNe prouvent le contraire de ce qu'on a vouhi ieur faire dire. (*) Taithsing, elc, k. 39, f 14 veYso. siirnomme Ming-tao, la « raison bril- lante » {Tching ming ido ts('), celebre commentateur des King, fonde en 986; ce dernier est situe a Test du gouver- nement du canton de Chang-youen. MoNASTiiHES. Bouddhiques 19 — Tao-sse 5 De ce nombre est celui dans I'en- ceinte duquel se trouve la celebre « Tour de porcelaine, » decrite prece- «> demment. Un grand nombre de ces monasteres sont situes dims le canton de Chang-youen ; et Ieur londatioii re- monte pour quelques-uns au 4' et au S"" siecle de notre ere. Plusieurs furent visites par le celebre Khang-hi. Ndn-king, renferme aussi beauooup de temples. On en remarque deux grands pres de la porte par oil I'ambas- sade de lord Amherst entra dans cette ville. « Celui dedie a la deesse KivaU' « yinj dit M. Ellis, et appele Thsing- « hai-tsi , ou le temple de la mer « tranquille, est interessant par le fini « precieux des portraits de philosophes « chinois et de saints qui ornent la « grande salle. Quoiqu'au nombre de a plus de vingt, ils sont tous dans des « attitudes differentes et pleines d'ex- « pression. II y en a deux qui , quant « aux traits et aux costumes , ressem- « blent assez aux sages de I'ancienne « Rome. Le pouvoir de I'un est designe « par une bete sauvage rampante a ses « pieds Quelques vases de metal « destines a briiler de I'encens fixe- « rent notre attention par I'elegance de « ieurs formes et le fmi du travail ; « Tun d'eux a beaucoup de rapport avec « Ies vases etrusques , etc. » Mandarins CELEBBEs 82 HOMMES CELEBBES 74 Passagees CELEBRES. Dc cc noin- bre est le celebre poete Li-pe, qui vivait sous Ies Thang. FeMMES CELEBRES 34 AnACHOBETES CELEBBES 18 Produits du sol. Cuivre, fer, toile de filaments de la plante nommee kb; aimaut, ou pierre d'aimant {tseti-cht) ; poissons de differentes especes et en abondance que Ton envoie jusqu'a Pe- king ; etoffes de coton renommees en Europe sous le nom de nankin. Salines <> abondantes sur Ies bords de la mer. CHINE MODERNE. 67 Population en 1743 (*). Contribua- bles, chefs de famille inscrits 209,064. Terres cultivees. Montagnes et marais, 52,614 king 9 m^ou; = en hec- tares Sld,0G2. — Terres des etablissements mill- taires, 11,849 /t. '27 m.=:hect. 70,501. Impots fongiebs en argent. 281,554 /. 6 ts.—enfr., 2,252,432. — en riz, 162,420 ctil ou hectolitres. — en legumes , 3,000 — 2" Departem'^. Sou-tcheou-fou (**). Ce (iepartement, situe a 272 lieues de Pe-king, a 22 lieues de Test a I'ouest et 25 du niidi au nord. Son chef-lieu, Sou-tcheou 1 est a 45 lieues au sud-est de IS'dn-king. II comprend dix can- tons. Configuration geographique. Ce departement jouit du benefice de trois grands fleuves et de cinq lacs ; les trois premiers Tarrosent et le fe- condent ; les cinq derniers I'enrichissent aussi considerablement. II confine a Touest au grand lac Tdi-hoA et au nord au fleuve A'idng. MoEURS ET usages. Lcs hommes distingues sent polis, c'est-a-dire, tres- observateurs des lois de la politesse et des ceremonies; et la foule du peuple n'estguere moins attaclieea ces usages. Les nioeurs sont generalement tres-pu- res. La doctrine du Tao y estflorissante et y entretient la paix et I'harmonie (Histoire des Som). Ce departement est une veritable pepiniere de lettres. Son territoire n'est pas tres-etendu ; les habitants sont tres-actifs, tres-dili- gents, mais aussi tres-peu economes ou (*) Le desir de rentlre aussi complete que possible, dans les limites qui nous sont accordees , cetle premiere statistique etiro- peenne de rempire cliinois , puisee aux sources chinoises les plus aulheutiques, nous a fait revenir sur la deterniinaliou prise ci-devant , page Sg , de supprimer les sec- tions PoruLATiON et Impots tekritoriaux ou FONCiERS des Departements et Arron- uissEMENTS DIRECTS. jVous cspcfons qu'on nous saura gre, en faveur de la science, de cette determination nouvelle qui ne fait qu'ajoulcr, pour nous , des labeurs de plus a des tra- vaux deja suflisaniment ingrats. (**) Tai-tlising-i-tlioung tclii; X. 41-43. parcimonieux. lis sont vains, mais bra- ves, et aiment la prodigalite. Tels ils etaient autrefois, tels ils sont encore maintenant. ViLLES PRTNCIPALES, \° SoU-fcheoU, chef-lieu du departement; elle a 4 lieues et deniie de circonfereuce, G portes par terre, et 5 par eau ; un canal environne son niiir d'enceinte, lequel canal fut creuse sous les Thang en 875 ; il fut recreiise sous les Mongols en 1351, et repare sous le regno de Khang-hi. 2" Kouen-chdn, chef-lieu de canton; murailles d'enceinte de 1 lieue t de circonfereuce; 6 portes par terre, 5 par eau; fosses de 18'" 900""" de largeur, creuses en 13.57 pour constniire le mur d'enceinte de la ville, et revetus de bri- ques en 1539, 3° Sin-gang, chef-lieu de canton., comprise dans I'enceinte de la ville pre- cedente. 4° Tchang-chou, chef-lieu de ca7i- ton; nuiraille d'enceinte d'une lieue en- viron de circonference; 6 portes par terre, 5 portes par eau ; appuyee sur une montagneaunord-ouest,etentoiiree au sud-est de trois cotes par de larges fosses, creuses sous les Mongols. 5" Tchao-wen^ chef-lieu de canton, comprise dans I'enceinte de la ville pre- cedente. 6° JVou-kiang, clref-lieu de canton; une demi-lieue de circonference , 4 portes par terre, 5 par eau; fosses de 9"' 450'°"' de largeur, creuses sous les Mongols et repares sous le regne de Khanghi. 7° Chintsi, chef-lieu de canton., comprise dans I'enceinte de la ville pre- cedente. 8° Tchang-fcheou, chef-lieu d'arron- cUssement. 9° Youen-ho, chef-lieu de canton. 10° Tai-hou-ting , chef-lieu de dis- trict, situe au milieu du grand lac Tdl- hoii. La ville de Sou-tcheou, ou reside le lieutenant-gouverneur du Kidng-ndn, est une des plus belles et des plus agrea- bies villes de la Chine; les Europeens qui I'ont vue la coinparent a Venise, avec cette difference que Venise est au milieu de la mer, tandis que Sou-tcheou est construit au milieu d'une quantite de cours d'eau, qui prennentleur source 5. 68 L'UNI oil qui se prrdcnt dans plusieurs lacs cnvironnants. Cetle villc fait iin srand commerce, iion-seulement avec toutes les proviii- .TS de Tempire , mais encore avec le l.ipoii. Tout ce qui peut servir aux commodites de la vie s"y trouve en abondance. I^s Cliinois out un pro- verl)e qui dit: /v» haut est le temple du del, en bas est Sou-tcheoii et Hang-tchfou (*), dans le TcM-kidng. C'est aussi une des villes cliinoises oil ii y a le plus de lettres, oil il se publie leplus de livres, ft oil ces derniers s'impriment au nieilleur marclie. Ce- pendant les Editions de Non-king sont plus correctes et plus reclierchees des savants. « La ville de Son-tcheou (dit sir G. Staunton , dans sa relation de I'Ambas- sade de lord Macartney) parait extre- ineinent grande et ext'remement peu- plee. Les maisons y sont bien biities et agreablement decorees. Les habitants qui, pour la nlupart, sont vetus de soie, out Pair d'etre riches et heureux... Les Anglais trouvcrent les i'enunes de Sou-tcheou |)lus belles, plus jolies, et v^tues avec plus de godt que la plupart de celles (jirils avaient vues dans le Dord de la Chine. » Colleges. On en coinpte 11, dont cinq sont des ctabli.^sements que Ton noiumc des « den)eurcs litteraires » {clioii youen), dans lesquelles de gran- des bibliolheques sont toujours a la dis- position des nommes studieux. Le college de Sou-tcheou fut construit ea 1034 sous les Soung, de meme que (•) Cliang yebii tlilen thdng ; hia yebu Sou Hang : ce (|ui sigtiilie que Its villes do Sou- Iclitiou el de Hang- tcltiou sont snr la terre ce que le paradis est dans lo ciel. C'tsl la.dii le P. Martini," oil ces gens qui se - rroient ncs pour le plaisir, s'abandounent - au via et aux fenimes avec tant d'e.xces , - qu'ils y perdent souvent la vie. Il y a la •• (juantite de navires qui ne soul destines •• que |)our le sen! plaisir et diverlissenient , •■ tous cnricliis d'or et peinis des cotileurs les - plus vives, plus seinblables a des maisons •■ magniiitpu-s qua des vaisse;iti.\. — In liis hel- • luoues i»li, du-il, ac couibibones Bacclio - Veiiereque »ese nierguut el jierduul. » Les navirti dont parle le P. Marliiii , Its Cliinois le* noninient des l>ateaux de JUun. VERS. ceux de Kouen-chan, de Tcliang-chou , de /f^'ou-kiang,etc.', un seul, « le col- lege ou institut des etudes litteraires » (/AV/i hid chou yonen), situe a Test de 'J'chang-chou, fut fonde par les Mon- gols (en 1332), et deux autres paries Ming (H32 et 1541). PbpuL.4TiON en 1743. Contribua- bles chefs de famille inscrits, 463,846. Tebres cultivees. 62,6C5 a. 39 wt. = /lect.^ 372,856. Impots fonciers en argent , 668,392 /. 7 ts. =fr. 5,347,136. — riz, 901,070 hectolitres. — ble, 1,765 — — legumes, 662. — MONTAGNES ET RIVIERES. Montagnes 52 Fleuves et rivieres, dontle principal est le grand Kiang 4 Lacs 16 De ce nombre est le grand lac nomnie 7cii-hoA, situe sur la liinite sud-ouest du departement de Sou-tcheou, I'un des plus celebres de la Chine. On donne a sa superficie une contenance de 36,000 king ou 214,200 hectares. C'est de ce lac dont parle Staunton quand il dit : « A pen de distance de Sou-tcheou est le superbe lac de Tai' hou , environne d'uue chaine de mon- tagnes pittoresques. Ce lac fournit beau- coup de poissons aux habitants de Sou-tcheou j et, en outre, il est pour eiix un lieu de rendez-vous public et d'amusement. Beaiicoup de canots, qui servent aux promenades de plaisir, sont conduits par une seule feinine. Chaque canot a une chambre tres-propre ; et on pretend que celles qui le conduisent exercent plus d'une profession. » Ce lac est horde, a Test, d'un pays fertile et romantique. Les montagnes y sont cultivees jusqu'au sommet. Le grand canal de transport {Yi'm- hd ) traverse aussi ce departement avant d'arriver a Ndn-king. Antiquites. Anciennes fortifica- tions de villes 30 Autres monuments anciens. ... "63 De ce nombre sont 6 tours anciennes, dont Tune « la tour de I'ancien Sou » {Kousou thcii), domine le lac Tdi-hou. On lui donneSOO /c/jansf de hauteur (*), (*) Tai-tliiing'i-tlioung-tchi. k. 4i. f a5. CHINE MODERNE. et de son sommet la vue s'^tend a 30 lieues de distance ; 9 temples {fhdng), dont Tun se nomine le « temple des trois sages » et I'autre celui des « qua- tre sages. » DouANES, grands et petits etablisse- ments 33 PoNTS, dont un grand nombre fondes sous les Soung. 37 Un de ces ponts, construit en pierres sur le Grand canal, a quatre-vingt- dix arches. Digues et jetees 4 ToMBEAUx CELEBREs. Depuis le commencement de la monarchie. • • 68 Un de ces tombeaux appartient a la dynastie des Chang (1783—1134 avant J. C), treize a celle des Tcheou{llo4 — 255), et quatre a celle des Han. Temples. On en compte 41. Dans ce nombre on distingue le « temple de la supreme vertu » {tchi te mido), fonde sous les Han (147—168 de notre ere); le « temple des sages eminents » {si^fi /lien tsi), situe dans I'enceinte du col- lege de Son-tcheou, et dans lequel on offre des sacrifices aux lettres les plus eminents des dynasties Tliang, Soung et des Youan/te\s que Ngheou-yang- si^ou, Sou-che ; le « temple de Tcheou- tien-ki, « celebre ecrivaindu temps des Soung, fondateur du fameux systeme de philosophie de la nature, intitule S^ng- li (*) ; le «temple des deux Tching-tseu, » disciples du philosophe precedent, et niaitres de Tchou-hi. Le premier de ces temples est situe dans le lieu de nais- sancede Lien-ki, du canton de Tchang- tcheou, et le second est situe a Test de Hou-kieou. IMoNASTERES bouddhiqucs 71 Instituts bouddbiques 4 Monasteres des Tao-sse 7 Cloitres de femnies des Tao-sse. 7 ces derniers fondes sous les Soung et sous les Ming. La tradition fait remon- ler la fondation du monastere Tao-sse de la » supreme verite » {c/idng tchln koudn) au commencement de la dynas- CeUe hauteur est nccessairement ideale, car en donnaiit au tcltdng 3m. i5a mm., elle aii- rait 945 m. Ue hauteur, ce qui est impossi- ble. (*) Voir ci-apres la section : Philosop/iie chinoise. tie des Han, 200 ans avant notre ere; les autres sont du temps des Liang , des Thang, des Soung et des Mongols- Parmi les 71 monasteres bouddbiques on remarque le « temple de la grati- tude et de la reconnaissance -> {pao- 7igdn-sse), situe a Tangle nord du chef- lieu du departement, et fonde dans la premiere moitie du 3* siecle de notre ere ; « le monastere de I'Inde ou indien » {si tchu sse), situe au sud-ouest du can- ton de Ou, construit sous les Thang ; le « monastere des dix mille vies » {wen cheou sse), situe au nord-est de Sou fcheou; le « monastere des accu- mulations precieuses » {pdo thsi sse) , fonde de 502 a 520 de notre ere; le <• monastere de la foret des lions » {sse- tseii Un sse), et celui de la double pa- gode {chodng thd sse), fondes le pre- mier sous les INIongols , et le second sous les Thaiig (de860 a 874); les deux pagodes furent construites en briques cent ans plus tard. — II n'est peut-etre aucun departement de la Chine dans lequel il existe autant de monasteres que dans celui qui nous occupe; ce fait est digne d'attention. IMaNDARINS CELEBBES.. 100 HOMMES CELEBRES 222 PaSSAGERS CELEBRES 15 FeMMES CELEBRES 42 Anachoretes. Depuis les Han. 7 PrODUITS et INDUSTRIE. EtoffcS de sole brochee et autres de differentes especes , dont quel(jues-unes a fleurs sans couleurs; damas, taffetas, crepes, nankin, toile, souliers de roseaux; lan- ternes; argile blanche; pierre a broyer I'encre; pierres du lac Tdi-hofi ; pois- sons de diverses especes; riz d'eau; plusieurs especes d'oranges; poires et chStaignes aquatiques. 3« Departement. Soung-kiang- FOU (*). Ce departement est situe a 295 lieues au midi de Pe-king, a 62 lieues au sud- est de Nan-king ; il a 16 lieues d'eten- due de Test a I'ouest, et 15 du midi au nord. II comprend huit cantons. Configuration- Ce departement confine d'un cote a la mer, et de I'au- tre au grand fleuve Kidng; le sol est (*) Tai-tlising-i-tltoung-ichi, k. 44. ft L'UNIVKRS. {;en €^ b«en arros^ par 7° Hoa-iing, chef-lieu de canton. es eaux. 8" Leou, chef-lieu (lecfl??^o?j. Mociins ET Ui^AGKS- Les liabitants 9" Sinijaiuj, chef-lieu de canton. de CO departemeiit aiinent beaucoup a Colleges. On en compte 11. sedistin^uprdesaiitre.s,priiicipalenient lis out etc fondes sous les 5oMWf/, crux dii canton de Uoa-tiny ; c'cst pour- sous les Mon.^ois, sous les Ming, et quel- qiioi les leltrcss'elevejitaiixdegresemi- ques-uns sous la dynastje regnante. ncnts d.iiis Jes eludes. La population De ce nombre est « I'institution de la est tres-portee a la bienfaisance. Les denieure de Khoung-tseu, » au nord de mandarins lettres y jouissciil d'uudoux la ville cantonale de Thsing-pou. A.n- loisir; le peuple se livre avec assiduile ciennement 11 y avail dans le menie eni- ct beaucoup de perseverance aux tra- placement un temple dedie au celebre vaux du laboura^e et au tissage des pliilosophe. Lc college date du temps etoffes; il se livre aussi avec la plus des Soiing. Sous les Mongols un liabi- grande ardeur au connnerce du sel et tant de I'endroit, nomme Tchang-pi, du jwisson, pour en tirer des profits. fit reconstruire I'ancien temple. ViLLEs PRiNCiPALEs. 1" Souug- POPULATION cu 1743. Contribuablcs A/an^, chef-lieu duf/e/jor/6'Wien/, a pres chefs de famille inscrits, 215,196. d'une lieue de circonierenre, 4 portes; Temhes cultivees, 40,875 k. 48 m. murs et fosses de 31'" SOO'""" de largeur = hect. 243,206. creuses sous les iV/?<'. 4,201,968. naux', et qui a des relations frequentes — oi riz 443,296 hectolitres. avec le Jupon. Montagnes et biviehes. 2" Founghien^ chef-lieu de canton, Montagues 22 4 portes ; murs et fosses. Fieu ves et rivieres 7 3" Kin-ctian , chef-lieu de canton, 1 2 Lacs 6 // de circonlVrence, 4 portes; murs et Les petits cours d'eau et les niarais fosses de 37°" 800""" de largeur. sont tres-nombreux. 4" Chang-lial, chef-lieu de canton , Aintiquites. Anciennes fortifica- neuf// decirconterence, 6 portes; fosses tions de villes 10 de 18"' 900""" de largeur, creuses sous Autres monuments divers 37 les Ming. — Ville maritime trescom- Parmi ces derniers, on doit distin- mercnnli! situee a quelques lieues du guerla maison de A7io6«g(-foeM,situeea tleuve Wou-soung iff^ou-soungkidng), neuf /i au nord de la ville de Thsing- sur lequel est un port de ce noni ou les pou. Cette ancienne demeure du plus Anglais lont claadestinement le com- grand des philosophes chinois est au merce public de Vopiion. Elle fait un nord de la riviere King; le temple de- 81 grand trafic de toiles de colon, que die au meme philosoplie est au uiidi. plus de 200,000 tisserands sont coiiti- Le celebre empereur Khanglii visita nuellementoccupesa les confectionner. ces veuerables antiquites, l£> 4Q* annee . Le port de C'haug-hai est un des de son regne (en 1705). c/«7 ports chinois ouverts au conunerce Douanes, campements, etc 30 europeen par le traite de Adn-king, Ponts, etablis sous les Soung , les du 27 octobre 1842 , et apres celui de Mongols , les lilitig 14 Lantoii, c est le port chinois ou il s'est Digues et jetees 4 oper6 le plus de transactions commer- De ce nombre est un grand marais caiBs dans ces dermeres annees. Voy. salant, creuse de main d'honmie, et j'V^f.'} s«'<^'tion intitulee Commerce que Ton nomme Hai-thdng, le « ma- ilektUnneareciLiu^npr rais de la mer. >. II est situe au bord npni- -;.""•"'' .^'^•''■''«" 2. = en hect. 370,982. Impots fonciees , en argent : 580,072 /. =/r., 4,(i40.576. — en riz , 356,032 hectolitres. — en ble, 7,975 — IMONTAGNES ET RIVIERES. Montagues 51 Fleuves et rivieres 12 De ce nombre sont le Kidng et le YUn-hd, ou grand canal de transport, qui, venant de Sou-tcheou, coule au nord-ouest du canton de Pf^'oii. Grands lacs y compris le Tdhhou. 9 Antiquites. Anciennesfortifications de villes 23 Autres edifices et monuments an- ciens 33 Dans ce nombre on distingue le « temple deslivres publics » du celebre poete Li-ta'i-pe , qui vivait sous les Thang et qu'il a chantes dans ses vers {Li koTttng choii thdng), situe non loin de ff^^uii-ijang ; la « plate-forme de la perspective du lac » {Wdng hoti, ko) , pres du m^me lieu, elevee aussi sous les Thang. UouANES. fitablissements divers, 26 PONTS principaux 9 Digues et jetees 11 TOMBfeAUX CELliBRES. Depuis ICS Tcheou , 30 Monaster F.s. En tout .G Mandarins CELi5BRES 83 HOMMES CELJiBRES 210 PaSSAGERS CELEBRES 6 FewMES CELi-:BRES 36 Anaghoretes 10 9$ L'UNI PlODUiTS ET INDUSTRIE. Taffetas rroises, toiles, argent nomine ou, em- ploy^ (Jans I'orfevrerie, vases de fonte , sonliers ou sandales de roseaux , nattes pour se couclier, thd, papier, cire, pois- sous, petit insecte qui devore les livres, poterie tres-estiinee, fabriquee a /- /ti>ig,et qui rend I'eau qu'elle contient d"un goilt tres-agreable. a* Dbpabtement. Tchin-kiang- FOO (*). Ce d^partement est situ^ a 18 lieues un peu au nord de Nan-king et a 233 lieues de Pi-Mng. 11 a 22 lieues de Test a I'ouest et 13 du midi au nord; il comprend quatre cantons. CoNFic.URATiON. II est entourc de fleuves et de niontagnes comme d'une ceinture. Les niontagues lui torment des reniparts et les fleuves des limites naturelles. McEUBS ET USAGES. Lcslettres ainsi que les magistrats de ce departement, jipres avoir occupehonorablement leurs emplois, retournentdans leurpays purs et consideres. lis ont de la noblesse dans leurs sentiments et de la regula- rite dans leur conduite. Le peuple tout entier se conforme aux lois de la poli- tesse et des rites prescrits. II conserve son etat sans cherchcr a se faire une nieilleure place aux depens des autres par la ruse ou la violence. ViLLES PBINCIPALES. 1° Tcldll- kidng, chef- lieu du departement , a environ une lieue de circonference , 4 portes, 2 douanes sur la riviere, des fosses repares sous les Ming, et de nouveau dans le siecle dernier. Cette ville, quoique petite, doit a son heureuse situation pres du grand fleuve Aid/ig, qui a, dans cet endroit, une demi-lieue de largeur, d'avoir un commerce considerable et d'etre une des places les plus fortes et les plus importantes de I'enipire. Ses murailles ont 10 metres d'elevation et sont cons- truites en briques. Les rues de la ville sont pav6es de marbre, ainsi que celles des faubourgs, qui sont tres-peuples. Les medecins de Tchin-kiang sont tres- renommes parmi les Chinois. T Tan-ijang, cbef-lieu de canton, (*) TaUtluing-ithoung-tclii, k. 46. VKRS. environ une lieue de circuit, 6 portes par tcrre et 2 par eau, fosses de peu de largeur creuses sous les Ming. 3" Li-yang, chef-lieu de canton, 4 portes par lerre et 2 par eau, fosses de lo" 750""° de largeur, creuses sous les Ming. 4' Kin-than, chef-lieu de canton, C portes par terre, 2 par eau , fosses de G"' 300'"'" de largeur. 5" Tan-tou, chef-lieu de canton. Colleges et autres grands etablis- sements litteraires 9 Les premiers, au nombre de quatre, ont ete fondes sous les Ming; les der- niers I'avaient ete sous les Soung. Population en 17-13. Contribuables chefs de faniille inscrits, 138,176. Terres cultivees, 5,750 k. 12 m. = hect. 301,962. Impots fonciers en argent : 313,120 /. 8 ts. =fr. 2,404,960. — en riz , 217,005 hectolitres. — en ble, 6,277. — Montagnes et rivieres. Monta- gues 63 De ce nombre est la « montagned'or » {Kin-chdn), situeeau milieu du grand fleuve Yang-tse-kiang, et qui presente I'aspect le plus pittoresque. Les herds tres-escarpes sont couverts de jardins et de maisons de plaisance. Fleuves et rivieres, 8, y compris le Kidng et le grand canal de transport, Yun-li6, comme pour le departement precedent. I^acs 6 Antiquites. Anciennes fortifica - lions de vilies 12 Autres monuments auciens , dont 3 pagodes 41 Douanes et autres etablissements, 20 Fonts. On en compte 17 PosTES pour les mandarins en voyage 3 Digues ET JETEES 15 ToMBEAUx celebres. Sepulcres et tertres eleves d'empereurs 10 — Tombeauxd'hommes celebres, 26 Temples. On en compte 11 MONASTEBES bouildhiques 10 — tao-sse 4 Au nombre des premiers est le «mo- nastere de la colline d'or, » situe au sommet de la montagne de ce nom, fonde du temps des rein (de 265 a 420); CHINE MODERNE. 73 ce monastere est d'une grande magnifi- Villes pbincipales. 1° Hoai- cenceet renferme des temples ornes de gan, chef-lieu du departement , a 3 statues dorees de la plus grande ri- enceintes entourees de murs et de fos- chesse. 11 tut visite par I'empereur ses : la premiere, ceile du midi , que Khang-hi, lors de son voyage dans Yon nomme \si vieille eticeinte, fondee les provinces meridionales de la Chine, du temps des Tcin (265-420), reparee II I'a ete aussi receinment par plusieurs • sous les Soung ( de 960 a 1 120), et re- Europeens qui out ete enchantes des vetue de briques sous les Ming (1370), sites pittoresques dont on y jouit et de a une lieue et plus de circonterence, et I'urbanite des Bonzes qui I'habitent. des murs hauts de 9'" 450'°'" ; 4 por- Les autres monasteres, fondes egale- tes par terre et 2 par eau. L'enceinte inent, les uns sous les /"cjn, les autres du nord , eloignee d'un li de la pre- sous les Soung et les Ming, occupent miere , et que Ton nomme Venceinte aussi des positions tres-pittoresques. nouvelle , construite en terre sous les Mandarins celebees 73 Soung, reparee sur la fin de la dynastie HOMMEs CELEiuJES 72 mougole, et revetue de briques sous les Passagers celebres to Ming, a 7 li et plus de circonference, Femmes celebres 20 8"" 820""" de hauteur, 5 portes par terre Anachoretes celebres 3 et 2 par eau. f^ntre ces deus enceintes Produits et INDUSTRIE. Taffetas est la troisieme, construite en 1560 de brode, toile, instruments et vases de notre ere (qui sert a relier la vieille en- cuivre, fer, poissons, cerises, etc. ceinte a la nouvelle), ayant 4 portes par _e T. , TT •• /*N terre et autant par eau. La vieille en- 6 Departement. Hoa.-gan-fou(*). ^^-^^^^ ^^^ contigue, au midi, au grand Ce departement, situe a 50 lieues canal {Yiin-h6); la nouvelle Test , au au nord de Nan-king, a 197 lieues de nord, au fleuve Hoai, et a un fosse de Peking, a 44 lieues de Test a I'ouest , i2"' eOO'^^de largeur et de 3" 780°'"" de et 26 du midi au nord ; il comprend six profondeur. cantons. 2° feou-ning, chef-lieu de canton. Configuration. Les cours d'eau et 3° Yen-iching, id. les collines s'entremelent tenement sur A" Thsing-ho, id. le terriloire dece departement, que les b° Ngan-toung, id. parties les plus arides sont arrosees et g" Tsiao-ijouan, id. offrent des produits abondants a Tin- 7" Chan-yang, id. dustrie avide de gain. Des barques ou Le canton de Yen-tching, ou « de hatiments de transport circulent par- « la ville au sel , » situe sur le bord de tout sur les fleuves et les canaux. A la mer, est, comme I'indique son nom, Test, ce departement est baigne par la tres-riche en salines. mer, et il confine a la province de Colleges. On en conipte 7, un dans Ckan-toung; il est traverse par le fleuve chacune des villes enumerees ci-dessus, Jaune. fondes sous les Soung, les Mongols et les MOEURS et usages. Les habitants ji/mgf; plus 3 institutions litteraires eta- de ce departement sont braves et cou- hiies dans le chef-lieu du departement, rageux, mais ils ont des habitudes que- jont 2 fondees sous les Ming. relleuses. Cepeudant ilssont reellement Population en 1743. Contribua- tres-attaches a la justice. lis se livrent bles inscrits, 272,146. avec beaucoup d'ardeur au labourage et Terres cultivees, 90,753 k. 63 ?n. au sarclage des champs-cultives. Quoi- = /lect. 539,980. que les mceurs du plus grand nombre Impots fonciers e}i argent : soient frivoles et legcres, les lettres 186,723 /. 3 ^v. =/r. 1,493,784. couservent un niaintien grave et com- — en riz , 69,281 hectolitres. pose. Petit a petit, dit I'ecrivain chi- — en ble , 0,009 — nois, les saintes habitudes penetreront IMontagnes et rivieres. Monta- dans la masse, qui acquerra peu a peu gnes, 3 , dont une est nommee la mon- ies mceurs des lettres. tagne de Lofi-tseu. (*) Tai-tlisiiig-i-tlioK/ig-tc/ii, k. iT-zS. Elcuves et rivieres?" 30. De cc Dom- 74 L'UNIVERS. bre, sont : la ttier. comme baipnant il est arrose par un grand nombre de les cotes de llaitcheou a Gan-toung; cotirs d'eau. le Uodna/io oii flcuve Jaime, qui a IMoeubs et coutumes. Les habi- plusieiirs branches et dont les digues taiits de ce departement ont ete sur- sont d'nn entretien fort coilteux ; le nommes les vanilenx {/dn-tchi); lis lioai-ho, qui a donne son noni au de- ont les niocurs legeres , et ils reeher- partenient,etle ) /J/i-/irfou grand canal. • client les plaisirs avec exces. Cepen- Ces flenves et c.inaux sont decrits tres dant lis aiment aussi Tetiide, et culti- au long dans la Geographie imperiaie. vent la litteralure. Le peuple des cam- Lacs. On en conipte 17. L'un de ces pagnes se livre au labonrage et au lacs, le //oM/i^ onl l)Ali |)oiir « i'empereur une maison de plaisauce, qui 7' DkPABTEMKNT. YANG-TCHEOU- .siirpreud d'aulaiil plus, qHejusqu'aiors oil FOU (*). « n'a rien vu qui I'egale. Cesl la copie de Ce departement est situe ;i 21 lieues " f^"'-"''''. autre uiaisou de ph.isance a deux J . I , . ,j . n„_ |. «\\^uti UQ Pe-kiiig, oil 1 enipereur demeure aunord^estdeArm^A-H^, a 227 leues . o,.dinairement , S dont le' F. Auiret, eel de Pe-king; i a 47 lieues de est a „ ^,,,„,„i („,,, j , „,^ ,,,f„,er le bou- I ouest et 30 du sud au nord ; il com- ..,„„ ,,j. ,Juja,in, a douu6 une belle des- prend deux arrondissemenls et six can- „ crintion. '^'*'"''" « La niuison de plaisaiice de Yang-lcheott ConfigubatiON. Le sol de ce de- . occi.pe plus de terrain que !a ville de Reii- partement est tres-uni et decouvert, et ..nes. C'est un amas de monlicules et de a rochers qiruu a eleves a la main , de val- (*) Tat-tUsing-i-thoung-ichi, k. 4f)-5o. « Ions, de cauaux, tanlot larges, tanlol etroits, CfflNE MODERNE. - 9f 2* I-tching, chef- lieu de canton; Montagnes bt biviehes. Monta- une lieue de circonference , 4 pontes, giies 25 fosses creuses sous les Soung, haute Fleuveset rivieres, 25. Dece noinbre totir ou pagode. sont : la mer, comiiie baignant les c6- 3° Kao-1/u, chef -lieu A'arrondisse- tes des salines du departement prece- ment, une lieue et plus de circoufe- dent jusqu'au nord-est de 7V«-/c/i'/), section de la Gdographi';, est confirmee de marbre comniuu... Les appartements des par i'ancien et celebre voyafjeur europeen preires soni propres el commodes... La tour Marco-Polo, qui dit presque dans les memes (ou pagode) a sepl elages; les dimensions en termes, en parlant des habitants decedepar- sont desagri'ables a I'ffiil , sa hauteur n'elant tement, nonnne par lui province de Succu'ir, pas proportionnce a sa base; chaque cole a « Vivunl autem de fruclu terra", nee inlro- Irenle pieds d'elevalion. » .. mitluut se de mercalionibus; •> ou , comme (") y**?'- V I» p.34t et suiv.; et Wm. s'exprime la vieille version francaise : lis tiir les Chinois, I. X, p. 70-1. vivcnt du front qu'ils traieut de la terre , ( **) U)id. , p. 343. TOt'j de mercandies ne se travailent-il guleres. CHINE MODERINE. 77 voitiires et des chevaux que du cote du inidi, ou il y a des fosses de 6'" 300""° de largeur et autant de profondeur. 2° Siao , chef-lieu de canton, 4 pon- tes, fosses de 22™ de profondeur, qui communiquent au midi avec les eaux d'un lac et qui furent creases sous les Ming. 3" Yang-chang, chef-lieu de canton., 3 portes par terre , 2 par eau ; fosses de 15'" 750'°'° de Jargeur, creuses sous les Ming (1600). 4° Foung., chef-lieu de canton., 4 por- tes, elevees eii 1551. 5° Pe'i, chef-lieu de canton, 4 portes ; fosses de 6 '" 300""" de largeur, creuses en 1543. 6" Pei-tcheou, chef-lieu d'arrondisse- vient, 4 portes. ■^ T Sou-tsien, chef-lieu de canton, 4 portes. 8' Chouhnvig, chef-lieu de canton., 4 portes. 9° Thoung-chdn, chef-lieu de can- ton , 4 [lortes. Colleges. On en compteO, distri- hues dans chacunedcs villes enumerees ci-dessus ; plus 5 etahlissements litte- raires , la plupart fondes sous les Ming; en tout 14. Population en 1743. Contribuables chefs de faniille inscrits, 238,371. Terrescultivees, 126,118/i;. 31 ni. = hect. 750,402. Impots fonciers en argent : 235,338 /. =f)\ 1,882,704. — en riz , 66,715 cht ou hectolitres. — en ble, 19,921 — ; MONTAGNES ET RIVIERES : Montagnes 60 Fleuves et rivieres 16 De ce nonibre sont le fleuve Jauue et le grand Canal de transport. Lacs 9 Antiquites. Anciennes fortifica- tions de villes 42 Autres monuments 27 De ce nonibre sont 5 anciennes tours {thai) , dont Tunc , « la Tour de I'air comprime » {Ye khi thai) , situee dans le canton de Foung, fut construite par I'enipereur Thsin-chi-hodng (V. t. F' , p. 208 et suiv.) , ce qui lui a fait aussi donner le nom de Tour de Thsin. On trouve egalement, parnii ces antiquites, « I ancienne demeure de Kao-tsou •" ou du fondateur de la dynastie des Han {Ilan-Kao-tsou kou-tse) , situee dans le canton de Foung. DOUANES 18 PosTES pour les mandarins en voya- ge 7 Points 22 Digues et jetees 17 Au nombre de ces digues sont celles du IIodng-h6 ou « fleuve Jaune , » qui traverse le departement dans sa plus grande etendue , et celles du « grand canal de transport {Yim-hd), » dont la Geographic imperiale donne nne des- cription historique (K. 51, f° 31 et s.). Ce sont des ouvrages tres-considerables et d'un grand eniretien. TOMBEAUX CELEBRES 26, dont 6 remontent a la seconde et a la Iroisieine dynastie. Temples de noms differents. . . 17 Deux de ces temples sont eleves en I'honneur de Kao-tsou., fondateur de la dynastie des Han., et de Koiiang- won, autre empereur de la nieme dy- nastie ; il y en a ineme quatrCi en dif- ferents endroits, dedies au premier de ces empereurs, ne dans un village du canton de Pei, de ce departement. Un autre de ces temples, situe a 3 lieues au sud-ouest de la ville cantonale de Siao, est dedie au « second saint » {Yd ching mido), c'est-a-dire, au philosophe Meng-tseu, le second., apres Khoung- tseu, dans I'eslime des Chinois. IMONASTEHES. Bouddhiqucs. . . 11 Id. Tao-sse 2 Ces monasteres ont ete fondes sous les Thang , sous les Kin , les Mongols et les ^Fing. IMANDARINS CELEBRES 77 HOMMES id 148 Yoyageubs id • 7 Femmes id 24 Anachoretes id 9 Dans ce nombre on compte Youen- tseu, disciple de Lao-tseu, qui vivait sous les Tcheou, et qui avait compose un ouvrage philosophique en treize li- vres ; Ho kouan-tseu, autre philosophe de la meme ecole , qui habita la mon- tagne nommee Chin (*). PrODUITS et INDUSTRIE. Cc dc- (*) ^^J- ci - apres Pliilosophie ciduoese , secliou Ecole du Tao. 79 L'UNIVERS. partemcnt produit du fer; on v fa- 1 lieue environ decirronference; 4 por- brigue du taffetas de sole a fleiirs, on y tes par terre et 3 par eau. trouve des pierres veinees de plusieiirs 3" Pao-cMti , cliet-lieu de canton; teintes, des terrcs des cinq coiileiirs 4 portes. (oH-sseUhoii), du charbon mineral {chi- 4" 'J'chin-yanf/, chef-lieu de canton, f/,a„), ii" Tsoung-ining, ciief-lieu de cant.^ AkhondissementsduKiang-nan, 5 portes; fosses de 9"" 450""" de largeur, ressortUsant directement au gouver- construits sous les Ming et repares nemeiit central (*). sous Kliang-hi. r Tai-tsano-tcheou. Get arron- Cette ville est le chet-lieu de I'lle de dissement est situe sur le bord de la ee nom , qui a environ 5 a 6 lieues de iner .laune, a 66 lieues au sud-est de longueur, 2 lieues de largeur, et a la- Ndtirklng, a 284 lieues de Pe-klng : il uuelle M. Gutzlaff (*) donne 2,000,000 a 21 lieues de Test a I'ouest, et 10 d'babitants. Une partie de Tile est ein- du midi au nord; il a plusieurs iles ploy^eexclusivennent a la culture du riz, dans sa juridiclion , entre autres celle une autre a la production de diverses que Ton noinnie Thsoung-ming, sepa- sortes de grains, etune troisieine, tota- ree du continent par un bras de nicr lement iniproductive en vegetation , peu profond , qui n'a pas plus de 5 ou fournit d'enornies quantites de sel , G lieues de lariieur. Cette ile est re()re- dont une grande partie est exportee. sentee sur les cartes cbinoises coninie Les habitants de cette petite ile sont entouree d'une multitude d'autres iles ties-industrieux ; lis sont d'excellents de sable, ce qui ferait penser que toutes peehcurs et de bons marins. ces iles sont dues aux sables charries Collegks 6 par le grand lleuve A king, quoiqu'elles Celui de Tsoimg-ming, situe au sud- soient situees assez loin de son embou- est et en dehors des fosses de la ville, chure. fut fonde en 1622 de notre ere. II est dit dans la Geographic impe- Population en 1743. Contribuables riale (R. 53, f" 9, v"), qu'anciennement chefs do famille inscrits, 186,078. cette ile etait une terre de sable au Terrks cultivees et maiiais : milieu de la mer. Ce ne fut que sous 35,016 k. 09 m. = liect. 208,344. les Soung, de 1208 a 1225, que Ton Impots fonciebs en argent : comujenca a y etablir des salines. 329,165 lidng =fr. 2,633,220. Get arrondissement coraprend 4 can- — en 7iz , 160,997 chi ou liectol. tons. — en ble, 6H — Mgeurs et coUTUMEs. Les habitants — en legumes, 229 — de cet arrondissenient maritime redou- Montagnes 7 tent beaucoup les chiUiments presents Rivieres 4 par les lois. lis bonorent la litlerature, Antiquites 17 a laquelle ils rougiraient de ne pas at- Douanes et autres etablissements tacher de rimportance. Les lettres ne de ce genre 22 se livrent a aucun travail corporel ; Plusieurs sont des postes militaires les gens du peuple pratiquent Tagricul- destines a proteger la sdrete publique, ture et le commerce. Leurs habitudes et d'autres a prelever les droits sur le sont ran-ees, et ils respecient facile- sel. ment I'opiuion publique. Qiiand le pays Po>ts 10 est tranquille , ils n'aiment pas a voya- La plupart fondes sous les Sounq et ger au lorn. les Mongols. \ ILLESPR1NCIPALES:1 Tat isaw^, TOMBEAUX CELEBRES " 5 chel-lieu de V arrondissenient, a 1 lieue Temples 6 de circonferencp, 8 portes par terre et Monasteres. Bouddhiaiies. . . . 5 3 par eau; des fosses de 25"' 300""" de Id. Tao-sse . 1 '"'F"^. "f."***^ *?"? '^s Mongols. Mandarixs celebres .' ." .... '. '. 22 y Am-/j7i(7, chel-lieu de canton, Hommes id 33 (•) Tai.thting-i-tlu>mg-tcld, k. 53-55. («) Cluna opemd, t. I, p. 8.. CHINE MODERNE. 79 PASS4GEBS CELEBRES 1 Femmes id 12 Anachobetes id 1 natifde I'lnde. PBODUITS EX INDUSTRIE. ToiicS dc chanvre, tissus de roseaux jaunes, sou- liers oil sandnles de roseaux. 2° Hai-tcheou. Get arrondissement est eminemmeut maritime, comnie Tin- dique son iioin ; it est situe a 82 lieues au iiord-est de Ndn-hing, a 170 de Pe- king; il a 27 lieues de lest a I'ouest, et 30 du midi au nord; il confine, a Test, a la mer .laune, et au nord a la frontiere du Chan-tomuj ; il comprend deux cantons. McEUBS ET COUTUMES. Les habi- tants de cet arrondissement ont des moeurs rudes, mais sinceres (comine le soiit generalement dans tous les pays celles des populations niaritimes). lis s'appliqueTit a I'agriculture et a la peche. Le territoire est etendu , mais peu fertile. Le bas peuple ne se livre rii au commerce , ni aux arts et aux sciences ; c'est pourquoi le peuple de cet arrondissement est des plus pau- vres. ViLLES PBINCIP4LES : 1° ilai-fcheou, chef-lieu de Varro}i- dlssement , a environ I lieue de cir- conference ; 4 portes; 4 douanes par eau ; lac. 2" Han-yu , chef-lieu de canton. 3° Mou-yaiig, id. Colleges. 3, 1 dans chaque chef- lieu, tous les trois fondes sous le regne du premier empereur des Ming (1369- 1372). Population en 1743. Contribuables chefs de famille inscrits , 29,042. Tehbes cultivees, 28;969 k. 64 in. =z hect. 171,365. Impots foncters en argent ; 63,367 /. =fr. 506,936. — era n's , 23,746 chi ou hectolitres. — en ble , 9,927 — MONTAGNES ET RIVIERES : Monlagnes 32 Au nombre de ces montagnes on compte « la montagne de la contem- plation du philosophe Khoung-tseu » {Khoung wdng chdn) ; " la montagne du jade blanc « (Pe yii chdn), ainsi nom- mee parce que les pierres qu'on y ren- contre, etant nettoyees , sent blanches comme du jade; il y a aussi « la mon- tagne d'argent » {Yin chdn), voisine de la mer, et » la montagne d'or » {Td kin chdn), situee au nord du canton de llan-yu. On trouve dans la premiere de ces dernieres montagnes, du cote de la mer, beaucoup de pierres qui etin- cellent au soleil et ont la couleur de I'argent (ce sont vraisemblablemeut des pierres a platre cristallisees). Fleuves et rivieres 10 Lacs 2 Antiquites. Anciennes fortifica- tions de villes 27 Autres monuments 12 Au nombre de ces derniers est « la pierre monumentale de la dynastie des Thsin » (Thsln-pie), situee au nord-est du cnnton de llan-yu. Cette pierre a 5™ 670""" de longueur, 1"' 575""" de lar- geur, 2'° 52.5'"'° d'epaisseur ; elle ports une inscription en trois colonnes de treize caracteres. On attrihue ce monu- ment au celebre empereur Thsin-chi- hoang-ti, I'incendiaire des livres. Douanes 12 Fonts 11 Digues et jetees 9 TOMBEAUX CELliBRES 3 Temples 7 MONASTiiREs. Bouddhiques 4 Id. Tao-s.se 2 Deux de ces monasteres ont et6 fon- des sous les Thang, les autres sous les Soung. ]\Iandarins gelebres 16 HOMMES id 12 Pass-agebs id 2 Femmes id 13 Anachobetes id 2 Ce sont deux sectateurs du Tdo. Pboduits et industbie. Sel, plan- tes potageres varices; espece particu- liere de riz , nommee i-i-jin; roseaux de diverses sortes. 3° Thoung-tcheou. Cet arrondis- semeyit est situe a 53 lieues a Test de Ndn-fclng , a 369 de Pe-king ; il a 47 lieues de Test a I'ouest, et 12 du midi au nord , et comprend deux can- tons. Cet arrondissement est place sur la rive gauche de I'embouchure du grand fleuve Kidng. et la mer borne ses li- mites au nora-est. McEURs EX usages. Les habitants M L'UNIVERS. (le crt ar rnnilisspmenl tircnt leurs prin- cipaux benelices de la peclie du poissoii ft du commerce du sel; il en rrsulle (|iic la presqiie lotalitode la population fsr. livrre au commerce; toutefois elle ii'cii aime pas moins les cliants et la inusiqtie. La politesse des manieres est poussee a Textn'me dans cet arrondis- >«iiient ; les esprits y scut enclins au ciilte des genies. La presence toujours menacante de la mer et du grand lleuve rend rares les contestations et les pro- ces. ViLLES PRIACIPALES : 1° Thoung, chef-lieu d'anondissement , 4 portes; un canal , creusc en 958 de notre ere , rnviroune les niurs d'enceinte de cette ville. 2° Jou-kao, chef-lieu de canton, 4 portes; canal. 3° Tai-hing , chet-lieu de canton^ 5 portes; canal. Colleges 6 fondessous [csSoung^ sous les Mongols et les Ming. Population en 1743. Contribuables chefs de famille inscrits, 176,.57I. Tebbes cultivees , 54,950 k. = hect. 326,952. Impots fonciebs en argent : 99,737 /. =/r. 797, 89G. — en riz , 15,875 clu ou hectolitres. — en ble, 4,849. — MONTAGNES ET BIVIEBES : Montagues 6 Fleuves 12 De ce nojnbre sent le grand Kiang, n le fleuve qui transporte lesel » Oiin- y^-hd)., « le fleuve au sable d'or » (A'in-c/jo/id), etc. Antiquites 13 DOUANES 17 Pots 8 Digues et jetees 7 TOMBEAUX CELEBBES 6 Temples 10 Dcce noinbre est « le temple dedie a I'esprit de la mer et du grand lleuve Mang » {A icing hat chin ts^), situe sur la nionlagne du Loup {Ldng chdn), au midi de rarroiidissement. Tous les ans, le 19' jour de la 7' lune, on y offre des sacrifices. Monastebes 8 I>a plupart ont ^te fondes sous les Tmng et les Soung. MANDABINS CELEBBES 26 HOMMES id 18 Passagebs id 4 Femmes id 12 Pboduits et inoustbir. Sole grege, sel^ poissons de di verses espc- ces, riz. Distbict de Hai-men. Ce district, comme i'indique son nom, est un dis- trict maritime {licit vicn , « porte de la mer »), qui ressortit direclement au gouvernement central. II est forme d'une lie situee dans rcnibouchure du Kidng, au nord-ouest de Tile plus grande de Thsoung-viing. Ce district est de re- cente creation. B. DBPABTEMENTS de la PBOVINCE DE GAN-HOEi (*). 1" Depabtement. Gan-Kiag-fgu. Ce departement, situe a 270 lieues de Peking , a 45 lieues de Test a I'ouest, et 27 du midi au nord ; il comprend six cantons. CoNFiGUBATiorv. II cst bome au sud-est par le grand lleuve Kidng , a I'Duest par la province de Jlou-kouang. Moeubs i:t coutumes. Le naturel des habitants de ce departement est vif et tf|)iniatre ; leur caractere est tres- deeide , et en meinc temps tres-franc et tres-sincere. lis aiment peu le com- merce et se livrent de preference a I'agriculture. Leclimat est sain etagr^a- l)le , I'air pur; le riz , dans ce departe- ment , croit en abondance. ViLLES pbincipales. 1° Gan-ki?ig, chef-lieu de la province de Gan-hoei et du departement qui porte ce nom, a environ une lieue de circonfereuce, cinq portes et des fosses creu'ses sous les Soung. — Ville riche , visitee par I'am- bassade de lord Amherst (**}. Son com- merce consiste principalement en por- celaine, en lanternes de corne, eu draps, en bonnets et autres articles de mer- cerie. Ce qui rend cette ville tres- vivanle , c'est que toutes les marchan- dises qui se rendent a Man-king des provinces nieridionales passent par Gan-king. Pres de cette ville est une (*) Tai-Tlising-l-thoitiig-tclu , k. 56-70. (**) On trouve dans la Relation de celle ambassade , par M. Ellis , une vue de Gan- king-fou. CHINE MODERNE. 8t pagode a sept etages qui produit I'eflet le plus pittoresque. 2° Touncj-tching, chef-lieu de canton; G // de circonference, appuyee au nord- ouest sur une montagne. 3" Tsien-chan, clief-iieu de canton. 40 Tai-hoU, — 6° Sou-soung, — 6° f-Fang-kiang , — Colleges. On en compte 14 , la plupart fondes sous les Ming. De ce nombre sont sept grands etablissemenis lUteraires, renferinant de riches hibiio- theques , et nommes ChoH-youcJi, les- queis, coinme dans tons les departe- ments , sont distingues des Colleges proprement dits , situes dans chaque chef-lieu. L'un de ces etablissements litteraires est celui de la inonta^ne Houan, dont il sera question ci-apres ; un autre est celui du « Lac de la mise- ricorde » {tseiX hoiXchoiiyouen) que Ton nomme aussi : « Etabhssement litte- raire de la fleur du nenuphar. » Population en 1743. Contribua- bles chefs de famille inscrits, 53,127. Terbes cultivees, hect. 128,561. Terres des colonies militaires: 949 k. = en hect. 5,646. Impots fonciers, en argent, en francs 1,395,272. — rlz, hect. 111,278. Montagnes 72 Fleuves et rivieres ... 18 Lacs 18 Antiquites. Anciennes fortifica- tions 17 Autres monuments anciens , tels que pavilions, tours, pagodes , arcs de triomphe , etc 35 Tons ces monuments sont celebres a divers titres, et remontent pour la plupart a des epoques assez reculees. Douanes, postes, etc 36 PONTS 19 Digues et jetees 7 TOMBEAUX celebres 20 Temples 15 De ce nombre sont : « Le temple dedie aux cinq especes de cereales » {Oil ko micio), situe a deux lieues au nord-esl de la ville cantouale de Sou- soung, oil Ton offre des sacrifices au « laboureur divin » [Chin-noimg) et a la reine ou deesse des cereales (//eow- tsi)^ la Ceres chinoise. 6* Livraison. (Chine moderne.) Monasteres bouddhiques. .. • 7 — TCio-sse 2 Mandarins celebres 64 hommes celebres 65 Passagees celebres II Au nombre de ces derniers , on cite le pretre ou bonze ihsdn (le brillant) qui Vint de Ta-mo (Damas?) dans le royaume du milieu , sous le regne de Youen-thsoung de la dynastie des Tliang (de 713 a 756 de notre ere). Ce religieux de Damas n'avait , selon la tradition, que ses vetements de reli- gieux et un vase pour recevoir sa nour- riture. Ce fut a San-thsou que Thsan arriva pour communiquer et propager sa doctrine, et ii expliqua celte doc- trine, cette loi (/a), dans une vallee deserte de la montagne Houdn (*). II finit ses jours et fut enterre au sein d'un monastere situe dans une vallee de la montagne en question. L'empe- reur Youen-thsoung ( nomme aussi IJiouen-thsoung) , des Thang,\m con- fera le litre honoriQque posthume de « maitre de la contemplation spirituelle (*) CeUe montagne , tres-celebre cliez les Chinois , est situee au nord-oiiest du canton de Tsien-clidn ; on lui donne 3,700 tcliang- ou 11,655"' d'elevalion, ce qui est neces- sairement tres-exagere *, et 20 lieues de lour. Cette montngne a trois pics ejevcs : le pic oriental, qui est nomme « la colonne du ciel >• {tliien tcltii) est continueilement convert de neige , c'est pourquoi on le nomme aussi « la Montagne de neige >> (Stone clidn) ; le pic occidental se nomme ho clid/i ; la secte des Tdo-sse y a quatorze retraites qu'elle appelle «< les cieux de I'origine dominatrice des co- lonnes du ciel » {tliien tc/iii sse youen tela tluen). Il y a sur celte montagne quatre tours (thai), trois lacs, et des clioses mer- veilieuses innombrables , disent les redac- teurs de la Geographic imperiale. Le celebre poete Li-tai-pe, de la dynastie des Tliatig, en naviguant sur le grand fleuve Kidng , apercut la montagne Houdn , et il I'a chantee dans la piece de vers intitulee : Koiing-chdn clit. , * Les Chinois ne sacli.mt pas fairc des operations trigonoinelriques, ni barornetriqiies pour raesuicr les hauleurs verticales , n'arrlvcnt qu'a des donnees einpiiiques excessiveinent imparfailes el sur Ics- quelles on ne pent avoir aucuiie conHance. II est k presuiner qu'iei la hauteur indiqiiee est la mesiire du versnnt de la montagne , de la base au soniniet , prise dans uiis uscensioii sinucuie et non cii ligiie droite. •f L'UNIVERS. et miroir de la sagesse » ( tcht kien cfien S5(*) (*). Lc religieux dont il pst ici question fut vraiseii)l)!;il)|pnient iin des iiesto- rieiis de Syne qui se rendirent en Chine pour v pr<5clipr le christianisnie, dans le scptien)o ct le luiitieme siecle de notre ere, et dont le Monument de Si-gan-foH, erige en 781 (voy. t. I, p. 2!)7 et suiv.i, porte temoignage. Au nombre des passagers celebres on compie aussi lecelebre pdeteLi-pe. Femmes celebbes 38 anachobjites celebres 5 PbODUITS et INDUSTRIE. l\toffeS de sole unies , vases a boire , vases en bronze, rire, tlie, espece de fruit nomme pe-tchu, dont on fait du vin, etc. 2' Depabteme.xt. HoeV-tcheou-fou. Ce departement , sltuc a 57 lieues au sud-est de Can-king, et a 285 lieues de Peking, a 39 lieues de I'est a I'ouest, et 22 du midi au nord ; il comprend six cantons, Co>FiGUBATio\. II est bome a Test et au sud par la province de I'che- kiang,a I'ouest par celle de Ridng-si, et au nord par le departement de Tal- ping. Moeubs et coutumes. Le carac- tdre des habitants de ce departement est hard! et entreprenant a I'exces ; lis aiment a se rencontrer sur les champs de bataille. Les hommes dis- tmgues s'appliquent de toutes leurs loroes a faire des actions d'eclat pour occuper un rang eleve dans la societe, et lis ne rougissent point d'arriver a eur but par des movens contraires a la justice. (re/\\is thsao ; des lacs et des cours d'eaux 3 grandes institutions litteraires.fon- considerables enrichissent son terri- decs sous les Soung et les Mongols. toire. KcoLEsde tous degres en 1844.. . 81 iMoeubs et coutumes. Les hommes Population en 1743. Contribuables et les choses , dans ce departement, chefs de famille inscrits, 60,044. sont en parfaite harmonic; le climat TEBBEscuLTivEES,87,072/iec/are5. en est tres-sain et I'air pur. Les ha- Impots fonciebs en argent: bitantsont le caracterepleinde raison, 956,272/7-o7JC5. ^'e sincerite et de droiture ; ils mepri- — en riz , 37,206 hectolitres. sent le commerce et honorent beau- — en legumes, 2,212 — coup I'agriculture. MONTAG>ES 42 ViLLES PBINCIPALES. LOU-tchcOU , Fleuves ET BiviEBES 10 chef-lieu du d^partement, a des murs Lacs 4 de 1 myriaoietre 4 kilometres 823 m. Antiquites de toutes sortcs. . . 44 de circonference, et 7 portes. Dans ce nombre on reniarque la mai- IVou-ive'i , chef-lieu A' arrondisse- son du celebre poete Li-foi-pe , situee 7nent. sur une montagne au sud-est de la ville Chefs-lieux de cantons fortifies : de Thang-tou. \° Ho-fei. 3° Chou-tching. Forts detacqes 17 2° Lon-kiang. 4° Thsao. Fonts C Colleges en 1743 Digues et jetees 4 Grandes institutions litteraires. 6 Tombeaux CELEBREs. . . . 17 EcOLES divcrscs en 1844 108 De ce nombre est le tombeau de Lz- Population en 1743. Contribua- tai-pe, qui vivait sous les Thang. II est bles chefs de famille inscrits, 277,207. situe sous la montagne Verte (/Asm^- Tebbes cultivbes, 399,060 hec- chdn) , au sud-est de Thang-tou. tares. Temples 15 Impots fonciebs, en argent : Dans ce nombre on remarque le 1, -593,640 /rancs. • temple du Genie qui apaise les flots — riz, 41,18^ hectolitres. «du grand Kiang y> {ting kidng chin — froment, 803 id. tsg), situe snr une montagne au nord- Montagnes 72 ouest de Thang-tou ; « le temple du Fleuves et biviebes 28 « poete Li-tal-pe » ( Li-pe-tse) , situe Lacs 4 sur la montagne Verte, au sud-est de Le lac Tchao , situe a 6 Iieues au la m^me ville, etc. sud-est de Ho-fei , a 40 Iieues et plus Monasteres. Bouddhiques 8 de circonference. ~ Tdn-ssc 5 Antiquites de tons genres .'io ^lANDARiNs CELEBRES 45 Daus ce nombre on distingue « la llOMMES id 00 « 'tour de la portede la justice »(/ 7?j^ra PASSAGERS id 6 //mj), situee a environ deux Iieues a l*EMMEs id 15 I'ouest de Ilo-fei; « la Tour du philo- ANACHORETEs id I „ sophe Khoung- iseu » {Khoung-tseil- CHINE MODERNE. 87 thdl), situee a cinq lieues au nord- jouest de la ville de Tlisao. La tradition rapporte que le grand pliilosophe , dans le voyage qu'il fit au midi de la Chine, visita ce lieu avec ses disciples. Forts deta.ches 26 Fonts 12 Digues et jetees 8 tombeaux celebhes 1 Temples 12 L'un At ces temples est dedie a I'es- prit du lac Tchao. MoNASTEBES. Bouddhiques. .. 7 — Tdo-sse 2 Mandarins CELEBRES 74 HOMMES id 80 Passagers id 2 Femmes id 19 Anachoretes id 4 PrODUITS et INDUSTRIE. KtoffcS de sole, taffetas, cire blanche; veruis uaturel ; alun {fan) ; mesures de capa- cite en pierre. 7' Departement. Foung-yang-fou. Ce departement, situe a 67 lieues au nord de Gan-king , a 198 de Pi -king , a 42 lieues de I'est a I'ouest, et 48 au midi au nord; il comprenddeux arron- dissemerds et sept cantons. Moeurset coutumes. Les habitants ont le caractere plein deraison, de sin- cerite et de droiture; ils meprisent le commerce et donnent tous leurs soins a I'agriculture. Leur nourriturese com- pose de riz conimun et de riz d'eau ; leurs v^tements sent faits de toile et de soie. Le territoire du departement est entoure de fleuves et de rivieres comme d'une ceinture; il s'ensuit que tous les produits sont facilement transportes . par des bateaux, d'une extremite a I'au- tre du departement. ViL^^ES PRINCIPALES. Fouugyang, chef- lieu du departement , a environ wn^ lieue de circonference, et 4 portes. L'ancien mur d'enceinte fut construit en 1372 de notre ere; mais il y avait en outre une muraille exterieure, cons- truite en terre en 1374, et qui avait cinq lieues environ de circonference; e!le est maintcnant delruite. 1° Lin-hoai . chef-lieu de canton. T Hoa'i-yotien, id. 3» Ting-youen, id. 4° Jloung, ■ id. 5° Cheou , chef- lieu [d'arrondisse- vient. 6° Foung-tal, chef-lieu de canton. 7° Sou, che{-\\eu d^arrondissement, 8° Ling-pi, chef-lieu de canton. Colleges. On en compte 10, pres- que. tous fondes sous les Ming. EcoLEs diverses en 1844 158 Population en 1743. Contribuables chefs de famille inscrits, 175,733. Colons militaires, 6,156. Terres cultivees, 561,108 hec- tares. Terres des colons militaires, 30,202 hectares. Impots fonciers en argent : 2,042, 296/ra«6-i-. — ns,' 41,704 hectolitres. — 6/e, 8,557 id. — legumes, 2,5i^ id- montagnes 72 Fleuves et rivieres 28 Lacs 14 Antiquites de toutes sortes. . . 96 Forts detaches 34 PONTS 22 Digues et jetees 8 TOMBEAUX CELEBBES 22 Dans ce nombre on compte celui du celebre foudaleur de la dynastic des Ming. Temples 18 Trois de ces temples sont eriges en I'honneur de Tempereur Yu. Chaque annee, au 0' jour de la 6' lune, on y offre des sacrifices. Deux autres ont ete eriges, l'un en I'honneur du philo- sophe Min-tseu, et I'autre en rhonneur de Thoung-iseu. Monastebes. Bouddhiques 4 — Tdo-sse 1 Mandarins celebres 105 HoMMES id 155 Passagers id 4 Femmes id 32 Anachoretes 5 Dans ce nombre on compte le celebre philosophe Hoai-ndn-tseu, roi de Hoai- ndn , qui vivait dans le second siecle avant noire ere. (Voy., ci-apres, Philo- sophie des Chinois.) Produits et Industrie. Cuivre, taffetas de soie, autres etoffes de soie, toile eonfectionnee avec les filaments de la piante Ao; toile dc chanvre, the, nacre de perle, stalactites , pierres so- M L'UNIVERS. nores, vnses en picrre pour mesures de Mpacite; plantes appelees tsien-tsao « rubia cardifolia », plantes caustiques de couleur pourprc. 8' Departf.ment. Ying-tcheou-fou. Ce departrment, siUie a 84 lieues ail nord-ouestde Gan-klng, a 182 lieues de.Pe-king, a 28 lieues de Testa I'ouest, et 35 du sud au nord ; il comprend un arrondissement et cifiq cantons. RIoEURS ET couTUMKS. Le pcuple, ayant des moeurs pures et droites, a f)e« de proces; les produits du sol sont )eaux et abondants. Sur ce sol fertile, les eaux sont douces , les vents tempe- res et salutaires. L'instruction est pro- pagee et repandue jusque dans les plus f)etits hanieaux. Dans les festins pu- )lics, leshommesetlesfemmesmangent et boivent separement. (Geographie his- torique des Mongols.) ViLLES PBiNCiPALES. 1° Ytng- tcheou, chef-lieu du departement. 2° Po-tch^oUy clief-lieu d' arrondisse- ment. 3» Ying-chang , chef-lieu de canton. 4" Ho-kiu , id. 5" Tai-ho, id. 6' Moung-tching, id. 7° Feou-yang , id. Colleges. On en compte 6 lis furent tous fondes au commence- ment de la dynastie des Ming. f.coLEs di verses en 1844 115 Population en 1743. Contribua- bles chefs de famille inscrits , 202,357 TERBE.S CULTIVEES , 237,476 hec- tares. Impots fonciebs , en argent : i, 208,280 fra7ics. — en riz, 11,05^ hectolitres. — en ble, 997 — MONTAG.NES 10 Fleuves et BIVIEBES 29 I.ACS 7 De ce nombre est le lac occidental (5t-/ioi}), situe a 3 li an nord-ouest de Feou-yang; il a une lieue de longueur et deux li de largeur. Ce lac est re- nomme pour sa beaute chez les poetes chinois. Sous les Soung, le celebre his- tonen Ngheou-yang-sieou {') et Sou- (•) Autciir de la grand*' histuirc des Thane, roraprisc dans la collection des aa histo- riens. che (*) se retirerent sur les bords de ce lac poetique pour s'y reposer I'es- prit dans la solitude. Antiquites de tout genre 71 Forts detaches 14 Po^TS voutes 13 Digues ET J etees I Tombeaux celebbes 16 Temples 12 Dans ce nombre on en distingue deux eleves a Tempereur Kouang-wou , des Han; un autre erige en I'honneur des quatre sages {sse-hi6n-tse) ou philoso- phes de la dynastie des Soung, aux- quels on offre des sacrifices : ce sont Gan-tchou , Liu-koung-tcho , Ngheoii- yang-sieoxi. et Sou -che: ce dernier temple est situe sur les bords du lac Si-hoit; un autre temple, situe an midi de la ville departementale, est erige en I'honneur de Ngheou-yang-sieou. MONASTERES 12 L'un de ces mona.steres , nomm^ le Palais du repos celeste {rhiCnthsi7ig kotmg), est situe a 12 lieues a Test de Po-tcheou, ou, selon la tradition, le celebre philosophe Lao-tseu (voy. t. I, p- 110) commenca a se faire connaitre. Ce temple fut erige en 104 de notre ere. Un autre temple, dedie au meme philosophe, nomine le Palais de la grande purete {Tai thslng-koimq), est situe a 4 lieues a I'ouest de Po-t'cheou. Ce dernier temple occupe I'emplace- ment ou naquit Lao-tseu. Mandarins CELEBBES 60 Dans ce nombre on compte les quatre lettres celebres que nous venous de mentionner a I'article Temples {**). (*) Nomme aussi Sou-tsett-yeoii, I'lin des meilieurs cominentatetirs de Lao-tseu. (**) Gan-tchou, Liu-koung-tcho, Ngheou- yang-s'teou et Sou-che. Le i"- elail iialif de Lin-tcheou, departement de Fou-tcheoii, pro- vince de Klang-si; il fut jirelet «, situe en dehors de la m^me ville; celui de I'empereur Tching- thang, etc. monastehes 23 Mandarins celbbres 90 HoMMEs id 132 Passagers id 3 Febimes id 30 Anachoretes id 20 Phoduits divers. Fer, ^toffes de soie brochees, clianvre, tapis de feutre {tch(n), sel, vin, peches, lentilies sau- vages {thsao). Arrondissemenls ressortissant direc- ment au gouvemement central de I'e-king, y. 1" Ping-ting-tcheou, 2 cant. 54 ecoles. 2" llin-tcheou, 2 id. 40 id. 3" Tai-tcheou, 3 id. 65 id. 4° Ilo-tcheou, 3 id. 39 id. 5° Kiai-tc/ieou, 4 id. 79 id. 6" Kiangtcheou, 5 id. 94 id. 70 Fei-tcheou, 3 id. 36 id. 8" Tsin-tcheou, 2 id. 35 id. 9° Liao-tcheou, 2 id. 35 id. IV' GOUVERNEMENT. 5'= PROVINCE (*). Chan-toung. Capitale : Tsi-ndn- fou. Population en 1812: 28,958,764. Apercu general. La province de Chdn-to'ung (orient des montagnes) a pour capitale Tsi-ndn-fou, ville situee a 80 lieues au n)idi dc Pe-king ; elie a 164 lieues de Test a I'ouest, et 81 du midi au nord. Kile comprend dix de- partements, deux arrondissemeyits res- sortissant a la province de Tchi-li, neuf arrondissemenls ordinaires et quatre- vingt-seize cantons. LiMiTES. A I'orient, cette province est bornee par la grande mer Jaune; a I'occident et au nord , par la |)rovince de Tchi-li, et au midi , par celle de Kiang-son. Cahactere PHYSiQDB. A I'est, le territoire de cette province s'avance dans la mer comme une grande penin- (•) Tal-tluing-i-thotoig-tcUi , k. cjG-iir. siile, escortee d'iles nombreuses; au midi, elle est traversee par le grand canal Imperial , qui est pour elie une source de richesses. Ses montagnes les plus renommees sont les montagnes Tal-chdn et I-chdn; ses principaux fleuves sont le l/odng-hd, ou fleuve Jaune , et le grand canal Imperial de transport, auquel se reunissent plu- sieurs rivieres. 1" Depahtement. Tsi-nan-fou. Ce departement, dont le chef-lieu est situe a 96 lieues au midi de Pe-king , a 36 lieues de I'est a I'ouest, et 28 du midi au nord; il comprend un arron- dissement et quinze cantons. Mqeurs et coutumes. Les habi- tants de ce departement se iivrent en f;rand nombre au tissage des etoffes; es leltres font tous leurs efforts pour acquerir des merites et de la renom- mee. ViLLESPRiNCiPALES. Tsi-ndn, chef- lieu du departement, ville fortifiee, ayant deux lieues de circonference. On la dit riche et bien peupiee, ayant de beaux batiments. Elle est situee a environ une lieue de la riviere Ta-thsing-hd (la ri- viere tres-pure), avec laquelle elie communique par un affluent. 1° Li-tching, ch.-l. de cant. fort. 2° Tchang-kieou, id. id. 3° Tseou-ping, id. id. 4° Tse-tchouen, id. id. 5° Tchang-chdn, id. id. 6" Sintching, id. id. 7° Tsi-hd, id. id. 8° Tsi-toung, id. id. 9° Tsi-yang, id. id. 10° Yu- tching, id. id. ir IJn-i, id. id. 12° Tchang-thsing, id. id. n° Ling,- id. id. 14° Te-ping, id. id. 15° Ping-youan, id. id. Te-tcheou, chef- lieu d'arrond. Colleges en 1 743 22 icoLEs diverses en 1844 275 Montagnes 70 Fleuves et rivieres 38 Lacs 7 Ces lacs abondent en poissons de toutes sortes, entre autres le lac Pe- CUmE MODERN!-:. 97 yuii , ou des nuages blancs , situe a nioins d'une lieue tie Tchang-kieou. AnXIQUITES DIVEllSES 102 (lont 74 ancieniies fortiHcations de ville, et 6 tours. Forts detaches 35 Poms 29 Digues et jetees 7 tombeaijx celebkes 44 Plusieurs de ces tombeaux remon- teut aux premiers temps de la monar- cliie chinoise. Temples 16 L'un de ces temples est dedie au ge- nie du fleuve Jaune. ]\Ionasth:res 16 Mandaiuns celebres 100 HoMMEs id 153 Dans ce nombre on compte le celebre Fou-semj (*), lettre qui vecut a I'epoque de I'incendie des livres, et a qui la Chme doit la conservation du plus beau de ses anciens livres, le Chou-kimj. Passagebs celebres 6 Femmes id 47 ANACHORETESid 7 Produits divers. Sole lilee , taffe- tas, crepes blancs et a fleurs, etoffes faites avec I'ecorce de la plaiite nom- niee K6, riz monde et non nionde, plantes medicinales. 2^ Departement. Yen-tcheou-fou. Ce departement, dont le chef-lieu est situe a 32 lieues au sud de Tsi-ndti, et a 123 de Pe-king, embrasse 51 lieues de Test a I'ouest, et 26 du sud au nord ; il comprend dix cantons. Mqeurs et coutumes. II est ditdans I'histoire des //«;t, par Pan-kou, que Khoung-tseu (**) (Confucius, ne dans ce departement, de son temps royaume de Lou) mit eu ordre les six King, afin de developper et de propager la doctrine des anciens empereurs Yao et Chun, ainsi que des trois premieres dynasties. C'est pourquoi la population de ce de- partement natal du grand philosophe aime I'etude et apprecie les regies de la politesse et de la justice; elle estime pen le commerce et I'industrie. Le ca- (*) Yoy. son portrait, t. I, pi. 35, i\° 4, et la note, p. 236. (**) Voy. sou portrait, 1. 1, ]>!. 22, et su Vie, p. 120 et suiv. 7" Licraisuii. (Chine .MouhHivt ' ractere des habitants est franc et sin- cere; leurs mceurs sont cellos des let- tres. ViLLES PRiKciPALES. Yen-tcheou , chef-lieu du departement, ville forti- fiee, de quatre lieues et plus de circon- ference , situee entre deux affluents du canal imperial. Climat doux et tem- pere. 1° Tseu-yang, c\\.-\.AQcant.foi't. 2° Khio-feon, id. id. 3" Ning-i/ang, id. id. 4° Sse-choid, id. id. 5° Tang, id. id. 6° li, id. id. 7° Tseou, id. id. 8" Yang-ko, id. id. 9° Cheou-tchang , id. id. 10° ff^en-chang, id. id. Colleges en 1743 22 Dans ce uombre on compte les insti- tutions litteraires qui portent les noms de Yen-tseu, de Tseu-sse, de Thseng- tseu, disciples de Khoiisvg-tseu. Ces grandes ecoles ont ete etablies la oit la tradition rap[)orte que ces disciples du grand philosophe enseignerent sa doc- trine apres la mort de leur niaitre. Ecoles divebses en 1844 186 i\l0INTAGNES 90 FlEUVES ET RIVIERES 30 Lacs 8 L'un de ces lacs, nomme Liu-meng, situe au midi du grand canal, est la reu- nion de quatre lacs qui ont ensemble luiit lieues de longueur. Le lac Tchao- yang, situe a 7 lieues au sud-ouest de Yang, en forme deux : le grand a huit lieues d'etendue; le petit n'a que 13 li (1 lieue 3/10). Ces lacs se communi- quent. Le lac Nan-iuang, situe a trois lieues et demie au sud-ouest de Pf^'eu- chang , et sur la rive occidentale du grand canal, est encore plus conside- rable : on lui donne plus de neuf lieues d'etendue. Lagrande Geograpliie imperiale cite ici plusieurs puits celebres, entre au- tres le « puits de I'eau saiute » {Clung- choul-tsing) , situe a quelqne distance nord-est de. Tsen-yang, a Test de la porte d'entree d'lui monastere boud- dhique que Ton nomme le monastere du Fo de pierre (CUi-Jd-sse). Au fond de ce puits est une inscription sur pierre en vicux caractere tdiouan. 98 L'UWIVKRS. Lorsqu'arrivc une seclipresse, on sort la pierre du puits, el la pluie lonibe aussitot, (lit-on. II y a encore « le puits des vestiges de la inaison de Khol'no - tseu » {Khoungtsi-l-lsiny), « le puits de Yen -tseu, etc. Le premier est situe dans la ville de Khio-feou , a lest du temple eieve en I'honneur du pliilo- soplie. Selon la tradition, c'est la que le grand maitre puisait de I'eau pour boire. Le second de ces puits est si- tue au sud-ouest du temple de Tcheou- koung, au nord-est de la meme ville. AnTIQUITES DIVEBSES 124 On comprend qu'un departement qui a ete anciennement le centre d'un royaume illustre par les plus grands personnages intellectuels de la Chine, auxquels elle doit sa civilisation ; on comprend, dis-je, que ce pays soit plein de vestiges de I'antiquite, et leur rende un culte. Aussi nous trouvons ici de- crits : « L'ancienne ville du royaume de Lou, actuellement la residence du sousprdfet de Khio-feou; rancienne ville de ce noni, a une lieue a Test de la ville moderne; le village ou hameau nomme Khioue, ou, selon le Aiayu, Khoung-tseu commenca son ensei- gnement : il est maintehant compris dans I'enceinte de la moderne Khio- feou; ce lieu fut visite en 1684 par le c^lebre empereur Khang hi, qui voulut offrir lui-meme en persoone un sacri- fice dans le temple du saint par excel- lence {ching), comme les Cliinois nom- ment leur grand philosophe ; « la tour du Printemps et de I'Automne » ( TchUn • thsieOu - thdi ) , construite dans Templacement ou Ton dit que Khouno-tsku composa I'ouvrage liis- torique qui porte ce nom. On cite en- core parmi les antiquites un vieil arbre de I'espece du pin , que Ton remarque devant le temple de KHOima-xsRU, et que Ton dit avoir ete plante par les propres mains du philosophe il v a plus de 2,000 ans! Lors de la visite du celebre Khang-hi, ce prince, arrive devant I'arbre en question, fut si frappe de sa majestueuse antiquite, qu'il com- posa des vers en son honneur (*). (*) Tai-lluing-i-tlMuiig-tclii, k. loo, P» 1 7. Voy. aiusi le 1 1 du preseut ouvrage, p. r8r, ct U pi. 33. " ' Forts detaches 38 PONTS 30 Le plus remarquable de ces ponts est celui que Ton nomme Sse-choiti-khido, situe a une demi-lieue au sud-est du chcf-Iieu du departement. On dit qu'il fut construit sous Iloei, roi de Lou, 676 ans avant notre ere. II a guinze ar- ches, chacune de plus de cinq tchaug de largeur (15'" 750"'""), re qui porterait la longueur tolale du pont a 75 tchang ou 236" 250'""'. Un autre pont, situe en dehors de la ville cantonale de Yi, a 110" de longueur et 9°" de largeur; il a quinze arches. DTGUES ET JETEES 17 TOMBEAUX CELEBHES 65 De ces tombeaux 31 sont de per- sonnages anterieurs a la dynastie des Han (200 ans avant notre ere). Ce sont les tombeaux de Niu-hwa , Foit- hi, Iloang-ti, Chao-hao ; celui du philosophe Khoung-tseu, nomm^ Khoiing-lin, « tombeau entoure d'ar- bres , » situe a deux li au nord de Khio-feou (*). Ce tombeau, en forme de dome, a la maniere chinoise, a trois metres et demi de hauteur au centre; sur la facade on lit une inscription sur pierre, ainsi concue : Tombeau du roi proctame de la' litterature, du, saint le plus grand, le plus parfait, le plus accompli (**). Sur le devant est un au- tel en pierre qui a trois pieds carres ; la facade regarde I'orient. Tout autour de ce' tombeau, et comme pour lui for- mer un glorieux et eternel cortege, sont les tombeaux des principaux disciples du philosophe. Celui de Pe-yu est a quelques pas a gauche ; celui de Tseit- sse est en face , a quelques dizaines de pas. Au sud-est du tombeau spheriqiie, existe un pavilion derriere lequcl on voit encore Parbre nomme Mai , plante par Tseu-koung. Lorsque Tempereur Khang-hi visitn (*) Yoy. la represcntatiou de ce tombeau , t. I,p. 33. (*•) Ell cliinois : Td-tckiiig-tchi-chiiig-w£u- siouen-wdiig-moti. Voy. Tal-thsing-i-tJioung- tclii , k. too, f" 2a. — Le tiUe de JFeii- sioueii-wdiig, « roi proclame de la iitterature, >• est uii title puslliiime qui lui fut douue la 37* annee Kai-youen, 788 de notre ere, par I'einpereur qui reguait alors , Ming- 'loang-ti. CHINE MODERNE. 99 ce tombeau en 1684, arrive en presence, ridionales de la Chine , passa par Khio- il ordonna a tous les rninistres de sa feou, se rendit dans ce temple, et suite de descendre de cheval; liii-meme offritunsacririceenpersonneaRuoi.mG- descendit de sa chaise, franchit la porte tsed, le <• premier instituteur des horn- de reiiceinte, et la , de\ ant le tombeau « mes; » li y accomplit les ceremonies du premier instituteur des fiommes des trois genvjlexions {sdn-koiiei) et {sidn ss€) , le visage tourne vers le nord, des neuf prosier nements {hieoii khb il flechit trois fois le genou en faisant thedu). Ces rites accomplis, il se ren- une libation, et accomplit la cere- dit dans la grandesalle des ceremonies, inonie des trois prosternemenfs (khd ou il ordonna qu'on expliquSt devant theo1i){*), apres laquelle il visita la lui le» oeuvres du grand philosophe. foret sacree des tombeaux. Ce temple , dont les bdtiments nom- Temples 28 breux occupent un vaste terrain , est Les principaux de ces temples sont desservi par un grand nombrp de fonc- les temples de Fou-hi, de }'ao, de tioimnires. L'Almanacli imperial de 7t7ieoM-AoM?jgf, Tun des plus anciens et 1844 enumere quarante descendants des plus illustres sages de la Chine (**). de Khoukg-tseu, parmi les premiers Lors de la visite deja signalee prece- desservants du temple de leur glorieux demment de I'empereur khang-fii, ce ancetre. prince fit oflicier dans ce temple le pre- Monasteres 13 sident du Ministire des rites. Mandariivs celebres 70 On remarque encore les temples de Hojimes id , 151 Tseii-sse, disciple et petit -fils de Dans ce nombre on compte beaucoup Khoung-tseu; celui de Yan-tseu; de descendants de Khoung-tseu ; niais celui de la mere de Meng-tseu, situe le plus celebre de tous est Khoung- au midi de la ville de Tsdou, et celui gan-koue , descendant du philosophe a de Meng-tseu lui-meme (***), nomme la onzieme generation, et qui fut, sous par les Chinois le second saint {yd les Han, I'un des plus ardents et des ching) , c'est-a-dire, celui qui vient im- plus hahiles restaurateurs des anciens mediatement apres Khoung-tseu. Ce livres et de I'ancienne doctrine (*). dernier tombeau est situe a gauche de Passagers celebres 3 la grande route, au midi de la ville can- Femmes id 64 tonale de Tseou. Produits divers. Fine sole; pierre Mais le temple le plus celebre, celui a grain fin et brune pour la fabrica- dont la description occupe pres de huit tion des encriers chinois ; poterie noire; pages in-4° dans la grande Geographic fer, etain; arbre nomme kia'i; plante imperiale, c' est le « Temple du premier nomme'e /im-/<«g', employee dans les " saint et du premier instituteur des maladies veneriennes ; talc; amethyste ■< homraes (****) » (tchi ching sidn ss^ cristallise (tse chi ying). oiido), situe dans I'enceinte de la ville „o ta - _ t cantonale de Khio-feou. Aucun monu- ^ Departement. Todng-tchang- meut europeen ne peut en donner une fov. idee. Ce departement, dont le chef- lieu L'empereur Khang-hi , lors du est situe a 22 lieues a I'ouest de Tsi- voyage qu'il fit dans les provinces me- ndn, et a 94 de Pe king , a 22 lieues de Test a I'ouest, et 28 du midi au nord ; (*) Geograpbie impeiiale citee. Voy. ci- j| comprend un arrondissement et neuf apres : Ministere des rites. C'est ceUe cere- cantons monie que plusieurs anibassadeurs europeens CarACTERE PHYSIQUE. Le territoire noni pasvoulufairedevauilenii.ereur de ^^ ^^ departement est generalen.ent ' ^-" Voy. 1. 1 . p. 86 et suiv. ""* '^ decouvert, et le sol arrose par de (•'•) Voy. le portrait de ce philosophe , "ombreux cours d eaux qui le rendent t. 1 , pi. 22 , p. 187. (*•••) II est represenle, d'apres uu plan (*) Voy. Tal-thsing-i-thoung-tclu, k. 101, chinois sur etoffe de soie, dam la pi. 3; de i" 7 v"; el Y-k'uig, ex latina iuterpretatione notre premier vohime. P- Regis , f. I , p. io3 et s<[. 7. ,00 L'UKIVERS. trcs-ferlilc. Au inidi , il communique r Depaktemekt. Tusing-tcueou- avec lesdeux dcpartcmenls precedents. tou. IMoEiias ET coiJTUUES. Lcs habi- .,.,,,-,■ tants de ce departement estiment beau- Ce departenient, dont le cliet-lieu est coup la litterature, et ceux qui la cul- a 33 iieues a i'est de Tsi-ndn , et a tivent- ieur caractere est ferine, plein 100 de Pe-king, a 27 Iieues de Test a de dro'iture, et ircs-atlacbe a la justice; i'ouest, et 34 du sud au nord ; il com- ils ont conserve la puret^ des niccurs prend onze canton.^. antiques. Le peuple est rude, niais franc CABACTiuiE physique. Au nord-est, etcenereux; il aime beaucoup la cul- la nier Jaune baiijne ses rivages; au ture des lerres, et il se livre aussi a la sud-ouest, il a pour limite les nionts nourriture des vers a soie et au tissage Tahchan, celebres des les premiers des etoffes. temps de la monarchic chinoise. Con- ViLLESPBiNCiPALES.7'oM«!>Ae-ma-//tA/aw.. Le peuple se 4° Tc/iouang - ping , id. livre au labourage et a la culture des 5° Thsing - ping , id. niilriers; les lettres sedistinguent dans 6" 5/«, id. la carriere litteraire. T Kwaii, id. \iLhES PJMTHCIV khv.fi. 7 hsing-tcheou, S" Aioa?i-tao, id. chef-lieu du departenient; ville fortiGee 9° Ca;i, id. d'environ une lieue et demie de circon- Kao-thang, chef-lieu d'arrondisse- ference. 7nent. i" }i-(uu,chti-lkudecajiion/ortiJie. Colleges en 1743 19 2" Po-chdn, id. id. £coLES DivEBSES en 1844 161 3° P6-hingj id. id. MoNTAGNEs 7 4° Ltti-tseuy id. id. Fleuves et BiviEBES 11 5" Kao-ijoueii , id, id. Au premier rang sont le Yiin-hd 6' Lo-gdn, id. id. ou canal Imperial, le fleuve Jaune et 7° Cheoukouang, id. id. le fyei-hd. 8° Tchdng-16 , id. id. Antiquites DiVERSES 68 d" Lin-ki€ou, id. id. FOBTS DETACHES 29 10° Gan-kieou , id. id. Fonts 22 11° Tchou-tching, id. id. Digues ET JETEES 13 Colleges en 1743 17 ToMBEAux celebbes 26 EcoLEs DivEBSEs en 1844 182 On cite dans ce norabre le tombeau Montagnes 88 de I'ancien philosophe Tchouang-tseu, Fleuves et biviebes 43 leauel est sitae a I'ouest de Lieou- Dans ce nombre on compte I'ancien telling. cours du fleuve Jaune, qui est au nord Temples 13 de Kao-youen, d'ou le fleuve fut de- Un de ces temples , situe au nord- rive sous I'empereur Mingti des //a/t, est de Tchoicang-ping, est dedi6 au I'an 69 de notre ere; mais si, comme philosophe A/t-ngf-^seu. quelques ecrivains chinois le pensent , Monastebes 8 I'ancien cours du fleuve Jaune n'est Mandabins celebbes 58 autre que le grand fleuve actuel Thsing- Hommes id 115 /id (et cette opinion nous parait tres- Passagebs id 1 vraisemblable) (*), les geographes ini- Feuues id 29 Pboduits divers. Soie lllee, crapes (•) Ce Oeuve ne communique maintenaut "°'*'^pisde(eutre,sel,COton, poires, avec le Hodu-^'-hd que [m- le r«'«-//J ou dattes, boeufs en grand nombre. grand caual Imperiul. C'cbl a I'epoque de Id CHINE MODERNE. 101 ()eriaux n'miraient pas dil faire de 'ancien cours dii llouncj-liO un fleuve a part. Antiquites divehses 100 La pliipart sont des ruines de villes fortes; on compte aiissi douze tours, dent une, situee an nord-est de 6V Tlioung - tcheou -fou. Cabactebe physique, a Test, cette province est bornee dans presque toute sa longueur par le fleuve Jaune; au midi par la riviere Han; a I'ouest par la Tartaric, etau nord par la grande muraille. C'est la province la plus occi- dentale de la Chine, et celle qui , seion les traditions historiques (voy. t. I, p. 56 et 109) , fut la premiere habitee par une peuplade de race civilisatrice venue de I'occident de la Chine, laquelle peuplade conserva longtemps des cou- tumes qui accusent son origine. C'est aussi dans cette province que I'ancienne dynastie des Tcheou etablit le siege de son empire, et c'est la aussi oii etait situe cet ancien T^ltat de Thsin , dont les rois, plus de 1,000 ans avant notre ere, eurent des relations avec I'Asie oc- cidentole (circonstance qui (it donner h tout I'empire le nom de Thsin, dans les lois indieuues de Manou: Tchina^ voy. CHINE MODEBNE. 107 1. 1, p. 2) , et d'ou sortit le fameux em- pereur incendiaire des livres , 249 ans avant notre ere. Les montagnes les plus renommees de cette province sont les montagnes fchoung-nan, Tai-hoa, Ou-yo, Louny- ti et Loung-men; ses priucipaux fleuves sont le Hoang-ho ou fleuve Jaune ; les Han, Wei, King et Lo-choui; ses pas- sages les plus difficiles sont les Thoting, fVou et San - kouan. II y a , dit - on , syllahe dii noin propre King thsing, nom qui i-st doniie en tote de riiiscriptioii', aii pieire d'lm monasUre du Td-thsiii [Id tlisiii sse sang) , qui apporia et propagea retle religion en Cliine. On pent consulter, an sujet de la propa- j;alion de la religion chrciicnnc en Cliine, nnc lettre inleressante de M. Keinaud a M. (;li, Lenorinant, sur plusieurs passages d'ecrivains arabes cpai v sont relatif):. (*) Tai-lfising-i-llwimg-lchi; k. iBa, f"a3. II y a ici une difliculte que nous n'avons pu lever qu'en supposant une fautc d'ini- pression dans le texie cliinois, et qii'au lieu desannees thlen-clnin , epoque de la repara- tion dn mnnumeut par les elrangers de Thill, on dnive lire tliii'ii-/!lii (tGix-iC^-iCi), epoqtie qui coinriderait avec eelle de sa de- couverte. Mais nous devons dire que rien ne nous antorise a supposer nne faute d'impres- sion dans le texte cliinois. La Geographie spfciaU A^ la province dn C/im-si , en f>o >ol., pnlilicc la 6« annee Kliaiig-lii (en lOG-), lie parle pas du monument de Si-ngan-fou] niais la i' edilion de la grande Geograpliie im|ieriali-, publiee en 176.',, k. 180, f" 4 v , |>oilela nienie date que Tcdition de 1-4; que nous possedons. ' (••) ynyM Uarez Semedo, Histoirc iiniver- sclte de la (;bine, traduction francaise, p aaS et le P. l.e Comtf, Lettre XI« * ' ' ' graphic impcriale. Le P. Le Comte ajoiite que les bon/es de ladite pagode oil .se trouve le monument Chretien ont cleve vis-a-vis une loiiguc table de marbre seiidjiable a la premiere, avec un eloge des divinites du pays (c'est-a- dire, des saints bouddhir/ues) , pour «' ditninuer en qiielque facon la gloire que la religion chrelienne ij a recue. » C'est la une erreur; les inscriptions bouddhiques que possede la nieine pa- gode ne furent point gravees et erigees dans I'inteiition supposee, puisqu'elles datent de la dynastie des Thang , c'est-a-dire, de la meme epoque que I'inscription chretienne. Le dcpartement de Si-ngan est plein de vestiges de I'antiquite chinoise; on y remarque, a chaque pas, des restes de monuments qui rappellent le souve- nir des faits historiques dont ce pa);s fut anciennement le theatre, et du se- jour de difterentes dynasties. Parmi ces antiquites , nous ne citerons ici que y edition (si on pent I'appeler ainsi), sur tables de pierre, des King ou livrcs sacres chinois (*), datant de I'annee 714 de notre ere, et qui est conservee dans I'interieur du college de Si-ngan, et une autre inscription sur pierre, conservee dans le meme college, appe- lee Aoit-pie, inscription ancienne, ti- ree du temple de I'ancien philosophe Khoung-tseu. TOMBEAUx. Oil trouve aussi , dans ce departement, les tombeaux de la plu- part des anciens empereurs de la dy- nastie des Tcheou; celui du celebre Tcheou-koung {**); ceux des rois du petit royaume de Thsin, qui existait deja plus de mille ans avant notre ere; celui de Tlisin-chi-hnang-ii , I'incen- diaire des livres , qui desct;..:ait de ces (*) Cette edition sur pierre coinprend In Y- liing des Trfieou ; le CItang-chou on le Lh-re des nnnales de la dynastie des Chang; le Mao-clil ou le J.h-re di-s T'ers ; le Y-li et le Li-ki, « Livres des Kites; •• le Tclnin- tlisieou, Annales du rovanme de Imu , ecriles par Khounc.-tseu ; le Tso-clii-lclioiiau , ou Cominentaire de Tso . clii sur le precedent ouvraj^e; les Cuuiinentaires de Klioung-yang et de Kho-iiang sur le niemelivre; le H'ldo- liing ou « Livre sur la pieic liliale » ; enfin, le iMi-yu et le F.ulh-ya. (") Voy. I. I, p. 84 et suiv. CHINE MODERNE. 109 niemes rois ; ceux des empereurs de la dynaslie des Ilan. On y ti;ouve aussi les tombeaux d'un grand nonibre d'hom- ines celebres, entre autres celui de I'an- cien philosophe Lao-tseu, lequel est situe au sud-est de la vil!e cantonale de Tcheou-wo. Temples. II y a , dans ce departe- nient, soixante-six temples dedies aux anciens empereurs des dynasties dont on voit les tombeaux, et a des person- nages ou philosophes celebres, coinme Lao-tseu. Un temple dedie a ce der- nier pbiiosophe est situe au midi de la villa cantonale de Tcheou-wo; il fut erige en Thonneur de Lao-tseu par le celebre empereur Timii-chi-hoang-ti (plus de 200 ans avant .1. C-); il fut restaure en 295 de notre ere. MoNASTEiiES. Les monasteres ysont au nombre de guarante-sept. Dans ce nombre on compte le « nionastere des « cent Pagodes » ou Tours bouddbi- ques, situe a cinq lieues au sud de Tchang-gan , ou Si-ngan-fou ; celui dont il a ete question ci-dessus, et qui renferme I'inscription djte de Singan- foil. La plupart de ces monasteres sent bouddbiques. VIII' PROVINCE. Kan-sou. Capi- lALE : Lan-tcheou-fou. Population en 1812 : 15,193,125 h. Apebcu genekal. La province de Kan-sou, qui faisait autrefois partie de celle du Che)i-si, a pour chef -lieu Lan-tcheou-fou (*) , ville situee a 404 lieues au sud-ouest de Pe-king;e\\e a 212 lieues de lest a I'ouest, et 241 du midi au nord ; elle comprend neuf de- partements , sept arrondissements , et cinquante et uii cantons. Les departements sent : 1 " Lan - tcheou -fou ; 2" Phiiuj-liang-fou ; 3" Koung -tchayig -fou ; 4" King-yang-fou; 5" Ning-hia-fou ; 6° Si-ning-fou ; 7° Liang-tcheou-fou ; 8° Kan-tcheou-fou; 9" Tchln-si-fou. (*} Cette ville est nouimee Lin-ihao-fou dans la Geographie iniperiale; VAlmanacli officiel imperial de 1844 la uomme Lau-lJitioufou. Caractebe physique. La province de Kan-sou forme le prolongement de celle du Chen-si dans la Mongolia et le desert de Kobi , ou Unit la grande mu- raille. C'est ua pays montagneux et plein de deliies qui bnt ete appropries a la defense de la frontiere cbinoise ; a I'ouest, cette province confine au Tbi- bet, et au nord aux Lieou-chd ou « sa- « bles inouvants; » elle est traversee par le fleuve Jaune. Capitale. Lan-tcheou-fou , la capi- tale, est une ville fortiliee , peu remar- (juable, d'environ une lieue de circon- terence , situee a quelque distance du fleuve Jaune. Son commerce consiste principalement en peaux de diverses sortes , provenant de la Tartaric , et en etoft^s de laine grossiere fabriquees dans le pays. C'est dans la ville departementale de Koung-tchang , entouree de montagnes presque inaccessibles, que Ton voit un temple eleve a Fou-hi. IX' PROVINCE. TCHE-KIANG. CAPI- TALS : Hang-tcheou-fou. Population en 1812 : 20,236,784 h. ApERCU GENERAL. Cette province est I'une des plus riches et des plus interes- santes a connaitre pour un Europeen. C'est aussi I'une des plus fertiles de I'empire chinois, et ou il se fait le plus de commerce. Elle a pour capitale Hang-tcheou-fou, ville situee a 330 lieues au midi de Pe-king, et a 88 lieues de Test a I'ouest, et 128 du midi au nord. Elle comprend onze departe- ments, un ai'rondissement, etsoixante- seize cantons. Les departements sont : 1° Hang - tcheou -fou ; 2° Kia-hing-fou ; 3° Hou-tcheou-fou ; 4° Ning-po-fou; 5- Chao - hing -fon ; 6" Tai-tcheou-fou ; 1° Kin-hoa-fou ; 8° Khin - tcheou -fou ; 9° Yen-tcheou-fou ; \ 0° Jf^en - tcheou -fou ; 1 1° Tchou - tcheou -fou. Caractere PHYSIQUE. Cette pro- vince est bornee, a I'orient, par la mer, qui baigne gudtre de ses departemeuts : 110 L'UNIVKRS. Kia-himj, Ningpo, rdl-tcheou et /f en-fcheou; au niidi , p;ir la proviuce de Fokien ; a I'ouesl , par de liaiites moiitagiifs , et, au nord, par In r(^iinion des ciiiq lacs que Ton nomme Tcii-hoii{*), le grand lac. Ses moiitagnes les plus renommees sorit la inontagne Iloei-ki , la montagne ThUn-mou , « rOrcille du « cif I ; » la montagne Sse-ming ou des « qiiatre clartes •, » les montagnes Thien- taiy et Kin-hoa , ou de la « fleur d'or. >- Ses fleuves les plus considerables sont le TcM-kidng, qui a donnc son nom a la province, lemiel n'est lui-m6mequ'un bras du grand AMng ; le P'ou-yang- kidng, et le iHnhd , ou canal Impe- rial. Tout le pays est couvert de mon- tagnes dont le soulevement semble n'avoir aucun caractere syst^matique; mais ces montagnes sont presque aussi bien cultivees que les plaines ou les valines les plus lertiles. Outre le grand nombre de cours d'eau naturels, I'in- dustrie des Chinois a construit de nombreux canaux qui contribuent en- core a r^pandre partout la fertility et la vie. Chef -LIEU de la province. La capitale de la province de Tche-kidng est Hang-tcheon-fou, situe pres du cp.- lebre lac Sl-hoU , qui a deux lieues de circonftrence. Cette ville fortifiee a trois lieues et demie de circuit ; dix por- tes par terre,et quatre par eau. La population a 6te estimee a plus d'un million par les missionnaires catholi- ques. "Cette population, dit Staun- « ton (**), est immense, car ou pretend « qu'elle 6gale presque celle de Peking. « Cependant la ville n'a en apparence « rien de grand que les murailles qui « I'eutourent. Les maisons sont basses. « II n'y en a point qui ait plus de deux « etages. Les rues sont ^troites et pa- « v6es avec de grands quartiers de • pierre dans le milieu, et de petites « bierres plates sur les cot^s. Toutes « les maisons des pritici pales rues ont « des boutiques ou des magasins sur le • devant; et plusieurs de ces magasins «ne sont point inferieurs aux plus ■ brillants de ceux qu'ou volt h Lon- n Voir ci-devant , p. 68. (•*) Relation de I'ambassade de lord Ma- cartney. n dres, dans le incme genre. On fait, a n llang-tcheou-fuu, un commerce tres- K etendu et tres-actif dc soierics; ou y « vend anssi beaucoup de fourrures et « de large drap d'Angleterre. » Ce sont des hommes qui tiennent les boutiques, et lion des femmes; celles-ci sont oc- cupees en quantite immense dans les manufactures de soieries et d'etoffes brocliees d'or, qui sont plus nombreuses a Hang-tcheou que dans aucune autre ville de la Chine. Van Braam (*) decrit ainsi la m^me ville : « /^o?/g'-?cA(;oMasoixanfe/i(**)de circonference {six lieues). Sa forme est irre^uliere; tantot le rempart est cir- culaire, tantot droit, tantdt encore il se courbe a cause de hautes montagnes. L'interieur de la ville est assez bien b.lti , et reiiferme plusieurs belles mai- sons. Divers fosses la coupent. Les rues ne sont pas fort larges, mais elles sont bien pavees avec de fortes pierres de tailie. En les traversant, j'ai remar- qu6 de grandes boutiques bien assor- ties,et des magasins de toutes sortes de marchandises, et, entre autres, a mon grand etonnement, trois boutiques d' horlogerie , et un grand nombre d'autres remplies de janibons fumes. « J'ai vu plusieurs arcs de triomphe de pierre tres- jolis, et deux considera- blement grands et maj^nifiques , places immediatement Tun a cote de I'autre, et en dedans de la porte de la ville. Pres de cette porte , on a mis deux pieces de canon, d'environ six livres de balles, montees sur des affdts a trois roues. « Dans Tune des rues, j'ai reraarque une mosquee mahometane. Sur la frisc est peinte une inscription arabe, qui si- gnifie : « Ce temple a ete eleve umquement « pour prier Dieu. Tons ceux qui y « entrent ne doioent penser qu'd- lui. « L'essence d'un temple est telle , que « tout lieu ou Ton invoque et sert (*) Voyage de I'ambassade de la Compa- gnie des Indes orientales hollandaises, vers i'enipereur de la {]liine, dans les annees 1794- 1795; Philadelplite, 1797, 2 vol. in-4''; t. I, p. 37C. (•*) La Geocrapliie imperiale que nous posscdous ne lui douue que 45 it, ou 4 lieufs et dtuiie. CHmE MODERJNE. Ill « Dieu devient un lieu saint. II est « plus avantageux pour Thorn uie d'etre « sans cesse occupe de I'idee de Dieu , « que de celle des choses d'oit peut « naitre le mal. » Plusieurs ecrivains , a commencer par le P. Martini et le P. de Magail- lans, ont soutenu que la ville capitale, nommee Quinsal par Marco - Polo et Rachid - Eddin , etait Hang -tclieou- fou, capitale de la Chine sous la dy- nastie des Soung (qui fut renversee par les Mongols), etque, pourcette raison, on surnominait King-sse, la fille ca- pitale, la CoKT souveraine. Cela est tres-vraisemblahle; niais il _y a une grande, une immense exageration dans le nombre de ponts que le voyageur venitien donne a la ville chiuoise, qu'il porte a 12,000. Ces douze mille ponts de .)/arco-fo/o sont aussi vrais que les dix mille autres ponts donnes recem- ment a Sou-tcheou (*), rivale de Hang- (') Voy. ci-devant, p. 67-69. La grande Geographie imperiale de 1744 n'enurnere que trente-sept ponts a arches voiitecs dans tout le departenient de Sou-tc/ie'ou , el dont I'un, coiisUiiit en pieire sur le grand canal, a 90 arches. A propos de ce pont , que Ton pourrait croire aussi une invention des re- dacteurs de la Geographic imperiale, voici ce qu'en dil John Barrow, que Ion n'accusera pas de credulite, dans son Voyage en Chine. « C'est dans les environs de Soti-tclieou-fuu « qu'on voit, sur le hras d'un lac qui commu- « nique au canal Imperial, le pont de qitalre- « vingt-onze arches dont j'ai fait mention. Je ■< regretle beaucoup d'avoir passe pendant la « nuit devant ce pont extraordinaire. II atlira « ratleniion d'un Suisse qui etait au nombre « de nos domestiques. Tandis que les yachts << longeaient le poul , cet homme se mit a ' « compter les arches ; et, voyant que le nom- « bre allait toujours croissant, il courut dans « la chambre avec beaucoup de vivacite , et « nous dit ; — Messieurs, venez, je vous prie , « sur le tillac; il y a la un pont comme je « n'en ai jamais vu ; il ne finit pas. — Nous « montames aussitot sur le lillac , el , malgre « lobscurile, nous distinguames assez bien, « du cote de Test , les arches d'un pont qui "s'etendait, parallelemenl avec le canal Im- « perial, sur lebras dun vaste lac affluent. » (Voy. ci-devant, p. 69.) La meme Geographie imperiale n'enumereque 21 ponts dans le de- partement de Hang-tclteou , dout deux dans la ville vAxaa. tcheou, par un envoye officiel fran^ais, qui lui attribue aussi une population de dix millions d'anies (*) ! Lac Si-hou, ou « lac occidental (**).» Ce lac , Tun des plus celebres de la Chine, est situe a une petite distance de Hang-tclieou-fou; il est peu d'ouvrages d'imagination dans lesquels ce lac ne figure ou ne soit cite. II a ete le sujet d'une foule de traditions plus 011 molns extraordiiiaires, qui ontdefraye Timagi- nation des poetes et des romanciers chinois. Situe a une petite distance a Vouest de Hang-tcheoufou, il est eu- toure de trois cotes par des montagnes. A Tepoque ou le celebre Sou-che etait prefet de Hang-lcheou , il fitconstruire m\& longue digue au milieu du lac, pour servir de voie de communication, laquelie voie comprend six ponts. On lauomme maintenant la digue du grand Sou. Voici de quelle maniere en parle IM. Barrow : « Apres avoir navigue une grande partie de la journee, a travers une foret de muriers, plantes avec beaucoup de regularite, nous arrivatnes , le 10 no- venibre (1793) , a Hang-tcheou-fou, ca- pitale de la province de Tche-kidng. Ici , le bras du canal Imperial qui com- munique avec le Yang ' tse - kidng , se termine en un bassin vaste et commode, qui, a notre passage, etait rempli de jonques et de bateaux. De ce bassin sortent plusieurs petits canaux qui pas- sent sous des arches, traversent la ville dans differentes directions, et sejettent, au dela des remparts , c est-a-dire , du cote du couchant, dans un lac qu'on appelle le Si-hou. « La beaute naturelle et artilicieile de ce lac surpassait de beaucoup tout ce qui avait Jusqu'alors frappe nos regards en Chine. Les montagnes qui Tenvi- ronnaient etaient fort elevees, varices dansleurs formes et extremement pitto- resques; et les vallees remplies d'arbres (*) La pluparl des journaux franQais ont , a propos d'une exhibition d'articles chinois, repele ces fables, ce que Ton n'aurait plus era possible de nos jours. (•*) Voir la planche XV, tiree de I'ambas- sade de lord Macartney. Cette belle vuc re- prcsente, sur le premier plan, la vallee des Tombeaux, et, dans le lointain, le Loiu- foung-tha; ou « U Tour des veati tonnaau. » Ill L'UNIVKKS. je difff rentes «'S|)e(Ts . ikuiiii Ics- (luelles nous en rcn)arqu;lines tiois sin- Kulierenieiit frafipantes, noii-seuleiiient a cause de leiir beaute intriiisei|ue, niais |)ar le contrasle quelles fonnaient avec le restede la foret. Ces trois sortes d'arbres etaient le cainphrier ( laurns (•amphora), \'ai\nc a suif {croton sebi- fentw) , et I'arbre de vie {thuya orien- 'talii). Le feuiliage oiair ct brillant du premier, entreinele avec ies feuilles pourpree^ du second, et doininc par le vert tres-fonce du grand et niajestueu.v arbre de vie, produisait un effet tres- agreabie a la viie. Ce qui nous reiidait ce pavsage encore plus intcressant , etait la variete singuliere de plusieurs inounnients consacres au rcpos des morls, et places sur la declivitc des co- tcaux voisuis. La, ainsi qu'ou le voit ailleurs, le cypies melancolique crois- sail pres des tonibeaux. Plus jjaut, on avait ouvert des allees dans Ies bois ou etaient construits des rangs de petils ^ifices peints en bleu, avec des colon- nades blanches. ISous reconnumes , en Ies examinant, que c'ctaient aussi des denieiires des morls. Des cercueils nus, etd'uneepaisseur extraordinaire, etaient deposes ca et la sur la terre. « Le lac s'etend des murs de la ville au pied des montannes, et forme divers bras qui arrosent de nombreuses vallecs couvertes d'arbres. Non-seulement il procure de grands avantages aux habi- tants de J/a7uj-tcheuu-fou , mais il est le theatre de leurs amusements. A la verite, ces amuseuieuts qui consistent, en grande partie, a se promeiier en ba- teau, n'appartienneiit guere qu'a Tun des sexes. Peu de fenimes , excepte cedes qui traliquent de leurs charmes , se joignent a ces parties. » KXCURSION SUR LE LAC Sl-HOU. « Nous limes avec notre excellent com- pagnon de voyage, Jf^'amj-ta-j'ui, une partie de plaisir sur le lac Sl-huu. iNous nous wnbarquames dans un superbe yacht, auquel on en a vait attache un autre pour nous servir de cuisii»e. Le diner (•ommen(;a au moment oil nous mimes le pied a bord, et ne cessa (|ue lor.sque nous descendimes a terre. On uous ser- vit successivement au moins cent plats differents , parmi lesquels il v avait d'excdlentes aiiguilles, pechtics "dans Ic lac, et preparces lout de suite, de di- verses maniercs. L'cau du lac etait aussi ciaire que du cristal. « xNous rencontrAmes un nombre in- fiiii de bateaux qui allaient ou venaient, tous agreablement ornes de peintures, de dorures , de pavilions et de bande- roles flotlantes. Les bonis du lac etaient converts d'edifices tres-legers, parmi lesquels on en distiriguait un plus solide et plus considerable, qu'on nous dit appartenir a I'empereur. Les terrains etaient enloures de murs, et, pour la plupart, converts de legumes et d'arbres fruitiers. II y en avait ou Ton cultivait les fleurs et les arbustes les plus estimes dans le pays. « Parmi les arbustes les plus reniar- quables du lac Si-hou, etaient la ket- mie changeante {hibiscus mutabilis) , la ketmie de Syrie {hibiscus sijriacus), le lilas {syriiKja cutgaris), et le miirier a papier. INoiis y vimes aussi une es- pece d"acacia {inimosa), la crotalaire {croluLaria)^ Talisicr {cratxyus) , le rosier, le nerprun (77tam/<«A), le su- reau {sambucus), le genevrier et le co- toiinier. « II y avait des pavots doubles, cou- leur de pourpre , dont la bcaute nous frappa; des lotus fleuris ( nelumbium) , qui croisseut dans tous les lacs et les etangs, et une espece de pivoine {pieo- 7iia) dont les Chiuois peignent soiivent la fleur sur les grands papiers avec les- quels ils tapissent leurs appartements. JNous remarquames plusieurs sortes de jolis baumes, une espece d'amarante, une immortelle {xeranthemum) et le (jnaphaiium. » On compte, dans ce departement, 34 grands temples et 30 monasteres. ISkx.-po. La ville la plus importante de la province de Tclie-kidny , apres /lang-tcheou, est I\ifig-po, appelee par les Portugais Liam-po, de pres de deux lieues (18 //) de circonference. C'est une ville maritime situee a six lieues (60 //) du rivage de la mer , au confluent de deux petiles rivieres dont la jonction forme le canal navigable qui relie.Vwg- po a la mer Orientale , et fait de celte ville un excellent port de mer. Aussi est-il un de ceux qui ont ete ouverts aux Kuropeens par le traite anglais de Nan- hiu'j, en dale du 27 octobrc 184-'. C'est CHINE MODERNE. 113 le port principal du commerce cliinois avec le Japon, Nangasaki n'en etant qu'a deux journees de navigation. TiNG-HAi. Le canal de JSing-pb est assez large et assez profond pour porter des vaisseaux de deux cents tonneaux . L'enibouchure dela riviere estdefendue par une forteresse et par une petite ville nominee Ting-hat, situee dans une pe- tite lie a 26 Jieues (260 li) a I'est-nord de Ning-po, autrefois chef-lieu de can- ton (/««e?0> niais maiatenant (d'apres TAImanach imperial del844) chef-lieu d'un district {ting)) ressortissant (/j Hen ou du Lis d'eau. » ('*) Gcogiaphie imperiale, k. 264. 118 L'UNIVERS. se distingue de loin par scs tours carnn- lerisliques du cultfl bouddliique, qui sontd'nne grande elevation. Amoij ou Hia-men est la residence de noinbreux inarchands chinois, qui y possedent plus de 300 grandes jonques, et qui font un commerce etendu, nou- seulement avec tous les ports de la Chine, mais encore avec ceux de I'ar- chipel Indien et du Japon. Ce nort est consid^r^ comme le grand niarcbe de la province dc Fu-kieii. La plus forte partie du commerce de Formose, qui est tr^s-etendu, se fait avec les Jonques appartenant aux negociants d'Amoy. Cos dernieres se rendent dans tous les ports occidentaux de formose, et elles s'en retournent cliargees de riz, ou elles se rendent dans lenordde la Chine avec des cargaisons de Sucre. Thai-wan (la Bale de la tour), noni- mee par les Europeens Ile de Formose. Ce departement, place a une cer- taine distance des cotes de la Chine, n'a fait partie integrante de I'enipire que vers la fin du xvi" siecle. La ca- pitale de la partie occidentale de Tile, qui est soumise au gouvernement chi- uois (la partie orientate, separee de la pr^cedente par une forte artere de montagnes, appartenant encore aux in- digenes), et de tout le groupe d'iles connu sous le nom d' a ijes des P^« cheurs, » est Thai-todn, eloignee de 725 lieues de I'e-king, et distante de 54 lieues de Fou-tcheoufou. La partie ohinoise de Hie, vis-a-vis les iles Pheny-hod « lies des P^cheurs, » a 10 lieues de largeur de Test a I'ouest, et 284 lieues du sud aunord (*); c'estla, {^*)Tai-tlising-i-toung-tchi , k. 271, f" i; el Tsio-tchl-thsiduan'lan, province de Po- ^'o, 1^ 35. Ce«e grande etendiie parait dif- •icile a admettre ; cepeadant les deux, aulo- lilt's cliinoises cilees dans le texle, autorites otticiflles, donncnt bien 3,846 /» et 2,800 it d'etendue a Thai-wdn dans sa plus grande longueur. Mais, d'un aulre cole, les meil- leures carles geographiques europeeniies ne donnent pas i I'ile de Formose plus de 4 de- gres el demi de longueur, c'est-a-dire , iia lieues el demie d'etendue, de a5 au degr^. Nous repeterons ici, a ce sujet, une remar- que aue nous avons deja faite ailleurs : c'est que les nitsurcs geographiques indiquees flu moins, I'etendue que lui donne la grande Ceograp/iie hnperiale chhioise (edit, de 1743). Ij Almanach imperial de 1844, impf ime^a Pe-king, lui attribue 2800 li ou 280 lieues. Elle est divisee en quatre cantons, et le prefet de ce departement recoit 1,600 lidng ou 12,800 fr. de traitemont. Les cantons sont : 1° Thai-wdn-hien, 13 ^coles, 20 vil- lages chinois, 3 villages indigenes. 2" Foung-chan-hien, ISecoles, 78 vil lages. Situ^ a huit lieues au midi du prece- dent. 'S" Kia-l-hien , 13 ecoles, 4 villages chinois et 32 villages indigenes. Situe a douze lieues au nord de Thal-wdn-fou. 4" Tchang-hoa-hien, 13 ecoles, 18 vil- lages chinois, 132 fermes chinoises et 51 villages indigenes. Situe a quarante lieues au nord de Thai-iodn-fou. La ville de Thai-wdn fut enceinte de murs la troisieme annee young-tcking ( 1725 de notre ere). Ces murs ont 6,763 metres de circonference; ils sont perces de sept portes, au-dessus de chacune desquelles est une tour cr^nelee. Les autres villas, chefs-lieux de can- tons, sont aussi fortifiees. Population. La population de I'tle Formose etait, en 1743, de 19,822 chefs de famille contribuables inscrits aux roles (*). Impotfoncier. i^wargr. ,245,760 fr. — En riz, 169, 440 hect. Ces impots ont ete diminues de beaucoup, par suite d'un grand eura- gan qui, en 1782, ravagen toutes les cotes de I'ile. Voici, d'apres V Alma- nack imperial de 1844, le chiffre ac- tuel des divers impots quepaye chaque canton : par les Chinois, lorsque ces mesure^ ne sonl pas le resullat d'operalions trigonometriques fajtes par les anciens missionnaires jtauites, sont ircs-pcu exacles, et ne doivent inspirpr que tres-peu de confiance. (*) C'est par erreur que, dans le t. Ill deVOccanie, p. 577, la populaliou de For- mose n'esl portee qu'a 1,748 individus, pour la population cliinoise seulemenl ; c'esl a peine la population d'un village. CHINE MODFRNF. 119 ^ — mi smi Salaires en liang i" Chi ou hetloUlres de riz. r Thai-wdn-hien 50,991 . . . ?,» Fournj-chun-hien 43,748. . . 3° Kiu-i-hien 47,686. . . i" Tchang-hoa-hien • 42,492. . . TOTALX 184,917 2" iinpi5t en liing, valant 8 fr.i ... 2,326.... ... 1,710.... ... 2,146. 1,119. 3,815 . 7,301 43,552 3° Heelofiires d* grains. vnlant 8 fr . 17,555 1,000 . 7,140 800 15,042 800 , ■ ■ 800 3,400 Le premier de ces imi)6ts est un impot foncier proportionnel ; le second est un impot indirect, dont sont frap- pes les marchandises et objets de con- sommation de diverses natures : ils s'elfevent a 58,408 fr. de notre mon- naie ; le froisieme est une charge fixe etdetermi nee pour I'entretien des fone- lionnaires publics; et le quatrieme est le traitement en argent de ces inemes fonctionnaires : il se nionte a 27,200 fr. VihT/ial-icdn, ou Formose, {utvi- sitie par I'infortune La Perouse en 1787, ainsi que plusieurs parties des cotes orientales de la Chine. Cette ile a eu tour a tour quelques-uns de ses ports occupes par les Japonais , les Hollandais et les Anglais. Selon la Oeographie imperiale{*), ellefut, dans i'antiquite, comprise par les Chinois dans ce qu'ils nommaient « le terri- n toire nomme Iloang-fou, — le rfo- « maine xmgue de Cenipereur, » qui n'avait aucune communication avec la Chine. Plus tard , les Chinois nomme- rent les habitants de File Thai-ivdn, « barbares orientaux. » Sur la fin de la dynastie des Ming (de 1621 a 1624), alors qu'elle appartenait aux Japonais, et que les etrangers auxcheveux rouges, les Hollandais, en occupaient un port, elle fut nommee Ki-loung, du nom meme du port. Les principales productions de I'ile Formose sont le riz, le sucre, dont une i^rande quantite est expediee dans toutes les provinces de la Chine, meme h Pe-king ; les differentes especes de grains ; presqiie tous les fruits des Indes, tels que les oranges, les ba- nanes. les ananas, etc.; plusieurs de ceux d'Europe, tels que les peches, les abricots, les figues, les raisins, les cha- taignes, les grenades et les melons d'eau. Le the vert y vient aussi en abondance; le sel ysuffifa la consom- (*) Tai-llising-i-thoiing-tclii , k, 271, f" i. matlon ; le soufre y est abondant et de bonne qualite; on en expedie beaucoup en Chine. La nature volcanique de rile faitqu'on y trouve peu d'eau bonne a boire,idu moins pour les etrangers, sur lesquels celle des sources et des ri« vieres a un effet dangereux, et quel- quefois mortel. Dans un projet de conquete de I'ile Formose, presente au gouvernement anglais, on lisait : « La possession de « Formose et des Pescadores, ou « ties « des Pecheurs » {Pheng-hoti) , parait « devoir assurer, a ceux qui I'obtien- « dront, le commerce de la Chine. « Cette ile est situee sur une partie « vulnerable de I'empire, et sa position « insulaire la met a Tabri de toutes « les tentatives de ce pays, n Le commerce de Formose est n^- « cessaire a la Chine, car cette ilefour- « nit a deux des provinces de cette « contree une grande partie de leurs « subsistances ; elle est a trente lieues « de Fo-kien, province qui fait tout le «■ commerce exterieur de la Chine , « excepte avec les Europeens, et la « plus grande partie du commerce de « cabotage de I'empire. ^ « Vinsi, etajit maitres de Formose^ « nx.tis le serions aussi directement « ou indirectement dhine grande « partie du commerce du Japon , de « la Coree , de la Cochinchine , de « Siam, et des iles de rarchipel In- « dien; et m6me I'avantage decide de « la position pour le commerce de la « Chine nous mettant en etat de vendre « a meilleur marche, nous en aurions, « par consequent, un plus grand de- « bouch^, et de meme nous obtien- « drions le the et les autres objets a « plus has prix... // n'y a pas dans « fout le monde un point a occuper « qui, sous le rapport des' entreprises « cummerciales , qffre tin champ si « vasie et si impoi'tant. IM L'UNIVKRS. <• Formose possedc tant d'autrcs « avantagcs, que I'on a peine a conce- « voir comment les idees ont pu se « porter sur uii autre endroit, etc. » II faut bien que le gouvernement anglais (qui, on doit lui rendre cette justice, s'occupe assez bien des inte- ms de sa nation) n'ait pas trouve la niilisation dn projet exposd ci-dessus BiM inconvenients, puisqu'il iie i'a pas encore mis a execution. II est probable toutefois qu'il n'est pas reste complete- nient dans I'oubli ; mais il est probable aussi que le gouvernement chinois, qui a su se faire rendre Tcheou-chan {Tchou-san), malgre les journaux an- Slais qui voulaient conserver cette ile en epit du traite de Nan - king, a aussi I'oeil ouvert sur Formose (*). XV* PROVINCE. KOUANG - TOUNG. Capitale : Kouang-tcheou (on Can- ton). Population en 1812 : 19,174,030 habitants. Apebcu genbeal. La province de Kouang'toung {orient etendu) a pour capitale Kouang-tchiou-fou , appelee par les Europeens Canton, ville situee a 757 lieues (7,570 li) au sud-ouest de Pe-hing. Elle a 250 lieues de Test a I'ouest, et 108 du midi au nord(**); elle comprend neu( departements , sept arrondissements , et soixante et dix- huit cantons; plus quatre arrondisse- ments ressortissant directement au gouvernement central de I'empire. Les departements sont : 1" Kouang-tcheou-fou , (*) Nous renvoyons , pour plus de details relatif) a I'importante ilc de Formose (sur laqupjle Louis XVI avail des projets qu'il nvait conGes a La Perouse, deux hautes des- tinefs tranchees avantle temps!), aux Voya- ges de Valentyn, I. TI; a ceux de la Com- pagnie hollandaisc dans les Indes orientates, t. V ; a la Relation du P. Maillot, piibliee dans les J.ettrrs fjlfiantcs, I. XIV, etc. \a Notice sur Formose, t. Ill de VOceanie, p. 577, offre un resume tres- court des prin- ciptles notions doiinces par des Europeens sur cette ile cclebro. (") V Almanacli imperial (Je 1844 porte 180 lieues, i,8oo //, au lieu dc 1,080 li que donne la Grande geogranliie. 2° 3° 40 5" 6" 7" 8° 9" C/iao-tc/ieou-/on , Uoei-tcheou-fou , Tchao-tcheou-fou , Cfi no-fch ing-fou , Kao-tcheou-J'ou , lAun-tcheoufou , Loui-tcheou-fou , Kh ioung-tcheou-foic. Cabactere physique. La province de Kouang-toung est Tune des pro- vinces ineridionales les plus inipor- tantes de la Chine. C'est la plus connue des Europeens , et celle avec laquelle ils font le plus grand commerce. Elle est bornee, a Test, par la province de Fo-kien; au nord , par cdle de Kiang-sl et les Ou-liiig, ou Cinq chaines de montagnes, dont I'une, nora- mee Mel -ling, est la plus celebre; a I'ouest, par le Gan-nan {Annam on Tonquin) , et au midi, par la mer. On compte plus de deux mille inontagnes dans cette province; mais les plus re- nommees sont : la chaine des mon- tagnes Jaunes {Hodng-ling) ; le L6-feou, qui a 50 lieues de largeur,et 11,340'" (3,600 tchdng) de hauteur (.'). Ses prin- cipauxfleuves sont : le Si-kidng, le/'e- kid7iget le ToiJing-kidng. Le territoire de cette province est tres-fertile; il produit de Tor, de la sole, des pierres precieuses, de I'etain, du vit-argent, du cuivre, du fer, de I'acier , du salpetre , du sucre , et des bois odoriferants tres - recherch^s ; la plupart des fruits d'Europe, beaucoup de poissons, etc. Chef-lieu de la province. La capitale de la province est Kouang- tcheou, ou Canton, nommee aussi poe- tiquenient Yang-tching « la ville du « belier, » ville avec enceinte fortifice , situee sur le bord du fleuve Tchoii- kidng, ou « fleuve des perles, » que les ecrivains europeens nomment ordinai- rement le Tigre, du nom chinois de son embouchure: Hoit-?ndn, « portes « (lu Tigre » {bocca Tigns). Ancienne- ment Canton avait trois miirailles d'en- ceinte; du temps des Ming, dans les annees 1368-1397, des trois on n'en fit qu'une seule, qui eut 11,957 metres de circonference (trois lieues), percee de huit portes ; un fosse plein d'eau, de 7,421™ d'etendue, longe ce mur d'en- ceinte. Dans les annees kia-tksing CHINE MODERNE. 121 (1522-15G6), un nouveau rempart ou mur d'enceinte, de 3, .MO"" de developpe- nient, fut eleve en face de la riviere des perles, a quelque distance en avant de I'ancien. C'est pies de ce dernier que sont situees les factoreries europeennes. La ville de Canton se trouvant de- crite plus ou moins exactement dans beaucoup d'ouvrages europeens, nous y renvoyons nos lecteurs (*) , en nous Dornant a dire ici que la population donnee a Canton par plusieurs ecrivains est purement hypothetique , aucun do- cument officiel chinois n'ayant servi de base a cette estimation. Canton renferme plusieurs beaux edi- fices publics, au nonibre desquels on distingue plusieurs temples et monas- teres bouddliiques ou tao-sse, avee des tours a huit ou neuf etages; une mos- quee mahometane comprise dans la vieille ville chinoise; le grand college si- tue au midi de la ville , et qui fut fonde sous les Soung, en 1096 de notre ere. On compte ordinairement dans ce col- lege quatre niille etudiants. Parmi les temples, on remarque prin- cipalement le « temple de la mer meri- « dionale » {JSdn-hai iniao) , situe au sud-est de la ville. Ce fut sous les Soui (14* annee kai-hoang ^ 594 de notre ere) que Ton y etablit le sacrifice au genie de la mer meridionale. Dans le nombre des monasteres, on distingue celui de « I'eclatante piete « tiliaie » {kotiang hido sse) , situe au nord-ouest de Canton, et dont la fon- dation remonte aux premiers siecles de notre ere. Ce n'eiait alors qu'une es- pece de jardin ou d'ermitage cham.- petre. Dans le quatrierae siecle (en 362), un pretre bouddhique du pays de Ki-pin (Copnene des anciens, le Caboul actuel) comraenca a en faire un mo- nastere qu'il nomma le « monastere de « I'enclos royal « {ivdtig wei sse). De- puis lors, cette retraite bouddhique recutdiverses denominations. Deux autres monasteres bouddhi- ques : celui de « la pure intelligence » {thsing hoelsse), sitae non loin du precedent, et celui de « la foret de (*) La description la plus exacte de Canton se trouve dans le C/iinese Repository, vol. 2, Canton, i833-34,p. i45etsuiv. "(leurs » {h6n Hn sse), situe au sud- ouest de la ville , furent fondes sous les lAang (de .520 a 540). Les autres furent fondes , pour la plupart , sous les Thang et les Soung. C'est a une petite distance de Can- ton que se trouve, au milieu du Tchoi'i- kidng , ou « fleuve des perles , » Tile de fkliampoa ( Hoang-pou ) , ou rela- chent ordinairement les vaisseaux qui remontent la riviere de Canton, et ou fnt signe, le 24 octobre 1844 (*), le Trait e conclu entre la France et la Chine, dit Traite de JVhampoa, qui reproduit les principales clauses du Traite anglais de Ndn-king, du 29 aout 1842, et du Traite americain de JVdng-hia, du 23 juillet 1844. Le departement de Kouang-tcheou comprend un district et quatorze can- tons; il est arrose par de nombreux cours d'eau qui fecondent d'immenses rizieres. Dans le departement de Chao- tcheou, situe au nord du precedent, et que traverse la grande vole fluviale de communication de Canton a Pe-kmg, se trouve le celebre et riche monastere bouddhique que I'on nomme « le mo- « nastere de la fleur meridionale » {jidn-hOa sse) , a six lieues au midi de la ville cantonale de Kiokiang ; il fut fonde par un bonze indien I'annee 502 de notre ere. On voit aussi, dans ce departement, un college ou grande institution litt^- raire, qui porte le nom du celebre phi- losophe Lien-ki {Tcheou-tseu) , fonda- teur du fameux systeme de philosophic naturelle que Ton vit fleurir sous les Soitng. Passage de MeT-ling. C'est dans Varrondissement de Nan-hioung {<\\x\ etait autrefois un departement), que se rencontre le passage difficile de la mon- tagne Mei-ling , que Ton est oblige de franchir pour se rendre de Canton a Pe-king. Selon M..Ellis (**), la route pa- yee qui traverse le passage de Mei-ling, (*) Ce traite, dans I'insertion au nulletin des loi^n° 12 56) porte, nous ne savonspour quels motifs, la date du 24 septembre , landis que le i y jour de la 9* lime de la 24* annee Tdo-kouang, repond reellement au 24 octo- bre 1844. (**) Journal de I'ambassade de lord Am- herst, t. II, p. 218. 132 rUNIVERS. dt.^an-hiaujig-tchemi (province dc Canton) a .\an-(ja)i-/ou (province de /), est I'ouvroge public qui, le grand canal Imperial, est ie plus reniarquable et le plus coniplct (ju'il ait vu en Chine. Cette route est payee en larges pierres de taiile ; une partie a etii creusee dans des rocliers a pic qui s'elcvcnt des deux cotes connue de hautes murailles. La partie la plus clevee de la gorge est ferniee par un mur au milieu duquel est une porte oii Ton a ^tabli un poste niilitaire charge de. faire la police de ce defile lellenientfrequente, que Ton se croirait au milieu de la ville la plus conimer- cante. On ne doit pas s'etonner de ce niouvement de la population , lorsque Von considere que tous les voyageurs et toutes les marchandises qui vont de Canton a Pe-kimj , ou de Pe-king a Canton, par la grande voie fluviale qui reunit les deux extremites de I'enipire, sont obliges de sortir de la voie fluviale pour franchir ce haul defile. Ile db Hai-nan. Pres des cotes de la province de Canton se trouvent des lies nombreuses qui en dependent. La principale est I'ile de IJaindn, ou « de « la mer meridionale, » qui forme un deparlement, dont le chef- lieu est A/iioung-tcheou-fou , et qui est divise en treize cantons. Cette ile, situee a 900 lieges de Pe-king, a 170 sud-ouest de Canton , a , selon la Geographic im- periale, 97 lieues (970//) de Test a I'ouest, et autant du midi au nord. FUle comprend trois arrondissements et di\ cantons. Khioung-fchiou, le chef-lieu, est une ville fortiflte, de 3 kilometres 36 metres de circonference , bStie sur un grand proniontoire, dans la partie la plus sep- tcntrionale de I'lle ; les murs d'en- ceinte, perces de trois portes, sont en- loures d'un fosse plein d'eau, de 13 metres de largeur. Le |)ort de Khioung-tcheou , forme par la riviere nommee Li-mdu {Li-m6u- kfdng , « la riviere mere de populations " aux cheveux noirs » ) , est tr#-fre- quente. L'lle de Uai-ndn est riche en pro- ductions natnrelles; on v com pte plus de 100 montagnes, dont quelques-unes sont tres-elevees , et 31 fleuves ou ri- vieres. On y trouve des mines d'or, (I'argent, des perles, des pierres pre- cieuses, des arbres rareg, coinme le hois d'aigle et le caluml)a tres-estiine des Orientaiix, ainsi que le hoa-H, especo de poirier, que les Europeens, a cause de sou odeur, ont nomine Lois du rose. L'ile produit aussi du sucre, du tabac, de I'indigo, des noix d'arec, de coco, des pamplemousses, etc. Le climat de la partie meridionale de l'ile est, dit-on, tres-nialsain; les eaux surtout sont niauvaises a boire. Le centre de Tile est herisse de hautes montagnes, et habite par des indigenes que les Chinois nomment Li Jin, « les n hommes aux cheveux noirs. » Ces hommes ne reconnaissent point I'au- torite chinoise. lis entretenaient au- trefois des relations suivies avec les nouveaux habitants de l'ile, auxquels ils livraient de Tor et de I'argent pro- venant des mines que renferment ces montagnes, ainsi que des bois pre- cieux , contre des produits manufactu- res; mais Tempereur Khang-hi, in- forme de la quantite considerable d'or que ce commerce d'echange faisait passer dans les mains des prefets et autres mandarins de l'ile , defendit , sous peine de mort, a tous les Chinois d'avoir aucune communication avec les indigenes. Cette defense singuliere a ra- lenti, mais non supprime, le commerce de I'or de i'ile de JIai-ndn, qui est encore maintenant , dit-on , assez con- siderable. ISATUBELS DE Hai-nan. ScIon Du Halde, les naturels de l'ile, hommes et f^imes, portent leurs cheveux passes dans un anneau sur le front , et par- dessus un chapeau de paille ou de ro- tin, d'ou pendent deux cordons qu'ils nouent sous le menton. Leur v^tement consiste dans un morceau de toile de coton noir, ou bleu fonce, qui les couvre depuis la ceinture jusqu aux genoux. Les femmes sont v^tues d'une espece de chemisette de la m^me etoffe, et se distinguent encore par des raies bleues qu'elles se font avec de Vindigo, de- puis les yeux jusqu'au has du visage. Les uns et les autres portent des bou- cles d'oreilles d'or et d'argent, facon- nees en forme de poire , et tres-bien travaillees. Leurs arine^ sont Tare et la CHINE MOPFRINE. 123 fleche, et line espece de coutelas qu'ils portent clans iin petit panier attache derriere enx a la ceinture. C'est le seul instrument tranchant dont lis so ser- vent pour tous les usages. Les nioeurs, le costume et le genre de vie des indigenes de Tile de Hai- nan ont uno graude analogie avec ceux des Miao-tseu , ou des anciens habi- tants de la Chine , retires depuis plus de trols mille ans dans les montagnes presque inaccessibles du Yun-ndn, de Kouei-tcheou , et de quelques autres provinces de la Chine; il est probable qu'ils ont la meme origine. Ilk de Houng-koung. L'ile de Hong-kong {hidng kidng , « ondes « odorantes , » dans le dialecte de Pe- king) , cedee aux Anglais par le traite de Nan -king, dependait anterieure- ment du canton de Sin-gan, departe- meut de Kouang-tcheou; c'est une ile assez malsaine, ct oii les Anglais pour- ront difficilement se maintenir a cause de son insalubrite. Elie est herissee de montagneSjiet a environ troislieues d'e- tendue dans son plus grand diametre. XVI'' PROVINCE. KOUANG-Sl. CaPI- TAL^ :,Kou€i4in-/ou. Population en 1812 : 7,313,895 habitants. Apekcu general. La province de Kouang-si (Occident etendu) a pour ca- pitale KoueUin-fou , ville situee a 746 lieues (7,460 li) au sud-ouest de Pe- Alwgi.Ellea 281 lieues de Test a I'ouest, et 296 du midi au nord ; elle comprend onze departements , seize arrondisse- ments , et quarante-sept ca«/o«s; plus deux arrondissements ressortissant di- rectement au gouvernement central de I'einpire. Les departements sont : 1" Kouei-lin-/ou , 2" Lieou-tcheou-fou, 3" King-youan-fou , 4° Sse-ngan-fou, .5° Sse-tchinq-fou , 6° Ping-lo-fou, 7" ff^ou-tcheoK-Jou, 8° Sin-tcheoufoii , 9° Nan-ning-fou y 10° Tai-ping-fou , H" Tchin-ngan-Jm. Cahactere physique. La province de Koitang-ai est Tune des plus eten- dues, et, en meme temps, I'une des moins peuplees de la Chine. Elle est si- tuee entre celles de Kouang - toung , IJou-kouang, Koiiel- tcheou et Ydn- nan ; au midi elle touche au Kiao-tchi ou Tonquin. De nombreuses mon- tagnes berissent son territoire; celle qui est la plus renommee est la mon- tagne Keou-leou , situee dans le depar- tement de Wou-tcheou. Ses plus grands fleuves sont le Li -kidng et le Tsang- ko kidng. La partie septentrionale de cette province, la plus elevee et la plus montagneuse, qui est en quelque sorte adossee a cette grande chaine de mon- tagnes elevees, prenant naissance dans la mer Orientale, 'entre les provinces de Fo-kien et de Tche-kidng ^ et allant rejoindre les hautes cbaines de I'Hima- laya , en separant les provinces de Po- kien, de Kouang -toung , de Kouang-$l et de Yun-ndn, des autres provinces de la Chine; cette partie septentrionale de la province de Kouang-si, disons-nous, est couverte d'epaisses lorets; et les nombreuses rivieres auxquelles ces fo- rets donnent naissance, suivant la decli- vite du sol, se dirigent presque toutes vers la partie orientale, ou elles portent la fecondite.U y a, dans cette province, des mines d'or, de mercure^ d'argent et de cuivre; des plerres precieuses, etc. On n'en exploite qu'un petit nombre. Capitale. Kouel-lin-fou , la capi- tale de la province, est une ville forti- fiee de douze li de circonference. Ses remparts, eieves sous les Soung et les Mongols , ressemblent, en partie, aux fortifications du moyen age; cequi fe- rait supposer que quelque Europeen au service des conque.rants mongols, comme Marco - Polo, ne fut pas etran- ger a leur construction. Passage de la Chine au Toung- KING. C'est dans le departement de Tai-ping que se trouve le celebre pas- sage par ou Ton se rend de la Chine dans le royaume du Toung-king ; on le noinme Tchin nan koudn, « passage «du midi surveiile, « ou « les colonnes « de cuivre » {thoiing tchou). C'est pat ce passage que les ambassadeurs du Tonquin portent leurs tributs a I'eni- pereur de la Chine. 134 xvn» PBOVTNCK. YtT!V-NAN. TALE : mn-nCm-fou. L'UNIVERS. Capi Population en 1812 : 5,561,320 habitants. APERfU GENERAL. La provincc de Ytin-ndn ( midi miagcux) a pour capi- tale Yiin-ndn-fou , ville situee a 820 lieues (8,200 Vi) au sud-ouest de Pe- king. Elle a 2.51 lieues de Test a rouest, et 160 lieues du sud au nord. Elle coni- prend qualorze departements, viiigt- six arrondissements , et trente-neuf cantons; plus (|uatre arrondissements ressortissant directement au gouverne- nient central. Les departements sent : r Ytm-ndn-Jou, 2» Ta-li-fou. 3° Lin-gan-fou, 4° Thsou-hioung-fou J 6° Tching-kianq-fou , *€* Kouang-nan-fou , T Chun-ning-fou , So Kio-tsing-Jhii , 9° Li-kiang-f'ou , 10" Phou-eul-fou, 1 r Young -tchang-fou , 12° Khai-hoa-fou , 13° Thoung-tcliouan-fou, 14° Tchao-thoungfou. Caractisre physique. La province de Yi'm-nAn, qui forme I'extremite sud-ouest du grand empire de la Chine, est bornee au nord par le Sse-tchouan et le Thou-fan, ou Thibet; a I'ouest, par les royaumes d'Assam , et de Mien ou d'Ava ; au niidi , par le Laos et le Tofing-king. Ses montagnes les plus renommees sont la montagne Ti^n- thsdng, ou « bleu d'azur,» situee a une demi-lieue a I'ouest de la ville de- partementale de Ta-li; la montagne Kl-tsoU ou du n pied de poule , » situee a 10 lieues au nord-est de la m^me ville; les montagnes Kao-li-koung et Yu-lofing ou « dragon de jaspe, » cette dernierc situee a deux lieues au nord- ouest de Li-kiangfou. Ses fleuves les plus considerables sont : le Kln-chd- Kidng , ou « (leuve au sable d'or, » qui prend sa source dans la montagne de la Vache {jou - nieOu ■ chdn) , situee dans le Thibet, d'ou, se dirigeant au sud-est, il penetre en Chine par la fron- tiere nord-ouest du departenient de Likiang, on passant a I'ourst du fort que I'ou nommc Thd-tching - koucln , « le fort a la tour bouddhique , « et se rend dans le Sse-tchouan; le lAn-tsdng- kidng prend egaleinent sa source dans le Thibet, au pied de la montagne noni- mee LoU-chi-chdn , « la montagne de » la roche des cerfs; » ce fleuve , se di- rigeant au sud-est, penetre aussi en Chine par la frontiere nord-ouest de Jl-kiang-fou , et, apres avoir traverse toute la province du YUn-ndn, sort des frontieres de la Chine en coolant au sud-est dans le Kiaotchi, ou Toiing- king, pour se jeter enOn dans la mer meridionale {ndn hdl). Le troisieme grand fleuve du YUn-ndn est le Lou- kidng , que Ton nomme aussi Nou- hidng. Ce fleuve, selon la graude Geo- graphic imperiale (*) , prend sa source dans les contrees nommees Si-yu, « contrees occidentales » (.pour la Chine), partie nord-est des Etats du Dalai-Lama, selon Tempereur Khang- hi, ou se trouve le lac Kara-noor. II traverse la partie occidenlale de Li- kiangfou , puis la partie sud-ouest de Young-tchang-fou ; etenlin, apres avoir coule au sud-ouest. dans la province de YM-ndn, sort de la frontiere de I'em- pire pour entrer dans le Mien-tien, ou royaume d'Ava, et serendre,de la, dans la mer meridionale. Un autre grand fleuve passe aussi dans la partie la plus occidentale de la province de Yfm-ndn: c'est le fleuve nomme Pin-ldng-kidng {**), ou « de « I'arbre qui porte I'arec, le Betel, » dont le cours inferieur, traversant le royaume d'Ava , recoit le nom indien d'irdvatl , qui signifie , en Sanskrit, pl€i7i d'eau, etant derive (Tfrd, la fejre, Veau, la parole! C'est ce fleuve dont le major Rennel a le premier re- connu I'identite sur la fin du dernier siecle, et qui porte , dans le Thibet , le nomde Yaeroudzongbotchoit, « grand « fleuve du Dzang ou Thibet. » Ce nieine fleuve, des le temps des Thang, est nomme , dans les geographies chi- iioises, Td kin chd kidng , « le grand « fleuve au sable d'or. « On trouve dans son lit, disent-ils, du yii, ou jadeorien- (*) Taithsing-t-thoting-tchl , k. 3o4,P'4. (*') /(i/V/., k. 3aa,f°i2. CHINE IMODERNE. 125 tal, de couleur verte , de For en strains et en paillettes , la pierre precieuse ap- pelee thsing cki, du tju ou jade noir, du cristal de roche, et quelquefois aussi du yii blaiic. Au pied des montagnes cjiril traverse, on recueille de Tarabre jaune. La province du YAn-ndn ne faisait pas anciennement partie de I'empire chinois. Sous les Thsin (255-206 av. J. C.) , cette province etait nommee Je royaunie de Tchin des barbares de fouest {si-i-tchin koue). Ce fut seule- meiit sous I'empereur IFou-ti, des Han (109 avant notre ere), que ce royaume fut annexe a I'einpire, sous le noin de principaute de I-tcheou. Cette province renfernie des mines d'or, de cuivre et d'etain, des rubis, des saphirs, des agates, et autres pierres precieuses ; des perles , de I'ambre rouge, etc. Au nombre des mines de cuivre, il en est qui produisent du cui- vre blanc, nomnie par les Chinois pe thoung. On placait autrefois , parmi les |;roductions du Yun-ndn^ des ele- phants ,• ii parait qu'il n'y en existe plus aujourd'hui, car la grande Geographic imperiale n'en fait pas mention. MoEUBS KT couTUMES. Les mocurs et coutumes des babitants de la pro- vince de YUn-ndn, comnie celles de tons les peoples qui habitent des pays frontieres, participent de celles de la nation a laquelle ils appartiennent, et de celles du peuple qui les avoisine. Tout ce qui tient a la vie publique est. et doit etre chinois ; mais ce qui tienjt h la vie privee se rapproche (dus des nioeurs indiennes. Ainsi , un trait sail- lant de ce dernier caractere, c'est que les fenimes, dans le Yun-ndn, ont plus la iiberte de leurs actions que dans I'in- terieur de la Chine, dans la vieille Chine eulin: dans le Yfin-ndn, elles se mon- trent dans les rues , aux promenades publiques, et se melent familierenient dans la societe des hommes. Une par- tie de la population y briile aussi les morts. La population de cette province, qui habite les montagnes , ayant di- verses origines , a conserve les princi- paux traits de ses moeurs primitives. CHEt'-LIEU DE LA PKOVINCE. La CH- pitale de la province de Yun-ndn est Yiin-ndn-fou, ville fortiliee, d'une lieue de circonference , situ^e pres du bord septentrional du lac que Ton nomme Tchin, auquel on donne cin- quante lieues de circuit. On fabrique dans cette ville une etoffe particuliere de soie torse, qu'on nomme Toung hal touan-tse, « satin de la mer orientale ; » nom qui derive probablement d'une epithete du lac precite , appele aussi hat, « mer, » lequel, par la qualite speciale de ses eaux , a pu donner son noma I'etoffe en question. On fabrique aussi, dans cette ville, des tapis qui sont consideres connne les meilleurs de tout I'empire. Le DEPABTEMENT DE Li-Mang-fou , le plus septentrional de la province, a son chef-lieu situeal,176 lieues (11, 760 li) dePe-king; il s'etend au nord-ouest jusqu'au Thibet, et a I'ouest, jusqu'au fleuve nomme Loii-kidng ou Nou-kidng, qui forme sa frontiere,"et dont la rive droite est occupee par des peuplades que les Chinois nomment Noit-i, « bar- « bares nou. » Ce departement est ar- rose par les trois grands fleuves Kin- chdrkidng , Ldii-thsdng-kidng et Nou- kidng. On y voit la celebre montagne Sioue-chdn , couverte de glaciers et de neiges perpetuelles; elle est situee a deux lieues au nord - ouest de Li- kiang. Pont suspendu en chaInes dj: fer. Dans I'arrondissement de Kbig-toUng, I'un de ceux qui ressortent directement au gouvernement de Pe-king, on voit un pont suspendu par des chaines de fer, lequel est vraisemblablementle plus ancien de ce genre qui existe dans le monde entier! On le nomme Ldn-tsin- khido ,» pont traversant le Ldn, i> e'est-a-dire, le grand fleuve Ldn-tsang kidng, au noxA-QiX. Ae King - toUng . il fut construit dans les annees 58 a 76 de notre ere, sous le regne de I'enipe- reur Ming-ti^ des //«», et fut ensuile repare sous les Ming , au commence- ment du quinzieme siecle. Selon la grande Geographic imperiale (*), ce pont est eleve, dans toute sa largeur , a une hauteur de mille/m(**), e'est-a- (') Tai-thsiiig-i-t1iouiig-tclii , k. 328 , f 4 recto. (**) Le jin est une mesure de longueur locale sur la dimension de laquelle les opi- 196 L'UNIVKRS. dire, dc plus de deux mille metres. II est appuve siir des roclicrs escarpes (ini (loininiMit l — s 1 1 1- 1 j i 1 eo M •«■ M - 111 — X 00 >n 6 "^ ^ o c- - 2 < ^ J c..= ^ Z > 3 i s 1 r^r?^»os«3>or--"'-t^r3 fiosow -J-s .III o - i £ -^ .J i ./ — 0DXC!O=!l^C3 — rT-OCiTieCJ — «5<'M i -i ■£ C" 2 114° 8' 30" no 27 00 114 44 13 110 13 00 Mi 47 30 112 13 00 1015 37 45 101 35 00 117 47 34 113 31 47 1 1 1 53 30 110 20 57 101 50 30 113 58 00 110 50 30 107 53 50 100 31 40 104 10 10 > c ili lii- -c ?; s — .« 3'= c f' (- 1- a:- 2 = '=_ o • 39° 54' 13" 32 04 40 30 37 10 37 53 30 30 44 24 34 52 05 34 10 45 30 08 24 30 20 20 28 37 12 30 3i 50 28 12 00 30 40 41 27 50 24 23 08 09 25 13 12 25 06 00 26 30 00 •ins e : 1 :|ifi|jjf|ltl||i} s, < < ^ t-i is; t;; >«; ft; < 15 >, ?- ft. '< ^ i-i -i 2 ~ i : i ij i i : i i 1 ii -i i :i • • J • S • • ■ o • • • -e • § ■ • -a » S s ' s ". : ".5 : ; • S : H « • B Chacune de ces divisions et subdivi- sions administratives cvrespondant, en Chine , a une ville fortifiee oil resident les autorites civiles et miiitaires, etces niemes villas portant le meme nom que leurs eirconscriptions administratives, il resulte de la qu'il y a actuellement en Chine : 9" Livraison. (Chink modi-rns.^ rFUL/ort:,ch.A.dedep. {fait). 182 2" id. id. d'arr. (tcheoic). 134 3" id. id. deca/i^. (/«>n). 1,281 4° id. id. des.-p.{thoung-tchi). S2 5" id. id. id. directes. 12 6" id. id. d'arr. directs. 68 Total des villes administrati- ves entourees de remparts et de fosses ~T709 m L'UJNIV On y coinple en outre : r CoUtgps (Ic 1" et de 2 oi'd'-f, etablis dans les chefs-lieux de provin- ces, de (lepartemenls , A' arrondiase- menfs , etc 2'338 •>° \f on (agues ay anldesnoms ditte- rents 14,607 3" Flenres et rivieres naviga- bles 1,^72 4" Lacs 765 5" Jntiquites de toutes natu- res 10,809 6" Forteresses de t" ordre, nom- mees KouAn 627 7° Forteresses de 2" ordre, nominees frei 567 8" Forteresses de 3* ordre, nom- mees Ss(i 311 9° Forteresses de 4" ordre , noin- mees TckUi 300 10" Forteresses de 5* ordre, nom- inees Pad 150 11° Forteresses de 6* ordre, nom- mees Poii 100 12» Forteresses de 7' ordre, noni- mees Tchdl 300 13° Tours (^Mi) et chdteaux forts 3,000 14" Tours, arcs de triomphe , et autres monuments publics eleves aux personnages illustres dans divers gen- res 1,159 15' Jiibliotheques celebres par la beaute et le nombre des volumes qu'elles renferment 272 16° Tombeaux ou mausolees remar- quables, soit par leur architecture, soit par le nora des personnages. .'. . 688 17° La surface totale des terres cidtiv^es (*) dans les 18 provinces, est de 7,915,251 king, ou en hecta- res 52,661,753 (•) "Voir ci-aiui'j rcnumeralion des terres ciiltiveet par cliacjiie provinre. La (oUlilc ties terres ciutivces en Chine, indi(|ut'c ci-Jessus, n'^uivaut qu'au nomhre d'lieclares qui com- poseiit la totalilu du lemioire fran^ais, et que Ton \H)rW a Si, 7(18,600. Mais les lerres la- bourables en FraiMt; , c'est-ii-dire, celles qui sonl employees specialement a produire les suistaiiccs aiimenlairet , soul portees seule- nient a environ 35,5oo,(>uo lieclares. II en rcVulle, toutefois, que la proporliou des terres l»houraUe.i en Fianee, par rapport a la po- ptilnlion, est heaiiroup plus graude our I'usage des grands mandarins, et qti'ilne se liouvequ'accidentellemenLdansle commerce, est diviseen Irois parties, compre- naiit ensemble 920 hlotinn on livres, dont 80 pour ce qui concerne la maison de I'enipe- reur, le conscil prive, les divers ministeres , etc. II a eu qnatre editions: la i"^* fut don- nee en 1684; la 2« en 1724; la 3* en 1747, et la 4* en 1825. Celte derniere, qui est relle dont nous nous soniines servi, est angmen- tee d'un grand commentaire, de noinbreuses planches, et d'additions telles, que c'est uu ouvrage tout a fait neuf, el lei qu'il n'existe rieu de seml)lal)le chez les nations europeennes. II y est dit, dans la preface, que I'antiquite et les temps modernes ont ete mis a contribution, dans des mesures differentes, pour la composition de ce grand recueil, afin de servir de regie a tons les fonctionnaires de I'empire. Get ouvrage ofliciel fut primiti- vement redige sur le niodele de la Collection des stattits administratifs de la dynastie des Mitig {Taming hoel tien), par une espece de eonsell d'Etat compose d'un grand nombre de mandarins choisis dans tons les ministeres ou bureaux des services publics, associes aux plus savants Han-Un , ou niendjres de I'aca- demie imperiale de Pd-king , et fait profes- sion de ne renfermer que des principes conforuies aux doctrines des premiers le- gislateurs de la Chine. Cette edition est ac- compagnee d'une espece d'allas avec texte explicatif, coniprenant i43o gravures sur bois, representant toutes series d'objels ligu- rables, destines a tV/w/rer, comme on dit main- tenant , les choses exposees et decriles dans le texte. C'est dans celte parlie de la Collec- tion des statuts que nous avons trouve la figure du pied officiel chinois, cile page 48 de cet ouvrage, et dont la dimension est egale a 3i5 millimetres. On y voit la representa- tion des Antels du Ciel, de la Terre, du So- leil, de la Lune, du premier Laboureur, etc.; des temples, des palais, des spheres, des carles de I'empire , de ses provinces et de toutes Cet ouvrage officiel, qui regie, jusque dans les plus petits details , les devoirs de tous les corps poiitiques, detous les fonctionnaires publics de I'empire, s'il etait traduit integralement, ferait mieux connaitre la Chine a I'Europe que tou- tes les relations passees , presentes et futures, des missions plus ou nioinsoffi- cielles qui laissent toujoursplus de tra- ces dans les budgets de I'Etat que dans la science. Des la plus haute antiquite, la science du gouvernement des peuples, la science politique, a ete consideree en Chine comme la premiere de toutes les scien- ces, la science par excellence , celle qui, aux yeux de tous les philosophes chi- nois, constitue le piushaut, le plus complet, leplus parfait developpement des facultes humaines. On fait dire a I'empereur Hoangti, dont on place le regne plus de 2,'600 ans avant no- tre ere, ces paroles : « Le gouverne- « ment des nommes est comme I'eau « qui couledans les vallees, sans remon- « ter a sa source. Son action est inces- « sante et ne s'arrete jamais. C'est « pourquoi , pourvoir aux besoins des « populations , et ne pas montrer en- « vers elles de I'indifference ou du « mepris; faire la part de chacun, « c'est-a-dire, tracer a chacun ses de- « voirsselon la position qu'il occupe, et « ne pas multiplier sans necessite les « obligations de chacun, voila le seul « et veritable gouvernement. C'est pour- n quoi encore, appliquer ces principes « a I'empire, et ne jamais les oublier, n est leseulet veritable gouvernement. .> Le philosophe Lao-tseu a dit : « Si « le gouvernement d'unfitat ne fait pas « sentir son action sur le peuple, par « des mesures oppressives et tyranni- « ques, alors lepeuple vitdans la pros- " periteetrabondance;si, aucontraire, ses dependances ; des vases et instruments employes dans les sacrifices et autres cere-, monies publiques; des habits de ccremonie,' tels que doivent les porter I'empereur, I'im- peratrice , les princes du sang , et les neuf ordres dc mandarins, etc. L'ouvrage complet, rclie a I'europeenne, forme 72 volumes petit in-folio. La preface imperiale porle la date tiia-kbig , wou yln (i8r8); mais l'ouvrage ne fut reellement public qu'eu 1820. 9. 132 L'UNIVERS. « le souvernemeiil a conslainnicnt sur « liii'iin ocil inquisitorial vt Ivranniqiie, « alors lo [)PU|)le tombe dans la pauvrete « ft la luiseri'. « {Tdotckimj, ch. 58.) Jp nidnie philosophe a dit encore (/6., ch.r»0): « L'dction de goiiverner un « royaume est coinine celle de ciiiro un « petit poisson. » Si on traite ce der- nier avec peu de nienagement, si on le toiirmente , alors on occasioniie un trouble dans Toperation. Cette derniere coniparaison , assez vulgaire, semble etre familiere aux anciens philosophes chinois, car fVen-tseu dit aussi : « SI « I'eau dans laquelle se trouve le pois- « son est trouble, epaisse , alors il sort « sa gueule hors de I'eau (pour respirer); « si le gouvernenient est oppresseur, « tyrannique , alors le peuple se livre « aux troubles et k la revolte. » C'est surtout par les philosophes de I'ecole de Kkoung-tseu ou Confucius , que la science de gouverner a ete culti- vee et enseignee avec une perseverance et une predilection extraordinaires , comme etant la science la plus elevee et en meme temps la plus importante pour le bonheur et la prosperite des peuples. On peut dire que le gouverne- nient de la Chine, ou plutot les lois po- litiques qui le constituent, sont, a I'ex- ception des innovations apportees par les conquerants tartares , I'ceuvre de ses anciens philosophes. C'est princi- palement a Khoung-tseu que I'on doit attribuer la plus grande part dans I'oeuvre de la constitution politique et morale de la Chine. C'est lui qui a dit ces belles paroles : « Gouverner son « pays avec la vertu et la capacite neces- « saires, c'est ressembler a I'etoile po- « laire,quidenieure immobile a sa place, " tandis que toutes les autres etoiles « circulent autour d'elle, et la prennent « pour guide. >» Selon lui , « le gouver- « nenient est ce qui est juste et droit. » {Liin-yu, ch. 22, § 17.) C'est la realisa- tion des lois eternelles qui doivent faire le bonheur de I'humanite, et que les plus hautes intelligences, par une appli- cation incessante de tous les instants de Icur vie, par une abnegation com- plete , un devouement absolu aux inte- r^ts de tous, sont seules capables de pratiquer et d'enseigner aux hommes. Au contraire , dans la conception mo- derne, le gouvernement n'est plus qu'un acte a la portee de lout le monde , au- quel tout le monde veut [)rendre part, conune a la chose la plus trivialo , la ()lus vulgaire, et a laquelle on n'a pas )esoin d'etre prepare par le moindre travail intellectuel ou moral. Une idee predominante et fondamen- tale dans I'ancienne politique chinoise, c'est Taction, I'intervention du ciel, ou de la raison superieure qui y reside , dans les evenements du monde, dans les rapports des souverains avec les po- pulations, ou des gouvernants avec les gouvernes; et cette intervention est toujours en faveur de ces derniers, c'est-a-dire, du peuple. L'exercice de la souverainete, qui, dans nos societes modernes, n'est le plus souvent que I'exploitation du plus grand nombre au profit de quelques-uns, n'est, aux yeux du philosophe cliinois, que I'accom- plissement religieux d'un maiidat ce- leste au prolit de tous, qu'une noble et grande mission confiee au plus devoue et au plus digne, et qui doit ctre reti- ree, des I'instant que le mandataire manque a son mandat. Ce que nous al- iens dire paraitra sans doute un para- doxe, tant les idees que Ton s'est faites, en Europe, du peuple chinois et de ses institutions sont fausses , erronees; mais c'est cependant la verite : nulle part, peut-etre, les droits et les devoirs respectifs des rois et des peuples, des gouvernants et des gouvernes, n'ont ete enseignes d'une maniere aussi elevee, aussi digne, aussi conforme a la raison. C'est bien la qu'est mise en pratique cette grande maxiiue de la democratic moderne : f ox populi, vox Dei! « La voix du peuple est la voix de Dieu ! » — « Ce que le ciel voit et entend , dit un « des livres sacres des Chinois (le C/ioH- o king) , c'est ce que le peuple voit et « entend. Ce que le peuple juge digne « de recompense et de punition , c'est « ce que le ciel veut punir et recom- « penser. II y a une communication in- n time entre le ciel et le peuple; que « ceux qui gouvernent soient done at- « tentifs et reserves ! » — Ailleurs (La Grande Etude, ch. x, § 5), Khoung- tseu a ainsi formule cette maxime : « Obtiens I'affection du peuple, et tu « obticndras I'empire. CHINE MODERNE. 133 « Perds I'affection du peuple, et tu « perdras rempire ! » On croit generalement , en Europe , que le gouvernement chinois est un gouvernement absolu comme celui que i'on suppose avoir existe dans les an- ciennesgrandes monarchies de I'Orient; il n'en est rien : la forme a bien quelque chose qui y ressemble , mais le fond ne repond pas a la forme. Ce n'est pas que les tendances du pouvoir, en Chine comme ailleurs. m^me en Europe, ne soient quelquefois portees vers I'arbi- traire et la tyrannie; mliis les institu- tions politiques y sont combinees de telle sorte, que I'arbitraire et la tyran- nic peuvent rarement etre impunement exerces. D'ailleurs, le corps des let- tres, quoique n'etant pas un corps po- litique, n'en exerce pas moins un con- trole souvent assez genant pour le pouvoir, en invoquant I'autorite des anciens livres (que le pouvoir n'a ja- mais ose ouvertement cnfreindre ou dedaigner) , et en s'appuyant sur I'inte- ret du peuple. II n'y a pas d'exemple, en Chine , ou cependant le nombre des ecrits politiques est infiniment plus nombreux que partout ailleurs, que des ecrfvains aient souille leur pinceau en le consacrant a I'eloge de roppression et de la tyrannie. On n'y trouverait pasun seul ecrivain qui ait eu I'audace, pour ne pas dire I'impiete, de niei*]es droits de tous aux dons de Dieu, c'est-a- dire, aux avantages qui resultent de la reunion de I'homme en societe , et de les revendiquer au profit d'un seul ou d'un petit nombre , comme ayant des droits superieurs aux autres, et des pri- vileges exclusifs. Le pouvoir le plus ab- solu que les ecrivains politiques et les nioralistes chinois aient rec(Jnnu aux chefs du gouvernement, n'a jamais ete qu'un pouvoir delegue par le ciel , ou la raison superieure , ne pouvant s'exercer que dans I'interet de tous, pour le bien de tous , et jamais dans I'interet d'un seul et pour le bien du petit nombre. Des limites morales infranchissables sont posees a ce pouvoir en apparence absolu ; et, s'il lui arrivait de les depas- ser , d'enfreindre ces lois morales , d'abuser de son mandat, alors, comme I'a dit un ce.lebre philosophe chinois du douzieme siecle de notre ere, Tchou-hi, dans son Commentaire sur le premier des Quatre livres classiqiies, enseigne dans toutes les ecoles et tous les (Col- leges de I'empire, le peuple serait de- gage de tout respect et toute obeissance envers ce meme pouvoir, qui pourrait etre renverse immediatement pour faire place a ua autre pouvoir legitime, c'est-a-dire , s'exer^ant uniquement dans I'interet de tous(*). ylpercu historiqne. Aux yeux des Chinois, le gouvernement le plus par- fait, celui qui porte le caractere le plus profond d'une origine superieure, et qui ne peut etre surpasse, est celui de leurs anciens rois Yao et Chun, qui furent en meme temps des legislateurs. Le gouvernement des trois dynasties qui leur succederent se distingua , celui des Hia^ par la droiture et Yhonnetete {tchoitng); celui des Chang , par Vefi- semhle de ses solides institutions {tchi) ; celui des Tcheou, par son caractere litteraire [win). Celles qui les sui- virent s'ecarterent plus ou moins de ces premiers et grands modeles du gouver- nement. La dynastic des Thsin (250 avant notre ere) se distingua par sa haine centre les anciennes institutions qu'elle voulut abolir, ainsi que les mo- numents qui en perpetuaient les maxi- mes. Celle des Han fut la restauratrice de I'ancienne doctrine. Le temps , qui n'est pas plus immobile en Chine que dans les autres contrees du monde , a apporte successivement d'assez nom- breuses modifications aux institutions primitives. On pourra s'en convaincre a la lecture de notre premier volume , dans lequel nous nous sommes efforces (*) Voici les propres paroles du ])liilosophe chinois : « Le texte signifie que celui qui est « dans la position la plus elevee de la societe «< (le souverain) ne doit pas ne pas prendre ■< en serieuse consideration ce que les popu- « iations demandent et attendent de Jui ; s'il « ne se conforniait pas dans sa conduite aux « droites regies de la raison, et qu'il se livrat " de preference aux actions vicieuses ou con- « traires a I'interet du peuple, en donnant un « libre cours a ses passions, alors sa propre <• perscnne serait exlerniinee, et le gouverne- Trouverait- (*) (La Grande Etitde, ch. x, § 6, note de noire edilion , ou le texle chinois de ce com- nicntateur se trouve cite.) CHINE MODERNE. 187 on dans tous les publicistes europeens un axiome politique plus rationnel et plus liberal ! « II est dit, dans I'ancien iJvre des « Annates : Le mandat du del qui « donne la soiiverainete a un homme « ne la lui confere pas pour toujours. « Ce qui signifie qu'en pratiquant le « bien et ia justice, on I'obtient; et « qu'en pratiquant le mal ou I'injustice, « on le perd. » II n'y a certainement aucun pays ou Ton ait tant ecrit et publie d'ouvVates sur les devoirs et la conduite des princes qui se trouvent appeles a gouverner un empire. II n'y en a pas non plus (et cela paraitra peut-etre un paradoxe) ou des avertissements plus severes leur aient ete adresses. L'un des defauts centre lesquels les philosophes chinois ont cherche le plus a premunir leurs gou- vernants, a ete le desir d'accumuler des ricbesses. « Ceux qui gouvernent un « rovaume (dit encore Thseng -tseic, « Grande Etude, eh. x, § 21-22) ne « doivent point faire leur ricbesse pri- « vee des revenus publics ; mais iis doi- « vent faire de la justice et de I'equite « leur seule ricbesse. « Si ceux qui gouvernent les Etats , a ajoute-t-il, ne pensent qu'a amasser « des ricbesses pour leur usage person- « nel , ils attireront indubitablement au- « pres d'eux des bomnies depraves ; ces « bomnies leur feront croire qu'ils sont « des ministres bons et vertueux, et ces « bommes sans principes gouverneront « le rovaume. Mais I'administration de « ces indignes ministres appeliera sur « le gouvernement les cbatiments divins « et les vengeances du peuple ! Quand •• les affaires publiques sont arrivees a « ce point, quels ministres, fussent-ils « les plus justes et les plus vertueux, « detourneraientdetelsmalbeurs? — Ce « qui veut dire que ceux qui gouver- « nent un rovaume ne doivent point « faire leur ricbesse privee des revenus « publics, mais qu'ils doivent faire de « la justice et de I'equite leur seule ri- ft cbesse. » Un commentateur cbinois resume ainsi la doctrine de Khoung-tseu sur ce sujet : « Le grand but , dit-il . le sens « principal du texte , signifie que le « gouvernement d'un empire consist e « dans r application des regies rfe droi- « tU7'e et d'equite naturelles, que nous « avons en nous, a tous les actes d'ad- « ministration publique , ainsi qii'au ft choix des homines que Von emploie, « lesquels , par leur bonne ou mau- « raise administration , conservent ou « per dent t empire. 11 faut que , dans ft ce qu'ils aiment et dans ce quails re- «■ prouveyit, ils se conforment toujours « au sentiment du peuple. » Un principe constamment professe par Meng-tseu et par d'autres pbilo- sopbes cbinois, dont les ecrits sont en- seignes dans les ecoles de I'empire, avec I'autorisation du gouvernement, c'est que , « toutes les fois qu'un prince re- ft gnant perd I'affection de la grande ft majorite du peuple, en agissant con- « trairement a ce que ce dernier re- ft garde comme le bien general , ce ft prince est rejete ou desavoue par le ft ciel , et peut ^tre detrone par celui « qui , au moyen d'un saint et genereux « accomplissement de ses devoirs, a ga- « gne le coeur de la nation. » L'ancien pbilosopbe Khoung-tseu a formule ainsi les principaux devoirs du souverain ' « Tous ceux qui sont pre- « poses au gouvernement des empires ft ou des royaumes ont neuf regies in- « variables a suivre : la premiere est de ft travailler constamment au perfection- « nement de soi-meme ; la seconde est ft de reverer les sages; la troisieme est « d'aimer ses parents ; la quatrieme , « d'bonorer les premiers fonctionnaires ft de I'Etat ou les ministres ; la cin- ftquieme, d'etre toujours en parfaite ft barmonie avec les autres fonction- « naires et magistrals de I'empire; la « sixieme , de traiter et de cberir le ft peuple comme un tils ; la septieme , ft d'attirer pres de sa personne les sa- « vants , les artistes et les artisans de ft merite ; la buitieme , d'accueillir avec ft cordialite les bommes qui viennent ft de loin, c'est-a-dii*e, les etrangers ; la ft neuvieme, enfin, de traiter avec ami- « tie les grands vassaux. » ( TchoHng- yo&ng, ch. xx, § II.) L'beredite du pouvoir par droit de primogeniture n'existe pas en Cbine. L'empereur regnant cboisit son suc- cesseur parmi ses enfants mSles, en ar- retant ordinairement son choix sur ce - 138 L'UNIVERS. lui qui lui parait reunir le plus des qualiles qui sont indispensahles poiir taire uii boii souveraiti, ou qui a le moius des defauts qui en font un niau- vais. Cetle facuite qu'a I'empereur de rhoisir son successeur corris;e, jusqu'a un certain point, ce que I'lieredite du pouvoir a d'aveuglement fatal ^ par rexercice, tres - restreint sans doute, niais enfin quelquefois utile, de la vo- lonte et de la raison souveraine. L'exercice de la souverainete est, aux yeux des philosophes et des publicistes cliinois, la plus haute, la plus noble et la plus sainte mission dont un homrne puisse etre revetu sur la terre. Cette mission, comme nous I'avons deja dit, n'est pas un droit, un privilege, un apanage appartenant a uu homme, a une famille, a une race, pour en dispo- ser selon leur bon plaisir; c'est une delegation, un mandat de la raison ou du pouvoir superieur qui preside aux destmees des nations; lequel mandat ne leur est confere que pour veiller constamment aux interets et aux be- soius de tous, comme un pere et une mere veillent aux interets et aux be- soiiis de leurs enfants, et faire regner la justice. Aussi I'autorite souveraine, eu Chine, estelle environnee des signes les plus uombreux, les plus eclatants d'un respect et d'une veneration en Jjuelque sorte sans limites. Ce sont ces ornies exterieures de la majeste souve- raine, ces manifestations en apparence si profoudement serviles de la part des populations asiatiques, et principale- ment de celles de la Chine, qui ont fait jjorter sur elles des jugements si severes par im grand nombre d'ecrivains euro- peeus, lesquels n'ont voulu voir en elles (juedes populations esclaves, absolument depourvues de toute dignite humaine. II est hans doute tres-beau d'avoir assez de respect de soi-raeme, de dignite de caractere, pour ne pas s'abaisser jus- qu'a rendre a un homme, flit - il cou- ronne, des hommages avilissants, une espece de culie fanatique qu'il ue con- viendrait pas meme de rendre a Dieu ; il serait beau de voir les peuples ne se prosterner que devant la loi , ne flatter que la loi, n'attendre des faveurs que de la loi ; mais la loi est un etre trop abstraitpour la generalite des hommes; et, jusqu'a ce que les habitudes et les mceurs de I'luirope soienl arrivees a ce dernier etot de civilisation, il lui siera assez mal d'accuser de servilite et de bassesse les mceurs orientales, et prin- cipalement les mceurs chinoises. Ce n'est pas , cependant , que nous voulions faire ici I'apologie de la so- ciete chinoise telle qu'elle est mainte- nant constituee , et que nous i'offrions pour modele a la societe europeenne; non, assurement. Depuis cinquante ans, surtout, la loi a deja trop rem- place la volonte arbitraire de quelques hommes pour que nous puissions avoir cette pensee. D'ailleurs, notre societe est loin, surtout a notre epoque. d'avoir pour base le principe de la famille, principesur lequel, comme nous Tavons dit , repose , avec tous ses avantages comme avec tous ses inconvenients , la societe chinoise. L'empereur,en Chine, est cense tenir du ciel son mandat souverain ; c'est pourquoi il est souvent nomme « le Ills « du Ciel » {thien tseii). On I'appelle aussi ley//s du Ciel, parce que, disent des ecrivains chinois, le Ciel est son pere, et la Terre sa mere. Les lieux qu'il habite sont nommes: le Palais de la Cour , la Salle dor, YJvenue et la Cour de vermilion, la Salte inter dite, le Palais defendu, la Cour celeste, etc. Dans I'ordre religieux comme dans I'ordre politique, I'empereur est revetu de I'autorite supreme; toutefois cette autorite est limitee par des Conseils ou grands tribunaux, auxquels ressortis- senttoutes les affaires du gouvernement. Sa suprematie religieuse ne pent toutefois s'exercer qu'en ce qui concerne le culte de I'f.tat, le culte dit de Con- fucius, a I'exclusion de tous les autres; et, sous ce rapport, I'empereur est reelle- ment dependant du grand Tribunal ou Conseil des Rites , charge de conserver les traditions et les usages religieux de I'antiquite (*). Professant lui -meme, comme etant d'origine tartare, la reli- gion bouddhique, il ne peut Lui rendre qu'un culte prive. (*) On verra plus loin en quoi consiste ce culte religieux ofticiel de la Chine, qui- n'a )>oiir preires et olficianls que les differenls lonclionuaires de I'ordre civil. CHINE IVrODERNE. 139 Cette autorite de I'empereur, que Ton croit si absolue, ne va pas aussi loin, sur beaucoup de points, que celle des souveraiiis de I'Europe, menie des sou- veraiiis constitutionuels. Sa personne aussi est inviolable et sacree ; et ses mi- nistres sont responsables , mais d'une responsabilite qui, pour n'etre pas ecrite dans une charte , n'en est pas moins reelle, et quelquefois meme terrible, puisqu'il arrive assez souvent que des" niinistres sont degrades, exiles en Tar- tarie, et condamnes a mort pour des actes de leur ministere. Dans ce der- nier cas, la peine prononcee par le Tri- bunal des peines ou Haute cour de justice, est presque constamment com- muee en un exil perpetuel ou tempo- raire par Jempereur, qui a, comme les chefs d'Etet en Europe, la haute et sainte prerogative du droit de grace. II n'est peut-etre aucun Etat dans le monde oii la voionte du souverain s'exerce plus raremeni d'une maniere directe qu'en Cliine; ou cette voionte, avant de se manifester, passe par plus de filieres, ou il soit plus difficile d'ar- river a elle, et d'en obtenir directement, soit faveur, soit justice. Les rouages du gouvernement sont si multiplies, que le niouvement s'accomplit souvent avec une extreme lenteur, hors les cas d'ur- gence ; mais ces rouages sont si bien combines, si adroitement coordonnes, qu'ils fonctionnent tous, dans leur sphere d'action, avec une regularite pour ainsi dire machinale. Si tous les mouvements de I'activite humaine ont jamais ete soustraits a toute spontaneite pour etre soumis a des regies fixes, on pent dire que c'est en Chine, oii , jusqu'aux plus simples rapports des hommes entre eux, tout a ete regie, formule par des edits qui font loi , ou des usages qui sont aussi inviolables. Des diffekents pouvoibs de l'Etat. Nous avons dit que Vautorite souveraine residait dans I'empereur, au nom duquel s'exerce le^^ouvoir exe- cutif. Tous ses Decrets , rediges en conseil et promulgues en son noni, par les ministres et autres agents respon- sables, ont force de loi. Ces decrets sont publics dans une espece de Bulle- tin des lots ou Moniteur de la cour, corame il est nomme, que le gouverne- ment fait paraitre jonrnellement a Pe- king , et qui est envoye a tous les principaux mandarins oufonctionnaires publics de I'empire. Ceux-ci en font part immediatement a leurs adminis- tres, par des afliches publiques. Aussi- tot cette publicite donnee, tous ces de- crets sont obligatoires. Le pouvoir legislatif r\e reside point dans des corps constitues, comme les chambres electives ou hereditaires de quehjues Etats de I'Europe, mais seule- nient dans la personne du souverain, avec I'avis et sous la responsabilite de Conseils speciaux , qui sont charges de branches distinctes du pouvoir exe- cutif. Ce sont ces conseils speciaux, dont nous parlerons ci-apres , qui ela- borent et preparent les projets de loi ou de decrets dont ils partagent I'ini- tiative avec le souverain, mais que ce dernier seul peut rendre executoires, Quoique tous les decrets, edits, procla- mations, etc., de I'autorite souveraine soient ainsi eiabores, la formule dont ils sont revetus dans la promulgation ferait croire qu'ils sont I'expression ab- solue, exclusive de la voionte imperiale, et rappelle, en termes presque iden- tiques, le : Tel est notre bon plaisir, de ?|uelques royautes europeennes ; c'est la ormule dupouvoir absoluqui,lorsqu'il ne I'exerce pas en realite, aime toujours bien a en conserver les apparences. 1° Classes privilegiees. Ministere de la maisoti imperiale. Les lois , edits , decrets promulgues au nom de I'empereur, sont obligatoires pour tous , a I'exception des membres de la famille imperiale, qui sont tres- nombreux , et qui sont places sous la dependance exclusive d'un conseil par- ticulier, nomme Ministire de la mai- son imperiale {TsotingjinfoU) ; a I'ex- ception aussi des personnes composant sept autres classes de privilegies non hereditaires, et que la loi place en dehors du commun des individus, pour lesquels elle n'a plus qu'un m^me ni- veau. Ces sept dernieres classes de ci- toyens sont ceux qui ont ete places ainsi au-dessus de la loi commune, 1° par le privilege des longs services dans de hautesfonctions publiques (*); (*) Cette classe, dit le comwentaire, com- t4t L'UNIVERS. 2" par le privilege de grandes ac- tions, honornbles et utiles an pays {*) ; 3° par le privilege dune sngesse non commune, qui s^est rendne profitable a la societrC*); 4" par le privilege de grands talents manifestes dans I'etat militaire ou dans i'administra- tion cii-ile ('*'); 3" par le privilege du zele et de Vassiduite apportes dans raccompHssevient des devoirs pu- blics (****); 6" par le privilege du rang occupe dans I' Etat {'****) ; et, enfin, 7° par le privilege d'etre ne d'un ))ere qui s'est distingue par une haute sagesse, ou qui a rendu des services eminents a I'Etat. Ce der- prcnd los ancicns et fideles serviteiirs de la rouronne ou familte imperials, coninie s'ex- priiiie le fexte chiiiois, .lyaiit re^u des dis- tinctions lionorables d;iii5 Ics liaiKes charges qii'ils ont remplies sans iiiterniption. (•) Cette classe coniprend ceiix qui onl fait des actions d'cclat en al)attant la lete du (;eneral ennemi, en liii enlevant sou eten- dard, eii iui brisant sou glaive, en le poursui- \ant a une tongue distance; elle coinprend aussi ceiix (pii ont rendu la trauquillite a leur pays, en faisant rentrer la multitude dans I'ordre el la souniission ; de meme que ceux qui ont elendu ks frontieres de I'em- pirc. Toules ces actions d'eclat seront gravees sur des tables de niaibre pour en conseiver le souvenir aux generations futures. (") Celte classe coniprend ceux qui , pos- scdant de grandes vertus, les ont niises en pratique, et, par leurs paroles ou leurs avis, aussi bieu que par leurs actions , ont inspire au gouvernenient une nieilleure direclion, et se sonl fails d'excellents niodeles a iuiiter et a suivre. (***) Cette classe rompreiid ceux qui ont de grands talents, et qui, par cela meme, sonl aples a commander des armees , a din- ger les alTaircs de I'Elat , en devenant mi- nistres. Os homnies d'action sunt souvent plus rares et plus utiles que ceux qui se bor- uent a praliquer la verlu et la sagesse. (****) Cctie classe comprend ceux qui, dans le commandement des armees , dans I'accomplissement de leurs fond ions civiles, y portent jour et nuit, loin ou pres, ua /ele, une assiduite, des soins qui ne se denienlent jamais. ('***•) Certe classe comprend ceux qui occupent le premier rang parnii- les manda- rins; en meme temps que ceux quioccupent, dans le second rang, des emplois civils ou ini- litairei; et eiilin ceux qui , n'etant que du nier privilege ne s'etend qu'a la se- conde , et rareinent ;i la Iroisieme Reneration. Ces sept classes de privi- leges, reunies a la premiere qui com- prend les membres de la familie impe- riale, coinposent ce que Ton nomme en cliinois pd i, « les huit regies ou privi- « leges (*): » Ces privileges , pour les sept der- nieres classes surtout, s'etendent prin- cipalement a Tapplication des peines , en enlevant ceux qui en sont revetus , ainsi que leurs parents , ascendants et descendants, a la juridiction des tribu- naux ordinaires , qui ne peuvent les juger que sur un ordre expres de I'em- pereur. La premiere de ces classes privile- giees, qui coniprend tous les membres et les parents a tous les degres de la familie imperiale, forme une nom- breuse tribu gouvernee par un conseil ou ministere special , compose d'un president, proche parent de I'empereur, et ayant le titre de roi ou prince du sang'; de deux vice-presidents, ces der- niers revetus du titre tartare de Bey, et de deux assesseurs, occupant quel- qiies-unes des plus hautes fonctions de I'Etat, et appartenanttous a la parent^ de I'empereur. Cette parenteest divisee en deux grandes classes : la premiere, nomttiee TsoHng-chi, « maisou impe- riale, » parente la plus proche eten li- gne droite du fondateur de la dynastie; la seconde , nominee Kioro ou Gioro , membres de la tribu d'or, surnom de la familie regnante , composee des bran- ches collaterales, descendance des on- cles etdes freresde ceinfime fondateur, et parente la plus eloignee. Les fonctions de ce ministere special de la maison de I'empereur sont nombreuses; elles con- sistent a lenir des registres exacts des mutations qui s'operent dans cette tribu imperiale, c'est-a-dire, a enregistrer les naissances des enfants nes de sang im- perial , et des enfants adoptifs qui doi- vent etre proclames publiquement; les mariages , les deces , les promotions et troisieuie rang, ont un commandement civil ou militaire qui le. place au-dessus de ceux du second rang. (*) Ta tlislng Un It , ou Code penal de la Chine, K. HI, 1* i4. CHINE MODKRNE. 141 les degradations; les honneurs, les di- gnites conferees; en un mot. a tenir de veritables Registres d^ I'etat civil de la famille et de toute la parente im- periale. Tous les dix ans , ces registres sont graves sur des tables de marbre. L'un de ces registres, quiconcerne spe- cialenient la parente de I'empereur en ligne droite, est nonime le registre jaune ; Tautre , qui concerne speciale- ment les branches collaterales , est noniDie le registre rouge. Lafamilleactuellementregnanteetant d'origine tartare, la plupart des titres conferes aux membres qui la compo- sent sont mantchous; ils correspon- dent aux titres connus en Europe de roiy prince., due, grand marechal, marechal, general, etc. (*). Les fem- mes recoivent aussi des titres. Ceux qui n'en ont point sont classes dans l'un des (*) En voici renumeration : 1° Ho-clu-tlisin wdii^ ,) , o rr / I- ■ ° I rots 3" To-lo-pei-le , \ 4" Ko-chan-pei-tseu, i 5° Foung-gan-tcltin-kuuc-kon^ G" Fouiig-gan-Jou-kouii-koun^ beys ou princes. dues et comles. 1« Pou-jl-pa-fcn-tclnn-kouc-koung 8" Pou-ji-pa-fen-fou-koue-koting, 9" Tchin-koue-tsiaiig-kiitu, j to° FdU-koue-tslans-klun, ( . . xi" J'oung-koue-tsian'T-ktitn, I ° 12° Fouiig-gan-tsiang-kuin. j Tous ces titres, conferes du vivant de ceux qui les obtieuuent, ou apresleurniort, conitne titles posthumes , le sont j)ar rang de pre- seance, et ils out entre cux des nuances de superiarke on d'tri/criorite ((ue nous n'avons pu rendre par des titres equivalenls. Les tilres donnes aux I'einmes sont divises en deux classes. La premiere, qui est la su- perieure , comprend deux tilres differents : les Kou-lun-koung-tchou , et les Ho-clii- kouiig-tchou , equivalents a celui de prin- cesses, et donnes, le premier aux fdles .legi- times de I'empereur, et le second aux lilies de ses concubines. La seconde classe comprend cinq- titres differents, qui sont : i° les Kiiui- tchou, 1° les Uien-tcliou , 3" les Kiun-kiun , 4° les Hien-kiiin , et 5" les Hiang-kiun. Ces cinq derniers titres de la seconde classe sont donnes aux filles des hauls tilulatres de la fa- mille iniperiale, et de la parente coUaterale. Toutes les fdles qui ne portent ])as un de ces tilres sont uomniees en general y?//fi da la fa- mille imperiale {tsotlng-niu) . neuf rangs {pin) que nous ferons con- naitre ci-apres. Les lils aines recoivent le titre At princes hereditaires {chi- tseii) , ou celui dejils aines {tchdng- tseii). Tous ces titres divers sont conferes, 1" pour recompenser des services enii- nents , 2" par faveur speciale (*) , 3" he- reditairement , 4° par suite d'examens sur certaines aptitudes, que les fils des dignitaires subissent a I'age de vingt ans, et qui concernent principalement Tart militaire , I'equitation , le tir de Fare, etc. Ces titres sont au nombre de douze. lis n'ont commence a etre con- feres que par les empereurs Khang-hi et Khien-loujig , qui ont, sous ce rap- port, comme sous plusieurs autres , beaucoup innove dans les mceurs et habitudes chinoises, pour se mettre au niveau des grandes monarchies de I'Oc- cident, dont ils etaient contemporains, et avec lesquelles les missionnaires je- suites s'efforcerent de les familiariser. Les titres ainsi conferes comme il vient d'etre explique, ne donnent a ceux qui en sont revetus d'autres privi- leges que ceux qu'ils tiennent de leurs fonctions ou de leur sang imperial , c'est-a-dire,de n'etre, dans certains cas, soumis qu'ala juridiction du ministere special tie la famille imperiale. Mais lorsqu'ils occupentdesemplois publics, civils ou inilitaires, c'estaux?/uVuA-^eres des offices civils {li-pou) et de la guerre {pmg-pou) a statuer sur ce qui les concerne. Les proches parents de I'empereur {tsoimg-cht), et les parents coUateraux eloignes igioi'o) , ne sont pas exemptes de cette subordination. Les contestations qui s'elevent entre eux, ou qu'ils soutiennent avec d'autres particuliers, sont deferees aiixminisle- res des finances {hou-poii) et de la jus- tice (hing-pou), qui statuent sur elles; le premier en ce qui concerne les pro- prietes foncieres , le second en ce qui concerne les personnes. S'il y a crime ou delit, et que ce crime ou cedelit ne (*) Les lils de I'empereur, parvenus a I'age de quiuze ans , recoivent un litre de leur pere; ils ne le recoivent pas, conmie dans les monarchies europeennes, au moment de leur naissance. On attend en Chine, pour le leur conferer, qu'ils puissent deja compreudre les devoirs et la dignile de I'homme. I us L'UMVERS. soil pas {,'rave , alors ces pouvoirs deci- dent Mjr la peine a appliquer ; si le crime on ie delit est grave, alors lis prononcent la condamnatiou, enallant jusqu'a remprisonnenient et I'interdic- tion de certains droits et de certaines fonctions. Knfin , si le crime est tres- grave, alors il eii est refere a lempe- reur, qui proiionce en dernier ressort. Tout niembre de la fainille de I'em- pereur qui a ete condanine a rempri- sonnenient est declm de sou rang. A la lin de cliaque annee , on passe la revue de ceux qui sont ainsi en prison , et on en rend compfe a Tempereur (*). Par uue politique assez adroite , le privilege du sang imperial , quand ii n'est pas soutenu et en quelque sorte justifie par des merites reels , ou par une faveur speciaie , cesse de pro- teger les privilegies, qui descendent alors au rang du simple peuple , sans litre et sans pouvoir m^me porter I'in- signe de I'un des neiif rangs de man- darins. Les membres de la familie imperiale appartenant a la ligne directe , et ceux qui appartiennent aux brandies colla- terales, sc distinguent , les premieres (les tsoung-chi), par le port d'une cein- ture jauiie et or, et les seconds (les ff/oro), par le port d'une ceinture rouge. Lorsque des individus appartenant a I'uiie ou a I'autre classe sont degrades de leurs honneurs, titres ou rang , les premiers portent alors une ceinture rouge, commeceuxde la secondeclasse, avec lesquels ils se confondent , et les seconds une ceinture de cotUeur vio- let te {tsze). A la fin de cliaque annee , dans ie douzieme mois , apres en avoir obtenu Tagrement de I'empereur , les muta- tions survenues dans la familie impe- rials sont operees sur le registre au-' guste (hodmj-tsi) ; les nouveau-nes sont portes sur le tivre du vermilion {tchou-choCi : registre des naissances), et les niorts sur le tivre voir {me-chou: registre des deces). Lisle civile de la familie imperiale. L'empereur, comme cbef souverain du pouvoir administralif et du pouvoir (*) Ta-ll,iuig'hael-tien,K. i, i» 14. executif , a a sa libre disposition lesre- cettes de I'Etat , sous la condition de faire face , avec ces recettes limitees, a tons les services publics. Iln'en est pas de meme pour les membres de sa fa- milie. Tous ceux a qui des titres out ete conferes, resolvent du tresor public des emoluments ou revenus fixes et an- nuels en argent et en riz, determines de la maniere suivante : I" Pour un thsin-wAng ou roi, pro- cbe parent de l'empereur, 10,000 lidng ou 80,000 fr., et 5,000 hectolitres de riz; S" Pour un kiUn-wdng, ou roi d'une parente plus eloignee , la moitie des cbiffres precedents ; 3^ Pour un bey, le quart de ce qui est alloue au thsin-wdng', 4" Pour \es Joung-gan-tsidng-kiiin, ou generaux honoraires , 110 Hang (880 fr.) et 55 hectolitres de riz; ainsi de suite pour tous les membres com- posant la familie et la parente de I'em- tiereur, selon le rang , le titre, I'dge et esexe de chacun d'eux, et meme son etat de sante (*). La maison de ces di- gnitaires de la familie imperiale est aussi composee selon leur rang et leurs titres. Les princesses du sang , tant qu'elles ne sont pas mariees, resolvent, celles de la premiere classe (les legiti- mes) , 160 Hang (1280 fr.) et 80 hecto- litres de riz par an pour leur entretien ; celles de la seconde classe ( les illegiti- mes), 100 lidng (800 fr.) et 50 hectoli- tres de riz; celles du dernier ranp;, 30 lidng (240 fr.) et 15 hectolitres de riz. Les membres de la familie qui ont ete degrades et dechus de leur rang pour une cause quelconque, et parcela meme reduits a la condition et au ni- veau du peuple, recoivenl encore 3 Hang (24 fr.) par niois, et une quantite de riz suflisante pour leur subsistance. 2. Conseil des tninistres ou Cabinet (Nei-Kd). Apres le Ministire de la maison im- periale , le premier corps constitu^ charge des iiiterfits generaux de I'em- pire, que foil connaitre le Iloel-tien (*'), (*) Voy. a ce sujet le Ta-tlising-lioei-tien, K. I, f° 12. (**) Ta-lluiiig-hoei-lim, K. a. GHI'JNE MODEUNE. 148 est le Conscll dcs m'umires { Nei-M , Ikt. : pavlllo)i , cabinet iuterieur). Ce conseil est compose d'anciens servi- teurs eprouves de la couronne , et ap- partenant pour la plupart a Tune ou a I'autre des huit bannieres tartares(*). (') Se\on VJlmanach imperial de 1844, iniprimea Pe-king, le Conseil en question etait nlors ainsi compose : 1° Ta-hio-ssk , ou Docleurs en grande science {politique) ; les premiers fouctionnai- res dej'Empire : Mou-tcltang-a, Mantchou de la banni&re a bordure bleue, I'un des presidents de I'aeade- mie iinperialedes//a«-/<.7, 1'un des menibres principauxdelachanihre historique, etc.,etc. Pwan-clii-iigau, Ciliinois du Kiaiig-soii,\\u\ des presidents de Tacadeniie intperiale des Hdn-thi, etc. Pao-/iifig, Manlcliou, de la banniere a bor- dtire jauiie. (Un 4'' Td-liio-sse , Cliinois, manque dans YAlmanacli, la place ctanl alors vacante.) 20 HiE-PAN-TA-Hio-ssE, Docleuis cii gvaridc science, de second rang: King-tching, Mantchou de la banniere a bordure blanche. Tcho-ping-tien, (Illinois du Sse-tchouan. 3" Hio-ssE. Simples doctews en science po- litique : King-ting, Mantchou, dela banniere a bor- dure jaune. King-Icing, id., de la banniere jaune. Tsai-tsang, id., de la banniere a bor- dure bleue. Soui-tchang, Mongol, de la bordure rouge. Yi-yuh , Mantchou, de la bordure bleue. King-si , id. id. Tckao-kouang, Cliinois du Yun-nan. Lo-wen-tsiun , id. du Kouang-toung, Tcliang-fei, id. de Kiang-sou. Wang-kouang-jin, id. id. Aiusi, sur i5 uienibres de ce grand Con- seil , 9 sont Mantchous et Mongols, et fJ seu- lenient sout Cbinois. Le,"nombre des Cln-tou-hio-sse, on Docteurs en science politique , assistants lecteurs, atta- ches a ce conseil, est de huit, dont six Mant- chous; celui des simples assistants lecteurs (Cfu-toii) est de seize, dont quatorze Mant- chous ; celui des grejfiers ( tlen - tst ) est de six, dont ^ua/re Mantchous. Le nonihre des stcre'taires particuliers (tchoung-cliou)cst de quatre-vingt-quatorze Mantchous etde trente Chinois; les gardes des archives (tcltoting- chou-fo) sont decinq , dont deux chefs et trois sous-chefs, sur lesquels deux sont Mantchous; les ecrivains redacteurs {pie-lie- chi) sontau norabre de dix, et tous Mantchous. Ses attributions sont ainsi definies dans les Statuts : « Ce conseil, qui doit avoir quatre grands chanceliers ( td- hio-sse), deux mantchous etdetix clii- nois, plus deux grands chanceliers cond- j uteurs ( hie - pan - td-hio-sse ) , mant- chous ou chinois , ou I'tin et I'autre a volonte, deliberesur legouvernementet I'adrninistration de I'empire, promulgue les ordonnances de Teinpereur, preside a I'execution des loisde I'Etat, et, en ge- neral, veille a ce que les fonctions res- pectives des differents pouvoirs soient niaintenues dans leurs jnstes limites, afin d'aider I'empereiir dans la direc- tion des affaires de I'Etat. Toutes les fois qu'une grande cereinonie doit avoir lieu, ce conseil en avertit les manda- rins, pour que cbacun d'eux yremplisse les fonctions qui lui sont attribuees. (Suivent les details du ceremonial.) « Toutes les fois que la volonte de I'em- pereur doit etre manifestee, elle Test, ou par un reglement {tchi) (*), oupar une declaration {tchao), \in& procla- mation {kdo), ou par une ordonnance {tchhi). Dans tous les cas, la forme des publications doit etre determinee et arretee par le conseil, avant d'etre presentee a I'empereur. II en est de meme pour ce qui concerne la litur- gie ou les observances que Ton doit suivre dans les sacrifices publics , dont quelques-uns sont regies par I'acade- mie de//d?i-/m, etd'autres pnrle con- seil des ministres; il en est de meme aussi des cartes de congratulation, si ces cartes doivent contenir quelques phrases. Chaque fois que le conseil re- coit I'ordre de faire connaitre au public fa volonte de I'empereur, si c'est une reponse faite a un memoire, a une peti- tion , et que cette reponse ait deja ete expediee, le conseil doit la transmettre a I'administration qu'elle concerne, pour y ^tre transcrite selon les formes usi- tees. « Tous les documents officiels , soit (*) Le reglement {tchi) est usite pour an- noricer etregler les dispositionsprises pour les grandes ceremonies: la declaration {tclu!o)el la proclamation {kdo) sont usitees pour an- noncer aux mandarins et au peuple les cho- sesquiconcernent la grande administration de I'Etat; Vordonnance{tchhi) est employee quand il s'agit deconferer desrangs et des tilres. 144 L'UNIVERS. qu'ils aient ete apporles par le Service des dvp^ches (fait par la cavalerie du deparlement de la mierre, niise a la disposition des t;oiiverneurs et heatt- iiaiils-(;ouverneurs dc provinces), on par rcMlremise de I'un des six departe- iiientsministeriels,doivent, avantd'etro nreseiites a rempi'reur(*),etrc soiimisa rexainen du conseil des viinistres , a\x\ en fait faire des duplicata. S'il y a des plans , des devis , des notes ou petits biltsts annexes a ces documents, ils doivent les accompagner(*'). « Les decisions proposees par le con- seil eUnl arretees, des cedides ou pe- tits billets sont prepares : s'il y a deux decisions sur un nieme snjet , on les transcrit chacune sur une cedule diffe- rente; s'il y en a trois, on fait trois ce- dules ; s'il y en a quatre , on en fait quatre. Lorsqu'elles sont ainsi toutes preparees , on les range en ordre pour atteudre la decision iniperiale. « Les raisons sommaires qui ont motive les decisions prises par le con- seil sont exposees sur une petite carte ou feuille de papier ; et lorsque la vo- lonle ou le bon plaisir de I'empereur a ete obtenu sur les decisions proposees, alors les documents sont envoyes aux six secretariats. « Quand I'empereur se presente dans la salle d'audience du conseil pour s'oc- cuper des affaires du gouvernement, le president du conseil lui presente alors les documents decachetes et onverts (***). (') Le Conimentaire fait coniiaitre les jours ferics dc rannee, pendant lesqiiels, soil pour une cause, soil pour une autre , aucun docu- ment ue pent etre presente a I'erapereur. (**) Selon le Comraenlaire, \c& plans , les devis, dout il est question dans le texte, eon- cernent les l)atinients el ouvrages pul)lics; les icJiiles sont des pelitcs carles ou niorceaux de papier, attaches aus documents, et con- rernanl lesquels, diverses decisions, tpielquc- lois conlradicloires, sont proposees par le conseil , dans le sens qu'il suppose que I'eni- ])creur pourrail decider. Le hut de ces cc- duUs ou pciits hlllels est d'econouiiser le temps dans I'expedilion des affaires, lorsque I'eni- |>ereur travailie avec son conseil , car uu sim- ple Irait du plnceau de vermilion , sur I'un dc ces pelils hillets, est decisif; il indique quec'est celui qui repoud a la volonle ini- periale. (***) Selon le Commcntaire imperial, voici « Les decisions prises en presence de I'empereur, apres une nnlre delibera- tion; celles portees aux sessions d'au- tomne (qui sont des sessions de revision des jugcments a des peines capitales portes par lestribunaux) etant adoptees [icho-kiue) par le conseil , alors, apres avoir obtenu I'agrement de I'empereur, ces decisions sont marquees du signe executoire. « Tous les documents presentes sont expedies en deux jours, et retournes a qui de droit (*). S'ils ont ^rapport a des affaires pressees , ils sont expedies et retournes le jour meme.)) ( Suit I'e- numeration descriptive tres-minutieuse comment les affaires se traitenl dans le con- seil : « Apres qu'un document ou demande quelconque a ele adresse au conseil par un deparlement ininisleriel , et avant d'avoir ohtenu a son sujet la decision de la volonle imperiale, le document est ouvert j>ar le con- seil, qui le renvoie a la seclion qii'il con- cerne. Les docunienls (pi'litions, demandes, leltres, depeclies, etc.) ainsi reciis chacpie jour, sont reunis dans dix sections ou bu- reaux speciaux , quelquefois dans onze ou douze. L'heure de I'audience ou de la lenue du conseil pour vaquer aux affaires du gou- vernemenl arrivee, rempereur se rend a la Porte de la Piirete celeste (noni du pavilion du palais ou se reunit le conseil), ninnle sur son truiie, et la, cha(pie deparlement minis- teriel lui communique les affaires qui le con- cernent pour les expcdier. Ueux des iecteurs assistants se placent devanl une table deslinee a cet usage, et recoivent, de chaqiie deparle- ment ministeriel represente dans le conseil , la liasse des affaires a expedier. Uu des dix tiib-sse ou docteurs en science politique , memhres du conseil, recoil la liasse des do- cuments decachetes el ouverls, el les depose silencieusemenl sin- la table. Apres les avoir classes selon un certain ordre melhodique, il fail part de leur contenu a rcmperein-. Kn- suile un des memhres tu-liid-sse recoil la de- cision imperiale. Cliaque decision, inscrile a part sur une cedule, est anucxee aux docu- ments ou petitions presentees, •« Lorstpie I'empereur est a son pare de plaisance de Yoiiaii-ming-youaii , les choses se passent de meme dans la salle iniperiale consacree a I'expedilion des uli'uires du gou- vernemenl, » {Ta-tltsing-ltoet-ticn , K . 2, f" 8.) (') Celte celeritc, dans I'expediliou des af- faires, pom-rait servir d'cxemple a bon nom- hre dc deparlemeuls miiiisteriels en Eu- rope. CHINE MODERN E. 145 des vingt-cinq sceaux de I'empereur, employes chacun dans des circonstan- ces speciales (*). « Toutes les fois qu'il est question de faire connaitre publiquement la vo- lonte de rempereur, les menibres dii conseil prive, charges de cette fonction, demandent les sceaux pour les appli- quer. Lorsque Tempereur se rend dans un lieu quelconquehors de la capitale, ces inemes personnages recoivent les sceaux pour le suivre. A la lin de I'an- nee, tons les sceaux sent nettoyes et remis en un parfait etat. » § 3. Conseil prive {Kiiin-ki-tchou). Ce conseil, disentles5/!a/M^6- (**), est compose de grands fonctionnaires de ri&tat (***), proposes a la direction de la machine gouvernementale ., comme s'exprime le texte chinois. II preside a la confection des edits imperiaux, des ordonnances de rautorile souveraine, en meme temps qu'il veille aux besoins generaux de la nation et de I'armee , afin d'aider Tempereur dans le gouver- nement de I'empire. Tons les jours il se rend dans I'en- ceinte du palais imperial interdit au public , pour y ^tre a la disposition de I'empereur (****). (*)Tous ces differents sceaux, la piupart formes de pierres precieuses de diverses coii- leurs, sont tous de forme carree , et varient de 2 a 6 lignes sur 2 ponces el plus de di- mension, lis soni tous ornes de la figure du dragon, qui est I'embleme de la puissance imperiale. (**) Ta-thsing.hoeUien. K. III. (***) Les ministres d'Etat qui composent ce grand conseil sont eu nombre illiniite; mais ceux qui resident dans la capilale sont au nombre de trente-deux , seize Manlchous et seize Chinois. lis sont choisis parmi les td- hio-sse, Mautchous et Chinois, les presidents des divers ministeres, les vice-piesidents et autres grands fonctionnaires residant a Pe- king. (****) La salle oil le conseil se reuuit, dil le Commentaire, est situee a Tinlerieur de la Porte des ancelres eminenls ( loung-tsoung' men). Cliaque jour, it I'heure yin, comprise eutre trois et cinq heures du matin , les membres de ce conseil se rendent dans ce lieu de leur reunion. Lorsque les affai- res ont ete expediees, et que les eunuques de service ont fait connaitre les intentions W ^Livraison. (Chine moder-ve I Lorsque Sa Majeste se rend a sa re- sidence de Youan-ming-youan, ou qu'elle est en voyage, les choses se pas- sent de meme. Chaque fois que des edits ou des ma- ni/estes de la volonte imperiale doi- vent etre promulgues , apres avoir ete r^diges dans les formes voulues par le conseil desministres d'Etat^ lis sonten- suite transmis au conseil des ministres ou Cabinet {Nei-ko) (*). Lorsqu'un acte public , sorti du sein du Conseil prive, est destine a etre de I'empereur , chaque membre se retire. II n'y a point d'heure fixe pour I'audience de I'empereur. Quelquefois I'empereur ue convoque ce conseil qu'une fois par jour, quelquefois plusieurs. Quand ces ministres d'Etat arrivent en presence de I'empereur , ils elendent une natte par terre, sur laquelle Sa Majeste leur permet de s'asseoir.Ensuite, les matieres sur lesquelles doivent s'ouvrir les deliberations sont soumises a chaque mem- bre, qui recoit en meme temps les differeu- tes cedules sur lesquelles on a exprime une decision difl'erente : chacun donne son avis , en indiquant la decision qui lui parait pre- ferable; et avanl que I'empereur ait fait con- naitre sa volonte par Tempreinle du pinceau de vermilion, tous les membres du conseil lui presentent respeolueusement, avec les deux mains, la cedule qu'ils ont adoptee, et se re- tirent a leur place pour y attendre la deci- sion souveraine. Toutes les decisions etant ainsi re(jues, les membres du conseil sortent de la salle d'au- dience de la maniere indiquee. (*) Selon le Commentaire, les documents publics qui decoulent de I'initiative impe- riale, sont appeles Edits (jii) ; ceux qui sont une decision prononcee sur une demande, une petition, un placet, etc., sont appeles Manifestes dc la volonte imperiale {tclil). Si cependant ces derniers repondent a un inte- ret general, et que, par consequent, leur promulgation doive etre faite d'uue maniere solennelle dans tout I'empire, ils prennent le nom A'Edits. Leur formule est celle-ci : Edit imperial recu du conseil des ministres {Nei ho foung changyu) ; I'aulre foimule porte : i>/a- nifeste recu de la volonte' imperiale {foiing' tclii). Chacun de ces documents porte le jour, le mois et I'annee dans lesquels il a ete requ. ' Si ou Juge qu'il doive etre imprime, on ea refere a I'empereur; et, apres avoir obtenu son assentiment, on ajoute au document ces mots ; Par ordrc de I'empereur, respectez ceci: {kin'ting), .) 10 I If) L'UNIVKRS. iiii.s ;i cxrculioii :snnspnSspr par le cun- .sel/desininisfrrs). eel ;icte public, npres avoir ete bicn et dilment examine, est sct'llc, ct ensuite cxpedie (*), Toiites \os fois qtiun onire imperial doit (Mre reserve pourdps rirconstances deleriiiinees , il est inserit siir un re- gisfre speeial , et conserve soigneuse- ment. Lorsque le temps est arrive , i! est alors pxtrait dii reuistre, et repre- seiite a rempereiir (**). Le Conseil prive a encore beaucoup d'autrcs atlribiitions , telles que celles dedeliberer sur les affaires les plus im- portantes du goiivernement; d'eclairer en temps de guerre les operations mili- taires , apres s'etre procure les rensei- gnements les plus exacts possibles sur les nior)tagnes, les fleuves, les routes, les distances des pays qui doivent etre le theatre de la guerre ; de fournir a rarniec en campagne les amies, les che- vaux , les provisions dont elle pourrait (*) Si un edit, ajoule le Coninientaire, exi^c d'etre proinptemenl cxpedie , ou s'it doit cUk tenii secrel, il no passe pas coinnie li's aiiliTS par le conseil des miiiistres pour clre promulcue parce dernier ;c'est alors uiie de- peclie att palais {/iiig-./i/ii), qui j)as.se par le grand conseil des ministrcs d' Elat, avec le ca- chet diKpicI il est scelle, ct rcinis ensuite au bureau special du niinistcre de la guerre charge des depeclies ((pie portent des cava- liers tarlares) , pour eire expedie a sa desti- nation; et, selou la plus ou nioins grandc urgeuce , le document est porte par des cour- lit-rs, cpii font (piatrn cents, cinq cents, six cents, ct, dans les circonstances graves, jus- qu'a plus desix cents //' (60 lieues) par jour! 8a fornnde est celle-ci : Depeclie expediee par le miiiislre de la guerre. {") Un rcgisire special , soigneusement tenu, dil le Conimcntaire, est destine a con- server la tencur des actes de I'aulorite sou- veraine. Tonics les I'ois qu'un edit on niani- festc de la volonte imperiale, couccniant une affaire quelconque du gouvcrncmenl, a ete icru et doit ^Ire conserve , il est inserit, en presence de SaMajeste, sur un regislre. L'e- l>oqiic de son execution arrivce, le document est exirait du registre , et |)rcsenle de nou- vcau a I'enipercur, pour lui dcniander son hou plaisir. Si I'affaire est d'unc nature qui de- mandn le secrel, alors le docnnient estscclle du sccau dc VKIal; el qiiaii,! le nionienl est irrrivp, If rl :■» Le Minisfere des offices civils sedi- vise en qiiatre grandes sections (t/ising lissf'), qui sont : La Direction du mouvemeut du per- sonnel; la Chambre des informations , laChambredu personnel; etle liureau des litres. 1° Direction da mouvement du per- sonnel {torn siofien thsing lisse). Cette direction, qui a cinq directeurs , trois Mantchoiix, wi Mongol et vn Clii- nois(i'elenienttartare y a, comme on le voit, une forte majorite) (*); quatre directeurs adjoints : deux iVlantchonx et deux Chinois : et trois sous-direc- teurs : un INlantcliou et deux Cliinois , est cliargee du classement eclaire des mandarins dans I'uii des neuf rangs ou ordres de presennce que nous allons enumerer en detail, en meme temps que de faire donner de I'avancement, ou subir une degradation, a ceux qu'elle aura reconnu les avoir merites. Elle est aussi cliargee de la presentation des mandarins a la cour. Les neuf rangs de mandarins. Tout le personnel des fonctionnaires civils en Chine , soit a I'interleur, soit a i'exterieur , depuis le premier jusqu'aii dernier, estclasse en neuf rangs (phi), subdivises chacun en deux classes , pre- miere et seconde, ce qui forme dix-huit classes ou categories (**). Ces rangs ont pour marques distinctives des boii- tons ou plutot des globules de differen- tes substances et de diverses couleiirs , portes au sommet du bonnet officiel. l'""RANCr. V^ classe [signe caracte- ristique : pierre precieuse rouge}. Ceux qui font partie de cette categorie sont : les premiers fonctionnaires de Tempire; le grand precepteur {tdi ss^.) ; le grand gouverneur {tdi foil) ; le grand chance- lier ou grand gardien de I'empire {fat pcio) ; les membres du conseil privo {ta hid ss^. [.es trois pi?eniieres dignites ne sont [*) C'est dans I'organisation de celle c/i- rcctlon , la plus importanle assnrenient de tonics cciles qui conslitiient le gouvernemeni chinois, que la dynastie tarlare artuellemen ri'i^nauio en Chine, a monire le plus de de- fiance de I'espril patrioliquc des Chinois. (") Ta-tlising-lweUien, K. VI, f i. 152 L'UNIVEUS. remplies que dans les circonstances ex- traordinaires, et lorsque I'age de I'em- pereur appele a regner exige uii con- seil de regence. II en est de meme des trois premieres dignites suivaiites : 1" BANG. 2' classe [globe de corail]. Ceux qui appartieiinent a cette cate- goric sont : les vice-precepteurs {chao ss^) ; les vice-gouverneurs {chad /ou) ; Je vice-chancelier {chad pad) de I'em- pire; le pr^cepteur de I'lieritier pre- somptif (fat tseii tdi ss^); son gouver- neur {tdi/oii); son gardien {Idi pad) ; les membres adjoints du conseil prive {hie pan td hid sse) ; les presidents ou secretaires d'ttat des six principaux ministeres {chdng cho'&), s'ils ne sont pas membres du conseil prive ; les cen- seurs imperiaux ou grands informateurs de la droite et de la gauche, ne relevant que de I'empereur {toil tchd youen yu sse). 2" RANG. V classe [pierre precieuse inferieure rouge , ou corail cisele en forme dejleurs]. Ceux qui font partie de cette categoric sont : les vice-precep- teur de I'heritier presomptif, vice-gou- verneur, vice-gardien; les gouverneurs de province {tlisoiing toil) , et les asses- seurs ou sous -secretaires d'l^ltat des six grands ministeres {chi Idng). 2' BANG. 2' classe [memesinsignes, niais de moindre dimension]. Ceux qui font partie de cette classe sont : les lieutenants gouverneurs des provinces {/oii youen) ; les simples docteurs ou nienjbres de second rang du conseil prive {hid sse) ; les membres de I'aca- demie imperiale des Hdn-lin { tchdng youen hid sse); les receveurs ou treso- riers generaux des provinces {poutching ss^). 3" BANG. 1 " classe [pierre precieuse spherique bleue]. A cette classe appar- tiennent : lescenseurs ou informateurs imperiaux adjoints de la droite et de la gauche {/ou toii y%i ssi); les assistants mandarins superieurs de I'lntendance de la maison unperiale {Tsofing jin foil Foil tching) ; le grand referencfaire pres du conseil prive {thoung tching sse) (*); (*) I,a Coiir des Refcicmluires , pies dii conseil-prive {Thoiingtcliing-sse), reqoit les reqiiutes, petitions , forniiiles d'appel , etc., till piihlic, non cachetees, les meinoires des mandarins de province, et les placcul sous les les deux premiers presidents de la haute Courde justice) (*) {td-li-sse King)\ le directeur du bureau des reviseurs, atta- che au college national (**) {tch^n-sse- foii Tch^nsse); les deux presidents de I'lntendance des sacrifices (**") {Tdi' tchdng-sse King); les gouverneurs spe- ciaux de I'e-king et de Moukden {foil yin); les jugescriminels de chaque pro- vince (Gaw tchd ss^). 3« RANG. 2* classe [mfiines insignes^ mais de moindre dimension]. A cette classe appartiennent : les deux direc- teurs de I'intendance des provisions de bouche pour la maison imperiale , et des victimes pour les sacrifices {Kwang loiisse king); les deux intendants des ecuries imperiales, ou grands ecuyers {Tdi-pd sse king); les inspecteurs des salines {yin-yimss^). 4" RANG, i"" classe [petite pierre pre- cieuse bl^e, ou petit globule en verre de mime couleur]. A cette classe ap- partiennent : les referendaires en se- cond {foil sse) pres du conseil prive; les vice-presidents {chdo king) de la haute cour de Justice; les sous-chefs {chdo tchin sse) du bureau des reviseurs des docutnents publics; les vice-presidents {chad king) de la cour des sacrifices; les deux grands maitres des ceremo- nies de la cour imperiale ( hoUng loit sse king); le vice-grand ecuyer de Tempereur; les prefets adjoints de Pe- king et de IMoukden {foil tching) , et les inspecteurs des provinces {too). 4" RANG. 2" classe [memes insignes, mais de moindre dimension]. A cette classe appartiennent : les lecteurs im- Periaux {chi tou hid sse), membres de academie des Hdn-lin ; les explicateurs imperiaux {chi kiang hid sse) de la m^- me academie ; les deux grands provi- seurs {Koue-tseu tsi-tsiiou) du college national; les lecteurs appartenant au conseil prive ; les prefets de departe- \ eux du conseil prive ou des membres du ca- i)inet, apres les avoir corriges, s'il y a lieu. (') Cour supreme, et en meme teni|)s Cour d'appel , siegeant a Pc-king. {") C,e bureau lilteraire prepare les docu- nienls destines [\ la puhlicite, sous la presi- dence de membres de rAcadeinie imperiale. ('**) Cette coiir a la direction- des sacrifi- ces, et aiilres ceremonies publiques et reli- gieuses qui out lieu a Pt'-king. CHINK MODERNE. 153 merits {tchifou) \ les prefets aborigenes {thoii tchifou) ; les inspecteurs adjoints des salines. 5" BANG. 1'" classe [globule decristal blanc ou de veri'e]. A cette classe ap- partiennent : les academiciens du rang de Tchunfung , de la droite et de la gauche ( litt. ; allees du printemps de gauche et id. de droite) ; les conseillers {tsdn i) de la cour des refereiidaires pres du conseil prive; les sous-direc- teurs de Tintendance des provisions de bouchede la niaison imperiale ; les nies- sagers de I'empereur {ki sse tchoung) ; les mandarins attaches a I'lntendance de la maison imperiale (/* sse kwdn) ; les huissiers introducteurs pres les di- vers ministeres {Idng tchoiing) ; les ar- chivistes, id. {tchi tchoilng) ; les deux directeurs presidents de robservatoire imperial Ki)i-tie?i-kien Kien tching ; le directeur president de racademie de medecine {Tdi-i-youen youen sse) ; les chefs de districts {toung tclii)\ les chefs de districts aborigenes {thou thoi'ing tchi) ; les sous-prefets de la province de Tchi-li. 5* RANG. 2' classe [menies i)isignes, mais de nioindre dimension]. A cette classe apparliennent : les lecteurs et les explicateurs de I'academie imperiale des Hdn-lhi ; les officiers des haras de I'em- pereur ; les grauds maitres en second (chdo king) des ceremonies de la cour imperiale; les censeurs ordinaires ou informateurs imperiaux de province (yd sse); les mandarins subalternes de I'intendance de la maison imperiale; les ecrivains (?/OMe?i tcdildng); les sous-pre- fets d'arrondissements {tchi tcheou) ; les sous-prefets aborigenes {thoii, tchi- tcheoic); les assistants inspecteurs des transports des grains {yiinfou) ; les re- gulateurs du prix des grains {tl klu). 6* BANG. 1'^ classe [globule enpierre precieuse blanche]. A cette classe ap- partiennent les lecteurs du conseil prive ou du cabinet; certains membres de I'academie imperiale, du college natio- nal, des divers ministeres , de la cour des censeurs, de I'observatoire impe- rial, de I'academie de medecine, de la direction des haras imperiaux , de I'in- tendance des sacrifices ; les principaux membres de I'academie imperiale de m\xsique{chin-yd-tchi Tchi tching) ; les procureursde districts {fhoAngpdn): Ics maitres en doctrine des pretres boud- dhiques et Tao-sse {*). 6"'rang. 2^ classe [memes insignes]. A cette classe apparliennent : les assis- tants officiels aux sacrifices; les correc- teurs et compilateurs {sieou tchouen) de I'academie imperiale; les mandarins inferieurs de I'intendance des provi- sions , de I'observatoire imperial, Mant- chous et Mongols ; les secretaires des recettes generales ; les sous-prefets ad- joints; lesdocteursdelaloi des religions bouddluque et Tao-sse. V BANG. 1" classe [globule d'or ou dore]. A cette classe appartiennent : les compilateurs de I'academie imperiale ; les mandarins inferieurs de la haute cour de justice, de I'intendance des sacrifi- ces, du college imperial; les greffiers ou archivistes du conseil prive; les secre- taires de la chambre des referendaires; les sous-secretaires; les greffiers de I'in- tendance des sacrifices; les mandarine inferieurs de plusieurs autres adminis- trations ; les recitateurs de prieres de I'intendance des sacrifices etde la direc- tion des ceremonies religieuses publi- ques; les chefs de cantons {tchihien); les secretaires des chefs de justice de chaque province; les directeurs des etu- des de districts. 7' BANG. 2° classe [m6mes insignes.} A cette classe appartiennent : les mem- bres de I'academie imperiale nommes {kien tdo) ; les secretaires de la carros- serie imperiale ; les secretaires particu- liers du cabinet de I'empereur (ffAortn^- choii-kd TchoAng chou) ; les secretaires particuliers du conseil prive {nei-ko tchofi/fg choA) ; les greffiers du bureau des reviseurs des documents publics; ceux de I'intendance des provisions im- periales ; les membres inferieurs du col- lege national; les inspecteurs assistants des etudes {tsoii kiao); les secretaires du prefet de Pe-king; les membres in- ferieurs de robservatoire imperial ; de I'intendance des sacrifices ; de I'acade- mie imperiale de musique ; les gardes des receveurs generaux ; les secretaires des inspecteurs du sel , les sous-pre- fets adjoints. (*) Les chefs superieurs des bouddhistes se nomnient Seng lou sse tsb yeou cken chi ; ceiix des Tao-sse : Tadloii sse tsb yeou tchingi. f54 J/imiVERS. 8' RANO. \" rlaxsp [n\?iws inslgnes]. A rctte clnsse nppartipnnent : les direc- ipurs (le r.irrivee ct du dq)art des de- \)M\es{ssr won); les lettres liabiles dans la connaissance des cinq Kiiuj {H'oii king pd sse); les professeurs du college national ( Koitc tseii klea hid telling) ; les historiogmplies {tchoii pd) deroi)servatoire imporial; les incdecins imperiaux (y«l) de racademie de ine- decine; les mandarins inferieurs de rinteiidance des sacrifices ; les tresoriers {khoii id sue) des receveurs geiieraux de province; les iutendants des greniersa sel places sousl'aiitoritedesinspecteurs generaux des salines , des magasins pu- blics de sel livre a la consoiumation ; les inspecteurs parliculiers de la ni6me administration ; les employes principaux {tchi ss6) des receveurs 'generaiix de province; les secretaires {king li) des prefets; les assistants des chefs de can- ton {hien tching) ; les chefs des institu- tions litteraires,nommess.sr^-c/«<-/t/6///6 Ion; les principaux des colleges d'arron- dissements ; les principaux des colle- ges de cantons {kido yil) ; les principaux des colleges bouddhiques; ceux des col- leges des Tad'Sse. 8* BANG. 2" classe [mdmes insignes}. A cette classe appartiennent : les archi- vistes (tl^npon) de I'academie impe- riale , ceux du college national , ceux de I'intendance des ceremonies; certains membres de I'observatoir* imperial , de I'intendance des sacrifices, etde I'aca- demie imperiale de musique ; les gar- diens des sceaux des receveurs generaux de province; les employes principaux {tchi sse) des inspecteufs des salines; les chefs de grandes institutions litte- ra\res{hiun tdo); lespr^tres boudShiques nommes kid i {d'une verlu manifeste); les pr^tres (tdo-sse) nommes tchii{d'une vertuparfaite). 9' RANCi. I" classe [m&mes insignes], A cette classe appartiennent : les prin- cipaux traducteurs du bureau de tra- duction attache au ministere des rites (// poll sseyt hoei thoi'tngkouan tdssd); certains membres de Tobservatoire im- perial ; les chefs des clcrcs {ssg choit) dans toutes les administrations ; les as- sistants oflicielschinoisde I'intendance des sacrilices; les gardiens des sceaux des presidents de cour de justice de province; les employes principaux des prefets (/«« tchissc), et les grel'fiers des chefs de cantons {hien tchoiipd). 9' BANG. 2' classe [memes insignes], A cette classe appartiennent : les huis- siers {tdi tchdo) de I'acaddmie impe- riale; les traducteurs en second du bu reau du ministere des rites ; les archi- vistes du college national ; les herauts d'armesde rintendancc des maitrcs des ceremonies; les gcoliers du tribunal des peines,ou ministere de la justice; les astronomes(sA'e'c/imp6.sse) de I'obser- vatoire imperial ; les agents medicaux {limoii) de I'academie de medecine; les emj)loyes {ssi yo) de I'intendance des sacrifices ; les agents du ministere des travaux publics {koiiiig-poit ss^ tsinng) ; les gardiens des sceaux des departe- ments et des districts ; les employes (// moii) des sous-prefectures ; les inspec- teurs du tresor ou des finances {tab kou td sse)\ les principaux officiers de po- lice (sioMn-kh6-ss6 td sse) ; les rece- veurs d'octrois {choiii-khb-ss6 td sse) ; les geoliers en cbef des departements et des districts; les conservateurs des greniers publics desm^mes circonscrip- tions territoriales ; les chefs de villages (sifin kien); les chefs de villages abori- genes {thoii siicn kien). Tous les employes qui ne sont pas compris dans ces neiifrangs sont dits non encore entres clans les classes dis- tinctes officielles {weiji Mou) (*). Ces derniers sont encore tres-nom- breux; nous nous dispenserons d'en faire ici I'enumeration. Celle que nous venons de dormer , d'apres les Statuts imperiaux, pourra ne pas ^tre d'une lecture agreable ; mais nous pensons qu'elle contribuera puissamment a faire connaitre a fond I'organisation secu- laire du gouvernemcut diinois. Les mandarins qui ne sont pas com- pris dans I'un ou I'autre de ces neui ordrcs de distinction, et qui cependant occupent des fonctions dependantes du gouvernement, sont les employes infe- rieurs qui rentrent dans la classe or- dinaire des salaries. Le titre de mandarin ou de fonc- tionnaircdii gouvernement esten Chine, encore plus qu'ailleurs peut-^tre , I'oh- (') Tn'tlising-hoei-t!en,K. VI, T 1—2. CHINE MODEHNE. 155 jet de bien des convoitises, parce que , "outre la perspective d'un traitementou revenu assure, sans que Ton soil oblige de se donner beaucoup de peine, il y a aussi en perspective la possibilite de satisfaire des sentiments de vanite et d'orgueil , que fait naitre, dans les es- prits etroits, I'exercice d'une portion deleguee, tant niininie soit-elle, de I'au- torite administrative ou judiciaire. Le gouvernement chinois a trouve bon de tirer parti, au profit du tresor, de cette faiblesse puerile; et il vend quelque- fois, mais cherement toujours, a de ri- rbes negociants qui se retirent des af- faires, ou a d'autres particuliers n'occu- paiit aucun emploi public, le droit de porter I'un des insignes des neufordres de mandarins. I\Iais ces mandarinats personnels ainsi acbetes inspirent fort peu de respect au peuple cbinois, qui en connait I'origine (*). Toute infraction a la loi, toute action qu'elle punit , eniporte prealabiement la degradation du rang et le retrait de Temploi. La carriere des emplois publics est soumise a des regleraents que la Direc- tion dont nous nous occupons est char- gee de faire observer. C'est surtout des Chinois que Ton pourrait dire, a juste litre, qn'ils sont tons admissibles aux emplois civils et militaires ( Charte constitutionnelle , art. 3). Cependant, pour pouvoir remplir des fonctions pu- bliquesen Chine, il faut appartenir a I'une ou a I'autre des huit categories suivantes : 1° Avoir le grade lillcraire de tsin sse, lilt. docteur availed dans ses grades, equiva- lent a celiii de docteur 1^**) ; ao Avoir celiii de hihji'ii (homnie recomman- de , equivalent a celui de licencie (*•«) ; (*) D'apres uii memoire fort curieux adresse a I'empereur regnant, en 182 1, a lepoque de son avenenient, et que nous reproduirons ailleurs , la vcnie des offices avait procure au tresor, pendant vingt ans (de i8ooa 1821), troh cent mille taels ou 2,400,000 fr. (**) Des Mantclioits et des Mongols, eni- ploves comme traducieuis du chinois en mantcliou et en mongol, sont places dans cette categoric. (***) Meme observation. Le nombre de ces docleurs et licencie's est si considerable, que beaueoup d'entre eux ne peuvent parvenir a 3° Eire koimgseng; \ esp^fs de hiicheliers,cani\~ 4° Eire r/'/i sens; ''•'"' '"'* '^'''"''"' f "P'^'''*'"'^ • 5° Etre hen seng; ,„„, ,g !,.,,,„e g,;„e,iq„e ,ie 6 Eire sengyonen; 1 tHudi , hommes de laltm (•;; 7° Eire koiidn liio seng , disciple d'un fonc- lionnaire; 8" Eire du grade de //, ou de lettre subor- doune. Ceux qui exercent des emplois dans I'art medical, ou parmi lessectesboud- dhiste et Tao-sse, restent cbacun dans leur sphere d'action, sans concourir, pour I'avancement, avec les autres em- ployes civils. Nous n'entrerons pas ici dans les de- tails donnes par les Statuts sur les au- tres attributions de la Direction du per- sonnel du Ministere des emplois pu- blics. Ces details, qui concernent les reglements a observer dans I'admission aux emplois, les promotions, les per- mutations , les epoques fixees pour la presentation des mandarins a I'empe- reur, sont plus interessants pour des Chinois que pour des lecteurs euro- peens, quoiqu'ils aient encore le meme caractere d'ordre et de regularite qui forme I'essence des moeurs chinoises , obtenir des emplois publics. EniSai, il y avail plus de 5,000 tsin-sse ou docteitrs , et plus de 27,000 kih-jin ou licencies sans em- plois ! {*) Les koiing seng sont des sin isdi, qui nreunent rang immedialement apres les kih jin ou licencies. II y a six series de bache- liei's koiing seng : i" Ceux qui le sont par nne faveur spe- ciale de I'empereur; on les nomme gdn koung seng; 2° Ceux qui sont clioisis dans un canton pour leur meritesuperieur, une foisendouze ans; on les nomme pd koiing seng ; 3° Ceux qui sont bacheliers siii Isdi par accession, et en seconde ligue ; on les nomme foil koiing seng ; 40 Ceux qui sont admis dans ce grade, sc- ion de cerlaines regies, dans un certain nom- bre d'annees ; on les nomme soiii koiing seng ; j° Ceux qui soul patronnes parte doyen du canton , en consideration de leur bonne con- duile etdeleurzelelaborieux; oh les nomme jeoit koiing se'ig-; C Ceux qui payenl cerlaines taxes exigecs par la loi; on les nomme li koiing seng. Les kien seng sont aussi des i"'^, 5^ et 6* classes precedentes. Voy. ci-apres VExpose des etudes chinoises. 156 L'UNIVERS; et qui manque peut-5tre iin peu trop aux ndtres. II y a cerlaines lunes fixees pour les numiiitttlons el promotions. Toutes les lunes paires sunt appelees luiies do yrundes promotions ;ks lunes impai- res sont des lunes de promotions iir- gentes {*). Aucune nomination nl pro- motion n'a lieu dans la tune interca- laire. Les nominations et promotions des mandarinsmantclious et mongois, ainsi que des mandarins militaires chi- nois, ont lieu ie cinquieme jour de la premiere decade (siun): celles des man- darins chinois dans la derniere decade, le vingt-cinquieme jour du mois ; celles des Pie tie cki , secretaires interpretes niantchous et mongois, attaches aux divers ininisteres et aux nombreux mandarins de ces nations exercant leur autorite en Chine, ont lieu dans la se- conde decade de chaque lune , Ie ving- tieme jour du mois. II est dit, dans les reglements con- cernant les nominations des manda- rins : « Un homme plein de vertus et « de capacite, fdt-il votre enneini, doit « ^Ire presente et promu; un homme « vicicux, fdt-il votre ami , doit etre « ecarte. « Nous ne voudrions pas soutenir que cette belle maxime est toujours obser- vee en Chine. La , comme ailleurs , rinjustice prevaut sou vent sur la jus- tice , et la faveur sur Ie merite et le droit; mais c'esl contrairement a I'es- prit, sinon a la lettre de la loi. Nean- moins, ilserait difUcile detrouverdans le monde un Etat oil le merite et la ca- pacite, le travail enfin,aient aulant d'acces a tons les emplois publics, me- trie aux plus eleves. II n'y a guere que I'empire ottoman, lequel est encore tout empreint de son origine scythiqiie, dont il a conserve rembleme caracteristique sur son etendard (**), qui offre, comme (*) La 2«, la 4', la 6^ la 8% la lo" el la la' lunes sunt des Innes paires; la i"^", la 3*^^, la 5«, la :'•, la 9' et la ii« sont des limes impaires. (*•) Les Turcs, qui tirent leur origiue du iiord (le la Chine, ont encore un assez grand numlire de couliimes qui ont bcancoup de rapport avec celles des Chinois; inaisle signe (vmbolique de leur eteudard , le croissant de la Chine, des exemples assez frequents d'hommes parvenus de I'etat le plus humble aux plus hautes fonctions pu- bliques. Tout mandarin nomine ou promu a un nouvel emploi doit etre presente a I'empereur, avant que d'entrer en fonc- tions. Les formalites prescrites dans ces circonstances sont decrites en grands details dans les Statuts^Y,.. VI, f 27 et suiv.). Voici le resume qu'a fait un mission- naire de cette partie de la seconde Edi- tion des Statuts{*) : n Si ceux qui ont obtenu le grade de docteur, soit de lettres , soit d'armes , ou qui ont deja ete en charge , ont une conduite reprehensible, on en presen- tera la liste , pour que leur nom , qui est sur le tableau des candidats,nepuisse passer aux promotions qu'apres avoir eu des preuvesde leur amendement. « On abrege Ie temps du service et la duree des emplois dans les endroits ou I'air est malsain. On donne des em- plois plus pres de leur pays aux manda- rins qui ont passe soixante ans. On propose de preierence, pour rentrer en charge, ceux qui ont interrompu leur service , ou a raison de maladie , ou pour cause d'un deuil , ou qui seraient alles assister et soigner la vieillesse de leurs parents ages. « Le pere , le Ills , Ie frere , I'oncle ou Ie petit-fils , ne peuvent pas faire partie d'lm meme tribunal. Cette de- fense a lieu dans Ics provinces pour quatre degres de parente ou affinite , soit directe , soit indirecte, ou colla- terale. Aux raisons de politique de ce reglement , il faut ajouter celle de la piete liliale; la convenance {li) ne per- mettant pas aux fils, aux neveux, etc., de contredire im pere, un oncle, etc., ni meme de s'asseoir en leur presence, surtout an meme rang. la tune, accuse d'nne maniere frappanle nne origine scythe, cette derniere nation, que les Chinois nomniaient j-oiic tclii (en Sanskrit tcliatidra vatisa^, de race /iiiiaire , ayant eu aussi pour enibleuie sin- ses eteiidards , et nii'me sur ses inonnaies , le croissant de la lime. C) Memoires sur les Chinois , lorn. IV , p. i3i. CHINE MODERN E. 157 « 11 est accorde aux gouverneurs, lieutenants gouverneurs, generaux et autres grands mandarins dn premier ordre, de proposer leiirs fils pour des emplois, sans que ces derniers aient obtenu aucun grade. La loi suppose que I'education qu'ils ont recue y supplee , et que les parents n'oseraient les pre- senter s'iis ne pouvaient pas remplir des charges avec honneur. Da reste , cette exception ne peut avoir aucun mauvais effet, parce qu'elle n'a lieu que pour les petits emplois , et qu'on ne monte aux autres qu'autant qu'on a fait preuve de merite. « On accorde un conge aux manda- rins tartares pour ailer au-devant de leur pere ou de leur mere,deleur grand- pere ou de leur grand'mere qui revien- nent malades des provinces, ou a la rencontre du corps de leur frere , ou pour assister a ses funerailles. On a deroge a la loi du deuil de trois ans pour eux, et on i'a reduit a cent jours. - J.es Tartares ne sont pas en assez grand nombre pour pouvoir la garder. « Tous les mandarins d'armes et de lettres chinois se demettent de leur em- ploi a la mort de leur pere ou de leur mere, de leur grand-pere ou de leur grand'mere du cote du pere , et obser- vent rigoureusement la loi du deuil de trois ans. Cacher, differer d'annoncer ces morts est un crime punissable. Ces mandarins ont droit de demander a se retirer pour aller servir leurs parents , lorsque ceux-ci ont passe soixante et dix ans, et on ne peut pas le leur refu- ser. Quand ils sont en voyage, a moins d'un ordre expres de se presser , ils ont droit de se detourner de dix jours pour aller a la sepulture de leur famille. » Un mandarin agirait contrairement a la loi, s'il contractait mariage avec une personne dont la famille serait placee sous son autorite, ou qui appartiendrait a une condition servile. L'avancement des mandarins est soumis a des regies fixes et determinees , lesquelles, malgre leur apparente severite , laissent encore plus d une porte ouverte a la faveur. 2" Chambre des informations {Kao koUng sse). Cette chambre coraprend dans ses attributions, ainsi que le disent les Statuts (K. 8.), de tenir des notes exactes et detaillees des m^faits com- mis par les mandarins civils dans I'exercice de leurs fonctions {tchouf&n), en meme temps que de signaler leurs merites ou leurs nonnes actions {isiit). Tous les trois ans, un examen appro- fondi (tcha) de la conduite des manda- rins a lieu a Pe-king, en meme temps que se tiennent les grandes assises trien- nales, concernant les mandarins, et que Ton nomme la grande instruction generate ( td lii) (*). C'est alors que la Chambre des informations met a execution les ordres du gouvernement relatifs au mouvement du personnel re- sultant de cet examen general des man- darins. Les peines qui sont infligees, par suite de I'examen de la conduite officielledes mandarins, sontrangeessous trois chefs principaux : le premier consiste dans une amende {fa fowig) de sept especes differentes (**) ; le deuxieme consiste dans la degradation du rang a des de- gres inferieurs {hidng ki), laquelle de- gradation est de trois especes pour ceux qui conservenj leur mandarinat , et de cinq pour ceux qui ne le conservent pas ; le troisieme consiste dans la pj'ivation de tout rang {ke tchi), avec ou sans retrait d'emploi. Ceux qui sont descendus deleur pang, mais qui ont conserve leur emploi , re- couvrent ce rang au bout de trois ans , s'ils n'ont point commis de nouvelles fautes. Ceux qui ont perdu tout rang le recouvreut au bout de quatre ans , s'ils ont eu une conduite irreprochable. Quand la perte du rang et la suspen- sion de I'emploi ne suffisent pas, la re- vocation ou la destitution a lieu; et enfin, si le mandarin est accuse de de- lits crinTinels consideres comme delits prices^ il est renvoye devant le Tribunal des peines (***). (*) Cet examen general de la conduite de tous les mandarins de Tempire, tous les trois ans, est une coutume tres-ancienne, que Ton trouve deja presciite sous la troisieme dynas- lie. Voy. le Tcheou-li. (**) La peine est proportionncc a la faute commise. Ainsi il y a I'amende a la perte d'un mois de solde , cede a la perte de deux mois, de trois, de six, de neuf, d'un an, de deux ans , etc. (***) Voyez ci-apres la notice sur le Code 158 L'UNIVKRS. Tout mandarin trndiiit tievnni iin tri- l)tinal, pour uii crime oil dclit, doit at- tptidrc le bon plaisir de l'etni)ereiir, au- (luel le jiigemeiit est toujoiirs defers, il a cnstiite le rccours en grace (/.vcm Ihsivou) pres dii nienic enipereur ; puis |p ponrvoi en revision, par une suppii- (|ue detaillee {tchiii thshig) ("). Li's niovens employes pour rocom- pcnser lesnicrites des mandarins, par suite du nienie (jrand examen, soiit aussi classes sous deux chefs princi- paux : l"l3 mention honorable (A/ /o«), de trois especes; 2" I'avaneement en de- gres {kidki\ aussi de trois especes, c'est-a-dire, ravancement d' tin, de deux oti de (rois degres, dont la marque dis- tinctive se porte a la ccinture; enliii, 3" la reunion de ces deux cbeCs, con)pre- nanldouze especes. Neici les regies observces dans les grands examens tricnnaux des manda- rins de rempire (**) : I/examcn des mandarins de la capi- tale se nomme Examen de la capitate {/liny tcMia)\ celui des mandarins de provinces, Grande information gene- rale [to, ki). Dans Vexamen de la ca- pitate , le conseil est compose de hauts ftciialiles Clilnois. Lii loi en Chine a fait line (listincliun entie les dilils conimis par les foiiclionnaires pnbliis comine fonclionnnircs oil liunimes imltlics, et comnie Itommes pr'ives oil iini/)/eJ /xtiiiculicrs. Lis premiers sonldii lessorl (ill MinUtcre Jes ojfucs publics, el les deniiers dii ressorl de la justice ordinaire, Le* ilelits publics ionX \\on\mii& koiing Isoiii , el les delits prives sst. tsotii. Ces deux espe- ces du delits eucourenl les niemes peinesi|iie les delits de lous les autres partiiuliers, et soiit passibles des nieines chaliineuls corpo- rIs en usage a la Chine ; niais ces deruiers ■ODt rcmplaces par les equivalents suivants : Amende d'un moii . lo coups de bainbou. — Htuc mots — 3IO — trois moii — 3o — tU mois — 4o — ntuf mois — So — HM anitit — IK'gradation d'un rang — — deux rangs — 6o 7" 8o — Ir-jis raiigs , eil ronserranl »es runciioiis , 90 — qiialrt mugs, eii |>crdant its ruuclions , 100 (i) (•*) Ta-thsing lioei lien, K. VllI, 1" 7 (0 Ttt-tftsing-ltod-titn, K. VHI, f 5. lonctJonnaires de I'Ktat, qui sont : les [jnisidents, vice-presidents desdifferents ministeres, les censeurset vice-censeurs iniperiaux d'un cote; le gouverneur et le lieulenant gouverneur dela province de Tautre, lesquels forment une espece de cour d'assises {lie. thi). Un meinbre du viirdstire des offices expose I'accu- sation, en meme temps qu'il retrace la giinealogie et la vie de I'accuse avec la plus grande impartialite. L'expose de i'affaire ayant ete presente ainsi dans tons ses details {kiu thi) , on attend qu'il plaise a I'empereur de faire juger la cause. Alors le fonctionnaire accuse est introduit iijaiidience, 011 11 presente sa defense personnelle (hdelfoii), soil de vive voix, soit par ecrit, a laquelle ic ministere public pout repliquer (*). Dans la ijrande information generate des provinces, la cour est une commis- sion d'examcn (khao thi), composce du receveur general tresorier et du grand juge criminel de chaque province. Le gouverneur ou lieutenant gouverneur remplit les fonctions de n)inistere pu- blic, en place d'un membre du Ministere des offices. L'affaire instruite et jugee , on attend qu'il plaise a I'empereur de statuer sur le sort de I'accuse. Ce der- nier a aussi la faculte de faire revenir sur son jugement par un appel a I'auto- rite stiperieure. Tons les trois ans, cette verification publique et solennelle des mandarins se renouvelle. Dans \''examen public de la capitale , chaque mandarin a \)Ouv examinaleurs {tchou khcio) des fonctionnaires du de- partement ou de la branche d'adminis- tration a laquelle il appartient. Get exa- men porte sur trois chefs differents , pour savoir: l"si la conduite officielle du mandarin a etc convenable et digne d'eloges {tchi'ng tchi) ; 2° si die a ete diligente {kin t'clii) ; 3° s'il a remplitous les devoirs de sa charge {koilng tchi). Et, pour s'cclairer sur ces trois points , on fait des recherches pour savoir : I" quelle est la tenue, Tapplication aux affai- res du mandarin (cAeoM)(**); 2" quelles sont ses capacites {thsdl) (**•); 3° quelle (*) Ib.K. VIII, ^7,8. (**) Esl-elle pure, pleine de dignlle, ordi- naire ? {Comm.) (*•*) Sont-clles gfatides, ordinaires? (A/.) CHINE MODERNE. 15U eslsanianiere d'a(lministrer(/c/(?'/?(7) (*); 'fquel est son ace {tiien) (**). Ces in- formations etant obtenues sent ensuite cnvoyees ail mlnistere des offices^ oil dies servent a ranger tous les manda- rins en trois classes differentes, selon les notes qui les concernent. Ceux sur les- quels on n'a pas eu de renseignements prealaliles sont classes selon le resultat de leiir exanien seulement. Les manda- rins 3ges, les infirmes sont dispenses de se presenter a I'audience des exami- nateurs. Dans la grandeinformadongencrale des provinces, les choses se passent a ^peu pres de nieme , sauf que les chefs civils des departements, lies ano?id is- semenfs , des cantons, examinent les mandarins qui dependent de leur cir- conscriplion administrative. Cet exa- men est repete par le gouverneur et le lieutenant gouverneur de cliaque pro- vince, qui se rendent partout oil leurs investigations doivent avoir lieu. Si le cas est extraordinaire, ils doivent en prendre acte, et I'ecriresur iin registre particulier. Le tribunal des examina- teurs en ayant pris connaissance , en refere au ministere. Les mandarins qui ont bien remjili leurs devoirs sont seu- lement consultes a ces examens, c'est- a-dire qu'ils ne font pas partie de ceux dont la conduite est I'objet d'une ins- truction approfondie. Ceux qui ont la faculte d'en appeler a Tenipereur pour des cas e.xtraordinaires, sont les man- darins de tous grades , jusqu'au chef de canton seulement (***). Les points principaux sur lesquels la deliberation a lieu dans ces examens Iriennaux , sont au nombre de six : 1" defaut de gravite et de dignite dans la conduite; 2" negligence, insouciance, paressedans I'exercice de ses fonctions ; 3" legerete de caractere, conduite in- consideree; 4*» incapacite par rapport aux fonctions exercees; 5" grand age; G" infirmites. Le premier et le troisieme de ces chefs etant bien demontres et verifies, sont punis du retrait de I'em- ploi, toujours neanmoins avec la faculte (*) Est-elle diiigente, est-elle ordinfiire.' (Id,) (*•) Est-il vert, fort, actif .' (A/.) (*") Ta-thslng hofi lirn , R. VIII, f" lo. d'en appeler a la clemence de Tcmpe- reur. Les mandarins avaricieux et pleins de convoitise (//<««; , ceux qui sont durs et cruels {kho) ne sont point classes dans les categories precedentes : on sta- tue a part sur leur compte (*) 3" Cliambre du j^ersonnel [Ki hii'm ss^ (**). Cette chambre s'occupe des affaires personnelles des mandarins; de la maiiiere dont ils doivent se com- porter dans certaiiies circonstances de la \\e; de leur succession, s'ils n'ont point d'heritiers directs (ceux qui se trouvent dans ce cas sont inscrits sur un registre special); de leur change- ment de noms on de la prise d'un sur- noin , toutes choses qui ressortissent a cette direction. Si un mandarin chinois perd son pere ousa mere, il en porte le deuil en se retirant pendant trois ans des fonc- tions publiques. Si c'est un mandarin mantchou ou mongol employe dans la capitaie , il ne le porte de la m^me ma- niere que pendant cent jours; encore, dans ce dernier cas, ceux qui sont a la cour, ou employes dans les ceremo- nies religieuses, ne quittent pas meme inomentanement leurs fonctions. Les mandarins mahometans, ou qui appartiennent a I'nne des bannieres , n'observent egalement le deuil que pen- dant cent jours. Les mandarins qui desirent rentrer momentanement dans leur famille, pour soutenir leurs parents, pere, mere et grands parents, reooivent un conge d'un an. S'ils ne rentrent pas dans leurs fonctions au bout de ce temps, ils sont passibles de certaines condamnations. L'entree en fonctions des mandarins et leur sortie sont du ressort de cette direction , qui public quatre fois par an la liste de tous les fonctionnaires de I'empire, eniridiquant tous les mouve- ments du personnel (***). (') ll>. K. VIII, Pi4. (*•) //^. K. VIII, r 1 5. (**•) C'est uue de ces listes ou ^Imanacfi imperial, qui ftst eu meme temps line verila- Ijje statistique admiiiistralive de I'empire chi- nois, portaiit la date de Vete de rS44, que nous avoiis deja cilc precedemment (p. 82 et passim), et que nous aiuoiis encore occasion de citfT bientot. Ccllc pul)liculion ojftciclle a (luohjue ana- 160 L'UNIVERS. 4° Chambre des brevets et dipl6- mes {YeH/oung ss^}y ou, pour crn- logie avec V Almanack general de MM. Di- dol. Ellc est divisee ei» 4 cahiers ou vo- limifs rliini)i!«, format in-8. Le i*"' Colunie doiiiie la connwsilioii et le personnel ieiil immediatement apies le Conse'd des minislres {yei-ko) et avant les divers mi- tiislifrts. (?fous ferons eonnailre ailleurscette graiide institution.) Apres rindication du |H'rsonnel des six grands uiinistercs, viennent Irs autri's branches des services publics; en un mot, ce i" volume est un tableau du per- sonnel de tous les mandarins residant a PJ- king , classes dans les administrations diver- ses au.\(|uelles ils apparliennent, et selou le rang qu'ils y occupent. Les Irois autres volumes sont consacres aux dix-hu'u provinces de I'empire. Voici comment elles y figurent. Immediatement apres le nom de la province on dunne le cliiffre du traltemenl du goiiverneur, s'il y en a un, du lieiitenanl gouccr/teiir eldu c/iance- lier Utlcraire. §ons ie litre de Delimitation, la tapilale de la province est iadiquee romnie le chef-lieu de I'admiuistralion, et on fait ronnaiire a quelle distance de la capitaie elle est situee. On donne ensuite le nonibre des departements, arrondissements , cantons el districts , s'il y en a , qui forment la pro- vince ; les dimensions de celte province ; ses limites aux quatre points cardinaux, et aux points intermediaires. Sous le titrc de fonctions puMiqites , on eniimcretoulesles fonctions publiques, occu- pees dans la province avec le nombre des ti- tulairos de chaque espece. Puis, sous le titre A^impots directs, on donne le cliiffre des im- jwls fouciers payes anuueliement par la pro- vince en argent et en nature; de ceux qui sont imposes d'une maniere fixe sur diffe- rents objels de consommation, coiunie le sel; dw im|>6ts fixes de diverses especes; on in- dique la quotite des impots preleves par le tresor local de la province pour ctre expe- diesk la capitaie, et la quotite de ces memes iiiipots relcnus |»our les besoins de la pro- vince. Ensuite on fait connaitre le revenu fixe des douanes de la province. Puis on doTiiie le uom et les titres des premiers man- darins dc la proviuce, avec le lieu de leur ori- gine. Easuite, wus le litre de tresorcrie , on plover une phraseologie coiisacr^e, Bureau du sceau el des titres. Ce bu- fait connaitre le chiffre et la quolile de tous les traitemenis des fonctioniiaircs de la pro- vince, ordonuances parlc tresorier. he grand jngc crimincl vient ensuite avec I'indicatioii pareiile de son trailcment, ainsi que quelques autres services specinux, s'il y en a, commc, par cxempie, celui des salines. Voila les documents que donne sur cha- 2ue province V Almanacli imperial de Pd- ing , sous le titre de Rcnseignements ge'nii- raux (tlisoitng Ho). Viennent ensuite des de- tails speciaux sur chaque departement pris a part, ainsi que sur chaque arrondissement et canton compris dans ce nieme departement. Apres renoaciatlon du departement , les li- mites en sont indiquees, conime elles I'ont ete pour la province, ainsi que sa distance en //, du chef-lieu de I'empire , le nombre des ar- rondissements et des cantons qui en depen dent, eu meme temps que le montaut des Iraitements des fonclionnairos (|ui I'adminis- trent, et dont le siege est au chcl-lieu. Sous le titre de Mtcurs et usages, on donne quel- ques definitions concises et caractcristi(|ues, qui s'appliquent aux traits les plus saillanls du caractere et des mneiirs des habitants. En- suite, sous celui de Colleges, ou indique le nombre des colleges et elablissements de ce genre qui existent dans chacune des subdivi- sions adminislralives ; enfui, sous le titre de Produits du sol , on indique les principales productions du departement. Puis viennent les uoms du prefet, du pre- fet adjoint, et des autres fonctionnaires, avec findicalion abrcgee de tears services, le lieu de leur naissance, et le nombre d'anntes passecs dans les grades injericurs. Ensuite vient renumeralion des arrondissements et des cantons qui couiposent le departement. Apres I'enonciation de chacuu de ces cantons et arrondissements, \' Almanack imperial de Pe'-/iing donne le montaut des impdts en ar- gent et en nature que payent ces arrondis- sements et ces cantons, eu nierae temps que le montaut des iraitements k payer aux man- darins de ces circonseriptions adminislralives. Ensuite vient le nom dc ces memes fonc- tionnaires, avec rindication de leurs litres, de leurs services anterieurs et du lieu de leur naissance, corame pour les fonctionnai- res du chef-lieu. On voit, par cet aper< partageait la terre (pour la donner a des •< privilegies) , mais on no partageait pas le « peuple {koii fen thoii eiilli wou fen tni'n) ; " cefutseulementsous les Han que Ton coni- " menca k par tager le peuple, pour ledonnei- « en propre a des nobles; c'est alors que les " rois (ivdng, princes du sang) et les autres « nobles , se partageant en quelque sorle le « royaume, eurent chacun des dizaines de « cites en possession. » Outre des litres de noblesse feodale, la dy- nastie des Han confera encore des privileges de presentation a la cour , et de sieger au rang des minislres. II y eut une noblesse de com" {tcltdo heotc) creeepar lettres patentes, portant des bonnets en forme de couronne, el des vetements ernes de riches broderies. Lorsque les princes du sang, portant le ti- tre de rois, furent crees , ils requrent uu sceptre de roseau et une poignee de terre , et lis allerent ensuite prendre possession de lein- terriloire , oii ils erigerent des autels au genie du lieu. Sous la dynastie des IVci (dans le sixieme siecio de notre ere) , il y eut six degres de noblesse : les cinq des tcheou, qui existent encore actuellement , et au-dessus desquels on ajouta celui de roi ou prince (ivung). En- suite les Ills des hommes litres porterent des litres modificatifs de ceux de leur pere. Com- me beaucoup de litres nobiliaires furent alors accordes, et qu'il n'y eut point d'emoluments attaches a la plupart d'entrc eux (sansdoute a cause du trop grand nombre), il est dit que c'est de cette epoque que dalent les titres vi- des{liiufoungtsio), c'est-a-dire, auxquelsn'e- tait attache aucun traitemenl. La dyuaslie de Tchin (557-58o) etablit neufdegres de principautes, avec des rois pour une etendue limitee de pays. En Chine , les koUng ou dues etaient seigneurs d'un pays de dix lieues d'eteiidue ; les Mou (marqids), de sept lieues; les p^ {comtes), de six lieues ; les tseu {pi- comtes) et les nan {barons), de cinq lieues. Des insignes particuliers , places sur les vetements d'apparat, sont affectes aux differents degres de cette noblesse. Les mandarins revgtus d'un titre lie- reditaire, et qui sont revoques ou des- les regir, el douze autres degres de noblesse. La dynastie des i'oHJ (581-617) eut d'a- bord ?ieuf differents degres de noblesse, qu'elle reduisit a trots. Celle des Thang (618-905) eul aussi neuf degres de noblesse. Les princes du sang furent nommes Thsin wdng, rois de proche pareute. Le fondateur de la dynastie des Suung (960) , qui obtint I'empire avec tant de fa- cilite qu'il n'eut presque pas besoin de se servir de troupes, ful dispense par la de re- compenser des services militaires, el il s'at- lacha uniquement a houorer el a recompen- ser les oeuvres litteraires (wen sse) ; aussi la lilterature fut-elle tres-florissante sous les Soting. Tons les miuistres de cette dynastie furent crees nobles, avec le titre de (lues de I' empire (koue houng).\A\o\ rendiie sous les Hari, qui ne permettait d'anoblir que des militaires distiugues par leurs services et leurs merites , fut ainsi abrogee et violee. La dynastie des Ming (i368-i573), qui a precede la dynastie rcgnante , fut prodi- guede titres de toutes sortes envers les mem- bres de la famille imperiale ; les princesses elles-mcmes en recurent en grand nombre. Les titres conferes par la dynastie regnante sont appeles des ustensiles de renommee (mi'ng khi) ! Ces titres out ele moins prodigues par quelques dynasties que par d'autres, pene- trees de ce prinripe , dil I'liistorieu chinois, (\\xun titre facilcment obtenu est peu estimii du peuple {tsio i te tse niin par/ kouei). La notice historique sur la noblesse chi- noise, de YEncyclopedie citee , se termine par I'enumeraiion de plusieurs personnages qui ont humblemeut refuse d'etre auoblis. (Voy. Youen-Kien loui lidn , K. 11 2- 121. Ces trois livres de I'Encyclopedie historique de Khang-ld pourraient fournir matiere a un fort volume in-8", qui ne presenlerait pas le cote le moins curieux de Ihisloire chi- noise. Il fan! ajouter ici, pour que Ton ne se uieprenne pas sur ce qui precede, que ce n'est giiere queparmi les Tartarcs mantchous (itlea Montrols que des collations de litres ont lieu). 11. 164 L'UNIVERS. litues de leurs fonctlons, pour cause de crimes on delits , conservent leur no- blesse , et ils en tr;insmeltent les insi- gnes a leurs descendants. Mais s'ils se sont rendus coupables du crime de re- bellion, on de rapines et de concus- sions, alors ils ciitrainent leurs des- cendants dans leur degradation. La no- blesse de ceux qui n'ont pas de des- cendants Unit avec eux. Les commissions des mandarins abo- rigcnes leur sont delivrees sur feuilies de papier {chi). Si ce sont des charges de prefets , de sous-prefets , de chefs de districts on de cantons , on y ajoute le sceau de la charge. Tout mandarin abo- rigenc porte les insignes de chef herc- ditaire. Tous les insignes de noblesse doivent etre portes a' la connaissauce du gou- verneur ou du lieutenantgouverneur de la province, qui en refere au 7ninis- fere dis ofjkes, pour etre, par ce der- nier, statue sur I'usage qui doit eu etre fait. Nous avons vu precedemment que tous les fonctionnaires ou mandarins chinoissont classes en neuf ranijs ip'm) comprenant chacun deux classes, ce qui fait (/Lr-kuil degres {/chit) dans les mandarinats. II y a une appellation par- liculiere pour chacun de ces degres, que les mandarins inscrivent soigneusement sur leurs cartes de visites. En voici I'e- numeration : i*^^"^ t/egrc : Kuilaiig loii hi foil : Hxcellence au reiioni eclataut ; '>■" — yuiiiig loii id foil : Excellence au reuoiii ^iorieux; ;{'■ — Tscii idling id Jou : Excellence a iadniiuisli-atiun uieriloire; 4'' — Thoiuig joimg la Jou: Excellence qui doit elie recue pailout avec lespecl; j' — Tliouitg I id/oii : Excellence jouis- sant d'uue consideration universelle ; <>" — Tclioiing i id /ou : Excellence jouis- saut d'une consideration inoyeniie; 7* — Tclwiutg liien-td-fou : Excellence de niodeie nioyeu ; 8e — Tclido i tdfoii: Excellence consi- deri'ei la cour; '•*' ~/'".""o ''^'""S '''foi* • Excellence uont I adiuiniiitration inspire le respect ; lo' — Foung tchi id Jon : Excellence t'loiit la druilure a droit an respect ; > I* — Tcl,i,,g ic /dug; Honoral)le dune Mrlii ttksibtaute; 1 2" — Joh /in /dng : Honorable d« la fe« ret des lettres ; Et / te /dng\: Honorable d'une vertu con- vcnable ; 1 y — Well /in /dug : Honorable de la fo- rct lilteraire; El / I /dug : Honorable d'une considera- tion convenable ; 14" — Tc/u'u^ sse /dug: Honorable rem- plissant convenablenient ses fonctions; 15*-' — Sicdu tclii /dug : Honorable s'occu- pant avec soin de son mandarinat ; iG'' — Siedn tela iso /dug : Honorable en second (du precedent) ; i-j'^ — Trug ssJ Idug: Honorable suscep- tible d'avancer en grades; 18" — Tcng ssii tsd /dug : Honorable en second (du precedent). Tous les mandarins de rempire, de- puis le premier jusqu'au dernier, sont classes d'apres les fonctions qu'ils rem- plissent. Les femmes de premier rang de tous les mandarins out aussi des litres ho- norifiques de netif degres, correspon- dant a celui de leurs maris. INous nous sommes peut-etre trop etendus sur le minis/ere des ojfices, qui compose toute radministration du per- sonnel des fonctionnaires publics ; et quelques-iins des details dans lesquels nous sommes entres , les derniers sur- tout, pourroiit sembler puerils a quel- ques-uns de nos lecteurs : nous n'avons pas pense de meme. Les mo^ui*s d'un peuple serevelent plus sou vent et mieux dans les petites choses que dans les grandes. Cheznous, les car/es de visl/es meme ne sont pas aussi indifferentes qu'on pourrait le croire ; un homme se revele quelquefois tout entier dans sa carte de visile, et souvent ce ne sont pas celles qui portent le plus de litres qui indiquent le plus de merites. 2. MlNISTijBE DES FINANCES {houpou)C). Ce ministere . compose de deux pre- sidents ( ** ) , run Mantchou , Tautre (*) Ta-t/ising'/ioei tien\ K. 10-18. (*•) ViAWiYA/manac/iinweria/ At. i844iCe miuistere, ainsi (|ue ('elui ues ojjices civils et celui des //-rti'MMc />u///ics, unlcbacuu uu/ne- iiJeul iuiicricur au\ deux prciidents ordi' nains, ce qui porle le nonibre des membres CHINK MODERNK. 165 Chinois ; de deux assesseurs de droite et de deux assesseurs de gauche, tou- Jours I'un Mantchou et Tautre Chinois, comprend dans ses attributions tout ce qui concerne I'administration, le gou- veruement territorial (ti tching) de I'empire , en meme temps que la tenue reguliere des listes de population, afin, disent les Statuts, d'aider I'enipereur a nourrir et entretenir ses peupies. Tout ce qui concerne les reglements pour la levee des inipots et taxes de toutes natures ; les dispositions a pren- dre pour le payement des salaires en argent, redevances en nature, alioues aux fonctionnaires publics ; la determi- nation de la quantite d'argent et de denrees qui entrent dans le tresor ainsi que dans les greniers de I'Ktat, et en sortent ; les ordres pour les transports de fonds et de denrees , soit par terre , soit par eau : toutes ces attributions appartiennent 'a ce ministere , qui est constammeut tenu au courant de lexe- cution des ordres qu'il donne , et des mesures prises par les nombreux fonc- tionnaires qui en dependent. Les deci- sions en tout ce qui concerne les attri- butions du ministere sout prises en conseil, forme des sept principaux membres. Si les affaires sont graves et importantes , il en est refere a I'em- pereur; si elles ne le sont pas, dies sont expediees par le ministere. C'est a ce departement ministerlel qu'appartient la faculte de repartir le territoire de I'empire en diverses cir- conscriptions administratives , mili' taires elfinancieres. Les circonscrip- iions administratives proprement dites sont, comme nous I'avons deja vu, les departements [foil], \es districts {ting), IPS arrondissements {tcMou) , et les cantons {Men); lescirconscriptionswii- litaires sont les villes fortifiees {tching) et les autres places fortes. Le territoire de Pe-king et celui de Moukden , en Mantchourie, ont une administration a du conseil de ces miiiisteres a sept au lieu de six. Ce premier president , de creation nou- velle, etait un Chinois, pour le ministere des finances {pan eld n^an), « grand gardien de rheritier jiresomptif", membre du cabinet, de I'acadcmie des Han-lin, etc., etc. Les pre- miers presidents des deux autres ministeres etaient Tartares. part, oonime etant la residence de I'em- pereur et de sa cour (*). Une connaissance detaillee de ce mi- nistere , aussi bien et encore plus que du precedent, nous paraissant d'une tres-haute importance pour faire en- fin justice de toutes les divagations ecrites jusqu'a ce jour en Europe sur la population chinoise , et pour sortir de I'ignorance a peu pres complete oii nous sommes encore de tout ce qui concerne les finances de ce grand empire , nous continuerons de traduire ici les parties les plus importantes des Statuts. Onzicme livre du grand Recueil des statuts administratifs de la dynastie regnante en Chine , comprenant le Re- censement de la population , ledenotn- brement des terres , et la repartition des impots (**), les deux premiers cons- lituant la base permanente et fondamen- tale de I'assiette des derniers. Ces trois parties forment un ensemble de rensei- gnements si essentiels et si importants pour la eonunissance du gouvernement et de la nation cWnoise, qu'ils ne peu- vent etre supplees par aucun autre (***). (*) Le dixieme livre des Statuts est consa- cre a faire connaitre les diverses circons- criptions administratives, les principaux fleuves et les principales montagnes, etc., de la Chine, sur lesquels nous nous sommes suffjsamment eteudus precedemmenl. (**) V Aperru statistiqiie de la Chine, donne comiiie tire de documents orioinaux, p.ir fniKla- proth , il la suite de la traduction francaiso du Voyage a Pe-king par Timlous/U, Parts, !82c,n'est, 4 trcs-peu de eliose pres rjiie , la traduction pure et simple de V Appendix anglais que M. P.-P. Ttinms a publiL' a la suite de son edition du Hon-tsien, Ma- cao, I82l,d'aprc's des doenmcnts chinois d(^ja vieillls, puisqnc la population n'y est porl^-c qu'a ^^1 millions, noinnic dans le yiew of China de M. Morrison, public en I3I7 a Macao. Tous ces cbiffres. repelcs dans presque tons les ouvrages de geographic et de stalistique, nc representent pas plus niaintenant I'e- tat reel des choscs en Chine, que les Oisiretrs de yanban (composces, en itsb. a rimifalion des sta- tistiques geographiques et politiques de la Chine, dont Villustrc ecrivain cut connaissance par les re- lations des missionnaircs) ne representenl I'ctat ac- tucl des choscs en France. Quoique I'on pensc et que Ton ecrivc tnujours le contraire, la Chine n'est pas plu.s stationnaire que rEurope : son existence en est la preuvc. (***} I,a traduction de ce Xl"^ livre du Ta-thsing hoei-ticn avalt d^jii 616 pnbliee en i84i, par Tan- teur de cet onvrage. ehez MM. Didot freres , avee la reproduction des denominations en chinois , sous le titre de : Dorvmrnts statistiques offlciels iur I'empire de la Chine, tires a ao excmplaires. 166 L'UNIVERS* I. BKCBNSBMENT DB LA POPULATION. [Texte.] Les registres de la popula- tion de I'empire seront exactement te- nus. ( Commenlairc] II y a des bureaux speciaux , coni|>os«;s J'eiiiployes militaires manlchoux , iijoi»t;ols el chiiiois, places sous la direction du Ministere des finances , qui tienneiit ces listos, cl s'en scrvent pour appliquer dans les differenles localitcs le salairc des luiit ban- nieres (rarmee chinoise). Les bureaux com- poses demililaires/a'ra, qui tiennentles listes de la population extcrieure/rfw, dependante des Tcha-tsa-khe [Dzassak, chefs militaires mongols), ressorlissent a la Chambre des pos- sessions etrangeres {Li-fan-yotian). {Texte.\ Les famiiles et les person- nes de toiites conditions de chaque pro- vince ont des chefs qui ea controlent exactement ie nombre, et cliaque an- n^e ces chefs en font part au minis- tere. Le recensement se fail par/ewa? ou partes {*). hes partes ou feux sedi- visent en plusieurs classes. 1" II y a les feux (**) du peuple(»iin- hoii). [Comm.] Ceux qui sont principalement attaches a la terre, ceux dont ie sejour dans un lien n'est que passa{;er, mais qui sont inscrits sur les regislres de recensement; les indiNidus qui onl iait partie des huit bau- nieres, el qui sont attaches aux bureaux des bannieres ; les militaires chiuois qui sont sortis des banuieres , et qui sc soul etablis dans des lieux fixes et tranquilles, oil ils font partie du |)euple; tous constituent lesfcujc du peuplc. 2" II y a les feux militaires ( kiun- hoii). Ce sont ceux qui etaient inscrits sur les listes du recensement primilif sous le nom de gardes ou colonies militaires {tun wet, destinceft k proleger des frontieres ou des passiii^C)) ; les uns sont relournes au milieu de leiirs compatriotes dans leur district, leur arrondissement ct leur canton: lesautresont continue comme anparavant a roster atta- ches au service des colonies militaires, ou ils out obtenu des comniandeuenls. Ceux d'enlre enx qui sont astreints a payer I'im- \M\. personnel luilitaire constituent les feux '•■iit-porip«. 1 noiij ciiipliilcrons de preference '■ '""/." purte.i parci- qu'll a ravaatagc <\Hre souvctii ciiiplo;« avfc I« in*oie slgniacatlon dam noire laoitnr. m'dlialres. Tous'cenx qui sorlent de chei eux pdur occupi-r un eniploi niilitaire, ainsi que leurs Ills et petits-fils, s'ils suivent la memc carriere et \ivent ensemble, constituent aussi Aeifeux militaires. 3" II y a les feux d'artisans (thsiang- hail). lis etaient sur la lisle de la contribution personnelle du recensement primilif. II y a des feiuc d'artisans dans chacune des pro- vinces de I'empire, lesqueis artisans se suc- cedent dans le nieme service , la mdme pro- fession qu'ils exercent ensemble. Si les des- cendants d'artisans viennent a changer de profession , I'etat de la famille est soumis a un examen, et I'impot en argent (que cetle famille doit alors payer) est expedie a la ca- pitale, au lieu du droit de la profession ; on nomme cela argent de la profession d'artisan (t/isiang-pan-yin) : ensnite ils se repandent peu a pen dans chaque province , oil ils h- nissent par entrer dans la masse des conlri- buables de I'impot personnel et foncier. Ce n'est que dans les roles complets des impols et des charges publiques que la lisle des ar- tisans est conservee. 4° II y a les feux des foyers (thsdO' hoii). A chaque puits ou exploitation de sel , il y a des foyers sujets a I'impot personnel : ce soul ces foyers que Ton noiame fvux ou fa- milies des foyers, 5° II y a Us feux des prehears {iH- hou). Lei feux des pecheurs datent du recense- ment primilif; ils se trouvent partout oii il y a des (leiivos, des rivieres, des baies oii les barques peuvent aborder. Ensnite ceux qui les composent (apres une plus ou moins lon- gue absence ) retouruent peu a peu dans leur arrondissement et leur canton. 60 II y a les feux des musulmansd'o- rigine (liOei-hou). ^ La population d'origine mnsulmane se ^ trouve dissemince dans divers lieux de cha- que province; toule celte population est classee parnii les feux du peuple (pour le paye- meui de limpol). C'est sculement dans la |)rovince de Kan-sou que se trouvent les fiimilles niiisiilmanes de la I'acc Sa-la-curh (Sarar) , |)lace«vs sous les ordres des magis- trals locau.y indigenes, dependant des aiito- rites superieures de la provinro. En outre, il y a dans rarrondissemenl Ti-hoa du ,os7,i7i B" — Kiang-sou, Id . . r.7,S43,»oi t!" — Nqan-hoei, Id . . 34,ie8,0ii9 7" — K'iang-si,\ Id . , 23,046,999 8'> — Fo-Kien, Id. . 11,777, 4iu Contribuables /an de I'ile de Tai- wan ou Formose 1,748 9" I'rovinccde TcAe-ftJanj?, contribuables et bouelies . 26,2i(e,784 10" — fiOU-pe, id . . 27,370,898 ji" — Hou-nan, id. . i8,e:i2,«07 A reporter . . 277,358,706 {*) K T.es mSles qni ont seize ans sont parvenus k I'ige viril oi\rnntrit>uable, ting.» {Commentaire.) 168 rUWIVERS. Report. . • • . »7T.sit8,7o« •«" Proviitoe it Chen-ti, }i • • •"•"oj.*^ ,s» - Kan-svu. ,^ , W- •. «i«,«»5,«m Par*nl ct Ouroumoutsi (dependant df -Kansou) ,\i • • ""■"" 14" Province do Sse-tcfiotian. cniitribua- litfs et bouclicii . 3i,4»i,e7B lyi _ Kouang-toung, Id . . t9,i7i.oso ISO .- Kouaiio-si, Id . . 7,r.is,89J i7« — Yuniidn. id . . u.iwi.mb la" - Konel-Uheou, Id . . «,28»/ii9 Total de la population de la Chine . . »ni,eOT,t79 JVota. On nc donne pas Icl le nombre den contrl- buablps de* hult bannieres tartjirc.s^qiil resident a /'liking. (Comm.) \Texle.] Populations situees au dela des frontieres dela Chine propre, mais dependant de I'empire, denoinbr^es par pontes ou feiix : [Comm.] Ces populations se cotnpcsent de niusulroans, defd/i, deli, de miao, de jtio et autres etrangeis barbares, lesquels, long- temps errants , se sont eiifiii civilises par I'exempledes Cliinois (Jioa-tche). Toules ces populations, apres le recensenieut fait des coiitrilmahlcs el des bouclics , doivent enlrer dans le chiffre de la population generate de I'empire. Les populations qui dependent du gou- vernement de He-loiing-kidii" (fleuve du dra- gon noir , en niautcliou Sagnalieii-oula) ; les So-lttn (ou Sso-lon archers), les Ta-hou-eurh (Dno/«),* les Go-luit-tchun {protcliuii) (ou conducteurs de rennes) , et les Pie-U-eiirli (Pilar) , comprenant les individus qui ont atteint I'age de porter la peau de marte /i- beline, el qui, par cela nieme, sont contri- buahles, s'elevent, en les comptant par/e«j; ou partes , a 4)497 Les populations qui dependent des trois tribus {san seng) ; les Tclti- tche, IvaFei-ya-k/ie, les Li-eurfi-kott- ye, les Go-lun-tchun , les Go-khe- A reporter 4)497 • 1,0 Hoei-tien {Kiotian, XIII, fol. l) donne en toiites Irltres le niontnnt general de la population tntiile. civile ft militairc, contribuuhlcs ct boucha, di- liiiilrs les pntvinccs de lemplre dela chine; le chlffrc ost de Jtii.citi.ssi. {.Kia king chi tsi nien tsi paochi ttdi kliesenrj li/ie tcliinq mintun tiiut lieou : Mn wen loii tslen I pe Ion chi knieou wen ttslen eulh pe san chi I.) II v a iinc difference en molns, avee le total cl-dessus, de i.9«8, laqiicll<; est due sans doute a radniission, dans IVnumeratlon des provinces, dii ehiffri" lip (piclques populations eiranperes a res iiieinps pro> iiicrs. quoiqiip pn dependant reclln- mcnt. I.ps redaelPiirs omclels dii Rpeiieil ehlnnls ajoutpnt que. par sullp dn rpcpnscMiiPiit qiip font clia- q»e annee, an inilipu de Ihivcr, les gniivcrnenrs et Its lieiilpnanls gouvprnpiirs des provinces pour ciin- ii.iilrc le nuinbru reel 4<)7 ta, formant en tout cinquante-six clans ^ sont au nombre de 2,398 partes ou feux, ci SiSqS Chacun de ces Jeiix donne en tri- but une quantite de 260 peaux de niartc zibeline. Les villes de Ke -chi-go-eurh (Kachegar) , Ye'eurli-kiang ( Yar- kiang), Jlo-ten {Kliataii),Ho-khe-saii (Aksoii), Koutc/iai (Koulcfie), Klie- la-clia-eurh {Harachar), toutes nia- hometanes, dependent d'un bey, ou Pek {Pe'klie). Elles forment avec le terriloire special de I-li , habile par des tribus de race musulmane, une population do 69,644 partes ou fetu:, ci 69,644 Les populations fan qui depen- dent de Tc/ioi/a/ig-lang dans la pro- vince de Kan-sou , et dont chacune est soiimise a un chef indigene , sont au nombre de 2(5,728 /e«x,ci 26,728 Les soldals contribuables des di- vers clans et pays du Tau lau-fan (Taiirfan) ont 700 denominations differeiites ; ceux de race musul- mane forment 2,368 Jeux, ci . . . . 2,368 Ceux de race musulmane /a-^ot/- no-eiir/i, i83 feitx, ci i83 Lcin" tribut consiste en 2,340 ta d'eaux (les ta d'eaux sont, selon les Chinois, des animaux resseuiblant a des petits chiens, qui vivent dans I'eau et se nourrissent de poissons. II est a presumer que ce sont des loiitres.) Les populations de race fan, gou- vernees par des chefs indigenes qui dependent de la province du Sse- tchaiian, sont au nombre de 73,374 fettx , ci 73,374 Celles qui dependent de chefs in- digenes de la mer Verte (ou Kako- fior], au nombre de trente - neuf clans, forment 7,842 /fj/x, ci. . . 7,842 Toutes celles qui dependent de chefs indigenes du Si-tdsang (ou Thibet) , au nombre de trente-neuf clans, forment 4,889/ew.c, ci. — 4)889 Les populations qui dependent d'Oii-li-rai-sou-tai, les Tiiang-nou et k'S Oii-liang-luii, et qui donnent pour tribut des martes zibelines, sont ail nombre de SgS fenx, ci. • SgS Celles d'enire ^es qui donnent pour tribut des ifcureuils sont au nombre de 4 1 2 A reporter. . . . 192,930 CHINE MODERNE. 16ft Report 192,930 Les popiilalions qui dependent de Ko-pou-to (Ko/ito) , Ics Ho-ewh- taiel les Ou-Uaii^'-hai, qui donnent pour tiibut des martes zibelines , sent au nombre de aSG/ejw, ci. . . a56 Celles d'entre elles qui donnent pour tribut des peaux de renards {liou) sont au nonibre de 429 feiix. les Ho-ewh-Jiai, hsNo-henr, les Ou-liang-ltai , qui donnent en tri- but des martes zibelines, sont au uombre de 147 Jeux, ci Ceux d'entre euv qui donnent en tribut des ecureuils sont au uombre de Chaque feu doil payer en tribut Sao peaux de niarte zibeline, on 1,040 peaux de liou, on ao,8oo ecureuils. II y a en outre des peuplades/a'« et autres qui dependent de chei's indigenes, dont on connait bien le nombre de camps et le nombre de clans, maisdonton ignore le nombre de/ewx, II y a encore des popula- tions payant impot, mais situees au- dela des frontieres , et dont on ne donne pas le denombrement (*). 4'»9 147 61 Total des pop\dations placees en feux, dehors des 1 8 provinces . . . ■ i93,8a3 [Texte.] Le nombre total descontri- buables ou hommes payant I'impot, est fixe d'apres le recensement de la 50* annee Khang-hi (1712). [Comm.'\ Une proclamation de Tempereur, de la 5-2« annee Khang-ld (i 7 14 de notre ere), fit connaitre publiquement le nombre reel des contribuablesdel'empire, qui s'etait accru a la suite des {generations successives, et fixa les roles des contributions jjour ravenir sur les lisies de recensement des contribuablesde la 5ne annee de Kliang-hi (17 12), n'ayant pas egard a I'accroissement annuel de la popula- tion , celle-ci pouvant augmenter sans que pour ceia on diit jamais augmenter I'im- [lot (**). Voici ce recensement des contribua- )les de la 5o* annee Klicmg-lii (1712, un sie- cle avant le recensement de la population lotale donne precedemment) : (•) Tai-thslriff-hoel-tien, K. XI, fol. i-5. i") Tai thsing hoe't tien, K. XI, fol. s. Cc passage trt^s-ciirieiix des Stattits prouve que I'impot /uri- eier, I'imput direct, est rcsle leniemc en (;hlne dc- piiis pliis lie cent uus, iiialsre I'aeo.rnissemeiU enor- ine dc l» popul.ition, etsaiis doiitc aussi le surcroit des charges publiques, aiixquelles le gouvernemcnt aura- fait face par les iwpdfs indirects. 9" 10" Kiang-j sou , Province de Tchi-U, population contrlbnable , min ting 5,a74,87o Pays de foung-tien ou Mottk- den, inin ting . . . «-,v.o — Kirin, id 33,oi« — Chan-touna , population contribuable »,278,ii9;« SoIdaLs contribuables culti- vant des terres (<«n ting) • — Chan-si, contribuables . . Solduts contribuables culli- vant des terres — Ho-nan, contribuables . . ; 1" Contribuables ' dependant du reccveiir gene- ral de Kiang- ning i,o^6,9r.o Soldats contri- buables culti- vant des terres. 4" Contribuables dependant du receveur {jen6- ral de Sou- tcheOU I,S99,8S!( Soldats contri- buables culti- vant des terres. bis Ngan-hoei, contribuables Soldats contribuables culti' vant des terres Kiang-si , contribuables. 2,172,^87 Soldats contribuables culti- vant des terres 6,170 Fou-hien , contribuables . 70u,riii Soldats contribuables culti- vant des terres 20.436 Tche-hiang, contribuables . s,7io,sia Soldats contribuables cultl- vant des terres 4,477 Hou-pe, contribuables . . «r.,94r. Soldats contribuables cultl- vant des terres Hou-ndn , contribuables . \ \ Soldats contribuables cultl- vant des terres Chen-si, contribuables. . s,iao,uu(: Soldats contribuables culti- vaut des terres I06,»6' Chefs de clans mobiles. ... 1: Kan-sou, contribuables. \ Soldats contribuables . . . | See-tchouan , contribua- bles 5,802,629 Kouang-toung , contribua- bles 1,142,747 Contribuables noirs {li-ting). i,««t Soldats contribuables culti- vant des terres 6,750 Koiiang-si, contribuables . 210,674 ytin-n'dn, contribuables. I4;i,4t4 Contribuables militaires {Kiun 26,210 l,727,l(« S;,219 S,094,laO S5,05t <,5;i7,829 40,a»it Tl» a,or.4 1,290 S6S,:i2l( ting ) ■ nlat Population contribuable k de- iiieures mobiles {che ting) . Koue'l-tcheou , contribua- bles Total general des contribuables . 29,012,492 (') C'cst ce recensement par individu contribua- ble qui a servi dc base k tons les calculs plus nu luolns errones des I'crivains europcens sur la popu- lation chinoisc, depuis I'l-poque ou le P. Amiot le fit connaitre dans les Memoires sur les Chinois, t. VI, p. ;279, aprte I'avoir cxtrait 'de la premiere edition de la Grande Gdographie iuiperiale Tai- thsing -i- thoung-tchil,i7U). etque ronretrouvcavecqtielquts modifications dans la scconde (Edition du m^me ou- >rage 0764). Dans celle-ei, coinme dans cellc de I7S0, la population dc ccrtalnes provinces est de- nombree en contribuables seuleinent, comme, par pxfMnple, la province de Tchi-li. qui u'cst porti^e que pour 5,404,07.8 contribuables (jin-ting) dans I'^ditlou de 1764, et pour s,o04,058 aans I'edition de »790; tandis que la province de Kianq-sou, qui nVstpor- tee qr.e pour s,30b',384 contribuables dans I'^ditinn 170 L'UNIVERS. [Tfxte.] L'accroissement annuel du nombre des personnes contribiiablfs , et par chaque generation, ne fait pas augmenter )es inipots ( pou kid Jou l/f'n) (*). Toute la population doit etre inscrite sur des registres particuliers nommes t^i , lesquels se divisent en quatre classes. Ceux de la premiere classe sont nommes Registres du peu- pie (mtn tsi). [Comm.] Les individus de toutes condi- tions, de tout pays {litt. de toutes couieurs), s'ils ne sout ni dependants d'autres person- nes (/li), ni inscrits sur les registres des mili- taires, des marcliands , des foyers mobiles , font tons partie des registres du peuple. [Texte]. Ceux de la seconde classe %on\,x\ommi& Regiilres militaires {khln tsL) [Comm.] Les feuz ou families militaires forment , par consequent, les Registres mili- taires; et m^meil y a de ces Registres aux- 3uel$ on donne la denomination de Registres espreposes a la garde des passages (weitsr). [Texte.] Ceux de la troisieme classe sont nommes Registres des marchands {ch&ng tsi). [Comm.] Les marchands, lenrs enfants, et loute la suite qu'ils emmenent avee eux en |iarcourant les provinces dans lesquelles ils se |)artagent. Ce sont ceux qui forment les Re- gistres des marchands. [Texte.] Ceux de la quatrieme classe sont nommes Registres des Joyers {thsdo 1st). [Comm.] Les feux des families des foyers forment les Registres des foyers. [Texte.] On recherchera avec solo quels sont les auteurs des personnes de ces differentes classes , ceux a qui elles de iJM, I'esl pour «8,w9,sM eontribnablfs et bou- rltft dans I'edition de 1790. La difference tnormc ties ociix noinbres, i inoiiis de so ans de distance poiir la meiiic province, ne pent sejiistifler qne par la difference de base dii denonibrcment , de ineme qiic la dilftfrence de nonibre de cclte nitiine pro- vnccdc A'iani7-j!0M orec cclle de Tc/ii-li, qui jflait plus peiiplce en ijm et nei. On a cependant addl- lionne ensemble ce« deux rsperei de recensenients poiir oblenir un chlffn- jseneral iiicnsoiifrer de la po- niil.ilion de jafihlne, d'eiiviron M;i millions. Vovez lei ouvraR. 1 dies de Morrison, 1'. P. Thonis el Kla- prolh, 1^ P. Aiiilol. (lOur obtenir son chiflre de-iM et Ue us million*, avait mnltiplle le chiffrc de »».<>«. W2 par », qii'ii considerait connmc Ic miilll- ' iximatif propre a oblenir le ctijlfre ' " Bcneralc, comnie etant le chiffrc : "ilires de rhaqiie famllle; ce qui ne quiui chiflre vaffuff de cetle ineme rme I avantderni«re note. auront etc confiees ou de qui elles de* pendront, et les licux qu'elles habitent. [C^mm.] Les individus qui forment la po- pulation {jin-hoii) duivent etre inscrits sur les Registres publics , la oil ils font leiir se- jour, oil ils ont leiir habitation, dans les re- gions et les localiles uii its sont eiabhs, oil ils ont les lombeuux de leur faniille, leur rctraite , et oil ils uiit deja pusse viiigt aii- nees. S'ils quittent leur raniille pour occiiper des eniplois publics, et qu'ils acquii^rent^de I'eclat et de la rcnonnnec , ils cessent d'ap- partenir au Kegistre de leurs auteiii's. Si un iettre quitte sa magislrature ou son nianda- rinat, il ne lui est pas perniis de resider dans line province dilTerente de la sienne ; si leg auteurs d'une faniille ne sout plus, et que les fils et petits-fils de ces auteurs demeurent dans d'autres provinces oil ils possedent des terres et payent des contributions person- nelles et foncit'res; .s'ils desirent ctre inscrits sur les Registres (des localites oil ils se trou- vent), que cela leur soit accorde. Les fils et pelits-fiis de militaires, aiusi que de ceux qui u'ont point de position fixe, pour qu'ils piiis- sent egalement etre in.scrits sur les Registres , il faut qu'ils soient soumis a un exameii ap- prufondi ; et ils ne pourront etre places sur les Registres qu'apriis iine residence complete de dix annees dans la locaUte. C'est par cette adjonction (aux Registres de la population) que les gouverneurs et lieutenants gouver- ueurs de province font parvenir au minis- tere des informations exactes. Les marchands et negociants qui babilent Ic pays de Foung-thien (ou Moukden), et se livreiit au commerce d'echange, ne sont pas aslreints a se faire inscrire sur les Registres d'une localite fixe et deterininee. Les etran- gers / de Gan-tcha el Gan-nd/i, de la pro- vince de Kiang-sou , auxqiiels on a accorde la faculte d'entrer sur les terres des fonc- tionnaires publics ou mandarins (jiour les cultiver), si on leur perinet de se marier avec des filles des habitants indigenes, seroni ins- crits sur les Registres pulilics de la pojiiiia- tion. Lesetrangers/an ou Thibelains deshiiit camps relranches de la ir'xhw Uang-Uoang du Sse-tcliouan, doiveut se fairc inscrire sur les Registres du peuple de I'arrondisseraent de Meou, en qiialite de comrais.sionnes ou em- ployes du goiivernement {Tchang-tchai). [Texte.] On determinera avec exac- titude la parente ascendante et descen- dante de ceux qui sont inscrits sur les registres des contribuables. [Comm.] Les personnes sans enfants sont autorisees a adopter loute iine parente, pour CHINE MODRRNE. ITI retablir entre elles les rapports sociaiix qui existent entre les pere et mere et les enfanis Uchao-meou), et ees devoirs reciproiiues en- tre les parents, afin de perpetHcr leurs fa- milies. D'abord il faut que les pere et mere, et les plus proches parents (des eufants adop- tes) , n'existent plus; en second lieu, il faut que ces enfants , etaut plonges , pour ainsi dire, dans le seindes c'mq sortfs de deuil{ou fou tchi net), soient depourvus de tout. Dans ces circonstauces, il est perniis a des per- sonnes sans enfants de clioisir et d'adopter line famille eloignee. II en est qui choisissent et adoptent des personnes sages sur lesquelles lis puissent reporter leurs affections , et les aimer en meme temps que leurs proches, pour ne pas etre prives des rapports et des dispositions dc famille ; a ceux-la il n'est pas permis de designer I'adopte comme mem- bre de leur parente , afin de ne pas don- ner lieu , dans I'ordre regulier de leur suc- cession , a des discussions facheuses et a des querelles, etc. [Texte.] On classera toutes les per- sonnes inscrites en honor ables et viles {liaiig tsien). [Comm.'\ Ces quatre sortes de populations (enumerees precedemment) sont honorables (liaiig). Les esclaves {noii), les serviteurs a gages (poiih), ainsi que les courlisanes (Jclidng), les acteurs et actrices [yeou), etant astreints a des services publics , sont "viU (tsien). Dans les provinces de Clian-si et du Chensi, les families designees sous le nom de famitles de plaisir (lo Itoii); dans celle de Klang-nan, les families designees sous le nom it families mendiantes {kdi hoit) ; dans celle de Tclid-kiang, la population que Ton nomme desauvree, Jaineante {tho liou); tou- tes ces families , avaqt et apres les pre- miere, septieme et huitieme annees joting- tcfiing (i^iS , 1729, 1730 de noire ere), fu- rent placees sur les Registres des personnes viles, etc. [Texte.] Les registres d'inscription des aventuriers {vido tsi), ceux des pas- sagers (kouatsi), ceux des individus qui traversent les frontieres et logent dans les auberges, seront tenus avec beaucoup de siirveillance. Cliaque chef de section (pao-kid) prepose a la garde des listes de recensement, etant pourvu des ecriteaux attaches aux portes de chaqwi famille {m^npdi), ecrira lenoni du chet'de ces families avec le nombre des contribuables males, et cliaque an- nee il fera a ses registres les change- nients convenables (*), Dix families constituent un pm (ou role de porte) ; chaque pdi a un chef {tMou)-., dix pdi forment un kid (ou decurie) ; chaque kid (ou decurie) a un ancien {tchdng) qui est a sa tete ; dix kid font un pdo (ou centurie); chaque pdo (ou centurie) a un directeur (ou ce/t^wriort, tching){**). Ces magistrats populaires surveilleront attentivement les infracteurs des lois , et ils les signaleront a I'autorite corape- tente. Les bStiments servant de marches dans les villes, les logements de trou- pes dans les bourgades et les villages, les foyers des employes aux exploita- tions du sel , les abris converts des mi- neurs , les temples et les monasteres (des sectes de la Raison et de Bouddha non soutenues par I'Etat), les boutiques elevees sur les berges des fleuves et des rivieres , les huttes situees dans les mon- tagnes, les reduits d'une simple ouver- ture, les habitations des defiles des frontieres, seront tons imniatricules (pien); les batiments maritimes, et au- tres bateaux employes sur les fleuves , seront aussi enregisfres, et places sous la surveillance des kid ou decurions. II. DENOMBKEMENT DES TERRES. [ Nola. Avant de donner le denombre- ment des terres , le Hoei-tien (K. XI, f° 9) indique les positions de Pe-king, des dix- huit provinces et des principaux lieux de ces memes provinces, en degres de longitude et de latitude , ces derniers comptes par la hauteur du pole au-dessus de I'horizon de Pe-king. Nous croyons inutile de reproduire ici ces positions. Nous ajouterons seulement que, selon les Statnts, cinq pieds chinois (tclilii) font unpoii; 36o poii font un li ; les degres de latitude et de longitude sont com- poses de 200 n. Il suit de la que le pied chi- (*) Le Commentaire flit qii'il en ^liminera cpiu qui seront partis, et qu'il y fera enlrer ceux qui y seront venus. Si Jine fainiUe change de residence, 11 en infoniiera en temps i;onveiiable ceux qui diri- gent les inscriptions des portes. ('*) Les nonis de pdi, de theou (chen , de kid, de tchdng, de i>do, de tching, sont desnoins de magis- tratures ipiibliques et gratuites cr^ecs pour diriper et adntiinistrer le peuple , et pour faire connailre la veritable situation des choses. Cent qui possedcnt en proprc leurs personnes et des uiaisons ;lcs hom- ines llbrcs et les proprictMres) reinpllsscnt ces fonc- tions , qui cessent a la fin de chaque annde , ^poqiie oil on les reoouvelle. (Commentaire.) C'est notre magi$trature viunicipule. ITS i;tjnivers. nois elant de o.lr'J mm., !«• poii est de 1 m. r.;'. mm., In // de .'SI!; in. , le degre dt* II 1,400 ni.| [Texte.] Toiites les terres cultivees sorit appelees champs {ihi^n); les champs se nomment aussi terres {thi). [Comm.] Dans les contrees meridionales , par exemple, li*s Vlianips cullives dont le sol pst has sont des r///V«, champs ; ceiix dont le sol est i'leve se nomment //(/, ti'ires. Dans les conlrees seplenlrionales, les champs aqueux sont des champs ; tout le reste du sol est de- signe par le nous de tlii, terres, etc. {Texte.} La totalite des champs et des terres forme plusieurs divisions. r II y a les champs dupeuple {rnin thien). [Conim.] I'armi le jieuple, ce qu'il possede a litre perpetiiel est sa propriete ; le sol qu'il fsl autorisi- a acheter et a vendre constitue le champ du peup/e {'). 2° II y a les terres apanageres {kdng ining thi). [Comm.] Ce sont les lerres distrihuees, du temps des premiers Ming, a des cirangers pour subvenir a leiir subsistance. 3° II y a les champs des colonies mi- litaires {tan thUn). [Comm.] Ce sont des champs situes dans des localiles ou des troupes sont stationnees pour la garde du territoire. II y en a qui servent a pyer en argent et en nature les commandants des lieux a proteger. 11 y en a dont le produit realise retourne aux magis- trals des arrondissements et des cantons. Les uns el les aulres sont des champs de co- lonies miittaires (tun thien). Ces champs ayant ete succ«ssivement cullives (|)ar la troupe) , sont aussi nommes terres concedees aii.r, trou- pes (chen kiuii thi). Ces terres sont siluees dans les districts de 7-//, de Ou-rou-mou-tsi, de Pa-li-chin , de Tour-fan , de Ha-mi, de Tou-pou-to et ailleurs. 4° II V a les terres des foyers ( thsdo thi). ' ^ [Comm.] I-es terres qui ]>roduiscnt de grands row^aux dans les provinces de Chan- toung, de Tche-kiang, d>} Fo-fiien,de Kouang- toiing, lerres dont I'impot se paye par fover, sont appi-tees terres des foyers. 5o II V a les terres des bannieresfA^J thi). ' (*) Y"rement dit) et le Chan-si eurent d'abord des terres appartenant aux bannieres; elles fureiit ensuite donnees a cul- tiver et a ensemencer au peuple : ouuomme celles-ci terres qui ont fait retoiir dans un rayon determine. 6" II y a les champs fertiles (du do- niaine prive) {tchouang thiin). [Comm.] Les lerres afl'ermees par !« conseii du domaine prive de I'empereur , pour en relirer un revenu en nature, sont des champs fertiles. II y en a dans les arrondissements et cantons voisins de Pd-king, et chaque ville de la province de Ching-king (ou Moukden) en possede. 7° II y a les terres donnees gracieuse- nient (par les empereurs) {gdn chdng thi). [Comm.] Le fondateur de la dynastie (re- gnante), dans les arrondissements et cantons voisins de Pe-king, donna des terres aux hnit bannieres, pour y placer et entretenir leurs chevaux. Ensuite les bannieres elant venues a se disperser, les etablissements abandonnes ne servant plus a aucuu usage , les succes- seurs du fondateur de la dynastie tres-pnre donnerent les terres a cnltiver au peuple. Ces terres changerent alors de nom, pour porter celni de terres donnees gracieusement par le souverain. 8° 11 y a les terres des bergers ( mau thi). [Comrn.] Ce sont les terres de rebut, pro- pres au paturage des moutons , siluees dans les provinces de Tchi-li et de Chan-si, ainsi que d'autres siluees au dela des fronlie- res, etc. 9" II y a les terres d'inspection {kiM thi). [Comm.] Le fondateur de la dynaslie re- gnante, pour se conformer a radministration de la dynastie Ming (qui I'avait precedee) , etablit dans la province de Kan-sou sept grandes menageries, pour y elever des che- vaux. Ensuite ces etablissements ayant ete supprimes, on donna les terres qui en de- peudaient au peuple pour les cultiver. Cesont les trrres d'inspection. CHIJNE MODERNE. «78 10° II y a les champs commuus (koiing thUn). [Comm.'] La province dc Kiang-sou en possede. Cliacune des auties provinces a aussi des terres qu'elle possede defondation, telles, par exemple, que des lerres entourees de cloture et plantees d'arbres, des teires destinees a I'cnlretien des communautes. En outre, dans le district de Kirin, dans celui du Fleuve du Dragon iioir {Sagltalicn-oula , dans la Mantcliourie), on a donne a la popu- lation robuste des terres a enseniencer. On les noinme aussi champs communs. 11" II y a les champs des etudes {Mb thien). \Comm.'\ Dans chaque province il y a des etablissements pour Tinstruction publiquc , qui out des cbamps destines a I'entretien de ces eludes ; ces champs servcnt a la depeuse iiomuunie de tons ceux qui font leurs etudes dans ces etablissements. Les provinces de Tchi-li, de Cliang-toung, de Kiang-sou, de Ngan-hoei ^ de Kiang-si, de Fo-kic.n , de Tclic-kiuiig, i^KlIou-fje, de Hou-iuiii, Clm^sc- tchouan, de Yun-ziii/i, cut conslilue de pa- reils champs destines a reuseigneuient; ces chaiiqis renlrent , par consequent, dans le nond)re des cliamps du peuple. Les provin- ces de C/tan-si, de Uo-iic'm , de Clw.n-si, de Kan-sou, de Kouang-toung, de Kouang-si , lie Kouvi-tcUeou, ont des champs destines a renseignenieut public en dehors et a part des clianips dupeuple; c'esi autant d'epargne aux produits des champs dupeuple. 1 2° II y a des champs de secours {tdwi thieii). {Comm.^ La province de Kouei'tcheou en possede. 1 3" II y a les champs des grands ro- scaux [louthiin). [ConimJ] Dans les provinces de Kiang-sou, Ngan-koei , Kiang-si , Hou-pe , Hou-ndn, sur les bords des fleuves et des rivieres, il y a des terrains qui , selon les saisons , sont inoudes par les eaux ; on les nomme champs des grands roscaux. [Texte.] Tous ces terrains ont ete mesures, et il en est resulte que le nom- bre reel des king et des vieou qu'ils contiennent a ete inscrit sur les regis- tres de denombrement {tse). Dans tous ces terrains mesures, cinq tchi ou pieds fontun arc {kot'mg) ; deux cent quarante koiing ou poit font uu vieou ou arpent. [Comm,] Le miou est uu carre de quiuze poii (ou koungzr. 24 metres 975 millimetres, ou 623 metres 75 centimetres carres). \Texte.] Cent meou font un king (*). [6omw.] Le king est un cane de cent quatorze poi't (environ 190 metres de chaque cote). [Texts.] Toutes les provinces et tou- tes les villes prises ensemble contiennent en nombres ronds *'""■ """.".) et en champs cultives 1,■»^\i,^A^ »« [Comm.] Les champs et les terres de cha- que province reunis ensemble. Chaque annee, les terres livrees nouvellement a la culture donnent un accroissement de sol cullive. On rapporte ici la liste enumerativc qui ful pre- sentee a I'empereur Kia-king , la i"^" annee de son rcgiie (1812 de notre ere.) t' Tchi-li. Cliamps dupeuple 1 Champs des colonics mi- 5 ensemble... . mt.Tiii M lituires I I'l-rraiiis converts momcntanenient piir les llcuves et rivieres ir. :>5 Terres des liuit bunnieres • ir,055 vi I'oiir les(|iiatre buniilercsde I'aile paucliu des 'J'c/iahn-curh (de la Monjiolie) , ct pour la iiioltic dc la premiere i)annierc jaune de I'aile droilc ; en outre , les terrains pris sur les eanx du fleuve dans Ic distriet dc t'oung-hien, et livres a la culture ■ 4,9SJ •£» Champs el terres du doiuainc prlve ct des mandarins «9,<>7'f uu Terres restant a la disposition du peuple.. i5,o89 15 Terres qui ont fait retour an people dans un rayon determine . . 7,u«« 9i Torres des bannleres n«,i!o;i a« Terres de surplus laissccs aux banuiercs. . i«,'25» u'j .4 reporter- ■ 032,574 32 (*} II resulte de cc teste officicl que le h'ltig clii- nois doit equivaloir a (i hectares «j ares 32centiares, en prenant pour base la valeur dc o ni. 353 nnn. pour Ic pied (tchi) employe par le i;ouvernenicnl cliinnis. I.c koiing ( ou poO) vaudrait alors 1 ni. u«s nun., el en carre 'i m- 772 mm. Le vieou vaudrait 2 ,»ll 03 SIS 21 Kia us Total general. . iMs.sia uo 40 H6-nan. Terrcs du pcuple 6S9,76!i 45 (.hamps dunnes a des elrangers (King- iniiuj-tien) 5i,2»« (Id.) 123 09 Champs de bauts roseaux (id.) .... ii.su m Total g«n«ral .... .720,884 86 <■ Nftm-hoei. Champs do peuple • 540 noj ra Champs des colonies miliuires .... 4i!c86 mo (Stamps des hauls roseaux 31,344 72 Cbaioiis des eludes 232 is Total general . (*' ^'?o' iitnoroiM la valeur agralre de res termes, qui indlqucnt sans doute des meturci locate*. 7" Kiang-tl. Champs du pcuple 4«i,4«i n Champs des colonies niilitaires 29 in Champs des colonies niilitaires 7,87« 10 Champs de Ndn-gao (ports miridioDanx) cl de i'dn-thsing-gito ia 5S Champs de Tal-^van-/ou (He de Fornio«c}, Cncfos «,[K)7 ii II y a CD outre B7,8«i kia. (?) Total general 159,433 as 9» Tche-kiang- Champs du peuple Champs des colonies mllltatres. . Tcrres vaseuses et sablonneuses. Total giiaeral. . 10° Hou-pe. Champs du pcuple Cliamps dcs colonies' militaires. . Champs des hauls roseaux. . . . Total g^niral. . 4i<»,44* !I0 1,173 04 4,380 73 S(8,8«ii .-.3 . 20,471 70 18,718 K 11° Hou-nan. Champs du pcuple 278,o«3 01 Champs donnes a des titrangers. . . . r.,991 m Champs des colonies militaires. , . . 30 ass vi Champs des hauls roseaux 2.773 21 Total general. . . . si8.8ij 9« IS" Chen-si. Champs du peuple att8,s7a ii3 Cbamps des colonies militaires. . . . 4o,07i 23 Terres des dfeparteincnts dc Foung-tsiang, de Htiv-tchoiing, de Hing-ngun, dii dis- trict de Tihan-ngan, abandonuees par les torrents ct devenucs productives. . a n; Terrcs donn^es autrefois a des strangers. 8,063 8J Champs appartenant aux ctublissements d'iustraction publiquc ' ta u Total general. . . . 3o«,77j IS" Kan-sou. Champs da peuple 115,176 Terrcs des colonics militaires »«,4i2 Terres concedces autrefois a des etran- gcrs 13,418 Terrcs destinces .i entretenlr dcs com- munautes 1.849 Tcrres d'inspection (A'ien-fAe) l,7B4 Terrcs dcs fan (etranticrs limitrophes) dans les quatre dcparteinenls dc Imu- tcheou, de Koung-tchang , de King- tcheou,ie Si-nnia 9oc Pins, 2i6,»i4 parcellcs (formant ctaacune inolns d'un nitoo). Champs des eludes 313 Champs du peuple dans I'arrondisseincnt de Ti-hoa. du departement de Tchin-si. 9.ait2 Total pour la province propre. . . [ Dependances exUrieures.] Champs cnllives par des colonies mili- taires Champs Champs <:haiups Champs Champs Champs Cliamps a J'a-li-kouan.\ . a Ha-mi a Tour/an. . ■ . i Oitrsumoutsi . . a Lou-ying-chi-pa. • a Tarpaugotat. . . 4 Karachar. . . . a Ou-rhi. 303 113 147 304 396 Total pour les colonics mililaircs_ cxterleures f'"" CHINE MODERNE. 175 14° Sse-tehouan. Champs du peuple wa,79s Chainps d'auloniue cultives par dcs sol- dats 154 Chainps a leguiues du dcpartenacnt de Niny-youun Kss Champs de colons militaires, aunorabre de cinq, du district indepcndant dc Meou-houng, ct champs des territoires nouvellement contiuis «>»« Terrains destines au paturage dcs che- vaux '^' Total general. 460.47I 31 ia° Kouang-toung. Champs da peuple su.909 « Champs des colonies militaires. . . . s.sst 7o Champs des etudes "" *^ Total general. . . . 5ao,348 vi 16° Kouang-ii. Champs du peuple 89,396 » Champs comples en pe [tuii-pi) ape. if) Champs comptesen wei (Tien-wei) 6,623 wei (?) Champs dc premiere qualitepcur 339 por- tes ou families. Champs de fonctionnaircs publics. . . so 3« Champs des etudes erdus dans les montagnes; tons les terrains qui dependent des trois tribus de I'uii-te-go, Ning-kou-tcha, et autres lieux, sonl des terrains nouvcUement ouverts a la culture, et non compris dans renumeration des terrains niesures et cadastres. Les terres des Moung-kou ou Mongols imposes, des habitants du district de Tchang- tcliiiti, de celui de To-lun-no-eurk, de celui de Tchao-yang, de celui de Tclii-fottng, de celui de Kien-tchang, de Tarrondissement de Pifig-yoitan , avec les terriloires des villes reunies et soumises des TcUa-sa-khe {Tchas- sack), Moung-kou iuterieurs el exterieurs ; les paturages des bergers nomades de tons les Tcha-go-eurU , Me'-te-so-lun , Ta-fiou- eurh-pa, Eurh-liou-n glid-lou-tc , IHing-lto-te, TcUa-go-tsin , Ou-liang-hai , La-lin et au- tres, qui tous appartiennentau Li-fan-youan (ou liureau des Etats dependants) ; en outre les paturages du Ta-ling-lto (ou du Jleuve aux grands glacons) , de Cliang-tou-ta, de Pou-sun-no-r/i; ceux de Ta-ti- (de la Mon(;olie) , ainst que sur celles de la pre- miere nioilie de la bannicrc jaune, qui rcntrcnt dans celles des magistrals ; en outre , ImpOls en argent etablis snr les terrains cnlcves anx Oeuves dans le dis- trict lie Foung Iiien ; ensemble. . . . 6,911 Fermage en argent des terres des buitban- nieres 465,045 Fermage en argent des champs d'etiido et deia justice 2,768 Imputs en tsicn ou luonnaiu dc cuivrc isi.ioo. Foung - thiEN ( ou lerrltolrc sacre de Mouk-den). Impots en argent fitablis sur les terres du peuple ai,i>9r> Impots en argent sur les terres rcstant 4 la disposition du peuple (i1/tii-!/»-f/ii). . ci.sso Impdis personnels (itablis eu argent sur le peuple 14,817 Imp6ls en nature , mais payes en argent , etablis sur les terres qui onl fait rctour (au peuple) dans un rayon determine. . 7,94j ImpOls en ai-gent etablis sur les terres de surplus laissces anx bannleres. . . . 99,880 ImpOts etablis en nature, mais payes en ar- gent, existant .sur les terres dn doraalnc prive et des fonctionnalres publics. . . 1,243 ImpOls etablis en argent sur les proprieties closes 2,142 ImpOls en argent etablis sur Ics terrains de piturages pour les ehevaux 12,877 ImpOls nilxtes en argent. - I2,62l ImpOts mixtes etablis sur les villes niurecs de Kaiyouan et autrcs ; taxes en argent sur les raarchandiscs qui sont transpor- tees snr le Kiang 13,196 Imputs en argent 6iablis .snr les terres du peuple dans les possessions du district dc Ki-rin, a Ning-hou-ta, Pctou-iia [Be- donnc), dans Ics Irois clans des Ho- eiirh-tsou (Ortsou), de Ke-ta-tin (Kc- raltn) 3J,409 ImpOts personnels (aux mCmes licux) payes en argent g,oo» ImpOts en riz non mondc, payes en argent. 24,593 froits mixtes, payes en argent, etablis sur les marchandises g.ico JnipOts mixtes payes en argent, etablis sur les villes muiee's de Thsi-tlisi-ho-eiirth, An pays de Ut^-loung-kiang 1,833 Total general pour la province dc Tchi-li. 5,r,i6,2«5 2" Chan-toiing. ImpOls en argent dtablis sur les champs du peuple 2,92«,I89 Impots personnels en argent etablis sur la population imposable {ting) 5se.028 ImpOts mixtes en argent U6,87t ImpOts en argent etablis sur Ics champs des colonics militaires r-iiSOB A reporter . , , . 5,119,791* lieport 5,419,799 ImpOts personnels en argent etablis sur la population militaire l*,42o ImpOts mixtes en argent etablis sur les champs des colonies militaires. . . . 8,2i4 Fermage en argent des champs d'etude. i.sie Total general »,45i,7S2 5" Chan-si, Inpftti en argent etablis sur les champs du peuple 2,536,381 ImpOts personnels en argent etablis sur la population imposable is.ii,r,e» InipOts mixtes en argent I70,s97 luipOts en argent etablis sur les champs des colonies militaires 20,077 ImpOts personnels en argent etablis sur la population militaire li,ZM Ferm.iges en argent de certaines terres (Thi-tsou) iseii Fermage en argent pour les etudes {Hio- tSOU) 2»7 Fcrirrage en ardent dtabli sur les terres de pAluragc des districts de Tshinq-choul- «o(neuvc d'eau pure) de Ilo-lin-lhi-eurh, Ac Niug-tjoitan ct Ac l-'oung-tchin. . . S4,8xt Total general. , '. . . 5,i45,08O 4" Ho -nan. ImpOls en argent Otablis sur Ics champs du peuple 2,798,o9<4 ImpOts en argent etablis .sur les champs donnesa des etrangers (Kang-ming). . r.» «:•> ImpOts en argent etablis sur les champs des colonies miliiaircs Fermage en argent des champs d'etude. . Argent provenant de I'lmpOt personnel etabli sur la population imposable. . . Argent provenant de I'impOt sur la cole personnelle des etrangers apanascs [Kang-ming) T . Argent provenant de I'impOt personnel (itabli sur la population militaire (t7i«n- ting) ImpOts mixtes en argent Sfijli^i Total general 5,351,02-. s" Kiang-sou. I. ImpOts en argent litablis sur les champs du peuple, dependants du receveur ge- neral de Kiang-ning 8I9,3S6 ImpOts en argent claiiiis snr les champs ties colonies militaires [id.) 47,003 Taxe militaire en argent ( hiang-choui- yin) etablie sur les champs lai'sses a la disposition publiquc dans la ville d'ori- ginc tres-ancienne dc Kian^-ning (Nan- kingi e,S88 ImpOts en argent etablis sur les champs dc hauls roseaux (bauibous) 109,005 ImpOts personnels en argent etablis sur la population imposable I81,5ig ImpOls personnels en argent etablis sur .sa population militaire •. . lo,«>o« ImpOts mixtes en argent 51,137 Droits mix les en srgcntetablissurlesmar- chandises ii3.nns Fermage en argent des eludes i.sjw Total pour ce qui depen^ du receveur ge- neral dc Kiang-uing i,528,3j<; II. Dependanccs du receveur general de Sou-tch('ou : ImpOts en argent etablis sur les champs (In peuple 2,083.iiU ImpOls personnels en argent etablis snr la population virile imposable i>o,i7o ImpOls en argent etablis sur les champs des colonies militaires 18,9.15 ImpOls personnels en argent etablis sur la population militaire lOO Fermage en argent des champs publics du district dcf)" 042 Produits en argent des grands roseaux ou bambous 183,7.11 2,512 6,189 A reporter 17,704 2,205,01b 13. 180 Iteporl . : liopOls mlxlcs en arKcnt. FcnuaBc en arRcnt tl's eludes- . . . ._ ToUl pour lei Kiang-si- IninOls en argent etablls sur Ics champs du peupic ." • ■ liupOls en argent etablls sur Ics dianips dcs colonU-s uillitaires produits en argent des grands roseaux ou bainbous • Inipfits personnels en argent etablls sur la population iniposable luipiMs personnels en argent etablis sur la popiiUition niilitaire ImptHs mixtes en argent Fcrmagc en argent des etudes Total gt'neral des inipOls et revenus de la province dc Kiang-si a" Fo-7iien. Inip6(s en argent litablis sur les champs du peuple linpOts en argent (Etablis sur les champs des colonies inilitaires IiiipOts etablis en argent sur les champs des Ndn-guo (ports ni^rldlonaux) ct dcs Yun-thsing-gao linpAts personnels en argent itablis sur la population itnposable Inipots personnels en argent etablis sur la population militaire Inipots niixtes cu argent. ...... Ferniagf en argent des etudes Itupi'its en argent etablis sur les champs de Tui-wan-fou, dip. de Tal-tcan ou He Formone InipOts en argent L't^blis sur les contri- buables de co ni^rae deparlemcnt. . . InipOts mUtes en argent, id Total general S,0M,0I6 1,490,070' 207, 81V 142,UG2 107,557 l,C49 1(0,829 ,G99,68G 48,405 G,074 181,819 1,S26 2i0,9'll< »so,ar>)i 39,049 171,930 lt,421 I8t,40fi 2,212 4,0J« 16,444 l,3BO,3(iO 0" Tche-kiang. liop^ts en argent etablis sur les cliamps du peuple . . 9,»37,099 IriipOts en riz, nials paycs en argent , eta- blis sur Ics champs des colonies mili- laires 21,931 Argent paye par la population virile Im- posable personnelfenient 9s«.93it Argent pave par la population railitaire luiposable 486 ImpAls en argent etablis sur les terres va- senses ct sablonneuses 19,993 Imp6ts miiles en argent liKi.407 Fcrmage cA argent des champs d'itudes. »,050 Total general. . . . . »,9»9,im 10° llou-pe- tiiipAts ei» argent etablls sur les champs du penplc 9m;,094 Iiiipftts en argrnt etablis sur les champs drs colonies luilitaires »9,389 Produits en argent dcs champs de grands roseaux ou banibous 11,143 A reporter. . . . i,oi»,6iu Jleport i,o«»,«e Argent provenant de I'impOt personnel (^labli sur la population 90,tltt Argent provenant de I'impOt personnel elabli sur la popiilaiion milltaire. . . iso InipOls mixtcs en argent £9.ito8 Kcnnagc en argent des champs d'liludcs. 1,848 Total general 1.101,334 11" flon-nan. Imp6t5 on argent eilablis sur Ics champs cfu peuple. . InipOts en argent etablis .sur les champs oes ctrangers apanages (Kang-miiin- tien Iinp6ts en argent Stablis sur les champs des colonies inilitaires Argent provenant de I'impDt personnel etabli sur la population virile 76,u»7 Argent provenant de I'impOl personnel sur la population milltaire 4911 Inip6ts luixtcs en argent 34,7oa Produits en argent des hauls roseaux ou bambous Fermagc en argent des champs d'itudcs. 980, 1»9 98,48S Total general. 1.7IG 1,90» 1,904,009 12<> Chen-Si. ImpOts en argent etablis sur les champs du people l,979,!M Impdts en argent etablls sur les .champs des colonies militaires iHi,7iS Fermage en argent etabli ."ur Ics terres des departcmeuts de Foung-tsiang, de Han-tchoung , de Hing-ugan, du dis- trict dc Tchang-ngan, abaiidonnis par Ics torrents et ileveniies productives. . uit InuxMs en argent etablis sur les terres donnees en apanage 8,490 Iiiip6ts personnels en argent etablis sur la population imposable sio.Wi InipOls personnels en argent etablis sur la population inllilaire 9,849 InipOts personnels en argent;etablts sur les elrangers apanages 9 Imp6ts niixtes en argent etablls sur les champs du peuple 83,oo« Impots inixtes en argent etablis sur les cliainps dcs colonies militaires. . . . C09 Fermage en argent des champs d'etudc. . i«4 Total gentiral. . . . . i.(m».2«m> I3» Kan-sou. InipOts en argent etablis sur les terres du people , Inip6ls en nature partis en argent, id. ■ . InipOts en argent etablis sur Ics terres des colonics militaires Impftts en nature paycis en argent, id. . . I'aille et foin payes en argent Iiiip6ts en argent etablis sur les terres donnees en apanage ImpOts en nature paves en argent, id' . . ImpOts en argent etablis sur Ics terres deslinees a I enlrctieu de cerlaines com- munautcs IinpOts en argent etablis sur les terres d'lnipection Argent provenant de I'iinpOt personnel etabli sur la population virile civile ct mllitairc InipOts mixtes en argent. . . . . ■ . Fermages en argent provenant des champs d'eludcs ','.•■ 'j ■ ImpOLs en argent etablis sur los (erres du peupic dans rarrondissenient dt Ti-hoa, du deparlement dc Tchin-si ImpOts niixtes en argent (dans les meracs localites) "■.•,•■■" Produits en argent des terres de la popu- lation marchande du Jon-eurh-fan (Tourfan) InipOts mixles en argent, id InipOts lulxtcs en argent dc J-U. • • • __ A reporter. . . . 3,774 193,(106 8,070 389 r,7 411 42.it«l 9,naT 99,687 199 1,B7« CHINE MODERNE. 181 Report :»i,40i ImpAts mUtfs pn argent elablis surla po- pulation niarchande dc Ta-eurhpango- tai [Tarpangotai]. '. . 4,01s IwpOts iDixtes en nionnaies de cuivre, pou- eurh ypara) elablis siir la population inarcliande Khe-la-eha-eurh , Kara- c/iar,~i7i.gii<) paras, ci. . . «7s,!Ha Inipols iiiixtes en inonnaies de cuivre para, etabiU sur la po- pirlalioii uiarcbaade de Kou- l>-'lif 44,7«8 InipiMs niixtes en monnaies de cuivre para, ^tablis sur la po- pulation marcbande de Ho-ke- iOU {.-/kfOU) 2JS,8C8 linputs reguliers {tching-feu) en nionnaies de ciiivre para, eLi- blis sur les families niusuluia- nes du i'arkiyang 9,;il3,ooo InipOts luixtesen luoiioale para, "'• S72,7ti« Inipots nilxtes en n)onuaie para, etablis sur la population mar- chande de Oti-chi |j«,»6t InipAts niixtes en iiionnaic para. elablis sur la population niar- chande dc Khe-chi-go-eurh (Khachegar) - . . S6«,706 Imi>6ts rejinliers en monnaie pa- ra, ctablis sur Ics fanjilles inu- sulnianes du infnie pays. . . S,S99,847 Impdts en nature paves en mon- naie para, id. ."..... 9S7,5ie Impiits reguliers en monnaie pa- ra, etablis sur les fauiilles niu- siilmanes du Hotien. . . . i,ioo,ooo Tributs en chevauv, paves en ar- gent par les clans barbarcs des horde< Tu-choii , qui depen- dent du ministre en chef du Tlising-hai {met Verte ou Ko- konor.i. 8S7 Total des iiDp6ts et revenus en para* et en fjaHj (•) 9,006,5S6 | =9j.parteineiit de Yatcheou. 4,oio Fcrniage en argent des icrres de patura- ges pour les cbevaux a.iii Total general so7.9c<: li" Kouang-toung. Imp6ts en argent sur les champs du people , ■ , 906,191 frnpuls personnels en argent etablis sur la population virile 118.5S8 Imp6ts mixtes en argent 48,73^ Iuip6ts en argent etablis sur les champs des colonics militaires lis IropAt personnel en argent elabli sur la population militaire 1.689 Fermagc en argent des etudes. .... i.nio Total general i, 076,9 91 (•) Ij somme lotalc que nous Irouvons pour les paras s'eleve a 9.006,32«, l.indis que cellc donnee dans le texto ne s'eleve qu'a 3.ooj.eoo. I.'erreur se troijvc dans le textc ou dans les details domiSs par le Commeutaire. 16" h'ouang-si. ImpAts en argent etablis sur les champs du peuple 347,S70 linpots persoanek en argent etablis sur la population virile 46,so« InipOts mixtes en argent (6,6X4 Fermage en argent des champs d'etudes. 1 ,071 Total general 48i,s7a 17° Yiin-nan. Iiuputs en argent etablis sur les champs du people et sur ceuv des barbarcs /. icj.7i;> Impots personnels en argent etablis sur la population virile 28,e9J InipOts en argent etablis sur les champs des colonies inilit^iires »i,ej| hnpOts mixtes en argent iis,9S3 Fermage en argent des champs d'etudes. 10 Ffcrmageen argentdeschampsdelajustice. sa Fermage en argent des terrains dc pfttu- rages de cbevaux »i Total general 5«o,o«.> 18° Kouei-tcheou- ImpAts en argent etablis sur les champs ou peuple 107,863 Fermage en argent des champs de se- coiirs ( Tehin-tiejt) 47 ImpOts personnels en argent etablis surla population virile I3,80« ImpOts mixtes en argent bj,3«i Feruiages en argent des champs d'etudes. S47 Total general H7,r,2s [Texte.] Le montant des impots en grains de differentes natures est de quatre millions trois cent cinquante-six milletroiscentquatre-vingt-deuxc/ji(*), et enfourrages, de cinq millions quatre cent quatre-vingt quatorze mi lie sept cent quatre-vingt-deux cho ou bottes. t" Tchi-li fA/(hectol.) cAd(boU.) Grains de premiere qualite fournis par les champs du peuple et les champs des colonies militaires. . 9S,sa9 Grains de premiere qualite prove- nantde fermage descliamps d'd- tudes et des champs dc la justice. Fourrages de premiere qualite fournis par les champs du peuple et ceiix des colonies militaires. , . . 94i4se En outre: ImpOts inscr. pourdtre eipedies an min. des finances : Legumes fariueux noirs {he-teou , comme /eves , haricots, etc.). . Sesame (frAi-nj«) Chataignes (thsiuli) FonNG-TH(E!v, ou territoirc sa- cre de Moukden : Kiz de premiere qualite prelev6 sur les champs du peuple. . . Legumes farincux de premiere qunliteprelev^ssur les,terresqui onl fait retour au peuple. . . 34,741 Fourrages 417,861 Grains de premiere qualite prelc- ves si'j les champs communs dans les trois clans de Keralin, Ortsou, a f'etouna iBedonne) , Ning-gouta, dependant du dis- trict de Ki-RiN n,6 id. . k«,i(88 Total giiniral. . . ■ »5.m4 7" Kiami-ti. Grains de premiere quality prdle- - v6s sur les champs du peuple. . 80,144 Gr.-ilns de toutcs qualites, id. . 79,446 Fruits provenant dufermage (des cbamps) d's du dt'partc- "" )i (Kormose). . loo,7a» Ru iJ I . / (m \isqucu\. . 7 Total gOnirat. . . . iiii,»7a L'UNIVERS. e,o:i8 19,183 D" Tche-kianij. Grains dc premiere qualitc prc'le- V('s sur les champs du peuple. . 242,108 Grains de toutcs quallt(is, id, . , 3.;, 720 Total geni^ral. . . , 277,tt'iB 10° Hoii-pe. Grains de prcmlire qualitt' prtfle- vCs sur Ics cliamps du peuple. . isa.gis Grains de toutes qualites , id. . 4a,i67 Fruits provenant du fcrmage des champs d'litiidcs 121 Total gciiiral . . . 1B1.207 11° llou-ndn. Grains dc premii^re qualiie pr(-lc- v(?s sur les champs du peuple. . 144.167 Grains de premiercqualil6 prele- vt's sin- Ics champs des colonics mllltaires 41 Grains de toutes qualites, id. . . 170 Total general. . . . in. 37a 42° Chen-si. Grains de premiere quallte prelc- vcs .sur Ics champs du peuple. . js.oib Fourrages, ib Gr.ilns de premiere qualltti prele- vis sur les champs des colonies militalres t89,6i6 Fourrages , id Grains dc premiere qualitc pr61e- ves sur Ics icrres des Irois di- partcments dc Founu-tsiang , de Han - tchoung, de Hitig- tigan, du district de Tcliang- ngan. qui out ete rcnduesa la culture , . 854 Grains de premiere qualitc prile- ves surlcstcrrcs donn^cs autre- fois en apanage a des strangers. 39,666 Grains de premiere quallte prele- vi's sur les champs des etudes. 1.298 Total general. . , . 903,062 is" Kan-sou. Grains de premiere qualite preic- vts sur les champs du peuple el sur ceux des colonies mili- talres 29,BB:i Fourrage de premiere quahte, id. . . . Grains de premiere quallte preie- ves sur les tcrrcs des colonics militalres 462,885 Fourrages de premiere quallte, id. , . . Fourrages payes en grains , id., 8 boisscaux. Grains de premiere quallte payes sur lesimpi»:s mixtcs ei Grains dc premiere quallte preie- ves sur les tcrrcs donnees en apanage 22,4!S9 Fourrages, id Grains de premiere quallte preie- ves sur les Icrres destlnees Jk rentretien de cerlaincs commu- nauies 447 Grains de premiere qualile prele- vessur les tcrrcs des /an, dans les qualredeparlenientsde I^n- tchcou, Koung-tchang, Ting- tcheou, ct Si-ning is.4si Fourrages, id Grains d-e premiere quallte prile- ves sur Ics champs d'eiudes. . 1,294 Grains de pi-cuiierc qualitc prele- ves sur les champs du peuple, dansrarroi)disscmcntde7(-no«, du deparlcuirnt de 7'c7(in si. . 7t,ilii Grains des colonies mllltaires dc I'ali-I.oiian. ....... 22,84S Grains des colonics militalres dc Hatni e,9i6 Fourrages dcs° colonies mllltaires dc /la-mi J reporter. , , . 634.8»4 CHINE MODERNE. 183 Repwt «S»,29I Grains des colonics mililaires de Tour fan )o,4!M QraiQs dvs colonies inilitaircs mti- sulinanes 4,U6s Grains rte Uiverses natures en ac- quit (le certains droits . . . 2,C96 Groins des colonies inilitaires de Ouroumoutsi 53.292 Grains dcs colonics luilitaires de I- li 4l,8ii9 Grains dcs colonies miUtaircs dc ninsuliiians (a III) 1 00 000 Grains des colonics inilitaires de Tarpangotai 14, 193 Grains des colonics miUtaircs de Karachar e.ic-j Grains de premiere qualite paves eomme iinpOts par des families ninsulmanes (a Karac/iar). . . aa'i Grains de premiere qualile p^iyc'' conime imp6ts par dcs families uuisulmanes de Aoti-tc/ie. ■ . 2,«i!3 Grains de premiere qnalite livrcs par les families musulmancs de ^ksou 8,111 Grains de premiere qualite payes comme iinpOt vegulicr par les families inusulmaaes du Yar- hlyanri 2l,riOG Grains ilc diverse nature en ac- quit de certains droits. ... 92 Grains des colonies inilitaires de <)U-Chi 3,112 Grains dc premiere qnalite paves coramc impOts par les families musulmancs, id 2,010 Grains de premiere qualile livres par les families musulmancs de Jiuclicgar 8,180 Grains de premiere qualite paves comme impftt regullerpar les" fa- milies musulmanes AsHo-tien. . 13,886 'I,a39,95l« Total general. . 9l:..09a 11° Sse-tchouan. Grains de premiere qualite paves en impOt par la population/an on elraiigerc Grains de divcrses cspeces fournis par les cinq colonies uillitaires dn district indC'pendant de niroukounri , et par les tcrres des tcrritoiresnouvellcment ac- quis Ri?. , fruits ct grains de divcrses csp6ces des terres desp&turages de chevaux Total gdneral. i.aac 2,i:.i 4,(>C'i 13" Kouang-toung. Grains dc premiere qualite prele- vi>s snr les champs du peuple. . sso.ir.s ImpOt territorial en nature de source intt'riciire et en pre- miere qualite 52,522 luipOt en argent ^tabll sur les ter- , res, change en imp6t en nature. 221,112 Somuie comptee en argent (Ay-yf);) 'i-MMii Hang 1*). Grains de preluicrc qualite prt'le- ves sur les champs des colonies militaires 9i,nM Total ge'neral. . . . boi.cbo iG" Kouang-fi. Grains dc premiere qnalit(i prgle- vcs sur les champs du peuple. . 78,787 Grains de toutes qualites, id. ■ 31,576 Grains dc loiitcs qu.ilites prelev(5s snr les champs d'etudes. ... r.a Total gimiral. (•) .SI Ton ajoutccetfe somme de lidnf/ an chiffre gt'neral des impiMs en argent priicedeuiment inu- luercis, on anra r..-.,o07.7S9 lidug, ehilfrc qui depasse- rait alors cclui donne dans le teste, de iC2,2a;; lidng. 17" Yun-tidn- Grains dc premiere quality prele- ves sup les champs du peuple. . tio.si? Grains de premiere qu.aUte prelc- vt's sur les champs des colonies militaires 27,217 Fruits provenant du fcrmage dcs champs de la justice 371 Fruits provenant du fermage des champs des etudes. ..... so Frnils provenant du fermage dcs champs de la Justice et des etudes 121 Total geniJral. 138.749 18° Koneitclicoit. Grains de preiuiere qualite prele- ves sur les champs du peuple. . 122,10a Fruits , id 73 Uiz de [iremiere quahte prelevds snr les champs des colonies mi- litaires Rlz provenant du fermage des champs de secours . . . . , Fruits , id 6,(i92 Ri/. provenant du fermage des champs d'etudes Fruits, id n.itoo 210 Total g^ueral. . 133,283 [Nota.] Le Commentaire ajoute : « Les grains blancs [pe-liang), preleves dans les provinces de Chan-tottng, Ho-ndn , Klung- ndn , Tche-kiang, K'lang-si , Hou-kouang , sont transporles par eau a Pe-klng; ceux de la direction dn Yiin-ndii ne sont point com- pris dans cette destination. » [Texte.] Quant aux impositions non determinees et fixees a I'avance , elles sont prelevees integralement et em- ployees de m^me. [Comm,'\ Ce sont les droits divers etablis sur les terres degencrees {lo-thi) des provin- ces de Tchi-li, de Chan-toung, de Ngan- lioe'i, de Tche-kiang, de Hou-ndn, de Sse- Ichouan ; les droits en argent sur les mar- chandiscs dans les provinces iln Ngdn-hoei , de Kan-sou, de Tchang-te-foii, du Hou-ndn ; les droits en argent etablis sur les cbevaux et les boeufs des cinq villes de Thsi-tclii-ngo-eurli {Thsi-ihsi-nagara?), de He-loung-kiang ; les droits et aulres taxes en argent pese etablis sur le tlie ti sur les marchandises du depar- tenient de Tlisi-ningel aulres de la province de Chan-toung ; les droits divers en argent etablis sur les dents de boeufs et d'anesde la meme province ; les droits divers etablis sur les fleurs qui donnent le bleu indigo {tim- ftoa), et ceux etablis aux entrees de la capi- tale sur les iiiMlelsde la jirovince de Kiang- sou ; le produit de la pecbe et les droits en argent etablis, a I'entree des passages, sur Its bo?ufs,les pores de la province de Fo-kien; les droits etablis sur les troncs d'arbres jau- iies nommes nie , sur les bceufs, les chevaux, les anes et les nuiletsde la province de Hou- /><' ; k's ilioits cn argent elablis sur les terres 184 L'UNIVERS. dcKradees de Sl-houan, de Yun-yang-fou , de la ville forliliee noiumee /rtrt de Jang-yang- fou, siir les niardies aux fourrages, marches 'aux sables iiiterifurs el exlerieurs de la viUe fortiUeede Uing-kiiig-tclwou-fou, sur les ruar- chci forairis de Gan lliig-foii, et de vingt-sept aulres localiles consistaiii en giaiides bour- gades ou villages approvisionni-s de la meme province; les inipots en argent etablis sur les champs des colonies militaireji dans le district de /-//; les droits en argent etablis sur les chevaux de la proviuce de Kouang- si, etc. [Texte.] Lorsqu'i! y a des exc^dants sur les impots territoiiaux, alors ces excedants ( soil en argent, soit en na- ture ) profltent au public. [Comm.] Les impots territoriaux directs eu argent, de memc que les impots territoriaux directs en nature, peuvent les uns et les aulres avoir des excedants. Les grains qui sont prele- \es et transporlcs par eau, s'ils ont des exce- dants, ces excedants rentrenl dans le grand canal, oi'i la direction de la proviuce de Yiin-ndn les verifie. {Texte.] Les excedants des impots de toute nature sont repartis d'apres des regies constantes et fixes. {Comm.] L'argent provenant des contribu- tions foucieres et persounelles est reparti, f)ar chaque Hang, au marc le franc, d'apres 'excedant des contributions foncieres et personnelles. [Les Staliits donnent ici en detail, par provinces, deparlemenis , arrondissements , cantons et districts, cette repartition propor- tionnelle, qui- pent nous paraitre, en Europe, quelque chose dune simplicite par trop gou- vernemeatale.] [Texte.] Si quelqu'un detourne la dix-millieme partie a'un lidng et tiie- n)e la dix-inillieine partie A'nnf^n (tres- petite fraction de inonnaie). 11 se rend coupable d'une faute punissable. Au mi- lieu du printemps on commence la le- vfte des impots; au milieu de I'ete on la discontinue; au milieu de rautomne on reprend les operations de la levee des impots , et au milieu de I'biver la levcc des impots doit fitre termiiice. Dans le cas de non-payement , on examinera avec soin si les contribua- bles n'ont pas de giaiiis caches dans I'interieiir de leur habitation ; on re- cberchera aussi avec soin si c'cst leur indigence qui s'oppose au recouvrement de I'iinpot. Les impots etant recueillis, sont pla- ces dans les tresors et les magasins des preposes de I'adtiiinistration, et on en fait connaitre I'etat au ministere. Si I'annee est tres-avancee, alors (les pre- poses de I'administration des finances) operent leurs versements, expedient leurs payements. Chacun verifie les comptes pour coinpleter ses operations. Apres les documents qui precedent, documents qui tie peuvent, a notre avis, laisser aucun doute sur la confiance qu'on doit leur accorder en Europe, il ne sera pas inutile de placer ici, comma objet interessant de comparaison, le Budget des recettes de la Chine pour I'annee \d>4A.Ct budget, que nous avons extrait de Y Almanack imperial officiel publie aPe-king pour letrimestre d'eVe de la meme annee, est plus detaille dans I'Almanach , en ce sens qu'on y trouve le contingent des impots payes, non- seulement par les provinces prises in- dividuelleinent, mais encore pur chaque departement, arrondissement , canion et district. Nous nous sommes borne a traduire le contingent de ces impots par provinces. V^ PBOVINCE. TCHI-LI. A. Contributions directes. x" ItnfOM fonder el person- nel du departemeut capital de PJ'king. a" Inipots foncier et person- nel portes sur les roles du re- ceveur general de la province. 30 Droits fixes etablis sur des produits de diverses natwes: liouille, etc 40 Droits fixes etablis sur di- vers genres de commerce, ou patcntes de diverses natures. . 5" Droits fixes produits par le ferniage des salines * 4 57>949 11. Doiianes. i" Droits proportionnels fixes portes aux roles de la douaue de Chan-liai {' ) . . . . A reporter. littHg (•). * 154,173 * 2,334,4/5 32,59.0 * 42,093 * 28,000 3,029,410 (*) E(|uivalant a 8 fr. dc noire uionnaie. — Pour ipiele lecleur puissejuger de \&sta- bilite des impots en Chine , nous avons fait CHmE MODERISE. 185 Report 3,0*9,410 2" Id. an passage Tcltang- kia, lie la graiiile miiraille (*). . * lo.ooo 3° id. a la doijane du port de Thien-tsin (**) * 4o,46q Total 3.079,870 W et IIP PROVINCES. KlANG-SOU ct Kgan-hoei. A. Contributions directes, Kiang-sou. 1° Impols foncierel person- nel portes siir les roles du rece- veur general de la proviuce de nimg. Kiang-sou * 3,i i6,82tj 2» Droits fixes etablis sur des prodiiits de diverses na- tures * 46,930 3" Produit en argenl des champs de hauls roseaux {tou- ko) * 93,940 Ngan-lioe'i. 1° Impols foncier et person- nel * 1,718,824 2» Drolls fixes elablis sur des produits de diverses natures. . 1 3,284 3" Produit en argent des champs de hauls roseaux. . . . 38,584 4" Droits de diverses natures pour les deux provinces reunies. 23,492 5° Droits fixes sur diverses marchandises, patenles, etc.,de la province de JS'gan-lioet. . . . 46, 611 60 Produit du fermage des salines * 2,083,282 B. Douanes. 1° Droits fixes porles aux roles des deux douanes de Loung-kiang et Si-sin *33,684 2" Droits fixes etabUs sur les manufactures d'eloftes, etc. ... * 191,149 3" Droits fixes sur les pro- duils manufactures et les mar- chandises a la douane de Yang- Ic/ieou * 55,753 40 Droits fixes percus a I'e- clgse de Koiia-i * 7,666 j4 reporter. 7,474,025 preceder d'anaste'risqueles chiffres des impols qui n'ont pas varie depuis un Steele, ces chiffres se trouvanl encore les me'mes qu'en 1744. (*) Cesdroils sont percus par I'inspecleur- intendant des douanes (Kien ton). {*') Voy. ci-dcvanl, p. 47 — 48. Report 7,474, o-^j 5° Droits fixes percus sur le sel a Tchang-icltin et a la douane de Hoai-ngan * 201,960 6° Droits fixes percus sur le sel aux douanes de Wou-hou. et de Hou-koung * 194,026 7" Droits fixes de la douane de Fouiig-yang * 79,820 8" Droits fixes de la douane de Chang-hai * 2j,5i6 Total 7,975;347 Nota. Les impols en nature des deux provinces , transpor- tes a Pe-king sur 65 batiments de I'Elat, soni en riz monde, de * 1,431,278 c/(i ou hectolitres. ^ IV" PBOVINCE. ChAN-TOUNG. A. Contributions directes. 1° Impots foncier et person- nel portes aux roles, et formant iii„g. le contingent fixe * 3, 376,165 2" Produits des salines affer- mees * 120,720 3° Patenles et autres droits fixes * 47,85o 4" Droits de diverses natu- res * 22,711 B. Douanes. Produits fixes de la douane de Thsing-tclieou, sur le grand canal * 29,680 Total 3,597,126 Nota. Les impots en nature preleves sur la province , et , transportcs par eau a Peking sur 12 batiraenis de I'lilat, sont , en grains divers , de 353,963 chi ou hectolitres. V« PBOVINCE. Chan-si. A. Contributions directes. i» Impots foncier el person- tumf. nel fixes . . * 2,990,675 2" Patenles et autres droits. * 3 1,1 00 3° Produils divers * 5i,844 4" Produits fixes des salines. * 507,028 B. Douanes. Produits fixes de la douane affermee du passage Clia-hou dans la grande muraille * io.9^9 Total... . 3,59 r, 566 186 L'UNIVEKS. VP PBOVINCB. HO-NAN. A. Contributions dlrectes. i" Impots foiicieret pewon- nine. nel fixes _• • * 3,iG4,758 1" Palcntes et aiilres droits fixes 3" Droits Jivei-s B. Doiianes (neanl). Total ~ * r2,fi5o * 32,3oo 3,20(),7o8 Nota, Un impot en nature de * aa 1,34a hectolitres de riz est preleve sur la province, et transporle a Pe-klng par les navires imperiaiix de la pro- vince du Chaii-loung. VII* PKOviNCE. Chen-si. A. Contributions directes. i" Iinpots foncier et person- nine. nel fixes * i, 058, 700 a» Produits divers fixes. . . * 40,623 B. Douanes. Ce produit n'est pas connu. Total 1,699, 3a3 VHP PBOViNCE. Kan-sou. A. Contributions directes. I" Inip6t foncier et person- nel fixes 2° Patentes , droits divers , prodiiiis des salines affermees. 3° Produits divers Total. tiling. *28o,65a * 39,450 ♦60,787 38o,889 Nota. Un impot en nature de ai8,55o hectolitres de grains est preleve sur celte province. IX' PBOVINCE. FO-KIEN. A. Contributions directes. I" Impots foncier et person- tUng. nel fixes * i,074;489 2" Produits des salines af- fermees 3* Droits divers 40 Produits de differentes natures * 85,470 *24,85o * 27,775 B. Douanes. Droits fixes de la douanc de Po-kien Total ' *7^'^»9 divers X« PBOVINCE. TCHE-KIANG. A. Contributions directes. I" Impots foncier et person- /««,. nel fixes * 2,914,946 a" Patentes et droits divers. * 10,600 3" Produits des salines af- fermees * 5oi,o34 4" Produits divers * 38,437 B. Douanes, I" Droits fixes de la duuane de Pe-sin * 129,660 2" Id. de celle de Nan-sin . . * a6,5oo 3" Droits fixes sur les mar- chandiscs de toutes natures, les produits manufactures, etc., de la douanc du port maritime de Ning-po * 32,o3o Total 3,646,257 Nota. Un imput en nature , de 611,720 hectolitres de riz , est preleve dans les trois depar- tements de Hang, Kia et Bou, ainsique 66,600 hectolitres de riz monde. L'Etat eulretient 24 baliments pour leur trans- port a la capitale. XP PBOVINCE, KlANGSI. A, Contributions directes. I* Impots foncier et person- uA„g. nel fixes * 1,878,682 2" Produits divers * 4,470 3° Produits des salines af- fermees * 5, 1 5o 4° Droits dediverses natures. * 34,t23 B. Douanes. 10 Produits fixes des doua- nes de Kieou-kiang et Ta-kou- thang * 173,880 2° Produit de celle de Hang- cheou * 46,471 Total *2,i42,:70 Nota. Un impot en nature, de 795,063 hectolitres de grains , est preleve sur cette province , et expedie a Pe-king, sur 14 hk- timeuts de I'Etat. XIP PBOVINCE. EOU-PE. A. Contributions directes. lo Impots foncier et person- uint. nel fixes *i,'74,iio 2" Patentes ct aulrcs droits 1,286,133 A reporter. •58,780 1,232,890 CHINE MODERNE. 187 Report 1,232,890 3» Droils de cerlaines trou- pes {tiin-hiang) 4" Droits de posies 5" Produits divers Report 1,^21,084 2° Droits fixes percus a la 32,640 douane de Tai-ptn^-kiao , du 18,140 deparlement de Tchao-tclwoii B, Douanes. Produits fixes de la douane de King-tcheou . * 22,554 * 9,644 * 53,670 Total. i,3i5,868 Nota. ITii impdt en nature de 96,934 hectolitres de grains est preleve sur celte province , et transportea/'e'-Aw^ sur 12 ba- timents de I'^^tat. XIIP PBOVINCE, HOU-NAN. A. Contributions directes. I" Impots foncier et person- nel fixes 2" Produits divers 3° Droits de certaines trou- pes 4° Droits de postes 5° Droits divers Total Hung. 882,745 *3o,53o 2o,35o *i3,88o i4,8i3 962,318 Nota. Un Impdt en nature de 96,214 hectolitres degi'ains est preleve sur cette province. XIV* PBOVINCB. SSE-TCHOUAN. A. Contributions directes. 1° Impols foncier et person- Hang. nelfixes * 631,094 2° Droits divers * 20,520 3° Produits divers * 11,242 B. Douanes (droits non specifies). Total 662,856 XV= PROVINCE. KOUANG-TOUNG. A. Contributions directes. 1° Impots foncier et person- Hang. nel fixes * 1,264,304 20 Patenles et autres droits. 3° Produits divers 4" Produits des salines affer- mees B. Douanes. 1° Droils fixes percus a la douane de Canton A reporter. . . 3,990 * 59,530 *47,5io * 43,760 1,421,084 Total. 1,474,754 XVP PROVINCE. ]K.OUANG-SI A. Contributions directes. 1° Impols foncier et pei-son- nel fixes 2"^ Paten tes et autres droits. 3° Produits des salines affer- mees 4° Produits divers B. Douanes (neant) Total Hang. 416,399 * 25,880 *47,i54 • 26,780 5i6,2i3 XVIP PROVINCE. YUN-NAN. A. Contributions directes. 1" Impots foncier et person- nel fixes a° Droits divers Uarig " 209,582 * 34,266 Total. 243,848 Nota. Un impdt en nature de 227,626 hectolitres de grains , legumes, etautresproduitsd'ele et d'automne , est preleve sur cette province. XVIIP, PROVINCE. KOUEl-TCHEOU A. Contributions directes. I" Impots foncier et person- nel fixes 2" Droits divers 3" Produits des salines affer- mees 40 Produits divers B. Douanes (neant). Total Hang. * 101,268 * 13,690 * 6,234 * i3,74a ^34,934 Pour resumer les documents prece- dents, nous allons presenter, dans un Tableau synoptiqtie , les principales donnees statistiques de la Chine propre- ment dite, en faisant abstraction de ses diverses dependances qui ne sont pas dons les m^mes conditions de culture et (fe civilisation que i'ancien empire. 188 L'UNIVKRS. Tableau synoptique de la superfide, de la population rit ^v=^ I'OPU^TIO StPERnClE M05TAST NOliS des provinoes. SII'EKFIOIE en kilometres Carres. TOPILATION en 1813. par kilometre carrd ou 100 hectares. des terras cullivees imposees de I'impot fonciei et personnel en Hung en de 8 fr. francs en king et miou. en hectares. u. r. iing. m iou. hectares. linng. fr. 1 Tcm-u 150,909 44 27,990,871 185 958,743 43 5,752,400 2,488,048 19,909,1 2 CUAM-TOUNC . . . 106,666 24; 28,958,764 173 986,345 11 5,918,070 3,376,165 27,009,; 3 Chan-si \k\,lxm Os' 14,004,210 99 553,212 50 3,319,275 2,990,673 ?3,925,( k HO-NAN 166,666 24 23,037,171 138 721,145 92 4,320,875 3,164,758 25,318,( 5 KlANG-SOC 237.212 16 37,843,501 303 720,894 86 4,325,369 3,116,826 24,934,( 6 NCAN-nOEl 34,108,059 414,368 75 2,480,212 1,718,824 13,750,: 1 KlANG-SI 184,770 56 23,046,999 124 473,741 07 2,842,446 1,878,682 14,829,i 8 FO-KIEN 136,908 80 14,777,410 107 139,433 83 836,602 1,074,489 8,595,! 9 TCIIEKUNC... 10o,22i» 00 20,256,784 260 465,003 69 2,790,022 2,914,946 23,319,; 10 Hou-Pt 870,611 30 27,370,098 12/1 685,185 56 3,631,113 1,174,110 9,392,> 11 HOU-NAJI. 18,652,207 ( 315,815 96 1,894,805 882,745 7,0C1,< 12 Chen-^i 394,260 48 10,207,256 64 306,775 22 1,840,601 1,658,700 13,269,t IS Kan-sod. 15,193,125 237,393 59 1,424,361 280,652 2,245,: 1ft SSE-TCHOtAN... 426,908 00 21,435,678 50 465,471 34 2,792,828 631,094 5,048,'. 15 KOCAXG-TOCNC. 203,407 36 19,174,030 94 320,348 35 1,922,090 1,264,304 10,114,/ 16 KOL'ANC-Sr 200,320 00 7,313,895 36 89,760 43 538,562 416,399 3.331,1 17 YUN-NAN 276,400 64 5,5«1,320 20 93,151 261 558,907 209,582 1.0T0,( 18 KOIEITCUEOU. . TOTAUX... 165,258 24 5,288,219 35 27,775 90 166,655 101,168 810,1 3,322,009 1 44.360,279,597 Moy. leo ^ 7,894,508 77 47,367,293 1 1 29,342,867 34,742,9: I F.n ajoiitant aii mo hectolitre , c'est-a-d ntaiit total de< impots fixes d ire, a 4»,4si,«o fr., on a un e la Chine pon total de 356, r IBM (montant qui est de 3J f89,708 fr. A'impdts fixes ; ( ,919,786 lidng ou 987.:.. e qui nc (at p«s i fi Le Tableau synoptique precedent (qui nous a codte plus de reclierdies et de travail qu'on n'en accordeordinairement a ces sortes de resumes) repond par lui- meme a bon nombre d'objeclions que Ton pourrait faire sur les documents que nous avons fait connaitre. INous nous bornerons done a le faire suivre des observations suivantes : 1° La svperficie totale des dix-huil^ provinces de la Chine, evaluec par nous en kilometres carres, est le resultat des triangulations operees par les niission- naires pour lever la carte generale de la Chine sous le regne de I'empereur Khang-hi, et par son ordre(*). (*) Celle carte fut gravee en France en I -32. Le P. deMailla, qni y piil unegraude pari, ecrivit, a propos de cette carte :« La « carle de la Cliine el de la Tarlarie, dans « le fait, est I'otivrage des sciils rnissionnaires <« francais. Les PP. Cardozo , Portngais , et « Fredely, Alleniand, qui out accompagne « quelqiies-nns de nous, n'v out en guere « d'autre part que celle de la fatigue qui est <■ inseparable du voyage; 11 serai I bon (|u'on « le sill. » (De Mailla, icllre j', en tele de .>ioii Hisloire gc'/icnilc de la C/ii/ie.) Voir i)Our les CHINE MODERNE. specijif/tie , et des divers impdts de la Chine en 1844. 189 •.OPORTION e I'impdt foncier !n argent r hectare. PUODHTS du fermage des salines. PATENTE8 et drolls divers. BIDGET des douanes. TOTAL des contributions fixes par province en 1844. MO.NTANT DKS IMPOTS IMPOTS en nature, riz, grains, etc., en chi ou hectolitres, expedies a Pe-king. expedies au gouveruement central. relenus dans le tresor provincial de I'impot foncier. fr. c. 3 £i6 //(in?. 437,949 74,G13 limig. 78,660 liang. 3,079,870 Hiing. 1,939,941 limig. 621,811 ihi. » 1) U 50 120,720 70,501 29,680 3,597,120 2,730,736 091,141 353,963 7 20 507,0i8 82,944 10,919 3,591,500 2,702,285 328,290 » a 5 85 n . 44,950 1! n 3,209,708 2,441,110 626,623 231,342 5 16 5 53 2,085,282 395,980 140,870 123,971 a 1 393,588 7,975,347 2,504,728 1,194,914 1,446,051 422,709 1,431,273 5 21 5,150 38,593 220,351 2,142,770 1,602,431 540,705 795,063 10 27 85,470 52,625 73,549 1,286,133 1,055,209 28,052 > » 8 li2 501,034 49,087 181,190 3,646,257 2,287,3^6 687,277 678,320' 2 58 II n 132,114 9,644 1,315,868 776,173 333,543 96,934 3 72 » . 79,573 » * 962,318 944,422 265,379 96,214 7 20 a a 40,623 i> » 1,099,323 1,344,548 265,498 II > 1 58 39,450 60,787 » » 380,889 182,644 72,274 218,550 1 80 » » 31,702 a » 062,856 306,366 13,029 > a 5 20 47,510 65,520 97,420 1,474,754 719,307 339,143 » a G 18 47,154 52,660 » > 516,213 278,559 86,945 * » 2 99 n 1) 34,206 o • 243,848 188,927 53,596 227,025 a 8j 6,234 27,432 » » 134,934 53.346 13,314 a » yy. 5 09 4,278,907 1,202,951 1,095,001 35,919,786 23,312,992 6,835,380 4,119,285 ), I.T valetir d lu! c I'impflt en > aturc suppo lu encore pa r ncuf provlnc es, valeiir que I'o n pent fixer a 12 1 r. Ic chl ou 2° La popidation de ces dixthuit provinces est celle trouvee par le re- censenient de 1812. Elle a dil encore beaucoup augmenter depuis, si Ton en juge par la progression de la population en Europe et en Chine nieme, d'apres les recensements anterieurs. C'est un fait dont rimportance a deja beaucoup preoccupe les economistes, que raccroissement progressif et gene- ral des populations civiiisees qui cou- vrent la surface du globe. Et en effet, details la Preface du P. Duhalde, eu tete de sa Description ile la Cliine. en suivant cette loi d'accroissement, on peut prevoir une epoque, assez rappro- chee nieme , ou ie sol ne suffira pas a leur subsistance. Pour etudier et re- soudre ce probleme, il n'y a pas de na- tion au monde qui offre des documents comparables a ceux que presente I'his- toire chinoise. Cette histoire , sur I'au- thenticite de laquelle on peut cousuiter notre premier volume (p. 33 et passim), donne des recensements de population, pour la Chine, qui remontent a plus de 2000 ans avant notre ere ! En voici quelques-uns. i;)o L'UMVERS. Avant J. C. 2250 1100 AprtsJ. C. 2 155 7(i0 ItOO 1290 1580 105> 1683 1-11 1730 17(i3 1753 1761 1792 1812 KMPEKELItS regaants. Chun. Yu. ... Telling wang. IIi.-io-ping-ti. . • Hiouen-li Ming-hoang-U- Hofi-tsoung. . . ( Houpi-lie I Kouliilal-khan. Chin-tsoung. ■ Chun-tchi Kliang-lii DViNASTlES. Hia Tcliiou. . . . Han * Thanij Soung Mongolc, . Ming Tai-lhsiiir/, Id "., Kicn-louD!! Kia-king. KUMimUS UONNKS I>A1( LES ECKIVAINS CinXOIS. Families contribuables. 12,233,000 16,077,090 8,91(1,900 11,009,500 13,196,200 10,021, fi30 10.883,858 19,1132,753 20,111,380 2!l,089,£i68 20,016,292 37,780.952 Bouchcs valides. 13,553,923 13,700,923 59,59'i,970 56,086,850 52,909,300 03,820,790 58,830,711 60,092,850 102,827,018 198,210,553 307,007,200 300,279,597 Les six premiers de ces recensenients, ainsi que le huitieme, sont tires de VEcratnen de divers ouvrages et docu- ments {Kiim-chou-pi-khao), ecrit sous les Ming; ceux de 1736 et 1743 sont ti- res de la Grande Geographic impe- riale ; celui de 1763, du Tal-tlising hoei-tien {edit, de 1764); et celui de 1761, d'un manuscrit chinois qui existe a la Bibliotheque royale de Paris. Celui de 1792 fut communique a lord IMa- cartney, ambassadeur a Pe-king, par un miiiistre d'Ktat. On voit, par ces divers recensenients, que la population chinoise n'a pas suivi un accroissemeut toujours progressif. La cause en est due aux nombreuses revolutions politiques que la Chine a subies dans le cours dVs siecles; aux troubles survenus pendant les cliange- mcnts de dynasties, les conquetcs, et au regime plus ou moins favorable des !;ouvcrnemcnts qui se sont succede. Les divers recensements ont eu lieu jiUT families contribuables ou par 6o?<- ches , seion Tassiette de Timpot qui ^tait etabli tantot par families , tantot par bouches; car ces recensements n'e- taient fails que dans ce but, et non pour le simple plaisir de fournir des documents a des amateurs de statis- tique. On pourra €tre surpris que, de 1761 a 1812, dans I'espace de cinquante et un ans , la population chinoise se soil ac- crue de 162,064,973 bouches. Quelques fails analogues pourront servir a cxpli- quer cette enoriiie progression. D'apres le recensement de 1836 , la population de la France etait de 33,540.910 hab. En 1846, elledtaitde.. 3.^,400,486 Augmentation 1 .8.39,576 hab. C'est pres de deux millions en dix ans. Si la incline progression se niaiu- tient, en cinquante ans, c'est-a-dire, en 1896, 1'augmentation sera de 10 mil- lions, et la population de la France sera alors de 45 millions d'habitants. On aura done, pendant cinquante et un ans, pour la France, un accroissemeut de po- pulation de 30 pour cent, tandis qu'en Chine il est de 81. lAIais il y a des pays, en Europe , ou la population s'accroit beaucoup plus rapidement qu'en France, fiar des causes bien counues. En Ir- ande, par exemple, la population a double en trente ans; I'accroissement a done ^te de cent pour cent dans cet es- pace de temps ! Pourquoi, sous ce rap- port, la Chine serait-elle moins privi- legide que I'lrlande (*)? (*) Selou les cloatmenls presentes au parle- ment anglais en 1846 , la population de la Grande- Vrclngiie (ks Hois royaumes) s'est CHINE MODERNE. 191 11 est uue autre consideration qui, a elle seule, doit faire tomber toutes les objections que I'ou pourrait faire contre ie chiffre de la population chiiioise, la- quelle, en prenant pour base la loi de son accroissement (d'environ 3 millions par an), doit etre, au moment oij nous ecrivons, de 460 millions; c'est que, par suite de sa maniere de vivre, |)rin- cipalement en riz, il faut beaucoup moins de superficie de terre pour sub- vcnir a la subsistance d'un Chinois que d'un Europeen, et qu'ensuite la plus grande partie du sol est consacree, en Cbine, a produire la subsistance de rhomme, et non celle des animaux , et qu'en outre les fleuves et les canaux dont la Chine abonde portent et nour- rissent une tres-nombreuse population. « La surface entierede la Chine, «dit George Staunton , dans sa Relation de I'ambassade de lord IMacartney (t.II, p. 544, edition ajiglaise), « a trcs-peu « d'exceptions pres , est consacree a « la production des subsistances pour « I'homme seulement. On n'y volt point « de prairies, tres-peu de palurages, au- « cun champ cultive en avoiiie, en <'feves ou en navets , pour Tentretien « d'aucune espece de beiail. On y voit « peu de pares ou de jardins de plai- « sance, excepte ceux qui appartiennent accrue, enqnaranlc-cinq ans,de 8,629,928 ; car eu 1801 cllc elait de 10, 942, 646, et en 1845 do 19,072,574. Kn 1802, dans Tespnce de cinqiianle el uii ans , elle aura probableinent douhle , I'ac- croissement elant d'environ 200,000 indivi- diis par an. L' accroissement de population jiour la Grande-Rretagnc, pendant le nicme inlervalle de femps , sera done pltis elevd ((u'en Chine, puisqu'il sera de 100 pour loo! On voit jiar la conibien les objections faites contre le falmleux accroissement de la popu- lation chiiioise, et IVja^'crrt/Zow prelendue desstalistiquesde songouveruenient, out peu de valem'. La petite diflerence queronremarqueeu- tre lechifhe de la population chiuoisedonne par le document Iradiiit, et celni de notre tableau synopllque, provientdece que, j)our composer ce dernier, nous avons retiauclie la population additionnelle de quelques dcpen- dances non conq)rises dans la Cli'ine proprc , ct qui, par consequent, ne dcvaieni pas en- trer dans les elements de coniparaison sta- tistique« « a I'empereur. Les routes , qui sont « rares et etroites, n'occupent que peu » de terrain , les principales communi- « cations ajaiit lieu par eau. II n'y a « point de comnmnaiix ; on n'y iaisse « point de terres en friche par ne- « gligence, par caprice, ou pour le plai- « sir des grands proprietaires ; et les « terres arables n'y demeurent jamais « en jachere. Le sol, sous un chaud et « fertilisant soleil , doime annuelle- « ment , dans la plupart des cas , deux « recoltes, pnrce que ces recoites sont « appropriees par la culture a la na- « ture menie du sol , et, a son defaut, « par son melange avec d'autres terres, n par Tapplication de differents engrais, « par rirrigation, enlin par I'industrie « la plus active, la plus judicieuse et « la plus variee. » 3" La population specifique par ki- lometre carre , ou cent hectaren, est le resultat de nos calcuis. Celle popula- tion specijique peut a elle seule faire juger de I'abondance et de la richesse relatices de chaque province. Celle oii la population est la plus dense est celle du Kidng-ndn, dont Nan-king est le chef- lieu ( comprenant actue'llement eel les de Kidng-sou et de Ngan-hoei) , qui est effectivemeut la plus riche, la plus fertile, la plus commercanie ; celle ou la population est la plus rare est celle du Yun-ncm, situee sur les frontieres de la Cochinchine, de Tem- pire birman et du Thibet, ou se Irou- vent beaucoup de moutagncs et de ter- rains deserts. La province de Tchi-li, ou reside la cour, ne vient qu'en troi- sieme ordre, apres celle de Tche-kidng . En prenant la population specijique la plus elevee, celle de Kidng-ndn, on trouve qu'elle n'est pas encore aussi dense que celle du departement de la Seine, Paris non comprise et celle du departement du J\oid, d'apres le re- censement de 1840, etant de 19.5, est plus dense que celle de la province de Chan-toung , la troisieme dans I'ordre des de?i,sites, qui n'est que de 173. Et, ce qui etonnera le plus , la population specijique dc la province du Yfin-ndti est la meme que celie du departement le moins peuple de la France : celui des Basses-Alpes ! On voit done que cette population de la Chine, qui parait im,' 192 L'UNIVERS. possible a la sasacite cle nos g^ographes , a ses eqdivalents, sous nos yeux, sur plusieurs points de la France. Et, si on pnMid sfiilenient la population speci- /ique moi/enne de la Chine, qui est de 100 ;, par kilometre carre, ou 100 hec- tares (I habitant par hectare), on verra que la population est plus nonibreuse en Beliiique et en Irlande qti'en Chine(*). 4° Le chiffre des terres iniposees comme donnant un produit par la cul- ture, dans les 18 provinces de la Chine propre, parait grandement en dispro- portion avec la superficie absolue. Ce- pendant, d'apres le denonibrenient qui lilt presente a I'enipereur Kia-king en 1812 (voy. ci-devant), les terres en culture quelconque, sur lesquelles est reparti I'impot territorial , paraissent avoir ete cadastrees avec beaucoup de soin , du moins d'apres Tenumeration qui en est faite. Malgre cela, ces terres en culture ne fornient que le septieme de la superOcie absolue du territoire. Ici encore il nous faut chercher, comme pour la population, si ce qui, au pre- mier apercu, semble tout a fait invrai- semblable', ne pent pas 6tre a peu pres la verite. D'.'ipres la Statistiqne agricole de la France, publiee par le ininistere du commerce en 1841, latotalite des terres imposables est de 49,878,203 hec- tares, les terres non imposables n'etant que de 2,890,409 hectares : ensemble, 62,768,610 hectares. II en resulterait que le chiffre des terres iniposees est plus eleve de 2,510,910 hectares en France qu'en Chine. Ce resultat renver- serait de fond en comble I'opinion ad- mise jusqu'ici que la Chine est le pays le plus et le viieux cultive du monde , et qu'il n'y a pas jusqu'aux pentes ra- pides des montagnes et aux rochers les f>lus steriles qui ne soient exploites par es industrieux Chinois. La question posee en ces termes, d'une raahiere (*) D'apres le dernier recensement fait en i8.',6, la population specifiqiie moyenne de la Fiance serait de 65; la population totale elanl de 35,4oo,486, el la superficie du terri- toire clanl de54o,o85 kilometres carres, c'est- a-dire «•• 1. Tclii-li 705,681 II 1) 2. Chan-loung.. 956,a'71 29,455 418 3. Chan-si W8,010 35,360 277 i. Honan 639,765 60,044 72 5. Kiang-sou 6!l7,'i05 25,869 1) 6. Ngan-hoei — 340,905 41,686 232 7. Kiang-si aG2,ao8 5,-11 » 8. Fo-kicn 128,629 7,875 » 9. Tche-kiang . . • /l59,iiW 1,173 » 10. Hou-pe 568,995 20,471 1) II. Hou-ndn 278,063 30,988 » 12. Chen-si 2.58,572 40,074 55 13. Kan-sou 122,728 96,412 313 M. Sse-tchouan . Q62,798 1,842 » 15. Koiiang-toung 31fi,909 5,287 151 16. Kouang-si — 89,596 » 134 17. Yiin-nAn 83,974 9,150 3 18. Kouei-tcheou. ToT\rx. . . 25,988 631 44 7,044,406 412,028 1.699 En hectares,. 42,266,436 2,472,168 10,194 Nous avons neglige de placer, dans ce Tableau, les terres'des hu'it bannicres tartares, comprises dans les provinces de Tchi-li et de Chan-si , qui avoisinent laTartarie, et qui s'elevent a 225,209 king (1,351,254 hectares), ainsi que les terres du domaine prive de I'empereur, pres de Pe-fcing, qui se montent a 26,820 king (160,920 hectares), de meme que quelques autres terres que Ton trouve dans I'enumeration du de- nombrement precedent. « cetle conlree {Hang-tclwpu-foti dans le t, Telle -kiaiig), s'enferait ccrlainemeiit line « fansse idee. La ronnaissance d'un certain <€nombrc de villas fort etendiies ne suffitpas c< pour en porter un jugement exact; et, sans « I'occasion qn'ont cue les missionnaires de « parcoiirir lenipire, pour en dresser la carte « geographique, nous ignorerioiis encore que, « dans la piuparl des grands gouvernements, « on trouve des contrees de plus de vingt « lieues tres-peu peuplces , presque incu/les, •< el assez souvent si sauvages, qu'elles sont « lout a fait iiihabilables. .. On voil que les cliiffres sont inexorables ! On voit, par ce Tableau recapitula- tif^ que les terres possedees en propre et cultivees par !e peuple chinois s'ele- vent a 42,266,436 hectares. Ces terres, coninie nous I'avons deja dit, sontcon- sacrees presque exclusivement a pro- duire des fruits destines a nourrir la population; tandis qu'en France, les terres consacrees a la nourriture de I'homme en produits du sol, c'est-a- dire, en grains d'automne, /romen^, sekjle , vieteil , et en legumes sees , plantes sarclees, etc., ne s'elevent qu'a 10,378,966 hectares ! 5" IjHmpot fonder est encore, en Chine, le meme aiijourd'hui qu'il y a plus d'un siecle (*). II n'a pas varie de- puis I'epoque oii I'empereur Khang-hi (en 1709) substitua Vimpot fonder a la capitation qui etait d'un recouvrement plus difficile ; cette substitution eiit lieu (*) Yoici le releve synoptique de la quantile de terres possedees el cultivees par la popu- lation chinoise, en i753, avec le monlant des impots en argent ct en nature dont elles etaient frappees. II est tire du Ta-tlising- lioei-tien, edit, de 1764. C'est un document curieux a plus d'un litre , surtout comme point de comparaison. En conferaut ces chiffres avec ceux qui sont porles dans le grand Tableau, on trouve, pour le denombrement des terres de 1812 , une diminution de 554,007 king 09 meou (on 3,324,042 bectares) snr celui de i753; tandis que I'inipot foncier de ce dernier bud- get presente au contraire un excedaut de 77i,8(.)i Hang, et de 4)^87, 5io hectolitres de grains et riz, sur celui de 1812. Cette difference tient a d'autres causes que celle d'avoir compris Ching-king , ou la province de Moukdeii en Tartaric, dans le releve de 1753; ce que nous avons omis dans celui de 1 812, pour ne representer que la Chine pro- pre. Ces causes sont trop pen importantes pour nous y arreter ici. Nous dirons seulenient que le budget chinois est bien loin de suivre la marche ascendante des budgets europeens qui ten- dent, avec le svstemedesempruntsinconnus ■ en Chine, a absorber completenieni lerevenu des particuliers, et par suite toiile la richesse publique. 13^ Livraison. (Chine iniodernk.) 13 IM L'UNIVERS. ^gilement afin que les revenus de I Etat piissent line base solide et fixe, au lieu d'etre sujets a toiite la mobilite et a toute rincertittidf dft I'lmpol par t^te , et afin aii.-si de dimintierles nhus noni- breux auxquels donnait lieu I'impot de capitation, livr^ en qnelque sorte a la discretion dcs agents du niinistere des finances. L'inipot foncier, ainsi etabli , etait en m^nie temps pour les posses- seurs des terres une sorte de redevance on de ferniage fixe envers I'Etat, a un taux tres-modere ,' conime on pent le voir dans la colonne ou nous avons donne les chiffres proportionnels rela- tifs de rimpot foncier en argent par hectare. Pour que ces chiffres represen- tassent la proportion relative reelle de I'impot foncier pour une contenance donnee, il faudrait que la valeur pro- portionnelle de la derniere colonne , ou figure pour neuf provinces un impot foncier en nature, y filt comprise ; ce que nous n'avons pas fait, parce que nous ignorons la valeur reelle de cet impot en nature. D'ailleurs, le chiffre propurtionnel reste vrai pour les pro- vinces qui ne payent point dHmpdtsen nature. Quant a Vimpdt sur le sel , impot tres-peu populaire maintenant en Eu- rope, on (Joit etre surpris de le retrou- ver en Chine, etabli comme il existait chez nous avant la revolution de 1790, c'est-a-dire, percu par des fermiers qui donnent a I'Etat un revenu fixe, en pro- fitant, comme on peut le croire, de I'excedant des recettes , ce qui fait que ces fermiers des salines acquierent tou- jours de grandes ricliesses par leur In- dustrie. On pourrait croire que cet impot du sel en Cliine a ete une im- portation europeenne , si on ne savait , par I'histoire de ce grand empire, que, des les premiers temps de la nionar- chie , le sel a He sonmis a une legisla- tion speciale, et que son exploitation , ainsi que son usage , ont ete I'objet d'une constante sollicitude de la part du gouvernement. Pour que les fermiers des salines n'abusent pas trop de leur monopole, le gouvernemenl chinois a etabli pres d'eux des commissaires regulateurs des prix {ti-kiu) qui maintiennent la balance entre les frais de production des fermiers et le prix de vente pour le sel livre a la consommation, laquelle est Tableau SYnoptlqiie de la quantite de terres cultivees et imposees en 1753. PROVINCES. TEKRF.S du peuple imposees. IMI'OTS qu'elles supporlent en argent. IMPOTS EN NATLRE paiile, foin. r. Tchi li Ching-king 2. Chan-toung 3. Chan-si 4. Ho-nan 5. Kiangsou Ci. N'gaii-lioel 7- Kiangsi 8. Fo-kien 9. Tche-kiang 10. Hou pii II Hou-nan 12. Cliensi 13. Kan-sou H. Sse-tcliouan ih. Kuuang-touDg 1 6. Kouang-si 17. Yunnan 18. Koueltcheou Tofaux Terres des colonies militaires Total hiitg. m^ou e5-,191 8T 25,2^3 21 970,054 07 329,586 21 722,820 36 689,884 /|5 338,120 92 479,207 62 128,270 87 159,787 70 565,913 49 312,287 98 252,371 03 177,8.'51 33 459,146 67 328,832 93 87,400 60 69,499 80 26,691 76 7,081,142 88 259,416 80 7,340,559 68 2,411,286 38,110 3,346,257 2,970,266 3,303,080 3,371,334 1,688,000 1,879,810 1,177,899 2,812,449 1,108,153 1,163,063 1,530,907 257.723 659,075 1,257,286 382,597 153,750 100,156 "2976ir,20r 503,557 3^,114,758^ M. 101,229 76,206 507,680 169,246 248,865 255,201 845,2'i8 899,632 108,453 1,130,481 286,554 277,641 168,453 53,476 14,329 348,095 130,375 230,848 154,590 8,406, 422 373 botlfs. 94,404 5,051,174 8,406,795 5,145,578 CHINE MODERNE. 195 I enorme dans I'empire , comme peut le faire supposer une population de trois cent soixante millions d'3mes, dont le poisson, dans les provinces niaritimes, et menie dans les autres, qui sont ar- rosees par de nombreux courants d'eau, forme une partie considerable de la sub- sistanc8. Le produit des salines fut, en 1753, de 5,560,540 Hang (44,484,320 fr.) (*) ; et celui des douanes, a la m^me date, fut de 4,324,005 Hang (34,592,040 fr.). Ces produits depassent de beaucoup, le dernier surtout, la somme fixe portee par prevision au Budget des recettes (sommes,^a:^.? de prevision portees sur notre grand Tableau, d'apres V Alma- nack imperial de 1844, et que les re- sultats depassent toujours plus ou moins , ce qui augmente considerable- ment le chiffre general des impots fixes). Les autres droits divers s'ele- verent, a la meme epoque, a 1,052,706 Hang (8,421,648 fr.). Ce chapitre du Budget des recettes se Irouve aug- mente, en 1812, de 150,245 Hang (1,201,960 fr.) seulement. Cette etude que nous venons de faire du Budget des recettes de la Chine, a differentes epoques (dont la derniere est celle del844), d'apres de nombreux documents officiels chinois, n'aura peut- €tre pas beaucoup captive nos lecteurs; mais nous pensons qu'ils n'en auront pas meconnu I'importance ; car ce cote de I'histoire d'une grande nation (**), qui est nee et s'est developpee en quel- que sorte comme sur iine planete iso- lee, pendant plus de quatre mille ans, presente un interet tout particulier, et montre comment I'esprit humain, avec des instruments etdesmoyens divers, ar- rive cependant presque toujours au m^me but.Encontemplantcephenomene,onne peuts'empecher de penser que I'homme, une fois entre dans la carriere de la civilisation, est soumis aux memes lois (*) Hoei-tien, edit, de 1764, K. XV, f° 3. (**) De quel interet ne serait pas pour nous maintenant la connaissauce intime de I'histoire territoriale et financiere des gran- des nations qui ont disparu de la surface de la terre , comme celle des Assyriens , des Me- des, des Bahyloniens, de I'Egypte, et meme de la Grece et de Rome , dont nous ne pos- sedous que des lambeaux ! de developpement progressif qui menent toutes les societes comme a leur insu. Si les limites de cet ouvrage nous i'eussent perrais, nous aurions montre comment la proprieteterritoriale, I'im- pdt foncier et les autres impots se sont etablis successivement en Chine, de- puis le commencement de la monarchie chinoise, c'est-a-dire, depuis plus de quatre mille ans; les modifications, les transformations qu'ils ont subies sous les differentes dynasties qui se sont succede ; on verrait que tons les modes possibles peut-etre de posses- sion et de payements d'impdts ont ete experimentes en Chine, et que le mode actuel , qui s'est degage de tous les au- tres, comme tine resultante rationnelle, parait etre celui qui peut le mieux sa- tisfaire tous les interets. Nous passons maintenant au Budget des depenses. IV. BUDGET DES DEPENiSES (*). Tous les payements et toutes les de- penses qui ont lieupour les besoins de r£tat, se font au poids de rargent(ex- cepte dans certaines circonstances). On s'assure de la quantite d'argent qui est entre pendant I'annee dans le tresor, afinde bien determiner le montantdes sommes qui devront etre conservees dans les caisses provinciales, et de cel- les qui doivent etre expediees a la caisse centrale de Pe-king. C'est au printemps et a I'automne que Ton retribue les ser- vices publics. Dans chaque province, il y a une caisse publique. Chaque annee, au prin- temps et a I'automne, on fait le releve exact de ce qui est conserve en argent dans ces caisses provinciales, et on en fait des bordereaux que Ton envoie an ministere des finances. Celui-ci verifie ce qui est sorti de la caisse et ce qui doit y Tester, apres avoir tenu coiupte des depenses occasionnees par les be- soins du service, a I'exception de la solde de I'armee. Ce qui reste dans les caisses provinciales est ensuite employe selon {'usage prescrit par le ministere des fi- nances. (*) Tai-thsing-hoei-tien, k. XII. 13. 196 L'UNIVERS. Toiifcs les d(''[)pnsps aniuielles sont cl.'issees sous douze litres on chapitres speciaux (jue nous alions cnumerer. Chapithe 1". Frais de culle ou ser- vice des sacrifices et ceremonies publiques {tsi-sse-tchi-khoudn). Dans la capitale, cliaque autel ou tem- ple (*) destine aux sacrUices recoit ses subsides de la Cour des sacrifices {'nH- tc/idng-sse), et cettederniere est sous la direction immediate dii niinistere des rites. Tons les lieux ou sont les torn- beaux des emnereurs et oil Ton offre des sacrifices de riz et de ble dont la va- leur est payee en lictng d'argent, tirent ieurs subsides du ministere des rites sous la dependance et la direction du- quel ils se trouvent Dans chaque pro- vince, les licoig en argent qui sont con- sacres a I'entretien des sacrifices dans les temples et aux autels, sont preleves sur les revenus qui proviennent des im- pots foncier et personnel, et consti- tuent une partie des depenses generales. Si, dans une province, il y a une re- serve de fonds restes sans emploi au chapitre des digues et chaussees (non endomniagees) et a celui des reserves pour les temps de disette et de fanwie, dans cette menie province on conserve, comme argent ou fonds public, celui qui aurait et^ employe aux services spe- cifies, et il est atfecte, dans I'interieur de la province, a constitucr un fonds de secours pour etre utilise dans les annees ou les besoins I'exigent. Voici le tableau de la quotite en ar- gent que chaque province paye pour la branche de service indiquee ci-dessus : lidng. i"" Tchi-li 26,210 Foung-tien 011 Moiikden .... 966 Kirin 98 a*" Chan-toung ii,']'ji Y' Chan-si 15,748 /i" Ho-nan 1 1,140 I a. Tresorerie ge- nerale de Kiang- ning {Nan-king). 6,434 bAdAtSou-tclieou 5,854 6* Kgan-lioel io,a5r 7' Kiang-si i3,oi6 8' Fou-kien io,55o A reporter i ia,o36 (•) Voy. ci-devant, p. 39-40. Report tra,o36 18,004 11,144 10,19a 7,365 393 g*" Tclie-kidng I o" Hoii-pe, . . . 1 1" Hoii-nan 6 20 1 li" Clten-si 1 3" Kan-sou /-// ; Id. en paras 12.495 14" Sse-teliouan 9,823 15'' Kouang-toung i5, 1 1 5 16" Koiiang-si: 1,941 17'" Yun-ndn 5,474 1 8'' Konel-tcheou (*) i 006 Total general 198,694 En francs. . .1,589, 55a Dans chaque province, il v a de I'ar- gent affecte aux sacrifices que Ton offre sur I'autel du Premier cultivateur {Siin- noiing), en meme temps qu'a encoura- ger, a provoquer les ameliorations agri- coles, la culture des champs, par des prix donnes aux mtilleurs produits en grains (**). S'il n ya pas de fonds dispo- nibles dans ces caisses speciales, on y supplee par de I'argent provcnant de I'impot foncier. Le tout est employe selon le besoin. Chapitrk 2. Service de la magistra- ture cantonale, dont les fohctions sont d'enseigner et de faire obser- ver les lois au peuple {i-hien-tchl- khoudn). Ce service se divise en plusieurs bran- ches. II y a 1° Tailocation pour leboire et le manger dans la celebration des U- tes de village; il y a 2" les depenses occasionnees par la confection de man- nequins en baguettes flexibles repre- sentant des bceufs ornes de (Ieurs em- ployes dans les sacrifices du printemps ; il y a 3" les salaires a payer pour les artistes qui gravenl, a des'cpoques de- terminees, les publications des magis- trats cantonaux; enfin il y a 4" le tri- but annuel consacre au maintien de I'ordre dans les villages {soui-koung- f(ing-l). Dans chaque province, il y a un impdt proportionnel annexe inte- (*) ^ compris les frais de mannequins re- presentant des boeufs coiironnes de fleurs, donl on se sert dans les sacrifices dn prin- temps. (**) Kill - thoung- tclti- King- tien-ko-kid, Tai-thsing-lioei-tien, k. XII, 1^ r. CHINE MODERNE. 197 rieur en argent (yin-nei-pien-tching) impose sur les proprietes foncieres, comme aussi un impot direct en nature convert! en argent pour certaines bran- ches de depenses speciales (*). Chaque anuee on en verilie I'einploi. S'il y a un excedant, on en fait la repartition. A. Allocation en argent pour la celebration des fetes de 'village. Provinces : lidng i"-' Tcki-li i,:4'i Moukden 26 2" Clian-toung SSg 3'' Chan-si ^>279 4" Ho-nan 366 5" Ngan-lioe'i 427 6"' Kiang-si 641 7"-' Fo-kien 99 8*= Tche-kiang 577 9" Hou-pe 378 10" Non-nan 368 11" Chen-si 190 12" Kan-sou 67 1 3'' Kouang-louiig 43o 14'^ Kouang-si 5o Total 7,000 B. Depenses en argent des mannequins pour les sacrifices. Provinces: lidng. i'« Tchi-li 4 Moukden i5 2* Chan-si 92 3"= Tche-kiang i8r 4*^ Kouang-toung 534 5^ Yun-ndn 204 Total i,o3o Report 2,804 8<= Fo-kien 336 9« Tche-kiang 700 10" Hou-pe 49^ 11'' Hou-nan 402 1 2" Chen-si 212 13'' Kan-sou 212 14"^ Sse-tchouan SaS i5'' Kouaiig-towig 204 16" Kouang-si 7 j 17'-" Yun-ndn 347 i^" Kouei-tcheou 204 Total 6,522 D. Depenses en argent pour le maintien de Pordre dans les milages. Les provinces de //o-na/i , Chen-si, Sse-tchouan , sont exemptees de cette branche de contribution. Le restant des provinces, d'apres les roles proportion- nels de leurs contributions en argent, deboursent, sous le uom de tribut, koiing (en dehors de I'inipot regulier), les sommes suivantes : Provinces : lidng. 1'" Tchi-li 415; 2" Chan-toung i>227 3*^ Chan-si 759 ia. TresoreiiedeiVfl'«- king 1 3 b. Id. de Sou-tcheou. 755 S*" Kiang-si 271 6^ Fo-kien io3 7'' Tche-kiang 3 1 7 8« Hou-pe 3i8 Hou-nan 4>444 9 c, Frais en argent d' impressions pour les magistratures cantonales. Provinces : lidng. i"-' Tchi-li. : 574 2* Chan-toung 176 3" Chan-si 1,122 4" Ho-nan 170 5" Kiang-sou ii3 6" Ngan-hoei 221 7* Kiang-si 428 A reporter 2,804 i4"-' (*) Autant que Von pent en juger par le lexte , qui pourrail etre plus explicite pour nous , les depenses de ce chapitre ne sont pas prclevees sur les Recettes que nous avons enumeiees precedemment, niais bien sur une espece de budget communal, etabl i de la meme maniere que nos centimes additionnels, ajou- tes pour certains besoins comnjuuaux au principal des contributions foncieres. Kan-sou 28 n'' Kouang-toung, canton de Po-lo. 5 (Le reslant de la province ne paye aucuue laxe extraordi- naire pour cet objet.) 1 2" Kouang-si 3oy 1 3° Kouei-tcheou , canton de Thien- tchou et de'Y'u-king 12 — Le restant de la province donne chaque anneeen argent. i83 En outre, elle paye encore an- nuellement en argent 1^193 Yun-ndn. Chaque notable (ming) de cetf e province paye 1 2 lidng. Le surplus se preud sur Timpot foQcier. Total 10,352 Resume' decs chapitre. '■ Service a ' 7,000 Id. B i,o3o A reporter 8,o3o IM L'UNIVERS. Id. Id. Rcftorl 8,(t3o , 6,5a2 1) io,352 Tolal general ... . 2/1,904 Eurrauc5. . . 199,23a Chapitke 3. Allocation en argent pour la HourrHure et I'enlretien des employes suballernes des diverses administrations et des divers servi- ces publics {foung-chi-tchi-khoudn). Provinces : Hang. 1" Tchi-U at 1,386 iloukden 1 3,6i 3 Klrln r,o5o 2" Clian-toung 145,972 3« Chan-si 1 18,966 4" Ho-nan i3o,833 Tresorerie de Nan-king. ... 57,319 Id. deSou-tcfteou. . . 60, 582 6*-' JNgan-hoei 99,3go 7<= Kiang-si 86,023 a*" Fo-klen 71, 656 9*^^ Tche-kiang 129,970 lo*' Hou-pe 94,880 11'' Hou-naii 84, 552 la" Clien-si 107,744 i3" Kcutsou 94,444 /•/< 4>20i lU" Sse-tcliouan 109,951 iS" Kouang-toung 1 16,757 16*^ Kouang-si 77,360 17" Yiui-ndii 6o,5oo 18" KoueirtcUeou 38,5r4 Total 1,914,978 En francs. 15,319,824 ChjIpitbe 4. Allocation affectee aux examens publics des licencies {klid- tcMng-lchi-khouan) . Les depensps qu'occasionnent les exa- mens publics a la capitale et dans les tirovinces, a la suitedesquels ondelivre es diploines de gradues civils et niili- taires, sont de plusieurs sortes : 1" II y a les frais de route des exanii- nateurs triennaux {tchoii-khao), envoyes de la capitale dans les provinces; 2° II y a les depenses en argent occa- sionnees parl'entrelien de ceux qui sont admis aux examens publics; 3" II y a les depenses occasionnees par la nomination des nouveaux gra- du6s du titre de kiii-jin ; 4MI y a les depenses pour frais de route occasionn^s par les grands exa- mens qui ont lieu a Pe-king; 5" II y a les depenses pour les gradues des bannieres ; 6" II y a les depenses pour les gradues du rang de tsinsse; 7° II y a les depenses pour les bon- nets de gradues. Les frais de route des examinateurs imperiaux sont preleves sur les fonds speciaux de chaque province. Seule- nient, au moment ou ils sortent de Pe- king, le ministere des finances leur fait remettre prealablement a chacun une somme de 200 Hang ou 1,600 fr. line partie des autres depenses est egale- ment supportee par les provinces, soit par I'argent des caisses provinciales, soit a I'aide de budgets speciaux. Chaque gradue recoil avec sa nomi- nation une gratification en argent pour I'indemniser de ses frais de route et do deplacement. Les gradues litteraires du premier rang , les Tsin-sse, recoivent 80 Hang (640 fr.) et une piece d'etoffe pour so faire confectionner un costume de leur grade; les autres gradues inferieurs 30 et 18 Hang. Les provinces donnent aussi des gratifications a leurs gradues. Voici le budget special des provinces pour les examens publics : J'rovinces : lidnq. i'" Pe-ki/iff io,585 Moukdeh 65 2" Chan-toting 2,377 3" Chan-si 2,821 4"^ ^t)-«flM (pour chaque examen). 8,000 5*^ Kiang-nan 12,640 6*-' Kiang-si io,344 Fo-kien 1 2,004 Tche-kiang 11,200 Hou-pe 7,823 Hou-nan ^,697 Chen-si et Kan-sou 10,644 Sse-tchouan 5, 000 Kouang-toung 9,170 Kouang-si 2,5oo Yuii-ndn 9i086 Kouei-tcheou 5,896 Total 125,848 En francs. 1,006,784 7 8« 9" 10® 14" 1 5" 1 6° II est encore plusieurs autres depen- ses relatives aux examens publics des gradues, a leurs frais de route pour se rendre soit au chef-lieu de leur pro- CHINE MODERNE. 199 vince, soit a la capitale, etque nous ne reproduisons pas ici. Ces depenses sont prelevees, soit surlesfonds des caisses provinciales, soit sur I'impot fonder, soit enfin sur des budgets locaux. C^APiTBE 5. Solde et entretien de Farmee {hiang-khienrtchi-khouan). Les traitements des officiers des Iniit I)annieres tartares en garnison a Pe- king sont payes par ie tresorier local des huit bannieres. Mais, a quelques exceptions pres, la solde de la troupe en argent et en na- ture estentierenient supportee par I'im- pot foncier. En voici la repartition par provinces pour les garnisons ou can- tonnements stables (tou-ying) : Provinces : argent. Hang ; rlz, c/ii. I" Trhi-li S9«,904 2" Chan-toung 296,289 I7,i87 Cantonnciuenlssur Icfleuve Jaime i^ Chan-si i° Ho-nan a" Tresorerie de KianQ-ning 54,696 460,6(14 272,194 82,046 429,802 67,SG« 29,993 3,6 IS 6a,30; id. AcSotttcheou ■ Caiilonneraent sur Ic fleuve Jaune M4.^;.;6 4,ig.> id. surle grandcanal . 79.774 7,38i! 6" Nnun-hoel les.soi 26,6i8 7" Kiang-si 258,624 j(o,i44 8" Fo-kien i,28i,379 01,493 9" Tchekiang 62j,6I7 i38,'JI5 ID' HoU-pe 398,703 80,897 n" Unu-nan 493,183 103,314 12" Chen-si 668,467 S2,440 IT," Kan-sou 1,772,303 5ii,208 I-!i 12;;, 888 11° Sse-tchonun 780,329 i3,!>3e I J" Koiiang-toiing i,lij,777 2H.3.iO 16° Kouan'gsi 401.999 84,916 17" Yun-ndn 76J,i84 148,004 IS" Kouei-tcheou 606.211 127,480 Totaux . 12,089,150 1,673,627 Les provinces de Chen-si et de Kan- sou doivent fournir en outre , la pre- miere 135,621 bottes de paille, et la deuxierae, 3,000,731 bottes de fourra- ges. Voici maintenant la solde des troupes placees dans des campements de sur- veillance ou de aiirete. Provinces : argent, Hang; viz, chi. 1" Tchi-li 445,289 47,182 Moxikden 381,334 Kirin 372,773 He-loting-kiang 267.842 i' Chan-toung {') 103,049 11, nu 3" Chan-si 242,9.-.9 40,089 4" Ho-nan loe.HO "ii" A' iang-sou, Van-lt'ing . . . 239,623 73037 id. King-keou . . . 77,623 38,104 A reporter. . . 2,436,836 212,131 (*) Dans ceUe province, comme dans le.s suivantes, ce sont les cantons ou se trouvent les campements qui payent ces sommes et ces deurees sur leurs contributions loncieres. Report .... 2,436,856 912,131 6° FO-kicn 120,312 37,438 7" Tche-kiung )9i,i48 103,792 B" IfnU-pC 274,004 .W o" Chen-si, Si-Ngan i-r.,313 91,434 10" Kan-sou 789,S94 186,190 l-li 317.369 221,910 11° Sse-trhoiian . » is» 3io 12" Kouang-toung 168,702 88,211 TotaUX .... 8,133,794 9«6,3{m La province de Chen-si fournit en outre 3, .516,300 boltes de fourrages; celle de Kan-sou, pays d'Ouronmoutsi et de Toia-fan, 778,135 bottes. Recapitulation de la solde de I'armee. t" Pour les garnison.s . 2° Pour les campements. l3,0S9,t<;0 1,673,627 8,133,794 066,339 17.244,944 2,610,186 En reduisant ces nombres en valeurs de notre mounaie, on a : 1° Pour 17,244,341 ?«all<7 .... 157,939,38* fr- 2" Pour 2.610 186 /i^cto/. de grains, a 12 fr. riiectolitre . . . . 3i.e82,'i.-2 Total gen(?rat On voit qu'en Chine, comme chez la plupart des nations europeennes, I'ar- mee absorbe la plus forte partie de rimpot. Si la valeur des fourrages et autres prestations en nature, non com- prises dans lecliiffreci-dessus, yetaient ajoutees, ainsi que Ie traitement de I'e- tat-major, qui n'y est egaleinent pas compris , ce cliifffe pour I'armee s'ele- verait a plus de detix cents milliom de francs. Chapitre 6. Service des pastes et courriers du gouvernement ( yi- tch dn-tchi-kkoucin) . Ce service , loin d'etre , comme en France et dans la plupart des Etats eu- ropeens, une source d'importantes re- cettes (*), est tres-onereux aux contri- buables chinois. (*) En Europe, Ie service des posies est un service mixte qui tieiit de V administration l>ubHque et de Viuduslrie privce. Le.s recetles oblenues pour Ie transport fort utile des let- tres et autres objetsdes particuliers couvrent, et au dela, les depenses du service ; de sorte que ce service n'est plus une charge pour I'Etat. II arrive meme qu'en France les re- cettes de ce service depassent les depenses de plus de vingt millions. En Chine, I'clablis- seinent des fiostcs par couniers , ne servant qu'aii gouveriiemeut el non aux particuliers , ne donne lieu qu'a des depenses qui sont a la charge des contribuables, 200 L'UNIVERS. Les depenses occnsionnees par ce service sout prelevees siir les loiids des caisses provinciales provenant de i'im- pot foncier. Cliaque aiiiiee, les depenses en argent sont ordonnnijcees par le tre- sorier ou receveur general de chnque province, reuni au grand juge. Le bor- dereau detaille des depenses, redige par eux, est envoye au ininistere de la guerre, dans la dependance duquel est placee radniinistration des courriers deposte, qui sontordinairement des ca- valiers tartares, et renvoye ensuile ap- prouve simplement, ou portant les mo- dilicalions que Ton a trouve convenable d'y faire. La repartition de ces charges n'est pas la nieme pour cliaque province. Comme cette repartition ne presente pour nous aucun interct, nous nous bornerons ici a en presenter le chiffre general pour tout rempire, y conipris la Mongolie et les autres dependances. Les dipcnsc!) en arpent sniit cic. cii riz- Plus tnfarine tie froment 1,9JI,79I lidiuj 22,877 VM !>ri,uo8 botles 8,657 kin. en fourrapcs en/arinetfe/i Ce qui peut (Jquivaloir !x pen pres & ig,ooo,ooo franc!. Chapitbe 7. .-Allocation de subsides aux gradues ou licencies {lin-chen- tchi-khouan). II existedans chaque canton, arron- dissement et departenient de cliaque province, des licencies quin'ont pas en- core pu obtenird'emploi et qui sont sou- vent dans la g^ne; les mandarins des circonscriptions adniinistratives dans iesquelles ils setrouvent, dressent une liste de ces gradues, qu'ils envoient au Cliancelier iitleraire dc la province. Celui-ci en fail part au gouverneur ou lieutenaiit-gouverneur, qui les fait ins- crire sur le registre des allocations prevues de cette nature. Voici le budget de cette allocation annuelle par provinces i"Tclti-li. . Aloukden . Kirirt .... a*^ Clian-toiin, Hung. n,i77 3i6 8 g 22,38:) 8,1 63 3" Chan- 4*" Ho-nan 8^o35 5" Klang-sou 1 7,904 6' Nga,.-ltoei 6,3-20 f}" Kiang-si 4, ig^ , A reporter 78,5o5 Report 78,5o5 8" Fo-klen 4,424 <)'■ Telle- kiang 0,368 lo"' Hou-pe 4,000 1 1 '■ Iluti-nan 2,927 12'-' Chen-si 7,^3i 1 3'" Kan-sou 4, (0() J 4" Konang-toung 5,323 i5" Kouang-si 3,864 16'' Sse-tchouan 9,600 17'- Yun-nan 5, 006 18'-' Kunci-lchcoii 795 Total 122,252 Plus en hectolitres de riz . . . 7,239 Ce qui cquivaut en lout a environ 1,064,884 francs. Chapitbe S. Secours aux paiivres et aux etahlissements (jdneraux de hienfaisance et de charite publique {chang-siue-tchi'khoudn). Dans chaque canton, arrondissenient, departenient des provinces constituees, il y a des fils devoues a leurs pere et mere, des lilies chastes, des fenimes d'une conduite irreprocliable, en ineine temps que des vieillards des deux sexes qui ont atteint leur centieme anuee. Les gouverneurs et les lieutenants-gou- verneurs les foht connaitre publique- ment par des proclamations elogieuses, et sollicitent pour eux de I'empereur des marques distinctives, c'est-a-dire, des lettres patenteshonorifiques du sou- verain (tsing-pido). Chaque personne nommce recoit une gratilication de Irente limn/ tn. argent; les autres re- coivcnt du riz, et meme quelquefois de certaines etoffes. Les fonds, ainsi que les denrees employes a cet usage, sont preleves sur le produit direct des con- tributions foncieres. Le budget annuel de ces depenses n'est pas lixe. Les per- sonnes qui dans leur localite sont comme delaissees et dans le besoin , les lettres avances en age et denues de tout, les veuves, les pauvres ct les orphelins, les inalades et les inlirmes , ceux qui n'ont personne |)0ur les reclamer, une fois leur etatd'indigence et de besoin connu de I'aulorite, sont inscrits sur la liste des indigents qui re(;oivent des aliments et des secours dans les etahlissements publics de hienfaisance {yamj-tsrijouen). Si les personnes sont trop nombreuses CHINE MODERNE. 201 pour etre toutes inscrites sur les rcgis- tres de ces etablissements, elles recoi- veiit egalement des secours et des ali- ments , mais en dehors de ces etablis- sements speciaux. C'est sur I'impot foncier que sont prelevees directement les depenses en argent et eu nature oc- casionnees par ces etablissements de bienfaisance. Eu outre, dans les grandes villes, il y a des salies d'asile (pou-tsi-thdng), des hospices pour les 01'phelins ou en- fants abandonnes {yo-ijing-thdng). La charite publique contribue a I'entretien de ces hospices ; les mandarins locaux sont charges de la solliciter au besoin, et d' V consjicrer des fonds qui resteraient en reserve ou qui auraieut une destina- tion moins urgente. Chaque annee, le bordereau des depenses occasionnees par ces etablissements de bienfaisance est envoye au ministere des linances, qui le verilie. Voici le tableau de la quantite d'ar- fjent et de riz donnt^s annuellement aux pauvres etaux orphelins, portes ou non portes sur les registres des pauvres de chaque province : Provinces : Udug, chi 1" Tchi U 29,884 l,S83 1,943 •fo C/ian-toung 5,167 *" Ho-nan 7,855 o,ni4 K" Tresoreric dc A'an-kiii'i . . . 1,240 id. lie Sou-tc/wou . . . ij,7r>!i ■ 5,,il6 Canton do TiOiiny-iiiiiK/ . . •i5 a" 2,24G 70 ic,l5a id- pour les salies d'asile. soiuiiic animellelixe - 087 id. pour les hospices des orphelins 408 8" Fo-hien id. pour les salies d'asile et les hospices d'or- 84,590 plielins, par an . . 2,820 0' Tchc-Uiuiiq : 27,H2U — District (le } «-/oMtfil . . 420 — pour les hospices d'orphc- liiis 1,100 l(l'^ Uou-pe <;,lil6 — pour les salies d'asile . . 1,300 La conlribution iinnucllc pour les liospices d'orplieltos non deteruiinec 11" IJou-iian 2,847 970 — pour les sallesd'asilcparan 4,000 10,734 4,0G7 H" Sse-tchonan. I.a depense n'est pas detcrmlnee. En Idi2, clle s elo\a pnnrcctle destination a S,808 La depense pour les hospices iiCst pas egaleiuent dctermi- nee. tJ° Kouanij-totiiig Pour deux hospices, I'uii d'asile, 18,2,5 J I'autre d'orphclins l,o70 Le surplus se prel6ve sur les re- .4 reporter. . . . 209,644 55,822 Report. ." • . . 209,«44 venus des douanes et sur les droits etablis sur les navires d'I'Uirope, doni une portion est alfi'ctee a cet usage — Pour deux hospices, I'un d'indigents et I'autrc d'orphc- lins du departeinentde Tchao- king et du canton de Kieou- kiang 2,«i2 ic" Kouang-si 1,052 17° i'un-niiii s,05o — I'our deux hospices , I'un d'indigents , I'autrc d'orphc- lins 1,280 i8» Kouei-tcheou. Les depenses an- nuellcs u<: sont pas fixees. Le chef-lieu dela province, Kouei- yang-foti , consacrc annuelle- ment a un hospice d'orphclins 215 Totanx .... 217.921 ■.l,7SO Cc qui equivaut en frnnrs n 2.l^;n.^88 Ce sont la les credits ouverts sur les contributions foncieres pour chaque province; mais il arrive toujours que ces credits sont depasses, et quelquefois de beaucoup, comme on le voit par le bordereau de ces allocations de la 17'= annee Kia-king (1812), dans laqueile elles se sont elevees a 97,327 liaiuj , 8,285,000 tsien, et 45,547 hectolitres de riz; ce qui porte les depenses de ce chapitre a environ 8,153,260 yrfiww. Chapitbe 9. Service de I'entretien et de la reparation des ponts et chaus- sees {sieou-chea-tchi-khoudn). II n'y a point de budget fixe pour les depenses annuelles de ce service. Les digues et les chaussees des lacs et ri- vieres de chaque province sont placees sous I'inspection d'ingenieurs qui veil- lent il leur conservation. Les devis ap- prouves, les sommes necessaires a I'en- tretien ou aux reparations sont ordon- nancees par le tresorier provincial. Les mandarins civils et les mandarins mili- taires concourent, chacun en ce qui les concerne, a I'execution des travaux. Chaque annee, on enumere ce qu'ils ont coiJte en argent. Nous renvoyons au Ministere des travaux publics pour de plus amples details sur ce chapitre. Chapftre 10. Depenses diverses reu- nies {tsal-pdn-tchi-khoudn) . Voici I'enumeration en argent de ce que chaque province paye pour certains produits locaux envoyes a I'einpereur : i'"^' Clian-loung, tendous de boeiif, cire jauue , couleiirs jaunes {Jiodng- 'if^ L'UNIVERS. Ida) pour ^^"^ a' Chan-si, Iiaclics ea acier, pa- pier en feuilles, laffelas de tliff/'ren- tes series , jwur 9»^5'v 3' Uo-nan, etoffcs de colon, ten- dons de ba-iifs, cire jaune, pour. . . 3,o63 4'' Kiaiig-sou, feuilles d'or, pro- duils resiueiix de I'arbre tlioimg , alun, etc, pour 64,408 5" jy'gan-fioei , chanvre blanc, cuivre jaune fondu, liaches en acier , vcrniillou povir le pinceau, pour 4ii'>7 6'' Klaiig-si, vermilion pour ecrire, produils resinenx de I'arbre thoiiiig, pour 4>7i9 7*^ Fo-kien, papier, ecritoires, cuivre jaune fondu, pour 7j765 8" Tclit'kiang, cire jaune , cui- vre jaune fondu, produiu ri.sineux, the de differentes especes , vert et jaune, differentes soieries. Le borde- reau annuel de ccs dcpcnscs u'est pas fixe : en 1812, les depenscs ve- riliees pour ce chapilre ont etede. . i,i5i 9" Hou-pe, cire blanche, pour. . 83 1 lo'^ Hou-nan, cire blanche,*plants d'arbres, pour • 10,624 11*^ Kouang-toiing , bois de san- tal, indigo, diverges especes d'arbres, ^laiu , pour 10,670 i2*i'tt«-«fl«,lapis-lazuli,elc.,pour 3,370 Total en Hang i a 1,044 En francs. 9()8,35a Chapitbe 11. Allocation pour les ma- nufactures imperiales {tchi-tsdo-tchi- khouan). Les niatiufactures imperiales de Kiang-ning ou Nan-king, de Sou- tcheou et de Hang-tcheou, dans le Kiang-nan, regoivent des allocations sur le Budget des defenses. Chaque annee, les departenients des Finances, des Travaux publics, et I'lntendance de la maison iinperiale , chacun en ce qui les concerne, s'occupent de ces ma- nufactures qui fabriquent des etoffes de sole epaisses et fines de premiere qualite, pour I'usage de la cour et des mandarins. Chaque annee on regie d'avance le bud- get de depenses de ces manufactures. Hang; riz hect. Cclul de la iDanufscturc de Plan- king est rcplt! fi *S,SSS 10,000 Celiil rte la manoructurc dc Sou- tcheon :\ 61,»00 9,768 « rliil dc la mannrnctiire do Hang- Ivhfou n'csl pas lixc; la depensc en itiafutdc 3a,i«3 ii.oto Tolain .... i4o,omt ao,87 7 ^quivalant en Irancs k . . 1,«90,»B Chapitre 12. Traitementsdes vianda- rins civils et militaii-es ; allocations auxetablissemcnts d'instruclion pu- blique {fcoimg-lien-tchi-khouan). Ce chapitre est Tun des plus impor- tants du budget ciiinois. Les mandarins de Pe-king, mantchous et chinois, sont payes sur" les fonds publics {kofcng -Jet), ou pnr differentes caisses, selon les fonc- tions qu'ils remplissent. Quant aux mandarins civils des provinces, leiirs traitemenls en nature sont preleves sur les fonds tenus en reserve ou sans em- ploi par ces provinces (*). Le traitement en argent des manda- rins militaires en garnison est une de- pense publique qui est preievee sur les contributions foncieres- en argent ; le traitement en nature de ces memes inandarins, ainsi que celui de ceux qui sont dans les cantonneinents, converti en argent, est pave sur les produits des salines ou des marchandises diverses. On distingue soigneusement ces paye- ments de diverges natures; a la fin'de I'annee, on en fait des bordereaux qui sontexpedies au ministere des finances. Tout mandarin en fonctioiis a un trai- tement correspondant, et on deduit (kheou) sur ce traitement I'equivalent des absences qu'ils peuvent faire. Depenses puhliqiies pour les colleges principaux de chaque province. Chacun de ces colleges recoit des dons en argent de I'empereur ; les autres de- penses se prelevent sur les fonds pu- blics des provinces. Chaque annee, on fait le bordereau de ces depenses, qui est expedie au ministere des finances. A. Traitemenls en argent des mandarins dc I'ordre citil {went-cfn-jdng-lien'jin (**). Provinces: lidng. !'• Tchi-li 135,836 Moukden 6,576 Kir'tn 856 A reporter 143,268 (*) C'est rinterprelation que nous avons crn ponvoir donner a I'expression composce hao-sien, (pie nous n'avons fenconlree dans aucun dictioiinairc eui'0|>i'eu ou chinois. (*') Litleraleincnl : argent destine a entrc- tcnir ou alimenler lajiurete, fincorriiptibilite ( lien ) des magistrals ou Jonctionnaires ci- vils. CHINE MODERNE. 203 Report 143,268 Clian-loung 278,016 Chan-si ai i,i5o Hoimii 102,554 Klaiig-sou a35,o45 6*^ Ngan-hoei 109,953 7*^ Klang-si i83,i4o 8*^ Fo-kien i5r,024 g'' Tche-kiang 127,213 10^ Hou-pe 171,000 11'' Hou-nan 140,160 12" Cheii'si 141,062 13" Kan-sou i3i,i7o 14" Sse-tcJiouan 195,960 iS'' Kouang-toung i6r,456 16"' Kouang-si 100, 175 17" Yun-ndn 191,828 18" Koiiei-lcheou 86,27 1 Total 2,861,445 B. Tra'ttements en argent cles mandarins de I'ordre militaire en garnison [ loii-ying- wuii-tchi-ydng-lien-yin (*) ]. Provinces: lidng. i""" Tchi-U 1 14,162 2*^ Chan-toung 42,296 3" Chan-si 5o,754 4^ Ho-nan 26,060 5*^ Kiang-sou 89,648 6® Ngan-hoei 20,958 7" Kiang-si 3 1,986 \ 8« Fo-kien 114, 162 9" Tche-kiang 85,823 10'' Hou-pe 52,634 1 1** Hou-ndn 65,322 12" Chen-si 67,074 13" Kan-sou 149,594 /-//■ X 1,352 14® Sse-tchouan .... 85,5o8 i5" Kouang-toung 126,246 i6'-" Kouang-si 5r,758 17" Yun-ndn 80,592 18° Kouei-tchcou 87,718 Total X, 35373^ c. Trailements en argent des mandarins de I'ordre militaire en canlonncmcnts [tchoii- fdng-jang-lien-jm (**) ]. Ces trailements , pour les douze provinces seulement (***) qui ont des canlonnements niilitaires, s'elevent a 5 1,47 1 lidng. (*) Meme observation que precedemment. (**) Memo observation. (**') Cos provinces sout : Tchi-li , Chan- toung , Chan-si, Ho-nan .^ Kiang-sou, Fo- kien, Tche-kiang, Hou-pe, Chen-si, Kan-sou, Sse-tcfiouan, Kouang-toung. D. Depenses en argent de chaque province pour les traitements des mandarins mill- taires en garnison , nreleves sur les impots fanciers (loii-ying-koung-fel-yin). A I'exception des provinces dc Kiang- sou et de Kiang-si, qui n'ont pas -a payer un contingent determine, et qui envoient chaque annee au irfnistere le bordereau de leurs depenses, les autres provinces parent annueilenientles som- nies suivantes : Provinces. lidny. i"^" Tchi-U i5,i2i Lorsque I'annee a un mois intercalaire, on yajoute 1,260 2" Chan-toung 12,000 3" Chan-si 9,544 Supplement pour I'annee du mois inlercalaire 274 4** Ho-nan 2,000 5" Ngan-hoei i>723 6'- Fo-kien 23,869 7" Tche-kiang. 19,600 8" Hou-pe 9,323 9* Hou-nan 12,198 I o" Chen-si 1 3,2 1 8 ri" Kan-sou 48,273 12" Sse-tchouan 33,ooo 1 3" Kouang-toung 26,1 77 14" Kouang-si 8,544 1 5" Yun-ndn 26,959 16" Kouei-tcheou i2,o5o Total 275,033 E. Salaires des mandarins militaires en can- tonnements{lou-y£ng-tchou-fdng-plng-ting). Provinces : Hang. 1"" Tchi-li 37,092 Moukden 56,497 Kirin 14,61 1 He-loung-kiang, Saghalien-oula . 9,057 2" Chan-toung 10,471 3''' Chan-si 16,000 4" Ho-nan 6,388 5" Kiang-sou 27,546 6" Ngan-hoei 4,000 7" Kiang-si 4,800 8" Fo-kien 42,000 9" Tclte-kiang 10,000 10" Hou-pe 17,240 11" Hou-nan 7,000 12* Chen-si 12,800 i3'' Kan-sou 25, 000 I-li 8,000 14" Sse-tchouan 20,000 1 5"' Kouang-toung 36,599 A reporter 370, lor 204 L'UNIVERS. Report 370,101 287,358,288 francs de notre monnaie. i6"' Kouang-si 8,000 Les Defenses fixes des 1 2 chapitres du 17" Yun-ndn 17.^43 budget chinois que nous venons d'cnu- 18" Kouei-tcheou "»846 merer, nes'elevent qu'a 255,313,612 fr.; Total 408,190 ce qui laisse un excedant de tiecettes „ „, — ^ , de 32,044,670 francs. Get excedant est .. Mlocations en argent aux colleges {c/iou- ga^s doute absorbe par des services rouen.ku,g.fei.ym). indetemiines (connne ceux du 9" chap.) prooineei: hang, oudont I'enonciation n'est pas comprise Chan-tienou Pe-hng fourhcoU ^^^^ ,^, ,,„^ggt g^,,-^^, j^^^,^- ^^\, ,^g • I" TcS (sou budget" ;p^cial' n'est ^^%^"''^ ^^ ^l"^ nous venons de faire con- pas fixe) naitre pour la premiere fois eu hurope. Denarleojent de Tching-te noar L'extreme modicite de ce budget, son college (i'-Zmo) .?.,,,.,. i aSa comparativement a I'etendue de I'em- Moukden !!!!'.!!!! 3)060 P^*"® ^^ ^ sou immense population, pent ^ a" CItang-toitng, pour son college ' parailre phenomenale aux yeux des ' principal 873 lecteurs europeens ; mais nous devons 3' Chan-si, id i.oSg repeter id que ce budget ne presente 4" Ho-ndn, id 2,400 que les recettes et les depenses fixes ; ", 5' Kiaitg-sou, id 1,000 que I'on doit ajouter aux premieres , &''^Ngan-ttoei,id 1,440 provenant uniquenient des imp6ts et s« ^""I^'^'' •'] *'""° droits divers, les produits des do- c^'ii' ■', i»948 maines de I'empereur, des mines de 9^ Tcue.kiang id 1,260 metaux precieux, dont I'Etat s'est re- Jr S'£; ij; :::::::::::;••, s 'r.^ •' 'r"°p"' ' '''r '','•' r ''"" , jc Chen-si id fi^H "^^^ ajouter aux secondes, les depenses iH*^ Knn.tn'ii wi ^'o , ^c la uiaison de I'Empereur, etc., non ij ivan-svu, lU I.ooi • J ^ - - »• r^ 14" Sse-tchouan. id 836 comprises dans notre enumeration. En i5« Aotta/jn-wo/^n-.'pourV colldges', tenant compte de ces diverses omis- y compiis celui de Macao. . .' 6,933 sions, le budget de la Chine n'en sera 16* Kouang-si, pour 2 colleges i goS P^s nioins d'un example peu contagieux 17" Yun-ndn, pour i college 1,484 poi"" l^s gouvernements europeens. 18'' Kouei-tchcou , id 702 Nous trouvons dans les memes Sta- Total 35 335 tuts (*) la preuve que le budget en argent — L— de la Chine ne s'eloigne pas beaucoup RECAriTULATioir GENERALE DES DEPENSES dcs chiffrcs cnonccs cl-dessiis. Nous y ,, „. ., „ ' En francs, voyons quc la 1 7"^ anucc A;/a-A:m«'"« hircntdc 4o,i36,ia» /jan? ousao.oss.jws/r. •• - Se^r^iceVeVplntskcham- "'"'*•* cettes <**) «,n.i«.6«o /.«»(, o.. 4o.».a.»8o />-. fees » » ,, . 11- 100 » Depenses diverses. . . . »c8,r,82 Mais cettc graudc disproportion cutre »« " Tra&'enu'al^v^^^^ *''"'''' Ic budget de I'empire chiuois, qui rcu- ^'lY ■ . , (erme \)lus de t7-ois cent soixante viil- A.Mandannsde I ordre ^^^^^^_^^ f.^^^^ d'liabitants, et celui de la France, " «w/-v;..v„'''' *** I'ordre ' par exemple , qui n'en compte que F. Colleges principaux. jtBu.nso tvente-cmq millions, surprendra moms Total general des depenses Dies. . ^.i^ r.i^cia si I'ou rellechit quc la Cliine u'a point Nousavons vu precedemment(p.l89) ^^ "^^^^ publique, tandis que nous en que le u.ontant total des i.np6s fixes VT ""^ ^i?T"^ ''*"*^ P'vr T en argent s'elevait, pour I'annee 1844 , "^^ '^''^ ''''^ trente-cmq millions de a la somnie de 35,919,788 lidng (de (*) Tai-thsing-hoci-iien , i.. Xll , {" igv". la vaieur de 8 irancs chacun), ou a (••) Lete.xteueporie que 4,832,86a /i««^. CHINE MODERNE. 205 francs, et que nos frais de regie, de perception des inipdts et autres reve- nus s'elevent a plus (\o cent vingt-cinq millions, tandis qu'en Chine ces frais de regie n'existent pas, ies impdts in- directs etant la pluport percus et verses grain itement par Ies fermiefs generaux, ies chefs municipaux et des employes subalternes salaries; ce qui fait deja pour ces deux categories (dette publique et frais de regie) une difference de quatre cent soixante millions I II est vrai qu'il faut ajouter a cet im- pot en argent I'impot en nature, dont une partie *st expediee a Pe-king (voir le Tableau, p. 1 89), et dont I'autre, beau- coup plus considerable, est retenue dans Ies greniers publics des provinces. Cet imp6t en nature, qui s'eleve a plus de 50,000,000 d'hectolitres, equivaut a en- viron 000,000,000 de francs. Nous en donnons I'enumeration ci-apres. Toutes Ies depenses publique s , en Chine, sont classees sous quatre titres differents,et Ies bordereauxqui lesrepre- .sentent sont envoyes aux gou verneurs ou lieutenants -gouverneurs des provinces 2ui y apposent leur sceau et Ies expe- ient ensuite au ministere des finances. Apres avoir ete controles et verifies dans Tune des quatorze directiojis du mi- nistere, ces bordereaux sont retournes aux payeurs generaux des provinces. Greniers publics. La Chine etant un pays expose aux grandes calamites physiques des inondations qui detrui- sent souvent en un instant Ies produits de la terre destines a nourrir une im- mense population, on a eu recours, poiu' prevenir en partie ces calamites, a retablissement de greniers publics, dissemines dans Ies provinces et places sous la direction du ministere des fi- nances, lis sont divises en cinq classes, de meme que Ies caisses publiques. La l'^ classe comprend Ies greniers destines a maintenir fegalite desprix {tchdng-ping-thsdng). Voici leur repar- tition et le montant de leurs approvi- sionnements permanents : Prnvinces. _ _ cJii ou hectolit. i"^ Tc/ii-li, grains divers 2,197,524 Moulxden, riz 520,000 a*" Clian-toung, grains divers . . 2,9.45,300 3* Chan-si, id 2,273,032 A reporter 7,935,856 Report 7,935,856 40 Ilo-nan , grains clivers 2,7-^5,999 5® Kiang-sou, id i,53!>,ooo d" Ngan-lioe'i, riz 947,000 7" Kiang-si, grains divei'S .... 1,320,713 8'^ Fo-kien, id 2,962,559 9* Tclie-kiang, id 2,926,561 10*^ Hou-pe, id 1,955,433 II* Hon-nan, id 1,487,712 12'' Citen-si, id 3,9o3,oi t 1^^ Kan-sou, id 6,63o,428 14" Sse-tcliouan, id 2,887,917 i5'' Kouang-toitng,\A 2,860,730 i6e Koiiang-si, id 1,27;',, 388 17* Yiin-ndn, id 836,674 18'' Kouei-tcheou, id 2,000,009 Total 43, 192,990 La 2« classe comprend Ies greniers de prevoyance {tju-pi-thsdng). Voici I'enumeration des provinces ou il s'en trouve , avec le chiffre de leurs appro- visionnements : hectolitres. I '« Ho-nan, grains divers 356, 000 riz et autres grains . 697,000 2" Ngan-fioei, grains divers. . . . 200,000 3" Sse-tcliouan, id 800,000 4" Kouei-tcheou, id 10,000 Total 2,063,000 La 3^ classe comprend Ies greniers des bannieres tartares {khithsdng). hectoiures. if«Ceux de la province tarlare de Moukden renferment, en riz, 200,000 2*^ Ceiix de Kirin, en grains div. . 206,845 3^ Ceiix de Helong-kiang ou Sa- ghalien-oula, en grains div. 260,000 Id. en legumes 70,000 Total 736,845 La 4« classe comprend Ies greniers consacres au genie des productions de la terre (sse-thsdng). II y a de ces greniers dans foutes Ies provinces pour subvenir aux sacrifices que Ton fait au genie des productions de la terre. La 5« classe comprend Ies greniers des rites ou des cultes {i-thsdng). lis sont confondus avec Ies precedents. La comptabilite de ces greniers pu- blics est tenue regulierement. A la fin de chaque annee, on fait un releve de Ventree et de la sortie des denrees que ron envoie au ministere des finances. L'enorme quantite de grains de toute nature tenus en reserve dans Ies gre- 306 L'UNIVERS. niers publics dc la Chine, est distribute au peuple dans las arandes calamites qui lui arrivent, soit par des inonda- tious, comnie nous i'avons dit ci-des- sus; soit par des incendies provenant du feu du del ou de toute autre cause; soit dans le temps de disette ou de grande cberte des vivres, etc. Ce sont les mandarins locaux qui sont charges de constater les besoins du peuple et de lui faire obtenir ces secours en na- ture. Les 14 DIRECTIONS DU MliMSTERE DES FiiHANCES. L'esprit methodiqueet compasse des Chinois leur a fait porter dans le departement des linances plus d'ordre niinutieux que de vues d'ensem- ble; ils out divise ce departement en qua- torze grandes Directions, qui forment comme autant de ministeres particu- liers. Voici I'enumeration de ces qua- torze Directions, avec I'indication de leurs attributions principales (*) : 1" Direction du Kidng-ndn. Elle comprend dans ses attributions tout ce qui coucerne les recettes et les depenses en argent et en nature de la tresorerie generale du Kidng-ndn, ainsi que les manufactures iniperiales deSou-tcheou; elle est aussi chargee de verifier les comptes financiers de toutes les pro- vinces de I'enipire, etc. 2° Direction du Tche-kidng. Elle comprend dans ses attributions les re- cettes et les depenses en argent et en nature de la tresorerie generale du Tche-kidng, ainsi que les manufactures imperiales de cette province. C'est cette direction qui est chargee du recense- ment general de la population et de la complabilite des greniers publics. 3" Direction du Kidng-si. Elle a dans ses attributions la tresorerie ge- nerale du Kidng-si, et la solde en ar- gent et en nature de I'armee dans tou- tes les provinces. 4° Direction du Fo-kien. YA\e. com- prend dans ses attributions les deux tresoreries generates du Fo-kien et de Tchi-li,ei ladouane maritime deJ7«e;i- t4dn{**), etc., etc. (*) Tai-thsing.ftoei-llcn , k. XIII. (*•) Thien-tsin, sur le Pe-ho, oil abordent les navire,s europecDs des ainbassades (|ui se reiident a Pe-king (v. p. 48), produisit en 5° Direction du floukouang. Elle comprend dans ses attributions les tre- soreries du Hou-pe et du Hou-nan, ainsi que le reglement des excedants des impots pour loutes les provinces. 6° Direction du Chan-toung, Elle comprend dans ses attributions la tre- sorerie du Chantoung, avec la comp- tabilite des trois provinces orientales, celle du traitcment en argent et en na- ture des mandarins des huit banuieres tartares, et celle du produit des sali- nes (* ). 7° Direction du Chan-si. Elle com- prend dans ses attributions ta tresorerie du Chan-si et I'apurement des comptes de recettes et de depenses annuelles de chaque province (**). 8° Direction du Ilo-nan. Elle com- prend dans ses attributions la trisore- rie du llo-nan, avec les subsides en nature et en argent a la tribu mongole des Tchakhar ( voy. precedemment p. 4). 9° Direction du Chen-si. Elle com- prend dans ses attributions les treso- reries du Chan-si et de Kan-sou, avec les depenses occasionnees par les nou- velles limites de la derniere de ces pro- vinces; la culture et le commerce du the (***) , ainsi que les finances de la capitale, Pe-king. 1 808 une somme delerminee de 40,000 Hang, donl 26,000 fluent expedies au miiiistere des finances , et 14,000 retenus et depenses pour les besoins de la province. (Voy. Tai-thsing- hoei-tieii , k. XIII , f° 5.) C'est aiissi a celte direction qu'apparlient la complabilite des allocations de toutes ser- ies qui sont failes |aux hannieies tarlares , aux monasteresbouddhiques, aux Lamas, etc. (*) Les 5/n/«/5 font connaitre tons iesnuils salins en exploitation par provinces, depar- lements, arrondissements et cantons, en ine- nie temps que la f/tianlile de sel (pii doit en clre extraite par annee. (K. XIII, f" i i-i 7.) (*') Voir ci-devant (p. 204) le resuilat du riglemcnt definitif, doiine ici par les Staliils, des recettes %\. depenses pour I'annee 1812, d'apres lequel les recettes des imputsfonciers, dufermage des douaiies, etc., etc., s'eievent a 4o,i36,i94Aa»^. Les depenses, a 35, 107, 534 Ditfereuce en plus sur les__ recettes 5,oa8,G6o Hang. (***) Oa trouve ici , dans les Statuts, des CHINE MODERNE. 20^ 10° Direction du Sse-tchoiian. Elle comprend dans ses attributions la tre- sorerie du Sse-tchouan et les revenus des douanes, etc. 1 1° Direction du Kouangdoung. Elle comprend dans ses attributions la tre- sorcriede Kouangtoung, avec I'admi- nistration des huit bannieres tartares. 12° Direction du Konang-si. Elle comprend dans ses attributions la tre- sorerie du Kouang-si, avec I'adminis- tration des mines de cuivre, d'etain, A^ argent, d'o?" et de/er. Nous revien- drons aussi sur les faits consignes ici dans les Statuts, et qui sont de la plus haute importance pour connaitre les ressources metailiques de I'empire chi- nois , dont on n'a eu jusqu'ici en Eu- rope qu'une bien imparfaite idee. 13° Direction du Yun-ndn. Elle com- prend dans ses attributions latresorerie du Yun-ndn, avec le produit des mines, les transports des grains par eau, etc., qui sont tres-detaillesdans les Statuts. 14" Direction de Kouet-tcheou. Elle comprend dans ses attributions la ire- sorerie de Kouei-tcheou , les produits des taxes aux passages des frontieres pour I'importation et I'exportation des objets de commerce, et les tributs en nature payes par les provinces de I'em- pire. Outre ces quatorze grandes direc- tions, il y a encore quelques bureaux speciaux dependant du ministere des finances. Nous croyons inutile de les mentionner ici. Nous nous sommes un peu trop etendu peut-etre sur I'organisation et les attri- butions du ministere des finances de I'empire chinois ; mais nous avons pense que tout ce qui se rattachait a la popu- lation, a la culture des terres , aux impdts, en un mot, d,\x\ forces produc- tires d'uu grand peuple et aux produits de ce meme peuple, n'etait pas moins dignes d'inter^t que les autres cotes de sa civilisation, et que, puisque jus- qu'ici tous les sinologues europeens, officiels et autres, se sont bornesla plu- delails fort curieux sur rimportance de la culture cl du commerce du the en Chine , aiiiji que sur les traitements alloues aux membres de la famille imperiale et aux grands fonctionnaires de TEtat. Nous y reviendrons ailleurs. part du temps a se copier les uns les autres, ou a ne nous donner que des notions tres-superflcielles des choses les moins serieuses, il serait assez pi- quant que celui que Ton s'est plu (sur le temoignage de quelque individu peu desinteresse dans la question) a ne con- siderer que comme un amateur en phi- lologie orientalje, fiit le premier en Eu- rope qui fit connaitre, par des docu- ments nouveaux et complets, le cote le plus serieux de la civilisation chinoise ! Nous ne craignons pas d'avancer que Ton trouvera plus de documents nou- veaux sur la Chine dans notre ouvrage que dans tous ceux qui ont ete publics jusqu'a ce jour sur le meme sujet par des Europeens. Ceci soit dit sans nie- connaitre leurs merites et sans aucune espece d'orgueil de notre part. Nous nous en rapportons d'ailleurs complete- ment a la justice distributive de I ave- nir. 3" MINISTERE DES BITES. Li-poii (*). Ce ministere, compose comme le pre- cedent (p. 1G4), comprend dans ses attri- butions tout ce qui concerne I'examen et I'observation des cinq rites dans I'empire, a(in d'aider I'empereur dans radiniiiistration des populations qui lui sont conOees. Les reglements relatifs a la preseance dans les ceremonies publiques et aux distinctions litteraires; les prescriptions canoniques pour le maintien de la pu- rete, de la sincerite des lois morales; les dispositions a prendre pour la re- ception des tributs , et pour entretenir des relations avec les etrangers; le ce- remonial a suivre dans les banquets et autres fetes publiques, sont du ressort du ministere des rites. Quand les membres qui composent ce ministere sont appeles par leurs chefs de directions a deliberer sur les affai- res de leur departement, ces affaires, si elles sont importantes, sont transmises au conseil du cabinet; si elles sont peu importantes, elles sont expediees par eux pour I'instruction du public. Les rites, ou les prescriptions pour (*) rot-//«iffg'-/joet-ft'e«,k. XlX-XXXn. 208 L'UNIVERS. diriger la conduite de I'liomme dans toutcs ies conditions socialcs ct dans toutes Ies circonstances do. In vie, ont ile. de tout temps la grande affaire des Chinois. Us sont pour eux lexpression en qiielque sorte complete de la civili- sation, ct ils ont tenement penetre dans Jeurs ma'urs, qu'ils sont devenus pour eux comme unc seconde nature. Quel- aue jugement que Ton en ait, on pent ire que la grande importance qu'ils y ont tou jours attachee a etc une des prin- cipales "causes de la duree, et on pour- rait ajouter de rimmuabilite de ce peu- ple comme nation, depuis plus dequa- tre mille ans, tandis que toutes Ies autres nations se transformaient ou dis- paraissaient de la surface de la terre ! Le code des Rites est maintenant di- vise par Ies Chinois en cinq grandes sections ou classes, de la nianiere sui- vante (*) : i" Ki^-ll, « Rites d'heureux auspices, au nomhrede 123; 2° Kid-li, « Rites de joie, de satis- faction , de contentement , au nombre de74; 3" Kiun-lt^ « Rites militaires , au nombre de 18; 4° PUirt}, « Rites d'hospitalite, au nombre de 20 ; .S" IIi6u)ig-ll, « Rites lugubres, au nombre de 15. La premiere section, qui est consi- der^e comme la plus iniportante, parce qu'elle comprena Ies sacrifices a toutes Ies puissances reelles ou fictives de la nature, honorees par Ies Chinois, est aussi la plus etendue et celle qui a le caracterele plus religieux. L'idee predominante des Chinois en accomplissant Ies ceremonies prescrites dans celte premiere section, c'est qu'ils se rendent lavorables Ies puissances na- lurelles ou iiiiaginaires en I'honneur desquelles lesdites ceremonies sont ce- !lcbrees. Les liites de la seconde section sont Ies formules du ceremonial observe dans les fetes publiques celebrces a I'occasion f>; et Tal-tltsing-toung-li , edit, de i73<). Les Rites At\?i troisieme section com- prennent le ceremonial. observe dans les preparatifs de guerre, les revues de troupes, etc. Les Rit^s de la quatrieme section comprcnnent le ceremonial observe dans les relations avec les etats etrangers, la presentation des tributs et la reception des envoyes ou ambassadeurs. Les Rites AoAdi cinquieme section sont relatifs aux ceremonies funebres. LES QUATRE DIRECTIONS DU MIMS- TERE DES RITES. Le Minisfere des Riles est divise en quatre i^randes directions. La premiere, que Ton nomme Direction de I'etiqnette ou du ceremonial (l-chi-t/wig-lt-ss^) (*), dirige tout ce qui concerne le ceremo- nial observe a la cour dans les circons- tances ordinaires et extraordinaires ; les rapports des menibres de la famille imperiale eutre eux, et avec les minis- tres, ainsi qu'avec les autres fonction- naires publics; la matiere, la forme et la coupe des vetements; les formules de salutation dans les receptions, etc. Elle a aussi dans ses attributions la surveillance de tous les etablissements d'education |)ublique, et le reglement des exaniens et des promotions des let- tres. La seconde Direction, nominee Di- rection des sacrifices ( ts44si-tching-li- ssi) (**), a dans ses attributions tout ce qui concerne la celebration des sacri- fices. Les plus imposants, ceux que Ton nomme les grands sacrifices, sont : ce- lui du solstice d'hiver, celebre en Thon- neur du del auguste empereur su- preme [hodng'thien-chdng-ti) sur la collineronde; et celui du solstice d'ete., celebre en I'honneur de la Terre au- guste {Jiodng-ti) sur le lac qiiadrangu- laire. Les plusimportants, apresces sa- crifices de premier ordre, sont ceux de second ordre que I'on celebre en Thon- neur des premiers empereurs de la Chine, du premier laboureur, et du premier eteveur de vers a soie ; du pre- mier instituteur des hommes {Khoung- tseu ou Confucius). Tous les autres sont ranges dans une mSme classe de troi- (*) Tai-llislng-hoeUien, k.XX-XXVII. (**) ll>., k. XXVIII-XXX. CHINE MODERNE. 209 si^me ordre, au nombre desquels ou re- marque les ceremonies pratiquees lors des eclipses de soleil et de lune. Cette Direction a aussi dans ses attributions les rites funeraires et les reglements concernant le deuil, depuis ceux qui doivent etre pratiques a la mort des eiupereurs, jusqu'a ceux qui coacernent le dernier des siijets. La troisienie Direction, nominee Di- rection des hdtes {tc/ioii khe thsing li ss^) (*), regie tout ce qui a rapport aux relations avec les Etats etrangers, letirs envoyes ordinaires et extraordinaires, la presentation des tributs et I'investi- ture des princes tribiitaires. Elle regie aussi I'epoque des payements des tributs de toute nature supportes par quekjues provinces, Titineraire que doivent sui- vre les missions ou ambassades etran- geres, et les presents qui ieur sont don- nes en echange par I'empereur. ETATS ET BOYAUMES ETRANGERS CON- SIDERES COMME TEIBUTAIBES PAR LES CHINOIS. Cette partie des Statuts n'est pas la moinsciirieu.se et la moins interessante pour les Europeens (**). Les royaunies etrangers, dit le texte, qui envoient des tributs a la cour, sont : 1° la Coree; 2° les ties Lieou- khieou ; 3° le Toung-king ; 4° la Co- chinchine; S'^ Siam; 6° les iles Pbilip- pines (***); 7° la Hollande- (****) (//o- la7i); S°Jva; et 9° les royaumes de I'O- cean occidental (*****}, cru de I'Europe. C) Ta'i-thsing-hoel- t'len , k. XXXI. (**) La Direction en question est compo- see de tiois directeurs : ttn Mantchou , tin Mongol ct UH Chinois; de deux sous-diiec- teurs : tm membre de la famille imperiale, et un Mank-hou ; et de deux secretaires : un Mantchou et un Chinois. (***) « I-e Conimeiitaire dit que ce fut pen- dant la 4' annee Youiig-tclung (1726) que ces iles conimencerent a porter des tributs ■a rempereiir de la Cliine. » (****) " On nonime aussi les habitants de ce royaume, ditle Coinmentaire, etrangers aux clievcux rouges. Ce fut dans la 10'' aniice Chutitchl (r653) qu'ils cominencerent a fiiire parvenir leurs tributs. La 3* annee Kliaiig-ld (1C64), lis (irent irruption k Ilia-men (Ainoy) avec une grande arniee. » (**«**) « Ces royaumes, dit le Commentaire, 14® Licraison. (Chine moderns Les autres royaumes etrangers avec lesquels I'empire cbinois. a entretenu des relations commercialese selon les Statuts, sont fort nombreux. Nous y avons reconnu le Japon, Cambodje, la Suede, le Daneniark et la France. « Ce dernier royaume, dit le texte cbinois, est situe au sud-ouest, dans I'Ocean, apres les ties de Liu-sonng (Lucon). Presque toute la population qui babite les iles est une population franque. 11 y a aussi beaiicoup de naturels de ce pays qui babitent lAIacao, avec Tautori- sation du gouvernement cbinois. Chaque annee, ils payeut une certaine retribu- tion en argent, pour continuer d'y se- journer; maisil Ieur est interditdepene- trer dans I'interieur des provinces. Du royaume de France a la Cliine, il y a par mer une distance d'environ cinquante mille li (ou cinq mille lieues). » EEGLEMENT CONCERNANT LES AMBAS- SADEURS ETRANGERS BT LES TKI- BUTS. L'epoque de la presentation du tribut it etre fi.xee a I'avance (*), ainsi que L . doit etre sont le Portugal (Po-eur/i-lou-lia-li-ja) , VUaiie (l-ta-/i-ja), et rAni;!eli!rre {Ting-Zd-ti koue). I.a if annee Khang-ld (1670), le roi du premier de ces royaumes, A-foung-sou (Alphoiise VI), commenca a ouvrir des re- lations, in envoyant un ami)assadeur avec une lettfe de cii-aiice et des tributs. En 1727, le roi Jou-ut.s ne [leuvcnl avoir plus de trois vai&seaux, et rliaque vaisseau ne doit pas avoir plus de cent lioiumes d'equi- page. L'ainbassaJeur en premier el les gens lie sa suite, qui se rcndeul a la capilale, ne doivenl pas exceder le nombre de vingt-dcux. Le ri'staut des bommes de sa suite est leteuu a la froutiere. » (T. tks. It. t., k. XXXI, f° 4.) (*•*) Les ambassadeurs vcnant de Siam, des possessions bollandaises el des Elats euro- pcens, se fcront reconnaitre par le lieule- natit gouwrneur de Kuuang-toung, et par le gouverneur des deux Kouang. Connno destination, il pr^sente ses lettres de crennce (*) (/.«'« tihipiao thsieou), et remet ses presents ou tributs {ta khl lioumj we) (**). c'est une faveur signalce dont les Elats clran- gers doivent etre reconnaissanis, que celle d'apporter des tributs, les ambassadeurs doi- venl demaiider a cliacun desdits gouverueur et lieutenant gouverncur I'autorisation de poursuivre leur route, en leur remettant une copie de leur leltre de creance origiuairc pour etre cnvoyee an miuistcre des Rites, afin qu'il y soil statue sur sou contemi. Les ambassadeurs tribulaires des royaumes elrangers une fois arrives a Pe-king, il en esl donue avis an surinlendant des douanes i^Tlisoihig-wen-men-klen-tou), qui verilie les bagages et an Ires objets appartenaut a I'am- bassadeur et a sa suite. (') ■< L'ambassadeur tributairc(/CoH//^-we) arrive a Pe-king presenle d'abord ses leltres de creance an ministere des Rites. L'an)bas- sadeiu" tributaire, avec toutes les personnes ofticielles de sa suite, revelus des habits de cotir ou de cercmonie de leur pays, parlent de riiolel de Tambassade pour se reudre au niinisiere, moment les degres, puis font tons- une geuuflexioa (/.7(fv»«). L'ambassadeur en premier tiinl a la main ses leltres de creance qu'il remet au chef du bureau general des inlcrpretcs {Sse-i-koi'inn-klung) , lequel , apres en avoir fait une version , la remet a I'in- tendaiU de Tbotel du minislere des Rites. L'ambassadeur en premier et tonte sa suite acconqilissent le ceremonial des trois genu- flexions el dcS nenf prostevnements {lu'ng-sdn- klioitei kichu-khcbu-H). La ceremonie acrom- plie, I'inlendant de I'bolel remet la leltre de creance a rambassadeur, et le reconduit ainsi que sa suite. « Le second jour est celui de la presentation des objels apportes en tribut. Ces objets sout Iransporles, converts d'etoffes a franges d'or, a I'botel du conseil des ministres. De I'iiolel du conseil des ministres (^Nci-ko), ou ils out ele reeus, ils sont repris. ct transpor- tes de Jiouveau a I'endroit ou ils doivenl elre dclinitivement prcsontes a rempeieur, aprcs les avoir etales aux regards dn public. « Du minislere des Kites, ranil)as.sadeur el sa suile sonl accompagnes a I'holel de Tiu- tendauce de la cour {Net- won-fou), ou I'am- bassadeiu' est prcsente aux princes du sang , aiixcreur coincide avec un jourheureux, tel que Je Jour de la naissance de i'empereur, \e pre- mier jour de L'an, le solstice d'hiver, etc. Ou voit par la que les delais pour, obtenir leur audience de i'empereur, donl se sont plaints plusieurs anibassadeurs europeens , delais qu'ils altribuaient a de tout autres causes, se trouvent ici expliques, '**) Les Statuts cnuniercnt tons les pre- ils qu'il est d'usage d'accorder en retour i ambassadeurs de la Coree, du Toung- ■;•■, de la Cochinchine , etc.; ces presents aoiit brillanis et nombreux. lis consistent principalement en pieces d'etoi'fes de sole de toute espece, en arcs, en fleches , eu car- quois d'or, en fourrures, etc. I tion la plus entiere, leur seront accor- dees pendant tout le temps de leur s^- jour et de leur voyage dans I'empire. Voila le texte des Stat iifs concernant les ambassadeurs etrangers porteurs de tributs a Teinpereur de la Chine, tel que I'a redige le ministere des Rites. Comme le sujet n'est pas sans iniportatice pour les relations a venir des Etats europeens avec la Chine, et qu'aucun ecrivain ou sinologue de I'Europe n'a encore donne des eclaircissements a ce sujet, nous croyons devoir reproduire ici la tra- duction complete du Cereynonial usite en ces circonstances, que nous avons publiee en 1843 dans la Revue de I'O- rient. TRADUCTION DU CEREMONIAL CHI- NOIS RELATIF AUX VISITEURS ET AMBASSADEURS ETRANGERS ( P/W- (*)■ Dans le Rituel ou Ceremonial de I'ancienne dynastie des Tcheou (de 134 a 266 avant notre ere), les homines qui yenaient de loin devaient observer le ceremonial qui est prescrit aux visi- teurs et ambassadeurs etrangers. Tout ce qui etait situe en dehors des neuf provinces {**)■, on le considerait coinme etant encore e?i dedans des frontieres. Chacune de ces populations (conside- rees ainsi comme dependantes et vassa- les) faisait part a sa suzeraine (la Chine) de ce qu'elle avait de plus rare et de plus precieux. Des I'instant que I'instruction mo- rale des fatnilles et de I'fitat fut ache- vee, la doctrine concernant les barbares des quatre cotes {sse-i) , qui viennent comme botes ou ambassadeurs {pin) de tous les royaumes maritimes et conti- nentaux situes au dela des confins de la Chine, fut confiee au ministere des Rites {Ll-poii). Plus de cent ans sesont ecoules {***) depuis que ce ministere (*) Tu-e du Tai-ths'ing-tlioung-U, ou Cere- monial de la dynastic regnante , public l,i 21^ annce Khien-lonng, 1766 de notre ei-e; edition imperiale. Le Ceremonial ci-dessus fait partie du xliu" livre. (**) La Chine etait alors divisee vn ncuf provinces (kieou-tctieou). (*•*) Ce texte ajant ete redige la premiere 14. 312 L'UNIVERS. re?neiisemeiit examine, et mis en har- monic avec le sujet ; on en retrancha et on y cliangea ce qui parut necessaire pour constituer convenablement le ce- remonial des hdtes ou visiteiirs etran- gers, ainsi que la mauiere la plus con- venable pour les fonctionnaires publics, les lettres et le peuple, de se visiter en- tre eux. Le ceremonial special , dont il est ici question, est expose dans les chapi- tres suivants. § 1 . Ceremonial concernant les tributs apportes a la cour. « Voici le ceremonial concernant les tributs (koting) apportes a la cour. Tous les royaumes dependants ou vassaux, situ^s dans les quatre regions barbares (des quatre cotes de I'empire chinois), a des epoques determinees pour payer leurs tributs, enverront leurs ambassa- deurs presenter leurs lettres decreance et des presents, consistant en produc- tions du pays. « Pour se rendre a la cour, dans la capitale de I'empire, les envoyes tribu- taires {koung-sse) commencent par franchir la frontiere. Si ce sont des en- voyes de . la Coree, deux delegues du ministere des Rites, instruits dans la langue et les usages des Coreens, iront au-devant d'eux, et les accompagneront a la ville imperiale de Cljing-king ou Moukden. « Si ce sont des envoyes du Tounquin, des lies Lieou-khieou,'d'Ava, de Siam, delaUollande, des lies Philippines ou de la Cocljinchine, on surveillera at- tentivement les routes par lesquelles passeront les tributs de tous ces royau- mes. Le gouverucur ou le lieutenant- gouverneur de la province frontiere d^pficbera un mandarin, employe assis- tant, connu par ses connaissances va- annee Khien-loung (1736), retablissement de la dynnstic remontait dt-ja alors a cent vingt ans. Et c'est tuujotirs a rctai>lissenieut d'une nouvellc dynastie que Ton revise toules les l()is Pt les rcplements de celle iiui I'a nre- cedee. riees, pour aller a leur rencontre jus- qu'a la frontiere. Si ce sont des envoyes de rocean occidental (I'Europe), I'un des directeurs de rintendance de la maison '\mpena\e {?iei-woii-fou) , avec Tun des Occidentaux ou Kuropeens qui remplissent les fonctions d'astronomes a I'observatoire imperial de Pe-king, iront au-devant des ambassadeurs jus- qu'a Kouang-tnung (Canton). lis seront munis I'un et Taiitre de mandats sur les etnblissements de postes du gouverne- ment par ofi les envoyes doivent passer pour traverser le pays. Les chefs de ces ^tablissements seront obliges de tenir dans leurs campemcnts et leurs hotel- leries, a la disposition des envoyes, des provisions de bouche et autres, des chars, des bateliers et des chevaux. Pen- dant la marche de chaque journee, par terre ou par eau, a chaque station mi- litaire que Ton rencontrera, les of'ficiers et les soldats preposes a la garde des envoyes se remplaceront successive- ment, jusqu'a I'arrivee sur le territoire de la ville capitale de Pe-king. Le mi- nistere des Rites {Li-poii) determinera a I'avance tout ce qui devra concerner la marche de I'ambassade. Le ministere des travaux publics {KoHng-poii) aura soin de preparer pour elle un logement convenabie, et decore pour sa destina- tion. II aura soin aussi de kii procurer tous les meubles et ustensiles propres a son usage, ainsi que le bois a brtller et le charbon dont elle pourra avoir besoin. Le ministere des llnances illou- poii) la pourvoira de mais ou ble dinde, de fourrages et de plantes legu- mineuses. L'Intendance des approvi- sionnements de la maison imperiale {Koud?ig-toU'Sse) la pourvoira de bes- tiaux, de poissons, de vins ou liqueurs spiritueuses, de sirops, d'herbes pota- gere.*, -de fruits, et de tout ce qui de- pend de cette administration. Le com- mandant en chef des troupes de Pe-king et des dignitaires du quatrieme rang de la chambre des interpretes pour les quatre points cardinaux {Sse-i-koiian), ainsi que de la cour de I'etiquctte du ^a\vt\s [noting -Ml- sse , feront et pres- criront soigneusemeut tout ce qui de- fiendra de leur ressort, de pres ou de oin; ilsentreront dans I'hotel de I'am- bassade, pour, selon les circonslances, CHINE MODERNE. 213 surveiller et contenir leurs hommes et la foule, aussi bien que pour leur dis- tribuer egalement le boire et le manger. «VoiIa pour la reception des arrivants. § 2. Presentation des lettres de creance^ des tributs et des productions du pays. « Les ambassadeurs tributaires se rendent a I'hotel qui leur est destine, et apres quelques jours de repos ils se mu- nissent des produits de leur pays, ainsi que de leurs lettres de creance ; et, ac- compagnes des officiers de leur suite, des secretaires et attaches de I'ambas- sade, chacun d'eux revetu des habits de cour de leur royaume, ils se rendent au palais pour attendre la presentation des lettres de creance. L'un des inaitres des ceremonies du ministere des Rites placera la table destinee a recevoir les let- tres decreance, au milieu de la salle dans laquelle les officiers du palais se reuni- ront, revfitus de leurs habits de cour ou de celui de leur dignite. Conformement aux dispositions prises et a I'avis qui leur sera donne, les ambassadeurs tri- butaires s'avanceront ensuite jusque dans la cour publique, en entrant par la porte de come de gauche ; et toute leur suite se rangera a leur gauche, en se tenant reverencieusement debout. Le premier de I'ambassade, qui doit presenter respectueusement les lettres de creance, precede toute la deputa- tion; le second de I'ambassade le s^uit immediatement ; tous les fonctionnai- res de la suite viennent apres, L'un des vice-presidents du ministere des Rites sort de I'interieur et se rend pres de la table, au cote gauche de laquelle il rests debout. Deux maitresdes ceremo- nies du meme ministere, deux herauts d'armes ou huissiers de la cour d'eti- quette du palais , se placeront separe- ment au midi des colonnades de droite et de gauche, Revetu completement de ses habits de cour, le grand marechal {king) du palais montera le premier dans la salle, et se tiendra debout, a droite de la colonnade de gauche. Ce heraut d'armes, elevant la voix , appor- tera les lettres de creance. Deux offi- ciers de Tintendance des botes etran- gers introduiroat rambassadeur tribu- taire, en lui faisant monter les degres pour se rendre dans la salle , oii il res- tera debout ; I'ambassadeur en second le suivra, et se tiendra debout derriere, a quelque distance; les autres attaches de I'ambassade se rangeront a la suite, en se tenant egalement debout. « Le heraut criera : « Agenoiiillez- vous ! « (Jihouei). — L'ambassadeur iri- Jbutaire et toute sa suite s'agenouille- ront. — Le heraut criera : « Prenez vos lettres de creance ! » {tsie piao). — L'ambassadeur en premier saisira la lettrede creance. — Le grand marechal du palais la prendra respectueusement de ses mains, pour la remettre a l'un des vice-presidents du ministere des Rites. Ce vice-president recevra la let- tre de creance, la placera droit au mi- lieu d'une table ou plateau de bois, et retournera vers le trone. — Le heraut criera successivement : « Prosternez- vous ! (kheou) ; — relevez-vous ! » (hing). — L'ambassadeur en premier et toute sa suite accompliront le ceremonial des trois agenouillements et des neufpros- ternements (*), et , s'etant releves , les officiers de I'intendance des botes etran- gers les reconduiront ; le grand mare- chal du palais, conformement a I'ordre de ses fonctions, les accompagnera jus- qu'a leur sortie. Les maitres des cere- monies du ministere des Rites porte- ront la lettre de creance au (jonseil prive (nei-kho), ou ils attendront I'or- dre que Sa Majeste imperiale fera trans- mettreau ministere des Rites, relative- ment a la destination et a I'usage qui devra etre fait des objets apportes par I'ambassade. «^'oila ce qui concerne la presenta- tion des lettres de creance, des tributs et des productions du pays. § 3. Audience solennelle de Vem- pereur. « La ceremonie de la presentation des lettres de creance de la part des am- bassadeurs tributaires etant terminee, ceux-ci sont conduits reverencieuse- ment dans la grande cour du jjalais. L'empereur , revetu de ses habits de cour ordinaires, descend dans la grande (*) On s'agcnouille trois fois, et on frappe la tene du fiont trois fois a cliaque agenouil- leiiaent. 314 L'UNIVERS. salle d'audience de la suprdme Con- corde (*), oil tous les riiiiiistres ct les grands fonctiounaires de I'Ktat se r('ui- niront pour accomnlir les ceremonies prescrites. Ces ceremonies terminees, ]es officiers de I'intendance des botes etrangers introduiront I'ambassadeur trihutaire, avec tous les officiers de sa suite. P^irvenus a I'extremite occideii- tale du vestibule de vermilion , les fonctions des officiers de I'intendance des botes etrangers cessent. Les he- rauts du palais sont avertis, et se pre- sentent pour faire executer le ceremo- nial prescrit. lis crient : « La faveur imperiale vous permet de vous assooir! — Ja faveur imperiale vous accorde du the! » — Selon qu'il est con\ enable alors (**), et si ce n'est pas un jour de reception rituellement reconnue, le mi- nistere des Rites delibere et fixe le jour de la reception officielle. II en est fait {>art a I'empereur, qui est prie de vou- oir bien accorder cette audience. Le grand niarechal du palais imperial pre- pare tout pour la niremonie en dounant les ordres necessaires, et en prevenant I'ambassadeur tributaire, avec ses in- terpretes, de se preparer, par des repe- titions, a executer le ceremonial pres- crit. « Le jour de I'audicnce arrive, I'ani- bassadeur tributaire , conformement aux dispositions prises, vStu des habits ofliciels ou publics {kottng-fou) de son Eays, les interpretes revetus de leurs abits accessoires ( d'interpretes ) , se rendent a I'exterieyr de la porte du pa- lais. ou ils attendeiit avec respect qu'on les introduise. « L'empereur, vfitu de ses habits ordi- naires {tchdngfou) (*"*), se rend alors h la salle d'audience, oCi se trouvent (*) Voir ci-devant p. 12, et le plan de Pe-king, ainsi que deuj^ vues de cetle salle d'audience, pi. 5 et 6. (") "Voyez, pour plus d'explication , le Kia-li , ou les Rites domestiques , dans le mt^me Ceremonial general, liv. xvit. {Note des Edit, citlnois.) C***) Les' vilements extraordiiiaircs sont reserves pour les ceremonies e.xlraordiuaires relnliveinent a I'empereur, comnie les sa- crilices au ciel el a la terre , les ceremonies en 1 honneur de Confucius, des ancetres, etc. reunis les grands officiers du palais et la garde imperiale , commandee a cet effet. Les grands officiers du palais et la garde imperiale sont ranges debout a droite et a gauche, selon I'usage cons- tant et habituel. L'un des presidents (*) du ministere des Rites , rev^tu de ses habits de cour cxtraordinaires, a dra- gons brodes, entre en conduisaut I'am- bassadeur tributaire. Les interpretes entrent a la suite. Arrives a Toccident du vestibule de vermilion, ils accom- plissent le ceremonial des trois age- nouillements et des neiif prosterne- merits. Ce ceremonial etant accompli, on conduit I'ambassadeur vers la salle d'audience, en lui faisant monter les degres par le cote occidental (**). Arri- ve a I'exterieur de la porte de la salle ou du pavilion du trone, il s'agenouiUe {khoue'i). L'empereur daigne alors faire connaitre son auguste volenti, et il in- terroge (I'ambassadeur) par des paroles bienveillantes et gracieuses. « Le president du ministere des Rites recoit les questions, et les transmet; les interpretes les traduisent, et les expli- quent a I'ambassadeur tributaire. L'am- bnssadeur tributaire y repond; les in- terpretes traduisent ses paroles; le pre- sident du ministere des Rites les rend a I'empereur. Ce ceremonial termine, on se leve; on dirige I'ambassadeur, en le faisant descendre du cote occiden- tal. Etant sorti , on le reconduit ; et s'il veut attendre, on lui procure le di- vertissement du spectacle. Voila le cere- monial de cette journee. « Lorsque I'empereur se rend a la salle d'audience, il est accompagne de la garde imperiale, comme il a ete dit precedemment. Les premiers ministres (*) II y a toujours en Chine deux pre- sidents d'un ministere ou d'un tribunal, i'un chinois et I'autre tarlare. (**) Pour bien comprendre cette descrip- tion, il faiit se rappeler que le palais in)pc- rial de Pe-Ling, comme d'ailleurs tous les grands edifices chinois, ne consistc pas eu un corps simple ou complexe de hatimenis, mais en baliments ou pavilions sepan's, dont chacun a sa destination particuliere, et aux- quels on arrive ordinaircnient par plusirnrs rampes ou escaliers en plein vent, qui font face ordinairemenl aux quatre points cardi- naux. CHINE MODERNE. 215 appel^s a deliberer sur les affaires du gouvernement , avec les commandants des hiiit bannieres , tons revetus de leurs habits de coiir extraordinnires, a dragons brodes, entrant dans la salle d'audience , et prennent place sur les coles en se tenant debout. Le presi- dent du ministere des Rites conduit I'ambassadeur tributaire, lequei, arrive a I'occident du vestibule de vermilion, acconiplit le ceremonial des trots age- nouillements et des neuf prosterne- ments. Lorsqu'il s'est releve, on le con- duit en le faisant monter a la salle d'au- dience par le cote occidental. 11 entre dans la salle d'audience par la porte de droits, et se tient debout a I'extremite de la file des premiers ministres d'Etat de I'ailedroite. Les interpretes entreat a la suite. Des aliments sont places derriere eux. « L'empereur ayant accorde la faveur de s"asseoir, les commandants supe- rieurs de la garde imperiale, les grauds officiersdu palais, les premiers minis- tres d'Etat appeles aux deliberations du conseil, les generaux commandant en chef des huit bannieres, les generaux en second , le president du iiiinistere des Rites, s'approchent du trone, de- vant lequei ils font un prosternement ; puis ils s'assoieni en ordre sur des sie- ges qui leur sont destines. L'ambassa- deur tributaire les suit ; il s'agenouille, se prosterne^ puis s'assiod : c'est alors que la faveur imperiale accorde le the. Le premier echauson pourle the le pre- sentc a l'empereur : toute rassemblee se met a genoux et se prostenie. Les gardes du palais font le tour de la" salle en presentant le the aux premiers mi- nistres et ci I'ambassadeur tributaire. Tons s'agenouillent en recevant ce the, et font un prosternement; puis ils se rassoient. Le the etant bu , ils s'age- nouillent de nouveau, et font un pros- ternement comme en commeiicant. « L'empereur daigne manifester alors ses volontes (litt. fait descendre ses ordres), en faisant (a I'ambassadeur) des questions pleines d'amenite et de bien-^ veillance. L'ambassa.leiu* tributaire s'a- genouille(A;/jowe«),et prete I'oreille avec attention , afin de pouvoir repondre a Sa Majeste. Le president du ministere des Rites recueille toutes les questions faites par Tempereur, et les transmet (a I'ambassadeur). Les interpretes tra- duisent les paroles de I'un etde I'autre, comme il a ete dit precedemment. » Le ceremonial termine , le presi- dent du ministere des Rites reconduit I'ambassadeur tributaire jusqu'au de- hors du palais. Arrives au scLiretariat de la cour, le president recoit commu- nication des ordres de l'empereur, et des faveurs accordees par lui a I'ambassa- deur tributaire. La collation terminee dans la salle destinee a cet usage, le grand marechal du palais reconuuit I'ambassadeur, en se conformant au3^ dispositions prescrites. " Apres quelques jours de repos, les etrangers sont invites a se rendre en dehors de la porte du sud pour remer- cier l'empereur des faveurs qu'il leur a accordees. Unhuissierde lachambre de I'etiquette de la cour les introduit par series. Les envoyes tributaires, ar- rives a I'occident du vestibule de ver- milion, le visage tourne vers le nord, accompliront le ceremonial des trois agenouillements et des neuf prosterne- ments, selon qu'il est prescrit; puis ils s'en retourneront. « Voila ce qui concerne I'audience so- lennelle de l'empereur. § 4. Remise des presents par l'empe- reur. « Le ceremonial concernant les tri- buts apportes a la cour ayant ete ac- compli, le referendaire du ministere des Rites demande que des dons soient conferes aux rois vassaux (qui ont en- voye la deputation), et qu'en meme temps des faveurs speciales soient ac- cordees aux ambassadeurs tributaires, ainsi qu'aux attaches de I'ambassade et a toutes les personnes de la suite : en consequence, il oblient a ce sujet un or- dre de I'erapereur pour faire transpor- ter par chaque surintendant special tous les objets qui devront ^tre offerts (dans le local destine a cet usage); et, au jour final (au jour ou I'ambassade prendra conge), les surinteiulants ayant tout dispose selon I'usage prescrit, la dis- tribution des presents et des faveurs accordes par l'empereur se fera a gaa- che de la rue exterieure de la porte nie- ridionale. Les peaux , les etoffes de 316 L'UNIVERS. sole unie, les toilfis, les pieces de taffe- tas, les ynetaux hlancs, sont disposes en ordre sur une table; les chevaux sont rnnpes dans une salle, ainsi que les sel les, les renes, et tout ce qui concer- ne leur liarnaoliement (*). Le grand ma- rechal du palais, revetu de ses habits de cour, est present. Conformement aux dispositions prises, I'ambassadeur tributaire, avcc tous les attaches de sa suite, chacun revetu des habits de cour de leur pays, passent par la porte du long repos de I'orient, par la porte du repos celeste, par la porte du vrai prin- cipe, et arrivent devant le secretariat de la cour de I'oucst. Le visage tourne vers I'orient , ils se tiennent la debout, ranges en ordre, en attendant tranquil- lenient d'etre introduits. Un des vice- presidents du ministere des Rites se tient la debout au cote sud de la table, la face tournee vers I'occident. Le di- recteur general de I'intendance des bo- tes etrangers se tient debout a sa suite. Quatre historiographes impe- riaux, deux herauts de la cour du cere- monial ou de I'etiquette, se tiennent de- bout, partages a droite et a gauche de la rue imperiale, la face tournee a I'o- rient et a Toccident. Deux huissiers se tiennent debout au nord de Tambassa- deur tributaire, la face tournee a I'o- rient. Tout le monde indistinctenient est revdtu de ses habits de cour. Des herauts d'armes, faisant retentir leur voix, des officiers de police et des huis- siers, conduiseiit I'ambassadeur tribu- taire jusque dans I'interieur du vesti- bule de vermilion de I'ouest : la , ces ofliriers se placent au second rang, la face tournee au nord, et penchant vers Toricnt. Les herauts d'armes s'avan- cent; tout le monde s'avance a leur suite. — Les herauts d'armes crient : « Agenouillez-vous! {khoiiei); — pros- ternez-vous! {kfieuu ) ; — relevez-vous ! (hlng) : » alors on isccomplit le ceremo- nial des trois agennuiliements et des neuf prostemements. Ce ceremonial accompli, le directeur general de I'in- tendance des botes etrangers remet aux rois vassaux les dons et les presents de (*) Ce n'est ^u'aiix rois el aux ambassa- Ueurs de la Coree qu'on donne des chevaux »:n presents. (r^ote d«s Mt. chinois.) I'empereur. Comme anterieurement , lorsque I'ambassadeur tributaire a pre- senle les tributs {koung) envoyes parson souverain, il s'agenouille pour recevoir les presents de I'empereur. D'autres presents sont distribues a la ronde a toute la suite de I'ambassade, c'est-a- dire qu'apres le don des presents gra- cieux de I'empereur, destines au roi qui a envoye I'ambassade, il en est donne en second lieu a I'ambassadeur tribu- taire, ainsi qu'a tous les officiers ou at- taches de I'ambassade, et a toutes les personnes de la suite (*). » Pendant que le directeur general de I'intendance des botes etrangers offre et distribue ces presents, chacun s'age- nouille en les recevant ; la distribution faite, le heraut d'armes crie : « Proster- nez-vous ! (khoiiel); — relevez-vous! » {hlng). On repete le ceremonial des trois agenouillements et des neuf pros- temements, puis on se releve. Ensuite I'ambassade est reconduite. Le grand marechal du palais , conformement a ses instructions, accompagne I'ambas- sadeur tributaire , les attaches et les personnes desa suite, jusqu'a leur sor- tie. Des faveurs speciales de I'empereur sont accordees au ministere des Rites, selon qu'il est convenable(**), et cha- cun s'en retourne. «Voila le cer6monial de la remise des presents conferes par I'empereur. §5. liecondidte de I'ambassade. « Les affaires de I'ambassadeur tri- butaire etant terminees, il se dispose a retoumer dans son pays. L'intendauce des provisions de la cour le pourvoit de bestiaux, de vins, de fruits et de le- gumes, li'un des vice-presidents du mi- nistere des Rites fait garnir de nattes de bambous, et de tout ce qui est ne- (*) On peut voir la liste detaillee des pre- sents que donne I'empereur aux ambas- sadeurs triljutaires de la Coree , des iles Liiou-khieou , du Toung-kiitg, de Siam , de la Cocliincltine et meme de la Hollande , dans le Tai-ths'uig-lioe'i-tien , k. XXXI, f" 8 et suiv. On pent aussi y voir la liste des tri- buts que doivent porter ces m^mes anibas- sadeurs. lb. , f"' 5-7. (•*) Voyez, pour plus de details, le Kia-li ou les Jtites liomesticjues. (Note des tdit. cliinou.) CHINE MODERNE. 217 tf cessaire pour se reposer, les hotelleries dans lesquelles Tambassadeur et sa suite s'arreteroot ; le tout conforme- ment a Tiisage du niinistere. Si ce sont des anibassadeurs de la Coree ou du Tounquin, ils seront accompagncs, a leur depart , jusqu'a leur sortie de la frontiere, corhme on a envoye au-de- vant d'eux, aussi jusqu'a la frontiere, des mandarins pour les recevoir et les accompasner a la cour. Si ce sont des anibassadeurs de la Cochinchine, des tlesLieou-khieou, d'Ava, de Siam, de la Hollande, des iles Philippines, ils se- ront accompagnes et reconduits par I'un des directeurs du niinistere des Rites, charge de rendre compte a I'em- pereur du resultat de sa mission. Si ce sont des ambassadeurs europeens (*), deux fonctionnaires ou mandarins (**), natifs de leur pays, et preposes ante- rieurement pour aller a leur rencontre, leur fourniront des raandats sur les postes et les relais du gouvernement, dont ils pourront avoir besoin ; et, dans leur marche par terre ou par eau, ils leur procureront des hotelleries, des chars et des bateaux, le boire et le manger. Les mandarins civils et les manidarins militaires veilleront a la siirete de leur marche. On observera le meme ceremonial qu'a I'arrivee des tributs, proteges sur toutes les routes ou ils passent pour se rendre a leur destination. Les presents gracieux de I'empereur seront diriges par un employe de I'intendance des routes, qui conformera ses instructions a celles du niinistere des Rites. Un grand manda- rin, prepose par le lieutenant gouver- neur dechaque province, chargera plu- sieurs autres mandarins de conduire et d'accompagner I'ambassade jusqu'a sa sortie de la frontiere. Les mandarins qui auront accompagne I'ambassade , leur mission terminee, se rendront a la cour pour rendre compte de leur man- at. (*) Les Chinois ne considerent pas les Hol- landais cDmme des Europeens, parce qii'ils ne les connaissent que comme maitres de I'ile de Java, d'oi'i partent leurs euvoyes ))Our la Chine. I(**) Ce sont ordinairement des Europeens laches au Uibunal d'astronomie de Pe-king. « Voila le ceremonial qui concerne la reconduite des ambassadeurs. » Tel est enQn le ceremonial officiel qui a ete pratique euvers tous les ambassa- deurs europeens qui se sont rendus en Chine jusqu'a ce jour, aussi bien qu'en- vers les ambassadeurs ou envoy^s asiati- ques. On est force de reconnaitre qu'il y a pen de cours en Europe, s'il y en a, ou I'etiquette en pareil cas soit aussi pompeuse qu'en Chine, et ou un cere- monial aussi minutieux soit observe. On a pu voir si ce ceremonial est aussi avilissant que certains narrateurs offi- ciels de relations ont voulu le faire croire en Europe, et si la partie de ce ceremonial qui exige des ambassadeurs et de leur suite les trois agenouille- ments et les neuf prosternements, dans telles circonstances donnees, n'est pas plutot un ceremonial maussade et en- nuyeux pour nous autres Europeens, que toute autre chose, et si le refus obstine de s'y soumettre n'est pas aussi pueril qu'impolitique. Aux yeux des Chinois, pour qui I'autorite imperiale est la plus haute dignite donlun honime puisse etre revelu, ce refus europeen est et doit etre une grave injure. Dans les chapitres du ceremonial generaJ, qui suivent ceux que nous venons de traduire integralement , priucipalement dans celui qui concerne le ceremonial de I'investiture des rois vassaux , on y voit ces memes rois executer a plu- siers reprises le ceremonial des trois ageiiouillements et des neuf prosterne- rnents (*). L'empereur lui-meme prati- que ce ceremonial dans unefoule de cir- constances (**). avec cette modification cependant, que, pour lui , il execute trois agenouillements (sdn khoicei) , et fait neuf reverences {kieou-pei) au lieu de neuf prosternements (la diffe- rence n'est que du plus au moins.) On pourrait peut-etre croire que le ceremonial que nous venons de traduire (•) Tai-thslng-toung-li , k. XLIII , f° 9. Ces rois vassaiix, qui vonl se faire donuer Vinvestiture par l'empereur de la Chine, sont le roi de la Coree, le roi du Tounquin et de la Cochinchine, et le roi des iles Lieou-khieou. (**) Voir, enire autre*, le ceremonial du sacrifice au ciel, du grand sacrifice au solstice d ele, etc. , etc. , passim. 218 L'UNIVERS. int^gralement, ilatant d^ja de pres de cent ans, a pusnbir beaucoupde modi- fications necessiteos par le pro{^res des relations de la Ciiine avec des nations etranjieres , principalenient avec les nations eiiropeenues; ii n'en est rien cejiendant. Nous avons compare ce ceremonial a celui qui est d^crit dans les Statiits iinprimes a Pe-klng en 1825 , et nous u'fj avons trouve que des differences insisnifiantes. Les trots agenouille- ments et les neuf prosternements y sent les mfimes. Ce qui prouve que les difficultes soulevees par les amoassa- deurs anglais en 1796 et en 1816 rela- tivenient a ce cdremonial, auquel iis ne vouUirent pas se souniettre, preferant ne pas fitre re(^.us par I'empereur, ne I'ont point fait modijier par les Chi- nois; et que si une ambassade euro- peenne se rendait de nouveau a Pe- King, elle devrait , pour ^tre adniise pres de I'empereur, observer le ceremo- nial dont nous avons donne la traduc- tion. Relations avec les Europeens. La Direction des hOtes etrangers du ministere des Rites a aussi dans ses at- tributions les relations eommerciales avec les negociants etrangers; c'est clle, par consequent, qui fait les re- glenients pour le commerce exterieur, donne ou retire aux negociants etran- gers I'autorisation de trafiquer sur tel ou tel marche de I'interieur, et d'y vendre telle ou telle marchandise (*). C'est aussi de cette Direction (qui est en realite un Ministere des affaires etran- geres) que dependent les artistes ou honimes d'art europeens qui veulent aller exercer leurs talents ou leur in- (lustrie en Chine, qu'ils soient astrono- mes, mathematiciens, sculpteurs, cise- tears, peintres, etc. Ceux d'entre les Europeens qui desirent aller exercer leurs talents ou leur Industrie en Chine doivent en faire la demande au gouver- neur des deux koudng (♦*) , residant a Canton. Apr^ en avoir obtenu I'auto- (*) Tai'iluing'i-tltoung-tchi , k. XXXI, (**) Lc gouTernement des provinces de Kouang-toung et de Kouaiig-si. risation de ce haut fonctionnaire , les etrangers en question sont dirig^s sur Pe-king, s'ils le desirent {*). Bureau des traducteurs. A cette Direction est attache un Bureau des traducteurs reunis {Ilo^i-toung-sse-i- koudn ) , sous I'inspeclion de deux grands mandarins tartares et du com- mandant des forces militaires, qui est en meme temps Tun des grands mai- tres de la Cour des ceremonies. C'est a ce bureau qu'est reserve le soin de lo- ger les ambassadeurs etrangers qui se rendent dans la capitale (**), et de leur procurer tous les ustensiles et au- tres objets •dont ils peuvent avoir be- soin pendant leur seiour, ainsi que toutes les provisions de boUche n(6ces- saires a I'ambassadeur et a sa suite, de ni^me que la consommation Jes che- vaux (***), etc. Lorsque les affaires qui ont motive le sejoiir de I'ambassadeur et de sa suite dans la capitale de reu.pire sont ter- minees, alors on regie les comptes de toutes les depenses et fournitures fai- tes, et le bordereau en est envoye a la Direction des holes etrangers, qui ordonne le regleinent de ces comptes. — Les ambassadeurs tributaires , de quelque Etat que ce soit (dit le com- mentaire des Statuts), qui viennent 5 Pe-king, a rexception de ceux de la Coree, sont tous places sous la direction et le controle {kingTll) de I'lntendance de la niaison imperiale. (*) Tal-thsing-i-thoung-tcid , k. XXXI , foie. (**) L'ambassadeur de la Coree , qui reside contiuuellement a Pe-king, a un liolel spe- cial, dont la description est donnce miuu tieusement dans les Statuts. (***) Les Statuts eiitrcnl djrns de curieux details a cet cgard. Ainsi il devra y avoir, dans riiotelde rambiissadeur, lant d'appailements, tant de chambres a feu par appartenient, on pliitol tant de fourneaux a lits (k/idng), car les Ills sur lesquels on repose sont cliauf- fes. Les provisions de boudie sont foinnies chaque jour par rinlcndancc de la maison imperiale. Le combustible, qui est ordinal- rement, a Pefcing, du cbaibon de terre, est fourni par le ministere dts travaux publics; le fourrage pour les ohcvaux, par le minis- tere des iinances. La quaulitc el le poids en sont determines. CHINE MODERNE. 219 Le Bureau des traducteurs est aussi specialernent charge de traduire en chi- nois les lettres de creance des ambassa- deurs qui soat ecrites en une autre lan- gue (*). La quatrieme direction du ministere des Rites est la Direction des repas et festins. {Tkslng-chen-thsing-li-ss6). C'est a eJle qu'est reserve I'approvi- sionnement de la inaison des ambas- sadeurs etrangers ; celui des festins publics donnes a I'occasion des f^tes solennelies du premier jour de Tan, de I'anniversaire de la naissancede I'enipe- reur, de certains mariages, etc. C'est elle aussi qui pourvoit a i'approvision- nement de bouclie des princes et des grands officiers de service aupres de I'empereur, ainsi qu'a celui qu'exigent les sacrifices periodiques celebres dans le cours de I'annee. 3° MINISTERE BE LA MUSIQUE. Y6-pou. Ce ministere n'est, a proprement par- ler, qu'une subdivision du ministere des Riles, placee sous la direction spe- ciale d'un baut fonctionnaire {Kouan- li-td-tchin). Quoique I'art musical soit loin d'etre en Chine ce qu'il est en Eu- rope (oil cepeudant on ne lui fait pas I'houneur de lui donner un ministere), la musique a toujours ete consideree par les Chinois, des les temps les plus anciens (**) , comnie de la premiere im- (•) Selon les Statuts, les lettres de creance des ambassadeurs de la Coree, des iles Licou- kliieoti, et du TUoung-kiiig, sout Ecrites en laiigue chinoise. Les qiiarante-deux meinbres (lu Bureau general des traducteurs interpretes sout, a <]iielques exceptions pres, tous Tar- lares-Manlchous , comme ( ce qui est tres- probable ) si les Tartares-Mantclwus avaient jilus de facilite pour apprendre les langues ctrangeres que les C/iinois. (*•) Voy. torn. I, p. 25, 3i et passim. On voit dans le Chod-king, ou L'lvre sacre des Jiinales , que I'empereur Chun , plus de 2,9.00 ans avant notre ere, inslitua un mi- nislcre de la musique. Voici le passage : « L'enipereur dit : Kouei, je vous nomme ^ « sur'uitendant de la musique {t'len-jd) ; je « veux que. vous i'euseigniez aux eufants des « princes et des grands. Faites eu sorte qu'iis « soieiit sinceres et affables, aidulgeiils , com- « plaisauts et graves j apprenez - leur a etre portance dans I'^tat. U en fut de m6me chez plusieurs peuples de I'antiquite. II faut croire que, dans les premiers temps de la civilisation , I'influence de la mu- sique sur I'esprit et les passions de I'homme fut tres-grande , puisque les anciens legislateurs la placerent au pfe- mier rang dans les ceremonies publi- ques. Les fonctions du ministire de la musique sont , comme s'exprime le texte, de diriger et de surveiller tout ce qui concerne le nombre et la mesure des ions et des sons musicaux ; de les adapter harmonieusement a des chants composes expres ; de les foire resonner sur des instruments, et de les appro- prier aux fetes et ceremonies publiques, aux receptions de la cour et aux grands sacrifices, atin d'approfondir le clair et I'obscur, et d'unir par I'harmonie le haut et le bas (*). Nous n'entrerons ici dans aucun de- tail relatif a I'organisalion de la musi- que chinoise, que font connaitre les Statuts. Ceux de nos lecteurs qui se- raient curieux d'en savoir davantage a ce sujet pourront consulter le traite complet de la musique chinoise, du P. Amiot, publie dans le t. VI des Me- 7noires concernant les Chinois. Nous nous bornerons a dire que la theorje de la musique chinoise re- pose sur une octave de sons, comme la musique europeenue, lesquels huit sons differents sont regies dans leurs combinaisons par douze lois fonda- mentales, nommees Vm. Les instru- ments de musique sont varies et nom- breux(**). «fermes, .sans etre ni durs ni cruels; donnez- « leur le discernement , niais qu'iis nesoient « point orgueilleux; expliquez-leur tas pen- « sees dans des vers, et composez-en des « chansons entremelees de divers tons et de « divers sons musicaux , et accordez-les aux « instruments de musique. Si les huit modu- K lations sont gardees , et s'il n'y a aucune "Confusion dans les differents accords, les « esprits et les hommes seront unis. — Kouel « repondit : Quand je frappe ma pierre, soit « fortement, soit doucement , les animaux les « plus feroces saulent de joie. « (Licres sacre's de r Orient, p. 5 2.) (*) Tai-l/tsing-lioei-tien, k. XXXIII, f° i. (**) Voir la planche speciale. I 390 L'UNIVERS. 40 MINISTERS DE LA GUERRE. Phig-poti (*). Ce minislere, compose de deux pre- sidents, I'uii mautclioii et I'aiitre chi- nois, de deux vice-presidents de i^auclie et de deux vice-presidents de droite, ^gaiement mantchous et chinois , com- prend dans ses attributions la direction du personnel de tous les mandarins ini- litaires employes a I'interieur ou a I'ex- terieur pour le service de 1' Empire. Tout ce qui est relatif aux reglements concernant la nomination des officiers, la promotion a des grades superieurs, ou les retraits d'emplois, ainsi que I'e- levation a un litre hereditaire; les me- sures a prendre pour le transport des depeches de I'fitat par des relais de postes militaires (**); les regies a suivre dans I'examen des delits, et dans I'ap- plication des lois de discipline; enfln, la confection et la verification des con- trolcs de I'armee, sont duressort de ce ministere. Quand les membrcs qui le composentsont appeles par leurs chefs de Directions a deliberer sur les af- faires de leurdepartement, ces affaires, si elles sont importantes, sont transmi- ses au Conseil du cabinet ; si elles ne le sont pas, elles sont expediees par eux pour accelerer la marche du gouverne- nient. Les presidents de ce ministere (com- me d'ailleurs les presidents des autreS* ministeres pour leurs fonctionnaires respectifs) sont charges des presenta- tions a la cour des officiers de leur de- partement. Ces officiers doivent ^tre en costumes militaires, Tare a la main et le carquois sur I'epaule. Ce sont eux aussi qui pr^parent les listes d'avance- ment, et qui repartissent I'armee chi- noise dans tout I'Empire par garnisons stables ou cantonnements. Oapeut voir cette repartition tres-detaillee dans les Statnts (liv. xxxv et xxxvi), ainsi que les reglements concernant les revues. Directions. Le ministere de la guerre est divise en quatre grandes Directions. La premiere, nommee Di- rection du mouvement militaire {ff^oii- siu^n-thsinglisse), examine et classe (•) Tai'duine-hoei-tien , k. XXXV-XL. (•*) Voy, ci-devant p. 199, les rangs et les grades des mandarins militaires, regie les droits de promotion ou d'ayancement d'apres les examcns passes a cet effet a des epoqiies fixes, et determine I'emplacement des diffe- rentes garnisons et des campements le long des fleuves et canaux, ou sur. les frontieres. Les rangs des mandarins militaires sont distribues, comme ceux des man- darins civils (voyez page 151 et sui- vantes), en neuf rangs, subdivises cha- cun en deux classes. Les grades mili- taires sont en outre di vises en trois ordres, qui sont : 1° I'ordre des manda- rins militaires a litre hereditaire (chi- tchi)\ 2° I'ordre des mandarins mili- taires sortis des examens {wou-kh6) ; 3° I'ordre des mandarins militaires dont la vie est obscure (yin-sing). — Dans le premier ordre sont compris ceux qui ont un litre de noblesse heredi- < taire (*) ; dans le second, ceux qui, dans leurs examens, ont obtenu les grades de tsin-." nou-pd loo 22.(5-1 valiers tartares revetus des insignes du «2» c/mt-si sb* m.boc service imperial (qui inspirent le plus '^^ .^t",X;«». ::::::;: V^ ll'il grand respect), sont transinises avec une m'^KimaMj-toung " wfiia rapidile extraordinaire, et a de tres- \T' ^7n"tn\". '. '. '.'.'.'. \ '. iil 11% grandes distances. ««° Koucttcheou'. '.'.....'. 197 »-.,8:.<> •4'' Direction. La quatrieme direction Totaux r„r.29 ow.-.t du ministere de la guerre est celle des provisions et fournitures militaires Si Ton reiinit ce chiffre de rinfantc- {ivou-khou-thsing-li-Kse). Elle est char- rie a celui de la cavalerie, donne precc- gee de dinger rajjpKovisionnement des clemment, on aura un effectif, pour Tar- troupes en vivres, en effetsd'armements mee cliinoise, do 888,725 hommes. Get et d'equipements , et en munitions de effectif, qui remonte a I'annee 1812, guerre ; en meme temps qu'elle dirige n'est pas considerable par rapport a la les inspections annuelles, les exameus population ; mais il paraissait suffisant, pour I'obtention des grades et I'avan- avant la guerre des Chinois avec les cement, ainsi que la tenue des con- Anglais, pour le maintien de I'ordre trdles. dans Tinterieur de I'Empire. II a pu 6tre Composition de I'armee chinoise. augmente depuis(*). L'armee chinoise est divisee en huit L'efi'ectifde I'armee chinoise est ob- bannieres (pa-khi), distinguees entre tenu par lescontroles que les geoeraux elles par la couleur ou la bordure des de division sont obliges d'adresser au dtendards. Les troupes des trois pre- ministere do la guerre. Ces controles mieres bannieres torment la garde im- doivent mentioniier raugnientation et periule{i/isln-ki(in); ce sout generale- la diminution que I'effectif a subies ; ment d(!s Tartares Mantchoux. Cesder- c'est-adire le iiombre des recrues, et nieres troupes sortt divisees en douze le chift're des hommes raves des con- corps difterents, doat V artillerie fait troles par une cause ou paV une autre, partie ; cependant il entre aussi des Recrutement de l'ausip.e. L'ar- Ciiinois dans cette arme, qui ne connait mee chinoise sc recrute par des enrd- que mediocrement la manoeuvre du lements volontaires , et par les enfants canon. Les troupes purement chinoises, dis- ,,^ ,. „ „ nM n- o , • tin(rii,.oc ..n.. i„ ^ \ 4 ', (*) M. P.-P. Thorns a pulmc cu 1824, a imgucps par le nom de ^ro?<'s a 6a?i- ,, ' 11 , . .' , p i r, V w «? • (/^"■y"'? ' \ f°'"'",^»t "n „,, p;,„,^, ,i,i„oi,e s'elcverait a rjfiS.ooo CO ps spc( la de cacalene {ma-plng) iJommes. Nous ignorous qudle couliaiicc on pOltant une houppe au sommet de son pout accorder a ces documents, ainsi <,u'a lasque. et le corps principal de Yinfan- d'a.nres de meme nature. Nous nous en lap- leriejpou-ping), partage en deux gran- porlons de prelerence a raulorite des Staluts Ues divisions : la division de guerre offldcfs CHINE MODERNE. 223 des anciens soldats, qui restent au ser- descendre d'un corps d'dite dans un vice jusqu'a un age tres-avance. Chez corps moins considere. les Tartares Mantchous et Mongols, le Le co(]e mililaire est tres-severe, sur- goilt naturel pour i'etat miiitaire fait tout pour les officiers rev^tus d'une en quelque sorts de chaque liomme un autorite importante. Nous en ferons soldat. Les Chinois preferent de beau- connaitre les principaux traits a I'arti- coup la carriere des lettres et des em- cle Code penal des Chinois. plois civils. . Remplacement militaibe. Le o On pourra se former une id^e assez remplacement miiitaire est interdit exacte des preferences pour I'etat mi- sous des peines severes, excepte par un litaire chez les Tartares et les Chinois, fils, un petit-lils, un neveu, un frere, |>ar lenumeration suivante des indivi- ou im autre parent hahitant avec la dus appartenant a des families de mill- personne obligee au service, et lorsqiie taircs, pour ranneeI812. le remplacant s'offre volontairement I" Dans la capitale et dans tous les et sans vue tnei'cenaire. cantonnements des provinces : Les troupes chinoises sont encore en „ • boiiches. partie armees, comme I'etaient autre- » 'o -«««'~ ""IVf:^ fois les Parthes ou les Scythes, avec des 30 £/3r ''- 5S^ fleches, des carquois et des boucliers (*), "' '^ ^' ^ sur lesquels sont peintcs ordinaire- II" Dans les dependances du gou- ment des figures propres a faire peur verncment de TchaUuir, habile aux enfants ; mais lis commencent a se par des tribus mongoles 16,489 servir des amies a feu europeennes, — Coinmissioniies de Mdo-ming- dont ils ont ete autrefois les inven- 6'««' 'd 285 teurs. — Barkoiils, dependants du com- mandant n)ilitaiie de /re-/oH«o^- MABINE CHINOISE. /"'«"^ i,25r ^ .... — Fils de miisulmans dependant La marine chmoise, soit maritime, de la premiere banniere bian- SOit fluvjale, depend aussi du ministcre die du ministcre de la niaison de la guerre. Elle a a sa tete : imperiale, ct des cinq autres ^ amivaux (c/,om-ssc-t/n-toti) (**), I'un re- ^r , . . . sidant dans la province de Fo-kien, — Olii/iois nnUtaires des huit ban- r . 1 n j i' " """ 1 autre dans cellc de Kpuang-loims \ meres , A3 KKr, • • /w - - \ " — Domes.iques mantchous et man- , , contre-amiranx {fou"lisidng) ; ^"^ • 5o,i63 i&ma\QVS {isdn-thsidng); Total 3q3o53* 49 capitaines de vaisseau (je^w-^i"); ' 28 lieutenants de vaisseau {tou-sse) ; A -r . -.r^-,,- _ -r ? ' I <54 capitaines Iclicou-pia) : AVANCEMENT MILITAIBE L'emula- ,^^ \\L,nauX. {(sienfthsiungy, tion dans 1 etat tmUtaire, en Chme, est 3,^ ^nscVnes {pd-tUsoimg)-, sollicitee par differents moyens. Les 562 sous-officiers (W.-wln ; trois premieres baiimeres, qui forment 212 id. (ghe-wdi-wdi-wei). un corps d'elite et qui constituent la ^, , --.. • j garde imperiale , se recrutent dans Chacun de ces officiers de marine, trois autres corps de troupes tartares ; ou plutot chacun de ces grades, sont ccux-ci, dans d'autres, et ainsi de suite, affectes a des arrondissements mari- Les autres movens d'emulation sont times determines dans les J/aMs (***). encore nombreux ; ils s'etendent memo ^.^ ^ ,, .^j^^ ..„,^^ JUSqu aux entants, qui sont promus \*L ^^^ ^^ms de grades par lesquels nous avantageusementdansdesemploiscivils avons exprime les denominations chinoises ou mihtaires. Les moyens d intimida- ne leur repondent qu'approximativement et tion pour maintenir la discipline sont dans I'ordre hierarchiqne. II en est de meme la degradation, ou simplement de faire pour rarmee de tene. (***) Tai-thsiiig-hod-tien, k. XXXVI, * Tai-thsing-hoci-tien , k. XII, f" 22. f" 1-6. 224 L'UNIVERS. rOLICE MARITIME METBOPOLTTAI- NE. II y a une police maritime metro- politaine, comprenant toute la pro- vince de Tcki-li, qui rcssortit aussi an iniiiistere de la guerre. Elle est placi-c sous la direction d'un gouverneur ge- neral (thsduny-fou), lequel a sous ses ordres we?// lieutenants de police {fsien- t/isoung), neuf sous-lieutenants {pa- thsoung), huit brigadrers {tvdi-wC'i)^ et quatorze sous-hrigadiers. Navigation fluviale. La naviga- tion fluviale est tres-importante en Chine, ou la plupart des transports se font par eau. Celte navigation est placee sous les ordres d'un gouverneur gene- ral des voies fluviales (hd-tao-thsoiing- tou), dependant aussi du ministere de la guerre. L'organisatioii de ce ser- vice est a peu pres la meme que celle du service maritime, sauf qu'il n'y a point d'officiers du grade de vice-ami- ral et de contre-amiral. Commandants des places fobtes ET des colonies militaires. Le mi- nistere de la guerre pourvoit aussi a la nomination des commandants des pla- ces fortes, des passages fortifies, et des possessions chinoises dans la Tartarie et ies lieux circonvoisins; de mSme qu'a ceux des troupes preposees a la garde des tombeaux des empereurs. Instruction militaire. L'art mi- litaire a ete tres-cultive en Chine des la haute antiquite. Par une loi fatale qui semble inherente a la nature hu- niaine, l'art de se defendre a dil naitre en mfime temps que l'art de se nourrir et de se v^tir. Mais cet art de I'nttaque et de la defense a dil mettre bien des siecles avant d'arriver a I'etat de per- fection relative ou il a ete porte de nos jours, surtout en Europe. II fut sans doute aussi tres-cultive par les nations del'antiquite restees celebres dansl'his- toire; mais la Chine seule a conserve des traites speciaux de cette science an- cienne, traites dont les auteurs etaient contemporalns de Cyrus. Le premier et le plus celebre de ces traites fut redige par Sun-iseu, sur la fin du sixieme Steele avant notre ere. 11 est intitule : « iMis ou regies militaires de Sun- tsiu {Sun-tscu-ping-fd (*)). » On y (*) Celui qui ecril ces lignes en possedc lit : « Les troupes sont la grande af- « faire d'un Etat; c'est d'elles que de- « pend la vie ou la niort des sujets, la « grandeur ou la decadence de I'em- n pire. » II pose en principe que tout militaire qui veut que la gloire et les succes acconipagnent ses amies , ne doit jamais perdrede vue cinq oLjets principaux, qui sont: la Doctrine, c'est- a-dire, la grande loi morale dont le plii- losophe Klioung-tseu s'etait constitue I'apotrele pluseclaireet le plus fervent; j le Ciel, c'est-a-dire les lois et les phe- nomenes du monde physique, la con- naissance des climats et des saisons ; la Terre, c'est-a-dire la connaissance j approfondie des pays et des contrees de la terre ou il peut etre appele a conduire ses troupes; le Commande- ment, c'est-a-dire toutes les qualites qui constituent I'homme sup^rieur, ca- pable et digne de commander aux au- tres ; enfin la Discipline , c'est-a-dire l'art de disposer les troupes et de les souniettre aux regies de la subordina- tion, sans laquelle il n'y a point de com- mandement possible et de succes dura- bles. L'ouvrage de Sun-tseu est divise en treize chapitres ou livres. Le premier traite des principesj'ondamentaux de l'art militaire. Nous venons d'enu- merer les cinq principes sur lesquels il le fait reposer. Le second livre traite de V entree en campagne. A pres avoir dit qu'il faut avoir l)ien soin d'etre ap- provisionne de tout ce qui est neces- saire pour I'entretien de I'annee en vivres et en munitions de guerre, il veut que ceux qui possedent les vrais princi- pes de la guerre la terminentdans une campagne, etle plus promptement pos- sible, lis ne doivent pas, pendant trois annees entieres, consumer des vivres inutileraent. Ite doivent trouver les une tres-belle edition , portant des annola- tions marginales, a \encre rouge, du celebre general JFang-chi-tcfimg, qui vivait sous les Soiii, an coniniencenient du septieme siecie de notre ere. L'ouvrage de Sii/i^tseu , qui comprenait priniitivemenl 82 chapitres, n'cn a plus que i3 niaintenant. Le P. Amiot en a fait uue tiadiictiou qui a ete imprimee daus le t. VII des Memoires sur les Cliinois, ainsi que sa traducliou des ouvrages de Ou-tseu et de Sse-ma. CHINE MODERN E. 225 raoyens de faire subsister leurs armees aux depens de I'ennemi , et epargner ainsi a leur pays les frais immenses que, dans iin cas contraire, il serait oblige de faire lorsqu'il faut transporter au loin toutes les provisions. Us n'ignorent pas que rien n'epuise tant un royaume que les depenses de cette nature. Car que I'armee soit aux frontieres ou dans les pays eloignes, le peuple en souflre toujoilrs ; toutes les choses neccssaires a la vie augnientent de prix ; elles de- viennent rares, ct ceux qui, dans les temps ordinaires, sont le plus a leur aise, n'ont bientot plus de Ijuoi se les procurer. Sun-tseu n'oublie pas cc qui consti- tue partout lener/de la guerre, c'est- a-dire V argent ; il veut que la solde des troupes soit toujours payee a temps, et avec la plus rigoureuse ex?ctitude. Dans ce cas, dit-il , vous pouvez mar- cher droit a I'ennenii ; I'attaquer et le vaincre seront pour voiis une meme chose. .Te dis plus : ne differez pas de livrer le combat ; n'attendez pas que vos amies contractent la rouille, ni que le tranchant de vos glaives s'emousse. S'il s'agit de prendre une ville, hatez- vous den faire le siege; tournez d'a- bord toutes vos vues de ce c6te-la. di- rigez la toutes vos forces; il faut ici tout brusquer. Si vous y manquez , vos troupes courent le risque de tenir longtemps la campagne; dans ce cas, de combien de revers ne vous rendez- vous point responsable? etc. — Si I'ar- mee ennemie a %ine raesure de grain dans son camp, ayez-en vingt dans le votre ; si I'ennemi a cent bottes de fourrages pour ses chevaux , ayez- en devx mille pour les votres. Ne lais- sez echapper aucune occasion de I'in- commoder, de le barceler; faites-le pe- rir en detail ; trouvez les moyens de I'irriter, pour le faire tomber dans quel- ques pieges.Diminuez ses forces le plus que vous pourrez, en lui fiiisant Jiver- sion, en lui tuant de temps en temps quelque parti, en lui enlevant de ses convois, de ses equipages, et d'autres choses qui pourront vous etre de quel- que utilite. On trouve dans le Wvx&At Sun-tseu ces preceptes d'humanite a I'egard des pri- sonniers, qui ne sont pas toujours ob- 15* Livraison. (Chine moderne. serves dans nos societes modernes, les- quelles se vantent cependant d'avoir ete elevees et purifiees par les doctrines du christianisme. Voici comment en parle I'ancien general cbinois : « Traitez bien les prisonniers, nour- rissez-les comme vos propres soldats ; faites en sorte, s'il se pent, qu'ils se trouvent mieux chez vous qu'ils ne le seraient dans leur propre camp , ou dans le sein meme de leur patrie. Ne les laissez jamais oisifs ; tirez parti de leurs services avec les defiances convenables; et, pour le dire en deux mots, condui- sez-vous aleur egard comme si c'etaient des troupes qui se fussent librement en- rolees sous vos etendards. » Le troisienie livre traite de ce qu'il faut avoir prevu avant le combat. n II vous faut, dit Sioi-tseu, conserver toutes les possessions ettous los droits du prince que vous servez ; les agran- dir en empietant sur les ennemis, c'est ce que vous ne devez faire que lorsque vous y serez force. « Veiller au repos des villes de votre pays, voila ce qui doit principalement vous occuper; troubler celui des villes cnnemies, ce ne doit etre que votre pis- aller. « Mettre a convert de toute insulte les villages amis, voila ce a quoi vous devez peuser; faire des irruptions sur les villages ennenus , c'est ce a quoi la necessite seule doit vous engager. « Empecher que les bameaux, que les chaumieres mpme des sujets de votre souverain ne souffrent Ic plus petit doniaiage, c'est ce qui merite ega- lement votre attention ; porter le ravage dans les bameaux ou dans les chaumie- res de vos ennemis , c'est ce qu'une di- sette de tout doit seule vous faire en- treprendre. « Sans donner de batailles , tachez d'etre victorieux; ce sera la le cas ou, plus vous vous eleverez au-dessus du bon , plus vous approcherez de I'incom- parable et de I'excellent. Les grands generaux en viennent a bout en de- couvrant tons les artifices de I'ennemi, en faisant avorter tons ses projets, en semant la discorde parmi ses gens , en les tenant toujours en haleine , en em- pecbant d'arriver les secours etrangers qu'ils pourraient recevoir, et en lui 1 15 L'UNtVERS. i5B otant toutes les facilit^s qu'il pourrait avoir dese tleterminer a quelque chose d*avaritaceux pour liii. « Un habile general ne se trouve ja- mais reduit a ses dcrnieres rcssources. Sans donner dcs batailles, 11 sail I'art d'luimilier ses eniiemis; sans repaiulre (ihe gouttc de sang, sans faire usage de ses amies, il vient a bout de prendre les villas; sans nieltre les pieds dans les rovaunies etrangers, il trouve le moyen de'les conqti^rir; et^ sans perdre un temps considerable a la tete de ses Iroupes, il procure une gloire immor- telle au prince qu'il sert, il assure le bonheur de ses compatriotes, et fait que I tin i vers lui est redcvabie du repos et de la paix. Tel est le but auquel toun ceux qui commandent des armees doi- vent tendre sans cesse, et sans jamais se decourager. » Jamais, assurement, on n'a enonce en Europe, en fait de politique militaire, des principes pins elcves et plus dignes des nations civilisees. Aussi la nation cliinoise, qui les professe.depuis plus de deux mille ans, a ete plutot une nation conquise qu'unc nation conquerante. Rials, cependant, telle est la force de la raison et de la justice, que les vain- queurs par les amies sont dcvenus aus- sitdt les valncus par la civilisation! « Pour ^tre victorieux de ses enne- mis, dil Sun- tseu, cinq choses sortt necessaires a un general : i" savoir quand il est a propos de combattre, et quand il convient de se rctirer ; 2° sa- voir employer le pea et le beaucoup, salon les ci'rconstances ; 3° montrer au- tant d'affection aux simples soldats qu'aux principaux offlciers; 4° profiler de toutes les circonstances prdvues ou imprevues; 5° etre siir de ne point etre desapprouve par la souverain dans tout ce qu on peut tenter pour son service et pour la gloire de ses 'amies. Avec cela, si vousjoignez a la connaissance que vous devez avoir de vous-meme , et de tout oe que vous pouvcz ou ne pouvez pas, celle de tons ceux qui sont sous vos ordres, eussiez-vous cont guerres a soutenir, cent fois vous serez victorieux. Si vous ne connaissez .'^\. Sous la dyuastie des //an, qui suivit celle des Tlisin , les lois penales s'adou- cirent; effet naturel de la reaction qui s'opere toujours dans les esprits apres avoir ete entraines dans un sens oppose. Cependant les meilleurs regnes n'ont pas toujoui's su se defendre de cruaute dans Tapplioation des lois penales. « J'ai toujours remarque avec chagrin , dit Ma-touan-Un (*), que des punitions telles que celles de fendre le uez , de eouper les oreilles , de mutiler et mar- quer le visage, qui sembleraient etre le resultat de la tyrannic, ont cependant ete en usage sous les regnes de Yao et de Chun. L'usage d'arreter toutes les personnes de la famille d'un criminel , et de les envelopper dans la peine de mort,m'aegalementsembleune cruaute digne des J'hsin, et qui n'aurait pas dd etre pratiquee sous les Han et les IPYi. J'ai ete surpris de trouver que des princes sages et vertueux n'aient pu se defendre de suivre ces lois injustes et tyranniques. L'empereur fren-ti{nd- 155 avant notre ere) , de la dynastie des Han, aholit la peine de la mutilation, et y substitua celle du/owe^ et de la t^te rasee. La derniere etait trop douce pour corriger les coupables , mais le fouet causait sou vent la niort du cri- minel , ce qui etait trop severe ; en con- sequence, ce chatiment fut egalement supprime. Dans la suite, la peine fut reduite uniquement a celle d'avoir la tete rasee. Les gensconvaincus d'un de- lit qui n'emporlait pas la peine capitale furent rases et enchaines, pour etre em- ployes aux travaux publics ; les offenses plus graves etaient punies de mort. Ce- pendant des juges cruels et severes ne nianquaient pas de pencher pour les chatiments les plus graves; de sorte (*) Introduction an Wenhien-thoung- kliao. Yo'iv Noiivcau journal aslatlque, iSSa. ' On pent consulter sur I'liistoire de la pe- nality cliinoise, depiiis les premiers temps de la monarchie jnsqu'a la dynaslie regnaiite un curieux Iraite dc Youan-liao -fan , compris dans son Kldiin-chou-pi-kltao , k. Ill, fol. 19- 32. On y verra que la necessite, pour les gouvernements successifb de la Chine, de re- primer les desordres incessanis, a fait tou- jours porter une grande sollicilude sur les mojeiis a employer pour altcindre efficace- nient ce but. 232 L'UNIVERS. que , sous la (ivnastie des //rt«, le noin- brp (les persoiines condamnees a niort lut tres-considerable. Sous les dynas- ties des Jrin et des /rei (de 220 a 420 apres .1. C.) , qui vinreiit eusuite, ou desira laire cesser ud pareil abus; mais, au lieu d'adopler la punition du fouet, de diminuer le nombre des cou|)s alin d'erupecher que la mort ne s'eiisiiivit , la peine tie la mutilation fut remise en vigueur, dans ['intention d'epargner la vie. Mais on ne put atteindre au but qu'on se proposait, et I'usage de raser la tete et de condannier aiix travaux forces tut adopte de nouveau , comme la seule maf)iere de punir qui pilt etYec- tuer ce que Ton souhaitait. Les juges ne manquaient jamais de pretexte pour condamner a cette punition les gens auxquels ils voulaient faire eviter la peine capitate. On vit des exemples de personnes qui, apres avoir blesse ou niutile dangereu- sement leurs ennemis, en etaient quittes pour la perte de leur chevelure ; et d'au- tres,qui ne meritaient pas la niort, con- damnees , par des juges iniques, a la su- bir. Les clioses furent meme poussees au point de mettre a mort toute la fa- mille d'un criminel ; jamais on ne vit si grande iniquite dans I'administration de la justice. Kniin , les dynasties des Soul et des 77ia?» J/ (581-905) instituerent les cinq sortes de punitions encore aujourd'hui en vigueur, et qui sout: 1" La peine du fouet, ou du petit bout dii bambou ; 2" La peine du baton, ou du gros bout du bambou ; 3" La peine de Vexil temporaire ; 4" La peine du bannissement perpe- tuel ; Kt, 5° , la peine de niort. Ces cinq punitions etaient un retour aux cinq especes de chfitiments en usage sous I'ancien empereur t'/twn(*); maisun saint roi n'aiu'jit pas voulu les employer. Quant a ceux qui desirerent se faire tin notn par la clemence , et qui moiitrereiit envcrs les criminels une indulgence prejudiciable au bien gene- ral , par exemple, de ne pas faire mou- rir les meuririers ; de ne pas chatier (•) Voy. t. I, p. 3; el 4a. ceux qui ont blesse leur procbain ; le resultat de ce systeme fut que des per- sonnes innocentes, qui etaient les vic- times de la baiiie ou de la colere, ne purent obtenir que justice leur fiit rendue. D'un autre cote , ceux qui ne respcctent pas les lois, et qui chercbent a s'enricbir par toutes sortes de moyeus, nesui vent pas I'exemple des anciens, qui s'appliquaient a I'amelioratiou des lois penales et a la propagation des bonnes doctrines. » Selon le Code penal actael des Chi- nois (*) , les cinq ch3timents auxquels sont condamnes les ditferents criminels sont : 1° La peine de la verge (tchi tsoui) ; 2° La i)eine du bflton {tchdng tsoui) ; 3° La peine du bannissement ou de I'exil temporaire {toii tsoui) ; 4" La peine de la deportation perpe- tuelle {lieou tsoui); Et 5", la peine de mort (ss^ tsoui). La premiere de ces peines s'applique en frappant le coupable avec le petit bout d'une verge de bambou. Cette peine est de cinq degres, c'est-a-dire, cle 4, 5, 10, 15 et 20 coups reduits. La deuxieme peine s'applique avec le gros bout du bambou ; elle est ensuite de cinq degres, selon le nombre de coups, qui sout de 20, 25, 30, 35 et 40, reduits. La troisieme peine est ua exil tempo- raire loin de sa province natale, et a une distance qui ne doit pas exceder 500 li, ou environ 50 lieues; cette peine est aussi de cinq degres , selon que le bannissement est de 1 au, 1 an 1/2, 2 ans, 2 ans 1/2, et 3 ans ; le tout avec accoinpagnement d'autant de coups de bamboos que pour la peine precedente, proportionnellement au degre de culpa- bilite. La quatrieme peine consiste en 100 coups de bambous et en une deportation peipetuelle a 2,000, 2,500 et 3,000 /«. La cinquieme peine est la mort, de deux fa^,ons : par strangulation et par decapitation. II est plusieurs autres peines, comme celie de remprisonnement, de la can- que, etc., qui sont appliquees aux diffe- rents debts. (*) Tdi thsiiig liu li lien; K. 4i , f" A. cl le Tdi ttisiiig lioei CHINE MODERNE. 233 Le Code penal chinois compte dix crimes capUaux {chi 6) , qui sont : 1" La revolte{m^oufan), ou plutot I'infractioa des lois qui garantissent la securite publique et les produits de la terre ; 2° Le brigandage (rn4ou td rti), qui consiste a tenter la destruction des temples, des tombeaux , des pnlais im- periaux ; 3° La desertion ( miou phdn ) , ou plutot I'abandon de son pays natal pour un pays etranger; 4° Le parricide (d ni) ; 5° Le massacre d'une famille, ou de plusieurs personnes d'une meme famille {poii tdo) ; 6° Le sacrilege {td pou king) ; 1* Le manque de piete filiale {poii hido) ; 8° La discordeAdXi^ les families {pou moit) ; 9° lSinsubordinatio7i poussee jus- qu'a I'assassinat {poii i) ; 10° Vinceste, ou le trouble interieur des families {nei loudn). Les crimes ranges sous ces dix chefs etant distingues des autres par leur enormite, les lois les punissent avec la plus graude rigueur. Comme ils sont toujours des violences directes des liens qui maintiennent la societe dans I'or- dre, on en place le detail dans la partie introductive du Code, pour apprendre au peuple a les craindre et a les eviter. Apres Tenumeration des dix especes de crimes , le code chinois place les huit privileges de rang que nous avons fait connaitre preeedemment (p. 139- 140). Les lois chinoises dont I'infraction implique une peine sont classees sous sept chefs ou litres differents. Sous le jci- xiTRE, on-traite des lois generates {ming liu li) ; sous le 2" , des lois civiles {li till) , se rapportant au minist-ere ou Tribunal des offices cicils ; sous le 3*", des lois f scales {/lou li) , se rapportant au ministere des f nances; sous le 4'", des lois rituelles {li W) , se rapportant au ministire des rites; sous le 5" , des lois militaires {ping li), se rapportant au ministere de la guerre; sous le 6*', des lois criminelles {king li), se rap- t)ortant au ministere de la justice; sous e 7^, des lois relatives aux travaux I publics { koUng li), se rapportant au ministere des travaux publics. Toutes ces lois sont reunies sous 436 articles, lesquels sont eux-memes divi- ses en autant de sections que I'ecole chinoise (au moins aussi minutieuse que nos ecoles du moyen age pour eta- blir des divisions et'des distinctions) en a imagine pour I'eclaircissement des cas et I'application proportionnelle des peines. Les lois d'un peuple etant, en quel- que sorte, I'expression ecrite de sa ci- vilisation, nous croyons devoir douner ici les titres des 436 articles du Code chinois, dans I'ordre ou ils se trouvent. PBEMIEBE SECTION. Lois generates en 46 articles (*). 1. Des cinq chatiments. 2. Des dix crimes capitaux, 3. Des hint privileges de rang. 4. Des delits commis par les classes privilegiees. 5. Des delits commis par les peres et les grands-percs des privilegies. 6. Des delits commis par les fonc- tionnaires publics. 7. Des delits commis par les fonc- tionnaires civils et militaires, comme hommes publics {'*). 8. Des delits commis par les fonc- tionnaires civils et militaires, comme hommes prives. 9. Des coupables qui ne sont pas su- jets au bannissement. 10. Des delits commis par ceux qui appartiennent a la classe militaire. 11. Des adoucissements aux peines, ou circonstances attenuantes. 12. De la mise a la retraite sans dis- grace des fonctionnaires publics. 13. Des delits commis par les fonc- tionnaires publics avant leur nomina- tion. 14. Des fonctionnaires degrades ou mis en retrait d'emploi, assujettis aux memes charges que les simples parti- culiers. 15. Des parents des transportes (***). {*) Tal'tlising-hoei tien, K. XLI, f" 9 et suivaiits. (") Voy. ci-devant p. i58, uo(e. (***) II est dit dans le code que les femmes 334 L'UNIVERS. IG. Des personnes qui ne peuvent <5tre comprises dans une amnistie g6ne- raler). 17. De i'effet d'une amnistie sur les transportes. 18. Des oriminels qui ol)tiennent de rester dans ieur famiile pour avoir soin (le leurs parents (*"). 19. Des delits commis par les astro- nomes. 20. Des delits commis par les arti- sans et les niusiciens au service du gou- vernoment, et par les femmes (***j. 21. De la recidive en matiere correc- tionnelle. 22. De I'autorisation accordee au.K coupables de moins de quinze ans, ou de plus de soixante et dix, ou bien qui sont affectes d'inflrniit^s, de se raclie- ter par une rancon de la peine a laquelle ils ont ete cond'amnes. 23. Des delits commis dans un temps donne, avant d'avoir attaint I'age ou les infirmites de I'article precedent. 24. De la confiscation et de la resti- tution de marchandises. 25. Des criminels qui se livrent eux- memes a la justice. 26. Des coupables accuses de plu- sienrs delits. 27. Des coupables d'un mSme delit qui se sont soustraits a la justice. 28. Des fonctionnaires publics com- mettant, comme corps constitu^s, une illegalite ou delit public. 2!>. Des erreurs ou fautes commises dans un acte public. 30. De la distinction a etablir entre le chef de plusieurs criminels et ses complices. 31. De la conduite a tenir quanc^ I'un des coupables d'un crime s'est echapp6. des transportes les suivront; leurs ascendants el descendants reslent libres de le faire. (*) Ce sont celles qui se sont rendues coiipahles de I'un des dix crimes mentiounes a Tart. a. (**) Quand un conpable, condamne a la peine de morl , a des parents infirnies on iges de pins de soixaiite-dix ans, et qui u'ont ui enfanis ni petits-cnfants au-dessus de seize ans, autre que le condamne, celni-ci jiiiit ob- tciiii dc rester pres d'eux pour les soij;n('r. ('**) Les" peities pour les uus el pour les aulres sout adoucies. 32. Des parents qui dissimqlent Ieur culpability rcciproque. 33. Des peines applicables aux d^- serteurs dans I'armee. 34. Des etrangers consideres comme naturalises (*), et qui se rendent cou- pables de crimes. 3."). De la conduite a tenir dans les cas particuliers ou les lois paraissent contradictoires (**). 36. Des regies relatives a Taugmen- tation et h la diminution des peines. 37. Des privileges et distinctions du rang imperial (***), definis. 38. De la parente du premier degre definie. 39. L'expression : solidaires ou com- plices du m^vie crime, definie. 40. Les termes intendanls et surin- tendants responsables , comme fonc- tionnaires publics, definis. 41. Definition du jour en cent frac- tions (****). 42. Dps regies concernant les pretres et les pretresses de la secte du Tao. 43. De la decision des cas prevus par les nouvelles lois (*****). 44. De la decision des cas non pre- vus par les lois existantes (******). (*) Hod j in, hommes transformes, c'est-i- dire, ayant adopte la civilisation chinoisc, les conditions de la vie chinoise, soil pour un motif, soil pour un autre, sans lettres dc iiatitralisa/ioiii quoique consideres comme naturalises. Ces etrangers sont soumis a la loi commune. (**) Lorsiiu'une loi parliculiere paraitdiffe- rer dans son application des principes poses dans les lois gcnerales, la preference doit etrc accordee a ces dcrniercs, et, dans les autres cas, a celle qui prescrit la peine la moins severe. (**•) Ces privileges du rang imperial s'ap- pliquent indislinctement a I'empeieur, a Vim- peratrice, a I'lmperatrice mere, a timpera- trice •(rand'mere. (***') On lit dans une note de Tedition de 1 832 (que nous possedons) du Tdi thsing liu It, ou code general chinois, (|ue le Jour est actuellcmcnt di\he en <)() parties, con- forniementa YAlmanucti imperial; j Go jours forment une annce. Une journie d'ouvrier n'embrassera que les fractions du jour com- prises entre le lever el le cotictwr du soleil. (**•**) Les nouvelles lois sont obligatoires du jour de Ieur promulgation. (****•') Decision par analogic. CHINE MODERNE. 386 45. Des lieux de transportation tem- poraire et perpetuelle. 46. Des lieux de bannissement ou de transportation extraordinaire ou mi- litaire (*). § 2. Lois c'wiles (**). A. Systeme de gouvernement. 47. De la succession her^ditaire aux rangs et litres reconnus tcls par le§ lois^ 48. De I'incapacite des grands fonc- tiounaires ou niinistres d'Etat a noni- nier aux emplois (***). 49. De la defense faite aux fonction- naires ou mandarins civils de solliciter des titres hereditaires (****). 50. Des employes surnumeraires du gouvernement (*****). 51. Des devoirs et des garanties des niessagers officiels. 52. Des degres litteraires ou autres accordes a des individus qui ne les ont pas merites (******). (*) La transportation temporaire ne doit pas avoir lieu plus loin que 5oo li ou 5o lieues. La transportation perpetuelle est de trois degres: de 2,000, 2,5oo et 3,ooo //. La transportation ej;< qui puissent les assister. Tout magistral qui " leur refusera I'entretien etson appui, sera ■« puni de soixantc coups de bambou. « Quaiid un magistral et ses subordonnes mnn(|ueront de douner a ces pauvres, entre- tenus et pi olegcs par le gouvernement , lout ce que la loi leur accorde en nourrilure et en velements , ils seront punis en proportion de la valeur de ee qu'ils en auronl retranclie, suivant la loi porlee contre ceux qui dissi- pent les objels renfermes dans les magasins du gouvernement. » Suivant les prescriptions de cede loi , il y a , dans la plupart des vilies de la Chine, des hospices enlrelenus aux frais de I'Eiat el par la charite publiqne, pour yrecueillir les en- fants trouvcs, les iuQrmes et les vieillards qui , n'ayant plus ni parents ni amis pour les secourir, ont par consequent droit a /'as-' sistaiice publique. (*) D'apres cctle loi, les terres qui uc sont point inscrites sur les regislres du fisc sont confisquces au profit de I'Etat. (**) La remise d'une partie on de la lo- talite de I'impot foncier, en meme .temps qu'une prompte distribution de secours en grains, tires des magasins publics de I'Elal , sont les moyens les plus nsiles par le gouver- nement chinois pour attenuer autant que possible les calamiles publiques, comme les jjrandes inoudalions, les grandes secheresses, etc. Dans I'idee chinoise, I'empereur etant le perc du peuple, et les fonctionnaires publics etant ses representants , ceux-ci sont reiidus par lui responsables de la population (pi'ils gouvernent, et ils doivent avoir pour elle la meme sollicitude qn'un bon pere de famille, (***) Ces terres doivent I'impot foncier cl le service personnel comme les aulres, excepte 238 L'UNIVERS. 93. De rusurpation des tcrres et des fermes, et de leur vente frauduleuse. 91. l)c lacliat des terreset des fermes par les foiictionnaires publics (*). 1)5. Des hypotlieques foiicieres(**). <»6. J)e l'usur|)atiou frauduleuse des tcrres par la culture du douiaiae public ou priv^ {***)■ 97. De I'abindon des terres portees aux roles de I'impot foncier, ou dont la culture est negligee (****). 98. De la destruction ou de rendom- iiiagemeut des outiis de labourage et des fruits de la terre, etc. 99. Du niaraudage dans les jardins, vergers, etc. 100. De I'emploi prive des objets qui appartiennent au gouvernement. ccllcs qui out ete donnees par I'enipercur a litre lie recompense nalionalc. (") Les foiHtionnaircs publics qui out line juridictioii lerritoriale, ainsi que Icurs coui- niis ou greffiers, ne peuveiil acquerir uucunes Icrres dans les limites de ceUe juridiclion , pendant rexerclce de leur autorile. (**) La loi en Chine a pris beaucoup de precautions pour garantir le pret d'argenl sur nypolhcque. Qnaud la fraude est recounue , la lerre hypolhequce illegalement est confis- tjuce au profit de i'Htat. (***) En general, dit la loi,le prolit tire d'uiie terre cultivee sans autorisaliou sera restitue au proprietaire a qui elle apparliuu- dra , ou devolu a I'Etat , par contiscation , suivnnt les circonstances. (****) Cetle loi n'eri est pas une des moins curieuses du code chinois. Le legislateur qui I'a proinulgwce pensait sans doute que si noblesse ohl'ige , proprietc oblige aussi, et qu'il est de T'intercl general qu'une portion quelconcpie de la richesse publique (coinpre- naut toules les richesses privces ) ne reste j)as improduct'tve par le f.iit de celui qui s'en trouve etrc le delenteur. <■ Le proprielaire , dit la loi, qui laisscra sa terre inculte,ou qui negligera ses |)lanla- lions de muriers, de cliauvrc , etc. , sera pnni snivant la proporlion qu'il y aura enire la parlie inculle ou negligee et la totalite deses terres, etc. De plus, il y a solidarile etablie par la loi enire le cliej An village ou de la commune (/< ichd/ig) , le premier magistral du canton (/i/V« huiuin) et le proprielaire ne- gligeanl. Le cliefdu village sera de dcuje de- gres plus coupablc que le chef du canton; les assesseurs de celui-ci serout punis comme complices du delit. » 101. Des regies fiohcemant les nia- riages(*). 102. De I'aete par lequel une femnic ou une fille est louee a un autre (**). 103. De linobservation par le mori du rang que doivent occuper sa feninu; principale et ses feraraes secondai- res (***). 104. Du renvoi du gendre de la inai- son de son beou-pere qui veut donner un autre mari a sa fille (****). 105. Des nwriages contractes pen- dant la duree legale du deuil. 106. Des mariages contractes pen- dant qu'un pere ou une mere sont en prison. 107. Des mariages cntre personnes qui ont le meme nom de famille (***»*). 108. Des unions contractees entre personnes deja parcntes par un ma- riage ; ce qui, d'houorables qu'elles doi- vent etre, les rend viles (******). {*) En general, d'apres la loi cbinoise, lo droit de conclure les mariages et de les con- troier reside tout entier dans les parents et les grands parents, ou ceux qui en ticnnent lieu. Un bomme, en Chine, pent epouser plusieurs fenimes; niais il ne pent en avuii qu'une du litre veritable d'epoiise (uxor, cu chinois tlisi); et celle-ci est son cgale; les aulres feinmes ne petivent porter quele litre de femmes secondaires (en chinois tltsiSi) , soumises a la premiere. (**) " Quiconquc, dil la loi, louera une de ses lemmes a un autre, pour en faire la sienne pendant un temps, sera puiii de qua- tre-vingts coups de bainbou; quieouque louera ainsi sa fille, le sera de soixante. » (***) « Quiconque, dil la loi, fera descen- dre sa premiere femme au rang de femme se- condaire , subira une peiue de cent cou|)S de bambou; quiconquc, pendant la vie do sa principale femme, en elevera une autre au nieuie rang, en recevra quatre-vingt-dix. (****) Peine de cent coups de bambou ap- pliquce an bcan-pere. (*****) Ces mariages sont interdils. («»**«*j La loi cbinoise est beaucoup plus exclusive que la loi francaise. Elle est ainsi conque: « Toule union contractee outre per- sonnes deja parentes au quatrieme degre, par un autre manage, el tons les mariages fails avec des sauirs, filles dc la nieme mere, quoi- que nees de peres differenls, ou avec les bel- les-lilies d'ini premier mari, seront conside- rcs commc incestuous, ct puuis suivant la CHINE MODERNE. 339 109. Du manage avec des parents du m^me sang , ou avec les veuves de ces parents. 110. Du niariage des fonctionnaires publics avec des femmes dont les fa- milies sont soumises a leur juridic- tion (*). ill. Du mariage avec une personne qui se cache pour cause d'un crime. 112. Du mariage force des femmes ou des filles d'hommes libres (**). 113. Dumariageavecdesmusiciennes ou comediennes (***). 114. Du mariage des pretres de Fo et de ceux de la secte du Tdo {****). 11-5. Du niariage entre des personnes libres et des esclaves (*****) . 116. Du divorce, ou dela repudiation de la femme par le mari (******). loi centre les liaisous crimiuelles entre pa- rents. « Uu homme n'epousera ni la hiu de son pere ou de sa mere, ui les lilies de la tante de sou pere ou de sa mere; ni la soeur de son beaufrere ou de sa belle-soeur , ui la soeur de la femme de son petit-Ills, sous peine de re- cevoir cent conps de bambou pour ce delit. » (*) Interdits. (**) " Quiconque, dit la loi cbinoise , se confiant en son poiivoir ou en son credit, eu- levera la femme ou la fille d'un liomme libre, pour en faire une de ses femmes, sera mis en prison pendant le temps nsite, et con- damne a la mart par strangulation , etc. » (•**) Ces mariages sont interdits au.x fonc- tionnaires publics. (****) Le mariage est interdit par la loi aux pretres de ces deux sectes, qui sont tres- nombreuscs. « Tout pretre de Fo ou Tao-sse , dit la loi , qui se mariera en epousaut uue femme principale , ou uue femme secondaire , sera puiii de quafre-vingis coups de bambou el chasse de son ordre. L'individu de la faniille qui Ini aura donne cetle femme eii mariage, subira la meme peine que lui; le mariage sera nul, la femme sera renvoyee a sa famille, et les presents de noce seront confisques an profit du nouvernemeul. Tons les autres pre- tres ou bonzes de sa communaute seront su- jets a la meme peine corporelle que lui, s'ils ont ete complices de son delit , uiais uon a etie expulses de leur ordre; et s'ils ont ignore le delit de leur confrere, ib ue seront condainnes a aucune peine. » (*****) Ces mariages sont interdits. (*****^ La loi chiuoise autorise la rcpudia- 117. Lorsque des mariages sont con- tractes contrairemeut aux lois, les per- t/on de la femme par le mari, d'abord pour crime d'adultere, ensuite, pour les sept causes suivantes : I" La slerilite {wdu tseu); 2° Vimpudicite {yen jf); 3° La desobeiisance envers les pere et mere de son mari {poii sse hijou kou) ; 4" La loquacite ou la propension a- la medisance (to yen) ; 5° Le pencliant au vol (tad khioi'ing) ; 6° Vn caractere jaloux {toil ki); 7° Une maladie incurable {oping). « Qiiand toutes ces causes de divorce exis- teraient, si Ion pouvait y opposer i" que la femme a porte trois ans le dcuil pour le pere ou pour la mere de son mari ; a*" que sa fa- mille est devenue riclie , de pauvre qu'elle elait avant sou mariage, et au temps oil il s'est fait; 3° qu'elle n'a plus ni pere ni mere pour la recevoir, elles seraient inadmissibles, el le mari qui aurail cbasse sa femme sur de lels foudenients subirait la peine de qua- Ire-viugts coups de bambou, moins deux de- gres, etserait oblige de reprendre sa femme. >• La loi chiuoise rend, dans eeriaius cas, le divorce obligatoire : « Si la femme avail rompu le lien malri- monial par un adultere , ou qu'elle eiit com- niis un delit pour lequel la loi veut que des cpoux soient separes, le mari qui ne la ren- verrait pas en subirait la peine j)ar I'appli- calion de quatrervingls coups de bambou. « Quand deux epoux, ne se convenant point, desirent muluellemenl se separer, la loi n'y peul mettre opposition. « Si un mari refuse de consenlir au di- vorce , et que sa I'emme, qui pretend s'en se- parer, abandonne sa niaison , elle sera punie de cent coups de bambou , et son mari pourra la vendre a celui qui voudra I'epouser, etc. » Dans un livre intitule Traditions sur les devoirs des femmes dans I'antiquile ( Tien koiili niii tchouan), en deux livres , d'oii sont tiretes les sept causes de repudiation que nous avons euumerees ci-dessus , on lit encore que « la femme ne doit prendre aucune part daus >' la direction des affaires de la famille ; et « qu'il y a trois personnes auxquelles elle doit « surcessivement obcissauce : i° a son pare, « pendant qu'elle est daus la maisou paler- « nelle; 2° a son mari, apres qu'elle a ete ma- « riee; et 3" si elle devieut veuve, a son /ils « ai'nc. Dans aucune circonstance de sa vie, « elle ne doit etre maitresse absolue d'elle- « meme. » Ces devoirs de la femme chiuoise sont let' 340 L'UNIVERS. soniies qui se sont entremises pour les dre les objets en nature provenant de nciiocier en sont responsables. I'impdt. 118 Oes regleinents concernant la 122. De Taction de monopoliser le nionnaie (*). , payement des impots (*). 119. Des epoques fixes ou Ton doit 123. Des laux recepisses ou fausses percevoir les impots en nature. quittances de payements d^livr^es dans 120. De rimpartialite que Ton doit les magasins publics. apporter dans la perception des impots 124. Dii trop percu dans les impots; les transports d'une branciie a une au- tre du revenu public defendus ; la vc- rite et la iidelite dans les comptes exi- gees. 125. Du pret ou de I'emploi secret du revenu public en argent. 12G. Du pr^t ou de I'emploi secret des clioses pubiiques ou qui sont la pro- priete piiblique. 127. Des reeettps, depenses ettrans- ferts du revenu public. 128. Des fraudes commises par les employes dans les magasins ou greniers publics. 129. Des fraudes commises dans la distribution des fournitures et de la solde de I'armee. 130. De la solidarite des fonction- naires employes dans le maniement des fonds publics. 131. De la responsabilite des monies fonctioiinaires dans It s cas de soustrac- tion de denrees ou d'objets conserves dans les magasins publics. 132. De la responsabilite des rece- veurs et des distributeurs d'objets en argent ou en nature appartenant au gouvernement. 133. Des fraudes commises dans les greniers ou magasins publics a I'entree et a la sortie des denrees ou autres ob- jets. 134. Des vexations commises dans la perception des impots publics. 1 35. De la purete exigee de I 'or et de I'argent requs en payement des impots. 1 3G. Des dommages et pertes qui ont lieu dans les greniers et magasins pu- blics. 137. Du transfert des denrees et ol)- jets appartenant au gouvernement. 138. Des regies a suivre pour les confiscations et les restitutions. en nature. 121. De Taction de d^rober aux re- gards ou de laisser endommager et per- titelUment dans les ancieunes lois indienncs de Manuti, conime beaucoup d'aiUres pres- ciiplioiis des lois chinoises , encore aujoui- d'liui en vij;iieur. On lit , en effet, dans Ma- /loit, lA\Te\, S/o/ia 1 48: •< Pendant son enfance , la femmc doit de- •• pcndre de son peie; pendant sa jcnnesse, « elle doll dcpendie de son mari; son mari « etanl inort, elle depend de ses lils. La femnie .< ne doit jamais elie niailresse absolue d'elle- « menie. » Yoici le texte Sanskrit : lidlje pitour Tasti ttclitel ; pdnigrdhasya jdvane, Poutrdndm dliartlari prcte ; na bkadjet stri svatantratdm 1| i48||. I,a memo prescription se Ironve encore dans le Livre IX, SI. 3 : « Le pere garde la femnie pendant son en- « fence; le mari la garde pendant sa jen- « nesse ; les fils la gardcnl pendant sa vied- « lesse. La femmc xw doil jamais elre laissee ■• a I'exorcice libre de sa vplonte. » Pild raxati kdmdre; bhartd raxati ydvaiie, Raxanti sthdvire poutrd ; na strt svdtantrlyaru harali ||3||. On voit, par ces citations, que la femnie, dans I'lnde et en Cliine , est toujonrs mi/ieiire, et t\H'elle ne pent , en aucun temps , disposer de sa personne et de ses hiens en toule li- berie. (*) •' Snivanl les regicments qni concer- iienl la fabrication de la monnaie, dit la loi, i) J a des fonderics et des etablissementsou le metal est prepare et frappe, et des magasins ou la monnaie est deposee jusqu'a ce qn'elle soit mise en circulation. La quantite de metal monnaye, el les epoques de sa sortie des magasins ou de son emission, seront fixees d'apres les deliberations du niinistere des fi- nances, alin que les emissions successives de la nionnaie se fassent en raison des besoins publics. A la meme epoque, ce ministere re- glera aussi le prix de Tor, de Targent, des grains el autres objets d'utiliie pnblique ou de consommalion , selon le cours de la place It des marches. » (*) Le but de cede loi est d'empecliti I'etablissement d'une industrie usnraire qui speculerait sur la gene du peuple pour faire des profits illicites. CHINE MODERNE. 241 139. De la conservation des proprie- tes confisquees. 140. De Taction de cacher ou degui- ser les personnes at les proprietes con- fisquees (*). 141. Des regiements sur I'exploita- tion et le commerce du sel (**). 142. Des gains illicites que se pro- curent les surintendants du sel. 143. Du maintien et de I'exeeution des regiements sur le sel. 144. De la contrebande du the (***). (*) «Les families des criminels, dit la loi, ne seront reiidues esclaves , et leurs proprie- tes niobilieres ou immobilieres confisquees , que dans les cas de Iraliison, de revolte, ou d'un autre des dix grands crimes (enunieres precederanient n° 2), ou dans ceux oil la loi i'ordonne expresscment ; et si un magistral rend injustement, et sans autorisation , une sentence de confiscation , il sera puni comme dans le cas oii il condamnerait quelqu'un au bannissement perpetuel, avec injustice et de son propre mouvement , elc. » (**) « Le commerce du sel (observe le tra- ducteur anglais du Code des lots penales), donnant en Chine des droits qui forment une branclie considerable du revenu de I'Etat, se fait par un privilege exclusif , regie et limite aun nombre de negociants auxquels le gou- vernemeut accorde des licences a cet eftet , et dont les magasins sont soumis aux visites de preposes, nommes specialement pour ce service dans chaque province. Les nego- ciants qui jouissent du privilege de vendre exclusivement le sel, comme ceux qui out celui d'en trafiquer seals a I'elranger , sont tres-riches et fort consideres. Le principal marchandde selk Canton, passe acluellement pour elre rhomme le plus riche de la pro- vince, Les regiements sur Texploitation et le commerce du sel sont tres-minutieux, ce qui prouve qu'ils ont une grande importance j^s- cale, (***) " Quiconque, dit la loi , vendra clan- destinement du the, sera sujet aux peines elablies precedemmenl centre ceux qui ven- dent du sel clandestinement. Quiconque 8) ant une licence pour vendre du the , indi- quant la quantite qu'il pent en posseder, cer- tifiee conforme par les employes du gouver- nement auxquels cette licence a du ctre presentee a I'effet den faire la verification , et s'en servira , apres le temps fixe pour sa validile, pour tirer, des plantations de tUe , de nouvelles provisions, subira toutes les Ies portees conire la contrebande de cette 16* Livraison. (Chine modebne.^ 145. De la contrebande de I'alun. 146. Des droits eludes . ou de la contrebande en general (*). 147. Des vaisseaux niarchands qui ne declarent qu'une partie de leur car- gaison (**). 148. De i'arriere dans le payement des impots et des droits sur ies mar- chandises (***). 149. Du pret usuraire (****). 150. De I'infldelite concernant une propriete ou des objets confles. 151. De la trouvaille de choses per- dues , ou des epaves (*****). marcbandise, et infligees comme de cou- tume. » (*) Les lois chinoises sur la contrebande sont severes et minntieuses; mais elles n'en sout j)as moins eludees quand il se trouve un fort profit a le faire, comme dans la contrebande de Yopium, qui porle un si grand prejudice a la population cbinoise,et que les mesures les plus severes du gouvernement n'ont pu encore rcprimer. (**) « Tons les capitaines des grands ba- timents marcbands, dit la loi, qui navigue- ront sur la mer, en abordant au port pour lequel ils auront fait voile, remettront aux oi'ficiers de la douane Yetat exact de toutes les marcbandises qui seront a leur bord, afiu que Ton puisse etablir les droits qu'ils devront payer pour elles. Si le negociant du pays auquel est adresse un vaisseau marchand , ou le subrecargue de ce bailment, dans le lieu oil il relachera, ne fournissent point I'etal ci- dessus , ou en donnent un qui soit faux ou defectueux, ils seront piinis decent coups do bambou , et les marcbandises non portees en totalile ou en partie sur ledit elat seront sujetles a confiscation. Ceux qui recevront de telles marcbandises n'ayant pas ete du ment verifiees lorsqu'on les mettra a terre, subiront la menie peine. « Les personnes qui donneront avis des infractions faites a cette loi, recevront la re- compense de 20 lianff ou onces d'argent (160 francs). » (***) « Tout I'arriere, dit la loi, qu'un contribuable doit au gouvernement dans le cours d'une annee, sera acquilte avant la fin de I'annee. » (****) Le taux legal de Tinteret en Chine est de 3 pour cent par mois et de 3o pour " cent par an. Il est defendu aux fonctionnai- res publics de preter de I'argent a leurs ad- ministres, meme au taux legal. (*****) Le droit chiuois est le meme qu'e- 16 31? L'lJNiyKRS. 152. Des agents coinmerciaujf elpblis et autorises par le Cioiiveriipme|it daps chaque ville, marclie public, port de mer, etc. (*). , . , 153. De revaluation du pnx des mar- chandises par des facteurs ou des agents commerciaiix (**). 154. Dp I'entente iilicite entre le^ facteurs ^t les marchands (***). 155. Des ppids, des mesures et ^es balances fausses (****). ma. De fa ifabrication d'ustepsiles ct d'etpffes de soie dans una formie non sanctionnee par l''usage (*****), tail le droit fran^ais avant la revolution. Les objetis IrOHvik cloiverit eire deposes entre les mains du chef du canton dans lequel ils nnt cit ti-ouves. Si ces objets sont reconnus pour faire partie de la propriele pubiicpie, iis se- ront relenus par le gouverneineni ; sinoa , ils lesteront cliez ce niagistrat pour etre reinis au proprietaire , s'il se presenle. (^ Ce sont des agents patenles qui ont de I'analogie avcc nos agents de change , cour- tiers de commerce, etc., et comrne eux assu- jettis a tenir des regislres officiels qui les ren- denl responsables de leurs transactions, etc. ('*) « \.vs agents commerciaux appointes par le gouvernenient (espece de commissai- res-prisenrs), apres avoir examine suffisam- ment les marchandises qu'on iin|)orlera dans knrs niarclies respeclifs, en feront revalua- tion en toute ef|uite. S'ils s'ecartent de ce devoir par suresliniation ou moindrc prisee desdites marchandises, ils seront sujels a su- bir une peine proportionnee a ces augmenta- tion ou diminution de valein-, d'nprcs la loi concernanl les malversations pecuniaires en general , etc. » {'**) Cette loi est destinee a at^eindre toules les speculations qui auraient pour but de faire surcucherir ou de deprecier les mar- chandises. I (**") Peines severes ajtcignant tons les complices, les fabricants de i'aux poids, de fausses mesures , comme ccux qui s'eu ser- 1 vent, aussi bicn que les poids el mesures qui, quoique coufornif s aux etalons du gou- vernemenl, n'en porieraient point |e timbre. (*****) « Lorsqu'un parliculier fabri<|uera lourlavente, dil la loi, quelque article qui le sera pas, en tout, aussi bien confectionue que le modcle clabli par le gouvernenient, on rc^u dans I'usage ordinaire, ou des eloffes de hoio et aulres d'un lissii iiioiiis scire, d'une largciir moins graude el d'un auiiage plus court que rcchautillou legal ou usuel, § 4. Lois riituelles (*). 157. De j'administrgtioq des rites rclatifs aux sacrifices (**). 158. De la dei^radation et de la des- truction des autels, te|rasses et tertres sacres, sur lesqueis se celebfent les sa- crifices. 15'J. D6s rites sacres a observer dans les provinces, conforineinent au rituel qui les contient (***). 160. Des tombeaux des anciens eni- il sera bou. » puni de cinquante coups de bam- (*) Les lois riluelles (// /«/), ou cellcs qui sont deslinees a regier la pratique des devoirs religieux, ne sont (|n'au nombre de vingt-six, dont six (i57 a 1G2) se rapportent aux sacrifices et aux offrandes, el 20 (i63- 182) aux clioses imperiales et aux ceremo- nies pnbliques. (**) " Tons les fonclionnaircs du gouver- nement, dil la loi, qui president a Taccomplis- sement des grands sacrifices au C'lel, a la Terre, aux Ge'nies des productions terreslrcs, ou di- viniles tutelaires de I'Elat (//«>*«, tin', die, t/isi td sse), et ceux (|ui president aux cere- monies reiigieuses dans les temples iniperiaux, s'y prepareroiit loujours par I'abslinence ; ils s'eiigageront, par des vneux solennels, a observer cettc abstinence, et , avanl de pro- noncer ces vucux , ils annonceront , de la ma- niere que la loi le prescrit, le jour oil se feronl les sacrifices qui oul lieu dans de telles occa- sions , etc. " (***) « Dans tons les deparlemcnis, arron- dissemenls el cantons de chaque province, dit la loi, les Genies locaux (jui president aux fruits de la terre; les Esprilsdes nionta- gnes, desfleuves, des vents, des nuages, des eclairs et du lonnerre, de la pluie, j-insi que les saints empereurs {Yao, Chun, elc.), les rois eclaires, les ininislres fideles, et les grands philosophes, seront tons hoiiorcs publique- iiient par des oblations et sacrifices, et il en sera fait commemoration dans les ceremo- nies saiiites qu'ordonne a leur egard le code rituel. « Les chefs des circonscriplions adminis- tratives enumerees ci-dessus ne manqueront pas d'elever a ces peisoiiuages AWim des monuments convenables, pour en honoreret conserver la memoire, en fnisant t'rigei des tables sur 'lesquelles on gravera jeurs noms, leurs litres, el les jours oil Ton devia leur faire des sacrifices, etc. » CHINE MODERNE. 243 pcreurs et personnaf;es distingues (*). IGI. Du culte proiaiie rendu aux Es- :irits(**). 162. De I'interdiction des masiciens, chefs de sectes , propagateurs de faus- ses doctrines (***). (*) « Les moniiraents funeraires des an- cieiis em|ierems et princes, dit la Ibi, de meme que ceux des saints personnages on pliilosophes de rnnliqiiite,des anciens sages, des minislres fideles, etc., seroiit soigiieuse- ment entretenus par les cJiels des cantons oil ils auront etc eriges; el il est defeiidu a toiile personne de faire paiire des bestiauxi de couper du bois et de condiiire la charrue au- tour de cos monuments respeclahles. » (**) Cette loi defend aux parliculiers, aux families privces, de lendre un culte prive au ciel , a leloile polaire, etc., en derogation aux ceremonies publiques. Elle defend aussi aux pielres de Fo e\ aux Tdo-sse d'imiter les rites sacres du culle officiel-, et aux femiiies de se rendre dans les temples de ces pretres |. pour y faire des ceremonies religieuses. (***) La loi chinoise est tres-severe siir ces matieres, qu'elle considere comme des moyeiis directs ou iiidirects de troraper le peuple, et delui inspirerdes idces perverses, des sentiments dangeieux pour la Iranquillite puhlique. Dans cette calegorie soiit places les propagateurs et les sectaleurs de la doc- trine chrelieniie, ou du mailredu Ciel(t/iieu tclio'u) , comme elle est designee. " Lorsqu'oa decouvrira, dit-el!e, que ces personnes auront otfert de Tencens en secret aux representations des objets do leur culte , el qu'elles auront rassemble leurs sectaleurs peudaut la unit, pour les instruire de leurs maximes, en abiisant des pouvoirs qu'ils s'at- tribuent, ainsi que des connaissanccs qu'ils pretendent avoir pour seduire et tronqier la multitude troj) credule, le principal ministre de leurs abominations sera eniprisonne pen- dant le temps prescrit, et perdra la vie par strangulation. Ses adhereirts recevront cha- cun cent coups de I amboii , et serout ban- nis a perpetuite, a la distance de 3,ooo//. » On peul voir dans le Tai-thsing liu U, ou Code chiiiois, la legislation concernant la religion cliretienne, reviieVd premiere annee Tao kotiang (iSai), et dans laquelle est re- )iouvelee la « defense formelle , rigoureusc « i^jdii liin) aux bommes de I'Ocean occiden- tal (les Europeens), de pcnetrer et de se- ]ouiiier dans rinterieur de la Chine, en lemc temps qu'il est prescrit a ceux qui s'y Irouveraient etablis de veudre leurs pro- pri^les et de quitter le pays. » I 163. De la preparation des medeci- nes et des niets destines pour I'empe- reur. 164. Du soin des equipages et de la garde-robe de I'enipereur. 165. De la possession et du recele- ment des livi-es defendus, et des ins- " truments astronomiques (*). 166. De la transmission des presents imperiaux. 167. De {'observance des jours de fetes et de cereinoiiies. 168. De raccomplisseiiient conyena- ble des ceremonies prescrites. 169. De I'ordre aans lequelles fonc- tionuaires pubh'cs doivent parler a rempereur (**j. f 170. De remp^chement premedite «'■ d'avoir une audience de ['empereur (***), 171. Des adresses sur les affaires publiques (****). Nous verrons plus loin quelles sont les mo- difications obfenues sur cet article par notre inutile et couteuse ambassade, (*) « Tout chef de maison ou de fa- mille, dit la loi, qui gardera cbej lui secre- tement les images des esprils celestes, les insiruments dont on se seit pour expliquer le coins des aslies, ou pour en tracer les representations (comme des spheres et autres instruments de ce genre, dit la Giosc); qui aura des livres d'asti-ologie, de diviiiation, ou d'autres dont la possession est defendue (parce qu'ils troublent le gouvernement ; dose) ; qui de plus conservera les portraits des empereurs et rois des differentes dynas- ties, des sceaux officiels graves sur de I'or ou des pierres precieuses (exceple les priu- cipaux fonctionuaires), et enfin toute autre chose semblable, sera puni de cent coups de bamboti, etc. » ('*) Le phis eleve en dignite s'avance, et parle le premier. / {'**) « Si un fouctionnaire, dit la loi, ou une '-'• auli'e personne qui a droit a I'houneur d'etre / presentee a Sa Majeste Imperiale, est eloiguee ( de cette prerogative sous d'insidieiix pretev- tes employes par le surinleudaut des cere- monies imperiales , cc suriniendant , cou- vaincu d'avoir agi de la sorte dans lo dessein de nuire, sera mis en prison pendant le temps ordinaire, et condamne a avoir la tele tranchee. » (****) « pn tout ce qui conccruera les fautes commises dans I'administraliou des affaires de I'Etat, dit la loi; les avanlages ou les prejudices qui pourront regarder I'armec 16. ^44 L'UINIVERS. 172. Des monuments eriges par des ft le petiple; en uo mot, dans toutes les af- faires ou les |>rojel$ qui tendront a accroitre Ic Ijjeii public , on a tiii|.t'clier qu'il n'y soil porle aUciiite, il en sera fait des enquetes, et le rcsuilat en sera place sous les yeux de I'enipercur iui-ineme, par les mandarins des six grands niiuisteres de I'^tat. « Les censenrs, les gouverneurs et lieute- nants gouverneurs des provinces, chacini en ce qui les concerne, represenleront de uieme a I'eaipereur, avec lidelile et sans rieu ca- cher, tout ce qui paraitra bon a lui £(re communique sur les objels ci-dessus. i< Si un fonctionnaire grand ou petit, soit a la cour, soit Sans les provinces , s'aper- (joit dc quelque irregulai ite dans les actes de {'administration a laquelle il appartieut, il en fera la declaration claire et precise a son su- perienr, cjuand le sujet meritera d'etre mis sous les )eux de Sa Majeste Inipcriale, par uu rapport fiJele, pour qu'elle en decide suivant son bon plaisir. Ceu\ qui, ayant re- counu ladite irregularite, iaisseront passer beaucoup de ten)ps sans en donner avis a leurs superieurs , ce qui etablirait une con- nivence avec eux, seront sujets, si c'est a la cour, a eire recberches pour cette conduite par les censeurs, et, s'ils out comniis ce debt en province, par les gouverneurs ou leurs delegues. Lorsqu'ilsseroulreconnuscoupables d'une telle omission, ils subiront la peine vonluc par la loi pour les cas ordinaires , oil Ton mau(|ue de faire uu rapport necessaire sur les affaires publiques, a ses superieurs ou a Sa iNIajeste, « Dans toutes les representations de cetle nature adressees a I'enjpereur, les fails qui en fi-ront le sujet et les raisons donnees a I'appui, devront etre etablis d'une maniere simple et sans detours ; chaciin de ces fuils forniera un article separe, et bicn expose. Tout mot vide de sens el toule repetition inutile seront bauuis de ces adresses. « Les fonctionnaires qui sollicitent un avan- cement en se servant de termes iusidieux sout puuis de cent coups de bambou. S'ils porlenl a tort des accusations coutre uu fonc- tionnaire dont ils convoiient la place, ou pour un autre motif, et, de plus, si, pour que leur adrcsse parvienne plus sdreinent a remj)iieur, ils empruntont un sceau et une euveloppc officielle, eux, et la pcrsonne qui leur auia prete le sceau el mis la suscriplion a I'adresse , seront condanmes a avoir la tele traucbee. » (Ce debt est du genre mixte; Close ; c'est-a-dire (pie la peine en est com- muable en un bannissement.) On voit, par ce texle de loi, que si le gou- fonctionnaires publics en leur pro- pre lioniieur (*). 173. De la defense d'aller au-devant des fonctionnaires superieurs , et de les reconduire au dela de certaines limi- tcs (**). 174. Des envoyes ou commissaires officiels qui traitent avec hauteur et mepris les mandarins de province (***). 175. Des lois somptuaires con- cernant les vetements et les habita- tions (****). vernement cbinois n'a pas, comme les gou- vernemenls europeens, des journaux quoli- diens pour le raniener ou le mainlenir dans la bonne voie, pour lui donner d'utiles avis (quand ils ne se borncnt qu'a cela), il a d'anlres mojens de connaitre les abus et de les rcprimer. — « II faut convenir, dit G. « Staunton , qu'il y a peu de monarcbies re- « gulieres oil la conduite personnelle du soii- « verain , et les mesures generales qu'il or- « donne, soient soumises autant qu'en Cbine " aux lois, aux coutumes, et a I'opiuion pu- « blique. » (*) « Si quelque fonctionnaire public, dit la loi, pendant le temps de son administra- tion , ose elever, dans les limites du pays sou- mis a son autorite, un monument public portant des inscriptions en son propre bon- neur, lorsqu'il n'a eftectivement rendu a I'Etat aucun service digne d'etre rappele a ia me- moire de ses conciloyens, il sera puni de cent coups de bambou. Les inscriptions seront ef- facees , et le monument abaltu. » (**) « Quand des fonctionnaires superieurs du gouveriiement ou autres, cbarges d'une mission speciale de I'empereur, seront en route pour la remplir, si queiqucs-uns des fonctionnaires de la province vont plus loin que les murs de leur ville, soit a leur rencon- tre, soit en les reconduisanl, ils seront punis de qualre-vingl-dix coups de bambou. « Quiconque souffrira que la suite d'bon- neur accordee a sa mission passe les bornes prescrites ci-dessus , subira la meme peine. » Dans un des staluts supplemenlaires , il est ordonne a tout soldat ou simple citoyen, sons peine de recevoir cinquanle coups de bambou , de ccder le pas a I'oificier civil on militaire du gouvernement qu'ils renconlre- rout dans un chemin public, ou s'ils sent a cheval , d'en descendre. (***) Ces commissaires sont punis de 6o coups de bambou. {*"*) « Les maisons, dit la loi, seront ba- ties, les apparlemeuts seront distribues , les voilures, les vetements et autres articles a CHINE MODERNE. 245 17G. Du respect que les pretres de Fo et les Tao-sse conservent envers leurs pere et mere, et de leurs vete- ments (*). 177. De la negligence a observer les phenomenes celestes (**). 178. De la defense aux magiciens, aux sorciers et aux Jiseurs de bonne aventure, de predire les evenements fu- turs (***). 179. Du deuil dont le devoir est ne- glige et la cause cachee. 180. Des fuuctionnaires publics qui I'usage des fonctionnaires du gouvernement et du peuple en general, seront fails confor- nieuient aux regies et aux gradations eta- blies; tous ceux qui les enfreiudront serout punis suivant leur position. >> (*) Les bonzes de Fo et les Tao-sse qui continuent a visiter leurs pere et mere, a sucrifier a leurs ancelres, a porter le deuil de leurs pareuts decedes , comme s'ils vi- vaient encore dans le monde , seront con- damues a recevoir loo coups de bambou , et obliges de I'enoncer a leur ordre. '< Les etoffes de soie que ces bonzes porte- ront seront d'une seule couleur, et taillees sur un seul patron; ils sabstiendront de se vetir de damas et d'eloffes a fleurs diversi- flees, sous peine de recevoir 5o coups de bambou , d'etre excius de leiu- ordre, et de voir confisquer lesdits vetements au profit du gouvernement. « Neannioins , le kia-cha (vetement in- dieu) et les autres vetements de ceremonies, exclusivement portes par les pretres, ne se- ront point regardes comme des infractions faites a cette loi. >• (•*) « Tout ce qui concerne la science des astres, dit la loi (comme le soleil, la lune, les cinq planeles, les vingt-liuit constella- tions principales et les autres) , ainsi que T'observation des eclipses, des meleores , des cometes el des autres phenomenes celestes, seront du ressorl des membres de I'observa- loire imperial de Pe-king. Si ces fonction- naires negligent d'observer exactement les- dils phenomenes, et de marquer le temps oi'i ils auront lieu, pour en rendre compte a S. M., ils seront puuis de 6o coups de bam- .bou. » (***) « II est defendu aux magiciens, aux iseurs de bonne aventure, de freqiienter les naisous des fonctionnaires civils on militaires I gouvernement; s'ils le font, ils subiront la eine de loo coups de bambou pour chaque rediclion. » n'ont pas pour leurs parents les egards qui leur sont dus. 181. Des reglements concernant les funerailles. 182. Des reglements pour les jours de fetes d'un pays. § 5. Lois militaires (*). 183. De la defense d'entrer dans les temples imperiaux. 184. De la defense d'entrer dans les palais imperiaux. 18.5. De la defense aux gardes impe- riaux de se faire remplacer, sans per- mission, dans leur service de jour ou de nuit. 186. Des personnes attachees a la maison imperiale manquant a leur ser- vice. 187. Dudelitdesuivreoude traverser les routes reservees a I'empereur (**). 188.- Du delit de substituer un arti- san a un autre artisan autorise iv tra- vailler dans les palais imperiaux. 189. Du delit, pour un artisan, de rester dans les palais imperiaux apres sa journee faite. 190. De ceux qui entrent dans les pa- lais imperiaux sans permission, et qui en sortent de m^me. 191. De I'obligation de visiter les car- tes d'entree des personnes qui entrent dans les palais imperiaux ou qui en sor- tent. 192. Du crime de tirer de Tare ou d'autres projectiles du cote des palais imperiaux. 193. De I'obligation, pour les soldats de garde la nuit aux palais, de ne pas deposer leurs amies. 194. De la defense faite aux indivi- dus convaincus d'un crime ou delit, et a leurs parents, de servir dans les gar- des imperiales. 195. De la defense de se meler au cortege ou a la suite de I'empereur. (*) Ceslois sont au nombre de 71, dont 16(183-198) concernant la garde du palais imperial; 21 ( 190-219), I'administralion de I'armee; 7 (220-226), les froiUieres et les doiianes de I'empire; 11 (227-287), les Irou- peaux du gouvernement, et 16 (238-25J), le service des depeches. (**) Peine de 80 coups de bambou. 34(S t'lWIVERS. 19C. DeTentr^e dans la cltereservee ctdans Ics palais imperiaux. 197. ])e I'escalade des murs d'en- ccinte de la cite iniperiale. 198. l3e I'ouverture et de la fermeture des portes des villes Ibrlifiees. 199. Ue I'emploi des forces militaires sans autortsatlon. 200. De fobligation de rapporter G- (lelehient les opeVations militaires. . 20). Ue i'euvoi des courriers de de- ^ches concernant les operations uiili- taires. 202. De la divulgation des secrets de Tarmee. 203. Prescriptions pour rentretieli des troupes sur les frontieres. 204. Des erreurs et des fautes coni- ihises dans les operations militaires. 205. Des retards apportes par des of- ficiers a riiettre ieurs troupes en rrtoii- vehieht. 206. tties soldats qui serveilt par substittits. 207. De rinfidelite dans les comman- dants enchef(*). 208. De la faiblesse ou de la conni- vence d'un chef qui laisse ses soldats se livrek- au pillage. 209. De la negligence apportee a Tcvercice et a la discipline des troupes. ?10. De la provocation a la revolte dii peuple par unecondiiite oppressive. 211. De la vente clandestine des che- vaux de troupe. 212. De la vente cldhdestitie des ar- mes et des effels d'habillements. 213. De leur destruction et de leur abandon. 214. Du delit de garder seci"eteineht chez sol des amies prohibees. 215. Du relilchement de la discipline parmi les soldats places sons ses ordrcs. 216. Des princes el autres nobles he- reditaires qui emploient .secretement a leur service prive des troupes de I'E- tat. 217. De I'abandon de son posle dans biie expedition ou uu detachement mi- litaire [*"). 218. Des faveurs accordees aux pa- rents des ofliciers el des soldats mot-ts au service. (*) Peine canitale, selon la cravitc du cas. (••) Id. 219. Des reglements pour la police de iuiit (*). 220. be ceux qui se presentent aux barriercs ou postcs - frontieres sans passe- ports. 221. Des passe-pOrts obtenus sousde faux pretextes. 222. De la detention sanS motifs, et des vexations coniniiSes aux barrieres ou douanes envers les voyageurs. 223. De Tassistaiice pret^e pour fa- voriser I'evasion , des villes fortifiees , des femmes et des filles des deserteurs. 224. De la decouverte et dc la prise des espions (**). 225. De la sortie clandestine des fron- tieres de I'empire, et de la contrebaride par mer en opposition aux reglements. 226. De I'emploi des archers a un ser- vice prive. 227. De la responsabilite dont sont charges ceux qui administrent lestrou- peaux de VtAat. 228. De I'elevage des clievaux pour le compte du gouvernement, 229. De I'infldelite dans I'examen et le choix des chevaux et autres animaux achetes pour le compte du gouverne- ment. 230. De I'inobservance des prescrip- tions de I'art veterinaire dans la nourri- ture et le traitement des animaux ma- lades (***). (*) II est defendii , par ccs reglements , a tbiiies les pcrsoiines liabilaiil PJ-/(i'/i^, de soillr de chez elles pendant la null passe ueuf lunnos douze minutes du soir, et avant cinq heures douze minutes du matin. (**J « Si dans des posies principaux elablls sur les frontieres, dit la loi , ou dans d'au tres places importantcs a garder, il se trouvo des conspiraleurs qui ciierchent a porter chez les nations etrangeres les productions et les inventions du pays , ou des espions qui s'y introduisent du dehors pour instruire Icin- gouvernement des affaires de lenqjire, ccs conspiraleurs et ces espions, quand on les aura decouvcrts, seronl conduits par-devant les tribunaux de I'ltlal, ct la inlerroges seyc- rement; et aussilol qu'ils auronl ete convain- cus des crimes ci-dessus, etc., ils seront con- danines a resler en prison pendant un temps determine, et a avoir ensuite latete tranchee. » (***) Un ouvrage sur I'art veterinaire, Cn 4 volumes, intitule Ma-king, pronve que cet art a recti une graade altention de la part CittlSE liidbERKE. 231. Du maiivais emploi ties betes de somme et aiitres aniiiiiiux dii gouver- nenieut, et de la negligence a !es soi- 232.Dela negligence a dresser et a exercer les chevaux du gouvernement. 233. De la defense geuerale de tuer les chevaux , les betes a cornes et les autres animaux (*), 234. Des animaux vicieux. 235. De la dissimulation de I'accrois- sement survenu dans les troupeaux du gOMverneinent. 236. Du louage clandestin des ani- maux appartenant au gouvernement. 237. J)es messagers ou envoyes pu- blics qui disposent indiiment des che- vaux du gouvernement. 238. De la transmission des dep^ches du gouvernement (**). 239. De ['interception des depeches et adresses envoyees au gouvernement. des Cliiuois; il n'y est question, toutefois, que lies chevaux, des ciiameaux, des mu- lels, etc., appartenant au gouvernement. « Si les chevaux, chameaux , mnlets, anes et Letes a cornes apparleuant an gouvernement deuieiinent matgrcs on malades pour n'avoir las ete trailes suivant la pratique appiou- le et recue, le niarechal ou niedecin ve- inaire sera puui de 3o coups de bam- ou , etc. » (*) Cette loi ordonne que « quiconque, sans la permission du gouvernement, tue ses propres chevaux ou ses beles a cornes, sera puni de loo coups de bambou , et de 5o seuiement si ce sont des anes ou des mulcts. » (**) « Les soldats des postes militaires , dit la loi , qui seront charges de la transmis- sion des ordres et des depeches du gouver- nement, ferorit 3oo //(3o lieues)dans un jour et nne nuif. S'ils sont en retard de trois f/itarls d'heure sur le temps qui leur est fixe pour t'aire ces 3o lieues, ils recevroni 20 coups de bambou, et un accroissement de punition a raison d'un degre pour chaque retard ad- dilionnel de trois (|uarts d'heure. La ceierite ordinaire des courriers de • depeches du gouvernement chinois est de 3o lieues ( 3oo //) par jour; quand ce sont des de|)e(;hes nrgenlcs, nommees en chinois depeches dc feu, les courriers qui les portent doiveni I'aire 5o lieues ( 5oo U) j)ar jour. C'est ainsi que des depeclies arrivent de Pe- king a Canton dans douzc ou treize jours. ^T)OI 247 240. t)e rehtretien oblige des etablis- semenls de nostes. 241. be Teipploi a un service prive des courriers des depeches. 242. Des retards apportes dans le service des depeches. 243. De Temploi, dans ce service, d'un plus grand nombre de chevaux ou (ie bateaux qu'il n'en est alloue par le gouvernement. 244. De la surtaxe en argent ou en rations demandee par les courriers ou messagers. 245. Du refus de fournir des chevaux pour les expres porteurs de depeches urgentes, ou qui interessent I'enipe- reur. 246. Du retard dans le transport des effets appartenant au gouvernement ou a sa charge. 247. be I'occupation des principaux appartetnents des etablissements de poste par des courriers ou des ofliciers ordinaires. 248. Du droit accorde aux courriers du gouvernement de porter avec eux, sur les chevaux de poste, des objets prives n'excedant pas dix Ai/i(*). 249. Des fonctionnaires publics qui obligent leurs administfes a porter leurs chaises ou palanquins. 250. Des families des fohctionnaires n)orts en activite de service, renvoyees chez elles aux frais du gouvernement. 251. De ceux qui, s'etant charges de transports pour le compte du gouver- nement , les conlient a des sous-entre- preneurs. 252. Du transport d'objets prives ou appartenant a des particubers, avec les chevaux, les chars et les bateaux du gouverneinent. 253. Du louage des chevaux de pos- te du gouvernement , dans un Intet^t prive. (*) Le kill est un poids de 617 grammes. D Les courriers ou porteurs de depeches du gouvernement ont done le droit de transpor- ter des objets prives, ou appartenant a des parliculiers, jusqu'a concurrence de 6 kilo- grammes 170 grammes. Comme il n'y a point en Chine d'elabiissemenis de postes a lusage des particubers, cette facultc accordee aux courriers des depeches est precieuse pour le transport des lettres ou depeches privees. ■ 248 LimiVERS. § C. Des Ms criminelles (*). 254. Du crime de haute traliison. 255. De I'infidelite eiivers le souve- rain et de la rebellion eiivers les ma- gistrals. 256. De la publication de livres de magie ou de predictions de I'avenir (**). 257. Du vol des choses employees par I'empereur dans les sacrifices (***). 258. Du vol des edits ou ordonnan- ces de I'empereur (****). 259. Du vol des sceaux du gouver- nement (•****). 260. Des vols commis dans le palais imperial («*****). 261. Du vol des clefs d'une villa for- tiflee. 262. Du vol des armes de guerre. 263. Du vol des arbres des enclos et des cimetieres. 264. Du vol des deniers et des ap- provisionnements des tresors et des greniers publics par ceux qui sont preposes a leur direction et a leur garde (*******). (*) Les his criminelles soiit ail nombre de 170 (du n° 254 au n° 4a3), etsont compri- ses dans (I subdivisions: 28 n°> (254-281) sont relatifsau rol; 20 (282-301), a Vhomi- cide; 22 (3o2-323), aux rixcs et querelles ; 8 (324-33i), aux injures; 12 (332-343), aux affaires liligietues ; 11 (344-354), a la cor- riiplion; 11 (355-365), aux /rawfi^M el /n/^i- fications; 10 (366-375), aux relations i/li- cites; ir (376-3S6), aux offenses mixles; 8 (387-394), aux arrestations et evasions ; 29 (395-423), aux emprisonnements . (**) « Toute personne, dii la loi, convain- cue d'avoir compose et public des livres de sorcellerie et de magie, ou d'employer des ."sortileges ct des figures magiques pour agiter le peuple et influencer les esprits, sera de- tenue dans les prisons pendant le temps ordinaire, et subira la mort par decapitation. (*'*) Peine capitale. — (**") Id. (***") Id. , pour les sceaux de I'empereur. (•""•) Id. ("*"") Les personnes convaiucues dece debt seront punies selon le degre d'impor- tancedu vol, et, en outre, elles seront mar- quees sur le bras, entre le coude et le poi- goet, de I'un de ces trois mots : j grains, yoUur du gowernement \ marcUandises, I argent, suivant la nature du vol. 265. Du in^me vol commis par d'au- tres personnes que des fonctionnaires. 266. Du vol commis avec violence. 267. Du delit de favoriser I'evasion de prisonniers , en resistant avec vio- lence aux preposes du gouvernement. 268. Du vol commis en plein jour. 269. Du vol en general. 270. Du vol des chevaux et autres animaux domestiques. 271. Du vol des grains et autres pro- ductions de la terre dans un champ ouvert. 272. Du vol fait a des parents ou a des maitres. 273. De la prise de possession d'une propriete par menaces et violence. 274. D'une propriete publique ou privee obtenue par fraude. 275. De ceux qui volent et vendent des personnes comme esclaves(*). 276. De la violationdestombeaux(**). 277. De I'entree sans autorisation , la nuit , dans une maison liabitee. 278. De I'asile donne aux voleurs et autres malfaiteurs. 279. De ceux qui inspirent, prote- gent ou facilitent des projets de vol. 280. De ce qui constitue un vol a force ouverte et un vol furtif , ainsi que la tentative de les commettre. 281. Du delit d'effacer les marques dont les voleurs ont ete fletris. 282. Du concert pour commettre un assassinat. 283. Du projet ou de la tentative d'as- sassiner im envoye de I'empereur ou un mandarin duquel on depend. 284. Du parricide avec intention pre- meditee (***). 285. Du meurtre commis sur sa fem- me adultere par un mari (****). (*) « Quiconque sera coupable d'altirer .i soi, dit la loi, par quelque stralageme que ce puisse etre, une personne lihrc, pour tacber ensuite de la vendre comme esciave , sera puni de 100 coups de bambou, et banni a perpeluite, a la distance de 3, 000 //. » (**) Dans certains cas, si le cercueil a etc ouvert et le corps enleve, la mort par stran- gulation. (***) Peine de mort par decapitation. (****) « Lorsqu'un mari, dit la loi, sur- prcndra en adultere une de ses femmes, soit la principale, soit les secondaires, s'il tue CHINE MODERNE. 249 280. Du meurtre commis par une veuve siir la personne de son beau-pere ou de sa belle-mere. 287. Du meurtre de trois personnes dans la meme famille. 288. Du nieiirtre avec raise en pieces dela victime. 289. De la preparation des poisons animaux pour donner la mort. 290. Des fixes, et du meurtre com- mis avec intention dans un tumulte. 291. De Taction de priver autrui de la nourriture et du vetement. 292. De Taction de tuer en jouant , par erreur, par meprise ou par acci- dent. 293. Du mari tuatit sa femme ou sa concubine qui a des fautes a se repro- cher. 294. Du crime de tuer son fils, son petit-lils ou son esclave , en attribuant ce crime a des innocents. 295. Des blessures raortelles faites en tirant des flecbes. 296. Des blessures causees par des chevaux ou des voitures. 297. Des maladies et de la mort cau- sees par un mauvais traitement du me- decin (*). 298. De la mort occasionnee par des pieges et des trebuchets. 299. De la mort occasionnee par des menaces graves et effrayantes. 300. Des chefs de famille qui se compromettent en cachant le meurtre d'un enfant ou d'une personne placee sous leur dependance. 301. De la negligence a donner avis d'un crime projete. siir-le-cliamp le seducteur ou son infidele, ou nienie tons les deux, il n'en subira aucune peine. Si, dans ce cas, le mari ne tue pas sa femme, elle sera punie suivant la ioi appli- cable a Tespece en question , et vendue en- suite a un autre mari, au profit du gouver- nement. (*) Quand il est reconnu par les magistrals que la mort n'est causee que par Tignorance du medecin, sans aucune mauvaise intention, le medecin pourra se racheter de la peine inlligee a Thomicide; niais il sera oblige de quitter sa profession. — Quand on reconnait qu'il y a eu dessein de donner la mort, la peine de la decapitation est appliquee. 302. Des rixes et querelles dans les cas ordinaires (*). 303. Periodes de responsabilite par suite de blessures faites. 304. Des rixes et des querelles dans les palais imperiaux. 305. Des injures et blessures faites a un membre, quel qu'il soil, du sang imperial. 306. Des injures ou blessures faites a un envoye de I'empereur, ou a un fonctionnaire quelconque, sous les or- dres duquel le coupable se trouve. 307. Des employes inferieurs inju- riant ou frappant leurs superieurs. 308. Des fonctionnaires superieurs maltraitant ceux qui dependent d'eux , ou leurs egaux d'une autre juridiction. 309. Des mandarins du neuvieme rang etau-dessus, maltraitant ceuxdu troisieme rang et au-dessus. 310. Des mauvais traitements envers une personne employee a un service public. 311. Des eleves et apprentis qui frappent leurs maitres. 312. De la reclusion privee avec vio- lence. 313. Des personnes honorables et des personnes viles s'injuriant et se battant entre elles (**). 314. Des esclaves et des serviteurs a gages, males et femelles, qui frappent leurs maitres (***). 315. Des femmes legitimes et des concubines frappant leur mari (****). 316. Des parents a un degre eloigne qui se battent entre eux. 317. Des jeunes membres d'une fa- (*) Cette enumeration en 22 titres prouve que les Chinois sont de grands querelleurs , et que, malgre leur extreme politesse de formes, ils en viennent encore souvent aux mains , le duel europeen n'etant pas en usage pour prevenlr et reparer les injures. (**) L'esclave ou le serviteur a gages qui frappe une personne libre doit etre puni d'un degre de plus qu'un coupable ordinaire, et il doit supporter la peine de mort , si les suites des coups qu'il a donnes sont mortel- les et meme seulement tres-graves. (***) Ils encourent la peine de mort par decapitation. (****) Plusieurs peines graves; celle de la decapitation , si le mari reste esti'opie ou in- firme. 2.10 mille qui frappent leurs parents plus Ai;es qu'eiix , luais a iin ilegre eloigiip. 3 is. Des jeunes niembres d'lihe fa- niille Irappant leurs allies. 319. Des onfanls qui inaltraitent leurs pere et mere ou leurs grands pa- rents (*). 320. Des femines legitimes et des concubines qui frappent les parients de leurs maris decedes. 321. Des mauvais traitemeiits d'une belle-mere envers les enfants de son premier mari, 322. Des femmes legitimes et des concubines qui frappent les pere et mere de leur mari decede. 323. Des mauvais traitements envers des parents ou des grands parents. 324. Des injures en general. 325. Des injures envers un envoye de Tempereur ou uu mandarin sous la juridiclion duquel le coupable se trouve. 326. Des injures d'un inferieur ea- vers son superieur. 327. Des esclaves et des serviteurs a gages, males et femelles, qui injurient leurs maitres. 328. Des injures envers un parent 3ge, chef de la famille. 329. Des injures adressees par des enfauts a leurs parents ou grands pa- rents. 330. Des femmes legitimes et autres, qui injurient les parents plus dges de leur mari. 33 1 . Des femmes legitimes et autres, qui injurient le pere ou la mere de leur mari decede. 332. Des plaintes portees irregulie- rement (**). (*) Peine de mort par deca[)itation. ('*) - Tous les sujels de Terapirc, dit la loi, mililaires oil citoyens , qui aiiront des plaintes a porter devant les fonctioiinaires du {;onverDemeiit, s'adresseroni, en prehiiere instance, an tribunal le plus inferieur du dis- trict ou canton auquel ils appartiendront, d'oii la coiinaivsauce de laffaire dont il s'a- fiira pourra 6tre porlee aux tribunaux supe- rieurs, en allant du dernier an premier par nne grailation reguiiere. Tout inilividu qui portera d'abord sji plaiute devant un tribu- nal su|)eiieur, an lieu de s'adresser, pour la presenter, au niaijistrat de son distlicl, L'UNIVeRS. 333. Des arcusatlons criminelles ano- n vines (*). 334. De la negligence des magistrals a donner suite aux accusations regu- liere.s qui leur sontfaitcs. 335. Des cas dans lesquels le§ ma- gistrals doiveni se recuser ou se decla- rer incompetents. 33G. Des accusations fausses et m^- cliamment alleguees. 337. Des accusations portees conlre ses propres parents. 338. De la desobeissance envers ses parents. 339. Des accusations ou denoncia- tions formees par des criminels en pri- son, interdites. 340. De I'excitation aux querelles et aux proces. 34 1 . Du mode de procedure a suivre dans les causes oii les accuses sont por- tes sur les roles militaires. 342. Du mode de procedure a suivre quand un fonctionnaire du gouverne- ment est en cause (**). competent pour la recevoiren premier lien, sera puni dc 5o coups de bambon , quand bien nienic sa plainle serail fondee. << Cependant il sera perinis d'eii appelcr a un magistrnt superieur quand le mngistrat inferieur refusera de reccvoir la plainle, et rendra sur cette plainte un jugement ioique, et nun aulrenienl. » (*) «Toule personne, dit la loi, qui adres- sera ou presentera a un foiictioiuiaire du gouvernement une plainte coulenanl des ac- cusations directes et au criiidnel contre ua parlicuiier , sans I'avoir siguee de son uoni personnel et de son nom de famille, subira la peine de mort par sirangulalion. « Les plaintes anonymes, trouvees pla- cardecs ou autrement , seront iinmediale- mcnt briiices ou dccbirces en morceaux. Tout individu qui, au lieu d'agir ainsi, les pre- sentera a un magistral, sera puni de 8o coups de bambon. — Tonj niai;istral qui informera sur des plaintes ou accusations anonymes encomra la peine de loo coups dc bam- bou, elc. » Cette loi ilous parait tres-morale ; I'En- rope, sous ce rappoit, est en arriere de la Cbine. (*•) Toutes les fois qu'un foncllohnaire du couveniemcnt est en cau«e dans un proces, il doit laire suivre personnelleiiient son af- faire, uon par le niinislcre d'un avoue (les CHINE MODERNE. i^i 343. De la peine de la transportation extraordinaire pour faiisse accusation. 34-1. Des fonctioniiaires publics qui recoivent des presents (*). 345. Des transactions pecuniaires en vued'un crime. 34G. Des presents recns par des fonc- lionnaires apres certains services ren- dus. 347. Des fonctionnaires publics qui se laisseut seduire par des proniesses d'argent. 348. Des offres foites dans I'inten- tion de corronipre. 349. De I'extorsion de prets d'Srgent par ceux qui sont au service du gou- vernement. 350. De I'extorsion de prets d'argent par des personnes attachees au service, ou de la faniille de fonctionnaires du gouvernement. 351. De I'acceptation de presents par de bants fonctionnaires influents. 352. De la levee de contributions ex- traordinaires, sous pretexte du service public. 353. Du debt de retenir a son profit des objets voles, recouvres par la police. 354. Des ofPiciers qui recoivent des presents de la noblesse hereditaire. 355. De la fabrication fausse d'un ^ed it imperial (**). ^Hmios sont inconnus en Chine), mais par »?Bn .serviteur a gages , ou iin membra de sa famille. (*) Ce litre est ahsolument equivalent au§ 4, L. HI de noire Code penal , inti- tule De la corruption des fonctionnaires publics. La loi chinoise ne differe gnere de la loi francaise ; elle est ainsi concue : « Tout fonclioiinaire civil et militaire, el aussi loules personnes aj ant des emplois sans rang dans le gouveriiemcnl , qui seront convaincus d'avoir accepte des presents a eux ofterts en vue de faire reussir un projet legal on illegal, siibiront une peine proportionnee a la va- leur desdils presents , comme il est etabli dans la table ci-joinle; et de plus ils per- dront leurs offices et leurs rangs, s'ils en out, ou leuis emplois, quels qii'ils puissent etre. << Ceux qui auront negocie de lelles af- faires , ct ceu\ par les mains desquels les presents auioul passe, seront punis d'un de- gre de moins que ceux qui les auront ac- ceptes, etc. » (**) Peine capitale. 35G. De la promulgation fausse d'6. dits imperiaux (*). 357. Des communications fausses oil trompeuses faites a I'empereur. 358. De la contrefagon des sceaiix i^li gouveihement et des calendriers de Tempire. 359. Centre la fabrication privee de la monnaie de cuivre. 3G0. De ceux qui se pretendent faus- sement fonctionnaires publics ou em- ployes du gouvernement. 361 . De cieux qui se pretendent hauls fonctionnaires de I'Etat. 362. Des grands fonctionnaires qui se donnent comme charges de rhissions secretes. 363. De la pretention de faire croire a certains presages. 364. Des allegations de fausses ma- ladies ou de mort simulee, pour eviter I'accomplissetnent de certains devoirs. 365. Destentatives de seduction pour engager le peuple a transgresset les lois. 366. Des relations criminelles entre les deux sexes (**). (*) Peine capilale. \**) Cetle subdivision du code cbinois, que I'ou pourrait intituler aussi des Attentats ttiix mceiirs, indique une grande corruption dans les mcpurs chinoises que la loi n'est pas toujours habile a reprimer , quoiqu'elle soil tres-severe dans la piiipart des cas. Sous le litre 366, la loi porle que les cor- respondances criminelles avec une femme non mariee sont punie!) de 70 coups de bambou ; avec inie femme mariee, de 80. La violence faile a une femme, mariee ou non, est punie de la mort par strangulation. Les complices subissent la meme peine. L'accusalion, en ce qui concerne les rela- tions criminelles , doit etre ctablie sur los preuves les plus positives , flagrante delicto, ou sur des preuves equivalentes. ^ Trois slatitts supplementaires snriinceste el Yadultere sont aiiisi concus : « I. Tons les individns qui aurunl on non des posies offi- ciels, el qui aui'ont commis un adullere avec la femme de tout fonclionnaire civil on mi- litaire du gouvernement, subiront la mort par strangulation. << Tout ofllcicr civil ou militaire du gou- vernement qui commeltra un adullere avec la femme principale d'un simple particulier, sera degrade, et puni de too coiipsde barn- 3fiS L'UNIVERS. 367. De la connivence d'un mari a un commerce criminel avec I'une ou Taiitre de ses femmes (*). 3G8. De I'inceste, ou commerce cri- minel entre parents. 369. De 1 accusation d'inceste por- t^e faussement contre le pere de son mari (**). 370. Du commerce criminel des es- bou, et il portera la cangue pendant un inois. « Dans torn les cas ordinaires d'adultere commis par le peuple, les deux coupahles recevront chacun loo coups, el porteront la cangue pendant un mois. << Quaud les coupables d'un acte d'adul- lere seront esclaves tons les deux, soil qu'ils appariiennent au meme maitre, soit qu'ils en senent deux, ils seront punis de loo coups de bambou, sans autre peine. " II. Les j)ersonnes qui exciteront et celles qui aideront a commetlre un adultcre se- ront punies, comine complices, d'un degre de moins que les coupables principaux. « III. Les individus depraves qui conspi- rerunt ensemble pour se saisir du fils ou du parent d'une famille honnete , dans la viie de commeUre le crime conire nature , qu'ils aggravent ou non leur delit par le crime d'un meurtre subsequent , subiront la mort par decapitation aussitot apres convictiou. Les complices de ce crime subiront la mort par strangulation, a I'epoque ordinaire des exe- cutions; et toules les aulres persounes qui auronl participe a une telle liaison crimi- nelie seront bannies a perpctuite. " Quiconque commelira par force ledit crime avec un enfant de dix a douze ans, su- bira la mort par decapitation, a I'epoque or- dinaire des executions. « Les individus qui commetlront ce crime d'un consentement mutuel, seront punis cha- cun comme dans les cas ordinaires de liaison criminelle entre differents sexes, c'est-a-dire de 100 coups de bambou, et du port de la rangtie pendant un mois. <■ Quand on tachera de faire du tort a quelqiTun en I'accusant d'avoir commis un tel crime, on sera puni au m^me degre que I'individu accuse aurait subi, s'il edt etecon- vaincu. ■• (*) Le mari complaisant est puni , comme les deux coupables, de 90 coups de bambou. (") Quaud une fenime accusera fausse- ment sou beau-pere ou son beau-frere , plus 4ge qu'elle, de I'avoir forcee a consentir a un commerce incestueux avec Tun ou I'autre, elle subira la mort par decapitation. » claves ou domesliques a gages avec la femme ou la fille de leur maitre(*). 371. Du commerce criminel de fonctionnaires civils ou militaircs avt les femmes ou les filles des habitants du pays ou ils exercent leur autorite. 372. Du commerce criminel pendant le temps de deuil , ou par les pretres des sectes de Fo ou du Tdo. 373. Du commerce criminel entre des personnes libres et des esclaves. 374. Des fonctionnaires civils ou mi- litaircs qui frequentent des prostituecs ou des actrices (**). 375. De I'achat de personnes libres pour en faire des acteurs ou des actri- ces (***). 376. De la degradation et de la des- truction des monuments publics. 377. Des soins medicaux que Ton doit donner aux soldats et aux artisans employes dans un service public. 378. Lois contre les jeux (**•*). 379. Des eunuques (****'). 380. De la sollicitation de commettre des malversations dans les fonctions pu- bliques. 381. Desdclitsa compromis, ou des transactions a forfait pour frauder la justice dans un interet prive. 382. Lois concernant les incendies par accident. 383. Des incendies premedit^sf"*****). 384. Lois concernant les represen- tations theStrales. 385. De la desobeissance aux ordres du gouvernement. 386. Des actions inconvenantes. 387. Du devoir des officiers de po- lice dans la recherche et la poursuite des malfaiteurs. (*) Peine do la decapitation. (**) 60 coups de bambou. (***) 100 coups de bambou. (****) .< Toute personne coiivainciie d'a- voir joue , aux jeux de basard , de I'arf^ent ou des effets, sera punie de 80 coups de bambou. « Tous ceux qui tiendront des malsoiis de jeu subiront la m^me peine, et la maison sera contisquee au profit du gouvernement. » (*****) U n'y a que Tcmpereur et les princes de la famille impcriale qui aient le droit d'avoir des eunuqiies. (******) Peine de la decapitation. CHINE MODERNE. 3&3 I 388. Des malfaiteurs qui r^sistent i aux officiers de police. 389. Des prisonniers s'echappant de prison par ruse ou par violence. 390. De la rupture de ban des con- danines au bannissement ou a la de- portation. 391. Du retard apporte a I'execution des sentences de bannissement. 392. Des geoliers qui laissent echap- per leurs prisonniers. 393. Du delit de proteger des crimi- nals que Ton sail etrecoupables. 394. Du temps accorde pour la pour- suite des voleurs. 395. De la negligence apportea a contenir les prisonniers. 396. De I'emprisonnement preme- dite des innocents, et des mauvais trai- tements exerces sur eux (*). 397. Du retard illegal apporte dans I'execution d'un jugement. 398. Des mauvais traitements exer- ces envers les prisonniers. 399. Du delit de donner aux prison- niers des instruments aigus propres a favoriser leur fuite. 400. Des geoliers qui excitent leurs prisonniers a faire des appels non fon- des. 401. De la fourniture des habille- ments et des vivres pour les prison- niers. 402. De la permission accordee aux parents d'hommes d'lttat, ayant rendu des services conime tels , de les visiter dans leur prison. 403. Des criminels condamnes qui se donnent eux-memes la mort dans leur prison, 404. De I'exemption des tortures et de la question , accordee a certaines classes privilegiees par leur age ou leur rang. (*) « Tous les employes du gouvernement el leurs subordoimes ol'ficiels qui , par me- cLancete ou par vengeance, feroiit niettre en prison un individu qui ne sera accuse d'aucun delit, ou qui ne sera implique daiis aucun , subironl 8o coups de bambou ; et si cet injusle emprisonnement cause directe- ment ou indireclement la aiort de cet indi- vidu, ils seronl condamnes a la strangula- tion, apres le temps de remprisonnement ordinaire. » 405. Des cas ou la confrontation des coupables avec leurs complices doit avoir lieu. 406. De I'interrogatoire confine dans les bornes del'accusation. 407. De la mise en liberie des accu- sateurs apres le jugement des accuses. 408. De I'accusation fausse des pri- sonniers centre des personnes inno- centes. 409. De I'attenuation ou de I'exage- ration du crime d'un prisonnier. 410. De la cassation de jugements rendus sur une fausse accusation. 411. Des autorites competentes pour prononcer les jugements , et de leur execution. 412. Contre les pratiques fallacieuses employees dans une enquete sur un crimed'assjssiuat. 413. Des punitions infligees d'une maniere ilkgale. 414. De la procedure a suivre contre les fonclionnaires superieurs et les en- voyes de I'empereur. 415. Des lois a citer dans le pro- nonce du jugement (*). 416. De la liberte accordee aux pri- sonniers de s'avouer coupables et de protester contre leur sentence (**). 417. Effet du pardon ou d'une am- nistie sur une sentence rendue prece- demment ou immediatement apres. 418. Des crimes comrais dans le but d'etre compris dans une amnistie ge- nerale (***). 419. Des transport's qui refusent (*) « Dans tous les tribunauxde justice, les sentences a porter contre les coupables se- ront prononcees conformcment aux lois, aux statuts, a la jurisprudence exisiante, appli- cables aux cas qui s'y rapporteront, en les comparanl les uns aux autres; et toute omis- sion a cet egard sera punie de 8o coups de bambou. » (**) Lorsqu'en Chine un prisonnier est con- damue a mort ou a la transportation, on doit, conformcment a celle loi, lui lire sa sentence et lui exposer les motifs du jugement, afin qu'il puisse les avouer, ou les discuter et les nier ; el les parents , a 3o lieues de distance, doivent etre convoques pour etre presents a rinstruction judiciaire. On donue ainsi aux accuses toutes les garanties possibles d'uue bonne justice. (***) Peine plus grave. ■ •J.U L'UNIVERS. d'executer les travaux auxquels ils sont condamnes. 420. Des crimes et dellts commis par les feinmes (*). 421. I)e I'obligation d'attendre la ra- tification d'une sentence capitale par IVnipereur, avant de proc^der a I'exe- cutlon. 422. De I'execution d'une sentence erronec, ou rendue contrairement aux lois. 423. Des greffiers des tribunaux al- terant les fails d^nonces par les accu- sateurs. $ 7. lA)is concernant les travaux publics. 424. De la maniere dont on doit en- Ireprendre etconduire les travaux pu- blics (**). 425. Des depenses inutiles de temps ct de travail faites pour des materiaux inipropres a leur destination (***). 426. Des commandes faites dans les manufactures de I'^tat, contrairement aux reglements. 427. De Temploi indu des matieres premieres appartenant a I'Etat dans ses propres manufactures. 428. De I'emploi indu des soies ou des metiers du gouvernement. 429. De la defense de fabriquer tou- tcs sortes de tissus sur des modeles prohibes, tels que des figures de dra- gons, de phenlx , etc. 430. De i'excedant du temps limite pour la confection des objets da«s les manufactures du gouvernement (****). (•) Les femmes ne spnt point mi ses en prison', e.xcepte 'pour les crimes capilaux ou dans les ras iladultcre. Lors(|iriinc femnie est mise en prevention pom- line faute grave', elje esl conjiee a la garde ile soil mar/ 'ou de ses parents, qui en reponi)eiit. (^*) Heglemepts mini)tieux a cet egard. ^***) Res|)onsal)ilit'e ^ra\e des architectes et ingcnioiirs dii gouvernement. {*"*) "tine qiianiile delerminee d'ctoffes desoieeld'armesdef^iieiTesiTamanufactiiree annuelliment pour le servji e de Yf.iai , dans cliaque sn1)dlvisipii du departement des tra- vaux pulAics'; et si les ouvriers qui y sont emplojes mauq'nent a fournir'lcur lachedaiis le temps prescrit, ils eijcounonl une puni- Uon qui sera de ao a 5'6 coups de'hambou, 431. De la reparation des grenierset autres batimenls publics. 432. Des employes du gouvernement qui ne demeurent pas dans les bati- ments de leur office, et de ceux qui de- tournent des objets appartenant an gou- vernement(*). 433. De la degradation et de la rup- ture des digues et jet^es. 434. De la negligence a entretenir les digues et jetees. 435. De rempietement sur^les rues, les places et autres lieux publics. 436. De la reparation des ponts et chaussees publics (**). Tels sont les 436 litres du Code ge- neral des Chinois, qui embrassent non- seulenieiit les lois importantes, inais encore des matieres qui , cbez d'autres peuples, sont regies par des reglements particiiliers. Les idees qui ont preside a la codification chinoise n'ont ete ins- pirees ni par les Institutes de Justinien , ni par des travaux comparables a ceux de nos grands jurisconsultes aiiciens et modernes ; I'etude de cette legislation sui generis n'en offre pas moins d'interet. line chose nous frappe et nous revolte m^me dans la legislation penale des Chinois : c'est Tappiication a tous les delits d'un nombre deteriuine de coups de bambou. Mais cette peine, qui n'est pas dans nos moeurs, est plutot nomi- selon le temps qu'il.s auronl manque. Le di- recteur on contre-maitrc sera egalcment pii- ni. D'aulre part, si les maiicres piemicie* brutes ne sont pas livrces nux ouvriers dans les quantites suffisantes et aux temps mar- ques, le direelem- de la manufacture de I'E- tat suhira la peine de 40 coups de bambou, et Temploye qui les aura Jelivrees , cello de 3o. (*) Tons les fonctionnaires publics chi- nois sont oIjH^'CS d'babitcr les baliments pu- blics assigncs a icms fonctions, sous peine de 80 coups dc bambou , etc. (•*) « La reparation ct renlrelien de toutes les routes et dc tous les ponts, dit la loi, soil .T demcure, soit de biileanx pour servii- passagerenienl , seronl sous la direc- tion des gouverneurs des villes de differents ordres, de leurs conscilicrs et de leurs de- putes, et I'on en fera la visite chaque au- lu'e, dans rintervalie des rccolles, pour s'as- surer si les unes el les autres sont en bon etat. Quaud les communications par les CHINE MODERJNE. m- nalc que reelle en Chine. En effet, le Code chinois renferme, dans ses Pre'/j- minaires^ des Tableaux synoptiqiies presentant : r Une echelle des pnnitions des crimes et delits envers la proprietepu- blique et pr'wee (n'"254-281 et 343-354) ; 2" Une echelle des punitions rache- tables par des sommes proportionnees en argent (*), selon que les coupables .sont, J" en elat de payer; 2° le pou- vant diffioilement ; 3" majeurs on mi- news ; 4" femnies en certains cas ; 5" fernmes en general, el 6" ayant occasionne involontairement des bles- siires oil la mort. 3" Une echelle de rachats pecuniaires dans (juelques cas particuliers, ou, d'a- pres la loi, on obtient des lettres de grace , et qui , sans etre necessairemeut rachetables, ont ete declares tels sur petition, par iin edit rendu la 8* annee Kien-loung (1743). En voici le tableau : WKSG DES COUPABLES. SENTENCE. COMMLTATIO.N. Un mandarin au-dessiis dn 4° rang ' Id. dn 4' rang ^o i liang(UiUAe>iIr. 12,000 5,000 4,000 2,500 2,000 1,000 Id. du o"" on 6* rang 1 «Z3 .2 CO "O Id. dn 7" rang etaiidessoHS, on nn doctenr cs lettres. 1 Un gradiie on licencie ' Un simple particnlier ^ Un mandarin an-dessns du k" rang Id. du 4" rang j n 7,200 .3,000 2,400 1,500 1,200 720 Id. dn 5^ on 6' rang 1 Id. du 1" rang et au-dessoiis. . . . Un gradne on licencid Un simple particnlier Un mandarin an-dessns dn 4^ rang \ Id. dn 4^ rang 1 sa 4,800 2,000 1,600 1,000 3PQ 480 Id. du .5* ou 6« rang f Id. dn 7= rang et aii-dessous 1 Un gradne on liccncid | Un simple particnlier / 4" Une echelle des degres de puni- tions ordinaires. routes el les ponlsseronl interrompues, faute de jcs avoir entretennes avec le soin neces- saire, les magistrals cites, qui en onl la responsabilite, subiront la peine de 3o coups de bambou. << S'ils manquenl de faire conslrnire des pouts, ou d'etablir des bacs pour h commo- dite des habitants la oil ils sont juges ncces- saires, ils seront punis de 40 coups de bain- bou. » ' C) Ce Tableau synojytlque se nomine , en chinois , Loii thsdng tlioit : Tableau des six trt'sors ou f/es six moreris de procurer des revenus a I'Eiat. En effet , celte faculte de se raclieter de punitions corpovelles par une amende pecuniaire doit etre une source abon- danle de revenus pour I'Eiat ! 5" Une description des instruments ordinaires de punitions, de gene, qui sont : le bambou lisse et sans branches ; le kia uomme cangue,, piece de bois que Ton place au cou ilu patient; |a chaine de fer , les menotles et les fers aux pieds. Eiiiin, G" les tableapx synoptiques presentant tons les cas de deuil., et les regies a observer dans chacup de ces cas pour chaque indivi^u. Nous ne pouvons repro(|uire ici les details curieux doiines dans \e?,Slatuts (K. 42-43) sur les divers modes depro- cedures dans les diverses juridictions, stir reniprisonnement et le regime des prisons, sur une foule (|e sujets relatifs a radniinistration de la justice par les tribunaux de cantons, de districts, 356 L'UNIVERS. d'arrondissements , oe d^partements et de provinces. Ces details demanderaient un ouvrage special. Nous nous borne- rons aux observations suivantes. DES COUBS ET TBIBUNAUX. Outre les cours et tribimaux qui sie- gent a Pe-king, et que nous avons fait connaltre precedeainient , il y a dix- sept grandes directions de justice pro- vinciale {tlising tiss^) siegeant aussi a Peking, au niinistere de Ta justice. En voici Tenuineration ; r Direction judlciaire de la province de Tchi-li, composee de deux presi- dents, i'un mantchou, I'autre chinois; de quatre vice-presidents, un mantchou, un mongol et deux chinois; deux se- cretaires , un mantchou et i'autre chi- nois. Elle a dans ses attributions I'ad- ministration de la justice dans la pro- vince de Tchi-li, et I'aile gauche des huit bannieres tartares. 2" Direction judiciaire de Foung- tien ou Moukden. Elle a le Liao-toimg, Kirin , Tchi-tchi-har, les membres tartares de la famille imperiale et le bureau des affaires ^trangeres, dans sa juridiction. 3° Direction judiciaire de Kiang- 50U. 4" Direction judiciaire de la provin- ce de Ngan-hoei. Kiang-si. Fo-kien. Tcliekiang. Hou-kouang. Ho-nan. Chantoung . Chan-si. Chen-si. Sse-tchouan. Kouang-toung. Kouang-si. Yuii-nan. Kouel-tcheou. Outre ces directions judiciaires, on compte encore, comme dependantesdu ministere de la justice, 1" la cour des grandes assises d'automne ( tlisiedii chin tchoii [*] ), dont les fonctions sont de preparer la revision de tous les ju- geinents a des peines capitales rendus (•) Tdi tluing lioei tieri.K. 44, i" 12. 5° M. de celle de 6" Id. id. 7" Id. id. 8° Id. id. 9° Id. id. lo- Id. id. ir Id. id. 12° Id. id. 13° Id. id. 14° Id. id. 15° Id. id. i(;° Id. id. 17° Id. id. pendant Tannic dans les provinces, et sur lesqueis I'empereur doit prononcer en dernier ressort. T La chambre du depdt des lois (liU It koudn[*]), composee de Mantchous et de Chinois, dont les fonctions sont de recueillir tous les edits et autres do- cuments emanes de I'empereur et des autorites competentes , d'en publier un recueil tous les cin^ ans, ettous les dix ans une nouvelle edition du Code entier des lois, autorisee par I'empe- reur. 3° Une Intendance generate des prisons {ti Ida ting [**]), dont les fonc. tions sont de diriger tout ce qui con- cerne le personnel et le regime des pri- sons. 4° La Tresorerie des amendes et des rachats de peines ( thsdng fa khou). Enlin, 5°un bureau d'approvisiotme- ments et de recettes provenant des pro- vinces [fan yln tchou), et destines aux depenses du ministere. La justice, en Chine, est rendued'une maniere un peu sommaire , comme d'aiileurs chez tous les peuples orien- taux. C'est de la justice a ta turque; mais, pour etre rendue sans le minis- tere d'avocats et d'avoues, elle n'en est {las souvent moins bonne. Dans tous es cas, elle est plus expeditiveet moins coLlteuse. L'instruction de la cause se fait par ecrit; dans les tribunaux de premiere instance il n'y a qu'un jtige, qui est souvent le magi'strat ou le fonc- tionnaire administrateur du lieu ; car le premier degre de juridiction, en Chine, est la juridiction du fonction- naire immediat qui represente , a son degre de juridiction, la justice de l'£- tat. C'est une justice gratuite lorsqu'il n'yaasubir ni peine ni amende; et cette justice se rend a toute heure, quand on se presente devant le magistrat. Beau- coup de differends sont arranges par lesdoyens ou chefs des villages, qui ont d'aiileurs tous une assez grande respon- sabilite concernant leur commune. Relativement a la population de la Chine, les executions capitales parais- sent beaucoup moins Qombreuses qu'en (*) Ibid., f i5. (") Ibid., f° 16. CHINE MODERNE. 257 Europe; car en 1817, par exemple, il n'y eut que 935 sentences capitales rendues aux grandes assises d'automne a Pe-king pour tout I'empire; en 1826, le nom- bre n'en fut que de 591; en 1828, de 789; en 1829, de 579. Cette proportion est moins grande que pour la France a la meme epoque ; car la nnoyenne des condamnations a mort a ete de HO, de 1825 a 1831, pour moins de 35,000,000 d'habitants. Pour donner a nos lecteurs une idee plus concrete de I'administration de la justice en Chine, nous rapporterons ici le recit d'un proces et d'une execution celebres arrives a Pe-king, en 1827. Proces et execution de Chang-kang , neveu et favori de I'empereur re- gnant. L'empereur actuel de la Chine , fils de Kia-king , surnomme , lors de son avenement au trone en 1820, Tao- kouang ou Splendeur de la raison, nom qu'il porte aujourd'hui , est sur- tout estime par son esprit de justice et d'equite. JNul, parmi ses sujets, n'invo- que en vain sa puissante entremise con- tre un mandarin prevaricateur ou meur- trier, et la loi, egale pour tous , va frapper le coupable jusque sous ses lambris dores. Un des traits distinctifs du caractere des Chinois, c'est ieur amour insatiable de I'or. Aucun etat, aucune profession, aucun commerce n'est vil pourvu quil les conduise a la fortune. Cette soif de I'ordetruit souvent Ieur naturel, qui est, en general, bon,doux, laborieux et pa- tient, pour les rendre dissimules, in- justes, coleres, vindicatifs. A I'amour des richesses ils joignent celui de I'os- tentation; ilssont sensibles aux louan- ges, et, quoique d'une grande frugalite dans Ieur interieur, lorsqu'ils recoivent un etranger, ils le traitent avec beau- coup de luxe et de splendeur, dans le seul but d'agir sur son esprit. C'est cette disposition a I'ostentation qui rend terribles et frequentes , dans la so- ciete chinoise, les vicissitudes de la fortune, et il n'est pas rare de voir des individus dont les peres etaient manda- rins et occupaient, par consequent, le premier degre de I'echelle sociale , se 17® Livraison. (Chine modebne trouver reduits , par suite de leurs pro- digalites, a devenir portefaix. Les Chinois sont, en outre, vindi- catifs et joueurs. Lorsqu'ils ont perdu un proces, un de leurs principaux moyens de vengeance consiste a se pendre a la porte de Ieur adversaire, dans son jardin ou dans son champ , pour attirer sur lui Tanimadversion de ses concitoyens et la malediction de I'esprit celeste. Celui qui a ete la cause d'un pareil suicide est, pendant de lon- gues annees, I'objet d'une espece de reprobation publique , et on le regarde comme poursuivi par la vengeance du ciel. Dans aucun pays le jeu n'entraine plus qu'en Chine des animosites et des querelles sanglantes. C'est ce qui a rendu l'empereur impitoyable pour les personnes accusees de meurtres a la suite de disputes survenues au jeu. Dans I'annee 1827, vivait a la cour de l'empereur , a Pe-king , un jeune prince renomme pour la noblesse de son coeur , la distinction de son esprit, la superioritede son education; il etait propre neveu du souverain, qui I'en- tourait d'une affection toute particu- liere; seul, il avait le droit d'entrer dans la voie sacree, le plus grand hon- neur que puisse recevoir, en Chine, un prince, meme de la famille imperiale. La voie sacree est la route qui conduit de Pe-king a la maison de l'empereur. Elie est creusee a un metre dans terre , et parcourt une distance d'environ qua- rante kilometres. Dans toute sa lon- gueur regnent deux especes de rails plats en or sur lesquels posent les roues de la voiture imperiale , attelee d'un seul cbeval. Les personnes de la suite de l'empe- reur marchent des deux cotes de la route, mais nul ne pose jamais le pied dans la voie sacree. Autrefois, il y avait peine de mort contre quiconqu'e me- prisait cette defense ; depuis . cette peine a ete ciiangee en celle de la de- tention perpetuelle. Lorsque l'empe- reur veut honorer quelqu'un d'une ma- niere toute particuliere, il Pautorise a marcher a pied, devant ou derrierelui, duns la voie sacree. A I'epoque dont nous parlous , le neveu de l'empereur jouissait seul, a la cour de Pe-Aing, de cet insigne honneur. .^ 17 as L'UWVERS. GhanR-kang (c'est le nom de ce prin- ce) reunissait en lui toutes les perfec- tions, jouissait de tous les bonlieurs; mais im seul vice venait entacher ce caractere si pur, et devait un jour, par une cTuelle fatality, causer sa mort ct son d^shonneur. II aimait passionne- inent lejeu, et avait essaye vainement de combattre ce terrible penchant. Une autre passion , cependant , mais noble et prande, neutralisait par moment I'effet de la premiere : c'etait I'amour. Le prince avait epouse , en mariage le- Sitime , la filled'undes principaux man- arins de I'empire ; mais la mort avait, apres deux ans, bris6 cette union. II avait alors reporte toute son affection sur une jeune esclave tartare, que la loi lui permettait d'avoir comme con- cubine. Mia-ming (c'etait le nom de cette femme) etait I'objet de ses soins et de ses continuelles pens^es. Pour orner sa beaute, il avait fait venir, de toutes les parties de I'Orient, les diamants, les pierreries, les plus belles parures, les etoffes les plus preeieuses. Cette passion , qu'il ne sacriQait qu'a son amour pour le jeu, I'avait rendu souvent le but des sarcasmes des jeunes mandarins, ses amis, et des princes avec lesquels il etait eleve. Un jour qu'il avait reuni quelques amis dans la maison de plaisance qu'il habitait aux environs de la ville, a la suite d'un re- pas splendide qu'il lear servit, tons se mirent a jouer. Chang-kang, apres avoir r^siste quelques instants, finit par ce- der h I'entrainementgeneral. La chance, pendant la premiere heure , lui fut fa- vorable; mais, peu a peu, elle s'eloigna de lui. II commenqa par perdre tout son or, puis il perdit ses clievaux, ses equi- pages ; alors il joua les terres qu'il pos- sednit dans I'empire, et qui avaientfait, de pereen flls, la fortune de sa famille. La chance nefaste pour lui continua a raccabler. Alors il joua la maison de plaisance dans laquelle il recevait ses amis, et qui devait 6tre son refuge. Au firemier coup de de, il perdit encore ce ambeau de sa fortune. En ce moment , pousse par sa pas- sion, excite par les railleries du jeune mandarin Fo-kiang, qui etait son ad- versaire le plus neureux et le plus achame, il consentit a jouer, comme derniere ressource , les parures et les diamants de Mia-ming , sa maitresse bien-aimee. Mais la fortune acharnee a sa perte lui fut encore adverse; il per- dit ces objets precieux, qu'il avait ras- sembl^s avec tant de soin. Fo-kiang alors demanda d'une maniere railleuse qu'ils lui fussent remis a I'instant. « Au moins, s'ecria Cliang-kang en se le- vant, la rage dans le coeur et en tirant un poignard qu'il portait a sa ceinture, tu n'en jouiras pas longtemps. » En meme temps il le frappa au coeur. Fo- kiang tomba baigne dans son sang et rendit le dernier soupir. A cette vue, tous les assistants inquiets et trem- blaiits prirent la fuite, et Chang-kang, revenu a lui , resta seul , plonge dans son desespoir. L'einpereur, en apprenant ce qui s'e- tait passe et en voyant quel etait le cri- minel , eprouva un violent chagrin ; il ordonna neanmoins que la justice eilt son cours. Par son ordre, le surinten- dant de la ville, assiste du Ti-toii, com- mandant des gardes, se rendit a la mai- son de plaisance et arreta Chang-kang, qui fut amene a Pe-king, garrotte com- me le dernier des criminels, et depose dans la prison de la ville. Son proces commen^a immediatement devant le tribunal des chatiments ou cnur crimi- nelle superieure. Ce tribunal se com- pose d'un surintendant ou premier pre- sident, d'un president, de deux vice- presidents et de quatre conseillers. La procedure criminelle se fait en Chine d'une maniere particuliere. Chaque membre du tribunal des chAtiments se rend a part dans la prison de I'accuse et I'interroge; il fait une instruction personnelle de I'affaire. Cette premiere lormalite dure ordinairement plusieurs jours; lorsqu'elleest terminee , tous les membres du tribunal se rassemblent, se communiquent leur instruction , et deliberent sur la question de savoir s'il y a lieu de mander devant eux le pre- venu. Si leur decision est negative, on le relSche; si elle est affirmative, les gar- des , accompagnes des huissiers du tri- bunal , se rendent a la prison et amc- nent aussitot I'accuse, qui est place dans uu endroit de la salle d'audience voile CHINE MODERNE. 269 par un rideau , de maniere a ce qu'on puissel'entcndre, niais non pas le voir. Le president du tribunal lui adresse la parole , lui explique le crime dont il est accuse, les charges qui pesent sur lui, et I'engage a repondre; apres quoi on fait paraitre les temoins. De- vant chacun d'eux, le voile qui cache I'accuse s'ouvre pour qu'il puisse de- clarer son identite , et se reJerme eu- suite. Apres I'lnterrogatoire des te- moins, I'accuse est amene par les gar- des a une courte distance des magis- trals. Chaque membre du tribunal I'interrogea son tour, lui adresse des questions, et c'est la reponse qail fait a ces questions qui constitue la defense de I'accuse. II n'y a, en Chine, ni avoues ni avocats. Chaque preveuu se defend lui-meme, de la maniere que nous ve- nons d'indiquer. II peut seulement se faire assister par un de ses parents, qui se place a sa droite et qui I'aide a re- pondre aux magistrals. Lorsqu'un in- dividu se permet de defendre un accu- se en se faisant passer pour son parent sans qu'il le soit, il s'expose a etre condamne au supplice de la cangue, comnie fauteur de troubles et de divi- sions. Le prince Chang-kang comparut de- vant les magistrals, et avoua tout. II declara que , dans un moment de pas- sion el de colere, il avail tue un de ses semblables : que , d'apres la loi , il avail encouru la peine de mort, et que si la volonte du sublime empereur, son on- cle, etait qu'il mourilt, il subirait son sort sans se plaiudre, en expiation de son forfait. Le tribunal , apres toutes les formalites remplies , declara le prince Chang-kang atteint et convaincu d'assassinat sur la personne du manda- rin Fo-kiang, et le condamna, confor- naement au rescrit de la 7* annee du regne de Tempereur Tsong-lsou, a ^tre etrangle publiquement sur une croix. Le condamne entendit son arret sans trembler. D'apres les lois du Celeste Empire , le souverain forme, a lui seul , un Iri- ^unal supreme qui statue en dernier sort sur les affaires capitales. Dans ecas, I'empereur juge sur pieces, a moins que le condamne n'ail, par son ng, droit d'entree a la cour, ou ne se le s I fasse representer par un haut person- nage qui jouisse du meme droit. L'em- pereur manda a son audience le prince Chang-kang. Il arriva, selon I'usage, la t^te couverte d'un voile rouge, pour indiquer qu'il avait verse le sang. II avait a sa droite un de ses cousins, jeune homme d'un grand merite, qui s'etait offert pour I'assister, et a sa gau- che, le chef du bureau special charge de recueillir, minute par minute, les paroles et les actions journalieres de i'empereur. Lorsqu'ils arriverent, coni- me le souverain, dans cette circons- tance, represente la justice, ils ne se prosternerent point. Le defenseur du condamne prit la parole; il parla en sa faveur de la maniere la plus palheti- que; il fit valoir sa conduite, irrepro- chable jusque-la , I'etat d'excitation dans lequel le meurtre avait ete commis, les insultes et les provocations que lui avait prodiguees son adversaire, et il finit en invoquant la haute clemence imperiale. Pendant ce discours , I'empereur ne put retenir ses larmes. II se recueillit en- suite pendant une heure entiere, selon I'usage, pour reflechir; puis il rendit une sentence qui confirmait I'arret du tribunal des chatiments, et declarait seulement qu'attendu le rang de I'ac- cuse et les liens qui I'uuissaient a la famille imperiale, la peine prononcee contre lui serait commute en une sim- ple strangulation au tombeau de ses anc^tres , et que cette execution aurait lieu lejour des supplices. En Chine , I'execution des condam- nes a la peine capitale a lieu une fois par an , dans toule I'etendue de I'eni- pire, au jour designe par un rescrit de I'empereur. Ce jour-la, les affaires sont interrompues cbmme aux epoques de fetes, et le peuple en masse quitte les campagnes pour venir dans les villes assister aux executions. C'est un spectacle tres-recherche de tons les Chinois. Lorsque I'empereur veut honorer un mandarin ou un grand personnage, qui s'est rendu coupable d'un crirne qui ne denote pas une Sme vile et basse, il ordonne que son exe- cution aura lieu a un jour particulier; mais pour les membres de sa famille, il ne rait jamais cette exception. I-e premier jour de la septieme luue, 17. 260 L'UNIVKRS. 1" juillet 1827, le prince Chang-kang fut conduit (Inns un jardin plants dar- bres odorants et do cypres, au mii.eu duquel s'elevaierit, a differents inter- valies,des pierres funebres. Sur I'une d'elles, qui etait le tombeau de son pere, le venerable Kang-tsou , Chang- kang s'agenouilla. Autour de lui se ran- eerent les mandarins de la cour de Fempereur et les membres de sa fa- mille qui avaient re^u I'ordre d'assister a cette triste c^r^monie ; devant lui se placerent les bonzes ou pr^tres, qui commencerent leurs prieres en battant la mesure, alin de demander aux es- prits de ne pas entrainer i'Sme de celui qui ailait mourir au fond du fleuve de sang, que traversent loujours les cri- minels en sortant de cette terre. D'a- pres la crovance de ces pretres , lorsque I'^me louche le fond du fleuve , qui est tres-profond , elle y demeure toujours ; mais si, au contraire, elle peut arriver a tester a sa surface pendant trois ans, alors elle obtient son pardon. Lorsque les prieres furent terminees, les bonzes frapperent dans leurs mains et s'ecrierent a haute voix que le mo- ment de pleurer pour celui qui ailait mourir etait arrive. Aussitot , comme par un mouvement unanime, tous les assistants eclaterent en sanglots. Quelques minutes apres, le chef des bonzes s'approcha et decla- ra que le moment acoorde pour pleu- rer etait passe , et a I'instant tous les sanglots cesserent comme par enchan- tement. Alors le president du tri- bunal des chfltiments s'avanca a son tour et se mit a lire I'arret de'ce tribu- nal, qui condamnait Chang-kang, et la sentence imperiale qui confirmait cet arr^t, puis 11 s'ecria que le moment de mourir etait arrive. En meme temps il remit au condamne une longue corde de sole; celui-ci la passa autour de son ecu. En ce moment les ex^cuteurs arri- verent, et se saisirent des extremites de la corde. Cinq hommes se placerent a chacune de ces extremites, prets a ser- rer le noeud au signal convenu. Un si- lence complet se Ot, pendant lequel tous les assistants regardaient le pa- tient a\ec anxiete. Bientot, uu coup de tam-tam retentit dans Tair ; a ce signal. les executeurs serrerent la corde fatale, le prince Chang-kang poussa un der- nier cri, et expira aussitot. La foule des assistants se retira triste etsilencieuse. L'empereur de Chine, qui etait de- puis deux ans sous le coup du chagrin violent que lui faisait eprouver la guerre desastreuse qu'il soutenait cen- tre les Tartares, tomba, par suite de I'ev^nement que nous venons de raronter , dans une tristesse pro- fonde. Pendant six mois, et en sigue de deiril, il laissa pousser ses cheveux et sa barbe. La mort et la condamnation de Chang - kang prouvent combien est grand I'esprit de justice et d'egalite qui anime le souverain actuel du Ce- leste Empire. Un fait recent, que rap- portent les journaux de I'lnde et de In Chine d'apres la Gazette de Pe-king, deniontre que, depuis 1827, l'empereur Tao-kouang n'a rien perdu de rinflexi- bilite de son caractere, lorsqu'il s'agit de Texecution des lois. Au mois de mai 1845, plusieurs princes de la famille imperiale ont ete condamnes au supplice de la strangu- lation pour avoir fume de I'opium , au mepris des edits imperiaux. A la meme epoque, un autre prince a ete condam- ne au meme supplice, pour avoir tue sa femme , et un autre, pour avoir tue sou tailleur. Des demarches nombreu- ses ont ete faites aupres de Tempereur pour obtenir la grace des coupables. Comme les differentes sentences , par suite de circonstances particulieres, avaient deja ete revisees trois fois avant de venir a lui , l'empereur a evoque I'affaire sans appeler les condamnes devant sa personne, et apres s'^tre fait faire le rapport detaille des circons- tances du proces , il a ecrit en marge : « Que Ton agisse conformement aux edits et reglenients. » Et, a Theure qu'il est, mai^re leur rang et les prie- res de leurs families, les condamnes ont subi le dernier supplice. § 6. Ministire des travaux publics {*). Le Ministere des travaux publics^ compose de deux presidents, I'un man- (*) Tai thsiiig iioei lien , K.. 45-48. CHINE MODERNE. 361 tchou et rautrechinois; de quatre vice- presidents , deux mantciious et deux chinois, comprend dans ses attribu- tions la direction des monuments pu- blics, des travaux d'art et des manu- factures de I'Etat, dans tout I'empire, en meme temps qu'il pourvoit aux de- penses que ces travaux exigent, afin d'aider I'empereur a tenir le peuple dans un etat de paix et de prosperite. Tout ce qui concerne la construction, I'entretien ou la reparation des mo- numents ou edifices publics en terre, pierre et bois , celie des ponts et chaus- sees ; la forme legale a donner aux cho- ses et objets, comme les vases, les instru- ments de diverses sortes, les etoffes de toute nature a I'usage du gouverne- ment, ou pour I'accomplissement des ceremonies religieuses officielles ; les reglements relatifs a la fermeture ou a I'ouverture des canaux; ceux qui regis- sent les sepultures imperiaies et les temples, sont du ressort de ce minis- tere. Les membres qui le composent doivent recevoir de leurs chefs de di- rections des rapports sur loutes les af- faires de leur departement, pour en de- liberer. Si ces affaires sont importantes, elles sont transmises au Conseil du ca- binet ; si elles ne le sont pas, elles sont expediees par eux pour hater la marche et la prompte solution des affaires pu- bliques. Le ministere des travaux publics a un budget fixe qu'il ne doit pas depasser. Lorsque des circonstances extraordi- naires , comme de grandes inondations, exigent des depenses extraordinaires, on y pourvoit au moyeu de differentes reserves , souvent tirees du tresor par- ticulier de I'empereur, ou de dons vo- lontaires qui viennent en aide au gou- vernement pour reparer des calamites publiques. Les Statuts divisent les arts et me- tiers en seize classes, de la maniere suivante : 1° Les ouvriers sur metaux ( ki7i koung). 2" Les ouvriers sur bois ( moii koi'mg). 3" J .es ouvriers sur bambous {tchoii kotmg) . 4° Les ouvriers sur roseaux fins {tang koi'mg). 5° Les ouvriers sur pierre {chl koung). 6" Les ouvriers sur briques {wa koimg). T Les ouvriers terrassiers ( thoii koi'mg). 8° Les ouvriers fileurs en soie ( si koung). 9° Les ouvriers tisseurs en soie ( phi koAtig). 1 0° Les ouvriers sur cuir (M koUng). llo Les ouvriers sur comes {kid koimg). 12° Les ouvriers en cordes de boyaiix { kin koimg). 13° Les ouvriers papetiers ( tchi koi'mg). 14° Les ouvriers en vernis { ssi koicng). 15° Les ouvriers peintres { hod koung). 16" Les ouvriers teinturiers {j^n koimg). Chacune de ces classes se subdivise en plusieurs especes. Le ministere des travaux publics comprend plusieurs bureaux speciaux , dont nous ne ferons pas ici I'enumera- tion. INous ferons connaitre seulement les grandes directions. 1" La 1" direction (*) se nomme Di- rection des bdtiments et edifices pu- blics {ying chen thsing li sse); elle a dans ses attributions tout ce qui con- cerne la fondation des villes, la cons- truction des places fortes, I'erection , la conservation et la reparation des edi- fices publics. Tons les revenus et les produits des bois de I'Etat, ainsi que ceux des champs de roseaux, sont sous son controle immediat (**). Les idees architectoniques des Chi- nois, pour differer totalement de celles des peuples ancrtns, consideres comme les maitres de I'art, n'en ont pas moins un charme sui generis que Ton ne (*) Tai thsing hoeitien, K. 45, f« 8, (**) Les Statuts doniient ensuite ( K. 45, fo 9-20) line description tres-delaillee , sous le rapport des dimensions et des parties ar- chitecturales, de lous les monuments de Pe- king, description que nous ne reproduirons pas, celle qui se Irouve p. 3 el suiv. de ce volume, aiusi que le plan qui y est joint , pou- vant facilement y suppleer. 262 L'UNIVERS. irouve pas dans les li^iies s^veres des Grccs et des Romains. Les Cliinois sont le seul peuule connu qui oit su associer la variete a la plus rigoiireuse unifor- mity. L'imprevii est, en Chine, le plus grand effet de Part , et I'art ne peut avoir que des fantaisies olficielles. Les lois reglent la forme et les dimensions des villes de premier, de second, de trolsieme , de quatrieme et de cinquid- me ordre , c'est-a-dire des chefs-Ueux At provinces, de depart ements, de dis- tricts, A^arrondissements, de cantons; le nombre et la position de leurs rues , de leurs portes ; le nombre et la nature des temples qu'elles doivent avoir, ainsi que celui des edifices destines a I'habi- tatioQ des divers fonctionnaires, etc. temples officiels dans chaque ville de l'empire. Quant aux temples ou lieux destines aux sacrillces {ts^ viido ), les chefs- lieux de cliaque province, de meme que les chefs-lieux de departement, dis- trict, arrondissement et canton , doi- vent avoir : 1° Un autel dedie au g^nie de la terre et de ses productions {cM tsi thdn ) C). 2" Un autel dedie au vent, aux nua- ges, au tonnerre, a la pluie^ aux mon- tagnes et aux riviires {foiing yUn loiil yu chdn tclioikin thdn). 3" Un autel dedie au premier agri- cuIteur(«V« noiing thdn){**). 4' Un temple dedie a la litterature {w^n miao). 6° Un temple dedi6 ^ la suite des empereurs qui ont gouverne la Chine {koudn li miao). 6° Un temple h la constellation de la Grande ourse ( lo^n tchdng li kldn miao). 7" Un temple dedi^ nux fosses d'en- oeinte (gardiens) de la cit6 {tching hodng miao). 8° Un autel d6die au demon qui cause les maladies {lithdn). 9» Un temple lionoriGque dedie aux (*) "Voy. ci-devant, p. i8, u» 64, et la figure de eel auiel caire, avec ses pavilions el son enceinte , dans le Tai tLina- hoel (*•) Taithsiiig lioei tun thou, K. IIF, f» 12. ministres d'fttat renommes pour les services qu'ils ont rendus a leur pays (ming Awdn tst!). 10" Un temple houorifique dedie aux sages des villages {hlang lii^n ts^). 11° Un temple honorilique dedie aux hommes qui ont ete des modeles de fidelite, de sincerite, de droiture et de piete filiale {tchofing i hiao iitsi). 12° Un temple honorilique aux jeu- nes lilies qui se sont distinguees par leur eminente chastete, aux femmes mariees qui se sont aussi distinguees par leurs vertus et leur pudeur ( lie niu tsie fou ts€). Maintenant, certaines villes doivent avoir certains temples dedies a des di- vinites particulieres. Ainsi, chaque ville chef -lieu de departement , de mfime que les villes chefs-lieux des arrondis- sements qui ressortissent a la province de Tdii-li, doivent avoir un temple honorifique dedie a la fidelite ecla- tante(tchdo tchoUng ts6)\ chaque chef- lieu de province doit avoir un temple dedie au dragon genie ( loiing chin miao)^ un autre temple honorifique dedie aux sages et aux homines de me- rite {hi6n liang ts^). En outre , cer- taines provinces, etant plus remarqua- bles que d'autres pour certaines pro- ductions naturelles, ont encore d'autres temples particuliers. Ainsi, la province de TcM - kidng a un temple dedie aux premiers vers a sole {si^n tsdn miao), parce que celte province a ete,de temps immemorial , renommee pour la cultu- re de la soie. Greniers publics. II doit y avoir aussi dans chaque province, dans cha- que arrondissement, dans chaque can- ton, des greniers publics {tsdng), desti- nes a conserver des approvisionnements de grains pour les annees de disette. La direction des edifices publics a encore plusieurs autres attributions im- portantes, telles que celle de fournir aux ouvriers des manufactures impe- riales les modeles ou patrons des objets qu'ils doivent executer; celle de I'ame- nagement et de la conservation des fo- rets, pour lesquelles il y a deux inspec- teurs generaux , I'un mantchou, I'aulre chinois, places sous ses ordres imme- diats; comme il yen a aussi deux des chantiers de bois'de construction four- CHINE MODERNE. 568 nis par les provinces boisees de I'em- 3° ceux dii midi (ndn h6). Chacune a pire. Les Statuts font connaitre la son directeur particulier. quantite de bois que chacune de ces Les iinmenses digues des cotes des provinces doit fournir par annee. provinces de Kidng-ndn et du Tch^- Les manufactures de cristaux ( Iteou kidng sont aussi du ressort de cette di- /»), qui ont deux inspecteurs generaux, rection (*). Ce sont des travaux magni- appartieunent aussi a cette direction. fiques , dont aucune contree europeen- La 2^ direction se nomme Z)/rec^/on ne, pas meme la Hollande, ne peut des instruments et objets d^art (yH donner une idee. Ces digues sont de Mng thsing li ss^); eWe a dans ses at- plusieurs especes : les unes sont en tributions la confection des vases et pierresde granit parfaitement jointes, autres objets d'art, la fabrication des d'autres seulement en terra gazonnee instruments de guerre , amies blanches recouverte de roseaux. et amies a feu, auxquelles elle doit Nombre de vaisseaux et de*bdtL- faire donner les calibres exiges (*); ments de transport chinois. La direc- le choix des perles tirees des pecheries tion du ministere des travaux publics , imperialps, et leur classenient en cinq dont nous nous occupons, a aussi dans ordres, sont de son ressort. C'est elle ses attributions la construction et I'en- aussi qui surveille et regie les poids et tretien des vaisseaux et autres bSti- viesures dans tout I'empire. ments de I'Etat dans toutes les provin- La 3" direction se nomme Dii'ection ces. Les Statuts donnent le nombre des des pants et chaussees ( tofi choui bfltiments de guerre et autres de tout thsing li ss^); elle a dans ses attribu- i'empire, par provinces (**). Nous pen- tions i'adniinistration des bacs , des sons que cette statistique ne sera pas ponts, des digues et des jetees; elle sans inter^t pour les lecteurs euro- surveille les eaux, dirige les conrants, peens. fait creuser des canaux et entretenir „ , . , . , , j y.«,.., „..; «.,%.! I T „ 1 „„„«! T„, A. Bailments de s'uerre tenant la mer sur les ceux qui existent. Le grand canal Im- ,. ,, A ,.. , , . . •■ ^ „A--„i • I- ..I -i I cotes (at hai tclten tchouan) : penal, qui aliniente la capitale en v , ,• i j transportant les denr^es des provinces ^° Cnng-kmg ou Moukden ....... lo les plus eloignees, est aussi dans ses f C7*a/i-/o««» 7/in tcliou) (*). Get etablissement , loute- fois, met beaucoup moins en circulation de inetaiix precieux que Ton pourrait s'y attendre, puisque la monnaie chi- noise est toute en cuivre, Yargent ne circulant que par lingots d'un poids de- termine. La quantite de cuivre et de plomb expediee annuellement au ministere des travaux publics par diverses provinces est considerable. Cette quantite est de- terminee; en voici le tableau : Kin («•). 1" Pr.de Yun-nan, cuivre {tlioung) 5,836,a2o III- poiidre d'ailiivion {pao yotidn kiti) 1,945,406 a° Kouei-lcheoity plomb IJaiic {pe youen) 4,3t)i,9i4 Id., poudre d'alltivion 1,463,971 IJ., plomb noir (/;« youen) 473,288 Id., poudre d'ailiivion 157,746 3° Uou-uan , ))lomb noir (car/>0' note? ) a5o,ooo Id., poudre d'alluviou 83,333 Le produit d'autres provenances n'est pas determine. Chaque annee, la monnaie imperiale fond (***) 86 mao de txi^n ; un mao consiste en 6,249 tchouan ou e?iji- lades de monnaies de cuivre percees d'un trou carre dans le milieu; cha- que enfilade comprenant 270 pieces de monnaie {win) ; ce qui fait un to- tal de 145,101,780 pieces de monnaie de cuivre (tsien) fondues annuellement a la monnaie de Pe-king. Les monnaies de I'interieur des provinces ajoute nt an- nuellement a la circulation .'>37,437 (*) Tai thsing Itoei tien,K. 48, f° 20-21. (*') Le //« equivaut a 617 grammes: il compread i6 Itdiig ou owc du conseil prive, la haute cour de justice, « snnt les neiif corps de I'lfitat." Coniraentaire. (•*) « La section// klio a dans ses attribu- tions I'cxamen et la surveillance de tout le personnel du ministere des emplois publics (li poll) et Pe-king; la section fioii khd a la surveillance du personnel du ministere des finances ( /jOK /7o«); la section II khd sur- veille le personnel du ministere des rites (k pott), de I'intendance de la maison impe- riale (thsoiingjin foil) , du bureau des co- lonies (// fan youen) ; de I'intendance des sacYi^cas {tdl tchdng sse), de celle des pro- visions de bouche {kwdng loii sse), du col- lege national ( koiie ts^u kien ) , et de I'ob- servatoire imperial {kin ti'en kiin). La section ping-khd surveille le personnel du ministere de la guerre {ping-poii), de I'intendance des ecuries imperiales {tdi po ssii), de celle des equipages de la cour {toi'ian i wei). La sec- tion Iting khd surveille le personnel du mi- nistere de la justice {hing poit ) , de la cour des referendaires pres du conseil prive {thowig tching sse), de la haute cour de jus- tice {id li sse). La section koi'ing khd sur- veille le personnel du ministere des travaux publics ( koi'mg poit). Deux fois chaque mois les censeurs font I'examen attentif de tous les 368 L'UWIVERS. Les censeurs sont en relations per-^ manentes avec le conseil prive {^nei ko). Us en recoivent des documents qu'ils transmettent ensuite,avec leur cen- sure , aux departements qu'ils concer- nent. A la (in de chaque annee, ils etablissent I'etat detous les documents qu'ils ont recus du grand Conseil pri- ve, avec rind'ication des resultats. Les remontrances des censeurs sont inattaquables; leur droit de censure est souverain, m^me a I'egard de I'empe- reur ; seulement ils ne peuvent appliquer par eux-mfimes aucune penalite. Le tribunal des censeurs exerce son action dans les quinze circonscriptions ou cercles {too), correspondant a peu pres aux quinze anciennes provin- ces (*). Quancl le besoin I'exige, les chefs du tribunal se rendent dans les pro- vinces pour exercer leur redoutable niinistere. Dans uu empire etendu com- nie la Chine, et oiJ ceux qui sont re- vetus d'une portion de I'autorite pour- raient si faciiement en abuser, I'opinion publique n'ayant point d'organes pour se manifester, Tinstitution des censeurs est d'une grande utilite. L'histoire chi- noise est pleine des actes courageux dont ceux qui ont ete charges de ces difiiciles fonctions se sont honores. On lit, dans l'histoire de la dynastie des Thang, que les censeurs^ a cette epo- que, avaient pour mission principale: r De s'enquerir du bien et du mal, ou des vertus et des vices des fonction- naires publics; documents qui ont ele adresses aux diffeients niinisterei ou etablissemeuts publics de leur ressort; ils peuvent demander des eclaircis- semenls,emettre leur opinion, prononcerune censure sur tout ce qui leur parait I'exiger. >• (*) Ces quinze inspeclions sont : i° le ter- ritoire de Pe-kiiig ( king lien ido) ; -io le cer- cle du Ho-nan ( lid nan ido) ; 3» le cercle de Kidng-ndn {Kid/ig ndii tdo) ; 40 le cercle de Chan-toung ; 5° le cercle de Clian-si; <■)" le cercle de C/ien-si ; 7 " le cercle de Tche- kidiig; 8° le cercle de Kiang-si; 90 le cer- cle de Hou-koudng ; 10" le cercle de Fo- kieii; j 1° le cercle de Kouang-toung; 12" le cercle de Kouaiig-si; 1 3" le cercle de Sse- icliouan; 140 le cercle de Yun-nan; i5° le cercle de Kouet - Iclicou, II j a qiialre cen- seurs pour chaque cercle, exceple j.our les cuKf dcrniers qui n'en ont que deu.i. 2" De s'informer s'ils n'apportaient pas la plus stricte equite dans la levee des impots etdans les corvees; 3" De s'assurer si la population ne mettait pas de negligence dans la cul- ture des terres, et dans celle des md- riers, et s'il n'y avait point de deficit dans les greniers publics; 4° De s'informer s'il n'existait point de malfaiteurs exercjant des arts ma- giques ; 5" De recherche r les liommes de ta- lent et de genie extraordinaires pour les faire connaitre a I'empereiir; 6° De surveiller les actes du gouver- nement qui tendraient a la violence et a la tyrannie , ainsi que les fonctionnaires qui s'allieraienta des families puissautes pour exercer aussi des violences. Le vieux philosophe iMo-tseu disait: « Lorsque le gouvernement pousse I'es- « prit de surveillance deliante a I'exces, « le peuple vit dans I'inquietude et la « niisere ! » — II semble que I'institu- tion des censeurs, qui s'interposent entre les gouvernants et les gouvernes, pour rappeler leurs devoirs aux uns et aux autres, et faire respecter la justice, doive prevenir de grands abus; il est certain, du moins, que I'independance et I'inviolabilite dont ce corps jouit en Chine le rend egalement genant pour tous ceux qui se mettent dans le cas d'encourir sps censures. Cette grande institution qui embrasse dans un innnense reseau toute la popu- lation chinoise, gouvernants et gouver- nes, est comme un grand ministere de la police, qui a I'ceil ouvert partout sur I'accomplissement des devoirs de cha- cun et le maintien de I'ordre public. Police de Pe-king. C'est surtout dans la grande ville de Peking , la capitale de I'enipire, que I'institution des cen- seurs, par son personnel divise en cinq classes, exerce Taction la phis complete et la plus vigilante. Les agents des deux dernieres classes sont charges de faire arreter les voleurs, les malfaiteurs, les joueurs, les vagabonds et autres gens de cette sorte; de visiter les rues et les quartiers, d'y faire des rondes ou le guet la nuit, et de placer des sentinelles pour prevenir I'autorite en cas d'iu- cendie. Les capitaines des rues sont soumis CHINE MODERN E. 269 a ces deux classes. Ces capitaines ties rues sont des chefs d'une sorte de magistrature municipale qui sert piiis- samment au maintien de I'ordre pu- blic (*). Chacua de ces chefs est oblige d'avertir les agents du tribunal des censeurs de ce qui se commet dans sa circonscription contre les lois et les iiioeurs, ou de ce qui y survient de nou- veau. II est aussi oblige d'exhorter les families a la pratique du bien, en repe- tant a haute voix tous les jours au commencement de la nuit, dans la rue conflee a sa garde, ces preceptes substan- tiels : « Obeissez a vos pere et mere '« {/lido chiXn fou mou ) ; respeetez les « vieillards et vos superieurs(^/isoi<«g' « king tclidng ckdng); vivez tous en « paix dans vos families (Ad kid //); « instruisez vos enfants (A"mo tseio stm) ; « ne commettez point d'injustice {mo atso w&i) {**).» Cette coutume, dont I'esprit europeen se raillerait sans aii- cun doute, si nos gouvernants voulaient I'importer chez nous, n'en est pas moins fort respectable, et ces exhortations dans une bouche pure et digne doivent toujours produire un salutaire effet. 3. Cour des re/erendaii'es pres du conseil prive {thoilng tching sse). Nous avons fait connaitre les attribu- tions de cette cour precedemment (page 152, note); nous ajouterons seu- lement qu'elle recoit aussi les appels que ie peuple fait ' pres de I'empereur, des jugements prononces par les tribu- naux de provinces. Des n)embres de cette cour sont specialement charges de se tenir a la porte du palais impe- rial pour recevoir les placets de ceux qui, selon une tres-ancienne coutu- me (***), vont frapper sur le tambour 3ui s'y trouve place, pour obtenir au- ience ou justice. Cette cour est une espece de grand Bureau d'e?iqudtes et de revision par lequel doivent passer tous les placets , memoires, petitions, etc., de tons les mandarins civils et militaires de I'em- pire, pour parvenir au souverain , ex- (*) Voy. ci-devant, page 171. {*•) Magalhans, Nouvelle ix'lation de la Chine, p. 223. (***) Voy, 1. 1, p. 36, et la pi. 3 du meme volume. cepte toutefois les mandarins de Pe- king, qui peuvents'adresserdirectement a I'empereur. 4. Cour d^appel {td li ss^) {*). Les attributions de cette cour sont de re- partir de la maniere la plus equitable la justice dans tout I'empire. Elle re- vise les cas graves, et concourt, comme nous I'avons deja dit precedemment, a constituer, avec les autres cours ettri- bunaux, les neuf cours appelees a de- liberer sur les affaires les plus impor- tantes du gouvernement, ou les trois cours supremes de judicature qui pro- noncent les peines capitales aux gran- des assises d'automne. Pour que la peine capitale soit prononcee dans ces grandes assises , il faut que les trois cours soient unanimes dans leur deci- sion. S'il n'y a pas unanimite, I'opinion de chacune des cours est soumise a I'empereur, qui juge en dernier res- sort. 5. Academie imperiale (**) {han tin youen). C'est ici le corps des lettres chinois, le corps savant par excellence, la for U de pinceaux , comme il se nomme (les Chinois ecrivent avec un pinceau), qui jouit de la plus haute consideration dans I'fitat. C'est a par- venir a faire partie de ce corps il- lustre qu'aspirent tous les lettres de I'empire. L'academie des Hdn tin est , pour la Chine , ce que Yinstitut est pour la France. Elle fut fondee sous la dynastie lettree des Thang, vers le milieu du neuvieme siecle de notre ere (***). Elle (*) Tai thsing hoei tie/i, K. 54, f* 16-17. (*') 16. , K. 55. (***) Voy. t. I , p. 3o8 , et p. 23 , n" 108 du present volume. Dans V Almanack imperial de 1844, I'aca- demie des Han lin est placee immediate- ment apres le Conseil prive. Les deux presi- dents du grade de (sin sse, ou cloctews, etaient alors Mou-tchang-a , mantchou, el Pwan-cln-ngan, chinois ; tous les deux mem- bres du Consed prive des miuislres. L' Aca- demie etait composee ensuite : 1° de 4 doc- teurs assistants lecteurs impcriaux {citi toil hid sse); 1° de 5 doctenrs assistants expli- cateurs des livres classiques de I'enipereur ( clii kiang tiio sse) ; 3° de 5 assistants lec- teurs {clii ton) ; 40 de 5 assistants explica- teurs (t/it kiang) , tous du grade de tsin sse; 870 L'UJNIVERS. a deux presidents, I'un mantchou et rautrechinois. Cette srnnde institution litteraire a pour attributions de rediger les documents officiels qui concernent ia litt^rature et I'histoire. Ses princi- paux membres sont les chefs des di- verses classes de litterature , lesqiiels font tous leurs efforts pour acquerir le plus de science litteraire et de renom- mee , afin de parvenir a occuper des empiois publics, ou a remplir des fonc- tions pres du souverain. Le merite litteraire, en Chine, ^tant le merite par excellence, ceux qui, dans les etudes classiques, parviennent au premier rang sont s(irs, par cela mfime , d'arriver aussi au premier rang dans I'Etat. Les empereurs chinois , qui ont aussi cherch6 souvent a briller dans les lettres, aiment a s'entourer des lettres les plus celebres de leur empire. Les deux presidents de I'academie des Han I'm sont, ex officio, les habitues du palais imperial , et airigent toutes les etudes des princes de la famille impe- riale. Deux fois par an , au printeraps et a I'automne, ils designent les quatre mandarins (deux mantchous et deux chinois) charges d'expliquer les livres classiques dans les circonstances so- lennelles, et de traduire du chinois en mantchou, ou du mantchou en chinois les essais litteraires de I'empereur, etc. Les lecteurs imperiaux accompagnent Sa Majeste quand elle se rend au tem- ple dii premier maltre, le philosophe 5* de 4 auditeurs de la propagation de la doctrine {tien po ting) ; 6° 4 auditeurs assis- lanU de Tenseignement {tai tcfuo ting); 7° 39 emvains redacteurs (pie tie chi), tons mantchous ; 8° 16 aulres ecrivains redacteurs de la direction du mouvement du personnel, laquelle direction est composee cfe 3 mem- bres; 9° 3 docteurs tsin sse , cbefs de la sec- tion de la revision et impression des livres (iieou s'tohan); 10° 84 docteurs tsin sse, re- dacteurs et compositeurs de collections de livres ou compilations choisics (^p'len si4oii) : CC8 deux dernicres cate{;ories composees prestjue cxclusivement de Chinois; 1 1° 7 poe- tes ou compositeurs de vers [kiin chi), tous Chinois et du grade de tsin sse ; 12° enfin 60 docteurs tsin sse , ayant eu le plus de lucc^ dans les grands concours litteraires (c/ioji kii tst). Ces derniers ont uu traite- ment annuel d« 1,440 /;art^(ii,5aofr.). Khoung-tsen , pour lui rendre les hon- neurs qui lui sontdus. Ils doivent aussi composer des vers sur les sujets que I'empereur veut bien leur designer. II y a dans Tacademie des Ildn I'ui vingt docteurs, dont huU mantchous et douze chinois, charges specialement, avec I'aide des jeunes gens qui ont le plus brille dans les examens, et qui ont obtenti les premiers grades, de preparer des editions correctes des livres classi- ques , ou des compilations egalement correctes des meilieurs morceaux lit- teraires ou hisloriques destines a I'en- seignement public, ou a orner les bi- bliotheques imperiales. Ces editions choisics sont publiees aux frais de I'empereur et par les presses imperiales. Les Siatnts (*) donnent le catalogue de tous les ouvrages choisis qui ont etc ainsi prepares et publics depuis le regne de Chun-ichi, premier empereur de la dynastie tartare regnante. Celui qui ecrit ces lignes possede plusi'eurs de ces editions, qui sont d'une f^rande beaute et d'une parfaite correction (**). (*) Tai ttising hoei tien , K. 55, f 4 et suiv. (**) Le nomhre des ouvrages chinois pii- blies par I'academie des Udii /in, depuis la i'" annee CItun-cIti (1645 de noire ere) jus- qu'a la 16*^ annee Kia-i:ing (tSii), est de 128, prt'scjue tons d'une elcndue tres-consi- derable. En \oici les principau.v " : 1. * Tela sioitan mi/ig sse; Histoire de la dynastie des Ming, preparee et redigee par ordre imperial (1645). 2 . Tchi tswcin t/ioting kien tsioi'ian chou ; Edition complete du Miroir universel dc I'histoire , recueillie et continuee par ordre imperial (i656). 3. Uido king yen i; Sens explique snra- bondamment du Livre sur la piete fliiale (i656). 4. Y king tlioiing tchou ; Comnienlaire perpetuel sur le Y-King ( 1 656). 5. Tclii pienji kiting sse cltoii kidi i; Sens explique des quatre Livres classiques daus des lectures journalicres , ouvrage compose par ordre imperial (1677). 6. Tela tswiin kitin ling liodng yd p!ao; a. Les ouvrages dc cede grandc collection impe- riale, marques d'un asterisque * , font parlie de la Dihtioihiijue chhwhe de I'auUur. Les dates donnres ici sonl celles de I'on/ie imperial pour la rednction , la compilation nu la coinposilioii des onvrages; celles de la publication sonl toujonrs posterieuru, soavent d'un asscz grand nouibre d'anaset* CHINE MODERJNE. 2T1 6. Bibliotheque imperiale ( tien tsiS ting). Cette bioliotheque est confi6e h Tableaux synoptiques dc I'empire chlnois, rediges par ordre imperial (1679). 7. Tcht sieou OTi'«^«c',- Leshistoriens des Ming edites par ordre imperial (1670). 8. Tchi pi'eii ji klang chod king hidt i; Sens explique du Livre des Annales , dans des lectures journalieres , ouvrage compose par ordre imperial (i 680). 9. Tela pi'cnji kiang t king kidi /; Sens explique du Livre des changements, dans des lectures journalieres, ouvrage compose par ordre imperial (i683). 10.* Tcfii tswan tdi titsing hoei tien ; Col- lection des staluts adminislratifs de la dyuas- tie (at thsing ou tres-pure ( actuellement re- gnanle) , recueillis par ordre imperial (1684). Voir ci-devanl, p. i3i. — JS'ota. Le meme grand ouvrage a ete public de nouveau par I'academie des Hdn lin, avec des augmenta- tions successives considerables , et par ordre imperial de 1724, 1747, 1801. 1 1. * Tclii sioudii tdi thsing i thoiing tchi; Geograpbie historique universelle de I'em- pire des Tdi thsing, redigee par ordre inipe- rial(i685). — Voy. ci - devant , p. 1. Cette grande Geograpbie bistorique a ete reimpri- mee successivement avec des augmentations nombreuses en 1744 et en 181 1 (dates du decret de reimpression ). C'est I edition de 1744 que nous possedons. Elle comprend 356 kiouan, ou livres. 1 2. Tchi pica koii wen youdn kie'n ; Mi- roir des sources de la litferature ancienne , recueil compile par ordre imperial (i685 , 64 livres). — Voy. torn. I, p. 287 , /lote. Chef- d'oeuvre lilteraire et typogiapbique. 1 3. Tchi sioitdn pel wen jun foil; Tresor tonique de lilteralure a graver dans la me- moire; ouvrage redige par ordre imperial (i 704 , 120 volumes). — Grand Diclionuaire tonique de la langue chinoise, dont une nou- velle edition a paru a Canton il y a quelques annees. 14. Tchi siouan kouang kiwi fang poii ; Traites sur toutes sortes d'objets de culture et d'histoiie naturelle, composes par ordre imperial (1708). 1 5. * Tchi sioiian khdng-hi tse'u tien ; Dic- tionnaire de Khdng-hi, redige par ordre imperial (1710, edit, petit in-4"). 16. * Tchi sioiian joud'i kiin loui han ; Encyclopedie bistorique el litteraire, tiree du Miroir des sources (Bibliotheque parlicu- liere de rerapereur) , redigee par ordre im- perial (1710 , 45o kiouan ou livres). — L'ediliou que nous possedons est une la garde de deux conservatcurs Hdn lin, I'un mantchou et I'autre chinois. nouvelle edition en miniature, sur papier blanc, lout a fait conforme a la precedeuie qu'elle reproduit page pour page. 17. *Tchi sioitan U tdi ki sse nien pido ; Tableaux cbronologiques des cboses et des evenements arrives sous les differentes dy- nasties qui se sonl succede; ouvrage re- dige par ordre imperial (17 12, 100 vol. in- 4°). — Voy., t. I, p. 35, la note 2 , sur ce magniGque ouvrage d'histoire et de lypo- grapbie chinoises. Ou u'en connait que deux exemplaires en Europe: celui de la Bibliothe- que nationale de Paris et celui que possede I'auteur. 18. * Tchi pien Tchoii-lseii tsioiian choii; CEuvres completes du philosopbe Tchoii-tseit ou Tchoil-hi, recueillies par ordre imperial (1713, 66 kiouan ou livres). 19. * Tchi sioiian Thang chi; Poesies du temps de la dynastie des Thang , recueillies et publiees par ordre imperial (1713). — l^dilion de toute beaule, avec encadre- ment des ouvrages cites dans le Comnieu- taire, et ponctuation a I'encre rouge , et une preface de I'empereur Khdng-hi; i5 forts volumes in-40. 20. Tchi sioitan sing U thsing i ; Sens subtil du systeme de pbilosophie naturelle, intitule Sing li , redige par ordre imperial ('717)- 2 1 . Tchi sioitan phien tse'u loui pien ; Col- lection methodique d'expressions composees de deux caracteres, ou grand Diclionuaire de mots accouples , redige par ordre imperial ('7 '9)' [Magnifique ouvrage en 129 volu- mes, chef-d'oeuvre de typographic chinoise, dout le seul exemplaire connu en Europe a ete vendu a la bibliotheque de de Guignes, et achete pour la Russie.J 22. Tchi sioiian jun foit chi i ; Supple- ment au grand Diclionnaire tonique (n" i3), redige par ordre imperial (1720, 23 vol.). 23. Tchi sioiian tseii sse thsing hda : Fleurs et essences des philosophes et des his- toriens, ouvi-age compile par ordre imperial (i 721, 160 kiouan ou livres). — Ce sont les opinions des philosophes et des hisloriens chinois classees methodiquement sur les memes sujets, tels que le Ciel, le Soleil, la Lune , les Eloiles , le Vent, la Terre , etc., etc., elc. ; Ires-belle impression. 24. * Tchi sioiian tchun thsieou fchouan chdtic wet tswdn ; Guirlande d'explications, de commentaires et d'cclaircissemeuts de toutes sortes sur le tclnhi thsieou de Confu- cius, recueillie par ordre imperial (i7ax). — 373 L'UNIVERS. Le catalogue complet des livres con- serves dans cette bibliotheque a etc pu- JlHgnifiqiie edilion, avec iine preface de I'ein- nereur KhiiiK-hi, a4 vol. iii-P. _ tS. Tclii pieii ]i kiiiiig tcliuii thsteou kiai i; Sein expliqtic dti Tclmn-lhsieou , ou Livre ijcs Aniiiih'S, dans des lectures joiirnaliercs , conipo&e par ordre imperial (i7^y). aC. * Tclii iioitan tdi tlisiiig llioiiiig li; Ceremonial iiuiversel de la dynastie Tai- thsing, redige par ordre imperial (1736).— Cel ouvrage n'a ele public qu'en 1756; il esl en 5o livres et forme 8 volumes •»-4"- Voir ci-devani, p. 211, la traduction du Ce- remonial wsWh envers les Ambassadeurs, que nous avons donoee d'apres cet ouvrage offi- ciel. 37. Tc/it stoiian clie'ou chi thoi'mg khao ; Examea approfondi des temps et saisons , redige par ordre imperial (1737) ; ouvrage sur y Agriculture, accompague de planches nombreuses. 78 kiouau ou livres, a4 vol. pe- tit in-P. 28. Tclit tswan sou wen hien thoiing khdo; Supplement a la grande Encyclopcdie histo- rique de Ma-louan-lln (dont le litre suit, n" 27), redige par ordre imperial (i747> sSa kiouau ou livres). 20. Tclii tswan liod/ig tclido wen lilen tlioung klido; Exami'ii approfondi des monu- ments lilleraircs parvenus jus(|u'a nous (ou- vrage de Ma-touttn-Un), arrange pour I'usage de ia cour imperiale par ordre superieur (1747, 26a kiouan ou livres). 3o. Tc/ii sioiian si tlist'ng koit kien, Mi- roir des anliquites de la purete occidentale (cabinet de I'empereur), redige par ordre imperial (1749, 42 vol. grand in-f , avec beauroup de planches). — Nota, C'est de ce magniGque ouvrage que nous avons lire les planches 38 a 44 de notre premier volume , page 201 et suivantes. 3r. Tela siottan thoiing wen yiin tliottng; Traite general de 1h prononcialiou de plu- sienrs mots compares {sanskrit, tliihetaia el mongol) , redige par ordre impeiial ('75o)- 32. Tclti t>ien tsien loii; Catalogue des monnaies , redige par ordre imperial (i75i). 33. Tcht tswan hodng yd si yd (hod tclti lod lid tela; Description des fleuves el des chaines de monlagnes, el cartes figuratives de I'empire chinois el du Si-yii (ou Occident de I'Asie ) , redigee par ordre imperial , de 1756. 3t. * Tchl tswan hodng tclido li ki thou clit; Modeles figures des objets de loules na- ture* couformement aux riles, recueil redige blie, d'abord, par ordre de Tempereur Khang-hi (*), et ensuite, par Kien- a Tusage de la cour, par ordre imperial (i 759, 16 vol. in-4", en deux enveloppes, avec une preface de I'empereur). — Ouvrage roagni- (i(|ue renfermanl le modele ou patron figure ot'ficiel des ustensiles employes dans les sa- crifices; des instruments de geometric , d'aj- tronomie «, etc. ; ceux des v^temenls civils et mililairee, ceux des instruments de musiqiic de loutes sortes; de tons les grades; des etendards, oriflammes , chars , arcs , jleches , fusils , sabres , catapultes , canons , palan- quins , fusils de remparts , mortiers, etc., etc. 35. Tela tswan si yii tlioung wen tchi ; Traite des noms communs aux si yii , on con- Irees occidentales de I'Asie, presenles dans des tableaux synopliques (en chinois, man tchou, mongol, oelet, thibetain et turc), re- dige par ordre imperial (1763). 36. Tchi tswan hodng tclido thodng tien; Regies universelles de gouvernemenl, editees par ordre imperial pour I'usage de la cour (1767), Nota. L'ouvrage original fut compose par Tou yeou, qui vivait sous les Thang; il com- prend 200 livres. 37. Tchi tswan hodng tclido thodng tchi; Traite sur loules sortes de sujets importanls, edile par ordre imperial pour I'usage de la cour (1767). Nota. L'ouvrage original fut compose par Tchin tsiao, qui vivait sous la dynastie des Soitng; il coiuprend 200 livres. 38. Tchi tswan sod thodng tien i sou thodng tchi; Deux supplements aux deux grands ouvrages precedents, rediges par ordre imperial (1767). Nota. Le second de ces supplements comprend 527 livres. 39. Tela pien tseng ting thsing wen kien; Miroir de la langue mantchoue , corrige el augmeute par ordre imperial (1771, 48 livres). 40. Tela tswan sse kliot'i thsiouen chou; Catalogue complet des quatre magasins, re- dige par ordre imperial (1773). Nota. C'est un catalogue raisoniie, en 112 volumes, de tons les livres chinois qui devaient composer la grande Collection d'ouvrages choisis, en i6u,ooo volumes, ordonnec par I'empereur Khien-toung. Voy. ci-devant, p. 14, et note. (*) Khin ting thou chou tsi tolling. a. On y voit la representation de plusieurs instro- inenls de inatheinaliqiies et d'astrniiomie. fabriques en Europe ; et 011 lit tres-lisibleinent sur la gniTure de I'un d'eux London (Loudres). CHINE MODERNE. 273 hung (*). Ces livres, avec la grande collection des annees young -lo des Ming , forment la bibliotheque impe- riale. 7. 11 est encore d'autresetablissements quiont des rapports avec racademie des Hdn-im. Tel est le Bureau des histo- riographes de la cow ( Ki kiu tchou koudn) , compose de dix Mantchous et de douze Chinois, dont les fonctions sont de rediger des memoires de tous les faits qui meritent d'etre transmis a la posterite. Toutes les fois qu'il y a des assemblees ou des reunions publi- ques a lo cour, les bistoriographes de service restent constamment aux cotes de I'empereur, pour recueillir ses pa- roles et faire le recit de ses actions, Lorsque I'empereur se rend a sa resi- dence d'ete de Youen-ming -youen , quatre historiograpbes restent attaches a sa personne. lis Taccompagnent dans toutes les ceremonies publiques, com- me celle du labourage^ celles de la ce- lebration des sacrifices, sa visite aux tombeaux de ses ancetres, afin detrans- mettre ces faits a la posterite. 8. Un autre Bureau, plus important que le precedent, et qui a aussi des rap- ports etroits avec I'academie des //dn-/<«, est le Bureau des kistoriographes de I'empire {KoMsse /owa/t), dont les attri- butions sont de rediger des memoires fideles et authentiques sur tous les eve- nements et les faits contemporains. Ces documents sont destines a servir plus tard de materiaux pour ecrire i'bistoire officielle de I'empire. L'histoire officielle cbinoise est assu- rement la plus autbentique du monde; car, chez aucun peuple, il n'a ete ap- porte autant de soiiis a recueillir les faits qui y sont consignes (**). Cettehis- 4r. Tela sioiian tlioung kien kitdng mou sail plen ; les trois parties de I'hisloire iini- verselle , inlitulee Tliot'uig kien klidng mou, redigees par ordre imperial ( 1775). Yoy. Gaubil, Chronologic chinoise, p. 170. 42. Tcht tswdn tela lid fang Ho; Abregc de I'art de diriger et mailriser les fleuves, redige par ordre imperial (i8ii). (*) Klit'n ting sse kltoii tsioiien clioii tl pen. Voy. p. 14, n° 9 , et le n° 4o de la note qui precede. (**) Voy. 1. 1 , p. 32. 18« Livraison. (Chine modebne.) toire repose sur quatre especes de re- cits, qui sont: 1° L'bistoire des souverains (pen ki) ; 2" des traditions {tchouan) sur tous les faits importants qui peuvent concer- ner les ministres et autres personnages remarquables de I'fitat ; 3° des statis- tiques de faits naturels, physiques et autres (tchi); 4° enGn, des documents externes de toutes natures, comme des tables genealogiques [pido) (*). Tous ces materiaux reunis servent a constituer l'histoire. (*) Tai tlising lioei ii«n , K. 55 , f i2-i3. Selon le Conimentaire , void les diverses es- peces de traditions que doit recueillir I'his- torien: r° traditions ou we'/woirej concernant les ministres d'fitat; 2° memoires d'actes de justice et de ildelite; 3° memoires sur les lettres; 4° memoires sur les compositions lilteraires ; 5" memoires sur les recherclies des historiens ; 6° memoires sur Jes actes remarquables de piete filiate et d'amitie; 7° memoires sur les femmes celebres par des actes de devouement et de verlus; 8° me- moires sur les chefs indigenes (toil sse); 9° memoires sur les contrees elrangeres des quatre cotes; 10° memoires sur les ministres qui ont aide le gouvernement ; ii" memoires sur les ministres rebelles. — Ce plan ofGciel dc I'historien chinois est a pen pres celui choisi par Sse-ma-tltsian (l. I, p. 246). Selon le meme Commentaire, les tchi, pour I'hislorien chinois, sont des traites 1° sur V astronomic ; 2° sur la loi des saisons; 3° sur les rites; 4° sur la guerre; 5° sur les iois penales; 6" sur la musique ; 7° sur les arts mecaniques et litteraires ; 8° sur la geogra- phic; 9° sur \ts fleuves et les canaux; ro" sur les moyens de transports et les vetements ; 11° sur les ceremonies publiques et la defense des places ; 1 2° sur les denrees de consom- mation; i3° sur les magistrals ou fonction- naires civils et militaires; 14" sur Vavance- ment dans les emplois ou les promotions. Les pido ou tableaux synoptiques com ■• prennent : i° le tableau gcnealogique des ministres d'Etat, avec des memoires sur les actes meritoires qui ont pu elre accomplis par des membres de leurs families , lesquels sont aussi representes comme chefs de leur branche, dans des tableaux genealogiques; 2" des tableaux des faveurs et dignites accor- dees aux princes et chefs mongols et maho- metans des possessions chinoises de I'Asie occidentale. On voit, par ce Commentaire des Statuts, que les devoirs de I'liistorien chinois sont 18 374 L'UNIVERS. 9. IJn autre 6tablissement,dont les at- tributions sont aiissi d'line nature scni- blable, niais inforieure, le Departe- ment de I'observation des fails de la cour {chin ss4/ou), depend encore lit- terairenient dei'academiedes Hdn-lin. 10. Inkndance des sacrijices (tdi tchdtuj sse ) (*). Cet etablissenient est charge de preparer et de diriger les ce- remonies aes sacrifices; de choisir I'es- pece et le nombrc des ustensiles qui doivent y ^tre emplo^^s ; enfin , tout ce qui concerne ces ceremonies de tout ordre, et qui eft depend. 11. Intendance des ecuries imperia- lesiidl po sse). Cet ctablissement est charge de diriger tout ce qui concerne les eruries et les attelages de i'empe- reur. II a aussi sous sa direction les haras imp^riaux situ^s en Tarta- ric (**), etc. 12. Intendance des provisions de bouche de la maison imperiale, et de celles qui sont necessaires dans les ceremonies publiques [fioudng lou sse). Cet ctablissement est d'une assez gran- de importance en Chine, ou les fetes et les ceremonies sont nombreuses. C'est surtout quand on celebre les grands sa- crifices au Ciel, a la Terre, au Soleil, hi la Lune , dans les fetes anniversaires de Pempereur, etc, que les Vatels chi- nois de cet ctablissement sont occupes. Ce sont eux aussi qui sont charges de I'entretien des ambassadeurs Strangers assez notnhieux et assez importants noiir faire cle sa fonction I'linc des plus nobles et des plus nicritoires qui puissent ^tre accomplies dans »in ^tat civilise. Aussi est-elle en grand Itonncur en Chine depuis un temps iinmcnio- rial, comme nous le verrons plus loin. — Les grandes annates chinoises sent toutes, depuis deux mille ans, redigees sur le plan qni vient d'etre expose. Comme les documents cpii ser- vent a composer ces Annates sont recueillis journellement par le Tribunal des Idstoriens dont nous parlous ci-dessus, res aunales pre- sentent des tableaux successifs a peu pres complets de la civilisation chinoise. (•) Tai thilng hoel t'len , K. 56-5;, Les Statuts dontient,en deux livres, les details les plus minuticux sur tout ce qui concerne racconiplissemcnt des ceremonies sacrilica- toircs. ISous nc poUvoiis ni les reproduire ni le« analyser ici. (") I*., K. 5;, rj7.ai. et de leur suite , lorsqii'ils entrent eii Chine. Les provisions (moutons, pores, poissons , vin, etc.) qui doivent leur etre delivrees sont reglees par les Sta- tuts (*). 13. Institutions municipales de la ville de Pe-kimj {chtin thien foil (**) ). La ville de Pe-Hng , comme capitale de I'empire , est administree par un magistrat special, dont le titre (ijin) et les fonctions correspondent en quelque sorte a celles de Maire eu Pre/et de Paris. C'est ce magistrat qui regie, dans les limites de son territoire ( Pe- /ling et sa banlieue ) , tout ce que les etablissements precedents reg lent pour le reste de I'empire. La traduction du livre des Statuts qui concerne cette administration municipale, ainsi que celle (le Moukden, aurait un grand in- ter^t pour nous ; nous ne pouvons que I'indiquer ici. On y remarque, entre autres choses , les mesures que le maire de Pe-king doit prendre a I'epo- que annuelle de la c^remonie du labou- rage par i'empereur {***). CEREMONIE DU LABOURAOE (****). « Pour montrer plus de respect et de veneration dans cette ceremonie, di- sent les Statuts , la charrue ( loii'i sse ) (dont se sert I'empereur) est peinte en jaune (couleur imperiale), et le fouet est de soie couleur jaune. Le coffre a semence {sidng ) Ao\t etre de couleur verte. Suivent la charrue : trois princes imperiaux {ivdng) et neuf grands di- gnitaires (king), avec chacun une char- rue peinte en rouge et un fouet de soie de couleur rouge, le coffre a semence etant de couleur noire. Ces coffres a semence doivent etre pleins de grains pour semer ( tchofmg loii). La charrue dont se sert Tempereur est attelee d'un bocuf cou\eur jaune J les charrues qui suivent sont trainees chacune par un boeuf de couleur noire. « De vieux et honorables laboureurs sont convoques a cette ceremonie, au nombre de trente-cinq, pour y prendre (*) Tai thsing lioei tieu , K. 58, f 7. (") ll>., K. 5<). (***) Voy. pi. 14 de ce volume. (*"*) Tai tlising hociticn, K. 69, f 3-4. CHINE MODERNE. 275 part; et d'autres laboureurs , au nom- bre de quarante-deux , charges de di- nger et d'accomplir ponctuellement la ceremonie du labourage. Deux vieux laboureurs ont la mission de conduire le hceui {A it'll niedu) de la charrue de I'empereur (*); deux autres laboureurs soutiennent les manches de la charrue {foil H). Les charrues des trois princes imperiaux et des neuf grands dignitai- res qui suivent , sont conduites cha- cune par un vieux laboureur, et soute- nues par deux autres laboureurs. Le maire ou prefet de Pe-f>ing est en tete du cortege, revetu de ses habits de gran- de ceremonie {meng pao). Les vieillards qui precedent Tempereur sont vetus de robes de soie verte ( thsing kiouen) ; les laboureurs qui precedent les trois prin- ces imperiaux et les neuf grands digni- taires portent des robes de toile verte {thsing poll). Tous portent le bonnet distinctif de leur dignite et de leur rang {ting mdo). Les laboureurs portent le bonnet de feutre orne de franges et le large pantalou de toile. « Lorsqiie I'empereur s'approche de la charrue pour labourer la terre, le maire de Pe-king lui presente le fouet ou I'aiguillon, et I'accompagne jusqu'au bout du champ. La ceremonie llnie, le mememagistrat, a la tete des employes places sous ses ordres, accompagne des vieillards et autres laboureurs, se range en ordre devant la Tour de la contem- plation du labourage {koudn f>eng thai), sur le cote occidental , et la face tournee vers le nord. A la voix du maitre de ceremonie, I'assistance ac- complit les trois agenouillements et les neufprosternements{**). La ceremonie finie et les rites accomplis, les vieil- lards et les autres laboureurs conti- nuent de labourer le champ commence. Si I'empereur ne reprend plus le man- che de la charrue, alors le maire de Pi'-king, avec sa suite et les laboureurs qui assistent a la ceremonie, achevent le labour du champ commence. « Lorsque les produits de ce labou- rage sont arrives a maturite, alors on en annoncepubliquementia moisson,et ce produit du labourage imperial est (*) Voy. la pi. 14 de ce volume. (**)Voy. ci-devanl, p. 2i3-2x.',. depose dans le grenier de I'esprit di- vin {chin tsdng), oil le grain en est re- cueilli dans des ustensiles destines a cet usage (*). » 14. Intendance du ceremonial de la cour imperiale et des assemblees pu- bliques {hoUing loii sse) (**). Cette cour de I'etiquette chinoise, qui se rattache, par son personnel, au Ministere des rites, regie le ceremonial qui doit etre observe dans les reunions et fetes pu- bliques, aussi bien que dans les cere- monies reiigieuses. Les exemples que nous avonsdeja presentesde la science des membresqui composent cette cour de I'etiquette orientale., peuvent sul'lire pour en donner une idee. 15. College imperial ( Koiid tseu Hen) {***). Ce college est destine a i'e- ducation des fits des grands de ['em- pire, comme Tindique son nom , et des princes etrangers. Les eleves y restent six ans, et payent cent Hang par an (800 fr. de notre monnaie). On y en- seigne les langues chinoise, mantchoue et mongole. Les mathenwtiques font partie des etudes dans ce college im- perial. Deux professeurs, I'un tartare- mantchou, I'autre chinois, y enseignent aussi la langue russe, ainsi que le chi- nois et le mantchou aux jeunes Russes qui y sont admis. II y a beaucoup de jeunes Tartares des huit bannieres. L'empereur visite ce college une fois Ear an. Nous reviendrons sur cet eta- lissement en traitant du Systeme d'e- ducation chez les Chinois. 16. Observatoire imperial {Khin thien kien). Cet etablissement, specia- lement charge de la redaction annuelle du calendrier, tient une grande place dans les Statuts (****), qui donnent ainsi (*) Nous donnerons plus loin la traduction du Ceremonial complet usite en cette cir- coustauce, et celui de la. fete des muriers, oil rimperatrice joue le premier role, coaime I'empereur, daus la ceremonie du labourage, (*•) Tallhsing lioei tien, K. 60. (***) Tai thsing hoe'i tien, K. 61. (**") Tai thsing lioei tien, L. 62-64. Le bureau de YObservatoire imperial est com- pose, d'apres les Statuts, de deux presidents , I'un mantchou et I'aulre chinois, et de deux vice-presidents europeens, I'un de gauche et I'autre de «//o//(;. Voir ci-devant, p. 22, n°ioi. Selon TAlmanach imperial de i844, le Di' 18. 276 L'UINIVKRS. iintraitecomplet d'astronoiniea I usa^e dps mandarins de I'enipire , lesquels doiventd'aiitant nioins ignorer I astro- nomic oflicielle, quecelle-ci est intime- nient liee aux autres institutions et ce- remonies publiques. t7. Academic de medecme (tai I tjnuen (*))• Get etablissement a pour mis- jijon de maintenir dans toute son inte- crite la science de la pratique medirale, qui remonte , en Chine, a la plus liautc antiquite, et de diriger ceux qui entrent dans la m^ine carriere. Les membres qui composent cette academie de inedecine sont au nombre de cent quinze, dont quinze medecins imperiaux (yui); (rente praticiens {Umm); quarante docteurs en niede- cine (i sse) , et trente eleves en mede- c\n&lising). Nous parlerons plus loin de la ine- decine chinoise. 18. Bureau des gardes imperiales {chi wei tchou {**)). Ce bureau a dans ses attributions tout ce qui concerns lestroispremieresbannierestartaresqui forment la ^'arde imperiale , composee desjeunes gens des principales families tartares-mantchoues et niongoles. Les Statuts font connaitre les reglements du service de cette garde. 19. Bureau de reception des re- quites , petitions, viemoires adresses a lafamlUe imperiale {tsao sse tchoii). Ce bureau est charge de recevoir et de transmettre a ieur adresse tous les ccrits, de quelque nature qu'ils soient, en langue mantchoue et en langue chi- noise, qui sont adresses a I'empereur ou aux membres de la famille imperiale. 20. Intendance des equipages de la cour (louanl w6i). Get etablissement ne manque pas d'une certainc impor- tance; il occupe un livre entier dans les Statuts {**'). recletir de F ohservatoire etait alors King telling, Tarlare; les deux presidents, Pun Tarlare et I'autre Chinois, etaieiit Tslang tai et Tcheouyu king. Il y avait 4 vice-presi- dents, deux Chinois el deux Tarlare^; mais point d'Eiiropeens. (•) Tai-thsing lioei tien, K. G4, f"» 26-28. Toy. ci-devant, p. aa, n" lOr. n lb., K. 65. (*•*) Tai thsinghoei tien, K. 66. Il com- prend plusieurs Directions ou Jnte/idances : 21. Administration generate des huit bannieres {pa khi tofi thoiinn). Cette administration , qui a a sa tete vingt-quatre directeurs generaux, huit Mantchous, huit Mongols et huit Chi- nois, et quarante-huit sous-directeurs egalement des trois nations, regie tout ce qui concerne le service et I'adminis- tration des huit bannieres comprenant I'armee chinoise, I'armee mougole et I'armee tartare , en meme temps qu'elle en surveiile et fixe Teffectif , qu'elle en regie I'instruction et la discipline, qu elle determine les rangs et les hon- neurs parmi lesofliciers, et qu'elle pour- voit a la solde des troupes, Les Statuts {*) entrent dans de nom- breux et niinutieux details sur I'orga- nisation de I'armee chinoise, comprise sous la denomination des huit bannie- res ipd/rhi); sur les lieux oij elle doit tenir garnison; sur la constitution et I'effectif des differents corps, selon les places qu'ils occupent; sur les peines discipiinaires; sur une infinite de faits et de circonstances que nous ne pou- vons reproduire ici, mais qui sont de nature a interesser considerabiement lesEuropeens qui cherchent a connaitre les forces defensives de ce grand em- pire. L'organisation de plusieurs autres bureaux ou directions spociales concer- nant les fabriques d'armes et de muni- lions de guerre, est encore decrite dans les Statuts {**). Ces directions speciales se rattachent a la precedente : nous n'en parlous ici que pour memoire. 22. Enlin, la derniere et grande ad- ministration chinoise dont il nous reste a parler, est le Departement de la maison imperiale {nei woufoii (***) ). Ce departement regie tout ce qui con- cerne le service et I'administration des trois premieres bannieres qui forment la garde imperiale, en meme temps celie des cliars et autres equipages ; celle des clievaux et attelages; celle du manicment des uns et des autres; celle des arcs et desjlec/ies; celle des bannieres et elendards; celles des lances, iiallcbardes et amies de toutes na- tures, etc. (') Tai tlising hoei tien, K. 67-69. Voy" p. 220. (**) IIk, K. 70-71. ("•) ll>., R. 72.80. CHINE MODERN E. 277 3ue tout ce qui depend de ce iiieme epartenient dans les six grands mi- nisteres des fonctionnaires publics , Ats finances, des rites, de la guerre, de h justice et des travatix publics. Cette vaste administration, qui com- prend les sept derniers livres des Sta- tuts, est divisee en un grand iiombre de bureaux, dont il serait trop long et trop fastidieux de faire ici Tenumera- tion. L'un de ces bureaux est VIntendance des tresors et magasins {koudng tchou sse). Cette intendance regie tout ce qui coneerne Ventree et la sortie des objets a I'usage de I'empereur, des tresors et magasins imperiaux, au nombre de six, qui sont : 1" le tresor d'argent {yin Ahou) ; 2° le magasin des peaux {phi Ahoti); 3° le magasin des pierres precieuses ( ise'M Ahou); 4° le magasin des soieries [toudn Ahou) ; 5° le maga- sin des velemeiits (i Ahou) , et 6° le ma- gasin du the {tchd Ahou). Les Statuts donnent I'inventaire de ces six tresors et magasins. Ensuite ils font connai- Ire les formalites des mariages des princes et princesses du sang; les ar- tisans, au nombre de sept sortes, joail- liers, ouvriers fleuristes , etc., em- ployes pour I'usage de la maison im- periale. Les rites que doit observer I'empereur, non plus commesouverain, mais comme pratiquant la doctrine de Che Aia meou ni Fo {BouddJia sha- ktja mouni), de meme que ceux que doi- vent pratiquerl'imperatriceet lesautres membres de la t'amille imperiale, aux differentes epoques de I'annee ; les ve- tements de rigueur dans chaque cir- constance, sont detailles avec le plus grand soin dans les Statuts (*). Ces derniers font aussi connaitre en detail les rites et usages qui doivent etre ob- serves par I'empereur et sa famille dans les ceremonies de naissances, mariages, funerailles et autres circonstances im- portantes de la vie civile (**). Tout ce qui coneerne le regime et I'organisation des eunuques est regie par ce departement (***). II a aussi radministration des domaines inipe- n Jk, K. 64. (**) il>., K. 75. (*") Il>., K. 75, f 14 et suiv. riaux, qui sont nombreux et conside- rables, et dont lesrevenus annuels, en argent et en nature, sont dounes dans les Statuts, de meme que le regime et le produit des troupeaux et haras ap- partenant a I'empereur, et situes en Tartaric (*). Le regime disciplinaire de la garde imperiale , les reglemenfs concernant le service du palais, sont aussi detailles dans les Statuts (**), ainsi qu'un grand nombre d'autres sujets , dont nous ne croyons pas necessaire de faire ici I'enu- meration. C'est dans la dependance de ce Departement de la maison imperiale que se trouve la Bibliotheque impe- riale, dont nous avons parle prece- demment (***), et qui renferme une edition d'ouvrages chmois de 78,731 vo- lumes ! II faut lire les sept derniers livres des Statuts, pour se former une idee de I 'immense et somptueux appareil qui entoure un grand monarque asiatique, Celui des cours europeennes ne pour- rait en donner qu'une imparfaite idee. Les descriptions, si longtemps crues fabuleuses,du voyageur venitien Marco- Polo , de la cour asiatique du grand Khan, n'ont rien d'exagere, appliquees a ses successeurs sur le trone imperial de la Chine ; et, a defaut des Statuts, le lecteur europeen pourra, en les lisant, se representer, jusqu'a un certain point, la cour du Celeste empire, qui seule, dans le monde moderne, a conserve le luxe et les traditions des anciennes mo- narchies derOrient,desgrandes satra- pies medes et persanes, dont elle est, avec I'ombre eclipsee de I'empire des sultans, I'unique heritiere! Nous venons de donner, autant qu'il nous a ete possible dans les limites qui nous etaient tracees, un apercu raisonne des lois organiques actuelles de I'em- pire chinois, qui ne forment pas moins de trente volumes in-folio dansle texte original. II ne nous a pas fallu peu de courage et de resolution, dans les cir- constances orageuses que nous venons de traverser, pour accomplir cette tSche (*) lb., K. 76. n lb., K. 77. (**') Page 14 , n" 9 et note. 278 L'UNIVERS. ingrate et laborieuse, sans autre appui que nous-iu^tiie , sans autre desir que oelui de douner a nos lecteurs une me aussi exacte que possible d'une nation qui est seule mainteuaut, avec une po- pulation presque fabuleiisc, a represen- ts ies idees de I'ancien monde, et qui, a ce titre seul, devrait suffisamment interesser le nouveau ! TROISli:ME PARTIE. LANGUE, PHILOSOPHIE ET LITTEBA- TUBB CHINOISES. r Langue chinoise. Apr^s avoir de- crit,d'apres Ies sources authentiques chinoises, I'etat actuel de cet empire sous Ies rapports geographique et poli- tique, c'est-a-dire, apres avoir fait con- naitre, autant que le temps et I'espace nous ont permis de le faire, rimmense scene oii se meut le plus ancien et le plus grand peuple du monde, et Ies dif- f^rents rouages de son organisation po- litiuue et sociale, nous devons chercher maintenant a initier nos lecteurs a ce systerae d'ecriture et de langage qui n'a plus d'analogues que sur Ies pierres mutilies des monuments de I'antique fegypte , et qui est rest^ , aux yeux de rkurope, comme une espfece d'enigme, dent quelques personnes s'obstinent a chercher vainement la solution (*). II se passa bien des siecles depuis le jour ou I'homme apparut sur le globe quMI habite, jusqu'a celui oii, reuiil en societe, il decouvrit le moyen de don- ner une forme d^terminee a sa pensee, jusque-Ia fugitive, en la faisant passer dans le domaine du monde materiel. Les premieres tentatives qui furent faites pour etablir un lien de commu- nication entre le monde des formes et celui des id^es, durent nectssairement participer de rimperfection de Tintelli- gence de Thomme, qui ne pouvait arri- (*) Ceiis qui voudraieiK s'inilier plus avaiit daiu le syiiteiiic de VAcriture chinoise , peu- »em coDtuller I'ouvrage que nous avons pu- blic cii i84», sous ce litre: Sikico-^gyp- TiACA, ou Esiai sur I'or'igine et la formation timilaires des ecritures figiirativet chinoise et egjptienne , d'oii la plus grande parlie de ce qui suit a ete tiree. Paris, F. Didol; i vol. ver a son complet d^veloppement que par le perfection nement progressif de ce grand instrument de civilisation. On a souvent dit et repete que le lan- gage et recriture n'^taient pas des pro- duits humains, mais des revelations divines. Si Ton a voulu dire que la fa- culte que Thomnie possede d'exprimer sa pensee par des articulations nom- breuses et soumises a des lois varices, de la communiquer au moyen de cer- tains signes convenus, est une faculte gu'il tient de Dieu comme ses autres racultes, on a eu raison; mais si, au contraire, on a voulu dire que le langage et Tecriture etaient directement reviles de Dieu a Thorame, essentiellement in- capable d'arriver par lui-meme a se creer un langage quelconque et des signes convenus de communication , on est tombe, selon nous, dans une grave er- reur, parce que les langues numaines et les signes destines a les representer aux yeux sont trop ilnparfaits, malgr6 les perfectionnemcnts que les genera- tions successives leur ont apportes, pour ^tre I'oeuvre de Dieu. 1. Origlne, developpement et modifi- cations successives de t'ecriture chinoise. L'histoire, d'ailleurs, donne a cette opinion toute I'autorite d'un fait. Et, pour nous borner aux recherclies qui font lesujet decet article, nous allons passer successivement en revue co que ies ecrivains chinois les plus accreditcs ont dit de I'origine et de la formation de Jeur ccriture IJgurative. On lit dans la seconde partie du Commentaire de I'illustre philosophe Khoung-tseu, sur le Supplement au Y-klng ou Livre des transj'or motions (le plus ancien livre chinois), nonnne Ht-thseii, redige primitivement par TV6n-wdng et fcheoti-koimg , dans le onzieme siecle avant notre ere (*) : (*) Le Commentaire de K^oung-tseiV sur le Hi-thseii de Wen-wdnge\. de Tcheoii-koung, est iulitule Tchottdn, c'esl-a-diie Hisloire tra- tlitionnelle , traditions. Des traditions Iraiis- niises par uu hoinine comme rilltistre philo- sophe chinois meritent certaiiienient d'etre prises en consideration par la critique mo- derne, memo la plus dilTicile et la plus in- credule. CHINE MODERNE. 279 « Dans la haute antiquite, Pdo-i (au- « trement dit Foil -hi) gouvernait le « nionde {thien-hid) : ayaiit leve les o yeux en haiit, il vit des figures dans o le ciel; les ayant ensuite baisses, il vit « des modeles a imiter sur la terre; il « contempla les formes variees des oi- « seaux et des quadrupedes , ainsi que « les proprietes diverses de la terre. Des « corps a proximite de lui et qu'il pou- « vait saisir, comme des objets eloigiies « qu'il pouvait determiner, il traca les « huit Koud ou Symboles, dans le des- « sein de penetrer la vertu de I'lntelli- Kgence divine [comme la nature de « rimmobile et du mobile, de ce qui « cede et de ce qui resiste, Commen- « taire (*) ] , et dans celui de classer « par especes les proprietes distinctes « de tous les etres [comme les figures « des lacs, des montagnes, du vent, du >» tonnerre, Commentaire] (**). » On lit encore dans le meme livre (f* 21) que, « dans la haute antiquite, « on se servait de cordelettes nouees « pour I'administration des affaires. « Pendant les generations suivantes , « le saint homme {Fofi-hi) les remplaca « par I'ecriture (***). » On lit aussi , dans le Supplement au Sst-hi (de I'historien Sse-ma-thsidn) que, «selon I'histoire primitive des trois « empereurs (5d/i-/ioa«g'), letres-illustre « Foii-hi inventa I'ecriture pour rem- « placer les cordelettes nouees, dans « I'administration du gouvernement. » Le Thoting-kien {****) dit aussi « que « la vertu du tres-illustre (Foti-hi) unis- « sait le haut et le has. Le ciel y corres- « pondit en faisant apparaltre a sesyeux n les caracteres ou les formes exterieu- « res (iv^n) des oiseaux et des quadru- « pedes-, la terre y correspondit en lui « montrant les figures du Lou-choic, « sur le tableau sorti des eaux [Hdthoit). (*) Le Commentaire est celui de Tthou- lii, iiititi'le Pen-i, « sens primitif et fouda- menlal. » (**) Hl-thseil {liUi-tchoudn , second Com- mentaire), folio 20 recto; edition kien-pen, ou revue, de 1782. On place le regne dei^0H-/»' environ 3,369 ans avant notre ere. (*•*) Voy. aussi le Y-K'tng ta-tlislouan-Itoei- hiai, K. III.P 20. (****) Tsh'n-pien, ou Premier livre. « C'est par suite de cela que Foiirhi, en « levant les yeiix en haut, vit des images « dans le ciel, et qu'en les baissant il « vit des modeles a imiter sur la terre. « Il apercut ce qui constitudit la nature « et les rapports exteriem'S de tous les « etres, et il commenca a tracer les huit « Koud. II inventa I'ccrilure pour reni- « placer les cordelettes nouees , dans « I'administration du gouvernement. « — La formation de cette ecriture a « lieu d'apres sixregles, qui consistent : « 1° A figurerla forme (sidng- king); « 2° A detourner les premiers carac- « teres formes de leur signification pro- n pre, pour les employer au figure {kici- « tsiei); « 3" A indiquer les objets {tchi-sse)\ « 4° A combiner ensemble plusieurs « idees (hoei-i) ; « 5° A tourner les caracteres dans « un sens oppose (tchoudn-fchou) ; « 6» A reunir la forme au son {kidi- « ching). « Foii-hi fit en sorte que, dans I'Em- « pire, la raison et la justice fussent en « harmonie avec les caracteres primitifs « et les caracteres derives, et que les ca- « racteres primitifs ainsi que les carac- « teres derives fussent en harmonie « avec les six principes de leur forma- « tion (*)..» (*) Le Commentaire intitule Chi-i, « sens expiique , » ajoule : « Par choii (vulgo I'tvre) , on eutend les ca- racteres traces au piiiceatt (ou par tout au- tre moyen). « La premiere classe se nomme figurant la Jorme; les caracteres yi", yoilel, « soleil et lune, )' appartiennent a cette classe; c'est en figurant la forme ou le corps du sole'il et de la lune qu'on les a representcs (en ecriture ancienne, kou-wen). « La secoude classe se nomme a sens corn- binds (il y a interversion dansl'ordre) ; les caracteres woii , sin, « guerrier, sincerite, >• appartiennent i cette classe; les elements tciti « empeclier, » et kd « lance, » equiva- lant a defendre avec une lance, constituent le caractere won, « guerrier ; » les elements jin, yen , « homme, parole, » constituent le caractere ««, « parole d'homme, » equiva- lant a sincerite, fidelite. « La troisieme classe se nomme a sens in- verse; les caracteres kttao el lab, « examen, vieux, » appartiennent a cette classe. On a elabli ainsi une classe de ces caracteres 380 L'UNrVERS. Ijo-pi, dans le livre intitule Lou- ssi (*), attribue aussi I'origine de I'ecri- ture. a Fouhl. U ajoule que , pour per- petuer le souvenir des circotistances qui concoururent a cette invention, i'inven- teur nomma cette ecriture EcrUure du dragon, parce que ce fut sur le dos d'un dragon-cheval, sorti du fleuve, qu'il vit les premiers lineaments des carac- t^res. On donna aussi lesurnom de dra- gon a tous les fonctionnaire& publics qui se servirent les premiers des carac- teres inventes. D'autres ecrivains chinois, tels que J'auteur du ff^diki, attribuent I'inven- tion de I'ecriture a Thsdng-IM, ministre de la droite de Hodng-ti{'2G98 aus avant J. C). II proceda a cette importante inven- tion sur un ordre expres de I'empereur, en suivant la m^me marche que nous avons vu suivie plus baut par Foic-hi. Cette derniere opinion est celle qui fut <« qui changent de sens par la direction op- •< posee a droite ou a gauche que Ton fait « prendre a une partie des traits qui les cons- « (ituent. « La quatrieme classe se nomme Indiquant - la position des ohjets : tchoit-sse; les ca- » racleres chang et liiii , « haut et has , » ap- « partiennenta cette classe; un homme place « au-dessus de la ligne horizontale i, est " chang, « en haut, eleve, superieur; » un « homme place aii-dessous de la ligne hori- «• zontale i, est hid, ■< en has, inferieur; » « chacune de ces positions est iudiquee par «• une disposition propre du caractere : c'est « pourquoi on nomme ces caracteres iWi- « catifs. « La cinquieme classe se nomme a sens - empruHte, ou melaphorique; les caracteres " lytg^ tclidng, <■ ordre, age,.. apparliennent « a cette classe; c'est un meme caractere em- • ploye dans deux sens differents. « La sixieme classe est celle des caracteres « qui unissent la figure an son, pour ne for- •< mer qu'w/i sent caractere, comme kidng, - ltd, noms de deux fleuves; le signe (iguralif " ehoiu, .. eau, » constitue \t\xv figure, kidng « el /lo en constituant le son. .. {Tseu-liid-tien, K. I, Pi verso.) On peut consulter, pour tous les carac- teres cliinois que nous ne reproduisons pas ici, noire ouvrage cite precedemmcnt.el iu- tilulu Stiitco-.S:r>TPTi*CA , passim. (,') iMt-ste, Histoire des Itineraires, par adoptee aussi par le celebre prince pbi- losophe llodi-ndn-tseu , qui vivait dans le second siecle avant notre ere (189) , et par TchoA-hi., dans son Commentaire sur le Liv7'e de I'oheissajice filiate {*). Ces deux opinions, loin de se contre- dire, conlirment le meme fait, a savoir : I'invention de I'ecriture et des carac- teres chinois par Fou-hi et Thsdng-hie, trois mille ans avant notre ere ; le pre- mier, entracantles premiers lineaments de cette ecrfture ; et le second , en don- nant plus de developpement a I'inven- tion rudimentaire de Fou-hl. On doit blen penser que cette inven- tion continua de se developper et de se perfectionner avec la civilisation chi- noise. L'empereur Ydo (2357 avant J. C.) commenca, dit-on, a tracer 'les caracteres irni'tes de la tortue {KoHei- choli), c'est-a-dire, dont il apercut la forme sur la tortue intelligente o'u di- vine, comme s'expriment les ecrivains cbinois (**). Sous lereune de la dynastie C^ Hido-hing. (**) Les historiens chinois rapportent a la cinquieme annee dii regne de Ydo (2,353 ans avant notre ere) un fait qui pourrait faire naltre de curieuses conjectures sur rorigine de I'ecriture chinoise. Ce fait est I'arrivee a la cour de Ydo « d'un barhare du midi , de « la faniille ou race nommee Yoiie- tclidng, « apporlant eu present une grande tortue. » (Voy. le Kdng-mou, Isien-pitn.) On lit dans Y Histoire des clioses exlraordinaires {Cliod-i- ki, citee dans le Li-tdi-ki-ssd , Kiouan I , f* 3 I'erso , et dans le Supplement a I'Encyclope- die de Illd-toiian-lin , intitule .9oM-we/i-///e/i- tltoiing-klido), « que, du temps de Ydo, Yoiie- « tclidng viut lui offrir une tortue divine agee « de mille ans , et de plus de Irois pieds de « dimension en longueur et en largeur ; ayaut « sur son dos des caracteres en ecriture kkd~ « teou {a formes de tetards), qui compreuaient « riiistoire du monde, depuis son origine « jusqu'alors. Ydo ordonna de Irauscrire ce « texte etrauger, qu'il appela Kouei-lie, ou « Annates de la Tortue. » II serait sans doute temeraire de preteudre que I'ecriture apportee en Chine, 2,353 ans avant noire ere, par un etranger (j) du midi (de la Chine), etait I'ecrilure hierogljpldque des l^Igyptiens, et que I'histoire que cette ecriture rcufermait etait I'un des livres A' Her- mes ; niais cependant si Ton reflechil que, selon les traditions historiques sacrees et pro- fanes, il n'y avail guere alors que deux na- CHINE MODERNE. 281 des Hid (de 2206 a 1766 avant J. C), on niit en usage les caracteres des ins- tions qui eussent deja I'usage de I'ecriture, les igypt'tens et les Phetiiciens , il ne sera pas invraisemblable de supposer que I'elran- ger arrive a la cour de Ydo etait Egyptien ou Pheniclen, et que I'ecriture en question etait une ecriture egyptienne ou pheiiicieitne, laquelle aurait donne naissance a I'ecriture chinoise, c< Phcenices primi , famse si crcditur, ausi « Mansuram ludibus voceni signare figiirisn (a dit Locaih). Cetle communication du peuple ou de la na- tion de Yo'tie-tchdng avec la cour de Chine, 2,353 ans avant uoti'e ere , ne fut pas la seule. On en trouve une autre mentionnee 1,242 ans plus tard, la 6" annee de Tcliing- wdiig, ou 1,110 ans avant notre ere. (Voy. Li-tdi-ki-sse , K. VI, f" lo verso , et noire Description de la Chine, t. I, p. 87.) Le lexte historique chinois s'exprime ainsi : « Des '< personnes de YoUe-ic/tdng I'inrent a la « cour. » Les redacteurs du Li-tdi-ki-sse ajoutcnt : « Yotje-tchang-cui : « Des person- « nes de Yotie-lchdng ; c'est un royaume de €< la mer mcridionale (ou royaume maritime II du midi), dont trois interpretes de premier <' ranj; vinrent offrir des faisans blancs. i< Tclieoti-koung (oncle et premier ministre X du roi regnant) leur fit present de chars qui ■< moulraient le sud (c'est-a-dire, munis d'une « boussole), pour les diriger dans leur retour. '< L'aunee suivante, ils arriverent chez eux. » Celte nouvelle mention du pays de Yoiie- tclidng, quoique laissaut encore beaucoup de vague sur sa position geographique, est ce- peudant precieuse , en ce qu'elle fait connai- Ire que c'etait pour la Chine un pays meri- dional transoceanien , dans lequel devaient se Irouver naturellement des faisans blancs. Or, on sait que ces faisans sont communs sur les cotes de la Cafrerie , en Afrique. Le pays en question etait doncsitueen Afrique. Mainte- nant , que Ton rapproche toutes ces donnees de ce que nous savons de la civilisation afri- caiue aux epoques mentionnecs , surtout a la derniere (1,110 av. J. C), ou les vaisseaux de Tyr et de Sidon allaient chercher I'or d'Ophir (quelques annees plus tard) pour ba- tir le temple de Salomon, on trouvera moius lemeraire la supposition que des ligypliens, ou des Pheniciens surlout , ont pu se rendre en Chine dans les temps recules, et y porter les elements de quelques arts necessaires , comme I'ecriture primitive. Nous savons bien que les ecrivains chinois des ages posterieurs ont place le royamne de Yoiie-iclidng au sud de Kiao-tchi , ou de la criptions gravees sur les cloches, les vases et les trepieds (*), dont quelques- uns, seion les antiquaires chinois, sont parvenus jusqu'a nos jours. Ces cloches, ces vases , ces trepieds de la premiere des vingt-deux dynasties qui ont deja regne en Chine, ont ete soigneusemeht recueiliis dans les temps modernes (du moins ce qui a pu echapper au ravage des siecles et des revolutions). On en a publie la figure , avec les inscriptions qui y etaient tracees. Nous en ferons usage dans cet Essai. Les fondateurs de la dynastie des TcMou^ fV&n-xodng et ff^oic-wdng (1134 avant J. C), commencerent a tracer, le premier, les caracteres Nido , ou imitant les traces des oiseaux ; le se- cond, les caracteres YH, ou imitant les bonds des poissons; et sous Tching- wang , la sixieme annee de son regne (1110 avant J. C.) , Pdo-cAt determina les regies des six sortes de formation des caracteres, et on les enseigna aux enfants du royaume (**). On lit , dans le Livre des Rites des TcMou (***), que « Tun des Magistrals « de la terre , surnomme PAo-chi, fit « des remontrances au roi sur ses de- ft fauts , et instruisit les enfants du « royaume dans les principes de la « droitevoie ou de la saineraiso7i{tdo), Cochinchine, el que les missionnaires etau- tres sinologues europeens ont cru que c'etait le An-nam ou Tounquin actuel ; mais ce n'est qti'uue conjecture , laquelle , etant supposee vraie, n'iufirme en rien la notre, aitendu que la civilisation du Tounquin , a I'epoque en question , n'etait pas assez avancee pour porter en Chine une Histoiredr nonde, ecrile en caracteres dechiffrables. C'fct un fuit d'ail- leurs bien connu , que les Tounquinois ont emprunle aux Chinois leur sysleme d'ccri- ture, qu'ils ont modifie a leur maniere; et cela, depuis I'ere chretienne, epoque avant laquelle il n'y avail chez eux aiicuiie forme de civilisation. Et c'est cependant a ce peuple que certains ecrivains, denues de toute espcce de science critique, veulent attribuer I'inven- tion de I'ecriture et de I'hisloire, plus de 2,000 ans avant notre ere! (*) Tseu-liid-tim , liv. I, f° 7. (**) Ibid. , verso. (***) Selon le Tsou-choil-ki-nidn, le Tcheou- 11 fut compose la 6* annee de Tchlng-wdng, i,iu() avant notre ere. 383 L'UNIVERS. • c'«it-j-dire (selon le TcMou-n que je fitraduis) qu'il leur enseigna les cinq • arts suivaiiU: . , , i.* . 1" Les cinq rites ou regies de poli- « tesse et de bienseance ; . 2' Les six espices de imsique: . 3« Les cinq manidres de lancer les fleches; , , , « A° r.es cinq mameres de dompter « et de diriger les checaux ; • 6° Les six sortes deformation des « caracteres. » L'empereur Chi-hodng-ti , de la dy- nastic de Thsin (221 ans avant J. C), Tincendiaire des livres, ordonna a son minislre Li-ss^ de tracer la forme d'e- criture noniuiee Td-tchouan ou grand tchoudn , et do diniinuer les traits de i'ancienneecritureliguralive(/i:o«V-w^/i), pour en former Teeriture dite Siao- tchouan,oa petit tchoudn {*). La premiere ecriture inventee par le ministre Li-ss& avait une symetrie pu- rement factice, et qui la fit bientot re- jeter; elle ne fut plus employee que pour les cachets et les sceaux (**). On lit , dans la preface du Choue- w€n par Iliitchin, que Khoung-tseu, en transcrivant les six Ki7ig ; Tsd- khieou-tning , en commentant le TcMn- thsi^ouy se servirent I'un et Tautre du style Koii-w6n ou ancien (***). Mais , apres que I'empire cliinois eut ete divise en sept l^t'its, les caracteres de I'ecri- ture subirent diff«k-entes alterations dans leurs formes. Ce fut , a la mfime ^poque de la dy- (•) Tseu-hio-tien , livre I , fo 8 rec(o. Celle m^me ^criltire Td-tcltouan, iiivenlee par Li-sie , et que quelques ecrivains noin- ineiit aussi Chdng-fdng-td-tchohan , differe beaucoiip de I'espcce d'ecriluie du ni«^me nom employee sous les Tchiou, 820 ans avant notre cre. Ccllc de Li-ssi est tout arlificielle et de fantaisic , taudis que celle des dynasties j ant^rienres differe peu du Koii-w^n, ou de I'ecriture ancienne Agurative. t (**) On peut voir des exemples de ces deux Ventures , ou piutot de ces deux formes d'ccritures , dans rEucyclopedic in- titulee San tlisdi thou-hoel, t. XXXIII , liv. II, f" 20; dans le monument dc K«, jHiblie par Hager, Paris, i8oa, in-f", et dam la gramniaire chinoisc de M. Remusat, p. 5. (•*•) Tteu'luo-tiin, K. I, f° 8 veno. nastie des Thsin (*) , que , trouvant les caracteres en ecriture Td- tchoudn (grand tchoudn) et Siab-tchoudn (pe- tit tchoudn) difficiles a tracer dans I'usage liabituel de la vie , on employa I'ecriture nommee LI ou des Bureaux, Cette ecriture, formee de traits pesam- ment dessines, mais d'un usage assea facile, fit abandonner pour toujours les anciens caracteres Kou-w6n. Cepondant ces alterations simulta- n^es ou successives permettaient tou- jours, pour la plupart du temps , de re- connaitre I'ancien caractere; et dies n'etaient le plus souvent que des alte- rations calligraphiques, a I'exception toutefois de recriture nommee thsab, qui fut inventee sous les Han poste- rieurs ou orientaux, pendant le regne de Ilido-tchdng-ti (de 7G a 88 de notre ere). Cette derniere ecriture est une sorte de tachygraphie extrSmement cur- sive et fort difficile a lire, h cause d'une multitude d'abreviations, de licences et de ligatures qui alterent la forme des caracteres (**). L'introduction de cette ecriture cur- sive ayant apporte une grande pertur- bation dans Teducation nationale, et parmi toiite la classe nombreuse des lettres, l'empereur Ilido-hd-ti (89 de J. C.) ordonna de retourner a la culture et a r^tude exclusive des anciens ca- racteres. Ce fut alors que Jliu-chin composa son Choite'-iv^n, ou Expli- cation des caracteres anciens en qua- torz-e livres. Si I'usage des caracteres thsdo ou cursifs avait continue, il se serait na- turellement opere en Chine une de ces revolutions intellectuelies auxquelles les nations sont quelquefois soumises a leur insu, et dont I'histoire ne fait pas toujours mention. Apres I'adoption de I'ecriture cursive et I'abandon de I'ancienne ecriture, qui conservait en- core des empreintes nombreuses de son origine figurative, il n'y avait plus qu'un pas a faire pour arriver a I'ecri- lure purement alphabetique. C'est ce pas decisif qui ne fut point franchi par les Chinois dans le premier siecle de (**) Voyez les Elements de la grammaire cliinoise, parM. Ab. Keniusat, p. 5. CHINE MODERNE. 283 notre ere, et qui ne le sera probable- ment jamais. On lit dans la Continuation de VEn- cijclopedie litteraire de Md-toiian-lin : « Lt-ss6 ayant fait des additions et des « retranchements aux caracteres de « Tcheou, qui avaient des ressemblances " et des differences avec I'ecriture Td- « tchoudn, on nomma cette ecriture « Siao-tchoudn (petit tchoudn). On la « noinma aussi Thsln-tchoudn , ecri- « ture Tchoudn des ancieiis Thsin (*). « Les ecrivains contemporains I'appe- « lerent Yu-tchou-tchoudn , « ecriture « defragments de pierres precieuses ou « de jade. » lis la designerent encore « par la denomination de Pd-f6n Siab- t(> verso. ("•) Tseu-hio-tiin, K. II, f 17 redo. (••*•) Ibid. nent la fujure ou la forme ct le son {hing-ching), et dc ceux qui presentent un sens combine {hnei-i), on les ap- pelle tseu ou produits par derivation. Les caracteres tseu , ou produits gra- duellement par derivation, sont tres- nombreux (*). « Ce que Ton trace sur le bambou ou sur la sole s'appelle cAoA, ecriture. — L'ecriture est destinee ou a donner la ressemblance (des objets), ou a ex- primer une pensee, ou a manifester un sentiment , ou a rappeler des souvenirs ou des faits (**). « En representant ce qui se passe a I'interieur des etres vivants, on fait connaitre clairement toutes les actions; en rappelant des souvenirs et des faits passes, on fait connaitre I'avenir. Si les noms des objets et des choses , si les mots qui designent les actions n'avaient pu etre formes , dans quel isolement et quel desordre la foule des honimes n'aurait-elle pas ete plongee (***) ? » Le Y-king dit : « Dans la haute an- « tiquite, on se servait de cordelettes « nouees pour gouverner. Dans les sie- « cles suivants , les saints hommes « cbangerent ce moyen imparfait de « communication pour employer Vecri- « ture. Tous les fonctionnaires publics « s'en servirent pour gouverner les dix « milie peuples, pour les eclairer et « leur enseigner leurs devoirs (****). » Cette premiere ecriture cessa d'etre cultivee sous les 7Vis/tt,lorsque leSido- (*) On lit dans la Preface du Clioiie-wen : " La classe des caracteres qui ont quelque « similitude avec les objets est celle de ceux u (\iii _fi^iirent la forme {sidng-hing) ; c'est « pourquoi on les nomme wen ou peinture « des objets. Ceux qui viennent ensuite , el " qui representent la forme et le son (ln'iig- " clit'ng), se sont produits mutuellement en " s'ajoutant ou en s'associant les uns aux au- •< tres; c'est de la qu'on les nomme tseu ou « produits par derivation. Thsdng-lue , lors- « qu'il inventa I'ecrilure, nomma la forme « des objets wen, peinture, et tous les sons, «< il les nomma tseu, produits par derifO' « lion. » (**) Tseu-hio-tiin, K. II, f* 17 recto. (*") Ibid. {*<"') Y-king-hi-thscu, K. Ill, f- 21 verso. (]^ition Kicn-pen) ; et Tseu-hio-tien , I. II , f- i8. CHINE MODERNE. 289 tchouan fut mis en usage , et que Ton eut detruit par le feu les anciens livres Merits en Kou-w^n (*). Du temps de JVen-tl des Han (179 avant notre ere), un savant lettre qui avail vecu sous les Thsin, nonime Fou- seng (**) , vint offrir a I'empereur un exemplaire du Cho-H-Mng ou Chang- choti, ecrit en Kouwin. Un autre of- frit un livre du Yd-choii ou Yd-kl?ig, livre sacre sur la musique, ecrit aussi en Koii-wifi. Du temps de fFoti-ti (140 ans avant J. C. ), on decouvrit dans I'interieur d'une muraille de la demeure de Khoung-tseu, tombee en ruine sous le regne de KoHng-wang , roi de I'Etat de Lou (376 avant J. C.)i et enfermes dans un coffre de- pierre , le Hido-king ou Livre sur lapieteji- liale , le Choiifclng , et d'autres livres de la m^meespece. Du temps de5io?io?t- ti ( 73 ans avant notre ere ), une jeune fille s'etant trouvee emprisonnee par le fleuve Hodng-ho (deborde), decouvrit, dans I'ancienne demeure en ruine de Lao-tseii, deux livres ecrits en Kou- w^n (***). Outre ces anciens documents ecrits en caract^i^es antiques, on a decouvert aussi des inscriptions sur des vases et des trepieds, sur des tables de marbre, en ecriture Koii-win, dont un certain nombre a ete conserve en Chine jusqu'a nos jours, et que les antiquaires de ce pays ont publiees dans des livres de pa- ieographie. Ce sent ces ancieii« carac- teres , reproduits dans differents ou- vrages chinois, principalement dans une edition tres-rare du Y-king (ou Livre sacre des tra7isformatio7is) en carac- teres Koitrwin, ainsi que dans les dic- tionuaires chinois intitules Chou€-v^n ; Loii-cho'd-koU ; Loii-choiJi-thsing-w^n ; Jwin-pi-lan, tons en notre possession, qui nous serviront dans la suite de cet Essai, pour etablir leur similitude d'o- rigine et de formation avec les hierogly- (•) Tseu-hio-tien, liv. II, f" i8. (**) On peut voir son portrait dans le I®"" volume de notre Description de la Chine, pi. 45, n° 4. (*•*) Tseu-h'o-tien,\\\. II, f" i8 recto. Les deux livres en Koii-weti , trouves dans la de- meure de Lao-tsed, elaient sans doule les deux livres du Tab-te-king. 9* Livraison. (Chine modkrne.) fihes egyptiens, qui datent a peu pres de a meme epoque. Cette ecriture Koii-w^n est identifiee par quelques ecrivains chinois avec I'e- criture Khd-teoii, qui est une denomi- nation differente de I'ecriture de la haute antiquite. 2. Ages de I'ecriture (*). Les differentes ecritures qui ont ete ou qui sont encore en usage chez les differents peuples de la terre peuvent ^tre divisees en trois Sges, selon qu'elles sont : 1° La representation figuree des ob- jets et des idees ; 2° La representation alteree et con- ventionnelle des objets ; 3° L'expression phonetique pure des articulations de la voix humaine. Le premier de ces Sges peut s'appeler dge fignratif ou hieroglyphique ; le se- cond, age transitoire ; et le iroisieme, dge alphabetique pur. Quoique Ton n'ait que des donnees tres-vagues a cet egard, il est fort presumable que toutes les ecritures ont commence par etre figuratives et syllabiques avant de de- venir purement alphabetiques. Plu- sieurs alphabets, tels que I'alphabet Sanskrit, I'alphabet ethiopien, I'alpha- bet persepolitain (sans parler des al- phabets japonais et coreen), sont en- core presque completementsy/toftiowes, et portent des traces evidentes aune origine figurative. Les alphabets mo- dernes, reduits a un petit nombre d'e- lements vocaux par I'esprit d'aualyse et d'abstraction, qui est le propre des so- ci^tes avancees, ne peuvent pas plus ap- partenir a Vdge primitif que le calcul infinitesimal. A Ydge figuratif appartiennent les premiers caracteres de I'ecriture chi- noise, les premiers hieroglyphes egyp- tiens etles peintures mexicaines; a Vdge transitoire appartiennent les formes se- coudaires de I'ecriture chinoise , I'ecri- ture egyptienne appelee hieratique, et, (*) Tout ce qui suit, jusqu'a la page 3oo, a deja ete imprime, a peu de chose pres, en i838, dans I'article Ecriture Ae VEncyclopedie noiivelle, et dans la raeme Dissertation intitu- lee De I'origine et de la formation des dif- ferents systemes d' ecritures orientales et occi- dentales. Aoilt i833, in-4''. 19 MO L'UWIVERS. sous quelques rapports, les ^oritures jq- ponaisc et cor^enne; a Vdge alphabetic que pur appartiennent toutes les ecri- tures qui ne represeiitent plus que les citiuient* vocaux des arliculatious hu- maines, reduits a leur plus simple ex- pression. L'dge aumiel une ecriture appartient peut servir h determiner son aiiciennete relative ; car celle qui appartiendra au premier de ces dges sera necessairemeut plus ancienne, dans I'ordre de deriva- tion, que celle qui appartiendra au se- cond; et celle qui appartiendra au second, que celle qui appartiendra au troisieme. C'est une loi qui , nous le croyons, ne peut souffrir ^lucune exception. Pour ne citer ici que quelques exem- ples incontestal)les , I'histoire de Tecri- ture efivpiienne et de i'ecriture chinoise confirnie cette loi. Chez les fegyptiens et chez les Chinois, les plus anciennes nations connues de I'antiquit^, Tecri- ture a 6te d'abord purement hierogly- phique on figurative ; ensuite elle est pass^e a I'lSiat transitoire, ou les flgu- res primitives ont beauconp perdu de leur exactitude etde leur ressemblance, et s'assorient de plus en plus des ele- ments phonetiques, pris dans les signes figuratlfs purs ou alteres, pour faire correspondre autant que possible la langue figurative a la langue parlee ; enfin Tecriture egyptienne arrive a I'e- tat presque purement alphabetique , dans I'ecriture demotique ou encho' riale; et, apres I'introduction du chris- tianisme en figypte, elle passe tout en- tiere dans Valphabet copte^ forme en grande partie de I'alphabet grec. L'^cri- ture chinoise n'est pas encore pass^e a ce troisieme etat, et on peut supposer qu'il s'ecoulera encore bien des siecles avant que la nation chinoise adopte I'e- criture purement alphabitique. II fau- drait, pour que cet evenement arrival, quune grande revolution s'oper^t , comme en Egypte, au sein de la na- tion; que tous les monuments de sa litteraiure et de sa civilisation eussent disparu de son sol, et qu'une nouvelle langue, avec de nouvelles institutions, fusseut imposees a &q& habitants (*). , (*) Le f»meux empereiir TItsing-clu-Uodng- U Mul aurail pu peut^re operer celte rivo- 8. Synthase de I'ecriture chinoise. L' ecriture chinoise a procede d'abord a la notation des idees, non par un signe arbilraire representaiit un son determine de la langue, mais par la Ogure plus ou nioins ildele des objets. On I'a done nonimee avec raison Ecri- ture ideographique. II est arrive en- suite que I'impossibilitedeyjgfMrertouB les objets de la nature, surtout les noms propres, de nieme que toutes les idees, toutes les affections de lame humaine, et la necessity de representer d'une fa- ^on quelconque les sons de la langue parlee qui n'avaient pu etre figures, in- troduisirent dans 1 ecriture ideogra- phique un nouvel element, reieuieut phonetique , qui dut cepeudant conser- ver les entraves naturelles de I'ecriture figurative. Pour nous faire mieux comprendre, nous allons exposer avec quelques de- tails lasynthese de VtctxHxre, figurative ou ideographique des Chinois, dent on a generalement une bien imparfaite idee. On a vu precedemment quelle avail ete I'origine de I'ecrilure chinoise. Le premier element de cette ecriture fut un simple trait — , celui de I'unite, qui est I'element unique des trigranimes de Foii-hi. Get element, avec ses differentes liition sociale. II I'avait commencec par la destruction ordonnee de tous les livres qui existaieut de son temps, a I'exception de queiques-uns, et par les mcsiires qu'il prit pour faire iiiveuter et adopter une ecriture plus expeditive destince a remplacer I'an- cienne, ou plutotles nombreiises especes d'e- criture en usage dans les nombreux ^tats qui divisaient la Chine avant lui. Celte nouvelle ecriture ne differait , il est vrai , pas plus de Tancienne ecriture que I'ecriture hieratique ne difCere des hieroglyphes; mais nul doute que si rhorame extraordinaire qui fit cons- truire au nord de 5on empire ua rempart de cinq cents lieues de .longueur, qui reiinit toute la Chine sous sa domination , depuis le Tonquin jusqu'aux deserts de la Tartaric * ; nul doute, dis-j«, que s'il avait eonnii une ecriture purement alphabetiqiie, il ne Petit fait adopter par la nation chinoise. On ue peut supposer quelles auraieut ete pour la Chine les consequences de cette mesure. ♦ Voy. 1. 1 . p. 107 at »wr. CHINE MODERNE. 291 combinaisons, n'ayant pas suffi pour ex- primer symboliquement tons les objets de la pensee, et surtout les objets phy- siques, on inventa Vecriture figura- tice C'). Cette ^criture du premier 5ge, qui dut representer les objets aussi exac- temeiit que possible, etait deja alteree a i'epoque ou i'lnscription de Yu (que Ton possede encore) fut gravee, c'est-a- dire, 227S ans avant notre ere, puisque cette Inscription n'offre deja plus qu'un petit nombre d'imnges ou de figures primitives reelles (**). Les inscriptions chinoises qui existent sur les anciens vases conserves au mnsee imperial de Pe-king (***) , dont I'antiquit^ ne re- monte que de miiie a dix-huit cents ans avant notre ere, n'offrent egalement que peu de figures primitives reelles, telles que W , pour signifier enfant., et un petit-fils ou descendant , lorsque la flgure est renversee la tSte eu bas ; <§>, . pour signifier un ml; ^ ^ pour signi- fier un a?'c (****}. L'epoque la plus an- cienne de I'ecriturechinoise connue n'est done deja plus purement figurative. On coniprend facilement que cet etat pri- mitif ne pouvait etre de longue duree, parce que I'usage jounialier de cette ecri- ture, et les besoins toujours croissants de former de nouveaux caracteres ou de nouvelles figures pour representer de (*) Voyez ci-devant, page 278. (**) Cette Inscription a ete publiee par Hager, sur un caique envoye par les mission- naires francais en Chine, Paris, 1802. Elle avail ete gravee sur un rorher, en caracteres de I'espece nommee hkd-tebu-tcliouan (voy. ci-devani , p. 283), a peine reconnaissables. L'absence cl'edifices en pierre et d'une cons- truction monumentale , comme en Egypte , pent-elre aussi le manque de goul des Clii- nois pour orner ieurs edifices selon les prin- cipes dii grand et du beau, entendu a la inauiere des Egyptiens, ont ete cause que I'ancienne ecriture figurative des Chinois n"a pas rte porteeau point de beaute et de per- fection auquel I'ecriture bieroglyphique est arrivee en :^vpte, des une haute auliquite. (***) "Voy. les figures de plusieuj's de ces vases, que nous avons fait graver dans le premier volume. ('***) Comparez les hleroglyphes signifiant les m^mes objets, et absolument semblables. nouvelles idees, devaient necessaire- nient y introduire de nombretises alt<^- rations. Mais cependant, quoique alte- ree, ou, si Ton veut, perfectionnee ainsi , et quoique , comme les hierogly- phes egyptiens , elle renferrae deja un grand nombre d'el^ments phonetiques empruntes aux figures elles-memes, de- tournees de leiir signification habituelle, I'ecriture chinoise de cette epoqiie peut encore ^tre appelee figurative ou tdio- graphique. II serait difficile, pour ne pas dire impossible, de tracer une ligne de demarcation tranchee entre I'ecriture purement figurative et I'ecriture figura- tive alteree. C'est pourquoi, bien que I'on puisse former deux divisions de ces deux ^critures, nous n'avons trouve aucun inconvenient a reunir ces deux etats de Tecriture chinoise et de I'ecri- ture egyptienne, sous le nom A'dgefigu- ratif ou hieroglyphique. Les premiers essais qui furent faits a I'origine pour communiquer la pensee de rhomme a Thomme, pour peindre la parole et I'exprimer aux yeux , ne le furent necessairement pas au moyen de signes conventiomiels et abstraits, comme les lettres alphabetiques , mais bien au moyen de signes concrets, c'est-a-dire, de la peinture plus ou moins grossiere, plus ou moins figur^e des ob- jets. C'est ainsi que furent crees les ca- racteres figurnti/s. Les objets ainsi figures avaient des rapports entre eux; il y avait unite ou pluralite, difference de position, etc.: ces rapports, cette unite et cette plura- lite, cette difference de positioii, furent indlques dans I'ecriture ; de la naqui- rent les caracteres indicatifs. L'impossibilite de representer des idees ou des phenomenes qui n'avaient aucune forme materielle et palpable, fit recourir a la combinaison de deux ou trois signes deja connus et adopt6s , pour exprimer une idee ou un fait qui devait ressortir naturellement de cette combinaison ; de la naguirent les carac- teres d'idees combinees. Des I'instant que I'esprit de I'homme se met a reflechir, il ne tarde pas a s'apercevoir que la plupart des idees et des faits ont leur contraire dans la na- ture : le bien suppose I'existence du mal, la vertu celle du vice ; le haut im- 19. 21*2 L'UNIVERS. nlique n^cessairement le has; le cot6 droit, le o6t6 gauche. De la sont nes les caract^res inverses. Les objets d representer aux yeux par IVcriture^taient illimites, mais la • faculte de les figurer ne I'etait pas. nomment en effet operer la delineation distincte de tous les objets de la nature, de tous les desirs, de toutes les pensees et de toutes les actions de riiomme? C'est ici que le systerae d'ecriture figu- rative que nous decrivons va subir une profonde modification. Les inventeurs de ce systeme n'avaient encore fait que representer, plus ou moins grossiere- ment, les objets visibles les plus appa- rents, les rapports les plus sensibles qu'ils avaient entre eux , etc. lis sen- tireiit bientot I'impossibilite de conti- nuer le ni^nie procede, et la necessity de recourir a un nouveau mode de no- tation des idees, qui s'alliat cependant avec le premier. Deja un assez grand nombre d'objets auxquels repondait un parell nombre de mots de la langue Farlee, se trouvaient representes par ^criture figurative. On imagina de prendre quelques-unes des figures deja admises dans cette ecriture, pour en faire des types geniriques des especes nombreuses qui avaient entre elles de grandes analogies, et on adjoignit a ces figures types un des signes deja en usage, lequel signe perdait, dans cette adjonction , sa signification habituelle, pour ne conserver que sa valeur phone- tique; de sorte que les caracteres de cette nouvelle classe representaient en m^me temps \a figure type du genre et le son de tespece ou le mot correspon- dant de la langue parlee. C'est ainsi que fut creee la classe des caracteres ideo-phonetiques , qui est de beancoup la plus riche et la plus nombreuse de Tecriture cbinoise. Enfin , lorsqu'une langue se forme , les intelligences qui president a sa for- mation , celles qui concourent a son perfectionnement, se plaisent quelque- lois k exprimer des idees , non pas di- rectement, mais indirectement et par detours, par analogic. Voila I'originede la classe des caracteres mefaphoriques. C'est a ces six classes de caracteres que se rapportent tous les caracteres de la langue cbinoise. 2" — 3* — 4- — 5° — 60 _ Voici I'ordre de leur enumeration : i° Caracteres figiiratifs purs {sidng- hlng) • indicatifs {tchi-sse); a sens combines {hoei- 0; inverses ( tchoudn- tchou); ideo-phonetiques (kidi- ching) ; vietaphoriques ( kidl- tsie). La premiire de ces classes est celle des caracteres figtiratifs purs, qui sont destines a representer la forme ou la figure des objets. En voici des exemples : SoUit. Lune. Moiita^ne. Arbrc. Clui-n. Chcvtt/. Formes mo- ;E=i 13 ^ Oj 7k :^ ^ La deuxiime classe comprend les ca- racteres qui indiquent certaine quolite ou propriete d'une chose, ou la chose elle-m^me, comme : Matin, Soir. Haul. Bas. Un, Centre. L'idee de viatin est indiquee dans le premier caractere par I'image du soleil plac^e au-dessus d'une ligne horizon- tale : c'est le moment du jour ou le so- leil apparait au-dessus de I'horizon. On a indiqtie l'idee de soir par des traits vaporeux descendant vers I'horizon, en supprimant I'image du soleil ; l'idee de haul, par un point place au-dessus de la ligne horizontale; l'idee de bas, par un point place au-de.fsous dc la m6me ligne; un, par un trait horizontal ; mi- lieu , par un trait vertical partageant en deux portions egales un cercle ou parailelogrammequi represente labou- che. La troisiivie classe comprend les ca- racteres qui representent par leur pro- pre formation des idees combinees. On composa ces caracteres en reunissant ensemble deux ou trois figures simples, dontlacombinaison pouvait faire naitre dans I'esprit l'idee complexe que Ton ForniM anciennes. Formes mod ernes. CHINE MODERNE. 293 voulait rendre. Ainsi la reunion du so- leil et de la lune signifia lutni^rej la figure d'homme au-dessus de celle de inontagne signifia anachorete, ermite; deux arbres reunis signifierent /or^^; I'image de bouche et celle d'oiseau si- gnifierent chant ^ celle de I'eau et celle d'un oeii signifierent larmes, pletirs, pleurer ; I'image de femme, jointe a celles de main et de balai, signifia femme de menage : Lumiere. Ermite. foret. Chant. Larme. Femme. Formes anclcniies, Formfs modernes. ee ^ n 'I m n \ La quatrieme classe comprend les caracteres qui, par la nianiere dont ils sont traces, acquiereut une significa- tion inverse, antithetique, ou en oppo- sition avec leur signification primitive. Le nombre de ces caracteres est tres- borne. En voici des exemples ( c'est le 2'', le 4" et le 6" qui sont inverses) : Gauche, Droite. Continu. Rompu. Hontme. Cadavre. F. anc. F. — f-* rood. /r. =1 i La cinquieme classe, de beaucoup la plus nombreuse, comprend tous les ca- racteres composes de deux elements , dont Tun represente Vimage generique des objets ou des actions , et i'autre le son de la langue parlee, correspondaht al'objet ou a I'acte special que Ton veut designer. Le second des deux elements qui composent cette classe de carac- teres est toujours emprunte aux autres classes: mais, en se groupantavec une figure ou image generique, il perd pres- que habituellement la signification qu'il avait primitivenient avant cette asso- ciation. iS'ous disons presque habituel- lement, parce que, dans la composition de cette classe de caracteres , on a re- garde comme une perfection de faire concourir au sens special du caractere ainsi compose, non-seulement ['image generique^ et ensuite le son special du groupe phonetique additionnel , mais encore le sens primitif de ce meme groupe additionnel. Cependant ces trois conditions se trouvent assez rarement reunies dans cette classe de caracteres. et il faudrait bien segarder, comme on I'a fait et comme on le fait encore tro|p souvent, de ne voir et de ne chercber dans les deux elements qui les compo- sent que des images representatives , lorsque I'un de ces deux elements, que nous nommons groupe phonetique ad- ditionnel., represente toujours le son ou le mot correspondant de la langue parlee, et que rarement il conserve sa signification originaire. Voila done un element nouveau in- troduit dans la langue primitive figu- ree ; et c'est faute d'avoir bien distingue I'element phonetique et syllabique de I'element j?(7«ra#(/', que Ton a commis tant d'erreurs, et que Ton s'est livre a tant de reveries sur la formation et la composition des caracteres chinois. Le resultat de cette composition de carac- teres moitie ideographiques ou Jigu- ratifs , moitie phonetiques , a ete d'in- troduire aussi, dans la langue chinoise, une grande terminologie linneenne qui sert admirablement pour I'intelligence de cette langue , au premier abord si difficile. Quelques exemples feront mieux sai- sir ces principes, un peu abstraits par eux-memes. Le signe figuratif ^ /^, qui signifie terrain ou Von a etabli sa demeure , espace determine., etc., pris comme signe de son ou groupe phone- tique, et joint a I'image generique de poisson rS , forme le nom de poisson- li, ou nomme li: QeB , c'est- a-dire, carpe ; le signe figuratif yyZ arbre (premiere classe) devient I'image ge- nerique de tous les noms d'arbres, en s'adjoignant un groupe phonetique ou syllabique pour chaque espece d'arbres que Ton n'aurait pas pu figurer : ainsi, avec le signe Q pe., qui signifie par lui-mSme blanc , il forme un compose de la cinquieme classe , qui veut dire arbre-pd , ou arbre prononce pS T'Hi c'est-a-dire , cypres. Le signe qui repre- sente le chien (premiere classe), type generique de tous les animaux qui ont avec lui quelque ressemblance , s'il est associe au signe ® qui se prononce 294 L'UmVERS. mUU>, de oette maniire ^Q. il signi- fiera chien-mido ou chat. II siiffirait d'un seul de ces exemples pour prouver que le groupe phonetique joint au signe figuratif generique ne represerite que le son de la langue par- leo dans la plupart des cas, sans avoir de signiGcation figurative. Ainsi , le groupe prononce;?^, eX qui, seul, si- gnifie blanc , ne conserve certainement pas sa signification de blanc dans son adjonction au signe flguralif generique de I'arbre, puisque le cypres est tout le contraire d'un arbre blanc. Comme toutes les langues a leur ori- gine, la langue chinoise ne se compo- sait d'abord que de la representation des objets les plus communs, et les plus neoessaires a la vie agricole ou pasto- rale des habitants. Mais , a niesure que la civilisation eut agrandi les besoins et les connaissances , les signes figura- tifs et surtout phonetiques durent se multiplier. Mors les deux ou trois cents signes Qguratifs ou ideographiques qui existaient deja , et qui , par la nature des choses, se trouvaient etre les images des principaux objets qui avaient les premiers frappe les regards, devinrent des types ou des idees-meres qui furent places a la t^te de lous les signes figu- ratifs presentant des analogies d'especes avec eux. La nature m^me de I'ecriture figurative, qui se trouva dans I'impossi- billte de representer d'une maniere dis- tinctive tons les objets de la mfime es- p^ce pour lesquels la langue parlee avait deja trouv^ des noms, comme, par exemple, toutes les especes d'arbres, toutes les especes de poissons, fit adop- ter la cinquieme classe de caracteres dont il est question. Ainsi, le signe flguratifqui le premier avait servi pour representer I'arbre en general , i'arbre abstrait, I'arbre qui avait suffi aux pre- miers hommes, devint le type generi- que de tous les arbres, h mesure que les nommes sentirent le besoin de distin- guer tel arbre de tel autre arbre. II ar- rive ensuite que les premiers essais de representation sp^ciale des objets furent abandonnes pour cette cinquieme esp^ce de formation, qui etait un premier pas de fait dans le domaine de la notation Byllabique et alphabetique des articula- tions huraaines. Ainsi , pour n'en citer qu'un exemple, la poule, qui, dans I'e- criture figurative, avait ete ainsi repre- sentee ^ , le fut dans le nouveau systeme par le caractere suivant ^tf que Ton prononce Ai, lequel est com- post du radical ^ ^ tch&ul, type ge- nerique des oiseaux a queue courte , et du groupe phonetique ^, prononce ki, nom de la poule dans la langue pariee; ce qui donne une veritable definition linneenne : oiseau ^ queue courte , nom- miki. A I'epoque oii le celebre lexicographe Hiu-ch(n composa son Dictionnaire des anciens caracteres chinois (89 ans apres notre ere), intitule Choug-win, les trois quarts au moins des caracteres chinois appartenaient deja, d'apres son analyse, a cette derniere classe de for- mation. On se fera une idee plus exacte et plus complete de cette grande classe de caracteres par les exemples suivants, tires de quelques Radicaux ou signes cletenninatifs generiques chinois, aux- quels nous avons joint le nombre des derive* phonetiques qu'ils forment par la simple adjonction d'un autre carac- tere pris phonetiquement, et que nous nommons signe ou groupe phoneti- que (*). (*) Le premier caractere, ou plutot la pre- miere forme de chaque caractere cite, est en hoit-wen oil ecriture antique, et la seconde forme en kiai-choil, ecriture carree d'im- pression uuiversellement en usage. Lecliiffre qui suit la prononciation de chaque caractere est ceiui de I'ordre qii'il occupe dans la lisle des 214 radicaux adoptcs dans le Diction- naire imperial A^^Klidng-hi et dans'la plu- part des autres dictiounaires, leU que le Tcliingtseutlioung , le Tseu-wei, le Jf-weii- pi-ldn , et les principaux dictionnaires chi- nois europeens. Get ordre, qui u'cst fondc que sur le numbre des traits dont est furme chaque caractere considere comme radical, est luin sans doute d'etre exempt de defauts; mais il a I'avantage d'etre adopte par les meilleurs lexicographes modernes de la Chiue, et il n'y a aucun motif raisonuable de le changer, si on a'adopte pas I'ordie tonique. I _ 1^ 1. JIJ. TJf. CHI. [113]. Esprit, I Genie d'en haut. ii2 derives phone- I tiques. Caractere figuratif primitif , destine, selon les lexicographes chinois, a fepre- senter aux hommes les manifestations du ciel par des rayons descendant vers la terra. Ce caractere est devenu le signe ou type generique determinatif des di- verses especes de genies, de tout ce qui est suppose venir d'en haut, et de tout ce qui, sur la terre, est reiatif aux etres surnaturels. II forme ainsi 112 derives ideo-phonefiqttes, par I'adjonction de 112 caracteres differents qui, pris iso- lement, ont une signification propre, mais qui , etant joints a uu caractere generique, deviennent par cela m6me, dans la plupartdes cas, des signes, non d'idees , mais de sons. C'est pourquoi nous Jes avons nommes des groupes phonetiques. I Ainsi , le caractere ci-dessus joint a ^^ tcM {niesure; diviser), pris comme grottpe phon^tique , de cette maniere : ?|^ tcM , signifie bonheur, felicite ve- nue d'en haut. — Joint a '^ yeou {droite) , pris comme groupe phojietigue : jjj^ yeou, il signifie : secours envoye par les es- prits. — Joint a P, sse {soim^me), pris comme groupe plionetique : jjjP, sse, il signifie sacrifice offert aux esprits ou genies. — Joint a J^ chin {heure), pris comme groupe phonetique : ijilfc chin, il signifie : chairs offertes dans les sa- crifices (*). Nota. Dans ces exemples, comme dans tous les autres composes de mdme nature (sauf quelques exceptions), ies (*) Une autre preuve que ce n'est que le son que Ton a voulu representer par le groupe cliin, c'est que ce groupe prend aussi dans le m6me sens le determinatif generique joii, « chair des aiiiinaux,>> pour indiquer Jes chairs offertes dans /« sacrifices. CHINE MODERNE. MS groupes phonitiques ont perdu cOm- pletement leur signification propre idio- graphique , pour ne conserver que leur valeur purement phonetique. On voit, par les exemples precedents, que ce qui autorisa I'emploi des caracteres figuratifs ou ideographiques , comme signes de sons , ce fut la valeur pho- netique qu'ils avaient acquise anterieu- rement comme signes d'idees. Le mot ou V articulation de la langue parlee qu'ils representaient ideographique- ment leur devint inherente; et cette articulation, depouillee de toute signi- fication, les suivit dans tous les com- poses oil ils entrerent comme groupes phonetiques : de sorte qu'ils represen- tent chacun un mot ou une articula- tion de la langue parlee, comme les lettres de nos alphabets representent aussi chacune un son de la langue par- lee. Ils ne different done des elements alphabetiques de nos langues euro- p^ennes que parce qu'ils sont constam- ment adjoints a un element figuratif (exceptedans la representation des noms propre>«). Ce role leur est d'autant plus naturel en chinois, qu'ii y a un tres- grand nombre A' homophones, et que la langue parlee n'est composee que d'en- viron quatre cents expressions mono- syllabiques{*). (*) Il est Ires-probable que la nature mo- nosjllabiqite de la lan{;ue chinoise, ainsi que le tres- petit nombre de mots qui la compo- sent, et par consequeui aussi le grand nombre Hhomopltones , viennent de la nature in^me de I'inslrument qui a servi a les representer. On doit supposer que si, des l'origine,l'ecri- ture chinoise se fiit prelec au developpement de la langue, cette langue, comme touies celles des nations civiliscfs, se serait deve- loppee en s'enrichissant de mots composes et de formes granimaticales. L'ecriture figu- rative hieroglvphique, en se dccomposani en elements sjllabiifues , t\. meme purement ff^ pliabetiques , a bien phis favorise le develop- pement grammatical de la langue parlee egyp- tieime qu'elle a representee, que l'ecriture chinoise. Aussi la langue copte n'est-elle pas restee monosyllabique et a I'eiat d'enfance, comme la langue parlee des Chinois; c'est ce qui fait qu'elle a pu etre representee par une ecriture purement alphabelique, composee d'uu petit nombre d'elements, tandis que la langue chinoise parlee ne pourra jamais I'^tre aimi , destinee qu'elle est par sa nature (qui 396 L'UNIVERS Ainsi, dans les exemples qui pre- cedent le groupe v ^cM-i q>'' repre- seiite et sif;ni/ie seul une mesure ; diviser, ii'a e(e adjoint au shjne ge- nerique deterviinalif ^f^ espi'it^ pour exprimer le mot felicite, bonheur, que parce que ce mot, dans la iangue chi- no\s(i parlee , se prononcait egalement tchi, avec le m^me accent ou la inline intonation de voix. Par suite du ni^me principe, ce m^me caractere \7, pro- nonce tchi^ se joindra a trente ou gnarante autres radicaux ou deter- minati/s generiques , pour exprimer trente ou quarante mots differents de ia Iangue parlee , prononce tchi ou khi (deux articulations qui se confondent tres-facilement dans les idiomes asia- tiques et m^me europeens ). Joint au signe determinatif generi- que -j ou y^ HOMME : -j^, il signi- (iera ruse, malice, talent, parce que, dans la Iangue parlee, on exprimait I'idee de ruse ou malice humaine et de talent, par I'articulation khi, va- riante de tcM. — Joint au signe determinatif ge- nirique ^ pemme : ^ J , il signiflera femme publique , parce que, dans la Iangue parlee, on exprimait I'idee de femme publique par I'articulation khi. — Joint au signe determinatif ge- nerique j(^ ou f coeuR : ^ , il si- gn! 6era sentiment de haine, de repu- gnance, de violence, parce que, dans la Iangue parlee, on exprimait ce sen- timent par I'articulation tchl. — Joint au signe determinatif y^ ou I BAD : I J, il sera en m^me temps idiographique et phonetique (*) , et il n'esl telle toutefois que par rinfluence de son ecrilure) a clre eternellement enchainee a sou ecriture figurative. (*) C'est le motif qui aura fait choisir ici ce groupe, de preference entre tous ceux qui se proiioncent iclii, afi,, que le coiiinose soil plus ricbe et en quelque sorte plus parlant «^«'«. Le nombre de ces heureux com- P«e« e»l de pres de quaire cents. signiflera une division ou une ramifi- cation d'un ruissean. 11 en est de m^ine pour tous les au- tres groupes phonetiques. 2- 7^- ^- KouEi. [194]. Manes, Genies. 46 derives phonetiques. Caractere liguratit primitif, destine, selon les lexicoiiraphes chinois, a re- presenter Vessence subtile des deux principes dans tous les hommes. Selon le Choue-w^n , la partie de I'hoinme qui retourne [a son principe] est ce que Ton nomme Koiiei. Ce caractere est devenu le signe ou ttjpe generique determinatif de ce qui est relatif aux mdnes, aux genies , aux esprits ter- restres. En Kou-iu^n ou ecriture an- tique, ce caractere est un derive du precedent, dont il conserve la fijjure comine type generique determinatif, et il est ainsi ^crit : jfi^. Exemple des derives phonetiques: Ce caractere joint a ^ toiing (orient), pris com me groupe phoneti- ^we.-^l toting, sjgnifie genie ou ESPRiT-to^wgr, que I'on dit donner la niort. — Joint a ~^ ytin ou hUn {parler, dire), pris comme groupe phonetique : ^ hoin , il signifie genie-Ao^h ou dme, c'est-a-dire , pour les Chinois, le principe actif de la matiere la plus pure , lequel principe , eu tant que prin- cipe , est nomme y&ng. — Joint a Q pe {blanc), priscom- me groupe phonetique : 6^ p^, i I si- gnifie le principe materiel du corps de I'hommea I'etat ^oncret de mdnes, le- quel principe, en tant que principe, est nomme yln. Nota. Le celebre philosophe Hoai- ndn-tseu a dit : « L'essence subtile {khi) du ciel , c'est le ho4n ; « L'essence subtile de la terre , c'est lejoe. » 3- f\ • /\^. JIN. [9]. Homme. 586 derives phonetiques. CHINE MODERNE. 297 Caractere figuratif de 1'homme , de- venu le signe ou type generique deter- minatif de tout ce qui est relatif a Vhomme. Exemples de derives phonetiques: Ce caractere joint a Hp tseii (Jils), pris comme groupe phonetique la Ute , et une troisieme partle oppo- see de Tanimal , la queue. Exemples de derives phonetiques : Ce caractere joint a pf kou {an- cien), pris commQ groupe phonetique : . jri- ^pF ^^ ' signifle bqeuf-^-om, c'est-a- ' J Hirft tseit^ signifie HOMME-foew, c'est-a-dire, porier ;pouvoir. — Joint a Q pi (blanc), pris com- me grottpe phonetique : a p| pe , signitie homme-/3C , c'est-a-dire, /rere aine. — Joint a fP tchotng ( milieu ) , pris comme groupe phonetique : qttf tchoUng ^ il signifle HOMME-^cAojlftg', c' est-a-dire, /rere carfei. I 4. ^ . ^. Niu.[38]. Femme. 550 derives phonetiques. Caractere figuratif de la femme, de- venu le signe generique determinatif de tout ce qui est relatif a la femme. L'ancienne torme representait la femme par sa robe trainante. Exemples de derives phonetiques : Ce caractere joint a rr pi (compa- rer), pris comme groupe 'phonetique : njr pi, signifie femme-/)^, c'est-a- dire, mire defunte. — Joint a pp koi/ (ancien) , pris comme groupe phonetique : ifJ^ koii, il signifie femme-Aom, c'est-a-dire, mere du mar i; be lle-mere, etc. — Joint a vju yi}i (parce que^ a cause de ) , pris comme groupe phone- tique : W^ yin , il signifie femme- yln, c'est-a-dire, mariage , alliayice , etc. 5. ^. ^. nieou. [93]. Bceup,Va- CHE . 56 derives phonetiques. Caractere figuratif du boeuf, devenu signe generique determinatif de tout ce qui est relatif aux quadrupedes , genre boeuf. Selon le Choue-w^n, l'an- cienne forme representait les cornes , dire, taureau. — Joint a Zp sing {naltre) , pris comme groupe phonetique : w]T. sing, il signifle BCEUF-s^ngr, c'est-a-dire, ani- mal {genre boeuf) d'une seule couleur ; victime pour les sacriflces. — Joint a W kdo, hdo, h6 ( aver- tir) , pris comme groupe phonetique : Ji^ ko, il signifle boeuf ou vache- kd, c'est-a-dire, etable (*) pour les boeufs et les chevaux. 6. ^^. ^^. NIAO. [196]. OlSEAUa longue queue. 436 derives phonetiques. Caractere figuratif de I'diseau , et si- gne generique determinatif de ce qui est relatif au genre giseau. Exemples de derives phonetiques : Ce caractere joint a pj koii (an- cien), pris. comme grottpe phoneti- ;nifie oiseau-Aom, que: grt^ koii, signif c'est-a-aire, perdrix. — Joint a ^ kdo {avertir), pris comme groupe phonetique: g^ Ad, il signifie giseau-Ao, c'est-a-dire, oie sauvage. — Joint a fi on (moi, nous) , pris comme groupe phonetique : B^ ml , il signifie GiSEAU-oti, c'est-a-dire, es- pece de chauve-souris. 7. ^.^. TCHGUNG. [142].VEBS, Reptile. 514 derives phonetiques. Caractere figuratif des vers , des beptiles, devenu le signe generique detenninatif 6e toutes les especes d'm- sectes et de tout ce qui y est relatif. (*) Le mot francais I'acfierie, ainsi que le mot latin bubile , sont d'une formation iden- tique. M« LtNIVERS. Exempl^ tchii , il signifie arbre- tchic, c'est-a-dire, arbre dont I'ecorce sert a faire du papier; papier. — Joint a X tchou {seigneur, mai- tre), pris comme groupe phonetique : TilL tchou J il signifie abbbe ou BOts- tchou, c'est-a-dire, colonne en bois. 10. vj^. ^J'I)^ 4-^ THSAO. [140]. Roseau. 1166 derives phonetiques. Caractere fignratif des boseaux, de- venu le signe generique determinatif de toutes les especes d'lierbes ct de plantes, et de tout ce qui a rapport aux hei-bes et aux plantes. Exemples de derives phonetiques : Ce caractere joint a ?j hou ( an- cien), pris comme groupe phonetique : j/Y /iOM, signifie plante-A;o«, c'est- a-dire, ;j/anh side , petit. [ Cette idee est representee par deux traits : )( et par une ligne verticale au milieu; ce qui indique que I'objet ne pent qu'^tre divjse en deux. {Ch.w.)] 31. 32 48. rfwAng, boiteux, tortu, bancal. [L'ancienne forme re- presente un homme anx jambes tortues.] 56. C7 44. j^ chi , cadavre ; effigie. [ La forme ancienne represente un homme etendu et immobile. (C^.w?.)] 118. 149 45. n^ tchi, rejeton, pousse [figure par les bourgeons qui sor- tent de la plante. (CA. M>.)1 :, 17. 39 20*" Uiraison. (Chink modebne.) 20 ,00 rumvKRS. ^6. ill f^irfn, montagne, [Eminence qilis'^tend au loin, et an lour de laquelle circulent les principes vivifiants de la na- ture , qui produisent tous les 6tres. {Ch. w.)] 569. 037 47. W^ tchoxifn , eau qui coule et serpente 23. 27 , 48. ~P koung, artisan; homme adroit, ingenieux. [L'ancienne forme represente un homme avec une equerre et im compas. (CA. m;.)] 11. 18 49. H ki, soi-m5me. [L'ancienne forme representait on etait censee representer le ventre de I'homme. {Ch. w.).. . . 19. 21 50. rjl Mn , linge , bonnet ; pi^ce d'^toffe ; etoffe 247. 295 51 , -F* Adn , bouclier. Arme defensive 15. 18 52. "y^ ydo, petit, d^licat. [L'ancienne forme represente un enfant qui vientde nattre. (CA. w.)] 15. 21 63. / ijan, dessus; protection; abri. [Ce caractere repre- sente la forme d'une habitation elevee pour etre oppo- see aux attaques du dehors. {Ch. w.)] 22.'j. 287 54. l>rancfi€d'arbre. [L'ancienne forme r^pf^sente une main qui cueille une branche de roSeau. (Ch. w.)\. . . 21 , 27 307 241. 296 19. 2S CHINK MODERN E. 66. "5^ phoic, frapper ; leger coup donne avec la main. (Ch. ioJ). 67. 3c ^^"i raie; caractere forrn^ par des traits de pinceau. • NoTA. « On appelle wiSn les caracteres qui dependent de la classe desjigm-aii/s; quand ces meines carac- teres passent dans la classe de ceux qui representent \a figure et le son, par leur adionction comme grou- pes phonetiques, on les appelle tseu. » (Preface du Choiie-win.) 68. ^4-- teoii, mesure; boisseau chinois de dix ching; la grande Ourse. Fig. {Ch. w.) 27. 33 69. rV kin, hache; instrument pour couper du bois. Fig. {Ch.w.) 4a. 56 70. J-t fang, carre. [L'ancienne forme represente deux bateaux dont les proues sont placees a cote I'une de I'autre.]. 68. 83 71. ~ir^ wow , negation ; defaut; manquant. Nord-ouest 9. 13 72. M ji , le soleil ; [ce qui est la substance reelle de toutes clioses; I'essence sublime du grand principe mSIe et lumineux,qui n'est soumise a aucune diminution, a au- cune perturbation. Fig. {Ch. w.) ] 381 . 455 73. i— "I yoiie , dire; [parole indiquee par la bouche ouverte, d'oii s'echappe le souffle de la voix, {Ch. w.)] 23. 38 74. ^ you€, lune; mois. [L'essence subtile du grand prin- cipe femelle obscur. Fig. {Ch. %v.)] 58. 70 75. 7|\^ moa, arbre; bois. [Ce caractere represente dans sa par- tie superieure les pousses vegetales, et dans sa partie inferieure les racines. {Ch. w.)] 1,232. 1,358 76. -y^ khien , expiration ; souffle qui s'echappe de la bouche. [L'ancienne forme represente un homme baillant en ouvrant la bouche. {Ch. w.)\ 196. 23G 77. j|^ tch\, s'arrfiter; discontinuer. [L'ancienne forme repre- sente des roseaux et des arbustes qui se redressent apies que le pied les a foules. C'est pourquoi ce carac- tere est employe dans le sens du radical 157. (CA.w.)]. 49. 91 78. -^ yd, squelette; pervers ; mauvais , vicieux 190. 232 79. '^c choa,, bSton; frapper; tuer un homme avec un bSton. {Ch.w.) 58. 84 80. jfr won , negation ; meltre un em.p^chpment. [Ce caractere, dans son ancieune forme , repre>ente une fenime se livrant a un commerce charnel. {Ch. iv.)] 10. 17 81. jr* pi, comparer ; mettre en ordre 14 ?2 82^^ wdo, cheveux; polls des sourcils 155 212 20. ,03 L'UNIVERS. 83. KT- chi, famine , race , descendance 7. 15 W. "^ lif^U a'""? souffle; vapeur qui monte en liaut, en forme de nuage. Fig. {Ch. w.) 9. 18 85. -^ choul, eau; egal, ^galiser. [Ce caractere represente la multitude des eaux qui coulent, et au sein desquelles est figure le principe vivifiaut et subtil de la nature. {Ch.w.)] 1,333. 1,580 86. ^ hd, feu; flamme qui raonte en haut. Fig. {Ch. w.) — 545. 03 87. Ill /cAAo, onglesde la main; griffes 21. 37 88. "^/oti, pere; modele; le chef I e plus Sg^ de la maison, qui donne I'instruction. {Ch. w.) [Dans I'ancienne lorme, ce caractere represente une main qui s'appuie sur un Mton.] 10. 11 89. ^^ A«to, imiter ; acc^der aux voeux des autres 12. 17 90. 44 tchoHang , lit 38. 50 91 . tr pMen , ^clat de bois. Fig. {Ch. w.) 75. 78 95. y^ yd, dents. [L'ancienne forme representait les dents de la niAchoire superieure et de la maclioire inferieure se croisant mutueilement. {Ch. w.)] 9. 9 93. ^t- nieoa, boeuf; grand betail. [Le caractere, dans sa plus ancienne forme figurative, represente un bceuf; sa forme alteree n'est plus censee representer que sa tete, ses comes et sa queue. {Ch. w.)] 211. 233 94. ~7i^ A/tio?/e?j,chien. [L'ancienne forme representait la figure A\xc\\\en. Fig. {Ch.iv.)] 412. 445 R4DICAIIX DE 5 TRAITS. 95. ^^ hioiwn, couleur du ciel. [L'ancienne forme represente le .wleil au sommet d'un triangle support^ par une ligne verticale.] 0. 7 96. -jt ytijjaspe; pierre pr^cieuse. [L'ancienne forme repre- sente une pierre precieuse taillee, avec un fil qui la traverse] 418. 473 97. J^ koHa, coixrge. Fig. {Ch.w.) .W. 50 98. ^^ tvd, terre cuite; tuile. [L'ancienne forme est celle des laiks.] Caract. fig ur 100. 173 99. |-J hdn, doux, agr^able. [L'ancienne forme represente une bouche contenant une ligne borizontale , qui est le signe indicatif de la parole. (C/t.tt'.)J 19. 23 I » CHINE MODERNE. 309 100. A^ s^ng, naitre; vie. [L'ancienne forme represente des ro- seaux,(ies plantesqui surgissent delaterre. (C^.w.)]. 17. 23 101. MJ young, se servirde; faire usage de ce dont on peat se servir. {Ch. w.) 10. 11 102. jfl thi&n, champ. [L'ancienne forme represents un champ divise en qtiatre parties par des canaux d'irrigation.]. 149. 193 103. ^ soii, pied. (C^.w.) ,. • 12. 16 104. rj " ni, maladie; appuye sur. [L'ancienne forme repre- sente deux bommes s'appuyant contre un mur {Ch. w.)\ d'ou I'idee defaiblesse , debilite , maladie.^ 470. 527 105. Vr p6 , pieds ecartes et opposes Tun a I'autre. {Ch. w.). . . 12. 16 106. p| /je, blanc. Couleur des regions occidentales. (CA. w.). . 86. 109 107. Jt/ phi, peau , barque 76. 95 108. im mlng , vase de menage dans lequel on depose les ali- ments pour boire et manger. {Ch. w.). Caract.fig. .. 113. 129 109. tj WOM, ceil, organe visud de I'homme. (CA.tf.). Car. /gr,. 554. 646 110. ^^^ 7n4ou, ballebarde fixee sur les chars de guerre, etlon- gue de 2 tchang ou 20 pieds. {Ch. w.). Caract.fig. ■ . 48. 66 111. ^^ tchi, fleche. [Le caractere ancien represente la fleche ent^ere avec sa pointe en acier et ses pennes. {Ch. w.). 55. 65 112. ri chi, pierre, rociie situee dans des anfractuosites de mon- tagne. Fig. {Ch. w.) 447. 489 113. JT\ khi, genie terrestre, [phenomenes celestes par lesqueis sont reveles a I'homme les evenements heureux ou malheureux. (CA. w.)] 179. 214 114. IZ^ jeou, plante du pied des quadrupedes, imprimee sur la terre. Fig. {Ch. w.) 11. 13 1 15. "^r kd, cereales de printemps qui commencent a croitre a la 2* lune (mois de mars), et milrissent a la 8* {Ch. w.). [L'ancienne forme represente des tiges de ble ou de millet.] 346. 433 1 16. /t hiouS, caverne ; habitation souterraine. {Ch. w.) 142. 300 1 1 7. )J /«, €tre debout. [L'ancienne forme represente un homme se tenant debout sur le sol comme un arbre.] Carac- tere a sens combine. {Ch. w.) 73. 102 HADtCACX DE 6 TRAITS. 118. 4a' tchoii, bambou; roseau qui croit en hiver. [Caract.fig. representant les feuilles tombant en bas. {Ch. iv.)]- . . G72. 954 310 L'UMIVERS. 119. ^ mi , rjz, grains de riz. [Le caraciere ancien represente la forme du fruit de la plante. (CA.tf.)] 205. 321 120. 4^ mi, lil de soie; fil delie. [L'ancienne forme represente des fils de soie. {CA. w.)] 627. 821 121. ^f feou, vase de terre. [Vase de terre cuite dont on se ser- vait pour offrir du vin aux botes. En frappant on en tirait des sons liarmonieux. Carac^/gr. {Ch.iv.]... 61. 78 122. W] loang, filet pour prendre des poissons. Caract. fig. (Ch.w.) 120. 1G4 123. qp ydng, niouton; belier. [Le caractere ancien represente la t6te, les cornes, les pieds et la queue du niouton. (Ch.w.)] 108. 1.37 124. ^^ S'w, pennes; longues queues d'oiseaux. /'ig'.((7A. «;.).. 167. 210 125. :^ lad, vieillard ; homme 3ge de 70 ans. [L'ancienne forme est compos^e du signe cheveux et de celui de chati- gement; ce qui signifie : personne dont les cheveux ont change de couleur, ont blanchi. {Ch. w.)} 14. 23 126. Ifn eaih, conjonction et; poils de la mdchoire. [Ce carac- tere figure la barbe du menton. {Ch. w.)] 17. 23 127. y^ /o«i , charrue. [Le caractere ancien represente une main qui laboure avec un raorceau de bois crochu. {Ch. w.)] . 76. 85 138. ]|J* eUlh, oreille ; enteodre. Organe de rouie. Fig. {Ch. w.)] . 1 37. 172 129. "^ yijt, pinceau; instrument pour tracer les caracteres de I'ecriture. (CA. w. ) 15. 20 130. ^ JoM, chair. [Corflc^^re/g^j^ro^Z/'representant un mor- y ceau de chair avec des veines. (<7A. M?.j] 577. 675 131. ]p^ tch'in, sujet; vassal qui servait un prince. [L'ancienne forme represente I'ancien bonnet de ceremonie. {Ch.w.) 9. 17 132. ^ Iseii, particuleefe, ex; sol-mfime. (L'ancienne forme represente up nez, et c'est ainsi que i'ecrit le Chou€-w6n.] 21. 35 133. ^ tchi, parvenira; atteindre. [L'ancienne forme repre- sente un oiseau qui vole, et qui, descendant en has, vient atteindre la terre. Fig. {Ch. w.)] 17. 25 ^34. y AAi>o«, mortier.[Caractere/§fwra^//dans lequel onvoit des grains de riz disposes pour gtre piles. (Ch. w.)].. 40. 72 135. "gl" j^, chi^ langue. [Languedans labouche, servant a par- ler eta goiiter les saveurs. (CA. w.)] 34. 35 186. ^¥^ /c^0K«n, opposition. [L'ancienne forme presente I'image CHINE MODERNE. 311 de deux homines qui se tournent le dos, et qui ont !es jainbes entravees. (CA. ««.)] ^- H 37. jy- tcMou, barque. Fig. {Ch. w.) 166. 198 38. n> Ae'«,limite. Desobeissant , r^fractaire. {Ch.w.) 5. 6 39. ^ 556, couleur. Air, contenance. {Ch. w.) [Les sentiments de joie ou de colere d'un homme se manifestant sur la figure se disent 55e , air, couleur. I-wen pi-lan.] .... 20. 22 40. ^^ thsdo , plante , roseau. Fig 1,423. 1 ,902 441. tg hou, tigre. Fig. [L'ancienne forme represente un tigre se precipitant sur sa proie.] 69. 115 42. ^^ hoei., animal rampant; insecte, reptile ayant des pat- tes. Fig 804. 1,067 43. jiy] hiouS, sang. [L'ancienne forme represente un vase (le n° 108) dans lequel on offrait le sang des victimes pendant les sacrifices. (Ch. w.)] 38. 61 44. ^T hing, marche; pas d'un homme en marche. (Ch. w.)... 35. 54 45. A^ i, vetement superieur; ie vetement inferieur se nomme tchdng. (Ch.w.) 466. 611 46. mj yd, couvrir; couvercle. Figf 20. 30 RADICAUX DE 7 TRAITS. 47. feJ kien, voir. Compose de la figure de Vhomme (10) et de la figure del'cBJ/ (109). (C/i. w.) 133. 162 48. -^ kio^ cornes des b^tes. [Compose de la figure des tendons et de celle de la chair. Fig. (Ch. w.)] 137, U>d 49. ^^ y^n, parole; parler. [L'ancienne forme represente une bouche d'ou le souffle s'echappe.] 734. 861 50. yf^ koii, vallee; espace vide, [L'ancienne forme represente une source d'oii I'eau s'ecoulc en formant une vallee. Elle est composee de la figure de Veau apercue a moitie sortant d'une ouverture ou ftowcA^-. (CA. W.)]. 47. 65 51 . ^ teou, vase de hois, employe anciennement pour y deposer la nourriture. Fig. (Ch. w.) 49. 69 52. ^C c'") PO'*c- [L'ancienne forme est toute figurative.] 119. 50 53. ^^ i , visage ; face de Vhomme. {Ch. w.) [L'ancienne forme represente une tete vue de face.] 64. 67 177. Tp- ti^i cuir prepare. [Peau desanimaux preparee , de la- quelle on a fait disparaitre le poil. L'ancienne forme etait figurative. (CA. w.)] 290. 307 rt-t. 178. £3. w6i , oppose ; peau 93. 101 \19. d^ hieoii., o\%non. Fig. {Ch.w.) 15. 2{ 180. q" yiii^ son, articulation. [Ce qui sort du coeur et se pro- duit a I'exterieur, on I'appelle son, yin;ce caractere, dans rancienne forme, est compose du signe de la pa- role et de celui de langue, representee par un trait horizontal. {Ch. w.'j] 3-1. 43 181. pi hie, tete. [L'ancienne forme est figurative. (C/j. to.)]. 324. 373 182. jm, foung , \ent. Les huit vents, c'est-a-dire , les vents des quatre points cardinaux et des points interme- diaires. [L'air semettant en mouvement, les insectes naissent ou apparaissent aussitot; c'est pourqnoi des insectes sont represenles dans la figure du vent. {Ch.w.) — Queiques anciennes formes ont la figure du soleil entouree d'une zone, signe de pluie et de vent; ce qui donne une etymologic plus rationnelle de ce caractere, quoique I'apparition des insectes dans les temps de vent et de pluie soit egalement un indice caracteris- tiqiie.] 154. 183 183. 4}^/i ch&ii, millet, sorgho; variete du radical 115; cereale qui se seme dans les climats humides et chauds, et a laqiielle par cela meme on a donne le nom de choU-, temperature tres-chaude. {Ch. w.) 44. 47 203. ^s. he, noir. [Couleur de ce que le feu a couvert de suie {Ch. w.). — L'ancienne forme represente la suie re- cueillie au-dessus de la flamme.] 146. 173 204. ^rt tchi, coudre; broder. [Fils d aiguille avec lesquels on cout les vetements. (C/i. w.) j 9. 9 RADICADX DE 13 TRAITS. 205. aa^ ming et min, grenouiile. [Animal coassant, nomme wa. Fig. {Ch.w.)] 35. 41 206. ^A ting., trepied. [Vase a trois pieds, a deux oreilles ou anses; vase precieux, destine a conserver les cinq odeurs. Autrefois Yu fit fondre neuf ting ou trepieds d'airain sur lesquels etait la description des neuf pro- vinces (ou divisions pastorales de la Chine), qu'il fit placer au somraet de la niontagne Heng-chan. Ca- r act. jig. {Ch.w.)] 13. 15 207. ipj5 koii, tambour; frapper un corps sonore. [L'ancienne forme represente une main, a droite, qui frappe sur un vase ou tambour.] 41. 47 208. uM c/io«, rat. Nom generiquederespecerat.Fig'.(CA. w.).. 79. 103 RADICAUX D£ 14 TRAITS. 209. ^, pi., nez. Organe de la respiration. {Ch- w.) 47. 60 210. ^S thst, arrangement; surface egalisee, uniforme, des epis des cereoiles. Caract. fig. {Ch.w.) IG. I'J RADICAUX UE 15 TRAITS. 211. 1^1 tch'i^ dents superieures. [Le caractere represente les dents dans la bouche. (C^. M?.)] 145. 163 RADICAUX DE 16 TRAITS. 212. pjE loUng, dragon. [Animal couvert de longues ecailles, pouvant se cacher dans les profondeurs dc la terre, apparaitre a la lumieredujour, se rendre d'une subti- lite impalpable, pouvant prendre une forme carree, ronde, allongee. Au printemps, il se divise, el monte 3IQ L'TTNIVERS. dans le ciel ; en autonine, il plonge dans le fond des ahfmrs. (Ch.w.)] 19. 25 J J 8. ^fe kouei, tortue. [Le caraclere figuratif represente a I'ex- t^rieur les ^cailles de la tortue, et a I'inlerieur sa chair. {Ch.w.)] 21. 25 RADICAL D« 17 TRAITS. 214. ^tn? yo, flilte; instrument de musique, en bambou, a trois ouvertures, pour produire tous les sous. {Ch. w.). ... 17. 20 Le 7'5eM-Aio- pierre • . . . Sol * * H moii, ceil 347 Figurrt. Noiiibre I -I thsao, roseau 1,146 V\ chdn , montagne 345 y cAoMi, eau 1,057 |H yw, poisson.. 32G >f wiOMj arbre •••• U17 ho , it\x 313 * cheoa , xnzva 725 rjj A/itowcn^ chien 2'J2 j* iirt^ occur 702 ^ /id^ grains 2b9 i ;m^ homme 586 J yti, jaspe 280 P AAcoMj bouche 572 1 wm, cheval 264 tchou , bambou 570 H hie , lete 230 ^ n'm , femme 5.50 A tchi , marclie 228 g y^/t, parole 521 |^ u;a, tuile 221 $ hoei, ver 500 i tcho , mouvement 2 1 G 3^ wt, fildesoic 490 | A'^^cuir 102 Ij 70M, chair 454 |l /do, couteau 187 I nido, oiseau 436 ^ /jAcJm, frapper 173 % kin, or 391 jf wi, riz 168 J fou , terre 374 ^ khien , expiration lo" CHINE MODERNE. 81? ^^^ tji( , pluie. 145 ^- J-angiie orale. ,.. Tous les caracteres, c'est-a-dire tous pel , perle 123 |gg signes graphiques qui ont servi a fy peindre la parole chinoise, proviennent ^ tch^otc J Durque 119 originairement,commenoiis Tavonsde- ^^^ iDontre , de la peinture primitive des khioue , caverne It7 objets, soit direclement, soil indirecte- - nient. II suit de la que leur composi- jjl cM, esprit 112 tion ne comporte en soi aucune articu- „ lation intrinseque et Gxe, a I'encontre ± h^ , noir 105 des elements qui constituent les mots ^ des langues alpliabetiques. Les groupes jj li, nerfs 102 ou signes graphiques chinois rappel- ' lent seulement une articulation tradi- m tchi , dents 96 tionnelle, un mot de la langue parlee; ^ ' et, par leur association a un eleme7it '~^~* ml couvrir 96 f'g^<^Jets dif/erents de nature et de forme F- -' ' dans la langue ecrite, mais semhlables 3^ wtt Dlumes . 92 ^^ "°"^^ ^^"^ '^ '^"S"^ P^*"'^®- ^'^'''" ^ ' V plication que nous avons donn^e prece- ,., . q, demment (pag. 293 et suiv.) de cette )c ^'*^^*-' ^°"" formation tres-remarquable de I'ecri- i . ., Q„ ture chinoise, nous dispense d'entrer ^ mdo, cheveux, pons yu j^j ^^^^ ^^ nouveaux details a ce sujet. P(-» Mais comme cc inecanisme ingenieux t^ ville , cite yu j[g l3 langue et de I'^criture chinoise est X ^ loin d'etre compris par les Europeeiis, ip Mm, bonnet 88 m^me par quelques-unsdeceux qui ont •^gr . etudie le chinois, nous avons cru devoir eiilh, oreille 85 donner ici la liste des differenis grou- |-Q-j pes phonetiques qui servent dans Vecri- wa7ig,G\eX 82 ^wre a representer les mots de la /angfue ^ parlee. Cette liste sera d'autant plus M /fjo, cornes 81 utile qu'elleformerauns^Z/afiatVede la V. langue chinoise, lequel syllabaire com- % »»^, ble 80 pose des principaux groupes phoneti- ^ ques, reuni a la liste des radicaux ou tkiu, char 72 types figiiratifs generiques, precedem- ment donnee(pag. 303-316), represen- ftchl ver insecte 69 tcra presque en totalite la partie la plus ' ' ' ' usuelle surtout de la langue et de I'ecri- P ^i^«, champ 68 ture chinoises. '^ En eftet, on a pu voir par la synthese il koUng, arc 67 ^^ I'ecriture chinoise, que nous avons J ^' esquisseepreceaemment(p.290etsuiv.), J rh^ norc 71 ^"^ ^®^*^ ecriture se composait beau- •f- ' P coup moins arbitrairement qu'on ne le ¥ . . f^ croit communement , et que tous les f yaws', mouton ^ elements qui la constituent peu vent etre ± . , facilementramenesadesprincipes fixes % /otti, cnarrue 56 qui ont leur base dans la constitution mSme de I'esprit humain. Apres avoir fait ^n quelque sorte Vinventaire moral 3,8 L'TTN de la langue et de I'^criture chinoises, il ne sera pas moins utile peut-€tre, pour en avoir une plus complete intelligence, d'en donner aussi Vinventaire mate- riel. C'cst ce que nous allons essayer de faire. M. Marshman a ^t^, & notre connais- sance, le premier Europ^en qui soit en- tr6 dans cette voie nouvelie. On trouve dans sa Clavis sinica, publi^e h Seram- pore en 1814 (*), un travail remarquable sur la composition des caracteres chi- nois. Les r^sultats de ce travail, dans iequel il dit avoir ete aid^ par ses as- sistants chinois, sent les suivants : Caractire*. 1° Le Dictionnaire imperial de Khang-hi coiitient,s!ins les additions faites a chaque radical, et mises a sa suite 3i,ai4 Les additions consistent en carac- teres incorrects, formes inusitees, etc. 6,4a3 Caracteres qui n'avaient pas en- core ete classes dans aucun diction- naire anterieur i,65g Caracteres sans nom ou significa- tion 4,200 Total 43,4()6 a" Les caracteres veritablement usuels iiC montent pas a plus de 3o,ooo 3' A part les a 14 cle/s on radicaux (don- nes precedemment ), le nombre des groupes (syllabiques) servant k former les caracteres de la cintjuiime classe, s'eleve a. . . 3,867 4* De ce nombre, 1,726 ne se groupent qu'avec tin sent radical (nous en avons neglige un certain nombre dans notre Syllabaire, mais lMri»*». un petit nombre), ci t,7a6 1,726 45a se groupent avec a radicaux differenis , ci 904 383 se groupent avec 3 i»i49 X 34 se groupent avec 4 536 12a se groupent avec 5 fiio 86 se groupent avec 6 5i6 83 se groupent avec 7 58 1 66 se groupent avec 8 5a8 63 se groupent avec 9 567 6i se groupent avec 10 610 4r s e groupent avec ir 45i 3,ai7 A reporter 8,178 (*) Clavis sinica. Elements of Chinese Onmmar with a preliminary nissertation on the < :haraclcrs and colloquial meiliiim of the Chinese. Serampore, 18 14, i vol. in-4''i '■ ' IVERS. 3,ai7 Report. .'. 8,*g8 37 se groupent avec 12 444 38 se groupent avec 1 3 494 3o se groupent avec 14 420 aQ se groupent avec 1 5 435 a5 se groupent avec 16 400 a6 se groupent avec 17 4,',a 69 se groupent avec 18 a ao . . . i,3 1 ( 91 se groupent avec 20 a 23 . . . i,ooa 66 se groupent avec 25 a 3o . . . 1,848 i38 se groupent avec 3o a 40 . . . 4,83o 75 se groupent avec 40 a 5o . . . 3,376 27 se groupent avec 5o a 60 . . . i,485 9 se groupent avec 60 a 74 . . . 6o3 3875 groupes, etant combines avec les 214 radicaux, produiseut.. a5,267 En retranchant de ce nombre les groupes syllabiques (que M. Marshman nomme /;/•<- mitives) des deux premieres ciitegories qui ne s'associent qu'a un et denx radicaux, il res- tera 170a groupes syllabiques, qui, a eux seuls, se groupant avec diflerents radicaux , produiront 23,655 derives phonetiques. C'est la un fait important et qu'il est bon de ne pas oublier, pour comprendre le mecanisme de la langue chinoise. Ce double inventaire , qae nous essayons de donner a nos lecteurs, du materiel de I'ecriture et de la langue chinoises, en m^me temps qu'il rectifie les idees erronees que Ton en a generalement en Europe, simplifie aussi beaucoup I'elude que Ton pent en faire. La connaissance ciaire et nette de I'objet de ses investigations est deja pour I'esprit un grand pas de fait dans la science qu'il se propose d'acquerir. Quand nous n'aurions obtenu que ce resultat, nos lecteurs nous pardonneront de les avoir retenus un peu trop longlemps peut-etre sur des matieres qui doiveut leur etre assez peu famiJieres. Mais la nouveaute du sujet, I'impoilance que le$ etudes de la philologie et des anti- quiles orientales acquierent chaque jour en Europe , seront pour nous une suffisante jus- tification. Les caracteres chinois , en se groU' pant ensemble pour former les com- poses que nous avons nommes ideo- phonetiques (p. 302), subissent cer- taines alterations ou modifications dans leur agencenient, qui permettent de les separcr dans la composition typograjlii- que. Voici la forme que les radicaux donnes precedemment (p. 303-316) dans leur individualite , prennent lorsqii'ils s'associent des groupes phonetiques. CHINE MODERNE. ^f« '-1 Tableau des radicaux qui, dans la composUion des caracth'es,forment un 6l4ment separable pour la (ypographie{*). S 9 IS IK IS 19 SI S4 L 1 .^ ^ ij )t/ ^ b t p p t=I ± ± ^fiC z:^^ SS t(9 «0 S8 39 40 41 42 46 ^ ^ J ^ J ^-^ III •" m ^H- MS 116 117 72 78 76 7a 79 82 88 86 90 91 93 91 "• I ^ fe ? X I t ^ .u tI }i f t 96 »7 98 1 i 3^ I 1 ^ 112 ^ ^ I f ^ I ^ i ^ i I I t "" s 1411 148 147 I4« 149 1X0 till IKS ISJ IS4 IS? IS8 . f ^ ^ 1 « I § 8 I I I S >^ I lei 170 172 ITS 177 178 180 iS^ W U ii ¥ f H 102 IDS lOli 108 109 MO III I 6 am. Bl f ^ 118 119 120 121 ISI 134 ISS ir>7 <3S 139 140 I4S lo9 I 165 164 les 166 167 f I P I ^ f i 188 19; 17U 1/V 181 184 187 I f I 194 I9S 196 197 199 201 203 204 S0« 209 211 © ft 1 2 3 5 6 7 8 ' 9 10 100 1,000 10,000 (*) Des le commencement de nos etudes cbinoises , nous avions ete frappe de la graude importance de ce mode particulier a la lan- gue cbinoise, d'ofl'rir en meme temps, et pour le meme caraclere, deux groupes distincts; I'uu representant , ou cense represenler la forme generlque de I'objet , et I'autre repre- sentant le ^son ou le mot de la langue parlee auquel cet objet repond. Cette composition des netif d'lxiemes environ des caracteres chi- nois , une fois bien determinee et reconnue, fut pour nous un trait d6 lumiere qui nous montra le lien qui unissait en quelque sorte la langue figiirath'c de I'ancien monde aux langues syllabiques ou alphabetiques du nou- veau. Nous conciimes des lors la possibilile de soumettre la composition des caracteres chinois aux lois de la typo!,'raphie moderiie, en reduisanl autant que possible les elements divers qui les composeot a leur plus simple expression. La connaissance du mecanisme, si I'on peut s'exprimer ainsi, qui a preside a la formation de la classe Ideo-phonetique des caracteres chinois, devait naturellemeat nous amener a suivre le meme mode en typogra- phic. Aussi, des i836, nous disions, dans une Notice sur la fonte des types mobiles d'un caractere chinois grave sur poincons d'acier par M. Marcellin-Legrand, a rinspiralion et sous ia direction de celiii qui ecrit ces iigues: « De tontes les laugues du monde contiu , la « plus difficile a representer par les types » mobiles est incoutestabloment la langue « cbinoise. On peut meme dire qu'elle a fait 320 L' UNI VERS. II n'existe pas dans le monde de Ian- gue plus riche et plus pauvre en nieuie - jusqu'ici le dosespoir des plus liitbiles typo- m graphes europrens. Les Cliinois ont pris le > parli , apres avoir t-ssaye eux-memes de • reiidre mobile cliaciin dc leurs innombra- «blrs caracteres, de s'en tcnir a la gravure • primitive sur des planches de bois. « Presque tous les essais que I'ou avail -faits jusqu'a ce jour en Europe, pour gra- m ver ces caracteres, avaient e« pour resultat m la reunion d'un plus ou moins grand nom- « bre de ces caracteres, graves sur bois, sans « jamais constituer un corps un peu riche et • commode. II fallait done am ver a faire • quelqur chose de complet, de defiuitif ; il • fallait resoudre le nrobleme de representer - la languc figuree aes Cliinois avec le moins > d' elements possihle , sans allerer cependant • la composition des caracteres. Une etude - attentive dc la theorie de la langue figuree ■ des Chinois nous a amene a resoudre d'uue « maniere salisfaisanle le probleme ci-dessus « pose, en classant tous les caracteres chinois m en deux series ; Tune coniprenant les carac- m teres indivisibles , et I'autre, les caracteres « divisibles typographiquement. « Dans la premiere serie se trouvent places : ■ 1° Les elements symboiiques , radicaux • ou clefs ; « a° l,es caracteres formes par ceux des ra- « dicaux dont la figure nc pent se separcr typo- « grapliiquement des groupes addilionnets ou « sjilabiques qui constituent leurs derives ; « 3° Les caracteres dont les elements sont •• tels que Ton ne pent egalement les separer ■ des radicaux, a cause de I'union trop in- « time de leurs parties constiluanles avec ces > radiraux , sans en alterer la forme. •< Dans la seconde serie, de beaucoup la « plus nombreuse , sont classes : " i" Tous les groupes qui peuvent se join- ' dre aux radicaux (dans la forme qu'ils « prennent en composilion , forme represen- " tee dans le Tableau ci-dessus) sans en alte- « rer la forme et Teiegance. •> (Nous donnons ci-apres le catalogue de ces groupes addi- lionnets ou phoneticjues .) « a° Les radicaux et les groupes qu'il faut •• graver sous deux formes differeotes , etc. » Ce systeme de composition typographique chinoise permet d'economiser la gravure de deux tiers au moins des 3o,ooo poinqons au'il faudrait graver avec I'ancienne me- tnode , pour imprimer les 3o,ooo caracteres qui se trouvent dans le Dictionnaire impe- rial de Khang-lii. On a pu juger, par les mndeles de ces caracteres rcproduils dans ce volume, par les editions des testes cliinois de Confucius et du philosoplie Lao-tseu , publiees chez 1V1M. Didot, en i837 et i838, Car celui .qui cciit ces lignes , etc. , de la eaute et de la nettete de ces caracteres ainsi graves et composes. Ces ni^mes types, qui ont nalurellement trouve en France des de- prdciateurs , sont employes mainlenant en Chine par des Europcens, pour I'impression de livres chinois; et ces impressions, ainsi failes au milieu des Chinois par des Euro- [>eens , dcpasscnt en nettete et en elegance es plus belles impressions du pays. Nous avons en notre possession un ouvrage clii- nois -anglais, intitule The Chinese Speaker (ouvrage pqsthume de M. Rob. Thorn , consul anglais a Ningpo), imprimc a Ningpo, en 1846, avec nos caracteres mobiles. Cet ou- vrage pent assurement rivaliser avec tout ce que les presses chinoises ont prodiiit de plus elegant et de plus beau. Les missionnaires americains ont aussi commence, en Chine, I'impression d'une Bible chinoise, avec ces m^mes caracteres. IVI. Medhurst , missionnaire . anglais en Chine, qui a deja public plusieurs ouvrages en chinois et sur la langue chinoise * , en a parle en ces termes : « Un essai de fondre des types mobiles '•chinois a ete fait a Paris, sous la direction « de M. Pauthier, membre dela Socieic asia- « tique de cette ville. D'apres quelques spe- «cimens qui ont ete publics, il parait qn'ils « sQnt beaucoup plus petits que les types de « M. Dyer, elant a peu pres de la force d'un « gros-romain ; et ils sortent des mains d'un « des plus habiles fondeurs de France. Ces « types chinois sont, sous le rapport de la V finesse des trails et de I' exactitude des pro- « portions , superieurs a tout ce que les ou- " friers asiatiques pourraient produire. La « forme de quelques-uns de ces caracteres « est un peu roide et disproportionnee, ce « qui est AA en partie a I'inexperience , en « partie a la tentative que les Francois ont « i'liile de separer et de combiner les elements » de plusieurs caracteres, afin de n'etre pas « obliges de graver un poin^on pour chaque « caractere separe. Mais , en somme , ils sont « extraordinairement nets et beaux (but on « the whole they are exceedingly neat and « handsome.) **. » ' M. Medharst a public par la lilbogra;>bie : 1° TJi) f^oeabulaire japonais anglais; Batavia, |83«>. a° Un Vocabulaire comparaiif det Ungues vhi- ntise, toremnt et japonaise, elc ; Batavia, i835. 3" Un Diciionnaire chinoifonglais , t vol. in-8°; Balavia , i84> , eic. *• Cbinn; ils Stat* and prospecH, 18 38, p. i66. CHINE MODERNE. 321 temps que la langue chinoise. II n'y en a pas de plus rlche comine langue ecrite, et de plus pauvre comma langue /?a/7e>. Cette derniere ne consiste qu'en 489 syllabes,ou phitot monosyllabes primi- tifs (*), qui, par la variation des ac- cents ou des intonations, peut s'ele- ver a 1200. On comprend des lors a combien de combinaisons les Chinois ont dil avoir recours pour exprimer oralement toutes leurs idees ! Cette ex- treme penurie du materiel de la langue chinoise est due, sans aucun doute, a I'element graphique, oppose, des Tori- gine, a {'assimilation de toutes les pre- positions et desinences qui , dans les autres langues, se sont insensiblement adjointes aux mots primitifs dont le fond de tous les idiomes est toujours forme. Nous venons de dire que la langue parlee des Chinois ne consistait qu'en un petit nombre d'articulations mono- syllabiques, augmentees en nuances par quatre accents differents. Ces articula- tions ont ete analysees a une epoque uideterminee par les grammairiens chi- nois, qui ont consacre 36 caracteres a representer tous les sons initiaux usi- tes dans leur langue, on chaque mot ne forme qu'une emission de voix, et ou les sons finaux , dans le dialecte clas- sique de Nan-king, sont tous exprimes par des voyelles et des nasales. Ces sons initiaux sont arranges dans un ordre constant et systematique, qui a la plus grande conformite avec I'arrange- ment de I'alphabet Sanskrit. On les trouve ainsi disposes dans les Prolego- menes du grand Dictionnaire imperial de Khdna-hi, divises en neuf series, avec les denominations des organes qui servent principalemtmt a les articular, et qui sont les memes qu'en Sanskrit, c'est-a-dire : r Sons prononc;s en appuyant la langue contre les dents inferieures, ou consonnes dento-gutturales ; 2° Sons prononces du bout de la lan- gue contre les dents, ou consonnes den- tales ; 3° Sons prononces en appuyant la (•) Ce nombre peut encore 4tre beaiicoiip reduit , plusieurs d'entre eux n'etant que le meme monosyllabe, differemment prononce. 21" Livraison. (Chine modehnb.) partie superieure de la langue contre le palais, ou consonnes palatales ; 4° Sons prononces par les levres for- tement serrees, ou consonnes labiates fortes; 5° Sons prononces par les levres le- gerement fermees, ou consonnes la- biates teg^res; 6" Sons prononces de la langue con- tre les dents superieures, ou consonnes sifjlantes; 7° Sons prononces de la langue pla- cee contre les dents de cote, ou con- sonnes chidntantes ; 8° Sons prononces du gosier, ou consonnes gutturales; 9° Sons prononces partie avec la lan- gue et partie avec les dents, ou semi- iwyelles. Voici le tableau systematique de ces consonnes initiates, telles qu'elles sont classees dans les Prolegomenes du Dic- tionnaire imperial deKhang-hi, publie a Pe-king en 1716. Les lettres alphabe- tiques et les groupes par lesqueis nous avons transcrit les caracteres chinois nous ont paru ^tre ceux qui represen- taient le mieux les sons initiaux chi- nois. CONSONNES INITIALBS. Nawles Fortes. Asplrtta.Tinaet. correj- poadani 1. Derito-guttur'", ft, Ish, k, ng,i. 2. Deiilales, t, di, t, n. 3. Palatales, tch, tcli, tch, gn,'n. 4. Labiales fortes, />, ph, p, m. 5. Labiates legeres,/, /', /, w. 6. Sifflantes, ts, du, ts, ss. 7. Chuinlanles, tch, tcli, tch, ch. 8. Gutturales, 'i, h, » h. 9. Semi- voyelles, /, j,y, » » VOTELLKS FINALES. Simples , a, a, t, i, o, d, i, i. Composees, ai, ai, el, eu, ou. N.VSAI.ES FINALES. ang, ling, oung, ing, eng. an, un, oun , in, en, etc. Dans la transcription des mots chi- nois par les Europeens, la classification donnee ci-dessus a ete d'autant moins fidelement observee, que I'alphabet de la langue employee a la transcription etait moins rlohe et moins propre a re- 21 sts L'UNIVERS. pr^eiiter de« sons qui n'nvaient point (lanalouuesdansrette m^me laiij^ue. La classe aes consonnes fenues n'a pas ^te dislingufe de celle des/ortes, les chuin- lantes «Ip^ palatales ; et les nasales Mnales ont «^te representees tantdt sans a tantdt avfc un g, celtc consoime, dans tous les ens, ne dcvniu pas etre pronon- cee distinclement h Teuropeenne Ce classement des sons initiaux et finaux de la langue cWnoise fera com- prendre, dun seul coup d'oeil , Tano- malie apparcnte qui existe dans la liste des groupes phonetiques^ que nous donnoDS ei-apres, et dans iaquelle un groiipe photiefique on syllahique appa- rait plusieurs fois, conuwe representant non - seulement la consonne initiale forie et la ronsonne aspiree de la in^me classe, niais encore quelquefois des sons initiaux dc la m^nie serie , com me kh et h ; p et /, qui ont entre eux des afli- nitesde serie, independamment des af- JJnites de classes, l.a , aussi, se trouve le secret d'une foulc d'etymologies qui deviendraient inexplicables saus cette theorie des affmit^s. Les Chinois ont plusieurs articula- tions qui nous manquent, comme nous en avons qui Icur manquent egalement (telles sont h, g, d, r, a). C'est ce qui ftit que toutes les transcriptions eu- rop^nnes des mots chinois ne sont qu'appro.vimatives. On «ait d'ailleurs qu'atie langue parlee ne s'apprend bien que par \e9oreiHes, et non par les yeux; les signes, quels qu'iis soient, que Ton emploie a representer les sons paries , n'en donna nt tou jours qu'une trfe-im- parfaite idee. Neanmoins, aucune langue du monde n'est plus rebclle a la representation nlphabttique que la langue chinoise. J^es mots drs autres lanjiues elant com- poses (I'el^mcnts facilement decompo- sables en consonnes et en voyelles delerminees , peuvenl etre exactement Iranscrits par des consonnes et des vovelles ^quivalentes. II n'en est pas de m^me pour le chinois. line phrase chinoi«e, transcrile avec les lettres de I'alplwbet europeen, est presque tou- iours complelement ininleili^iWe, saos le secotn-s des earacleres origioanx ; a plus forte raison, un livre ainsi trauscrit le serait-il. C'est ce qui rendra loujours la langue chinoise d'un abord difficite pour les Kuropeens. Les Chinois avouent que, jusqu'^ la dynastie des Ilan (202 ans avant iiotre ere), leurs lettres n'nvaient pas connu le systpinc des sous radicanx , ni I'art d'en distiniiuer 30 qui sont comme les meres des autres. « Cette invention , «disent-ils, nous est venue de I'Occi- « dent (*). — « Ce sont les religieux in- « diens, (lit un autre ouvrage (**), qui « ont fait conn.titre ce systemc a notre « empire. lis voulaient nous enseigner a leurs doctrines et leurs traditions, et « c'est ce qui les engagea a etablir ces « caracteres frepresentalifs dep 36 con- « sonnes de I'alphabet Sanskrit). Leurs « traditions ne leur paraissaient pas « suffisnininent expliquees, paree qu'il « s'y trouvait souvent des mots dont «.ils ne pouvaient rendre le sens, et « dont , pour cette raison, ils voulaient « eonserver le son (en se bornant a les " transcrire). Nos pretres chinois ont « retenu ciet usage qu'ils avaient pris « des relii;ietix bouddhistes indiens. Ils « ont adopte 36 caracteres qu'ils ont « determines comme radicaux (meres)^ « en les dislinguaut en quatre classes. « Par la, on a pu rendre les sons de « tous les ohjpts de I'univers : le cri de « la griie, le sifflement du vent, le chant « du coq, I'aboiement du chien, le fra- « cas du tonnerre, le bourdonnement « du grillon; il n'y a pas jusqu'a la voix « de I'honune dont on ne puisse , avec « ce sei'ours, saisir I'articulatiou et les " trois intonations. Les pretres etran- « gers avaient, avant nous, cet art admi- « rable, qui etait reste inconnu a nos « letlr^s. Ce n'est pas que nous n'cus- « sions quebjue chose de semblable dans n nos caracteres figura/ifs du son , a dont I'iiivention rcmonte a I'auguste « Thsdng-hie. » Nous donnoiis ci apres la liste de ces caracteres chinois figvratifs du son, dontl'invention estaltribuce ;i Ths&ng- /«€(***) par I'ecrivain chinois cite. Ces (*) Preface du Dictionnaire impend de Khang-lii. (•*) Hisloire de.s Mongols daiis les Mif- laiiges asialiqttes de M, AbelftemHsal , I. II, p. 1 4 5, {*") Voy. ci-dovant, p. 280 el suiv. CHINE MODERNE. 323 caracteres ont bien quelque chose d'ana- logue avec les elements purement al- phabetiques des Iiidiens et des autres peuples; niais si ces caracteres phone- tiques, ou employes phonetiquement, suffisent pour representer les differents monosytlahes de la langue chinoise, ils ne peuvent servir a representer que tres-imparfaitement les mots pohjsyl- lahif/iies Strangers a la langue chinoise, parce que ces memes caracteres rap- pelient, non pas le simple element al- phabetique d'un mot, mais bien un mot tout entier. Aussi, quand ces ca- racteres sont employes en chinois a re- presenter le sou de mots polysyllabi- ques etrangers , il faut, a la lecture de ces noms etrangers , faire abstraction par la pensee des articulations finales de chaque caractere, pour ne lui conser- ver que sa valeur phonetique initiate. Nous rendrons ce fait plusfrappaut par un exemple. Dans leTraite conclu entre la France et la Chine le 24 octobre 1844, a Houang-pou, le nom de France est transcrit en chinois par trois carac- teres qui se prononcent individueile- ment Fou, Lan, Si; le premier caractere n'a que la valeur phonetique de /; le second conserve , par le choix heureux qui en a ete fait, sa valeur syllabique tout entiere ran (*) ; le troisieme repre- sente la syllabe finale ce. Les memes caracteres servent, selon leur position dans la phrase chinoise, a exprimer les mots France et Francais. Nous nous sommes un peu etendu sur la nature de la langue chinoise ecrite et parlee, parce que nous avons vouiii en donner une intelligence aussi exacte que possible, ce sujet etant un de ceux sur lesquels il a ete repandu le plus d'idees fausses dans le public europeen; et parce que nous avons voulu montrer que, dans cette ecri ture regardee comme hieroglyphique , il y avait (aussi bien que dans les bieroglyphes egyptiens) les elements de toute langue humaine : les elements phonetiques; et que ces elements, s'iis ne comportent pas la va- leur simple et precise des lettres al- phabetiques des langues europeennes, ils remphssent, dans Tecriturechinoise, (*) Les Chinois n'ayant pas t'arliculalion r, la remplaoent par la semi-voyelle /. les memes fouctions que les lettres al- phabetiques dans les [iremieres. On ne manquera pas de faire une grave ob- jection contre ce systeme phonetique de la langue, ou plutot de Yecriture chinoise, qui emploie, pour represen- ter les «o«« de la langue parlee, plus d'un millier de caracteres differents (*); tandis que les ecritures alphabetiques n'emploient que vingtquatre a trente- six elements au plus. On admettra dif- ficilement que ce genre d'ecriture, qui comporte un si grand appareil de signes graphiques , ne soit pas un symptome de barbaric, et ne soit en m^me temps un puissant obstacle au progres des sciences exactes. II y a quelque chose de vrai , assurement , dans ces allega- tions, mais d'un vrai relatif. Si Ton ad- met la langue chinoise parlee telle qu'elle existe, le tres- petit nombre de mots invariables qui la constitue ne pourrait 6tre represente par nos simples ele- ments alphabetiques sans donner lieu a toutes sortes de confusions. En outre, ce genre d'ecriture n'est pas un obsta- cle bien serieux au developpement des connaissances de tous genres et meme a letude des sciences exactes, si Ton s'en rapporte au P. Magaiilans, qui s'ex- prime ainsi (**) : « II est certain qu'une « personne qui etudiera avec applica- « tion et avec une bonne methode, « pourra, dans un an, fort bien eiiten- « dre et parler la langue chinoise. Et n nous voyons par experience que tous « nos peres (les missionnaires) qui tra- « vaillent a present dans cette mission (*) M. Gallery, dans son Systema phone- ticum scripturce sinicce, Macao, 184.1, en conipte io4o, qui! considere comme les ele- ments fondamentatix (fondaraenlales litlera?) de I'ecriUire chinoise, taniiis qu'ils n'eu sont que les elements accessoires (kidi clii'ng), et par ordre de date, et par ordre los^ique. M. H. Kuriz, dans son Tableau des elements vocaux de tecriturechinoise, divise en deux parties, et lithographie a Paris en 1829, a reuni 700 groupes phonetiques, tires du Diction- naire dii P. Bazile de Glemona, lesquels grou- pes determinent chacun la prononciation de 6 caracteres au mains. C'est le premier cata- logue de ce genre qui ait ele piibiie. (**) Nouvelle Relation dela Chine, conipo- see en I'an 1668, traduite et publiee en fran- cais, Paris, 1688, p. 97. 21. 334 L'UNJVERS. « soiit 3U bout de deux ans si savants « en cette langue, qu'ils confessent, ca- « techisent, priohent et composent avec « auiaiit de facilite que si c'etait leur . langue naturelle... « On ne pourra pas douter de cette « v^rit^, si Ton consldere le grand nom- « bre de livres que nos peres ont com- « poses et traduits, et composent et tra- « diiisent encore tons les jours en cette « langue. » En effet, les missionnaires ont compose ou traduit en chinois un grand nombre de livres sur toutes sortes de sujets: sur les mathematiques , la physique, Vasfronomie, etc. II y en a plus de cinq cents volumes imprimes, outre les manuscrits(*). Dans I'ecriture hieroglypbique , le nombre des signesfiffuratijs ou symbo- //g?<<'.?jemployes,comme en chinois, avec une valeur purement phonetique (le plus souvent syUabique), n'est pas aussi considerable qu'en chinois, parce que cette ecriture s'est assimile plus complelement Velement syUabique etal- phabetique que la langue chinoise. Cette (Venture a nifime 23 signes purement phonetiqves dans toutes les circons- tmces , et que Ton trouve employes de preference jusqii'a la 20" dynastie egyp- tienne, c'est-a-dire jusqu'au treizieme siet'le avant notre ere. Oe nombre s'ac- criit, dppuis la 20' dynastie, d'une ceti- tmne environ, independamment des ca- racldres syl/ablqnes {**]. Le premier travail grammatical i'ait par un granimairien ou lexicographe chinois, sur la langue chinoise, est ce- lui de Hill-chin, qui vivait, comma nous I'avons d^ja dit, dans le premier siecle de notre ere (p. 294). Son ouvrage, in- titule Choue-tvfn, que nous poss^ons, est un rlapsement methodique de tons les caracteres chinois qui existaient de son temps, dans les differentes formes koihw^n, tcheou ettchoudn (dont nous avons parie preeedemment ) , avec de braves explications. II est divise en 14 livres, chacun comprenant deux par- ties. Tons les caracteres sont ramenes a 540 radicaux ou chefs de classes {pmi), (') Id., p. loi. (**) Voir la Grammaire hieroglrfkique de fpii Cbani|)ollion, ou les liieroglyphes phone- tiqnet sont pones iiidistiuclenieut a a6o. SOUS lesquels sont ranges et expliques 9,353 caracteres differents {w^n), et 1,163 variantes ou repetitions de cer- tains caracteres sous des formes varices et des styles differents. On est surpris. en lisant ce precieux recueil de Hiu- ckin, du role immense que joue deja Velement purementp/ioneV/yMedans I'c- criture chinoise; les trois quarts au moins des caracteres recueillis par lui sont expliques comme formes d'un ele- ment qui rcpresente Videe rjenerique, element figuratif, et d'un autre ele- ment qui representele son ou le »/o^de la langue paiiee. On trouve deja dans les King et les autres livres classiques de la Chine uu assez grand usage des caracteres com- poses selon le mode kidi-chlng, c'est- a-dire qui associent a I'element generi- que de Videe Velement phonetique de ia langue parlee. C'esl ce qui est dune evidence incontestable dans la forme actuelle des caracteres chinois. Mais si on se reporte a Vancienrie forme de I'e- criture danslaquelle ces anciens livres ont etc composes, on verra que I'usage de Velement phonetique dans cette an- cienne ecriture etait beaucoup moins frequent, et que tout ce qui pouvait ^tre represente sans trop d equivoque eiaxi represejite on cense Tetre. Ainsi, nous trouvons , par exemple, dans le Y-king, ancien texte(*), le caracterede la petite Iiache ou hac/iette complele- ment figuratif; tandis que , dans la forme actuelle de I'ecriture, ia trans- cription qui en est donnee est con)po- see de I'ancien element figuratif de hache defigure, et d'un element pho- netique qui se prononce foil (n° 34 du tableau suivant, simpliGe), nom de la hac hette Ad^ns la langue parlee. II en est de meme d'une foule d'autres ca- racteres ; ce qui est une prenve peremp- toire del'ordre dans lequei les modifica- tions de I'ecriture chmoise ont en lieu, et de la preexistence ainsi que de la preeminence de I'element figuratif suv i'element phonetique. (*) Kioiian ■>., folio 6i redo. Dans Y ancien lexle , la liacliette est figuree par une liac/ie a mane fie court. — Voy. ci-apres, p. SSfi, note. CHINE MODERNE Tableau des principaux GROUPES PHONfiTIQUES de l'^riture chinoise i- A, 6, ^ 2. tin, ngan, -^r 325 3. do, ngao, M 4. Cha, '>J?;^. 5. CAa', i^ Conf^rez Tsie. 6. C/iai, Q Coaferez 5j. 7. CAan, [Ij^ J] 8. CAawj^,^^ ^ (*) 9. Chao, Q S Conf. yt/mo. 11. cAe/i, |;^ 1^ g c.y« 12. CAeott, ^ ^ g M. 13. Chi , P {^ ^" f|j ^ H j^ 36. HAi , g 3| II Conf. Kai. Zl.Han, f.t.^.^JlJJ. . ^. 38. // awgr , jt /fr Conf. A^aw^. I.f. 39. //«o, f.gJJJ|c.Aao. ^<>-^^'' iJ. 41. T/e/t, ^ Conf. A:c». 26. Chun, i^. J.^. 26. EllLH, j^ I J J J 29. Fongr, ^ ZO.Fel, $Jf.^J[;. Conf./'«. 31. y-Vn, ^ J Conf. /'en. 32. //ow, ^.§.^.f-.$. 33. Fo-, ^ Conf. Foil. 35 7E 14. t/A/', ^,-\.%.% n.Chin, )t^.|.f M.cho, 4 if 18. CAo«, ^.X.^.tJC S.§,§n. 42. //e«gr, J. ^•. f . Conf. /C«i^. 19. Chow, j^ ^ 1^. f . 43. ^.o« , j§ 1. % e. 1. II i- S 44. Hi,^ ^^ M ' l|j- 7t- ^• 20. Choua,\ 2 1 . Chcuai, % 22. Chouang, aC 23. CAoMcce. forte en fait la seule difference. 46. Hid, ^MMM ^•^*"' 47. Hia', ^ ^ ^ ^ C. Kia'. SSfi c. Km. Conf. Kou. 74. Houng, JL ^ ^- ^oung, i.M.t.^.'l.ti. L'UNIVERS 49. Hiang^^y^ M Conf. Kien. 5$. //ieo«, -jf /^^ 54. Hin , ^ |5[ Conf. Kin. hb. Hing, JBj.^'.f.^. i^-King. b%. Hio\ ^. ^. J. Conf.Ato. 57. ///o?<«, ^ ^ |[ Conf. ifiowe. 58. //ioMe»,S^ g C./fiowew. 59. //iott/jgf, [A| ^ |pj ^ C. Kioung. 81 . /eow , ^,^ 61. Hiun, ffl ffl -^- Conf. /CfM7t ~r^- tsvT' /tj • 76. Jang, i| 77. Jao, *g 78. /e , ^ Conf. /o. Conf. yeo« . 79. Je, 80. /en, ff ^ 63. //0-, :^ A 64. //oa, /[{^ II 65. ^oo', © ^ Conf. Awa. 66. Hoai, ^ 67.//oan, £^.f J.ll 68.//oany,g.5|J^£| 69. //O^, Q. ^. g. J.^. 70. Hoe\ hwe, ^ ^ 71. Hoel, 0.^.Jj|.f.| 82. yt, 83. ym, A.S.f.fJ.i.i^ 84. yfrtfir, ^ 86. /O, §.^.)i. 86. yo«, ^.^P.^. 87.yo«ert,yMen,M Conf. /mh. 88. yoMi, ^ 89. yoM«9,%.^.f.§. 90. /Mtt, ^ -^ llj. 92. AAal, ^ g f . 93. Aan, f ^ I!;. ]|. Conf. //a«. 73. //o«,,§t|.^| N" 75. La serie syUabiqiie J se pronoQce aussi, dans certaiues provinces , Y. m W. Khan, ^. ^. CHINE MODERNE. 327 16. KanQy _L 96. Khang^n Conf. Hang. 97. /fao, § ^ Conf. Hao. 98. /ffeao , -J ^ t99. /^., 4 IS. 100. iiTAe, ^^ 101. Ae«, ^ Conf. A^en. ^ 102. Aengr, 5 I; 1^ jl g. 103./L/jengi,ii « Conf. A'Aa»<;. i04. Keou, ^.^.§. 105 if/ieoM,p 106. A^, l£,.5.f.$.ft ^ Conf. /. 107. Khi, ^ 108. Aia, Jp.Pl.f.l. 109. Khia no. Kial, ji^.^.f ^ llI.yiCmn^,X.$.5.^.^.g. H'2.Khiang, hm il4. Khiao,^ 116. Aie, Ai^j, ^ ^ ^ ^ ^ g 116. AA/e, /^Aie/, f^ ^ 1^ ^ "^•^-'' ^.*.ti.i.ti. »** g ^' ^* n 3&eJC ,f AJ.±c.*i., 120. AAieoM,^ 121.ifm, f\,^,^.% 133.^/«n, U 123./Cmgr, 5. §. J. §. 124. Khing^Va 126. Aio, ^.^.8. Ue.Khio, !^/J. 127. AtoMe, {Jj ^ Conf. Kiu. nS.Khioue, ^.J|.|i. 129.Kiouen, ^. #. iZO. Khiouen, A. M ISLAioMngf, IpJ 132. AAioMW^,-:^^ 3^ 135. Amn, 4l.S 186. Khiun,y^ 138. AAo, ^.#.^.i.*§. 139. /Cot^, $.£g.t. 140. AAow, jg|.w|. 141.Ao«a, JJ.Ij'.^. 142. AAowa,^ 143. AoMai,|f j5 144. Khouai, g Si Conf. //oo<. 118. Khien, j^ ^ C. Kin et Aaw. 145. Kouan,"^ ^ J Conf. ^oan. 328 L'UNIVKRS. 172. Ltouen,]^ Coiif. Louan. 141. Khunany, [3:.^. (48. Koue, ^ ^. ^. Conf. Ho^ toO. KhoueiM .73. Le., g.t.l.ii. 174. Lo, ^ m.Lou, §.|^§.§. t77.Ao.% iJ.g 178. Louan,^ 179. Lout, lei, ^.^.^.JSJ. 180. loung,^^ 181. Lunj/oue;},^ «82.Ma, ||.||.^. 183. iWa', ^ Conf. Mo 184. Waii, W 186.Afa«, ^^ 186. ^a»^,^^^ 187. Mao, ^ ^[J ^ pg 188. M^, 5MM Conf. yp, ^/ow l-l- TV- ittf 190. itfen, P^ 191.A/en^, J.gf.p. 192.MeoM, ^^^.^. 193. Mi, ^.^. ^. 194. Miao, >1> |^ 195. Me., £g .96. Mien, £ |.j|. \97. Mieou,^ Conf. Liemi. .98. Min, S I .&l.AoMe«,H| Conf. Hoen. Ii2. Khouen, ^ ^ l53./fo«ny,I.^.&ft.M- 154. A^Aottngr, ;i3T. ^ ffi 155. /Cotto, ^. |fl Conf. /To et Wo. 187. L«t, ^ II 158. Lan, g| 159. Lang, ^ ^ 160. Lao, S.ft ^ 161. Lc, j],il_ Conf. /.i. 163. Leou, jg M '«»•"• 1j.ti.i.M.^.i. 164. t«a«f^, ^^/g^ .65. Ziao, PJ .66./^, /i., ^.|.|.|- 167. Uen, ^ ^ ^ ^ Conf. A'i«w. 168./j.o«, f gf '*«""^ tt.i.i. 170. Zino, ^ ^ ^. .71. /.to, ^.^ Conf. /.o' et /.o«. 199. 200. 201. 203. 203. 204. 205. 206. 207. 208. 209. 210. 211. 212. 213. 314. 215. 216. 217. 218. 2iy. 220. 221. 222. 223. 224. 225. C=» it* Ming, ^ Mo, Mo', a Mou, ^ Mou, ^ Moung,^ Na', pj Nai, Jj Nan, 44* Nang, S Nao, jil Net, 1^ i^eng, ^ Neou, Ngai, ^ Ngan, ^ Ngafig,^ Ngao, ^ Ngeng, ^ Ngeou,^ Conf. i>/a. 5. 0.8. _S1 M P* Conf. A'bt*. Conf. iVcii. ^ ^ 1^^. ie Conf. /o et Jou. 0. ;^ C. Niang (Voy.n-iSe, /Co.) 09 CHINE MODERNE. 329 226. Mawgr,I|l R ^ C.Liang, Jang. 227. A'iao, ^ ^ ^ C Jao, Jo. 228. Mei, wie, ^ ai ^ 230. iVi«OM, J 231.iVm(ouym),^ 232. Ning, m (Voy. AV/i^, u" aia.) 233. iVio, ^ 234. Niu, ^ 235. iVo, ^ H 236. iVo', :jg' (Voy. Joel Jou.) 2S7. Nou, ^V 238.Nouan,^ M 239. Noting,^ 240. A^M», M Conf. Jouen, Jun. Pf Conf. Ko. § § (Voy.ilC«.n<',38.) CD A.* 241.0, 242. O', 243. Pa, 244. Pha, 245. Pa\ 246. Pat, @ jfe fe Conf. Pet. 247.Phai, JS 248. Pa«, S.^.f.^. C. Fan 249. Phan, ^ 2.50. Pawgr, ^ ^ C /:/(/A et / 251 . Phang,^ 252. Pao. '^.^.ft. SM S68. Phao, ^ 356. Phe\ Q L'UINIVKRS. 276. Pho, » 277. />o% gj.f.t. 278. P/to\ » « ^ » ^. ||. 356. P.,, J.Mit.l^.^. 257. />A^, |[ §. 258. Pen, ^ 259.PAe>», ^ im.Peng, jj 261./'/i€«y,|3^^ 262. PAeott, ^ (Voy. n" a56 S?.) 263. Pi, pie, £ it. ^. ^. ^^. ^. |. 286. Sa , ^. II. Conf. Khie. Conf. Si el »S««. I. a. 279. Pom, i^.f.g.f. 280. PAoM, m 281. Pom', |^ ^|| 282. Pouan,pwan,^n C. PAan. 283. Pkouan, phwan, ^ » Cont. 284. Pojm^, ^ 285. Phoung, » Po. {^ ffi Conf. Pi«f, Pie. 287. Sai , 2b4. Phi, pie, (M6m. group, que ci-de8«u».) 288. .Van, 265. P/ao, ^ M. 266. PA/oo, ^ 267.Piei,pie, |:t.^.g!).|.tt. 268.PAtei(,pAic,J^l| S 269.Pfe«, ^Jl 270. Phien, ^ » (*) 271. Pin, ^ 272. PAm, » 273. Ping, ^.'^.^. 274. PAtn^, <^ S (*) Les guiUemets » iiidiqueiil que le ca- ractire donl ils tieunent la place est /e iffcfme que celui qui est immeaiatement «u- ."^' ^'* **"'' «""p'''y^* '<"' pour eviter des reftetitmns iautUes de caracteret. 289. iangr, ^ 290. 6oo, ^* 291. Sse, L^ 292. A'cngf, fl^ 293. Seou, ^ 294. 5t , ^ I il.E^ glil'i 295. .sr, -^ 296. 5mn^, |J 297. .Vtoo, >J^ 298. iJet,«e,U 299.J.W,«fe', ||.^\^. 300.5een, [I]. ^. f ^:. ft ||. t. CHINE IJ. 301. Sieou, 302. Sin, Ji.U^MXm 303. Sing, ^. ^. ^. 304. Siouen,^^ C. Hiouen. 30b.Siouei, § 306.5m, ^.^.l.f. QOl.Siun, %.^.^, 308.50, V>.^.f.$. 309. 5q', %.%. 310. 5oM, ^.J. 311.5o?<% §.^. 312. 5oMa/i, ^ 313. 5o?a, $.^.5. 3l4.5oMwgr, ^. j^. 315. 5tt/i, f^. 316. Ta, J^ 317. Tha\ g.gj.^^.g. 318. rai, l\;.p.$.'fp. 319. Thai, X.^.% 320. ran, ^. H. ^. 321. Than, ^.^.^.5 § B 322. raiig, g /^^ tfe ;si5 CIZ) ^ 323. ryi«/jgr,|^.^.g.j^.S. 324. 7 ao, 7) Ju- ^• 325. yViao, |^.^.Q.^. 326. Tt/m, "^.^.fi.^. 327. rcAa, ^. ^. ^. §. ^. ^. t. MODERNE. W» 328. Tc/ja', [, g ^ 329. Tc^flt, S § 330. Tchan,i^ 331. Tch-an,^ 332.Tchang,^ 333.Tch:ang,j^^ ^. ^. ^.^l.*^. 334.7cA«o,)It.g.|.|.t S36. Tch'ao^ ^ ^. 336. Tche, T^,^. 337. rcA'e , » » 339. rcAen, |5 J^ )g g. C. TAaw. EH tiS 340. jTcA'e/^^.Jg. 341. rcAeoM,^ J]. ^.)ij.§. 342. Tch'eou^^ ^. ^. M ^ 343. Tc/^^, it.K.n.ifi:H3^ 344. Tch'i, ^^.Jl.f.f. 345. rcAi', y^ 346. Tch'i% Jf.^'.fl^. 347. Tchin, %.^.^MM 348. ycA'iw,JL. ^. 349.rcAi/iJ?,j£.]^.^.§.i[. o 3: ^zs •"* 360. Tch'ing,^^ ^. Q^. 351. rcAo', ^.^.iC. 352. rc^'o', ^ 353. Tchou, J.^.^. Bfeiif 354. 355. 856. 857. 358. 359. 360. 361. 362. 363. 364. 365. 366. 367. 368. 369. 370. 371. 372. 373. 374. 375. 376. 377. 378. 879. 380 Tchoua , ^. J@. Tchouai, K. H-M Tcnouang, yi tjX gf M. Tch'ouang, jg g, ^ rcA-ow«», {({Jll.f. Tch'oui, » J> Tchoung, fp ^ ^ ^ Tch'un^ '■*'■ IJ. "■• ^Sl. 7-Aiao, Jl ^ "«•*■*. iS. til. L'UNIVERS. 381. 382. 383. 384. 385. 386. 387. 38^. 389. 390. 391. 392. 393. 394. 395. 396. 397. 398. 399. 400. 401. 402. 403. 404. 405. 406. 407. Thiel, thie, M Tien. iS.E. ft. Thing, J.^jI. ^^«' tti- Tho\ ^ ^ C. c'/ii, Choui Ton, S.^.]^. Thou', ^ r-t '-'^ LfT '^ tit 1^4 rAotti, Jl ^ Thouvg,^_ ^ J 77iM« , » » Thsai , » » Thsang, » » » CHINE MODERNE. IZ92 408. 409. 410. 411. 412. 413. 414. 41.5. 416. 417. 418. 419. 420. 421. 422. 423. 424. 425. 426. 427. 428. 429, 430 i Thsao, W @ Thse. )^.^.« /5? ^ ^ Jseng, |h, g.^^. j'hseng,Q^_ Tseou, ^ Thseoii, » Thseu, ^ •'•«. ^1 Thsi, J. §. ^•^•^'' tit at ^/*«N h f.f.i. c-^^^- r.sj«n^,^^ 3^ C.Tksang. Thsiang, ^ § C. rsawgr. Thsiao, » » w Tsieijsie, ^. g . Thslen, » » ^i Thsieou,yi » » 433. Thsin, ^^^ 434. rsingr, ^ ^ 4iS.Thsing,^ » 41- ^P» 4X5 436.7'sjV, g,||. g. 437. rsio?n, X.fi.g 468. 469. 470. 471 472 473. 474. 475 476. 477. 478. 479. 480. ) 481. M», jf.^ij.sji.t 4f5 ;tli''- 482. ym• CTD- I,es groupes phonetiques chinois n'e- tant limites que par I'lisage qii'en ont fait les ocrivains indigenes, pI non par la nature nieme tie oes signes represen- tatifs de la parole, on |)liit6t de la lan- giie parlee ( puisqiie chaque signe d'idee peutdevenir signe de sort), nousn'avons pas eii la pretention de les coniprendre tons dans le tableau precedent; niais on y trouvera tous les grouper phoneti- ques les plus nsuelsC*), et qui s'asso- cient au plus grand nombre de rudi- caux, ou types generiques d'idees. On y trouvera aussi la plus granile partie des autres. Nous aurions desire faire un travail pour djviser ces groiipes pho- netiques en deux classes. Dans la pre- miere, nous aurions place tous ceux dont Temploi conime groupe phon^- tique remonte aux premiers temps ou au premier Sge , comme nous I'avons (*) Nous avions, dans notre manuscrit, marque d'nn asterisqiie * les groupes plione- tiques de celte caleporie , pour les signaler plus specialement a rattenlion du lerUin ; mais cetle disposition n'a pu s'executer a la typographic. CHINE MODERNE. 33S rappele, de i'ecriture chinoise(*); dans la seco)ide classe, nous aiirions plac6 les groupes phonetiques des temps mo- dernes, ou la necessite de reproduire en eiiinois des nouis etrangers, et (i'au- tres causes, en ont fait beaucoup aug- menter le nombre. Mais nous avons pense que ce travail ne presentait pas assez d'utilit^ h nos lecteurs pour le publier ici. Le tableau precedent presents aussi la liste de tous les mots, ou plutot de toutes les articulations de la langiie clii- noise. Cette liste n'est pas considera- ble, puisqu'il n'y en a que 489 : et si Ton supprimait les variantes du meme mot, qui ne different que parce que la prononciation en est aspiree , ce nom- bre serait encore beaucoup reduit. II est vrai que par les intonations qu'on leur donne en les prononcant, intona- tions qui peuvent se repfesenter par nos quatre accents " ' ' " , ce nombre pent etre porte a 1200. Mais ce fonds de la iangue parlee chinoise est toujours excessivement pauvre, et le nombre considerable des homonymes rend tres- difficile, surlout pour des etrangers , I'intelligence de cette Iangue. Les Chinois, pour reniedier a ce grave inconvenient, ont eu recours a toutes sortes de combinaisons et d'associa- tions de mots, que nous ne croyons ni utile ni opportun d'ex poser ici. II y a en Chine , comme d'ailleurs (*) Qiiand on etmlie les anciens monu- ments grapJii([«ns de la (^liine, tels que les inscriptions gravees sur des vases qui lenion- tent aux premiefcs dynasties (voy. notre F'' vol., p. 902, et les planches 38 a 44 qui i'aecoinpatjnent) , on est surpris de ne ren- conlrer dans ces inscriptions que pen et ineme point de cararieres ideo-plionethirtes; ce sent tous des caracleres .//°-(/m.7/i on cen- ses tels. Ce n'est qn'a I'epoque on Ton a commence a avoir un fonds de signes suffi- sants pour emre des livres, que Ton Irouve I'lisage des groupes phonetiques. Sans celte utile, qnoiqne incomplete invention, I'ecri- ture des Ohinois, de meme que I'ecriture hieroglypliique des ^gyptiens, seraient res- tees a Velat d'enfance, comme les qnipos des Peruviens; et proljablement les civilisations des deux premiers peuples n'auvaient pas |nis un plus grand developpement que ce'ie du troisieiHe. dans tous les pays ^tendus qui parlent la meme Iangue, une grande diversity de prononciation. Chaque province a la sienne; mais celles des provinces rneri- dionales sont peut-fitre celles qui dif- ferent le plus de la prononciation clas- sique de Nnn-king, I'aneienne metro- pole, qui fait encore autorite dans les livres et dans la Iangue offiftielle des fonctionnaires publics , ainsi qu'a la cour. Les principaux dialectc-s connus sont ceux de Canton et dti Fo-hien. Voici quelques exemples de <;ette diver- site de prononciation du nveme mot ou caract^re dans differentes provinces : Signification Prono nc iation ties mots, mandarinique. tte Cnnton. de Fn-kieat Un, ^, yxit, it. Deux, et'ilh, i, ji, no. Trois, sdn, .sdm, ssam. Quatre, sue, sz% sek. Cinq, oil, "ng, ngou. Six, loU, louk, liok. Sept, thsi, ts'at, tchit. Huit, pa', pdt, pat'. Neuf, kiecAi, kao, 'kiu. Dix, cfii, chap, sip. Le caractfere general et caracteris- tique des di.'ilectps des provinces meri- dionales de Ja Chine, c'est que la piu- part dps mots ou articulations, au lieu de se terminer par des voyeUes ou des nasaleSy commo dans les provinces du nord et dans la prononciation manda- rinique ('*), se terminent par une ^-o??- sonne teniie, surtout dans les mots qui sont affectes de I'accent bref \ comme on le voit pour les nonis de nombre reproduits ci-dessus. A Pe-khnj , ou change souvent le k devant Vi en dz, le s en ch, et on prononce le h comme kh (**). (*) Ou koudn hod, {angue des mngistrats, c'esl-a-dire Iangue offirielle , que tous les mandarins on fonctionnaires publics doivent ecrire ou parler correctement pour remplir leurs fonctions. (**) Cette diversite des dialectes d'une me- me Iangue n'est pas anssi indifferente qu'on pourrait le supposer au pretnier ahord. Leur connaissance suffit souvent pour d^couvrir des etymologies, et, par suite, des faits his- toriques qui, sans elle, seraient restesajamais ignores. 386 L'UNIVERS. yotions de grammaire chinoise. - 1 Le svsteme de la loiigue et de I ecri- ture chinoises differe de tous les a litres sv«i^me8 de langne connus , m«me de la langiie hierofjlvpliique des anciens [;:!iV|)liens , en «*! sens que chaquc ca- raotere, representant r.n mot de la lan- g(ie, reste aussi inmrinble , quelle que rante siecles sufHt grandement pour etablir entre les monuments litteraires de la premiere epoque et ceux de notre temps une difference' marquee. Toute- fois, cette difference n'est pas nnssi grande que le laps de temps ecoul6 entre eux pourrait le faire supposer. Les caracteres employes par les pre- soit'sa place dans la phrase ou le dis- miers legislateurs chinois lesont encore cours que si des I'orlgine, il avail et6 de nos jours, avec la mdme forme qui coule'diins un moule d'airain. Au pre- leur a ete donnee il y a plus de deux mier aborJ , on croirait , en jetant les mille ans. On y en a seuiementajoute de ■ .■ • nouveaux. La difference subsiste prin- cipalement dans le style, qui est tres- concis dans les anciens ouvrages, tandis que, dans les ecrits modernes, la pens(^e est revalue d'une forme moins abrupte et plus chargee d'ornements. Dans le style ancien la forme est souvent sen- tencieuse, les oerben auxiliaires ou af- firmatifs sont la plupart du temps nous- entendus; I'usage des mots indes est tres-restreint. C'est le contraire dans le style moderne. Un autre caractere du style moderne est I'emploi des ex- pre.ssionx composees, qui sont encore rares dans le style ancien. Cette diffe- rence des deux styles a porte (juelques yeux sur une page d'ecriture chmoise, voir une de ces anciennes constructions etrusques formees de blocs de pierres brutes qui ne sont que juxta-posees, sans qu'il y ait entre elles un lien appa- rent. Mais, en I'observant de plus pres, on trouve que I'intelligence qui preside a toutes les oeuvres de I'bomme ne lui a pas fait defaut. '2. L'usage de I'ecriture, comme nous I'avons vu precedemment ( p. 278 et suiv.), remonte, en Chine, h 2,700 ans avant notre ere (*). Les monuments ecrits chinois que nous possedons main- tenant ne remontent (sauf «n certain nombre de fragments qu'il est assez facile de dislingwer) qu'a I'epoque du regne des empereurs iao, Chun et Yu, les trois principaux legislateurs de la Chine, environ 2,200 ans avant notre ere (**). Mais cette antiquite de qua- (*) On possede mainlenant des moniinienis hieroglypbiqiies qui remontent jusqn'a la \* dynastie egyplienne; re qui |)lacprait ('usage de Vecrilure en Kgyple 5,ooo ans avani notre ere , scion les anciens chrono- logbtes. (**) On pourrait nieme ne faire remonler la redaction actuellc des plus anciens livres chinois qu'a I'epoque du philosophc Confu- cius ; encore n'avoiis-iious pas les anciens livres chinois imprimes avec les caracteres antiques qui etaient alors en usage. II est vrai que les savants chinois onl , a diverses epoqnes, cherche a reconsiiluer leurs anciens livres dans la forme que les caracteres de I'ecriture possedaient a I'epoque de la re- daction de leur i;raiid philosophe. On pos- Mde a la Bibliotlieque nationale un exem- plaire tres-l>eau des Cinq King, sans com- meiitaire , imprime en caracteres antiques la tchouan. Nous possedons nous-nacme un etemplaiiv du Y-king, ou I.ivre ties Trans- formations, le plus ancien de tons les livres chinois', tel qu'il fut retrouve sous les Han , en anciens raracleres koii-wen, ou dc la haute antiquite' (voy. p. 28^), avec une trans- cription iiiterlineaire en ecritnre moderne el beaucoup de cominentaires. Cet exeinplaire, unique en Europe, et peut-etre nieme le seiil qui exisle dans le nionde, a ele imprime ou du mo'xns puhtie la 24* annee wen-li (iSptJ de noire ere), ainsi que le porte une inscrip- tion chinoise inanuscrite placee en tele. (;et exemplaiie precieux est un j)eu endoinniage par le temps, mais il est encore d'uu prix incalculable pour I'eiude de la langtie el de I'arrheologie chinoises. C'est de cette edition du Y-king, en caracteres A^oH-tvt'rt, que nous avoiis tire les caracteres de forme ancienne figurative, inseres pages ago et suivantes de ce volume. Nous possedons encore un exemplaire plus ancien d'un Dictionnaire , par ordre de ma- tieres, des anciens caracteres chinois. Ce dic- tionnaire , intitule Loii-chou-thsing-wen , c'esl-a-dire : Collection quinlessentielle des six classes de caracteres, fut public I'an i54o de noire ere. Os deux ouvrages tres-precieux sont d'un secours inappreciable pour I'etude de r.n- cheologie el de I'ancienno ecrilure chiuaise. CHINE MODERNE. 337 sinologues europeens , entre autres le P. Premare, dans sa Notitia linguae si- nicai{*), et M. Abel Remusat , dans ses Elements de la Grammaire chi- noise (**) , a donner une grammaire pour chacun de ces difterents styles. Nous ne pouvons que renvoyer a ces deux excellents ouvrages les personnes qui desireraient faire une etude speciale de la langue chinoise. K'Dans^ I'antiquite, dit M. Abel R^- « musat {Elements de la Grammaire « chinoise, § 64) , I'ecriture ne servant « encore qu'a des usages bornes, ou se « plaisait a sous-entendre le verbe ou « ie sujet des propositions, et a laisser « aux mots toute leur latitude d'accep- « tion ; on marquait rarement leurs rap- « ports; on exprimait ses idees avec le « moins de mots possible; on ecrivait « isolement chaque proposition, sans la « lier a celles qui la precedaient ou la « suivaient. De la resultait ce style sen- « tencieux , vague , concis et morcele , « qu'on remarque dans les anciens mo- « numents, et qu'on nomme, a cause « de cela. Style antique {koii-w^n). « Ce style, ayant bientot cesse d'etre « en rapport avec les besoins de la so- « ciete, il s'y est introduit divers chan- « gements, qui, tous, ont pour but de « rendre la langue claire, precise, et « susceptible de formes varices. Pour « qu'on pilt s'entendre en parlant, on « a substitue des mots composes aux « ternies simples, qui pretaient a trop « d'equivoques, a cause des mots homo- « phones. L'emploi plus frequent des « pronoms a permis de determiner le « sens substantif ou verbal des mots ; « I'usage de particides nouvelles, ou n autrement employees, a marque net- « tenient leurs rapports, et divers pro- « cedes phraseologiques ont fait varier « la coupe et I'enchainement des pro- positions. » (*) Notitia linguee siniccB, imprimee a Ma- lacca, en i83r, mais coinposee en Chine et envoyee en Europe des 1728; un vol. in-4°. Le manuscrit original du P. Premare, mis- sionnaire francais, est a la Bibliotheque na- tionale de Paris, ainsi que plusieurs autres manuscrits iuedits du meme niissionnaire. (**) Elements de la Grammaire chinoise , par M. Abel Remusat; Paiis, 1822, un vol. in-8<>. 22* Lioraison. (Chine modebne.) 3. En these geuerale, un mot ou ca- ractere, de la premiere categorie, pent tour a tour jouer le role de subslantif, adjectifet verbe. Quand un caractere qui n'a pas ordinairement I'acceptioa de verbe, la prend dans une phrase, il est alors generalemeht affecte de I'ac- cent appele khiu ', I'accent du 7nou- vement (*). Ainsi le mot wang, lu avec I'accent ", ou de repos, signiliera roi; avec Taccent ', ou du mouvement, il signiflera gouverner (**). 4. Les caracteres chinois etant tou- jours absolument invai-iables, ileAt ete difficile, pour ne pas dire impossible, de decouvrir le vrai sens d'une phrase chinoise, si aucun principe n'avait pre- side, des rorigine,a sa construction. Ce principe, c'est celui de la position, qui est en quelque sorte mathematique , comme celle des chiffres. C'est cette position du caractere dans la phrase qui determine principalementsa valeur grammaticale (***) , comme cette po- sition determine aussi celle des chif- fres. 5. Les grammairiens chinois ont dasse tous les mots de leur langue en deux grandes categories : I'une qui com- prend tous ceux qui ont par eux-m^- mes , et independamment de la place qu'ils occupent dans le discours, une signification generale propre, comme les mots que nous appelons noms, ad- jectifs,verbes; les mots de cette grande categorie sont nommes par eux mots pleins {chi-tseu) ; I'autre de ces cate- gories comprend tous les mots qui, par eux-m^mes, n'ont aucune signification propre , mais qui, servant de liens aux (*) Cette regie est donnee dans le Diction- naire imperial de Kliang-hi, sub voce chdng {haitt, moiiler), i^' Radical. (**) Celle faculle d'etre tour a tour nom substantif et verhe n'est pas seulement pro- pre a la langue chinoise. Love, en anglais, signifie amour, et to love, aimer. (***) L'esprit europeen cullive , qui est habitue aux categories, aux desinences et aux formes grammalicales des langues aipha- betiques, s'accoutume difficilement a cette expression des rapports grammaticaux de la langue chinoise, expression qui est plulot dans la pensee que dans la Jorme exterieure de I'ecriture. 22 3S8 L'UNIVERS. premiers, marquent les rapports q\x i\s ont entre eux , et leiir servent d auxi- liaires; leg mots de cctte categoric sont iiommes mots vides (hiii-tseu), par op- position aujc premiers, ou termes auxt- liaires {tsou-tseH). . . 6. La langue et I'ecriture chmoises ewnt donn^es, trouver le systeme ou les lois grammyticales qui ont M pre- sider aux rapports des mots entre eux, dans le but d'exprimer clairement les idees et les conceptions de I'esprit. Pour rteoudre ce probleme, il ne faut pas appliquer a la langue chinoise les lormules des langues alphabetiques; ce serait s'ecarter considerablement de la solution. Un esprit eminent, Guillaume de Humboldt, a dit: « Les grammaires des autres langues <• ont une partie ^tymolofjique et une « partie sytUactiqne; ia grammaire chi- .< noise ne connait que cette derniere. De « la decoulent les lois et les particulari- <. tes de la pbraseologie chinoise ; et des « qu'on se place sur le terrain des ca- « legories grammaticales, on altere le « caract^re^ original des phrases chi- « noises (*). » Cela est parfaitement vrai,si Ton veut bien comprendre le genie de la langue chinoise; mais si Ton veut se borner a V interpreter, Vappareil des categories grammaticales est un instrument qui peut aider considerablement I'esprit accoutume des son enfance a s'en ser- vir. C'est ce qui explique pourquoi tous les sinologues qui ont public des gram- maires chinoises ont suivi plus ou moins la melhode des grammairiens europ^ens (**). (*) Letlre a M. Abel Reniusat sur'la na- ture des formes grammaticales en general et sur le genie de la langue chinoise en parti- rulier, par M. G. de Humboldt. Paris, 1827. (**) Nous croyons devoir donner ici la lisle, par ordre de dales , des Grammaires et des Dictionnaires chinois publics par des Euro- l»eens : OHAMMAIRES. 1. Arte de la lengua mandarina ; compuesto per el M. R. P. Francisco Varo. Imprcso en Canton, 1703. — Outrage excessivemenl rare et dont on •e connait que tres-peu d'exemplaires en Eu- rope. Les caracteres chinois n'y sont pas re- produiU, 7. Nous avons dit que les grammai- riens chinois avaient classe tous les ca- ■>. Museum Sinicum , etc. , opera Th. Sigefr. Kayeri. Petropol., 1750. i. Meditaliones Sinicae; opera Sleph. Four- mont. Lnleliie Parisioruni, 1737, in-fol. 4. Lingue Sinaruni mandarinics hierogly- phica: Orammatica duplex. Par le nionie , 1 742, in-fol. — M. Abel Reniusat a dit de Fourroont (preface des tUments de grammaire chinoise, p. xii) : « On pent dire que Fouimout est un « des autcurs . 9. Nolitia linguae Sinics; auctore P. Pre- mare. Malacca, i83r, in-4». Nola. Cet excellent ouvrage, compose par le savant missionnaire francais Premare, avail ele envoye de Chine en F'rance des 1728 , et il etail resle inedit jtisqu'en i83t , epoque ou il fut imprime a Malacca par les soins et aux frais , dit-on , de lord Kingsliorough. — Une traduction anglaise, faite yar M. J. (>. Bridgman, rauteur de la Chinese cltrestoma- ihy in the Canton dialect ( Macao , 18+1, in-4°), a etercrcmmenl publiee a Canton, par les soius de M. S. W. Williams , lui-mcme habile et consciencieux sinologue, sous ce litre : The Nolilia Ungiice Sinica: uf Premare. Translated into english by J. G. Bridgman. Canton, 1847, pe'it in-8° de 37.8 pages. C'est une des publications les plus utiles qu'on ail pu faire pour le progres des eludes chinoises. 10. Easy lessdns in Chinese, or progressive exercises, to facilitate the study of that language, specially adopted to the Canton dialect; by S. W. Williams. Macao, 184a, in-8''. — Cet ouvrage , sans etre une grammaiie proprement dite, est assuremenl un de ceux qui peuvent facililer le plus rapidement par la pratique 1 etude de la langue chinoise. It. Notices on Chinese grammar"; by Philosi- nensis. Batavia, 1842, in-S"; imprime par la lithographic. — C'est sous ce nom de Philosinensis qii. le R. M. Medhursl a public plusieurs ou- vrages. Cependant quelques sinologues attn- CHINE MODERNE, racleres de leur laugue en deux gran- des categories, c'est-a-dire , en mots bueut relte esquisse de giammaire a M. Giitz- laff; W. Medliurst n'en serait que I'edi- teur. la. The Chiuese speaker; or Extraits from works writleu in the mandarin language, as spoken at Peking, compiled for the use of students; by Robert Thorn, Part. I. I\'i/ig-Po, Chine, i846. 1 3. Manuel pratique de la langue chinoise vulgaire ; par Louis Rochet. Paris , Mar- cellin Legrand, editeur, 1846. — Ces deux derniers ouvrages ont ete im- primes la mcme aunee, I'un en Chine, I'autre a Paris, avec les caracteres chinois decom- nosables , dout it a ete question precedem- naent (p. 3 19 et Sao). UICTIONNAIRES. 1 . Dictionnaire diinois , francais et latin (par le P. Basile de Gleniona); public par M. de Guigiies. Paris, I. -I., i8r3, in-fol. 2. A Dictiounary of the Chinese language, in thre parts; by R. Morrison. 6 vol. in-40, Macao, i8i3-i825. 3. Vocabulary of the Canton dialect; par le nienie. Macao, 1828, i vol. in-S". 4. Diccionario china-portuguez, e portuguez- chiua ; por J. A. Gonijalves. Macao, i83i- i833, 2 vol. petit in-4"'. Du mime P. Goncalves : \ Vorabularium Latino -Sinicum. Macao, 1 836, I vol. in-8". fi. Lexicon manuale- Latino -Sinicum. Ma- cao, 1839, I vol. in -1 8. 7. Lexicon magnum Latino-Sinicum. Macao, 1 84 1, I vol. in-4''. 8. Systema phoneticum scripturae Sinicae ; auctore J. M, Callcry. Macao, 1841, i vol. gr. in-S". — L'ouvrage de M. Callery , qui est un Vocabulaire des caracteres chinois les plus usuels, ranges dans un ordie particulier a I'auteur, montre d'tme maniere frappante le role que jouent les groupes plionetiques dans le systeme de I'ecrilure chinoise. Ces groupes plionetiques elant places dans ce f^ocabulaire, ainsi que dans le Dictioimaire tonique de M. Morrison, comme autant de types gene- riques (|ui s'assimilent les divers raaicaux pour prendre autant de significations diffe- rentes , devienneut ainsi V element dominant de la langue et de I'ecriture chinoises , taudis qu'ils n'en soat reelleaient que Velement se- condaire. 9. Dictionnaire encyclopedique de ia latigue pleiiu et en mots vides (S 6) ; uiie sub- division a ete faite par eiix a la pre- miere ciasse : les caracteres qui ne font que nommer ou qualifier les objets {noms suhstantifs et adjectifs) ont ete appeles mots marts {sse tseu) ; ceux qui exprinient la maniere d'etre des objets ont ete noinmes mots vivants {sdng- tseu) ou termes de mouvement {ho- tseu). Toutes ces especes de caracteres sont aussi invariables les unes que les autres. 8. La langue chinoise etant par sa nature depourvue des inflexions et de- sinences qui caracterisent la pltipart des autres langues du nionde, il a fallu, comme dans les noinbres, trouver un principe qui y suppledt pour que la phrase chinoise frtt rendue intelligible. Ce principe, c'est le principe de posi- tion. 9. « En general , dans toute phrase chinoise 011 il n'y a rien de sous-en- tendu, a dit M. Abel Remusat {Gram- maire chinoise, p. 166), les elements dont elle se compose sont arranges de cette maniere : le sujet, le veibe , le complement direct, le complement in- direct. Les expressions modificalives pre- cedent celles auxquelles elles s'appli- quent ; ainsi I'adjectif se met avant le substantif, sujet ou complement (*) ; le substantif regi avant le mot qui le re- git (**); I'adverbe avant le verbe (***); la proposition incidente , circonstan- cielle, hypothetique, avant la proposi- tion a laqueile elle se rattache par un chinoise; par le mSme. T. I*""", f* parlio. Macao et Paris, i845. 10. Chinese and English Dictionary; by W. H. Medhurst. Batavia , 2 vol. in-8" , lithographies. 11. An English an Chinese vocabulary; by S. W. Williams. Macao, 1844, in-S". 12. Dictionary of the Hokkeen (Fo-Kien) dialect; by W. H. Medhurst. Macao, i83i. (*) Ex. : Citing jin, sUnctus homo, un saint homme. (**) Mm li, populus vis, la force du pen- pie. (***) Cliu min tseu Idi, plures populi filio- rum-more venerunt, les peuples accouriirent aupres de I'Empereur , comme des fils pr^s de leur pere. (Livre des Vers.) 22. 340 I/UNIVERS. adjectif conjonctif, ou par iine conjonc- tion exprimee on soiis-enteridue(*). n La position relative des mots ct des phrases, determm^e de cette maniere, supplee souvent a tout autre signe dont Tobjet serait de niarquer leur depen- dance mutuelle, leur nature adjective ou adverbiale, positive ou coridition- nelle, etc. « Si le sujet est sous-entendu , c'est que c'est un pronom personnel, ou qu'il a ete exprime plus haut, et que le in^nie substantif qui est omis se trouve dans la phrase precedente, dans la in^me qualite de sujet, et non dans une autre. «' Si le verbe manque, c'est que c'est ie Derbe suhtanlij (**) , ou tout autre aise a supplcer, ou qui a deja trouve place dans les phrases precedentes avec un sujet ou ua complement diffe- rents. « Si plusieurs substantifs sesuivent, ou bien ils sont en construction I'un avec I'autre, ou bien ils forment une enumeration , ou enfin ce sont des &y- nonymes qui s'expliquent et se deter- minent les uns les autres (***■>. (') Soui yeou khi wei , keou woii klii te , poii kail ISO U yd yda , elsi habeaiit illorum (|)rineipum) dignitatem, si non ilioruni vir- tutem , lie audeant facere ritus miisicatnque : qtielque certains princes occiipent le trune des anciens el glorieux emperenrs, s'ils it' en pos- scdent pas les verlus, ils ne doivent pas oser prescrire de iwuvelles ceremonies et une nou- velle musique. (**) Dans les anciens livres des moralistes et des philosophcs chinois, la suppression du verhe siibsianlif arfirmatif est tres-frequenle : Kiuii-tseh tcfii Too; fee eulli yen, sapient is via, ampla et obscura ; la voie du sage [est] ample et cachee! (Tchoung-young.) (***) En cbiuois, comme d'ailleurs dans les autres langues , il y a des caracleres qui out souvent differentcs acceptions, sur lesquclles Tesprit llotterait incertain , si on ne leur ad- joignait dans la phrase «in autre caractere qui delerinioe son acception. Ainsi , tao sii^nifie conduire, vote, doctrine, etc. ; s'il est adjoint :i lou, cfiemin, de cette maniere : tdo-lon, il lie puurra signifier que -voie , chemin. C'est la un des moyens frequents en chinois, sur- lout dans le langage parle qui est si pauvre en vocables differents, d evitcr les obscurites trop giaudes et les equivoques nombreuses OU ducourt. « Si Ton trouve plusieurs verbes de suite, qui ne soient pas synonyines, ni employes comme auxiliaires, c'est que les premiers doivent etre pris comme adverbes, on comme noms verbaux, su- jets de ceux qui suivent (*), ou ceux-ci comme noms verbaux complements de ceux qui precedent (**). « Ce peu de mots est le resume le plus precis qu'on piiisse faire de toute la phraseologie chinoise. » Kous donnons ici, comme exemple, I'analyse d'une phrase chinoise. Cette analyse fera mieux comprendre a nos lecteurs les principes qui precedent. 9 10 II 12 13 14 15 IG wi yeou pen mod; sse yioii tctioting ctii; tela sso sie'n heuh; tseii kin Tdo t. LiUeralement : Res liabent radices, ra- mosq'Jie,* actiones habent finem, priii- cipium^we; cognosce id-quod prius, posterius^?/e; tunc prope-accedes viaiB (particula fuialis) . {Td-hio.) 1. Le premier caractere de i^auche (nous avons dispose les caracteres de la phrase chinoise selon I'ordre europeen) est un substantif indei'ini , sujet de la premiere phrase, et qui si2;nifie chose, objet tombant sous les sens. II petit fitre pris au singulier ou au pluriel; aucun signe particulier, si ce n'est le sens de la phrase, ne portant le lecteur a lui donner de preference I'un ou I'au- tre 7iombre. II en est de meme du verbe qui suit. Ce premier caractere est compose du radical 93 {nieoH, boeuf) et du groupe phonetique wi (n° 465). 2. Le second caractere est le verbe substantif le plus usite eu chinois. II represente tous les modes , toutes les personnes et tous les temps, sans au- cune espece d'inflexion; c'est aussi le (*) Sse seng yeoii ming , mori, vivere, oti mors, vita, babent fatuni ; vivre et mourir, ou la vie et la mart, sont regies par la loi celeste. (**) Kill ji'n sido tied, niandueare homi- num irrisionis verba; etre I'objet des raille- ries des autres. CHINE MODERNE. 341 sens et la disposition de la phrase qui f)orleut I'esprit a lui attribuer le mode^ a personne et le temps qui lui con- viennent le inieux. II est compose du radical 74 {tjouei, lune) et du signe abrege de la main (R. 29) qui se prononce yeou (V. n°480). 3. 4. Ces deux caracteres ont le m^me radical (75, moii, arbre). Seulement, pour le troisieme, unebarre liorizoutale a sa base indique que c'est la partie de I'arbre qui comprend les racines; et pour le quatrieme, une barre egalement horizontaie a la partie superieure in- dique que c'est la portion de i'arbre qui comprend les branches. C'est la le sens propre et primitif. Pris au ^/?g'wre', le troisieme signifie base fondamentale, caiisPy origine; et le quatrieme signifle effets., consequence d'unpriticipe. Ces deux caracteres sont le regime direct du verbe qui les precede. 5. Ce caractere, dont la composition est remarquable, est un substantif in- defini , sujet de la seconde phrase , et qui signifie ordinairement aussi chose, action., mais dans I'ordre moral. II etait compose primitivement du signe main (R. 29) et du signe parole (R. 149), dont il conserve les traces. 6. Memes observations qu'au n° 2. 7. 8. Ces deux caracteres sont le re- gime ou complement direct du verbe qui les precede. Le premier, qui est compose du radical 120 {mi., fil de sole) et du groupe phonetique tchoUng (n° 364), signifie an propre : bout defil, extremite, et au figure '.Jin. Le deuxie- me, qui est compose du radical 38 {niii, femme) et du groupe phonetique tchi (n" 343) , signifie au propre : principe de la femme. et au figure : commence- ment , principe d'une chose. Ces deux caracteres sont en opposition dans cette phrase, comme les caracteres 3 et 4 le sont dans la premiere. On remarquera aussi que ces deux premieres phrases offrent un contraste et un paralielisme parfaits , la premiere s'appliquant aux choses de Yordre physique, et la se- conde aux choses de I'orrfre moral. C'est la un des caracteres frequents du style antique. Le philosoplie chinois, apres avoir pose en principe que toute chose dans Yordre physique et dans Yordre mo- ral a un commencement et une^n, en tire la consequence exprimee dans la double phrase suivante qui balance les deux precedentes. La premiere des deux dernieres phra- ses pent etre, ou une proposition hypo- thetique rattachee a la proposition principale par la conjonction tseu (tunc), ou une proposition affirmative construite avec un nom verbal a I'etat abstrait ou a Yinfinitif, dont la seconde serait le complement; ou enfin une phrase commencant par un verbe a Yimperatif, comine dans notre traduc- tion latine. Dans les trois cas, le sens sera a pen pres le meme. Dans le pre- mier, on lira : Si I'on connail ce qui precede etce qui suit (ou la cause et les ef/ets , le principe et les conse- que7ices), alors on approchera bien pres de la voie droife, de la raison su- perieure; dans le second cas, on lira: Connaitre ce quiprecede et ce qui suit, c'est approcher tres-pres de la voie droife, de la raison supreme ; dans le troisieme cas, on lira : Connaissez les causes et les effets , et alors vous ar- riverez a la raison supreme. II n'y a , dans les deux dernieres phrases chinoises, aucun signe, aucune inflexion grammaticale qui oblige de les traduire d'une de ces facons plutot que de I'autre ; c'est la contexture du dis- cours, le genre de diction qui fait choi- sir un mode plutot que I'autre. Comme les deux premieres phrases ont une forme didactique qui comporte le sens le plus general, le plus absolu, les deux dernieres doivent avoir le m^me carac- tere. 9. Dans ce cas, le neuvieme carac- tere sera un nom verbal au mode que nous appelons infinitif, « connaitre. » Ce caractere appartient, par sa compo- sition , a la troisieme classe , que Ton nonmie a idees combinees (voy . ci-devant p. 292). Eneffet, il est compose du radical 111 {Ichi, fleche) et du radical 30 {kheou, bouche); c'est la parole de verite, la science qui peuetre comme une fleche. 10. Ce caractere est un pj-onom re- latifou conjonctif qui, en chinois, se place toujours apices le sujet et avant 34) l/UNIVtRS. le verbe de la proposition dans laauelle il se trouve. Le svjet, ici , c'est rinfi- nltif connaitre (tchi); le rerbe, ce sont ies deux caract^res qui suivent. 11.12. Sic'n et heoii, dans leiir accep- tion la plus commune, sont des propo- sitions qui signilient avant et aprSs. Dans la phrase que nous analysons, ces deux raract^res ont la force et la signi- fication des verbes preceder et suivre; mais dans une acception philosophique, ils signifient la cause et Vef/et. Le pre- mier est compose du radical 10 (/m, homme), et d'un caractere indiquant Ies premUres pousses de la vegetation; cc qui a donne Tidee de principe ou de cause. Le second caractere est com- pose du radical 60 {tchi, pas, marclie) et du groupe phonetique heou (n" 43). 13. Ce caractere est une confoncfion, qui indique la dependance des deux phrases. II est compose du radical 18 {ta6, coutcau) et du radical 154 {pe'i, nacre de perle, monnaie). 14. Ce caractere est un verbe que Ton peul considerer comme etant au mime mode infinUif que le n° 9, avec lequel il est en correlation de mode, de nombre et de temps. II est compose du radical de mouvement, 162 {tcho, marcher, marche), et du groupe pho- netique kin (o» 121), et it signifie appro- cher de, etc. 15. Ce caractere est un suhstantif, regime ou complement direct du verbe precedent. II est compose aussi du ra- dical 162, qui est le signe gOnerique du mouoement, etdn radical 185 {cMon, titp); composition qui donne I'idee de intelligence directrice , vole droit e , raison supreme. 16. Ce caractere est une particule finale inslgnillante, qui ne sert le plus souvent qu'a clore la phrase avec sy- metrie. Le leoteur aura pii se convaincre, par I'anilyse qui precede, que, en chinois, la valeur de position des mots domine tout, el que c'est le plus souvent de la position qu'il orcu|)e dans la phrase que Ton deduit le sens du caractere. Mais, si la valeur de position des ca- ractires est le point le plus essentiel a connaitre de la grammaire chinoise, il n'en reste pas moins un cerlaiu vague dans I'esprit de l' turopeen, accoutume aux formes precises des langues mo- dernes. « Ce que je viens de dire des mots grammaticaux de la lansue chi- noise, qu'ils n'indiquent pas proprement Ies formps grammalicales des mots , peut Ogalement, a ce qu'il me semble, se dire de I'emploi que cette langue fait de la position des mots. En fixant par Ies lois granmiaticaies I'ordre des mot.i, on marque Ies parties constitutives de la pensee; mnis, denuee d'aiitres se- cours , la position seide est hors d'etat de Ies marquer toutes. FJIe laisse du vague la ou des mots de differentes ca- tegories grammalicales pourraient for- mer une de ces parties, Aussi, Ies lan- gues joignent-elles, pour la plupart, I'emploi de la position a celui des flexions ou de mots grammaticaux. Le chinois mnnquant de flexions, et usant tres-iinparfaitement de mots gramma- ticaux, s'en remet le plus souvent a la position seule pour I'intelligence de ses phrases. « Sans flexions., ou sans quelque chose qui en tienne lieu , on manque souvent du point fixe qu'il faut avoir pour appliquer Ies regies de la position. On peut dire avec certitude que le sujet precMe le verbe, et que le complement le suit; mais la position seule ne four- nit aucun moyen pour reconnaltre le verbe, ce premier chalnon auquel on doit rattacher Ies autres. Les regies grammalicales ne suffisant pas dans ce cas, il ne reste d'autre moyen que de recourir h la sighiflcation (les mots et au sens du texte. « Si Ton considere attentivement la phraseologie chinoise, la position des mots ne marque point proprement leurs formes grammalicales, mais se borne a indiquer quel est le mot de la phrase qui en determine un autre. Cette de- termination est consideree sous deux points de vue : sous celui de la restric- tion de I'idee d'une plus grande etendue a une plus petite, et, sous celui de la direction d'une idee sur une autre, comme sur son objet. De la derivent les deux grandes lois de la construction chinoise auxquelles, a parler rlgoureu- sement , se rOduit toute la grammaire de la langue. CHliNK MODERiNK. 348 " Dans toutes ies langues, une partie de la grammaire est explicite, marquee par cles signes ou par des regies gram- maticales, et une autre, sous-entendue, est supposee concue sans ce secours. « Dans la langiie chinoise, la gram- maire explicite est dans un rapport in- flniment petit, comparativeraent a la grammaire sous-entendue. « Dans toutes Ies langues, le sens du contexte doit plus ou moins venir a I'appui de ia grammaire. '<■ Dans la langue chinoise, le sens du contexte est la base de lintel ligence, et la construction grammaticale doit souvent en etrededuite. Le verbememe n'est reconnaissable qu'a son sens ver- bal. La methode usitee dans Ies lan- gues classiques, de faire preceder du tra- vail grammatical et de I'examen de la construction la recherche des mots dans le dictionnaire, n'est jamais applicable a la langue chinoise. C'est toujours par la signification des mots qu'il faut y connnencer. « Mais des que cetle signification est bien etablie, Ies phrases chinoises ne pretent plusal'amphiboiogie.— On pent rarement se borner a prendre Ies mots' des phrases chinoises dans le sens seu- lement ou on Ies emploie isolement; il faut , le plus souvent , y rattacher en meme temps Ies modifications qui nais- sent de la combinaison de ce sens avec I'idee qui a precede. « La langue chinoise abandonne au lecteur le soin de suppieer un grand nombre d'idees intermetiiaires, et im- pose par la un travail plus considerai)le a I'esprit. Chaque mot parait, dans une phrase chinoise, place la pour qiron le Eiese, et qu'on le considere sous tous es differents rapports avant que de passer au suivant. Comme la liaison des idees nait de ces rapports, ce tra- vail purement meditatif supplee a une partie de la grammaire. On pent sup- poser que, dans le langage vulgaire, rhahitude et Tcmploi de ()hrases, une fois usitees, rendeiit le meme service. « La langue chinoise n'offre jamais de ces phrases longucs et compliquees, regies par des mots places a une grande distoncede ceux qui en dependent; elle presente au conlraire toujours un objet isole et independant ; elle n'attache a cet objet aucune marque qui autorise a I'attente de ce qui va suivre; elle place, apres cet objet, d'une maniere egalement isolee, ou une pareiiie mar- que, ou un deuxieme objet, et compose insensiblement de cette maniere des phrases entieres. « On pent, pour juger de cette lan- gue, partir des points suivants : « 1° La langue chinoise ne marque ja- mais ni la categoric grammaticale a la- quelle Ies mots appartiennent, ni leur valeur grammaticale en general. Les signes des idees, dans la prononciation et dans I'ecriture , restent les monies, quelle que soit cette valeur. « Le changement d'accent des noms qui peuvent passer a I'etat de verbe, et quelques composes, font seuls excep- tion a cette regie generale, « 2° La langue chinoise n'attache point les mots vkies aux mots pleins, de ma- niere qu'on puisse, en eidevant de la phrase un mot pleln avec son mot vide, reconnaitre toujours avec precision, a I'aide du dernier, la categoric gramma- ticale du premier. « 3" La valeur grammaticale n'est done reconnaissable qu'a la composition meme de la phrase. « 4° Elle ne Test m^me alors que lors- qu'on conuait la signification d'un ou de plusieurs mots de la proposition. « 5° La langue chinoise, dans sa ma- niere d'indiquer la valeur grammaticale, n'adopte point le systeme des catego- ries grammaticales, ne les specific point, dans leurs nuances les plus fines, et ne les determine meme qu'autant que le langage le rend absolument necessaire. « On pourrait, d'apres cette descrip- tion, confondre la langue chinoise avec ces langues imparfaites de nations qui n'ont jamais atteint un grand develop- pement dans leurs facultes intellec- tuelles, ou chez lesquelles ce develop- pement n'a pas agi puissammcnt sur la langue; mais ce serait, selou mon opi- nion, une erreur extremement grave. — « Avant que de tenter une expli- cation du systeme de la langue chinoise, >. je dois encore developper davantage I'idee que je me forme de sa veritable nature. J'ai parle presqueexclusivement 344 L'UJNIVERS. jiisqu'ici des qualites qu'elle ne possede pas; iiiais cettc laiigue etonne par le phdnoiiicne siiifjulier qui consiste en ce que, siinplemcnt en renoncant a un avanlage cominiin a toutes les autres, parccttcprivatiuiiseiile, ellecnacquiert un qui ue se trouve dans aucuiie. En dedaigiiant , aiitnnt que la nature du Jangage le perniel (car je crois pouvoir insister sur la justesse de cette expres- sion), les couleurs et les nuances que I'expression ajoute a la pensee, elle fait ressortir les idees, et son art consiste a les ranger immediatement I'une a cote de I'autre , de maniere que leurs conformites et leurs oppositions ne sont pas seulement senlies et aper• (Comment.) (*''****) << Les trois vertus ou qualites sont les vertus qui conviennent pour gouverner en ameliorant les moeurs. » (Comment.) (*******) ■< Vexamen des cas douteux est unc consultation que Thomme fait de la vo- lonle du Ciel. » (Comment.) CIIIINE MODERNE. S49 leur rles ecailles (de la tortiie briilee); — 4" par les fissures isol^es qui se manifestent; — 5° par les fissures qui se croisent; — C" par ie pronostic del'immtttabilit^; — 7° par le pronoslic de la mufabilUe. 8. L'oBSERVATION DES PHENOMfeNES CI^LESTES (*). Signed'une bonne condiiite. \ ; 2 3 / Pluie incessante. I Signe d'un bon gouvernement. 1 < ^ E i S^cheresse. / Signe d'une sagesse consomm^e. I ^ ^ ^ ) Chaleurcontinuelle. I Signe de jiigements dqiiitables. ( -» s S J Froid incessant. Signe de la perfection. ] » I g I Vent perp^luel. 9. LES CINQ F^UCIT^S ET LES Sl\ CALA.M1TES (**). 1" La pluie. 2° La temperature. 3° Le chaud. 4° Le froid. ^'' Le vent. 6" Les saisons. A. Les cinq f^licitds. 1" Una longue vie; 2" Des ricliesses ; 3" I.a tranquillity ; .4" l/amoiir de la vertu ; i" Uue (in heureuse aprfes avoir accompli sa deslinee. Telle est la construction ( pour em- ployer le langage de la noiivelle ecole) du systeme philosophiqiie de Ki-tseu, qui vecut 600 ans avant Thales et Py- thagore. Si la partie physique de ce systeme est peu avancee, la partie ethi- que ou morale Test a un treshaut de- gre, coinme on peut s'en convaincre en lisant le Livre des Annates., dont ce document curieux fait partie. Voila une esquisse rapide des con- ceptions philosophiqiies de la Chine pour la periode que nous nommerons antehellenique. La periode suivante, qui correspond a celle 'de Thales , de Pythagore et de tous les philosophes gfecs jiisqu'a Zenon, est la plus fe- conde et la plus brillante de la philo- sophic chinoise. Seconde periode. La seconde periode de la philosophic chinoise commence au sixieme siecle avant notre ere, avec deux grands noms philosophiques : Lao-tseu et Khoung-tseu (***), chefs de deux eco- (*) «• It'ohservation des phe'nomenes ce- lestes, c'est rechercher dans le Ciel les causes des phenotnenes qui se manifesleut pour riiomme. » {Comment.) (*') « Les fetiches ct les catamites sent la remuneralion que le Ciel fait des oeuvres jg I'homme. » {Comment.) (***) Le premier de ces ohilosophes naquit, B. Les six catamites. 1° Une vie courte ; 2" Les maladies ; 3o Les chagrins ; 4» La pauvrete ; 5" La ni^chancet^ 6" La faiblesse ct I'oppression. les qui se sont partage avec une troi- sieme ecole , formee en Chine six cents ans plus tard (celle de Fo ou Boud- DHA), toutes les intelligences pen- santes et les intelligences croyantes de la Chine. On peut consulter sur ces deux grands philosophes chinois le premier volume de cet ouvrage , pages 1 10 et suivantes, ainsi que le Dictionnaire des Sciences Philosophiques, articles Lao-tseu et Khoung-tseu. Les antecedents de la doctrine du se- cond de ces deux philosophes sont connus ; il nomme lui-meme les sages qui lui ont transmis la doctrine qu'il enseigne : ce sont Fou-hi, I'auteur primitif du Livre des Transforma- tions., dont nous avons fait connaitre precedemment I'idee fondamentale; Chin-Noung ou le Divin agriculteiir, I'un des premiers fondateurs de la civi- lisation chinoise; Hoang-ti ou VEm- pereurjaune, qui regnait 2637 ans avant notre ere; Yao et Chun, deux autres grands hommes, qui regnerent 2,280 ans avant notre ere; enfin, les sages legislateurs des trois dynasties , HiA, Chang et Tcheou, aux insti- tutions desquels Khoung-tseu aimait selon quelques historiens chinois, et seion I'historien persan Rascliid-ed-dln , 604 ans avant notre ere; le second naquit I'annee 55i avant notre ere, 53 ans apres Lao-tseu. 350 L'UNIVERS. a reporter le nierite et rinvcntion de 63 doctrine. « Je ne naquis point doue « de la science, disait-il dans ses En- .. tretiens philosophiques ( chap. 7 , « § 19). Je suis un lionime qui a ainie n les anciens, et qui a fait tons ses « efforts pour acqu^rir leurs connais- « sances. » Les antecedents de la doctrine de Lao-tseu sont completement inconnus pour nous. Cependant on a lieu de penser (c'est, d'ailleurs, une loi du developpement des ideas humaines, 3u'elles ne sortent pas toutes completes e la premiere t^te qui les a concues , comme Minerve , selon la mytliologie grecque , sortit tout arm6e du cerveau de Jupiter), on a lieu de penser, dis-je, que Lao-tseu emprunta les idees fon- damentales de sa doctrine, soit aux ecrits de quelques-iiiis de ces anciens sages cliinois qui vivaient en anacho- retes au milieu des montagnes et des solitudes desertes , comme Chang' young ^ dont il est parle dans le ChcyA- King ou Livre des Annates (ch. -1 ), a I'annee 1 120 avaiit notre ere, et duquel le prince philosophe I/oai-ndn-fseu dit que Lao-tseu emprunta sa doctrine (iu Tdo ou de la Raison supreme (*) ; soit a quelques philosophes indiens, avec la doctrine desquels la sienne a une etonnante ressemblance. Quelques ecri- vains chinois font remonter la doctrine de Lao-tseu a I'empereur Hoang-ti. lis disent ( Differences ou oppositions (les doctrines de Hoang-ti et de Lao- tseu, dans le Tdo-te-King-tchou kiai , 2" partie , f" 45) que « la Doctrine du « Tdo, ciiez les deux pliilosophes, est « ia mfime, mais que les temps sont << differents. » L'application et les de- veloppements out dd aussi etre diffe- rents; ce qui a necessairement consti- tue, seion eux, une doctrine diffe- rente. La me.thode suivie par ces deux an- ciens pliilosophes n'est pas moins op- posee que leurs doctrines. Lao-tseu , devore du besoin de s'expliquer Tori- gine et la destination des etres, suit la (*) Ce philosophe, natif du petit royaume de Tsou , fut le matlre ou instituteur du prince fVen-wang des Tcheoit. metliode ontologique, la methode Av/n- thetique ou d priori, qui prend pour base une premiere cause , et pour point de depart I'unite pbimokdiale. Khoung -TSKU , plus preoccupd du perfectionnement de I'homme, de sa nature et de son bien-fitre que des idees purement speculatives (qu'il regardait, d'ailleurs , comme inaccessibles a la raison humaine, ou comme resolues par la tradition et par les ecrits des saints homines qui I'avaient prece- de, et dont il ne se posait que com- me I'interprete et le continuateiir), Khoung-tseu, disons-iious, suit la methode psychologique , la methode analytiqiie ou a posteriori, qui prend pour base I'individualite humaine, et pour point de depart les phenomenes du monde visible, qui tombent sous nos sens. Ce n'est pas que ce dernier philosophe meconndt rexistencc des causes : au contraire, il s'attache scru- puleusement a scruter celles qui ont les rapports les plus directs avec le coeur de riiomme, pour bien determiner sa nature, et pour reconnaitre les lois qui doivent presider a ses actions dans toutes les circonstances de la vie. Pour lui , le del intelligent, le Ciel pro- videntiel , est partout , et toujours Vexemplalre sublime et Sterne! sur lequel Ihomme doit se modeler, et que doit suivre I'humanite entiere, depuis celui qui a recu la haute mission de gouverner les'hommes, jusqu'au der- nier de ses sujets. Pour Khoung-tsku, le Ciel est la perfection ineme. L'lioni- me kant imparfait de sa nature , il a re^u du Ciel, en naissant, un principe de vie qu'il pent porter a la perfection, en se conformant a la loi formelle de ce principe, c'est-ij-dire en suivant les inspirations de sa celeste origine. Aussi, toute sa philosophie peut-elle se re- sumer dans ce grand et admirable principe (qui est encore, de nos jours , le principe le plus strict et le plus fe- cond de la science humaine), loi for- mulee ainsi par lui-mfime : « Depuis « I'homme le plus eleve en dignite jus- « qu'au plus humble et au plus obscur, « devoir egal pour tons ; corriger et « ameliorer sa personne, ou le perfec- « tionnement de soi-meme, est la base CHINE MODERNE. 351 a fondameiitale de tout progres nio- <- ral. » (Le Td-Mo on la Grande Etude, chap. 1", § 6, p. 25 de notre edition chlnoise-latine et francaise .) En supposant que Lao-tseu n'em- prunta point sa doctrine a una philoso- pliie etrangere a la Chine, il faut alors admettre qu'il s'inspira aux memes sources traditionnelles que Khoung- TSEU , mais que la nature de son esprit le porta a s'eniparer principalement de la partie ontologique de ces niemes tra- ditions, tandis que la nature de I'esprit de Khoung-tseu le porta a en deve- lopper la partie morale et pratique. Seulenient, Lao-tseu aurait imprime a I'ontologie de Fou-hi une forme qui en aurait fait une conception tellement nouvelle, que I'on n'y reconnaitrait plus les traces de son origine traditionnelle. KcoLE Du Tao (Tdo-hid). 1 ° Conception philosophique de Lao- tseu. La conception de Lao-tseu est un Rationalismepanthelstique absolu dans lequel le monde sensible est considere oomme la cause de toutes les imperfec- tions et de toutes les miseres, et la per- sonnalite humaine comnie un mode in- ferieur et passager du grand l^.ire, de la §rande Unite, qui est I'origine et la (in e tous les Ktres. Elle a, comme nous I'avons deja dit a\\\G\iiT?> { Appendix d la traduction des Essais de Colebrooke sur la philosophie des IJindous), une grande analogic avec le systeme de VIdentite absolue de Schelling. II y a cette difference, cependant, que la con- ception du premier n'est en quelque sorte qu'a Tetat rudimentaire, comme la civilisation de son epoqiie, tandis que le systeme du dernier embrasse tous les progres que la pensee philosophique a faits pendant plus de deux mille ans d'incessants et souvent d'infructueux labeurs. Des le debut de son livre intitule Tdo-teKing, ou le Livre delaRaison supreme et de la Fertu, Lao-tseu s'efforce d'etablir le caractere absolu de son premier principe: la demarca- tion profonde et infranchissable qui existe entre le distinct et Vindistinct , Ig Hmite et Villimitef ieperissable et Vimperissable. Tout ce qui dans le monde est distinct, limite, perissable, appartient au mode phenomenal de son premier principe, de sa premiere cause qu'il nonnne Raison (7'ao), et tout ce qui est indistinct, illimite, imperissable, appartient a son mode d'etre transcen- dental. Lao-tseu est le premier philo- sophe de I'antiquite qui ait positive- ment et nettement etabli qu'il n'etait pas au pouvoir de I'homme de donner une idee adequate de Dieu ou de la premiere cause, et que tous les efforts de son intelligence pour la deflnir n'a- boutiraient qu'a prouver son impuis- sance et sa faiblesse. Dans plusieurs en- droits de son livre, Lao-tseu dit que, force de donner \xn nom a la premiere cause pour pouvoir en parler, il la nomme d'un nom qui n'en donne qu'une idee tresimparfaite, il est vrai , mais qui rappelle quelques-uns de ses attri- buts eternels. C'est le caractere figura- tif Tao (compose du radical de la mar- che , du mouvement en avant, et du groupe additionnel cheou, t£te , prin- cipe, commencement , et donl la com- position signifiait primitivement mar- che intelligente , et eAisiiite vote, vote droite) , qu'il choisit pour designer sa cause premiere, mais en elevant [iarfois sa signification jusqu'a I'idee de soitve- raine intelligence directrice, de Raison primordiale supreme, comme le Ko-^oc, de Platon, de Philon, de Piotit), de saint Jean, et d'autres phiiosoph(S. De sorte que ce caractere, chez Lao tseu , est pris tout a la fois au propre et au figure, dans un sens n)ateriel et dans un sens spirituel , comme I'idee complexe qu'il vent donner de sa cause premiere. Au propre, c'est la grande vote de I'uni- vers dans laqufdle marchent ou circu- lent tous les etres; au figure, c'est le premier principe du mouvement uni- versel , la cause, la raison premiere de tout ; du monde ideel et du monde formel, de Vincorporel et du corporel, de la virtualite et du phenomene. i\ous ne pouvons nous enipecher de signaler ici un trait caracteristique de la philosophie chinoise a toutes les epo- ques de son histoiro : c'est qu'elle n'a aucun terme propre pour designer la premiere cause, et que Dieu n'a pas de sr.3 L'UNIVERS. nom dans cette philosophic. II est bien vrai qu'il en est de ni^me dans presque tODtes les philosophies qui n'ont pas adopt*^ (ine tenninoloRio religieiise dans jaquelle le nom de Dieu est toujoiirs donne comme revele. et n'a d'autre si- gnification que celle d'etre ou de passer pour ^tre un nom propre. Mais , en Chine, ou aucune doctrine ne s'est ja- mais posee comme revelee, Videe aussi bien que le nom d'un Dieu personnel, d'un Dieu abstrait , sont restes hors dti domaine de la speculation. Car on ne pent pas dire que le nom de Chdngti, « supreme empereur, "donne dans I'an- cien Litre des rers {Chi-king) et dans le Livre des Annales {CkoH-klng) a la puissance celeste, superieure a toutes les puissances de la terre, soit le nom de Dieu , puisque ce n'est qu'un nom emprunte a un souverain de la Terre, avec I'addition d'un terme qualificatif (\e superior ite. Les philosophes chinois, et Lao-tseu tout le premier, compri- rent que tout nom etant la representa- tion, pour I'esprit, d'un objet sensible , ou d'idees nees des objets sensibles, au- cun nom ne pouvait etre legitimement donne a I'fttre primordial, qu'aucun objet sensible ne peut representer, sans que ce nom transmette a I'esprit une id^e imparfaite et par consequent irra- tionnelle de ce premier £tre. Pour revenir a Laotseu, voici com- ment il dePmit son premier principe : « La voie droite ou la raison liumaine « {tdo) qui peut ^tre suivie dans les ac- « tionsde la vie, n'est pas la Foie droite « (/oo) ou Teternelle, I'immuable Raison « supreme. Le nom qui peut etre nomme « n'est pas le Nom eternel et immuable. ■ Designe sous le nom de Non-Etre (ou « considere dans son etat de negation de « tous les attributs inherents a I'existence « materielle), ce principe supreme est la « cause efficiente ou primordiale du Ciel « et de la Terre ; designe sous le nom • d'etre (ou considere dans son etat « d'existence corporelle) , c'est la mere « de tous les f^tres. C'est pourquoi I'e- « ternel Non-fetre eprouve le desir de « contempler sa nature imperceptible « aux sens, sa nature merveilleuse et « divine; c'est pourquoi I'eternel f^tre « eprouve le desir de contempler sa na- « ture limitec, sa nature corporelle phenomenale. Ces deux natures ou « modes d'etre du principe supreme out « la meme origine et se nomment co « pendant diversement; ensemble on « les appelle I'indistinct et le profond « comme I'azur du Ciel. Cet indistinct « etprofondcommel'azurdu Ciel, porte « au dernier degre , est la source de « touteslesintelligencesmerveilleuses. » [Tdo-te-King (*)', ch. I.] Ailleurs (ch. 32) , il dit encore : « Le Tdo on la Raison supreme, dans n son etat d'immuabilite est sans nom. « II est simple de sa nature, mais, quoi- n que d'une subtilite tres-grande, Fe « monde entier ne pourrait le subju- « guer... Ce n'est que lorsqu'il eut com- et mence a se diviser et a revetir des « formes corporelies qu'il eutun nom... « Pour employer une comparaison , le « Tdo ou la Raison supreme existe dans « tout I'univers, et le penetre de sa subs- « tance, comme les rivieres et les tor- « rents des vallees se repandent dans « les fleuves et les mers. » On voit que Lao-tseu, en definis- sant , ou piutot en voulant caracteriser son ifctre primordial, sa premiere cause, representee par le caractere et le mot Tdo ( Thot, eeo;, Deus), le degage de tous les attributs variables et perissa- bles, pour ne lui laisser que ceux A'eter- nite , d'immuabilite et d'absolu. Ces derniers attributs lui semblent encore trop imparfaits, et il le designe en di- sant qu'il est la negation de tout, ex- «epte de lui-meme; qu'il est le Rien, le Non-Etre, relativement a V^tre, mais en meme temps qu'il est aussi Yiifre relativement au Non-Etre. Consider^ dans ses deux modes, il est virtuelle- ment et plastiquement le monde invi- sible et le monde visible. Aussi Lao- tseu pose-t-il rUNOUl'UNITEABSOLUE comme la forniule la plus abstraite, la derniere limite a laquelle la pensee puisse remonter pour caracteriser le premier principe; unite, qui precede (*) Voyez la premiere livraison du Tdo- te-king en chinois, en lalin et en fran IS unite, pour Lao-tseu, n'est pas encore le principe primordial ; aii-des- sus de Vunite, qui n'est dans sa pensee que I'etat primitif d'indistinction de I'universaiite des etres, il place uu prin- cipe superieur, une premiere cause in- telligente qui est le Tdo ou la Raison supreme , le principe primordial de tout mouvement et fie loute vie; la Raison absolue de toutes les existences et de toutes les manifestations mon- daines. Cependant, nous devons convenirqiie Lao-tseu semble confondre quelque- fois le Tdo ou la Raison suprime avec y Unite, a laquelle il donne les memes atlributs. C'est qu'en effet , sous cer- tains points de vue, la Raison prlmor- diale et V Unite sont identiques, quoi- que sous d'autres elles soient differentes ou du moins differenciees. Dans la doctrine de Lao-tseu, tout ce qui siibit la loi du mouvement est contingent, mobile, perissable ; la forme corporelle etant essentiellement contin- gente, mobile, est done essentiellement perissable. II n'y a , par consequent , que ce qui garde I'inmiobilite absolue. qui ne rev^t aucune forme corporelle, qui ne soit pas contingent et perissable. L'incorporeite et I'immobilite obsolues sont done pour lui les exemplaires, les types eternels de I'eternelle perfection. Les modes d'^tres contingents ne sont que des formes passageres de I'existence, qui, une fois depouiilee de ces monies formes, retourne a son principe. Voici comment Lao-tsbu expose cette doc- trine : « II faut s'efforcer de parvenir au « dernier degre de l'incorporeite pour « conserver la plus grande immobi- « lite possible ou I'immobilite abso- « lue. Tous les etres apparaissent a la n vie dans un mouvement continu.iNous " les voyons se succeder les uns aux au- « tres, paraissant et disparaissant tour « a tour. Ces elres corporels revetent , « dans leur mouvement, differentes « formes ext^rieures ; mais cliacun d'eux « retourne a sa racine, a son principe. " Retourner a sa racine , a son prin- » cipe, signifie renirer dans I'immobi- CHINE MODERNE. 855 » lite absolue; rentrer dans I'immobi- « lite absolue , signifie rendre son « mandat. Rendre son mandat, signifie n devenir eternel et immuable; savoir « qne Ton devieut eternel et immuable, « signifie ^tre eclaire. Ne pas savoir que « Ton devient eternel et immuable, c'est « ^tre livre al'erreur et a toutes sortes « de caiamites. Si I'on sait que Ton de- « vient eternel et immuable, on con- « tient, on embrasse tons les ^tres. Em- « brassant tous les €tres dans une « commune affection, on est juste, equi- « table pour tous; etant juste, equitable « pour tous, on possede les attributs de « la souverainete. Possedant les attri- « biits de la souverainete, on participe «a la nature divine; participant a la « nature divine , on devient identifie « avec le Too ou la liaison supreme. « fitant identifie avec la Raison su- n pr^me, on subsiste eternellement; le « corps mfime se dissolvant, I'aneantis- « sement n'est pas h craindre. » ( Tdo- te-Klng, ch. 16.) « Le retour des ^tres a leur origine. « a leur principe, dit-il encore aiileurs «(ch. 40), est le mouvement du Too n ou de la Raison primordiale... Tous « les corps de I'univers sont nes de « Y litre ( yeou ) , et VEtre est ne du « Non-Etre {woh). » «Tous les etres de I'univers, dit le « commentateur Li-si-fchal, recoivent « I'existence et subsistent materielle- « ment {toet-ijeoii) ; puis de I'etat d'exis- « tence materielle ils passent a I'etat de « Non-Etre. C'est ainsi que subsidiai- « rement ils font partie de la substance « du Tdo. C'est pourquoi il est dit, dans « le texte , que le retour des Etres a « leur principe est le mouvement du « Tdo. Tous les etres corporels {ijeou) « de I'univers sont n6s du Non-Etre « {wo'Ct,). » « Le Tdo , dit encore Lao-tseu (ch. « 62) , est comme le sanctuaire de tous « les etres; c'est le tresor de I'homme « vertueux et la ressource du me- « chant. » Voila , en peu de mots, mals en ter- mes rigoureusement logiques, la con- clusion, et, en quelque sorte, le dernier mot du systeme de Lao-tseu. On ne peut s'empecher d'y reconnaitre les ca- racteres nets et tranches d'un pan- tlieisme rationaliste , tel que celui'qui est expose dans le systeme de Vldentite absolue de Schellini;. Le passage sui- vant ne peut laisser aucuu doute a cet egard : « Autrefois, a I'origine des cboses, « I'unite seule subsistait, universelle, « absolue. Ensuite le Ciel est parvenu « a V unite par la purete de son essence ; « la Terre est arrivee a i'unite par son « etat substantiel de repos ou d'immo- « bilite durable; les esprits ou intelli- « gences subtiles {chin) sont arrivees a « I'unite par la subtilite de leur nature; «■ les valiees pnrviennent aussi a Yunite « par le plein; i'universalite des etres « obtient Yunite en obtenant la vie; les « princes et les rois obtiennent Yunite n en se constituant des modeles inva- « riables de droiture. Voila comment « toutes les choses enumerees par- « viennent a I'unite. » (Tdo-te King, ch. 39.) Un commentateur, Li-yo-ngan y ex- plique ainsi la pensee de Lao-tseu : « Toutes ces choses ne forment point « par elles-memes une unite ; mais cha- « cune a son unite propre; de meme la « lumiere du soleil et de la lune qui se « repand au loin , I'eclat brillant des «astres, le bruit retentissant du vent « et du tonnerre, les gouttes deliees de « la pluie et de la rosee, ont chacun « leur imite, et ne se melent point en- « semble. » La pensee de la plupart des autres interpretes chinois n'est pas moins cu- rieuse a connaitre. Sou-tseu-yeou dit que « Yunite, c'est le Tdo ou ia Raison « primordiale, » el que « tous les etres, « de quelque nature qu'ils soient , ne n sont que le Tdo lui-meine. » Liu-kie-fou dit que « le Tdo c'est « Yunite , et rien de plus. » Dans cette doctrine, Yunite primor- diale est sortie d'elle-meme a I'origine des choses pour former exterieure- ment la pluralite des ^tres , laquelle pluralite forme a son tour autant de nouvelles unites ou d'unites secondaires qu'il y a d'^tres vivantd'une vie propre et individuelle; mais ces unites secon- daires rentrent tot ou tard dans la grande unite d'oii elles sont sorties, 23, 35« I/UMVKRS. (Inns cptte unite .ibsolue qui est comme rocVan dcs ^'tres. II ne fniit pas penire de vue, en in- icrpretant les anciens philosophes, qii'ils viv.iient a uneepoqiie oue Ton pourrait appeler concrite, oil I idee n'etait pas separ^e du sujet, et que I'on tomberait souvent dans une erreiir profoiide en leiir, pr<3tant nos idees abstmifes qui n'ont auciine espece de realite. Vabs- traction, tout en facilitaiit jusqu'a un certain point I'elude des sciences, a donne naissance a d'innombrables er- reurs, auxquelles n'ont pas ^chappe la plupart de nos idees modernes de Dieu. I.es anciens, plus voisins que nous du berceau du monde, avaient peut-^tre luie idee plus juste de son origine et de ses premieres manifestations. On verra plus tard la doctrine deL\o-TSEUSuivre la loi fatale de toutes les doctrines , c>st-a-dire, passer a I'etat d'aft^^/rac- tion, comme ie bouddhisme primitif, et n'ctre plus qu'une sterile et souvent absurde scolastique. Nous avons dil faire ces observations pour conserver a cbaque chose et a chaque epoque son propre caractere. L'ontologie de Lao-tseu etant ainsi determinee, la psychologie est logique- nient donnee. De meme que Ie phiioso- phe chinois reconnait deux natures a son premier principe, la nature incor- porelle ou divine , et la nature corpo- relle ou phenomenale , selon ses modes d'etre, de meme il reconnait a I'homme deux natures ou deux principes : I'un , Ie principe materiel, recoit par trans- mission et contient Ie principe igne, \e principe lumineux de rintelligence auquel il sert comme de vehicule. <■ Le « principe materiel de I'homme , dit « LAO-TSKu(ch. 10), est le vehicule et n le support du principe igne de I'intei- « ligence divine ; il faut done s'attacher « a ce principe simple de I'unite, alin « de ne pouvoir jamais en ^tre separe. « Voila le seul texte dans lequel Lao- tseu ait exprime sa doctrine sur la na- ture spirituelle de I'homme. Mais,quoi- que cette doctrine ne se trouve pour ain«i dire qu'en germe dans son livre, elle n'en est pas moins tres-remarqua- bie. La forme obscure et concise dans laquelle cette conception antique est enoncee dans le texte chinois, tenioigiie de I'impuissancede la langue figurative pour exprimer ciairement des idees abstraites, que d'ailleurs aucune langue ne pent exprimer bien nettement. Ici la forme a influ^ sur la pensee , et la pensee sur la forme; I'expression a dil participer de I'obscurite de I'une et de i'aiitre. Quoi qu'il en soit, nous devons constater ici que la doctrine des deux principes dans I'homme, I'un spirituel et i'autre materiel ( le h6€n et le phe), parait etre anterieure a Lao-tseu , et remonter a la plus haute antiquite chi- noise , comme le font remarquer les commentateurs. Mais les philosophes qui ont voulu expliquer ces deux prin- cipes ont ete bien loin de s'accorder entre eux sur la nianiere de les coni- prendre. Selon les uns,qui appartien- nent surtout a I'ecole de Khoung-tseu, le Iiden (principe immateriej) est la par- tie subtile ou spirituelle du premier principe male yang , lorsqu'il est separe du corps, et \Qphe ( principe materiel) est la partie subtile du principe femelle yin. Le phe est la partie creee la pre- miere, le hden vient ensuite, et ce der- nier correspond a peu pres a notre dme. II est dit que I'essence vitale du hcen , ou de Xante, va partout ; qu'elle ne pent pas s'eteindre ou perir; qu'elle est le principe divin attache a la partie mate- rielle mais subtile de rhomme. Le phe serait aussi le principe sentant, \ame vitale. II est quelquefois confondu avec le h6€n. Nous devons dire que ces deux termes ont la meme etymologic, qui est le radical des mdnes, des genies subtils, des ^tres enfin qui participent de la materialite et de I'immaterialite. La doctrine de Lao-tseu sur la na- ture et la destinee de Vdme, ou du principe immateriel que nous portons en nous , et qui opere les bonnes ac- tions, n'est pas explicite. Tantot il con- sidere ce principe comme conservant pendant longtemps sa personnalite, tantot comme devant retourner dans le sein de la Raison supreme, lors de sa separation du corps, si toutefois ce prin- cipe a accompli des oeuvres meritoires, et s'il ne s'est point ecarte de sa propre destination. •« Celui qui ne perd point ce qui cons- CHINE MODERNE. 867 « titue sa nature propre a une existence « tie longiie duree. Celui qui nieurt et a ne peril pas en entier conserve long- « temps son principe de vie. » (Ch. 33.) Les commentateurs sont divises sur Texplication de ce passage ; mais la plu- part y voient la doctrine de la perpe- tuite du principe animique de I'liomme apres la mort du corps. L'un d'eux, Sie- Hoei,d\t que c'est comme s'il y avail dans le texte : « Le souffle de la vie <- se dissipe, niais I'esprit, I'anie, le « principe divin de intelligence, se con- « serve. » Un autre commentateiir dit qu'il n'y a pas absorption de I'individualitedans le 7 do ou le principe supreme , puis- que cette individualite ne perit pas en entier. On a dit et repet6 souvent (sans s'^tre assure de ce que Ton disait et de ce que Ton repetait ) que la morale de Lao- TSEU avait beaucoup de rapports avec celle d'Epicure. Rien n'est plus loin de la verite qu'une telle assertion. Si on pouvait la comparer a la morale dequel- ques philosophes, ce serait a celle des stoiciens plutot qu'a celle de tout autre. Et cela devait etre , puisque Tontologie et la psychologie de Lao-tseu ont egalement beaucoup de rapports avec I'ontologie et la psychologie des stoi- ciens. En effet, selon la doctrine des stoi- ciens, le Xoyoc, identique par sa double acceptionde joaro/e, verbeeiAt raison, avec le Tdo de Lao-tseu , est aussi la premiere cause, le premier principe de toutes choses , lequel est repandu , comme le Tdo, dans toute la nature corporelle : 6 sv tyi uXiri Xoyo;. « Toute la nature, selon cette ecole, ditM. Miche- ]et{de la Mefaphysique d'Jristote, p. 250) , n'est que la manifestation de la raison eternelle qui gouverne tout, qui produit tout, et qui est repandue par- tout. Cette raison est Tactualite de la matiere, c'est-a-dire, de la substance qui manque de qualites; elle y reduit a I'acte les semences de toutes choses qu'elle contient. La raison eternelle est done la totalite des formes qui se realisent dans la matiere. » On a vu dans le stoicisme comme une sorte de protestation contre la cor- ruption de la societe antique. La mo- rale de Lao-tseu fut aussi une pro- testation contre la corruption de la societe de son temps, qu'il ne cessc d'attaquer et de combaltre. Ce fut meme, dit I'historien Sse-ma-tlisien, pour fuir le spectacle de la decadence de la dynastie des Tcheou, et en meme temps de celle des moeurs, qu'il quitta sa charge de gardien des archives a la cour des Tcheou, pour se reiirer dans la retraite loin de son pays. II ne voit le bien public, le bien prive que dans la pratique austere et constante de la vertu{te), de cette vertu souve- raine qui est la conformite des actions de la vie a la Raison supreme, prin- cipe formel de toutes les existences transcendantes et phenomenales , et par consequent leur loi et leur raison d'etre. II n'y a d'autre individualite morale que celle de la Raison supreme, il n'y a d'autre loi que sa loi , d'autre science que sa science. Le souverain bien pour I'homme, c'est son identifl- cation avec la Raison supreme , c'est son absorption en elle. L'etat d'incorporeite y d'immateria- lite, d'immobilite absolue de la Rai- son supreme est son etat parfait, son etat de corporeite , de materialite , de mouvement de creation et d'aljsorplion est son etat imparfait; il en est de meme pour I'liomme; il doit done ten- dre de toutes ses forces a se depouiller de sa forme corporelle pour ar river a l'etat incorporel, et par cela meme a son identification avec la Raison su- preme. II doit dompter ses sens, les reduire autant que possible a l'etat d'impuissance, et parvenir, des cette vie meme, a l'etat d'inaction et d'im- passibilite completes. De la le fameux dogme du non-agir (ivoti-wei) auquel Lao-tseu reduit presque toute sa mo- rale, et qui a ete le principe des plus grands abus chez ses sectateurs, I'o- rigine des pratiques ascetiques les plus absurdes et de la vie nionacale portee jusqu'a I'exces. La personnalite hu- maine a disparu et s'est absorbee dans la personnalite absolue de la Raison supreme. On peut dire du sage de Lao- tseu ce que Ritter ( traduction de M. Tissot, t. Ill) dit de celui de Ze- 8M L'UNIVERS. non : il n'a.!;il pas; il s'abstrait de la r6alite pour se rendre insensible a tout ce qui I'entoure ; il est au-dessus de tout ^venement exterieur. Sa felicite reside dans I'indifference ou dans I'af- franchissement absolii de toiites les Eassions qui tourinentent les autres ommes; il est libre de tous desirs, de toute crointe, de tout plaisir et de ioute peine. Par cela m^me qu'il y a dans Phom- nie deux natures , Tune spirituelle , I'autre mat^rielle, il y a aussi en lui deux tendances , Tune qui le porte au « du n6cessaire pour donner a ceux « qui ont le superdu. « Quel est celui qui est capable de « donner son superflu a ceux qui eprou- « vent des besoms dans le monde? Ce- « lui-la seul qui possede en soi le Tdo « ou la Raison supr^mjp. » La politique de Lao-tseu est en tout conforme a sa morale. Le but d'un bon gouvernement doit ctre, set Ion lui, le bien-^tre et la tranqiiillite du peuple. L'un des inoyens que les sages princes doivent employer pour atteindre ce but , c'est de donner au bien, I'autre qui le porte au mal. Le peuple, dans leur personne et dans J saint homme de Lao-tseu, ou celui celle de ceux qui exercent des fonctions qui aspire h la perfection , doit suivre exclusivement la tendance de la nature spirituelle; par consequent , il doit fair les agitations et le tumulte de la vie active du monde; ce ne sont pas seu- lement ses paroles, mais ses ceuvres meritoires qui doivent instruire et con- vertir les autres bommes par I'exemple, dont I'empire est le plus puissant sur eux. Devoue au bonheur du genre humain, il ne repousse aucune des creatures qui viennenl a lui ; il leur donne la vie spirituelle, la vie morale, et il ne s'approprie pas leurs merites ( ch. 2). II fait le bien, et il ne s'en pre- vaut pas, il n'en tire pas vanite. II fait le bien pour le bien, avec humilite et dcvouement, et c'est par cela mSme qu'il est vertueux. L'ahnegation de soi-m^me est portee au pins haut degre dans la doctrine de Lao-tseu. « Le saint, dit-il (ch. 63), " pratique le non-agir; il fait son oc- « cupation de la non-occupation , et « trouve de la saveur dans ce qui n'a « pas de saveur. II considere les petites « choses comme lesgrandes, la penurie « comme Pabondance. II recompense « les injures par des bienfaits. » Ce dernier trait est tout evangelique. « Iji Raison du Ciel, dit-il ailleurs « (chap. 77), est comme le fabricant « d'arcs : elle abaisse ce qui est eleve, « et elle eleve ce qui est abaisse; elle « 6te le superflu a ceux qui ont de « trop, et elle vient en aide a ceux qui « mnnquent du necessaire. • Lara/son de Phomme n'agit pas • ftinsi ; elle ote a ceux qui nianquent Kubliques, I'exemple du mepris des onneurs et des richesses. Les gouver- neurs des peuples, par consequent, ne doivent point combler d'bonneurs et de richesses certains honimes,fussent- ils des sages, ni faire un trop grand cas des objets rares ou de luxe, parce qu'en agissant ainsi , ils excitent Ten- vie et la jalousie du peuple, qui s'ex- pose a commettre de mauvaises ac- tions pour obtenir, lui aussi, ces ra6- mes richesses et ces objets de luxe (chap. 3). Le philosophe ne veut pas m^me que Ton fasse etalage des objets de fantaisie, a plus forte raison d'un luxe demoralisateur, qui jette une per- turbation profonde dans I'esprit du peuple. Le snint homme de Lao-tseu, qui occupe des fonctions publiques , dedaigne la boue des richesses et des honneurs ; il meprise les objets de fan- taisie et de luxe, et a toute I'aust^rite du philosophe stoique. En outre , et comme derniere consequence de ce systeme, Lao-tseu present de faire en sorte que le peuple soit sans ins- truction, et, par consequent, sans de- sirs. Ces derniers, et les troubles qui en resultent, naissent necessairement (ill savoir, selon cette doctrine qui est la compression de I'intelligence turbu- lente de rhomme, et son maintien dans la simplicite et I'ignorance, son etat naturel et priniitif, « Si je gouvernais un petit royaume « et un petit peuple, dit Lao-tseu « (ch. 80), je ferais en sorte que le peu- « pie n'eut des instruments de guerre « que pour une compagnie de dix ou CHINE MODERJNE. 359 « de cent hoiiimes , et encore qu'il n'en « fit pas usage. Je ferais en sorte que « ce peuple craignit la niort, et qu'il « n'emigrat pas au loin. « Quand meme il aurait des bateaux « et des chars, il n'y monterait pas; « quand meme il aurait des cuirasses « et des lances, il ne les porterait pas. « Je ferais en sorte que le peuple « revlnt a Vusage des cordelettes « nouees {pour ecriture). . . » Veila I'ideal du gouvernenient de Lao-tseu ! II dit aussi dans un autre endroit de son livre (ch. 3) : « Le saint homme fait en sorte que « le peuple soit sans instruction , sans n savoir, et, par consequent, sans de- « sirs; que celuf qui a de I'instruc- « tion n'ose pas en faire un mauvais « usage. » Ailieurs (ch. 63), il est encore plus explicite, s'i! est possible: <' Dans I'antiquite , ceux qui prati- « quaient la doctrine du Tdo ou de « la liaison supreme ne s'occupaient « point d'eclairer les peoples; ils s'oc- « cupaient a les rendre igiiorants. « Le peuple est dilficile a gouverner « parce qu'il salt trop, etc. » Cette doctrine politique de Lao- tseu frappe d'impuissance et de mort toute societe , coinme sa doctrine mo- rale frappe egalenient d'impuissance et de mort toute individualite. Aussi les essais qui en out ete faits, a differentes reprises, par des empereurs chinois, devenus partisans enthousiastes de la doctrine de Lao-tseu , onl-ils ete des epoques fatales dans I'histoire chinoise ; et le retour aux doctrines morales et politiqups enseignees par Khoung- TSEU , ainsi que par les sages qui I'ont precede et suivi dans la mfime voie, a-t-il toujours ete le salut de I'empire. Neanmoins, cette doctrine de I'as- Sfrvissenient, de I'abrutissement de la pensee humaine, diametralement op- posee a celle du philosophe Khoung- TSEU, qui prescrit sans cesse le per- fectionnement, le developpement le plus complet de toutes les facultes de I'homme, confond notre orgueilleuse raison , par ce fait seul que I'etat de la civilisation chinoise , 600 ans avant notre ere, a pu autoriser un grand penseur a la proclamer ! Cette doctrine a ete aussi proclamee depuis , et dans nos societes modernes , par des honi- raes qui , il est vrai , n'ont pas une grande confiance dans les lumieres dc la raison humaine. Toutefois , la phi- losophic qui proclame I'homme essen- tiellement perfectible par une educa- tion scientiGque , et les nations les plus eclairees, les plus heureuses, nous pa- rait bien superieure; elle est du moins bien plus conforme a la dignite hu- maine , bien plus consolante pour I'hu- manite, et assurement bien plus ap- propriee a sa destination. Voici la construction du systeme de Lao-tsbu : I. Le Tag ou la Raison primordiale 4ter- nelle et supreme, designee aussi par les expressions de Hiolen : I'Indistinct:; de 1 : rUMTE ABSOLtE. II. Consideree sous ses deux modes d'filre elle est : 1° le Non-£lre , ou \'incorpor6it6. 2° \'£tre, ou la corporiite. III. Representani 1" sa nature insaisis- 2° sa naivre corpo ■ sable et subtile ; relle phenomenah. Pour dernier resultat rUNiTE a laquelle tout letourne. JNous nous sommes etendu sur la doctrine de Lao-tseu, parce que cette doctrine n'avait encore ete exposte nulle part avec quelque exactitude , et que, cependant, elle occupe une place tres-importante dans I'histoire de la philosophic chinoise. Nous ter- minons cette exposition de la concep- tion philosophique de Lao-tseu, par la traduction du jugement qu'en porta Tchou-hi : « Le systeme de morale de Lao- « TSKU , dit-il, consiste dan&Vhumi- « life, la Concorde, la temperance et « Yeconomie. II consiste aussi tout en- « tier a ne jamais permettre I'asser- « vissement du principe raisonnable a « I'empire des sens. « Les speculations de Lao-tseu, « generalement parlant, roulent sur le 860 L'UINIVKRS. • vidCt 8ur le repos ou Vimmobilile, m 6ur le non-agir, sur Visolement du « monde et la conservalion de soi- » virtue (cVst-a-dire, pour Lao-tseu, etre penetre , qu'il ne peut etre di- ' vise. C'est pourquoi il est dit le Ciel, il est dit la vie., il est dit Vesprit. il est dit V indistinct , et, pour reunir toutes ces expressions , il est dit le ya'o. Sans VEtreun, pas de Ciel; sans VEtre un , pas de vie ; sans V li- tre un , pas d'esprits ; sans V^tre un., pas a'indistinct; I'fltreest, par consequent , tel qu'il vient d'etre dit. Pourquoi I'homme ne serait-il pas ainsi? Tous les hommes peuvent CHhNE MOD ERNE. 361 « se dire Ciel , tous les hommes peu- n vent se dire esprits , tous les hom- « iiies peuvent se dire arrives a la « vie , ayaut penetre rindistinct. lis ne « pourraient pas dire, en parlant du « Ciel : Ceci n'est pas Ciel ; en parlant « des esprits , Ceci n'est pas esprit ; en « parlant de la vie, Ceci n'est pas la « vie; en parlant de I'indistioct, Ceci « n'est pas Tindistinct. C'est pourquoi « nous soinmes veritablenient le Tdo ; « par consequent, au sein nieme de « V litre un, sachant le Ciel, epuisant « I'esprit, parvenant a Textreine li- ce niite de la vie, et creant Tindistinct. « En etudiant ce grand sujet, on se « perd dans une confusion de noms « divers, qui tous sont identiques en « realite. Celui qui est parvenu a com- « prendre cela regrette cette identite <■<■ reelle , et il oublie que les noms seuls « sont divers. » Ce passage! peut sufflre pour faire apprecier la doctrine et la maniere de raisonner de Kouan-yun-tseu. JNous ne connaissons aucun philosophe plus de- lie, plus subtil, plus abondant. II sem- ble prendre plaisir a se jouer de sa pensee, en accumulant opposition sur opposition , antithese sur antithese. Son ouvraae, assez etendu, n'en est pas inoins un des monuments les plus cu- rieux et les plus extraordinaires de I'antique philosophic. On croit lire les Enneades de Plotin , ou la Theologie de Proclus ; et c'est la un monument qui date de six siecles avant notre ere! Peut-on mieux faire distinguer la cause de I'effet que ne le fait Kouan- yun-tseu , dans ce passage : « Ce qui suit le courant de I'eau, c'est « le navire ; ce par quoi la navigation « a lieu, c'est I'eau, non le navire; ce « qui roule , c'est le char; ce par quoi « le mouvement de rotation des roues « a lieu, c'est le boeuf qui traine le «char, et non le char lui-meme:ce « qui reflechit, c'est le coeur {sin ou « I'organe de la pensee ) ; ce par quoi la « reflexion a lieu, c'est la pensee (z), « non le coeur. On ignore pourquoi et « comment il en est ainsi (dans ce der- « nier cas) ; mais ii en est ainsi. » [Tseu- han,K. 1, f*' 40.) Et ailleurs : « Les etres naissent sur la terre; « leur fin s'opere aussi sur la terre par « transformation. Les actions de I'hom- « me p.rennent naissance dans la pen- « see; elles se terminent aussi dans la « pensee. Si Ton sait que c'est seule- « ment la pensee qui est leur cause, « alors I'acte a lieu instantanement, « comme il ccsse instantanement; le « bien s'opere instantanement, comme « le mal aussi s'opere instantanement. « La pensee change , se transforme : le « coeur, ou I'organe de la pensee, ne « change pas; la pensee a la faculte de « connaitre , de juger, de discerner ; le « coeur, ou I'organe de la pensee , ne « I'a pas. Notre coeur n'est qu'un sim- « pie organe indivis; mais la pensee « est un element subtil , qui va et vient « dans I'espace. » {Ib.,P 41.) YuN-wEN-TSEU. A [>res A ouan-yuH- tseu, vient un disciple de Lao-tseu : c'est Yun-iven-tseu. II s'exprime ainsi, dans un chapitre intitule le Grand Tdo. « Le Ciel et la Terre sont transpor- « tes dans I'espace (*), et se penetrenl « mutuellement. Tous les etres qui « existent forment une totalite, une « generalite, et ne font qu'un. Si Ton « connait cette unite, il n'est rien, « dans cette unite, que Ton ne con- « naisse; si Ton ne connait pas I'unite , « il n'est rien, dans I'unite, que Ton con- « naisse. Nous occupons un lieu dans « le monde, nous ibrmons meme un « etre un , et les ^tres sont egalement « des etres. Ces etres, combines en- « semble , peuvent constituer mutuel- « lenient de nouveaux etres. » {Tchou- tseu-han, K. 1, f" 53.) Voici un passage qui attribuerait trois origines a nos connaissances : » — Dans la science superieure, on « apprend par I'esprit; dans la science « moyenne, on apprend par le coeur; « dans la science inferieure, on apprend « par les oreilles. Pour celui qui ap- « prend par les oreilles , la science re- « side dans la peau ; pour celui qui « apprend par le coeur, la science reside (*) Cette observation du mouvement de la Terre est d'aulant plus reniarquable , que I'ecole de Fou-hi et des ieltres regarde la terre comme immobile; c'est du pythago- risme. 363 L'UNIVERS. « dans linterieur de la chair ; pour « celui qui apprend par I'esprit, la • science r^ide dans la nioelle des os. « Voila la raison de toute science, {lb.) « — Dans le nionde, dit-il encore, « le vrai et le faux ne sont pas deter- « min^s. Dans notresiecle, chacun re- « garde comme le vrai ce qu'il aime, « el comme le faux ce qu'il deteste. Ce- n lui qui cherche ce vrai ne le cJjerche « pas dans son union avec la raison 1 des choses : il ne le cherche qu'a- n vec sa propre raison. Celui qui re- R pousse le faux ne repousse pas le « vrai : il ne fait que le rendre plus perseverant dans son occur. Mainte- « nant, la satisfaction de nos desirs « passe pour le vrai , et nous y perse- « verous. La repression de ces niSmes « desirs, c'est le faux, et nous I'ecar- « tons. Le siecle ne sail pas ce qu'il « appelle le vrai et le faux. » ( lb., r 54.) LiE-TSEU, qui florissait 398 ans avant notre ere. Ce philosophe fut le disciple de Kouan-yun-tseti , etil passa quarnnte ans inconnu dans un iardin de r£tit de Tchinrj. II est appele par Tchou-hi (critique chinois et philoso- phe celebre du onzieme siecle ae notre ere) un ecrivain plat, insipide, inculte et vide. ( Philosophes divers, art. Lie- TSEU ). Ce jugement est plus que se- vere, il est injuste. Get ecrivain est, au contraire , renomme par I'emploi frequent et habituel des figures et des metaphores; ce qui a pu, toutefois, motiver le jugement precedent du phi- losophe rationaliste. C'est dans un ouvrage intitule le Livre du vide et de I'incorporel iTchoung-hi&-King), que Lie-tseu a expose sa doctrine. Cette doctrine ne differe guere de celle de I,ao-tseu que par I'emploi de termes differents pour exprimer des idees analogues. On ren- contre nifime dans Lie-tseu mu chapi- tre qui se trouve aussi dans Lao-tseu (lesixieme), et que le premier de ces philosophes n'attribue pas a Lao-tseu, mais a i'empereur Iloang-d (qui vivait 2640 ans avant notre ere). Il n'a fait qu'/7/«s/rer (comme s'exprime iin ecri- vam chinois) la doctrine du Tcio de Lao-tseu. Voici im passage qui fera connaltre la maniere de ce philosophe ; il est tire duchapitre intitule: Proms- tics ou Manifestations celestes. « L'^tre qui recoit la naissance par « sa propre raison d'etre doit avoir « une fin; I'^lre qui a une fin ne pent « pas ne pas avoir cette tin , de m^me « que I'etre qui recoit la naissance n'a « pas pu ne pas recevoir celte nais- n sance; et s'il croil perpetuer sa vie, « determiner, calculer sa fin , il tom- « be dans une erreur grave sur le « nombre des annees qu'il lui est don- « ne de vivre. Ce qui est subtil et spi- « rituel (dans I'etre vivant ou Thoni- « me) est la portion du Ciel; ce qui « compose la chair et les os est la por- « tion de la Terre. Ce qui appartieut « au Ciel est pur, et se disperse; ce « qui appartient a la Terre est trouble, » impur, et se r6imit. Les parties sub- « tiles et spirituelles se separent de la « forme corporelle, et chacune d'elles « retourneason essence veritable. C'est « pourquoi on appelle ces parties :par- « ties subfiles et spirituelles qui s'en « retournent ( Kouei ). Le nom de « Kouei, qu'on leur a donne, signifle « retourner : mais c'est retourner h « son veritable principe, a sa demeure « primitive.Vd^ncitn empereur //oowgr- a j?i a dit : L'essence subtile et spiri- « tuelle rent re par sa porte ou dans « sa matrice ; les os et la chair re- « tournent a leur racine, a leur prin- « cipe. Reste a savoir comment ce qu'il « y a de superieur en nous continue « d'exister (*). » TCHOUANG-TSEU. Apr^S LlE-TSEU vient TcHOUANG-TSEU (338 ans avant notre ere), que Tchou-hi appelle un genie superieur et d'une Elocution tres- fleurie. Sa doctrine enibrosse tout ce qu'il est possible d'explorer (pour em- ployer les termes de Thistorien chinois Sse-ma-thsien)\ cependanl, selon le m6me Ecrivain, son but fondamental est de rattacher tout ce qu'il dit aux paroles m^mes de Lao-tseu. II com- posa deux ouvrages , le Pire picheur {YH-fou) et le Foleur-chi (Tdo-chi), dans le but de combattre et de ridicu- (') Oil peiil voir ic lexte diiiiois de cc curieux passage, dans uolre eJilioii cIiIiuksc- laline et francaise du Tao-te-kiiig de Lao- tseu, p. 8o. CHINE MODERNE. 363 liser ies sectateurs da Khoung-tseu , en meme temps que d'iliustrer la doc- trine de Lao-tseu. (Voy. Sse-ma- thsien.) Son Livre de la fleur meri- dionale {Ndn-hod-king) n'est, en quel- que sorte, qu'un brillant et poetique commentaire de celui de Lao-tseu, dans iequel il introdiiit una foule de personnages historiques , princes et phiiosophes, qui discutent Ies ques- tions Ies plus nautes, et Ies plus varices et dont il est impossible de donner ici I'analyse. Nous en citerons seulement Ies passages suivants : « — Le Tdo ou la liaison supreme « est le principe d'oii precedent tous • Ies €tres de TUnivers, la source d'ou « ils sont sortis. « — Ce Tdo a des sentmients d'af- « fection et de fidelite. li n'agit pas, il n est sans forme ; il peut ^tre transmis, « mais il ne peut pas etre recu par la « main; on peut I'obtenir, nia'is on ne « peut le voir. Avant I'existence du « Ciel et de la Terre, il existait avec >< certitude des la grande antiquite; c'e- « tail I'esprit, souverain des esprits « ( chin fcouei chin ti) ; il a donne nais- « sance au Ciel et a la Terre. II existait « au-dessus du grand fade, anterieu- « rement au grand comble ( tai-ki) , « et cependant il n'est pas plus eleve ; « il existait au-dessous des six ex- « tremites (?), et cependant il n'est « pas plus profond. II a precede la n naissance du Ciel et de la Terre , ct « cependant il n'est pas d'une duree « sans limite; il est plus 3ge que la « grande antiquite, et cependant il « n'est pas vieux. » {Tchou4seu-han , K. I, f" 71.) « — La vie, c'est la suite de la mort ; «■ la mort, c'est le commencement de « la vie. II faut s'attacher a connaitre « cette chaine de succession. La vie de « riiomme n'est que la condensation n de I'esprit vital. Si cet esprit vital « est condense , alors c'est la vie ; s'il H est disperse, alors c'est la mort. « Comme la mort n'est que la suite « de la vie , pourquoi nous affligerions- « nous de mourir? Voila pourquoi tous « Ies ttres de I'univers ne sont qu'une « grande Unite. » {Nan-hod- king, K. 6, P 36-7.) « — La lumiere est uee des tene- « ores ; I'ordre materiel est ne de ce « qui n'avait pas de formes ; Ies ^tres « spirituels sont nes du Tdo. La for- « me est essentiellement nee du prin- « cipe subtil, et tous Ies etres de I'U- « nivers se sont donne mutuellement « la naissance par la forme qu'ils ont a rev^tue. » (76., f°. 38.) « — Qu'est-ce que la confusion? « Qu'est-ce que la mort.' Ce sont Ies « esprits vitaux, le hoen et le phe, « qui s'en vont; le corps Ies suit, se « dissout; c'est le grand relour a la « forme de ce qui n'a pas de forme, « laquelle est la non-forme de la forme. • C'est a elle que I'homme s'identifie « par sa science. » {lb., i° 40.) C'est aussi le meme ohilosophe qui disait : « Le desir immodere de la science a « trouble le monde. » KiA-TSEU et Han-fei-tseu. Les phi- iosophes de I'ecole du Tdo qui viennent ensuite , mais qui ont beaucoup moins de celebrite que les deux precedents, sont Kia-tseu et Han-fetUeu (environ 400 ans avant J. C). L'ancien histo- rien Sse-ma-thsien dit que leur doc- trine se rattache essentiellement a celle de Uoang-ti et Ae Lao-tseu; mais des ecrivains de I'ecole de ce dernier phi- losophe les repoussent formellement en disant que ce sont leurs commen- taires sur les lois peiiales qui ont fait leur reputation, lesquels commentai- res, plems de prescriptions cruelles et de doctrines violentes , n'appartiennent point a des sectateurs de Lao-tseu. HoAi -NAN-TSEU. On compte aussi Hoai-nan-tseti , prince philosophe du deuxieme siecle avant notreere, parmi les ecrivains de I'ecole de Lao-tseu, quoiqu'il ait traite beaucoup de sujets etrangers a la philosophic. II a donne de magnifiques developpements a cer- tains points de la doctrine du Tdo (*). II pose aussi YUnite comme principe absolu de toutes choses. « — C'est de la grande et supreme « Unite, dit-il, que sont sortis tous « les Stres de ITnivers; c'est d'el.le (*) A'^oir entre autrps son Erpfication aes Esprils et des Genies : Kouelcliin-liiun, dans le Recueil intitule : Tcfiou-tstu-wei-fidn, k. i5, fol. 42 a 6r. 364 L'UNIVERS. « qu'ils ont re^u leur existence. Cette « Unite est la racine foiidanientale de « tous les ^tres; c'est la grande Haison m supreme (Tao) qui est sans aucune <■ esp^e d'opposition. « Celui qui connalt I'llNirB , dit-il « encore, alors ii n'est rien qu'il ne « connaisse; celui qui ne connalt pas « I'Dnite, ne connait absolument rien. » La description qu'il fait du Tdo et de la Raison supreme, de cette Unite absolue et sans limite est de la plus grande beaute. « Cette Raison supreme {Too) era- R brasse le Ciel et soutient la Terre ; « il n'est point de hauteur a laquelle « elle ne puisse atteindre ; il n'est point « de profondeur a laquelle elle ne « puisse penetrer. Elle est si immense, « que le monde entier ne peut la con- « tenir, et cependant elle se trouve « comprise dans la plus petite unite. « C'est par elle aue les montagnes sont • hautes, que les abimes sont pro- « fonds, que les quadrupedes mar- « client, que les oiseaux volent , que le « Soleil et la Lune eclairent, que les as- « tressuiventleurs coursperiodiques. » HO-KOUAN-TSEU Ct YaNG-TSEU OU Yang-tchou. Ces deux philosophes sont aussi consideres comme appar- tenant a I'ecole du Tdo. lis etaient contemporains de Meng-tseu (400 ans avant notre ere) , qui attaque le der- nier eu ces termes, dans son livre classique : « II n'apparait plus de saints « rois pour gouverner I'Empire! les « princes et les vassaux se livrent a la « licence la plus effrenee; les lettres « de chaque eudroit professent les « principes les plus opposes et les plus « ctranges ; les doctrines des sectaires « Yang-tchou et Me-ti remplissent « I'Enipire , et les doctrines otficielles « de I'Empire, si elles ne reiitrent pas « dans celles de Yang, rentrent dans « celles de Me. La secte de Yang rap- " porte tout a soi; elle ne reconnait « pas de princes ; la secte de Me aime " (out le monde indistinctement; elle « ne reconnatt pas de parents. Ne point « reconnaitre de parents , ne point re- « connaUrede princes, c'est ^tre comme « des b^tes brutes el des betes fauvps. « Moi, effraye des progres que font « ces dangereuses doctrines , je de- « fends celle des saints hommes du « temps passe ; je combats Yang et « Me ; je repousse leurs propositions « corruptrices, alin que des predica- « teurs pervers ne surcissent dans I'Enj- « pire pour les repandre. Une fois que « ces doctrines perverses sont entrees « dans les cccurs, elles corrompent les « actions, elles corrompent tout ce qui « constitue I'existence sociale. » {Me7ig- tseu , L. 1 eh. 6, § 9.) Nil novi sub coelo ! Tchou - hi pretend ( Philosophes bouddhisfes , C. 9 ) que c'est Lao- TSEU et Tchouang-tseu que Meng- tseu avait en vue en nommant Yang et Me. Tching-tseu^ autre philosophe confuceen , du onzieme siecle de notre ere, dit que « les doctrines dangereuses « et funestes de Yang et de Me vien- « nent surtout de Kia-tseu et de Han- « iseu, el que les doctrines dange- « reuses des bouddhistes vienneut sur- « tout de Yang et de Me. Yang, par « rapport au moi, a cause du moi, met « en (Joule la justice; Me, par I'exten- « sion qu'il donne aux sentiments d'a- « mour et de bienveillance, met en « doute I'humanite. Am et Han-fei « etaient des hommes rustiques et sans « importance, qui paraissaient pouvoir « etre trailes avec indifference; c'est « pourquoi Meng-tseu s'arrete a ses « attaques contre Yang et Me, et fait « leurs erreurs celles de son siecle. » Lie - tseu parle souvent de Yang- tchou. Le Choix des anciens philo- sophes ( Tchou-tseu-han ) contient un petit fragment de ce philosophe et plusieurs de Me-tseu. On sail peu de choses de Ho-kouan- tseu, dont il ne reste que des fragments mutiles. II recut le nom sous lequel il est connu , et qui signifie le philoso- phe au bonnet de crete de poule ho , parce qu'il en porlait toujours une sur la tele. C'etait un anacliorete qui vi- vait dans les forets , a la manierc de plusieurs phiiosoplies indiens, el mfime de plusieurs anciens philosophes chi- nois. Une ancienne collection d'ou- vrages publics sous la dynastie des //a« (200 ans avant, et 200 ans apres notre ere) nous a conserve un ecrit de ce philosophe. On le trouve aussi dans le Choix des anciens philosophes CHINE MODERiNR. 365 (Mv. IV, f° 28). II disserte sur le Tdo, sur son influence, ses lois; sur I'huma- nite, la justice, sur les bonnes ceuvres. II a aussi one doctrine mystique des nombres, dans laquelle il pretend que le nombre 25, compose de 5 fois5, est la raison du monde , et que 36 , com- pose de 6 fois 6, est la loi de I'annee {Tckou-tseu-han , K. IV, f° 30); c'est absolument la doctrine de Platon , qui attribue a ces memes chiffres, 5 et 6, la ligure du monde, et qui dit que les rncines des spheres sont 25 et 36. £C0LE DES LETTRES {jOU-Mu). *^ Doctrine de Khoung-tseu et de ses disciples. Apres avoir expose, avec quelques de- tails , la doctrine de Lao-tseu ou du Too, si importante et si peu connue jusqu'ici, nous allons reprendre I'expo- sition de la philosophic de I'ecole des Lettres , qui reconnait les rois ou em- 5 pereurs Fou-hi (I'inventeur des pre- miers lineaments de I'ecriture chinoise), Chin-noung (ledivin laboureur), Hoang- i 1 iiitfliiuencf^ du pre- « mier piiiicipe femelle Yin, et que le « Chin est Tin tell liience du premier « priiicipe mflie Y&ng. Reiativeineiit a « ce que Ton nomme I'unique principe o^primog^neaerijorme, ce qui, de ce « principe, va droit en avant, cest ie « Chin, et ce qui forme opposition et « retoiirnea son foyer, a sa source, c'est « le Kouel. Ces deux modes d'etre en « realile n'en formeut qu'un. Ce sont « des facultes, des activites meritoires « abstraites {te) comnie celles que Ion ■ nomme nature, sentiments , merites. « Les Kouei-chin sont denues de for- « mes, aussi bieu que de son ; cependant « le commencement et la fin dt-s ^ires « n'ont jamais lieu, si ce n'est par la « reunion ou la dispersion de ce qui « constitue les principes mSle et fe- « melle, actif et passif. Cest cette es- « sence constitutive des deux principes « qui forme la substance des ^tres, et « ce que ces mSmes fitres ne peuvent « perdre. » 24* Livraison. (Chine modebise.) Cette explication du commentateur chinois est parfaitement conforme a la doctrine du Y-Klng , oil il est dit : « Ce « qui, dans le premier principe (mSle) « Yang , et dans le premier principe « (femelle) Yin, ne pent 6trescrute, pe- « netre, approfondi, on I'appelie Esprit « {Chin). » On pent voir, par ces nombreux pas- sages tires des ecrils sur le Y King, at- tribues a Khoung tsbu , et traduits, pour la premiere fois, dans une langue europeenne (comme presque tout ce que nous avons cite jusqu'ici dans cet ar- ticle), de m^me que, par la derniere citation , tiree du second des Quatre litres classiques J et expliquee par le commentaire, en quelque sorte olficiel, de Tchou-hi, que les opinions du chef de I'ecdle des Lettres sur la premiere cause, I'origine des ^tres, I'existence des esprits, sont loin d'etre aussi expli- ciies que la plupart des missionnaires jesuites Tont pretendu, dans les deux derniers siecles , lors de leurs lonuues discussions avec les dominic'iins. Quel- que boime volonte que Ton ait, il est diflii iie de de^iager de res textes une doctrine tele que rabstrnrtion chre- lienne moilerne Pa formulee, c'est-^- dire, un Dieu distinct du monde, une tline separee de toute forme corporelle, et une vie future. Ce que Ton y trouve reellement, cest un vaste na/ufa/isme, qui eutbrasse ce que les Lettres chinois nunmieiit les trois grandes puissances de la nature : le Ciel, la Terre et V Homme, dout rinfluence et Tnciion se penetrent mutuelleuient. tout en r6- servant la suprenmtie au Ciel. Ce n est point dans la periode dunt nous nous occupnns, qui est encore, comme nous I'avons deja dit, une periode concrite , que i'on rencontre les S|ieculaiions abstraites de la pen>ee philosophique et relij;ieuse des temps posterieurs; et , loin que les pliilosophes modernes de la Chine aient denature et n.aterialise les conceptions de I'antiquite, ainsi qu'on i'a souvent pretendu, ils leur ont piutdt donne un developpement toutcontraire, comme nous le verrons dans i'examen de la troisieme periode. Cest en con- fondant, comme on I'a toujours fait, les textes el les opinions de toutes les ^poques, que Ton est parvenu a exposer 24 fto Lt^NlVERS. des doctrines qui n'a^parti^nneot h au- cun texte et a aucunc epoque. Que Ton ne se mepr<>rine pas cepen- dant sur notre pensee. Nous sommes loin de pret^ndre que les doctrines des inciens Cliinois, et celles de Khoung- TSIU en parliculier, iuVnt M materia- listes ; rien ne serail plus oppose et nux faits et a notre opinion persoimelle. Au- Cun phiiosophe n'a altribue au OV/i(ne plus grande part d;es lie vioent qu'wi certain temps, « oil dit d'eux qu'//s ne perisxent pas ■ tout entiers. Voila ce que signide • J'expression, ne pas perir tout *«- « tier { pou hieou). » {TsO'tchouan, K. 5,f 32.) On pent voir, par cette citation et cette traduction fidele d'un texte qui n'avait Jamais ete traduit dans una lan- gue europeenne, si ie pretendu conser- vateur des dogmes religieux tradition- nels en a scrupuieusement conserve un, que Ie philosophe Khoung-tseu, son conteiiiporain, aurait altere, ct m^ine supprime, dans la revision ou la re- daction des King, ainsi que dans ses propres ecrits. Loin qu'il y ait dans Ie texte precedent, dont I'anciennete re- mouie au cinquieme siecle avant notre ere, la moindre trace d'un pareil dogrne, ia supposition qu'une partie de nous- m^mes, I'dme ou Ie prim-ipe pensant, ftuisse sub>ister personnellement apres a mort, n'est pas mime faite, et ne se rencontre dans aucune autre partie du mime livre. Nous igiiorons quel travail Platon et Aristote firent sur les dogmes re- ligieux de leur pay><; ce que nous sa- vons , c'est que ce qui a eleve Ie philo- sophe chinois au rang qu'il occupe de- puis plus de di-ux miile ans, parmi les grands honimes qui ont Ie plus contri- bue a civiliser ie monde, ce qui Ie met ii cdte de Platon et d'Aristote, c'est qu'il a ete doue de cette haute raison philosophique qui a regu la mission sainte de proclamer les ventes eter- nelles renferni^es dans Ie sein de I'eter- nelle et su|>r6iiie rai>on, et de guider riiumanile dans les saintes voies du bien. Oui, sans doute, Khoung tseu a ^t^ I'apotre infatigable de la justice et de la raison , et c'est la ce qui fait sa gloire, el c'est la ceqiii justilie ces pa- roles d'un empereur chinois , gravees sur Ie frontispice des temples elev^s dans toute la Chine a notre philosophe, quit est Ie plus grand, Ie plus saint et leplus vertueux des instituteurs du genre humain qui ont paru sur la terre ! Morale et politique de Khoung- TSEU. — C'est dans Ie Td-hio, ou la Grande Etude (Ie premier des Ouatre livres classit/uesj et dans Ie Tchoting- yoiing , ou V Inoariabiiite dans Ie mi- lieu ( Ie second des Quatre lirres das- siques ) que la doctrine morale de Khoung tseu a ete Ie plus nettement exposee, et qu'elle a recu , pour ainsi dire, sa Ibrmule metaphysique. Le philosophe chinois part du priiicipe que i homme est un etre qui a recu do Ciel, en mime temps que la vie physique, un principe de vie morale qu'il doit culliver et developper dans toute son eteiidue, afin de pouvoir arriver a la perfection, conformement au modele celeste et divin. « La loi de la grande etude (dit-il « dans le Td hio), ou de i'etude propre « aux homines raisonoables, de la phi- « losophie pratique, consiste a deve- « lopper et remettre en lumiere \eprin- « cipe lumineux de la raison que nous « avoiis requ du Ciel, a renouveler les « homines, et a placer sa destination « definitive dans la perfection ou le « souverain bien. » (^ 1.) ^Ar principe lumineux de la raison, I'inlerprete Tcliou-lii dit que Ton doit entendre « ce que I'homme obtient du « Ciel, et qui, eta i it immateriel, in- « telligent et iion obscurci par les pas- « sions , constitue le principe ration- « 7iel chez tons les homines, el fait « sentir son influence sur loutes les ac- « tions de la vie. » (Voy. notre edition chinoise , latine et/raiicaise, p. 18.) La nature morale de Vhomme, son principe spirit uel, sont done clai- rement et positivenient admis par Khoung-tseu et son ecole. Voici comment cette nature morale , ce principe spirituel, est defini dans le TchoHng-ijoHr.g : « Le mandut du ciel s'appelle nature « rationnelle ou morale^ le principe " qui nous dirige dans la coiiformile « de nos actions avec la nature ration- « nelle s'appelle droite voie, raison « (Tdo); le systeme coordonne de la « droite voie, de la raison, s'appelle « Doctrine des devoirs ou Institutions « suciales. » (§ I.) Le commenlateur Tckou-hi s'e.vpri- nae ainsi sur ce passage important : - ' « Le mandat du ciel est conime un CHINE MODERNE. 373 « ordre, une mission recue*, la nature '< rafionnelle ou morale , c'est la voie ' droite, la raison. Le Ciel, par le « moyen du Yin et du Ydng ou du < principe feinelle et du principe male « et des cinq elements, doniie la nais- "■ sance , par generation et par trans- " formation, a tous les ^.tres de I'uni- « vers. Le principe materiel aeriforme < et primogene {khi) developpe les for- i nies de ces ^tres , et la raison (li) ' leur est aussi attribuee, conferee, " donnee comme un mandate un or- ' dre. U suit de la que la vie [sing) de « riiomme, aussi bien que celle des « autres ^tres vivants {we), par cela « mdine que chacnn d'eux a obtenu ce « principe rationnel qui lui est con- « iere, est considereeeommeconstituee « pour se conformer aux prescriptions « des cinq vertiis cardinales; c'est ce « que Ton appeile la nature ration- « nelle{sing[*]). L'homme, ainsi, que « les autres etres produits, obeis'sent « chacun a leur propre principe ou « raison d'etre, aux lois speciales de « leur propre nature {sing-tchl-tseu- « jin ) ; alors leur action operee jour- « nellement est intrinseque ou reside « en eux-memes. Aucun d'eux n'existe « sans avoir une voiequ'il doive suivre, « dans laquelle il doive marcher; c'est « alors ce que Ton nomme droite voie « (7ao, metaphoriquement raison). « La nature rationnelle {sing) et la « voiedroiteou la raison (ra'o),quoique « identiques,differentcependantenquel- « que chose par Irur constitution propre. « C'est pourquoi ne pas pouvoir ne pas « depasser (cette voie droite), ne pas « I'alteindre est egalement une faute. « Le saint homme s'appuie sur re que « les hommes et les autres ^tres doi- « vent pratiquer et suivre, d'apres leur « constitution propre, et le coordonne, « afin de constituer la loi qu'il propose -< au monde ; c'est alors ce qui est ap- « pele la Doctrine des devoirs ou Ins- n titutions sociales {kido). Ce sont les « usages pratiques {li), la musique {*) Ce dernier caractere chinois est le meme que celiii qui signiiie la we, plus un autre element figuralif qui signifie le coeur, I'dme (sin), c'est-a-dire le principe pen- sant. « {yd)\ les lois penales {king), ies lois « administratives {tchlng), et tout ce « qui en depend. Or, I'honune saitper- « sonnellement qu'il a une nature ra- n tionnelle, mais 11 ne sait pas que « oette nature rationnelle precede du « Ciel; 11 sait que ses actions ont une « voie droite, une raison, une r^^gle; « mais il ne sait pas comment la deri- « ver, la faire sortir de sa nature ra- « tionnelle; 11 sait que le saint homme « possede la doctrine des devoirs, les » institutions sociales, mais il ne sait « pas qu'il s'est appuye sur ce qu'il y a « de plus certain , de plus solide en « nous pour les composer. C'est pour- « quoi Tseu-sse (le petit-fils et le dis- « ciple de Kaoung-tseu, qui a redige « le Tchoiing-yoiing d'apres les ins- « tructions de son maitre, part de la « pour poser ces principes des le debut « de son ouvrage et pour les rendre ma- « nifestes, et c'est aussi la meme pensee « que Toung-Tchoung-chu (qui vivait « sous les Han, vers le commence- « ment de notre ere) exprime quand il « dit : La voie droite ou la raison « ( Tan ) est la grande source qui sort « du Ciel. « Cette voie droite , cette raison « nattirelle , continue le disciple de " Khoung-tseu (§ 2), qui doit diriger « les actions, est tellement obligatoire, « que I'on ne doit pas s'en ecarter d'un « seul point un seul instant. Si I'on « pouvait s'en ^carter, ce ne serait pas « la voie droite, la regie de conduite « immuable. C'est pourquoi I'lionmie « d'une vertu superieure veille attenti- « vement en lui-meme sur les principes « qui ne sont pas encore discernes par « tous les hommes, et il niedite avec « precaution sur ce qui n'est pas en- « core reconnu et proclame comme « doctrine. « La voie droite , la raison naturelle « {Tad), dit Tchou-hi, est le principe, « la raison de ce que I'on doit pratiquer « dans toutes les actions que Ton fait « journellement , dans tous les actes « de la vie; c'est la faculte active, la « vertu intrinseque {te) de toutes les ■« especes de nature, laquelle faculte n ou vertu intrinseque a son si^gedans « le principe intelligent (sfw) 5 •' "'est » aucnn etre qui ne la possede, il n'est S74 L'UNIVERS. « aucun temps, aucunecirconstanceou « il n'en soil pas ainsi ; c'est ce qui « fait que I'on ne doit pas s'en ecar- " ter aim seul point un seul instant. " Si I'on poiivait sVn ecarter , alors « comment pourrait-on dire que I'on « s'est conforme a sa nature? C'est « pourquoi le cceur (ou le principe in- « telligent) de I'homme superieur est « toujours dans une viaiiance craintive « en ce qui concerne des doctrines qui ■• n'ont pas encore ete proclamees, ou « cedes qu'il n'ose laisser tomher dans n Poubli; c'est ce qui fait qu'il s'atta- « che a prendre toujours pour base la « raison celeste ( thUn-li) , et qu'il « s'e/force de ne pas s'en ^carter m^- " me de I'^paisseur d'un cheveu. » Le fondement de la morale de Khocing-tsku est ainsi determine de maniere a exclure formellement tout mobile qui ne rentrerait pas dans les prescriptions de la raison , de cette raison universelle, emanee du Ciel, et que toutes les creatures ont recue en partage. Aussi, sa morale est-elle la plus pure qui ait jamais ete enseignee aux hommes, et en mime temps, ce qui est plus important peut-eire, la plus conforme a leur nature. II est bien demontre, par les cita- tions pr^cedentes , que Khoong-tseu reconnaissait dans I homme un prin- cipe superieur a la matiere, un prin- cipe intelligent et done de raison , de cette raison souveraine que nous rece- yons du Ciel. Ce principe, selon son interprete , est immatiriel. Nous pour- rions, par consequent, le nommer rtme, si nous n'attachions pas a ce der- nier mot une Idee de p^renneite indi- viduelle, si nous pouvons nous expri- nier ainsi , que les philosophes chinois n'attachent pas a leur principe ration- net de I'homme. En effet, Vdme, dans leur opinion, lorsque la mort vient operer la separation du corps , refourne se perdre dans le Ciel , ou elle n'a plus d'existence propre et individuelle, ainsi qu'on peut le conclure des textes sui- ^ants: On lit, dans le Livre des Annales (ch. Chun-tlen, § 18), que I'empereur lAO monta et descend! f, c'est a-d ire moiirut. Le commentateur TsalchinAW, que, par ces deux mots, monta tides- cendit {tsoUflo), on exprime le fait qui se passe a la mort de quelqu'uu. « Dans I'acte de la mort, dit-il, I'e^- « prit vital , a^riforme , le principe « subtil (koueikhi), retpurne aM ciel : « c'est pourquoi on (iit qu'il monte. Le « principe substaqtiel de la matiere « ithi-phe) retourne a la terre : c'est « pourquoi on dit qu'il descend. » On lit, dans le Livre des Fers ( Chi- Aing), section Ta-ya., ode sur fVen- wang, fondateur Ue la dyuastie des Tcheou: « tVen-wang reside en haut. — Oh ! « comnie il illumine le Ciel! — Quoi- « que la famille des Tcheou possediit, " depuis loDgtemps, une principaute « royale, son mandat est cependant « recent. — Coniment , dans tous les <• temps et dans toules les circonstan- '< ces, les Tcheou n'auraient- ils pas « manifeste clairemcnt le mandat de « /'Empebeub iti-ming)?—{iue ff^en- « wang monte ou de.scende , — il re- « side a droite ou a gauche de I'Empe- « BBUB. » Le commentateur Tchou-hi dit, au sujet de cette strophe, que, par man- dat , il faut entendre mandat du Ciei, et par Empereur, le souverain Em- pereur (du Ciel : Chang-ti), et par a droite et a gauche, aux cotes du Chang-ti. II ajoute que le sens general de cette strophe est que, « apres la - « mes. « (//j., c}). 36.) La politique de Khoung-tseu est basee sur les m^mes principes que sa morale. Le souverain, dans I'exercice de sa souverainete , (jpit accomplir strictement le mandat du Ciel, com- me tout homme doit accomplir celui qu'il a egalement recti du Ciel, entant qu'homme; il n'y a' nas plqs d'arbi- traire dans I'un que aans I'autre', ils sont fondes tous deux sur feternelle raison , sur la nature propre et la des- tination de rhomme, qui est le bon- heur et la perfection. Ce n'est que celui qui exerce un con- tinue! empire sur soi-meme, qui n'a plus de passion que pour le bien pu- blic ., le bopheur de tous, qui est arrive a la perfection enfin , qui peut digne- ment gouverner les autres hon^nies. « Celui" qui possede I'enipire , dit « Khoung-tseu {Grande Etude, cha- « pitre 10, § 4), ne doit pgs neo;liger « de veiller attentivement sur lui mS- « me pour pratiquer le bien et evitef « le nial; s'il np tient compte de ses « principes, alors la chute de son em- « pire en sera la consequence. » Il avait une si haute opinion de la souverainete, qu'il disait : « Gouver- « ner son pays avec la vertu et ja ca- rt pacite neeessaires, c'est ressembler « a I'etoiie polaire, qui demeure im- « mobile a sa place, tandis que toutes « les autres etoiles circulppt autour « d'elle et la prpnnent pour guide. » {LUnyii, ch. 11, § 1-) Selon le mefne philpsopjie, le gou- vernement e^t ce qui est juste et droit, {lb., ch. 12, § 17.) C'est la realisation des lois eterneHes qui cjqivent faire le bonheur de I'humanitp, et quelps plus haj^tes ipt^Iigencqs, par une applica- 376 L'UNIVERS. tion constante de tou« les instants dc leur vie , sont scules capables de con- naltre et d'enseigner aux hommes. L'exercice de la souverainete , avons- nous dltailleurs {Introduction aux Li- vres sacris de t'Orient^ p. 10), n'est, dans la piiiiosopliie chinoise, que I'ac- complissement religieux d'un mandat celeste au profit de tous, qu'une noble et grande mission confiee au plus de- vout et au plus digne, et qui eiait re- tire des I'instant que le niandataire manquait a son m.mdat. (Voyez la Grande ttude, ch. 10, passim , et les notes des commentateurs.) Nulle piirt peut-fitre les droits et les devoirs res- pectifs des rois et des peuples , des gou- vernants et des gouvernes, n'ont ete enseigii^s d'uiie maniere aussi elevee, aussi digne , aussi conforme a la raison que dans les ecrits des philosophes chinois. Cest bien la qu'est constam- ment, mise en pratique cette grande maxime proclamee par la democratic moderne : Fox populi , vox Dei : la voix du peuple est la voix de Dieu ! Disciples de Khoung-tseu. Les dis- ciples de Khoung TSEu et les philo- sophes de son ecole qui, comme Meng- tseu , sans avoir requ son enseignement oral, en continuent la tradition, pro- fessent les m^mes doctrines. Seule- ment ils leur ont donne un plus grand d6velopi)fment. Ce qui n'etait qu'en germe aans les ecrits ou les paroles du maltre a et^feconde, et meme sou vent, ce qui n'y etail que logiquement con- tenu en a et^ deduit avec toutes ses consequences. Cest ainsi que Ton trou- ve dans Meng-tseu une dissertation sur la nature de I'homme (K. VI), qui fait connaJtre parfaitement I'opinion de I'ecole a ce sujet. « La nature de I'hom- « me(ou, comme la definit Tchou-hi, " la raison celeste dont I'homme est .0 pourvu des sa naissance) ressemble a • une eau courante, disait Kao-tseu; • si on la dirige vers I'Orient, elle « coule vers I'Orient; si on la dirige « vers rOccident, elle coule vers I'Oc- « cident. La nature de I homme ne « distingue pas entre le bien et le mal , « comme I'eau ne distingue pas entre " rOrient et I'Occident. » - Meng-tseu lui repondait : « L'eau, « ussurement, ne distingue pas entre « I'Orient et I'Occident ; ne distingue- « t-elle pas non plus entre le haul et « le bas.' La nature de I'homme est « naturellement bonne, comme l'eau « coule naturellement en bas. II n'est « aucim homme qui ne soit naturelle- « ment bon, comme il n'est aucune « eau qui ne coule naturellement en « bas. Si , en lui opposant un obstacle, « vous la faites refluer vers sa source, « ou jailliren huut, appellerez-vouscela « sa nature? Ce sera I'effet de la con- « trainte. — Les homines peu\entega- « lenient 6tre amenes a faire le mal; « leur nature le permet aussi. » Par cela m6me que Meng-tseu sou- tientque le principe pensant de I'hom- me est naturellement porte an bien , el que, s'il fait le ma! , c'est qu'il y aura eu contrainte exercee par les passions sur le principe raisonnabk, il s'ensiiit qu'il devait professer le Ubre arbitre, et, par consequent, la moralite des actions. Ce libre arbitre etait recon- nu par Khoung-tseu, aussi bien que par Meng-tseu, quoique ce dernier philosophe I'ait mieux fait ressortir de ses discussions. Ainsi , veut-il prou- ver a un prince que , s'il ne gouverne pas comme il doit gouverner pour ren- dre le peuple heureux, c'est parce qu'il ne le veut pas, et non parce qu'il ne lepeut pas, il lui cite, entre autres exemples , celui d'un homme a qui Ton dirait de transporter une montagne dans rOcean septentrional , ou de rom- pre un jeune rameau d'arbre ; s'il re- pondait dans les deux cas qu'il ne te pent pas, on ne le croirait que dans le premier; la raison s'opposerait a ce qu'on le crilt dans le second. Meng-tseu distingue de la maniere suivante les deux principes qui sont en nous : « Ce principe de la volition « {tchi)(\wc nous possedonscommandc « au principe vital aeriforme {khi); le « principe vital est I'ahment necessaire « des membres corporels de I'homme. « Le principe de la volition est plac^ « au sommet; le principe vital est se- « condaire. C'est pourquoi je dis qu'il « faut porter une attention continue « sur son principe de volition, et ne « pas porter la perturbation dans son « principe vital. » {Meng-tseu, K. XI.) La methode des deux philosophes CHIISE MODERKE. 577 differe aussi , comme leur earactere et leur genie. Dans Khoung-tseu , I'ar- gument appele sorite domine ; dans Meng-tseu, c'est la dialectique socrati- que, vive, spirituelle, mordante, me- nant le plus souvent ses adversaires a I'absurde. II manie egalement bien I'i- ronie. Cependant la methode, chez ces philosophes , est plutot naturelle qu'ar- tificielle. Ce n'est guere que dans les luttes de la controverse que se consti- tue I'art de la logique, pour satisfaire aux besoins de la demonstration; car il en est de nieme des luttes de I'esprit que de celles du corps; et comme, en Chine , la controverse des systemes philosophiq'ies n'a jamais ete bien grande, I'art de la logique ne s'est que mediocrement developpe. II serait impossible d'exposer ici les opinions de tons les philosophes de Tecole de Khoung-tseu qui appar- tiennent a cette seconde periode de la philosophie chinoise. Nous nous bor- nerous a citer Ths^ng-tseu et Tseu- «se, disciples de Khoung-tseu, et qui publierent, le premier, le Td-kio ou ia Grande Etude, et le second, le TchodngyoUng ou V Invariabilite dans le milieu, les deux premiers des Qua- tre livres classiques. Le plus celebre des autres philosophes de la meme ecole (parmi lesquels on compte encore JVen-tchoung-tseu, qui vivait 179- 163 ans avant J. C, et Yang tseu , qui vivait au commencement de notre ere, 32-8 ans avant J. C.) est Siun- fseu, qui florissait environ 230 ans avant notre ere. Celui-ci avait une au- tre opinion que celle de Meng-fseu sur la nature de Chomme. car il soutenait que cette nature etait vicieuse , et que les pretendues vertus de I'homme etaient fausses et mensonaeres ; opi- nion qui pouvait bien lui avoir ete ins- piree par I'etat permanent des guerres civiles auxquelles les sept royaumes de la Chine etaient livres de son temps. Ce meme Siun-tseu distinguait ainsi V existence maierielle, de la vie; la vie , de la connaissance ^ la connais- sance, du sentiment de la justice: « L'eau, disait-il , et le feu possedent « I'element materiel {khi), mais ils ne « vjvent pas; les plantes et les arbres « ont la vie, mais ils ne possedent pas « la connaissance; les animaux ont la « connaissance, mais ils ne possedent « pasle sentiment de la justice. L'hom- « me seul possede tout a la fois I'ele- « nient materiel, la vie, la connais- « sance et, en outre, le sentiment de « la justice. C'e>t pourquoi il est le « plus noble de tous les ^tres de ce « monde. <> Nous passons niaintenant a I'expo- sition de la troisieme periode de la philosophie chinoise. Troisieme periode. Depuis Yang-tseu, qui florissait vers le commencement de notre ere, il faut franchir un inlervallede temps de pres de mille ans pour arriver a la troisieme periode de la philosophie chinoise. Les guerres interieures et exterieures aux- quelles la Chine fut livree depuis la chute de la dynastie feodaledes Tcheou, les luttes qu'elle eut a subir pour at- teindre a I'unite politique, les nora- breux changements de dynasties ne permirent pas a la speculation philo- sophique de prendre un essor libre et spontane. Cependant apres la destruc- tion des livres ordonnee par I'empe- reur Chi - hoang -ti ( 2i 3 avant notre ere), deux grandes dynasties chinoises, celle des Han (202 avant et 220 apres J. C. ) et celle des Thang (618-905) brillerent par la culture des lettres , qu'encouragercHt publiquement plu- sieurs empereurs, ce qui, peut-etre, fut ia cause de la direction en quelque sorte tout officielle qu'eiles suivirent. En effet, la plupart des travaux litte- raires de cette epoque sont purement philosophiques ou historiques , en m6- me temps que les anriens livres echappes a la destruction officielle sont etudies et expliques par de noinbreux comnien- tateurs. Ce fut seulement sous le regne des premiers empereurs de la dynastie des Soung ( 960- 1 119 de notre ere) , que se forma une grande ecole philosophique, laquelle eut pour fondateur Tcheou- lien-ki ou Tcheou- tseu, pour promo- teurs les deux Tching-tseu, ct pour chef le celebre Tchou-hi. Le but hau- tement avoue de cette ecole est le de- veloppement rationnel et systematique de I'ancienne doctrine enseignee par S7S L'UKIVERS. Foit-ki, dans son Livre des Trann/pr- maUoHs ( i-Alng),aian que ppr les autpfs ancieos sa.nes, et dont Khoung- T»Eii s'^tait f.iit, sous le rapport moral ft ftolitique, le propagateur et I'apotre if)t°9tij£al)ie. Nous trouvons la confirmation de cps fait» dans le passage suivafit de Tchou-hi: « La veritable doctrjpe est • difflcilenifipt ijtiise en junijere et s'pbs- « curcitfaciiienient.PjBpMis YaoetChun « jusqu'a KHOU>'Cr-TSEti et a Meng- « tseu, it y a un intervalle de temps « dVnviron deux inille ans, pendant les- <■ quels cettp doctrine a des eres d'eclat « et des eres d'obscurites. De Meng- « tseu a Tcheqii-tseu et aux Tching- ,<» tseu (ies disciples de ce dernier phi- « losopbe), son ere d'obscurite est de « quinze sjecles, et son ered'eclat n'est « pas ni^me de cent ans. Apres la « voQTt des Tching, les quereljes, Ies « controverses passionnees remplirent f. I'eeole, et les bonnes traditions ne f manquerept pas de se perdre. Que la « bonne dqctrine ne soit pas propagee, « et Ton verra bientot les secies de « Lao-taeu et de Sakya (on Bouddha) « conce\oir de gnmdes esperanoes. B C'est cependant ce que le sie(^lp ne « veutpas comprendre. » {Tchpu-tseu- isiqu4n-ckou , OEuvres completes de Tchou-hi, K. 52 , f" 2.) La (o\ phiiosophique de Tchou-hi etait plus grande que celle de son sie- cle, car il a ecrjt ces belles paroles: n La doctrine veritable {tdo) a ton jours « subsiste dans If monde, et n'a jamais « perj ; sQulempnt ce^te doctripp elant " confipe auji hommes, les uns rpm- « pep^ avec el|e, les autres la conti- « nuent scrupulepsement. C'est pour- «• qupi s^ df^stjnee dans le mo)ide » est d'^tfe tantut ecla^ante , taiitpt « obscure. C'est toujours I'ordre dii " cjjel qui en decide ; ce n'est ni la fpfce, « ni la ^agesse de I'homme qui peuvent « en disposer. » {lb., f° 15 v".) L'etablis^pment ep Cbine dp deux grandes ecoles philosophiques rivales : pelle de Uto-tseu ou du Tdo {tn chi- qpis Tdq-kid , « ^cple du Tdo » ) qqe pous avons fait connaitre precedeni- pieut, et pelle de Fo ou Bouddha (en chmo'is Che-kid,po\irSaki/a-kid, « eco- le de .Sakya, » npm patronymjquc de Bouddha), impprtee de I'lpde en Ocat^ dans le premier siecle de nptre ere , avail di) necessairement susciter des cpntroverses avec les lettres de I'ecoje de Khoung-tseu (en chinois Joti-kid), et ces controverses durent aussi (aire reopnnaitre les lacunes frappantes qui pxjstaient dans les doctrines de cette .c|erniere ecole concernant I'existence et les attributs d'une premiere cause, ainsi que toutes les grandes questions specu- latives a peine elfleurees par I'ecple de Khoung-tseu , et qui avaient reicu une solution quelcpnque dans les Ecoles ri- vales. Aussi les plus grands efforts de I'ecol* des Lettres modernes ( nomipes par lies Chinois fieou-jofi : Lettres pos- terl^urs, par opposition aux anciens Lettres plus rapprocbes de I'cppque de Khoung -TSEU , qu'ils npmnjent Thsi^n-jou : Lettres anterieurs). que Ton pourrait appeler NeQ-covfypeens , s'appiiquerent-ils a ces questions me- tapUysiques. Mais, afin de donnerplus d'autorite a leur systeme, ils preten- direjit Tetablir sur la doctrjne dp I'aiJ- cierine ecole. Vpici comment ils prpce- derent. Le Comn\ent€iire traditionnel, sur V Appendix ay Litre des Tran^fqr- mations ( Y-King), intitule Hi-tsen- tcll^oudr\ , attribue a KHOuisG-T$f^ pat.' les uns. a fVang-^ou par Ips au- tres, contient de pombrpu^ passages (dont quelques-uns out et.e cites pfp- ced^mment) sur I'origine et la trans- fprmation des choses, sur les lois f|yi president aux pjienomene? et aux evii- nements du monde, sur les causes et les effets. Ce Commentaire tradition,- ne(, qtii fut decouvert, dit-on , par une jeuiif fill<;, dans une aucienne ha- bitation de Lao-tseu, au milieu d'une plage du fleuve Hoang-lio, sous le re- gnft de Iliovun-ti d^s Han ( 37-49 av, nptre ere; Y-^ing, ancien teste, K. 2, f". 106), pffre, quel qq'en soit rauteup. la premiere exposition explicite et iij- ttijigible des tou,ceptipns pptologiqnes attrjbuees au.x aiicjens pbilpsopl^ps cfif- nois de I'^ccMe dont nou? nous occi^- ppns. Npus jjeypp^ mpme ajoutpr qqe ce traite a une assez grande analogje avec le livre de Lao-lseii, ptqup, sous une terminologie souveijt dinerpnte, on ne iai\ que retrouver Ips rp^mes CHINE MODERNE. idees ; ce qui ferait supposer avec quel- que vraisemblance , independaminent de pliisieurs autres causes, que cetexte n'appartient reellement pas a Kholng- TSEU, niais bien a un auteur poste- rieur t-t familiarise avec les doctiiues de Lao-tseu (*). Le fait de la decou- verte de ce Iraite ( que Ton pourrait aussi comparer a celui d'Ocel/us In- caniis), dans une apeienne habitatioi} de Lao-tseu, ne peut que preter une graude force a cette conjecture. Quoi qu'il en soit , Tcheou-lien-ki s'empara de la conception de la cause premiereou Augrand/aite [Tdi-kil**]), placee pour la premiere fois dans ce traite, au sommet de tons les etres, pour construire le Tableau jiguratij de son systeme ontoiogique; mais il en modifie ', ou plutot il en determine la signidcjition en nommant son premier principe le sans faite eX. le grand falte [woU-ki eiilh-idt-ki , « sine terminis et magnus terminus » ) , que Ton peut aussi traduire par ViUimite et le limite, ^indistinct et le dernier terme de la distinction. L'auteur du Commentaire traditionnel avait dit ( npus traduisons selon I'interpretation des connnenta- teurs chinois): « Dans le substrattim primordial de « toutes les formes organisees (y[***]) (*) Les ecrivains chinois qui attrjbuent le Commentaire traditionnel {Hi-fseu-tc/iouan) i ff^ang;-sou , nous paiaissent plus pies de la verile ijue les autres, par celte eoiisiclera- tion que Wang-sou etait le frere ou du tnoins le proche parent de Wang-pl, qui a com- meute le livre de Lao-tseu. Seult-niPut ces deux ecrivains, ayant vecu sous les W^^ iA^ ?2o a 264 de noire ere), il y aurait jnipos- sibilite a ce que le commentaire du premier gur le JJilseu eut ele decouveit sous les Han, avaut notre ere. Ou peut concilier les deux tradilious, en admeitanl que le texte decouvert alors appartenait bien ;iu Y-^ing, mais n'elait pas celui dont il eat ici quesfion. (**) L'anclenne forme de Kl represente le comble d'uu batiment, ou Ton voit les pieces de charpenle ou les chevrons aboutir au faite sur lequel ils s'appuienf. (***) L'ancienne forme figurative de ce terme represente le soleil et la lune, unis par un lien. EUe donne I'idce, dit un lexi- cographe chinois, de {'ascension et de la desceute du soleil et de la lune. L'auteur du Commentaire traditionnel de- « existait le grand faite; celui-ci en- « gendra les deux grandes effigies (ou « le Ciel et la Terre); le? deux grandes « effigies engendrerent les quatre li- «gures; les qnatre figures engendre- « rent les hujt diagrammes symBoli- « ques (Koiid); les huit diagrammes « syjnboliques determinerent leschoses « heureuses et les choses malheureuses; « les choses heureuses et les choses « malheureuses donnerent naissance a « toutes les actions humaines. » ( Y- King, anc. texte, K. ^2, T 126, et nouv. texte, ch. 11.) Tcheoii-tseu pose aqssi au sommet de sa construction metapl)vsiaue deux €tres coeternels, ou plutfit les deux termes Ahine m^me equation ontolo- gique qu'il nomme le sans faite ou Vil- limite , Vindefini , Vindistinct {wqu- ki [*J ) , et le grand faite ou le point culminant de la creation sensible {tdi- ki). La difficult^ est de savoir que! est le veritable sens que ce philosophe at- tachait a cette premiere formule de son systeme. Avait-elle pour lui la meu'.e signification que la formule anterieure rapportee ci-dessus.? ou en avait-plle une autre? De la solution exacte de cette question depen(j rintelligence ve- ritable de tout le systeme pliilosophi- que que nous exarniHons. Dans la pensee de Tauteur du Com- mentaire traditionnel, le prernier ter- me de son equation ontologiqiie signi- fiait la vie universelle {singsong) dans toutes ses manifestations et transfor- mations {Ili-tseu-tchoudn, ch. 6). Ce- tait, par consequent, plutot un effet qu'ijne caiise. surtput une cause iiitel- ligente. 1| est vrai que Ton pourrait considerer la vie comme cause et effet tout ensemble. Les comiiientateurs chi- nois disent que la vie univex&elle est le produit de I'union des deux pretfliers principes male et femelle. Tchouhiy qui a Tesprit le plus net et le plus lo- gique de tons, ajoute {lb., ch. 11) : « Toute unite engendre la dualite, par- finit lui-meme ce terme en disant que c'est la vie universelle. (*) Ce TVou-ki, par ime coincidence sin- gnliere, a le meme sens etymologique et phi- josophique que le dcixeipov d'Anaximandre et de Pythagore. 880 L'UNIVKRS. « ce que I'unit^ est une cause qui a en « elle sa propre raison d'etre. Le ca- - ractere }' (du tcxte en question) si- te pniOeles manifestations (ou passages « du Non-fitre a I'fttre) des deux prin- « cipes male et femeile ; le grand Jalte, « c'est leur cause efdciente (li). » Le second terme de I'^quation serait done une cause efjicienle intelligente ope- rant comme telle sur son premier ter- me copxistant, mais passif. Le com- mentateur de Vancien texte , poste- rieur a Tchou-hi, s'accorde avee ce dernier, mais il ajoute ces paroles si- gnificatives : « Dans le sein du y pri- " mitif (oil de tontes les manifestations « vitaies en puissance) existait le sou- « verain maltre de la raison supreme, « nomme grand faife ( Yeou tchi td « tchi li tchu tsdl y& khl tclwAng, « ming tdl ki). C'est ce grand faite n qui, en engendrant le Ydng el le Yin « (le premier principe mSle et le pre- n mier principe femeile ) , forma les « deux grandes efGgies (le Ciel et la « Terre), lesquelles ont pourexemple, <> pour loi (/a), \t grand faite {*), etc.» Pour savoir si Tcheou-lien-ki a ainsi entendu sa premiere formule metaphy- slque, ou s il y attarhait un autre sens, nous avons cru devoir traduire ici in- tefjraiement I'explication que lui-mfime a donnee de sa construction ontologi- que figuree , comme le moyen le plus sdr de faire connaiire exactement son systeme, et d'eviter d'interminables controverses. Le grand recueil de la Philosophie (*) Un cominentateur celebre des Lhres canonlques, Koiing-lng-ta (&1^]-&!^^) de notre ere) dit, an siijet du lexte ra|)|)orie ci-des- siis, que le Tdl-ki, c'est ce qu'on appelle •■ I'elenienl maleriel primordial (yueii-fi/ii), « leqnel a precede la division on separation - du Ciel el de la Terre, lorsque eel elemenl « elait dans un elal de confusion, et ne for- <• mail qn'un tuiil unique. » On vuit que le cummentaleur chiuois du septieme siecle pensait autrement que celui du qualorzieme. naturelle (fondle par Tcheou-lien-Ki) et intitule : Sing-li-td-thsiov6n-h6ei- thniing (*) , c'est-a-dire , Somme com- plete de la philosophie naturelle^ don- ne le tableau Jiguratif su\\3nt du sys- teme philosophique que nous avons a expliquer : (*) Public pour la premiere fois, la Irei- zieme annee yoiwg-to (i4i5 de noire ere)], avec une preface de I'empereur Wen ti des Ming, et reiniprinie sous la dynasiie tarlare regnanle, en 34 vol. rliinois, in-4". Le P. Premare, dans la leltre inedile con- servee a la P>ibiiotlic(|ue nalionale et que sou elendue nous empdclie a noire grand regret de rapporlcr ici, s'l-xprime ainsi au sujet du systeme qui nous ocrupe : << Ce fut sous la dynastic des Soung que Tcheou-lien-ki s'avisa le premier de faire uu systemt; de physique, et il a eu le bonheiir que presqiie tons les lellres qui lout suivi rout regardc comme leur niailre. Il sufGl d'exposer le gros de re systeme pour faire sentir ce qu'il vaut. Ou pent le reduire a irois points : « 10 II y a dans I'univers un elie qu'on ap- pelle K'i; cela n'est point figure, mais ii peut le deveuir. C'est comme uu vase dans lequel esl un autre dtre (|u'on nomme li , et qui est tellemenl au-dessus de loule figure, qu'il esl impossible qu'il en prenue jamais une. C'est Tc/ioit-lii, le plus fameux des dis- ciples de Lien-ki, et qu'on fait passer pour le prince des alhees; c'est Tclwii-lu qui de- finit ainsi ces deux etres : « Dans I'univers , X dit-il, il y a li et il y a ki. Ce qu'on eiilend « par //, c'est la raison qui esl au-dessus de « toule figure, el cpii est comme la racine « d'ou sortent lous les elres. Ce qu'on eiilend « par ki , c'esi le vase , sujet a la figure el X I'instrument donl tout est fait. >• « a" Ce ki ou matieie, si ou peut I'appeler ainsi , se trouve tour a lour en muuvement el puis en repos; en repos et puis en mou- vement. « !(<■ La matiere, duuee de ces deux qualites radicales, se divise eu cinq sorles d'etres, qui soul I'eau, le feu, le bois, le nielal et la terre. Mais ces cinq sorles de malieres ne soul reellemenl que les deux d'oti elles sor tent. » CHINE MODERWE. 381 Tableau Jiguratif du Tdi-ki (TaI-ki-thod). Tou$ Ces itres de funivtrs en refoivent la vie. TRADUCTION DE L'eXPLICATION CHINOISE. « Le cercle Q (^) c'est ce qui est ap- « pele le sans limites et le grand faite a [woU ki eUlh tdlki : « Sine terminis « et magnus terminus »). Par son mou- « vement il constitue le ydng ; par son « repos il constitue le yin : c'est la sa « substance fondameniale, laquelle, tou- « tefois , n'existe point separement du « yin et du ydng (*). Le yln et le ydng « designent ses modes d'etre; sa subs- « tance fondameniale , qui n^ est point « separee de ces deux modes d'itre, « exprime ce qui le constitue. « La seconde figure b du Tableau re- « presente tout a la fois le moiivetnent « du O Tdi ki et le ydng; le repos du « Tdi-ki et le yin. Le cercle iriterieur « noir # de la figure a represente sa « substance fondameniale ou primor- « diale. La partie gauche de la seconde « figure b represente le monvement du « ydng; ce sont les modes ou attributs « {young) du Tdi-ki Qi P^r lesquels il « manifeste son action. La partie droite « represente le repos du yin; c'est la « substance {thi) du Tdi-ki par laquelle <• il est constitu^ comme €tre siibstan- n tiel. Ces deux parties ou modes d'etre « (de la fig. 6) sont mutueltement ori- « gine ou cause Tune de I'autre. » (*) Le mouvement et le repos sont les premiers attributs, modes ou accidents qui peuvent faire connalire la substance du premier principe. Ces attributs, modes ou accidents sont done veritablement la substance de cfi premier principe , el n'en sout point separes. <« Les cinq elements disposes ainsiX-' le feu , IVau, la lent , le bois , le mital , sont produits par les manifestations ipMn) du principe ynng uiii au prin- cipe yln. La ligne descendant a droite exprime les manifestations du prin- cipe ydng; la ligne descendant a gauche exprime I'union du principe 1 yin. L'eau est le substratum {c/n'ng) du princfpe yin; c'est pourquoi elle est plac^e a droite de la figure; le FKU est le substratum du principe ydng; c'est pourquoi il est place a gauche. Le bois est le produit ^le- mentaire du ydng, c'est pourquoi il vient immediatement apres le feu; le METAL est le produit rudiinen- taire du yln; c'est pourquoi il vient imm6diatement apres Veau. La ter- BE est I'elenient materiel pianant 382 L'UNIVERS. « dans I'espace ( tch^Hng-khi ) , c'est « pourquoi elle est plaoee au milieu , et « relie sur sa surface I'opposition [] du « feu et de Veau. « Le yin est Torigine du ydng, coni- « me le ydng est Torigine A<.\ yin. L'eau » etant dunnee, vient le bois; le bois « etant donne , vient le feu ; le feu n etant donhe, vient la ferre; la terra « ^tartt donnee, vient le metal; le \ne- « tal etant donn^, on retourne a l'eau, « comme a une chalnedontles anneaux a n'ont ni commencement ni fin. Les « cinq priiicipes materiels {oil khi) se « repandent, et lesquatre saisons pfen- « nent leiirs cours. « La generation des cinq elements, « dans I'ordre susdit, precede imme- n diatement du yin et du ydng, les- « quels sont des modes d'etre du Tdi- « ki.. . Le yin et le ydny r^iinis sont « ce qu'il y a de subtil et d'epais, d'es- «iqOe. Nous devons ajouter quelques eclair- cissemenlS sur te systeme. Tchou-hi pretend que Tcheou-lien-ki, « par les termes de sans limites et de « grande limite ou grand faite {Tdi- n ki-eHlh-woH-ki) , na pas voulu dir6 « quil y eilt un etre supeneur au Tdi- * ki; mais que, en operant une division « (pour le besoin de I'esprit) , il y avait « un ^tre non limite pafr des rorrnes « sensihies [ivo-tiki). II dit seulement « que le Tdi ki n'existe point a la ma- « niere des etres rorporels tombant sous « les sens... IS^tre illimite (woit-M) « est la cause efjiciente {li), depourvu^ « de formes sensibles. La grande li- « mite (Tdi-ki), c'est la cause ejjicientb « (li) du premier principe m3le ydng , « et du premier principe f^hielle yin, « ainsi qae les cinq elements (ou king), « lesquels existent corporellement. Ce « n'est point un ^tre vide ou abstralt, « depourvu de realite et d'action , « comme, dans certaities circonstances, « est le vide des Bouddliistes... « Par les expressions de sans limites « et de grande limite (fVoH-ki eUlh-Tdi- « ki), dit encote Tchou-hi, TcMou-lien- « ki n'a pas voulu dire qu'il y ellt uri « etre en dehors du Tdi, ki, mais qUe « c'est par une divisibn (operee dans « I'espi^it) qu'il y a I'fitre sdns limit^i « (woU-ki). Dans cette non enlite exiS- « tait par elle-mSme cette cause oti rai- « son efficiente (li). En outre, il est « bien evident que de I'Etre saris limi- « tes formelles (woUki) on ne peut paS « faire la grande limile (Tdiki). La «< particule rofhj^ynctive efilh (et), qui « unit leS deux termes, ne tire paS a « cortsequence ; elle ne rtiarque ni cause, « ni ordre de succession. » (Tchou-hi ^ OEuvres completes, K. .52, f' f8.) Z84 L'UNIVERS. C'est bien une premiere cause , une cause cfficiente, que represente ici le Td(-ki, le grand faite , la grande li- mit e de Tc'heou-tseu; mais cette cause efficiente n'est pas separee essentietle- ment (Je la premiere cause en quelque sorle subjective {woii-ki, « sans liini- tes ») ; eiie n'en est separee (\yxtformel- lement, et lorsqu'on la considere sous le point de vue de Taction et dii mouve- ment. II r^sulte de la que le fVoH-ki et le Tdl-kiy ou le sans limites et la grande limite du systeme pliilosofihi- ?|ue que nous examfnons, est tout a la ois la cause malerielle et la cause effi- ciente de I'Univers, comine le Dieu de la philosophie vid&nta. (Voyez notre traduction des Essais de Colebrooke , p. 173.) « Le yln et le yAng, dit Tcheou-lien- « ki (*) , etant reunis , sont ce qu'il y a « de subtil et d'epais, d'essentiel et de « contini^ent dans ie Tdi-ki, sans dis- « tinction de ceci, de cela. Le Tdi-ki, « dit-il encore , est le »«2/e celeste et la »■ femelle terrestre , quand on en parle « sous le rapport de la gener.ition ele- « meiitaire ou de la production subs- « tantielle pure. Chacun d'eux a sa na- « ture propre et inJividuelle; mais le « niflle et la f'einelle, ne faisaut qu'un, « sont le Tdi-ki. « Le Tdi-ki donne naissance a tous « les ^tres de I'univers, quand on en « parle sous le rapport de la f^eni^nition « formelle, ou Ue la production de la « forme corporelle. Chacun dr ces ^tres «a sa nature propre et individnelle; « m.tis tous les ^tres de Tunivers reunis « sont le Tdi-ki. » Considere sous le point de vue ra- tionnel, le Tdi-ki est la cause effi- ciinte de I'univers. Aussi , Tchouhi dit-il qne le Tdiki n'est absolnmeiit parlant que cette ni^me can.-e efficiente (/i). « On demande, ajoule-t-il , si le « Tdl-ki n'existait pas avant la forma- « tion du Ciel et de la Terre, ^poque ou " 11 y avait un certain chaos d'ou les « Sires ont tire leurs formes et leur « complet developpement. N'est-ce pas « ce que Ton appeile du nom general de « ft, ou cause efficiente du Ciel et de la « Terre et de tous les Stres de I'uni- (*) Sing-H-td-thslouin-lwel-thoung, K. i. « p< « I i tre « vers? — Le Tdi-ki, repond-il, est « simplement ce li ou cette cause effi- « ciente du Ciel et de la Terre et de « tous les etres de I'univers. Si on en arle comme residant dans le Ciel et a Terre, alors, dans le sein m^medu « Ciel et de la Terre existe le Tdi ki. Si « Ton en parle comme residant dans « tous les Stres de I'univers, alors, au « sein m€me de tous les ^ties de \'\nn- « vers, et dans chacun d'eux individuel- « lement, existe le Tdiki. Av;int I'exis- « tence de toutes choses , exist;iit cette « cause efficiente {li). Elle se mil en « mouvementet engendra le ydng (pre- « mier principe mdle), lequei n'cit ega- o lement que cette m3me cause effi- (' ciente {li). Elle rentra dans son repos « et eneendra le yin (premier principe « femelle), lequei n'est encore egale- « ment que l.i cause efficiente {li). Tous les Strcs de I'univers , le< qua- saisons, les cmq elements, ne « sont que des effets emanes du sein '■ de ce Tdi-ki. Le Tdl-ki n'est encore « qu'un Certain element vivifiant, aeri- « forme {khi, comprenanl la miitiere et « la forme, mais seulement en puis- « sauce, comme a I'^tat elementaire), « Par un mouvement de deviation, cet « element vivifiant, aenfoime. se di- « visa, et forma un double element vi- « tai. II se ment interieuremenr, et il « devienl le |.rincipe n)aie, ydng; il « rentre dans son lepos, et il devient « le principe femelle, yln. II se divise « encore, el il forme cintj elements de « vie MiNISTlfeRE DES FINANCES ( HOC-POU) ". 165 1. Recensement de la population 106 2. D^nombrement des'terres 171 390 TABLE DES MATIERES. I'ogi!". 3. Repartition des impflts 17G 4. Budget des d^penses 195 3* MINISTERE DES RITES (Ll-POC) 207 Les quatrc directions du minlstfere des rites 208 etats et royaumes strangers coiisiddrps comme tribotaires par Ics Chinois 209 B6glemeiit conccrnant les ainbassadeiirs ^traiifters et les tribiits ib. Traduction du c^^ionial chinois relatif aux visiteurs et anibassadeurs strangers. 21 1 4» MiMSTfeRE nE LA GOEKRE ( PiNG-l'Ol') 220 Directions du niiuist6re de la guerre ib. Marine cbinoise 223 5° MlMSXfenE DE L\ JUSTICE ( Hisc-poo) 229 Articles du code cliinois 233 DCS conrs et tribunaux 256 C° MlNISrillE DES TRAVAOX PUBLICS (KODNG-POU) 260 Division des arts et metiers en seize classes 261 Directions du niinist^re des travaux publics ib. Fabrication de la moiinaie cbinoise 264 C»5r^monie du labourage 27'i ULWGDE CHINOISE 278 ' 1. Origin*!, d<5veloppement et modifications successives de I'^critiire cbinoise ib. 2. Ages de I'ecriture 289 3. Syntliese de I'ecriture cbinoise 290 4. Analyse de I'ecriture cbinoise 300 5. Liste g^nerale des radicaux chinois dans leurs formes modemes, avec lear signi- fication et le nombre de leurs derives 303 Langde orale 317 Tableau des principaux groupes phon^tiques-de I'ecriture cbinoise 325 PUILOSOPIllE CHIN0I8E 344 Premiere p^riode 345 Seconde p^riode 349 Ecole du Tao 351 Pbilosophes de I'^cole de Lao-tseu 3C0 Ecole des Lettr^s 365 Troisi^e periode. , 377 L'UNIVERS OD HISTOIRE ET DESCRIPTION DE TOUS LES PEUPLES, DE LEURS RELIGIONS, MOEURS, COUTUMES, etc ^|A«» V»%%«'» VWVK^ « GBINE MODERNS, PAR M. BAZIN, P&OFESSEUR BE CHINOIS A x'eCOI.E DES LAHGVES ©11IEHTAI.ES, 4RTS, LITT^RATURE ET MCEURS. THEATRE. OBIGINES DD THEATRE CHINOIS. C'est sous les Thang, vers I'epoque ou Hiouen-tsong monta sur letrone, que naquirent, dans la ville de Tchang- ngan, Tart theatral et ia poesie drama- tique. Les Chinois attribuent a I'empe- reur Hiouen-tsong (Rao-mi ng-ti) la gloire d'avoir eleve, Fan 720 de notre ere, le premier monument dramatique vraimentdigne de ce nom. Toutefois, comme je I'ai dit ailleurs (*), cetle opi- nion est aujourd'hui controversee. 11 y a des ecrivains qui revendiquent pour Wen-ti, fondateur de la dynastie des Soui (I'an 581 de notre ere), Thonneur d'avoir invente le drarae. Au nombre (*) Introduction au Theatre chinois des Youen. (Voy. Theatre chinois, ou Choix de pieces de theatre composees sous les empe- reurs mongols, traduites pour la premiere fois sur le texte original, precedees d'une introduction et accooipagnces de notes, par M. Bazin; Paris, Imprimerie royale, i838, I vol. in-S".) de ces derniers figure Ma-touan-lin, qui, dans son Examen general ^t?, mo- numents ecrits, observe que, « pendant les annees 'tchin-kouan (627 a 649 de notre ere) et kai-youan (713 a 741), la musique en vogue fut celle du thea- tre (*) , » d'oii il semble resulter que du temps de Tempereur Thai-tsong, de la dynastie des Thang (I'an 627 de notre ere), il y avait deja des represen- tations dramatiques dans le Celeste em- pire. Ma-touan-lin vivait sous la dynas- tie des Youen; il fut peut-etre le savant le plus universel de son siecle; mais ici I'autorite de cet ecrivain celebre ne me semble pas d'un tres-grand poids. L'o- pinion la plus sOre, a mon avis, est que le theStre fut institue a la Chine dans le huitieme siecle de notre ere. Quand I'invention du poeme dramatique re- monterait dans ce pays a une epoque plus reculee, il ne faudrait pas se bSter, (*) Wen -hien- thong - kao , section xv, fol. I V". 892 L'UNIVERS. commc a fait Voltaire (*), den tirer un argument philosophigue en faveur des Cliinois. M. Abel Reinusat remar- quo a ce sujet qu'on a trouv6 des spec- tacles a Java, a Sumatra et dans toutes Jes lies du Grand Ocean, ou la philoso- phie et meme la civilisation n'ont pas fait de grands progres (**). « A la Chine, comme dans tons les pays du nionde, dit un savant critique, les vers ont ete la langue des plus an- ciens monuments litteraires, et ces pre- miers monuments ont ete surtout coii- sacresauculte...Lamusiqueesttoujours et partout contemporainede la poesie. Chez les Chinois, I'usage de cet art est si ancien que, sous I'erapereur Chun (plus de 2200 ans avant notre ere) , il existaitdeja unesurintendancedela mu- sique. Nous trouvons mSme que I'art musical entrait, corarae en Grece, dans la science du gouvemement et de la morale. La tradition dit, presque dans les monies termf s que Platon et Aris- tote : « La connaissance des tons et des sons a des rapports intimes avec la science du gouvernement , et celui-la seul qui comprend la musique est capa- ble de gonverner. » Quant a la danse, il ne nous est pas permis de douter u'elle n ait fait oiiginairement i artie Ju culte religieux en Chine. On lit, dans (e Riluei chinois (le Li-ki). qu'on juge des moeurs d'une nation par ses dan- ses (**•). On pourrait ajouter que la danse fut la pratique de toute I'antiquite chi- uoise. On dansait pour appeler les es- prits , on dansait lorsqu'il survenait une eclipse, une grande calamite, un grand desastre, quand un officier du gouvernement mourait. Dans tous les sacrifices aux genies, dans toutes les ceremonif^s civiles, on executait des danses. Parmi les plus fameuses , on distingiiait la Porte des mies,\a Grarule toumante ^ la Tout-ensemble, la Ca- (•) D'aprcs Toltaire, I'origine du theA- tre, chez les Chinois, remonterait a plus de trois mille ans ; c'est une erreiir. (**) Al>el Remusat, Melanges asiatiques, t. II, p. 3ao. (***) Charles Magnin, Journal dee Savants, mai 184a, p. a66. 3 dencie (le P. Amiot (*), qui s'y con- naissait, assure que cette danse etait une des plus gracieuses de I'antiquit^) , la f'ertueuse^ ou autrement la Grande hia, par allusion a la dynastie des Hia, sous laquelle on la dansait (elle etait lente et grave, dit encore le P. Amiot), la Bienfaisante , la Grande guerrie- re, etc. Parmi les petites danses, il y avail la danse de la piice de snie a couleur variee, la da)ise de la plume, la danse du phenix, la danse du gui- don d queue de boeuf, la danse du bou- clier, la danse de I homme (**). Avant Hiouen-tsoncr, il existnit chez les Chinois des ballets pantonjimes. Ces ballets etaient pour la plupart figu- res, et representaient les memes scenes qu'on retrouve dans la choristique des Grecs : les travaux du labourage, les jo'ies de la moisson, les fatigues de la guerre, les plaisirs de la paix. On trouve m^me, dans les notes du P. Gau- bil sur le Chou-king, la description suivante d'un ancien ballet panto- mime : « Les danseurs sortaient par le cote du nord. A peine avaient-ils fait quel- ques pas, que, changeant tout a coup 1 ordre dans lequel ils etaient venus, iis figuraient. par leurs attitudes, leurs gestes, leurs evolutions, un ordre de bataille. Dans^ la troisieme partie, les danseurs s'avancaient encore plus vers le midi; dans fa quatrieme, ils for- maient une espece de ligne; dans la cinquieme, iis representaient les deux ministres Tcheou-koung et Tchao- koung, qui aidaient de leurs conseils Wou-wang ; dans la sixieme, ils res- taient immobiles comme des nionta- gnes. Cette danse etait une histoire de la conquete de la Chine par Wou- wang, qui, entrant dans I'empire, de- fait le roi Cheou, penetre ensuite plus avant, assigne des bornes a ses £tats, t (*) La Chine, ou Description gcnerale de cet empire, redigee d'apres les nienjoires de la mission de Pe-king, par I'abbe Grosier, t. vri, p. 395. (*•) Ce dernier nom indiquait que les danseurs ne tenaient aucun objet en dan- sant. (Voy. leTcheou-li ou Rites des TchtiHi, traduit pour la premiere fois du chinois, par feu £douard Biol, t. II, p. 4i>) CHINE MODERNE. S93 et les gouverne par les sages conseils de ses deux ministres (*). » L'usage et le goilt des ballets panto- mimes s'est toujours conserve chez les Ciiinois ; mais a partir de I'epoque des Song, les danses ne gagnerent ni en decence ni en grace; eiles devinrentsi obscenes, et la licence y fut portee a un tel point, qu'elle excita souvent I'at- tention des empereurs, des ministres et des mandarins, et qu'elle provoqua la severite des lois. « La premiere fois qu'il est fait men- tion de pieces de theatre dans I'his- toire, ecrit le P. Cibot, c'est pour louer Tching-thang, fondateur de la dynastie des Chang (1766 ans avant notre ere), d'avoir proscrit les jeux de la scene , comme des divertissements frivoles et dangereux. Siouen-rvang, de la dynas- tie des Tcheou (827 avant J. C), re- cut des representations par lesquelles on I'engageait a eloigner de sa cour les comediens, dontla presence devait etre funeste pour les moeurs. Un autre em- pereur, dont on ne rapporte pas le noni, tut prive des honneurs funeral res pour avoir trop aime le theatre et frequente les comediens (**). » Ces faits, je Tavoue, paraissent in- compatibles avec I'assertion des ecri- vains cbinois, relativement aux origines du theatre ; mais il faut savoir que le P. Cibot assimile nial a propos les an- ciens spectacles des Chinois, qui con- sistaient en ballets pantomimes, aux pieces regulieresappelees Tchoiien-khi, fJi-kio, Tsd-khi, etc., ou plutot la me- prise du savant jesuite vient de ce que les missionnaires ont traduit indiffe- rennnent par le meme mot, come- diens, I'expression yeou-jin (histriones), qui designe a la verite les comediens, mais qui, dans le style des ecrivains anterieurs a la dynastie des Thang, se rapporte aux bateleurs ou aux acteurs de has etage qui jouaient dans les bal- lets pantomimes. Si Ton rencontre au debut de la so- ciete chinoise la poesie, la musique et Tart des gestes ou la dansc, Hiouen- (*) Voy. le Chou-king de Gauliil, p. 329. (**) 'Voy. les Memoires concemant les Chi- nois, t.VIII, p. 228. tsong n'en fut pas moins le premier qui introduisit, dans une piece regu- liere, tons les elements du poeme dra- matique. Cet exemple fit negliger les ballets, et I'histoire demontre que les ecrivains de la dynastie des Thang s'at- tacherent a imiter et a perfectionner le nouveau genre de spectacle. COUP d'(eil sur l'htstoire de l'abt DBAMATIQUE. L'histoire de I'art dramatique chez les Chinois peut se diviser, d'apres le temoignagede quelques ecrivains mo- dernes, en quatre epoques distinctes. Nous rangerons done dans la pre- miere les pieces de theatre compos6es sous la dynastie des Thang, depuis I'an 720 de notre ere jusqu'a I'avenement des cinq petites dynasties, dites poste- rieures, vers I'an 905. On salt que, de- puis la chute de la dynastie des Thang jusqu'a i'epoque des Song, l'histoire de la Chine, empreinte d'une sauvage monotonie, ne presente plus que des tableaux hideux et le spectacle d'un pays afflige par tons les fleaux du del h la ifois. Les desordres et les guerres ci- viles interrompirent les jeux de la scene, et le peuple ne fut plus convie aux f^tes de la paix et de la prosperite (*). La seconde epoque comprend les pieces de theatre composees sous la dynastie des Song (960 a 1119 de no- tre ere) ; la seconde, les pieces repre- sentees sous la dynastie des Kin et celle des You^n (1123 a 1341 de notre ere). Enfin,tous les ouvrages dramatiques qui ont paru depuis la dynastie des You^n jusqu'a nos jours appartiennent a la quatrieme epoque. II n'existe, a ma connaissance, aueime piece de theatre qui puisse donner une idee du systeme dramatique des Thang; mais il est permis de juger des pieces des Song par le Si-siang-ki {Histoire du pavilion occidental), puisque I'au- teur de cet ouvrage, Wang-chi-fou, a vecu sous les Song et les Youen. Un sa- vant critique (**) nous apprend que les (*) Voy. mon Introduction au theatre chi- nois des Youen , p. i. (**) L'editeur chinois dn Youen -jin-p^ tchong. 3^" L'UNkVlERS. ^rivains des Son;,' n'emplovoient ja- mais plus de cinq acteurs dans leurs pieces, dont le sujet draniatique man- quaitdeddvelopj)einent. Comme la fable etait peu compliquee, les vers tenaient influiment plus de place que la prose : on sacrifiait tout a la partie lyrique. La litterature dramatique t'ut pous- see a sa perfection pendant le regne des empereurs mongols, et I'expression dis- syllabique tsd-khl est le nom general que Ton donnait sous la dynastie des Youdn a toutes les pieces ecrites pour le theatre. Ce titre ne convenait pas moins h la comedie qu'au drame, puis- que les auteurs, conome on le verra plus tard, out transports sur la scene lyri- que le drame et la comedie, qu'ils ont ajustesa I'opSra. Si Ton considere les pieces des You^n, relativement a I'or- donnance de ia fable, a Teconomie du plan, h I'arrangement des scenes, on les trouve d'une ressemblance parfaiie. Nos regies dramatiques y sont,pour rordinaire,ou raeconnuesou negligees; la distinction des genres n'y est point 6tablie; toute la difference qu'on y aper^oit provient du choix des sujets, des situations, qui sont plus ou moins touchantes, plus ou moins amusantes, de la diction , qui est plus ou moins noble, du caractere et des moeurs des personnages (*). 11 s'enfautdebeaucoupque I'arttheoi- tral ait parcouru a la Chine les m^mes phases que dans les autres pays. Les pieces des Ming et des Thsing, dont nous parlerons plus tard, n'ont pas la moindre ressemblance avec les drames des Youen. Ou est revenu dans la qua- trieme epoque aux Tchouen-khi ou aux romans dialogues des Song. Ainsi, tiour ce qui est de la forme du drame, es ecrivains modernes n'ont pas quitt^ les voies anciennes; ils n'ont perfec- tionne ni la fable dramatique ni le style theStral. Forme exUrieure du drame ; sys- Ume dramatiaue des Chinois sous les Youen; rdte du personnage qui chante. Dans le drame chinois, la division n Voy. le Journal asialique, cabier de fevrier-man i85i, p. i65. des actes et des scenes ressemble a cells d'un drame europeen. Ainsi le specta- cle n'est pas continu, depuis un bout de la piece jusqu'a I'autre, comme chez les Grecs. Cliaque piece reguliere se compose ordinairement de quatre cou- pures (tche) et quelquefois d'une ou- verture (sie-tseu) et de quatre coupu- res. Le sie-tseu est, h proprement parler, une introduction, ou plutot un prolo- gue dans lequel les principaux person- nages vienuent decliner leurs noms, exposer I'argument de la fable ou ra- conter les evenements anterieurs qui iiiteressent I'auditoire. On jouait, sous la dynastie des Thang, des pieces de theatre dont le prologue, recite par un acteur que les historiens appellent I'm- troducieur de la comedie, avait de I'a- nalogie avec les prologues de Plaute. Dans les pieces de la dynastie des You^n, le prologue est dialogue et sou- vent entremele de vers. Les coupures correspondent aux divisions europeen- nes que nous nommons actes. Quand une piece chinoise se compose d'un prologue et de quatre actes, I'exposi- tion a lieu dans le prologue, et I'intri- gue se noue dans le premier acte ; quand une piece se compose uniquement de quatre actes^ I'exposition est renfermee dans le premier., et I'intrigue est our- die dans le second ; I'intrigue se pour- suit jusqu'a la Gn du troisieme acte; et dans le quatrieme enfin arrive la peri- petie, qui change le cours des evene- ments et frappe le crime de chatiments inattendus. Les scenes ne sont point distinguees les unes des autres, comme dans nos pieces de theatre; mais on in- dique I'entree et la sortie de chaque personnage par ces mots : chang {U monte) et hia {il descend). L'expres- sion pei-yun, litteralement, parler en tournant le dos, designe les aparte. II ne faut pas oublier qu'envisage par rapport au but moral, le drame chinois se divise toujours en deux par- ties. Le prologue, le premier, le deuxie- me et le troisieme acte sont unis, de- puis le commencement jusqu'a la fin, par une etroite liaison; le denodment ou la peripetie forme un acte a part, et domine en quelque sorte par des re- gies speciales. Cette separation est re- gardee comme necessaire au develop- CHIjNE moderne. 39r penient de I'idee morale sur laquelle repose une piece de theatre, a savoir : I'expiation d'une faute ou d'un crime (*). Tous les personnages du drame chinois sent desi2;nes, dans le textede la piece, par des denominations qui in- diquent leur role, a peu pres comme on distingue chez nous les jeimes pre- tniers^ les peres nobles^ les preiniers comiques, les seconds comiques-, etc. On donne souvent a ces personnages un nom approprie a leur etat et a leur caractere. Nos vieux comiques avaient adopte cet usage. Nous avons M. Bon- nefoi, notaire; M. Loyal, huissier; M. Rafle, agent d'affaires; M. Purgon, M. Fleurant, etc. Les personnages des deux sexes sontti- res detoutes les classes de la societechi- noise. On voit figurer sur la scene des empereurs,des mandarins civils etmili- taires,desmedecins, deslaboureurs,des bateliers, des artisans et des courtisanes. On y rencontre meme des dieux et des deesses; par exeraple^ dans la piece in- titulee Khan-tsien-nou ou VAvare, ve- ritable comedie de caractere .entremelee de scenes mythologiques, la premiere scene du premier acte se passe dans le del, et la secondesMr la terre. Ling- kou-heou, dieu du temple de la monta- gne sacree nommee Thai-chan , appa- rait suivi d'un demon qui execute ses ordres. II est remplace par Tseng-fo- chin, ou le dieu du bonheur. Dans la piece intitulee Tou-lieou-tsoui^ ou la Conversion de Lieou-tsoid , drame bouddhique, le premier personnage qui entre sur la scene est la deesse Kouan- yin, descendue du mont Lo-kia-chan. On pent done affirmer que les per- sonnages du drame chinois peuvent etre tires indifferemment de la mytho- logie, de la fable ou de I'histoire. Dans les pieces de pure fiction, les person- nages sont crees par les auteurs (**). La poetique chinoise veut que toute oeuvre de theatre ait un but ou un sens moral. Une piece de theatre sans moralite n'est aux yeux des Chinois qu'une oeuvre ridicule, dans laquelle on n'apercoit aucun sens. Suivant les (*) Introduclion au Theatre chinois , p. 89 et 40. (**) Ibid., p. 18, rheteurs, I'objet qu'on se propose dans un drame s^rieux est de presenter les plus nobles enseignements de rhistoire aux ignorants qui ne savent pas lire; et d'apres le code penal de la Chine, le but des representations theStrales est A'qffrir sur la seine des peintures vraies ou supposees, mats capables de porter les spectateurs a la pratique de la vertu. L'obscenite est un crime. Ceux qui composent des pieces obsce- nes, dit un ecrivain chinois cite par Morrison , seront severement punis dgns le sejour des expiations, et leur supplice durera aussi longtemps que leurs pieces resteront sur la terre. Si la poetique chinoise desavoue les ceuvres du vice, la loi punit severe- ment les ecrivains coupaoles qui font I'apologie des mauvaises passions. Du reste, il n'existe aucune disposition res- trictivedesjeux de la scene, a I'exception d'un statut du code penal qui interdit « d tous les musiciens et acteurs de re- presenter dans leurs pieces les empe- reurs, les imperatrices et les princes, les ministres, et les generaux fameux des premiers dges. » Mais le traducteur anglais, sir G. T. Staunton, observe avec raison que les representations qui sont prohibees par ce statut form ant, dans le fait, les scenes theatrales favo- rites et les plus ordinaires, on doit con- siderer celte loi comme tombee en de- suetude. Ce n'etait pas assez pour les Chinois d'avoir etabli Yutilite morale comme but des representations dramatiques, il fallait encore qu'ils imaginassent un nioyen d'atteindre ce but. De la le role du personnage qui cbante , admirable conception del'esprit, caractere essentiel qui distingue le theStre chinois de tous les theStres connus. Le personnage qui chante dans un langage lyrique, figure, pompeux, et dont la voix est soutenue par une symphonic musicale , est , comme le choeur du theStre grec, un intermediaire entre le poete et I'audi- toire, avec cette difference qu'il ne de- meure pas etranger a Taction. Le per- sonnage qui chante est, au contraire, le heros dela piece, qui, toutes les fois que les evenements surviennent, que les catastrophes eclatent, reste sur la scene pour emouvoir douloureusement 396 L'UNIVERS. ies spectateurs et leur arracher des larmes. On remarquera que ce per- sonnage peut 5tre tir^, comme Ies au- tres, (fe toutes Ies classes de la societe. Dans Ies Chagrins de Han, c'est un empereur; dans VHistoire dii cercle de craie, une femme publique devenue I'epouse d'lin homme riche;dans Ies Intrigues d'une soubretie , une jeune esclave. Qiiand il arrive que le princi- f)al personnage meure dans le cours de a piece, il est remplace par un autre personnage du drame, qui cliante a son tour. Cast enfln le personnage princi- pal qui enseigne, qui invoque la ma- jeste des souvenirs, cite Ies maximes des sages, Ies preceptes des philosophes, ou rapporte Ies exemples fameux de I'histoire ou de la mythologie. Par cette creation qui a servi de type aux ecrivains de la dynastic des You6n, Ies Chinois ont realist, dans le treizieme siecle, le precepte ^mis plus tard en Europe par Lope de Vega, dans son Kouvel art dramatique : « Dans votre langage toujours chaste, dit le poete espagnol , n'employez ni pensees rele- vees ni traits d'esprit recherches, lors- que vous traitez des choses doinesti- qulrs ; il faut alors imiter la conversa- tion de deux ou trois personnes; mais lorsque vous introduirez un personnage qui exhorte, conseille ou dissuade, vous pouvez vous servir de sentences ou de phrases brillantes. En cela, vous vous rapprocherez de la verite; car lorsqu'un homme veut donner des conseils, it parle avec un autre ton, dans un langage plus etudie, plus vehement que celui de la causerie familiere. * Langue du thiAtre; diction des pieces. On voit, dans la preface du Youen- jin-pe-tchong (Repertoire dramati- que des Youin), que Ies ocuvres du theatre offrent a peu pres toutes Ies formes du langage, et presentent trois genres particuliers de style, a savoir : 1° La langue des King et des histo- riens (King-sse-yu); 20 La langue poetique ou lyrique (yd Jou-jfu) ; 3* La langue commune {thien-hia- thong-yu) (*). II faut dire cependant que la partLe la plus commune du drame est presque toujours dans le style ordinaire de la conversation. Le hiang-than on le pa- tois des provinces n'est usite que dans Ies pieces modernes, et particulierement dans Ies pieces d'un has comique. Qu'on se garde bien d'assimiler, a cause de cela, le theatre chinois au theStre in- dien. Dans Ies pieces indiennes, Ies dialectes du Sanscrit sont employes et varient stdvant Ies personnages ; dans Ies pieces chinoises, Ies styles ne se diversifient qu'en raison du sujet; dans Ies pieces indiennes, leheros etles personnages principaux parlent sans- erif ; mais Ics femmes et Ies person- nages inferieurs empioient Ies diffe- rentes modifications du prAcrit. Dans Ies pieces chinoises , Ies personnages principaux et Ies personnages infe- rieurs, Ies hommes et Ies femraes, par- lent tous le kouan-hoa ou la langue commune, avec la variete de ton qui resulte necessairement du melange des classes de la society. Toutes Ies fois que des personnages vulgaires se trouvent avec des mandarins, il y a contraste dans Ies expressions du kouan-hoa. G6- neralement Ies personnages du drame chinois parlent suivant leur Sge et leur condition, Le vieux Tchang-y, dans la Tunique confrontee, s'exprime presque toujours avec une gravite sentencieuse, et Ies discours des deux amants, dans Ies Intrigues d'une soubrette, peignent leurs sentiments avec une vivacitetout a fait orientale (*). De meme que Ies parties en prose of- frent tous Ies genres de style, de meme Ies morcenux poetiques presentent tous Ies genres de versification. II y a des vers de trois, de quatre et de sept mots ; des vers assujettis aux regies de la ce- sure et de la rime, et des vers irr^gu- liers. Le choix du metre devient quel- quefois une source de beautes; par exemple, dans Ho-Jian-chan (piece 140) le poete nous represente Tchang-y re- tire dans une chambre de I'etage sup^ rieur avec sa femme et son fils, et jouis- sant d'un spectacle delicieux pour Ies Chinois, du spectacle de la neige qui tombe en abondance. Apres avoir pris (*) Voy. la Pref. duToufen-jin-p«-tchong. (*) Introduction au Theitre chinois, p. 36. CHINE MODERNE, S9r quelques tasses devin, son imagination s'exalte; 11 croit etredans le printemps. Les flocons de neige deviennent pour lui des fleurs de poirier qui tombent ; les nuages rougeStres, des fleurs de saule qui tourbillonnent dans I'air. li s'imagine que I'on suspend devant lui des draperies de soie brodees, que Ton etale a ses pieds un riche tapis de fleurs, etc. Or, pour approprier avec goiit la ver- siflcation au sujet qu'il avail a trailer, fiour exprimer convenablement ce de- ire de I'imagination de Tchang-y, que devait faire le poete ? Abandouner la stance reguliere qui semble reservee aux monologues graves et aux descrip- tions pompeuses, pour la stance irregu- liere ou la mesure libre; s'affranchir de cette regie qui soumet les vers chinois au double joug de la cesure et de I'alli- teration ; rechercher les termes poeti- ques les plus pittoresques; employer la reduplication, la metaphore, I'allego- rie, etc.; et c'est precisement ce que nous trouvons dans ce morceau. Du reste, il faut etre en etat de lire ces vers dans I'original pour avoir une idee de I'harmonie qui existe entre le style et la situation du personnage. Tout ce que nous pouvons dire, c'est que la poesie dramatique est inflnimeiit su- perieure a celle du Chi-king, sous le rapport de la versification (*), Description du theatre, appareil scenique. On a trop repete que les Chinois n'oat point de theatre public; c'est une er- reur. On trouve, dans le nord de la Chine , des edifices publics consacres aux exercices de la musique, du chant et de la danse, et qui, durant les jours de spectacle, fa7ig-kia-ji-tseu, sont ap- propries aux besoins des representa- tions dramatiques. On y etablit, avec les decorations de la scene , ce que les Chinois appellent kouei - men ( la parte des ombres), c'est-adire la porte par laquelle entrent et sortent les om- bres des anciens personnages de I'anti- quite. Timkovski nous apprend meme (*) Introduclion au Theatre chiuois, p. 35 36, 37 et 38, qu'il existe a Pe-king une rue appelee la rue des Thedtres. On compte en cet endroit six theatres situes Tun pres de I'autre, ou Ton joue presque tons les jours des drames mSles de chant et de musique, depuis midi jusqu'au soir. L'entree aux th^Stres ne codte, suivant Timkovski, que 150 copeques (*). II est vrai que, dans les provinces du sud , il n'y a point de theatres perma- nents ouverts au public ; mais le gou- vernement, qui ne manque jamais d'en- courager les divertissements dramati- ques, permet qu'on eleve un thelitre dans les rues, au moyen de souscrip- tions recueiilies parmi les habitants. Les mandarins fournissent eux-memes les fonds necessaires. « On construit alors, dit I'editeur anglais du Fieillard qui oblient unfits, un theatre public dans une couple d'heures. Quelques bambous pour supporter un toit de nat- tes, quelques planches posees sur des treteaux, et elevees de six a sept pieds au-dessus du sol, quelques pieces de toile de coton peintes , pour former trois des cotes de la place destinee a la scene, en laissant entierement ouverte la partie qui fait face au spectateur, suffisent pour dresser et construire un theatre chinois. » C'est dans une salle de spectacle provisoire, elevee de cette facon, que les chanteurs italiens dont parle W. J. F. Davis dans sa' Descrip- tion de la Chine executerent a Macao, en 1833, avec le plus grand succes, la plupart des operas de Rossini. Les Chi- nois, dit I'auteur de cet ouvrage, furent agreablement surpris de voir ce qu'on appelle dans le jargon de Canton un sing-song (theatre), erige par des etran- gers, sur le sol de leur empire, et en- core plus d'entendre un melange de chant et de recitatif si semblable au leur (**). Une relation recente nous donne, d'un theatre ainsi dresse a Canton, une idee plus favorable encore : « A I'ex- tremite d'une avenue deserte, dit un officier de marine, nous decouvrimes une vaste cour, entouree d'echafaudages (*) Timkovski , Voyage a Pe-king, t. II, p. 175. (**) Voy. J. F. Davis, The Chinese, t. II, p. 186 el 187, 998 L'UmVERS. garnis dc spectateurs , et au fond, sue un thc;Ure en pleiii vent coinme les lo- ges, les acteurs etaient a debiter leurs role's; la riviere et ses innombrables ba- teaux formaient le dernier plan du ta- l)leau. Songer a traverser la foule qui encombrait le parterre (la cour) etait chose impossible. Nous entriimes dans une maison que nous travers3mes,apres avoir paye une demi-gourde chacun, et nous arrivAmes sur un des echafaudages qui se trouvaient de plain-pied avec le premier etage de la maison. U y avail plusieurs banquettes disposees en gra- dins; nous nous placdmes sur les plus elevees, pour mieux jiiger de I'ensemble du spectacle. Voici^ quelle ^tait a peu pres la disposition du tbedtre : un en- clos plus long que large etait borde, sur ses grands cotes, par deux galeries couvertes, elevees sur des poteaux, et on se trouvaient assis les spectateurs payants; la scene, supportee aussi sur des'piliers, et couverte, non pas en nattes, comme les galeries, mais en toiles peintes, formait un des petits cotes du rectangle, et s'etendait sur le bord de I'eau; enfin, un mur, qui joi- gnait la maison par laquelle nous etions entres a une autre maison situee en face, et formant, comme celle-ci, le prolongement de I'amphithesitre, com- pletait la cloture de I'enceinte, laissant seulement une porte ouverte a la foule qui entrait gratis dans le parterre (*). » Independamment de ces the^itres tem- poraires, appeles par les Chinois Hi- thai, il existe encore dans les maisons des riches et dans les hotels particuliers des salles de spectacle, ou les comediens ambulants jouent des pieces de theatre. La scene y est de plain-pied et occupe un grand espace vide aue laissent les tables rangees sur deux files. On couvre seulement le pave de la salle d'un tapis, et, pour coulisses, les acteurs font usage ie quelques chambres voisines, d'oii ils eortent pour jouer leurs roles; ils ont ordinairement plus de spectateurs qu'on n'a rassemble de convives : I'lisage est de laisser eutrer un certain nombre de persounes, qui, placees dans la cour, jouissent aussi du spectacle qu'on n'a (•) Voy. la Revue des Deux-Mondes , du 1 5 sept. 1840, p. 85 1 et suiv. point prepare pour elles. Les feinmes peuvent y prendre part sans fitre aper- (jues; elles voient les acteurs a travers une jalousie, qui les derobe elles-memes a tons les regards (*). Les costumes des personnages du drame , s'il est permis a'en juger par le recit des voyageurs, sont assez bien appropries aux roles dramatiques, et quelquefois d'une rare magnificence. On verra que les acteurs ne manquent ja- mais d'indiqucr les chan^ements de costumes dans le texte chinois de la piece, quand il arrive qu'un personnage est promu a une charge ou a une nou- velle dignite. Comme la plupart des pie- ces chinoises , dit M. Davis, out une couleur historique, et, pour de bonnes raisons, ne se rapportent point aux eve- nements qui se sont succede depuis la conquete tartare, les costumes des Chi- nois sont ceux qu'ils portaient anterieu- rement a la dynastic des Thsiug (**). Des acteurs et des actrices. De meme que les acteurs n'etalent reputes infsimes, a Rome, que par le vice de leur naissance et non pas a cause de leur profession , de meme, chez les Chinois, les comediens ne jouissent ni du respect ni de I'estime de leurs corapatriotes, parce que les directeurs, au mepris d'un statut formel du code penal, achetent ordinairement des en- fants d'esclaves, qu'ils elevent pour en faire des acteurs, et qui sont, par cette raison , classes hors des rangs de la societe. Une compagnie de comediens ambulants {y-pan-hi-tseu) est, pour I'ordinaire, composee de huit a dix per- sonnes qui sont a la lettre les esclaves du maitre ou directeur (***). Nean- moins la posterite a conserve les noms des comediens ceiebres. On sail, par exemple, que sous la dynastie des Song Wei , Wou et Lieou furent des acteurs d'un tres-grand merite, et que, dans le role du devot, le premier de ces ac- teurs n'a jamais ete surpasse (****). (*) Timkovski , Voyage a Pe-kiug, t. It , p. 178. (**) Introduction aiiTheAtre cbinoi.o, p. 45. ("*)Ibid., p. 43. ( ) Preface du Touen-Jin-p^-tchong, CHINE MODERNE. 399 Mais , a I'exception de la capitale et de quelques grandes villes , les come- diens chinois sont ambulants, courent les provinces etvont jouer dans les mai- sons particulieres, ou on les appelle lorsqu'on vent joindre I'amusement de la comedie aux delices d'un festin ; il en est pen de complets sans cette sorte de spectacle. Au moment ou Ton se met a table , on voit entrer dans la salle quatre a cinq acteurs richement vetus; ils s'iiiclinent tous ensemble, et si pro- fondement que leur front louche qua- tre fois la terre ; ensuite , I'un d'eux presente au principal convive un livre dans lequel sont inscrits, en lettres do- rees, les noms de cinquante a soixante comedies , qu'ils savent par coeur et qu'iis sout en etat de representer sur- le-champ. Le principal convive ne de- signe celle qu'il adopte qu'apres avoir fait circuler cette liste, qui lui est ren- voyee en dernier ressort. La represen- tation commence au bruitdes tambours de peau de buffle, des flutes, des fifres et des trompettes. Chaque personnage, lorsqu'il parait sur la scene, commence toujours par se faire connaitre aux spectateurs; il leur apprend quel est son nom et le role qu'il va jouer dans la piece. Le meme acteur represente souvent plusieurs ro- les dans la meme piece. Telle comedie, parexemple, sera jouee par cinq ac- teurs, quoiqu'elle continue et fasse suc- cessivement paraitre dix ou douze per- sonnages qui parleiit (*). Aujourd'hui les roles de femmes sont to remplis par de jeunes garcons. On a dit que les Chinoises n'avaierit jamais paru sur ia scene : je puis affirmer qu'il y avait des actrices a la Chine pendant le regne des empereurs mongols. On les appelait tchang-yeou (comediennes), vulgairement nao-nao (guenons). Tan est le nom qu'on leur donne dans tous les ouvrages de litterature. Les actrices de la dynastie des Youen n'etaient pas tres-estimees,et ne valaient guere mieux que les courtisanes. Une ordounance de Khoubilai, datee de la quatrieme an- nee Tchong-tong (1263) , confond les unes avec les autres, et n'^tablit au- (*) Timkovski , Voyage a Pe-king , t. II , p. 177 et 178. cune difference entre les professions qu'elles exer^aient. Liste des principaux auteurs drama- tiques de la dynastie des You6ii. Chang-tchong-hien. On a de lui le Combat de Yu-tchi-king-te et le Red des dragons. Che-kiun-pao. Des dix pieces qu'il a composees, deux sont restees au thea- tre. Le Ma7-i qui fait la cour a sa femme est sa meilleure comedie. Che-tseu-tchang. On a de lui une petite comedie intitulee : le Mariage d'une religieuse. Fan-tseu-ngan. II a compose trois pieces de theStre. Elles sont fort me- diocres. HoA-Li-LANG, courtisane et come- dienne. Elle composa quatre petites pieces qui ne reussirent guere, a ce qu'il parait; elles ne sont pas restees au theatre. Kao-wen-sieou. Get auteur a com- pose trente-deux drames. Le Tourbil' Ion noir est le seul qui soit reste au theatre. Khang-tsin-tchi. On a de lui uu drame intitule : le Jugement de Song- kiang. Ki-KiuN-TsiANG. C'est I'auteur du Jeune Orphelin de lafamille de Tchao. KiA-TCHONG-MiNG. Les trois pieces qu'il a composees sont : 1° la Deesse qui pense au monde; 2° VHistoire dit peigne dejade; 3° \e?, Amours deSiao- cho-lan. Kiao-meng-fou. II a compose huit pieces de theatre, dont les meilleures sont : le Gage d'amour et les Secondes noces de f'f^ei-kao. KoNG-TA-YONG. On a de lui un drame intitule : le Sacrifice de Fan et de Tchang. Kou-TSEU-KiNG. C'cst I'auteur des Metamorphoses. KouAN- HAN -KING. Origlnairc de KiaT-tcheou-fou, chef-lieu d'un depar- tement dans le Chan-si, Kouan-han- king travailla pour le Conservatoire de musique, et composa soixante pieces de theatre. Dans le monde, on vante sou- vent les couplets des Song et la mu- sique des Youen ; on ne reflechit pas que les couplets dont on parle sont de 4(M» L'UNIVERS. I'epoque des Thang, el ont ete compo- ses par les poetes de cette dynastie; il n'y a que les airs des couplets qui ap- partiennent aux Youen. On donna la preference aux airs du Nord (parce que les plus liabiles chanteiirs etaient ori- ginaires des provinces septeutrionales). On reunit (fans le Conservatoire un certain nombre d'honimes de leltres ; on divisa les sujets des compositions dramatiques en douze classes; puis le directeur choisit les sujets, regln, pour ainsi dire, I'economic de chaque piece, quant aux morceaux lyriques, indiqua les timbres des airs , et ordomia aux ^crivains de se mettre a Toeuvre. Ceux- ci composerent avec la phis grande promptitude cinq cent quarante-neuf pieces de theatre. Telle fut , d'apres la Bmjraphie uni- verseUe de la Chine, I'origine des com- positions dramatiques appelees^id-A;/(t; mais que Ton se garde bien de prendre pour autant de faits les assertions du Diographe chinois. Ce biographe etait un lettre, et les plus injustes comme les Flus violents detracteurs des arts de esprit sont assurement les lettres de la Chine. Quant aux emprunts faits par les auteurs aux poetes de la dynastie des Thang, il y a du vrai dans ce que dit le biographe. Sur les soixante pieces de Kouan- han-king, huit seulement ont ete con- servees dans le Youen-jin-pe-tchong {Repertoire dramatique des Youin). Ce sont: le Miroir de jade, la Courti- sane savante, la Courtisane sauvee, le Songe de Pao-kong, le Raoisseur, le Mariage force, le Ressentiment de Teou-ngo, et le Pavilion de plaisance. Li-CHEOU-KiNG. On a de cet auteur un drame historique intitule : Ou-youin jotiant de la flute. Li-HAO-Kou. II a compose un drame mythologique intitule : la Nymphe amoureuse. Li-HiNG-TAO. C'est I'auteur del7/is- toire du cercle de craie. Li-TCHi-FOU. On a de lui un drame intitule : VEnseigne a t^te de tigre. II a compose onze pieces de theatre qui n'ont pas reussi. Li-TCHi-YOUEN. On a de lui un drame intitule : le Condamne qui re- tourne dans sa prison. Li-WEN-WBi. On ade lui un drame intitule: Yen-thsing vendant du pois- son. Ma-tchi-youen. II a compose ireize pieces de theatre, sur lesquelles sept ont ete conservees; ce sont : !<> les Chagrins dans le palais des Han; 2° ['Inscription de Tsien'fo; 3o le Pa- vilion de Yo-yang ; 4o le Sommeil de Tchin-po; 5° le Songe de Liu-thong- pin; 6° les Amours de Pe-lo-thien; T Jin , le fanatique. MoNG-HAN-KiNG. On a de lui un drame intitule : le Magot. Ou-TCHANO-LiNff. On a (le liiide pieces de theatre : T'chang, I'anacho- rete, et le Songe de Tonq-po. Pe-jin-fou. II a compose quinze pieces de theatre. La Chute desfeuilles du Ou-thong est son meilleur drame. SuN-TCHONG-TCHANG. On a dc lui un drame intitule : le Bonnet de Lieou- ping-youin. Tai-chen-fou. II ne reste de cet ecrivain qu'une comedie inlitulee : VA- cademicien amoureux. TcHANG-CHEOU-KiNG. On 3 de lui une comedie intitulee : la Fleur de pol- ricr rouge. II n'a fait que cette come- die; clle est restee au the.ltre. TcHANG-KOUR-piN, courtisanc et actrice. Son vrai noin etait Tchang- kho-pin; Tcharig-koiie-pin est son nom d'auteur, c'est-a-dire le nom qu'on lui donna, quaiid ellc fut admise dans la societe des auteurs dramatiques. 11 est a presumer ([u'elle avait des relations avec Kouan-han-king, et que ce fut cet academicien qui lui apprit a composer des vers. On a deTchang-koiie-pin trois drames intitules: la Tunique confron- tee, Sie-jin-ko&ei et les Aventures de Lo-li-lang. TcHAo-MiNG-KiNG , courtisane et actrice. Elle a ecrit trois comedies qui ne sont pas restees au theatre. TcHmG-TE-HOEi. Cet ecrivain cele- bre a compose dix-huit pieces de thea- tre. Les ineilleures sont : le Mai d'a- mour, V Elevation de fVang-tsan et la Soubrette accomplie. TcHiNG-THiNG-YU. II uc nous reste que trois pieces de cet auteur; ce sont : Tchao-kong, prince de Thsou, la Fleur de P arriere-pavillon et YHistoirc du caraclere Jin. CHINE MODERNE. 401 Thsin-kien-fou. On a de cet auteur VEnJant prodigiie et le Bevouement de Tchao-li. TsENG-TouAN-xiNG. On a de lui une comedie intitulee : Histoire dela pan- toufle laissee en gage. Wang-chi-fou. La Biographic uni- verseile de la Chine n'a point consacre d'article a cet ecrivain celebre, qui a trouve et trouvera toujours des admi- rateurs et des enthousiastes. C'est I'au- teur du Si-siang-ki {Histoire du pavil- ion occidental), Wang-tchong-wen. On a de lui un drame intitule : V Innocence reconnue. Wang-tseu-y. On a de cet auteur la Grotte des pickers, opera-feerie. Wou-HAN-TCHiN. II lie Hous reste que trois pieces de Han-tchin : le Fieil- lard qui obtient unfits, les Amours de Yu-hou el le Petit pavilion d'or. Yang-hien-tchi. II a compose deux dranies : le Naufrage de Tchang- thien-khio et le Pavilion. Yang-king-hien. On a de lui la Courtisane Lieou. Yang-wen-kouei. II a fait une co- medie intitulee : \a\Reuni^n du fits et de lafille. Y6-PE-TCH0UEN. C'est I'auteur dela Transinigration de Yo-cheou. Classification des pieces de ilic'dtre. Apres une lecture attentive des cent pieces de theatre renfermees dans le Youen-jin-pe-tcliong {Repertoire dra- viatique des Youen), j'ai reconiiu que les Chinois comprenaient sous le nom de tsd-khi sept especes d'ouvrages dra- matiques, a savoir : 1° Les drames historiques; 2° Les drames tao-sse; 3o Les comedies de caractere; 4° Les comedies d'intrigue; 5» Les drames domestiques ; 6° Les drames mythologiques; 7° Les drames judiciaires ou fondes sur des causes cclebres. Les drames historiques, particu- lierement la Chute des feuilles du Ou-thong et la Mart de Tong-tcho, meritent le premier rang et la prefe- rence sur tous les autres. Ce sont, a mon goilt, les plus beaux monuments de la litterature chinoise dans le siecle des Youen. On trouve dans les annales, 26* Livraison. (Chine modebnb.} dans les meraoires des historiographes une chronologic savante et regulifire, des faits classes dans le meilleur or- dre, une grande precision; mais les historiographes et les annalistes ne font point entrer dans leurs longs et fastidieux ouvrages le tableau des moeurs nationales; ils se bornent au recit peu instructif des evenements, et omettent une foule de choses qu'on voudrait sa- voir. II faut done les chercher dans les drames et les romans, puisqu'on ne les trouve pas ailleurs. Les auteurs dra- matiques de la dynastie des Youen, appliquant les premiers I'eloquence a I'bistoire, ont ajout6 au recit des eve- nements ce qui manquait dans les ou- vrages des historiens , et , comme dit Hamlet dans Shakspeare : « They shew the very age and body of the time his form and pressure. » lis offrent au lec- teur un veritable tableau des antiquit^s chinoises, depuis Fan 607 avant J. C. jusqu'au dixieme siecle de notre ere; tableau naif , varie, rempli d'episodes, de petits details, ou Ton voit le carac- tere des personnages et la physionomie des siecles. On peut etudier fort agr^a- blement I'histoire de la vieille dynastie des Tcheou, de la grande querelle de Hoei-wang, prince de Wei , et de Wei- wang, prince de Thsi; de la rivalite de Sun-pin et de Pang-kiouen, dans la Route de Ma-ling ; I'histoire du regne de Ring-wang et les moeurs de I'epoque ou vivait Confucius, dans Tchao-kong^ prince de Tsou, et dans Ou-you4n jouantde la flute i I'histoire d'une pe- riode interessante qu'on appelle TcAew- koiie, dans Sou-thsin transi de froid; les moeurs de la dynastie des Han, dans les Fureurs de Yng-pou; les moeurs de I'epoquedes San-koue, dans leMariage de Lieou-hiuen-tS, et la Mort de Tong- tcho; enfln, les moeurs des Thang, qui ont un grand attrait, dans la Chutedesfeuil- les du Ou-thong, dans le Trompeur trompe, Sie-jin-kouel , le Petit com' mandant, le Pavilion demoli, la Pa- gode du del, et le Combat de Hoei- tchi-kong. Gen^ralcment , le dialogue de ces pieces n'est pas dans le ton de la conversation ordinaire; il n'y a pas de styles qui se ressemblent nioins que ce- lui des drames historiques et celui de la conversation. Quant aux vers, ils sont 26 HH L'UJNIVERS. aussi plus elegants que les autres, plus riches de m^taphores, d'images, d al- lusions, et, je je suppose, d'uiie har- nionie plus savante (*). Au defaut d'un culte fonde sur una revelation veritable, les hoinmes se for- pent un culte et des revelations sans /ondeinent. Je I'ai dit ailleurs, il n'y a pas de spectacle religieux chez les Chi- nois. Que les opinions superstitieuses du peuple, ou que les folles ceremonies du boiiddhisme se trouventsouvent melees aux pieces de theatre, ceia est vrai ; mais les representations dramatiques n'en sont pas plus majestueuses pour cela. Au contraire, des qu'un ^crivain met en scene des jougleurs comme les tao- sse,ou de ridicules personnages comme les bouddhistes , ii renonce par le fait au genre s^rieux et grave. Get amas de superstitions chinoises, dont se com- pose le culte des tao-sse, devait four- hir au th^fltre des caracteres etranges, des aventures merveilleuses, des eve- nements extraordinaires, des mceurs et des situations tres-comiques et tres- amusantes. Je place au second rang les pieces tao sse. Outre qu'elles nous font connaitre les sentiments intimes des visionnaires les plus extravagants qui furent jamais, nous y trouvons encore un precieux temoignage du genie sa- tirique des auteurs ; car si Ton v^ne- rait les tao-sse, du temps des Song, sous les Youen on s'en moquait. II y a dans la collection huit drames tao-sse; ces drames sont : le Pavilion de Y6- yang, le Sommeil de Tchin-po, le Songe de Uu-thong-pin, Fleur de pa- cker, la Nacelle nietamorphosee, la Deesse qui pense au monde, la Cour- tisane Lieou et la Conversion deLieou- tsoui. On pent joindre a ces pieces deux drames bouddhiques : YHistoiredu ca- racUre jin {patience), et le Songe de Sou-thong-po. On ne voit pas que les Chinois aient compose des pieces comiques d'une for- me reguliere, sous ladynastie des Song. 11 se pent neanmoins que I'origine de la comedie remonte encore plus haut,'com- me Taffirment les editeurs du Youen- jin-p^-tchong. Quant a moi, je per- (*) Journal asiatique, cahier de femer- mars i85i, p. i66 et 167. siste a croire que les dynasties ante- rieures a la dynastie mongole n'avaient que des drames burlesques, des bouf- ionneries, des farces, et que le siecle des You^n a produit les premieres co- medies du genre serieux. Sans avoir a nous offrir des comedies parfaites, ni des monuments conipa rabies aux no- tres, les ^crivains des Youen meritent notre estime, pour s'etre essayes dans un genre d'ouvrages extremcment dif- ficile : je veux parler des comedies de caractere; j'en ai trouve cinq dans le repertoire; ce sont : Y Enfant prodi- gue, le Botiddhiste, le Libertin, VA- vare et le Fanatique. J'incline a croire queletheStremoderneenrenfermebeau- coup d'autres. A la Chine, le thefltre est une ecole de morale, et les pieces de ce genre, moins peut-etre que les dramesjudiciaires, plus queles comedies d'intrigue, peuvent servir a reprimer les folies et acorriger les vices. Quant aux six piecesqueje viens de citer,elles me pa- raissent tres-remarquables.Tous les en- fants prodigues, tousles avares, tons les libertms se ressemblent; Lou-tchai-lang n'estni au-dessus ni au-dessous de don Juan ; mais quel caractere que celui du Bouddhiste! quelle etrange maniere de penser et de sentir ! Dans la piece chi- noise, oil I'ou trouve episodiquement la fable du Financier et le Savetier, les moindres actions du principal person- nage amusentet soutiennent I'attention. Ce n'est pas encore la, on le pense bien, le vrai genre de la comedie de caractere, et Ton sent a quelle prodigieuse distance VAvare de I'auteur chinois doit ^tre de VAvare de Moliere, ou meme de VAulu- laria de Plaute. Les comedies d'intrigue, ou figurent principalement des courtisanes, sont plus nombreuses que les comedies de caractere ; mais aussi de tous les gen- res c'est, dit-on, le plus facile. IMalheu- reusement la plaisanterie chinoise n'est ni tres-fine, ni tres-spirituelle; elle est m^me un peu lourde, et s'ecarte quel- quefois des regies de la bienseance. De telles comedies peuvent interesser le lecteur europeen par les tableaux de mceurs qu'on y trouve; elles plai- sent au spectateur chinois par la singu- larite des aventures, la variete des in- cidents qui retardent Taction, et surtout CHINE MODERNE 403 par le nierveilleux de I'intrigue. Le Gage d' amour, la Housse du lit nup- tial, le Miroir de jade, la Courtisane savante, la Courtisane sauvee, le Fleuve au cours sinueux, le Mariage secret, les Amours de Yu-hou, VAca- demicien amoureux, le Marl qiii fait la cow a sa femme, Y Inscription de Tsieii-fo, le Mai d'amour, le Songe de Tou-mo-tchi, les Secondes noces de JVei-kao, le Pavilion, la Fleur de poi- rier rouge, la Soubrette accompUe, le Lac Kin-tsien, VHistoire de la pan- toufle laissee en gage, VHistoire du peigne de jade, le Portique des cent Jleurs,\aReligieusemariee, les Amours de Siao-cho-lan et le Pavilion de plai- sance peuvent €tre regardes comme vingt-quatre comedies d'intrigue. Au point de vue de la morale, ce sont les vingt-quatre pieces les plus reprehen- sibles du theatre chinois; mais il y en a peu dans lesquelles on ne rencontre des scenes tres-interessantes. Les drames domestiques, d'un genre moins noble, n'ont aucun caractere particulier ; ils roulent sur les accidents de la vie commune, et peignent en ge- neral les mceurs du bas peuple. On y trouve quelquefois des situations tres- touchantes. Les editeurs du Youin-jin- pS-ichong nous ont laiss^ dix-huit drames de ce genre; ce sont : la Tuni- que confrontee , VHistoire d'un p£- cheur et d^un btccheron, Yen-thsing vendant du poisson, le Naufrage de Tchang-thien-khio, le Fieillard qui obtieni iinjils, les Caisses de cinabre, VEnseigne a tite de tigre, la Reunion dufds et de la fille, le Tour billon noir, les Amours de Pe-lo-thien, le Festin du ministre d'Etat, Meng-kouayig, le Sacrifice de Fan et de Tchang, le De- vouement de Tchao-li, la Boite a toilette, le Jugement de Song-kiang, les Aventures de Lo-li-lang, le Con- damne qui retourne dans sa prison. Le dialogue des drames domestiques , ecrit dans le ton de la conversation or- dinaire, est un monument de la langue chinoise parlee au quatorzi^me siecle; le langage est clair, naturel et simple, parce que les auteurs ecrivaient comme ils parlaient. 11 paraitra surprenant gue les Chi- nois, avec un degre d'imagmation assez mediocre, s'amusent a composer des drames mylhologiques ou des operas- feeries; mais ce n'est pas le nierveil- leux, c'est le ridicule qu'on trouve le plus souvent dans ces pieces , dont les defants tiennent a la mythologie chi- noise, qui n'est pas assez poetique. Les fictions des anciens poetes, loin d'etre ingenieuses, charmantes, comme les fictions d'Ovide ou de I'Arioste, n'of- fraient aux auteurs dramatiques de la dynastie de Youen qu'une assez triste ressource. Ces auteurs ne paraissaient pas appeles a de grands succes ; et d'ail- leurs, comme il n'existait, pour le thea- tre, ni architecture, ni sculpture, ni peinture, ni choregraphie, les operas- feeries n'etaient soutenus par aucun des prestiges de I'illusion theatrale. Aussi le petit nombre de drames my- thologiques restes au theatre prouve que ce genre n'a pas reussi. On n'en compte que six dans la collection des You^n ; ce sont : T'chang, VAjiacho- rite , \t Creancier ennemi, le Saule, la Grotte des packers, le Roi des dra- gons, la Nymphe amoureuse. Les drames judiciaires, d'une in- fluence plus puissante sur les mceurs, me paraissent inferieurs awx autres pieces. La collection des Youen en ren- ferme seize, qui sont : le Grenier de Tchin-tcheou, le Chien de Yang-chi, la Delivrance de Thsien-kiao, les Origi- naux confrontes, V Ombre de Chin- nou-eul; le Songe de Pao-kong , le Bonnet de Lieou-ping-youen, Vlnno- cence reconnue, Lou-tchai-lang , la Fleur de I'arriere-pavillon, VHistoire du cercle de crate, le Magot, le Plat qui parte, le Ressentiment de Theou- ngo, le Petit pavilion d'or et les Mal- heurs de Fong-yu-lan. Les principaux incidents des drames judiciaires se trouvent dans les repertoires des causes celebres , mais surtout dans une collection des jugements de Pao- kong , collection deja popuiaire au commencement de la dynastie des Youen. Pao-kong ou Pao-tching, dont la sagesse est devenue proverbiale a la Chine, fut gouverneur de Khai-fong- fou, juge en dernier ressort, puis mi- nistre, sous le regne de I'empereur Jin- tsong, de la dynastie des Song. Ses 6quitables et ingenieuses sentences ont 26. 4M L'UNIVERS. acquis une celebrite qui dure encore, Encadrdes dans les pieces dramatiques des Youf'u, elles y produisent des coups de theatre, tant elles semblent inipr^- vues. M. Stanislas Julien, le premier, nous a fait connattre une de ces pieces; elie offre avec le Jugement de Salomon la ressemblance la plus frappante. Tels sont pour le theSlre les divers genres d'ouvrages auxquels le siecle des Youfin a donn^ naissance, et ces ouvrages ont obtenu le succes qu'ils meritaient. II faut dire aussi que cette remarquable epoque etait plus favora- ble que les precedentes a la po6sie dra- matique. Les auteurs qui travaillaient pour le theatre pouvaient facilement puiser dans les sources de I'antiquite, dans Tso-khieou-ming, par exempIe,dont la precieuse chronique avait ete tant de fois expliquee etcommentee, dans le Sse-ki de Sse-ma-tbsien et dans les An- nales. M. Stanislas Julien, en reprodui- sant et en traduisant les documents originaux qui ont fourni le sujet du drame celebre intitule : le Jeune Or- phelin de lafamille de Tchao, a inon- tre le parti que I'auteur chinois a tire du Sse-ki. Pour les ecrivains dramati- ques, les romans ont sur les annales et les chroniques des avantages conside- rables; ils offrent,avec le merveilleux des incidents, des peintures plus vives et des scenes amusantes. On a vu que \e San-k6ue-tchi avait inspire les deux plus beaux drames de la collection ; le Choui-hou-tchouen, par la franchise originale de ses caracteres et rinllnie vanete de ses tableaux, par I'interet et le comique des situations qu'on y trouve, presentait aux ecrivains des ressources inepuisables. J'ai deja parle du Recueil desjugementsde Pao-tching ; c'etait comnae un repertoire ou chaque auteur puisait a son gr^. La dynastie df s Thang et la grande dynasti'e des Song avaient produit d excellents poetes. Sous les Mongols, il y avait d^ja, dans la litt^rature chi- noise, une foule de petits poemes que Ton pent comparer a nos odes, et dont quelques-uns meritent veritablement den porter le non.. Ce sont des pieces de vers plus ou moins estimables, par- tag^es en strophes (kiai) ou stances re- guheres. Les unes sont dans un genre tres-noble, les autres sont plus remar- quables par I'agrement du style que f)ar la magnificence des idees. Quant a a forme ext^rieure et i la structure particuliere de ces odes, les regies de la poetique chinoise sont infiniment f)lus severes et plus compliquees que es notres. Si, chez nous, on ne doit jamais enjamber d'une strophe a I'au- tre, comme les Grecs et les Latins, a la Chine, il n'estpas m^me permis d'en- jamber d'un vers a I'autre. Dans tous les ouvrages de poesie, un vers chinois n'est autre chose qu'un nombre arr^te de cinq ou de sept mots monosyllabi- ques, renfermant un sens complet ; mais ce qui fait que I'ode est pour les Chi- nois d'une execution tres-penible, c'est que les poetes ont introduit dans I'in- terieur du vers le systeme periodique, systeme qui consiste dans le retour de certains sons, et ne s'appliquait primi- tivement qu'aux finales. On distingue les stances des Chinois par le nombre de vers, et Ton trouve'chez eux, comme chez nous, des quatrains, des sixains, des huitains et des dizains. Les canta- tilies et les grands morceaux des pieces de theatre, ou cette distinction n'a pas lieu, sont regardes comme des pieces irregulieres, abandonnees aux fantai- sies de ceux qui les composent. Puisqn'on avait ecrit tant de vers sous les dynasties precedenies, les au- teurs dramatiques de la dynastie des Youen avaient done sous les yeux une foule de modeles pour tous les genres. Aussi les meilleurs morceaux lyriques du theatre des Youen sont-ils une mii- tation continuelle de la poesie des Thang et des Song. Cependnnt, a I'exception de Ma-tchi-you^n, qui est, je crois, le plus habile versificateur de cette epo- que, de Kouan-han-kinp, de Tching-te- hoei, de Pe-jin-fou et de quelques au- tres, les ecrivains dramatiques ne pre- naient pas la peine d'ecrire les morceaux qu'ils inseraient dans letirs pieces; ils les composaient de vers pilles caet la. Quant au pe-wen ou a la prose, on sait que la langue commune est la langue du theatre. Cet idiome avait beaucoup perdu de sa rudesse et de son siprete dans le quatorzieme siecle, et si Ton sentait le besoin d'une Elocution facile, 61^gante, le Choui-hou-tchouen et les CHINE MODERNE. 405 dialogues du Si-siang-ki offraient aux auteurs dramatiques d'excellents mo- deles de style; Chi-nai-ngan et Wang- chi-fou leur avaient ouvert la route. Ce dernier fut v^ritablement le crea- teur des pieces de theatre appelees tsa-khi, et les cent quatre-vingt-dix ecrivains dramatiques dont les noms figurent dans le catalogue du Yonin- jin-pe-tchong, doivcnt etre ranges dans ia classe des imitateurs; niais il faut avouer que si Wang-chi-fou fut tres-su- perieur, comme poete, a tous les au- teurs de la dynastie des Youen qui vinrent apres lui, ces auteurs, assure- ment tres-estimables, montrerent une plus grande force dramatique. lis ont essaye de conduire une action et d'en- chainer les scenes; iis ont su develop- per, soutenir un caractere pendant cinq actes, interesser par la variete des si- tuations et des epreuves. Ma-tchi-youea est le plus habile ecrivain; Kouan-han- king est le plus fecond. Quant aux mu- siciens qui ont travaille pour le theatre sous la dynastie des Youen , on en compte trente-six. Les plus celebres chanteurs etaient originaires des pro- vinces septeiitrionales de la Chine (*). BBAMES HISTORIQUES. La Boite myst^rieuse. Kous avons dans notre litterature VOrphelin de la Chine. Si Voltaire con- cut I'idee de celte piece a la lecture (i'un drame chinois, du Tchao-chi- kou-eul de Ki-kiun-tsiang, ce fut un ecrivain anonyme, I'auteurde la Boite vujsterieuse , qui inspira le Jeune Or- phelin de la famille de Tchao. L'exa- men comparatif des trois pieces, de leurs qualites et de leurs defauts, m'eloigne- rait trop de mon objet principal ; je me bornerai icia I'analyse AtXa Boite myste- rieuse{**)\ mais j'indiquerai en passant les emprunts les plus remarquables que Ki-kiun-tsiang lui a faits. Le sujet de la Boite mysterieuse est pris dans Thistoire des Song. A la fia (*) Journal asiatique , cahier de fevrier- mars, p. r68 a 178. {**) Liu. : « (Tchin-lin) porte dans ses mains une boite a toilette. » du regne de Tchin-tsong (*), de cet eni- pereur qui n'aimait pas la guerre, qui avait conclu avee les Tartares un traits humiliant, dont les historiographes par- lent d'une maniere fort ironique , la monarchic etait encore plus florissante que sous Tai-tsong. Malheureusement Tchin-tsong, tenant fort peu a se mon- trer orthodoxe, venerait trop les doc- teurs Tao-sse. II aimait leurs livres ; il y croyait, et manifestait sa croyance. Ce n'etait pas assez d'un scandale pa- reil ; il avait offert publiquement un sa- crifice a Lao-tseu (**). Les eunuques, de concert avec tous les magiciens, tous les jongleurs du royaume, multipliaiemt les prodiges et enflammaient les ima^- nations. Chaque jour, des livres myste- rieux tombaient du ciel. On les tfans- portait dans un temple que I'empereur avait fait construire. Generalement la couverture de ces livres etait noire et scellee avec des caracteres etranges. Les dragons apparaissaient, et, chose infiniment plus rare a la Chine, on de- couvrait sur les montagnes des fontai- nes dont I'eau etait sucree (***). « L'empereur est un saint, se dit a lui-meme, dans le premier acte du pro- logue, un ofiicier du palais, enthou- siasme de tant de merveilles ; les minis- tres sont des sages. L'empire jouit de la tranquillite et de I'abondance. Une seule chose afflige notre grand monar- que , c'est de se voir prive de rejeton male, d'un prince heritier thai-tseu. Cependant I'historiographe Wang-hong a presente bier un rapport a l'empereur; il expose que les astronomes ont apercu pendant la nuit, dans la constellation Thai-tseu (Ursa minor), une etoile qui brillait d'un eclat extraordinaire. Cet evenement est, sans contredit, d'un heureux presage. Aussi l'empereur, transporte de joie, ordonne-t-il que Ton rassemble toutes les femmes du palais dans le jardin imperial. Sa Majeste est soutenue par I'espoir qu'une de ces fem- mes donnera le jour a un prince heri- (*) Vers I'an 1022 avant J. C. (**) Dans le palais de la Purete supreme. (Voy. le Li-tai-ti-wang-nien-piao , Tchin- tsong, 7® annee Ta-tchong-tsiang-fou.) (***) Voy. YHlstolre generate de la Chine, t.VIII, p. 164. 40(i vmivKKi. Uer, 11 faut que j'avertisse le chef des fuouques. » ..... Le premier acte nous introduit dans i le jardin imperial. Tchiti-tsong n'y fait que des putiriiites. A la voix du chef des eunuques, les femmes du palais se rangeiit sur deux Gles. Un officier pr6- sente a reinpereur un de ces arcs qu'on appellc tan-kong et qui servent a lan- cer des billes : I'empereur lance en effet une petite boule d'or. « Qu'une de vous me la rapporte, crie I'auguste monar- que, se tournant vers les femmes ; au- jourd'hui meme elle parta^era ma cou- che. » II n'avait pas acheve ces paroles, que loutes les femmes du palais, rom- pant les files, se prccipitent dans les parterres. Leurs pieds, que le poete compare a des nenufars, effleurent a peine les gazons. Parcourant tous les recoins,furetantadroite, a gauche, elles cherchent avec une attention melee d'inquietude. A la fin , Li-mei-jin aper- coit la pi'tite boule; elle la ramasse et pousse un cri. Ainenee bientot devant I'empereur par Tchin-lin , le chef des eunuques , la jeune concubine s'age- nouille et recoit les compliments du monarque. « Oh, qu'elle est belle, » dit tout has un officier ; « Elle est encore plusheureuse, » repondun autre. L'em- pereiir rentre dans son palais, coudui- snnt Li-mei'-jin par la main. Un intervalle de neuf mois environ separe le premier acte du deuxieme. Li-mei-jin vientderaettreau monde un thaiiseu (prince heritier). L'impera- trice Lieou parait sur la scene ; elle est dans une agitation extreme, et appelle une de ses femmes, nommee Keou- tching-yu. On va juger du caractere de cette princesse par le dialogue suivant : l'impkratrice. Keou-tching-yu , repondez a mes ques- Uons. Qui est-ce qui vous nourrit? KEoc-TCHiitG-TU. (^EllefaU une reverence.) L'imperatrice. l/mFKRATRICK. Qui esl-ce qui vous doune des vetements? KEOc-TCHiKo-YO. {Elle fait une reverence.) L'imperatrice. L'lMPi&ATaiCE. Si je vous ordonnais d'aller dans le Palais Oneulal.... KK»0-TCHIHG-Tr, J'irais. 1. iMrKRATRICE. Dans le Palais Occideutal.... KEOa-TCHING-yO. J'irais. I.'lMPF.RATRICE. Si je ne vous ordonnais rien ? KEOD-TCHIIfO-TO. Je resterais ici. I.'lMPERATRICE. Ah ! mon ctieiir trcssaille de joie ; Tching- yu , je vous aime. II faut que vous me ren- diez un service important ; j'aibesoin de vous pour une certaine chose. KEOn-TCHIIfG-YU. Quelle est cette chose ? l'imperatrice. Vous savez que Li-mei-jin est acrouchce d'ua fils. Allez dans le Palais Occidental ; dites a la princesse que Sa Majesle temoigne le desir de la voir; puis faites semblant dt, quitter le palais et cachez-vous. Alors , ma bonne, vous prendrez I'enfant; vous hii en- foiicerez un poignard dans le sein , ou , si vous aimez mieux , vous I'etranglerez avec votre ceinture.... Tching-yu , c'est a votre choix. Acquittez-vous de ma commission , et revenez promptement... Ah ! j'oubliais un point essentiel ; vous jelterez le prince heri- tier, quand il sera mort , dans le grand lac du jardin. KEOD-TCuiKO-YU. {Elle fait une reverence.) J'executerai avec soin I'ordre de I'impe- ralrice. La scene change, et le theatre nous represente Keou-tching-yu tenant un enfant dans ses bras. Son esprit parait trouble, agite. C'est qu'au moment d'executer I'ordre de l'imperatrice, des scru pules etranges ontamolli son auda- ce. D'un cote, la boule d'or que Li-me'i- jin avait ramassee dans le jardin imperial et que le prince heritier portait sur lui, d'un autre cote, les couleurs emblema- tiques de son petit v^tement, tout cela avait fait sur Tching-yu une impression des plus vives. £mue jusqu'au fond de r^me, cette femme, plus superstitieuse que cruelle, concoit tout a coup le pro- jet de sauver le prince heritier. Elle s'achemine done vers le petit pont du jardin. Surprise par Tchin-lin, qui [»ortait dans ses mains une boite a toi- ette (*), elle prend le parti de lui devoiler (*) De la le litre de la piece. Cette boJle etait un present qu'il avait rcqu de I'em- pereur. CHINE MODERNE. m I'aboniinable complot de I'lhiperatrice. ■fitouffant ses soiipirs, el!e cherche a emouvoir le chef des eunuques; elle invoque tour a tour les maximes des sages et les exemples fameux de I'his- toire. Tchin-lin laisse attendrir son coeur. IMalgre la hardiesse et les perils de I'entreprise, il se devoue au salut de la dynastie, ouvre la boite, y cache Ten- fant precieux , remet le couvercie et s'eloigne. Dans cette scene, habilement conduite, le role de Tchin-lin est d'un bout a I'autre intercssant et noble. Cependant Timperatrice, apres avoir ordonne le meurtre du prince heritier, n'est pas encore satisfaite et trame deja la perte de la mere. II y a dans le palais un pavilion dont rarcliitecture est sim- ple et I'aspect fort triste ; c'est le pa- vilion reserve aiix concubines imperia- les qui ont encouru la disgrSce du mpnarqiie. — Li-mei-jin y entrera ; elle y trouvera la mort. — Lasse d'attendre Kcou-tching-yu , qui ne revient pas, rimperatrice, agitte d'une inquietude mortelle, sort de son appartement, pe- netre dansle jardin et rencontre Tchin- lin portant sa botte. I.'iMPERATRICE. Tchin-lin ? TCHiN-tiN , consterne d'cjfroi. Cicl, rimperatrice! je suis mort! I.'iMPERATRICE. On allez-vous .>* TCHiN-i.iN , avec emlarras. Dans le polager de I'emperenr [Il met sn hotte par terre), pour y ciieillir des fruits de la saison. I.'iMPERATRICE. T a-t-il tpielqne chose de nouvean (*).' TCHIN-I.lPr. On ne parle de rien. I.'iMPERATRICE. Alois, vous pouvez vous relirer. (Tcliin-lln rcprend sa boite, et s'eloigne preciphamment; fimperalrice le rappclle.) 1,'lMPERATRICE. Tchin-lin , revenez ici. {Tcliin-lln revient a pas lents, depose encore sa boile et s'age- nouille.) TCHIN-LIIT. Madame, j'altends vos ordres. l'imperatrice. (Apart.) Qu'a-t-il done? {Haut.) Tchiii- (*) Pour avoir des nouvelles cerlaines , on s'adressait loujours au chef des eunuques. Uri , qti^nd ie vous dis : « Allez-vous-en , » vous fendez I'air, comme la flcclie ecllappefe de Tare ; quand je vous dis : « Revenez, » on dirait un crin qui traine sur un tapis. Tout ce dialogue a et6 emprunte par Ri-kiun-tsiang. Afin de monirer com- ment les Chinois imitent, je vais repro- duire ici un fragment de VOrphelin de Tchao : HAN-K.rOOE. Qui es-tu." TCHING-ING. Un medecin; mon nom de famille est Telling; je m'appelle Tchin^-ing. HAN-KIOUE. D'oii viens-tu ? TCHIT) Il demande qu'on le transporte dans une autre chambre; toutefois, (Quoiqu'il envisage la mort sans emo- tion, son Sme est triste et agitee. Li- chi, son epouse, est belle, tres-belle, et Yd-cheou est jaloux. II craint, il apprehende avec effroi que, apres sa mort, Li-chi n'epouse un autre homme. II y a des traits de moeurs dans cette scene; elle est interessante, et nierite qu'on s'y arrete. y6-cheou. Ma femme, appretez-moi de I'eau de riz. i.i-CHi , aux servantes, Courez , courez vile. Qu'on appr^le de I'eau de riz pour mon cpoux. CHINE MODERNE. 421 yo-CHEOU. oh ! oh ! Ics servantes ! elles ne savent pas re qu'elles font. Ma femme, allez-y voiis- ineme. lit-CHl, J'obeis. (A part.) Be I'eau de riz; et a qiioi bon?.... C'est un pretexte; il a quelqiie chose a dire a men beau-frere. Ah! il veut que j'aille appreter de I'eau de riz ; je n'irai pas. Restons ici; nous entendrons tout. {Elie ecoiife a la porte.) yo-rHEOTT, a son fils. Fo-tong, mon fils, venez ici; agenotiille/- X'ous devant voire oncle. {A sonfrcre.) Mon frere, j'ai des amis, j'en ai, surtout quand j'ordonne un grand feslin; mais a qui, si ee n'est a vons , pourrais-je confier ma femme, recommander mon fils? Kcoutez; je vais vous ouvrir mon coeur. Votre belle-socur est jeune encore. {11 cliante.) Elle a des appas.... STTW-FO. Qui ne font aucun tort a sa vertu. Qu'avez- vdus a craindre ? yo-cHEotj. (// clianle.) Les seducteurs. II y a dans le monde des hommes qui ne rougissent de rien et qui sa- vent employer les promesses.... lis viendront, n'en doutez pas ; ils lui tendront des pieges. SCN-FO. Encore une fois, mon frere, vos craintes n'ont pas de fondement. Ma belle-soeur ne se laissera seduire sotis aucun pretexle. YO-CHEOU. Une indiscretion pent la perdre. Mon frere, quand vous vous apercevrez de quelque chose, usez de severite. Dites-lui,... SOIf-FO. Quoi .-* YO-CHEOU. «Ma l)elle-soeur, imitez done ma femme; elie a des principes , de la regularile , de !a retenne; aussi voyez comme eile jouit de I'estime pubiique. Ah ! ma beile-soeur, mar- chez tonjours siir les traces de ma femme. >> 1,1-CHi , revenant dans la chambre. Assesseur, quel langage tenez-vous la? YO-CHEOU. Un langage que je n'oserais vous tenir a vous-meme. LI-CHI. De tels soupcons sont injurieux pour moi. Eh, de grace, dans I'etat oii vous etes, ban- nissez de votre esprit les mauvaises pensees. Allez, quoi qu'il arrive , je resterai dans le veuvage. J'habiterai avec mon fils; et, quand menie Fo-tong viendrait a mourir, je ne con- tracterais pas de nouveaux noeuds. Femme, je n'ai jamais quitte la maison ; veuve , je ne sortirai pas de I'ouxToir. Oserais-je d'ailleurs regarder un bomme en face ? Fi done ! y6-cheou. Ah! vous ne soriirez pas de I'ouvroir, et vous croyez qu'aucun homme ne pourra s'of- frir a votre vue. Ecoutez-moi. 1.1-CHr. Oh, je vous ecoute, parlez. YO-CHEOU. (// chante.) II est des temps ou Ton doit sacrifier aux ancetres , par exemple , quand I'hiver arrive. {I I park.) Nous voici bienlot au quinzieme jour du mois. C'est la fete des morls. Fo-tong est trop jeune encore pour aller seul aux collines. Ma femme , est-ce que vous ne sortirez pas de I'ouvroir ce jour-la? Et si vous sortez, vos regards ne tomberont- ils pas sur des hommes? T.r-CHr. Je ne sortirai jamais. J'ordonnerai au tchang-tsien d'emmener mon fils avec lui, et de briiler du papier sur les tombeaux. y6-cheou. Tres-bien. Mais Fo-tong se mariera un jour. Apres les noces , il y aura necessaire- ment un repas, auquel assisteront les parents et les amis de voire bru. Qui les recevra, si ce n'est vous ? tl-CHI. Je recevrai les femmes; le tchang-tsiea recevra les hommes. YO-CHEOU. A merveiiie. Vous savez que j'ai des amis, des amis intimes. Quand ils entendiont dire que To, I'assesseur, est mort , ils viendront ici pour briiier du papier-monnaie ! Dans la journee , mon frere est a I'audience ; mon fils est a I'ecole. (// sanglote. ) Ah, ma femme, vous recevrez mes amis. (// chante.) Quand ils frapperont a la porte, vous ouvrirez; vous leur offrirez vous-meme le papier parfume. r.i-CHi. Vraiment, vous prenez les choses trop a ccEur. YO-THEOu, poussant des soupirs. Ah ! c'est mon convoi que j'apprehende!... Il aura lieu pourtant ; oui, dans sept jours ! Ma femme, esl-ce que vous n'accompagne- rez pas mon corps jusqu'aux sepultures.' (// ciiants.) II faudra bien que vous suiviez le char funebre. {Il parte.) Tous les jeunes gens de la vilie dirontalors: « Yo, I'assesseur du tribunal , avail une femme d'une beaute accomplie; elle s'est toujours derobee aux regards du public; allons done au convoi de I'assesseur; nous la verrons. » Ah, ma femme, des qu'ils vous apercevront, ne seront-ils pas frappes de I'elegance de votre tailie et de rirresislible attrait de vos charmesp II me L'UNIVERS. aemble deja que jc les entends : « Oh, qu'elle est l>elle! qti'elle eit belle ! Bon f;re, mal gre, je vpux quelle devienne ma fonime. .. (// ^'eiMiHOHil.) 8Dir-PO. Mon frcre, calmez-vous? YO-CHEOU, revenant a liii. Oil est moil liis? (^sonfiU.) Fo-tong, j'ai uue recommandation a vous faire. Quand foiis serer grand, lie liuivci; pas la oarriere de-sleltres; liviez-vous a I'agririilture. {A son fi-ere.) Mon frere, je vous en supplie, pre- uez soil! de mon fils. SCH-KO. N'ayez aucune inquietude; je me char- f;erai. de Fo-long. TO-CHEOU. Je sens que mon dernier moment approche. Ma fenime, qiiaud je serai moit, ii'oiibliez pas de Tester dans I'ouvroir. (// meiirl.) Au second acle, le theatre repre- sente I'enfer des Tao-sse, On doit s'at- tendre ay rencontrerYd-cheou ; il y est. Le polytheisme tao-sse a des enfers plus nonibreiix que le bouddhisme; les Tao- sse en comptent dix-huit. Y6-cheou se presents charge du poids de ses fauteS. II coniparait devant le juge, qui est en ni^me temps le roi du monde souter- rain (Yen-wang), ct habite dans la ca- pitale des inorts une assez jolie maison pour une inaiSon infernaie. Le poete place a cote du roi deux assistants ou deux demons, dont I'un a une t^te de boeuf , et lautre une tele de cheval. En general , on ne trouve dans I'enfer des Tao-sse aucune forme pure et re- {luliere, mais les combinaisons les plus etranges et les assemblages les plus fantastiques. Tout cela est visiblement emprunte des mythologues de la Cbine^ et cela n'en estpas plus poetique. On precede a rinterrogatoire de Y6-cheou. Celui-ci est frappe d'une terrible epou- vante, quand 11 entend I'arret du juge. Au fond , cet arrfit a de quoi epouvan- tor. Voici comment on punit les ava- res : les demons prenrtent une chau- diere immense qu ils placent sur neuf ti"epieds ; ils remplissent la chaudiere d'liuile, mettent Je feu sous les tr^- pieds, et, quand Ihuile commence a bouiliir, le roi jette dans la chaudiere une de ces pctites pieces de monnaie que les Chinois appellent vien (cope- ques ) , et ordonne au coupable d'aller la ramasser. Ileureusement le grand anachorete, Liu-thong-pIn , qui est un immortel , arrive tres-a-propos pour delivrer Y6- cheou du supplice qui I'attend. Le lec- teiir verra plus tard que les inunortels tao-sse ont la faculte de platier dans les airs. Doues d'une agilite extraordi- naire, et d'une subtilite plus extraor- dinaire encore, ils peuvent se trans- porter en un moment d'une partic du monde a I'autre, de la terre au ciel, puis du ciel redescendre dans les en- ters. Avec quclques paroles , quelques exhortations, comme il sait en faire, I'anachorete convertit Yd-cheou a la foi des Tao-sse, et le neophvte prononce en enfer ses voeux de religion. Cest alors que Liu-thong-pin sollicite et ob- tient la grace de Yd-cheou. A cela pres de quelques actes, d'une severite peut-etre excessive, les habi- tants des enfers tao-sse sont d'une grande politesse. l^e roi lui-meme a beaucoup d'affabilite. LF. ROI DES EMFERS, a Liu-l/tong-pl/i. Illuslre mallre , j'aurais dii aller a votre rencontre. Que je suis confus de mon iuri- vilile! elle est impardonnable , imiardon- iiable. T.IU-THONG-PIS. J'ai a vous entretenir d'une affaire se- rieuse. Quel crime a done commis Y6-clieou, pour que vous lui infligicz un tel chalimeni? LE ROI. Vous ne savez done pas que cet .'ibomi- nable homme (moiitranC Yo-cheott) , pendant qu'il etait assesseur du tribunal de Tehin^'- tcheou, vendait la justice, prevariquait a chaque moment. C'est un avare , un monstre d'avarice.... Oh, il ira dans la chaudiere. I.IU-THOKG-rlW. Grand roi , iniitez la verta du Chang-ti (souverain seigneur du ciel) , qui uime a donner I'exislence aux ^fres. Cet liomme, tout rupide qu'il est, n'en a pas moins dc la vocation pour la vie religieuse. Et d'ailleuivs, il est converti maintenant; il a prononce ses voeux; j'en fais mon disciple. Par considera- tion pour moi , rejoignez sou ame a son corps, rendez-ie au monde. I.R Bor. Attendez, que je regarde un pen. {Il re- garde. ) Quel nialheur ! la femmc de Y6- cheou vient, a I'iustant meme, de brrtler If corps de son mari. T.ru-THOWa-PIN. Comment done faire ? CHINE MODERNE. 4SS To-CHEon, a part. Quelle infamie, quelle cruaute! Ah! nia femme , vous eliez done bien pressee d'en finir avec mcs restes ! Ne pouviez-vous pas seulement altendie iin jour de pliis? LXU-THOMG-PIN. Vons avez le moyen de substituer a son propre corps le corps d'uM autre. Grand roi, examinez done. re ROI. Tres-volontiers. (// regarde.) II y a dans le faubourg de Tching-tcheou un jeune bou- cher, qui est mort depuis trois jours. Son nom de famille est Li. Chose extraordinaire! la chaleur du corps n'est pas encore eteinte. Venerable immortel , je puis faire transmi- grer I'ame de T6-cheou dans le corps de ce bourher. Qii'en pensez-vous? Je vous avertis quil est horriblement laid: 11 a des yeux bleus. I.IC-THONG-PIN. J'acceple , j'accepte. ( yi Yo-cheoii. ) Yo- cheou, on va operer voire transmigration. Vous le voyez, on ne pent pas reunir volie ame a voire corps, puisqiie voire corps n'existe plus. Voire femme I'a brule. II ne fnut pas toulefois que eel evcnement laisse dans voire ame des regrets inutiles. Vons transmigrerez dans le corps d'lni jeune boucher, qui n'elait pas beau. Vous aurez des yeiix bleus. Mais qu'imporle? n'avez-vous pas renonce tout a rheure h. la convoitoise, a la voliipte? Y6- cheou, soyez toujours fidele a vos vneux ; souvenez-vous bien de nies exliortalions. Mainlenant voire nouveau nom est Li-cheou; voire nom de religion Tie-khouai. Allez, quiltez la ville des morls. Y6-chcou remercie Liu-tliong-pin, et sort avec precipitation des eiifers. Le troisieme acta nous introduitdans line petite maison du faubourg exte- rieur deTcliingtcheou, Cest la maison du boucher Li, dont le fils est mort depuis trois jours. Le theatre repre- sente une chambre a coucher. Le mort est etendu sur un lit; toute la famille est consternee. A la Chine, on peut toujours compter sur I'assistance de son voisinage. Les parents s'abandon- nent au desespoir, quand deux proches voisins arrivent pour enlever le corps. La veuve pousse des gemissements; ma is bientot sa douleur fait place a une joie excessive, car la transmigration de Yo-cheou s'opere. Tout a coup le mort se rani me et se dresse sur son lit. To-CHEOU, etonne. Ma femme! Tcbang-tsien ! Fo-long! oti etes-vous.' I.E PERE DD BOUCHER , ait comblc de la joie. Remercions le Ciel et la Terre ! mon fils est ressuscite. YO-CHEOU, d'lin ton couirouce. Chul! a I'audience, a I'audience; je ne m'occupe d'affaires qu'a I'audience. A-t-ou jamais vu un scandalepareil.' Quelle audacb! ils viennent jusque dans ma chambre a cou^ cher. I.E PERE »U BlOCnER. Je suis ton pere; voila ta femme. Mon fi!s, est-ce que tu ne me reconnais pas ? y6-cheou. Voyons, approchez.... En verite, je nc vous reconnais pas. T.E PERE DU BOUCHER. Quel etrange langage! LA. FEMME DU BOUCHKR. Li , mon epoux , vous me reconnaissez , moi? Vous reconnaissez votre femme, qui vous aime tant. TO-cBEOU, d'ltn ton irr'tte. Tchang-tsien , metlez-moi ces gens-la a la porte. I.E PERE DU BOUCHER. Mon fils, revieiis a toi. I.A FEMME DU BOUCHER. Conceit -on qu'il ne reconnaisse pas sa femme .•• YO-CHEOU. Ah ! vous m'assourdissez les oreilles. Lais- sez-moi rcflechir un pen. (// cro'ise ses mains sur son front et rcflecliit.) Ah! je me sou- viens mainlenant des paroles de mon libera- teur, quand j'ai quitte les enfers. Mon ame a transmigre dans le corps d'un boucher. La maison oil je me trouve est probableraent celle qu'il habitait. Comment faire pour en sortir? {Haitt.) Ecoutez; il est tres-cerlain que tout a I'heure j'etais mort ; il est encore tres-cerlain que je ne suis qu'a moitie res- suscite. Mon ame est dans mon corps; mais mon esprit n'y est pas. II est reste dans la pagode de Tching-hoang. Il faut que j'aille chercher mon esprit. I,E PERK DU BOUCHER. Ma bru , reraettez a votre mari du papier par fume, i,A. FEMME DU BOUCHER , ttvec vivocite. Oui ; mais dans I'etat ou il est , je ne veux pas qu'il aille tout seul chercher son esprit. YO-CHEOU, avec colere. J'irai seul , j'irai seul. Est-ce que vous ne savez pas que les esprils prennenl la fuite des qu'ils apercoivent un etre vivanl.' Ils sont d'uue extreme'timidite. Vous epouvanleriez 4M L'UNIVERS. inon esprit, (li te live, vail marcher, et tomhe a la remerse.) All ! voila une chute qui m'a tue. LE PEKE Di; BOUCHEH. Mon fils, a quoi penses-tu? Tu sais l)ien que tu as une jainbe tortue. Pourquoi cher- cbes-lii a marcher? LA FEMMF. DU BODCHER. Li , mon epoux , on ne peut pas marcher avec une jambe. Voulez - vous votre be- quilie ? yo-cHEOu. Ma bequille ! {A part.) Ah , mon pere spi- riluel , que n'ai-je trausraigre dans un corps phis parfait ? Voila ; dans ma vie prccedenle, qiiaud j'etais assesseur du tribunal , j'avais une conscience tortueuse , el mainlenairt je reviens dans Ic monde avec une jambe tor- tue : c'cst de la justice. I.E PKRE DU BODCBER, Veux-tu ta bequille .>* YO-CHEOU. Oui , apportez-la , apportez-la. (Yo-cfieou prend la bequille , et se wet a marcher.) T.A FEMME DU BOUCHER. Appuy«z-vous sur moi. Yii-CHEOU. Non , non , retirez-vous. (// sort de la niai- son.) Ne me suivez pas surtout ; vous epoii- vanleriez mon esprit. Au quatrieme acte, Yo-cheou s'ache- mine lentement vers son hotel, qu'il ne reconnait pas. Apres avoir clierche pen- dant quelque temps, examine toutes les maisons de la rue, il prend le parti d'iu- terroger un passant. Y()-CHE0u, au passant. Pourriez-vous me dire ou je demeure ? tE FASSAKT. Non. TO-CHEOU. Savez-vous oii est la maison de Yo-clieou ? LE PAssAWT, montranl une maison. La voici. YO-CHEOu, avec surprise. Comme elle est changee ! LE PASSANT. C'est que , apres la mort de Yo-cheou , Han-Wei-kong, touche des grandes qualites cl des vertus de ce magistral , a voulu trailer sa veuve avec magniTicence. II a fail peindre la maison , decorer rarriere-pavilloii , donl I'entree est severement interdite a tons les habilants de la ville. y6-cbeoc. Merci! [A part.) Toiichi- de mes vertus! je croii p\ut6t ((u'll a etc touche des allrails de ma femme. N'importe , entrons. II frappe. Li-chi ouvre. Eu voyaiit tin liomnie avec des yeux bleus, une Jonfiue liarbe et une jambe en cerceau, Li-chi ne peut se defendre d'un mou- vemeut d'effroi , et cherche a refermer la porte; mais Y6-cheou decline son noni, et, raconte en detail sa descente aux enfers, son jugement, le rigoureux supplire qu'on voulait hii infliger, sa delivrance, et enfin sa transmigratiion. Un tel r^cit n'^tonne point la femme ; elle fait entrer Yo-cheou dans sa chambre, et son esprit n'est preoccupe que d'un seul objet, c'est de la iaideiir de son epoux ressusrite. « II fallait, iuidit-elle naivement, revenir a la vie, sinon avec une forme humaine plus parfaite^au nioins tel que vous etiez auparavant. » La conversation des epoux est in- terrompue par I'arrivee de Sun-fo, qui venait de fonder un service pour ITime de son frere. II est suivi du tcliang- tsien. Le greffier est d'abord etrange- nient surpris, et non moins scandalise, quaud il trouve sa belle-soeur assise a cote d'un mendiant , car il prend Yo- cheou pour un mendiant. On s'explique alors; mais pendant qu'on s'explique, le pere et la inere de Li arrivent a ieur tour. X.I , a sa brii. Il est ici , ma bru ; je n'en donte pas. En- trons , entrons. (// entre le premier, et aper- coit Yo-cheou.) Mon fils, que fais-fu ici.' Reviens , reviens done a la maison. YO-CHEOU. Comment, a la maison.' mais je suis chez moi. LA FEMME DE L!. C'est mon mari. LA FEMME DE YO-CHEOC. C'est raon epoux. Une altercation s'^leve entre les deux feinmes. Le tchang-tsien , dont I'office est, comme on I'a vu, d'administrer la bastonnade, prend la bequille de Yd- cheou et en frappe le pere du boucher. Yo-cheou tonibe encore unefois. Li se met a crier : « Justice! justice! a I'au- dience ! — A I'audience ! » repondent les autres. Tons les personnages , sans en excepter Li-chi , sc rendent a I'au- dience. La scene change, et le theStre repre- sente le tribunal de Tching-tcheou. CHINE MODERNE. 425 Han-Wei-kong est dans le siege du jiige; Li est le demandeur. Apres les questions d'usage, celui-ci expose !a cause : Y6-cheou replique. On pent se Hgurer I'embarras de Han-WeT-kong , quand il apprend qu'il a devant lui un homme dont le corps est celui du bou- cher Li, et Tame celle de Y6-cheou, ancien assesseur du tribunal. II refle- chit; il inlerroge du regard toutes les personnes presentes; ii ne sait a la- quelle des deux ferames il doit accor- der uu mari. L'intrigue du drame se n'enoue surnaturellement. Et Liu- thong-pin, revenu fort a propos des eufers, comparait en personne. Y6- cheou, qui s'etait oublie au point de inanquer a ses voeux, se desiste de ses folles pretentions, des qu'il apercoit son liberatenr. II declare qu'il em- brasse la vie religieuse, adresse quel- ques sages conseils aux deux femmes, et quitte le tribunal avec le grand ana- chorete. Han-Wei-kong, sauve d'em- barras, leve I'audience, et chacun s'en retourne chez soi (*). Le Pavilion de Yo-yang. L'auteur, Ma-tchi-youen', a pris son sujet dans I'histoire tabuleuse des Tao- sse, eta choisi, pour son principal per- sonnage, I'anachorete Liu-thong-pin. A defaut de mythologie, I'histoire des Tao-sse parait tres-favorable a la poe- sie dramatique. Elle presente quelques situations dignes d'un grand theatre, ct Ma-tchi-you^n, qui excellait dans la peinture des mceurs et des caracteres , en a su tirer de magnifiques tableaux. 'Le Pavilion de Yo-ijang offre beau- coup de ressemblance avec la quarante- cinquieme piece de la collection, ou le Songe de Liu-thong -pin , qui est du meme auteur. Toutefois, des deux pie- ces, je prefere la seconde. On sent que Ma-tchi-youen avait fait ses premiers essais dans ce genre ; il est" plus sage, plus severe; le nierveilleux do la magie, considere poetiquemeut, y est mieux employe, et la piece, en general , est d'un interet plus touchant. On trouvera plusloinune analyse complete dtt Songe de Liu-thong-pin (*). Le Mai d' amour. Cette comedie est une des plus fan- ,- tastiques du repertoire, et I'intention n'en parait pas tres-difficile a saisir. •Te ne sais si je me trompe, mais il me semble que, a une lecture un pen at- tentive^ on y verra une satire de la psychologic chinoise , comme on a trouve, dans la Transmigration de Yo-cheou, une satire de la metempsy- cose. Pour juger une piece telle que le Mai d'anwur, il faut done connaitre jusqu'a un certain point les opinions philosophiques des Chinois sur la na- ture de ra'me. Or, les philosophes , ou plutot les commentateurs des anciens livres, enseignent qu'il y a deux prin- cipes dans I'ame : uu "principe sup^- rieur, qu'ils appellent Hoen, et un principe inferieur qu'ils nommeut P'e. Le Hoen est une partie subtile du Yang, ou du premier principe male; le P'e est une partie subtile du Yin, ou du premier principe femelle. Le P'e, forme avant le Hoen, entre pour sept dixiemes dans la composition de I'ame humaine; le Hoen n'y entre que pour trois dixiemes seulement. Ce qu'il y a de plus bizarre encore, c'est que, d'apres les Tao-sse , la separation du Hoen d'avec le P'e ne sufGt pas pour determiner la mort. Quand cette se- paration a lieu, leP'E reste avec le corps animal, et le Hoen, devenu ce que les Chinois appellent kouei (un esprit), conserve individuellement la forme hu- maine dont il etait revetu. Telles sont les opinions extravagantes que l'auteur attaque d'une maniere tres-bouffonne, quoique, dans tout le cours de la piece, rien n'indique la moindre allusion a la philosophic des anciens. Le prologue du Mai d'amour offre une grande ressemblance avec le pro- logue de la comedie intitulee : « Tchao- met-hiafig, ou la Soubrette accom- plie,v comedie quej'aitradiiiteetqui est du meme auteur. Le bachelier "VVang- seng et Thsien-niii , jeune lille spiri- (*) Le Steele des Youeii, Journal asialique, (*) Le Steele des Youin, Journal asiatique, cahier d'avril-mai i35i, p. 339 a SGi. avril-mai i85r, p. 374. 4M L'UNIVERS. tuelle et jolie, avafent ^i^ fianc^ par leurs parents. Une cntrevue a lieu comme dans Tchao-mei-hiang ; les fiances, qui ne se connaissaient pas, deyiennent ^pris I'un de I'autre; mais ■yVang-senp a perdu son p^re et sa m^re, il porte le deuil; et madame Li, mere de la jeune fille, juge a propos de differer le manage pour ob^ir aux rites. Elle exige en outre que le bache- lier se prfeente au concours des doc- teurs. Wang-seng, c^dant aux instances de madame Li, prend cong^de Thsien-niu et part pour la capitale. La scene des adieux, quoique d'ailleurs tres-bien 6crite, forme a elle seule tout le pre- mier acte. Ces adieux achevent de ser- rer le coeur de la jeune fille, que I'a- mour avaitd^ja rendue malade. Elle se retire avec sa suivante, se couche,et tombe dans cet affreux d^lire que les Chinois appellant siang-sse-ping (le mal d'amour). Son 3me spirituelle ( hoen) s'^chappe alors , se rev^t d'une forme humaine charmante et tout a fait semblable au corps gracieux qu'elle ani- mait, court apres Wang-seng , qu'elle trouve surla route deTchang-ngan, et fait accroire au jeune homme, tout stu- p^iait , qu'elle a quitt^ furtivement la maison de sa m^re pour le suivre. Les deux amants conviennent de faire en- semble le voyage de la capitale. A partir de ce moment, Taction se divise, comme le principal personnage, en deux parties, et la scene se passe alternativement dans la capitale et dans la raaison de madame Li. Thsien-niu, rest^e avec son corps animal et son 9me sensitive { p'e), ne pent sortir des tourments amoureux dent elle est la proie, tourments qui sont decrits par le poete avec beaucoup de verve et de liberty. Sa mere a beau lui donner mille marques de sa tendresse, elle ap- pelle Wang-seng a chaque moment et pousse des cris douloureux. Un jour, enfin, on frappe k la porte; la suivante ouvre: c'est un messager qui arrive de la capitale. U MEMAGEB. J'apporte une lettre du bachelier Wang , mon maitre , qui \ient d'etre appel6 a ua niandarinat du premier ordie. T.A SrrVANTE. Venez, venez par ici. (El/e conduit le mes- sager dans la c/iamire de sajeane maitresse.) LE MESSAGER , aperccvont Thsien-niu. La belle personne ! comme elle ressemble a madame ; c'est a s'y meprendre. (^ T/isien- nih.) Yoici une lettre du seigneur Wang, mon maitre. THStEir-Kiir, lisant. •< A Madame Li. » Voyons done : « Capi- tale , hotel du gouvernement. — Wang , vo- ire gendrc, premier laiireat du concours, se prosterne hiimblcment a vos pieds. II a I'hon- neur de vous informer que, apres avoir monte les degres du palais imperial , il s'est place tout d'uu coup au premier rang des docteurs. li a oblcnu le grade eminent de tchoang- youen, et u'attend plus qu'une notification of'fi- cielle pour retourner avec sa fiancee dans votre noble demeure. II implore dix mille fois votre misericorde. — Missive confidentielle. » Ainsi done, il epouse une autre femmel O ciel, j'en mourrai d'indignation! {Elle tombe evanouie.) LA SUIVANTE, la relevant. Mademoiselle, reprenez vos esprils.(r/(«^«- niii revient de son cvanouissement.) C'e^t la faute de ce vilain messager, (La suivante frappe Ic messager.) LE MESSAGER , (jiilltant V apportement. La belle commission ! Au fond, mon mai- tre a tort. Ah , monsieur, que vous epousiez une autre femme , encore passe ; mais qu'a- viez-vous besoin de m'envoyer ici avec une lellre.3 Je me disais : C'est sans doute un com- pliment qu'il adresse a sa famille. Oh oui , c'elait pour divorcer.... La pauvre fille I j'ai failli la faire mourir de colere. Ajoutcz a cela que la suivante m'a ballu. Au fond, mon maitre a tort , mon maitre a tort ! Ici finit le troisieme acte, qui con- tient des morceaux lyriques d'une grandeetendue et d'une grande beaute. De tous les auteurs dramatiques de la dynastie des Youen, Tching-te-hoet etait le plus exerce dans I'art d'ecrire en vers. II a niontre, par la Sonbrette accomplie, qu'il pouvait s'elever jus- qu'au genre de la comedie; et s'il y a plus de delicatesse et de grSce dans cette derniere piece, on trouve dans le Mal (Tamour, malgre I'etrange econo- mie du plan , beaucoup plus de naturel et de sensibilite. Au quatrieme acte, Wang-seng re- vient dans son pays natal , avec celle qu'il prend toujours pour Thsien-niii. CHINE MODERNE. 427 II sfi presente a sa belle-mere, afflige, contrit de tout ce qu'il a fait; il de- mande pardons sur pardons ; il se met a genoux. MADAME Li , avec etonnemeiit. Je n'y comprends rien ; quelle fame avez- vous done commise? WANG-SEWG. Ah , madame, je u'aurais pas dii emmener votre noble fiMe avec moi , sans voire per- mission. MADAME LI. Ma filie ! eile est loiijoiirs restee dans sa chaml)re ; elle est nialade. WANG-SE>-G. Comment ! elle est malade? La voici. {Moii' trant cellc qu'H avait amene'e.) MADAME LI, satsie {Tejjfroi. C'est un esprit, c'est un esprit (kouei). Uoe scene d'explication a lieu. On conduit I'esprit de Tlisien-niu dans la chambre de la jeune (ille. Get esprit, apercevant son corps, y rentre avec precipitation; la belle forme qu'il avait revetue disparait au meme instant. Tout obstacle est leve ; et , comme rieii ne s'oppose aux impatiences des deux amants, la piece se termine par le fes- tln nuptial de Wang-seng et de Thsien- niu (*). Le Songe de Liu-thong- pin. Le Songe de Liu- thong -pin est un Mijet tao-sse. La premiere scene est dans le ciel , et le theatre represente un cabinet de travail (tcbai), le cabi- net de Tong-hoa-ti-kiun ou du Souve- rain de la feur orientalc. Tong-hoa- ti-kiun nest pas un dieu oisif, spec- tateur indolent des cboses humaines, comme parte Massilion ; il est tres-oc- cupe, car il examine chaque jour les rapports des esprits qui president aux cinq montagnes sacrees, parcourent I'univers, et observent les actions des homines. Pour se delasser d'une lon- gue application, le dieu quitte son ca- binet et abaisse ses regards sur les con- trees inferieures. II est frappe de la serenite de I'air. C'est qu'il existait alors, dans la ville de Ho-nan-fou , un (*) Le Steele des Youen , Journal asiatique, juin i85i, p. 497 a 5o2. jeune bachelier, dont on pouvait re- nouveler la nature et sanctifier I'esprit. Son nom de famille etait Liu , son surnom Yen , et son titre honorifique Thong-pin. Le Souverain de la Jleiir orlentale ne perd pas un moment ; il charge un grand anachorete, Tching- yang-tseu, de convertir Liu-thong-pin a la foi et au ciilte des Tao-sse. Get anachorete etait du nombre de ceux que les Ghinois appellent Sien (immor- tels). II habitait sur une montagne, cultlvait Talchiraie, operait a volonte des metamorphoses et ressuscitait les morts. Originaire de Hien-yang, he- ritier d'un grand nom , il s'etait illus- tre lui-meme dans la carriere des let- tres et dans la carriere des armes. Appele au commandementdes troupes, sous les Han, il avait gagne des batail- les. Plus tard, apres avoir distribue son bien aux pauvres , il s'etait retire a Tchong-nan-chan, ou il avait trouve le Souverain de la fleur orlentale et acquis I'intelligence du tao ou de la rraie voie. Nous quittons le ciel. La seconde scene du prologue nous ramene sur la terre et nous introduit dansl'hotellerie de Hoang-hoa , a quelque distance de Han-than. Cette hotellerie est une mai- son enchautee, et I'hotesse n'est rien moins qu'une femme : c'est un esprit (sien). Le bachelier Liu-thong-pin ar- rive, moute sur son ane, et portant Te- pee des lettres. II s'arrete , entre dans I'hotellerie ; mais comme il est pauvre, il demande a Thotesse du millet jaune ( hoang-Iiang), pour apaiser sa faim. II est bientdt suivi de Yang-tseu. Le venerable aspect du religieux fait sur Thong-pin une impression profonde: n Oserais-je, dit celui-ci, vous deman- der quel est votre nom ? » Pen a pen, la conversation s'engage, et Yang-tseu, fidele a sa mission , cherche a conver- tir Liu-thong-pin. YANG-TSEU. La reputation, la fortune, les dignites, voila done tout ce qui occupe voire coeur. Ce sont la des choses qui vieillissent el pe- rissent. Bachelier, vous ne pensez pas a vos fins dernieres. Vous ne comprenez rien a la vie , rien a la mort. Suivez mes conseils , re- noncez an monde. 438 LTNIVERS. THOKO-riN, Docleur, je crois que vous ^tcs fon. — I.e nis dii Ciel appelle a la cap.tale tons les l.om- mw de talent , je veux concounr. Quo.! j au- rais tindie le W6n-tchang avec lant d ardeur pour devenir.. .. Tao-sse ! Oil sera.l le fruit de mcsveilles? Dites-moi, docleur, quels sont done vos plaisirs ? YAWG-TSKU. Les plaisirs des religieux ne ressetnhlent pas aux plaisirs du monde. THONG-nW. Mais enfin , quels plaisirs avez-vous? YAKG-TSEr. Est-cc que vous ne save/, pas (// chantc) «que du haul du niont Kouen-lun (sejour des immorlels), nous cueillons les ctoiles; que, sur le mont Tai-chan, le sable que nous ramassons est du sable d'or. La , le ciel n'a pas plus de deux a Irois pouces de hauteur, et la terre ne paratt pas plus grosse qu'un poisson. Qiiand une fois I'liomme s'est iden- lifieavec leTao.... » TBONO-rrw, rinterrompant. Voila nn langage bien fastueux. YAKG-TSEC, contlnuaiit. « II vit eternellement , et ne vieillit pas. II connait laverite, dompte les dragons, sou- met les tigres. » L'anachorete trace a sa facon le pa- rallele de la vie mondaine et de la vie religieuse. 11 recne dans ce tableau un sublime de mylhologie chinoise qui ap- f)roclie de I'extravagance. C'est le me- ange le plus bizarre d'opinions fan- tastiques, de traditions populaires et de metaphysique subtile. Les allusions nombreuses qu'on y trouve ne sont qu'un fort mauvais remplissage. On a lieu de s'en etonner, si Ton songe que I'auteur, Ma-tchi-youen, qui s'e- tait essaye dans tons les genres de poesie avec un grand succes, passe pour un excellent versificateur. — Pen- dant que Yang-tseu enumere tous les biens et tous les plaisirs dont jouissent les immortels, Liu-thong-pin s'endort. L'anachorete decide que le sommeil de Thong-pin durera dix-buit ans, et quitte I'hotellerie de Hoang-hoa; mais, a peine est-il parti, que Thong-pin se re- veille; il adresse quelques paroles a I'hotesse, prend son fine, et se remet en route sans avoir mange. Dans rintervalle qui separe le pro- logue du premier acte, dix-sept ans se sont 6couies. Liu-yen (Liu-thong-pin) s'est presents au concours des doc- teurs, et a obtenu la premiere place; puis au concours militaire, oit il s'est distingu^. l^omme commandant de la cavalerie, il a cpouse Thsoui-ngo, fille unique de Kao , gouverneur du palais imperial. Thsoui-ngo est une jeune femme d'une grande beaute, et Liu- thong-pin a de son mariage avec elle un liJs et une (ille. Or, c'est dans le pa- lais du gouverneur que le premier acte nous introduit. On apprend alors qu'une grande insurrection a eclate dans le pays de Thsai-tcheou ; que les insur- ges r^pandent partout la terreur ; qiie le filsdu ciel ordonne a Liu-yen (Thorig- pin) de se mettre a la t^,te des troupes et d'etouffer la revolte. Thong-pin ar- rive dans le palais pour prendre cong6 du gouverneur ; mais , comme tout est fantastique dans la piece, le gouverneur n'est pas Kao, c'est l'anachorete Yang- tseu sous les traits du gouverneur. Ce- iiii-ci adresse a son gendre des reconi- mandations tres-s6veres , lui retrace les devoirs d'un general d'armee, et lui-ci offre, suivant I'usage, le vin du depart; Thong-pin en boit une tasse et se trouve tout a coup indispose. C'e- tait pourtant du vin de Yang-tcheou. « Thong-pin, dit alors le gouverneur, suivez mes conseils ; abstenez-vous de I'usage du vin, puisque le vin est per- nicieux k voire sante. — Je n'en boirai plus, repond le gendre; j'en fais le serment. » Ce serment est le premier des voeux que prononce Thong-pin. Au deuxieme acte, Kao, le gouver- neur du palais imperial, succombe a une maladie aigue. Get ^venement ne fait aucune impression sur Thsoui-ngo, dont I'ame est agitee par les passions. Profitant de I'absence de son epoux , elle entretient avec Wei-che, (lis du president d'une cour souveraine, les relations les plus criminelles. — D'un autre cot^, Liu-thong-pin, charge, comme on I'a vu , de reprimer I'insur- rection de Ou-youen-thsi , avait pre- sente la bataille aux insurges et rem- porte la victoire; mais, pendant que Thsoui-ngo s'abandonnait a I'intem- p^rance de ses desirs, Thon^-pin, plus coupable encore, se livrait a tous les exces pour assouvir sa cupidite. II vend le territoire , les champs qui ont CHINE MODERNE. 429 ete le theatre de son patriotisms et de sa valetir; 11 recoit trois boisseaux de paries, une immense quantite d'or ; et , charge de ce hontenx butin, il s'en retourne dans le palais du gouverneur. Un chatiment cruel I'y attendait. Et d'abord il est frappe du silence qui rh- gne partout. « Ma femme, pense-t-il, s'est ensevelie dans la solitude. — Oil est done le vieux domestique? — Je ne vols personne ! — Entrons dans cette chambre a coucher; mais... j'entends du bruit. Ecoutons. » XHSOUr-NGO. Que le viu me semble bon , qiiand je le bois avec vous ! WEl-CHE. Si Liu-yen (Thong-pin) meurt sur le champ de balaille, je vous epouse. nu-THONG-piN, a part. Le scelerat ! THSOui-NGO, riant. Ah , ah , si pour mon bonheur Liu-yen venait a mourir, mon choix serait bientot fait. Lic-THONG-piN, etoiif/ant de colere. J'enfonce la porte. (// enfonce la porte; Wei-c/te el Tlisoui-ngo sont consternes d'ef- froi) WEl-CHE. Je suis pris. Sautons par la fenetre. Cou- rous , courons , coiu'ons. (// saute par la fe- netre , et oiibite son bonnet.) nu-THONG-piN, entrant dans la chambre. L'amant est parti! {A Ttisoui-ngo.) Qui est-ce qui buvait du vin avec vous ? THSOUI-BGO. Personne. UU-THONG-PIir. Personne; et a qui ce bonnet.' WEl-CHE , dehors, et mettant le nez a la fe- netre. Mon frere (ko-ko), c'est a moi. (// se sauve.) Voila, sans contredit , un amant bien bouffon. Thong-pin ne dissimule pas sa rage; et, dans le premier acces d'une jalousie trop fondee, il veut poi- gnarder sa femme; mais I'anachorete vient au secours de celle-ci. Yang-tseu se presente sous les traits du You^n- kong, ou du vieux domestique de la maison ; il intercede humblement pour la fille de son maitre, et implore a ge- noux la clemence de Thong-pin. Cette scene est, sous le rapport de Texecution, d*une beaute vraiment remarquable, et le role du vieux domestique est sou- tenu d'un bout a I'autre avec unegrande perfection, II y a dans les paroles du vieiliard une sensibilite douce, naive, touchante, qui finit par penetrer jusque dans rSme emue de Thong-pin. L'e- poux flechit et pardonne. Toutefois, cet acte de misericorde, quel qu'en soil le merite, ne le sauve pas de la ven- geance des lois. On instruit son pro- ces. Le general Liu-thong-pin, declare coupable d'avoir vendu le champ de bataille , d'avoir recu de I'argent et d'avoir abandonne un poste militaire, est condamne a subir la mort par de- capitation. La procedure est transmise au conseil pour avoir le prononce defi- nitif de I'empereur; et, comme Thong- pin avait rendu des services a I'fitat, I'empereur, usant d'indulgence , con- damne le general au bannissement. Tombe dans le malheur. Thong-pin se livre a de serieuses reflexions sur sa conduite. On voit que le temps s'ap- proche oii il devait changer de croyan- ces. II avait deja fait un voeu; il en fait un second, le voeu de pauvrete; puis un troisieme , car il remet a sa femme un acte de divorce^, et embrasse la cliastete. Thsoui-ngo est au comble de la joie. Cependant un officier de po- lice arrive avec des archers : I'epouse infldele reclame ses enfants et veut les garder; Thong-pin s'y oppose. THONG-rlN. Us me suivront. — A qui done voulez-vous que je confie mon fils et ina fille ? THSOm-NGO. A moi. Si vous avez viole les lois de I'J^tat, est-ce que cela nous regarde ? Thsoui-ngo veut arracher ses enfants des bras de Thong-pin. Alors un com- bat corps a corps s'engage entre Thong- pin, Thsoui-ngo, le flls, la fille et le chef des archers, qui frappe tour a tour sur le mari , la femme et les enfants. C'est une scene tout a fait ridicule. Le chef des archers y met fin, en adjugeant a Thong-pin les enfants qu'il enimene avec leur pere. La premiere scene du troisieme acte nous represente le principal person- nage du drame, dans le moment ou ses gardes, fatigues de Toffice inhumain L'UNIVKRS. dont ils sont charges, I'abanclounent au milieu d'uiie plaine deserte; ses Eieds sont nus , ses vdtements en lam- eaux. li tombe avec ses deux enfants dans la faim et le desespoir. Ici I'uni- que objet de Ma-lcbi-you6n est d'e- niouvoir la multitude par le spectacle de la souffrance et de la famine. De telles scenes produisent toujours beau- coup d'elTet a la Chine. Comme les homines n'y sont pas a couvert de I'e- pouvantable. fleau de la faim, ils ont plus de pitie, plus de commiseration pour ceux qui en souffrent; puis, il faut convenir que les auteurs drama- tiques des Youen excellent a depeindre la famine avec toutes ses douleurs et toutes ses augoisses, — Pendant que sou ills et sa fille pous»ent des cris de- chirants, Liu-thong-pin apercoit un hOcheron qui vient au-devant de lui. Ce bdcheron est Yang-tseu , ranacho- rete, auquel Thong-pin raconte I'his- toire de ses malheurs; il lui demande son chemin (tao). II y a dans le Songe de Liu-thong-pin autant de calem- bours que dans les drames de Shaks- peare. LB SXVX b6cH£RON. Puisque vous ne connaissez pas le Tao (voire chemin), je vous pailerai du Tao (de la doctrine des Tao-sse) ; je vous trausmettrai le Tao (la doctrine); je vous tnontrerai le Tao (le chemin). r.IU-TH0NG-riK. Je ne comprends pas. LK FAUX B^CHEROir. Quoi ! vous ne comprene/. pas encore. Eh bien, marchez toujours. (// lui indique du doigt line monlagne.) II y a sur cette mon- lagne une petite chaunuere; eiitrez-y, en- trez-y. Le faux bilcheron quitte Thong-pin, et celui-ci s'achemine vers la montagne avec ses deux enfants. Ici finit le troi- sieme acte. Dans le quatrieme, trop charge d'in- cidents, Liu-thong -pin arrive a la chaumi^re avec ses enlants. II frappe; une vieille femme ouvre. C'est I'an- cienne hdtesse de Hoang-hoa , ou ma- dame Wang , qui a pris la figure d'une rtlTak'-"'-'"™*-'"'' ™P'°" LA VIEILLI FEMMK. C'est mon caraclcre d'etre bieufuisante ; niajs, hclas ! mon fils, qui demeure avec rooi, ne me permel pas d'exercer I'hospitalite. C'est un liomme sanguinaire, qui ne se plait qu'a la chasse.... Il ne lardera pas a revenir. Oh! fuyez , fujez , car j'apprehende des mallieurs. •Lin-THOMG-PIN. Ah! madame, apres toutes les epreuves de ma vie, mon Sme est inaccessible a la peur..,, Mais , h peine a-t-il acheve ces pa- roles, qu'il survient un homme d'une mechante physionomie. Get homme (c'est encore I'anachorete sous les traits d'un brigand) etend ses mains sur les epaules de Thong-pin, qui se retourne et tremble de frayeur. Le brigand prend tour a tour le (ils et la fllle du general et les precipite dans un ravin; puis, levant son cimeterre, il court pres de Thong-pin et lui abat la tete. Ici Tac- tion du drame, qui se continue, est d'un merveilleux parfaitement appro- prie aux ideessingulieres des Tao-sse; c'est comme dans nos operas. La scene change; la chaumiere disparait , et fait place a I'hotellerie de Hoanji-hoa ; Yang- tseu reprend sa femme; il metamor- plwse la vieille femme, qui redevient madame Wang, et ressuscite Liu- thong-pin. — Apres sa resurrection. Thong-pin ressemble a un homme pris tout a coup de vertiges et d'eblouisse- ments. II regarde Yang-tseu , I'hStesse, puis les murs de la salle, puis la pe- tite table sur laquelle il avait dormi : c'est un songe que j'ai fait, se dit a lui- ra^me le nouvef Epimenide. i.iu-TH0BG-piif , se frottant la tele, et regar- dant Yang-tseu, Comme j'ai dormi saus m'en apercevoir. YAKG-TSEC. Oui, oui. LIU-THOWO-PIK. Combien y a-t-il que je dors ? TAWG-TSEP. Dix-huit ans. i,iti-TH0WG-prw, souriant. Dix-huit ans I ( ^ madame JFang.) Mon millet est-il prit ? MADAME WANO. Pas encore. YAMG-TSBC. Liu-yea, touvenez-vous des voeux que vous CHIiNE MODERNE. 431 avez faiU. Peudant dix-huit anuees, livie success! veinent a toutes les passions ignomi- uieuses , vous les avez leprimees , domptees, vaiucues. Comprenez-vous eufiu ? LIU-TBONG-PIH. Oiii , je comprends ; la vie n'est qu'un songe. Maitre , je suis converli au Tao. Tout a coup une grande joie eclate dans les cieux. Tong-hoa-ti-kiun des- cend suria terre, et recoit Liu-thong- pin au nombre des irainorlels. Le Songe de Liu-thong-pin est le meilleur des drames tao-sse. Je sup- pose que Ma-tchi-youen avait fait de Lao-tseu, de Tchouang-tseu et des principaux philosophes de cette ecole, sa lecture la plus assidue. II y a gene- ralenient, dans les niorceaux lyriques, beaucoup de noblesse et beaucoup de pompe. Le melange de serieux et de bouffon qu'on y trouve, la fantasma- gorie du spectacle et quelques defauts encore ne sauraient contre-balaucer le nierite de cette piece ingenieuse , qui se distingue par la moralite du plan , la beaute des details et Tobservation la plus exacte des niceurs tao-sse (*) Fleur de pecher. A defaut d'une imagination vive et forte, lesjpoetes tao-sse ont une ima- gination feconde en fantomes. Voici une piece qui n'a pas moins de cent dix pages, et ou Ton voit plus de demons que I'enfer n'en peut contenir, comine dit le tragique anglais. Le principal personnage de la comedie est une jeune magicienne qui a penetre tous les se- crets, tous les mysteres du Tao, et dont le nom est Fleur de packer. Le per- sonnage qui vient apres est un sorcier d'un grand merite, qu'on nomme iro- niquement Tcheou-kong. Fleur de pr- ober dejoue, par ses talismans, par ses invocations , les savants calculs de Tcheou-kong. Le dessein de I'auteur est d'opposer les sectateurs du Tao a ceux qui font profession de predire les choses a venir, et de montrer que la magie est superieure a I'art divinatoire. Peut-etre le poete a-t-il eu I'intentioa de faire ressortir par un contraste in- genieux tout ce qu'il y a de profonde- (*) Voy. le Steele des Yomn, Journal asia- tique; juin i85i, p. 5o4 a 5i6, ment ridicule chez les uns et chez les autres. Quant a moi , j'aime mieux y voir un cadre satirique. La traduction d'une pareille comedie ne se laisserait pas lire. II y a pour- tant une scene interessante : c'est celle ou Tcheou-kong , dont I'esprit com- mence a baisser, tente, avant de re- noncer aux affaires, une derniere experience, et tire I'horoscope de son commis. La bonne foi du sorcier, qui croit reellement a son art , son deses- poir quand il reconnait que son vieux serviteur n'a plus que trois jours a vivre; son caractere bienveillant et des- interesse; les incertitudes du commis, qui sent que son maitre degenere , et n'en concoit pas moins des inquietudes tres-viveSj tout cela est peint avec bonheur et avec une grande naivete (*). Histoire du caract&re Jin , Draine bouddhique. Ce drame, dont le principal role n'est pas trace avec beaucoup d'art et de ve- rite, a pour sujet rhistoiremiraculeuse d'un avare converti aubouddhisme par un religieux mendiant. L'avare est un preteur sur gages, devenu opulent. On I'appelle Lieou-kiun-tso. 11 a de sa fem- me .Wang-chi deux enfants, un lils et une fille. La premiere scene du prolo- gue peint d'abord le personnage. WAWG-CHI. Laneige tombe a gros flocons. Mou Youea- wa'i, ou dit toujoiirs : Le vent ct la ne'ige sonl la providence des cabaretiers. Si nous pieuions une tasse de vin.... LIEOC-KIOK-TSO. Non, ma femme, non; je ne puis y cou- sentir. Le vin est maintenanl bors de prix. WANG- CHI. Quoi ! avec une fortune couime la voire.... LIEOU-KIDH-TSO. Ah ! VOUS m'assassinez ; aliens , allons. {Au domestique.) Qu'on apporte du vin ! I.E DOMESTIQCE. J'obeis. LiEOU-BLiuK-TSO , roppelont le domestique. £coute; tu auras soin de ne tirer que deux tasses.4.. (*) Le Siick des Youen, Journal asiatique, cahier de sept.- octobre i85i, p. 261 el 262. 493 L'UJNIVERS. D'aiitres incidents servent a mettre en relief, puis a irriter le caractere de I'avare. Mais ce qu'il ya d'intole- rabie dans le prologue, c'est le plagiat de I'aiitpur. On y retrouve deux scenes du Ho-liaiJ-clian,que j'ai traduit. Lieou- kiun-tso aperroit dans la rue un jeune baclielier qui toinbe d'inanition. 11 re- cueille daus sa iiiaison cet infortune, dout le uom est Lieou-kiuu-yeou. Sans lui offrir de I'argent, il lui propose de I'adopter, c'est-a-dire delereconnaitre comme J'rere adoptif, non par une geuereuse inspiration de son coeur, niais parce que les affaires du bureau occu- pent toute sa jouruee, et qu'il a besoin d'un horn me pour op^rer ses recou- vrements. D'ailleurs il se rend justice et ne cache pas ses defauts. « Je vous previens que je suis avare, tres-avare, » dit-il a Lieou-kiun-yeou. Toutefois, comme celui-ci estpauvre, il accepte avec empressement une proposition qui lui parait avantageuse, et s installe dans la niaison du financier. Au premier acte, I'auteur person- nllie le Bouddha Cakyamouni sous les traits d'un religieux jnendiant. Cher- chant , comme tons les ecrivains de Tepoque , a verser le ridicule sur le bouddhisiue / il fait de ce religieux un persoanage qui pr^te a la moquerie. On va en juger: I.B RELIGIEUX , fiappant a la parte de Lieou- kiun-tso. Nan-wou, nan- won , Amida Bouddha! Hola ! Lieou-kiua-lso , mediant avare ! UEOc-KiuK-yEoo, se levant avec vivacile. D'oii vient ce tiutamare? (Il ouvre la poile de la maison , et apercoit le religieux.) Mise- ricorde ! quel embonpomt ! quelle masse de chair ! LE HO-CHAKG. oh, le meudiaut ! qui le croirait? il n'est pourtant pas mort dans la neige. HEOU-Kicw-YEOU, apart. Ilsait lout! LE HO-CHANG. L'avare est-il a la maison ? LIEOU-EIUK-YEOU. Atleiidez, je vai? avertir mon frere. (// etouj/e de rire.) LIEOC-KIUlf-TSO. Qu'avez-vous done ? LitoTi-nuK-YEOD, riaiit loujours. Ah, mga freie! I'hoiame Je plus risible du nionde ! Vcnez done , veuez done sur le seuil de la porte. ( Lieou-kiun-tso se live el qiiifte la salle.) LE HO-cHAirG , apercevant Lieon-kiun-tso. II a bien la physionomie d'un avare. LiEOu-KiDW-Tso , a part, Ciel! quel ho-chaug! On n'a jamais vu un homme d'une aussi grosse corpulence. ( Il eclate de rire a son lour.) LE HO-CHAKG. D'oii vient ce rire fou, extravagant? LIEOU-KIUW-TSO. Je me ris de vous voir, avec votre mine affamee.... LE HO-CHAKG. Avec ma mine! Prenez-y garde; je ne mc ris pas de la voire. LIEOU-KlCir-TSO. 11 me fera mourir! Ah, mou frere, qu'a done mange ce ho-chang? LE HO-CHAMG. Donuez-moi des legumes. LiEou-KiuN-Tso. (// c/ia/ite.) « Quel homme genereux et bienfaisanl pour- rait rassasier de legumes un lio-cliang de cetle espece? La forme de son venire a quelque chose de monstrueux. S'il y avail ici un chameau, un elephant blauc , un leopard.... » LE UO-CHAHG. Apres ? LIEOU-KIUH-TSO. «« II pourrait s'accommoder lui-m6nie un pelil.... » LE HO-CHANG. Oui, oui, un de ces pelits festins oil Ton ne mange pas, mais ou on est mange. LIEOU-KII^N-TSO. Enfin , de quoi se nourrit-il ? combic n pese-t-il ? II faul que je prenne la mesure de son venU'e, pour faiie une comparaison. LE HO-CHANG. Une comparaison.'* LIEOU-KICW-TSO. Ho-chang, on ne Irouve dans rantiquite que deux hommes auxquels vous ressemblez. LE HO-CHANG. Nommez-les. LIEOU-BLIUS-TSO. (// chante.) « Vous ressemblez a Ngan-lo- chan, des Thaug ; vous ressembli'z encore plus a Tong-lcho, des Han. » {Il parle.) Eu vous apercevant sur le seuil de ma porle, (// cliaiiie) « Je me disais : C'esl saus doule un genie messager qui m'apporte un Iresor. » LE BO-CHAMG. l^lrange aveugiemenl ! vos yeux obscurcii par les passions ne peuvent plus dislinguer les gens de bien. Lieou-kiuu-tsO; je suis Je CHINE MODERNE. 433 Bouddha Cakya Mouni. Dounez-moi a man- ger; je vous transmettrai uia doctrine. LIEOU-mON-TSO, Votre doctrine, oil est-elle? I.E ho-<:hang. Apporlez-moi dii papier, de I'encre et un pinceau. LIEOU-KICK-TSO. Je n'ai pas de papier. HEOU-KIUN-YEOU . Pardon , mon I'rere , il y a ici dii papier ; je vais en prendre iine feuille. LiEOu-KiuN-TSO , a part. Uue feuille qui coiite un denier; c'est une mine , une vraie ruine que cet lionime-la. LE ho-cha:• J'emprunte I'ob- jet, je in'en sers , puis je Ie rends. Quel tort cela fait-il au prochain.^Si j'apercois un beau cheval , je Ie monte; une belle femme, je I'enleve. » Lou- tchai-lang prend d'abord la femme d'uu orfevre, nomme Li-sse, ensuite celle de Tchang-koiiei , son assesseur, et comme cet assesseur a deux enfants , il lui donne la femme de Li-sse, dont il est las , pour elever ces deux en- fants. C'est meme une scene tres-co- mique que celle 011 I'honn^te marchand retrouve sa femme chez I'assesseur, au moment oii il cherche a venger son outrage. Loii-tchai-langestpuni auqua- trieme acte : I'enfer ne s'ouvre pas pour I'engloutir; mais Pao-tching, chargi'; de scruter la conduite des magistrals iniques, condamne ce monstre a subir la peine capitate. L'assesseur, qui a Ie principal role, est Ie personnage ver- tueux de la piece. Quant a la rencontre de toutes les victimes de Lou-tchai- lang dans la pagode de Yun-thai, c'est un tableau charge. Un auditoire francais est encore au- trement severe qu'un auditoire chinois, et, malgre la decadence de nos moeurs, Ie sentiment public n'admettrait pas chez nous I'odieuse verite de ces com- positions (*). Le Fanatique. Le Jin-fong-tseu (Jin le fanatique), presque entierement fonde sur la ma- gic et le merveilleux, parait un ouvrage d'une espece unique ; c'est moins une comedie qu'un spectacle tao-sse. Au- tant d'incidents, autant d'extravagan- (*) Steele des Youen , Journal asiatique , cahier de juin i85i, p. 53i et 532. 440 L'UNIVERS. ces ; mais on ne peut s'emp^cher d y reconnaltre, comme dans toutes les pieces de Ma-tchi-youen, un style tres- clair et tres-exact. II taut dire aussi 3 lie le nierveilleiix occiipe peu de place ans le Pe-w6n ou le dialogue, et c'est principalement dans le dialogue que cet auteur original , qui avail tant de hardiesse, tant de saillie dans I'ima- gination, attaque les ridicules et les jongleries des Tao-sse. Le caractere que I'auteur s'attache a developper est celui du fanatique. Un grand anachorete, qu'on appelle Ma- tan-vang, et qui ressembie traits jjour traits a Yang-tseu (*), arrive inopine- ment dans le district de Tchong-nan- chan. 11 y opere une foule de metamor- phoses, ressuscite les morts, et finit par convertir au culte des Tao-sse tous les habitants du bourg de Kan-ho, a Texception pourtant des bouchers. Les nouveaux convertis, scrupuleux obser- vateurs de la loi , renoncent a manger de la viande et meme des oignons ; car si la secte des bouddhistes autorise I'usage du grand ail, du petit ail, de I'oignon et de la ciboule, la secte des Tao-sse, plus rigide, n'admet que les poireaux , le celeri , la coriandrc et la ciboulette. Sur ces entrefaites , les bouchers de Kan-ho, ou les quatre freres Jin, dont le commerce est absolument perdu, ruine , tiennent une conference et de- liberent sur le parti a prendre. L'aine de la famille (c'est le principal per- sonnage de la piece) forme la reso- lution de tuer Ma-tan-yang ; il part, malgre les sages representations de sa femme Li-chi , et aborde I'anachorete ; mais, au bout de quelques minutes, Ma-tan-yang, a qui la nature obeit, fait tant de miracles, que le boucher Jin se converiit a son tour, et em- brasse la vie religieuse. Le caractere du fanatique me parait inferieur , sous tous les rapports , au caractere de Liu-thong-pin. Apres sa conversion, le boucher Jin, qui n'a point change de nature, est encore plein dejactance, plein de inechancete, plem de cruaute. Quand on lui presente (•) PersonDagc qui figure dans le Songe (le Liu-thong-piii. son enfant , pour montrer qu'il est d^- gage de toute affection humaine , il le tue ; il le tue en presence de son frere et de sa femme, qui reculent d'epou- vante. Son fanatisme ne peut inspirer que de I'horreur. Le mari et la femme contrastent assez bien ensemble; mais celle-ci, en temoignant son aversion pour le c^libat, ressembie trop aux amies de Lysistrata dans la licencieuse comedie d' Jristopha?ie (") . COMEDIES d'iNTRIGUE. La Housse du lit nuptial. Un preteur sur gages, Lieou-yen- ming, homme inipitoyable, comme tous les preteurs sur gages, se trouve creancier d'un grand mandarin. Voici I'origine de cette creance : le premier ministre, egare par des discours ca- lomnieux, presente h I'empereur un acte d'acciisation contre Li-yen-chi , gouverneur de la ville de Lo-yang. On instruit le proces. Le gouverneur, oblige departir pour la capitale (Tihang- ngan), ou il doit subir un interroga- toire, et pris au depourvii, charge I'abbesse du monastere de la Grande Purete d'emprunter pour lui, de Lieou- yen-ming, dix taels d'argent (**). Dans tons les pays, la prudence est la vertu des financiers. Yen-ming consent a preter pour un au , et met au pr^t trois conditions. II exige d'abord que le billet d'emprunt soit ecrit en en- tier de la main de Temprunteur (c'est a la Chine comme chez nous); puis il exige le cautionnement de I'abbesse, -puis la signature de sa fille ; car Li- yen-chi a une fille unique, cigee de dix- huit ans. Necessite n'a point de loi ; on souscrit a tout. Une annee s'e- coule; le gouverneur ne revient pas; I'echeance arrive , et le financier de- mande son remboursement. Le refus qu'il rprouve lui inspire une pensee qui paraitra peut-^tre singuliere. i.TEOU-yF,N-Miwur nage dans la joie. MEI-YNG, tout effaree. Courons , coiirons , courons. {Elle s'arrete et regarcle.) Mais notre maison n'est pas un hotel; d'ou vient qu'il y a un chevai a la porle .•*.... Je comprends. {Elle ctiaute.) Ce vil seducteur, abusant de sa puissance, rher- che a deshonorcr les femmes. Ses inclinations sent basses; son effronterie n'a pas de bornes; comment ose-t-il sc presenter dans noire maison ? Malgre nioi , j'elouffe dc colere ; il faut qtie mou resseiiliment eclalc. (Elle pe- netre dans la salle , tire Thsieou-liou par ses vetements, et reut Vexpulser de la maison.) LiF.ou-CHi , avec surprise. Ma bru , que faites-vous la? Vous mellez votre mari a la porle. Quoi , vous ne recon- naissez pas Thsieou-hou ! MEi-YHG, Idchant Tlisieou-liou. (Elle cliante.) Ah, ah, c'est done vous qui revenez dans votre pays natal avec des habits brodes ! (Elle sort de la maison , et appclle Thsieou-tiou.) Thsieou-hou , venez ici ! THSIEOU-HOU. Mei-yng , pourquoi me chassez-vous de la maison ? La scene d'explication entre le mari et la femme est pleine d'inter^t ; I'au- teur a su peindre avec originalite le depit que les precedes de Thsieou-hou excitent dans le coeur de sa femme. Le bon sens naturel de Mei-yng, sa vertu, sa simplicite un peu trop franche, met- tent en relief les vices et les faiblesses du mari, qui, ne pouvant pas s'excu- ser, a I'ennui d'entendre de facheuses verites, Mallieureusement , les poetes de la dynastie mongole aimaient le li- bertinage; comme auteur dramatique> Chi-pao-kiun ne se tient pas toujours dans une mesure decente, et se permet qiielquefois des expressions qui ne font pas moins de tort a sou caractere qu'a son goiit. Enfin, Mei-yng, qui a resist^ a toutes les seductions du plaisir et du monde , raconte naivement a son mari tout ce qu'elle a souffert, les entre- prises et les ruses de Li , et finit par demander a Thsieou-hou un acte de divorce. Sur ces entrefaites, le financier amou- reux revient a la charge, accompagn6 du pere et de la mere de Mei-yng. On peut juger de la surprise de ces der- CUIJNE MODERN E. 446 niers, quand ils apprennent le retour de Thsieou-hou dans la maison pater- nelle. LI , a part. Je suis perdu ; il est mandarin ! THSIEOD-HOtl. Que venez-vous faire ici ? n , ac«c hesitation. "Vous adresser des.... felicitations.... siir voire retour. MADAME LO. Vous nous aviez dit qu'il etait mort ! LI. Non, non, il n'est pas mort; et nioi, je ne resterai pas longtemps avec les vivants. THSIEOU-HOU. Cet abominable coquiu a fabrique de faus- ses noiivelles pour ravir les femmes des au- tres. [Aux hommes de son escorte.) Gardes, qu'on le saisisse, et qu'oii le mene dans le district de Kiu-ye, oil on instruira son pro- ces. Ici I'auteur se moque-t-il de la jus- tice? Je le crois. II y a evidemment dans cette scene une allusion plaisante a la gravite hypocrite des mandarins. Chi- pao-kiun saisit en passant les vines de son epoque. — Dans la derniere scene du quatrieme acte, Mei-yng, cedant eu6n aux instances de sa belle-mere, pardonne a son epoux, en lui faisant encore une petite lecon; et, quand Thsieou-hou volt que sa femme lui rend son amour, il s'abandonne a la joie. II est tres-certain que I'auteur ne s'est pas mis en frais d'i magi nation. Le Mari qui fait la cour a sa femme ne vaut pas les Maris en bonnes fortunes de M. Etienne. II est encore vrai que les Chinois n'ont jamais su conduire une intrigue, enchainer des scenes; mais enfin on trouve dans cette piece une peinture de moeurs plaisante et vraie (*). Les Secondes noces de Wei-kao. Cette piece a une physionomie tao- sse; il est vraisemblable que I'auteur en a puise le sujet dans une legende fabuleuse de Wei-kao , celebre general des Thang , qui vecut sous les regnes de Te-tsong, de Chun-tsong et de Hien- tsong , et fut mis , apres sa mort , au nombre des genies. Le jeune Wei-kao, simple bachelier, epouse Yu-siao, courtisane de dix-huit ans, dont il est eperdument amoureux. Quelques jours apres ses noces , con- traint par son ambitieuse belle-mere de se presenter au concours des doc- teurs, il se voit dans I'obligation d'a- bandonner le domicile conjugal , et d'entreprendre le voyage de Tchang- ngan. — Yu-siao, ne pouvant se con- soler de I'absence de son epoux , suc- combe a une maladie de langueur, et renait de ses cendres comme le phe- nix. Elle est recueillie par le gendre de I'empereur, qui I'eleve avec beaucoup de soin. Cependant Wei-kao avait obtenu au concours le grade eminent de tchoang- youen. Aussi habile dans I'art militaire que dans la politique, il s'etait convert de gloire sous le regne de Te-tsong. INomme par Chun-tsong, commandant en chef des armees imperiales, il avait gagne des batailles , extermine les Tar- tares Thou-fan. Dans le quatrieme acte, Tchang- yen-chang, qui etait le gendre de Tein- pereur, fait preparer dans son hotel un grand festin , auquel il invite le commandant en chef. Au jour fixe pour le banquet, Wei-kao arrive dans I'hotel de Yen-cliang et y trouve Yu- siao, qu'il croyait morte. Apres plu- sieurs incidents, il contracte un se- cond mariage avec sa femme, qui venait d'atteindre sa dix-huitieme annee. La comedie de Kiao-meng-fou n'est pas- remarquable par le nombre et la variete des personnages; mais le ca- ractere de la jeune femme est trace avec beaucoup d'esprit et de sensibi- lile (*). Le Gage d' amour. Le Thang -thsal-tseu-tchouen ou « I'Histoire des ecrivains celebres de la dynastic des Thang, » a fourni a Kiao-meng-fou le sujet de cette co- medie. En Europe, nos personnages coraiques sont ordinairement des per- (*) Steele des Youen , Journal asiatique, (*) Steele des Youen , Journal asialique, cahier d'avril-mai i85i , p. 364 a 372. cahier de sep'..-octobre i85i , p. 254 a 2 56. 446 L'UNIVKRS. sonnapes d'iniagination ou de pur ca- prire; il n'en est pas de mfime a la Chine. On y aime tant I'histoire, que la comWie chinoise csi presque toujours de I liistoire, sous tine forme plus on inoins attrayante. Ainsi, dans le Kin- thsiin-ki ou « le Gage d'amonr, » on voit (igurer trois poetes de la dynastle des Thang : Han-fei-king, qui a 1e pre- mier role; I'academicien Ilo-tchi- tchang et le celebre Li-thaT-pe. II y a plus, et c'est la un des caracteres par- ticuliers du Kin-tsien-ki, les jolies ariettes que I'auteur met dans la bou- che de Han fei-king, sont du poete Han-feT-king lui-meme. II n'y a pas de prologue. La premiere scene du premier acte nous introduit dans un des plus magnifiques palais de la capitale, ou reside le gouverneur Wang-fou , avec son fils Wang-tching et sa lille, nominee Lieou-mei. Wang- fou, eleve par I'empereur Ming-hoang- ti des Thang (Hiouen-tsong) au com- hle des dignites et de la fortune, est un magistral severe et desinteresse. Comme ilse consacre avec zele au ser- vice de I'Etat, et repousse de son pa- lais les m^disants et les flatteurs, ii recoit chaque jour de nouveaux bien- faits et de nouveaux presents; car Hiouen-tsong etait un monarque tres- genereux. Quand il tenioignait une grande gaiete (ce qui lui arrivait sou- vent), les ministres pouvaient toujours compter sur quelques cadeaux, tels que des vases, des escarboucles, des per- roquets blancs, des tablettes de jade ou du vin deNiao-tehing. II avait donne h Wang-fou cinquante pieces d'or, por- o tantlescaracteresdelanouvellemonnaie des Thang, qui etait une monnaie de cui- vre. Une particularite plus curieuse en- core, c'est que le gouverneur avait fait de ces pieces de monnaie un collier, ou « plutot une espece de talisman qu'il avait remis a sa fllle Lieou-mei, en lui assu- rant que, si elle le portait, sa vertu ne serait jamais exposee aux tentations, et que les mauvaises pensees ne pourraient naltre dans son coeur. A la Chine, I'em- pereur est tres-certainement le souve- rain pontife de la nation; ii y exerce ave<: une autorite incroyabie le plus eleve detous les ministeres, leministere spirituel; maisen v^rite, le gouverneur s'avancait trop, lorsqu'il regardait un pareil collier comme un talisman in- faillible. Onvaenjuger, L'empereur Hiouen- tsong, instituteur du theatre , fonda- teur de la celebre academic des Han- lin, n'avait pas seuiement de la genc- rosite ; il aimait les arts , il aimait la musique; et comme il la savait tres- bien, disent les historiographes, il avait reuni dans I'interieur du palais impe- rial cent jeunes actrices, auxquelles il donnait lui-m^me des lecons de chant. Ce n'est pas tout : il aimait les f^es aussi. Or, un jour, c'etait dans la troi* sieme decade du troisieme mois ( les Chinois insistent sur les details) , Tern- pereur Ming-hoang-ti avait convo- que tous les habitants de la capitale, sans exception, a une grande f^e sxxt le Kieou-long-tchi, ou « le lac des Neuf- Dragons, » a un concert, avec des in- termedes singuliers. On devait, dans ces intermedes, chercher a lire une proclamation imperiale, dont les ca- racteres avaient ete traces avec des fleurs de pivoine par une des concu- bines du palais. Wang-fou, comme gouverneur de Tchang-ngan , se trou- vait naturellement charge des prepa- ratifs de cette fete. II v met tous ses soiiis, et ordonne a sa "filje Lieou-mei d'y assister avec unede ces jeunes sui- vantes quon appelie dans les pieces de theatre Mei-hiang « parfums du prunier. » Lieou-meT tait d abord quel- ques difficultes sur ce projet; elle al- legue sa jeimesse, sa timidite, sa pu- deur m^me : elle n'a jamais quitte le gynecee; comme oserait-elle soutenir les regards des hommes? tRassure- toi, ma fille, repond le pere, on t'ac- compagnera ; j'ai deja choisi deux ser- viteurs d'un caractere respectable. » Lieou-mei' obeit, et le lendemain, a Theure fixee, elle s'achemine avec sa suivante vers le lac des Neuf-Dra- gons. C'est ici que le principal personnage de la comedie. Han-fei-king|, parait pour la premiere fois sur la scene. FeT-king, originaire de Lo-yang, etait I'ami intime de Ho-tchi-tcliang et de Li-thaT-pe. Comme poete , il avait une reputation immense. Ses poesies circu- laient dans Pempire avec la rapidity CHINE MODERNE. 447 de ia fleche. Assez peu curieux de re- nommee, sans ambition, il aimait a boire et n'aimait pas a courir apres les f)laces oil les grades litteraires. D'ail- eurs radministration n'etait guere plus equitable sous les Thang que de nos jours. Pour obtenir une place distin- ,'guee dans les examens publics , il fal- lait gagner les juges par des presents. Fei-king, installe chez I'academicien Ho-tchi-tchang , s'abandonnait done au plaisir de boire et de composer des vers, lorsqu'il apprit que I'empereur donnait a la capitale une grande fete sur le lac des Neuf-Dragons. II y court a moitie ivre, penetre dans la foule, et se presse avec les gens du peo- ple autour de « la corde rouge » (hong- (;hing), qui marquait I'enceinte ou siegeaient I'empereur, les concubines imperiales, les ministres, les grands dignitaires. Au bout d'un certain temps, il quitte sa place pour faire le tour de rile, et apercoit une jeune fille d'une beaute remarquable : c'etaii Lieou-ineT. Le basard les avait rapproches; ils de- viennent amoureux I'un de I'autre a la premiere vue. Sans la moindre pru- dence, sans discretion, sans reserve, la jeune fille ne cesse d'attacher sur FeT-king des regards languissants; elle voudrait lui ouvrir son coeur, ou du moins lui laisser un souvenir, un gage de sa tendresse; mais quel moyen em- ployer.? Contrainte de s'en retourner, elle ote furtivenient son collier et le cache dans son mouchoir, qu'elle laisse tomber a dessein. Han-fei-king le ra- niasse, y trouve des pieces d'or, les regarde avec surprise, puis se met a courir apres le char qui porte la jeune fille. Sur ces entrefaites, il rencontre I'academicien Ho-tchi-tchang ; celui-ci veut I'arreter. i.'ACADEMiciEif , a son domestique, Cethomme qui court (levant moi , n'est-ce pas Han-fei-king ? I.E DOMESTIQUE. C'est lui-meme. t'ACADEMICIEN. Vite, arr^tez-le. I.E DOMESTIQOE. Bachelier Han, bachelier Han, on vous appelle. HAN-FEl-KIirG. Je n'ai pas le temps. L ACADEMICCEN. Han-fei-king , vraiinent on ne conipreud rien a votre conduite ; vous meprisez done les sages. Comment , pendant que je buvais avec vous , vous nie quiltez sous «n faux pretexle pour aller sur le lac des Neuf-Dragons. A qiioi vouliez-vous done vous diverlir sur le lac.-* on n'y trouve que les filles des magistrats. Dans I'ctat oil vous etes, avec la bonne liumenr que donne le viu, j'apprehende pour vous quelque mauvaise affaii'e. Fei-kiiig, il ne taut pas compromettre les poetes ; suivez-moi , suivez-nioi ; nous preudrons ensemble qualre ou cinq tasses. HAN-FEI-KING. Mon frere , ne me parlez plus de vin; voyez-vous , quand vous auriez de la liqueur de jade (du nectar) ou quelques-uns de ces fruits qui donneiit rimniorlalite a ceux qui en goiitent , je n'en prendrais pas. J'ai une affaire de la plus haute importance. (,Ilse met a courir.) i,'acadkmic[e?i, Varretant par son habit. Oil courez-vous? Quelle est celte affaire si importante ? HAN-FEi-KlWG. Vous ne savez pas que je viens de voir, sur le lac des Neuf-Dragons , la plus belle fille qu'il y ait dans le monde. C'est Tcliaug-ngo, qui est descendue du palais de la Lune, ou peut-eire une jeune immortelle qui a quitte le sejour des dieux. Ses charnies out agi sur moil cceur ; j'en suis amoureux , et je crois qu'elle partage mes sentiments. Quaiid je me suis approche d'elle, je I'ai entendue repeter ces vers : « D'od nait la tristesse qui m'accable? Je me fatigue a tourner la tele pour le voir et le revoir encore. » l'academiciex. Oh ! les jobs contes ! Mon ami , ce sont la des paroles que la bouche profere, Est-ce qu'il faut y ajouter foi? HAN-FEI-KING. Un moment, j'ai ungage.... Oh, courons done sur ses traces. (// se remet a courir ; Ho-tchi-tchang I'arrite encore.) I.'ACAI)EMrCIEN. Quel est ce gage.' Fei-king, parlez-mtoi avec sincerite. HAN-FF.i-KIHG. (Ilchante.) Leplus beau qu'on puisse olTrir a un ami ; mais ce qui m'afflige , c'est qu'un pareil present est sans valeur, pour acheter ce que je veux acheter. t-'academicien. Oh , je devine , je devine. han-fei-king, Devinez. L'UNIVERS. l'acaokmicier. Un ueccssaire. HJLH-Fei-KIIfO. Yous n'y ^tes pas. l'academicieit. Quel gage done ? HAN-FEl-KING. Ho-tclii-lcliai»g, je ne veux pas vous Irom- per ; elle m'a doniie ciiiquaiite pieces d'or, portant les sigiies de la noiivelle inonnaie. l'academiciew, surpris. Quoi ! cinquanle tliong-pao en or! Mise- ricorde ! c'cst au nioins la fille d'un ministrc d'j^lat ! HAN-FEi-KIMG. (// clianle.) Sur les deux coles du char oil elle elait niollement assise, on voyait le glaive et la hache de cuivre. i.'acadf.micien. Et vous voudriez penetrer jusqu'a elle ! Han-fe'i-king, prenezy garde ; on ne plaisante pas avec les lilies des ministres. HAN-FEi-K.ING. (7/ clianle.) Quand ce serait la fille d'un prince (heou), je la poursuivrais jusqu'a la ])orte du harem , ou I'air est iinpregne de parfums , oii I'ueii n'apercoit que des perles. l'academicien. Decidement Tamour I'a rendu fou. Au second acte, Han-fei-king erre a I'aventure, cherchant a decouvrir la retraite do sa maitresse; il porte ses pas jusqu'au pavilion du gouverneur Wang, ou Lieou-mei traverse une salle ; il reconnait la jeune fille qu'il a vue sur le lac, et entre sans plus de facon dans le jardin. Le domestique de I'no- tel le prend d'abord pour un voleur et ciierche a I'arreter. « A qui est cette maison? » s'ecrie Han-fei-king, tou- jours a moitie ivre ; et pendant qu'un colloque s'engage entre le poete amou- reux et le valet deconcerte , le gouver- neur Wang-fou arrive. Celui-ci inter- roge a son tour Han-fei-king. La scene de I'interrogatoire est parfaitement ecrite , mais il y a de la langueur, par- fois de I'insipidite, malgre les beaux vers qu'elle renferme. i.E ooLVERHEUR, uu domest'tque. Au fond , de deux choses I'une : cet homme est uu libeilin ou un voleur. UAN-FE1-K.IHG. Excellence, quelles paroles se sont echap- pees de voire bouche.' Y pensez-vous, un bachelier n'esl pas un voleur ? 1,E GOUVERNEUR. Eulin , expliquez - vous : que veuez - vous faire dans mon jardin de plaisance? HAK-FEl-RIKG. £coutez-nioi. On trouve dans rantiquiti- des grands hommes , oui des grands hommes, qui out ete des voleurs. LE GOUVERNEUR. Oh , par exeniple , je vous ecoute. Han-fei-king fait au gouverneur une le(jon d'histoire. II cite d'abord Wang- tchong-tsiouen, le grand historiographe Sse-ma-thsien, puis les poetes Kou-seng et Tseu-kien. II rappelle poetiquement I'etrangelarcin deLieou-chin,qui vecut si longtemps dans la grotte des pe- chers, sans paver son tribut a la nature ; Han-cheou , de la dynastie des Thsin , qui deroba des parfums, pendant qu'il etait secretaire de Koutchong, et enlin Han-sin , le fameux capitaine, qui, presse par la faim , deroba un melon et du millet a une vieille femme. I.E GOUVERNEUR. , Cel houime est a moitie ivre. Si je I'ecoute, il se moqucra de moi. Domestique, atta- chez-le a la muraille avec une corde. Quand il aura cuve son vin , je recommencerai I'in- terrogatoire. Cependant I'academicien Ho-tchi- tchang, qui se doutait de quelque chose, est a la recherche de son ami ; 11 prend des informations dans les rues , Irappe a plusieurs portes, et finit par decou- vrir sa retraite. Introduit chez le gou- verneur Wang-fou, il apercoit Han- fei-king attache a la muraille. <^ Mal- heur! malheur! se dit-il a lui-meme, il faut absolument que je le delivre. » Apres les salutations eties compliments d'usage, le gouverneur raconte a Ho- tchi-tchang I'aventure du jardin ; il pa- rait tres-irrite. l'academicien. Connaissez-vous cet homme? LE GOUVERNEUR. Pas le muins du mondc. i.'academicien. Cependant I'empereur vous a souvent parle de lui : c'est Han-fei-kin , le fameux poete , I'ami , le conipagnon de Li-thai-pe. r.E GOUVERNEUR, stupefait, Han-fei-king. l'academicien. Oui , Uau-fei-kiog. CHINE MODERNE. 449 LE GoiJVERNEUR, au domestique. Qu'on le mette en liberie ; qu'il vienue , qu'il vienue avec nous. Cet incident araene une scene de re- conciliation entre le gouverneur et Han-fei-king. Le premier se confond , il multiplie les excuses et les compii- / ments ; le second repete sans cesse qu'il avait trop bu , qu'il ignore ce qu'il a fait. L'idee vientau gouverneur d'ins- taller Han-fei-king dans son palais conime precepteur de son liis. « Voulez- vous ouvrir une ecole dans nia bibjio- theque? lui dit-il, nous philosopherons tous les deux. » Han-fei-king accueille avec enlhousiasme cette proposition, dont Wang-fou est loin de sentir tout le danger. II se retire, fait qnelques Sreparatifs, et revient bientot apres ans le palais du gouverneur. Le troisieme acte s'ouvre par I'en- tretien de deux ecoliers : I'un est Wang- tching, fils du gouverneur; I'autre, Ma-kieou, fils d'un mandarin. Ce sont de fort niauvais ecoliers, qui connais- sent a peine le pe-kia-sing, « la table des nonis propres, » et le mong-kieou, « espece de rudiment. » A un autre point de vue , le dialogue est de nature a nous donner une idee des moeurs chinoises. MA-KIEOn. Voila pres d'un mois que je viens chez vous; voire mailre ne m'a rien appris; il soupire sans cesse. WANG-TCHING. C'est vrai ; depuis que je le counais , il ii'a point fait un vers, ecrit un caraclere; il f^emit toute la journee; il pleure, pousse de grands soupirs. Quand il est dans le petit salon, il repele sans cesse siao-tsiei, siao-tsiei « madenioiselle ! mademoiselle ! » Je ne sais ce que tout cela vent dire. MA-KIEOU. C'est qu'il a envie de.... Je n'oserais dire ici en quels termes s'expriment les deux eieves, qui sont ages de quinze ans. Les expressions les plus licencieuses, les plus obscenes s'y font malheureusement remarquer. On a cherchea nousfairecroirequela jeunes- se de ce pays est generalement reservee, obeissante, fort appliquee a I'etude; qu'elle n'a pas un ton aussi decisif que la notre. Ce sont la des contes , et des contes de philosophes. Le theatre nous 29" Liwaison. (Chine moderne.) en apprend plus, sur les moeurs de la societe chinoise, que tous les livres en- semble. Au fond , Han-fei-king est tres-mal- heureux dans le palais du gouverneur ; on a beau le combler des attentions les plus delicates; lejour il ne mange pas, la nuit il reve d'amour. Epris plus que jamais des charmes de Lieou-mei, c'est pour elle qu'il soupire; il la cherche des yeux. Quelquefois son chagrin est mele de colere, et alors rien de plus plaisant que le langage du poete chi- nois , langage a la fois erotique et pe- dantesque : « Quoi ! s'ecrie-t-il dans son depit, je ne pourrai pas m'unir a cette jeune fille, dont les attraits sont si puissants, et cependant les koua du Y-king s'unissent ensemble , le kieu et le kouen, « le ciel et la terre, « unis- sent leurs elements, le soleil et la lune unissent leurs lumieres, les qua- tre saisons leurs vertus , les bons et les mauvais genies, les destinees heu- reuseset malheureuses. » Pendant qu'il adresse une priere au ciel, a la terre et aux genies, le domestique entre precipitamment dans la bibliotheque, et annonce le gouverneur. Han-fei-king, surpris , cache les pieces d'or dans I'e- tui d'un livre. LE GOUVERNEUR. Bachelier, je voulais venir vous voir tous ces jours-ci ; mais je suis retenu par les affai- res ; je vous en prie , ne m'en veuillez pas. HAS-FEJi-KING. Gouverneur, vous etes trop bon. T.V. GOUVERREUR. Vous savcz combien I'empereur a de gene- rosile. Figurez-vous que ce matin le fils du ciel, transporte de joie (apres avoir enlendu mon rapport), m'a fait present de dix flacons de vin. Je n'aime pas a boire seul. Bachelier, tenez-moi compagnie. {j4u domestique.) Ser- vez le vin. HAN-FEi-KIWG. Je vous suis tres-reconnaissant. I.E GOUVERNEUR. Fei-king, videz cette tasse. HAN-FE'i-KIWG. Votre Excellence me comble de faveurs, Est-ce que mon pen de merite...? LE GOUVERNEUK, Buvez. HAN-FEI-KING, buvant. Ce vin-la est fait av^c du raisin de Liang- tcheou. 29 4M L'UNIVERS. ui oouvtamua , nant. Est-cc que voiu pieferez le ti-hoii (liqueur blanche faite avec de la creme). Buvez en- core , le viu diasse la tristesse. HAII-FE1-K.IICG. Qui Tous a dit que j'etais triste ? LE GOUVEaiCEDR. Oh, je le sais ; vous pensez a votre pays nataf. HA.H-FE1-UN6. Pas precisement. LE GOUVERffEUR. Qu'avez-vous fait depuis plusieurs jours? HAR-FEI-RIirG. Je lis le l-king. LE GOCVERNEUR. Tres-bien. Lisons-le ensemble. (Ilprend le Y-king, et trouve les pieces d'or dans te'lui; Han-fei-king est consterne d'effroi.) Voila done {'intrigue percee a jour. Aux questions muitipliees que ie gou- verneur lui adresse, le poete amoureux repond par des mots equivoques. «Ily a ici un mystere, » s'ecrie Wang-fou. — « Dans votre interet, replique froi- deinent Han-fei-king, gardez-vous de I'approfondir. » Le gouverneur, saisi d'indignation , appelle sa fllle , I'acca- ble de reproches, debite des lieux com- muns , et ordonne , pour la seconde fois, au domestique, d'attacher Han- fei-king a la muraille. Mais une circonstance que le gou- verneur ignorait , c'est que la situation de Han-fei-king etait changee. L'ele- gance de ses compositions avait attire sur lui les faveurs imperiales. Le poete est encore delivre par I'acadeinicien Ho-tchi-tchang, et I'entretien de ce- lui-ci avec le gouverneur termine le troisieme acte. Le cinquieme commence par un mo- nologue de Li-thai-pe, qui, instruit secr^tement de la mesaventure de son ami , avail presente une supplique a I'empereur. Hiouen-tsong portait de I'inter^t a Han-fei-king : « Je veux, repond-il a Li-thai-pe , que I'union du poete avec la fllle de Wang-fou s'ac- complisse a I'instant m^me , et je vous charge personnellement de presider au manage. » Apres une pareille ca- tastrophe, I'intrigue de la piece est sineulierement refroidie; car le de- Dodment est prevu.Le beau-pere et le gendre font un assez triste role , quand Li-thai-pe arrive pour celebrer le raa- riage. Wang-fou refuse d'abord; mais ce refus n'est pas un obstacle a I'union des deux amants. Han-fei-king lui- m^me a beau hesiter, si loutefois son hesitation est sincere, tous ces inci- dents, qui sont, il faut en convenir, d'un assez mediocre effet, ne forment pas une veritable intrigue. La piece n'en vaudrait que mieux, si I'auteur eilt imagine des obstacles assez grands pour eloigner, avec quelque vraisem- blance, le mariage du poete (*). La Soubrette accomplie. On trouve dans le Journal des Sa- vants une analyse de cette piece , dont j'ai donne une traduction en 1835, et qui est v^ritablement , dit M. Charles Magnin, une fort jolie comedie. Madame Han , veuve du prince Pei- tou, cousacre tous ses soinsa I'educa- lion de sa fille unique Siao-man. Ellea mis aupres d'elle, pour suivante et pour compagne d'etudes , une jeune per- sonne de dix-sept ans , nommee Fan- sou, douee d'un enjouement et d'une finesse d'esprit remarquables : « Mon frereHan-toui,ditmadameHan, voyant cette petite Fan-sou si spirituelle, si sage, si aimable, me dit unjour: At- tendez qu'elle soit devenue grande , vous en ferez la femme de votre neveu INgo-tchang. » Cependant, a son lit de mort , le prince Pei-tou a recommande a sa femme de donner leur fille en ma- riage au jeune Pe-min-tchong, fils d'un general qui, dans une bataille, lui a sauve la vie aux depens de la sienne. Le jeune Pe-min-tchong, retenu au fond de sa province, pendant les trois ans que dure le deuil de son pere, ar- rive entin dans la capitale de i'Ouest, pour y prendre ses degres et reclamer la jeune epouse qu'il salt que le prince Pei-tou a promise autrefois pour lui a son pere. Madame Han, qui est un modele de savoir et de prudence mater- nelle, eprouve a la fois beaucoup de joie et d'embarras de la visite de Pe- min-tchong. Les rites lui defendent de parler du mariage projete, et elle veut pourtant recevoir ce jeune homme (*) Siecle des Youin , Journal asialique , cahier de fevrier-mars i85i, p. 178 a iy4. CHINE MODERNE. 451 comme un gendre futur. Elle presente je bachelier aiix deux jeunes filles, et leur enjoint de le saluer comme un frere ; puis, ne voulant pas laisser loger dans une hotellerie cet etranger venu ' de si loin , elle I'installe dans la salle ' des dix mille volumes, c'est-a-diredans > la bibliotheque, qui occupe un pavilion au milieu du jardin. On pense bien que I'amour ne tarde pas a naitre entre Siao-man et le jeune Pe-min-tchong. Les symptomes de cette passion nais- sante sont peints avec beaucoup de na- turel et de grace. Le jardin, depuis que le bachelier habite dans le pavilion, est, comme I'exigent ies bienseances chinoises, interdit aux jeunes tilles. De la, une charmante scene, oil Siao-man, en descendant sur le soir dans le pare, veut avoir I'air de ceder aux instances de son evaporee soubrette (*) : FAN-SOn. Mademoiselle , ecoutez done. SIAO-MAM. Que veux-lu que j'ecoute ? FAH-sou. {Elle chante.) ■< Enlendez-vous ies modulations pures et harmonieuses de I'oiseau Tou-kiouen ? Sen- tez-vous le parfum des pSchers qui vient re- jouir I'odorat ?... Mademoiselle , promenons- nous a la derobee. » SIAO-MAN. Fan^sou, garde-toi de faire du bruit. Re- tenous nos ceintures, qui sont garnies de pierres sonores, et marchons tout douce- ment. FAW-sou. (Elle chante.) « Les pierres de nos ceintures s'agitent avec un bruit hannonieux ; que nos petits pieds, semblables a des nenufars d'or, effleurenl moUement la terre (bis). La lune brille sur nos tetes, pendant que nous foulons la mousse verdoyante {bis). La fraicheur humide de la nuit penetre nos legers v6tements. » — (Elle parle.) Voyez done comme ces fleurs sont vermeilles ; elies ressemblent a une etoffe de sole brodee; voyez la verdure des saules; de loin on dirait des masses de vapeurs qui se balaucent dans Fair. Nous jouissons de toutes les beautes du printemps. SIAO-MAN. Que ces perspectives sont ravissantes!... FAN-SOU. [Elle chante.) « Les ileurs et les saules semblent sourire (*) Voy. Journal des Savants, cahier d'oc- tobre 1842 , article de M. Charles Magnin. a notre approche ; le vent et la lane redou- blent de lendresse. Dans ces moments deli- cieux , un poete se sentirait presse d'epan- cher en vers les sentiments de son ame. » — (Elle parle.) Mademoiselle, Ies sites que vous voyez m'enchantent a tel point que je vou- drais proliter de cette heure delicieuse de la nuit pour composer quelques vers. Je vous prie , ne vous en moquez pas. SIAO-MAir. Je desire les entendre. FAN-SOU. (Elle chante.) « Un han-lin (academicien), avec tout son talent , ne pourrait decrire les charmes de ces ravissantes perspectives ; un peintre habile ne pourrait les representer avec ses briliantes couleurs. "Voyez la fleur hai-taog , dont la brise agile le calice entr'ouvert ; la fraicheur de la nuit penetre nos robes de soie ornees de perles; les plantes odoriferantes sont voi- lees d'uue vapeur legere; notre lampe jette une flamme tranquille au milieu de la gaze bleue qui I'entoure ; les saules laissent ilolter leurs soies verdoyantes , d'oii s'echappent des perles de rosee qui tombeut , comme une plnie d'etoiles , dans cet etang limpide : on dirait des balles de jade qu'ou jetterait dans un bassin de cristal. Voyez la lune qui brille a la pointe des saules ; elle ressemble au dra- gon azure qui apporta jadis le miroir de Hoang-ti. » {Pi-min-tchong joue de la guitare.) SIAO-MAN. De quel endroit viennent ces accords har- monieux ? FAN.SOU. C'est sans doute le jeune etudiant qui joue de la guitare. SIAO-MAW. Quel air joue-t-il .» FAN-SOTT. Ecoutons au has de cette fenetre. p"-MiN-TCHOWG. (// chante en s'accompa- gnant de la guitare.) « La lune brille dans tout son eclat ; la nuit est pure , le vent et la rosee repandent leur fraicheur ; mais , helas ! la belle per- sonne que j'aime n'apparait point a mes yeux : elle repose , loin de moi , dans sa chambre soUtaire! Depuis qu'elle a touche mon coeur, aucun oiseau messager ne m'apporte de ses nouvelles. II lui est difficile de Irouver quel- qu'un a qui elle puisse confier une leltre. Mon ame se brise de douleur, ma tristesse s'accrolt de plus en plus, et cependant ma chanson n'est pas encore finie. Les larmes inondent mon visage. Mille lis me separent de mon pays natal ; j'erre a I'aventure comme 29. 452 L'UWIVERS. la feuUle emporlee par le vent. Qnand se- rai-je asset heureiu pour posseder la belie Yu-fei (•) ? " SIAO-MAir. Les paroles de ce jeune homme vous at- tritlent le coeur.... rxR-sou. (£Ue chante.) - A peine I'ai-je entendii , que j'ai senti I'accroiire mes enuuis. La douceur de ses accents faisait naitre par degre le trouble au fond de men ^me ; sa voix touchante ins- pire ramour. Avee quelle verite il a d^peint les tourments de cette passion ! Ne croirait- on pas qu'en prenant sa guitare , il a voulu decrire votre abandon , voire Iristesse?... » »I-Miif-TCH05G. (// chante de noiiveau en s' accompagnant de la guitare.) « Le phenix solitaire cherche la compagne qu'il aime ; il chante d'une voix plaintive : oil esl-elle pour ecouter ses tendres accents ?» FAN-SOD. Que ne joue-t-il un autre air? il semble faire allusion a nos peines. Mademoiselle , allons-nous-en. SIAO-MAN. Pourquoi es-tu done si pressee ? FAK-SOO. Hola ! mademoiselle , est-ce que vous ne voyez pas un homme qui vient ? SIAO-MAir. De quel cdte vient-il ? FAN-SOU. (^Elle chante.) « Les bambous froisses resonnent sur son passage ; les fleurs laissent tomber avee bruit leui's petales decolores; les oiseaux, qui dor- maieut sur les branches, s'envoleut de frayeur. {Elle ecoute.) J'ai ecoule longlemps avee in- quietude : je n'entends personne; autour de nous regnent la solitude el le silence. » SIAO-MAH. A quoi bon faire Teffrayee ? Comment un homme pourrait-il venir a cette heure? II faut que tu sois folle!... FE-HIN-TCHONG. 11 me semble que je viens d'entendre par- ler.... Ouvrons la porte du cabinet, et re- gardons. FAII-SO0. {El/e chante.) « Ah ! j'ai eutendu resonner Tanneau de la porle ; il m'a semble voir quelqu'un venir. Le bruit m'annou^ait une personne qui mar- che daus I'ombre. Soudain j'ai arrete nies yeux de ce cote : ce n'ctait que le bruit des gouttes de rosee ; ce n'etait que le murmure de la brise du soir. Les fleurs balaucent ca- pricieusement leur ombre ; elles ont failli me faire mourir de frayeur. » — {EUeparle.) Ma- (*) Jeune fille d'une beaute remarquable. demoiselle , allons-nous-en. J'apprehende qu'il ne vienne quelqu'un. SIAO-MAN. ^coulons encore un air. Qu'est-ce que lu as a craindre ? FAN-SOU. Si madame vient a le savoir, elle dira qu'cilo connait la coupable, que c'est Fan-sou, cette petite scelerate; puis elle m'appellera et me i'era mettre a genoux. La nuil devient obs- cure ; retournous-nous-en. Hola ! je crois en- tendre I'arrivee de quelqu'un.... La nuit de- vient sombre; retirons-nous. SIAO-MAN. Eh bien! marche la premiere; je te sui- vrai. FAN-soo. {Elle chante.) « L'eclat de la lune pent nous trahir : je meurs d'iuquielude. » Fan-sou , envoyee par madame Han savoir d»s nouvelles du bachelier tombe malade, le trouve vraiment pres de perdre la raison. II faut voir de quel ton i'espiegle soubrette, transformee en docte lettre, eite au bachelier tons les textes d'auteurs classiques qui recom- mandent a un etudiant de m^priser I'amour et de ne s'occuper que du pro- gres de ses etudes; mais la petite pre- cheuse linit pourtant par s'adoueir et par se charger d'un message pour sa maitresse. Nouvelle scene fort jolle en- tre Fan-sou et Siao-man ; colere simu- lee de celle-ci en recevant la lettre de I'etudiant; menaces de faire chatier Fan-sou par sa mere ; feinte terreur de la messagere, qui reprend bientot I'of- fensive et menace, a son tour, d'aller tout declarer a madame Han ; frayeur tres-reelle de Siao-man et maguanimite de la soubrette, qui pardonne et con- sent meme a porter une reponse au bachelier. Elle fait plus encore que de lui remettre un billet; elle lui donne, comme de la part de sa maitresse, un rendez-vous dans le jardin. Ces deux scenes charmantes, qui sont la sixieme et la septieme du deuxieme acte, nieri- tent d'etre mises sous les yeux du lec- teur; les voici : Sctne 6. SIAO-MAN ET FAN-SOD- StAO-MAir. Fan-sou, d'ou vieus-tu? CHINE MODERNE. 453 FAN-SOU. Madame m'avait chargee de visiter Pe-min- tchong, qui est malade. SIAO-MAN. Comment va ce jeiine homme? FAN-SOU, a part. II parait qu'elle s'interesse beaucoup a liii. {A Siao-man.) Son etat s'aggrave de plus en plus ; la maladie va le conduire par degres au lorn beau. SIAO-MAN, a part. Est-il possible qu'il soit reduit a cet etat ! Je n'ose Tinterroger avec trop d'inslances. Comment doncfaire.' quel remede ? FAN-SOU, a part. La question que mademoiselle \ient de m'adresser decele a fond les sentiments de son coeur; on pent lui parler franchement. (A Siao-man.) Pe-min-lchong m'a chargee de vous remettre une lettre ; j'ignoie ce qu'elle contient. siAO-MAW, prenant la lettre et la lisant, affecte tin ton irrite. Vile creature ! il faut que lu sois bieu ef- frontce. FAN-SOU. Que voulez-vons dire? SIAO-MAN. Fan-sou , viens ici ; mets-loi a genoux. FAN-SOU. Je n'ai commis aucune faute; je ne m'a- genouillerai pas. SIAO-MAN. Indigne suivante, tu deshonores ma fa- mille ! Sais-tu bien oii tu demeures? Tu oses manquer a ce point aux convenances, comme si je ne les connaissais pas ! N'est-ce pas ici la maison d'un ministre d'Etat ? Je n'ai pas encore engage ma foi ; malgre cela , tn vas prendre la lettre amourense d'un jeune homme pour venir eiisuite me seduire! Si ma mere, qui est d'un caractere emporte , venait a le savoir, tu serais perdue. Petite scelerate, je devrais te briser la figure ; mais on dirait que je snis une jeune fille et que j'ai la me- chancete d'un demon ; on ne manquerait pas de me calomnier : mon unique desir est de prendre cette lettre et d'aller la montrer a ma mere. Miserable suivante ! elle te fusti- gera comme il faut. FAN-SOU, se meltant a genoux, et riant. Eh bien , me voila a genoux. Ce jeune homme m'a chargee de vous remettre nn bil- let; je ne savais pas, en verite, ce qu'il avail ecrit. Mademoiselle , si vous allez le dire a madame [Elle chante) , « vous me perdrez , ainsi que le jeune amant de la ville de Lo- yang. >• SIAO-MAN. Petite scelerate , tu es bien impudente ! FAN-SOU, tlraut le sac d'odeur. Mademoiselle, ne vous fachez pas tant. — {Elle chante.) « Voire suivante ne fera pas de bruit ; mademoiselle, gardez-vous de vous emporter. » — {Elle parle.) Voici un objet qui a une destination. — (Elle chante.) « Di- tes-moi a qui il etait destine. » — {Elle parle.) Regardez un pen. — {Elle chante.) « Cher- chez , expliquez d'ou il vient. » SIAO-MAN, regardant le sac , a part. Comment se fait-il qu'il se trouve dans ses mains .>> FAN-SOU. Ne m'avez-vous pas dit : Tu es bien im- pudente, petite miserable ; sais-tu bien oil tu demeures.' — {Elle chante.) » Ne suis-je pas dans le palais du ministre d'Etat ? » — {Ell? parte.) Et qui etes-vous, mademoiselle? — {Elle chante.) « Vous etes une jeune per- sonne ; oserais-je vous seduire par des pro- pos indiscrets.' Quand madame , qui est d'un caractere si bouillant, aura vu cette servante qui deshonore sa maison , e'en est fait d'elle! Permettez-moi de vous quitter prompte- roent. » — {Elle parle.) Je vais aller trouver madame — {Elle chante), « afin qu'elle me chAtie comme je le merite. » SIAO-MAN. Fan-sou , je veux raisonner serieusement avec toi. FAN-SOU. Feu le ministre d'Etat a gouverne sa mai- son avec tant de severite, que les domesti- ques et les servanles n'osaient pas (aire une demarche contraire aux rites. Aujourd'hui , mademoiselle, vous mettez en oubli les ins- tructions que vous avez reques dans votre enfance ; vous ne cultivez pas les vertus de votre sexe ; vous desobeissez a votre tendre mere.... Vous promettez votre coeur a un jeune homme , et vous lui donnez un gage de votre tendresse. Ces jours derniers vous eticz fatiguee de broder; vous vous disiez atleinte 6te cette lassitude qu'occasionne I'influeDce du printemps : il parait que c'etait pour cela. Voila le larcin decouvert! C'est a vous main- tenant de demander pardon : loin de la, vous voulez avoir un entretien serieux. Rejetant vos fautes sur moi , vous m'accablez de re- proches. Est-ce ainsi qu'on traite les gens? Je ne vous fais qu'une seule question: Vous avez brode sur ce sachet deux oiseaux qui entrelacent leurs ailes ; quelle etait votre pensee ? — {Elle chante.) « II faut convenir qu'ils sont brodes avec art. » — {Elle parle. i Voici une touffe de neoufar. — {Elle chante.) « Vous aviez sans doute vos raisoos pour les 454 L'UINIVERS. broder aussi. Cette condiiile d'une personne distingiicc comnie vous I'ctes ne pent man- qiier d'cxciJer la raillerie et les sarcasmes du public. {F.lle se met a coiirir.) Je coins mon- trer k madame ce petit sachet. » SIAO-MAN, rarritant. Tout a I'heure je plaisantais avec toi; pour- quoi veux-tu aller cbcz ma mere ? vjlV-sov. {Elle cliantc.) « Vous etes tine jeiine personne : pourquoi agissez-vous ainsi ? » siAO-MAW, la retenant totgonrs. C'est un tort que j'ai eu.... FAN-SOO, Est-ce Lien vous , mademoiselle ? — {Elle chante.) « Comment ! vous me suppliez, moi, qui suis une miserable servante, de vous acGorder du repit ! » SIAO-MAir. Je conviens que j'ai eu tort. FAW-SOU. Mademoiselle , tout a I'heure n'avez-vous pas voiilu me frapper ? SIAO-MAN. Eh bien ! frappe-moi h ton tour. FAN-SOU. AUons , venez ici, et meltez-vous a genoux. — (Elle chante.) .Notre role est change; c'est maintenant a moi de vous chatier....» — (£//e paile.) Est-ce que vous avez neur ? SIAO-MAX. Certainement que j'ai peur. FAir-SOU. Ah ! n'ayez aucune craiute ; je voulais seuiement plaisanter avec vous. SIAO-MAN. Tu as manque me faire mourir de {rayeur. FAN-SOU. Mademoiselle , parlez - moi serieusement. Est-ce vous qui avez doDue ce sachet a Pe- min-tcbong? SIAO-MAir. Oui. FAIC-SOU. Pourquoi vous etes-vous cachee de moi ?• SIAO-MAN. Je n'ai pas ose le faire cette confidence. FAK-SOU. .... Mademoiselle, qui est-ce qui pent s'op- poser a voire union ? Pe-miu-tchong nourrit dans le fond de son coeur une passion qui le mine ot le consume ; il desire meme que la mort metie un torme k ses tourments. Ma- demoiselle , les rites veulent qu'on aime les hommes. Quel bnnheur n'eprouve-l-on pas lorsqu'on adourit les peines de ses sembla- bles .' SIAO-MAN. Ma compagne d'eiudes, tu es tout a fait dans I'erreur. Est-ce que lu n'as pas enlendu dire : •< En fait de mariage, quand on neglige les formalites prescrites par les rites, on de- / vient tine concubine. » Songe done que je 7 suis la fille d'un ministre d'fital. Si je deso- beis a ma tendre mere, et que je contracle avec un jeune homme une union illicite , comment oserai-je paraitre dans le nionde ?... FAN-SOU. Si pour une affaire de pen d'importance , on compromet la vie d'un liomme , n'esl-ce pas une faute grave? Mademoiselle, refle- chissez-y milrement. SIAO-MAN. Garde-toi de m'en parler davantage; ma resolution est irrevocablement fixee. PAN-SOU. Le Lun-yii dit : << Celui qui manque a sa parole ne merite pas le nom d'homme. » Ma- demoiselle, puisque vous persislez avec obsti- nation dans voire refus , je vais prendre le sachet el avertir madame. SIAO-MAN. Attends done, raisonnons encore un pen. FAN-SOU. « Mille raisonnements ne valent pas un consenlement. » SIAO-MAN. Tu joues de ruse avec moi. AUons, attends que je reflecbisse encore. FAN-SOU. « Il vaut mieux sauver la vie d'un homme que d'elever une pagode a sept etages. » Ma- demoiselle, quels ordres avez -vous a me transmeltre.' Il faut que j'aille rendre reponse a ce jeune homme? SIAO-MAN. Attends que j'ecrive une letlre; il la lira et connallra mes sentiments. {^Elle remet la lettre a Fan-sou.) FAN-SOU, d^iin ton severe. Eh bicD , je vais la porter. SIAO-MAN. A qui? FAN-SOU. A madame. SIAO-MAN, effrayee, Elle a jure ma perle ! FAN-SOU. Mademoiselle , rassurez-vous ; c'est au ba- cheljer que je la porte. {Elles sortent c«- semble.) Scdne 7. PB-MIN-TCHONG BT FAN-SOU. rE-MIN-TCHOWG. Dans mon trouble , je tohs preaais pour CHINE MODERNE. 4§S f une autre. Eh bien , oii en est notre affaire? FAN-SOU. (JElle cliante.) « Aujourd'hui la soubrelte vous a rendu un service signale. » PE-MtN-TCHONG. Mademoiselle a-t-elle daigne recevoir ma lettre? FAN-SOU, fa'isant claquer ses doigts, (El/e cliante.) " J'ai eu recoups a un petit stratageme, et j'ai arrange votre affaire. » pI-MIN-TCHONG. Si vous avez quelque bonne nouvelle , fai- tes-la-moi connaitre ? FAN-SOU. (Elle chante.) « J'ai un billet de sa main , ou elle a ex- prime ses sentiments. » PE-MIN-TCHONG. Quel bonheur 1 Une reponse de mademoi- selle ! laissez-moi la voir. FAH-soc, tirant de son sein la lettre sans la montrer. — {Elle chante.) " Oh ! dans cet endroit personne n'a pu la voir. » PE-MIN-TCHONG. Si je ne puis la voir, 6 ciel ! ]e mourrai d'impatience. FAN -SOU. (Elle chante.) « Lettre stupide , qui n'entendez rien aux affaires , eh bien , votre sort est dans cette main-la ! » PE-MIN-TCHONG. Ayez pitie de moi ! (Fan-sou remet la let- tre a Pe-min-ichong ; celui-ci s'agenoiiiUe pour la recevoir.) Avant de la prendre, atten- dez que j'allume un rechaud de parfum. Ma- demoiselle, prosternez - vous devant cette lettre , et faites une priere pour moi. PAN-SOU. Je ne comprends pas. PK-MIW-TCHONG. Yous ne roulez pas ? je prierai moi- merae. FAN-SOU. Mademoiselle n'en ferait pas autant pour Tous. — (Elle chante.) « Qu'a done cette let- tre de si extraordinaire pour que vous bru- liez des parfums en son honneur ? Est - il possible que vous portiez la demence au point d'adorer un morceau de papier ! (Pe- min-tchong lit la lettre.) Vous le voyez, je viens de remplir pour vous une mission de- licate; je me suis compromise peut-etre!... Ah! j'essayerais en vain de vous raconter tont ce que j'ai fait. » PE-MIW-TCHONG. Mademoiselle me promet un rendez-vous pour cette nuit, mais j'ignore a quel moment .elle viendra. FAN-SOU. (Elle chaate.) " Elle sera avare de sa tendresse, dans la crainte d'effacer sa beaute ; et cette nuit , avec vous.... » PE-MIN-TCHONG. Celte nuit, comment se conduira - 1 - eUe avec moi ? FAN-SOU, rinterrompant. — (EUe chante.) ' « Le mot etait venu sur le bout de ma langne; veritablement je I'ai avale, » PE-MfN-TCHONG. Comment avez-vous pu I'avaler? Vite, pro- noncez ce mot; mettez le coinble a ma joie. FAN-SOU, apart. — (Elle chante.) " Si je ne le dis pas , je le ferai mourir de chagrin. » PE-MIN-TCHOWG. Qu'est-ce que mademoiselle vous a recom- mande ? FAN-SOU. (Elle chante.) « Elle m'a ordonne de vous dire a voix basse.... » PE-MIN-TCHONG, De me dire quoi ? FAN-SOU. (Elle chante.) « Qu'elle vous engage a ne pas dormir, quand la nuit sera avancee ; elle veut que de la capitale on entende vos soupirs ; elle veut que » PE-MIN-TCHONG. Mademoiselle, ne plaisantez pas; dites- moi sans detours a quelle heure de la nuit elle viendra. FAN-SOU. (Elle chante.) " Attendez que le tambour ait annonce I'arrivee de la nuit; attendez que tout le monde de ce palais soit plonge dans un pro- fond sommeil ; attendez qu'un bruit qui se prolonge au loin parte du baut de la lour; que la goutte d'eau tombe sur la clepsydre de jade sonore; qu'une brise printaniere fasse fremir I'aigrette du phenix qui dort sur les bananiers ; que la fleur qui croil dans le palais de la Lune abaisse son ombre sur la cime des arbre^ ; que la jeune beaute sorte furtivement de sa cliambre, d'oii s'exliale un doux parfum ; qu'elle quitte ses rideaux brodes; qu'en agitant sa robe ondoyante , elle franchisse le chemin entoure d'une ba- lustrade ; qu'elle souleve moUement la jalou- sie ornee de peries; attendez qu'un leger bruit se fasse entendre de la fenetre : c'est le moment ou elle viendra. » (Elle sort.) (*). (*) Voy. Theatre chinois ou Choix de pie- ces de theatre , traduites par M. Bazin , i'^ piece, acte II , seen, vi et yif. 4» L'UNIVERS. Siao-man rencontre Pemin-tchong au lieu convenu ; mais, au milieu d'un^ conversation des plus tendres, survient madame Han, qui entre dans une vio- lentecolere en derouvranttoutecette in- trigue menee par Fan-sou. Elle chStie la petite impudente, qui, bien qu'a genoux, demontre a sa maftresse, avec la plus comique assurance , que d'elie seule vient tout le mal, et que , nnalgr6 son age et sa prudence, elle a commis dans cette affaire une foule de fautes contre les rites, dont la nioins pardonnable est d'avoir admis un jeune etudiant dans sa niaison. Cependant, Pe-niin- tchong est force de quitter la demeure de madame Han; il va se presenter au concours litteraire, ou il r^ussit au dela de ses esperances ; il est nornm^ han- lin (academicien). L'empereur, qui sait que le prince PeY-tou a promis au gene- ral Pe de donner a son fils la main de sa die Siao-man , envoie un ordre a madame Han par le messager des no- ces. Et comme les mariages qui se font a la Chine par la volonte de l'empe- reur sont affranchis des formalites impos^es par les rites, I'union des deux amants peut s'accomplir, sans attendre que Siao-man ait atleint Page voulu par la loi. Cette comedie, sauf le der- nier acte, qui me parait bien inferieur aux trois premiers, est conduite, dans quelques-unes de ses parties, avec un art tres-delicat et presente plusieurs situations pleines a la fois de grSce et de comique (*). Le Mariage forc6. Un lettre, nomme Han-fou-tchin , qui allait a la cour pour y subir ses examens, s'arrete sur sa route, a Thsi- nan-fou , chef-lieu d'un departement dans le Chan-tong. Apprenant que le gouverneur de la ville est Chi-hao- v^'^n, son ancien condisciple, il dirige ses pas vers I'hotel de la prefecture, oii il est accueilli, par le gouverneur, de la maniere du monde la plus cordiale et la plus obligeante. Apres les compli- ments d'usage, les deux amis se met- tent a table. Le repas acheve, Chi-hao- wgn appelle un domestique et lui trans- ^*) Voy. Journal des Savants, octobre 184a, article dc M. Charles Magnin. met I'ordre d'amener a la prefecture une jeune courtisane, d'une grande beaute, nommee Thou-joui-niang. La courtisane arrive, et fait sur le coeur du bachelier une impression profonde. Han-fou-tchin se decide sur-le-champ a quitter la prefecture et s'installedans la maison de Thou-joui-niang, chez madame Li. Cette hospitalite, qui n'etait pas in- fructueuse pour la mere de la courti- sane, pour madame Li , a laquelle Han- fou-tchin ne manquait jamais de faire quelque present. Unit par deplaire , quand le bachelier, deja depourvu de sens et de raison, se trouva depourvu d" argent et de provisions de bourhe. On le met a la porte. Han-fou-tchin profite du moment ou Thou-joui-niang se promene, avec ses compngnons sur les bords du lac Kin-sien, pour lui re- procher son ingratitude ; il cherche a I'attendrir et lui propose de I'epouser, mais la courtisane est inflexible. Dans son depit, Han-fou-tchin traduit Thou- joui-niang devant le tribunal de Thsi- nan-fou. Le gouverneur, instruit de I'affaire par son ami, ordonne d'abord qu'on administre la bastonnade a la jeune fille, qui se recrie. « Mais, dit alors Han-fou-tchin, comme le frere de Dorimene dans la piece de Moliere, vous n'avez pas lieu de vous plaindre, et vous voyez que je fais les clioses dans Tordre. Vous m'avez manque de parole; vous refusez denvepouser; on vous donne des coups de baton ; tout cela est dans les formes. » {Un huissier live le b&ton.) THOU-JOUI-KIAHG. He bien I j'epoiiserai, j'epouserai. La piece se termine par le mariage de Han-fou-tchin et de Thou-joui- niang. Elle n'est pas aussi gaie que le Mariage force, de Moliere; elle n'est pas meme assez gaie (*). La Fleur de poirier. Cette petite comedie, dont le dialo-j gue manque de vivacite et n'est seme d'aucun trait, est conduite avec un art (*) "Voy. le S'lecle des Yotien, Journal asia- tique, cahier de septembre-octobre i85r, p. 28a a 384. CHI?sE MODERINE, 457 qui ne se retrouve pas au m^me degre dans les autres. Un bachelier nomme, Tchao-ju-tcheou, tourmente du desir de voir, puis d'epouser Sie-iiin-lien , * jeune courtisane d'une grande cele- hrite , entreprend , dans ce but , ie voyage de la capitale. Introduit chez ie i . gouverneiir de Lo-yang, son aneien condisciple , Lieou-kong-pe (c'est Ie nom du gouverneur) met en jeu divers stratagemes pour donner ie change a la passion de son ami. D'abord il lui fait accroire que la courtisane est mariee ; il installe Tcbao-ju-tcheou dans son ca- binet d'etude, au fond du jardin, I'exhorte a lire Ie Chou-king ; d'un au- tre cote, il charge un domestique d'a- mener secretement dans sa maison la courtisane Sie-kin-lien. Kin-lien arrive. Le gouverneur lui expose son plan, ses desseins, et, comme le bachelier n'a jamais vu la courtisane, il la prie de cacher son nom, de se faire passer pour la fille de Wang-tong-tchi et de cher- rher a inspirer de I'amour au bache- lier. Au deuxieme acte. Kin-lien, dans une promenade nocturne au milieu du jardin, estapercue de Tchao-ju-tcheou, qui se met a courir apres la jeune fille, lui adresse quelques paroles et en de- vient eperdument amoureux. Sie-kin- lien joue parfaitement son role; elle accueille les propos agreablesdu bache- lier, et se laisse lier par un serment a n'etre jamais I'epouse d'un autre. In- vitee a prendre une collation, elle con- sent a cette demarche perilleuse ; elle est au moment de penetrer dans le pa- vilion, lorsqu'une vieille gouvernante, qui agissait de concert avec elle etavec le gouverneur, survient tout a coup , prend un ton irrite et accable de repro- ches les deux amants. Le pauvre bache- lier, mecontent du sort, verse des lar- mes et s'abandonne au chagrin. L'a- droite gouvernante se radoucit alors et finit par faire des propositions de paix qui sont acceptees. Elle s'engage a ne- gocier le manage de la jeune fille avec Tchao-ju-tcheou, a condition que celui- ci obtiendra letitre de docteur. L'esperance raffermit le courage du bachelier; il travaille avec ardeur, se presente aux examens publics avec con- fiance, obtient la premiere place et re- vient triomphant dans I'hotel du gou- verneur. II y retrouve la jeune fille, dont le vrai nom est bientot reconnu. Tchao-ju-tcheou, qui se sent redevable de son avancement au gouverneur Lieou , remercie ce dernier de I'heu- reux stratageme qu'il a employe, et la piece se denoue par le mariage du doc- teur et de la courtisane. De toutes les comedies d'intrigue qui se trouverit au repertoire, la Fleio" de poirier est la moins interessante et la plus reguliere (*). DBA.MES DOMESTIQUES. Le Vieillard qui obtient un fils. « On ne pent nier, dit M. Abel Re- musat, que le genre d'utilite le plus incontestable des drames et des re- mans des nations lointaines ne soit de faire juger les moeurs et les usages de ces nations, en les mettant en action, et en les presentant sous un jour plus naif et plus vrai qu'on ne le pent faire dans une relation. Mais, d'un autre cote, la condition indispensable pour juger du degre d'inter^t de ces produc- tions, meme, jusqu'a un certain point, pour les entendre, ce serait la connais- sance de ces moeurs et de ces usages dont on y cherche I'csprit. Par exem- ple, dans la comedie dont le titre pre- cede, tout I'inter^t se porte sur un vieillard qui se voit pres de mourir sans enfants mSles ; et, quoique ce soit en tout pays un malheur que de ne pas laisser de posterite, on ne pent, a moins d'etre bien imbu des idees chinoises a cet egard , apprecier convenablement I'importance que ce vieillard met a avoir un fils , le desespoir qui I'accable quand il se croit prive de cette conso- lation , I'exces de sa joie quand il ap- prend que le ciel la lui a enfin accor- dee. Pournerientrouverd'exageredans tons ces sentiments, il faut connaitre et avoir bien presentes a I'esprit les re- lations que les lois, la morale, j'ose- rais dire la religion, out etablies entre les parents et les enfants, et qu'elles perpetuent apres la mort des premiers, (*) Voy. le Steele des Yoiten , Journal asia- tique, cahier de septembre - octobre i95i, p. 27^ a 274. '""* 468 I/UNIVERS. par les devoirs qu'eWes imposent aux autres. li faut savoir qu'un Cliinois , pres de mourir sans enfants mflles, envisage son sort du menie ocil qu'un Kuropeen qui se verrait, ici, prive des lionneiirs funebres : il est deshonore, sa famiile esteteinte, personne n'heritera de son nom ; ses filles le perdront en passant dans la famiile de leur mari ; on ne fera point en son honneur ces ce- remonies journalieres qui, suivant fi- dec de Confucius, rendent les raorts toujours presents au milieu des vivants; on ne viendra point, matin et soir, se prosterner devant la tablette ou son nom sera inscrit ; on ne brulera point des parfflms, on ne lui offrira pas des mets, on n'arrangera pas ses habits, on ne tiendra pas sa place vacante au mi- lieu de sa famiile, comme cela est re- commande dans le Tchong-yong ; on ne remuera pas la terre siir sa sepul- ture, on ne cultivera pas les arbres qui y seraient piantes; au jour anniversaire de sa mort, on ne viendra pas pleurer et se lamenter sur son tombeau. Voila les catamites que redoute celui qui nelaisse pas de fiis apres lui; voila les prejuges que la philosophic chinoise a rpnforccs de tout son pouvoir, loin de chenher a les detruire. II nous faut tin commentairc pour nous mettre en etat de les concevoir ; mais toutes ces idees se reveillent en Chine, au seul litre de la piece que nous avons sous les yeux : Laoseng-eul, le Fieillard a qui il nait un Jlls. Ce ne serait chez nous qu'un bonheur ordinaire; c'est, a la Chine, un coup du ciel. Le princi- pal personnage est sauv6 d'un malheur accablant ; les traverses qui vont lui faire craindre d'y retomber, exciteront au plus haut degre I'intergt et la com- passion des spectateurs. «Un vieillard deTong-ping-fou, nom- me Lieou-thsong-chen, a ramasse une grande fortune dans le commerce ; sa conscience lui reproche les moyens dont il s'est servi pour I'acquerir ; le ciel Ten punit cruellement; il a soixante ans; sa femme, Li, en a cinquante- huit ; il n'a qu'une fillequi est mariee, et un neveu, fils de son frere , qui porte le meme nom de famiile que lui ; mais tout le monde dans sa maison est conjure centre ce neveu : sa femme, sa fille, et surtout son gendre. On craint que le vieillard ne veuille laisser son bien a cet heritier du nom de sa fa- miile. La femme oblige son mari a le chasser de chez lui ; le gendre, charge de compter a son cousin une somme d 'argent, lui en vole une partie ; Je pauvre neveu est renvoyd sans pitie. Le vieillard , a la sollicitation de sa femme, remet toutes ses clefs a son gendre, et lui abandonne la direction de son bien. Tout le monde est content, excepte le neveu , qui se trouve reduit a la misere. Le vieillard , pr^t a partir pour la campagne, annonce a sa fem- me la grossesse de Siao-mei , sa seconde femme, lui recommande d'avoir beau- coup de menagements pour elle, et de- mande avec instance d'etre informe tout de suite du sexe de I'enfant qu'elle lui donnera. Telle est la matiere du Sie-tseu ou prologue : la marche en est rapide, le dialogue naif et anime. La passion de la dame Li contre son ne- veu, le caractere interesse et sordide du gendre, lajoie de Lieou-thsong-chen, en parlant du fils qui doit lui naitre, I'lm- patience de sa femme, qui ne partage point cetle joie, tout cela est peint avec chaleur, et assaisonne de traits vifs et comiques. « Au premier acte, le gendre deplore son malheur de se voir prive de Theri- tagesurlequelilavaitcompt^. "Jamais, dit-il a sa femme, je ne vous aurais epousee, si j'avais pu ni'attendre a ce qui ni'arrive. Si Siao-mei donne le jour a une fille, il faudra cederla moitie du bien de votre pere, et si c'est un fils, il faudra le ceder tout entier. » La jeune femme le console; elle lui promet de feindre que Siao-mei a pris la fuite avec un autre homme: cette feinte est adoptee; on en fait part a la dame Li , et tous trois vont a la campagne trou- ver Lieou-thsong-chen. Celui-ci refuse d'abord d'ajouter foi a son malheur, il croit qu'on lui prepare une surprise ; mais quand il est enfin persuade, il se livre a son d^sespoir, etprend la reso- lution de distribuer des auniones pour apaiser le ciel, dont la colore le pour- suit. Ainsi finit le premier acte, que le traducteur a beaucoup abrege. On volt que la scene, d'abord dans ia maison de ville de Lieou-thsong-chen, est trans- CHINE MODERNE. 459 portee ensuite a la campagne. L'unite de lieu n'est pas une regie qu'il faille s'attendre a trouver observee a la Chine. Le second acte commence par la dis- tribution des aumones, que le gendre du vieillard est charge de faire dans le temple de Khai-youen. Une scene de mendiants, placee en cet endroit , est ^gayee par quelques tours de fourberie dont ces sortes dfe gens ont coiitume d'user. Le neveu deLieou-thsong-chen vient ensuite pour avoir sa part de la distribution ; il est repousse durement par le gendre, accueilli avec tendresse par son oncle, mais chass^ de nouveau sur les instances de sa tante. Le vieil- lard le congedie, en lui recommandant d'etre exact a remplir ses devoirs sur les tombeaux de ses ancetres. Cette re- commandation, prise dans le sentiment meme qui anime Lieou-thsong-chen , fonde assez adroitement la grande scene du troisieme acte. « Dans celui-ci la scene est au milieu des tombeaux. La fille de Lieou-thsong- chen voudrait alter pratiquer les cere- monies accoutumees sur ceux de sa famille ; mais son mari Ten eloigne pour la conduire a la sepulture de la sienne. Cette maniere de mettre en action les devoirs qui separent une fille de ses parents me semble assez inge- nieuse. Le neveu vient ensuite, et, dans un monologue tout a fait tou- ehant, il exprime ses sentiments aux ombres de ses ancetres, et temoigne le regret de ne pouvoir, a cause de la pauvrete ou il est reduit, orner leurs tombes suivant son desir. Quand il est eloigne, Lieou-thsong-chen et sa fern me arrivent a leur tour. lis savent que leur fille et leur gendre sont partis avant eux, avec les gateaux, les victi- mes et le vin chaud destines aux of- frandes ; mais tout cela a ete porte aux tombeaux de la famille de leur gendre. La faible offrande de leur neveu n'est point apercue. Lieou-thsong-chen de- plore I'abandon ou sont les sepultures, et cette image redouble sa douleur, en lui presageant le sort qui attend sa tombe et celle de sa femme. Ceile-ci s'attendrit peu a peu ; elle sent I'isole- ment ou se trouve une famille qui n'a point de rejetons mSles pour lui ren- dre les honneurs funebres, et le resul- tat de cette scene, qui est tres-bien filee, fort interessante, et ^crite d'un style tres-propre au sujet, est que la dame Li accueille avec joie son neveu qui revient pour achever les rites qu'il avait commences. Cette reconciliation est amenee avec beaucoup d'adresse, et accompagnee de circonstances qui font honneur a I'habilete du poete. Le gen- dre et la fille, qui vienneut ensuite pour la ceremonie, sont tres-mal recus par la dame Li , qui les congedie' a leur tour, et les force de rendre les clefs qui leur avaient ete confiees. Ainsi finit le troisieme acte. « Au quatrieme, on celebre le jour de la naissance de Lieou-thsong-chen. Le neveu, devenu intendant de la maison, recoit son cousin corame il en a ete recu, et lui rend dans les memes ter- mes Taccueil qui lui a ete fait. Le vieil- lard lui-meme refuse longtemps de re- cevoir les felicitations de son gendre et de sa fille. II ne veut admettre, dit-il, aucun parent qui ne le touche de plus pres que son neveu. Dans son idee, cett€ reponse exclut son gendre et meme sa fille, qui a passe dans une autre famille. Mais celle-ci a un moyen sur de se re- concilier avec son pere. Elle fait entrer Siao-meT, que depuis trois ans elle avait tenue cachee, ainsi que le fils au- quel cette derniere avait donne le jour; elle rend elle-meme un compte assez peu satisfaisant des motifs qui I'ont dirigee dans sa conduite. Mais le vieil- lard , transporte a la vue de son fils, passe aisement sur tout ce qu'il y a d'irregulier et d'invraisemblable dans cette maniere d'agir. II exprin)e le bon- heur qu'il eprouve de se voir au milieu de sa fille, oe son neveu et de son fils, et partage en leur faveur son bien en trois parties egales : « Le ciel m'a su gre des aumones que j'ai distribuees, dit-il en finissant, et, pour me recom- penser, il m'a donne un fils dans ma vieillesse. » (*)• (*) Melanges asialiques ou Choix de mor- ceaux de critique et de memoires relatifs aux i-eligions, aux sciences, aux coutumes, a I'histoire el a la geograpliie des nations orien- tales, par M. Abel Remusat, t. II, p. 3a8 a 333. 460 L'UNIVERS. Le Sacrifioe de Fan et de T'ohang. Les Chinois ont fait de Tamitie une vertu; toutefois, romme la morale, telle qu'ils la concoivent, n'engage a rien dans la pratique, il arrive souvent a la Chine que deux ou Irois person- nes se lient ensemble par un contrat, par un serment et par une c^r^monie. Le contrat impose des obligations veri- tables, et generalement les liens de I'a- mitie sont plus ou moins indissolubles, suivant que les clauses du contrat sont ou plus ou moins severes. Quant a la ceremonie, elle ronsiste presque tou- jours dans un sacrifice offert par les parties contractantes. On ne doit done pas s'etonner qu'il y ait dans la litteratiire chinoise un tres-grand nombre de legendes sur Pamitie ; celle de Fan et de T'chang en est une. Fan-kiu-king, originaire du Chan-yang, contracte avec T'chang- youen-pe une amitie immortelle. Cette amitie ne se forme pas avec le temps, peu a peu, maistout d'un coup, comme chez les musiciens. Apres le pacte, ils offrent en sacrifice un coq et du mil- let ; puis, Fan-kiu-king , lie par un contrat, par un sacrifice et par un ser- ment, se met en route et se presente au concours ouvert dans la capitale. Mais I'amitie de Tchang-youen-pe n'e- tait pas a I'epreuve de I'absence; il tombe dans une grande tristesse, et, quoique sa jeune Spouse et sa mere lui prodiguent les soins les plus tendres, il meurt de chagrin. Autrefois, dans les ceremonies des funerailles, le char funebre etait tou- jours tratne par les parents et les amis du defunt. On place done le corps de Tchang-youSn-pe sur le char funebre. Chose extraordinaire, malgre les efforts des parents et des amis, et suivant la prediction que T'chang-youen-pe en avait faite lui-mfime, le char reste im- mobile. Au quatrieme acte, Fan-kiu-king, averti par un songe de la mort de son ami et des circonstances miraculeuses qui s'opposent a I'inhumation du corps, Suitte sur-le-champ la capitale, revient ans le Chan-yang, offre un sacrifice et preside aux funerailles de Tchang- youdn-pe. On se remet a roeuvre; le char fuit, et la ceremonie funebre s'ac- complit sans le moindre obstacle (*). Le Devouement de Tchao-Ii. II n'est que trop vrai qu'il y a eu des anthropophages , comme dit Voltaire dans son Dictionnaire philosophique. A la Chine , pays tres-police et tres- civilise, nous en avons trouve sous la dynastie des Song; voici niaintenant une piece de theatre qui nous en raontre sous la dynastie des Han. Pendant la premiere annee kien-wou (Pan 2.5 de notre ere), sous le regne de I'empereur Kouang-wou-hoang-ti, avec lequel commence la dynastie des Han orientaux, il y avait dans la province du Ho-nan une foule de Chinois qui ne se mangeaient pas entre eux , mais qui mangeaient les hommes et les fem- raes des districts ou ils s'etablissaient. A leur approche, les habitants, saisis d'epouvante, prenaient la fuite. Dans le premier acte du Tchao-li-jaug-fei (le Devouement de Tchao-Ii) , le thea- tre represente les champs de Pien- king. Une veuve d'un rang distingue, madame Tchao , arrive, soutenue par ses deux fils, au pied de la montagne Y-thsieou ; le fils aine s'appelle Tchao- hiao , le cadet Tchao-Ii. Comme les emigres du Choui-hou-tehouen , ils s'etaient derobes par la fuite aux in- cursions des brigands Mais quand on est dans les champs, il faut pour- voir a sa subsistance. Pendant que Tchao-li coupe du bois , Tchao-hiao s'eloigne un peu pour chercher des her- bes et des racines. A peine a-t-il fait cent pas, qu'il survient un hommed'une effrayante physionomie. Le nom de cet homme etait" Ma, son surnom Wou, son titre honorifique Tseu-tchang. Ori- ginaire de la province deTchin-tclieou, il avait a se plaindre des juges et des examinateurs publics, car, s'etant pre- sente au concours pour le merite mi- litaire, il avait 6te rejete des examens, malgre son talent, a cause de sa lai- deur. Pour se venger de ['injustice des hommes, il s'etait mis a la tete d'un parti de mecontents, et mangeait cha- (*) Voy. le Steele des Youert, Jourual asia- tique, cabier de septembre-octobre i85i, p. 253 et 254. I CHINE MODERNE. 461 que jour d ses repas un petit morceau de coeur ou de foie humain Ma- wou etend ses mains sur les epaules de Tchao-hiao, et I'enlraine dans son camp, ou il veut le poignarder. Apres avoir essaye vainement d'attendrir le ohefdes antliropophages , Tchao-hiao, qui etait rempli de piete Oliale, implore eomme uiie grSce la permission d'^o- norer sa mere , une fois encore, avant de mourir, et promet de rentrer au bout d'une heure. Ma-wou hesite. MA-WOD, Qui m'assure que vous reviendrez ? Quel gage me donnerez-vous ? TCHAO-HIAO, Ma paiole. MA-WOU. Cela n'est pas cher. TCHAO-HIAO. Je suis un disciple de Confucius; ma pa- role vaut del'argeut. Cette reponse amene une discussion philosophique sur les cinq vertus car- dinales, et particulierement sur le sens du caractere Sin {smcerite). Le chef des anthropophages est naturellement battu. Pour eprouver Tchao-hiao, il le laisse aller sur sa parole. Rien de plus touchant que la scene oil le jeune homme prend conge de sa mere ; les larmes de celle-ci ne peuvent le retenir et, quand le delai tatal est expire, Tchao-hiao , Gdele a sa pro- messe, retourne au camp des anthro- pophages. II est bientotsuivi de Tchao- li et de madaine Tchao. Une lutte genereuse s'engage entre la mere et ses deux fils. Chacun veut donner sa vie pour les deux autres. Tchao-li , gui avait plus d'embonpoiiit que son frere Tchao-hiao, decouvre sa poitrine, mon- tre sa belle charnure, et tache de se- duire I'anthropophage par I'appat de la gourmandise. A la fin , Ma-wou, lou- che de tant tie vertus, fait grSce a Tchao-hiao, et met en liberte la mere et les enfants. Tel est le sujet de ce drame; il me semble qu'il ne donne tort ni a Marco- Polo, ni aux deux voyageurs arabes dont la relation a ete publiee par M. Rei- naud (*). (*) On Irouve des anthropophages dans le Choui-hou-tchoueu (Hisloire des rives da DBAMES MYTHOLOGIQUES. T'chang, I'Anachorete. La deesse des cannelliers apercoit un jeune homme qui se promene,' a la clarte de la lune, dans un jardin de plaisance. Ce jeune homme est le ba- chelier Tchin-chi-yngy neveu de Tehin, gouverneur de Lo-yang. Sa demarche legere, sa taille, I'agrement de sa phy- sionomie, la delicatesse de ses traits, d'autres avantages encore, font sur le coeur de la deesse une impression pro- fonde. Elle en devient eprise, et quitte le sejour des dieux, pour courir folle- ment au-devant de Chi-yng. Elle est bientot suivie de la deesse des pruniers, de la deesse des chrysanthemes, de la deesse des nenufars, de la deesse des pechers, et d'une foule de divinites su- balternes. Une entrevue a lieu dans le jardin. La deesse des cannelliers, eclip- sant toutes les autres, revetue des for- mes les plus cliarmantes et paree des attraits les plus seduisants, inspire a Chi-yng un amour extreme , desor- donne. Apres le depart de la deesse , le jleuve). « L'hotesse , au comble de la joie , servit la table ; les deux archers, presses par la faim , se mirent a manger ; mais Wou- soug, qui avait ouvert un j)ate et I'exami- nait avec soin, interrogea l'hotesse. « So/tl- ce la, cria-t-il, des pales d' homme ou des pates de chieii ? — Des pales d'homme ! re- pondit celle-ci, rianl aux eclats. Ou trouve- rions-nous done de la chair humaine , pour faire des pates ? Le pays est calme ; on nefa'u pas la guerre a present. » (Choiti-hoti-lc/ioue/i, chap. XXXI.) Le tome deuxieme du San- koue-tclii (^Histoire des trois royaitmes), que M. Theodore Pavie vient de publier, est piein de fails analogues. « Les trois cent mille hommes de Tsao consommaient une grande quantite de vivres; la disette deviut si affreuse dans le pays, que les habitants sc mangeaient les tins les autres. » (Liv. IV, chap. IV, p. 49.) « Un vieillard s'etant avance avec respect , Hiuen-te sut qu'il vi- vait du produit de sa chasse et se nommait Lieou-ngan Ce jour-la le vieillard avait parcouru et battu la plaine sans rien rap- porler ; il tua sa propre femme, pour soula- ger la faim de Hiuen-te! « Quelle est celte chair, demanda Hiuen-te.? — C'est du loup... lui repondit le vieux chasseur, et lis soiipi- rent. » (Liv. IV, chnp. v, p. 74.) •463 L'UNIVERS. malheureux jeune homme iie se pos- sede plus; ses esprits se troiiblent, sa raison s'^gare. Revenu dans son cabi- net d'etude, il s'etend siirson lit; mais le feu de sa passion iui devore les en- trailles. On appelle des niedecins ; ie mal fait des progres. Apres avoir inutile- nient epuise toutes les ressources de Tart, le gouvemeur de Lo-yang, dans son desespoir, invoque pour sou neveu le secours d'un grand anachorete, appele T'chang. Celui-ci arrive; plus habile et surtout plus puissant que les medecins, il gu6rit le jeune malade a I'instant menie. Telle est la matiere des trois premiers actes; le dialogue en est aninie ; la niarche de Paction est suspendue par des incidents qui exci- tent I'iuteret et piquent la curiosite. Un tel drame, s'il finissait la , pour- rait influer sur la morale d'une maniere f^cheuse, et le theatre chinois est une ecole de morale; apres la faute vient done le ch^timent. Le grand anacho- rete, superieur comnie Sien (immortel) aux divinites subaiternes, inflige d'a- bord des peines tres-severes aux dieux du vent, des fleurs, de la neige et de la lune, qui figurent a leur tour dans ce dernier acte et n'y (igurent que pour dresser des embdches sous les pas des jeunes filles, pour les pervertir et les pousser au mal; puis, il adresse un rapport au souverain seigneur du ciel , qui bannit de son palais la deesse des cannelliers et ses quatre complices. La mythologie a fourni le sujet de plusieurs pieces de theatre ; celle-ci n'est peut-^tre pas la meilleure , mais elle est assurement la plus instructive. On y trouve une foule de particulari- tes curieuses sur le polytheisme des Tao-sse (*). Les Metamorphoses. Dans cette piece, ou tout est pro- dige, les morceaux lyriques tiennent naturellement beauco'up de place; le chant, comrae on I'a dit, est le mer- veilleux de la parole. Au premier acte, un vieux saule mSle Spouse un jeune p^cher femelle. Ces etranges personna- gcs se transforment, pour ainsi dire, de (*•) SiicU des YoiUn, Journal asiatique, cahier de (evrier-mars i85i, p. ao8 a aio. I'exceplion v, jguli^re des ^h ent la reine / morphoses, \ scene en scene, et finissent au qua- trieme acte par devenir immortels et semblables aux dieux. Tel est le sujet de ce drame mythologique; il n'a rien d'interessant pour nous, a I'exceplion d'une nomenclature assez reg dieux et des deesses qui servent d'Occident. Quant aux metamorp' elles sont operees par Liu-thong-pin. La Deesse qui pense au moBde. Une jeune deesse, nomm6e Kin- thong-yu-niii, eprouve dans le ciel le besoin d'aimer, pense au monde et se laisse abattre a la melancolie. Pour la punir, la reine de I'Occident , Si-wang- mou, la conilamne a descendre sur la terre et a renaitre dans un corps hu- main. Parvenue a I age nubile, la deesse epouse Kin-ngan-cheou , personnage qui donne son nom a la piece. Au bout d'un certain temps, Si-wang-mou or- donne au religieux Thie-kouaT-li de convertir les deux epoux a la foi des Tao-sse et de les amener dans le ciel ; mais, comme Kin-ngan-cheou et sa femme resistent aux exhortations du religieux, celui-ci, qui a plutot I'air d'un intrigant de profession que d'un immortel , use de tous les moyens, de toutes les espiegleries pour arriver k son but; il joue cent mauvais tours a Kin-ngan-cheou et opere tant de mira- cles, que la femme, effrayee, se conver- tit la premiere ; Ngan-cheou ne tarde pas a I'imiter ; puis tout a coup, par un decret de la reine de I'Occident, les neophytes sont 61ev6s au sejour deS dieux. Le lieu de la scene est d'abord dans le ciel, sur les bords du lac Yao-tchi^ pres du celebre pecher Fan-thao, dont les fruits procurentl'immortalite aceux qui en mangent ; puis, jusqu'a la fin du troisiemeacte. Faction continue sur la terre, dans la maison de Kin-ngan- cheou; enfin, au quatrieme, les acteurs retournent au ciel. La versification est tres-remarquable; c'est I'unique piece du repertoire dans laquelle on trouve un choDur et des danses; quant au drame, il ne merite aucune estime (*). {*) SiecU des Youeii , Journal asiatique , cahier de seplcmbre-octobre i85i, p. ifi et 276. CHINE MODERNE. 463 La Grotte des Pechers. On trouve, dans I'encyciopedie inti- tiilee San-thsai-thou-hoei, la petite legende qui a fourni le sujet de ce drame invtliologique. C'est I'histoire de Lieou-chin et de Youen-tchao. Originaires du district de Thien-lliai, fortement appliques a la sagesse, ils vivent ensemble dans une inalterable amitie ; et , comnie cette amitie n'est fondee que sur la vertu, le dieu qui preside a la constellation Tliai-pe-sing, voulant converser avec eux, descend d;ins le monde et revet une forme liumaine. Au premier acte, le theatre represente le mont Thien- thai. Lieou-chin et Youen-tchao , qui cueillaient sur cette montagne des plan- tes medicinales, s'egarent du chemin et sont surpris par I'obscurite de la nuit. Apres avoir parcouru plusieurs milles, ils rencontrent un vieillard d'un vene- rable aspect. Ce vieillard etait le dieu Thai-pe-sing, sous la figure d'un bu- cheron. Une telle rencontre est pour Lieou-chin et Youen-tchao nn evene- meut des plus heureux; car, guides par le vieillard, ils entrent, sans le savoir, dans la grotte des pechers, ou habite Si-wang-mou, la reined'Occident, c'est- a-dire dans le sejour des deesses. La, ravis du spectacle qui s'offre a leurs yeux, abreuves de nectar, rassasies d'ambroisie, enthousiasmes de la musi-> que des immortelles et des belles voix qu'ils entendent, ils perdent de vue la sagesse et s'abandonnent a la volupte. Lieou-chin, le premier, s'unit a une jeune deesse dont les attraits le subju- guent; Youen-tchao en fait autant. Au bout d'une annee, I'enchantement des plaisirs s'evanouit. Nos deux philoso- phes demandent a retourner dans leur pays natal; on leur en indique le che- min. Mais ce qu'il y a de curieux, c'est qu'ils ne savaient pas combien de jours s'etaient ecoules dans le district de Thien-thai, depuis qu'ils en etaient partis. Arrive a quelques pas de son village natal, Lieou-chin est frappe de stupeur. LIEOU-CHIN, a Youen-tchao. MoH frere, voyez done comme tout est change depuis un an. C'est a n'y rien com- prendre. TfODEN-TCHAO. Je ne reviens pas de ma surprise. (lis con- tinue/it a marcher.) Oh , pour le coup, voila notre vieux temple. LIFOO-CHIN. Oui. ( lis examinent le tempU.) Ou est done ie petit pent? YOUEN-TCHAO, avec etonnement. Mou esprit est confondu. LIEOU-CHIN. Je suis slupefait. N'importe, peuetrous plus avant. — O chose extraordinaire, voici les deux pins que j'ai plantes moi-memc, I'annee derniere, avant de parlir pour le mont Thien-thai. Comme ils sont forts et avances ! YOuiw-TCHAO, souriant. J'avoue qu'ils n'ont pas langui. C'est que, apparemmeut, la terre est plus feconde main- teuant. LiEou-CBiN. (// frappe a la ports de sa maison.) Ouvrez-moi la porte. LiEOU-TE, dans I'interieur. Encore un indiscret et un importun. N'ou- vrez pas. I.IE0U-CBIN, frappant toujours. Lieou-hong ! Lieou-nong ! ouvrez. I.1E0U-TE, se levant el prenant son baton. Decidement , il a envie d'etre battu. {A Lieou-chin.) Quoi ! apres une annee si roalheureuse, quand les anciens du village offrent dans ma maison un sacrifice propi- tiatuire au dieu de I'agriculture, venir ici!... Ah ! vous meritez d'etre chatie pour votie impudence. (J I le frappe.) LIEOU-CHIN. Yotre maison est la mienne ; je suis Lieou- chin ; cet homme , que vous voyez , s'ap- pelle Youen-tchao. Apres un an d'absence nous revenons du mont Thien-thai... LIEOU-TE. Du mont Thien-thai ! oui , je m'en sou- viens, Lieou-hong, mon pere, m'a dit autre- fois que mon aieul Lieou-chin s'en etait alle avec Youen-tchao sur le mont Thien-thai , pour y chercher des plantes medicinales ; mais ils n'en sont jamais revenus ; il y a de cela cent ans au moins. On suppose qu-'ils ont ete devores par les loops. LIEOU-CHIN. Voila une etrauge supposition. (Apart.) Au bout du compte, par oil auraient-ils devine ce qui est encore un mystere pour nous.^ (Haul.) Sacbez done que miraculeu- sement conduits dans la Grotte des pechers, admis a vivre parmi les immortels, nous avons d'abord contracte avec deux jeunes deesses 464 L'UNIVERS. I.KOU-T*. f Ces hou>mcs-la soiit foiis. {Montrant les pins a Lieou-cluH.) lenez, regardez ces deux pins. C'est inoii ^'laiid-pere Lieou-cluii qui les a plantcs. Quel age leur doiinez-vous?... Une explication a lieu entre le graud- pere et le pelit-fils; Lieou-chin raconte en detail a Lieou-te I'aventure du inont Tliien-thai. Tout le quatrienie acta 'se traine d'un bout a I'autre sur un fonds epuise. Au cinquietne, les deux amis quittent pour la secondefois le district, et rencoulrent encore le dieu Thai-pe- sing. Enfin la |)iece se termine par I'apotheose de Lieou-cliin et de Youen- tchao. DRAMES JUDICIAIBES. Le Cr^ancier ennemi. Le sujet de ce drame est un proces que le bouddhiste T'chang-chen-yeou intente aux divinites infernales. De tels proces ne sont pas rares a la Chine ; Duhalde en cite plusieurs. 11 arrive mSnie souvent que les tribunaux pren- nent I'lnitiative. Le prologue nous introduit dans la maison de'X'chang-chen-yeou , origi- naire de Kou-tching. Chen-yeou, con- vert! au bouddhisme , vit honnetement avec sa femme legitime Li-chi, dont il a deux enfants. Chaque jour, il recite les Soiltras (livres sacres) , adore Foe, fait des oeuvres de niisericorde, appro- fondit les niysteres de son culte. Sa pi6t6 lui concilie la faveur du roi des enfers, qui s'incarne sous les traits de Thsoui-tseu-yu et engage Chen-yeou a suivre la profession religieuse ; mais le bouddhiste, loin de ceder aux soUicita- tions de Tseu-yu, refuse de quitter le monde; il aime sa femme, qui est d'une grande beaute ; il aime ses en- fants. et ne se trouve pas en etat de supporter les austerites du monastere. Tseu-yu attend avec patience, Au premier acte, le superieur du cou- vent des Cinq-Tours, voulant reparer I'autel de Foe, ordonne une qu^te dans tous les villages de sa juridiction. Un ho-chang (bonze), charge de rccueillir les offrandes, depose en passant dix laels entre les mains de Chen-yeou , qui les remet a sa femme et sort avec le religieux. La femme s'approprie le depot ; et , quand le ho-chang se prc- sente, avant le retour de Chen-yeou et demande son argent, elle soutient ef- frontement qu'elle a tout rendu. Selon les bouddhistes et les Tao-sse, le vol a cela de propre qu'il abrege les jours de celui qui le commet et entraine ; , les plus grands maiheurs. Les divinites f \ infernales, vaincues par les impreca- ^ tions du religieux depouille (c'est le creancier ennemi ) , indigent a la fa- miile de Chen-yeou le chdtiment qu'elle merite. Au second acte, T'chang-chen- yeou, troQipe par sa femme, fait le partage de ses biens entre ses deux en- fants. Le lils aine se livre a toutes les prodigalites, a toutes les debauches, consomme sa ruine, dissipe le patri- moine de son frere, et meurt. Sa mere Li-chi ne tarde pas a le suivre dans la tombe. En proie au chagrin, justement alarme pour son second fils, qui tombe dangereusement malade, T'chang-chen- yeou met en oeuvre tous les moyens que sa piete lui suggere, afln d'obtenir que la vie de son Qls soit prolongee. II offre un sacrifice dans le temple de Foe, adresse une longue priere au Bodhl- sattva du temple; mais, en depit de toutes les prieres et de tous les sacri- fices, le malade succombe. Irrite de se voir ainsi trompe dans ses esperances, le pere, au desespoir, accuse d'injus- tice les divinites des enfers, et preud le parti de les traduire devant les tri- bunaux. 11 porte plainte devant Thsoui- tseu-yu , devenu gouverneur du dis- trict. Celui-ci, alleguant son impuis- sance, refuse d'instruire le proces; mais dans un songe 11 fait apparaitre a T'chang-chen-yeou sa femme et ses deux fils, qui expliquent clairement comment les divinites apercoivent et notent toutes les mauvaises actions et avec quelle jtistice on souffre en enfer. Apres une telle vision , Chen-yeou se desiste de sa plainte et erabrasse la vie religieuse. Le Plat qui parle. Le Plat qui parle est une piece fon- dee sur une legende populaire ; elle est mediocrement ecrite d'un bout a I'au- tre, et ne se soutient guere que par I'odieux et le ridicule. — Koiie-yong , originaire de Pien-liang, croit aux ho- o CHINE MODERNE. 465 roscopes, coiiime tous les Chinois. Un jour qu'il se trouvait sur la place du marche, il apercoit un astrologue en- vironne de la foule. Curieux de savoir quelque chose de sa destinee, il s'appro- che de I'astroiogue. Celuici , qui etait un tres-habile physionomisle, tenant les yeux fixes sur Koiie-yong, le con- siderc avec la plus grande attention pendant un certain temps, et prononce son horoscope. L'horoscppe n'est pas heureux , tant s'en faut. Epouvante des maux qui I'attendent, et ne pouvant y penser sans horreur, il quitte sa fa- mille, son pays natal, et s'etablit a Lo- yang, ou il aniasse dans les affaires un assez bon nombre de taels. Au bout de quelques annees, se croyant a I'abri de toutes les infortu- nes, il revient avec securite dans son pays, et s'arrete, en passant, a I'auher- ge de la Tuilerie (Oua-yao-iien). C'etait une affreuse taverne, dont le maitre, ancien potier, se nommait Pan. La cassette dans laquelle Koiie-yong avait serre son argent excite la convoitise de I'aubergiste et de sa feninie. lis se jet- tent tous les deux sur le malheureux voyageur, et I'assassinent. Pan brille le corps de sa victime, recueille ses cen- dres, pile ses os, dont il fait d'abord une espece de mortier, puis un plat. C'est ce plat qui , apporte a I'audience de Pao-tching, parle tres-clairement, tres-distinctement, et denonce les cou- pables (*). Le Magot. C'est un drame judiciaire, qui offre une assez grande ressemblance avec le Hoei-lan-ki. Le caractere de la jeune fennne, centre laquelle on eleve une accusation fausse, est irreprehensible et vaut, a bien des egards, celui de Hai-tang, dans I'histoire du Cercle de craie ; mais il s'en faut de beaucoup que le plan de la piece soit aussi bien concu. L'action est languissante , et Ton n'y voit pas une seule idee dramatique. Le cinquieme acte, toutefois, ne me sem- ble pas depourvu d'interfit; c'est le ju- gement de Li-wen-tao. Un petit magot, (*) Siecie des Yoiten , Journal asiatique , cahier de novembre-decembre i85i,p. 523 el 524. 30* Livraison. (Chine moderne.) portant les caracteres du marchand , figure au nombre des pieces de convic- tion ; de la vient le titre du drame. Histoire de la Pantoufle laiss^e en gage. Wang-yue-ying , jeune filie de dix- huit ans, tient avec sa mere une bouti- que de parfumerie , dans une rue de Lo-yang. Ses charmes ont agi sur le coeur d'un etudiant appele Kouo-hoa. Get etudiant, contre I'ordinaire, n'est pas un libertin. Au milieu de toutes les intrigues, de toutes les orgies de la capitale, il conserve une sagesse exera- plaire, et ne montre qu'un amour hon- nete et desinteresse. Il s'en faut de beaucoup que la jeune fjlle soit indifferente ; elle aime Kouo- hoa, qui vient chaque jour dans la bou- tique, sous le pretexte d'y acheter de la parfumerie; mais la presence de la mere est un obstacle a ses projets. Plus impatiente que son amant, Yue-yng prend la resolution extreme de lui adresser une lettre, de lui ouvrir son coeur et de lui proposer un rendez- vous, la nuit, dans le temple de la deesse Kouan-yn. L'intrigue amou- reuse est conduite par une servante, qui porte la lettre et transmet la re- ponse. Une telle proposition enflamme Les desirs de Kouo-hoa. Chose rare a la Chine, I'amant arrive le premier au rendez-vous. Dans les pagodes chi- noises on trouve a peu pres tout ce que Ton veut. En attendant celle qui doit mettre le comble a son bonheur, Kouo-hoa s'assoit a une petite table, pres de I'autel de Kouan-yn; il de- mande a un bonze du vin chaud, boit a plusieurs reprises, passe, sans s'en apercevoir, de I'enivrement de I'amour a un enivrement plus commun, et s'as- soupit. Sur ces entrefaites, la jeune fiUe ar- rive a son tour, accompagnee de la servante, qui porte une lanterne. Trou- vant Koiio-hoa endormi, elle attend avec patience. Pouitant, quand le tam- bour annonce la quatrieme veille, elle se decide a quitter la chapelle ; mais, avant de partir, elle veut laisser a Koiio-hoa un gage de sa tendresse ; elle enveloppe done dans son mouchoir 30 4m L'UNIVERS. parfume une panloufle qu'elle avail brodee elle-nieinc, ct la depose sur le sein de son amant. A son reveil, Koiio-hoa trouve la paiitoufle, I'examine, et reconnalt qu'il a manque I'heure du bergcr. Plain d'bonncur, ne pouvant survivre a sa honte, il cherche a se donner la mort, et, pour y parvenir, emploie un singu- liernioyeu. II avale le inouchoir de sa niaitressc et tombe etouffe. Le reli- gieux charge de rinspection de la ciia- pelie heurte en niarchant un liomme etendu a ses pieds; au mSme instant arrive iedomestiquede I'etudiant, qui, inquiet de ne pas voir revenir son ma!- tre, s'etait acheinine vers la pagode. Une altercation des plus vives s'eleve cntre le domestique et le religieux. Le premier accuse le second d'avoir cora- uiis un nieurtre, prend la pantoufle et court au tribunal. Le grand juge Pao-tcbing avail I'ba- bitude d'ouvrir I'audience des I'aubedu jour. Apres I'expose de la plainte, I'ins- truction du proces connnence. On ecoute le religieux ; mais , par un adroit stratagenie, Pao-tcbing ne tarde pas a decouvrir le mystere. Un em- ploye du tribunal , deguise en porte- laix, se met a parcourir lentement les rues de Lo-yang, avec la pantoufle. Quand il passe devant la boutique de parfumerie oii demeure Wang-yue- ying, celle-ci reclame i'objet qii'elle avail laisse en gage. Amenee bientot a I'audience par le faux portefaix, elle est interrogee par le sage Pao-tcbing. Cette scene est attacbaute et parfaitement ^crile. Conduite par le Tchang-tsien dans la chapelle de Kouan-yin , la jeune fille examine avec beaucoup d'attention le cadavre de son amant, et apercoit dans sa bouche un coin du moucboi'r, qu'elle tire avec vivacity. Koiio-hoa revient aussitot a la vie, adresse quelques mots a sa maitresse et se leve, Yue-ying, ac- compagnee de sou amant, retourne au tribunal, et Pao-tcbing, apres avoir fait une mercuriale a la jeune fille, ordonrie qu'on marie les deux amanls. Si cette piece ne parait pas remar- quable par les ressortsdramatiques que I auteur y fait joucr, elle est du reste fort dfecente. Dans la boutique de par- fumerie, comme dans le temple de Kouan-yin , Tseng-touan-king a su con- Kcrvera la jeune lille, malgre la vehe- mence de sa passion , la delicalesse et le charme de la pudeur (*). LITT^RATURE 9IODER\£. Ecrivains du premier ordrL LES THSAI-TSEU. Qu'est-ce qu'un Thsai-tseu, et que faut-il entendre par ce mot compose, que Ton rencontre si souvent dans les prefaces des ecrivains chinois? M. Stanislas Julien a parfaitpment explique le sens des deux caractcres qui I'expriment: « Le caractere Thsai (pris isolement) designe les talents na- turels de I'liomme, innafx ingenii do- tesy par opposition aux talents qui sont le fruit de I'etude (**). Tseu (lils) est, d'apres le dictionnaire de Khang-hi , une qualification distinguee qu'on em- ploie pour designer un pbilosophe, un pieux personnage ou un personnage ele- ve en dignite; mais Morrison fail ob- server qu'on I'appliqiie souvent aux Ecrivains eminents qui ont traite de la morale, de la philosophic ou de la Utterature {***). Un Thsai-tseu est done un ecrivain distingue, ou plutot, comme I'a dit Klaproth, un bel-esprit. A ce sujet, il y a une remarque que je ne puis m'empecher de faire , c'est que ce mot Thsai-tseu a eu le meme sort dans la langue chinoise que le mot bel-esprit dans noire langue francaise. « II ne se j)renait autrefois, dit'laHarpe, que dansun sens tres-favorable : c'etait le litre le plus honorifique de eeux qui cultivaient les lettres... Aujourd'hui le mot de bel-esprit ne nous presente plus que I'idee d'un merite secondaire. Ce changement a dd s'operer quand le nonibre des ecrivains qui pouvaienl meriter d'etre qualifies de beaux-es- prits est venu a se multiplier davan- (*) SiicU des YouSn, Journal asiatique, cahier de septenibre-octobre i85i, p. a84 a a37. (**) Examen critique, p. 12 r. (***) Simple expose, p. i63. CHINE MODERNE. 467 tage. Alors ce qui appartenait a tant de gens n'a plus paru une distinction assez honorable, et Ton a cherche A'autres termes pour exprimer la siiperiorite. » Ce changement tres-re- niarquable s'est opere dans la langue chinoise. Au conimeuceiiient de la a\- nastie des Ming, vers Tan 1404 de notre ere, on comptait six Thsai-tseu, beaux-esprits ou ecrivains du premier ordre : le phiiosophe Tchouang-tseu, qui vivait quatre siecles avant notre ere ; Khio-youen, poete de la dynastic des Tcheou ; Ssema-thsien ,. le plus ce- lebre des historiens cbinois; le poete Tou-fou , le romancier Chi-naT-ngan, et Wang-chi-fou, ecrivain dramatique. Sous les Thsing, on a d'abord exclu du nombre des Thsai-tseu les quatre premiers ecrivains que je viens de ci- ter ; puis on a mis I'auteur du San- koue-tchi a la place de Tchouang-tseu; I'auteur du Hao-kbieou-tchouen a la place de Khio-youen, et I'auteur du Yu-kiao-li a la place de Ssema-thsien. Est-ce volontairement, systeraatique- ment qu'on a fait redescendre du rang superieur qu'ils occupaient le plus grand phiiosophe de la secte des Tao- sse, le plus grand poete de la dynastie des Tcheou, le plus celebre des'histo- riens chinois, celui qu'on a surnomrae le Prince de Thistoire, et Tou-fou, qui vivait dans le huitieme siecle de notre ere? Je n'affirme rien, mais j'incline a croire que le mot Thsai-tseu a cesse d'etre le titre honorifiquedeces grands hommes, parce qu'il n'a plus paru une distinction assez honorable. C'est dans la litterature que je me suis confine ; je n'ai done point a par- ler de la langue savante, des antiquites, de la chronologic, de I'bistoire, de la geographic, de la medecine, de la ju- risprudence, mais dc la langue com- mune, du conte, de la nouvelle, de la comedie , du drame , du roman de nioeurs, du roraau historique, du ro- man mythologique, de la chronique po- pulaire, du poerae et de tous les ou- vrages d'imagination. II va sans dire aussi que je n'ai point a parler des King ou des livres sacres des Chi- nois, ni de Confucius, ni de Mencius, ni des anciens philosophes. Dans le premier volume de cet ouvrage, et dans le chapitre qu'il a consacre a la philo- sophic, M. G. Pauthier a traite des King et des' philosophes; mais M. Pau- thier et moi nous differons sur plus d'un point, et je dois en avertirlelcc- teur. Toutefois, si, parmi les monu- ments de la langue savante, on en trouve un grand nombre ou I'bistoire de la litterature n'a rieu ou n'a que pen de chose a voir, il existe pourtant des ouvrages que Ton regarde a la Chine corame les chefs-d'oeuvre de I'es- prit. Je presenterai done ici la liste des ancicjis Thsai-tseu ou des ecrivains du premier ordre qui out laisse des chefs- d'oeuvre, sous le double rapport du style et de I'eloquence. Cette liste sera sui- vie de quelques notices biographiques et litteraires. L'ordre que j'ai suivi est, comme on le verra, l'ordre des dynasties ou l'ordre clironologique : LISTE DES AKCfENS THSAI-TSEU. TSO-CHI ou TSO-KHIEOU-MIWG. Tchouang-tseu . Ssema-thsien. TOL-FOU. Ll-THAl-PE. Han-yu. LlEOD-TSONG-YOUEN. ssema-kouakg. Wang-ngan-chi. Ngheod-yang-sieou. Sou-che. Hiu-heng. Od-t"ching. Notices biographiques et litteraires sur les anciens Thsai-tseu. Dynastie des Tcheon. Tso-chi ou Tso-KHiEOU-MiNG, his- torien celebre que Ton regarda long- temps comme le premier des Thsai-tseu, cujus geminum opus, dit Premare, tantopere laudatur ob stylum antiqui- tatis sapore passim conspersum (*) ; Tso-chi vivait sous la dynastie des Tcheou, et occupait une place dans le tribunal de Thistoire. On a de cet au- teur deux ouvrages, dont le premier est intitule Tso-tchouen, et le second Koiie-yu. (•) Voy. Notitia linguae sinics, auctore P. Premare, Malacoe, i83i, p. 189. 30, 469 L'UJNIVERS. Confucius nvait pour oet ('-crivain une tresgrande veneration, el ne fai- sait aucune difficulte de dire publi- quement qu'il u'estimait que ce (fue Tso-chi approuvait. A I'dpoque ou le nhilosophe publia le Tchun-thsieou/Iso- khieou ining examina cet ouvrage his- torique, en parla m^me avec eloge; niais il trouva qu'il y manquait quel- que chose, et resolut de publier dans toute son elendue, et dans le m^me or- dre que Confucius, I'histoire des temps posterieurs a ceux dont parle le Chou- King. II ecrivit done son commentaire du Tchun-thsieou, qu'il intitula Tso- tchouen (*).Le style du Tchun-thsieou est serre, pittoresque, energique, su- blime; c'est,d'apresun missionnaire(**), le chef-d'oeuvre de Confucius. On trouve deja dans le Tso-tchouen I'ele- gance, la clarte, I'harmonie^ je dirai presque les graces du Wen-tchang ; c'est le chef-d'oeuvre de Tso-khieou- ming, car le Koue-yu (Discours poii- tiques) parait inferieur, sous le rap- port du style, au Commentaire histo- rique. On a imprime a la Chine, pour les etudiants, un recueil des plus beaux morceaux des auteurs, dans le genre de nos Excerpta ou de nos Lefons de Utterature et de morale. Ce recueil, parfaitement compose, et intitule Kou- w6n-ping - tchou, renferme tbente- QUATHE morceaux extraits du Tso- tchouen, et NEUF tires du Koue-7ju. TcHOUANG-TSEU , famcux philoso- phe, disciple de Lao-tseu. Son nom d'honneur etait Tseu-hieou. II naquit a Mong, ville du royaume de Song, obtint une petite charge, cultiva la philosophic, et composa le celebre ou- vrage intitule Nan- hoa king. Quand Lao-tseu, qui n'avait rien de cache pour son disciple, lui devoila les plus profonds mysteres du Tao, Tchouang-tseu sentit tout a coup qu'il devenait un autre homme. II abdiqua son emploi, prit conge de Lao-tseu, et se mit a voyager, comme Platon, afin d'augmenter et de perfectionner ses connaissances. Mais, dit une legende, (•) Voy. Mailla, Hist, generalede la Chine, 1. 1", Preface , p. xv. (*•) Le P. Cibot. quclque ardeur qu'il eiit pour I'etude, il ne fut point insensible aux charmes de la volupte : il se maria trois fols successivement. Sa premiere femme lui fut ravic par une mort prematuree; il repudia la secondepour avoir viole la foi conjugale ; la troisieme est rheroine d'un conte ingenieux, qui offre une ressemblance tres- singuliere avec la Matrone d'Rphese de Petrone, et qui a ete traduit par le P. Dentrecolles (*). Tchouang-tseu est I'inventeur de I'a- pologue a la Chine. Dans son histoire de la philosophic chinoise, M. G. Pau- thier a consacre a ce grand ecrivain une notice assez courte, mais substan- tielle, et a traduit quelques passages du Nan-hoa-hing (**). Le Kou-wen-ping- tchou renferme deux morceaux clioisis de Tchouang-tseu ; ils sont accompa- gnes d'un excellent commentaire. Dynastie des Han. SsEMA-THSiEN, le plus cclcbrc des historiens chinois, dit M. Abel Remu- sat, qu'on a surnomnie le Pere de C histoire et Vllerodote de la Chine, etait ne a Long-men, vers Tan 145 avant Jesus-Christ. « Son pere (Ssenia- than), qui voyait en lui un continua- teur de ses propres travaux et un suc- cesseur tout designe pour ses fonctions d'historiographe, lui donna une edu- cation speciale, et dirigea I'attention de Thsien, des sa premiere enfance, vers les objets qui devaient un jour faire I'occupation de sa vie (***)•» M. G. Pauthier a extrait de la biographic de Ssema-thsien quelques details pleins d'inter^t; on les trouve dans le premier volume de cet ouvrage (****). Ce grand hlstorien est 1 auteur du (*) Voy. I'abbe Grosier, Hist, generale de la Chine , redigee d'apres les Memoires de la mission de Peking, t."VlI, p. 342 et suiv. (3* edition). (**) Voy. plus haul , p. 362 et 363. (•**)Voy. Abel Remusat, Nouveaux Me- langes asiatiques, ou Recueil de morceaux de critique et de memoires relalifs aux reli- gions, aux sciences, aux coutunies, a I'his- toire et a la geographic des nations orientates, t. II, p. l52. (****) Voy. Chine, on Description histo- rique, geographique et litteraire de ce vaste empire, par M. G. Pauthier, p. 246 et suiv. CHINE MODERNE. 469 Sse-kl, vaste recueil divis^ en cent trente livres, et contenant cinq cent vingt-six mille cinq cents caracteres. Le Kou-w^n-ping-tchou renferme quinze morceaux choisis de Ssema-thsien. On y remarque une tres-curieuse notice sur la vie et les ouvrages du poete Khio-you^n. Dynastle des Thang. Tou-FOU, surnomme Tseu-mei, I'nn des plus celebres poetes de la Chine, naquit, vers le commencement du liui- tieme siecle, a Siang-yang, dans la pro- vince de Hou-kouang. « Ses ancetres, dit M. Abel Remusat, s'etaient depuis longtemps distingues par leurs talents et par les hautes charges qu'ils avaient occupees, et Tou-chin-yan , son aieul, avait compose des poesies, dont ilnous est reste dix livres. « Tou-iou, des sa jeunesse, annonca d'heureuses dispositions, et toutefois il n'obtiut pas de succes dans ces con- cours litteraires qui ouvrent a la Chine la route des eniplois et de la fortune. Son esprit recalcitrant et tant soit peu inconstant ne put se plier a cette re- gie inflexible que les institutions im- posent a tous les lettres sans excep- tion. II renonca done aux grades et a tous les avantages qu'il eiit pu en es- perer pour son avaucement; etson goilt I'entrainant vers la poesie, il devint poete. Ses vers ne tarderent pas a le faire connaitre, et dans lespace qui s'ecoula entre 7-12 et 755, il donna trois de ces poemes descriptifs qu'on nomme en chinois fou. « Le succes de ces ouvrages lui pro- cura la faveur du souverain, qui voulut lui donner des fonctions a sa cour, ou lui confier I'administration d'une pro- vince. Tou-fou se refusa a ses bien- faits, et n'accepta qu'un titre, honora- ble a la verite, mais tout a fait inutile a sa fortune. A la tin, lasse de I'etat de gene qui le poursuivaitdans son in- fructueuse elevation, il adressa a I'em- pereur une piece de vers ou il peignait sa detresse avec cette liberte que la poesie autorise et qu'elle semble enno- Blir. Sa requete fut favorablement ac- cueillie, et lui valut une pension dont il ne jouit pas longtemps, parce que cette annee meme Teranereur fut con- traint d'abandonner sa capitale a un rebelie. « Tou-fou, fugitifde son cote, tomba entre les mains d'un des chefs des re- voltes ; mais sa qualite de poete, et le de- dain qu'elle inspira aux officiers qui I'a- vaientpris, le servitmieux queieuresti- me n'aurait pu faire; il trouva moyen de s'echapper, et se refugia, en 757, a Fong- thsiang, dans le Chen-si. C'estde cette ville qu'il s'adressa au nouvel empe- reur (Sou-tsong); il n'en fut pas moins bien traite qu'il ne I'avait ete du pre- decesseur de ce prince. Mais, ayant voulu user des prerogatives de la charge qu'on hii avait donnee, et defen- dre avec hardiesse un magistrat qui avait encouru la disgrace du prince, il se viflui-meme eloigne de la cour et relegue, en qualiie de sous-prefet, a Thsin. Comme il vit peu d'apparence a pouvoir s'acquitter des devoirs de cette place, il s'en demit immediate- ment, et se refugia a Tching-tou, dans la province du Sse-tchoueii, ou il vecut dans un tel denument, qu'il fut reduit a ramasser lui-meme les broussailles dont il avait besoin pour se chauffer et preparer ses aliments, « Apres plusieurs annees d'une vie agitee et miserable, il fit, en 761, la connaissance d'un commandant mili- tairedu Sse-tchouen, nomme Yen-wou, qui representa a I'empereur I'etat pre- caire oii se trouvait Tou-fou, errant de bourgade en bourgade dans la pro- vince que lui-meme il administrait. Sur la demande de cet officier, I'empereur accorda a Tou-fou ce qui etait le plus a sa convenance, un titre qui I'attachait au ministere des ouvrages publics, et fournissaita ses besoins,sans lui im- poser de fonctions. Mais le protecteur de Tou-fou etant venu a mourir, et de grands troubles ayant eclate dans la province qu'il habiiait, le poete reprit sa vie errante, et passa successivement a Sin, a Tching-tou et a Kouei. « Vers 768, il eutenvie d'aller visi- ter les Testes d'un edifice antique, dont on attribuait la construction au celebre Yu. S'etant hasarde seul dans une bar- que sur un fleuve deborde, il fut sur- pris par les grandes eaux, et force de cbercher une retraite dans un temple abandonne. II demeura dix jours en- 470 L'UNIVKRS. tiers daus ee refuge, sans qu'il filt pos- sible d'aller le secourir ou lui porter des provisions. A la iia pourtcint, le masislrat du lieu fit faire un radcau qui! inonta Iiii-ineine, et rcussit a tirer Tou-fou de son asile; mais les soinsde ce magistrat devinrent nliis funestes au poete que ne Tavait etc I'abandon ou on Tavait laisse iangiiir; car son estomac, affaibli par une si longue abs- tinence, ne put supporter les aliments qui lui fureiU offerts. Tou-fou mangea beaucoup, but davantage, et mourut d'indigestion pendant la nuit. n II avait compose un grand nombrc dc poesies qui ont ete recueillies avec soiu, et donueesau public pen de tem[)s apres sa mort. Elles font encore au- jourd'hui les deiii^es des gens ect les fragments de ses annates, ou a legende s'encadre dans la tradition; les discours pompeux oii les noms des anciens empereurs sont invoques a I'ap- pui d'un principe. Dans ce pays, tout repose sur la tradition: la politique, la morale, les arts, les sciences subsistent en vertu des lois primitives. _/ ■ « Dans le San-koue-tchi, la doctrine ' I des Tao-sse joue cependant un grand ■ role. Les docteurs de la secte soulevent les populations des les premiers cha- pitres; on les rencontre sans ccsse em- ployant leur pouvoir surnaturel a faire tomber la pluie, a faire souffler le vent. Les elements leur sont soumis en toute occasion... Soil qu'il se laisse entrat- CHINE MODERNE. 477 ner par I'amour du merveilleux, soil qu'il accepte sans y croire, el seule- inent comnie iDoyen poetique, cette intervention des puissances surnalu- relles, I'ecrivain cliinois tient peu a se montrer orthodoxe... « L'auteur avait a fondre I'liistoire dans le roman, a puiser dans les anna- les la realite, dans son imagination la fiction poetique. Le tlieine ainsi po- se a produit un ouvrage qui n'est ni le roman de chevalerie du moyen age en Europe, ni le roman historique de uos jours , ni la chronique serieuse, telle que I'entendaient les Romains, mais qui resume assez bien les ele- ments principaux de ces genres di- vers. Sans jamais tomber, comme Cte- sias, dans la fable ignorante, l'auteur ne s'abstient pas de donner dans le merveilleux, dans les presages a la ma- niere d'lierodote... Les guerres, il faut Tavouer, tiennent trop de place dans le San-koiie-tchi; touteiois, on pent ex- cuser cette surabondance de batailles, en songeant que la guerre est I'expres- sion de I'anarcbie, que les combats fsont les pieces du proces, guand plu- sieurs pretendants se disputant la couronne. « Moins concis que les ouvrages an- ciens, moins diffus que les textes mo- dernes, le San-koiie-tchi represente le style moyen, severe, soutenu, qui con- vient a I'histoire. S'il etait permis de hflsarder une comparaison , on pour- rait dire que l'auteur du San-koiie-tchi ressemble par sa diction aux ecrivains t francais de la premiere moitie du I xvii'^'siecle, en ce sens surtout qu'il in- m dine vers les formes anciennes. II est ■ nourri de la lecture des vieux maitres; ■ les lettres de nos jours Font accepte comme un classique. Son ceuvre a ete lue et relue si souvent, que, les editions vinssent-elles a perir, il vivrait encore dans la memoire des etudiants et du peuple (*). » Je transcrirai maintenant le debut du San-koue-tchi, pour donner au lec- (*) Voy. le San-koiie-lchy , Histoire des trois royaumes , roman historique , traduit sur les textes cliinois et mandchon de la Bi- bliollieque royale, par M. Theodore Pavie, t. P"", p. xr, et suiv. teur une idee du ton general de I'ou- vrage : CHAFITRE PREMIER. Revoke des Bonnets jaunes. (Annee 168 de J. C.) Hiao-luouen-ti, empereur de la dynastie des Han pos- terieurs , etant mort, son fils, Hiao- ling-ti, age seulement de douze ans, monta sur le trone. A cette epoque, le general en cbef des armees, Teou-wou, letuteur du jeune monarque, Tchin-fan, et le general de Tinfanterie , Hou- kouang, remplissaient a la cour les fonc- tions de ministres. Au neuvieme mois, a I'automne, deux ennuques, Tsao-tsie et Wans;-fou , s'etant empares du pou- voir, dirigerent I'empire au gre de leurs caprices. Teou-wou et Tchin-fan fornierent le dessein de faire mourir les favoris ; mais le secret de leur conspi- ration fut decouvert, et ilsperirenteux- m6mes sous les coups de leurs adver- saires ; alors toute I'autorite passa aux mains des ennuques. (Annee 16U de J. C.) Le quinzleme jour du quatrieme mois de la 2^ annee Kien-ning (de la tranquillite etablie), I'empereur ayant assemble les grands dans la saMe d'audience dite Ouen-te (de la vertu sincere), allait s'asseoir sur le trone, lorsqu'a I'angde de Tapparte- ment il s'eleva un grand tourbillon, et on vit un serpent bleu, long de vingt mesures de dix pieds, suivre en rampant le haut de la poutre princi- pale, puis descendre comme s'il edt vole, et se glisser sur le siege impe- rial. Dans sa frayeur, le jeune prince tolnba evanoui ; les officiers places a ses cotes se precipiterent pour lui porter secours ; les manda'rins civils et les man- darins militaires furent si troubles , qu'ils s'entre-choquerent et roulerent pele-mele sur le parquet ; mais le serpent disparut a 1 instant raeme. Peu de temps apres, le tonnerre gronda avec violence; il tomba une grosse pluie mSlee de grele qui ne cessa que vers le milieu de la nuit; dans I'enceinte de la capitale orientale (a Lo-yang) , elle detruisit environ niille maisons. (Annee 171 de J. C) Le deuxieme mois de la quatrieme annee Kien-ning, on ressentit un tremblement de terre «» L'UNIVKRS. dans la province de LoyanR; tons les imirs de la capitale s'rcroulerent. Les eaux de la iner s'etnnt elevees, envahi- rent quatre villas dii littoral, Teng, Lai, Y et Tsi ; cette inondation balaya les habitants et les entralna dans rOcean. L'empereiir discontiniia de donner aux annees de son regne le nom de Kien-ning, et y substitua celui de lli-ping (de la paix qui penetre de tons cotes). Puis, comme il y eut des re- voltes parmi les peoples des irontieres, cinq aiis apres, la denomination de Hi- ping fut reinplacee par celle de Kouang- ho {de la concorde nianifestee). Cette nienie annee-la, les poules chanterent comme des coqs. (Annee 178 de J. C.) La premiere annee Kouang-ho , le premier jour du sixieme mois , un esprit de couleur noire, long de cent pieds, se glissa en volant dans la m^me salle dite Ouen-te. Au septieme mois, un arc-en-ciel parut dans la chambre de l'empereiir; le som- met du niont Ou-youen s'^croula, et des presages sinistres de toute espece se manlfesterent. L'empereur, epou- vante, se hAta de convoquer^ a la porte du palais dite Kin-chang , tons les grands dignitaires, Yang-sse et les au- tres. II les interrogea sur les causes de ces calamit6s, de ces prodiges mena- cants, et sur les moyens de les faire dynaslie. J'expose humblemeiit encore que Kouo-si, Kiao-biuen, Lieou-tchong, que tons ces mandarins pleins de droi- ture, ces vieiilards sincerement ver- tueux, doivent dinger le conseil. Les grands mandarins, conseillers supre- mes, sont les bras et les jambes du souverain ; il ne convient pas de rece- voir les ordres d'hommes meprisabies, de nialtraiter et d'opprimer les bauts dignitaires. « Votre sujet espere que Voire Ma- jeste supportera ces remontrances et mettra un terme a ces abus. Tous les mandarins qui approcbent l'empereur doivent changer de conduite; car si les hommes sortent d'eux-mfimes de la mauvaise vole, les presages et les cala- mites cesseront d'eux-memes aussi Votre sujet espere que vous peserez attentivenient les observations de sa requete, et que vous ferez en sorte que les mandarins pleins de fidelite ne soient pas en butte aux machinations des per- vers. « En entendant cette requSte , l'em- pereur poussa un profond soupir; et comme il se levait pour oter ses habits de cour, I'eunuque Tsao-tsie, qui s'etait tenu dans un appartement retire, epiant I'assembl^e, alia secretement avertir ses collegues de ce qui s'etait dit. L'af- faire se divulgua bien vite, et tous les grands perdircnt la vie (cent des plus de Tempi re cesser. « Yang-sse repondit le premier eminents personnage A son tour, Tsai-yong, membre du conseil imperial , prit la parole et dit : n Apres avoir medite avec la plus profonde attention, votre sujet expose huinblement que tous ces presages an- noncent la fin de la dynastie... L'arc- en-ciel s'abaissant sur la chambre im- p^riale, les poules qui cbantent comme ties coqs, sont autant d'avertissements qui se rapportent a I'intrusiqn des fem- mes dans les affaires de I'Etat. Votre nournce, Tcbao-yao, ale rang deprin- cesse dans I'empire; I'intendant de vo- tre palais, Ho-Yu , est un homme fourbe et artificieux. Reflechissez bien a ces cboses, car assurement elles sont un sujet de cliagrin pour le royaume. Tchang-hao,Wei-tchang,Tchao-hiouen, Kou-cbeng, voila maintenant vos favo- ns; rdflediissez que ces hommes sans merite peuvent causer la perte de la et sept cents mandarins fureiit mis a mort). Cependant un eunuque, nomine Liu-kiang, qui aimnit Tsai-vong a cause de ses talents, obtint sa gr'Sce de l'em- pereur et lui sauva la vie. <• La cour etait alorslivree aux intri- gues de dix eunuques ; tous les emplois, toutes les faveurs se dislribuaient aux creatures de ces dix courtisans ; l'empe- reur, subjiigue, voyait en cux les mai- tres dont il devait suivre les couseiis. Aussi, jouissant d'un libre arces pres du monaruue, ils ne redoutaient per- sonne, et laisaient de leurs h6tels par- ticiiliers autant de petites cours. « (Annee 184 de J. C.) Ling-ti venait de changer une fois encore le nom des annees de son r^gne; on entrait dans un cycle nouveau : ce fut alors que f)arurent dans la petite ville de Kiu- ou trois freres, Tchang-kio, Tchang- CHINE MODERNK. 479 I Jiang et Tchang-pao. L'aine n'avaitfait aucune etude, niais, un jour (dit la legeude) qii'il cueillait des plantes nie- diciiiales sur la montogne, il rencontra un vieillard aux yeux brillants, a la che- velure flottante comme celle d'un jeune homme, appuye sur un baton fait d'une tige de la plante Li, qui, I'ayant invite a entrer dans une caverne, lui presenta les trois volumes d'un ouvrage de la secte des Tao-sse, dont le litre etait : Recettes magiques et talismans pour arriver a la grande quietude. Puis il dit a Tchang-kio : « Appliquez-voiis a I'etude de la doctrine de Lao-tseu, et recevez du ciel la mission de convertir les hommes ; sauvez par loute la terre la generation presente; les desirs multi- plies et desordonnes du coeur sent la source positive detoutes les afflictions. » Apres s'etre fait connuitre sous le nom de rimmortel du Nan-hoa (Tchouang- tseu), il disparut, eniporte par le tour- billon leger d'une brise adoucie. Muni du livre mysterieux , Tchang-kio I'etu- dia si bien jour et nuit, que bientot il put commander aux vents et a la pluie; il prit alors le nom du Tao-sse de la grande quietude. (Annee 184 de J. C) Dans les pre- miers jours de cette mdme annee, une epidemic terrible etendit ses ravages par tout I'empire. A I'aide d'une eau sur laquelle il repetait des paroles ma- giques, Tchang I'illumine guerissait les malades ; ses prodiges le firent suruom- mer le tres-saint docteur. Tons les affliges , il les appelait pres de lui, et apres qu'ils lui avaient avoue leurs fautes, illes ramenaitau repentir et les convertissait a la vertu. Bientot ii compta cinq cents disciples , et leur nombre augmenta d'une maniere ex- traordinaire, car il parcourait I'empire a la maniere des ascetes, en guerissant sur son chemin. Alors Tchang etablit ses adeptes dans trente-six endroits 'lifferents; kurs plus grandes reunions Maient de dix mille, les plus petites de six il sept mille; et dans chacune de ces ecoles il y avail des maitres qui se- maient, a rinstigation de Tchang, cette prophetic mensongere : « Le ciel gris est mort; le ciel jaune va paraiire ; la dynastie des Han s'eteint, une autre va la remplacerj le nouveau cvcle sera pour le monde une ere de bonheur. » « Tchang ordonna mSme au peuple de tracer sur les portes des maisons avec de la craie les deux mots Kia-tseu (qui expriment la premiere division du cycle), et bientot ils furent ecrits dans les marches des villes grandes et petites, sur les portes des tribunaux des dis- tricts, et sur celles des temples et des monasteres de la secte des Tao-sse. La population' entiere de huit districts le saluait du litre de tres-saint docteur qu'il s'arrogeait lui-menie. a Desireux de se faire des partisans jusqu'a la cour, Tchang-kio chercha a gaguer I'amilie de I'eunuque Fong-siu au moyen de magnifiques presents en argent et etoffes precieuses qu'il lui envoya par Ma-youen-y, I'un de ses principaux adeptes. Cela fait, ildelibera avec ses deux freres : « Le plus diffi- cile, c'esl d'avoir pour soi I'affection du peuple, disait-il; desormais, le peu- ple est pour moi : si je ne profile pas d'une si belle occasion pour m'empa- rer du trone j'aurai eternellement lieu de m'en repentir ! — Nous avons aussi la meme pensee, repondil Liang! >> Et aussilot ils firent une banniere aux couleurs imperiales, et fixerent aux cinq premiers jours du troisieme mois le soulevement general de tons les illu- mines. Mais un disciple du nom de Tang-cheou , charge de remetlre une lettre a I'eunuque complice, etait alle tout denoncerau tribunal deTempereur; le premier emissaire eut la tete tran- chee, et Fong-siu fut jete en prison. « Deja le general en chef Ho-tsin avail recu I'ordre de rassembler les troupes; de'son cote, Tchang-kio se voyant de- couvert leva reteudard de la revoke. Les trois freres eurent chacun un corps d'armee; Tchang-kio prit le litre de general du ciel, Liang, celui de general de la terre, et Pao, celui de general des homines. « Le temps accorde par le ciel a la dynastie des Han louche a sa fin, disait Tchang-kio au peuple souleve ; le grand saint a paru, obeissez lous a la volonte divine, et suivez la vraie doctritve pour Jouir des bienfaits de la grande quie- tude! » De toutes parts, la foule coiffee de bonnets jaunes se pressait sur ses oas et se revoltait a sa voix. Au nom- 480 L'UNIVERS, bre tie quatre a cin<| cent inille, les illu- mines traversaient districts et provin- ces en niettant tout a feu et a sans? ; devant ce fleau les magistrats quit- taient leurs postes et fuyaient de bien loin ; niais le general en chef, Ho-tsin, insistait aupres de Tenipereur pour que Sa Majeste envoyflt rapideinent I'ordre de se tenir sur tous les points pret a la defense, alin de pouvoir remporter la victoire sur les rebelles. Deja il avait dep^che Lou-tchi, Hoang-fou-song et Tchu-tsiouen, commandants militaires, qui marcbaient avec trois divisions de bonnes troupes. « Ccpendant le premier corps d'armee des rebelles , celui que commandait Tchang-kio en personne, avait penetre dans le district de Yen ; un des com- mandants subalternes du canton, nom- me Tseou-tsing, alia trouver Yeou- yen, general de la province. Get oflicier, originaire de King-ling dans le Kiang- hia, surnomme Kun-laDg, descendait d'un ancien roi de Han (Lou-kong- wang), aieul de la famille regnante. Les deux chefs delib^rerent ; I'ennemi approche, comment faire pour le re- pousser? — « tcoutez, dit Tseou, un ordre de Sa Majeste enjoint de detruire partout les rebelles ; pourquoi I'illus- tre general n'appellerait-il pas sous les drapeaux ceux qui peuvent servir la cause imperiale?" Get avis pluta Lieou; une proclamation fut immediatement aflichee dans tout le canton ; elle invi- tait les soldats fldeles a preter aux com- mandants le secours de leurs bras. « Distribuee aussi dans le petit vil- lage de Leou-sang (district de Tcho- hien), cette proclamation en tit sortir un homtne heroique , Lieou-pei ( sur- nomme Hiuen-te). Fort peu epris de I'etude des livres, mais passionne pour la chasse et les exercices du cheval , pleinde goQtpourla musique, aimant les beaux vStements, parlant peu, poli envers tout le monde, ne manifestant jamais ni folle joie ni noir chagrin, recherchant raffection des gens de bien , doue d'une haute portee d'esprit, Lieou-pei joignait h ces qualites mo- rales uue stature gigantesque , des pro- portions athletiques, un exterieur sin- guUerement remarquable. II etait ar- ricre-pelit-QIs, a la ueuvieme genera- tion , de Tempereur King-ti , de la dynastie regnante. Ayant perdu fort jeune son pere, qui occupait une petite magistrature, sa merelui restait, a la- quelle il temoignoit le respect filial prescrit par la loi ancienne. Desor- mais pauvre, Hiuen-te gagnait sa vie a vendre des souliers, a confectionner des nattes. » Nous omettrons divers pronostics qui, des son enfance, (irent pressentir en lui un homiue appele a de hautes destinees. A I'epoque ou nous le voyons paraitre, il avait vingt-huit ans. Cette proclamation, il la lut, soupira, et prit la route de sa maison ; mais derriere lui il entendit une voix qui disait : « O jeune homme ! si vous ne voulez pas employer vos forces au salut de I'em- pire, pourquoi soupirer ainsi ? » Hiuen- te se detourne , regarde, et voit un homme athletique aussi , terrible dans tous ses traits, si extraordinaire , qu'il le suivit. Get inconnu avait la t«5te du leopard , les yeux ronds, le front de I'hi- rondelle, la barbe du tigre, la force du cheval lance au galop; il rentre avec lui dans le village, et il sait bientot que son nom est Tchang-fei , son surnom Y-te; ancien habitant du pays, culti- vateur, marchand de vin et bbucher, il aimait a se lier avec les gens robustes com me lui. « Pourquoi soupiriez-vous devant cette pancarte.3 demanda-t-il a HiuCn- te. — Helas ! repondit celui-ci , je des- cends de la famille imperiale (et il de- clina ses noms), j'apprends la revolte des Bonnets jaunes, leurs brigandages ; les balayer de la surface de la terre se- raitmon plus grand desir; je raffermi- rais ainsi la dynastie chancelante. Mais, seul, que puis-je faire? rien, et je sou- pire. — Unissons-nous, dit le paysan; j'ai mes garcons de ferme, et avec eux nous pouvons faire quelque chose. Qu'en dites vous? « Enchante de I'idee, Hiuen-ie etait(c eutre dans une taverne avec son nouveh* ami , lorsqu'il apercut a la porte un homme de haute tallle qui descendait d'un petit chariot : « Garcon, dit Tetran- ger en s'asseyant sur uri banc de bois de mdrier, vite a boire ; je vais aller me joindre aux troupes du district, et je n'al que le temps, CHINE MODERNE. 481 « Iliuen-te regardait cet homme fort grand , remarquable par sa barbe lon- gue de pr^s de deux pieds, par son visage rouge comma le bois du jujubier, par ses levres eolorees comme le vermil- ion, par ses yeux semblables a ceux du phenix, par ses sourcils pareils a ceux du ver a sole endormi. Sa physiono- mie etait extraordinaire, son aspect terrible. II s'assied a ses cotes, et ap- prend de lui que son uom est Kouan- yu, son surnom Tcbang-seng ; mais ii I'avait change en celui de Yun-tchang. Kouan-yu etait ne fort loin de la , a Kiai-liang , a Test du fleuve Jaune ; niais conime il avait tue dans son pays un homme violent qui tyrannisait ses voisins, il se trouvait reduit a niener depuis cinq ou six ans une vie errante. Ce jour-la, ayant eu connaissance de I'avis qui appelait aux amies les hommes de bonne volonte, pour detruire les Bonnets jaunes, il voulait y repondre. « Hiuen-te se bata de lui decouvrir ses propres desseins ; et tous les trois, pleins de joie, ils allerent de compagnie a la ferme de Tcbang-fei. La , ils cau- serent des affaires de I'empire. Les deux nouveaux venus saluerent Hiuen- te du titre de frere aine (ils etaient plus jeunes que lui), puis Fei fit cette proposition : « Derriere ma ferme il y a un petit jardin de pechers, les fleurs sont epanouies; allons-y demain immo- ler au ciel un cbeval blanc, a la terra un boeuf noir, et jurons de rester comme trois freres, unis a la vie et la mort ! Qu'en dites-vous? » « Ce projet plut beaucoup aux trois nouveaux amis ; le sacrifice fut offert ainsi qu'iis en etaient convenus ; ils par- tagerent des monnaies d'or et d'argent, immolerent un boeuf noir et un cheval blanc , deposerent les morceaux des victimes sur la terre; puis, apres avoir brdle des parfums et s'etre prosternes deux fois, ils firent le serment d'etre freres, de se soutenir mutuellement, de se secourir dans le peril , de defendre I'empire et de proteger le peuple ; quoi- qu'ils ne fussent nes ni la nieme annee, ni le m^me jour, ni a la meme heure, ils devaient mourir au meme instant. Le ciel, roi des immortels, la terre, reine des esprits, avaient lu dans leurs coeurs ; celui qui trahirait son serment 3r Lwraison. (Chine moderne.) et la bonne cause s'engageait a perir sous les coups de la vengeance divine et humaine. « Apres ce serment, Hiuen-te fut sa- lue I'aine ; Kouan-yu et Tcbang-fei, se- lon leur ^ge, devenaient I'un le cadet, I'autre le plus jeune des trois freres. Ces ceremonies et ces politesses ache- vees, ils allerent ensemble (fideles au respect que Ton doit a la vieillesse) faire une visite a la mere de Hiuen-te. « Cependant trois cents jeunes gens de la contree s'etaient joints a eux ; ils recurent dans ce meme jardin des pe- chers une distribution de vin. Le len- demain on trouva de quoi s'armer ; mais les chevaux manquaient. Au milieu de cette perplexite, on vint annoncer que deux etrangers escortes de dix servi- teurs arrivaient a la ferme, conduisant avec eux une belle troupe de chevaux. « Le ciel vient a notre aide, s'ecria Hiuen-te, accomplissons done de gran- des choses ! » C'etaient des marchands de Tchong-chan que la revolte des Bon- nets jaunes forcait a reprendre le che- min de leur pays, sans avoir pu aller dans le nord vendre leurs chevaux. Hiuen-te les pria d'entrer dans la ferme, les traita fort bien, et leur fit part de la resolution, prise eu commun, de repous- ser la rebellion pour secourir la dynas- tic menacee et d'arracher le peuple a tant de miseres. « Enchantes de cette resolution , les deux marchands donnerent a Hiuen-te cinquante chevaux de choix, une grosse somme d'argent et une grande quantite d'acier. Celui-ci , avec le secours d'ou- vriers habiles, fit confectionner pour lui un sabre a deux tranchants, un cime- terre recourb^ en forme de faux pour Kouan, et pour Fei une lourde lance. Chacun d'eux completa son armure par un casque et une cuirasse. Ces prepara- tifs acheves, ils allerent a la tete de cinq cents jeunes volontaires trouver I'offi- cier Tseou-tsing, qui les conduisit pres de Lieou-yen, Te commandant du dis- trict. Celui-ci les accueillit avec trans- port, quand il sut et leurs noms et ce qui les amenait vers lui. « Voila un des- cendant des Han, s'ecria-t-il en euten- dant le noni de Lieou (c'etait celui de la famille regnante que portait Hiuen) ; s'il a le mbindre merite, il devra etre 31 48: L'UiNIVKRS. appele a des eniplois lionorables ! » Apres avoir reconmi que Hiuen-te et luj descondaientdedeux branches d'une inline famille, il disposa ses cavaliers eii boil ordre. « A ce moment, des ^claireurs vin- rent annoncer qu'un corps de cinquante mille Bonnets jaunes, ayant a leur tete Tc'hing-yoiien-tchi (disciple et lieute- nant de Tchang-kio), s'approchait de la ville de Tcho-tcbeou. Le commandant de la garnison rassembla vite scs clie- vaux et son iiifanterie ; Tseou-tsing eut ordre de se porter en avant pour enga- ger le combat, et lestrois chefs de vo- lontaires, ivres de joie, s'elancerent a cheval (*). » HAO-KHIEOU-TCHOUEN, Ouvrage du deuxi^me Thsai-tseu. Cet ouvrage, originairement traduit du chinois en portugais parun inconnu et du portugais en anglais par le doc- teur Hugues Percy, eveqiie de Dro- more, I'a ete de cette derniere iangue ^n francais par Eydous , qui a fait imprimcr sa traduction a Lyon , en 1766. Les editeurs de la Bibliotheque des romans en ont donne un long ex- trait dans leur collection (**). En 1829, un habile sinologue, aux travaux duquel nous avons rendu plusieurs fois hom- niage, M. John-Francis Davis, agent superieur de la compagnie anglaise des Indes orientales a Canton, retraduisit sur le texte original , le Haokhieou- tchouen, qu'il intitula : The fortunate union. Enlln M. Guillard d'Arcy, mem- bre de la Societe asiatique, publia a Paris, en 1842, une traduction fran- ^aise de ce roman, qu'il intiiula plus exactenient la Femme accomptie, car les mots chinois hao-khieou contien- tienncnt une allusion a un vers du Chi'king. Le Hao-kbieou-tchouen est un recit dramatiqiie, oii I'interet croit de scene en scene jusqu'audenodment. L'auteur inconnu de cet ouvrage I'emporte sur (*) Voy. San-koue-tcby, romau htitoriqiie, traduit par Theodore Pavie, 1. 1", p. i a 12. (**) Voy. ravaiii-piopos du San-yu-leou, a la suite de la comedie intitulee : Laoseng- m, par A, pruguiere de Sorsum, p. 144. tous les Thsai-tseu par l;i siniplicltedu plan , I'observation exacle des carac- teres, par la clarte, la naivety du style, par le naturel et la verite. II y a dans le Ilao-khieou-tcbouen d'admirabies morceaux en prose, des phrases habi- lement construites, un dialogue seme d'heureux traits. Mais, ce qui fait le vif interet de ce roman de mocurs, c'est qu'on y apprend sur la plvs grave des affaires serieuses a la Chine, sur le iiiariage, une foule de choses qui ne se trouvent que la ou dans des ro- mans du meme gerire ; (outefois, comme je n'offrirai au lecteur qu'une analyse du Haorkhieou-tchouen, il ne me parait pas inutile de consacrer un article spe- cial a.u mariage des Chinois et aux ce- remonies qui I'accompagnent. Ceremonies du mariage, " Les femmes de la Chine, disenl les mis- sioniiaires (car, (|iiand on parle des moeurs et des coutiimes de la Chine, on reiiconire toujours devant soi les niissionnaires), soiit a peu pres coiidamnees a ne voir jamais le jourhors de chez elles. Un Chinois se niarie sans avoir oieuie aper^u celle. qu'il epouse. II ne se forme une image de ses Iraits, de sa taille, de son caractere, que sur le rapport d'une entremetteuse (*), d'une parente ou de quelque autre femme qui , en pareil cas , fait I'office d'une enlremetleuse. II est vrai que si on lui en impose, ou sur I'^ige , ou sur la figure, il est en droitvde faire declarer le mariage nul. Ici la loi vient , a son tour, corriger les abus de I'usage. « Les entremetteuses qui negocient un mariage conviennent aussi de la sommc que donnera le futur aux parents de I'epouse; car, a la Chine, ce n'est pas le pere qui dole sa fille, c'est le mari qui dote sa femme, dolem non uxor marito , sed marilus uxori affert , ou , pour mieux dire, il I'achele; eile devient sa propriete a double litre. Cepcn- dant , il arrive que le beau-pere propose a son gendre de venir hahiter dans sa maison, et le constitue en meme temps hi'rilier d'une . parlie de ses biens ; mais il ne pent se dis- ^ penscr de leguer I'aulre partie a quelqu'uu de sa famille et de son nom. « Les peres et les meres , et a leur dcfaut , les aieux ou aieules, ou enfin les plus pro- ches parents du cote paleniel, et ensuile ceux du rote maleruel, jouissent d'une au- (*) A la Chine , les fonctions des cnlremet- tciises sont fori honorees. CHINE MODERNE. 483 torite absolue pour rcgler les manages des ent'ants. Ceux-ci ne peuvent se soustraire a I'autorile patenielle que dans deux cas : 1° s'ils se niarient avec une etrangere, par exemple, avec une juive ou une maliome- taiie. Comnie la maniere de vivre des elrau- gers est tres-differenle de ceile des Cliinois, il est juste, dit la loi, que celui qui conlracte une semblahle alliance jouisse d'une entiere liberte. a" Si un jeune homme, dans le cours d'un voyage, se marie dans une province eloi- gnee, sans connaitre les engagements que ses parents peuvent avoir pris en son absence, son mariage est valide, et il n'est pas oblige de se conformeraux premieres vues de son pere. Si cepeudant il u'y avait encore que des promesses reciproques, le jeune homme est tenu de rompre ses engagements et de recevoir la femme que ses parents lui des- tinent. « Rien n'est plus ordinaire, parmi les Cbi- nois riches et d'un rang distingue, que d'ar- reter les articles d'un mariage, longtemps avant que les parties soient en age de le conlracter ; souvent meme on en convient avant que les futurs epoux soient nes. Deux amis se promeltent tres-serieusement et avec solennite d'unir par le mariage les enfants qui naitront d'eux , s'ils sonl d'un sexe dif- ferent; et la ceremonie qui sanctionne celle promesse consiste a dechirer, I'un et I'autre, leur tunique et a s'en donner reciproque- ment une partie. « Le mariage est precede d'une negociation appelee Ping , laquelle est conduite par des entremelteuses ou par des amis. C'cst alors qu'on invoque le secours de I'astrologie et que Ton tire les horoscopes des deux futurs- epoux ( pa-tseu ) , c'esl-a-dire des huit ca- racteres. II y a deux caractercs pour I'annee, deux pour le mois, deux pour le jour et deux pour I'heure de la naissance. On cher- che des presages divers dans la combinaison (le ces caracteres, et le premier soin des pa- rents qui veulent marier lenrs enfants est d'echanger leurs huit caracteres (pa-tseu) et de les comparer pour voir si , d'apres les regies de I'astrologie , elles annoncenl une parfaile compalibilite d'humeurs et de des- tinees(*). On considere le printemps comma Tepoque la plus convenable et la plus heu- reuse pour le mariage, et Ton prefere sur- tout la premiere luue de I'annee chinoise, (I'esi dans ce mois que le pecher fleurit a la Chine ; de la , les frequentes allusions {*) Toy. le Yu-kiao-li ou les Deux Cou- sines,roman cbinois, traduit par M. Abel Remusat, t. l", p. i35, a la note. faites a cet arbre, en parlaiit du mariage. « Lorsque les deux families onl passe le contrat, et que les arrhes ont ete donnees, ce qui forme proprement les iiancailles, ce sont les parents de la fille qui lixent le jour de la celebration du mariage. Us ont soin de consulter le calendrier pour choisir un jour heureux; car ils ea admeltent de deux es- peces, de bons et de sinistres. Durant cet intervalle , les deux families se font des mes- sages et des presents reciproques. Le fulur en- voie a celle qu'il doit epouser quelques bijoux, comme des bagues, des pendanls d'oreilles , des aiguilles de tete, etc. Ou s'ecrit des deux parls , mais on ue se voit point encore : les cadeaux et les billets doux sonl transmis par des mains tierces. « Pendant les trois nuits qui precedent le jour destine aux uoces, on illumine tout I'interieur de la maison de I'epouse, moins en signe de joie que de tristesse : ou veut faire entendre qu'il n'est pas permis aux pa- rents de dormir dans le temps oil ils soot sur le point de perdre leur lille. On s'abstient de meme, dans la maison de I'epoux, d'y faire entendre aucun iustrument de musique, et une egale tristesse semble y regner, j)arce que le mariage du fils est cense devoir etre regarde comme une image de la mort du pere , et que le fils alors semble en quelque sorte lui succeder. « Au jour fixe pour la celebration du ma- riage, I'epoux, richement vetu, se rend a la maison de sa fiancee, et s'y prosterne devant son beau-pere et sa belle-mere, les oneles et les proches parents de sa future epouse. Les derniers adieux de celle-ci a tous ses parents sont aussi des prosteraations , au moment ou elle se dispose a quitter la maison paternelle. Quelques missionnaires placent ici la pre- miere entrevue de I'epoux et de I'epouse, d'autres la reculent jusqu'a I'arrivee de celle- ci a la maison de son mari : peut-etre cette circonstauce varie-t-elle selon I'etat des per- sounes et le different ceremonial des nia- riages. « Ces formalites preliminaires remplies , ou place la fiancee dans une chaise ou dans un palanquin ferme. Tout ce qui lui appar- tient, el les divers effels qui composent son trousseau, I'accompagnent , portes par diffe- renles personnes des deux sexes; d'autres I'entourent avec des torches et des lanternes, meme en pleiu midi , usage qu'on a conser- ve, parce qu'autrefois tous les manages se celebraient pendant la unit. Une troupe de musiciens la precede, et sa famille la suit. La clef qui la renfcrme dans sa chaise est entre les mains d'un domestique de confiance : il 31. 484 L'UNIVERS. Hc doit la remellre qu'aii inari. Celui-ci , apres I'avoir a«;oin|>agn6e qiielque temps a cheval on dans un palanquin , prend les de- cants , et court atlendre a sa porle Tariiv^e du cortege. On liii lemet cette clef; il ouvre avec empressement la chaise, el du premier coup d'oMl il apprecie sa chance et voit si on I'a Lienou malservi. Il arrive quelquefois que I'e- poux mecontent referme suhitement la chaise et renvoie la fiancee chez elle. II suffit qu'il consenle a nerdre, pour s'en debarrasser, la somme nu'il a donnee pour robtenir. « Si I'epouse est agreee, elle descend de sa chaise et enlre avec I'epoux, suivis, I'un et I'aulre, de leurs parents , dans une salle oil le couple nouvellement uni salue quatre fois le thien (ciel), et ensuite les parents de I'epoux. Aussitot apres, les nouveaux maries se rendent au lieu oil Ton a prepare, pour eux seals, le repas nuptial. Avant de s'as- seoir, I'epouse fait quatre genuflexions de- van t son mari, et celui-ci a son tour en fait deux devant elle ; ensuite ils se mettent a table, mais avant de manger, ils repandent un peu de vin en forme de libation, et met- tent a part quelques viandes pour 6tre offertes anx esprits. Lorsqu'ils ont un peu mange, en gardaut un prufond silence, I'epoux se leve, invite SOD epouse a boire et se remet incon- tineut a table : I'epouse pratique aussitot la meme ceremonie a I'egard de son mari. Alors on apporte deux coupes pleines de viu : ils en boiveut une parlie , et melent dans une seule coupe ce qui resle, qu'ils se partagent ensuite et achevent de boire. «« Pendant ce temps, le pere de I'epoux , dans un appartement voisin, donne un grand repas a ses parents et aux personnes invi- tees : la mere en donne un autre a ses pa- renles et aux femmes des amis de son mari. Cet usage s'observe dans tous les festins chi- nois : les femmes s'amusent entre elles et les bommes se reunissent de leur cote (*). » Analyse du Hao-khieou-tchouen. Thie-tchong-yu est un jeune bache- lier, dont la famille habite une ville situee a deux cent cinquante milles de la capkale. Ses traits ont cette delica- tesse qu'on adraire chez les personnes de I'autre sexe, et de la lui est venu le surnom de Thie-mei-jin (Tliie, la belle tiUe), par lequel on le designe en plai- santant. II aims avec ardeur la vertu, (*) Description generate de la Chine, rc- digee d'apres les Memoires de la mission de Peking, par I'abbc Crosier, t. V, p. 271 a 377. mais i! est d'un caractere bouillant, emporte, et se laisse entrainer, en quel- que sorte nialgre lui, a des actes d une violence extreme. II a pourtant une excellente quality : si un homme vrai- ment malheureux s'adresse a lui , sans s'iuformer s'il est riclie ou pauvre, no- ble ou du peuple, il vient a son secours. Thie, son pere, est un inspecteur gene- ral, devenu celebre par la hardiessedes remontrances qu'en plus d'uue occa- sion il n'a pas craint d'adresser a I'em- pereur: connaissant le caractere impe- tueux de son Ills, il ne permet pas qu'il reside a Pe-king. Lorsque Thie-tchong-yu eut atteint I'age de seize ans, son pere et sa mere voiilurent le raarier. « Le mariage n'est guere du godt de votre fils, leur dit-il; il n'en est pas d'une epouse comme d'un ami. Entre amis, tant qu'on se convient, on reste unis; cesset-on de se couvenir, on se separe ; mais le ma- riage dure autant que la vie. » II alle- gua encore d'aulres raisons , et les pa- rents n'insisterent pas davantage. Le jeune homme continua done de se livrer a I'etude jusqu'a I'Sge de vingt ans. Un jour qu'il lisait, retire dans son appartement, il toniba sur les re- presentations que Pi-kan adressa a son souverain, representation que ce minis- tre celebre paya de la vie. En reflechis- sant sur cet evenement , I'idee lui vint a I'esprit qu'une fin aussi tragique attendait peut-etre son pere, et dans son inquietude, il resolut de partir pour la capitate. Dans un village ou il s'etait arrete pour y passer la nuit, il entend racon- ter I'histoire d'un jeune etudiant, au- quel un grand seigneur, nomme Ta- Kouai, avait enleve la fiancee. II prend aussitot parti pour le jeune etudiant, qu'il rencontre a quelques pas du vil- lage, et se charge de remellre un me- moire a I'empereur. En arrivant a Pe-king, tous les pres- sentiments de Thie-tchong-yu s'accora- plissent. Le zele, avec lequel I'inspec- teur general Thie-yng avait defendu la cause du jeune etudiant avait d«plu h I'empereur. D'accuse qu'il 6tait, Ta- kouai ^tait devenu accusateur et avait rejete sur Tiuspecteur general I'accusa- tion d'avoir abuse de sa charge pour CHINE MODERNE. 465 tromper le prince. Les membres du tribunal des peines, gagnes par les pre- sents de Ta-kouai, s'etaient prononces ea sa faveur et avaient demande la condanination de Thie-yng. Cependant Thie-tchong-yu s'ache- niiiie vers une prison ; il y est recu avec les plus grands egards par le gouver- neur, et introduit dans une petite cham- bre obscure, ou son pere etait assis, dans une attitude noble et calnie. Le jeune homme s'avance tristement et s'iucline quatre fois jusqu'a terre. Thie- yng tressaille asa vue; il se ieve, etdit d'un ton severe : « Je suis ici pour avoir renipli fidelement mon devoir et pris la defense des lois de I'empire. » Thie-tchong-yu, tiront alors de sa n^anche le placet de Tetudiant, le pre- seiite a I'inspecteur; le vieillard, apres Tavoir lu, est transporte de joie, car ce memoire exposait clairement les fails et ne laissait rien a desirer. L'empereur.auquelonfait parvenirce document, rend sa faveur a I'inspecteur general Thie-yng, et lui transmet, selon sa demande, I'ordre secret d'arreterTa- kouai. Thie-tchong-yu s'arme d'une masse de cuivre, penetre dans la somp- tueuse demeure du coupable, le saisit vi- goureusement apres une lutte assez longue, et met en liberte la fiancee de I'etudiant. Thie-yng reprend alors ses fonctions; I'empereur punit Ta-kouai, et vante le courage du jeune homme, qui a su mener a bien toute cette affaire ; mais Thi(3-yng, redoutant pour son fils renivrement des eloges, en conqoit de I'inquietude : « Le ciel n'aime pas les ' orgueilleux, lui dit-il; sous pretextede voyager pour votre instruction , fuyez dans un pays lointain.)) Thie-tchong-yu obeit aux ordres de son pere. Dans un district de la province du Chan-tong est la residence d'un mem- bre du tribunal militaire de Pe-king. Son nom de famille est Choui , son sur- nom Kiu-y. A I'age d'environ soixante ans, il avait eu la douleur de perdre sa femme, qui ne lui avait laisse qu'une fille d'une incomparable beaute, nom- mee Ping-sin. C'est a elle qu'il confie la conduite de sa maison et la direc- tion de ses affaires, quand les devoirs de sa charge I'appellent a la cour. Choui -kiu-v avait malheureusement un frere plus jeune que lui ; ce firere se nommait Choui-yun. Passant sa Tie dans la societe de gens sans moeurs et sans foi, I'oisivete avait bientot amene la misere. II avait trois fils et une fille d'une laideur extreme; elle etait nee la meme annee que sa cousine Ping- sin, et se nommait Hiang-kou. Voyant que son frere n'avait pas d'heritier, Choui-yun convoitait I'administration de sa fortune, qui etait considerable ; mais comment parvenir a ce but ? Pour le moment Ping-sin n'etait pasdisposee a se donner un maitre; elle n'ecoutait aucune proposition. A quelque temps de la , un general , qui commandait I'armee, eprouva une sanglante defaite. L'empereur, irrit6 contre le pere de Choui-ping-sin , qui avait fait choix de ee general, le de- pouilla de ses fonctions et I'exila a la frontiere de I'empire. Bientot apres, l'empereur appela le ministre Kouo- long-tong dans son conseil. Choui- yun ne savait plus quel moyen employer, quand il se ligua contre sa niece avec un jeune voluptueux appele Rouo-khi- tsou, fils du nouveau ministre Kouo- long-tong. Kouo-khi-tsou , epris des charmes de Ping-sin, avait fait une de- mande, a laquelle celle-ci avait repondu par un refus positif ; mais le prefet, que le fils du ministre avait mis dans ses inter^ts, etait intervenu dans I'affaire. C'est alors que Ping-sin , a bout de voie, persuade a Choui-yun de mettre sa propre fille a sa place : « Ma cousine Hiang-kou a plus de dix-sept ans; il est temps qu'elle se marie. Pourquoine pas profiler de I'oc- casion qui se presente de lui donner un epoux ? Le mariage une fois conclu , quel mal pourrait-il en resulter?» « Choui-yun laissa retomber sa tete sur sa poitrine en poussant de profonds soupirs. Tout a coup, avec un melange de crainte et de joie , il s'ecria : « Sans doute, c'est un moyen de sortir d'em- barras ; mais votre cousine est si laide et vous resserable si peu ! Apres le ma- riage, que dira Kouo-khi-tsou, quand il la verra ? Je tremble a I'idee des reproches qu'il sera en droit de me faire. « Le billet d'flge que vous lui avez porte est veritablement celui de ma 486 L'UINIVERS. cousine ; les presents qu'il a fails, c'ost Chez voiis qu'il les a envoy^s: dans voire lettrc de rr merctment , il n'est question que de votre lilie ; aujourd'hui c'est cliez vous qu'il vient cliercher son dpouse; evidemment, c'est ma cousine qui doit I'epouser : quel reproche serait- il en droit de vous faire? Lors mfime qu'il croirait avoir lieu de se plaindre, vous n'avez rien fait contre les lois : que pourriez-vous craindre de lui ? Ce mariage coiiclu , vos iionneurs seront grands comme le Ta'i-chan : quoi que vous ayez fait auparavant, tout sera facilement oublie. Avais-je tortde vous dire que votre tristesse se changerait en joie ? u « Jusque-Ia, Choui-yun I'avait ecoutee en silence : tout a coup sa figure s'epa- nouit de joie : « iMon enfant , s'dcria-t-il , jeune et sans experience comme vous ^tes , ou votre esprit va-t-il cliercher de si ad- uiirables inventions ? Se peut-il qu'a- pres avoir, par votre supercherie, mis mes jours dans le plus grand danaer, vous nie rappeliez si facilement a la vie? « Votre niece n'aurait jamais eu I'au- (lacedevous Iromper, raon oncle;mais il fallait me defendre et me tirer de I'embarras oh vous m'aviez mise. « N'en parlous plus, dit Choui-yun. Mais votre cousine va se marier sans avoir ete prepar^e a cette idee; sa figure est pen aj^reable, et ellen'a pas le talent d'en dissimuler la laideur. Ne vien- drez-vous pas I'aider a faire sa toilette de noces ? » « Ping-sin y consentit avec plaisir : elle prit avec elle deux de ses femnies, et se rendit chez sa cousine. Elle lui fit arranger les cheveux , laver ia figure, nettoyer les dents et peindre les sour- eils. Ces preparatifs durerent depuis midi jusqu'a la nuit. On couvrit sa tete d'ornen)ents divers, enrichis de pierres precieuses, et son corps de vltements de sole brodee. Enfin on I'inonda des parfums les plus suaves et les plus pre- cieux. "Ping-sin lui recommanda ensuite daffecter beancoup de reserve et de jnodesiie en entrant dans I'appartement interieur; d'insister pour que les lumie- resfussentaeintes.afind'lviterdemon- trer trop tot sa figure, et de se retirer de bonne heure dans la chambre nuptiale pour se livrer an repos. Elle ordonna aux femmes de chambre de ne pas epar- gner le vin au nouvel epoux, quand viendrait le moment de vider la coupe d'alliance et de faire de leur mieux pour I'enivrer. Si, aprfes avoir vu sa figure, Kouo-khi-tsou eclatait en plain- tes et menacait de maltraiter Hiang- kou , Ping-sin conseilla a sa cousine d'affecter iin grand desespoir et de Tef- frayer par la menace de se donner la mort. Hiang-kou, quoique d'une intel- ligence born^e, comprit parfaitement Timportance de cesconseils, et promit de les suivre. Sa toilette se termina enfin, et elle se montra radieuse comme les trois etolles dans le fciel. « Le soir, Kouo-khi-tsou, monte sur un cheval magnifique et snivi d'une troupe nombreuse de domestiqncs , arriva pour recevoir sa fiancee. Choui- yun, tremblant de tous ses membres, placa sa Hlle dans sa chaise. Aussitot, une musique joyeuse se fit entendre et la troupe se mit en marche. « Kouo-khi-tsou, persuade que c'etait Ping-sin qu'il avait epousee et qu'il emmeuait chez lui, avait peine a con- tenir les transports de sa joie. II I'es- corta jusqu'a la porte de son hotel ; quand Hiang-kou sortit de la chaise, une troupe de femmes , qui I'atten- daient, s'empara d'elle et I'aida a mar- cher jusque dans le salon. Sous le grand voile de sole brodee qui lui couvrait la tete et les riches habits dont elle (^tait ornee, on I'aurait prise pour une immortelle : et tous les assistants, per- suades que c'etait Choui-ping-sin, don- nerent les marques les plus bruyantes de leur admiration. « Apres les reverences prescrites par les rites, on entra dans la chambre ou le repas nuptial avait et6 prepare. Jr. vin fut verse dans la coupe d'alliance et presente aux nouveaux epoux. Hiang- kou fut invitee a boire a son mari; mais celle-ci, qui n'avait pas oublie les instructions qu'on lui avait donnees, courut se cacher derriere les rideaux, et toutes les instances du monde ne purent Ten faire sortir. Kouo-khi- tsou attribua cette conduite a un ex- cesde pudeur;il ne voulut pas la con- CHINE MODERNE. 4S1 traindre, et, quittant la chambre, il se rendit dans la grande salle, ou ses pa- rents et ses amis celebraient, a table, son niariage. Entraine par I'exeniple, et pour repondre a leurs felicitations, bu- vant avec tout le nionde, il fut bientot dans line ivresse complete. Dans cet etat, il rentra dans la cbanibre, qui n'etait eclairee que par un petit nom- bre de lumieres. La jeune femme etait blottie dans le lit; il s'en approclia en chancelant. — « La nuit est fort avan- cee, lui dit-il; pourquoi ne dormez- vous pas encore? » « Hiang-kou, effrayee, detourna son visage, et, d'une voix faible, ordonna a ses femmes d'eteindre les lumieres. Les femmes ne bougeaient pas, et re- gardaient Kouo-khi-tsou : il comprit leur intention. — « Puisque madame vous I'ordon- ne, leur dit-il , eteignez les lumieres et retirez-vous. » — El les obeirent aus- sitot, et Kouo-khi-tsou, impatient, se depouilla a tatons de ses habits, et se mit au lit... « Le lendemain, quand le jour pa- rut, il se tourna joyeux du cote de sa femme. Au lieu de la beaute delicate qu'il avait vue a la derobee, il n'aper- cut qu'un large front, un visage carre, les traits les plus communs et les plus repoussants. II bondit sur son lit, et, se jetant sur ses habits : — « Yous n'e- tes pas mademoiselle Choui, s'ecria- t-il avec angoisse, vous n'etes pas celle quej'ai epousee! Qui done etes- vous? » — « Qui dit que je ne suis pas ma- demoiselle Choui? repliqua Hiang-kou ; regardez-moi avec attention. » « Kouo-khi-tsou la regarda de nou- veau, et secouant la tete : — « Helas ! helas! ce n'est pas elle! s'ecria-t-il douloureusement. Choui-ping-sin etait belle comme le nenuphar flottant sur I'eau, belle comme le saule a travers la vapeur. Je ne vois ici rien qui lui res- semble. Ah! ce vieux chien de Choui- yun m'a cruellement tromp6 ! » — « Vous m'avez epousee, je suis vo- ire femme, s'ecria Hiang-kou furieuse. Osez-vous bien, en ma presence, insul- ter aussi grossierement mon pere? » n Ces paroles redoublerent la colere de Kouo-khi-tsou. — «Assez! assez! dit-il; c'est sa fille Ping-sin qu'il m'a fait voir en secret. Vous I'appelez vo- tre pere : vous etes sans doute sa fille, mais non pas celle que je voulais epouser. » — « Peut-on etre stupide a ce point I dit Hiang-kou en s'asseyant sur le lit, et commencant a s'habiller. Ping-sin est la fille de mon oncle, I'ex-membre du tribunal militaire; si c'est elle que vous vouliez epouser, il fallait aller la lui demander a la frontiere. Pourquoi vous adresser a mon pere? Le billet d'age qu'il vous a remis, c'est le mien ; dans le billet de remerctment qu'il vous a adresse a I'occasion des pre- sents, il n'etait question que de sa fille; ne I'avez-vous pas vu? Que par- lez-vous de sa niece? C'est chez mon pere que vousavez envoye les presents d'usage; c'est dans sa maison que vous etes venu me prendre: pouvez-vous dire que ce n'etait pas sa lille que vous vouliez epouser? Ma famille est illus- tre; vous m'avez epousee publique- ment etselon les rites; vous m'avez emmenee dans votre maison, ou vous avez reuni vos parents et vos amis dans un splendide festin ; aucune des ceremonies prescrites n'a ete omise, et vous ne craignez pas de ine tenir aujourd'hui un langage aussi insultant! Comment pourrai-je a I'avenir remplir convenablement mes devoirs de fem- me, et vous donner des descendants capabies d'offrir les sacrifices fune- bres aux ancetres? Plutot mourir mille fois. » A ces mots, elle s'elance de son lit en versant un torrent de larmes. Elle invoque a grands cris le ciel et la terre, et se jette sur un mouchoir rouge, avec I'intention apparente de s'etrangler. Kouo-khi-tsou avait ete assez doulou- reusement surpris en reconnaissant que ce n'etait pas Ping-sin ; mais quand il vit Hiang-kou prfite a se donner la mort, il fut saisi d'une fraveur inexprima- ble (*). Apres plusieurs tentatives infruc- tueuses, Choui-yun, pour calmer Kouo- khi-tsou, lui fait une proposition qui decouvre a nu toute sa bassesse; il lui (*) Voy. Hao-khieou-tchouen ou la Fem- me accomplie , roman chinois , traduit par M. Guiilard d'Arcy, p. 85 a §» 488 L'UJNIVERS. indique un moyen d'obtenir Choui- ping-sin pour epouse, et de ravaler llianj^-kou a la condition d'une femme du second rang. « Le vingtieme jour de la neuvieuie Inne, lui dit-il , ma niece se rend reiigieusemeut a la ferme du Midi, pour deposer sur la tombe de sa mere les offrandes funebres. Elle recoit en mSme temps les redevances de'ses fermiers, et passe une partie du jour a visiter les chrysanthemes en fleurs ; chaque annee il en est de meme. Ce jour veuu, montez a cheval , cachez un certain nombre de vos gens autour de la ferme, et attendez que, apres avoir offert le sacrifice, ma niece s'en retourne chez elle. Tombez alors sur les porteurs, mettez-les en fuite, et faites-la conduire dans votre maison. » Ce projet, comme on voit, est d'une execution simple, facile, et Ton ne peutqu'admirer I'artavec lequel Choui- ping-sin decouvre toutes les entrepri- ses, toutes les machinations de ses deux perseculeurs. Au jour anniversaire, Choiii-ping- sin ne manque pas d'accomplir les ce- remonies funebres; mais ayant com- pris qu'il se tramait quelque chose contre elle, la jeune fille s'enferme dans une chambre, ordonne a une de ses femmes de debarrasser une grande malle de tous les habits qu'elle conte- nait, la fait rempiir de pierres, puis. secretement deposer au fond du siege de la grande chaise, que Ton ferme a clef. Ping-sin alors quitte ses habits, se couvre de ceux d'une de ses femmes, et se glisse dans une des quatre peti- tes chaises. Elle laisse a I9 ferme la femme dont elle prend la place, apres avoir prie le fermier de la lui ramener le lendemain... On n'etait guere qu'a une portee d'arc de la ferme, quand tout a coup une vingtaine d'hommes se mon- trent a droite et a gauche de la route; pendant que les uns se jetaient sur la grande chaise, les autres tombaientsur les porteurs. On transporte la chaise dans la mai- son de Kouo-khi-tsou, ou le prefet et les magistrals etaient reunis; mais quand on reconnut qu'elle n'etait rem- phe que de pierres, un rire immoder^ eclata de toutes parts. Kouo-khi-tsou s abandonne aux transports de la plus violente colere; toutefois il ne se de- courage pointy attend quelques jours, et se concerte avec un de ses amis, nom- me Tching-ki. Ce dernier, en faisant parvenir a Choui-ping-sin, sur un pa- pier rouge, un faux decret qui rappelle son pere de I'exil, parvient a s'mtro- duire dans sa maison, suivi d'un nom- bre d'hommes considerable. La jeune fille alors, debout au milieu de la salle, sans changer de couleur et sans que la moindre alteration se fasse remarquer dans le son de sa voix, demandea etre conduite devant les magistrats; or, comme ces derniers etaient les amis de Kouo-khi-tsou , Tching-ki condes- cend volontiers aux desirs de la jeune illle. En ce moment, Thie-tchong-yu, qui voyageait pour son instruction, arri- vait justement dans la ville. A un de- tour que faisait la rue, il se trouve au milieu de cette cohue, qui ne lui laisse Eas le temps de se ranger et le heurte rusquement. Transporte de colere, il saute a has de sa mule, court apres les porteurs, et saisit le premier a la gorge ; mais, apres avoir recu les excuses de Tching-ki, il allait s'eloigner, quand, du fond de la chaise, sortit une voix plaintive: « Pitie! pitie! disait-elie, je suis victime de la plus affreuse vio- lence. Noble jeune homme, sauvez- moi ! » Sans plus tarder, Thie-tchong- yu ordonne que Ton porte la chaise chez le mandarin, qui sicgeait deja, pret a donner gain de cause a son ami. Frappant a coups redoubles sur le tam- bour place a la porte, il penetre dans le tribunal, et parle d'egal a egal au juge etonne. Celui-ci toutefois adjuge Ping-sin a son ravisseur. Tchong-yu, rempli d'indignation, se fait alors re- connaitre, et lemagistrat, saisi d'ef- froi, ordonne d'une voix tremblante la miseen libertede la jeune fille. Tchong- yu devient vivement epris descharmes de Ping-sin, et Ping-sin, de son cote, temoigne a son liberateur une recon- naissance tres-vive. Pendant ce temps Kouo-khi-tsou forme le projet de se venger; il seduit quelques mauvais bonzes du monastere bouddhique, ou Tchong-yu etait momentanement loge. Corrompus par des presents, les re- ligieux mfilent du poison aux ali- CHINE MODERNE. 489 nients qu'ils servent au jeune bachelier. Choui-ping-sin, qui connaissait le caractere de Kouo - khi - tsou , avail charge des emissaires de lui rendre compte de ce qui se passerait. Des (ju'eile fut iiiformee que son lib^rateur etait malade, elle prit soudain la reso- lution de lerecevoir chez elle; c'etait I'unique moyen de lui sauver la vie. Thie-tchong-yu n'accepte qu'a regret cette invitation; il aimerait mieux uiourir que de donner prise a la ca- lomnie. Bientot 11 recouvre la sante ; 11 est sur le point de quitter la niaison sans avoir vu la jeune fille (car, dans cette conjoncture delicate, toutes les regies de la bienseance avaient ete ob- servees) , lorsque Choui-yun, en qua- lite d'oncle, vient adresser des remon- trances a sa niece. Choui-ping-sin s'ex- cuse, en dlsant que les rites ont ete ins- titues pour diriger le commun des hommes, et non'pour regler la con- duite des sages; qu'il faut agir selon les circonstances, rendre le bien pour le bien, et le mal pour le mal; elle evoque les anciens, s'autorise des mo- dernes, et I'oncle, etourdi, confondu, se retire, apres avoir ordonne a une femnie de chambre de se glisser dans la maison de sa niece, et de s'y cacher de maniere a tout voir et tout enten- dre sans etre apercue. La fenime de chambre rend a Clioui-yun un compte extremenient favorable de la conduite de Choui-ping-sin : — « M. Thie est un peu mieux ; mais il ue peut se lever encore ; il est assis sur son lit, oil on lui apporte a boire et a manger. — « Et mademoiselle, ou se tient- elle.? — « Dans le salon, d'ou elle surveille la preparation des diverses boissons qu'onadn)inistre au malade. — « Ne va-t-elle pas le voir dans sa chambre? — « Non, jamais. — « lis causent pourtant quelque- fois ensemble? — « Non; ils ne communiquent en- tre eux que par I'intermcdiaire d'un pe- tit domeslique. » Thie-tchong-yu, parfaitement gueri , quitte celle qu'il peut uommer a son tour sa liberatrice, et s'en retourne dans sa province, afin de s'y preparer aux examens publics pour la licence. L'infatigable persecuteur de Choui- ping-sin profite de son absence pour gagner I'inspecteur de la province. Ce fonctionnaire lui delivre, en qualite de representant du ciel (de I'empereur), I'autorisation par ecrit d'epouser la jeune fille dans sa propre maison, en vertu d'une coutume autorisee a la Chine. Choui-ping-sin, qui, sur ces en- trefaites, avait envoye, par un messa- ger, un memoire a I'empereur, adjure I'inspecteur general de lui preter main- forte pour la delivrer du libertin qui I'obsede, et, sur son refus, lui montre la copie de la plainte qu'elle a formee contre lui, L'inspecteur general, trem- blant de tous ses membres, s'oppose alors a la celebration des noces. Cependant Thie-tchong-yu ne tarde point a apprendre tout ce que souffre son amante; il'se hSte de revenir dans le Chan-tong, determine a defendre Choui-ping-sin de tout son pou voir. Kouo-khi-tsou se presente au domicile de Thie-tchong-yu, et comme on lui refuse I'entree de Thotel, ainsi qu'il s'y attendait, il laisse une carte de cere- monie. Thie-tchong-yu se trouve con- traint de lui rendre sa visite, et, tout en conservant un air froid et reserve, de s'asseoir dans le salon, ou arrivent successivement tous les amisde Kouo- khi-tsou, qui s'etaient concertes avec ce libertin. Ceux-ci se prennent de que- relle, afin de pouvoir, dans la melee, tomber sur I'amant de Choui-ping-sin. Thie-tchong-yu echappe par son cou- rage a ce guet-apens. Plus tard, et apres beaucoup d'aven- tures, il obtient la grace de Heou-hiao, auquel on rend le commandement de I'armee. Choui-kiu-y, nomme a la pre- sidence du tribunal militaire, est rap- pele a la cour par I'empereur. Celui-ci , plein de reconnaissance et d'admira- tion, conclut avec Thie-yng le mariage de Thie-tchong-yu et de Choui-ping-sin; mais les fiances craignent, en se ma- riant, de porter un coup funeste a la morale ; ils se sont rencontres dans un moment de danger et de trouble, et se sont vus contrairement aux rites. Ces scrupules finissent neanmoins par eire laves. Au moment ou le mariage allait 4H L'UISIVKKS. s'accomplir, Clioiii-ynn et Kouo-kln- tsou vieiiiieiit y apporter de noiiveaux obstacles; on adrcsse uti rapport a Tempereur, qui punit les coupables, eleve le sage Thie-tcliong-yu a la di- gnite de ininistre, et la vertueuse Choui-ping-sin au rang de dame du palais. YU-KIAO-LI, Ouvrage du troisieme Thsai-tseu. Le roman de mocurs intitule : Yu- kiao-li, ou les Deux Cousines, a ete tra- duit et public, en 1826, par M. Abel Re- musat. Si Ton trouve le ceremonial des mariages dans le Hao-khieou-tchouen, on pent etudier tout le ceremonial des visiles dans le Yu-kiao-li. Une visite est a la Cbine une affaire grave; les formu- les que la civilite prescrit dans certains cas y sont une affaire plus grave en- core. Je parlerai done dd ceremonial des visiles; mais, apres avoir consacre quekjues lignes a la civilite chinoise, j'extrairai seulement du chapitre V un petit tableau de moeurs, un episode qui m'a paru avoir quelque chose d'origi- nal et de piquant. On jugera mieux du ton de I'ouvrage par im fragment que par une analyse. Je n'essayerai pas non plus une appreciation du Yu-kiao-li ; je m'en liens a celle de M. Abel Remusat: elle est exacte et complete. « Ce n'est pas pour les Chinois, dit le spirituel ecrivain, une gloire medio- cre que d'avoir su, dans I'extremitedu monde ou ils sont relegues, s'elever depais plusieurs siecles au roman de moeurs et au roman historique, tels qu'on les concoit aujourd'hui parmi nous, Les nations dans Tenfance ont des apologues, des r^cits merveilleux, des epopees : les vrais romans nenais- sent que dans la vieillesse des societ^s, quand Taffaiblissement des croyances tourne leur attention vers les choses de ce monde; et s'il en faut, comme on I'a dit, aux peuples corrompus, c'est qu'eux seuls ont cette dispo>ition qui porte a reflechir sur les scenes de la vie interieure, sur le jeu des passions, sur •'analyse des sentiments, sur les d^- bats produits par le choc des int^rets et le melange des professions. Les fic- tions SQivent naturellement le cours des habitudes reelles , et le theStre qu'elles occupent doit changer avec la maniere de vivre des hommes qui s'eu nourris- sent. La muse qui les inspire, originaire des for^ts et des lieux sauvages, s'est plu longtemps au milieu des monta- gnes et sur les rivages de I'Ocean. Elle u'a penetr6 qu'assez lard dans Ten- ceinte des cites, et les Chinois sont, avec quelques nations de I'Kurope mo- derne, les seuls qui I'aient admise dans les salons, pour y prendre part aux en- tretiens familiers, aux reunions ami- cales, aux discussions domestiques et a la diplomatie du menage, a tous ces petits evenements enfin dont se com- pose la vie des hommes civilises... « L'opinion de deux missionnaires instruits.Premareetl'evequedeRosalie, recommandait particulierement le ro- man intitule Yu-kiao-li, sousle rapport de la purete du style, de la grSce et de la politesse qui le caractcrisent comme composition litteraire. En le parcou- rant, j'y ai trouv^ une fable simple et bienconcue, desdeveloppements agrea- bles, des caracteres habilement pr^- sentes des I'abord, et conslamment soutenus jusqu'a la fin. On pourrait desirer dans cette histoire qu'il v fiU un peu moins question de vers, d'im- provisations et de poesie descriptive. Mais ce defaut est inherent aux aven- tures qu'on attribue a des lettres, et , puisque les lettres sont I'elite de la na- tion chinoise, c'est surtout leur esprit et leur caractere, leur maniere de par- ler et d'agir, qu'on doit desirer de voir decrits dans un tableau d'apres nature. D'autres romans abondent en details militaires, ou roulent principalement sur la vie des convents, les tracasseries ou les desordres du gynecee. Les epi- sodes du noire sont d une nature plus elegante et plus pacifique. C'est I'ideal de la soci^te du pays, ce sont les amu- sements de la bonne compagnie qu'on y trouve representes ; on y reconnait deja I'empreinte de ces institutions qui ont fait de la litterature la principale occupation d'une nation savante et po- licee; et c'est uniquemenl a la civilisa- tion chinoise qu'il faut s'en prendre, si les scenes qu'elle fait naitre n'ont pas cette teinte sombre et vigou- reuse qui frappe dans les tableaux em- CHINE ^ibbERNE. pruntes a Thistoire des guerres civiles ou des querelles de religion (*). » Ceremonial des 'vis'itcs a la Chine. « On se fait celer a la Chine comme en Europe, c'est-a-dire qu'on se derobe a la foule des visiteurs en leur envoyant dire qu'on n'est pas chez soi , sans se soucier de le leur faire croire. On ne craint pas ni^me de se dire indispose, accable de travail , hers d'etat de recevoir ; les domestiqiies scut char- ges, dans ce cas, de prendre les billets de vi- site qu'on apporte et de demander les adresses pour que leur maitre puisse, dans I'espace de queiques jours, rendre les visites qu'il n'a pas recues. Dans un roman que nous avons sous les yeux (le Yu-kiao-li) trois leltres sont ensemble a se divertir en buvant du vin chaud et en composant des vers : on amionce un vieux mandarin intrigant, et d'un commerce ennuyeux et desagreable. « Imbecile, dit le maitre a son domestlque, « pourquoi ne lui avez-vous pas dit que je « n'y etais pas ? — Monsieur, repond le do- « mestique, je le ^ui ai assure; mais il a vu « les chaises de ces deux messieurs devant la « porte, et il a connu par la que vous etiez •« ici. » Le maitre se leve, prend son bonnet de ceremonie , court avcc un empressement force au -devant de cet bole importun, et le comble de politesses aflectueuses , sur les- quelles les deux autres lettres, qui le detes- lenl, encherissent encore, Ou croirait a peine que la scene, qui est peinte assez nai- vement, se passe a i34 degres du meridien de Paris. << Celui qui veut rendre une visite doit , queiques heures auparavant , envoyer par son domestique un billet a la personne qu'il a dessein de voir, tant pour s'inforraer si elle est chez elle, que pour I'iuviter a ne pas sortir, si elle a le loisir d'accepter la visile. C'est uue marque de deference et de respect pour ceux que Ton veut aller voir chez eux. Le billet est une feuille de papier rouge, plus ou moins grande, suivant le rang et la diguite des personnes, et le degre de respect qu'on desire leur temoigner. Ce papier est aussi plie en plus ou moins de doubles, et Ton n'ecrit que queiques mots sur la seconde page, par exemple : « Votre disciple, ou voire «frere cadet, un lei, est venu pour baisser « la tele jusfiu'a lerre , et vous offrir ses « respects. » Cetle phrase est ecrite en gros caracleres, quand on veut meler a I'expres- (*) Yu-kiao-li , ou les Deux Cousines , ro- man chinois traduit par M. Abel Remusat, preface, p. vi,vii, viii, xr,v et xlvi. 491 sion de sa poHlesse un certain air de gran- deur ; mais les caracteres diminuent et de- vienneut pelits a proportion de I'inler^t qu'on peut avoir a se monlrer veritable- ment humble et respectueux. « Ce billet elant remis au portier, si le maitre accepte la visite, il repondra verbale- ment : « 11 me fait plaisir, je le prie de ve- « nir. " S'il est occupe, ou s'il a quelque raison pour ne pas recevoir la visite, la re- ponse esl : « Je lui suis fort oblige, je le re- « mercie de la peine qu'il veut prendre. •• Mais si , par hasard , le visiteur esl un supe- rieur, alors on ne manque pas de dire : •' Moiiseigueur me fait un honueur que je « n'eusse pas ose esperer. » A la Chine, on n'a pas coutume de refuser ces sortes de vi- sites. « Si on n'a pas recu de billet qui annonce la visite, ce qui ne peut avoir lieu qu'a re- gard des iuferieurs, ou des gens du commun, ou dans le cas d'affaires pressees, on pent prier le visiteur d'atteudre, en lui rendant compte de I'occupalion qui vous retient un moment. Par exemple, le domestique qui recoit I'etranger, lui dira : « Monsieur vous u prie de vous asseoir un moment ; il acheve « de se peigner et de faire sa toilette. » Mais si Ton a ete prevenu par billet, on doit prendre de beaux habits et se tenir pret a recevoir son hole a la porte de la maison , ou a la descente de sa chaise, et lui dire d'a- bord : » Je vous prie d'entrer. » On a soin d'ouvrir les deux battants de la porte du mi- lieu, car il yauraitde I'impolitesse a laisser entrer ou sortir par les porles laterales. Les grands se font porter dans leurs chaises , ou entrent a cheval jusquau pied de I'escalier qui conduit a la salle des holes. Le maitre de la maison les recoit en se mettant a leur droite, puis il passe a leur gauche en leur disant : « Je vous prie d'aller devant, » et il les accompagne en se tenant un peu en arriere. « Dans la salle des botes , des sieges doi- vent etre prepares et ranges sur deux lignes paralleles, I'un devaut I'autie. En y entrant, on commence , des le has de la salle , a faiie la reverence , c'est-a-dire qu'on s'incliue a cote de son bote, el un pas en arriere , jus- qu'a ce que les mains, qu'on tient I'une dans I'autre, touchent a terre. Dans les provinces du midi de la Chine, le cote du sud esl le plus honorable : c'esl le conlraire dans celles du nord. On pense bien qu'il faut, suivant la province, ceder le cole le plus honorable a son bote; celui-ci, par une ingenieuse courtoisie, peut, en deux mols, changer la face des choses, et dire, si on I'a place du 492 L'UNIVERS. rote du midi : « Pe-li , c'est lei ]a ceremonie ilu pays du nord ; » ce qui siguifie : J'espere «|u'en me mt'ltant au midi vous ni'assignez la place la nioiiis dislingiiee; mais le maitre do la niaisoii sVmpifsseia de relabiir la si- tuation convenable en disant : Naii-li , « point « du lout, Seigneur, c'est la ceremonie du .. midi , ct vous eles a la place oil vous de- • ve/ 61 re. •> « Souvent le viiiteur affecfe de prendre le cote le moins honorable ; alors le maiire de la maison s'excuse en disant : « Je n'ose- '• rais ; >• et passant devant son hole en le regardant loujours, et ayant bien soin de ne pas lui tourner le dos, il va se mettre a la place convenable et un pen en arriere ; c'est alors que tons deux font, en m^me lemps, la reverence. Si plusieurs personues font une visite ensemble, ou si le maitre a quelque parent qui demeure avec lui , on re- pele la reverence autanl de fois qu'il y a de personnes a saluer. Ce manege dure alors assez iongtemps ; et tant qu'il dure , on ne se dit autre chose que Poii-kan, pou-kan (je n'oserais). « line politcsse que Ton doit aux grands , et qui lie deplail pas aux personnes d'une condition moyenne, quand on en use avec elles, c'est de couvrir les chaises de petits lapis fails expres. Alors on se fait recipro- quement de nouvelles famous. On refuse de prendre le premier fauteuil, pendant que le maitre insiste pom- qu'on I'accepte. (lelui-ci feint de I'essuyer avec le pan de sa robe, et I'etranger fail le nicme houneur an fauteuil <|ui doit elre occu]>e par le maitre. Enfin , on fail la reverence a la chaise avanl de s'as- seoir, et Ton ne prend sa place qu'apres avoir epuise toutes les ressources de la civi- lite et de la bonne education. « A peine esl-on assis, que les domesli- qnes apportenl le the; les lasses de porce- laine sont rangees sur un plateau de bois verni. Chez les gens riches, on ne se sert pas de tlieiere , mais la quanlite de the ne- cessaire est mise au fond de la tasse , et I'eau bouillante versee par-dessus. L'infusion est tres-parfumee ; on la prend sans sucre. Le maitre de la maison s'approche des plus con- siderables de ses holes , et leur dit en lou- rhantle plateau : « Thslng-t'clia, je vous in- vile a prendre du the, » Alors lout le monde s'avance pour prendre chacun sa lasse. Le maitre en prend une avec les deux mains, el la presente au premier de la compagnie, qui la ri'cjoit de nieme avec les deux mains. Les autres affeclent de ne prendre les lasses ct de ne Iwirc qu'ensemble, quoiqu'on s'in- vite par signes , les uns les autres , a com- mencer. Quand tout le nionde est servi de cctte mauiere, celui ou ceux qui sonl venus en visite, tenant leur lasse avec les deux mains, el demcuranl assis, se courbeni en la porlant jusqu'a terre. II taut bien prendre garde alors de ne pas repandre la moindre goulle de the , cela serait fort incivil ; et , pour empecher que cela n'arrive, on a soin de ne remplir les lasses qu'a moilie. La maniere la plus honn^tc de servir le the est de joindre a la lasse un pelit morceau de confiture seche el une petite cuiller, qui n'esl qu'a eel usage. Les invites boivent le the a plusieurs reprises el fori lentement, qiioique lous ensemble , pour elre prets a reposer la lasse sur le plateau tons a la fuis. Quelque chaude qu'elle soil, on doil plutot souffrir de se brOler les doigls que de laire ou dire rien qui puisse iroubler la bienseance el I'or- dre dcs civilites. Dans les grandes chaleurs , le maitre prend son evenlail apres que le the esl bu ; el , le tenant avec les deux mains, il fait une inclination a la compagnie, ea disant : « Thslng-chen (je vous invite a vous •> servir de vos eventaiis.) » Chacun alors prend son evenlail el s'en sert avec beaucoup de modesiie et de gravile. II serait impoli de ne pas en avoir avec soi , parce qu'on serail cause qu'aucun ne voudrail en faire usage. « La conversation doit toujours commen- cer par des choses indifferentes ou menie insignifianles ; el ce n'esl pas la , sans doute, la condition du ceremonial la plus dirflrile a remplir. Communemenl, les Chinois sonl deux lieures a dire des riens ; el , vers la fin de la visile, iisexposent, en Irois mots, I'af- faire qui les amene. On ne doit parler ni trop vile, ui trop haul, el surtoul on ne doil faire aucun gesle. Le visiteur se leve le premier, el dit quelquefois : »II y a Iongtemps que je « vous ennuie. » De tons les compliments que se font les Chinois, c'est celui-la qui ap- proche le plus souvent de la verile. « Avanl de sortir de la salle, on fait une reverence de la meme maniere qu'en arri- vanl. Le maitre reconduil son hole en se te- nant a sa gauche, el un pen en arriere, ct le suit jusqu'a sa chaise ou a son cheval. Avant de mooter, I'etranger siipplie le maiire de le laisser, et de ne pas assisler a une action qui n'est pas assez respeclueuse ; mais I'aulre se conlente de se retourner a demi , comme pour ne pas le voir. Quand I'etranger esl remonte a cheval ou que les porleurs out soulevc les batons de sa chaise , il dit adieu ( thsiug-liao), el on lui rend cette courtoisie qui est la derniere de toutes (*).» (*) Melanges posthumes d'histoire el de CHINE MODERNE. 493 BlSTOIRE DE VANG-KO. Yu-kiao-l't , chapUre V. « Le baclielier Sse-yeou-pe , ayant resolu de partir pour la capitale, nianda un vieux domestique, qui se nommait Sse-cheou. II lui enjoignit de rester a la maison et de veiller avec soin siir tout ce qu'il y laissait. II fit ensuite choix de quelques habits et des objets necessaires pour la route, et les ayant distribues en deux paquets, il les envoya devant lui par un autre domestique qu'il chargeade les porter jusqu'a I'em- bouchure du fleuve. Lui-meme ne prit avec lui qu'un petit valet, nomme Siao- hi, et apres avoir donne tous ses or- dres, il monta a eheval et vouiut partir. '< Par un hasard fScheux, son cbeval se trouva retif et fringant; il sentit des le premier instant que Sse-yeou-pe n'etait pas un cavalier experimente; il ne bou- geait pas de place. Sse-yeou-pe embar- rasse tirait irregulierement les renes, tantotd'un cote, tantot de I'autre. Mais I'animal avait a peine fait un pas en avant, qu'il se cabrait, levait la croupe et reculait de deux pas. Sse-yeou-pe commenca a s'inquieter serieusement. Son domestique Sse-cheou vint a son secours: « Monsieur, lui dil-il, si vous ne frappez pas votre eheval, comment vouiez-vous qu'il ailie? Vous aviez au- trefois un fouet a poignee de corail , que ne le prenez-vous avec vous ? II n'y a que la crainte qui fasse marcher un auunal. » — « Tu as raison, j'allais I'oublier, » dit Sse-yeou-pe. II envoya chercher son fouet, et quand il fut arrive, il reprima I'ardeur de sa monture, en lui donnantpiusieurs coups au moment ou elle se cabrait. La douleur la rendit docile , et elle se vit contrainte d'avan- cer. Sse-yeou-pe se m.it a rire : « Get animal, dit-il, ne veut pas marcher qu'on ne le frappe. II en serait de meme des hommes dans ce monde, s'ils cessaient un seul jour d'etre soumis a I'auto- rite. » « Au moment du depart de Sse-yeou- pe, un vent de printemps repandait dans I'air une douce temperature. Toute lilteratuie orienlales, par M. Abel Kemusat, p. 363 a 370. la route etait couverte de sautes en pleine fleur. Sse-yeou-pe, monte sur son eheval , ne pouvait se lasser de les ccnsiderer... II se parlait a lui-m^me, quand, sans s'en apercevoir,^ il arriva dans un endroit ou le chemin faisait la croix. Tout d'un coup, de I'une des branches de ce carrefour, sortit en cou- rant un homme qui , regardant Sse- yeou-pe de la tele aux pieds, dit entre ses dents : « C'est veritablement bien lui ! » et saisissant a deux mains la bride de son eheval, il I'arreta. « Sse-yeou-pe, qui, dans ce moment, etait tout entier a ses reflexions, ne s'attendait pas a cette surprise. II ne put se garantir d'un mouvement de irayeur, et jetant a la hate un regard sur celui qui I'arretait ainsi, il vit que cet homme avait sur la tete un cha- peau pointu de feutre, tout dechire et pose de travers , qu'il etait vetu d'une veste de toile bleue en lambeaux , et qu'il avait aux jambes de mauvaises bottines toutes couvertes de poussiere. La sueur ruisselait sur tout son corps, comme s'il eilt ete expose a la pluie. — « Qui etes-vous ? lui demanda Sse-yeou-pe avec trouble , et pourquoi arretez-vous ainsi mon eheval ? » « Cet homme , encore haletant de sa course, fut quelque temps a reprendre haleine; il ne put repondre distincte- ment , et tout ce qu'on entendit, ce fut : « Bien ! je I'ai rencontre tout a point. » A ces paroles depourvues de sens, Sse-yeou-pe leva son fouet pour le frap- per. « Monsieur, s'ecria cet homme a I'iustant , ne me frappez pas. Si je ne retrouve pas ma femme, c est vous qui en ^tes la cause. » « Ce discours mit Sse-yeou-pe dans une grande colere : <• Quel est cet extra- vagant? dit-il; si ta femme ne se re- trouve pas, en quoi cela me concerne- t-il? Je ne t'ai jamais vu ni connu. T'ai-je jamais fait le moindre tort? » — « Je ne dis pas que ce soit vous 3ui m'ayez enleve ma femme. Mais il epend de vous de me la rendre : c'est une chose bien certaine. » — « Tu deraisonnes de plus en plus : je suis un passant qui suis sa route , oil veux-tu que je trouve ta femme, et comment dis-tu que c'est une chose certaine que cela depend de moi ? Je •ISM L'UNIVERS. gage que tu n'es (ju'un miserable vo- leur de grand ciiemiii. Comment oses-tu, en plein jour, m'arreter dans men voyage? Je suis le fils du seigneur Sse, I'iiispecteur general, prends bien garde a ne pas clierclier quelque mechante affaire. » Et en parlant ainsi , il leva son fouet et en donna plusieurs coups a cet homnie, sur la tete et en travers du visage. Siao-bi accourut en nieine temps, et se niit a le battre aussi de son cote : plus cet bonime sesentait frappe, etplus les paroles qii'il pronon<;,ait dans .son trouble devenaient iniiitelligibles. Tout ce qu'on pouvait comprendre au milieu de ses cris , c'etait : « Retenez votre main , monsieur ! ayez pitie de moi, soyez toucbede mon affliction ! En verite, je ne suis pas un miserable ! » Mais qiioique la douleur tirat des cris de sa boucbe, ses mains ne cessaient |)as de tenir la bride, et on Teut tue plutot que de la lui faire IScber. « Sur ces entrefaites, des voyageurs etdes paysans du village voisin, voyant qu'il se passait quelque cbose d'extraor- dinaire entre ces deux bommes, accou- rurent pour en savoir la cause et s'a- masserent autour d'eux pour les regar- der. Sse-yeou-pe ciiait de toutes ses forces : « Y a-til rien d'aussi etrange dans le monde ? Si tu as perdu ta fem- me, comment t'adresses-tu a un bomme qui passe, pour la retrouver? » — « Je serais bien facbe de vous arr^ter, monsieur; mais tout ce que je vous demande, c'estde vouloir bien me donner votre fouet , et ma ferame se retrouvera a I'instant meme. » Les assistants se mirent a rirea ces paroles. « Cet bomme est un fou, s'ecrie- rent-ils. Que veut-il dire d'une femme perdue qui se retrouvera par la vertu d'un fouet? » — « Mon fouet a une poignee de oorail, et vaut plusieurs onces d'ar- gfnt, pourquoi irais-je te le donner? » dit Sse-yeou-pe ; et sa colere augmen- tant encore, il leva son fouet pour le frapper de nouveau. L'bomme se mit a crier : « monsieur, dit-il, attendez! Avant de me battre, permettez-moi de vous expliquer une chose. » — « Suspendez un moment votre courroux, monsieur, dirent les assis- tants, et permettez-lui de s'expliquer. ]\ous ne vous retiendrons pas cnsuite, si vousvoulczlech5tier. »Et ilsdeman- dcrent a cet bomme dc quel pays il etait, et quelle etait son affaire, en lui enjoignant de Icur expliquer tout cela en detail. — « Je suis, repondit-il , du village de Yang-kia, pres de la petite ville de Tan-yang. iMon nom est Yang-ko. Ces |ours derniers j'ai envoye ma fenmie a la ville pour retirer des effets que nous avions n)is en gage. Des inconnus font enlevee sur la route. J'ai passe toute la journee a la chercher, sans en avoir aucune nouvelle. Ce matin de tres-bonne heure, etant au bourg de Keou-yong, j'ai rencontre un docteur qui salt I'art des prieres magiques ; je I'ai suppiie d'en dire une a mon inten- tion, fct il m'a promis qu'aujourd'biii, a trois beures trois quarts apres midi, je retrouverais ma femme. Je lui ai de- mande de quel cole je devais me diri- ger pour la chercher. II m"a repondu qu'en allant vers le nord-est I'espace de quarante milles (quatre lieues), je trouverais un carrefour; que j'y ren- contrerais un jeune seigneur, vetu d'un habit couleur jaune de saule, et monte sur un cbeval tachete ; que je devais I'arreter, lui demander le fouet qu'il portait a la main, et qu'alors ma femme se retrouverait ; qu'il fallait seulement courir en toute hate, paroe que si je le manquais d'un seul pas, et qu'il fut deja passe, il me serait impossible de la re- joindre jamais. Muni de cette instruc- tion, je suis venu tout d'une baleine, et ajeun. J'ai fait quarante milles pour- arriver a ce carrefour, et, grace a ma diligence, j'ai rencontre monsieur, monle sur son cbeval et dont rhabille- ment et la figure repondent parfaite- nient a la description qu'on m'en avait faite. Comment douter que ce ne soil lui qu'on m'a indique?J'ai prie mon- sieur de faire un acte d'humanite , et de vouloir bien me donner son fouet, pour que nous puissions, ma femme et moi , nous voir nnmis de nouveau , puisque c'est de lui que depend cctle merveilleuse operation. » — « Vous perdez tout a fait le sens, mon cber ami ! dit en riant Sse-yeou-pe ; it n'y a jamais eu dans le monde de CHINE MODERNE. 495 docleur doue de faculfes si extraordi- naires. Apres avoir vu bien distincte- ment mon chevol , mon habillement et ma figure , vous avez forge ce conte a plaisir pour m'escroquer mon fouet. Comment vouiez-vous qii'on ajoute confiance a ce que vous dites ? » — « Je ne serais pas assez liardi pour vouioir vous en imposer,reponditYaug- ko; je perise bien que vous ne vous en rapporterez pas a nioi. Mais vous ne sauriez manquer de croire a toutes les choses que ce docteur a dites. II a en- core ajoute que votre voyage avait pour objet la recherciie d'un mariage. Cela pst-il vrai ou faux? Vous savez bien, monsieur, a quoi vous en tenir. » « A ces mots de recherche d'un ma- riage, Sse-yeou-pe resta interdit : « Voila, se dit-il, une atfaire que j'ai tenue si bien renfermee dans mon sein, que les dieux eux-memes n'auraient pu la decouvrir. Comment cet homme a-t-il fait pour la penetrer ? II y a done quel- que chose de vrai dans tout ceci. » Puis s'adressant a Yang-ko : « Eh bien! lui dit-il, je consens a vous donner mon fouet: ce n'est pas une chose d'une grande consequence. JMais il faut qu'au- jourd'hui meme je fasse diligence pour arriver a I'embouchure du fleuve, et si je n'ai pas de fouet, mon cheval ne voiidra pas avaucer; comment pour- rais-je me tirer d'embarras ? » « Les assistants , qui avaient trouve queique chose d'extraordinaire dans celte affaire, etaient tons -fort curieux de voir comment le fouet de I'un ferait retrouver la femme de I'autre , et s'a- percevant a la pbysionomie de Sse- yeou-pe qu'il etait dispose a accorder ce qu on lui demandait, ils commence- reat a prendre son parti. « Puisque ce monsieur veut bien consentir a vous donner son fouet, dirent-iis, vous de- vriezbien vite ailer luicouperune bran- che de saule pour lui en tenir place. » «Yang-ko ne demandait pas mieux que de rendre ce service a Sse-yeou-pe; mais la crainte que celui-ci ne protit^t du moment pour s'eloigner I'obligeait a rester pour le retenir. Sse-yeou-pe devina son motif, etlui remettant da- vance le fouet : « Puisque je vous I'ai promis , dit-il , je ne vous manquerai certainement pas de parole. Allez vite me couper unebrancbe, car je suis tres- presse de continuer ma route, » «Yang-ko prit le fouet en faisant mille protestations de gratitude. « Que de remerciments je vous dois, monsieur, lui dit-il. Si je parviens a retrouver ma femme, bien certainement je ne man- querai pas de vous le reporter. » Et s'e- tant releve, il regarda de cote et d'au- tre, pour voir ou il pourrait aller cueil- lir une branche de saule. » On etait alors a la seconde decade de la deuxieme lune. Les bords de la route etaient plantes de jeunes saules dont les rameaux encore nious et flexi- bles n'auraient pas fait avaucer un che- val. Maisdu cotedu sud-est, a I'entree d'un sen tier ombrage, et tout aupres d'une vieille chapelle en ruines, s'ele- vaient trois ou quatre grands saules dont on apercevait les tetes par-dessus la muraille. Yang-ko s'ydirigea en toute hate ; mais h peine etait-il grimpe dans un de ces arlJres , et sur le point d'en arracher une branche, qu'il entendit les cris de quelqu'un qui se lamentait dans la chapelle. II ecarla le feuillage; et ses regards piongeant dans I'inte- rieur, il vit trois hommes qui entou- raient sa femme et qui la retenaient de force au milieu d'eux. Elle resistait a cette violence, qui etait la cause de ses cris et de ses sanglots. « A ce spectacle, Yang-ko ne put se contenir : "Brigands, miserables! s'e- cria-t-il , e'est done ici que vous venez vous cacher apres avoir ravi la femme d'autrui ! » En meme temps il descen- dit de I'arbre precipitamment, et se mit a frapper a coups redoubles a la porta de la chapelle. '<■ Les assistants, qui avaient entendu les mots, C'est done ici, se haterent d'approcher tous ensenible pour voir de quoi il s'agissait. Yang ko, qui s'e- tait presente d'abord a la principale porte de la chapelle, I'avait trouvee barricadee, et ne voulant pas s'arreter a I'enfoncer, comme il eut faliu faire, avec sa tete ou ses pieds, il chercha une ouverture pour entrer. Mais avant qu'il eut acheve le tour et qu'il fdt par- venu derriere la chapelle, il y avait long- temps que les trois ravisseurs avaient pris la fuite en passant par une des brcches dela muraille. La femme seule 496 L'UNIVERS. y etait restee. Les deux epoiix furent transportes de joie en se voyant r^unis, et ite se mirent a pleurer d'attendris- sement. I.es assistants etniciit demeii- res saisis d'etonnement a cette viie, et ils reconnurent que tout ce que Yang- ko avail dil ^lait conforme a la ve- rite. « Cependant Sse-yeou-pe, qui avail entendu dire que Yang-ko venail de retrouver sa femme , ful frappe d'une surprise inexprimable. II descendit lui- m^me,et laissant Siao-hi pour veiller sur son cheval , il s'approcha de la chapelle pour s'assuror de la chose par ses yeux. En le voyanl entrer, Yang- ko dil a sa femine : « Si je n'etais pas venu couper une branctie de saule pour obtenir de monsieur qu'il me donnat son fouet , nous ne nous serions jamais revus dans cette vie. » — Puis remet- tant le fouet a Sse-yeou-pe : « Mille remercimenls , monsieur, lui dit-il , je n'ai plus besoin de ceci. » — « Vit-on jamais dans I'univers quel- que chose d'aussi elrange que cetle aventure! s'ecria Sse-yeou-pe. Je vous ai fail injure, mon ami. Mais dites- moi, je vous prie, auel est le noni de ce docteur qui dil les prieres magi- ques. » — « Personne ne sail son nom de fa- niille ou ses surnoms, repondil Yang- ko; mais comme il porte a la main une pancarte sur laquelle sont Merits les mots : Sai-chin-sien, ou s'esl accoutu- me a I'appeler Sai-chin-sien ou I'er- mite de la reconnaissance. » « En fmissanl de parler, il renouvela encore par deux et Irois fois ses actions de graces a Sse-yeou-pe ainsi qu'aux aulres assistants, et, emmenant sa femme avec lui , ii reprit le chemin par ou il etait venu. Apres son depart , Sse- yeou-pe sortil de la chapelle, remonta a cheval , et tout en cheminant it se livra a mille pensees dilferenles , qui lui etaient inspirees par ce qu'il venail de voir. » (*) Tu-4iao-li, ou les Deux Cousines, t. II, p. ig a 4a. P ING-CHAN-LING-YEN , Ouvrage du quatrt^me Thsai-tseu. Le P'ina-chan-ling-yen ou les Deux jeuncs fUles lettrees est iiu roman de moeurs, dont le litre designe par au- tant de monosyllabes, les noms abreges des quatre prineipaux personnages : Chan-Zoi! et Ling Kiang-sioue (les deux jeunes (illes) , P'ing Jouheng et Yen Pe-han (les deux lettres). Get ouvrage du quatrieme Thsai-tseu serail aussi inconnu chez nous que le P'ing-kouei- tchouen et le Pe-kouei-lchi, si M. Sta- nislas Julien ne s'elait donne la peine de le Iraduire, en 1845 (*). Pour came- leriser le P'ing-chan-ling-yen, nous dirons qu'il est un chef-d'oeuvre du Wen-tchang (style litteraire). Dans tout le cours du roman, Tauteur sem- ble n'avoir d'autres soucis que la re- cherche des plus belles figures et le jeu des syllabes a double entente. II n*y a ni intrigue, ni episodes, ni comhiuni- sons dramatiques. L'interfit, je le re- pete, est dans le style. « Ces morceaux de belle prose , ob- serve, ausujetduW^n-tchang, M. Abel Remusat, oii I'on decrit uniquement pour decrire, et ou I'auteur se propose surtout de faire preuve de talent et de bel esprit, sont, il faut I'avouer, des ornements deplaces , particulieremenl dans le style le plus nabituel des re- mans chinois, dont les sujets ne com- portent pas, en general, une grande elevation. Effectivenient, les personna- ges qu'on y voit le plus souvent figu- rer sont rarement pris dans I'ordre le plus illustre, celui des rois etdes prin- ces. Ce nesont pas non plus des indi- vidus apparlenant a la derniere classe ; mais bien des personnes de moyen elat et des rangs intermediaires de la so- ciete, des magistrals, des gouverneurs de villes ou de provinces, des prefets ou des sous-prefets, des conseillers d'Etat ou de simples lettres. Le langage em- ploye par ces divers personnages est d'ordinaire assorti a leurs conditions. Les subalternes et les personnages vul- (*) La traduction de M, Julien a ete pu- hliee dans la Bibliotheque cboisie du Cons- titutionnel. CHINE MODERKE. J97 gaires se serveiit de la iangue com- mune; mais la niauiere de parler des lettres est toujours plus ornee, etquand ils entrent en p.onversation les uns avec les autres, leur style devient si fleuri , tenement riche en metaphores et en expressions poetiques, qu'il en est quel- quefois inintelligible : ce sont comme des enigmes qu'ils se donnent a deviner les uns aux autres, ct auxquelles il est (I'usage derepondre dans les plus beaux termes imaginables. C'est une profu- sion de traits d'esprit, un deluge d'i- mages ingenieuses, d'emblemes recher- ches et d'aliusions savantes sur les- quelles le dernier venu doit toujours s'efforcer d'encherir. L'histoireancien- ne et moderne , les anecdotes particu- lieres, les usages de Tantiquite, les tra- ditions locales, les prejugesrelatifs aux actions de la nature , aux proprietes des plantes ou aux habitudes des ani- maux, les fables, enlin, tout est mis a contribution dans ces enlreliens doctes et fleuris, tout concourt a embellir le langage des gens bien eleves... II s'est forme de cette maniere un vocabulaire de locutions bizarres et ampoulees, de termes alambiques et emphatiques, d'oii les mots propres et les plirases simples sont soigneusement bannis,.. C'est un trait du caractere national qu'on doit se garder d'effacer, au risque de cho- quer les gens de godt; car il ne faut pas que les lettres de la Chine passent pour etre plus simples dans leurs ma- nieres, ni plus naturels dans leur facon de s'expriraer qu'ils ne le sont en rea- lite. lis perdraient trop eux-memes aux ameliorations qu'on voudrait apporter a leur langage ; ce ne serait pas la peine de faire de si longues etudes, etde pa- lir toute sa vie sur les ecrits des an- ciens, pour parler ensuite comme tout le monde, et n'employer que des termes d'un usage universel (*). « Nul roman peut-etre n'offre une plus belle matiere a la critique et a I'erudi- tion que le P'ing-chan-ling-yen. On ne s'etonnera done point que M. Stanislas Julien ait regarde la traduction fran- caise d'un tel ouvrage comme insuffi- (*) Voyez le Yu-kiao-li, rotnan chinois, traduit par M. Abel Remusaf, preface, p. xx a XXIV. 32' Livraison. (Chine moderne.) sante, el qu'il en prepare le commen- taire. Un commentaire sur un auteur chinois, ecrit par M. Julien, ne saurait manquer d'etre instructif, complet, ap- profondi. Nous citerons ici un fragment du premier chapitre , oij se trouve la des- cription d'un magnifique festin donne par I'empereur. Description d'un banquet imperial. « Sous une dynastie illustre et flo- rissante des temps passes... on comp- tait, dans la ville de Tchang-ngau (la capitale), neuf portes et cent carrefours, six grandes rues, trois marches, trente- six maisons de plaisir, et soixante-douze pavilions. On voyait circuler en foule des magistrats en costume de ceremo- nie ; I'air retentissait au loin du bruit des coursiers et des chars ; parlout on se rejouissait au son des instruments de musique... « Un jour, le fils du ciel s'etant ren- du de bonne heure au palais, les offi- cierscivils et militairesvinrent en foule lui presenter leurs hommages et leurs felicitations. La cloche du matin reson- nait dans la salle d'or, et la garde di- vine etait rangeesur les degres de jade; c'etait un spectacle aussi magnilique qu'imposant. Apres que tous les magis- trats eurent fini de se prosterner de- vant I'empereur, et de lui souhailer de vivre dix mille annees , chacun d'eux rentra dans son rang, et y resta droit et immobile. « Tout a coup , un officier du palais s'ecria a voix haute : « S'il y a quelque affaire importante, qu'on se hSte de I'an- noncer a Sa Majeste ! » « II n'avait pas acheve de parler, qu'on vit un magistrat sortir des rangs; il portait un bonnet de crepe noir, et te- nait dans sa main une tablette d'ivoire. II se jette a genoux sur les dalles rou- ges, et s'ecrie : « Tchang-kin, president du tribunal imperial d'astronomie, aun evenement d'une grande importance a annoncer! » « L'empereur lui ayant fait deman- der quel etait cet evenement : « Cette nuit, repondit-il, comme j'observais I'aspect du ciel , j'ai vu des nuages et des vapeurs d'heureux augure enve- lopper le cercle circompolaire; j'ai vu 83 408 L'tNlVKRS. d€8 etoiles doiit I'eclat aunonce la joie et le bonheur briller pres de la route iaune(i'ecliptiqup)... J ose supplier Vo- ire Majeste d'ordonuer au tribunal des rites de publier dans tout Tempire un decret de felicitations , et dexalter la paix, rharnionie et les changements sa- futaires que la generation presente doit a notre auguste souverain. J'ai observe en outre que les six etoiles de W^n- tchang brillaient d'un double eclat. Tout ceia nous presage que des lettres eniinents du jardin de la litUrature repandront un grand lustre sur votre administration sage et eclairee. Mais, ce qui est digue surtout d'exciter I'ad- iniration, c'est que la constellation Kotiei-pi repandait des flots de clarte aui inondaientl'univers: c'est signe que ans Tenvpire il doit naitredes homines d'un genie extraordinaire, et telsqu'on n'en aura point vu de seniblables dans aucun siecle. Comme le ki-lin et le plie- nix , ils se tiendront caches dans des asiles profonds et recules... Je supplie Votre Majeste de coivvoquer le tribu- nal des rites, afin qu'apres en avoir miireinent delibere, ii envoie dans les differentes parties de I'empire des com- missaires pour rechercher et decouvrir les hommes capables de vous seconder dans vos augustes desseins. » « A pres que le (ils du ciel eut enten- du ce rapport, une vive allegresse eclata sur sa face majestueuse. « Je n'upprouve pas, dit-jl, qu'on me decrete des fe- licitaiious; mais les hommes de ta- lent sont le tresor du royaume ; je ne puis permettre qu'ils restent caches dans 1 obscurite. .Pordonne au tribunal des rites de deliberer sur ce point, et d'envoyer des commissaires pour les rechercher et les decouvrir. » « A peine cet ordre imperial etait-il rendu , que le president du tribunal des rites sortit des rangs. « Sire, dit-il, puisquc la saintete et les lumieres de Votre Majeste ont ete annoncees par des signes celestes, il etait convenable de decreler des felicitations. En s'y re- fusant, par exces d'humilite, le souve- rain qui merile de vivre dix mille ans n'a fait que montrer davantage la gran- deur de sa veriu. Cependant le progres des moeurs publiques a une liaison in- Urae avec les revolutions de chaque epoque; comment pourrait-on le tenir cache , au lieu de le reveler au grand jour?... Sans doute, il est permis d'en- voyer des commissaires a la recherche des hommes de talent; mais, d'apres les lois etablies par les anc^tres de Vo- tre Majeste , c'est au moyen des exa- mens publics et des concours que les hommes de talent doiventse recruter; si on les appelle maintenant en vertu d'une ordoniiance , on leur conferera done arbitraireinent des grades et des emptois! Que devieudraient alors les examens publics ? Par la on s'ecarte- rait, je le crains, des vuesqui ont guide vos ancetres, lorsqu'ils ont fonde la belle institution des concours. Voici mon humble opinion : le parti le plus mile est de recommander aux di- recteurs des colleges de chaque pro- vince (ie donner des ordres severes aux niagistrats des villes de premier et de troisicme ordre, pour qu'a I'epoquedes examens annuels ou du concours gene- ral ils s'appliquent ardemment a re- chercher, en dehors du nombre rcgu- lier des concurrents inscrits, les hom- ines d'un vrai talent , et a les porter d'oflice sur la liste du concours. Qu'on decide, en outre, que les magistrats des villes de premier et de troisieme ordre obtiendront de I'avancement ou se verront abaisses , suivant qu'ils au- ront decouvert ou neglige de signaler des hommes de talent... Je supplie no- tre auguste souverain d'examiner cette importante question, et de la decider. « « Le fils du ciel lut enchante de ce rapport : « Les avis de Votre Excel- lence, dil-il, sont d'une parfaite jus- tesse; j'ordonue qu'on se conforme a votre proposition , et qu'on I'execute sur-le champ! » « Les membres du tribunal des rites, ayant recu ce decret, s'avancerent a la t^te de tons les autres magistrats , et saluerent I'empereur, en lui souhaitant de vivre dix mille annees. Apres avoir recu leurs hommages, le Ills du ciel rentra dans son palais, et tous les ma- gistrats se retirerent. «Ce jour-la, des que le tribunal des rites eut publie I'ordre imperial , tous les mandarins qui se trouvaieiit dans la capitale ecrivirent chacun une lettre de felicitations , et viurent, I'un apres Chine moderne. 499 I'autre, la presenter a I'empereur. Ces lettres , qui n'avaient d'autre but que de louer les merites du souverain et d'exalter ses vertus, n'etaient pas d'une grande consequence; mais cliacund'eux, jaloux de montrer son talent, avail de- ploye toutes les ressources de I'art , etale toutes les rrichesses du stye. Le fils du ciei se rendit en personne dans la salle laterale, et les examina lui- meme avec le plus grand soin. II re- inarqua dans toutes ces pieces des ex- pressions d'une beaute nierveilleuse et des passages fails pour exciter I'admi- ration; son ame sainte en fut Iranspor- tee de joie : « Je reconnais maintenant, dit-il, que le president du tribunal de I'astrononiie ne ni'a point Irompe en annoncant la spiendeur eclalante de la consteHation Wen-tcbang. Je suis tou- clie des felicitations que m'ont pre- sentees lous les magistrals; il convient que j'y reponde, en les invitant a un banquet; solennel. » « Aussitot il ordonna a lous les ma- gistrals de se reunir le douzieme jour de la troisienie lune, aupres de la porte appelee Touan-men, pour prendre part au bar.quet imperial. « Des que ce decret fut rendu, tons les magistrals firent eclater, en baltant des mains et en dansant , leurs trans- ports de joie et de reconnaissance. « Le jour du festin elant arrive, on put juger que le gouvernemenl ^tait bonnete , el que le ciel lui etait favo- rable. En effet , ce jour-la le ciel etait pur et ratniospheie transparente ; le soleil repandait une douce cbaleur, le vent etait calme, et une multitude de fleurs etaient epanouies. Le fils du ciel se rendit en personne a la porte appe- lee Touan-men. Au bas des degres qui y conduisaient, on voyait etaUs avec ordre les mels du festin imperial. Lors- que lous les magistrals eurenl iini de presenter leurs hommages a I'empe- reur, il ne resta que quelques membres du conseil prive (quelques ministres), qui prirent place a la table imperiale. Tous les autres fonctionnaires, suivant I'importance du bureau dont ils fai- saient partie, etaient ranges el assis au bas des degres. Sur chaque table, le fils du ciel ordonna de placer un pot de fleurs renommees du jardin imperial. En entendant eel ordre, lous les magis- trals frapperent la terre de leur front pour remercier le souverain de ce nou- veau bienfail; puis chacun alia s'as- seoir a sa place. Au bout de quelques instants, on entendit resonner la musi- que du dragon et du phenix , el Ton vil servir dans des vases de jade les mels les plus rechercbes. On peul dire que rien ne saurail se comparer a la magnificence de I'empereur. Nous td- cherons d'en donner une idee. « La fortune de I'empire brillait du « plus grand eclat; on contemplait ce- « lui qui se dit un simple moriel (I'em- « pereur) conime le soleil et la lune qui « regnent au milieu du firmament. Ses « augustes bienfaits s'etendaient com- « me une mer sans bornes; mille ma- « gistrats etaient reunis dans la salle « de la fleur Fou-yong {hibiscus rosa « sinensis) ; les beaules du printemps <> inondaient le palais de Kien-lcbang ; « I'oreille etait charmee des modula- « lions du loriot, dont I'aile effleurait " la terre ; tout le palais , resplendis- « santde bannieres rouges, vous eni- « vrait de couleurs eblouissantes. Les n mets provenaient des pares de I'em- pereur. On y remarquait des foies de dragon, de la moelle de phenix, des petils de leopards , des levres de sing-sing, des bosses de chameau, des^ paumes d'ours , des grillades de hiao et des queues decarpe. Les pro- duits les plus rares des montagnes et des mers etaient etales avec profu- sion. On ne finirait pas dedecrireles saveurs exquises des hull tresors de sa table. La musique qui resonnait etait celle du palais : on ne se lassait pas d'entendre les paroles el les sons barmonieux de ces airs neuf fois re- petes. Du milieu des rangs, les ri- ches costumes etincelaient aux rayons du soleil. On voyait des v^tements ornes de cigognes, de faisans dores, de paons, d'oies, de faisans blancs, de cormorans, de huppes, de cailles, de pies, de loriots. Ceux qui portaient ces vetements etaient places, les uns en avant, les autres en arriere, et formaient une multitude aussi nom- breuse qu'imposante. Au bas des n degres, les bonnets et les diademes <• brillaient comme des ^toiles. On dis- 32. fiOO L'UWIVERS. « tinguait le bonnet de ceux qui pre- « sentent les sages {le bonnet des let- « tres), le bonnet de lynx (celui du « bourreau), le bonnet de faisan dore « (celui des surintendants de cliaque •• ininistere), le bonnet a ailes de ciga- « les (celui du guerrier), le bonnet a « queue de pie (celui d'un chef de can- a ton), le bonnet a colonne de fer (ce- rt lui du juge criminel), le bonnet a sur- « face doree (celui des astronomes), « le bonnet de ceux qui repoussent les « mechants (celui des gardiens du pa- ct lais), le bonnet de j'amitie et de la « deference (celui du magistrat qui en- « seigne les rites). Tous ces oiGciers « etaient remplis d'une crainte respec- n tueuse. Les uns se retiraient, les au- « tres accouraient pourrecevoirde pres « les ordres bienveillants du souve- « rain : ils contemplaient tous ia joie « qui animait le visage celeste (de I'em- « pereur); tous sentaient avec emotion « la douce rosee (de ses bienfaits) qui a se repandait d'une maniere egale ; « tous savaient que sa bonte ne con- « naissait pas la partialite... Se cour- « bant avec humilite pour accomplir « leurs devoirs, ils celebraient la pro- « tection du ciel (de I'empereur) qui les « enivrait et les rassasiait de ses grd- « ces. « Lorsque le prince disait oui, sou- « vent les miuistres disaient 7ion; ils « auraient rougi de se preter a des flat- « teries complaisantes.Ilsnedesiraient « guere se retirer sans ^tre ivres; niais « comme 11 y avait a gauche un ins- « pecteur, et adroite un historien, quel « est celui qui aurait ose manquer aux n convenances? Le prince, voulant met- « tre le comble a la joie de ses ofliciers, « leur faisait distribuer, par respect « pour les anciens usages de sa dynas- « tie, la chanson oii Ton c^lebre les mi- n nistres enivres par ordre imperial. « Les sujets, emus des bienfaits de « I'empereur, choisissaient quelques- « unes des roeilleures exhortations des « siecles passes, et lui presentaient, « avec une noble fraternity, la petition « pour I'eloignement de Y-ti (qui in- « venta I'art de faire du vin). Au bruit « des tambours et des cloches, des (1(1- « tes et des guitares , on vidait des cou- « pes joyeuses. Le ciel et la terre Etaient « unis dans une douce allegresse ; on » souhaitalt a I'empereur une longevite « de dix mille ans , une existence sans « bornes, comme ceiie du soleil et de « la lune, des montagnes et des col- « lines. » « Apres que le prince et les sujets eu- rent bu assez longtemps, les membres du conseil prive (les ministres), voyant que la musique avait ete executee a trois reprises, et que le vin avait circule ncuf fois, craignirent que la multitude des officiers ne s'ecartat des convenances, lis quitterent leurs sieges, et, se met- tant a la tete des convives, ils allerent se prosterner devant I'empereur : « Sire, dit I'und'eux, gracea votre bonte sainte, nous avonspris part a un splendide fes- tin; nous venons, a la tete des magis- trals, vous offrir nos remercimenls. » C HOUi-HOU-TCHOUEN, Ouvrage du cinquiime Thsaitseu. Le Chou'i-hou-tchouen , ou CHis- toire des rives du fleuve, est un ro- nian celebre, oii figurent plus de cent personnages principaux, sans compter les agents subalternes; un roman dune enorme et volumineuse prolixite, car il n'a pas moins de soixante-dix livres. Tous les chapitres se divisent regulie- rement en deux parties, et I'ouvrage presente la singuliere complication de cent quarante intrigues differentes. Get ouvrage, que Fourmont avait pris pour une histoire de la Chine, au troisieme siecle; M. Klaproth , pour un roman historique, et M. Abel R6musat, pour un roman semi-historique de la meme nature que le San-koue-tchi , est pres- que tout entier d'invention : c'est le premier roman comique des Chinois. Quoiqu'on le reimprime tous les jours a mi-page avec le San-houe-tchi , on aurait tort de le regarder comme le pendant de V Histoire des trois royau- mes. Toutes les parties du livre sont trail^stron plaisammentpour etre his- toriques. II ne me semble point que Chi-nai-ngan ait voulu imiter Lo-kouan- tchong, et lutter avec I'Histoire des trois royaumes dans le roman Choui- hou-tchouen, qui contient pourtant une foule de tableaux analogues, et dont le sujet est pris dans I'histoire d'une CHINE MODERNE. 501 guerre sociale. A I'exception du prolo- gue, le Choni-hott n'est point imite du San-kom; Chi-nai-ngan a travaille d'a- pres lui-m^me. Sa maniere est plus na- turelle que celle de Lo-kouan-tcliong, plus agreable. Lo-kouan-tchong se borne a raconter les faits; Chi-naT- ngan cherche a peindre les moeurs; il a plus de scenes a effet, mais il s'arrete sur des details trop minutieux, quelque- fois meme sur des puerilites. II ne taut pas comparer, quant au style, le Choui- hou-tchouen au Sankoue-tchi. Le ton du San-koue-tchi , roman heroique, est plus noble quecelui du Choui-hou- tchouen, qui n'est qu'un roman comi- que. Avec le style concis et serre du San-koue, I'auteur duChoui'hou n'au- rait jamais pu descendre, comme il I'a fait, au ton naif du badinage et de la conversation familiere. II y a done une grande difference en- tre le San-koue-tchi et le Choui-hou- tchoiien. La variete des episodes, des tableaux et des portraits , la multipli- cite des aventures, et un dialogue ani- iTie , recommandent particulierement le Choui- hoU'tchouen. Un tel ouvrage convenait surtoutaux imaginations ac- tives et mobiles. II est aimedes jeunes gens. « Les jeunes gens ne lisent pas le San-koue, ditun proverbe chinois, les vieillards ne lisent pas le Choui-hou. » Mais I'amusement que ce livre procure a la jeunesse chinoise n'est pas son seul merite ; il peut servir a donner une idee tres-exacte du caractere et des moeurs des Chinois audouzieme siecle denotre ere, dans un temps oii la grande dynas- tie des Song penchait vers son declin, ou le pays, avant de subir la domination des Mongols, etait ravage par la peste, la famine et le brigandage. Le Choni-liou-tchouen est un monu- ment precieux du Kouan-hoa ou de la langue commune. Ce celebre ouvrage , qui parut pour la premiere fois sous le re^nedes empereurs mongols, fut reim- primeversl'an 1650, avec un commen- taire perpetuel , par Kiu-ching-than , auteur d'une version du San-koiie- tchi, ecrivain d'un grand merite, et donl j'ai deja parle. II a intitule ce ro- man Chi-nai-ngan-kou-pen-choxd-hou- tchouen, « Histoire des rivages, con- forme a I'ancienne edition de Chi-nai- ngan. » Depuis Kin-ching-than, on a pu- blic une edition du Choui-hou-tchouen, intitulee Choui-hou-thsiouen-chu, « Edi- tion complete de I'Histoire des rives du fleuve, » et qui contient cent vingt chapitres au lieu de soixante-dix. J'ai lu avec beaucoup d'attention le nouveau Choui-hou-tchouen (c'est-a-dire les cinquante chapitres ajoutes a I'ancien), et J'ose affirmer qu'on n'y trouve pas le meme fond d'interet, ni dans les carac- teres, ni dans les situations. C'etait d'ailleurs I'opinion du P. Premare, qui recommandait aux missionnaires la lec- ture du Choui-hou-tchouen ; il prefe- rait I'edition de Kin-ching-than. « Sed ut secretus htijus libri sapor melius sentiatur, emendus erit qualis ab inge- nioso Kin-ching-than fuit editus, cum notis , quibus mirum authoris artiji- cium primus detexit. » Cependant le Choui-hou-tchouen , quelque excellent qu'ilfOt juge d'ailleurs, sous le rapport de la composition et du style, fut mis h I'index quelque temps apres la publica- tion de Kin-ching-than (1 695), par Pem- pereur Khang-hi, comme capable deper- vertir les inclinations les plus deuces et les plus bienfaisantes. C'est precisement a ce titre que le roman paraitra plus re- marquable. Pour que des personnages comme Song-kiang, Tseou-ming, et tant d'autres , qui ne sont que des chefs de brigands, inspirent un interet si vif , il faut que Chi-nai-ngan ait du merite, et meme beaucoup de merite. Le Choui-hou-tchouen est une composition qui echappe a toute ana- lyse. Le lecteur jugera de la variete des tableaux et de la multiplicite des episodes par la table des matieres que je vais presenter et par les extraits qui la suivront. II y a peut-etre dans ce roman une trop grande multitude d'a- ventures; mais comme I'interet se con- centre sur quelques personnages , I'at- tention n'est point fatiguee. Table des matieres contenues dans les deux premiers volumes du Choui-hou-tchoueu (edition de la Bibliotlieque nationale). FROT.OGUK. Peste de Kha'i-fong-fou. Decrel de I'empe- reiir. Mission du goiiverneur du palais. Un pelerinage a la montagne d^s Dragons et des Tigres. Conference du gouverneur avec les 503 L' UNI VERS. Tao-SM. Comment il ki*»c echapper dans sa mepri&c des demons et des etres surnalnrels. Le grand roaiire de la doctrine conjure, par des nrieres cl des sacrifices, une nialadie pesliientielle. CHAPITRE PREMIER. Mtxurs de la cour imperiale des Song , a ri-poque de la decadence. Jcunessed'un pre- mier ministre. Histoire et avenlnres de Kao- Khieoii. Portrait de Siao-wang-lou , gouver- neiir du palais imperial. Histoire du prince de Touau. Par quel hasard Kao-khieou gagiie la favenr dti prince, et comment il devint premier ministre. Histoire de Wang-tsin. De quel stralageme il use pour prendre la fuite. Le village Sse-kia ou des families Sse. Aven- lnres de Sse-tsin, suniomme le Dragon a neiif raies. Histoire des brigands du mont Chao'hoa. Tchou-wou, Yang-tchun el Tchin- ta. Combat de Sse-tsin et de Tchin-ta ; quelles eu fureut les suites. CHAPITRK II. Conference de Sse-tsin avec les chefs mi- litaires. Meurtre de Wang-sse. De la reso- lution que prend Sse-lsin de meltre le feu a sa ferme. Comment ii se venge de Li-ki. II accompagne les brigands sur le mont Chao- hoa. Voyage de Sse-tsin. II fait connaissance avec Lou-ta dans une caveme du Hoei'-tcheou. Quel homme c'etait que Lou-ta. Histoire de Li-lchoug. De la rencontre que Lou-ta et ses compagnons firent d'une jeune femme qui ])leurait. Histoire de Kin-lao et de sa fille Tsoui-lien. Du dessein que forme Lou-ta de venger I'injure faite a la jeune femme. Meur- tre du boucher Tchin-tou. Fuite de Lou-la. CHAPITRE III. Par quel basard Lou-ta reconnatt Kin-lao. Histoire de Tcbao, le yoiien-wai (litre bo- noriOque). Description d'un repas. Lou-la se retire dans le village des Sept-Diamanls. Quels motifs i'eugagent a embrasser la pro- fession religieuse. Histoire du monastere de Mandjous'ri. Ordination de Lou-ta. Descrip- tion des ceremonies de la tonsure, de la prise d'habits et de Timposition des mains. Comment le neophyte quitte son nom et s'appelle, en religion, Savoir-projond. Hor- rible scandale dans le monastere. Represen- tations faites par les bonzes an superieur. De quelle maniere Savoir-profond viole les preceptes et les regies du bouddhisme. Mar- chc public. Comment les habitants d'un vil- lage relevaienl du superieur d'un monastere. Nouveaux scandales. Intemperance de Savoir- profond; il brise, dans son ivresse, les sla- lues des saints et detruit un belvedere. Sa- voir-profond est exdu d« la communaute. CHAriTRF. IV. Depart de Savoir-profond pour le mo- nastere de Tong-king. II passe par le village Thao-hoa ou des Fieurs de peclier. Quelle personne il trouva dans nne ferme. Conver- sation de Savoir-profond avec le fermier Lieuu. Un raariage force. Des preparatifs qui se firenl dans la ferme et ailleurs pour ce mariage. Cortege et toilette du fiance. Quel homme c'etait que ce fiance. Important service que Savoir-profond rend it au fer- mier. Par quelle singuliere aventure les no- ces furent tout a coup interrompues. De retonnement ou fut Tcheou-thong de Irou- ver un hnmme extraordinaire sur le lit de sa fiancee. Orage de coups de poings dans la chambrc nuptiale. Frayeur ties brigands. Comment Savoir-profond reconnut Li-tcbong parmi les chefs. Le fermier et le religieiix acceptent une invitation de IJ-tchong, et accompagnent les brigands sur la inontagne. Reconciliation de Tcheou-thong avec Savoir- profond. Comment on pretail sermeut sous les Song. De quelle maniere Savoir-profond fut traite par les brigands, et des sages re- flexions qu'il fit a ce sujet. Belie conduite du religieux. II se brouille avec les brigands et continue son voyage. CHAPITRE v. Description d'un monastere abandonne , ct quelles choses y vit Savoir-profond. De la rencontre qu'il fit d'un bonze qui chan- tait une romance. Une jeune femme reduite au desespoir se jette dans un puils. Par quel hasard Savoir-profond iroiiva Sse-tsin dans une foret. Comment ils se separent. Savoir-profond prend la route du Tong-king, arrive dans la capitale, ct se presente au convent des ministres d'£tat. De quelle fa- con ct avec quel costume il est inlrodiiit ])ar les bonzes dans la cellule du superieur. Organisation des services dans le monastere ; mode d'a^aucement. Savoir-profond est noni- me regisseur du potager. CHAPITRE VI. Quelles mauvaises gens Savoir-profond trouva dans le potager du monastere. His- toire de Tchang-san , surnomme le Hal des rues, et de Li-sse, surnomme le Serpent des prairies. Do la singuliere aventure qui ieur arriva, lorsqu'ils voulurent plaisanter avec Savoir-profond. Portrait de Lin-tchong. Com- ment Kao , membre du conseil d'l^tat et fils dn gouveriieur du palais imperial , aper^ut la femme de Lin-tchong dans le temple des Cinq ~ Montagnes et en devint amoiireux. Quel parti prit Lia-tchong apres cetteaven- CHINE JVJOPERNE. 5{)3 ture. Maiivais succes des intrigues de Kao; tentalives d'enlevement. Le gouverneur du palais imperial se montre favorable au\ amours de son fils , et ordonne le meurtre de Lin-tchoiij;. Par quel accident Lin-tchong entra, i>ans le savoir, dans la salle du con- seil. cHAPiTRE vri. Jugement de Lin-tchong ; probite de Sun- ting. Comment la justice s'administrait sous les Song , dans le tribunal de Khaifong-fou, Lin-tchong recoil la bastonnade ; il est con- damne a I'exil. De la conversation tonchante que Lin-tchong eut avec sa femme, et du conseil qu'il lui donna. II quitte la capilale pour se rendre a Tsang-tcheou. Comment les deux archers qui conduisaient Lin-tchong rattacherent a un arbre dans une foret; ce qu'ils voulaient faire. CHAPITRE VIII. Par quel hasard Lin-tchong apercut Sa- voir-profond dans la foret, au moment ou les archers se disposaient a executer les or- dres du gouvernenr imperial. Conversation de Savoir-profoud avec les archers. Gene- rosite de Lin-tchong; il sanve la vie a ses assassins, et reprend la route de Tsang-tcheou. Ferme de Tchai-lin. Quel homme c'etait que Tchai-lin. Histoire du commandant Hong. Une partie d'escrime. De quelle maniere Lin- tchong flit recu et traite dans le camp de Tsang-tcheou. Corruption des fonctionnaires. De I'embarras oil se trouve Lin-tchong, et comment il en sort. CHAPITRE IX. Lin-tchong rencontre Li-tchai. De la cn- rieuse conversation qu'ils eurent ensemble. Comment Lin-tchong obtint du gouverneur du camp la permission de faire une prome- nade dans les environs de Tsang-tcheou. Rela- tion de celle promenade. Lin-tchong s'arrete dans une chauraiere. Description d'un ancien temple , qui etait consacre au genie de la montagne de Tsang-tcheou , et dont la facade representait d'un cote un juge et de I'autre nn petit demon. De ce qui se passa dans le camp de Tsang-tcheou apres le depart de Lin-tchong. Incendie du niagasin a fourrage. De ce qui empecha trois hommes d'executer une abominable resolution. Vengeance de Lin-tchong. II retourne dans le temple, et depose trois tetes sur la table des sacrifices, an pied de la statue du genie. De quelle fa- ^on les paysans eteignirent I'incendie du camp. Retour de Lin-tchong a Tsang-tcheou. CHAPITRE X. Comment Lin-tchong est accuse d'avoir mis le feu an magasin ije f jang-tcheou. Fuite de Lin-tchong. Dans quel accoutrement il partit pour le mont Liang-chan. Histoire des brigands du mont Liang-chan ; Wang-lun, Thou-thsien et Song-wan. Un bachelier sans place. De I'accueil que les brigands firent a Lin-tchong. Portrait de Tchu-kouei. Quel homme c'etait que Tchu-kouei. Lin-tchong fait connaissance avec nn personnage extraor- dinaire. CHAPITRE XI. Histoire de Tang-tchi. Cnneuse conver- sation de Wang-lun et de Yang-tchi. Une entrevue avec le premier minislre. Quel homme Tang-tchi rencontra, et de quel eve- nement cette rencontre fut suivie. De quelle fa^on Yang-tchi se constitua prisonnier, apres avoir commis un meurtre. Histoire de Liang, commandant en chef de I'armee de Ta-ming- fou. CHAPITRE XII. Description d'un grand lournoi dans le faubourg de I'Est. Le commandant et les principaux officiers de la garnison assistent a cette fete. Combat a cheval de Yang-tchi et de Tcheou-kin ; costumes militaires du temps des Song. Histoire d'un magistrat du Chan- tong. Portraits deTchu-tong, commandant de la cavalerie , et de Loui-hong , comman- dant de I'iufanterie. La pagodede Lin-kouan. Comment les soldats de Loui-hong emme- nerent nn homme qui dormait dans la pa- gode. CHAPITRE XIII. Histoire de Lieou-tang, surnomme le J)e- mon aux clieveux rouges. Par quel hasard il se trouvait dans la pngode , quand il fut ar- rete par les soldats de Loui-hong. Quel hom- me c'etait que Tchao-khai. De la reputation dont il jouissait dans son district. Comment il accueillit Lieou-tang, et du service qu'il lui rendit. CHAPITRE XIV. Conversation de Tchao-khai avec Loui- hong. Histoire des trois freres Youen. Cos- tumes des pecheurs. Des exactions commises par les brigands dans les villages. Du projet important que forma Tchao-khai, et de quelle maniere il fut execute par On-yong. Recep- tion amicale que Tchao-khai" fit aux trois freres Youen. Entretien secret de trois pe- cheurs, de Tchao-khai, de Lieou-tang et de Ou-yong, sur la politique et I'administration. Comment et par qui cet entretien fut infer- rompu. Quel homme c'etait que le Tao-sse Kong-sun-tching. 504 L'UNIVERS. CalPITKX XT. Conciliabulc de Tcliao-khai, Ou-yong, Rong-sun-tching, Lieou-tang et des Irois p6- cheiirs. De la resolution qu'ils ferment en- soiiible. Comment ils se separerent. Conver- sation avec Yang- Ichi. Yang-tchi est ciiargc d'une mission dangereiise. De quelle maniere il rencontra dans une for^t sept niarchands qui vendaicnl des jujubes. Des inquietudes de Yang-tchi. CHAFITRE XVI. Yang-tchi continue son voyage. De la ren- rootre qu'il fit dans une holellerie. Hisloire de Tsao-tcliing. Le monaslere des Perles pre- cieuses, on de la monlagne des Detix- Dra- gons. Comment les bonzes de ce monastere, au Dombre de cinq cents, laissent croitre leurs cheveux et renoucent a la vie religieuse. lis pillent les villages. Combat de Savoir- profond et de Yang-tchi. Reconnaissance. De quelle maniere Savoir-profond , Tsao-tching et Yang-tchi s'introduisirent dans le con- vent des Perles precicuses. A.ventures de Ho- Ising et de son frcre. CHAFITRE XVII. Oil mene la passion du jeu. Ho-tsing perd son argent, et devient teneur de livrcs chez un marchand. Histoire de Sonf-kiang et de sa famille. Entretien de Song-kiang avec Ho- thao. Par quel incident Tchao-khai, Ou- yong, Kong-sun-ching et Lieou-tang se Irou- vent dans la necessite de prendre la fuite. Des provisions de voyage qu'ils firent avant de se metire en route, el de ce qui se passa quand ils arriverent dans le village des Ko- chers. CHA.PITRE XVI II. Exploits de Tchao-khai et de Kong-sun- tching. Comment ils se derobent aux poursuites des archers. Incendie d'une ferme. Fidelite des trois freres Youen. Prp paratifs dans le |)orl des Rochers. Le commandant Ou-thao interroge un villageois. De quelle facon Ou- thao fut jete dans un (leuve par des pecheurs. De I'entretien de Tchao-khai et de ses ca- marades avec Lin-tchong, et de la resolu- tion qu'ils forment ensemble. Lin-tchong tue Wang-lun, CBAFITRE XIX. Comment Lin-tchong reciit des nouvelles de la capitale, et apprit que la femme de Tchang-tsing s'etait pendue. Violence dont le goiiverneur du palais imperial voulait user envers cette femme. Curieuse conversation de Tchao-khai avec Kong-sun-tching. Inquie- tude et vigilance des mandarins. Histoire d'une veuve (madaroe Yen) qui n'avait pas le moyeu d'acheter un cercueil pour son mari. Charite de Song-kiang. II entretient et picud a bail la fiUe de la veuve. Des suites facheuses de ce contrat. District de la Chine oil les hommes et les femmes obscr- vaient la fidelite conjiigale. Quelle reception Song-kiang fit a Lieou-tang. CBAPITRE XX. Intrigues de madarae Yen et de sa fille Po-si. De la chastete de Song-kiang, et de quelle maniere il passait les nuits avec sa concubine. Singuller entretien qu'il cut avec un employe du tribunal. Amours de Tchang- san el de Po-si. Song-kiaug refuse de juger Po-si sur les apparcnces. Comment Po-si trouva dans un portefeuille la correspoiidance de Song-kiang avec Tchao-khai , el du parti qu'elle voulut en tirer. Injustes proccdes de Po-si. Song-kiang, dans un acces de co- lore, tue sa concubine. De quelle facon ma- dame Yen se consola de la perle de sa fille. CHAFITRE XXI- Proces intente a Song-kiang; plaiiite de madame Yen. Interrogatoire de Tang-nieou- eul. Le juge decerne un mandal d'amener contre Song-kiang, De quelle manier-eet sous quel costume Song-kiang pril la fuile avec son frere Song-tsing. Perquisitions failes a la campague dans la ferme du pere de Song- kiang. De ce qui se passa dans la ferme de Tchai-lsin. CHAPITRE xxir. De la rencontre que fit Song-kiang dans la ferme de Tchai-lsin. Histoire de Wou- song. Entretien de Song-kiang avec Tchai- tsin. Wou-song relourne dans son pays natal. Comment il apercut un placard affiche sur la porte d'un temple en mine et contenant un avis du gouverneur aux habitants du district. Force extraordinaire de Wou-song. Il ter- rasse un tigre dans une foret et le tue avec son cimeterre. Honneurs rendus a Wou- song; il est nomme major de la garde du dis- trict, CHAPITRE xxiir. Histoire de Wou-ta, frere de Wou-soug. Comment il epouse Kin-lien. De la curieuse reception que Kin-lien fit a son beau-frere. Chastete de Wou-song. Mission delicate con- feree par un gouverneur. Hisloire de Si- men-khing , celebre debauche de la dynastie des Song. Ses liaisons avec une entremetteuse de bas elage. Quelle femme c'etait que ma- dame Wang. Amours de Kin-lien et de Si- men-khing. CHAPITRE XXIV. Suite des amours de Kin-lien el de Si-men- CHINK MODERNE. 505 khing; ils s'abandonnent a la voluple. De quelle inaniere Woii-la , etant lombe malade, flit Iraite par sa femme Kin-lien, et du poi- son qu'elle lui administra. Derniers moments de Wnu-ta; sa mort. Hypocrisie de Kiu- lien. CHAPITBE XXV. Obseques de Wou-ta. Toilette du mort ; ceremonial funebre; office religieux; convoi. Kin-lien, vetiie d'une longue robe de deuil, marche a la tete du cortege. Fatisse incinera- tion du corps. Ho-kbieou-cho derobe le cer- cueil de Wou-ta. Retour de Won- song. Com- ment il apprend la mort de son fiere. Du cliagrin qu'il en ressentit , et de la conversa- tion qu'il eut avec sa belle-soeur. Il offre un sacrifice; apparition de Won ta. Revelations failes par nn enfant. Eutretien de Wou-song avec Ho-khieou-cbo. Etrange festin auquel il convie Kin-lien et madame Wang. II venge la mort de son frere par le meurtre de Kin- lien et de Si-men-khing. Condamnation de Wou-song. CHAPITRK xxvr. Depart de Wou-song pour la prison de Mong-tcbeou-fou. Ilprendia route de Mong- tcheou, et arrive a I'bolellerie de la Croix. Description de cette hotellerie. Quelles gens il y trouva. llistoire du marairher Tcbang- sing. Anlhropophagie. CHAPITRE xxvix. Arrivee de Wou-song a Mong-tcbeou-fou. Le directeiir de la prison le recounail et le traite avec magnificence. De I'entretien qu'ils pjirent ensemble. Histoire de Che-nghen et de son pere. Singulieres occupations des pri- sonniers. CHAriTRE xxviir. Entretien secret de Che-nghen avec Wou- song. De la resolution que Che-nghen et Wou-song formerent apres cet entretien. lis quitlent la prison de Mong-tcheou-fou. His- toire de I'aubergiste Tsiang-tcbong, surnom- me Tsiang-men-chin. De quelle maniere Wou- song venge, dans son ivresse, le tort fait a Che-nghen. Combat de Wou-song avec Tsiang-men-chin. CHAPITRE xxtx. Reinstallation de Che - nghen dans son anberge. Stratagcme de Tsiang-men-chin. Wou-song recoit une invitation de Tchang , gouverneur niilitaire de Mong-tcheou-fou. Quel accueil on lui fait dans I'hotel de ce gouverneur. Une jeune musicienne, appelee Yo-lan (chrysantheme de jade), chante une romance. Ruses que le gouverneur met en usage pour s'emparer de I'argent et des pre- sents de Wou-song. Nouvelle incarceration de Wou-song. Comment Che-nghen , pour sauver son bienfaiteur, parvienta corrompre les employe du tribunal. II offre cent taels au greffier. CHAPITRE XXX. Wou-song revient a Mong-tcbeou-fou. De quelle maniere il s'inlroduit dans I'liotel du gouverneur Tchang. Pavilion du Youen et du Yang (oiseaux fabuleux). Orgie du gouver- neur. Memorable vengeance de Wou-song; il extermine tons ceux qu'il rencontre dans I'hotel. Fuite de Wou-song. Par quel hasard il entre la nuit dans I'hotellerie de la Croix et reconnait Tchang-tsing. Singulier degui- sement que la fille de I'aubergisle propose a Wou-song. II quilte I'hotellerie, revetu du costume d'un bonze que Tchang-tsing avait egorge. Comment il delivre une jeune femme a laquelle un bacheiier voulait faire violence. CHAPITRE xxxr. Montague des Scolopendres. Comment Wou-song ful pris par des paysans, qui I'at- tacherent a un arbre. Conversation des pay- sans. Wou-song est delivre par Song-kiang. Reconnaissance et entretien secret des deux amis. Ils voyagent ensemble, et se separent apres avoir traverse le village du Vent-pur. Song-kiang est arrele par des brigands dans une foret. De quel caractere etaient ces bri- gands. Histoire de Wang-yong et de Yen- chun. Ils rencontrent la femme d'un officier qui portait une cassolette d'argent. Comment Song-kiang empecba Wang-yong de coin- mettre un adultere, CHAPITRE XXXII. Description du village de Thsing-fong ou du Vent-pur. Camps ou stations gouvernes par un mandarin civil et un mandarin mi- iitaire. De la reception que Hoa-yong fit a Song-kiang. Quel homnie c'etait que Hoa- yong. Une representation theatrale. Singn- liere avenlure de Song-kiang. Mission de Lieou-kao. Arreslalion de Hoa-yong. CHAPITRE xxxiir. Voyage de Hoang-sin et quel en fut le motif. II rencontre les brigands dans une foret. Comment ils dclivrerent la femme et la socnr de Hoa-yong. Portrait de Tseou-ming, gou- verneur militaire de Thsing-tcheou-fou. Hoa- yong provoque Tseou-ming. Belle conduite de Song-kiang. Attnque nocturne de Thsing- tcheou-fou par les brigands, Retour de Tseou- ming a Thsing-tcheou-fou. Dans quel etat il retrouve celte capitale. Ce qu'il apercoit en montant sur les decombres des fauboings qui avaient ele incendies. On lui refuse Ten* uQCt L'UMVERvS. trpe ^e U ville. Sitiguliere coofeience de Tseou-miHg avcc les autorites, II reconnait la Ictc de sa femme siispeiidue a uiie pique. CHAPITRE XXXIV. Extermination de la famille de Lieou-kao. Song-kiang et Hoa-yoiii; rencontrent dans nne expedition deux militaires, dent I'un elait hal)ille de rouge, et {'autre habille dc l)Iaiic. Quels etaient ces deux hommes. Hisioiie de Liu fang et de Koi'io-lchiug. Che-yong re- inel a Song-kiang une letlre, par iaquelie celui-ci apprend la mort de son pere. Piete filiate de Song-kiang. Histoire de Lin-tchong el de Lieou-kiun. Assemblee generale des chefs Hoa-yong , I'seou-ming , Hoang-sin , Yen-cliun , Wang-yong, Tchin-la, Liu-fang, Kouo-lching, Che-yong. Conference dans Inquellc on lit une letlre de Song-kiang, apres avoir hrille des parfums. Serment prete par les chefs. Comment Song-kiang retrouve son pere, qu'il croyait mort. Extraits du Choul-hou-tchouen ou de r Histoire des rives dujleuve. Peste de Khai-fong-fou. Prologue (oh Von vott comment) Tchang , le grand mailre 'de la doctrine , conjure par des prieres et des sacrifices une maladie pestilentielle , [et comment) Hong, le gouverneur du palais imperial, laisse echapper, dans sa meprise , des demons et des elres surna- turels. A la mort de Tchin-tsong, de la grande dynastie des Song, lorsqiie son flls (Jin-tsong) prit possession du trone imperial, la Chine, calme et pros- pcre , jouissait d'une tranquillite pro- fonde. II existait alors deux sages mi> nistres , qui assisterent I'empereur regnant de leurs iumieres et de leurs conseils. Le premier etait le grand chancelier Pao-tching, gouverneur de Khai-fong-fou; le second etait Ti- thsing, le commandant en chef des ar- mies imperiales , celui qui subjugua le royaume de Ilia , situe a I'ouest de la Chine... Jin-tsong regna quarante- deux ans , et changea plusieurs fois le noin des annees de son regne. Depuis la premiere annee Thien-ching (Tan 1023 apres J. C.), ou il monta sur le trone, jusqu'a la neuvieme annee de la in^me periode, la recolte des cereales fut abondante ; les hommes du peuple se livraient a leurs travaux avec joie. Sur les routes , il n'y avail pas de vo- leurs (litteralement, on ne ramassalt pasles objets perdus) ; la nuit, on ne fermait pas ses portes. Qui edt dit que I'exces de la joie ameuerait la tristesse.' Dans le printemps de la troisieme annee Kia- yeou (I'an 1058), une maladie pestilen- tielle ravagea I'empire. Du Kiang-nan aux deux capitales , ce fleau terrible se repandit partoiit. Dans chaque provin- ce, dans cliaquo departement, les rap- ports des autorites se succ^daient les uns aux autres comme des flocons de neige. On raconte meme que dans la capitale de Test (Tong-king) et dans sesfaubourgs la mortalite fut si graiide, que I'epidemio enieva plus de la moitie de la population etdes troupes. Le gou- verneur de Khai-fong-fou, Pao-tching, puj)liait des reglements de police, et prescrivait des mesures sanitaires pour maintenir I'ordre dans la classe in- ferieure, et arreter les progres de I'e- pidemie; il levait des impots, achetait des substances medicinales; mais, he- las ! ce fut inutilement qu'on epuisa toutes les ressources de Tart. La conta- gion se propageait avec une rapidile inexprimable. Les mandarins de I'or- dre civil et militaire resolurent d'en de- liberer ; ils s'assemblerent dans la gran- de cour du palais, et bientot apres sol- liciterent une audience du fils du ciel.... Dans cette assemblee generale des cours supremes, on vit un grand mi- nistre franchir tout a coup les rangs : c'etait Fan-tchong-yen , qui avail le ti- tre de Tsan-chi-tching-sse. Apres le ceremonial prescrit, Fan-tchong-yen se leva et s'exprima en ces termes : « Sire, I'epidemies'etend aujourd'hui dans tou- tes les provinces. L'armee souffre. On ne rencontre plus que des malheureux abandonnes et sans secours. Des nou- velles d^sesperantes arrivent coup sur coup. Dansunteletatde choses, Thum- ble avis de votre ministre est qu'il faut conjurer par des sacrifices cetepouvan- table fleau, et appeler au secours du peuple le grand mailre de la doctrine des Tao-sse; il faut en outre que Ton offre, dans les temples et les pagodesde la capitale, a tous les esprits du ciel sans exception, un grand sacrifice propitia- toire , et que Votre Majeste presente CHINE MODERNE. 507 elle-meme une supplique au Chang -ti (souverain seigneur dii ciel). Alors, je n'en doiite pas , le peuple sera delivre du fleau qui l"accable. » Jin-tsong, le fils du ciel, frappe de la sagesse de cet avis, ordonna sur-le- chaiiip a iin membre de I'acaderaie des Han-lin de jeter sur le papier le brouil- lon d'unordre imperial, qu'il mitau net de sa propre main ; puis , apres avoir deninndequelques baguettes d'eiicens,il chargea Hong-sin, qui exercait alors la charge de Tai-ouei (gouverneur du pa- lais)"de porter cette missive ecrite sur papier rouge... Hong-sin executa I'ordre imperial , et prit conge du fils du ciel. II serra )a missive dans un etui, I'encens dans une cassolette^ monta sur un cheval de pos- te , et emmena avec lui une trentaine d'hommes. Accompagne d'une escorte, il s'eloigna de la capitale de Test (Tong- king), et suivit la route deSin-tcheou, sans s'arreter nn jour. Arrive a Sin-tcheou, dansle Kiang-si, tous les mandarins sortirentde la vilie et vinrent a sa rencontre. Hong -sin depecha aussitot un officier du gouver- nement vers les Tao-sse, qui demeu- raient dans le palais de laPurete supre- me, snx la montagne Ac?, Dragons et des Tigres, pour les avertir de son arrivee, Le lendemain, les mandarins accom- pagnerentle Tai-ouei jusqu'au has de la montagne. Le gouverneur vit alors les Tao-sse du palais de\a Purete supreme. lis etaient en grand nombre. Les uns agitaient leurs cloehettes de cuivre ou battaient du tambour; les autres te- naient a la main des baguettes d'en- cens, dps bouquets de fleurs ou des flambeaux allumes; ceux-ci portaient les bannieres sur lesquelles etaient pein- tes les images des genies , ceux-la des parasols eclatants de perles et de pier- res preeieuses. TJne troupe de musi- ciens suivait le cortege, lis descendirent processionnellement de la montagne pour recevoir le mes- sager de Tempereur. Quant au Tai- ouei, lorsqu'il fut arrive pres du palais de la Purete supreme, il mit pied a terre. Ce fut alors que tous les Tao-sse, suivis des novices du monastere , vin- rent le feliciter. Apres les compliments d'usage , les religieux le conduisirent dans le temple des Trots-Purs , I'in- viterent a tirer la missive de I'etui ou elle etait renfermee, et a offrir un sa- crifice dans le temple. Sur ces entrcfaites,le Tai-ouei, inter- rogeant le venerable , qui avait la sur- intendance du palais, lui demanda ou etait le maitre de la doctrine. n Gouverneur, repondit le venerable, ce grand anachorete, qui est I'aieul des generations , a pour titre honorifique Hiu-thsing-thien-sse, ou « lediv'mins- titutenr parvenu au vide et a la quie- tude. » Degage de tous les liens (pas- sions) , souveraiuement pur, comme il n'ainie pas a entretenir des relations avec les hommes, il s'est construit une cabane de roseaux sur le sommet de la montagne def Dragons et Jes Tigres. C'est dans cette cabane qu'il cultive la vertu ; il ne demeure pas dans notre palais. — « Mais le fils du ciel Tappelle a la capitale ; il faut que je m'acquitte de ma mission. — « Permettez-moi,repriten souriant le venerable, une seule observation. S'il existe une missive de I'empereur, il faut, avant toutcs choses, la deposer dans le teniple, sur un autel ; c'est la une formalite de rigueur, et sans la- quelleni moi, ni aucun des venerables ici presents, nous n'oserions jamais ou- vrir la missive. Veuillez done accepter une collation dans notrc couvent. INous aviseronsensuite ace que vous aurez a faire, et nous offrirons un sacrifice dans le temple des Trois-Ptirs. » Le Tai-ouei , escorte des magistrats, suivit les venerables et entra dans le mo- nastere. Apres qu'il se futassis nu mi- lieu des Tao-sse, les novices lui offri- rent d'abord du the, et ensuite du pois- son , des legumes et des fruits. Quand la collation fut achevee, le Tai-ouei, revenant a la charge, interrogea le ve- nerable, et lui dit : « Puisque le maitre de la doctrine a etabli son sejour sur le sommet d'une montagne, dans une cabane de roseaux, que ne chargcriez-vous quelqu'un d'in- viterce grand anachorete a descendre; j'aurais une entrevue avec lui ; il ouvri- rait la missive — a Ce grand anachorete, interrom- pit le venerable , bien qu'il demeure 508 L'UNIVERS. surle sommet d'une montagne, n'en est pas moins dou^ de facultes extraordi • naires; il monte , quand il veut, sur les niinges, qii'il dirige a son gr^; on chercherait inutilement les traces deses pas. Si noiis-m^meSj pauvres bonzes duTao, nous avons de la peine a le voir^ comment voulez - vous qu'on d^peche vers lui un messager? — « Helas! repliqua le Tai-ouei, comment done fairePUne maladie pes- tilenlielle exerce maintenant ses ravages dans la capitale; et comme elle s'etend partout, I'empereur veut que, poursau- ver les liommes et conjurer le fleau d« ciel, le grand maitre de la doctrine recite des prieres , et offre un sacrifice propitiatoire^ conformement aux regies de votre liturgie. Je tifens a executer les volontes de I'empereur; eclairez- moi done de vos lumieres. — « Prenez garde, repliqua vivement le venerable, il y a ici quelques diffi- cultes. Si le fils du ciel veut sauver les liommes , ii faut pour cela que Votre Excellence se convertisse a notre foi , qu'elle ne livre plus son esprit au dou- te, son cceur a la crainte. Gouverneur,, pratiquez les saintes abstinences, ob- servez les jeflnes, faites vos ablutions; quittez ensuite cet babit de parade; laissez la votre escorte; suspendez a vos reins (I'etui qui renferme) la missive impcriale; brillez des parfums sur votre route; gravissez a pied la montagne; accomplissez le ceremonial prescrit : vous verrez alors le grand maitre de la (loclrine, et apres avoir frappe la terre de votre front, vous lui adresserez vo- tre supplique ; mais si , manquant de foi , votre courage vient par suite a de- failiir, c'est en vain que vous graviriez la montagne sur laquelle demeure le grand anachorete, vous ne le verriez pas. — « Helas! s'ecria le Tai-ouei, apres avoir entendu ces paroles, mon coeur doit etre inaccessible a la crainte; car, pour vous dire la verite , depuis la ca- pitale jusqu'ici, j'ai regulierement jedne aux racines et a I'eau. Je m'en repose done sur vos paroles. Demain, a I'aube du jour, je gravirai la montagne. » Quand le soir fut venu, on se retira. Le lendemain , a la cinquieme veille, les Tao-sse se leverent pour apprfiter des parfums; its inviterent le Tai-ouei a faire ses ablutions. Les ablutions acbevees, Hong-sin revfitit une longue tuniqiie de cbanvre, et mit a ses pieds des sandales de paille. Apres avoir man- ge quelques racines cuites a I'eau , il enveloppa la missive imperiale dans un morceau desoiejaune, la replaca dans son etui , qu'il suspendit a ses epaules, prit sa cassolette d'argent, se baissa jus- qu'a terre, et brflla I'eucens du (ils du ciel. Alors les Tao-sse, toujours en grand nombre, le conduisirent jusqu'au pied de la montagne; la, ils lui indiquerent du doigt les chemins et les sentiers, et le venerable qui avait la surintendance du palais, prenant la parole, ditauTai- ouei : '« Seigneur, de vous depend aujour- d'hui le salut du peupie ; fermez done votre coeur au decouragement etau re- gret, mais fortifiez-vous dans votre re- solution, et partez. » Le Tai-ouei prit conge des Tao-sse ,• puis, apres avoir invoquele nomdu mai- treduciel, ilse mitagravir a pied la col- line. Sans aucune escorte, seul, il mar- cba pendant quelque temps dans les sentiers tortueux de la montagne , qui ^taitcoupeed'un nombre infini de tours et de detours , saisissant parfois les plantes grimpantes , qu'il entrelacait Tune dans I'autre , et auxquelles if se cramponnait comme a une corde pour soutenir sa marche. II parvint jusqu'au sommet de plusieurs collines ; mais, apres avoir fait deux ou trois milles , insensiblement ses pieds se gonflerent ; il etait deja si faible, qu'il ne pouvait plus proferer une parole. Le doute s'em- para de son esprit. Alors, reflechis- sant , il se dit a lui-meme : « Quand j'e- tais a la capitale, je dormais sur des coussins moelleux ; on me servait a mes repas une foule de mets d^licats et recherches, et encore je m'en lassais! D'ou vient done qu'ils m'ont mis aux pieds des sandales de paille pour mar- cher ! II y a sur cette montagne tant de chemins qui s'ouvrent et se croisent de toutes parts, comment decouvrir la retraite du grand maitre de la doc- trine.' Oh ! que je suis malheureux, gue je suis malheureux ! » Toutefois , ii se remit en marche ; mais , a peine eut-il fait quarante a cinquante pas, CHINE MODERNE. 509 que epuise deja , et nianquant d'halei- ne, il fut contraint de se reposer der- riere iin bouquet de grands arbres. Tout a coup, un tourbillon de vent s'e- leva de I'antre de la montagne ; un ins- tant apres, il entendit les cris des betes teroces qui reteiilissaient comme le bruit du tonnerre, et apercutun tigre qui accourait vers lui, Ce tigre avait une belle criniere, la face blanche, les yeux hagards, etincelants. Hong, le Ta'i-ouei, fut saisi de frayeur, et cria : .1-ya! II toniba la face centre terre. Le ti- gre fixa les yeux sur lui , fureta a droite, a gauche, grinca des dents, se niit a rugir, et, apres s'etre couche sur- I'herbe^ sauta au bas de la coiline, et dispariit. Hong, le Tai-ouei, qui n'avait pas quitte les racines des arbres, etait sieffraye, que ses dents claquaient , s'entre-choquaient; le coeur lui bondis- sait dans la poitrine; son corps ne pou- vait se comparer qu'a un arbrisseau que le vent agite , et ses jambes res- semblaient veritablement a celles d'un coq, qui revient d'un combat apres avoir qte battu : aussi ne cessait-il d'exhaler des plaintes. Au bout de quelques ins- tants, son coeur se ranima. Il appreta sa cassolette, brdla des parfums, et gra- vit de nouveau la montagne; il esperait que, apres de longs efforts, il decou- vrirait enfin la denieure du grand ana- chorete. Lorsqu'il eut encore fait qua- rante a cinquante pas , il s'ecria avec amertume : « L'auguste empereur, usant de sa prerogative celeste, ra'a en- voye sur ces coUines ; mais Tepouvante ni'a saisi..... » II n'avait pas acheve ces paroles, qu'une nouvelle bouffee de vent , qui ebranla tous les arbres, repandit dans I'air des vapeurs malfaisantes. Comme il regardait avec attention, il entendit dans le fond des broussailles, puis sous les plantes rampantes qui tapissaient les flancs de la montagne, un murmure sourd, une espece de bruissement. A I'instant meme, une couleuvre mons- trueuse , blanche comme la neige, sor- tit du milieu des herbes et des brous- sailles, comme un seau sort d'un puits. Le Tai-ouei est frappe de stupeur; il laisse tomber sa cassolette. « Oh ! cette fois, je suis mort!)) s'ecria-t-il. II par- vint cependant a gagner la cinie d'une roche escarpee; niais la monstrueuse couleuvre s'elanca avec force sur la roche, s'approcha'de Hong, le TaT-ouei, et, decrivant pliisieurs circuits tor- tueux, sereplia sur elle-meme. Ses yeux lancaient des eclairs ; elle ouvrit sa gueule, darda sa langue au dehors , et humecta de sa salive venimeuse tout le visage du gouverneur. La couleuvre finit par s'eloigner ; bientot on ne la vit plus. Alors le Tai-ouei ramassa pe- niblement ses forces, et se souleva avec lenteur. « J'en rougis de honte, s'eeria- t-il ; mais la frayeur m'a tue. « Puis il maudissait dans le fond de son cccur tous les Tao-sse. « Non, disait-il , je ne puis supporter de pareilles irreveren- ces. Les miserables! ils se sont joues de moi « Le lendemain le venerable , les Tao- sse et tous les assistants inviterent le Tai-ouei a faire une promenade autour du palais; cette proposition combia de joie le messager de I'empereur. II par- tit a pied du monastere, suivi d'une foule considerable de bonzes et precede de deux novices. On lui montr.r les sites les plus interessants ; mais on ne sau- rait figurer par la parole le magnifique spectacle qui s'offrit a ses regards du haut du palais des Trois-Purs. On de- couvrait d'un cote le temple des Neuf- Cieux, le temple du Sole'd levant; le temple du Pdle boreal: ces trois tem- ples, separes par des cours spacieuses, lormaient I'aile gauche de I'edifice; a droite, on apercevait le temple de la Grande-Unite , le temple des Trois- Conseillers , le temple des Purifica- tions: ces trois temples composaient I'aile droite. Apres avoir examine tous les edifices, le Tai-ouei revenait au monastere avec les Tao-sse,lorsque derriere I'aile droite, sur une place deserte, il apercut un pa- lais dent I'architecture etait'plus sim- ple que celle des autres, et qu'il ob- serva avec beaucoup d'attention. Les murs de ce palais etaient converts d'un enduit rouge, dans lequel on avait jete du poivre pile. La facade principale of- frait deux portes d'ehtree ; au bas des degres de chaque perron, on avait range des vases de porcelaine peinte. Ces por- tes, a deux battants, etaient fermees par des serrures d'airain , et I'ouver- >I0 L'lINIVKRS. turc en etait intcrditc par des scelles, sur lesquels ou remarqunit un amas considerable de cachets rouges. A la partie saillante du toil etait siispendu un vaste ecusson servant de frontispice au palais. On y lisait les quatre carac- teres suivants : PALAIS DES DBKOHS SUBJOGDBS. o Qu'est-ce done que ce palais? de- manda le Tai-ouei , niontrant le fron- tispice. — « Ce palais , repondit le venerable en souriant, est celui des demons que les niaitres de la doctrine , nos venera- bles anc^tres des dynasties eteintes, ont subjugues et mis sous les verrous. — « Mais que signifient, repliqua ie Tai-ouei, tous ces scelles apposes sur les portes et cette prodigieuse quantite de cachets rouges? — n Le prince des demons , reprit le venerable, toujours en souriant, a 6t^ incarcere dans ce temple par un de nos venerables ancetres, qui vivait sous la grande dynastie des Thang; c'est ce di- vin instituteur qui , le premier, a mis le scelle sur les portes; et, depuis cette epoque, a chaque generation qui s'est ecoulee, le grand maitre de la doctrine y a appose son sceau de ses propres mains, aQn que ses flis et ses petits-Uls n'osassent pas temerairement ouvrir les portes de ce palais. Si le roi des demons parvenait a s'echapper, ce serait pour ['empire une calamite ef- froyable ; et d'ailleurs, qui peutsavoir ce qui se passe dansl'interieurde ce palais, dont les portes sont etroitement fer- niees ? » A ces mots, Hong, le Tai-ouei, eprou- va un sentiment de surprise m^lee d'ef- froi. Neanmoins, apres quelques re- flexions, il se dit a lui-nigme : « Je voudrais bien voir le roi des demons ; » puis, prenant un ton d'autorit^, il s'e- cria : « Quoi qu'il en soit, ouvrez la porte de ce palais, je veux voir com- ment est le roi des demons. — « Gouvemeur, repondit le vene- rable d'un air inquiet, je vous jure que je n'oserai jamais I'ouvrir. Pourrais-je faire si peu de cas des exhortations p"a- ternelles de notre venerable aieul etd'un saiutaire commandeinent qui , jusqu'a present, n'a et^. enfreint par personne? — « Vous debitez des extravagances, repliqua le Tai-ouei souriant; vous au- tres, Tao-sse, vous creez a plaisir des fant^mes; abusant de la credulite du peuple, vous operez de faux miracles; vous enflamniez les imaginations. II y a ici un dessein premedite. C'est vous qui avez erige ce palais , que vous avez appele mensongerement le palais du roi des demons. Voila comme vous exercez au grand jour votreartdetestable.Jecon- nais rhistoire;j'ai lu deslivresqui sont le miroir de la verite. Ces livres disent-ils qu'il y ait des demons incarceres quel- que part, de grands receptacles ou des cavernes obscures habitees par des etres surnaturels et malfaisants? Je ne crois pas que le roi des demons soit renfer- ni6 dans ce palais. Vite, vite, ouvrez- moi la porte ; s'il y est , je serais curieux de voir sa figure... » Le venerable, redoutant I'in- fluence et I'autorite du Tai-ouei, se vit contraint d'ordonner a plusieurs arti- sans tao-sse d'enlever a coups de mar- teau les serrures d'airain. Apres que ceux-ci eurentouvert les portes, le Tai- ouei et les Tao-sse entrerent ensemble dans I'int^rieur du palais; mais il y regnaituneobscurite si profonde, qu'ils s'y trouverent comme au milieu des te- nebres, sans pouvoir distinguer un seul objet. Le Tai-ouei fit allumer des tor- ches. Lorsque les bonzes les apporle- rent, on ne trouva que les quatre murs; ii y avait seulement dans le milieu un monument, haut d'environ cinq a six pieds , et a la base duquel on remar- quait une tortue de pierre recouverte en partie par une eau bourbeuse. On apercut sur ce monument une inscrip- tion en caracteres tchouen , imitant des phenix; etun livre celeste contenant des talismans. Tous ceux aui etaient la es- sayerent inutilement aen lire quelques mots; lis n'y comprenaient rien. Mais quand on examina ce monument a la lueur des torches , on decouvrit sur I'un des cotes quatre caracteres exacts, d'une belle dimension et graves eu creux ; on lisait: « Hong, que je rencontrerai par hasard, ouvrira {ce monument). >> En apercevant ces quatre caracteres, Hong, le Tai-ouei, fut ravi de joie. « Eh bien ! dit-il au venerable , tout a I'heure CHINE MODERNE. SU vous mettiez des obstacles a mon pro- jet; comment se fait-il done qu'on ait grave mon nom sur ce bloc de pierre, il y a quelques centaines d'annees : «Hong, que je rencontrerai par ha- sard , ouvrira ce monument ? » Vous le voyez , c'est un ordre, e'est un ordre. Je crois maintenant que le roi des de- mons est renferme sous ce monument. Vite, qu'on le demolisse, que Ton creuse partout ! » Le venerable repeta quatre ou cinq fois qu'il apprehendait des malheurs ; mais comment aurait-il pu flecbir le Tai-ouei? Les bonzes, rassembles en grand nombre, se mirent a I'ceuvre ; ils commencerent par abattre , a coups de pioche, le monument de pierre, sou- leverent, a force de bras, la tortue qui etait a sa base et finirent par deblayer le sol. lis creuserent pendant une demi- journee environ. On etait a peine par- venu a une profondeur de trois a quatre pieds, lorsqu'on trouva une dalle de jaspe vert plus large que la cbambre du superieur. Le Tai-ouei ordonna aux bonzes de soulever cette dalle. Le ve- nerable, dans sa vive inquietude, avait beau s'ecrier : « II ne faut pas creuser plus avant, « Hong-sin n'ecoutait rien. On souleve la dalle^ et Ton apercoit un precipice de dix mille tchang de pro- fondeur. Un bruit percant se fait d'a- bord entendre dans les cavites de ce gouffre immense; c'etait une voix, une voix dont Teclat penetrait partout et qui ne ressemblait pas a celle des mor- teis. Tout a coup unevapeur noire sort avec impetuosite du fond de cet abime et atteint bientot les toits du palais, qui disparaissent a I'instant; elle s'eleve jusqu'a la moitie de la hauteur du ciel ; puis, en se dispersant dans les airs, elle fait jaillir par dizaines et par cen- taines des etincelles semblables a des etoiles brillantes et des jets de feu qui illuminent tout I'horizon. Les assistants, saisis d'epouvante, sont comme frappes de vertige; Fair retentit de leurs cris tumultueux; les bonzes tremblants iettent leurs pioches, leurs outils , et s'61ancent hors du pa- lais. Dans leur precipitation, ils se heur- tent et tombent les uns sur les autres. Quant au Tai-ouei , il etait plus mort que vif. Le regard immobile , la bouche beante, il n'avaitpas quitte sa place. A la fm, il s'elanca comme les autres hors du palais, et rencontra bientot le ve- nerable, qui ne cessait de proferer des cris. Alors il lui demanda quels etaient les demons qui venaient de prendre la fuite. « Je n'en sais rien , repondit le vene- rable; tout cequeje puis vous dire, c'est que notre grand ancetre, le divin insti- tuteur, lorsqu'il transmit a ses disci- ples ses precepteset ses talismans, leur adressa la recommandation suivante: >< Dans I'interieur de ce temple sont ren- fermes les genies qui president a cent huit etoiles de sinistre presage (*). Le roi des demons est au milieu d'eux. Un monument s'eleve sur son corps. Sou- venez-vous bien que, si jamais il parve- nait a s'^chapper, il poursuivrait de sa haine et de ses mechancetes toutes les creatures vivantes. » Gouverneur, main- tenant que vous I'avez mis en liberte, a quels effroyables malheurs ne dcvons- nous pas nous attendre.-* » A ces mots, le Tai-ouei fut consterne; une sueur froide coula de tout son corps; il s'eloignadu venerable, tenant sa tete inclinee dans ses deux mains, prepara ses bagages avec empressement et, suivi de son escorte, il descendit de la montagne pour retourner a la capi- tale La consternation etait generale dans I'escorte. Sur la route, on uepro- non^a pas une parole En entrant dans la ville de Pien-liang , le Tai-ouei apprit par la rumeur publique que le grand maitre de la doctrine avait of- fert, pendant sept jours et sept nuits, des sacrifices aux genies du ciel , dans les temples et les pagodes de la capi- tale, et que repidemie avait entiere- ment disparu du milieu du peuple etde Tarmee. Moeurs de la cour imperiale sovs les Song de la decadence. (Extrait du premier chapiire du Choui- liou-tchouen.) On rapporte que, sous le regne de I'auguste empereur Tchi-tsong, de I'an- (*) La reponse du venerable monlre com- ment ceUe narration serl de prologue ou de preface au roman. Les principaux person- nages du Choui-hou-tchouen sout les cent huit demons incarnes. 512 L'UNIVERS. cicnne dynaslie des Song , longtemps apres la mort de Jin-tsonj,', lils du ciel, il y avail dans la garnisoii inilitaire de Khaifong-fou uii jeuiie hoinme de fa- raille, livre au plaisir et aux folles de- peuses. Son noni etait Kao ; et, comme il excellait surlout a jouer du ballon, les habitants de la capitale, amateurs de sobriquets , I'appelaient toujours Kao-khieou « Kao-balbn. » Ce jeune honnne jouait des instru- ments a vent aussi bien que des instru- ments a cordes ; il connaissait la musi- que vocale, la danse, rescrime; il etait, du reste, amonreux de tous les plaisirs. Cette vie desordonnee ue I'emp^chait pas cependant d'etudier le Cbi-king, le Chu-king, les poetes anciens et mo- dernes; quant a la charite, la justice, I'observation des rites, la sagesse, la sin- cerite, ce sont la des choses qu'il igno- rait absolument. Aussi le voyait-on, tanlot dans la capitale, tantot dans la banlieue, s'abandonner partout au luxe et a la mollesse. II avait contracte avec le flls d'un officier superieur appele Wang une liaison qui aurait pu etre prejudiciable a la fortune de celui-ci (car chaque jour amenait pour eux des intrigues et des depenses nouvelles), si Wang n'edt porte sa plainte au pre- mier magistral de la capitale. Kao- khieou fut condamne a la bastonnade et au bannissement ; defense fut faite a tous les habitants de la capitale de lui accorder un asile dans leurs maisons. Kao-khieou, reduit a cette extremite, prit le parti de se retirer dans le Hoai- si. Arrive a Lin-hoai (chef-lieu de Far- rondissement de ce nom ) , il implora I'assistance d'un homme de mauvaise compagnie, qui avait ouvert, depuis longtemps, une maison de jeu. Get homme, qui s'appelait Lieou-ta-lang, etait connu dans la ville sous le nom de Lieou-chi-kiouen. II se plaisait, non- seulement a recevoir et a nourrir dans son tripot tous les faineants de la ville, mais il y avait encore attire ces indivi- dus de bas elage qui viennent des quatre forties de I'empire et qui travaillent a a construction des digues. Kao-khieou trouva un refuse dans la maison de Lieou-ta-lang, ou il demeura pendant trois annees consecutives. A cette ^poque, I'empereur Tchi- tsong offrit un grand sacrifice dans le Nan-kiao, ou la banlieue du Midi. Pour remercier le ciel de la serenite de la saison, il donna un libre cours a .sa magnanimite, et publia une amnis- tie generate. Kao-khieou, qui vivait dans I'exil , profitant du benefice de I'amnistie, forma le projet de retour- ner dans la capitale. Or Lieou-chi- kiouen, son bote, avait un parent a Khai-fong-fou: c'etait un apothicaire, nommeThong-tsiang-sse, dont la phar- niacie etait situee au bout du ^oulaux Piles (Tor. II lui ecrivitdonc une lettre derecommandation, qu'il remit avec des provisions de voyage a Kao-khieou , en lui assurant que, s'il allait a Khai-fong- fou^ il trouverait un bon accueil dans la maison de Thong-tsiang-sse. Kao-khieou prit alors conge de Lieou- ta-lang, et quitta Lin-hoai. Parvenu ;i la capitale , apres avoir voyage a pe- tites journees , il se rendit directemcnt a la pharmacie Thong, et remit sa let- tre de recommandation. Thong-tsiang-sse, apres avoir salue Kao-khieou, lut la lettre de Lieou-chi- kiouen; mais reflechissaiit, il se dit a lui-m^me : « Comment pourrais-je, sans me compromettre, recevoir Kao-khieou dans ma maison? Si c'etait un homme d'un caraclere honorable, non equivo- que , un de ces hommes a qui Ton porte naturellement du respect , mes enfants ne pourraient que proliter avec lui; maisc'est une espece d'aventurier. D'ordinaire , on ne change pas facile- ment son naturel. Malgre cela, je ne puis pas lui fermer ma porte , par con- sideration pour Lieou-ta-lang , qui est mon parent. » Thong-tsiang-sse fut done force de s'accommoder a la circonstance; il ao- cueillit Kao-khieou de la maniere du monde la plus honnete, et, avec une. joie affectee, lui offrit une chamhre dans sa maison. Dix jours a peine s'etaient ecoules , que I'apothicaire songea aux moyens de se debarrasscr de Kao-khieou. II tira d'abord de son armoire une robe neuve , ecrivit une lettre de recomman- dation, puis s'adressant a Kao-khieou: « Ma maison est pauvre , lui dit-il , nous vivons dans Tobscurite, et, com- me je craindrais de nuire a vos iate- CHINE MODERNE. 513 r^ts , en vous retenant ici , mon inten- tion est de vous introduire dans lamai- son de Siao-sou, le ministre d'Etat. Qui salt? Par la suite, vous pourrez vous faire un nom. Du reste , je vous demande voire avis. Qu'en pensez- VOUS? a Kao-khieou, au comble de la joie, remercia Thong-tsiang-sse. Sur quoi , celui-ci , remettant la lettre d'introduc- tion a un commissionnaire, le chargea de conduire Kao-khieou chez le minis- tre d'Etat. Arrives a I'liotel , Siao-sou vint au-devant d'eux, salua Kao-khieou, lut la lettre de Thong-tsiang-sse, et se dit a lui-nieme : « Est-ce qu'il s'ima- gine par hasard que je vais recevoir Kao-khieou dans mon hotel.!* Au sur- plus , faisons le genereux pour aujour- d'hui ; demain , je le proposerai comme valet de pied au gouverneur du palais imperial. II aime les gens de cette es- peee. » Alors il envoya sa reponse a Thong- tsiang-sse et garda Kao-khieou dans son hotel, ou cet aventurier passa la nuit. Le lendemain, il ecrivit un placet, et chargea un de ses domestiques , homme adroit et intelligent, de presen- ter Kao-khieou au gouverneur du pa- lais. Ce gouverneur etait le gendre de I'empereur defunt (Chin-tsong) , et par consequent le beau-frere de i'empereur Tchi-tsong. II avait un goiit fin et de- licat, et recherchait les elegants. Des qu'il apercut le messager de Siao-sou, le ministre d'fitat, il prit le placet, et, apres I'avoir lu , s'approcha de Kao- khieou, qu'il accueillit avec joie (a cause de la noblesse de sa taille et de la po- litesse de ses manieres). II ecrivit sur- le-champ sa reponse, et accorda a Kao- khieou une place de valet de pied. A partir de ce jour, celui-ci fut installe dans I'hotel du gouverneur, et finit par y jouir d'une si grande liberte , que I'on edt dit que le prince et lui etaient de la menie iamille. Un jour Siao-wang, gouverneur du palais imperial, voulaiit celebrer I'an- niversaire de sa naissance, fit preparer dans son hotel un grand festin auquel il invita son beau-frere, le prince de Touan. Ce prince de Touan etait le onzienie 33* Livraison. fCniNE modekwe.) fils de I'empereur Chin-tsong elle frere cadet de Tchi-tsong. II avait sous son inspection les chariots de la cour et les etendards de guerre. On lui avait confere le titre de vice-roi. ^C'etait un homme d'une beaute remarquable et d'une grande perspicacite. Aime des femmes, courant sans cesse apres les aventu- res, il etait des plus renommes de ce temps-la pour les galanteries. Au fait, il ny avait pas une finesse, pas une ruse qu'il ignorat, pas un artifice qui n'edt pour lui des attraits. II savait ti- rer du kin (instrument de musique) les accords les plus melodieux ; il jouait aux echecs , tracait les caracteres avec elegance; il etait habile dans I'art du dessin. On n'a pas besoin de dire qu'il connaissait tons les jeux , jouait de tous les instruments, chantait et dansait a raerveille. Au jour fixe pour le banquet , apres qu'on eut acheve les preparatifs de la fete, le prince de Touan arriva dans I'hdtel de Siao-wang, le gouverneur. Siao-wang invita le prince a s'asseoir. Au second service . le prince de Touan, s'etant leve de table pour faire quelque chose, entra par hasard dans la biblio- theque, oii il apercut sur le bureau du gouverneur un presse-papiers a sujet, representant deux petits lions en jade, admirablement sculptes. C'etait, en fait d'art , un ouvrage parfait que ce presse- papiers , a voir la finesse du poli et la rare elegance du travail. Le prince de Touan , qui avait pris ces deux petits lions pour les examiner avec soin , ne pouvait plus s'en dessaisir ; il les tenait dans ses deux mains; il s'extasiait a les considerer, et repetait sans cesse : « C'est un chef-d'oeuvre, c'est merveil- leux ! » — « J'ai encore quelque part un porte- pinceaux, dit le gouverneur remar- quant que le prince de Touan prenait tant de plaisir a regarder sou presse-pa- piers ; il est en jade et represente un dragon; c'est le meme artiste qui I'a sculpte. Je ne sais vraiment pas ou Je I'ai mis (*) ; mais demain matin je le (*) Tons ces details sont d'une grande lide- lite historique.On represente Tchao-ki, prince de Touan , qui devint enipereur, sous le titre de Hoei-tiong, « comnie un prince naturei- 33 it4 L'UNIVERS. cberdiarai et je vous I'enverrai avec les lions. — • J« vous remercie iufiniment de voire intention obligeante, r^pondit ie prince de Touan transporte de joie. J'i- magine que ce porte-pinceaux est d'une beaute ravissante. — « Vous Ie verrez demain matin dans votre palais , repliqua Ie gouver- neur; je Ie chercherai, je Ie cherche- rai. C'est un petit present que je veux vous offrir. » Le prince de Touan reitera ses re- merciments... Le lendemain , sans plus tarder, Siao- wang acheta un porte-pinceaux, ie mit avec le presse-papiers dans une boite d'or, enveloppa la ooited'un raor- ceau de soie jauiie, ccrivit un billet etchargea Kao-khieou de le porter avec la boite. Kao-khieou ex^cuta les ordres du gouverneur et s'achemina tout droit vers le palais du prince , ou il demanda a parler a I'intendant. L'huissier qui etait de garde a la porte alia done chercher I'intendant. Un instant apres, celui-ci arriva, et adressa a Kao-khieou ies questions d'usage : « Qui etes-vous etd'ou venez-vous? » 1 Le prince, dit aiors I'intendant, est dans le cirque, auboutdu temple des anc^tres ; il joue au ballon avec des eunuques de la^ cour ; ailez-y, vous le troiiverez. « Veuillez prendre la peine de m'y conduire, ajouta Kao-khieou. » L'intendant conduisit Kao-khieou dans le cirque. Celui-ci apercut alors le prince de Touan. II portait sur sa tete un bonnet de cr^pe, a la mode des Thang. Son v^tement se composait d'une robe vioiette a dragons brodes ; sa ceinture etait une belle echarpe, sur laquelle on decouvrait une foule d'emblemes , signes caracteristiques de lement curieux, amateur des choses rares et biett travaillees. On dil qu'uue bagatelle de cefle nature roccupait des jours enfiers. Les oourtisans , qui avaient reconnu ce faible dan* le monarque , cherchaient dans le pays les pcinlures les plus iuteressantes,les pierres 1m plus curieuses, et les ouvrages de meca- nique les plus rares pour les offrir a I'empe- rcur. » ( Voy, I'Hisloire generale de la Chine, par le P. de Mailla, t. VIII, p. 354 el 335.) ses grades dans^ I'ordre civil et dans I'ordre militaire; il avait sur sa robe a dragons brodei» un petit manteau sansmanches, d'ut) niagnifique tissu , qui descendait jusqu'a la ceinture ; sa chaussure consistait en une paire de bottines ornees de petites pierres pre- cieuses ; on avait brode sur chacune un phenix aux ailes deployees. Quatre a cinq eunuques de la cour jouaient au ballon avec lui. Kao-khieou n'osa pas penetrer dans le cirque; il se tint de- bout derriere les domestiques, atten- dant la Gn de la partie. On se rappelle que Kao-khieou avait fait ses preuves comme joueur de bal- lon. Or il arriva que le prince de Touan manqua son coup. Le ballon , frapp^ a faux par le prince, vint tomber au mi- lieu de la foule des domestiques, juste- ment a cote de Kao-khieou ; mais celui- ci , qui I'avait vu venir, le recut avec le pied, sans se deconcerter le'moins da monde. Au meme instant, le ballon, volant avec rapidite, retourna vers le prince, comme I'oiseau youen retourne aupres de sa femelle. Le prince de Touan, emerveill^ de I'adresse de Kao-khieou, s'approcha de lui en riant et lui demanda qui il etait. « Votre serviteur, repondit Kao- khieou , votre serviteur est attach^ a la personne de Siao-wang. Je viens ici de sa part vous offrir des curiosites. « Aces paroles, le prince de Touan fut ravi de joie. Apres avoir exantin^ les objets , il les remit entre les mains d'un valet de pied, qui alia les serrer; puis s'adressant a Kao-khieou : « Vous jouez fort bien au ballon, lui dit-ii; comment vous appelez-vous ? — «Mon nom est Kao-khieou, re- pondit celui-ci, d'un ton timide et hum- ble ; autrefois je jouais au ballon dans mes moments de loisir. « Bien , repliqua le prince ; venez done dans le cirque faire une partie avec moi, — « Un homme de ma classe 1 s'^cria Kao-khieou, s'inclinant profondement ; comment oserais-je faire une partie avec votre altesse imperiale ? » Le prince de Touan insista; mais a chacune de ses instances Kao-khieou repoiidait par un salut et par ces mots : « Je n'oserai jamais. » A quatre ou CHINE MODERNE. 515 cinq reprises, il sollicita du prince la permission de se retirer ; enfin , voyant que celui-ci perseverait obstinement dans sa fantaisie, Kao-khieou frappa la terre de son front, denianda niille fois excuse et se traina a genoux dans le cirque. La partie commenca.Toutes les fois que Kao-khieou recevait le ballon , le prince jetait un cri d'enthousiasme. Kao-khieou developpa, comme a son ordinaire, toute son adresse et toute sou habilete. Les graces de sa personne charmerent le prince deTouan ; des iors ils s'attacherent I'un a I'autre par un lien qui devait durer eternellement. Le prince etait dans un contentement inex- primable; il garda Kao-khieou dans sou palais, et ie lendeniain fit apprgter un grand festin auquel il invita Siao- wang, le gouverneur. Or, on raconte que celui-ci, ne voyaut pas revenir Kao-khieou, formait des conjectures a ce sujet , quand un huis- sier de la porte entra tout a coup, et dif^a son maitre qu'un messager du prince de Touan venait d'arriver et ap- portait une lettre d'invitation. Le gou- verneur prit la lettre, et monta a che- val aussitot. Le prince I'accueillit avec cordialite, vanta beaucoup les objets qu'il avait recus, et lui en temoigna sa reconnaissance. Les deux convives se niirent a table ; la conversation s'engagea. « Savez-vous, dit le prince de Touan a son bote, que Kao-khieou lance le ballon aussi bien du pied droit que du pied gauche ? Que je serais heureux d'attacher cat honiine a mon service, comme valet de pied! Y consentiriez-vous? — « Si tel est votre desir, repondit le gouverneur en souriant, je ne deniande pas niieux. Gardez-le dans votre pa- lais. » Cette reponse combia de joie le prince de Touan ; il prit sa tassea deux mains, et remercia le gouverneur. Les deux amis passerent encore un certain temps a causer et a badiner. Quand le soir fut venu, ils quitterent la table, et le gouverneur retourna dans son hotel. A partir de ce moment , Kao-khieou fut iustalle dans le palais, comme valet de pied. 11 n'en resta pas la, et finit par deveair confident iutime. Le prince de Touan le suivait partout; il ne s'eloi- gnait pas de lui de la distance d'un pied. Deux mois a peine s'etaient ecoules que I'empereur Tchi-tsong mourut sans laisser de posterite , sans avoir m^me designe son successeur. II y eut une assemblee generale des mandarins de I'ordre civil et militaire, oil Ton deli- bera (sur le choix a faire du monarque). Le prince de Touan fut elu empereur, et prit pour titre Hoei-tsong. Apres qu'il se fut assis sur le trone, un jour qu'il avait du loisir, il dit a Kao-khieou : « Moi, I'empereur, je veux vous elever a un poste Eminent. Vous avez rendu des services quand vous etiez aux frontieres; il est juste que vous montiez en grade. Et, d'abord, je vais ordonner a mon conseil prive de vous admettre dans son sein; il faut que vous preniez en main les r^nes de TEtat. » Six mois tout au plus apres cette promotion , I'empereur nomma Kao-khieou commandant en chef de I'armee et gouverneur de la ville im- periale. Kao-khieou, devenu commandant en chef, fit choix d'un jour heureux, et alia dans I'hotel du gouverneur pour y prendre possession de sa charge. Des qu'il fut installe, les conseillers des cours souveraines, les grands manda- rins, le commandant en second de I'ar- mee, les inspecteurs militaires , les offlciers de cavalerie et d'iufanterie vinrent le complimenter. Tous lui pr^- senterent leurs cartes, sur lesquelles ils n'avaient pas manque d'inscrire fas- tueusement leurs titres. Kao , le gou- verneur de la ville imperiale, prit tou- tes ces cartes, et les marqua, une a une, avec son pinceau. Dans le nombre, il se trouva qu'un nom manquait : c'etait celui de Wang-tsin, commissaire d'ar- mee. Quand on representa a Kao-khieou que depuis quinze jours ce fonction- uaire , retenu chez lui par une maladie grave , dont il souffrait encore, n'avait pas mis le pied dans son bureau : « Mensonge ! s'ecria le gouverneur de la ville imperiale , enflamme de colere ; il savait qu'il y avait aujourd'hui pre- sentation de cartes a Thotel ; c'est un miserable qui veut se mettre en oppo- sition avec moi. On doit reprimer Tor- 33. 616 L'UNIVERS. gueil des subalternes. Vite, qu'on I'or- rfite et qu'on I'amene ici. >> Wang-tsin n'avait ni femme ni en- fants; il demeurait seul avec sa mere, qui ^tait flgee de plus de soixante ans. Quand le chef des huissiers se presenta cnez lui pour I'arrcter, il vit bien qu'il n'avait d'autre parti a prendre que de se mettre en route. II s'arma de cou- rage et de patience contre son mal. (Sui- vant a piea les huissiers), il entra dans I'hotel du gouverneur de Khai-fong- fou, fit quatre r6v6rences, s'iuclina de nouveau et donna encore d'autres mar- ques de respect; puis il se leva et par humility se tint debout a Fentrde de la salle. «Ah! coquin, s'ecria Kao-khieou, n'^tes-vous pas le fils de Wang , I'an- cien commandant en second de I'ar- mee? — « Qui , je suis son fils , repondit Wang-tsin. — « Dans les rues comme sur les places de la capitale, continua Kao- kliieou d'un ton courrouce , votre pere n'avait de relations qu'avec les femmes publiques, les bdtonnistes (spadassins) et les marchands de drogues (charla- tans des rues); c'est sous les auspices d'un pareil homme que vous avez ap- pi-is I'art militaire. Dites-moi , les con- seillers de I'administration precedente avaient done perdu les yeux pour nom- mer un drole tel que vous commissaire d'armee? Je comprends, apres eel a, que. dedaigneux et fier, vous n'ayez pas vouluflechir legenou devant moi. Mais pour braver avec tant d'audace les lois de la discipline, sur quelle puissance, sur quelle autorite comptez-vous done? Quoi, avec une figure de sante comme la votre, vous feignez d'etre malade, et vous restez chez vous ! — « Pardonnez-moi, repliqua Wang- tsin d'un air suppliant, la v^rite est que je souffre d une maladie grave et que je ne suis pas encore retabli. — « O vaurien astucieux ! dit alors Kao-khieou, si vous souffrez d'une maladie grave , comment avez-vous pu venir a pied dans mon hotel ? — « Le gouverneur m'appelait , re- pondit Wang-tsin ; pouvais-je d^sobeir a ses ordres? » A cette r^poDse , Kao-khieou , tout a fait hors des gonds, se mit a crier : "Huissiers, qu'on le saisisse; pretez- moi main-forte; frappez-le a coups de verges! » Tous les gendraux presents, qui portaient de I'affection a Wang- tsin , impiorerent sa grSce. « Gouver- neur, lui dirent-ils, le jour oil vous pre- nez possession de votre charge est un t'our heureux. Veuillez pardonner a cet lomme! * Malheureux ! repondit le gouver- neur de Khai-fong-fou , s'adressant a Wang • tsin , par consideration pour ces vaillants g^neraux, je vous par- donne aujourd'hui ; mais demain j'au- rai une explication avec vous. » Wang-tsin avoua qu'il etait coupable et se releva.ll regarda le gouverneur, et reconnut Kao-khieou. II sortit alors de la salle et, poussant un profond sou- pir : « Oh! maintenant, s'ecria-t-il , e'en est fait de ma vie. Je me disais toujours : Mais qu'est-ce done que ce nouveau gouverneur qu'on appelle Kao ? Et justement c'est Kao-ballon, cet aventurier si connu dans la capi- tale, qui m'apprenait autrefois a faire des amies, et qui fut condamne, sur la plainte de mon pere, a la hastonnade et au bannissement. Sans doute il vou- dra venger ses injures. Oh ! pour le coup, je ne m'attendais guere que je dusse un jour me trouvc ous ses or- dres. » PROFESSlOir DE LOU-TA. (Extrail du III'" chap, du Choui-hou-lchouen.) Le lendemain, des I'aiibe du jour, Tchao, le you^n-wai , (lit a Lou-ta : « Je crois que ce pays-ci ne vous convient pas; vous n'y etes pas en silrete. Je vous invite , mon cher brigadier, a ve- nir passer quelque temps a ma ferme. — « Oil est situee votre ferme ? de- manda Lou-ta. — « A dix milles d'ici , repondit le youen-M'ai, dans le village des Sept- Diamants. — n Tres-volontiers, reprit Lou-ta. » Tchao , le you^n-wai , chargea sur- le-champ un domestique d'aller dire au fermier de seller deux chevaux et de les amener a la ville. Vers midi , quand ■ on annonca que les chevaux etaient a la porte, le youen-wai invita le briga- dier a monter, et ordonna au fermier CHINE MODERNE. 617 de porter les valiseS sur ses epaules. Lou-ta prit conge de Kin-lao et de sa fille, et nionta a cheval avec Tchao, le youen-wai. lis arriverent au village des Sept-Diamants. Parvenus a laferme, Tchao, leyouen-wal, conduisit Lou-ta dans une chaumiere, ou il etablit sa demeure. Or, un jour que les deux amis etaient a causer tranquillement dans la bibiiotheque, ils apercurent de loin Kin-lao qui accDurait a la fernie. Le vieillard dirigea ses pas vers la bibiio- theque, y entra precipitamment, et voyant qu'il n'y avail pas d'etrangers : « Mon liberateur, dit-il au brigadier, je ne suis pas mefiant; mais je dois vous avertir que trois ou quatre offi- ciers de police sont venus bier soir jlans le quartier, pour y faire une in- formation sur votre compte. S'il arri- vait un malheur, quel parti aurions- nous a prendre ? — « Aucun, repondit Lou-ta ; il vaut mieux que je m'en ailie. — « Je connais une maison , ajouta le youen-wai, ou vous trouveriez un refuge assure contre les recherches de la police ; mais peut-etre que cette mai- son ne vous serait pas agreable? — « Comment done ! reprit vivement Lou-ta, tout m'est agreable. Songez qu'il y va de ma tete. — « Tres-bien, tres-bien ! continua le youen-wai; vous yoila dans d'excellen- tes dispositions. Ecoutez-moi. II existe a trente milles d'ici une montagne ap- pelee Ou-tai-chan ou la Montagne des Cinq-Tours. Sur cette montagne estle monastere de Mandjous'ri , qui n'etait dans I'origine qu'un petit oratoire con- sacre an bodhisattva-maiidjous'ri , et qui renferme aujourd'hui-sept cents re- ligieux environ du culte de Bouddha. Le superieur du monastere a pour nom de religion Sagesse-eminente. Dans cette maison, que mes ancetres ont toujours soutenue par leurs pieuses li- beralites, on me regarde moi-meme comme un bienfaiteur et comme un homme avide de gagner les ccuvres de misericorde. II n'y a pas longtemps en- core, j'avais promis au superieur d'a- mener un neophyte dans le couvent pour V faire sa profession ; j'ai meme achete une licence sur papier a fleurs que je puis vous montrer ; mais les vo- cations sont rares, on ne les rencontre pas toujours. Brigadier, il depend de vous quej'accomplisse mon vceu; quant aux frais , tout me regarde. Voyons, parlez avec franchise, vous sentiriez- vous de I'incUnation pour la vie reli- gieuse ? Y a-t-il dans la ceremonie de la tonsure quelque chose qui vous re- pugne.^ » Maintenant, quand jevoudrais par- tir, se dit a lui-meme Lou-ta , oii trou- verais-je un asile? II vaut mieux que j'accepte sa proposition. « Eh bien! repliqua-t-il , puisque le youen-wai veut bien me prendre sous sa protec- tion, moi, qui ne suis qu'un ivrogne, je fais vceu d'etre bonze. » Alors ils delibererent ensemble sur ce projet. La nuit suivante, on prepara les bagages, et Ton partit a la pointe du jour." Les deux amis prirent la route du monastere , suivis du fermier, qui por- tait les valises. II etait environ sept heures du matin , quand ils arriverent au couvent. Plusieurs bonzes, de ceux qu'on appelle iou-sse et kien-sse^ vin- rent a leur rencontre. Tchao, le you^n- wai , et le brigadier se reposerent pen- dant quelque temps sous le portique exterieur; puis, le superieur du mo- nastere, Sagesse-eminente., suivi des desservants de I'autel , se presenta pour les recevoir. « Oh , oh ! c'est un de nos bienfai- teurs, s'ecria Sagesse-eminente , aper- cevant le youen-wai. La fatigue du che- niin — — « N'en parlons pas, repliqua celui- ci ; je vous demande un moment d'au- dience; car j'ai quelques affaires a vous recommander. — « Entrez dans la grande pagode, dit alors le superieur; vous prendrez une tasse de the. » Les deux amis suivirent le superreur. Arrives au monastere, Sagesse-emi- nente offrit au youen-wai li) nalte des botes ; quant a Lou-ta , il alia , la tete baissee, s'asseoir sur le banc de la me- ditation. Le youen-wai recommanda au brigadier de prater une oreille at- tentive et de parler a voix basse. «Vous venez ici, lui dit-il, pour embrasser la vie religieuse; comment osez-vous vous 518 L'UNIVERS. asseoir en facet du siip^rieiir? — C'est faute d'attention , r^pondit Lou-ta. » Et sur-le-champ, il se leva et resta de- bout derrfere le yoti^n-wai. Tous les l)on7.es, depuis les desservants de I'au- tel jusqu'aux teneurs de livres, vinrent par ordre se ranger sur deux files, Tune a Torient, I'autre a i'occident. Le fer- nuier entra dans la salle un moment apres, apportant une boite. « Encore des presents! s'ecria le su- p^rieur, et pourqiioi done? On voiis a tant de fois importune. — « Ce sont des bagatelles sans va- lenr, repondit le youcn-wai; il n'y a pas de quoi me remercier. » IJn novice du monastere emporta les presents. AlorsTchao, le yoiifin-wai, s'etant leve, prit la parole : "Venerable cenobite, dit-il au sup6- rieur, cet honime que j'amene ici pour accomplir un voeu est men frered'adop- tion; le nom de sa famiile est Lou. Sorti des rangs de Tarm^e, apres avoir connu le monde et I'infortune, un mou- vement Interieur I'appelle a la vie c6no- bitique. Je viens done aujourd'hui sup- plier Votre Reverence d'admettre mon ireredans sa communaute. Votre cle- mence est incomparable; par deference pour moi , recevez-le. J'apporte une licence etun extraitdu registre des im- p6ts. Quant aux ceremonies de la ton- sure et de la prise d'habits, il va sans dire que j'acquitterai tous les frais. Ve- nerable religieux, niettez le comble a mon bonheur. — « L'acquisition d'un tel homme , repondit Sagesse-eminente , doit jeter un grand eclat sur notre maison ; "je le recevrai, rien de plus facile, rien de plus facile. » Apres qu'un neophyte eut enleve le plateau sur lequel on avait servi le th^, le sup6rieur Sagesse-eminente ordonna aux desservants de Tautel d'assembler tons les bonzes du monastere, et de delib^rer avec eux sur I'admission du neophyte. II recommanda en mfime temps aux bonzes administrateurs d'ap- prSter un repas maigre. Les desservants de I'aiitel et les bon- ws assembles linrent une conference. ",9^t homme-li n'a point de vocation, B ecri^rent-iis presque tous; son regard est rude et menacant; rien chez lui n'annonce la pi^te. Ailez, dirent-il8 aux hospitallers, invitez les deux voyaseurg a se reposer dans le grand parloir; pen- dant ce temps, nous transmettrons no- tre avis au superieur. » Un moment apres, les bonzes assis- tants, suivis d'une partie de la com- munaute, se rendirent aupres de Sa- gesse-eminente. « Cet homme, qui se croit appele h la vie religieuse, dit le premier des as- sistants, a la physionomie d'un idiot. A voir sa figure, on le prendrait plutot pour un criminel de has etage. II ne faut pas le recevoir, car un jour il com- promettrait notre maison. — « Songez done, repliqua le supe- rieur, qu'il est le frere de Tchao, le youen-wai. Comment pourriez-vous, sans avoir egard aux soliicitalions de notre bienfaiteur, refuser nne admis- sion qu'il propose ? La mefiance nuit souvent ; gardez-vous de vous y aban- donner. Au surplus, je vais mediter moi-meme sur le caractere de cet homme ?» Apres avoir allume une baguette d'encens consacre, le superieur Sagesse- eminente .s'assit, les jaiiibes croisees, sur le banc de la meditation , et recita quelques prieres a voix basse. Quand le feu de la baguette s'eteignit, il revint au milieu des bonzes. « Oh, pour le coup, s*ecria-t-il,vous pouvez le tonsurer. Savez-vous que cet homme est ne sous la constellation du cie!.? C'est un caractere ferme et droit. J'avouerai qu'il est un pen brutal, nas- sablement idiot, et qu'on ne trouve dans sa vie qu'un singiilier melange de bien et de mal ; mais dans la suite il temoi- gnera une piete exemplaire a laquelle, vous autres, vous n'atteindrez jamais. Souvenez-vous de mes paroles, et ne mettez pas d'obstacle a I'execution de mes volontes. — "Venerable superieur, repliquerent les desservants de I'autel , vol la ce qui s'appelle une sage condescendance. Du reste, advienne que pourra , nous ne sommes pas responsables des fautes d'autrui. » Apres un repas maigre, auquel as- sista Tchao , le you^n-wai , un bonze administrateur etablit le compte des frais. Le you^n-wai remit h ce bonze CHINE MODERNE. S19 quelques taels d'argent pour la chape , le pluvial, le bonnet, Thabit, les san- dales et les instruments du culte a I'usage des bonzes. Quand les preparatifs furent ternii- nes, le superieur choisit un jour heu- reux; il ordonna aux neophytes de son- o ner les cloches et de battre le tambour. Alors les religieux, au nombre d'en- viron six cents, se rendirent proces- sionnellement dans la chapelle ; ils etaient tous revedis de la chape. Arri- ves au pied de I'autel de la loi , ils joi- gnirent les mains, firent une reverence profonde, et se rangerent sur deux files. Un moment apres, le youen-wai , pour accomplir les ceremonies d'usage, prit de I'encens consacre dans une casso- lette d'argent, se prosterna devant I'au- tel, et adora le dieu Foe. Lou-ta vint a son tour precede des neophytes du monastere. Des qu'il fut parvenu au pied de I'autel, un bonze, de ceux qui exer^aient les fouctions d'administra- teur, lui ordonna d'oter son bonnet; puis il divisa les cheveux du brigadier en neuf touffesegales, qu'il lia avec des cordons de sole ; prenant ensuite cha- que touffe Tune apres I'autre avec la main, le purificateur les coupa tour a tour. Celui-ci se disposait deja a cou- per les moustaches, mais le brigadier s'ecria aussitot : « Ah , si vous m'eu laissiez un peu, vous m'obligeriez beau- coup. » A ces mots, les religieux ne purent s'empecher de rire. « Pretres de Bouddha, dit le superieur Sagesse-eminente , du haut de I'autel ou il etait place, silence et respect; prions ! — « II n'est pas bon , reprit le supe- rieur apres avoir achev^ sa priere, que cet homme conserve des instincts belli- queux : coupez tout ; qu'on ne laisse pas un poll. » Cet ordre, emane du chef supreme du monastere, fut religieusement exe- cute par le purificateur, qui prit un rasoir, et s'acquitta desa t3che a mer- veille. Alors un desservant de I'autel presenta la licence au superieur, et in- vita celui-ci a conferer un nom boud- dhique a Lou-ta. Le superieur, sans f)lus tarder, la t^te decouverte et tenant a licence a la main, prononca les pa- roles sacramentelles : « Un raVon de la divine lumiere est plus precieux qu'un monceau d'or. La loi de Foe embrasse tous les ^tres; » puis, il ajouta : « Je vous donne pour nom Tchi-chin (Sa- voir-profond). » Le bonze prepose h la garde des archives remplit sur la licence le nom qui avail etc laisse en blanc; apres quoi, le superieur remit a Lou, Savoir-profond, I'habit religieux et la chape, avec ordre de s'en revetir a I'ins- tant m^me. Celui-ci , portant pour la premiere fois le costume des bonzes, fut conduit a I'autel par un religieux administrateur. Alors commenca la ceremonie de I'imposition des mains et de I'instruction solennelle , appelee cheoxi-ki. « Voici les trois grands preceptes auxquels vous devez obeir, dit a Savoir- profond le 5u^tne:\XT Sagesse-eminente, une main posee sur la tfite du neophyte: « 1° Vous imiterez Bouddha; « 2° Vous professerez la doctrine or- thodoxe ; « 3° Vous respeclerez vos mattres et vos condisciples. « Voici maintenant les cinq defenses: « r Vous ne tuerez aucun €tre vi- va nt; « 2» Vous ne deroberez pas ; n 3° Vous ne commettrez pas d'im- puretes ; n 4° Vous ne boirez pas de vin ; « 5° Vous ne mentirez pas. » Savoir-profond ne comprit rien aux voeux des neophytes ; et quand le supe- rieur lui demanda s'il pourrait, oui ou non, observer les cinq commandements, Savoir-profond repondit : « Moi qui ne suis qu'un ivrogne, je m'en souvien- drai. » A ces paroles , tout le monde se mit a rire. Quand I'instruction du neophyte fut terminee, Tchao, le youf n-wai , prit conge du superieur auquel il recom- manda Savoir-profond. « C'est un hom- me d'une intelligence fort mediocre, lui dit-il ; ayez de I'indulgence pour lui. — « Soye'z tranquille, repondit le su- perieur, je lui apprendrai tout douce- ment a lire les ecritures, a reciter ses prieres, a disserter sur la doctrine et a officier dans les ceremonies. » 520 L'UNIVERS. Sr-SIANG-Kl, Ouvrage du sixieme Thsai-tseu. Le Si-siang-ki, ou VHistoire du pa- vilion d'occident , est un drame tres- celebre et tres-etendu , car il n'a pas inoins de seize actes, dont les sept nre- uiiers ont ete traduits et inseres dans V Europe litteraire par M. Stanislas Ju- lien. Voici le sujet du Si-siang-ki: Un jeune bacheiier , qui allait a ia cour pour y subir ses examens, traverse le departeiuent de Ho-tchong-fou , et s'arrete dans une petite hotellerie. Le nom de famille de ce bacheiier est Tchang, son surnom Kong, et sontitre honori(ique Kiuii-choui. Originaire de Si-16 , fils d'un ancien president du tri- bunal des rites, il a pour ami iiitime Thou-kio; mais Tliou-kio avait abaii- donne la carriere des lettres et obtenu dans I'ordre militaire le grade de tchouang-youen. £leve au rang de ge- neral en chef, il commande rarmee ex- peditionnaire de Touest, composee de cent niille homines, et garde les fron- tieres du Ho-tchong-fou. « Venez , que je vous adresse une question , (lit a son bote le bacheiier Tchang-kong; y a-t-il dans le voisinage quelque endroit oil Ton puisse faire une promenade agreable, un temple deTao- sse ou de bouddbistes , un site pilto- resque, un terrain consacre, n'importe? — Assurement, repond I'aubergiste, nous avons pres d'ici le fameux temple de P"bou-kieou , oii Ton conserve les reliques de Bouddha. Cest une mer- veille que ce monument, une merveille. Son architecture, son magnifique dome en cristal, sa pagode, qui s'eleve jus- qu'a la voie lactee , tout y excite I'ad- miration. » Tcbang-kong s'acbemine done vers le temple de P'bou-kieou ou le temple du secours universel. II est recu par un disciple du superieur, par Fa-tsong , qui lui montre le clocher, la cour de la pagode, le refectoire , les galeries cou- vertes; il est introduit par les bonzes dans la salle de la doctrine (Fa-tbang), et incline son front devant les P'iiou-sa. Parmi les personnes qui demeuraient alors dans la pagode se trouvaitTcbing- chi, veuve d'un ministre d'fetat appele Tsoui, accompagnee de sa fille Yng-yng, jeune personne d'une ravissantc beaute, d'une suivante nonmiee Hong-niang, de Hoan-lang , petit enfant que le mi- nistre , a defaut d'heritier male , avait adopte; Tching-chi portait a P6-ling le cercueil qui contenait les restes de son epoux; mais, ayant rencontre des obs- tacles sur sa route , elle s'etait arr^tee dans le temple de P'hou-kieou , et y avait depose le cercueil. Tchang-kong est dans le jardin du couvent; il y rencontre une jeuiie im- mortelle: c'etait Yng-yng, qui, tenant a la main un bouquet de fleurs, se pro- menait accompagnee de sa suivante Hong-niang. « Ses sourcils,dit le poete, s'arrondissaient noblement comme Tare de la nouvelle lune, et s'etendaient avec grace jusque sous les nuages parfumcs ( les cheveux) qui ombrageaient ses tem- pes. En apercevant Tchang-kong, ses joues se colorent de rongeur ; elle en- tr'ouvre ses levres, qui ont Tincarnat de la cerise, et laisse apercevoir des dents blanches comme le riz, brillantes comme la rosee ; toutefois le bruit har- monieux des pierres suspendues a sa ceinture s'eloigne par degres ; on en- tend seulement dans le lointain un ga- zouillement semblable a celui des oi- seaux. n Tchang-kong et Yng-yng de- viennent tperdument amoureux I'un de I'autre , et s'ecrivent des lettres pleines detendresse; c' est Hong-niang qui porte les messages. Le 15'' jour de la 2^ lune, pendant que Yng-yng offrait un sacrifice aux msines de son pere, elle se trouve tout a coup environnee d'une foule d'hom- mes, accourus dans le temple pour la voir. Lfn chef de brigandsMigurait au milieu d'eux. Epris des charmes de la jeune fille, il concoit rabomiuabic pro- jet de la ravir a sa mere, quitte la pa- gode pour y revenir bientot a la tete de cinq miile bandits. « Si quelqu'un s'ecrie alors Tsoui-chi, reduite au de- sespoir, me delivre du peril, par un coup imprevu, religieux ou laique, je lui accorderai ma fille. » Tchang-kong, sans perdre une minute, envoie secre- tenient un messager au commandant du departement, a Thou-kio. Celui-ci, comme on I'a vu , etait I'ami inlime de Tcbang-kong; il arrive avec des trou- pes, et met les brigands en fuite, apres CHINE MODERNE. £21 plusieurs combats. Lebachelier ne man- que pas de reclamer I'execution d'une promesse qui lui plait fort. II se pre- sente au concours, triomphe, et obtieat, avec le doctorat, I'epouse qu'il desi- rait. Le Si-siang-ki est le chef-d'oeuvre de la poesie lyrique des Chinois. Jamais Duvrage n'obtint a la Chine un succes plus reel et plus brillant ; il le meritait par I'elegance du langage, par la viva- cite du dialogue, et, d'apres tous les critiques, par le charme et I'harmonie des vers. L'enthousiasme qu'il excita dure encore. £coutez les editeurs de no- tre temps : « Un homme me disait : UHistoire du pavilion occidental {Si- siang-ki) est un livre obscene; je n'ea doute pas, un jour viendra ou I'auteur de cet ouvrage sera precipite au fond de I'enfer ; Jes demons lui arracheront la langue. Etes-vous de mon avis ? — Won, lui repondis-je, le Si-siang-ki n'est pas un ouvrage comme un autre; c'est le chef-d'oeuvre du ciel et de la terre. II existe depuis que le ciel et la terre existent. Ce n'est pas un homme qui I'a ecrit....Mais si vous voulez absolument qu'un homme ait compose I'Histoire du pavilion occidental, Ching-than vous dira son nom. — Je soutiens que le Si- sian^-ki n'est pas un ouvrage licencieux, s'ecrie un autre editeur; non, c'est le plus beau monument de la litterature. Tant qu'il y aura des hommes eloquents qui diront : C'est un chef-d'oeuvre, il se trouvera des libertins qui repondront : C'est un livre obscene. Ching-than n'a pas revele son secret a tout le monde. » Ching-than (Kin-ching-than) n'est que le coramentateur du Si-siang-ki ; c'estWang-chi-fou, dont j'ai d6ja parle, qui en est I'auteur ; cependant quelque merite que Ton reconnaisse dans le Si-siang-ki, on doit convenir que cet ouvrage est depourvu d'intrigue; gene- ralement les auteurs de la dynastie des Youen montrerent une plus grande force dramatique (*). On trouvera plus loin un parallele entre le Si-siang-ki et lePi-pa-ki. (*) Journal asiafiqiie, cahier de fevrier- mars i85r, p. 176 el 177. PI-PA-KI, Ouvrage du septieme Thsai-tseu. Le Pi-pa-ki , ou I'Histoire du luth (*), fut compose , vers la tin du quator- zieme siecle de notre ere, par un ecri- vain chinois appele Kao-tong-kia, dont le surnom etait Tse-tching. Ce drame celebre , qui fait aiijourd'hui colder tant de larmes, qui fut regarde , sous la dynastie Thai-thsing (actuellement regnante), comme V ouvrage le plus utile aux mo&urs et comme le chef- d'oeuvre du theatre chinois, n'obtint,du vivant de I'auteur, que des succes fort equivoques. En 1404, la deuxieme an- uee de la periode Yong-lo des Ming, il fut represente pour la premiere fois avec les changements de Mao-tseu. Mao-tseu etait un savant commenta- teur, qui perdit la vue a force de tra- vailler, et qui avait ce qui manque or- dinairement aux commentateurs , de I'esprit et du goijt. Le drame de Rao- tong-kia, revu et corrige, fut accueilli avec enthousiasme, et I'on rendit a la memoire de I'auteur un tardif et inutile hommage. Trois siecles apres, on re- commandait la lecture du Pi-pa-ki aux epoux , aux fils et aux serviteurs de VEtat. Une des editions du Pi-pa-ki ne ren- ferme pas moinsdequatorze prefaces;... mais , relativement a la biographic de Kao-tong-kia, jedois avertirque, si Ton vante beaucoup dans ces prefaces le talent natural de I'auteur et I'usage qu'il en a fait , on n'y parle jamais de son caractere et des circoustances de sa vie. II est vraisemblable qu'on ignore I'epo- que precise de sa naissance, qu'il vecut dans la retraite, et mourut dans la pau- vrete. Une parodie des examens publics dans le cinquieme tableau du Pi-pa-ki, quelques allusions contre le systeme des etudes dans le quatrieme, une iro- nic assez profoniJe dans presque tous les autres, et un ton d'amertume que (*) CeUe notice est extraile d'lin aver- tissement que j'ai place a la lele de ma tra- duction du Pi-pa-ki. (Voy. le Pi-pa-ki ou I'Histoire du lulh , drame chinois de Kao- tong-kia, represente a Pe-king en 1404, avec les changements de Mao-tseu, traduit sur le texte original par M. Ba/in Avertis- sement, p. 6-ia.) 522 L'UNIVERS, I'edileur lui-m«me fignale dans sa pre- face, annonceiU un amour-propre froiss^. J'inclinerais a croire que I'au- teur avail echou6 au concours dans sa jeunesse, si una charmante nouvelle, traduite du chinois par M. Tlieodore Pavie , ne nous apprenait que sous la dynastie desThang, au commencement du huiti^me siecle de notre ere , c'est- fi-dire cinquanteans environ apres I'ins- titiition des examens publics, on se mo- quait d^ia des examinateurs. A detaut de notices biographiques sur i'auteur, on trouve un grand nom- bre de notices litteraires sur I'ouvrage. Les critiques cherchent avec curiosite Ips sources historiques oil Kao-tong-kia a puis^ le sujet de son drame ; lis citent deux ou trois anecdotes que j'ai rap- port^es dans le Dialogue entre tin edi- tevr chinois et unjeune lettre. Chaque mot devient pour eux I'objet d'un coju- mentaire, et i'on pourrait dire de Kao- tong-kia , comme un Anglais de Sha- kespeare : « Criticism has been drawn to the very dregs in commentaries upon his words and loitticisms. » Quant au style, les critiques se livrent a des re- cherches sur les emprunts faits par Tong-kia aux poetes de la dynastie des Thang; et Ching-chan, editeur severe, a I'oeil de qui rien n'echappe, ne man- aue jamais de les signaler. Ce qu'il y a 'incontestable , c'est que la main qui a trac<^ les caracteres du Pi-pa-ki n'^tait pas une main vulgaire (Soii-cheou). Le Pi-pa-ki est un de ces ouvrages qui marquent I'^tat d'une litterature et la font estimer ; Kao-tong-kia a de la nai- vete, de I'esprit , de la sensibility et de la verve. ....Tous les drames qu'on a traduits jusqu'h present sont tir^s du Repertoire desYou^n,et appartiennent a la fin du treizieme siecle ; le Pi-pa-ki a ^te repr^sente sous la dynastie des Ming, au commencement du quinzieme. Que Ton prenne done le Jeune Orphelin de lafamille de Tchao, qui a fourni des situations a Voltaire ; les Chagrins dans le palais des Han, ou la Fengeance de Teou-ngo, pour les comparer au Pi- pa-ki, et I'on reconnaltra la progres- sion. L'exposition du sujet, dans le pre- mier tableau du Pi-pa-ki, est simple, claire et naturelle; une pareille scene vaut deja mienx, a elle senle, qu'un drame tout cntier de la dj'nastie prece- dente. Dans le dialogue," le style a de la vivacity et du mouvement. Plus que tous les ecrivains dramatiques qui I'ont precede, Kao-tong-kia interesse par le r^cit des faits et la variety des inci- dents , par le merite et la singuliere beaute des details. Chaque personnage a une physionomie distincte : Nieou-chi ne ressemble pas a Tchao-ou-niang ; Tchao-ou-niang est au-dessus de son sexe. On ne croit pas, en I'ecoutant, qu'tlle sera mise un jour au nombre des femmes vertueuses de la Chine, on en est siir; TS'ieou-chi a plus de dou- ceur, plus de modestie, plus d'amabi- lite. La morale de Kao-tongkia est su- perieure a celle des ecrivains des You^n. II est visible que cet auteiir cherche a se garantir des fautes qu'on avail re- prochees ^ Wang-chi-fou , auteur du Si-siang-ki. Analyse et exlrails du Pi-fja-ki. « Le prologue, dit M. Magnin , de rinstitut, nous montre le directeur du th^fitre deliberant, avec les corned iens r^nnis dans le foyer, sur le choix de la piece qu'ils vont repr^senter devant le public (*). Ce directeur propose dejoiier un tchouen-khi , c'est-a-dire un des drames historiques composes sous la dynastie des Thang; mais les corned lens demandent a representer le Pi-pa-ki. Le directeur observe qu'il est plus nis6 de faire rire les hommes que de les faire pleurer, axiome qui , dans notre Europe, serait pour le moins contes- table. N^anmoins il consent a ce qu'on joue le Pi-pa-ki. II entre done en scene, annonce la piece aux spectateurs, et lea prie d'ecouter I'argument , qui est une exposition tout a fait dans la forme des prologues de Plaute. Puis, ayant rejoint les acteurs : « Messieurs, leur dit-il , je ne veux pas que cette representation dure trop longtemps , tAchez de flnir aujourd'hui, mais surtout ne retranrhez rien. » « .... L'action du drame, qiioique une, se divise en deux parlies tout a fait (*) Voy. le Journal des Savanix , cahier de Janvier 1843 article de M. Magnin, p. 38 et suir. CHINE MODERNE. 523 distinctes, mais qui ont entre elles de certains rapports de ressemblance ou d'opposition; ce qui efablit une sorte de parallelisme continu qui, dans les idees chi noises, est le plus grand merite d'une composition. La scene se passe alternativemeiit dans un village de la frontiere , nomme Tchin-lieou et dans la ville de Tchang-ngan , alors capitale de rempire. Dans ie village habite une honnete famille, composee de M. Tsai, de sa femme , de lenr fils Tsai-yong et de leiir bru Tchao-ou-niang. M. Tsai n'a qu'une pensee , qu'un desir : celui de voir son fils, jeiine bachelier de grande esperance, se rendre a la capitale, et concourir pour un grade supcrieur. Madame Tsai est fort opposee a ce voyage , et le jeune homme ^prouve aussi la plus vive repugnance h exposer ses vieux parents et sa jeune femme k tous les accidents qui peuvent subvenir pendant son absence : TSAJi-TONG, avec chagrin. Qu'est-ce que ce monde ? — (// chante.) J'ai tout elndie ; les livres que j'ai his ne formeraient pas moins de dix mille cahiers; mais courir apres la reputation , les faveurs, oh ! je n'y ai jamais songe. Si je m'afflige d'une chose, c'est de voir que mon pere et ma mere coramencent a pencher vers le declin de I'age. Ou trouverai-je des fleiirs de giaieul (*)? Qui decouvrira pour moi I'arhre Ichun et I'arbre hiouen (**) ? (Ilparait dans line grande agitation.) Ciel ! mon coeur se gonfle ! a qui pourrais-je devoiler mes cha- grins? — Mais, pendant que je me livre a ces pensees , j'apercois le seigneur Tchang. LE SEiGWEUR TCBAKG. (// morche en chantant.) Mes bons voisins ! mes bons voisins ! lis me regardent tous comme nn protecteur sur lequel ils peiivent se reposer. Quoi qu'il ar- rive dans la famille, c'est a qui viendra m'en faire part ou me demander mon avis. (// salue Tsai-yong ; Tsai-yong rend le sa- lut.) TSAl-TONG. Ah! seigneur, mes parents sont trop Sges; decidement je ne puis me resoudre a partir. (*) Fleurs qui, sulvant les poetes et les mythologues, ont la verlu de rappeler a la vie. (**) Les caracteres tcliun et hiouen desi* gnent poetiquement le pere et la mere. T.E SEIGSETTR TCHANG. (// chttnte.) Mon ami, que Page avance de vos parents ou risolement dans lequel ils peuvent se trou- ver devienne I'objet de voire sollicilude, cela se conijoit ; mais avouez du moins que voire pere doit souhaiter que son fils illustre sa famille et ses ancetres. Si vous ne profitez pas de la verdure et des beaux jours du prin- temps pour vous mettre en route , quand partirez-vous done ? TSAJi-TONG. Vous desapproavez ma conduite , seigneur, et LE SEIGlTKint. TCHANG. Au surplus , voici voire pere et voire mere; expliquez-vous. (Tsai, le youen-wa'i, et ma- dame Tsai arrivent sur la scene.) MADAME TSAI , vivement a Tsai-yong. Mon Sis, jene veux pas que lu emmenes ton epouse avec toi. Depuis tout a I'heure deux niois qu'elle est mariee, Tcbao-ou-niang a maigri de moitie. S'il faut qu'elle habite avec toi pendant trois ans, je prevois qu'a la fin la pauvre femme ne sera guere bonne qu'a mettre en lerre (*). I.E SEtGNEUR TCHAHG. Ah! madame Tsai, voulez-vous semer la division dans votre famille , entretenir la dis- corde entre I'epoux et I'epouse ? TSAI, I.E TOUEH-WAJi, a son fils. Tsai-yong, le concours est ouvert. Voici I'epoque ou le fils du ciel appelle a' la capi- tale tous les hommes de talent. Puisque lu as fait les preuves dans I'assemblee du district , que ne vas-lu concourir pour un grade su- perieur ? TSAl-TOSO, Mon pere, daignez m'ecouter. Ce n'esl pas que votre fils se refuse a partir, helas ! je ne suis retenu ici qu'a cause de votre grand age, et parce que je prevois des malbeurs. Quand j'aurai quitte la maison, dites-moi oil est celui qui nourrira et servira mon pere et ma mere? I.K SEtONECR TCHAlfO. Touen-wai et vous , madame Tsai , voici mon avis. C'est qu'on doit exhorler le jeune bachelier a faire un tour a la capitale. MADAME TSAi. ■Seigneur, ignorez-vons que je n'ai pas dans ma maison sept fils ou huit gendres pour me servir ? Je n'ai qu'un fils au monde; voulez-vous qu'il m'abandonne? TSAI, I.E TOUEtf, a madame Tsai. Ma femme , quelles paroles se sont eclwp- pees de votre bouche? Si Tsai-yong nous (*) Ce passage ne se trouve point dans I'edition populaire. 524 L'UNIVERS. quille pom aller «abir ses examens liUe- raircs , est-ce que nous n'aurons pas im jour dans notre maisoii dcs gendres et des lils (*) en grand uombre ? MADAME TSAl , Ctl CoUtC. Stupide vieillard , vos yeux sent obscurcis par I'Age, vos oreilles deviennent sourdes, vous ne pouvez plus ni faire un pas, ni re- muer vos jambes. Quand vous aurez force voire Ills a partir, s'il survient une inonda- tion, qui viendraa nolresecours? Vous mour- rei de faim , si vous manquez de riz; de froid , si vous n'avez plus de vetements, savez-vous cela? TSAI, LK YOUEW-WAl'. Paix ! femme imperlinenle que vous dies, vous n'enlendez rien a ces affaires-la. Lors- que mon fils aura obtenu un mandarinat, nous aurons un auire train ; nous changerons d'habitation, de maniere de vivre. ... Il de- vrait deja etre sur la route de Tchang-ngan ! TSAl-YONG. Ma mere a raison. J'imagine que mon pere ne meconnaitra pas les egards. . . . TSAl, LE TOOEN-WAl. C'est cela, c'est cela; ta mere a raison, ton pere a tort. (y4n seigneur Tchang.') Je devine sa pensee; je sais maiutenant ce qui le retieut ici. LE SEIGNEUR TCHANG. Et qu'est-ce done, puisque vous le savez? TSAl, I.E YOCEN-WAl. \jKS charmes et les agrements de Tchao- ou - niang onl fait une vive impression sur son coeur. — (// chante.) II ne reve plus qu'a Tamour et aux douces voluptes de la couche nuptiale. Il ne pent plus s'eloigner du rivage de la mer; sa vue n'oserait point embrasser un horizon plus vaste. TSAi-YONG, d'un air confits. Mon pere, vous me supposez des senti- ments. . . . TSAl', I.K YODEN-WAJi. Tu connais a fond tons tes'auteurs. l^coute- moi ; je vais te citer uti trait hislorique. — (// chante.) Qiiatre jours apres (ses noces) , le grand Tu quitta le mont Tou-chan. — (// parlc.) Yoila deux mois que ton mariage est accompli. — (// chante.) Et Ton ne peut pas encore t arracher de ces lieux ! LE SEIGNEUR TCBANG, SOwiallt, Ah ! ah ! monsieur le bachelier. — ( // chante.) "Vous soupirez apres I'indissoluble union du youdn et du yang (**) ; vous etes comme le phenix male , qui ne veut pas se (*) Des serviteurs. (*•) Deux oiteaux qui sont le symbole de ramoor conjugal. separer de la compagne qu'il aime. Je craios bien que dans votre aveuglcment vous ne preferiez la stupide immobiiite de Toiseau ngo au vol audacieux de I'oiseau pong. Il est bon cependant que vous preniez un pen de repos. TSAl, I.E YOUEN-WAl. Oui, tu ne songes qu'au plaisir, et tu ne crains pas d'argumenter contre ton pere! TSA'i-YONG. (// se met a genoitx , et invonttc le del.) Ciel ! moi , Tsai-yong , tenir tete a mon pere! (// se releve.) O mes parents, esl-ce votre fils qui oserait vous susciler des obsta- cles? Helas ! je le repete, je ne suis retenu ici qu'a cause de votre grand age. Mon pere, supposez (et cela est possible) qu'une inon- dation survienne , que dira-t-on P Ou dira d'abord que votre ills a manque de piete liliale ; qu'il a abandonne son vieux pere , sa vieille mere , pour courir apres je ne sais quelle place, quelle magistralure ; ensuite on accusera mon pere d'imprevoyance, on alle- guera qu'il n'avait qu'un fils, et qu'il I'a force d'entreprendre un voyage long, avcntureux. Vraimeut , plus j'y reflccliis , plus il m'est difficile d'obeir a vos ordres. TSAl, LE YOUEN-WAl. Que tu n'obeisses pas a mes ordres , cela depend de toi ; mais dis-moi un peu ce qu'il faut entendre par ce mot hiao (piete filiale)? MADAME TSAl , d' iin lou courroucc. Ciel ! vous avez plus de qualre-vingts ans, et vous ne savez pas en quoi consiste la piete filiale ! Eh bien ! mener un vieillard a la li- siere comme un enfant , voila la piete filiale. TSAl , LE youEN-WAi , avec calmc. Femme , que voulez-vous dire .•• TSAl'-YONG. Mon pere , je vais repondre a voire ques- tion. Voici en quoi consistent les devoirs du fils envers ses parents : « Le devoir du (ils, c'est de prendre des precautions pour qu'en hiver comme en ete ses parents jouissent de toutes les commodiles de la vie. Il faut que, chaque soir, il dresse lui-meme la couche sur laquelle ils reposent ; il faut que , tous les matins, au premier chant du coq , il s'in- forme, dans les termes les plus affeclueux , de I'etal de leur sante; puis, que, dans le cours de la journee , il leur demande, a plu- sieurs reprises, s'ils souffrent du froid ou si la chaleur les incommode. Le devoir du fils, c'est de veiller sur ses parents quand ils mar- chent ; c'est d'aimer ceux qu'ils aiment, d'ho- norer ceux qu'ils honoreut ; il doit aimer jusqu'aux chevaux et aux chiens que son pere aime. Un fils , tant que son pere el sa mere vivent, ne doit point s'eloigner de la CHINE MODERNE. 525 J maison qu'ils habilent (*). >> Yoila la piete filiate des anciens. C'etait ainsi qu'ils pen- saient et agissaieat. TSAl, LE YOUES-WAl. Mon fils , tout cela , c'est ce qu'on appelle siao-tsiei (les jielits paragraphes du Hiao- king), ou les devoirs vulgaires ; mais il y a plusieurs degres dans la piete liliale : tu n'as pas parle jusqu'ici des grands devoirs, de la piete par excellence. MADAME TSAl, cxasperee. Malheureux ! vous n'eles pas encore mort; altenJez , c'est seulement alors qu'on poiirra le forcer a remplir les derniers devoirs, dont parle le Hiao-klng. Pour ce qui est du voyage a la capitale , qu'il n'eu soit plus question. I.E SEIG?(EUR TCHANG. Ta , ya , voila des paroles qui ne presagent rien de bon pour I'avenir. TSAl, I.E TOUEN-WAi. Mon fils , ecoute-moi : » Le premier degre de la piete filiale consisle a servir ses pa- rents ; le second , a servir son prince ; le troisieme , a rechercher les dignites. Con- server dans son integrite le corps que Ton a recu de son pere et de sa mere , eviter avec soin tout ce qui tend a le detruire , c'est le commencement de la piele filiale ; mais par- venir aux dignites, praliquer la vertu, eten- dre sa reputation jusqu'aux siecles poste- rieurs pour illustrer son pere et sa mere , c'est la fin, c'est le comble de la piete fi- liale (**). » Celui , dont les parents sont pau- vres , avances en age , et qui ne recherche pas les dignites, est depourvu de piete filiale. Si tu t'eleves par ton merite au rang des mandarins, et que tu transformes en une maison de plaisance la chetive habitation de ton pere et de ta mere, tu auras accompli tons les devoirs qui te sunt imposes , ou alors je n'y concois plus rien. TSAl-YOWG. Mon pere, je n'ai qu'une objection a vous faire. Supposez que j'echoue au concours des licencies, qu'avez-vous a dire? Vous direz que je n'ai pas su servir mes parents , que je n'ai pas su servir mon prince. Quelle ef- frayante responsabilile ! r,E sEiGSEiiR tcha: quietude sur le sort de vos pareaU. Il y a lougtemps qu'on dil : « Avec huit cents maces, 00 acbete uue chaumiere; avec mille, on acliele une maisou. » Puisque mon babila- tiou pent conlenir cinq families, ayez I'es- l»ril eu rcpos. Parlez, partez vile; et si voire pere el voire mere tombeut dans I'indigence, je saurai veair a leur secours. TSAi'-YOMG. (// chante.) Je vous remercie , seigneur, de vos gene- reux procedes. C'est a voire garde que je confie mes parents. Mais quand viendra le jour de ma prosperite , ue seront-ils pas tous 1«« deux accables par I'dge ? Helas ! je ne le eraius que trop , lorsque je reviendrai dans mon pays natal avec des habits brodcs , mon pere et ma mere ne me reconnaitront plus. TSaV, le YOUEJC-WAl. Mon fils , lu parlais tout a I'heure de noire ijolement; mais a parlir du jour ou tu seras mandarin (// chante), les trois especes de viaiide et t«s niels recherches qu'on offre dim les grands sacrifices, on me les servira du matin au soir, sur des trepieds a forme elegante ou dans des vases de purcelaine fine. Cela vaut mieux que de manger des leves et de boire de I'eau. Si tu revieus avec des habits brodes dans ton pays iialal {Il parU), je mourrai. — (// chante.) Mais mon ame sera fiere , paisible el juyeuse. MADAME TSAl. {Elte clionte.) £u un din d'oeil on me derobe la perle que j'avais sur la main. {A son fils.) Va, mou fils, si, duranl ton absence, ton pere el la mere meurenl de faim ou de froid , quand mcme tu reviendrais avec des habits brodes dans ton pays natal , la gloire u'en sera pai muins souillee. Dans la capitale, uous avons sous les yeux I'interieur d'une faniille toute differente. Voici I'hotel et les jardiiis du riche seigneur Nieou , precepteur de la famille iinperiale, qui consacre tous ses loisirs a reducation de sa fille, I'aimable ]Nieou-cbi, aupres de laquelle il a place une sage gouvernante et une jeime sui- vante presque aussi eveillee que la pe- tite Fan-sou de la Soubrette accomplie. Toute rambition du seigneur Meou est de trouver pour sa (ille un epoux digne d'elle. Cependant, au village de Tcbin-lieou, les tristes pressentiments de niadame Tsai s'accomplissent: les aunees s'ecou- lent, et leur fils ne revieut pas; une inondation ruiiie le pays; la famine ar- rive ; les deux pauvres vieillards sont reduits a la plus extreme misere. Leur bru, la vertueuse Tchao-ou-niang, vend un a un tous ses bijoux, toutes ses parures , pour faire subsister ses vieux parents. Leur charitable voisin, M. Tchang, vient aussi souvent a leur aide; mais enfin ils nieurent de misere Tun apres I'autre. Vous demandez quel obstacle s'est oppose au retour de Tsai- yong? II a obtenu la pa'.me academique; il est devenu magistrat de premiere classe, et a ete promu au grade de ini- nistre d'Etat. Bieu plus, par ordre ex- pres de reinpereur, et malgre ses refus reileres, il a ete contraint d'epouser la fille du precepteur de la famille irnpe- riale, la charmanle i\ieou-chi. Pourquol n'a-ti! pas francliement informe le sei- gneur Nieou et I'empereur du premier mariage qu'il a contracte? Pourquol, ne pouvant quitter la capitale, n'atil pas ecrit ou envoye un expres .i sa fa- CHINE MODERNE. 527 niille? C'etaient la des demarches faci- les, indispensables, et dont I'oubli est fort mal motive dans la piece. Aureste, CCS grossieres invraisemblances , qui sont le defaut capital de ce drame , n'ont pas echappe aux critiques chinois, notamment a I'enthousiaste editeur de 1704; mais 11 faut reconnaitre en re- vanche qu'il resulte de ces invraisem- blances une situation d'un interet puis- sant, et dont I'auteur a tire les effets les plus dramatiques. Rien n'est mieux senti que les remords et la tristesse de Tsai-yong , qui , plein du souvenir (ie sa famille et de sa jeune femme, niaudit la science, les succes litteraires, les grandeurs , la beaute m^me et les graces de sa nouvelleepouse. Rien n'est plus touchant que la maniere froide et triste , et neanmoins douce et affec- tueuse, dont il ajourne les questions et elude les caresses de Nieou-chl. Une scene surlout est vraiment charmante: c'est, je crois, celle qui a fait nommer ce drame VHistoire du hdh. Un soir, seul et pensif dans sa bibliotheque, TsaT-yong essaye de tirer quelques ac- cords de son luth. II est surpris par sa jeune epouse , qui lui demande la fa- veur de I'entendre; car elle aussi a du chagrin , et elle croit qu'une romance lui serait un soulagement. Tsai-yong ne peut se refuser a cette priere. II propose a Nieou-chi de lui chanter « le Faisan qui, le matin, pr end son vol. » Mais la jeune feuime n'approuve pas ce choix; il n'y a pas d'amour la-dedans: c'est une chanson de chasseur. — Eh bien , dit le jeune homme, je vais vous chanter « I'Oiseau Louen separe de la compagne qu'il aime. » — L'epoux et I'epouse ne sont-ils pas reunis ? repond Nieou-chi; pourquoi voulez-vous de- plorer sur votre luth les regrets du veuvage ? TSAi-YOMG. Alors chanlons une autre chanson. Que dites-vous de la romance intituiee le Ressen- timent de la belle Tcliao-k'iun ? wiEOtr-CHr. Qu'avez-vous besoin de chanter la Ven- geance dans le palais des Han ? La paix et ia Concorde habilent ici. Seigneur, dans le calme de cette belle soiree, devant ces pers- pectives ravissantes, chantez-moi la romance Qiiaiul la tempetc aglte les pins. Tsai-yong acquiesce a ce desir; mais il se trompe , et chante I'air Quandje pense que je retournerai dans man pays natal. Nieou-chi rinterrorapt , et il recommence; mais il se trompe en- core, et chante I'air de la Cigogne de- laissee. Cette scene , qui se prolonge et amene une demi-explication entre les deux epoux , serait pleine de grace et d'interfit sur tous les theatres du monde. Enfin, Tsai-yong se resout a faire ce par ou il aurait dd commencer, 1 aveu de sa position a sa femme et a son beaupere. L'un et I'autre approuvent qu'il envoie un messager a Tchin-lieou pour en ramener sa famille. Comme il est permis et, de plus tres-commun a la Chine, d'avoir deux femmes , et que la seconde est tenue seulement a quel- que subordination a I'egard de la pre- miere, Nieou-chi consent de bonne gr^ce a un partage qui rendra le bonheur a son mari. Que fait cependant Tchao-ou-niang? Elle a vu mourir de' misere son beau- pere et sa belle-mere ; mais comment leur rendra-t-elle les derniers devoirs? Elle coupe sa chevelure, et la vend pour subvenir aux frais de leurs funerailles. Elle ramasse avec ses mains de la terre dans le pan de sa tunique pour leur elever un tombeau. Avertie par un songe prophetique , elle revet un habit blanc de religieuse, prend un luth, et, amaigrie par la souffrance, s'achemine vers la capitale en chantant et en de- mandant I'aumdiie sur la route. Ayant decouvert I'hdtel qu"h;ibite Tsai-yong, et sachaiit queNieou-chi cherche a louer deux nouvelles servantes pour soigner la famille de son mari, dont elle attend I'arrivee, Tchao-ou-niang se presente a elle. C'est une scene on ne peut plus heureusement concue, et non moins heureusement executee, que celle oii, de question en question , de conGdence en confldence , ces deux femmes com- mencent a se comprendre, a s'aimer, et finisseut par se reconnaitre. La voici tout entiere : iroEOU-Ciu , au domestique. J'aurais besoin de quelques servantes pour les parents de mou epoux, qui vont arriver. Allez done faire un lour daus les rues ; pre- nez des informations a droite , a gauche , et 528 L'UNIVERS. si voiu rencontrez une femmc du peuple cherchaut une place, amenez-la ici. J«| veiix line jeiine feninie d'un exterieiir agreabic ; VOU& culendez ? LB DOMESTIQUB. Oui, madame , el je vais siir-le- champ m'acquitter de voire commissiou. {Il sort.) TCBAO-ou-HiAMtt , porlaiit le costume d'une religieuse. — {Elle cliante.) Ma nourriliire, c'est cette vapeur epaisse qui obscurcil I'air. O indigeuce sans asile ! hilas! quand viendra done le jour ou je Itourrai vivre dans le calme et le lepos ? J'ai )eau interroger le ciel , le ciel est sourd a ma voix. — {El/e parle.) Voici I'hotel du ini- nislre d'etat; voici le seuil de la porte. {y4u youen-kong, qui sort de t hotel.) Domestique, je V0U8 salue. I.E DOMESTIQUE. Religieuse du dicu Foe, d'ou venez-vous done comme cela ? TCH\0-On-IHANG. J'arrive d'un pays eloigne, el je viens dans la capitate pour y demander Taumone. LE DOMESTIQUE. Attendez un instant; je vais vous annoncer a madame, (// renlre dans I' hotel.) — {A Nieou-chi.) Madame, je viens de rencoutrer sur le seuil de la porte une religieuse qui demaude I'aumone. Voulez-vous la recevoir? HIEOU-CBI. Faites-la entrer. IE DOMESTIQUE, sur Ic seull de la porte, a Tchao-ou-niang. Ma mailresse vous permet d'entrer. TCHAO-00-ifiANG, apercevant Nieou-chi. Madame , la paiivre religieuse que vous voyez incline sa lete devaut vous. WIEOU-CHr. Ma sceur, de quel pays eles-vous , et que venez-vous faire dans la capilaie.'* TCHAO-OU-NIANG. Je suis originaire d'un pays eloigne ; je viens dans la capitale pour demander I'au- mone. NIEOU-CHI. Pour demander I'aumone!... Mais avez- vonsquelque talent? Voyons, que savez-vous faire ? TCHAO-OU-WIANO. Madame, sans y mettre de I'ostentation , je vous rcpondrai que je conuais I'ecrilure , le dessin , les ecbecs , et que je touche du luth; je sais coudre, travailler a I'aiguille; au besoin, jepourrais faire la cuisine.... Enfin, jesais un peu de tout.... WIEOU-CBl. Oh, oh! ma soeur, puisque Tousavez (ant de talenu, il doit vous etre penible de de- mander I'aumone dans les rues. Voulez-vous demeurer dans mon hotel ? j'ai besoin d'une servante. Vous trouverez ici , avec le calme et le bonheur, du the et du riz eo abon- dance. TCHAO-OU-WIANG. Si vous me preniez a votre service, ma re- connaissance n'aurait pas de bornes. HIEOU-CHr. J'ai une autre question a vous faire. Di- tcs-moi a quel age avez-vous embrasse la pro- fession religieuse ? Est-ce des vos plus jeunes annees ? TCHAO-OU-NIAWG. Madame, je ne veux pas vous tromper; il y avail deja longtemps que j'elais mariee, quand j'ai pris le costume des religieuses vouees au culte du dieu Foe. KiEOU-CHi , a part. Ah ! j'en sais un pen trop maiutenant. (^Au domestique.) Youen-kong, puisque cetle religieuse a un mari, elle ne peut pas rester dans notre hotel. Donnez-lui des aliments, etpriez-la d'aller demander Taumoue ailleurs. TCBAO-ou-NiANG , u part. Je me suis un peu Irop avancee. (Haut.) Madame, s'il faut vous dire toute la verile, ce n'est pas pour reeueiilir des aumones que je suis venue dans cette capitale, mais pour chercher mon epoux. NIEOU-CHI. Alors je vous adresserai une autre ques- tion; commeul s'appelle voire epoux.' TCHAO-ou-NiANG , avec embarras. (A part.) Si je lui dis son veritable nom, elle va peut-eire se livrer a la colere : lant pis; lachons ces trois mots: Tsai-pe kiai , pour voir I'aspect de saphysionomie. (Haul.) Son nom de famille est Tsai, son surnom Pe-kiai. On dit parloul qu'il demeure dans I'hotel du ministre d'Etat Nieou. Je pense» madame, que vous le connaissez. wiEOU-CHi, sans se troubler. Pas du tout (*). {Tchao-ou-niang est stw pefaite.) NiEOu-cHi , au domestique. Youen-kong, iuformez-vous done, dans les pavilions de I'botel, s'il y a ici un homme du nom de Tsai-pe-kiai. LE DOMESTIQUE. Je puis vous certifier, madame, que ret homme-la ne demeure pas dans I'hotel. KIEOU-CHI. Ma bonne religieuse, voire mari ne de- meure pas ici. Allez le chercher ailleurs; allez. (*) Nieou-chi ne connaissait pas le ming^ ou nom ctenfftnce, de son epoux. CHINE MODERNE. 629 TCHAO-OU-NIANG. Cependant lout le monde dit qu'il a sou domicile dans I'liolel du mimsire d'Etat Nieou. II est peut-eire mort ! {Elle pleure.) O men epoux, si vous avez quilte la \ie, ou tiou- verai-je un protecteur dans le monde ? Qui sera touche des maux de votre servante ? NIEOU>CHI. Pauvre femme , je vous plains ; mais ne VOUS afQigez pas trop. Restez avec nous; je vais ordonner au domestique de prendre des informations dans le quartier. On va se met- tre a la recherche de votre epoux. TCHAO-OU-NIAJiG. Ah! madame , comment pourrai-je vous temoigner ma reconnaissance ? NiEOU-eai. Mais si vous restez avec nous , je dois vous preveuir d'une chose: c'esl que vous ne pou- vez pas garder voire costume. II faut absolu- ment changer d'habits. TCHAO-On-NIANG. Je n'oserai jamais quitter mon costume. KIEOU-CHI. Et la raison ? TCHAO-OD-NIAWG. Parce que je dois porter le deuil pendant douze ans. NIEOU-CHI. Pendant douze ans! y pensez-vous? Mais le plus long deuil, le deuil d'un pere, ne dure que trois annees; pourquoi voulez-vous por- ter le deuil pendant douze ans? TCHAO-OU-NIANG. Mon beau-pere est morl ; il faut que je porte le deuil de mon beau-pere pendant trois ans. Ma belle-mere est morte ; il faut que je porte le deuil de ma belle-mere pen- dant (rois ans. Voila deja six annees. Puis, comme men epoux (6 fatale destinee!) n'est point revenu dans son pays natal , et vTai- seinblablement ne sail pas que son pere et sa mere ont cesse de vivre, il faut en outre que je porte le deuil pendant six ans pour mon cpoiix. WIEOU-CHI, Ah ! ma soeur, que voire piete filiate est exemplaire ! Quoi qu'il en soit , mon pere a la plus grande aversion pour les femmes qui portent votre costume. II faut changer d'ha- bits. {Au domestiifue.) Youen-kong, dites a Si-tchun d'apporte.r ici des robes et une toi- lette de femme. I.E DOMESTIQUE. J'obeis. (// sort.) NIEOn-CHI. Ma soeur, asseyez-vous en attendant. 34* Livraison. (Chine modebme.) si-TCHtrif, apporlant les robes et la toilette. Madame, j'apporte des robes et une toi- lette. NiEOU-CHi , ouvrant la toilette. Tres-bien. {A Tcliao-ou-niang.) Ma soeur, approchez-vous du miroir. Voila un peigne. Vous trouverez ici du fard pour les levres et les joues. TCHAO-On-iriAHG. Depuis que mon epoux est parli pour la capilale,je n'ai point vu ma figure. {Elle se regarde dans le miroir.) Ciel ! quelle paleur ! comme mes trails out change! £st-il possible que je sois devenue maigre a ce point .•> — {EAe ctiante.) Je me suis Irop negligee ; je lie songeais qu'au pheuix solitaire (*), et le chagrin a terni rincarnat de mes joues. KIEOD-CHI. Ma soeur, si vous n'arraiigez pas vos che- veux , changez au moins de vetements. TCHAO-OU-NIANG, regardant Us robet. {Elie chanie.) Je me souviens qu'a I'epoque de mon ma- nage j'avais aussi des robes el des eloffes de sole, des fleurs d'or, des plumes d'alcyon. Devais-je m'attendre qu'apres le depart de mon epoux, il ne me reslerait pas une tu- nique de toile, une petite aiguille de tete en bois d'epine, pour altacher mes cheveux? NIEOU-CHI. Ah ! ma soeur, vous rejetez ces robes ; mais vous porterez une aiguille de tete , n'est-ce pas? TCHAO-ou-NiANG, regardant les aiguilles. {Elle cliante.) Celte aiguille d'or, surmonlee de deux tetes de phenix. — {Elle parle.) Si , je la porle, — {Elle chante.) ne serai-je pas ac- cablee de bonle, moi qui suis separee de mon epoux? NIEOU-CHI. A defaut d'aiguilles de tete , vous pourriez orner vos cheveux de quelques fleurs. Tenez, {Elle prend des fleurs.) Faites un bouquet; choisissez; separez les fleurs de bon augure d'avec celles qui sent d'un mauvais presage. TCHAO-OU-NIANG. {Elle chonle.) Moi, orner de fleurs les Iresses de mes cheveux , porter une pivoine (meou-tan) ! oh, c'est alors que le ressentiment et la haine me poursuivraient, comme celte femme qui de- meure dans le palais de la luue (**). NIEOU-CHI. {Elle chante.) Helas! {A part,) La trislesse est dans son coeur, le chagrin sur sa figure ; comment pourrait-elle deguiser la verite.' {Haut.) Vous (*) A mon epoux. (**) Tchang-ngo. 34 580 'fUNlVtRS. avez perdu votre beau-pere, voire belle-mere, et vous pleurer. Ah ! ma soBur, mon beau- pere et ma l)elle-niere existent encore, ct jusqn'a present je n'ai pas pii letir offrir une tasse de the. Comparez votre sort au mien ; vou4 avez rempli votre tAche, vous, et vous ne craigni'z pas comme moi la censure, la caloniuie el les sarcasmes. Mais, dites-moi , quel evenement fatal a precipile dans la tombe les parents de votre epoux ? TCUAO-on-NiAMG. {Elle chanle.) La famine. La famine a ravage noire pays. Mon ^poux ne revenait point de la capilale, et, priv^e de seconrs, j'ai mange, dans le serrel de la maison, des ecorces d'arbre et lie la balle de riz. Aprcs la mort de mon beau-pere el de ma belle-mere , j'ai vendu ma chevelure pour acheler des cercueils. Seule, au milieu des sepultures, j'ai ramasse de la terre dans le pan de ma tunique de chanvre, etje letir ai eleve un tombeau. NIEOC-CHI. Voila une religieuse qui se targue de verlus u'elle n'a pas. TCHAO-oo-NiANG. {Elle cliaiite.) All! madame, je ne me targue point de mes meriles. {Elle moiitre ses mains.) Voyez mes doigts meurtris; des taches de-sang tei- gnenl encore mes vetemeuts. {Nieou-clu verse des larmes.) rcHAO-ou-NiAKG, continuant. Helas ! madame , pourquoi versez-vous des larmes ? NiHOU-CHi. {Elle ctiante.) Ma sceur, c'est qu'il y a longtemps aussi que mon epoux a quitle son pere el sa mere. TOHAO-OU-NtANG. Et qui dionc I'a empeche de retourner dans son pays natal ? HiEOu-CHf. {Elle chante.) Mon pere. C'esl mon pere qui I'a retenu; car il voulait renoncer a la magistrature. TCHAO-OU-HIAHG. A-l-il une autre femme dans la maison pa- Icrnelle? wiBou-cui. {Elle chante.) II a une autre femme; mais je trains qu'elle ue vous ressemble pas. A.ura-t-elle servi, coili- me vous, son beau-pere el sa belle-mere avec aulant de Constance el de fidelite? TCHAO-OD-MAHG. Ou sont maintenant les parents de vutre epoux? HiKOU-CHi. {Elle chante.) Us habitent les confins du ciel. TCHAO-On-NIANG. Bladame, pourquoi n'a-t-il pas charge un expres de les amener a la capilale? KiEOU-CHt. {Elle chanle.) Le messager est parii; je presume qu'iis sont maintenant sur les routes qui conduisent a Tchang-iigan. Helas! j'apprehende des mal- heurs. TCHAO-oo-MiAKG. {Elle cliante.) A peine ai-je entendu ces paroles, qu'un trouble siibit vient agiter nics esprils. ( A part.) Je crois a la sincerite de ses reponses; je veux cependant mettre son coeur a lepreuve. {Haul.) Mais, s'il a une autre femme el qu'elle accompagne son beau-pere el sa belle-niere, n'esl-il pas a craindre que vous ne vivies pas toules les deux en bonne intelligence? MIEOU-CUI. Ah ! ma soeur {Elle chante.), si elle vous ressemblail, mon plus vif desir serait qu'elle habilAl avec moi. J'aurais pour elle des egards el de la condescendance ; tous les ma- tins je balayerais sa chambre par deference, par humilile. Ce qui m'afflige aujoiud'hui , c'esl de savoir que les parents de mon epoux voyagent peniblement sur les routes. Je les cherche des yeux ; je crains de perdre la vue a force de regarder dans le lointain. TcuAO-oD-NiANG. {Ellc clionte.) {A part.) Son esprit est le jouet de Tillu- sion et de I'erreur. On dirait qu'elle assiste a une represenlalion , et qu'elle volt enlrer sur la scene des personnages de theatre. C'esl en vain qu'elle inlerrogerait les sorts. {Haut.) Cctte femme dont vous parlez, voulez-vous la connailre? NiEou-oHi, avec emotion. — {Elle chante.) Ou est-elle.'' Tc.HAO-oc-iriANG. {Ellc cliantc.) Devant vos yeux. Je vous jure, madame, que voire servante est I'epouse du Tcboang- youen. niEOU-CHi. {Son emotion redouble.) — {Elle chante.) Vous, I'epouse legitime duTchoang-youenI Madame, ue me trompez-vous pas? TCHAO-ou-NiAKG. {Elle ctiante.) Comment oserais-je vous tromper? MiEon-CHi , revenant pen a pen de son emo- tion. — {Elle chante.) Ah! madame, c'est a cause de moi que vous avez subi taut d'humiliations , eprouve taut de douleurs. Yous aurez beau faire, vous forcerez , malgre vous , le Teboang- youen a me haiir; il me conlraindra, lui, a murmurer contre mon pere ! — {Elle parle.) Madame, asseyez-vous, je vous prie, pour recevoir les salulalions de votre servante. {Tchao-ou-niang s'assoit, et recoit les saluta- tions de Nicou-chi.) KiEou-CHi. {Elle chante.) Que votre sort a ete different du mien ! CHINE MODERNE. 531 Pendant que je vivais dans le calme , an sein de ma famille , tous les maux de la vie vous assiegeaient a la fois; mais aussi veiis allez etre couverte de gloire; on vantera dan* le monde voire piete pour vos parents, vos vertus, tandis que moii nom sera livrc au mepris et aux sarcasmes du public. TCHA0-OU-NI\NG. Rassurez-vous , madame , vous n'avez pas merlte I'opprobre. NtEOU-CHi. [Etle chante.) Si voire beau-pere est morl, c'est par ma faule; si votre belle-mere est morte, c'est par ma faute. — (Elte parte.) Madame {Elle chanle.), je vous en supplie, chaugeons de costume ; prenez ma robe, ma ceinlure , mes ornemenls de tete ; moi je veux me couvrir de vos vetements de deuil. TCHAO-OD-SIANG. Madame {Elle chante.), nos maliieurs vien- nent de plus loin. Helas ! pourquoi , dans I'origine , n'a-t-il pas renonce a la magistra- ture? wiEOti-CHr. (Elle chante.) II a voulu et n'a pas pu renoncer a la ma- gistrature; il a voulu et n'a pas pu renoncer a la nouvelle alliance que I'empereur lui-menie avail ordonnee. TCHAo-ou-NiANG. {Elle clionte.) "Voila : on viole aujourd'hui une promesse, demain une seconde, apres-demain une froi- siome; puis le ciel fait descendre snr la famille du transgresseur d'cpouvantables calamites. WIEOtJ-CHI. Madame , je vous ai invitee toul a I'heHre a changer de costume ; vous avez refuse : n'en parlons plus. Toulefois, je crains bien que, vStue, coinme vous I'etes , d'une grosse eloffe de cbanvre , avec une corde pour ceinlure , voire epoux ne vous reconnaisse pas. Ma- dame , voici ce que je pense. D'ordinaire le Tchoang-youen , toutes les fois qu'il revient de la cour, entre dans la bibliotheque pour y faire une lecture. Vous avez des talents ; rien n'est au-dessus de vous. Que n'allez-vous lui ecrire une leltre sur son bureau, quelques lignes pour I'informer des tristes evenements qui vous amenent dans la capitale ? Nous aurions ensuite un entretien avec lui ; vous vous expliqueriez , et les choses s'arrange- raient a merveille. TCHAO-OC-NIANG. Vous avez raison. Quand je devrais, en ecrivant , negliger les bienseances , il faut que j'obeisse a vos ordres. (Elles sovtent en- semble.) (*). (*) Voy. notre traduction du Pi-pa-ki , ■)p. 241 a 256. Opinions de deux critiques chinois sur le Pi-pa-ki. Un dialogue, que j'ai place a la t^te du Pi-pa-ki , nous a revele I'existence d'une classe d'ecrivains chinois qui se consacrent a la critique, et travaillent, non, comme les scoliastes des dynas- ties prec^dentes, sur les anciens auteurs, mais sur les auteurs modernes, et par- ticulierement sur les ecrivaiiis drama- tiques. Les uns recueillent des pieces de theatre inedites, d'anciens iiianus- crits, ou inettent des collections en ordre ; d'autres s'appliquent a rediger des catalogues et des index ; d'autres encore publient des commentaires et des dissertations sur les romans. Je vais re- produire ici une partie de ce dialogue, que M. Charles Magnin regarde comme un tres-curieux echantillon de la criti- que admirative a la Chine (*) : LE LETTRE. Quelle est votre opinion sur le Pi-pa-ki .' Ii'editeur. Men opinion est celle de Mao-tseu. Ecou - tez ce qu'il dit dans sa preface : « Un ministre qui sert son prince , un Ills qui voudrait servir son pere et sa mere , deux epoux accomplis , une femme legitime et une concubine qui s'aimeni, des amis qui se secourent : voila les principaux person- nages que Kao-tong-kia a iulroduits dans son drame. Aussi, des qu'on ouvre un marche quelque part, dans le plus petit des hameaux, si une troupe de comediens arrive, et que les acteurs montent sur la scene pour jouer le Pi-pa-ki, c'est a qui viendra les entendre. Et quand ils se mettent a reciter les scenes de la Famine et de la Separation, la scene si palhetique et si attendrissante on Tsai-yong implore la misericorde du iils du ciel dans le palais imperial ; puis celles ou Tcliao-ou- niang vend sa chevelure pour achetcr un cercueil , et ramasse de la terre pour elever un tombean : alors, parmi tous les specta- leurs, proprietaires, matrones du lieu, jeunes patres, biicherons, vieillards venerables, on n'en voit pas un seul qui n'ait les joues rouges et les oreilles brulantes. Les larmes coulent des yeux , tous les visages sont cousternes ; on n'enlend plus que des soupirs, des gemis- sements, des sanglots, des cris; et cela dure jusqu'a la fin de la representation.... Pour (*) Journal des Savants p. 38. Janvier 1843, 34. 532 L'UNIVERS moi. je I'avouc, la premiere fois que je lus le Pi-jia-ki, '' '" je m'eci iai , le Pi-pa-ki , mon admiration fut si viye que iem'eciiai, dans un acces d'eiithousiasme: Ce drame est vraimcnt le Jivre d« septieme Thsai-tseu ! Puis, sui-le-cliamp , je travaillai a la revision du texte ; j'arretai avec bean- coup de soin la forme de ehaqiie phrase, et je remis men mauuscrit a mon lils Siu-lchi , en lui ordonnant de collationner la copie sur rorigiual, d'y faiie les changemcuts utiles, et de m'aider a y mettre la deruiere main. Plus tard, quand je relus cet ouvrage corrige par mon fils, qui s'etait acquittc de sa t^che a merveille, et avail partage Ics morceaux lyriques en strophes regulieres, adaple les airs aux paroles, 11 me sembla que je me trouvais face a face avec les anciens, et que j'avais fait revivre des personnages morls de- puis plus de mille ans. Alors j'exaltai, en soupirant, I'ininiilable /ac/wre de Kao-tong- kia, et je publiai une dissertation sur le Pi- pa-ki. Maineureusement, comme je souffrais a celte epoque d'une maladie des yeux, lout le munde m'abanJonna ; je fermai nia porte et me mis a composer des iivres : mais, reduit a ecrire sur des ouvrages d'un genre moins releve, sur les Tchouen-khi (drames histo- riques) de la derniere classe , je tombai dans la misere. » Dans la misere ! tel est le sort inevitable des hommes de talent. II est a remarquer que les plus grands ecrivains de I'antiquite fiirent tons malheureux. Tchouang-tseu vecut sur une monlagne; Khio-youen se noya dans la riviere Mi-lo; Ssema-tluien subit un chati- ment cruel ; Tou-fou , force de chercher un refuge dans un temple, y demeura dix jours sans manger. Des trois fils de Chi-wang-kao, on n'eu cite pas un qui ait obtenu une place. Oui, ces grands eciivains furenl malheureux, si loutefois Ton pent dire qu'un hon)nie qui lombe dans la pauvrete et ne perd pas pour cela son talent, sou genie , soit reelleibeDt malheureux. LE I.ETTHE. J'ai parcouni le catalogue de Han-hiu-tseu, qui a publie des dissertations fort savanles sur les pieces de theatre dc la dynastie des Youen ; j'ai vu la lisle des auteurs dramati- ques, depuis Tong-li jusqu'au dernier. II y a ••<■ tout cent qualre-vingl-sepi ecrivains. D'oii \ient done que I'auteur dn Pi-pa-ki nc figure pas sur ce tableau? Est-ce que par hasard on ne reconnaissail pas, a celte epoque, le me- rile de Tong-kia ? i-'editkur, Non, certes, el le travail de Han-hiu-tseu en offre une preuve. II y a environ trois cents ans que Mao-tseu publia le texte da Pi-pa-ki, avec un commentaire perpettiel , et intitula ce drame bistorique le Livre du septiime Tlisai-tseu. Tong-kia doit sa reputation a Mao-tseu. LB LETTRE. C'est-a-dire que Tong-kia a trouve un pa- ncgyriste comme les autres. Le Pi-pa-ki a ele conimenle |)ar Mao-tseu , de meme que I'ou- vrage de Tchouang-tseu I'avait 6te par Kouo- siang , le Li-sao par Wang-y, les Memoires hisloriqiies par Pei-yn , les Poesies de Tou- fou par Yu-tsi , THistoire des rives du fleuve et le Pavilion d'occident par Lo-kouan-tchong et Kouan-han-king. Lo-kouan-tchong est I'il- luslre auteur du San-koue-ttbi (Histoire des trois royaumes) ; Kotian-han-king , ecrivaiq dramatique d'un talent remarquable, a com- pose soixante pieces de thcalrc. On aurait pu les mettre au uombre de Thsai-tseu. L'tUlTEOR. Vous avez raison. Au lieu de sept , nous en aurions ueuf. Qu'importe le nombre? I.E I.KTTHE. Savcz-vous pourquoi et a quelle occasion Kao-tong-kia composa le Pi-pa-ki? L'EDlTtL'R. Kao-long-kia composa le Pi-pa-ki pour corriger son ami Wang-sse ; voila, du moins, ce qu'on lit dans les memoires secrets d'un auteur conlemporain. Kao-tung-kia avail pour nom d'enfance Tse-tcbing. C'etail , comme votis le savez, un homme qui vivait sur la fm de la dynastie des Youen, el lintime ami de Wang-sse. A celte epoque, Wang-sse cn- trctenait des relations avec les plus cclebres ecrivains de son temps. Plus lard, comme il acquit luimeme de rilhistralion , la prospe- rile changea ses moeurs. II rcpudia sa femme legitime Tchcou-chi pour epouser Pou-hoa , dont il etait epris. Toug-kia voulul le delour- ner de ce projel ; il y perdit sa peine. Alors il composa nn drame , dans I'esperance de ramener au devoir son ami , qu'il mil en scene sous le nom de T.sai-yong ( personuage de la dynasiie desThang), parce que Wang- sse avail ete pauvre dans sa jeuncsse et avail vendu des legumes. II designa Tchcou-chi sous le nom de Tchao-oii-niang ( Tchao , cinquieme du nom), parce que depiiis Tchao, epouse de Tsai - yong des Tliang , jusqu'a Tcheoii-chi , on coinptaii alors quatre fem- mes celebres du nom de Tchao. II intro- duisit comme personnage le niiuistre d'l^.tat Nieou , parce que Pou-hoa demeurail , avant son manage , sur les bords du lac Nieou (lac du Boeuf). 11 intitula son drame Pi-pa-ki, « Hisloire du luth , » parce que dans les deux caracteres/'i-/>a, le caractere wang (nom de Wang-sse) se trouve repele quatre fois. CHINE MODERNE, 533 Enfin , il se peignlt lui-meme sous les trails du seigneur Tchang. On assure que dans I'origiiie le role de Tsai-yong , let que Kao- tong-kia I'avait ecrit, differait beaucoup de ce qu'il est a present , et menie de ce qu'il fut lorsqu'on joua pour la premiere fois le Pi-pa-ki. Kao-tong-kia avail represenle Tsai- yoi»g corame un homme d'un caraclere me- prisable. II abandonnait volontairement son pere et sa mere; il contractait volonlaircment un nouveau mariage avec Nieou-chi , apres avoir repudie sa femme legitime Tcbao-ou- niang. On va jusqu'a dire que ce tut Wang-sse lui-meme qui changea le role de ce persou- nage, et en fit un modele de piele fiiiale, un epoiix accompli. I.E I.ETTRE. A croire celte anecdote, il parailrait que Kao-long-kia composa le Pi-pa-ki pour ou plulot coiitre Waug-sse. Cepeudant, de deux choses I'une : si Tong-kia composa le Pi-pa-ki centre Waug-sse, ce n'est point une bisioire du Luth , c'est I'histoire de Wang-sse qu'il a voiilu ecrire ; si c'est I'bibloire du Luth , le Pi-pa-ki est done un drame liistoriqtie. Mais alors le fond dc la piece , il faut eu couveuir, est, sous ce rapport, d'uue affligiaute sleri- lilc. Tchao-ou-niang ne chaute (|u'uue fois sur son luth, c'est dans la pagodo de JVIi-lo (Amida liouddha) ; et encore sa chanson ne vaiit-elle pas les vers que cliauta la princesse Tchao-kiun quand on celcbra les funerailles du khan des Tartai'es , ni ceux que Kiang- tcheou entendit dans la barque de Ssema. Les vers que chaiita Tchao-kiun , les chants que Kiang-tcheou entendit ont ete transmis a la posterite. Allcguerez-vous maintenaotque les persounages du Pi-pa-ki sont historiqnes? Mais, pour ne citer que le principal person- uage male , esl-ce le caraclere de Tsai-yong des Han que I'auleur a voulu tracer? Tsai- yong ctiiit president du tribunal des bisto- rieus sous le regne de Hiao-hieu-ti (191 a 220 de notre ere). II fut mis en prison pour avoir pleure la mort de Tong-tcho ; il demanda qu'on lui permit d'achever I'hisloire des Han; et, comme il n'oblint pas cette grace, il mourut, la nuil suivaute, dans sa prison. Voila ce que nous apprend le Thong-kien- kang-mou. Qu'y a-t-il de commun , je vous prie, entre Phistorien des Han et le person- nage que Kao-tong-kia a introduit dans son drame? II est evident qu'il a dcsigne Wang- sse sous le nom de Tsai-yong. Le Pi-pa-ki n'est pas un drame historique. Et ce pere qui vit et meurt sans savoir que son fils a ete promu au grade de Ichoang-jouen, dira-t-on que c'est la un fait historique? Auire chose encore : on lit dans la scene d'expositiou que le pere et la mere de Tsai-yong sont tous deux octogenaires, et que le fils n'elail Age, lui, que de treute ans quand il coutracta son premier mariage avec Tchao-ou-niang. Or, je vous le demande, a-t-on jamais vu une femme de cinquanle ans donner le jour a un filsP Won , non , le Pi-pa-ki n'est pas un drame historique. L'EDITSnR. Arretez-vous un peu ; ct , d'abord , puisque vous cilez I'historien des Han , je vous dirai qn'il y a des trails de ressemblance entre ce personnage historique et le personnagc de Tsai-yong. N'avez-vous pas hi dans les an- nales que I'liistorien des Han avait des ver- tus domestiques , qu'il ainiait son pere, sa mere el ses ancelres ? Mais voici le trait qui a fourni a Tong-kia le sujet de son drame. II existail , sous la dynaslie des Thang , un personnage appele Tsai , a qui Ton donna le commandemenl en chef d'un corps d'armee. Tsai , dans sa jennesse , et pendant qu'il etait pauvre , avait pour ami le fils de Nieou-seng- jou. On dit qu'ils obtinrent ensemble le grade de docteur. A celte epoqiie , Nieou-seng-jou exprima le desir que sa fille Ti-tseu devint I'epouse de Tsai; uiais celui-ci, qui avait deja une femme legitime nomniee Tchao, re- jela la proposition d'un nouveau mariage , et persevera dans sou refus. Alors, pour lever ses scrupules, Nieou-seng-jou taclia de ga- gner la coufiance de Tchao, et lui parla de sou projet; Tchao n'y mil point d'obstacle. Cetie affaire devint , sous la dynaslie des I'hang , le sujet de toules les conversations. Tong-kia kit quelque pari ce trail historique; il en fut louche, el composa son drame, LE I.ETTRE. Je crois que cette anecdote esl coutrou- vee. Si Tong-kia eiJt voulu representer dans son drame le commandant en chef des Thang, il aurait fait comme les poetes de la dynaslie des Ifoueu, il aurait ecrit un drame histo- rique , el I'aurait dit. Qu'avail-il besoiu de s'en cacher? Le nom du principal person- nage du Pi-pa-ki est Tsai-)ong; c'est une preuve que Tong-kia a voulu tracer le carac- lere de Wang-sse, et non point celui du commandant des Thang. Puis il a amene tant de persounages sur la scene 1 I'histoire ne fait point menlioQ de Li-tching, de Ou-kiai, de Li-kiuu-yu , de Lo-te-hi (*). i.'eoitecr. II arrive tous les jours qu'un trait de I'an- liquite fournit le sujet d'un tchouen-khi (drame historique) ; mais quand le pinceau du poete s'abaisse sur le papier, le sujet ( * ) Persounages du Pi-pa-ki. m L'UNIVERS. Vtlflpd et se deveioppe , \es scenes ckangent 4')wpect. I.E r.BTTRK. Bnf«|aB-*ou^ '*^ Pi-|>a-ki (histoire du luth) MliiMMgtii (histoire dii pavilloa d'ocrideitt? l'euitkur. Qtioiqu'un ail coutume de les reiiiiir el de jas j)ul)lier ensemlile , la siiperiorite du Pi- pa-ki est incontestable. Le Pi-pa-ki offre menie deux genres de superiorite : la supe- riorite des sentimenls et la superiorite du style. II y a autre ces deux draines la difTe- rence qui subsiste enfre le Kouc-fong (pre- miere parlie du Chi -king) el le Siao-ya (deuxieme partie du Chi-king). Dans le Pa- vilion d'occident, les entrefiens roulent sur le vent et les fleurs, la neigc et la lune (sur line intrigue amourcuse). Dans I'Histoire du Luth, on ne parle que de justice el de piete filiule. II est facile d'imiter le Si-siang-ki , dif- ficile d'imiter le Pi-pa-ki. On a toujours re- garde le Pi-pa-ki cornme I'ouvrage le plus utile auxmceurs; inalgre ceia , les hommes d'aujourd'hui liscnt le Si-siang-ki et le re- lisent sans cesse. Quant an Pi-pa-ki , c'est a peine s'ils daignenl y jeler les yeux ; ou bien , s'ils le lisent , its ne le medilent plus comme on mcdite une belle lei^on. LE LETTRK, C'est aussi parce qu'il y a des longueurs daus le Pi-pa-ki. i.'editedr , avec iwacile. Des longueurs ! y sougez-vous? Parce que le Si-siang-ki n'a que seize actes, on le trouve trop court, el Ton voudrait y ajouter des scenes; parce que le Pi-pa-ki a quarante-deux tableaux , on le trouve trop long , et Ton voudrait en relrancher plusienrs. Mais tout critique exerce sail tres-bien qu'il n'est pas plus necessaire de faire des additions au Si- siang-ki que des coupures au Pi-pa-ki. Si , parce qu'un canard a les jambes trop courtes, on voulail les allonger, on le mutilerait ; et si , parce qu'une cigogne a le cou trop long, on vonlait le raccoiucir, on la luerait. Qu'im- porte qu'un ouvrage soil long ou court .•* Le merite n'est pas la. I.E I.ETTRE. Vous regardez done le Pi-D">-iii comme une oeuvre parfaite ? i.'editeub . Non ; la perfection est un merite qui n'ap- partient a personne. II y a des defauts dans cc drame , et il y en a beaucoup ; mais le plus capital de tons les defauts du Pi-i)a-ki est que le ressentiment y domiiie. Madame Tsai a de la haine centre le youen-wai , le you6n-wai contre son fils, Tchao-ou-niang centre son epoux , Hieou-chi contre son pere; Pe-kiai (Tsai-yong) bait sa reputation, ses sucres litteraires, son avaucement dans les charges , sa nouvelle eponse ; puis il fuiit par se hair Iui-m6me. £t cependani Ton s'iule- resse tour a tour a raadame Tsai, au youen- wai, a Trhao-ou-niang , k Nieou-clii et a Tsai-yung : taut il est vrai que le Pi-pa-ki est une oeuvre de geuie. i,B t.ETTRE, soitriant. Oa ne s'inleresse gucre a madameTsai. L'EDiTEUR. On g'inlcresse a cette femnie , parce qu'elle est malheurcuse, et que son inforlune est attendrissante. Du reste , je cuuvieus que son caractere est quelquefois oulre. I.E LETTRE. Que dites-vous du voleur qui a dcrobe a Thong-pin le breuvage d'immortalile, el qui fabri(|ue une letlre pour avoir un cadeau du tchouang-you^n ? Estce qu'un fils ne con- nait pas I'ecrilure de son pere? Est-ce que le youi^ii-wai, qui savait ecrire, et qui ecrit liii-m^me son leslameut , dans le quinzieme tableau , avail besoin de rccourir a un elran- ger pour tracer une vinglaine de caracteres? Que d'invraisemblauccs! t'EDITEUR. Cette scene est deleslable. Et voyez comme une faute conduit a une autre! Tsai-yong, qui ne reconnait pas I'ecrilure de son pere dans ledix-septieine tableau, nerecounail pas celle de sa femnie dans le viugt-qiialriemc. I.E LETTRF. Le vingl-deuxieme tableau n'est pas non plus a I'abri de la critique. i/editeur. Distinguons. La premiere partie est d'line excessive mediocrite; j'enexceple lontefois la description de la pagode de Mi-lo (Aiuida Rouddha), qui est un morceaii plein d'eru- dition ; mais la seconde parlie clincelle de beautes. I.E LETTRE. La scene la plus palhelique, a mon avis, est la dix-neuvieme. Le monologue de Tchao- ou-niang est un chel'-d'tBuvre de style. Comme sa piele filiale est touchanle! quelle profonde sensibilile (*)! HOA-TSIEN , Ouvrage du huitieme Thsai-tseu. Le Iloa-tslen on V.trt d' aimer est un poeiiie cliinois, daiislequel on trouve tous les orneinents du "Wen-tchani; ou du style elegant. Il e.\iste une tra- duction anglaise de cet ouvrage, que (*) Voy. le Pi-pa-ki ou I'Histoire du luth, p. 6-17. 535 M. Perring Thorns, alors typographe de la compagnie des Indes a Macao , fit imprimer dans cette ville en 1824. « C'est bien veritablement un poeme, dit M. Abel Remusat , et, ce qui est plus remarquable, c'est un poeme nar- ratif , ou una sorte de roman en vers de sept syllabes , genre de composition qui n'est pas commun a la Chine, et dont nous poss^dons peu d'exemples parmi les livres qui en ont ete appor- tes. On attribue la composition de ce poeme a deux habitants de Canton; et quelques expressions du dialecte parti- culier de cette province, qu'on y ren- contre, donneraient lieu de penser que cette indication n'est pas sans fonde- nient. Le titre meme du poeme peut devenir le sujet d'une remarque propre a faire connaitre ce qu'on doit penser du style figure des poetes chinois. Les deux mots dont il est forme signifient : le premier, une fleur; et le second , une tablette , ou tout autre objet servant a ecrire. Dans I'usage ordinaire, cette expression composee designe le papier a fleurs d'or sur lequel on ecrit des vers, des lettres, des pieces pour les compliments , etc. M. Thorns y a subs- titue un terme anglais (courtship) qui signifie, non pas civilite, comme on I'a traduit dans quelques journaux lit- teraires , mais Taction de courtiser ou de faire la cour, d'adresser des soins a une femme ou de la rechercher en mariage. Ce sens, quelque eloigne qu'il paraisse du premier, est aussi renferme dans le mot hoa-tsien, parce que le pa- pier a fleurs sert dans toutes les occa- sions ou Ton veut declarer des senti- ments ou exprimer des vceux dont •'union conjugale est I'objet. Les trois premiers vers du poeme offrent un autre exemple de ces tour- nures enigmatiques qui passent, au godt des Chinois, pour des indications delicates , et qu'il serait tout a fait im- possible de deviner, si Ton n'etait averti des intentions du poete par les notes des commentateurs. Le mot chi- nois qui veut dire plaish', amour, ga- lanterie, est un terme compose de deux radicaux qui , pris separement , signi- fieraient vejit et lune. La raison qui a fait prendre a cette expression compo- st la valeur qu'elle a dans I'usage or- CHINE MODERNE* dinaire serait trop I ongue a rapporter ; mais ce qu'il faut savoir, c'est que I'a- que mour etant le sujet du roman en vers dont nous nous occupons, I'auteur s'est cru oblige d'en placer le nom dans son debut , ce qu'il a fait de deux manieres, savoir : en intercalant le mot vent dans son second vers , Le VEST d'automne souffle devant lui le parfum du nenuphar blanc; et le mot lune dans le troisieme On voit le croissant de la r.usE nouvelle, dont la lumiere est pareille au reflet de I'eau ; et sous une forme encore plus enve- loppee , des le premier vers , oii il dit : Debout.appuye sur la balustrade, on goule la fraicheur du soir. Car si Ton s'en rapporte au commen- tateur, c'est la lune meme qui est indi- quee par les premiers mots du vers, et c'est au vent que se rapportent mani- festement les derniers. Le traducteur anglais n'a, ni dans cet endroit ni dans les autres du meme genre , tenu aucun compte de ces sortes d'allusions, et nous n'enlendons pas lui en faire un reproche, car il eilt ete aussi difficile que superflu d'y avoir egard ; et si nous nous y sommes arr^tes un instant, c'est qu'il nous a paru curieux de faire entrevoir a quel exces de subtilite s'^- tait laissee entrainer une nation , aux yeqx de laquelle des raffinements si puerils peuvent passer pour des agre- ments. Ce n'est pas non plus un tort a re- lever dans la traduction de M. Thorns , que d'avoir presque partout substitue le terme propre a I'expression meta- phorique qui y correspond dans Tori- ginal. Ce parti, qui detruit a la verite la couleur poetique d'une foule de pas- sages , est pourtant le seul qu'on puisse prendre quand on desire d'etre en- tendu. Le mot rouge est en chinois synonyme de beau; mais dans toute autre langue on ne saurait conserver les sens accessoires qui resultent du rapprochement de ces deux idees. Le jaspe est I'embleme de la perfection et de la tendresse ; V orient , celui du mariage. Un hdte oriental est un gen- dre ; et , par opposition , un bote or- dinaire se nonfMue un bote occidental. 586 L'UNIVERS. On dit qu'un jeune homme est sous la fenftre, pour annoncer qu'il etudie; que deux personnes sont de la m6me fenfire, pour indiquer que ce sont des condisciples ; et de la le mot At fenfire est devenu synonyme A'etudiant. Plu- sieurs milliers d'expressions de oette espece,qui, le plus souveiit, ne sont pas expiiquees dans les dictionnaires, sont dt's ornements du style poetique qui doivcnt in^vitablement disparaitre dans I'imitation europeenne d'un ou- vrage chinois... M. Thorns n'a pas voulu s'engager dans le detail presque infini des expli- cations de ce genre ; il s'est borne a rendre avec exactitude le sens du poe- ine, eii tout ce qui concerne le recit des evenements , la suite du dialogue, et les redexions dont il est entremele. Consideree sous ce rapport , sa traduc- tion merite encore d'exciter quelque interet. Elleoffre un petit ronian, dont nous allons en peu de mots faire con- naitre la marche et les principaux in- cidents. Un jeune etudiant, nomme Liang, tourmente de ce desir de trouver une digne compagne, que les romanciers chinois ont coutume d'attribuer a leurs heros a peine adolescents, quitte la maison de sa mere pour venir demeu- rer chez sa tante a Sou-tcheou. Dans une course nocturne, au milieu d'un pare dont la description arrete fort iongtemps I'auteur, il porte ses pas jus- qu'au pavilion ou deux jeunes filles , nieces de la niaitresse de la maison , s'aniusaient, au clair de lune, a jouer aux echecs, ou plut6t a une sorte de jeu de dames. Les charmes de Tune de ces jeunes filles agissent sur le coeur de retudi;mt; il en devient eperdument amoureux. La belle Yao-sien, qui n'e- tait venue dans cette maison que pour y passer quelques jours , a I'oecasion de I'anniversaire de la naissance de sa tante , retourne bienlot cliez son pere, maintenant general, autrefois compa- gnon d'etudes du pere de Liang. Celui- ci la suit dans le lieu de sa retraite; et, ne pouvant penetrer jusqu'a elle, ii tait racqiiisilion d'une maison dont le jardin n etait separe que par un mur de celui de Yao-sien. Introduit, a titre de parenu chez le pere de sa niaitresse. ii a I'oecasion de voir des vers qu'elle a composes sur un sujet favori des poetes chinois, le branchage du saule pleureur suspendu au-dessus d'une piece d'eau. II y repond par d'autres vers sur le meme sujet et les memes rimes. Rien n'est plus commun , dans les romans de la Chine , que ce moyen d'entrer en relation avec un objetaiine L'idee vient promptement aux parents* de Yao-sien de la donncr en niariage au jeune voisin. On perce la muraiile pour que les deux jardins n'en fassent plus qu'un. Cette disposition amene des entrevues et des rencontres, d'abord du jeune lettre avec la suivante do Yao - sien , ensuite des deux aniants eux-memes; situation rare dans les ou- vrages d'imagination, et dont la beiie Yao-sien parait sentir tout le danger, lorsqu'eile dit en rougissant : « Nous nous rencontrons sous les pruniers et au milieu d'un champ de melons. « Car ceux que Ion surprend au-dessous d'un prunier peuvent ^tre soupcon- nes d'avoir I'intention d'cn cueillir les fruits , et ceux qui marchent au milieu d'une couche de melons ne manquent guere d'y souiiler leur chaussure. La jeune fille adresse a son amant des reproches etdes conseils remplisd'aus- terite ; ce qui n'empeche pas que , dans une autre entrevue, elle ne se laisse lier par un serment, dont il prononce la forniule, a n'etre jamais I'epouse d'un autre. » Puisse-je, dit-iJ , si je romps mon engagement, puisse-je mourir, tomber pour jamais dans I'en- fer, et ne plus rentrer dans le cercle de Texistence! Puissiez-vous, si vous manquez a votre serment, perdre la vie dans le fleuve, et n'echapper qu'a peine au tranchant de la hacbe! » Des incidents divers retardent une conclusion qui parait si prochaine. Le pere du jeune etudiant lui a menage une autre alliance; celui deYaosiea est choisi pour apaiser une revoke sur les frontieres. Le premier de ces incidents amene des scenes de jalousie, telles qu'on en trouve dans tous les romans du monde; et le second, une suite d'evenements qui ne peuvent avoir quelque vraisemblance qu'a la Chine. Le general Yang est cerne par les eii- nemis; Liang, parvenu en tres-peu de CHINE MODERNE. 537 temps au premier rang des lettres , et devenuen consequence ministred'Etat, sollicite la commission d'aller delivrer le pere de sa maitresse , et 11 Tobtient ; car c'est une chose reconnue qu'un habile lettre ne peut etre qu'un excel- lent homme de guerre. Celui-ci , toute- fois , n'est pas heureux dans son en- treprise : il se laisse entourer lui-meme, et passe quelque temps pour mort; ce qui fournit a Yao-sien I'occasion d'ex- primer sa douleur et de faire briller sa Constance. L'autre epouse qu'on lui destinait se jette dans la riviere, et est sauvee par un officier. Cependant, un lettre, compagnon d'etudes de Liang, est nomme pour commander I'armee, et parvient a delivrer ses deux prede- cesseurs. Tous trois reviennent victo- rieux a la cour, et y recoivent des re- compenses proportionnees a leurs ser- vices, lis obtiennent le titre de pe , ou, comme s'exprime le traducteur an- glais. Us sont falls dues. Le jeune Liang n'eprouve plus d'obstacles pour epou- ser Yao-sien; et celle-ci,,loin de s'op- poser a ce qu'il accepte aussi cette se- conde femme qui lui avaitete destinee, est la premiere a I'engager a suivre, a cet egard, la volonte du souverain. Ce double mariage, qui doit combler les vCEux d'un homme delicat et sensible, est I'un des denoijments auxquels on a le plus souvent recours dans les ro- mans chinois ; et cependant , en voyant la complaisance de sa premiere epouse, Liang ne peut s'empecher de s'ecrier : « Pen de femmes dans le monde sont capables d'un devouement aussi ver- tueux ! » Tel est le fond , assez commun , sur lequel le poete a cherche a repa'ndre les ornements de la poesie. II a partage son ouvrage en cinq livres, subdivises en soixante chapitres assez courts. Le rhythmequ'ila clioisi estcelui des stan- ces composees chacune de quatre vers de sept syllabes; mais il ne s'est pas tellement asservi a cette mesure, qu'on ne trouve en beaucoup d'endroits des vers de six , de huit, de neuf et m^me de onze syllabes. Par une attention dont les etudiants doivent lui savoir gre, quoiqu'elle puisse rendre la lec- ture de sa traduction moins agreable aux gens du monde, M. Thorns s'est astreint a interpreter toujours chaque vers chinois par une ligne de prose. Le texte occupe le haut de la page^ et la version , la partie inferieure. C'est le premier exemple d'un poeme chinois imprime en original (*). » PING-KOUEI-TCHOUEN , Ouvrage du neuvieme Thsai-tseu. Le Ping-kouei-tchmien, ou le Recit de la victoire remportee sur les de- mons, a ete mis au rang de Thsai- tseuckou. Cet ouvrage n'est pourtant qu'un roman mythologique rempli d'extravagances et de puerilites. Excepte dans son dernier chapitre, I'auteur m'a toujours paru au-dessous du mediocre. Voici le sujet du Ping-kouei-tchouen: Sous la dynastic des Thang , vivait un bacbelier dont le nom de famille etait Tchong, le surnom Kouei, le titre honorifique tchin-nan. Ce bacbelier, d'une etrange figure, avait la tete du leopard et la barbe du dragon; mais, fortement applique a I'etude de- puis son enfance , epris de la litterature ancienne , plein de godt pour I'eloquen- ce , aimant les beaux vers , il s'etait couronne de gloire au concours des docteurs. Nomme tchoang-youen , il est admis dans le palais aux clochettes d'or (le palais imperial). Malheureusement, I'empereur des Thang, Te-tsong, effraye de la pre- sence de Tchong-kouei , refuse de con- firmer le choix honorable qu'on a fait : « Non! s'ecrie-t-il , je ne puis me re- soudre a prendre pour ministre le nou- veau tchoang-you^n ; il est trop laid. » Tchong-kouei se permet alors d'adres- ser a Te-tsong quelques representa- tions : " Je demande si , dans le choix d'un ministre, la beaute du visage... » n Gardes, qu'on I'arrete ! » interrompt I'empereur d'une voix tremblante. Tchong-kouei, transporte de colere, tire son glaive et met fin a ses jours. Apres cette catastrophe , I'empereur revient peu a peu de son epouvante; son cceur se ranime. Sentant qu'il a commis une injustice , et voulant user (*) Nouveaiix Melanges asiatiques , ou Re- cueil de morceaux de critique el de meinoires; par M. Abel Remusat , 1. 1", p. 338-345. 598 L'UNIVERS. des belles prerogatives dont il jouit comine Jils du ciel , il corable le spectre deTolion,i;-liOUei' d'lioiineurs, de distinc- tions, et le cliarge d'exterminer tous ies demons qui infestent son empire. Le spectre obeit , penetre jusqu'au cen- tre de la terre , et informe le roi des morts du mandat qii'il a re(^u. On connait I'affabilite du souverain des enfers(*); Tchong-koiiei est ac- cueilli par ce monarque de la manierc du monde la plus civile et la plus obli- geante. Pour lui faciliter sa t^cbe, on lui adjoint deux compagnons d'une va- leur a toute epreuve , Han-youen et Fou-khiue. Si le debut de TouVrage est un peu ridicule, le chapitre qui nous represente le souverain des enters in- vestissant Tchong-kouei et ses compa- gnons d'un pouvoir surnaturel, ne man- que pas d'un certain interet. Tchong-kouei, Chen-you^n et Fou- khiue sont done Ies trois personnages principaux du roman; ils quittent Ies regions inferieures, apparaissent tout a coup sur la terre, et ne tardent pas a se mettre en campagne. Les demons du Ping-kouel-tchouen , comme on doit s'y attendre, ne sont pas des etres inoffensifs qui se laissent exterminer sans defense; ils livrent des combats terribles; a chaque moment, Tchong- kouei et ses compagnons sont exposes aux plus affreux dangers ; mais ce qui diminue singulierement I'interet, c'est qu'ils ne s'en tirent pas loujours, com- me les heros du San-koiie-tchi , par des prodiges de valeur, d'intrepidite ou de Constance, mais trop souvent par des prodiges de magie. Le dernier chapitre doit produire un grand effet a la Chine: c'est celui ou I'auteur, apres avoir fait parcourir aux trois principaux personnages que j'ai nommes, une serie d'aventures plus ou moins etranges, les rameue tous les trois dans I'enfer, victorieux des d6- n«ons. Tchong-kouei etses compagnons y decouvrent Wang-mang, Tsao-tsao, Tong-tcho, le Turc Ngan-io-chan , I'im- peratrice Liu-heou, la courtisane Yang, une foule d'hommes et de femmes ce- lebres. Tous ces personnages font I'en- tretien de Tchong-kouei avec le roi des (*) Voy. plus haul, p. 4aa. enfers, qui joue exactement le meme role que Virgile dans la Divine Come- die. Le Ping-kouel-tchouen n'a pas en- core et^ traduit. I'E-KOUEl-TCHI, Ouvrage du dixi^me Tbsai-t«eu. Le Pe-kouel-tchi , ou VHistoire du sceptre de jade, est une production plus estimable a beaucoup d'egards que le Ping-kouel-tchouen ; le merveilleux y entre aussi , mais il y entre moins. Nous transcrirons ici le premier cha- pitre de cet ouvrage , qui n'a pas encore ete mis en francais : Prologue ou premier chapilre du Pe-kouei- tchi. Sous la dynastie des Ming, au village de Siao-mei, situe dans le district de Ki-choui , departement de Ki-ngan, province du Kiang-si, vivait dans I'o- pulence un excellent homme, dont le nom de famille etait Tchang, et le titre honoriQque Yng-tchouen. II voyageait dans la province du Hou-nan, accom- pagnede ses deux Ills, Touan-heng-thsai et Kao-kouen-chan. Yng-tchouen mourut presque subite- ment. Les deux Uls emporterent avec eux le cercueil de leur pere; mais a peine avaient-ils fait deux ou trois milles, que tout a coup le char se brise au pied du mont Yang-chan et que le cercueil tombe. Chose plus extraordi- naire, nialgre les efforts de vingt a trente personnes accourues sur leslieux, on ne parvint jamais a relever le corps du defunf. Touan et Kao n'ayant plus qu'un parti a prendre, ce leur fut une necessite d'acheter le terrain, qui servit a I'inhumation du corps. lis s'acquit- terent des devoirs que les rites leur imposaient; puis , au bout de trois ans, quand le temps du deuil fut expire, ils s'en retournerent dans leur pays pour y vivre avec leur mere, qui etait de la lamille Li. Cette femme venerable leur adressa la recommandation suivaiite: "Mesenfants, quaudje serai morte, je veux que Ton transporte mon corps dans le tombeau de votre pere. » Les deux Gis s'inclinerent respectueuse- ment, et, a quelque temps de la, ils CHINE MODERNE. 539 conduisirent le cercueil de leur mere dans le Hou-nan, au pied du mont Yang-chan. Ce fut alors que Tchang-kao, qui etait le cadet, dit a son frere aine Tchang-touan : « Les precieuses de- pouilles de mon pere et de ma mere sont ici , mais d'ici a notre village na- tal il y a une grande distance ; mon intention est de fonder un etablisse- ment aupres de cette montague ; je ne manquerai pas d'offrir a mes parents les sacrifices funebres, d'arracher des sepultures les herbes etlesbroussailles. D'un autre cote , les tombeaux de nos ancetres sont a Ki-choui : pouvons-nous abandonner les tombeaux de nos an- cetres? Non, il vaut mieux que mon frere retourne a Ki-choui , et que je demcure, moi , jusqu'a la fin de mes jours dans le Hou nan. C'est assure- ment I'unique moyen de concilier nos devoirs ; nous serons lies aux auteurs de nos jours comme I'arbre est uni a sa racine, le ruisseau a sa source. » Tchang-touan accneillit avec en- thousiasme cette proposition. Sur ces entrefaites , les deux freres se separe- rent. lis etaient riches , animes des senti- ments les plus nobles , les plus gene- reux; car Tchang-touan, a ce qu'on rapporte, outre qu'il avait toujours montr^ une intelligence Ires-vive, s'e- tait encore fait de la charite une louable habitude. II aimait les orphelins, les pauvres ; et quand la recolte etait abon- dante, il amassait des grains pour sou- lager la misere dans les annees steriles. Tons les hommes du pays , sans dis- tinction, touches de ses bienfaits et des ^mincntes qualites de son coeur, I'appelaient du titre honoriOque de Yoiien-wai, titre qu'on n'accorde qu'aux mandarins. II avait epouse Ho-chi, fille de Ho-yu-kong, originaire du village deTsi-thong, homme celebre dans toute la contree par sa piete filiale et I'inte- grite de ses moeurs. Ho-yu-kong avait deux filles: la femme de" Tchang-touan etait I'atnee; quant a la cadette, elle s'etait mariee, dans le village de Pe- yun , a un homme dont le noni de fa- mille etait Hia, le surnom Song, et le titre honorifique Mong-hien... Or, nous dirons que Tchang-touan avait une fortune immense , un grand nombre de fermes, de maisons de campa- gne;et comme pendant treize annees consecutives la recolte des cereales avait ete abondante, il en resultait que les grains s'etaient, pour ainsi dire, amon- celes dans ses greniers. Cependant une grande secheresse survint inopinement; les chaleurs tarirent les fontaines , les etangs, les sources; la terre perdit sa fecondite. Pour cette fois, les habitants n'en souffrirentguere; mais I'annee sui- vante, loin de ramener des jours meil- leurs, fut plus desastreuse encore. On n'avait'devant les yeux que le spectacle de la famine. Tcliang-touan distribua aux pauvres ses grains et ses reserves. De tous les villages, des plus proches comme des plus eloignes, on accourait vers lui; c'etait dans sa maison que la faim etait rassasiee. Tchang-touan avait atteint sa qua- rantieme annee, et n'avait pas d'enfants. Un jour qu'il s'etait repose sur un lit, il crut voir en songe un personnage extraordinaire , convert d'une belle ar- mure , et tenant a la main un ejendard rouge. Ce personnage, qui avait un air majestueux , lui dit d'un ton de voix plein de douceur : « Touan, vous eticz condamne a mourir sans posterite, mais le souverain seigneur du ciel (le Dieu des Tao-sse) ayant examine tous vos merites, qui sont immenses, re- vient au jourd'hui sur cet arr^t. » Tchang- touan , tremblant d'effroi , se reveilla dans une agitation extreme , et fit part a sa femme du songe qu'il avait eu. « Je ne m'en etonne pas , s'ecria Ho- chi , car il y a deja plusieurs jours que j'ai commence a sentir des mouvements inaccoutumes; toutes ces choses pre- sagent une grossesse. « Apres un tel ^venement , les deux epoux s'abandon- nerent a la joie. Ho-chi mit au monde un fils. La na- ture avait doue cet enfant d'une mer- veilleuse beaute, Au moment de sa naissance, une odeur extraordinaire, mais plus agreable que les parfums, se repandit dans toute la maison. Pendant I'hiver de Tannic suivante, elle donna le jour a une fille. Le fils prit pour sur- nom Pong-tsou, pour titre honorifique Thing-choui ; la fille prit pour surnom Lan-yng; comme son frere, elle se dis- 640 L'UNIVERS. tinguait des autres enfants par ses qua- lites noturelles. Un jour, dans un de ces moments oil Tchang-touan joiiissaitd'un honn^te loisir, on vint lui annoncer la visite d'un etranger. Touan se leva sur-le- cliamp, et sortit pour alier a sa ren- contre. Cetait un liomme fort jeune encore, modestement , simplement y^- tu, d'une physionomie riante, tres- gaie et tres-ouverte. Apres les compli- ments d'usage, qiiand il se fut assis dans le sajon , Tchang-touan dit a son hole : « Quels motifs , monsieur, vous amenent ici ? » Or, il faut savoir que cet etranger avail le meme norn de tamille que Tchang-touan, et que, par conse- quent, il etait veritablement son frere. Son surnom etait Hong , son titre ho- norifique Yo-sieou. Amateur de voya- ges, il avait navigue, au gre du vent, sur les fleuves et sur les lacs ; apres avoir couru bien des pays, sans pou- voir se fixer dans aucun , il retournait a petites journees dans son village. Tchang-touan offrit une collation a son hole. Pendant qu'ils etaienta table, Touan remarqua que Hong etait cir- conspect , modere , sage , tres-retenu dans ses discours ; il en fut charme, et contracta avec lui une amitie sincere: mais Hong n'etait , au fond , qu'un hy- pocrite. Cette amitie s'accrut encore avec le temps, au point qu'un jour Tchang-touan dit a son ami : « Hia- song, mon beau-frere, a son domicile dans I'arrondisscment de Sou-tcheou ; il est devenu opulent; il faut que je vous introduise dans la maison de mon frere. Qui salt? Par la suite, vous pour- rez y etablir votre fortune. » Hong , au comble de la joie, remercia Tchang- touan. « Ah! s ecria-t-il , si je recevais un tel temoignage de votre estime et de votre confiance, que me faudrait-il de plus, et que manquerait-il a mon bonheur?» Sur quoi, Tchang-touan ^criyit une letlre d 'introduction qu'il remit a Hong, en y joignant, a titre de presents, quelques taels pour sa route. Au moment de s'eloigner. Hong, apres avoir acheve ses deruiers prepa- ratifs, revint pour prendre conge. Les deux amis passerent un certain temps a causer et a boire quelques tasses; leur entretien s'anima insensiblement. « Mon frere atne, dit Hong en riant, il ne convient pas que j'entreprenne le voyage de Sou-lcheou; croyez-moi , il y a une chose que vous n'aimez pas, que vous ne souffrirez jamais , c'est la soli- tude. Comment ? vous, que j'ai tant cher- che... Ah ! mon frere, vencz done avec moi; je vous jure que vous trouverez dans voire voyage miile agrements. » Tout a coup Tchang-touan pensa a Hia- Song, dont il etait separe; il laissa un moment errer son imagination , accepta I'offre qui lui etait faite, et se mit en route avec Hong, sans emmener un seul domestique. II n'y avait pas plus d'un mois qu'ils etaient partis, quand ils arriverent a Sou-tcheou. Les deux amis s'installe- rent dans la niaison de Hia-song , oil ils furent accueiliis cordialement, et de la manieredu mondc la plusobligeante. Comme il y a de belles promenades au- tour de Sou-tcheou-fou , Tchang-touan s'y plut pendant quelque temps ; mais il (init par sen lasser. Sa belle-soeur, voyant qu'il etait ennuye de tout, en paria a Hia-song, et le jourdu depart fut fixe. On transporta les bagages sur un bateau qui devnit toucher a Ki- choui. Tchang-touan et Hong s'embar- querent, apres avoir fait leurs adieux. On les prenait dans le bateau pour les deux freres. Mais Hong remarqua que Tchang- touan avait dans sa valise une immense quantite de perles et des bagues (cheou- tchouen) d'une grande valeur. Tant de rares objets avaient excite la convoitise de ce miserable; il (oncut, pendant le voyage , I'abominable dessein de tuer son bienfaiteur etsonami. Auboutde quelques jours on arriva a Nan-khang; Hong ordonna au patron de la barque de se tenir a Tancre; quant a lui, il descendit du bateau , entra dans la ville, y acheta du vin, de la viande, des legumes, et finalement du poison qu'il cacha dans la manche de son ha- bit. Approvisionne de la sorte , il re- tourna dans le bateau, et appreta un repas auquel il invita Tchang-touan. On se mit a table. « Mon frere , obserya Hong avec une insigne perlidie, je crois que le vin est pernicieuxa votre sante; il faut boire a petits traits, a petits CHINE MODERNE. 541 traits. » — « Comment done , repondit Tchang-touan, est-ce de cettefacon que Ton boit avec ses amis? Ne suis-je pas dans la force de I'age? Qu'ai-je a crain- dre? » — « Tant mieux, repliqua Hong. Quant a moi , je veux boire aujourd'luii plus que de raison. » Apres avoir ainsi parle , les deux amis remplirent leurs tasses. C'etait un pauvre buveur que Tchang-touan ; aussi les vapeurs du vin lui montant a la tete, il s'appuya sur la table et finit par s'endormir. Comme il avail laisse du vin dans sa tasse , Hong profita de ce moment pour y verser le poison. « Mon frere ! mon trere ! cria-t-il , c'est assez pour vous ; aclievez votre vin, et nous irons nous reposer. » Touan I'avala d'uii trait. Hong aiors disposa une natte sur la- quelle Tchang-touan s'etendit; puis il alia lui-meme se coucher dans une ca- bine, sur I'avant de la barque, oii il fit seniblant de doiinir. Quelques instants a peine s'etaient ecoul^s, que Tchang- touan se mit a pousser d'boiribles cris. « Oh ! que je souffre ! je me meurs , je me meurs ! » disait-il. Hong , qui etait sur I'avant, ne repondit pas. Le pa- tron de la barque , rempli d'effroi , ac- courut au secours de Touan ; inais voyant que le sang de ce malheureux jaillissait des sept orifices de sa tete, il sortit avec precipitation de la cabine pourreveiller Hong. Quand Hong a son tour s'approcha de Tchang-touan , ce- lui-ci avail cesse de vivre. Cependant Hong s'elanca sur k pont, comme un homme frappe de vertige ; il ne cessait de crier : « Au secours ! au secours! » Et quand les marchands, dans la compagnie desquels il se trou- vait, lui demanderent la cause d'une telle agitation et d'une telle douleur, « Ah ! leur repondit-il , le chef du ba- teau vient a I'instant meme d'assassi- ner mon frere. II s'est ensuile precipite sur moi; j'ignore, en verite, comment j'ai pu echapper a ses coups. » Les mar- chands descend irent dans la cabine qu'il indiqua du doigt, et reconnurent que Tchang-touan etait mort. « Dans mon infortune, continua Hong, puis- je, messieurs, vous assigner comme temoios a charge?... » Toutefois le batelier protestait de son innocence; il etait entoure des marchands^ lorsqu'un homme, d'un venerable aspect , prit sur-le-champ la parole : « Messieurs, leur dit-il avec le plus grand calme et I'accent de la ver- tu, il y a bien longtemps que je connais le maitre de cette barque ; j'ose vous affirmer qu'il est inaccessible a toutes les convoitises , incapable de commettre un nieurtre. Reflechissez, messieurs, a I'instabilite des choses humaines ; elles changent comme le temps; nous passons quelquefois du matin au soir par beaucoup de vicissitudes. Gardez- vous d'accuser a tort un homme inno- cent ! » A ces paroles , Hong , affectant de revenir sur ce qu'il avait dit, repli- qua vivement : « Je vols, monsieur, que vous etes un homme d'un carac- tere honorable, etje me desiste de ma plainte. Helas! songez au coup terrible, imprevu , qui vient de me frapper. Dans mon saisissement, j'ai forme, j'en conviens, une accusation fausse; mais si jen'eusse pas cherche a venger la mort de mon frere, comment aurais- je pu soutenir les regards de ma belle- soeur? » En achevant ces mots, il se jeta sur le cadavre de Tchang-touan pour I'embrasser, et versa des larmes en abondance ; les assistants emus I'ar- racherent a ce douloureux spectacle. Le lendemain, Hong entra dans la ville ety acheta un magnifiquecercueil, dans lequel il placa le corps de Tchang- touan. Apres avoir mis la majn sur les perles et sur lesbagues, il revint au milieu des voyageurs, sans proferer une seule parole... Enfin on arrive a Ki-choui. Hong descend du bateau, et s'achemine vers la maison de Tchang- touan pour y annoncer la fatale nou- velle. A ce moment, la femme de Tchang-touan, Ho-chi , elait assise dans une salle ou elle prenait un peu de repos. Quand elle vit que Hong re- venait a la maison vetu de blanc, elle s'approcha de lui et versa des larmes. Hong seprosterna jusqu'a terre, puis, eclatant en sanglots : « Ah! ma soeur, s'ecria-t-il , un coup funeste a enleve mon frere a mes cotes , sans qu'aupa- ravant il ait ete atteint de la moindre indisposition. » A peine avait-il acheve ces paroles, que la malheureuse femme tomba evanouie. Elle revint a elle , avec les soins et les attentions de Hong; <»4S L'UNIVERS. mais son ame ctait brisee, et Ion ne pourrait ex primer la douleur qu'elle ressentit. Hon^, suivi d'un doinesti- n»e, alia recevoir le cercueil de Tchang- touan. Quel sujet de tristesse et de re- grets ! Quand on apprit la nouvelle de sa inert , la consternation fut generate. Cependant tons les parents, tons les allies du defunt, quand on parlait de Hong , ne tarissaient pas sur ses quali- t6s, sur ses vertus : « C'est un bon , un excellent homme, » disaient-ils. Apres la ceremonie des funerailles, Ho-chi elle-mfime, dont la douleur etait in- consolable, s'imagina qu'elle n'avait rien de inieux a faire que de livrer a Hong I'administration de sa fortune. Celui-ci devint done I'intendant general de la maison; terres, herbages, fer- mes, maisons de plaisance, il regissait tout. Cette administration , on le pense bien , ne laissait pas que d'^re lucra- tive pour Hong. Deux ans a peine s'e- taient ecoules , qu'il figurait assez bien dans le monde; il avait une femme, des esclaves, des champs, une jolie maison de plaisance. Pendant son se- jour dans le Hou-nan , il avait eutre- tenu des liaisons criminelles avec la concubine d'un habitant do pays ; il lui etait ne de ce mauvais commerce un fils qu'il avait fait venir a Ki-choui et qu'il comblait d'affection. Comme cet enfant avait les yeux tres-beaux, il lui donna le surnom de Mei-yu (beau comme le jade). Mais laissons pour un moment Hong, et parlous de Ho-chi. Le temps n'avait pas amorti son affliction. Un jour qu'elle se trouvait par hasard sur les marches de I'escalier exterieur, elle apercut un petit char de voyage dans lequel une jeune femme etait assise , f)uis un homme qui niarchait derriere e char. On s'arr^ta devant la porte. Or, la jeune femme , c'etait I'epouse de Hia-song, la soeur cadette de Ho-chi; I'homme, c'etait Hia-song luim^me. lis venaient tons les deux deSou-tcheou- fou. Apres qu'ils furent entres dans le salon , Ho-chi s'approcha de la femme de Hia-song, et remarqua que des larmes coulaient de ses yeux. « Ah ! ma soeur, dit celle-ci, que je suis a plaindre! Hier, a rembouclmre du fleuve, un vent terrible enfla tout a coup la grande voile du bateau ; je tenais cutre mes bras mon fils, qui n'etait Sge que de trois ans: helas ! emportee par un tour- billon , les bras m'ont manque, et le pauvre enfant est tombe dans le fleuve. Un batelier plein d'ardeur accourut a notre secours; quant a moi, je lui dois la vie: mais mon enfant, j'ignore ce qu'il est devenu ; peut-6tre qu'il a ete enseveli dans le ventre d'un pois- son. » En achevant ces mots, elle pleu- rait amerement. Hia-song essaya de calmer son chagrin ; helas ! les deux soeurs se jeterent dans les bras I'une de I'autre et confondirent leurs larmes. On ne pouvait lesseparer. Cependant, un homme de I'equipage fut introduit dans la salle, et annonca qu'on allait mettre a la voile. Hia-song et sa femme furent contraints de partir a Tinstant m^me. Quand ils se trouverent sur les marches du grand escalier, Ho-chi leur renouvela ses recommandations et leur donna mille marques de son attache- ment. Ce n'est pas tout. Dans le district de Sing-tseu, du departement de Nan- khang, vivait un homme dont le nom de famille etait Wcu, le surnom Yng, et le titre honoriQque Fangchan. Na- turellement studieux, parvenu tres- jeune au doctoral, il avait ete nomme gouverneur de Tchang-tcheou dans la province du F6-kien , et s'etait acquitte des devoirs de sa charge avec une gran- de probite et undesinteressement rare. II avait atteint sa soixantieme annee, et n'avait point d'enfants ni de sa pre- miere femme Lieou-chi, qui etait morte a la fleur de I'dge, ni de Sun-chi, qu'il avait epousee eii secondes noces. Fang- chan, se trouvant done seul, sans fa- mille, mais avec une fortune assez digne d'envie, forma la resolution d'abdiijuer sa charge pour s'abandonner aux dou- ceurs du repos. II presenta un placet a I'empereur, obtint sa retraite comme sexagenaire, h^ta son depart, et ne s'occupa plus que des preparatifs du voyage. 11 naviguait done sur le fleuve et s'en retournait dans son pays natal , lors- qu'il apercut une troupe de pies. Elles nageaient avec une grflce singuliere , et portaient sur leurs ailes un objet dont on ne distinguait pas tres-bicn la- na- CHINE MODERNE. 543 ture ; tout a coup, au sein des airs, re- tentit le concert des oiseaux : « Sai- sissez-vous, si vous pouvez, de cot objet mysterieux, » dit Fang-chan au bate- lier. Finaiement qu'etait-ce que cet ob- jet? Un petit enfant qui pouvait avoir environ trois ans , mais dont la beaute extraordinaire charma tous les cocurs. Fang-chan le prit dans ses bras , et s'e- cria , transporte de joie : >i C'est un en- fant que le ciel m'accorde. » Puis, vou- lant lui donner un nom , il I'appela Rhi-eul « I'enfant du miracle, « et I'emporta a Nan-khang , ou il I'eleva avec beaucoup de soin. Or, il faut sa- voir que cet enfant etait le fils de Hia- song, celui que Sun-chi avait tant aime. On lui donna plus tard un precepteur qui lui apprit a lire. II devint un pro- dige de menioire et surpassa I'espe- rance de son pere , car a Nan-khang on le regardait comme le fils de Fang- chan. Nous ne soinmes pas a la fin de I'his- toire. Le temps s'ecoule; deja Thing- choui, fils de Ho-chi, et Mei-yii, fils de Hong , avaient atteint I'age de sept ans, lorsque celui-ci confia leur education au plus habile maitre du district. Le nom de famille de ce precepteur etait Tchin , son surnom Te-thsao. II etablit done une ecole particuliere dans la maison de Ho-chi; Lan-yng, soeur ca- dette de Thing-choui , assistait aux le- cons. Cette petite fille ne portait pas de pendants d'oreille comme les autres , elle ne portait meme pas le costume de son sexe; et quoiqu'elle edt ete soumise a la compression des ligatures, ses jo- lis souliers, habilenient faits, dero- baient aux regards la petitesse de ses pieds. Aussi disait-on communement qu'elle avait le corps d'une femme et rintelligence d'un homme. Dans le dis- trict , beaucoup de gens ne savaient pas que Lan-yng etait une fille. Nes avec des dispositions heureuses , les trois eleves ne cesserent de se livrer a I'etude. L'application , le discerne- nient, ladocilite, d'autres qualites en- core, leur valurentdes succes precoces ; Tching en etait ravi. Apres trois an- nees , les trois eleves excellaient a com- poser en vers et en prose ; et comme on annonca I'ouverture des examens dans le district, Tching ordonna a Thing-choui et a Mei-yii de concourir pour le premier degre ; la jeune fille, de son cote , resolut d'affronter les epreu- ves du concours. On apprendra dans le chapitre sui- vant ce qui advint a Lan-yng , quand elle se presenta devant les examina- teurs (*). EcarvAiHS DU SECOSD ordre. Apres les Thsai-tseu , nous parlerons des ecrivains du second ordre. « Les Chinois, dit le traducteur fran- cais du Lao-seng-eul (**), ont des romans de tous les genres. Romans a aventu- res, romans de caractere, romans his- toriques; recueils d'anecdotes et de nouvelles; romans dialogues; contes moraux, contes obscenes ; histoires merveilleuses ; leurs auteursont, comme les ndtres, tout observe, tout peint, tout raconte. » Neanmoins, s'il n'y a pas de nation dans le monde chez la- quelle on trouve tant de romans , tant de nouvelles , la verite est que les ou- vrages de ce genre y sont mis a I'in- dex,fletris quelquefois , comme le Kin-» p'hing-mei , par les cours souveraines de Pe-king, prohibes par les statuts, exclus des bibliotheques publiques. C'est ainsi que la bibliotheque im- periale, fondee par Khien-long, et qui contient 180,000 volumes,- ne renferme pas un seul monument de la langue vulgaire. C'est ainsi qu'on trouve dans les grandes bibliotheques une foule d'ex- cellents livres pour lesquels on a beau- coup d'estime , mais qu'on lit rare- ment; tandis que les ouvrages qu'on aime a lire ne s'y trouvent jamais. II n'existe pas a la Chine, pour I'his- toire du theatre, des romans, des ou- vrages d'imaaination , un repertoire analogue au Wen-hien-thong-kao, de Ma-touan-lin , ou Ton voit enumeres, juges et classes tous les ecrivains qui se sont servis de la langue savante; et quand M. Abel Remusat annoncait dans sa grammaire un tableau complet de la litlerature chinoise, I'illustre orienta- liste promettait bien au dela de ce qu'il pouvait donner. (*) Cet ouvrage a ete compose sous la dy- naslie actuelle. (**) M. Bruguiere de Sorsum, 544 L'UNIVERS. A defaut de notices , nous nous bor- nerons done a un aper^u, a une men- tion rapide des oiivrages qui ont et^ traduits. Notre plan est restreint, et Ion trouvera peut-6tre que la littera- tnre occupe deja trop de place. Les ouvrages que ies Chinois com ^renncnt sous la denomination de Siao- choue se partagent en deux classes ; on peut ranger dans la premiere les Ta- tchouen (romans); dans la seconde, les Siao-tcfwuen (contes et nouvelles). Commencons par ies Ta-tchouen. Des romans chinois. On distingue, a la Chine, trois es- peces de romans ; ce sont : 1° Les romans historiques ; 2° Les romans mythologiques ; 3" Les romans de'moeurs. De tous les romans historiques , le San-koUetchi, ou VHistoire des Trois Royaumes, dont j'ai deja parle, est incontestablement le premier et le plus beau. « Mais, dit M. Theodore Pavie, I'Histoire de la Chine presque tout on- tiere a ete mise en roman. Comme tou- tes les nations arrivees a un certain raffinement de civilisation ; coniine cel- les aussi chez qui le sentiment du passe est plus vif que I'instinct de Tavenir, la nation chinoise a, au plus haut de- gre , la passion des petites chroniques et de la litterature facile, qui lui retra- cent son histoire sous une forme agrea- blea saisir(*). » L'observationdeM. Pa- vie est exacte ; je remarquerai cepen- dant que !e style des romans historiques est en general fort eleve , assez concis, et n'offre pre>que jamais les formes du langage habiluei. Je crois que VHis- toire des Song et VHistoire des Thang sont, apres le San-koue-tchi, ce qu'on possede de mieux en ce genre. On connait moins les romans mytho- logiques. Le plus considerable de tous, celui que les Chinois regardent comme un chef-d'oeuvre et placent au nombre des quatre grands livres merveilleux (Sse-tay-chou), est sans contredit le roman bouddhique intitule Si-yeou-ki , ou Voyage dans I'Occident (c'est-a- diredans I'lnde). M. Theodore Pavie (•) Introduction a lliist. des Trois Royau- »«. 1. 1", p. 5a. en a tire deux Episodes : le Bonze sauvi des eaux et le Roi des dragons. Dans un autre temps, on aurait pu s'arreter au roman inythologique; mais quand un professeur celebre a mis a notre por- tee la relation originale qui en a fourni \ le sujet , relation oii Ton trouve I'cxac- * titude historique a cote des recits 1^- gendaires, on renonce a parler du Si- yeou-ki. Le Foyage de Hiouen-thsang dans tinde, iraduit du chinois par ISI. Stanislas Julien, est peut-^tre le plus beau monument de la philologie orientale, independamment du grand interet qui s'y attache. Une telle pu- blication exigeait des travaux prepara- toircs , au moyen desquels Tetude du chin(^is a ete assujettie a une methode exceptionnelle et soumise a des prece- des nouveaux, dont la decouverte ap- partient au savant traducteur. II y a loin du i)etit roman intitule Blanche et Bleue, ou les Deux Cou- leuvres-fees ^ public par M. Stanislas Julien en 1834, au Voyage de Hiouen- thsang dans I'Inde. Toutefois j'en di- rai un mot ici , p.irce que cet ouvrage rentre dans la classe qui nous occupe, et fournit un tres-curieux echantilloii des romans m^les de merveilleux et de feeries. Voici le suj^t de Blanche et Bleue : « Blanche est une femme que Foe (le Bouddha des Indiens) a fait passer dans le corps d'une couleuvre blanche , pour expier, pendant des siecles, les fautes de sa vie anterieure. Au bout de dix- huit cents ans, ce dieu decide que I'astro Wen-sing (I'astre de la litterature) de> cendra sur la terre, oii il doit parvenir aux plus hauts honneurs. En conse- quence, il permet a Blanche de repren- dre un corps humain , et d'epouser Han-wen , afln de donner le jour a I'astre Wen-sing, qu'il veut recompen- ser d'une maniere eclatante. Pendant plusieurs annees Blanche est exposee aux plus grands perils; il lui arrive mSme une fois de perdre la vie; mais comme de hautes destinees se ratta- chent a son existence, Bouddha or- donne a un dieu place sous ses ordres de la proteger lorsqu'elle est en dan- ger de perir, et de lui communiquer son souffle divin , apres que la vue du g^nie de I'astre NAn-sing I'a fait mou- CHIME MODERNE. o4l rirtle frayeiir. Ealiu, apres beaucoup de vicissitudes ou doiDine toujours le inerveilleux, Blanche arrive au terme de sa grossesse : une lumiere brillaiite illumine toute la maisou, et I'astre Wen-sing descend dans le monde. « Des ce moment le role de Blanche est accompli; et conime elle n'avait pas encore expie toutes ses fautes lorsque Bouddha la choisit pour etre, a I'egard de i'astre Wen-sing, rinstrument de ses desseins, il ordonne au religieux Fa-haT de I'ensevelir sous la pagode de Loui-pong. Vingt ans apres , lorsque Blanche a renipli la inesure de ses souffrances, Fa-lia'i vient la tirer de sa prison , et I'eleve au sejour des dieux. » L'histoire de Blanche et Bleue re- monte a une epoque peu eloignee de nous. La preface, redigee par un ami de I'auteur, porte la date de 1807. C'est le premier roman de ce genre qui ait paru en Europe. On a pu juger des romans de moeurs par les extraits que J'ai donnes du Hao- khieou-tchouen , du Yu-kiao-li, du P'ing-chan-ling-yen, du Pe-kouei-tchi ; il me parait inutile de revenir sur les tableaux de la soci^te chinoise, d'enu- merer tons les romans que Ton trouve dans notre Bibliotheque nationale; niais je ne puis omettre le plus etendu et le plus licencieux de tons , le Kin-p'hing- mei, qui parut pour la premiere fois en 169.5, et qui n'a pas moins de cent li- vres. C'est an sujet de ce roman que jVI. Abel Renuisat, dans une note de sa traduction du livre des Recompenses et des peines^ p. 58 , dit : « Malgre la severite des lois et les perpetuelles de- clamations des moralistes et des sec- taires, la corruption des moeurs est aussi grande a la Chine qu'en toute au- tre contree. A la verite, la plupart des ecrivains poussent la modestie des ex- pressions jusqu'a I'affectation la plus ridicule. INIais il y a aussi un bon nom- bre d'ouvrages oii regne le cynisme le plus revoltant. INous avons ici un re- cueil qui pent etre mis, sous ce rapport , a cote de Petrone et de Martial. Je dois convenirpourtant que le lien conjugal ny est presque jamais un objet de sarcas- me et de derision. On poiirrait en tirer une consequence favorable aux ma3urs nationales, s'il en etait de meme dans 35* Livraison. (CnmE bioderne. le Kin - p'hing - mei , roman celebre qu'on dit au-dessus, ou pour mieux dire au-dessous de tout ce que Rome corrom- pue et I'Europe moderne ont produit de plus licencieux. Je ne connais que de reputation cet ouvrage, qui, quoique fletri par les cours souveraines de Pe- king, n'a pas laissede trouver un tra- ducteur dans la personne d'un des fre- res du celebre empereur Ching-tsou, et dont la version que ce prince en a faite en mandchou passe pour un chef- d'oeuvre d'elegance et de correction. » Keanmoins , j'ai voulu montrer dans le siecle des Youen qu'on pouvait, sans pecher contre la bienseance , faire pas- ser dans notre langue quelques pages du Kin-p'hing-mei. Voici le morceau que j'en ai tire, et que j'abandonne au jugement du lecteur. Histoire de ff^ou-song et de KinMn. (Extrait du premier chapitre du Kin-p'hing-mei.) « Mais,je ne me trompe pas, s'ecria Wou-ta , c'est mon frere! — « Comment doncPvous dans cette ville! dit Wou-song, apres avoir salue Wou-ta. Je ne m'attendais guere a vous rencontrer ici. — « Ah ! mon frere , depuis plus d'ua an que nous sommes separes , pourquoi ne m'avez-vous pas ecrit.!" En vous voyant, je ne puis dissimuler ni mon ressentiment ni mon affection : mon ressentiment , quand je pense a tous vos desordres ; toujours dans les caba- rets, toujours frappant, tantot celui- ci , tantot celui-la ; toujours des de- meles avec la justice. Je ne me souviens pas d'avoir joui un mois du calme et de la tranquillite. Que de soucis! que d'amertumes! que de tribulations! Oh! quand je pense a cela , je ne vous aime pas. Mais voulez-vous savoir quand je vous aime ? £coutez-moi. Les habi- tants du district de Tsing-ho ne sont pas d'un caractere facile; vous les connaissez. Ces gens-la n'ouvrent la bouche que pour dire des sottises. Apres votre depart, ils m'ont trompe de mille manieres, puis tant' tourmente, tant opprime , qu'a la fin j'ai quitte le dis- trict. Quand vous etiez a la maison. nul n'aurait ose souffler dans ses doigts. ) 35 )46 L'UISIVERS. Oh! quand je pense h cela, je vous aime. » Au fond, les deux freres Wou-ta et "Woii-sont; , quoique nes du inline p^re et de la m^jine mere, iie se ressem- blaicnt pas le inoins du monde. Wou- soiig avait huit pieds de hauteur, une figure singuliereinent belle, des pro- portions athletiqucs. II etaitdoue d une force si extraordinaire que personne n'osait I'aborder. AVou-ta n'avait pas cinq pieds (*) de hauteur. II ^tait hor- ribleinent laid : la forme de sa t^te avait en outre quelque chose de comique. Les habitants du Tsiiig-ho, voyant qu'il ^tait chetif et d'une petite stature, i'a- vaient affuble d'un sobriquet ; ils I'ap- 1 )e\a\ent San-tsu7i-ting (Homme de trois )ouces). II existait, dans une famille opulente du Tsing-ho, une jeune ca- meriste d'une beaute remarqiiable. Son nom de famille etait Pan , son surnom Kin-lien (nenuphar d'or). EHe avait alors vingt ans. Le maitre de la mai- son , epris de ses charmes, voiilait en faire sa concubine; mais, comme il ar- rive presque toujours , la femme legi- time refusa son consentement. Dans son depit , le maJtre proposa cette jeune fille a un marchand de gflteaux, h Wou- ta, qui I'epousa , inoyennant quelques pieces d'argent. Kin-lien n'aimait pas son mari ; elle se plaignait sans cesse de I'exiguite de sa taille et de la laideur de son visage ; elle trouvait surtout ses manieres fort communes. Pour le mal- heur de celui-ci, elle se lia d'amitie avec des courtisanes et des femmes de mauvaise vie, qui etaient venues s'eta- blir a Tsing-ho. Wou-ta etait un hom- me fort honn^te, plein de droiture, mais d'un caract^re faible. II tolera dans sa maison la presence de ces fem- mes , qui se moquaient de lui. Finale- ment , abreuvf^ de sarcasmes et las de toutes ces avanies, il transporta son domicile dans la ville de Yang-ko, chef- lieu du district de ce nom ; loua une petite maison rue des Amethystes. Or, il etait en train d'exercer son 6tat, quand il rencontra Wou-song.' « Ah! mon frere, coi»tinua-t-il, te- nez , j'etais dans la rue ces jours der- nlers , lorsque je vis un rassemblement {*) Tche : c'est le pied cliinois. d'hommes et de femmes. Je m'approche pour entendre; quelqu'un racoiitait avec beaucoup de vivacite qu'iin hom- me, d'une force extraordinaire, avait terrasse im tigre sur la montagne; que le nom de cet homme etait Wou , et que le prefet venait de le nommer tou- /Aeo7< (major de la garde du district). .Je gage que c'est mon frfere, me dis-je a moi-meme. Oh! a|)res une si heureuse rencontre, je ne travaille plus d'aujour- d'hui. — (> Oil est votre maison, mon frere? — « Vis-a-vis, repondit Wou-ta, montrant du doigt la rue des Ame- thystes. » Wou-song , pour soulager son frere, chargea sur ses epaules le levier de banibou auqnel etaient suspendues deux mannes de p3tisserie. Arrives a la mai- son , Wou-ta souieva le treillis de la porte : « Ma femme , cria-t-il , le vainqueur du tigre, celui que le prefet du district vient d'appeler aux fonctions de major de la garde, justement c'est mon frere. — « Mon beau-frere, dit Kin-lien se tournant vers Wou-song, dix mille fell cites. — « Ma belle-soeur, repondit Wou- song , asscyez-vous , je vous prie , pour recevoir mes salutations, — « Tant d'egards confondent votre servante. — « Je veux observer les rites et vous temoigner mon respect. — « Mon beau-frere, imaginez-vous que. ces jours derniers , une de mes voisines, madame W^ang, vouiait m'en- mener avec elle pour voir le cortege. Quoi ! cet homme admirable qui entrait dans la ville, c'etait mon beau-frere!... Je vous en supplie , montez done dans notre chambre ! « Wou-song, Wou-ta et Kin -lien monterent dans I'etage superieur. « Je vais tenir compagnie a mon beau-frere, dit Kin-lien regardant Wou-ta; allez vite acheter quefque chose. — «Tres-bien! repliqua celui-ci. Mon frere, asseyez-vous ; je reviendrai dans quelques instants. — '< Quel exterieur agreable et plein de noblesse, se dit a elle-m^me Kin-lien, apres avoir examine Wou-song depuis les pieds jusqu'a la tete ; des deux fre- CHINE MODERNE. 647 res, celui que j'ai epouse h'est certai- nement pas le plus beau ; car s'il res- semble quelque peu a un homme , il ne / laisse pas d'avoir encore plus I'aspect ) d'un demon. Qu'ai-je affaire de Trois- pouces, d'un mari si ciietif et si laid? Trisle, languissante comaie je ie suis, il faut que je m'attache a Wou-song. On dit quMI n'est pas encore marie. O heureiix jour! Pouvais-je m'atten- dre a cette bonne fortune ? « Mon beau-frere , dit-elle a Wou- song d'un air joyeux, combien y a-t-il que vous etes ici ? — « Dix jours. — « Ou logez-vous.3 — « A la prefecture. — « Oh ! que vous devez y ^tre mal ! — « Un homme s'arrange toujours bien. D'ailieurs, je n'ai pas a me plain- dre ; les soldats de I'hotel m'apportent tout ce qui m'est necessaire. — « Des soldats ! Mais les gens de cette espece ne sont guere propres au service... du menage. Vous n'avez ja- mais que des potages rechauffes; et quels potages encore ! c'est a soulever le coeiir, j'imagine. Mon beau-frere, il faut quit- ter la prefecture et venir demeurer avec nous. Je veux appreter moi-meme tout ce que vous mangerez. — « Je suis profondement louche de votre accueil. — « rs'aiirais-je pas quelque part une petite belle-soeur a un caractere agrea- ble, enjoue, que vous seriez heureux de... — « Je ne suis pas encore marie. — « Mon beau-frere, dit alors Kin- lien d'un ton de voix plein de douceur, quel Sge avez-vous ? — « Vingt-cinq ans. — « Juste trois annees de plus que votre servante. Mon beau-frere, d'ou venez-vous maintenant.-* — « Du district de Tsang-tcheou , ou j'ai sejourne plus d'un an. Je ne m'at- tendais pas a rencontrer mon frere dans le Yang-ko. — « Oh 1 oh ! ce n'est pas une petite histoire. Apres mon mariage, figurez- vous que mon epoux m'a rassasiee de... morale, et le public de mauvaises plai- santeries. Nous nous sommes trouves dans I'obligation d'abandonner le dis- trict de Tsing-ho. Si i'avais epouse un homme fort, courageux comme mon beau-frere, qui est-ce qui aurait ose prononcer le caractere pou (non).^ — « Mon frere est un homme qui ne fait rien et n'a janiais rien fait que par principede conscience; il ne ressemble pas a Wou-song, dont la conduite a ete si desordonnee. — « Oh ! les jolis contes que vous debitez la, dit Kin-lien en riant. Quant a moi, j'ai toujours aime la gaiete, la vivacite ; et je ne puis soutfrir ces hommes graves , compasses , qui vous repondent toujours sans branler la tete. — « Mon frere est tres-pacifique ; il craindrait de jeter ma belle-soeur dans I'inquietude et le chagrin. » Sur ces enlrefaites, Wou-ta , revenu du marche, entra dans la chambre. « Ma femme, dit-il a Kin-lien, les provisions soiit dans la cuisine; vous pouvez appreter le diner. — « Voyez done le malavise ! s'ecria Kin-lien : pendant que mon beau-frere est dans ma chambre, il veut que je descende a la cuisine. — « Ma belle-soeur, repondit Wou- song, je vous en supplie , ne faites pas de ceremonies pour moi. — « Que ne va-t-il prier madame Wang , notre voisine , d'appreter le di- ner? » Wou-ta obeit. Au bout de quelque temps, madame Wang entra dans la chambre et servit le diner. Kin-lien proposa une sante a Wou-song. Wou-ta se levait a chaque instant pour trans- vaser le vin , a la grande satisfaction de Kin-lien qui souriait et ne bougeait pas de sa place. « Mon beau-frere , con- tinua-t-elle sans plus de facon , pour- quoi ne mangez-vous pas du boeuf avec votre poisson ? Tenez , je vais vous choisir un beau morceau. » AVou-song, Commc on I'a dit, avait des principes, une conscience delicate. II est certain qu'il trouvait les allures de Kin-lien un peu vives; niais il temoignait des ^gards a cette jeune femme parce qu'elle etait sa belle-soeur. Au fond pouvait-il deviner que son frere avait epouse une cameriste? Kin-lien, apres avoir bu quelqiies tasses de vin , se mit a consi- derer Wou-song. Celui-ci n'osait pas soutenir ses regards; il baissait la tete, 35. 548 L'UNIVERS. et finit par se lever de table. « Encore quelques tasses, lui dit Wou-ta. » — n Mou frere , c'est assez pour aujour- d'liui ; je reviendrai vous voir. » Wou-ta et Kin-lien descendirent de la chambre ; lis accompagnerent Wou- song jusqu'a la porte exterieure. « Mon beau-frere, dit Kin-lien, il faut que vous veniez demeurer avec nous. Au- trement, voyez-vous, notre situation est intolerable. On se moque de nous du matin au soir; on nous raille, et raoi je ne puis pas souffrir qu'on me raille. — « Ma femme a raison , dit Wou-ta: venez demeurer avec nous; vous m'ap- prendrez a defendre mes droits. — « Tres-volontiers, si c'est votre desir, repondit Wou-song. Je vais cher- cher ma valise, et demander au gouver- neur la permission de quitter la pre- fecture. — « Je compte sur vous, ajouta Kin- lien. » Voila done Wou-song installe dans la maison de son frere , Kin-lien au comble de la joie. On etait alors dansiedouzieme mois.Depuis plusieurs joUrs, le vent du nord soufflait avec violence. On apercevait des nuages qui, semblables a des vapeurs rougeStres, s'etendaient et se groupaient de tous cotes. Pendant une journee, la neige tomba du ciel a gros illocons ; et comme le vent continuait a souffler par in- tervalles, ces flocons tourbillonnaient dans Pair. Le lendemain , Wou-song , se levant avec le jour, alia marquerlesheures de service au poste de la prefecture. II n'e- tait pas encore de retour a midi. Wou-ta, vivement press^ par Kin-lien, sortit a son tour pour vendre des gliteaux. Or, la jeune femme, qui, ce jour-la, avait charge sa voisine, madameWang, de lui acheter des provisions, entra, des qu'ellese vit seule, dans la chambre de son beau-frere, et alluma du feu; puis, reflechissant , elle se dit au fond du coeur : « D^cidement je veux aujour- d'hui lui fai re quelques avances , quel- ques agaceries. Non , je ne puis croire qu'uii tel homme demeure froid et in- sensible. » Et se placant derriere le treillis de la porte, im'mobile, pensive mais pleined'espoir, elle attendit. Lors- qu'elle vit revenir Wou-song, qui fou- lait aux pieds les flocons de neige, elle souleva le treillis, prit un air souriant, et marchant a sa rencontre : « Mon beau-frere , s'ecria-t-elle, com- me le froid est vif ! Ah ! je souffrais pour vous. — « Je remercie , ma belle-socur de I'int^r^t qu'elle me porte, repondit Wou-song en entrant ; et, sans souffrir que la jeune femme le debarrass.1t de son chapeau de feutre a larges bords , il I'accrocha lui-m^mea la muraille, apres I'avoir secoue pour en faire tomber la neige; il delia sa ceinture, a laquelle pendaitun sachet, quitta sa premiere robe , espece de casaque en damas verr, dont la forme rappelait le pluvial des bonzes et sur laquelle figurait un per- roquet gris; puis il p^Mietra dans la chambre. — « Je vous ai attendu debout toute la matinee, mon beau-frere, dit alors Kin-lien; pourquoi n'^tes-vous pas re- venu dejeuner? — « C'est qu'a la prefecture , repon- dit Wou-song, une personne de ma con- naissance m'a invite a prendre quelque chose. A I'arrivee d'un troisieme con- vive, je me suis retire par discretion , etj'ai marche sans m'arr^ter jusqu'ici. — « En ce cas , mon beau-frere, ap- prochez-vous done du feu. — « Bien , bien , dit le major de la garde. » Alors il ota ses bottines de cuir, changed de has, mit des ponloufles d'hiver, prit un tabouret et s'assit pres du foyer. Pendant ce temps, la jeune femme avait ferme la premiere porte au verrou et mis la barre a la seconde; elle np- portait du vin, des legumes, des fruits, et preparait la table dans la chambre de Wou-song. « Oil done est alle mon frere? de- manda enfin celui-ci. Comment n'est-il pas rentre? — « II sort ainsi tous les jours pour vaquer a ses affaires. Qu'importe? Bu- vous ensemble quelques tasses. — « 11 vaut mieux attendre que mon frere soit de retour. — « Pourquoi done? pourquoi? On ne pent pas I'attendre, s'ecria Kin-lien, qui servait deja du vin chaud. CHINE MODERNE. 549 — « Gardez cela pour mon frere, dit Wou-song. » Kin-lien n'insista pas davantage; elle prit un tabouret, et vint s'asseoir pres de Wou-song. A cote d'eux etait une table , et s«r cette table un grand vase pleiu. Obligee de renoncer au viu chaud, Kin-lien se rejeta sur le vin froid. Elle einplit une tasse , I'dleva avec la main, et regardant fixement son beau-frere : « Videz au nioins celle-ci, lui dit-elle. » II obeit, et la vida d'un trait. La rigueur du froid devint un pretexte pour en verser une seconde , et Wou-song ne put se dispenser d'en offrir une a son tour. La jeune femme avait accepte avec empressement. Bientot elle trouva nioyen de laisser entrevoir sa gorge, qui etait blanche comme le lait; elle fit rouler les tresses de ses cheveux, qui Tenveloppaient a denii comme un epais nuage; puis d'un ton plein de gaiete : « II y a de sottes gens qui diseiit que mon beau-frere enlretient une musi- cienne dans la rue de I'Est , vis-a-vis riiotel du gouvenieur. Que faut-il pen- ser de ces propos.' — '<■ Ma belle-soeur, ne pretez pas I'oreille aux bavardages du monde. Je ne suis pas un honime de cette espece. — ft Oh ! pure medisance, n'est-ce pas ? Mais quand on aime, on ne dit pas tout ce qu'on ressent au fond du cceur. — « Si vous ne croyez pas a ma sin- cerite, vous n'avez qu'a interroger mon frere. — «Lui! est-ce qu'il salt quelque chose? S'il se connaissait a ces sortes d'affaires, il ne vendrait pas des ga- teaux. Mon beau-frere, buvez encore une tasse. » Kin-lien versa successivement trois ou quatre tasses; mais comme elle en avait deja pris plusieurs , les fumees du vin commencerent a lui troubler les sens. Son agitation etait extreme; alors il lui echappa cent discours hardis, niille propos lascifs. Cependant Wou- song, uniquement attache a ses de- voirs, baissait la tete et demeurait inac- cessible au sentiment de la volupte. Kin-lien se leva, et rapporta bientot dans un grand vase le vin qu'elle avait fait chauffer; puis, demandant a son beau-frere s'il n'etait pas trop legere- ment vetu pour la temperature, elle passa les doigts sur ses epaules et sur tout son corps , comme pour s'en as- surer. La chastete de Wou-song souf- frait beaucoup; il paraissait triste et ne repondait rien. Alors Kin-lien, re- levant les manches de sa robe^ saisit quelque menu bois, et se prit a dire: « Mon beau-frere, vous ne savez pas faire le feu. Je vaism'en charger pour vous. » Wou-song etait decontenance; il gar- dait le silence. Kin-lien s'abandonne a sa passion, qui etait ardente comme la flamme. Elle ne voit pas I'embarras de Wou-song ; elle verse encore une tasse, y trempe ses levres; puis, avec ce re- gard expressif particulier aux femmes libertines : « Si vous savez aimer, lui dit-elle, vous acheverez ceci. » Wou- song etend la main et prend la tasse , mais c'est pour la renverser par terre et s'ecrier : « Ma belle-soeur, vous fou- lez aux pieds toutes les bienseances. » Puis il la repousse, et, la regardant d'un ceil severe , il continue : « Votre beau-frere est un homme qui a des che- veux sur la tete et des dents dans la bouche ; mais il est si grand , si grand , qu'il louche a la vodte du ciel. II n'ap- partient pas a la race des chiens et des pores , qui sont depourvus de raison et ne connaissent ni la justice ni la pudeur. Ma belle-soeur, gardez-vous d'agir de la sorte. Autrement, quoique mes ycux reconnussent toujours qui vous6tes, mes poings pourraient bien I'oublier. » A ces paroles , Kin-lien de- vint rouge jusque dans le blanc des yeiix. « Je voulais plaisanter, dit-eile; vous interpretez mal les choses et vous calomniez les intentions. -• Elle se leva, prit le plateau, et descendit dans la cuisine. Mais tandis que Wou-song, reste seul, sentait accroitre son indignation, Wou- ta frappait a la porte, que sa femme lui ouvrait avec empressement. II ren- tre, decharge son fardeau, penetre dans la cuisine, et voit les yeux de Kin-lien rouges de larmes. n Encore une altercation ! et avec aui avez-vous eu des paroles? deman- a-t-il. — « Tout cela vient de votre fai- blesse, et de ce que vous ne savez pas vous respecter. On m'insulte. < — ■ « Eh! qui done a ose vous insulter?. siiQ 1,'UNIVERS. ■ — « Qui ? Votre miserable frere. Coin- me il venait de reiitrer, pendant que la neige tombait en aboiiaajice, je me suis empressee d apporler du vin et je Tai invite a boire; mais lui , voyant que nous etions seuls, s'est mis a te- ij'ir des propos d'amoiir, et a voulu se divcrtir pvec moi. , — « Mom frere n'est pas un homme d'un tei caractere, repartit Wou-ta; il a toiypurs ete hounete et vertueux. Gardez-vous de repeter tout liaut ce que vous venez de dire, car les voisins se moqueraicnt de vous. » A ces mots, il quitta sa femme pour 8e rendre dans la chambre ae son frere, auquel il proposa de dejeuner. Wou- song reflecliit quelques minutes; puis, au lieu de repondre , il ota ses pantou- fles de sole ouatee, remit ses bottines de cuir, attacha sa ceinture autour de ges reins, et, coiffe de son chnpeau de feutre a larges bords, il sortit de la maison, ^Vou-la eut beau crier : « Ou allez-vous , mon frere ? » celui-ci s'e- loigna sans proferer une parole. Alors Wou-ta revint dans la cuisine et interrogea sa femme. « Je I'ai ap- pele, dit-il; mais, sans repondre un mot, il a pris le cbemin de la prefec- ture. En vcrite, j'i^nore la cause de tout ceci. — n le plus stupide des etres ! s'e- cria Kiulien ; la cause est-elie done bien difficile a trouver.' Ce vaurien , tout honteux de lui-meme, nose plus sou- tenir vos regards. Enfin , puisqu'il est parti , je m'oppose, pour mn part, a ce qu'il revienne dans notre maison, — « I\lais s'ii va demeurer ailleurs, chacun parlera de nous. — « Homme absurde , demon affa- me! S'il m'avait seduite, ne parlerait- on pas da vantage? Rappelez-le, si vous voulez: quant a moi , je ue puis souf- frir un parcil bomme. Au surplus, donnez-moi un acte de divorce ; vous vivrez seul avec lui ! » Le mari ne trouvait plus rien a repon- dre, el Kin-lien continuait a I'exciter centre Wou-song. « On dirait partout, repetait-elle, que nous sommes entrele- nus par votre irere, le major de lu garde, tandis que c'est lui qui nous gruge. Re- inerciezlecieleila terredeson depart. » Sur ces enlrefaites, Wou-song, ac- compagrie d'un soldat de la prefecture, revint nour chercher ses valises, et sor- tit de la maison tout aussitot. Wbu-ta courut apres lui, et se mit a crier: « l\[on frere ! mon frere ! pourqiioi nous \j quittez-vous ? « — « Ah! cessez de m'interroger, re- pondit Wou-song; si je parlais, je bri- serais I'ecran que vous avez devant les yeux. II vaut mieiix que je me retire. » Or, on raconte que le gouverneur du district se trouvait en possession de sa charge depuis plus de deux ans et demi. Comme il etait grand concussionnaire, et avait recu beaucoup dor et cl'argent a titre de c'adenux, il desirait en envoyer une partie a ses parents dans la capi- tale de Test. II fit oppeler Wou-song au tribunal, et lui dit : « j'ai unde mes proches qui habile la ville de Tong-king. Je voudrais lui faire parvenir une caisse avec une lettre ; mais les routes sont dangereuses ; il faudrait pour une telle commission un hoanne sQr et d'un courage a toute epreuve. Parlez-moi avec franchise : seriez-vous dispose a faire pour moi le voyage de la capitale, sans redouter la fatigue ni les perils ? — « Je vous dois une grande recon- naissance, repondit Wou-song; vous^tes mon protecteur ; vous m'avez eievci au poste que j'occupe: comment oserais-je refuser? Puisque je recois un temoi- gnage si honorable de votre confiance, vos ordres seront executes sans retard. Des demain, je prends des informations sur mon voyage. » Le gouverneur, trans- porte de joie, lui versa trois lasses de vin. Mais nous ne sommes pas a la fin de rhistoire. On raconte que Wou-song, apres avoir accepte la proposition du gouverneur, redescendit dans le poste, et remit quelques taels d'argent a un soldat, auquel il ordonna d'acheter des provisions de bouche; puis, sedirigeant avec lui vers la rue des Amethystes , il arriva tout droit a la maison de Wou-ta. Justement celui-ci venait de renlrer.... Le temps n'avait pas entierement ralme la passion de la jeune femme. Voyant que Wou-song apportait des provisions de loute espece. Kin-lien, rellechissant, se dit au fond du coeur : « Esl-ce que par hasard ce vaurien pen- CHiPf^ M6MKNE. Ui Serait a moi maintenant? Oui, je n'en doute plus, le voila qui revient!... Mais c'est uii homme calme; il ne voudra pas employer la violence. Oh ! il faut que je I'amene tout doucement a una conversation particuliere. » EUe monta dans sa chambre , egalisa le fard sur ses deux joues , ajusta de nouveau ies noeuds de son epaisse chevelure, et quitta la robe qu'elle portait, pour en mettre une autre d'une grande beaute. Alors seulement elle redescendit, et saluant son beau-frere : « En verite, lui dit-elle d'uu air souriant, je ne sais ce qui vous amene ici. Que de moments se sont ecoules depuis que je ne vous ni vu, et sans que je puisse comprendre la cause d'un pareil eloignement ! Chaque jour je disais a votre frere : Allez done a la prefecture; causez avec le major; t^- cbez de le ramener; mais chaque jour il repondait que cela n'etait pas neces- saire. Enfin je me rejouis de votre re- tour; mais pourquoi prodiguer de I'ar- gent sans motif? — « J'aurais a vous entretenir, re- pondit Wou-song. Je suis venu tout expres pour donner quelquesavis a mon frere et a ma belle-socur. — « Puisqu'il en est ainsi , allons nous asseoir, » repliqua Kin-lien. lis monterent tous trois dans le pavilion (la chambre). Wou-song ceda Ies pla- ces d'honneur; il prit un tabouret et s'assit au milieu de la table, ou des mets furent bientot servis par le soldat qui Ies avait prepares. Kin-lien ne son- geait qu'a lancer des ceillades amou- reuses a Wou-song ; Wou-song ne pen- sait qu'a bien boire. Aussi ne fut-ce qu'apres avoir fait remplir cinq fois Ies tasses, que , se tournant vers son frere, il lui adressa ces paroles : « Mon frere aine, salut. Aujourd'hui le gouverneur me conGe une mission honorable, et je vous annonce que des demain je me mets en route pour la capitale de Test. Dans deux mois au plus tard, dans quarante ou cinquante jours au plus tot, je serai de retour; mais avant de partir, j'ai voulu causer un instant avec vous. » Apres avoir adresse quelques conseils a son frere , Wou-song remplit de nouveau sa tasse, et, se placant vis- a-vis de Kin-lien, il continua ainsi: « Ma belle-sceur est une personne d'un sens delicat et pur ; on n'a pas besoin de lui faire de longues recommanda- tions. Je compte entierement sur elle pour soutenir et defendre au besoin son epoux; elle sait d'ailleurs qu'il est plein dedroiture, animedes plus nobles sen- timents. Ma belle-sceur, si vous tenez votre maison comme elle doit I'Stre, pourquoi mon frere serait-il inquiet^ ? Vous connaissez cette maxime des an- ciens : « Quand I'enclos est bien ferme, Ies chiens n'y penetrent pas. » A ces mots, la jeune femme devient rouge jusqu'au fond des oreilles; elle fixe Ies yeux sur Wou-ta , et s'ecrie avec I'accent de la colere : « O etre stupide, immonde, si comme vous j'appartenais au sexe qui ne porte pas d'aiguilles sur la t^te, y aurait-il quelque part un hom- me assez hardi pour oser m'outrager? Oh ! c'est que je ne suis pas du carac- tere de ces femmes meticuleuses et sem- blables a la tortue , qui n'ose sortir de sa coquille. Depuis mon mariage, I'en- clos n'est-il pas soigneusement ferme? Oil voyez-vous que Ies chiens aient pu faire un trou a la haie? Allez, soyez tranquille : que Ton vous adresse iin mot injurieux , et je jette une tuile a la tete du premier qui s'en avisera ! » Wou-song se mit a sourire. « Que ma belle-soeur defende aussi vaillam- ment Ies droits de mon frere , ajouta- t-il, je le souhaite, et tout sera pour le mieux. » .... Apres la vigoureuse sortie de Kin-lien contre son mari, Ies deux fre- res burent encore quelques tasses ; puis Wou-song salua pour prendre conge, Wou-ta, la voix alteree par des pleurs, I'accompagna jusqu'a la porte, en le suppliant de revenir le trouver aussitot qu'il serait de retour. Wou-song, qui vit ses yeux pleins de larmes, le pria de renoncer pour ce jour-la au com- merce, et promit de lui envoyer toutes Ies provisions necessaires. Enfin, au moment de s'eloigner, il repeta de nou- veau : « Mon frere, souvenez-vous bien de mes conseils. » Puis il alia termmer ses derniers preparatifs , et se mit en route dans une voiture que le gouver- neur avait fail disposer pour lui. S«l L'UNIVERS. Des conies el des nouvelles. S'il cxiste un genre de iitterature dans leguel les Cliinois ont particulierenient cxcelle, c'est le conte ou la nouvelle. Dans I'art de raconter, ils ont uue supe- rioritequi ne ineparait pas contestable. Les morceaiix de cette espece, observe ]\I. Abel Renmsat, generalement peu eten- dus, ne sduraient, sous le rapport de Tart, entrer en comparaison avec les grandes ronipositions des romanciers; mais si la contexture de la fable et la peinture des caracteres y sont ordinairement plus negligees, on y trouve en revanche une multiplifite d'incidents et de details propres a soutenir I'attention, et a faire de plus en plus connaitre I'interieur de la vie |)rivee et les habitudes douiesti- ques dans les conditious inferieures de la societe (*). Le recueil intitule : Kin-kou-ki- kouan , dont la Bibliotheque nationale possede plusjeurs exemplaires, contient quarante nouvelles, sur lesquelles seize ont ete traduites par le P. Dentrecolles, MM. Davis, Stanislas Julieu, Theodore Pavie, et Robert Thorn; ce sont : I" L'lltroisme de la piete jUiale ; 2" Les Tendi'es Epoux; 3" L'Ombre dans I'eau; A° Les Tro'is Freres; 5° Le Crime puni; 6° La Calomnie demasquee; . 7° L'llistoire de Fan-hi-tcheou; 8" Les Trois Etages consacres; U* Les Deux Jumelles; 1 0" La Matrone dii pays de Song ; 11° La Peinture mysterieuse ; Vi" Les Deux Er^res de sexe diffe- rent ; 13° Les Plioines ; 14° Le Poete Li-thai-pe; 15° Le Luth brise; 16° Le liessentiment de fVang-kiao- louen. L'tlerolsrne de la piete filiate a ete inst're dans le recueil de M. Abel Re- nmsat. « Le sujet en est bizarre pour des Europecns, dit le savant ediieur, et il faijt s'etre bien penetre des idees chinoises pour en apprecier le merite. Une femnie exposee pendant plusieurs (•) CuiUcs cliinois, piiblies par M. Abel H(*mu.sat, I. I"', uvant-propos, p. vr. annees a d'odieuses persecutions, sans jamais perdre de vue la vengeance qu'elle doit a ses parents, et, des qu'elle I'a obtenue , quiltant sans regret la vie qu'elle ne supportait que par devoir, est aux yeux des Chinois un niodele d'be- roisme et I'exemple de la piete filiale. On ne voudrait pas chez nous que le crime et le chatiiuent de Sextus ftissent separes par un aussi long intervalle. La nouvelle qui retrace cet etrange de- vouement offre encore une autre sin- gularite. Elle avait ete mise en latin par un Chinois, disciple de quelqu'un de nos niissionuaires, et nomme Abel Yan. Ce traducteur, d'une espece nou- velle, n'avait fait que de mediocres pro- gres dans la connaissance du rudiment. .. II n'est pas bien etonnant qu'un Chinois sache mal le latin; ce qui est plus siu- gulier, c'est que celui-ci n'entendait qu'imparfaitement sa propre laiigue , ainsi qu'on s'en est convaincu en coni- parani avec le texte plusieurs passages de sa traduction. M. Stanislas Julien a revu cette traduction tout entiere, et se Test en quelque sorte appropriee par les ameliorations sans nombre qu'il y a faites. II a lui-meme mis en francais plusieurs autres compositions de' ce genre M. Stanislas Julien a revu de la nieme maniere les traductions du P. d'Entrecolles. Elles avaient ete faites assez legerement pour avoir besoin d'etre verifiees en beaucoup d'endroits. Le style de ces petites narrations est pourtant en general tres-clair, prive d'ornements, et par consequent exempt de difficultes. Mais apparemment le missionnaire ii'y avait pas attache d'im- portance; sa plume savanteaurait rendu plus fidelement les maximes de Confu- cius que certains passages de la Matrone de Song. Ce dernier conte, le plus pi- quant (ie ceux que d'Entrecolles a tra- (Jnits, est une preuve que les Chinois ont connu ces fables milesieiuies dont il faisait partie, et qui ont couru le monde. C'est la supposition la plus na- turelle qu'on puisse faire; car comment imaginer qu'un second modele ait pu fournir, au bout de I'Asie, I'aventure sur lequel est fonde ce recit satirique ? II est curieux d'examiner la maniere dont I'auteur chinois sy est pris pour CHINE MODERNE. 553 accomnioder ce sujet aux inoeurs de son pays. L'ideedel'eventail, I'indignation de la fenime de Tchouang-tseu a la pensee d'une iegerete, comme celle de la premiere veuve, sont des traits de genie que Voltaire n'a pas dedaigne d'eraprunter au conteur ehinois, etdont celui-ci n'etait pas redevabie aux pre- miers iiiventeurs. Le denoument de la Matrone de Song est d'une rare extra- vagance. Ceuxdes autres nouvelles, en general, en sont la partie faible. C'est que I'itiee ingenieuse qui se presente a un auteur, et les developpements agrea- bles qu'il sait y donner, ne ie soutien- uent pas toujoiirs jusqu'au bout, etque s'il y a mille moyens varies pour for- mer une intrigue, il n'y en a qu'ua tres- petit nombre pour la denouer. Moliere, dans son chef-d'oeuvre , nous fournifc la preuve de cette diiticulte, qui na pas ete completenient eludee dans les Deux Jumelles, les Tendres Epoux, I'Ombre dans I'eau, et dans d'autres nouvelles dont le sujet est gracieux , mais dont la terminaison laisse quelque chose a desirer (*). Les deux nouvelles traduites par M. Davis sont I'Ombre dans Peau et les Deux Jumelles. Le sujet de la pre- miere offre quelque analogic avcc celui de Pyrame et Thlsbe comme M. Davis I'indique par une citation d'Ovide ; mais il n'oifre point de catastrophe fu- neste. L'idee primitive en estgracieuse. Deux honmies de caracteres opposes ont epouse deux soeurs, et habitent en coni- mun la menie maison. Peu a pen, par suite de leur difference d'humeur, leur amitie s'altere; ils s'eloignent I'un de I'aulre, ils (inissent par ne plus pouvoir vivre ensemble. La maison est vaste, on la partage en deux ; le jardin est etendu , on le coupe par un mur tres- eleve. Dans le milieu etait une piece d'eau , aux deux bords de laquelle on avait construit deux pavilions d'ete. On ne pent pousser le mur a travers la piece d'eau , parce qu'elle est trop pro- londe , mais on y eleve une arche de pont qui intercepte la vue directe d'un pavilion a I'autre. La separation est complete; il n'y a plus aucune commu- nication entre les deux families. Mais {*) Contes ehinois, avant-propos, p. v a x. I'un de ces hommes avait un fils, et I'autre une fdle : ils etaient a peu pres du meme age, et si ressemblants I'un a I'autre qu'on les eut pris pour deux enipreintes du meme cachet. Dans leur eutance, avant la brouillerie de leurs parents, ils etaient toujours ensem- ble, et quand ils etaient portes sur le dos de leurs nourrices, on n'edt pu distinguer quel etait le jaspe et quelle etait la perle; mais d'epuis ils n'avaient plus eu d'occasion de se voir. Le jeune homme avait ete mal recu dans la maison de sa tame, quand il s'y etait presente ; la jeune (iile ne pouvait jneme songer a rendre visite aux pa- rents de son ancien compagnon d"en- fance. lis avaieut pourtant conserve le souvenir de leurs premieres annees, et la curiosite de voir si leur ressemblance etait aussi parfaite qu'on le disait. Un jour d'ete , par un temps d'une chaleur excessive, tous deux prenaient le frais par hasard dans les deux pavilions, tous deux avaient en meme temps les yeux sur la piece d'eau. lis aperroivent tous deux au meme instant une figure reflechie a la surface de I'eau , et cba- cun d'eux ia prend pour la sienne pro- pre. Cette erreur dure peu; elleest dis- sipee par une piece de poesie que le jeune homme jette dans le bassin. Cette piece est recueillie par la jeune llile, qui y repond aussi par des vers. Une feuilie de lotus sert d'intermediaire a cette correspondance. La connaissance est faite, mais I'union des Jeunes gens est retardee par les preventions et I'obsti- nalion des parents, que cependant un ami comraun parvient a lever, mais par des moyens si compliques et si peu natu- rels, que beaucoup.de developpements seraient necessaires pour les rendre supportables. « Dans les Deux Jumelles, il y a moius de details agreables, mais plus de traits caracteristiques et de singula- rites morales. Un homme et une femme de mauvais caractere, vivant mal ensem- ble et toujours en opposition I'un avec i'autre, ne peiivent s'entendre sur le mariage de deux lilies belles, douces, semblables a deux fleurs brillantes de rosee, ou aux herbes odoranles agitees par la brise. Le mari pretend disposer d'elles ^ son gre, et la femme soutient 654 i;UNIVEt(S. que c'est a une mere h marier ses filles. Chaciin d'eiix a fait clioix de doux gen- dres. et I'effet suivant de pres la menace, qtintre charges de presents de uoces, prelitninaires indispensables d'lin ma- ringe cliinois, sont apportees au meme instant dans la maison. Le pere chasse les porteurs envoyes par les proteges de sa femme; celle-ci jette an loin les presents recus par son niari. I.e debat parait interhiinable; ilest porte devant le magistral, que la loi charge en pareil cas de prononcer sur les dem^Ies des parents. Le magistral est un homme integre et eclaire ; il s'arr^te pen aux allega- tions dn pere et de la mere, et veut con- suiter les lilies. II les mande devant lui,et les ayant fait mettre a genoux au pied de sou tribunal, il les dis- pense de s'expliquer de vive voix , et les engage, pour faire connaltre les objets de leur preference , a tourner la tete ou bien du cote droit, oij sont les deux pretendus choisis par leur mere, ou du cote gauche , oil Ton a fait placer les deux gendres recommandes par le pere. Mais tous quatre sont ^galement laids, depourvus d'agrements queiconques. Les deux jeunes filles se taisent, bais- sent les yeux , et s'obstinent a garder leur position, sans sedetournerni d'un c6le ni de I'autre. Le magistral enlend ce langage; il renvoie les quatre gendres, et, ne pou- vant accorder les parents des deux jeu- nes filles, il s'avise, pour les marier lui- mcme, d'un expedient qui. partoul ail- leurs qu'a la Chine, paraitrait plus que bizarre : c'est de les mettre au concours. II ouvre un examen extraordinaire, et annonce que les deux lettres qui feronl les meilleures compositions sur un sujet donne obtiendront la main des deux jeunes filles. On sail que ce moyen de discerner les hommes de merite est en usage a la Chine pour tout ce qui tient aux charges et aux promotions; mais il ne doit pas etre inoui de le voir employe pour les mariages, car il en est aussi question dans d'autres romans. A Tissue de I'examen , un seul homme a traitd convenablemcnt le theme pro- pose, et eel homme refuse de se marier, sous pr^tcxte que le ciel I'a condamne au c^libat. II a dejJi , dit-il , et^ la cause innocente dfe la morl de six femmes. Chacune de celles qu'il a ^pousees est morte victime de cette espece de sort, eties aslrologuess'accordenta lui assu- rer qu'il portera loujours malheur awne femme. « Cela pent etre, repond le ma- gistral ; mais ici vous ne porterez pas mallieur a ?me femme, car vous en au- rez deux. » Par cet argument irresis- tible, il I'oblige a epouser les deux ju- melles. Cette querelle de menage, cette intervention du magistral dans des af- faires domestiques, ce mariage soumis aux chances d'un concours public, I'ex- pedient bizarre du juge pour eviler Tef- fet funeste de I'ascendaiit des aslres, tout cela compose un ensemble si (Stran- ge, si eloigne a tous ^gards de noire maniere de voir, que je n'ai pu m'em- p^cher d'en donner une idee suc- cincte (*). HISTOIBE NATURELLE. Mineraux de la Chine. « La mineralogie de la Chine est fort peu conuue, a dit un orientaliste tres- verse dans les sciences naturelies (feu M. ildouard Biol); quelques notions sur ce sujet inleressanl se trouvenl eparses dans les Memoires des mission- naires, dans V Atlas sinensis Ae y\3xX'\n\ et dans la Description generate de la Chine par Duhalde, qui , a eel ^gard , n'a fait qu'abreger le lexle de Martini. Plus recemment, les savants attaches aux ambassades anglaises des lords Ma- cartney et Amherst, y out ajoute quel- ques observations rapidement faites sur la route, dont ils ne pouvaient s'ecar- ter ; on les trouve reunies dans les re- lations de Barrow, de Staunton, d'Abel, et dans le troisieme volume de la com- pilation sur la Chine ('"), qui fait partie de V Edinburgh cabinet library. « Suivant M. Abel Remusat, il n'v a pas de mineraux qu'on ne puisse s al- tendre a voir sortir de la Chine. L'or et I'argent se trouvenl dans les provm- ces du sud et de I'ouest. L'ile ae Hai- nan possede plusieurs mines d'or, et le (*) Abel Remusat, Melanges asialiqiies, t. II, p. 339 a 343. (**) Journal asiatique, cabierdesepterobre 1839, article de M. Edoiiard Biot. CHINE MODERNE. 655 fleuve Kln-cha tire son nom des par- celles de ce metal qu'il roule dans ses eaux. Le fer, le plorab et le cuivre sont extremement communs. Plusieurs allia- ges naturels ou factices de cuivre et de zinc, de zinc et d'etain, de pionib et d'etain, viennent de diverses iocalites dans I'interieur de la Cliine. Le mer- cure natif et sulfure s'y trouve en abon- dance. On y recueiile du lazulithe, ie quartz, le rubis, peut-^tre aussi I'eine- raude, le corindon, la pierre ollaire, qui sert a faire des vases et particuliere- ment des ecritoires, la steatite, qu'on taille en ornements et en figurines, diverses espeees de schistes, de roche corneenne et de serpentine, dont on fabrique des instruments de niusique. Lejade, si celebre sous le nam de Yn, se trouve aussi a Tai-thong dans le Chan-si ; mais la plus grande partie de cette pierre si estimee des Chinois vient de Khotan, et est apportee de Tartarie par les Boukhares (*). M. Abel Remusat a place a la suite de son llistoire de la ville de Khotan une dissertation sur cette pierre celebre que les Chinois nomment } w, et qui est, dit- il, la production la plus reinarquable de ce pays. Cette dissertation , conipo- see a Toccasion d'une discussion qui s'etait clevee dans le sein de I'Acade- mie, est une nionographie complete, oij I'auteur a repris, pour tScher de les eclaircir, les nombreux passages des li- vres chinois qui parlent de cette subs- tance minerale(**). Des mineraux cfiinois appartenant a la collec- tion du Museum d'ltistoire naturelle (***). « La galerie mineralogique du Jardin duRoi possede, depuis foct longtemps, (*) Voy. les Nouveaiix Melanges asiati- ques de M. Abel Remusat, t. I'^'', p. i8. (**) Yoyez I'Hisloire de la ville de Khotan, tiree des Anuales de la Chine, et tiaduite du chinois ; suivie de recherches siir la subs- tance minerale appelee par les Chinois pierre de yu, et sur le jaspe des ancieas ; Paris, 1820. (***) Cetle notice est emprunlee au Jour- nal asiatiqiie, cahier de septembre 1839. EUe est interessante , et montre que son re- grettable auteur, feu M. fidouard Biot , ne negligeait aucune occasion d'eludier la nii- heralosie chinoise. environ quatre-vingts ecbantillons de mineraux de Chine, renfermes dans des bocaux ou des boltes avecdes etiquettes portant leurs noms, ecrits tantot en caracteres chinois, taiitdt simplement en caracteres romains. L'epoque oti ces mineraux ont ete deposes dans cette collection n'est pas parfaitement cer- taine; cependant M. Ad. de Jussieu, doht la lamille s'est perpetuee dans I'administration du Jardin du Roi ; presume qu'ils ont ete rapportes ou en- voyes a son grand-pere par un medc- cin du dernier siecle, nomme Vander- monde, qui se rendit en 1720 a IMacao, y exerca la medecine pendant dix an- "nees, et revinten France vers 1731. Ce Vandermonde, dont on peut lire I'arti- cle dans la Biographie universelle pu- bliee par Michaud , a laisse un extrait manuscrit de la partie mineralogique et botanique du Pen-thsao. Les nonis places dans les bocaux se retrouvent dans cette partie du Penthsao , comme dans Textrait que M. de Jussieu a bien voulu mettre a ma disposition, et dont j'ai priscopie. II est done probable que ces quatre-vingts ecbantillons etaient annexes comme pieces de verification au manuscrit de Vandermonde. « M. Alexandre Brongniart a consa- cre plusieurs seances a identifier ces quatre-vingts ecbantillons avec les es- peees connucs. J'ai assiste a ce travail. J'ai note ses determinations aiiisi que les titres des etiquettes que j'ai pu de- chiffrer ; je les ai rapprocbes des noms de I'Encyclopedie et des determinations donnees" par M. Remusat Les determinations de M. Brongniart, rap- prochees des noms de I'Encyclopedie japoiiaise, meparaissent utiles a publier pour rectifier la table de M. Remusat. Je n'ai pas pu me servir, dails le meme dessein. des ecbantillons deM. Caderill, car aucune etiquette chinoise n'y est jointe. M. Constant Prevost, averti par M. Stanislas Julien, a dei)uis ecrit a M. Caderill de joindre, aux ecbantillons qii'il pouvait adresser, leurs noms chi- nois ; mais aucun nouvel envoi n'a et6 adresse jusqu'ici par ce savant nvissioil- naire. K Jevais rapportevles noms des espe- ees minerales reconnues par M. Bron- gniart, et jejoindrai |i chacune les noms 55G L'UNIVERS. chinois indiques par les etiquettes. Je noterai a cote la page du livre de I'En- cvclopedie japonaise ou se lisent oes monies noms, et au moyen de cette in- dication , on retrouvera facilement les articles coirespoiidants dans les diver- ses editions du Pen-thsao. Je donnerai un extrait du texte, lorsqu'il pourra oflrir qiielque inter^t. « Cliaque bocal examine a recu ua numero ; inais comnie ces numeros ne suiveut pas un classement scienti(ique, etqu'ils seront necessairement changes, je crois inutile de les rappeler. « Deux bocaux conliennentdes echan- tillons de cristal de roclie. Le premier est un quartz hyalin limpide. L'eti- quette qui s'y trouve jointe porte : Pe- chi-yng, ou cristal blanc. Ce meme nom se lit pages 7, 8, livre LX de I'Ency- clopedie japonaise. Le texte cite du Pen-thsao dit que les morceaux pre- cieux de cette espece de pierre sont longs de deux a trois thsuii (six a neuf centimetres), qu'ils ont six faces, et que si on frotte leur surface, elle parait limpide et brillante. La figure jointe au texte rcpresente des prismes a section hexagonale. L'un d'eux est termine par des plans perpendiculaires a I'axe ; un autre se termine par deux pyrami- des u six pans. Le texte ne dit pas que Ton s'en serve pour faire des lunettes ou des besides comme on en trouve a Canton et dans les autres villes chinoi- ses. L'editeur japonais cite cet emploi du cristal de roche a I'article Choui- thsing, nom qui designe le cristal de roche limpide, etil ditegalementa Parti- cle Siao-tseu, verre, qu'on fait avec cette matiere des yen-king ou lunettes, aussi bonnesquecellesdechoui-thsing. L'edi- tion japonaise est de 1715. Le second echantillon est un quatz hyalin enfume. (Miiieralogie de Brongniart, 1. 1, p. 280.) Le bocal contient I'etiquette Tse-chi- yng^ ou cristal bleu^tre. Ce meme nom se lit p. 7 v, liv. LX de I'Encvclopedie japonaise. Le t(Xte du Pen-thsao dit que cespierres sont dediverses dimen- sions, toutes a cinq angles, et a deux extremites en fer de fleche. Cependant un des morceaux representes dans la ligure est de forme hexagonale, et il faut tres-vraisemblablemeut lire six angles au lieu de cinq angles. La lorme la plus ordinaire du quartz cristallise est en effet celle d'un prisme a six pans,et ces prismes sont termines de chaque cote par une pyramide a six faces. (Miiieralogie de Brongniart, t. I, p. 272.) Cette forme est exacte- ment celle d'une des pierres pe-chi-yng, representees dans la figure de Particle precedent. ( Encyclopedie japonaise , liv. LX, p. 7 v.) « A Particle Tse-chi-yng , le texte du Pen-thsao rapporte que cette pierre, plongce dans I'eau chaude, perd sou eclat; qu'elle estsemblable au cristal de roche {clioui-thsing) ; que seulement sa couleur est bleu^tre. L'auteur japonais dit en note que ce nom de tse-chi- yng est donne a beaucoup de pierres dont la forme n'est pas semblable a celle que decrit le Pen-thsao; elles ont seulement toutes la couleur bleuatre. « M. Remusat a traduit, dans sa ta- ble, pe-chi-yng par cristal de roche, ce qui est exact. II a traduit tse-chi- yng par amethyste. L'amethyste est un quartz colore en bleu; onpeutajou- ter : « et quartz hyalin enfume. » « 1! y a quatre echantillons qui se rapportent aux especes dites amphi- bole actinote et grammatite fibreuse. Le premier estl'amphibole actinote; il est joint a I'etiquette yn-tsitigchi, pierre curieuse du principe inerte ; ce nom se lit (Encyclopedie japonaise, liv, LXi, p. 31) parmi les noms en pe- tits caracteres. Le second a I'etiquette pesang-chi, pierre de mouton blanc ; ce nom se lit (Encyclopedie japonaise, liv. LXI, p. 18 v°) parmi les noms en petits caracteres. Le quatrieme a I'eti- quette yang-ki-chi, comme le second echantillon. « Les second ettroisieme echantillons sont identiques. lis correspondent a I'espece appelee woUastonite, Dans la table de M. de Remusat, on lit zeolithe pour Particle correspondant a la desi- gnation yang-ki-chi. D.ms cet article, le Pen-thsao dit que cette pierre yang- ki se trouve sur une montagne noni- mee Yang-ki dans le district de Tsi- tcheou, et que de la vient son nom. La figure represente des lames de forme triangulaire superposees irreguliere- ment. Le texte du Pen-thsao ne rap- porte, eu outre, que des fables sur la CHINE MODERNE. 557 maniere dont se forme cette pierre, et dit que, d'apres la croyance generale, la pierre yang-ki est le principe de la substance dite yim-mou ou mere des 7i?/a<7e.9.Jeparlerai plus loin deceterme, qui designe le talc ou le mica. « Le nom yn-tsing-chi de I'etiquette du premier echantillon se trouve place dans I'Encyclopedie japonaise a I'arti- cle Hien-ising-tchi, pierre curieuse noi- rAtre. La figure represente des cris- taux de forme hexagonaie, dont deux cotes sont plus longs que les autres. Suivant le texte du Pen-thsao, cette pierre se tire de Kiai-tcheoii (chan-si); sa forme est semblable a celle d'une ecaille de tortue, et sa couleur verte. Si on la frappe, elie se divise en frag- ments semblables a ceux d'un miroir, et ayant tous six angles, comme des feuil- les de saule. Si on la chauffe forte- ment, elle se divise en plaques sem- blables a des feuilles de saule et blan- cbes comme la neige. Ces indications me semblent pouvoir faire presumer que le texte parle de berils. II ajoute : Celles dont on se sert maintenant pro- viennent de Kiang-tcheou (Chan-si) ; ce sont des pierres rouges, et non des pier- res noiratres. D'apres cette indication de couleur rouge, celles-ci sont peut- ^tre des corindons. « Neuf echantillons se rapportent a I'espece des steatites , laquelie parait comprendre les divers mineraux appe- les par les Chinois graisse de pierre. « Le premier echantillon est une stea- tite blanche. « Le second est une steatite nuancee de rosStre et de violet. II a pour eti- quette kan-chi-tchi , graisse de pierre bleuatre. « Un troisieme est une steatite rou- geStre terreuse. II a pour etiquette kouang-chi-tchi , c'est-a-dire graisse de pierre.... Le premier earactere n'est pas bien lisible. Litteralement, il signiHe large , et indique tres-probablement que cet echantillon provient de la province de Kouang-tong ou de celle A&Kouang- si. « Un quatrieme echantillon est une steatite rosatre. II a pour etiquette tchi- chi-tchi, graisse de pierre rouge. Ce nom se lit a la page 9 v« du livre lxi de rEiicvclopedie japonaise. Le texte cite du Pen-thsao dit qu'il y a des grais- ses de pierre de cinq couleurs diffe- rentes; il cite I'espece rouge et I'espece blanche comme les principales. Cellesci sont employees pour Inter les joints des vases qui se placent sur le feu. Les autres especes, bleue, jaune, noire, ne sont pas aussi bonnes. « M. Remusat a ecrit : graisse de pierre, a Particle Tchi-chi-tchi ; il faut lire : steatite rosatre et autres. « Le cinquieme echantillon est une steatite blanche, un peu onctueuse, sem- blable au carbonate de magnesie. II a pour etiquette kouang-si-hoa-chi , pierre onctueuse du Kouang-si. « Le sixieme echantillon est une stea- tite blanche tres-onctueuse. II a pour etiquette sse-tchouen-hoa-chi , pierre onctueuse du Sse-tchouen. « Ce nom de hoa-chi se lit a la page 8, livre LXI de TEncyclopedie japonaise. Le Pen-thsao, cite' par TEncyclopedie, dit que le hoa-chi ou la pierre onctueuse se tire principalement du departement de Kouei-lin , capitale du Rouang-si , et qu'elle sert a peindre les maisons et a nettoyer le papier. L'editeur japonais I'indique comme utile pour eniever les taches d'huile, comme notre craie de Briancon. D'apres les observations du celebre missionnaire d'Entrecolles, rap- portees au tome II de Duhalde, p. 180 et 181, cette pierre onctueuse, dite hoa-chi, est tres-employee par les Chi- nois dans la fabrication de la porce- laine, et remplace le kao'lin. Cette application est recente, d'apres le P. d'Entrecolles, et ceci explique comment elle n'est mentionnee ni dans le texte du Pen-thsao, ni dans la Petite Ency- clopedic pratique intitulee Thieti-kong- khai-we. La steatite de CJornouailles, qui contient 14 pour cent d'alumine, est employee a Worcester dans la fabri- cation de la porcelaine. (Mineralogie de Brongniart, t. I", p. 497.) Les echan- tillons du Jardin du Roi montrant que la pierre hoa-chi est bien une steatite, il me semble qu'il serait utile de les analyser, et de tenter de nouveaux es- sais des steatites dans la fabrication de la porcelaine. « M. Remusat a traduit, dans sa ta- ble , hoa-chi par sorte de craie. II faut lire steatite. m t'UNIVERS. « Les septieme et liuitieme echan- tillons sont des steatites rosJitres, sans Etiquette. Ce sout evideintnent des tchi-cln-lchi. u Le dernier est uiie pagodite isa- belle aveo retirfuette thao-hoa-chi , pierre fleiir de pecher. << II y a deux echantillons d'argiles bolaires qui doivent suivre les steatites. Le premier est une argile bolaire rou- gefttre. II a pour etiquette ou-ssr-chi- tchi, graisse de pierre a cinq couleurs, avec rindieation qu'il provient du Sse- tchouen. Le second est uue argile bo- lairo, rougeatro et tendre. II a la ineme etiquette que le precedent, avec I'indi- catiou qu'il provient du Kouang-si. « Ce uom de graisse de pierres a cinq couleurs se rapporte evidemnient a I'ar- ticle de la page 9 v°, livre lxi , Ency- clo|)edie Japonaise. « 11 y a sept echantillons de mica. L'un est du mica argentin. L'etiquette porte les caracteres thong -hong-chi, litteraiement pierre de mine de cuivre. Un second est du mica a grandes la- mes , talqueux , verdiitre. L'etiquette ftorte les caracteres fang-hoatigchi, itteralement pierre brillante et ISche. Un troisieme est du mica metalloide laminaire, avec l'etiquette tsing-mong- chi, pierre de minerai bleuatre. Un quatriemeest du mica paillete, bronze, avec l'etiquette kin-mong-chi , pierre de minerai d'or ; et un cinquieme est du mica paillete jaune dore, avec l'eti- quette kin-sing-chi , pierre aux etoiles d'or. « Cette derniere denomination se lit a la page 25 du lxi* livre de I'Encyclo- pedie japonaise, et y designe des varie- ies de mica, comme M. Remusat a tra- duit dans sa table. La figure repre- sente du mica en feuilles, et le texte du Pen-thsao distingue, a cause de leur couleur, I'espece dite pierre aux etoiles d'or, et I'espece dite pierre aux etoiles d'argent. Toutes deux se tirent princi- palementde Hao-tcheou {flo-nan) et de Pien-tcheoH {Kiang-nan). « Les caracteres de la troisieme eti- quette, tsing-mong chi , se lisent a la page 26, livre i,xi de I'Encyclopedie japonaise. La figure represente deux sortes de plaques parsem^es de petits ronds. Le lexte du Pen-thsao distingue I'espece verte et I'espece blanche. II dit que si Ton prend celle qui est vert noi- rijtre et qu'on la frappe, on trouve a I'interieur des laches blanches comme ' des etoiles. M. Remusat a ecrit ser- ^ pentine pour le titrede cet article, qui parait correspondre a wn mica noi- ratre. « Le sixieme echantillon a ^te re- connu pour un mica laminaire, un peu nacre et transparent. II est joint a l'eti- quette yun-mou, litteraiement mere de nuages, et ce meme nom se lit 5 la page 54 du livre viii du Pen-thsao, et a la page 6 du lx* livre de I'Encyclo- pedie japonaise. Vandermonde a tra- duit ce nom par talc dans son extrait du Pen-tlisao. La table de M. Remusat porte nacre de perle. II me paraitrait que cette derniere interpretation doit fitre corrigee. « II y a encore deux echantillons de schiste coticule, cinq de stalactites, trois de chaux sulfatee, neuf qui se rappor- tent a I'espece fer, deux d'oxyde d'arse- nic , cinq de sulfure d'arsenic , etc., echantillons sur lesquels on trouve des renseignements dans la notice de M. fidouard Biot. « Le memoire de M. Remusat sur le Pen-thsao et sur quelques traites chinois d'histoire nntu- relle, dit en terminant le savant auteiir, montre qu'a la Chine les sciences natu- relles sont restees 5 I'etat rudimcn- taire, ainsi que les sciences mathema- tiques; et comme etude reeilement utile, on nedoity chercher que des faits isoles... En me bornant ici a la mine- ralogie,je rappellerai que les Chinois divisent les mineraux en trois classes, savoir : les metaux, les pierres precieu- ses, et les pierres de diverses especes. Parmi ces dernieres, une subdivision est faite pour les sels dans le Pen- thsao : elle comprend le sel commun et les sels vitrioliques ou fan... Ce classement est tel qu'il se feruit dans la boutique d'un marchand ; il est tout a fait commercial- » Tra'itement des mclaux ; precedes chinois. C'est encore ^ M. tdouard Biot que nous sonmies redevables de quelques details sur le trnilement des metaux a la Chine, sur la fabrication de la ceruse, de la litharge et des aluns, sur les pre* CHINE MODERNE. 65U parations mercurielles, etc. Void en grande partie le memoire qu'il a pu- blic, a ce si]jet, dans le Journal asiati- que (cahier d'aoilt 1 835) : Au seizieme siecle , le traitement des metaux, a la Chine, etait de la plus grande simplicite, comme on en pent juger d'.'ipres le Thien-kong-khai-we et I'Encyclopedie japonaise. P'apres ces ouvrages, Tor s'oblient principalement en le ramassant dans les rivieres, et en le debarrassant de sa gangue par des lavages. L'argent se retire, en majeure partie, de minerals, ou il se trouve melange avec le plomb. Le mineral lave est fondu dans un fourneau a vent. Ce four- neau a cinq pieds de haut , et pent con- tenir 240 livres chinoises, ou SfiO li- vres francaises environ. Le mineral s'y trouve mele avec du charbon de chS- taignier. On obtient ainsi une boule metalliquo, qui est refondue dans un autre fourneau en terre, ou le plomb se separe de l'argent, et forme le fond de la masse. On retire encore l'argent de sables argentiferes , qii'on nettoie par des lavages et que Ton fond avec du plomb. Les proportions indiquees sont deux de plomb pour un d'argent. On voit que le procede de la coupellation est depuis longtemps connu a la Chine. D'apres I'Encyclopedie japonaise et le Thien-kong-khai-we, le fer s'extrait a la Chine de minerais en grains ou terreux , ou de minerais en rognons, entre autres, de minerais magnetiques {tseu-chi, pierre d'aimant, nom carac- teristique des minerais magnetiques, comme M. Klaproth I'a remarque dans son memoire sur la boussole). Les mi- nerais se trouvent generalement pres- que a la superficie de la terre. On se contente d'ecrortter le sol avec une charrue, et on ramasse le mineral. On le lave, et on le traite dans des four- neaux bas qui liennent a peu pres 2,000 livres chinoises (environ L 100 ki- logrammes). On y m^le le mineral , tantdt avec du charbon de hois, tantdt avec (lu charbon de terre. Rien n'indi- que dans les ouvrages chinois que ce charbon de terre ait recu aucune pre- paration, comme celles qu'on lui fait subir dans nos usines a fer, oD on le transforme en coke avant de le jeter dans le haut-fourneau. Mais les four- neaux usites a la Chine etant tres-petits, et sembiables aux feux d'affiuage de la Catalogue, on concoit qu'on puisse y employer le charbon pur plus facile- ment que dans nos hauls- fourueaux, ou il ne donne pas assez de chaleur. Le vent se donne avec des caisses souf- flantes en hois, manoeuvrees par qua- tre a six hommes. Quand le mineral est fondu, on le coule, a la nianiere ordinaire, dans des monies de sable , si on veut avoir sim- plement du fer cru ou de la fonte ; mais si lion veut avoir du fer malleable, I'ope- ration se fait immediatement sur la fonte a sa sortie du fourneau. Pour cela, suivant le Thien-kong-khtii-we, « on creuse d'avance, dans la terre, un « espace rond de |)lusieurs pieds de « diametre et de qiielques pouces de « profondeur, a cote duquel on b«itit « un petit mur d'un pied ou deux. La « fonte coule dans cette espece de re- ft servoir, et de suite plusieurs hom- « mes, armes de batons de hois de pe- « cher, se placent sur le haut du mur; « la fonte sedesseche peu a peu, comme « la boue dans les eaux stagnantes ; il « se fait une poudre seche ; a ce nio- « ment un homme frappe dans ses « mains pour donner le signal de bat- « tre; les hommes aux batons remuent « fortement la matiere, et quand elle « s'enflamme, elle est devenue fer mal- « leable. Quand la matiere se refroidit, « il y en a qui la divisent en morceaux « Carres ; d'autres I'enlevent, la battent, « la remuent, et la roulent en barres « rondes qu'ils vendent ensuite. » Cette maniere de fabriquer le fer, toute grossiere qu'elle est, m'a paru assez curieuse par la ressemblance qu'elle presente avec le puddlage an- glais ou la methode de fabriquer le fer malleable a la houille, qui ne date en Europe que de cinquante a soixante ans. La description chinoise indique tres-bien le moment ou se forme la ma- tiere seche (le dr^j work, comme disent les Anglais), et dans lequel I'excedant de carbone se brule et la fonte passe a I'etat de fer. Mais le fer puddle a be- soin d'etre purilie par la pression de lourds marteaux et de cylindres lami- neurs ; et comme les Chfnois n'ont au- 560 L'UiNIVERS. cun de ces agents mpcnniques, leurfer est generalement tres-inaiivais, quoi- ?|u'ils excell<'nt dans les oiivra^es en onte. (Voyage de Macartney ; Voyage de Barrow.) I>es Chinois distinguent deux especes d'acier : Tacier naturel , qui s'obtient directement par la fusion de certains minerals ; et I'acier cuit, chii-kan. Pour obtenir celui-ci , on enveloppe un bar- reau de fonte ou d'acier nature! avec des lames minces de fer forg6, et Ton garnit d'argile I'extremite de chaque paquet. On chauffe le tout dans un fourneau a vent, et quand le barreau interieur commence a fondre, on retire le paquet et on le bat au marteau ; puis on le rechauffe et Ton rebat , jusqu'a ce que le tout soit bien soude ensem- ble, lis appelleat cet acier Vacier rond (touan-kan). L'explication est nialheii- reusement assez imparfaite. Quand ils emploient de I'acier naturel avec des barreaux de fer, le resultat correspond a ce que Ton appelie I'acier d'etoffe, qui est employ^ pour les i;ros instru- ments. L'emploi de la fonte indique ici ne reussit bien probablement qu'avec les minerals quidonnent facilementde I'acier naturel, et dont la fonte doit con- sequemment differer tres-peu de cet acier. Le cuivre s'extrait ordinairement, a la Chine , de minerals qui contiennent du plomb. On fond le mineral dans un fourneau a vent, au basduquel on perce deux trous a des hauteurs inegales. Le plomb surnasie sur le cuivre et coule par le trou superieur, tandis que le cui- vre coule par le trou d'en bas. Ce moyen est employe aussi en Europe pour operer la premiere separation dans les minerals ou le cuivre et le plomb sont mfiles. Mais les Chinois pa- raissent peu connaitre I'art difficile de bien rafGner le cuivre. Avec le cuivre est un mineral appele lou-kan chi, etqui estde la calamine ou de la blende. Les Chinois ont fait depuis longtempsdu laiton. Alors on emploie, suivant le Thienkong-khai-we, 6 11- vres de lou kan-cbi pour 10 livres de cuivre. Le Pen-thsao kang-mou , cit^ par rEncyclopedie japonaise , donne des proportions differentes, un de cui- vre et un de lou-kan-chi , pour produire un et demi de laiton. On fait aussi un alliage plus estime avec six de cuivre et quatre de zinc. Ce dornier metal , le zinc, est appele par les Chinois ija-yan, { . ou second plomb. D'apres rEncvclope- I die japonaise et le Thienkong-khai-we, le zinc n'etait pas connu autrefois des Chinois et des .Faponais. L'editeur ja- ponais du premier ouvrage Indique, dans une note, que le zinc s'extrait du lou-kan-chi; m.iis 11 ajoutequ'il nesait pas comment se fait I'extraction. Le thien-kong-khai-we donne plus de de- tails : « On met, dit-il, 10 livres de lou- « kan-chi dans un creuset de tei re. On " les y comprime fortement ; on les « divise avant de les exposer au feu ; « ensuite on place les creusets les uns « sur les autres, en les entrem^lant de « galettes de houille, et on allume le « feu. Le lou-kan-chi fond dans le mi- « lieu du creuset, et devient tout rond. « Quand le feu est eteint , on retire « cette boule, qui est le ya-ijan. Cette " matiere se combine avec le cuivre. " Quand on la met dans le feu, elle « produit une vapeur enflammee. » Sir G. Staunton, dans son ouvrage sur le voyage de lord Macartney a la Chine, rapporte que les Chinois font communiquer les creusets ou est la calamine a des recipients ou le zinc coule. D'apres cela, la fabrication aurait ete perfectionnee a I'epoque de son voyage. L'etain est divise en etain de monta- gne et etain deseaux (etain dalluvion). L'etain de montagne, qui est l'etain des mines, et qui est le plus Impur, est lave et debarrasse de saterre; puis on fond I'un et I'autre minerai dans un four- neau qui contient plusieurs centaines de livres de minerai et plusieurs cen- taines de livres de charbon de bois. La combustion est excitee au moyen d'une caisse soufflante. SI le minerai a de la peine a fondre, on y ajoute un peu de plomb ; alors it commence a s'etendre ; puis il coule par un conduit en fer place au bas du fourneau. Quant au mercure, on .salt que les Chinois le retirent depuis longtempsdu cinabre; mals ils ne le regardent pas comme un metal, et le procede de I'a- nialgamation pour I'extraction de Tor et do I'nrgeut ne leur parait pas connu. Le CHINE MODERNE. 561 mercure ne leur sert presque qu'a polir des miroirs.de metal. Ces extraits de I'Encyclopedie japo- naise et du Thien-kong-khai-we prou- ▼ent qu'a I'epoque de la publication de ces ouvrages, les Chinois n'etaient pas bien avances dans I'art d'extraire les m^taux , et cette indication s'accorde avec les recits des voyageurs qui ont visite leur pays. On sait qu'a la Chine rien n'est si frequent, dans le commerce, que les melanges frauduleux; etde la on pour- rait presumer qu'on a dirige aussi dans ce paysquelque attention sur les moyens de distinguer ces melanges, surtout pour les metaux , dont la valeur peut etre si facilement alteree. D'apres les recits des voyageurs, les Chinois sont fort adroits pour reconnaitre , avec la pierre de louche, le litre approximatif des objets d'or etd'argent; mais, quant a des procedes d'analyse exacte , on ne trouve, dans les ouvrages que nous avons cites, que des indications bien imparfaites. Suivant le Thien-kong-khai-we, pour separer I'or de I'argent avec lequel il se trouve souvent mele, il fautenvelopper le metal que Ton veut purifier dans des boules d'argile , le jeter dans un creuset et le fondre avec du borax {pong-cha)\ alors I'argent se mele a I'argile, de sorte que I'or reste pur, et on separe ensuite I'argent en y ajoutant du plomb, c'est- a-dire par le procede de la coupella- tion ordinaire. M. Boussingault a trouve un procede analogue, en usage dans les Cordilleres , pour la purifi- cation de I'or ; mais la c'est du sel marin qu'on ajoule au lieu de borax. M. Boussingault a explique I'operation americaine par la reaction de I'argile du ciment sur le sel marin a la faveur de la vapeur d'eau, de sorte qu'il se forme de I'acide hydrochlorique qui attaque I'argeni et en forme un chlo- rure. Cette explication ne parait pas pou- voir s'appliquer au cas ou Ton emploie- rait le borax. Une tentative faite dans un laboratoire, pour repeter le procede indique par le Thien-kong-khai-we, n'a donne aucun resultat, et I'argent ne s'est pas separe de I'or. II est vrai que des circonstances accidentelles peuvent se*" IJvraison. (Chine moderne. empecher de reussir dans nne expe- rience semblable , lorsqu'on n'a pas d'indication plus precise que cclle de I'ouvrage chinois. Ainsi , suivant M. Boussingault, I'operation qu'il a obser- vee en Amerique ne reussit qu'avec des creusets assezporeux, de maniere que Fair puisse avoir acces dans le me- lange. Nous devons dire aussi que, d'apres les valeurs donnees par les poids rela- tifs de I'or et de I'argent dans le Souan- fa-tong-tsong, ouvrage qui date de 1593, il paraitrait que la separation de I'or contenu dans I'argent se faisait alors d'une maniere tres-imparfaite ; car le poids du pouce cube d'or est indique comme 16 onces, et celui du pouce cube d'argent comme 1 4 onces ; de sorte que les poids relatifs de Tor et de I'ar- gent seraient comme 16 a 14, ou comme 11 a 10 ; tandis qu'il est constant que le centimetre cube d'or pur pese 19 grammes, et le centimetre cube d'ar- gent 10 grammes 47 centigrammes ; de sorte que les poids relattfs des deux metaux sont comme 19 a 10 1/2. La valeur donnee au poids de I'argent dans I'ouvrage chinois est done beaucoup trop forte; elle est presque egale a celle du poids de I'or, ce qui ne peut s'expliquer que par le melange d'une forte proportion d'or dans I'argent chi- nois ; car le plomb , I'autre metal qui pourrait s'y trouver mele , n'est pas assez pesant pour donner lieu a un tel excedant de poids. D'apres leThien-kong-khai-we, qnand on veut retirer I'argent des ustensiles ou il se trouve comnine avec le cuivre rouge et le plomb, ou quand on reconnak aux laches noires du metal qu'il ren- ferme une proportion sensible d'alliage, on le met dans un vase de lerre avec un peu de nitre. On lefond; unegrande partie du cuivre et du plomb se separe de I'argent et couleau fond du vase. On reprend I'argent ainsi a demi purifie avec les parties de cuivre et de plomb qui semblent encore assez riches en argent, et on les met dans le milieu d'un creuset de terre dans le fourneau a separer les metaux. Le plomb paraJt le premier ; bientot il s'ecoule , et le cuivre reste coUe. comme enveloppe du residu d'argent. On comprime cette ) 36 569 L'UNIVERS. masse avec des tiges de fer, et aussitot I'argent se rdpand et se separe. Ce precede, a ce qu'il parait, est coiinu et employe aussi, par les raffi- neurs, en Europe. L'etain du commerce, h la Chine, est souvent mele de plomb. Pour le purifier, on lave cet 6tain, et on le fond dans une solution de vinaigre assez fort : le plomb se consomme et coule dehors; I'etain reste seul. Ce proced^, donne par le Thien-kong-khai-we, s'ex- plique aisement. L'acetate d'etain est presque insoluble et se forme beaucoup plusdifGcilement afroid que l'acetate de plomb, qui est tres-solubie. Je passerai maintenant a I'examen de quelques produits dont les metaux forment la base principaie. Le procede hollandais pour la fabri- cation de la ceruse peut ^tre venu du Japon , avec lequel les Hollandais ont eu pendant longtemps des relations tres-importantes. En effet, ce procede est presque identique avec celui qui est indique dans les ouvrages chinois et japonais pour la preparation de cette matiere. Au reste, ce ne serait pas le seul emprunt que les Hollandais au> raient fait aux Japonais. Ainsi, pour I'agriculture, c'est de la que sont venus en Europe les semoirs mtoniques , qu'on trouve dans le Thien-kong-khai- we et dans le Cheou-chi-thong-kao, et qui existent depuis une haute antiquite a la Chine. De meme la machine a van- ner le ble, connue ea France sous le nom de tarare, est representee dans le Thien-kong-khai-we avec son ventila- teur et telle que nous I'employons; on en retrouve aussi la description , mais sans figure, dans la premiere edition chinoise de I'Encyclopedie japonaise, laquelle date de 1609. D'apres les en- cyclopedies anglaises, les Hollandais reconnaissent que cette machine leur vient du Japon. Voici la description du proced^ suivi a la Chine pour la fabrication de la ce- ruse, d'apres le Thien-kong-khai-we : « Pour faire le hou-mign (la poudre « blanche , la ceruse), on prend 100 li- « vres de plomb coul^; on les coupe, « on Ips divise en moroeaux, et on en « forme des tubes qu'on met dans un • vase de bois, au fond duquel estplacec n une petite tasse pleine de vinaigre. En « dehors on lute avec de I'argile et on « ferme le pot avec du papier colle; « puis on met un pen de feu, et on I'en- « tretient pendant sept jours. Cet es- « pace de temps suffit pourloperation. « Les morceaiix de plomb qui ont pro- « duit de la poudre blanche (de la ce- R ruse) sont jetes dans un vase plein « d'eau. Les morceaux qui n'ont pas St produit de poudre blanche sont re- « places dans les pots pendant sept « jours, et au sortir on les jette dans « I'eau. On continue ainsi jusqu'a ce « que le principe soit epuise. Les nior- « ceaux qui ne sont pas epuises com- « pletement sont reserves pour faire de « la poudre jaune rouge ( rouge de « plomb, massicot). » La methode qu'on suit en Hollande est presque identique avec celle des Chinois ; seulement, au lieu de chauf- fer les pots avec du feu, les Hollandais entourent les pots avec du fumier et du tan, ce qui donne a la ceruse jiinsi faite une teinte grisatre. Aupres de Vienne, on chauffe les pots avec du feu, et le blanc fabrique est tres-pur; alors c'est exactement le procede chinois. La description de TEncyclopedie japonaise differe peu de celle diu Thien- kong-khai-we. Suivant I'Encyclopedie, au lieu de tubes de plomb, on emploie de petites plaques rondes superposees. Le rouge de plomb ou tan que font les Chinois se fabrique avec les residus de plomb non convertis en ceruse, que Ton chauffe avec du nitre et de I'alun : on doit obtenir ainsi un produit analo- gue a la variete de minium connue sous le nom de mine orange. On tire encore ce rouge directement du plomb en rhauf- fant ce metal avec du soufre et du ni- tre. Dans cecas, on obtient un melange de massicot avec une forte proportion de sulfure et de sulfate de plomb. D'apres le Pen-thsao-kang-mou, dont le texte est rapporte par I'EncvcIopedie japonaise et le Thien-kong-khai-we, on prend : r plomb, 1 livre; soufre, 10 onces; nitre, 1 once. On fond le plomb, et on y ajoute siiccessivement soit du nitre, soit du soufre. IM. Gaul- tier de Claubry, qui a bien voulu repe- ter I'experience d'apres ces denudes, n'a pu obtenir une couleur rouge qu'avec CHINE MODERN E. 5«3 beaucoup de peine. Au fait, la propor- tion de soufre est singuiiere. Quand on fabriquechez nous le minium, on evite avec grand soin le contact des matieres sulfureuses, qui nuisent pour la fabri- cation de cristaux ou le minium entre en proportion notable. On doit se rap- peler, il est vrai., qu'on ne fait pas de cristaux en Chine ; et Temploi de leur tan ou rouge sulfure peut etre suffi- sant pour la peinture ou pour d'autres usages ; mais il est cependant probnbie 3u'il y a erreur dans les proportions onnees par le Pen-thsao-kang-mou. Quoi qu'il en soit, le texte chinois ajoute : « Si Ton veut que le tan rede» « vienne plomb, on doit le meler avec du « jus d'oignon et le chauffer ainsi ; le « plomb reparait et se reproduit. » II y a quelques annees, M. Berthier a fait connaitre un proc^de pour utili- ser les residus de sulfate de plomb pro- venant de la preparation de Tacelate d'alumine, lequel consiste a chauffer ce sulfate avec une certaine quantite de charbon en poudre, ou avec du sous- sulfure de plomb: le sulfate se decom- pose, et Ton obtient du plomb pur. L'identite de ce precede avec celui qu'indique le Pen-thsao-kang-mou est evidente. L'emploi du jus d'oignon dans I'ouvrage chinois indique unique- ment l'emploi d'une matiere vegetale. D'apres ce meme texte, avec 100 de plomb, on obtient 153 de tan. Pour tirer le plomb du sulfate de plomb, les proportions donnees par M. Berthier etaient 53 grammes de sulfate de plomb et 77 grammes de sous-sulfure , qui donnaient 100 de plomb. On voit que les quantites indiquees ne sontpas tres- eloignees. Ce rapprochement me parait assez curieux. Voici encore quelques preparations que les Chinois connaissaient au sei- zieme siecle. D'apres le Pen-thsao-kang-mou, les Chinois savaient foiredepuis longtemps des preparations mercurielles, qu'ils de- signaient sous les noms de hiong-fen et de fen-chouang, et qui se rappro- chent de celles que nous connaissons sous le nom de sublime corrosif et de sublime doux, ou bichlorure et proto- chlorure de mercure. Le hiong-fen se fait avec une once de mercure, 3oncesd'alun blanc, 1 once de sel marin , que Ton renferme dans un vase de terre convert. En chauffant, une poudreserenddanslehautduvase: oette poudre est le hiong-fen; et a I'excep- tion de l'emploi de I'alun au lieu d'acide sulfurique, c'est le mode qu'on emploie pour la preparation du sublime corro- ' sif. La poudre chinoise doit etre meles de principes etrangers au chlorure de mercure; mais on ne pouvait faire au- trement tant qu'on ne se servait pas di- rertement d'acide sulfurique. Pour la preparation du fen-chouang, « on se sert de bon hiong-fen, dit le « Pen-thsao-kang-mou; on en met « une once dans un vase de terre, dont « I'ouverture est surmontee d'un cou- « vercle, dont le dedans est garni d'une « feuille de papier mouille. On lute le « couvercle avec de I'argile detrempee, « et on gam it le bas du vase avec du « petit charbon de bois qu'on allume. « On augmente peu a pen la quantite « de charbon, jusqu'^ ce qu'on atteigne " le col superieur du vase; alors on « laisse le feu se refroidir, et on retire « le papier garni d'une poudre sembla- « ble a de la cire blanche: c'est le/(?ra- « chouang. » L'auteur a evidemment oublie I'addition du mercure au su- blime corrosif, addition necessaire pour enlever a ce dernier une portion de chlore. Sous le nom de/aw, les Chinois tan- gent plusieurs substances qui se rap- portent a I'alun et aux direrses sortes de vitriol. Le fan blanc est I'alun , dont on trouve des mines naturelles, d'apres le Thien-kong-khai-we , et qui se purifie par des lessives et la cristallisation. L'alun sert, en Chine, a divers usa- ges, entre autres, a la clarification de I'eau trouble. Ce precede a ete rapporte par Barrow, dans son Voyage a la Chine, et on en trouve quelque trace dans le Thien-kong-khai-we. En ajou- tantune tres-petite quantite d'alun avec de I'eau trouble, il se forme un sous- sulfate insoluble d'alumine qui se de- pose et entraine avec lui les particules terreuses. D'apres une note inseree dans le Bulletin de la Societe d'encou- ragement (annee 1880), ce meme prO' cede a ete applique, il y a quelques 36. m L'UNIVERS. ann^es, par M. Darcet, h la clarifica- tion de I'eau de Seine, et son fils I'a porte en figypte, ou ii parait inconnu. Les autres fan, noir, rouge, jaune et vert,s'extraient de pierres qui setrou- vent dans la houilie, et qui sont evi- deniment, d'apres cette indication, des pyrites de fer et de cuivre. Le mineral est briil^ a Pair, en I'en- tremelant avec de la houilie. Le residu est lessive et concentre dans une chau- diere. On obtient ainsi le fan vert : c'est du vitriol vert ou sulfate de fer. En calcinant cette substance avec 4 onces de terre jaune, on en retire le fan rouge, qui sert pour les ornements des maisons, quand on les peint. Ce fan rouge est le colcotar ou rouge d'An- gleterre. Le fan jaune se fait en cuisant le fan noir, qui est un melange de sul- fate de fer et d'alumine. On le place en tas que Ton couvre de terre. On y met le feu , qui dure lentement pendant le printemps et I'ete, et au commence- ment de rhiver il s'effleurit a la sur- face de la terre une poudre, comme les murs de briques produisent une espece de salpetre. On racle cette poudre, et on la recueille : c'est le fan jaune. Ce fan jaune est de I'alun effleuri a la sur- face des pyrites de fer, mais encore impur; d'ailleurs on n'obtient ainsi que de petites quantites d'alun. On indique aussi dans le Thien-kong- khai-we qu'on retire des fan des mon- tagnes a feu mouvants, ou des volcans. lis sont melanges avec le soufre. On les lave,et on en faitdu fan bleu fonce. Ce fan bleu s'appelle aussi la pierre defiel, et parait se rapporter a I'alun in^lang6 de sulfate de cuivre. BOTANIQUE CHINOISE. « Le regne vegetal, ^crivait en 1829 M. Abel Remusat, parait tres-riche a la Chine; et la botanique chinoise se- rait I'objet d'une etude immense. Jus- qu'ici on n'a pu connaitre qu'un nom- bre comparativement assez pen consi- derable de plantes, que les mission- naires ont envoyees en nature ou de- crites dans leurs memoires. Les traites d'histoire natiirelle des Chinois en in- diquent une inOnite d'autres par des figures et des descriptions qui suffisent quelquefois pour fonder une determi- nation scientifique. Pour ne pas nous perdre dans un detail immense, il suf- ilra de nommer ici, parmi les vpg^taux les plus celebres de la Chine, le bam- bou, dont les usages varies ont influe sur les habitudes des Chinois, et qui pourrait, pour ainsi dire, tenir lieu de tous les autres arbres: le th6, objet d'un commerce si actif ; I'arbre a cire, I'arbre au suif , le camelia oleifera, le mQriera papier, le camphrier (/a?/n^.? camphora), I'arbre au vernis, le li- tchi {dimnocarpus), le long-yen , le ju- jubier, I'anisetoile, le canneilier de la Chine, I'oranger, le bibacier, et un grand nombre d'arbres a fruit particuliers aux provinces meridionales; la pivoine en arbre, les camelia, I'hortcnsia, rapporte de la Chine par le lord Ma- cartney, le petit magnolia, plusieurs rosiers, la reinemarguerite odorante, rhemerocalle, la rhubarbe, dont le com- merce est si profitable aux habitants des provinces septentrionales de la Chine; le jin-chen (jin-seng), dont la recolte, dans la province de Chin-king, est exclusivement reservee a I'empe- reur et forme une partie considerable de son revenu; et une prodigieuse di- versite de plantes ligneuses ou herba- cees, cultivees pour la beaute de leurs fleurs ; le cotonnier, un grand nombre de |)lantes textiles, economiques et ce- reales , qui meriteraient d'etre natura- lisees en Europe (*). » Quoique la botanique chinoise ait fait des progres depuis trente ans, nean- nioins aucun ouvrage n'est, a cet egard, aussi complet, aussi exact et aussi in- teressant que la Description gpnerale de I'abbe Grosier. La partie botanique est redigee avec beauroup de soin, et contient,suivant RI. Abel Remusat (**), I'extrait de ce que le P. Cibot a donne de niieux sur cette matiere, compare avec les descriptions de Loureiro , de Thun- berg et de quelques autres botanistes. On trouve encore dans la relation an- glaise de sir Georges Staunton (***) (*) Voy. Abel Remtisat , Nouvcaux Me- langes asialiqiies, t. 1"', p. 20 clai. (**) Id. , ii)id., p. 299. (**•; Stauntoa's Embassy, I. II, p. i65, 27^, 435 el 524. CHINE MODEKNE. 665 quatre listes considerables de plantes chinoises : la premiere comprend les plantes du Pe-tchi-li ; la seconde, celles de la Tartarie mandchoue; la troisieme, celles du Chan-tong et du Kiang-nan, et la quatrieme, celles du Kouang-tong. M. S. Wells-Williams est, de Taveu des Americains, et meme des Anglais qui cuJtiveHt la litterature cliinoise a Canton et ailleurs, un de ceux qui y ont fait les plus remarquables progres. II est aussi le premier auteur auquel on soit redevable de quelques etudes sur la Acre de la Chine. M. Wells-Wil- liams a trouve le moyeu d'etablir une synonymie certaine entre les denomi- nations chinoises et les denominations europeennes d'un certain nombre de plantes, et a insere, dans son excellent dictionnaire anglais et chinois , une liste alphabetique (*), dont la repro- duction ne sera peut-etre pas inutile et que je vais donner. Je parlerai tout a liieure des travaux plus importants de .MM. J. Hoffmann et H. Schultes. Index botanique de M. S, JVells-WlUiams. Abrus precatorius. Acacia. Acanthus ilicifolius. Acorus gramineus. iEgiceras fragrans. Agapanthus. Aglaia odorata. Aleurites. Allium triquetrum. Aloe chinensis. Alpinia calcarata. Alpinia galanga. Alpinia nutans. Altliea rosea. Amaranthiis polygamus. Amaranthus spinosus. Amaryllis aurea. Amaryllis sinensis. Amygdalus persica. Ananassa sativa. Andromeda japonica. Angraeeum falcatum. Anona squamosa. Anthemis apiifolia. Aphelandra cristata. (*) An english and Chinese Vocabmary, in the court dialect, by S. Wells-Williams; Ma-, cao, i8/i4; p. loi et sujv. Aquilaria sinense. Arachis hypogaea. Ardisia creuuiata. Ardisia lentiginosa, Ardisia littoralis. Areca catechu. Artabotrys odoratissimus. Artemisia vulgaris. Arum esculentum. Asclepias curassavica. Averrhoa carambola. Azalea indica. Azolla. Backia frutescens, Bambusa arundinacea Bauhinia Candida. Bauhinia scandens. Begonia discolor. Bellis jaculifolia. Bombax ceiba. Bletia hyancinthyna. Bletia Tankervillae. Brassica chinensis. Brj^onia. Buttneria. Cactus triangularis. Callicarpa purpurea. Callicarpa rubella. Calotropis gigantea. Canna indica. Canarium alba. Canarium pimela. Caprifolium japonicum. Capsicum sinense. Caragana Caralagu. Cardiospermum corindum. Carica papaya. Cassia sophora. Celosia cristata. Cerbera chinensis. Cercis siliquastrum. Chimonanthus fragrans. Chloranthus inconspicuus. Chloranthus monander. Chrysanthemum sinense. Cissus umbellata. Citris decumana. Citrus limonum. Citrus margarita. Citrus aurantium. Citrus medical. Citrus madurensis. Citrus nobilis. Clematis chinensis. Clematis minor. Clerodendrum squamatuni «6 ClerodeDdrum fragrans. Cocos nucifera. Convolvulus bryonisBfolius. Convolvulus reptans. Cookia punctata. Corchorus japonica. Cornutia quinata. Cotyledon spinosa. Crinum asiaticuin. Crotolaria juncea. Croton tigiium. Cucumis maderaspatanus. Cucurbita citrullus. Cucurbita lagenaria. Cucurbita melopepo. Cupressus. Cupressus sempervirens. Cuscuta chinensis. Cyanella capensis. Cycas revoluta. Cydonia japonica. Cymbidium. Cyinbidium ensifoliuno. Cyml)idium lancifolium. Cymbidium xiphiifolium. Cynancbum sibiricum. Daphne odora. Datura mete I. Daucus carota. Dendrobium moDoliforme. Dianthus caryophyllus. Diantbus chinensis. Diospyrus kaki. Dolicbos? Doliebos purpureas. Dolicbos soja. Dracaena ferrea. Drvandra cordata- Ecnites caudata. Elaeagnus latifolius. Eleocharis tuberosa. Enkianthus quinqueflora. Eriobotrya japonica. Eriocaulon quadrangulare. Erysibe paniculata? Erythrina iudica. Equisetum hyemale. Euonymus ? Euphoria longan. Euphoria litchi. Evolvulus alsinoides. Fagara ? Eallopia nervosa. Ficus. Fraxinus chinensis. Gardenia florida. L'UNIVERS. Gardenia spinosa. Gardenia radieons. Geranium. Gerardia. Glycyrrhiza ecbinata. Gmeiina asiatica. Gomphrena globosa. Gordonia. Gossypium arboreum llabenaria Susannsc. Hamamelis chinensis. Hedysarum ? Hedychium coronarium. Helianthus cochinchinensis. Helicteris angustifolia. Heliotropium indicum. Hemerocallis cserulea. Hemerocallis fulva. Hibiscus acerifolius. Hibiscus liliaceus. Hibiscus mutabilis. Hibiscus manihot. Hibiscus rosa-sinensis. Hibiscus syriaca, rubra. Hovenia dulcis. Hoya carnosa. Hydrangea hortensis. Hydrocharis morsus-ransc Hypericum monogynum. Hypoestes purpurea. Illicium anisatum. Impatiens chinensis. Impatiens cochleata. Impatiens cristata. Indigofera coccinea. Ipomsea grandiflora. Ipomaea maritima. Ipomasa quamoclit. Iris orientalis. Ixora coccinea- Jasminum officinalis. Jasminum paniculatum. Jasminum sambae. Jatropha. Juniperus. Justicia ecbolium. Justicium paniculata. Lagerstroemia indica. Laurus camphora. Laurus caryophyllus. Lawsonia americana. Lawsonia purpurea. Leontodon chinensis. Ligustrum lucidum. IJIium concolor. Lilium japonicum. CHINE MODERNE. 667 Lilium tigrinuni. Leonicera periclynienum. Lychnis coronata. Lycopodium. Maba yaccinoides. Magnolia fuscata. Magnolia pumila. Magnolia purpurea. Magnolia conspicua. Malachra arena. Melanthium cochinchinense Melastoma dodecandrum. Melastoina maiabatliricum. Melia azedarach. Melodinus nionogynus. Michelia champaca. Mirabilis jalappa. Morus alba. Muricia cochincbiDensis. Murraya exotica. Musa sapientium. Musa coccinea. Miisssenda chinensis Myrtus tomentosa. JVandina doniestica. Narcissus tazetta. Nauclea cordifoUa. Nelumbium speciosum. Nepenthes phyliamphora. Nerium oleander. Nicotiana fruticosa. Kyclanthes arbor-tristis. Nymphaea pygnasea. Ocimum gratissinium. Olea fragrans. Onobrychis crinita Paeonia meoulan. Psconia aibiflora. Panax quinquefolium. Pandanus odoratissinuis. Papaver somuiferuni. Pardanthus sinensis. Paris poiyphylla. Parkinsohia orientalis. Passiflora ca;rulea. Pentapetes phcenicea. Pergularia odoratissima. Phoberos chinensis. Pinus longifolia. Piper betle. Piper nigrum. Pittosporuni tobira. Planlago major. Plumbago zeylanica. Plumbago rosea. Plumearia alba. Pcederia fetida. Poinciana pulcherrima. Polyanthes tuberosa. Polygonum barbatum. Polygonum tartaricum. Polygonum tinctorium. Punica granatum. Prunus domestica. Prunus armeniaca. Psidium pyriferum. Pyrus communis. Pyrus malus. Quisqualis glabra. Quisqualis indica. Ranunculus sceleratus, Raphanus sativus. Raphiolepis indica. Raphiolepis phoeostemon Raphiolepis salicifolia. Raphis flabelliformis. Rhus succedanea. Riciiius communis. Rosa Ranksiae. Rosa indica. Rosa multiflora. Rosa spinosissima. Rosa semperfloreiis. Rosa sinica. Rubus reflexus. Rubus parvifolius. Ruta angustifolia. Saccharum sinense. Sagittaria integrifolia. Sagittaria obtusifolia. Sagittaria sinensis. Sagus Rumphii. Salisburia adlantifolia. Salix babylonica. Sambucus chinensis. Santalum album. Sapindus abruptus. Saxifraga sarmentosa. SedumT Serissa foetida. Sesamum indicum. Sida tiliaefolia. Sideroxylon cantoniense. Sinapis brassicata. Smilax lanceolata. Spinifex squarrosus. Spiraea crenata. Spondias amara ? Stachys artemisia. , Sterculia balanghas. Sterculia lanceolata. Sterculia platanifolia. L'UNIVERS. 566 Slillinga sebifera. Sivrax. Tabernaemontana coronaria. Tagetes patula. Tamaris chinensis. Tecoma grandi flora. Thunbergia angustifolia. Thuya orientalis. Trapa bicornis. Tricosanthes anguina. Tropajolum minus. Unona discolor. Vanda. VirKia rosea. Vismia dealbata. Vitex spicata. Webera corymbosa. Zea mays. Zinziber officinale. Zizyphus jujuba. Zizyphus ramosissimum. Zornia pulchellum. Travaux de MM. J. Hoffmann et H. Schul- tes, snr la Flore dii Japan et de la C/iine. L'Index botanique de MM. J. Hoff- mann et H. Schultes, actuellement sous presse, est, comme on va le voir, beau- coup plus etendu que celui de I\I. Wells- Williams. Nous nous felicitons de pou- voir mettre sous les yeux du lecteur la preface de cet Index, preface oil M. Hoffmann retrace les principales ^poques des recberches scientifiqiies sur la flore japonaise. «Cefut, dit cet habile orientaliste, ▼ers la fin du dix-septieme siecle que les premieres notions de la flore japo- naise penetrerent en Europe. Le doc- teur Andreas Cleyer, qui, en 1683, avait visite la cour de Yedo , en qualite d'ambassadeur de Hollande, demeura jusqu'en 1686 a Nagasaki , comme chef de la factorerie du commerce hollan- dais, et, de retour a Java, publia, jus- qu'en 1700, une serie de traites sur les plantes japonaises, dans les Epbeme- rides de I' Academic Naturae curioso- riim, et apres avoir fait dessiner, au Japon , par des indigenes , treize cent soixante figures, les envoya a Berlin, au docteur A. Menzel , lequel en com- posa une Flore japonaise, qui se trouve jusqu'aujourd'hui inedite dans la Bi- bliolheque royale de Berlin. " 1-e docteur Cleyer s'occupait en- core de la description des plantes japo- naises , quand le naturaliste Engelbert Ka'mpfer arriva au Japon (1690), et pendant deux ans fit de la flore ja- fionaise le sujet de ses etudes. La va- eur scientifique de ses recherches, en general, surpassede beaucoup celle des ouvrages contemporains; mais, de son vivant, on n'en publia que la partie botanique. C'est dans les descriptions et les figures de plantes japonaises, formant le cinquieme fascicule *de ses Amoenitates exoticx (1712), que Kacmpfer a consigne avec beaucoup d'cxactitude les noms japonais et chi- nois, en profitant de beaucoup de no- tices interessantes sur I'histoire natu- relle indigene, qui lui furent commu- niquees par ses amis japonais. II mou- rut en 1716, et ses collections se trou- ventaujourd'huiau Museebritannique; entre autres une collection de figures de plantes japonaises, dont sir Joseph Banks publia, en 1791, une serie de quarante-neuf planches , sous le litre de Icones Kaempferianx. « Le premier qui traita la flore des lies japonaises d'apres la methode de I'ecole de Linne fiit C. P. Thunberg. Arrive au Japon en 1775, il avaitform^, au bout d'une annee, une collection de mille especes, dont il d^crivit huit cents. Dans sa flore japonaise, Thunberg donna, a I'exemple de Kwmpfer, les noms japonais, emprunt«s, ce nous semble, en partie a des oui-dire, en partie aux Amoenitates exoticx de ce dernier auteur. La haute vaieur attri- buee d'abord par quelques botanistes a la flore de Thunberg a considerable- ment diminue. Le bolaniste y cherche en vain une exactitude scientifique, et quant aux noms japonais, c'est a peine si la sixieme partie est exempte de fau- tes d'orthographe ou d'impression. « En 1823, M. Ph.-Fr. de Siebold arriva au Japon. L'etude de la flore de ce pays occupa une place ronsiderable dans le cercle de ses recherches. La col- lection de plantes japonaises qu'il forma Eendant son sejour dans ce pays n'em- rasse pas seulement la flore dVs envi- rons de Nagasaki , ou de I'lle de Kiou- siou , mais encore un g^rand nombre de plantes qu'il rassembia pendant son voyaiie a YeJo. Kile fut encore a.ig- CHINE MODERNE 56$ mentee par des envois que lui firent ses amiset eleves japonais, de divers points de I'empire, et a I'aide d'herbiers for- mes par des naturalistes indigenes. Cette collection , comprenant de deux mille deux cents a deux milie trois cents especes de phanerogames , fut placee , au retour de M. de Siebold , dans I'her- bier royal de Leyde, et augnientee, plus tard , dedeux a trois cents especes provenant d'envois du Japon , faits par M. Burger. « Ces materiaux, joints a un choix de plus de six cents figures que M. de Siebold avait fait dessiner d'apres na- ture par des artistes japonais, sonten- tres dans I'ouvrage intitule : Flora ja- ponica, s'we ptanfse qiias in imperio japonico collegit, descripsit, et ex parte in ipsis locis pingendas ciiravit doctor Ph. Fr. de Siebold; sectio prima: Plantae ornatui vel usui inservientes. Digessit doctor J. G. Zuccarini , Lugd. Bat., 1835-44. « M. Zuccarini donna au monde sa- vant une revue systematique des fa- milies et des genres des plantes japo- naises en rendant (le 12 juin 1841 et le 20janvierl844),arAcademieroyaledes sciences, a Munich , un compte de la flore japonaise et de ce qu'elle doit aux recherches des Europeens, aussi bien qu'a celles des Japonais memes. II mon- tra la connexion et I'ensemble qu'il y avait entre la flore du Japon et celles d'autres pays; mais ce n'etait qu'en traits generaux. Cette matiere fut traitee par lui, plus en detail, dans un ouvrage qui a paru plus tard sous le litre de : Florse japonic^ familise naturales, adjectis genenon et specierum exem- plis solntis ; sectio prima et altera : Plantae dicotyiedoneae. Auctoribus do- ctore Ph. Fr.de Siebold et doctore J.G. Zuccarini. « Le but que se proposa I'auteur de I'ouvrage que je viens de citer, etait de tracer un tableau de la vegetation des pays les plus orientaux de I'Asie. Pour y arriver, il a rassemble, aussi com- pletement que possible, toutes les fa- milies de plantes constituant la flore japonaise, en faisant ressortir princi- palement les classes et les genres carac- teristiques. II a montre la grande res- senibiance de la flore des iles meridio- nales du Japon, des iles de Sikokf, Kiou-siou et de la partie sud du Nip- pon , avec celle des regions moyennes et plus chaudes de la Chine, et il a prouve que beaucoupde classes et pres- que toutes les plantes cultivees sont communes aux deux pays et a la Coree, et que les decouvertes faites dans une de ces contrees sont, par consequent, tres-importantes pour les autres. « Si ces pays etaient occupes par des barbares, nous nous contenterions de ce que les voyageurs y decouvriraient et nous communiqueraient; mais les indigenes de la Chine et du Japon, jouissant d'une tres-ancienne civilisa- tion, et ayant examine et determine la vegetation du sol, se sont cree une litte- rature indigene sur le regne vegetal. Cette litterature nous offre une ample moisson de notices interessantes sur la patrie , la migration , la distribution geographique et I'usage des plantes cultivees, et nous promet, outre la con- naissance de cette Flore, les notions les plus interessantes sur I'industrie et les arts de ces pays. « Pour faciliter I'accesde ces sources, il nous faut un lien qui unisse la litte- rature botanique de ces peuples avec les recherches etles decouvertes denos savants; il nous faut une synonymic, enfin , ou , a cote du nom systemati- que donne par nos naturalistes, soil range le nom japonais et chinois. a Le travail que je publie aujour- d'hui est un pas vers ce but. Ce qui m'a surtout engage a I'entreprendre, c'est qu'un heureux concours de cir- constances en avait mis les materiaux entre mes mains il y a environ dix ans. M. de Siebold avait fait faire au Japon, par un savant du pays, une liste com- plete en japonais et en chinois des plantes rassemblees par lui , et il me permit de I'employer commebase d'une nomenclature botanique. Dans les ma- nuscrits botaniques de M. de Siebold , les determinations systematiques se bornaient simplement , pour les formes nouvelles, a I'enonciation des families et des classes, tandis que I'espece etait exprimee par le nom japonais. A me- sure que la publication de la Flore du Japon avancait, ces determinations prealables subirent bien des change- fe70 L'UNIVERS. menls, el elles furent remplacees par les nouveaux noms systeiiiatiques. L'a- chevement de la nomenclature botani- que, basee sur les materiaux que nous venons de citer, dependait de I'ache- veinent de cette Flore. « Malbeureusement, la publication de la Flore du Japan s'est arr^tee, en 1 844, .1 la vingt-cinquieme livraison , et un des plus beaux travaux de nos jours reste inacheve. La promesse que Zuc- carini avail faite de publier les families nionocotyledones n'ayant pas pu se realiser, les Favxillse iiaturales de Zuc- carini eurenl le mfime sort. II niourut en 1848, el avec lui s'^vanouit I'espe- rance de voir s'achever eel ouvrage. « Pour ne pas renoncer compl^te- ment a la publication de I'lndex bota- nique, qui jusqu'a cette ^poque avail marche de pair avec la Flore de M. de Siebold , je me vis forc6 de restreindre les limites de mon plan, et de borner mon catalogue aux plantes systemali- quement determinees dans ce qui avail paru de ces deux ouvrages. Le premier comprenait alors environ cent vingt- cinq especes avec trois cents noms in- digenes. Si les noms indigenes avaient iV^ ajoutes dans le dernier ouvrage, qui comprend huit cent quarante-sept especes de plantes dicotyledones, toutes determinees et decrites d'apres les exemplaires originaux , il m'eflt ^t^ facile d'achever la synonymie : mais comme il ne s'agissait pour Zuccarini que de donner une revue systematique du regne vegetal, land is que la descrip- tion detaillee des plantes avail deja 6t^ inser^e dans la Flora japonica, on lui restait reservee, il avail supprime tous les noms japonais des plantes. « Heureusement les materiaux que j'avais deja rassembles pour I'lndex me permettaient de remplir cette iacune, et, dans des cas douteux, je pouvais consulter I'herbier royal, ou sonl con- serves les exemplaires originaux qui ont servi a Touvrage sur les Families naturelles, et portent les synonymes japonais et chinois ajoutes par des Japonais. « Dans ces circonstances, la collabo- ration que m'offrit M. le docteur Schultes, durant I'ete de Tannic 1850, m'a ete d'autant plus agr^able, que ce botaniste , attache alors a Therbier royal , s'etait occupe depuis lonj^tenips de' la synonymie indigene de la Flore du Japon, s'etait assez familiarise avec les caracteres japonais pour les lire, et avail deja pris beaucoup de notes sur ce sujet. Fofin, M. Scbultes et moi, nous nous reunimes pour faire eel Index , et nous rdusslmes a constater, avec une certitude parfaite, la synony- mie de plus de six cent trente especes de plantes systematiquement determi- nees dans les deux ouvrages cites. Parmi les materiaux employes paruous, je dois mentionner encore une Hore du Japon intitulee : Kwa-tvl , ou collec- tion de fleurs, par Y6-nau IJen-sioU; Miyako, 1765, 8 volumes in-S"; puis un index de non^s japonais et chinois d'objets d'histoire nalurelle , publie sous le litre de Jiouts bin siki juei, par Midsou tani; Soukerok , 1809, 4 vol. in-12. Le Pen-ts'ad-kang-mb, ou I'his- toire nalurelle cliinoise de Li-chi-tchin, edition japonaise, et la section botani- que de la grande Encyclopedic japo- naise, furent consultes comme faisant autorite pour la bonne orthograplie des noms, etc. « Si avec tous ces materiaux notre Index n'a pas re^u une plus grande etendue, c'est que nous nous sommes rigoureusement astreints a n'admettre aucune cspece qui ne fill parfaitement d^termince, el par consequent repre- sentee dans I'herbier de Leyde, par des exemplai^-es auxquels les Japonais eux- m^ines avaient ajoute les noms japo- nais et chinois. « Un nombre considerable de noms chinois de plantes (488) se trouve aussi dans la Flora cochinchinensis de J. Loureiro, et nous Taurions consul- tee plus souvent, si nos botanistes n'eussent eleve des doutes fort graves sur la valeur scienlifique de cet ou- vrage. Comme cette Flore est de- pourvue de figures, il est impossible aux botanistes de resoudre bien des problemes et de fixer bien des points resits obscurs. Pour que I'ouvrage de Loureiro pOt inspirer de la conflanee, il faudrait que ses determinations fus- sent examinees, rectifi^es, completees d'apres son propre herbier, qui se trouve a Lisbonne. II faudrait encore CHIJNE MODERNE. &71 qu'on consultSt les remarques deM. von Bunge, de Beechey et de Hooker sur ia flore de la Chine et des lies de Lieou- kieou et de Benin , et qu'on decidSt quelles sont reellement les plantes qu'on trouve dans la Fiora cochin- chinensis de Loureiro. Ces recherches seront considerablement facilities par la comparaison des nonis cliinois qu'il cite avec ceux de notre Index. « Je terminerai en disant quelques mots sur I'usage que font les Japonais des nonis chinois des plantes. La iitt^- rature d'histoire naturelle de la Chine a servi aux Japonais de point de depart dans I'etude de la nature, et d'auto- rite dans la niedecine, Industrie et les arts. De la vient qu'au Japon les noms chinois des plantes jouent presque le m^me role que chez nous les noms la- tins, tandis que les noms japonais in- digenes sont abandonnes au langage du peuple. Voila pourquoi les Japonais, dans les determinations scientiflques d'objets d'histoire naturelle, se servent de la denomination chinoise a cole du nom indigene. " Cependant , la prononciatlon du chinois adoptee au Japon differe con- siderablement du dialecte officiel (des mandarins) que nous avons I'habitude de suivre, de sorte qu'il nous faut observer deux manieres diff^rentes de prononcer les noms marques en carac- teres chinois : la forme purement chi- noise, en dialecte mandarin, et la forme japonaise , qui constitue un dialecte particulier. C'est dans ces deux dia- lectes que la prononciatlon des noms marques en caracteres chinois sera donnee dans notre Index. » ZOOLOGIE. Nous avons reproduit le jugement que M. Abel Remusat a cru pouvoir porter sur la botanique et la mine- ralogie. L'autorite de cet illustre sa- vant, qui avait entiepris la redaction d'une histoire naturelle de la Chine, du Japon et des pays voisins , est as- surement d'un tres-grand poids en ces matieres. INous croyons encore faire une chose utile en tirant de la notice intitulee : Coup cVceil snr la Chine et sur ses habitants, I'expose general de ce qui a rapport a la zoologie (*) : « La Chine, dit M. Remusat, nourrit un grand nombre d'especes d'animaux, parmi lesquelles il y en a plusieurs qui ne sont que peu ou nial connus en Europe. Le cheval y est moins beau et plus petit. On y trouve le chameau de la Bactriane, le buffle, plusieurs especes d'ours, de blaireaux, de ratons, une espece particuliere de tigre, plusieurs especes de leopards et de pantheres. Le bceuf est moins commun qu'en Europe, et le cochon est plus petit. II y a plu- sieurs varietes de chiens, et enlre au- tres une que Ton mange. Le chat y est mis en domesticite, et la variete blan- che a poll soyeux n'y est pas incoimue. On compte beaucoup d'es[)€ces diffe- rentes de rongeurs, parmi lesquelles il y en a qui multiplient au point de de- venir un fleau pour les provinces qu'elles parcourent en troupes immen- ses. Les gerboises, les polatouches, les ecureuils, les loutres, les zibelines, se trouvent dans les for^ts. L'el^phnnt, le rhinoceros et le tapir oriental habitent les parties occidentales du Kouang-si , du Yun-nan etdu Sse-tchouen. De nom- breuses especes de cerfs, de chevres et d'antilopes, le muse et d'autres rumi- nants moins connus peuplent les for^ts et les montagnes, particulierement dans les provinces occidentales. On trouve aussi vers le sud-oucst plusieurs quadrumanes, et meme de grandes es- peces de singes assez voisines de I'orang- outang. « La Chine contient un nombre infini d'oiseaux, la plupart Strangers a nos climats; le faisan dore et le faisan ar- gente en sont originaires. On connait plusieurs especes de cormorans , de cailles, diverses varietes de gallinaces et de palmipedes, un assez grand nom- bre d'oiseaux de proie de jour et de nult, et de nombreuses especes de la famille des passereaux. Mais I'ornitho- logic chinoise n'a fait encore que peu de progres, et Ton est souvent r^duit a faire usage des peintures du pays, qui ne sont pas toujours assez exactes pour 3u'on puisse parvenira la determination es especes. (*) Voy. les Nouveaiix Melanges asialiques, par M. Abel Remusat, «. I", p. 17 a 20, 572 L'UNIVERS. « La mfime remarque peut s'appli- quer aux autres branches cle la zoolo- gie. Les poissons des mers de la Chine sont mieux connus, parce qu'on a sou- vent p^che dans ces parages ; mais les poissons des lacs et des rivieres out ete pen etudies. On n'a pas non phis de renseignenients sur les serpents et les lezards ; les tortues ont ete mieux de- crites, et Ton sait que plusieurs especes sont particulieres a la Chine. « II y a aussi des mollusques, dont les coquilles ont ete envoy^es de ce pays et font connaltre des especes re- marquables. Parmi les insectes, il ne faut pas oublier les papillons, dont la Chine possede plusieurs belles especes, et les vers a soie, dont Tespece vul- gaire n'est pas la seule a laquelle les Chinois donnentdes soins. » La zoologie occupe beaucoup d'espace dans I'ouvrage de I'abbe Grosier, Parmi les articles les plus interessants , les plus curieux peut-etre pour le plus grand nombre des lecteurs,M. Abel Remu- sat cite ceux des abeilles, de la cigale et des papillons, la notice sur les termes ou fourmis blanches, les articles rela- tifs au cheval, au tigre (leopard ) et a quelques autres mammiferes. Nous les reproduirons successivement, en y ajou- tant la notice de M. Remusat sur le tapir. Les abeilles. « II suffit d'ouvrir les anciens livres de la Chine pour s'apercevoir qu'on y a connu de lout temps les abeilles, le miel et la cire. On elevait un grand nombre d'abeilles domestiques sous les trois premieres dynasties, et cet usage ne fut interrompu que par les troubles et les guerres qui accompagnereut la celebre revolution de I'empereur Thsin-chi- hoang-ti , qui , dans le troisieme siecle avant notre ere, entreprit d'aneantir I'ancien gouvernement chinois. Les his- toriens ont remarque que , vingt-huit ans apres, le fondateur de la dynastie survante requt comme un present dis- tingue quelques vases de miel et deux cents bougies de cire. Mais les abeilles sauvages, qui naissent et se reprodui- sent sans le secours de Ihomme dans la plupart des forets , eurent bientot repare la perte de ceiles qu'on avait laisseesperir. Ces abeilles se multipllent tenement dans certaiues annees, qu'elles ont ^tc quelquefois, dans les temps de disette, une ressource precieuse pour le peupie; car il faut savoir que les Chi- nois mangent les nymphes de ces mou- o ches sauvages, soft macerees dans le vinaigre ou dans une saumure, soit frites dans la graisse ou dans I'liuile. lis en scat venus ensuite a manger les nymphes des abeilles domestiques, dont les Apicius des campagnes se montrent fort Iriands. « Quoique les naturalistes chinois distinguent plusieurs sortes d'abeilles, d'apres leur couleur, leur taille, leurs mccurs etles lieux oil elles s'etablissent, quelques-uns d'entre eux reduisent toutes ces especes a trois : aux abeilles des forets, a ceiles qui habitent les rochers sur le bord de la mer, et aux abeilles domestiques. Les premieres sont plus grosses et d'un jaune qui tire sur le gris ; les secondes sont presque noires, et les dernieres jaunes comme ceiles d'Europe. La saveur, le parfum et les qualites du miel varient selon les lieux, et il en est de meme de sa cou- leur, qui est tantdt blanche , jaune de citron , jaune orange, tantot rougeatre. « On eleve aujourd'hui a la Chine assez peu d'abeilles domestiques, et plu- sieurs causes ont concouru a faire ne- giiger cette branche d'economie cham- pfitre. Les plantations de Cannes a Sucre, qui s'introduisirent dans les pro- vinces du midi vers la fin du troisieme siecle, firent considerabloment tomber I'usage du miel. La decouverte des insectes h cire blanche (pe-la-tchan), faite dans le meme siecle, acheva de decrediter les abeilles, parce que, leur cire etant trouvee moins belle que celle de ces insectes, celle-ci fut preferee par la cour et la seule admise dans les appartements de I'empereur. Ajoutons que les hivers trop rigoureux dans les provinces du nord, et les etes trop plu- vieux dans ceiles du midi, sont deux circonstances qui rendent plus difficile la conservation des abeilles, et qu'elles ont dil coutribuer, sinon a faire per- dre totalement le goOt de les elever, du moins a le restreindre. « Le P. Cibot nous a transmis quel- ques details qui peuvent donner une CHINE MODERNE. ^73 idee de la methode chinoise pour le gouvernement des ruches. Les abeilles sauvages, dans les provinces du sud , Oxent leur habitation au haut des arbres et sur leurs branches; mais, dans celles du nord, elles etablissent leur demeure a la naissance du tronc, et meme en partie dans la terre. Les Chinois ont suivi cette indication de la nature pour disposer le logement des abeilles domes- tiques. Les cultivateurs du midi pla- cent leurs ruches sur des terrains exhausses, sees, bien acres, pour pre- server leurs essaims des dangers de I'humidite ou de la trop grande cha- leur; ceux du nord, au contraire, dis- posentles leurs dans des lieux enfonces, soigneusement abrites et tournes au inidi. « Quelques-uns etablissent les ruches de leurs abeilles daus une muraille de pierres seches, batie en hemicycle, oil on laisse des vides proportionnes au nombrexies ruches qu'on doit y placer. Ces vides, qui oecupent toute I'epais- seur de la muraille, offrent aux abeilles deux ouvertures, I'une au midi et I'au- tre au nord , afui qu'elies puissent en- trer et sortir des deux cotes; mais, en hiver, on ferme avec du gazon et de la terre grasse rouverture du nord , pour garantir les mouches du froid. La mu- raille d'ailleurs est assez epaisse pour qu'oii puisse y enfoucer la ruche de maniere qu'elle s'y trouve a I'abri de la pluie, du vent et meme du soleil pen- dant I'ete. Les abeilles aiment a habiter pres des ruisseaux et des fontaines;il est a propos que les hemicycles de pierre batis pour recevoir les ruches n'en soient pas trop eloign^s, et que tout le terrain d'alentour soit en gazon ; s'il est plante d'herbes odoriferantes, les abeilles ne s'en trouveront que mieux ; mais il importe que le lieu de leur demeure soit solitaire et peu fre- quente. «■ On regarde a la Chine comme un point essentiel de ne laisser ni trop ni trop peu de miel aux abeilles : si on leur en donne trop, elles deviennent pnres- seuses, inlirmes, et ne se multiplient pas; si Ton use d'une economic trop li- goureuse, elles s'epuisentetd^perissent en peu (ie temps. Dans les provinces du midi , on fait annuellement deux recoltes de miel et de cire, une au prin- temps, I'autre apres le commencement de I'automne : on ne connait que celle du printemps dans les provinces sep- tentrionales. « Les ruches chi noises varient beau- coup entre elles par leurs formes : les unes sont en berceau renverse, les au- tres en caisse de tambour, quelques- unes en tour carree; mais les plus re- commandees et les plus accreditees sont celles qui se forment et se com- posent de plusieurs etages mobiles, paroe qu'on les regarde comme les plus commodes pour la recoltedu miel etde la cire, et comme les moins meur- trieres pour les abeilles. On trouve en- core les memes avantages reunis dans une autre espece de ruche, qui s'ouvre d'un cote par une porte, laquelle s'em- boite comme un couvercle ; a la surface interieure de cette porte sont fixees des etageres de bambou , auxquelles les abeilles altachent et suspendent leurs gateaux de cire. Lorsqu'on veut exploi- ter une ruche, il suffit d'ouvrir ou plu- tot d'enlever cette porte laterale, qui amene au dehors tons les tresors qu'elle renferme. On ecarte ensuite les abeilles avec la fumee d'une grosse torche d'ar- moise sechee qu'on allume et qu'on tient au vent; soit que cette fumee plaise aux abeilles par son odenr, soit qu'elle les enivre, elles ne s'effarou- chent ni ne s'irritent et se laissent pai- siblement depouiiler. « Dans les contrees ou les froids de rhiver sont trop longs et trop rigou- reux pour que les abeilles puissent les supporter, on les enferme dans leurs ruches , qu'on garnit en dehors de gazon seche au soleil et qu'on recou- vre en totalite d'un enduit de terre grasse, afin que I'air exterieur ne puisse pas y penetrer. Elles passent I'hiver dans cette exacte cloture, et leur prison ne s'ouvre qu'au retour du printemps. « II y en a, dit I'auteur du livre chinois Hod-king, qui suspendent une poule dans la ruche, avant d'y enfcrmer les abeilles; mais ils la vident et la lais- sent quelque temps exposee a I'air, atin qu'elle se desseche un peu et ne re- pande pas de mauvaise odeur. Quand on ouvre la ruche au printemps, ajoute- t-il, on ne trouve plus que le squelette 574 L'UNIVERS. de la poule : plumes et chairs, tout a ^te mauge. « Si i'on ne blanchit pas aujourd'hui a la Chine una grande quantite de cire d'abeilles, ce ii'est pas qu'on y ait ignore le secret de cette operation. II est certain par i'histoire de la dynastie des Thang, qui a commence Tan 619 et fini en 907, qu'on blanchissait alors la cire d'abeilles, ou en la faisanttrem- per pendant cent jours, vers le temps de la canicule, dans de I'eau de pluie d'orage, ou en la lavant a plusieurs reprises dans I'eau d'une petite riviere, alors connue sous le nom de Yan. Les proeedes de cette manipulation n'ont cesse d'etre en pratique que depuis la decouverte de la belle cire d'arbre, blanche par sa nature, et dont on se sert aujourd'hui a la cour. Les mission- naires font blanchir, dans leur resi- dence de Pe-king, de la cire d'abeilles Eour I'usage de leurs eglises, et I'on en lanchit egalement a Canton pour la consommationdes Europeens; ces bou- gies sont fort belles, mais eiles coutent presque aussi cher qu'en France. « Peut-etre n'apprendra-t-on pas sans quelque surprise que les cierges longs ne sont pas inconnus a la Chine et que de tout temps on s'en est servi dans les sacrifices au Chang-ti ct dans les autres ceremonies religieuses. Get usage porte tous les caracteres de Tan- tiquite et parait dater des commence- ments memes de la monarchie. « La cigale. « Les pfcis anciens livres de ia Chine ont parle de la cigale, de maniere a ne laisser aucun doute sur les idees qu'on se formait alors de cet insecte singu- lier : ils I'ont design^ par un mot qui signifle Vinsecte qui crie ou qui chante par les jlancs. Peut-^tre les anciens Chinois n'ont-ils pas etudie, comme nous , ni su aussi bien demeler le me- canisme et le jeu des organes par les- quels ce petit animal fait un si grand bruit; mais il parait qu'ils out bien connu ses metamorphoses, ses habi- tudes et toute I'histoire de sa vie. Un anclen livre expose tous les details de son histoire naturelle : il enseigne que la cigale commence par etre un ver, qu'elle seuterre, en automne, au pied des arbres pour y passer i'hiver; qu'ell« sort de terre au printemps, monte sur les arbres et s'y metamorphose. Le lettre Ou-ta , qui vivait sous la dynas- tic des Thang , allait delerrer lui-meme des nymphes de cigale, pour les faire voir aii.x paysans, auxqueis il montrait au.ssi les branches de hois mort ou la mere avait depose ses a3ufs, afm de desabuser ce peuple credule des fables et des idees superstitieuses qu'on se plaisait a repandre alors sur I'histoire de cet insecte. « La Chine parait 6tre plus riche que TEurope en cigales, dont elle compte jusqu'a six espeoes, savoir : la cigale aux cinq couleurs, c'est-a-dire sur laquelle on distingue du jaune , du rouge, du bleu, du vert et du noir ; la cigale de ble , qui est verte et pe- tite; la grosse cigale, qui a jusqu'a trois pouces de long ; la cigale moyenne; la cigale verdatre et argentee, et enlin la cigale couronnee, qu'on ne trouve que sur les bambous. On ne croit pas que celle-ci laisse aucune depouille apres sa metamorphose , et la preten- due couronne dont on orne sa tete ne parait etre qu'une double antenne a plu- sieurs aigrettes. On cite encore une au- tre variete de cigales, qu'on dit etre ri- chement nuancee de jaune etde rouge. La plupart de ces especes ne se trou- vent que dans les provinces du midi. <( Les anciens Chinois se faisaient un amusement , dans la belle saison , d'.il- ler a la chasse des cigales , et cette chasse s'executait la nuit, a la clarte des flambeaux. Les anciens livres sem- blent donner a entendre que la lumiere attirait ces insectes ailes et les faisait descendre des arbres. Au reste, le plai- sir seul ne dirigeait pas les chasseurs, et le gibier qu'ils prenaient n'etail p;!S pour euxune proie inutile : les Chinois d'alors mangeaient les cigales, qu'ils regardaieiit comme un mets tres-iieli- cat. Les Grecs en furent egalement. friands : elles faisaient, suivant Aris- tote, les delices de leurs tables. II nous apprend qu'avant I'accouplement on preferait les cigales niSles, et qu'apres la fecondation on accordait la prefe- rence aux femelles, a cause des oeufs qu'eltes contenaient. « Les cigales , pendant un temps , CHINE MODERNE. »75 obtinrent a la Cliine tous les honneurs de la mode, ety devinrent tout a coup I'objet d'uii engouement general. Ellas durent cette eciatante fortune a un pau- vre lettre de la dynastie des Thang, qui , pour alleger'sa misere, s'avisa de recourir a I'expedient de faire un com- merce de ces inseetes. II alia dans la catnpagne , choisit les plus belles 'ci- gales , leur fit a chacune de petites ca- ges, et revint les montrer et les offrir dans les rues de Tchang-ngan , alors capitale de I'empire. G'etait une nou- veaute : il n'en fallait pas davantage pourqu'elle reusstt dans unevilleriche et voluptueuse. L'ascendant de la mode fit trouver agreable a la ville le cri de la cigale, dont on ^tait excede dans les campagnes. L'imperatrice, les reiues, les dames du palais voulurent avoir de ces mouches chanteuses ; on erigea m^me en titres d'offices, avec de forts appoin- tements , des charges de pourvoyeurs , qui n'avaient d'autres fonctions que celle de fournir la cour d'une certaine quantite de cigales de toutes les tailles et de toutes les couleurs. C'etait un de- lire, une vraie fureur : on rencontrait des cigales dans toutes les maisons , on en portait avec soi dans les visites; toute la ville retentissait de leurs cris. Les arts s'emparerent sur-le-cliamp des cigales; elles entrerent dans les bro- deries, dans les dessins des etoffes, dans la ciselure des vases. On en fit en email , en pierres de yu, en or, en pierreries, et une femme elegante ne se serait pas cruebien paree,si eilen'eiit porte une cigale parmi ses ornements de tete. La mode de ces inseetes briiyants a passe a la Chine; mais il en est reste un amusement de plus pour le peuple et pour les enfants : les gens de la campagne ont continue a prendre des cigales pour les venir vendre a la ville, et Ton continue a les leur ache- ter. « Les poetes ne furent pas les der- niers a partager I'ivresse generale. Des flots de vers coulerent en I'honneur de I'insecte a la mode, et les recueils du septiemeetduhuitiemesieclesontpleins de ces pieces de poesie, toutes aujour- d'hui plongees dans Toubli , a I'excep- tion de quelques-unes que leur merite a fait surnaeer. « Les medeeins chinois font entrer dans plusieurs de leurs remedes les de- pouilles de cigales, et quelquefois la ci- gale elte-m^me. II faut avoir soin de recueillir ces depouilles avant les pluies. On en detache tout ce qui n'est pas le corselet; on lave ceiui-ci dans une eau chaude pour en enlever toute la terre, et apres I'avoir fait passer a la vapeur de I'eau de gingembre, on le fait se- cher. Cette depouille , reduite en cen- dres, est excellente, dit-on, pour ar- reter une dyssenterie inveteree ; mise en poudre et donnee en potion , elle apaise les convulsions des enfants, cal- me les migraines violentes et facilite les suites de raccouchement; prise en in/usion , elle aide a I'irruption de la petite verole et tempere I'ardeur de la fievre qu'elle cause. Les jeunes cigales dont on a retranche la tete , les ailes et les pattes, et qu'on a fait secher apres les avoir expos^es a la vapeur de I'eau de gingembre, ont les memes vertus que leurs depouilles , mais dans un de- gre d'energiesuperieur pour toutes les maladies internes. On les recommande surtout contre les convulsions des en- fants , accompagnees de I'extinction de voix , et contre les vers "Suxquels ils sont sujets. On les emploie avec un egal succes pour delivrer les femmes de leur fruit, quand il est mort dans leur sein, et pour soulager dans les retentions d'urine. Ce meme remede, dans ce dernier cas, est indique par Dioscoride et par plusieurs de nos me- deeins modernes(*). » Papillons de la Chine. « On salt que cet insecte a six pieds, quatre ailes plus ou moins poudreuses, des yeux et des antennes; qu'il vieiit originairement d'une chenille, et qu'a- pr^s avoir passe par I'etat de chrysa- lide, embleme de la mort , il se meta- morphose , renait, sort vif, brillant, radieux , du milieu des debris de son ancienne depouille, et s'^lance dans le sein des airs , dont il devient I'habitant le plus volage et le plus semillant. Les plus grandes especes se rencontrent (•) Voy. Grosier, De la Chine, on Descrip- tion generale de eel empire, redigee d'apres les Memoires de la mission de Pekin, t. Ill, p. 393 a 400. 576 L'UJNIVERS. parmi les phalenes ou papillons de iiuit ; dans toutes , les couleurs des ma- les sont ordinairement plus foncees, plus vives et plus eclatantes que dans les femelles, et le corps de celles-ci est , en general, plus gros. Les papillons de I'Asie el des deux Indes sont les plus beaux de I'univers. Rien ue peut etre compare a reclal et a la richesse des nuances qu'ils etalent : on croit voir etinceler, sur le reseau l^ger de leurs ailes , I'or, le saphir, I'emeraude et la topaze. Ces magnifii)ues insectes sont aussi plus forts et plus grands que les notres; mais on pretend que leurs especes sont moins nombreuses que ceiles des papillons d'Europe, dont nous comptons plus de deux cents va- rietes. « Les plus beaux papillons de la Chine sont ceux qui se trouvent sur la montagne Lo-feou-cliau , situee dans la province de Canton. Leurs couleurs sont singulierement varices, et sans etre tres-eclatantes, forment des com- partiments et des dessins d'une extreme delicatesse. On en fait un si grand cas, qu'on les envoie jusqu'a la cour. Ces papillons, qui sont de la.classe des phalenes , sont beaucoup plus gros et ont les ailes bien plus larges que ceux de TEurope. lis restent comme immo- biles sur les arbres, pendant le jour, et its s'y laissent prendre sans peine. Ce n'est que vers le soir qu'ils commen- cent a voltiger, a peu pres de la menie maniere que les chauves-souris, dont quelques-uns semblent egaler la gran- deur par I'etendue de leurs ailes. On vante aussi les papillons de la montagne Si-chan, dans la province de Pe-tclie-li; mais ceux-ci sont moins grands, et ne jouissent pas de la m^nie celebrite que ceuxde la montagne Lo-feou-chan. « Le beau papillon violet de la Chine nitrite en particulier d'etre decrit. Ce papillon, qui est de la classe des diur- nes , a trois pouces et demi de largeur, lorsque ses ailes sont etendues. Les yeux sont grands et d'un hrun rouge, la tete et le corselet sont noirs, taclie- tes de bianc. Le corps est petit en pro- portion des ailes ; le ventre est long , mince et noir, marque seulement , a I'extremite, de quelques anneaux ou raies de bleu de ciel. L'iosecte a six pattes, dont les deux anterieures sont extr^mement courtes , et ne peuvent lui servir a marcher; les pieds ou griffes sont noirs. « Ce papillon porte ses ailes bien etendues ; les deux superieiires sont en dessus d'un violet vit et velout^^ qui est changeant en noir. Ce fond violet porte des taches bleu celeste de difte- rentes grandeurs, blanches au milieu, et versle bord exterieur sont quelques pe- tites taches blanches. Le dessus des ailes inferieures est de couleur brune,a herds tachetes deblanc; le dessous des quatre ailes est brun, parseine de difterentes taches blanches , un peu bleuatres. « On a imagine quelques instruments, tels que des filets legers de gaze ou de soie, pour aller a la chasse de cet in- secte volage, et faciliter les moyens de le saisir vivant. On dit que les' dames chinoises , dont un grand nombre sa- vent meler a leurs amusements le goOt pour I'etude et I'observation de la na- ture, s'y prennent plus sdrement pour se procurer de jolis papillons. Elles choisissent les plus belles chenilles, lorsqu'elles les voient parvenues au mo- ment de filer leur coque , et les eufer- ment toutes ensemble dans une boite interieurement garnie de petites trin- gles ou batonnets disposes en et.ige. Elles attendent ainsi I'epoque de la me- tamorphose de ces insectes, et quand elles les entendent battre des ailes , elles s'empressent d'ouvrir la boite, et l^chent ces brillants prisonniers dans un appartement bien ferme et rempli de fleurs. C'est par ce procede facile que les dames chinoises obtiennent cha- que annee des papillons choisis et des plus superbes especes, soit qu'elles veuillent en former des suites pour un cabinet, soit qu'elles chercheut seule- ment a se procurer des modeles qu'elles puissent imiter dans leurs ouvrages de broderie ou de peinture. « Les papillons desseches ont si peu de poids et occupent si peud'espace, qu'ii en est parvenu en PLurope un as.sez grand uombre d'individus, meles dans les bol- tes et les caisses qu'on recoit de la Chine (*). » (*) Crosier, Descript. geiu'ialcdo la Chine, I. in, p. 407 ji ', 1 1. CHINE MODERNE. 677 Les tertnes ou fourmis blanches. « Parrai les nombreuses especes d'in- sectes connues a la Chine, une des plus singulieres et des plus malfaisantes est celle des fourmis blanches. Elle est generalement repandue dans tons les pays situes entre les deux tropiques : on la trouve en Amerique, en Afrique, aux Indes, a la Chine, au Japon, a la Nouvelle-Hollande ; et , dans toutes ces parties du inonde, elle se signale par ses invasions soudaines, par ses sour- des et obscures devastations. "Get insecte, dans les divers pavs ou il est repandu, a recu differents noms, la plupart fondes sur son genie destructeur. Linne et quelques natu- ralistes I'ont d^signe sous le norn de termes. On s'accorde assez a lui don- ner celui de Jourmi blanche, non qu'il ait aucun des caracteres essentiels qui distinguent nos fourmis proprement dites, mais uniquement a raison de la conformite qu'on remarque entre la ma- niere de vivre de ces insectes et celle des fourmis communes. Comme celles- ci , les termes vivent reunis et forment des societes nombreuses et regulieres; ils se construisent des habitations sou- terraines , se dispersent dans tous les lieux d'alentour pour butiner, et pa- raissent s'occuper du soin d'amasser des provisions. Ces habitudes sont les seuls traits de ressemblance qui les rapprochent des fourmis, dont ils dif- ferent meme par leur forme, quoique d'une grosseur a peu pres egale. • Les termes sont d'une blancheur de neige, a I'exception de la tete etde la gorge, parties dures, rudes au tou- cher et d'une couleur obscure, tirant sur le brun. La tete est terminee par un museau arme de quatre dents, ou plutot de quatre petites pinces recour- nees et tranchantes. Le reste du corps est mou et simplement recouvert d'une peau fine et delicate, qui les laisserait sans defense contre le plus faible en- nemi, si I'instinct, comme nous le di- rous, ne pourvoyaita leur conservation. « On compte cinq a six especes ou v.'u'ietes de termes, qui different par la grosseur, par quelques accidents de forme et de couleur, et surlout par leur manicre de se loger et de bAtir; Z'," Licraison. (Chink modernk.) mais ou remarque dans toutes les memes habitudes generales. Chacune de ces especes est composde de trois ordres d'individus : d'ouvriers, de sol- dats et de parfaits ou ailes. Le premier de ces trois etats suit immediatement la naissance ; les deux autres paraissent etre le resultat de deux metamorphoses que subit I'insecte. Les termes ou- vriers sont les plus petits de I'espece, mais les plus nombreux; leur nombre est a celui des soldats comme cent est a un, Eux seuls sont charges de tous les soins doraestiques, de tous les tra- vaux de I'interieur. Les soldats ont le corps plus gros et plus long , une t^te enorme qui a la consistance de la come, et des pinces plus grandes et plus du- res. lis n'ont d'autre fonction que celle deveilleralasilretedelacolonie. Si Ton fait une brechea I'habitation commune, ils s'y portent aussitot pour repousser I'ennemi, Celui-ci a-t-il disparu, ils se retirent eux-memes, et font place aux ouvriers, qui s'empressent de repa- rer et de fermer la breche. Le troisieme ordre offre I'insecte parvenu a son etat de perfection. Toutes ses dimensions se sont agrandies; son corps, qui a huit a neuf lignes de longueur, deploie quatre superbes ailes ordinairement brunes, rouges dans quelques especes. Les termes ailes sont les seuls qui aient la puissance de se reproduire, et c'est parmi eux que les colonies nouvelles choisissent leurs rois et leurs reines. Parvenus a cet etat, ils cessent de prendre part aux travaux domestiques et aux combats; ils se livrent molle- ment au repos, et ne s'occupent plus que de leurs amours. Quelques semai- nes apres leur metamorphose, ils emi- grent et abandonnent les toils pater- nels. Quelques -uns, accueillis par d'autres termes, fondent avec eux de nouveaux etablissements ; tous les au- tres perissent dans I'espace de quelques jours. Ces fourmis ailees ne peuvent voler que dans un temps pluvieux et humide. Bientot I'ardeur du soleil des- scche leurs ailes, qui se detachent; elles tombent , se trament penibiement sur la terre, apres avoir ete quelques instants les lilies de I'air, et ne tardent pas a etre devor^es par de nombreux enncmis. 37 578 L'UINIVERS. « Les ternies se multiplient avpc uiie rapiditj^ prodi;^ieuse, et lorsqu ils se sont emparcs d'un appartement, il ii'y a que les seules fourinis noires , doiit ils sont mortelleinent hais, qui puissent les en chasser. Ces insectes niettent une telle activite dans leurs ravages, ^ue , dans i'espace d'une nuit , ils per- cent, non-seulement les ballots les plus epais, les pieces de draps, les soieries, Ites toiles, mais encore les tables, les buffets, les armoires; ils attaquent rtignie le fer, le cuivre et I'argent , sur lesqiiels ils laissent I'empreinte de leurs petites dents; a moins qu'on ne veuille attribuer les erosions qu on y remarque a racrinionie de quelque humpur qu'ils laissent echapper. Ces fourmis blan- ches, dans les provinces meridionales de la Chine, sont le fleau des biblio- tlieques ; elles devorent les livres et en detruiselit jusqu'aux couvertures. Le ilieilleur moyen, dit-on, pour s'en ga- rantir dans les magasins , est d'etendre sous les ballots une couche de sel qui lies deborde; et dans les appartements, d'elever les meubles, qu'on veut pre- server, siir des piedestaux enduits de goudron. « Une habitude naturelle et tres-sin- guliSre distingue specialement ces four- mis : elles fuient la lumiere comme les taupes, et ne marchent jamais a de- convert; niesure de silrete, que I'ins- tinct leur fait prendre, sans doute, pour defendre leurs petits corps , qui sont d'une substance molle et absolu- ment nus. Elles percent et s'ouvrent des routes a travers toutes les matieres qui ne peuvent resister a I'active cor- rosion de leurs petites dents tranchan- tes; mais rencontrent-elles un corps solide et d'une durete impenetrable ^ elles s'en d6tournent , et se construl- sent une voQte ou galerie qu'elles pro- longent, a mesure qu'elles avaricent, jusqu'au lieu ou elles se proposent d'exercer leurs ravages. Ont-elles a francbir des tasde grains, un amas de petits corps detaches et mobiles, qui n'offrent aucun point d'appui, leur galerie se metamorphose en un long tujau , ;i travers lequel tout le detache- ineut passe et chemine. Telle fut un jour leur tactique , dans un magasin de la compagnie des Indes orientates, pour gravir au haut d'un enorme tas de clous de girofle, qui s'elevait jus- qu'au plafond : parvenues a ce point, elles percerent le plancher, et detrui- sirent, dans le magasin superieur, une quantite considerable d'etoffes precieU- ses, qu'elles dechiqueterent. « Ces chemins couverts s'executent avec une etonnante celerite ; le nombre des ouvrieres et le bon ordre ciu'elles Observent abregent et facilitent le tra- vail. Les fourmis s'avancent sur deux files. L'une des deux qui se trouvent a la tete depose un peu de terre, dont elle s'est muuie, sur le lieu oil doit com- mencer la votlte : I'autre y degorge une liqueur visqueuse. Elles petrissent tou- tes deux cette terre, lui donnent la forme qu'elle doit avoir, et se retirent de part et d'autre , le long des deux files, pour aller se charger de nouveaux materiaux et revenir ensuite prendre place a la queue de toutes les autres. Les deux fourmis qui, apres le depart de celles-ci, se trouvent les premieres en rang, executent la meme manoeuvre, laquelle est successivement repetee par toutes celles qui composent la double file. Ainsi des milliers de fourmis tra- vaillent continOment et satis s'embar- rasser, et la galerie s'acheve en tres- peu de temps. « Le voyageur Kaempfer a observie ces fourmis blanches au Japon et dans I'lnde. « On m'a rapporte, dit-il , plu- « sieurs particularites surprenantes sur « la Vitesse de leur marche et les rava- « ges qu'elles ont faits : mais je n'eki « dirai rien dont je n'aie ete moi-hi^me « temoin oculaire. Pendant que j'etais « a Coylang, fort des Hollandais sur la « cote de Malabar, j'avais un apparte- « ment dans la maison du gouverneur. «■ II arriva un jour qu'etant fort occupy, n je ne me couehai qu'a iniuuit. Le « lendemain matin lorsque je me levai, « j'apercus sur ma table des marques « de ces* voiltes, qui etaient a peu pres « de la grosseur de mon petit doigt, et, « en regardant de plus pres, je trouvai « que ces animaux avaient fait un trou, « de cette mfime grosseur, dans un « des pieds de la table en moutant, un « autre au travers de la table, et un « troisieme au milieu de I'autre pied en « descendant, qui entrait dans le plan- CHINE MODERNE, 579 « cher. Ce fut un bonheur qu'elles ne « toueherent point a mes papiers, ni aux « autres choses que j'avais laissees sur « la table. Tout cela se fit dans I'espace « de quelques lieures. » Ce voyageur remarque que la inatiere de ces vofltes en galerie est a peu pres la ni^me que celle dent les gu6pes construisent leurs nids. « Ces insectes rongeurs se fixent meme quelquefois dans ies caisses qu'ils ont envahies , et trouvent commode d'y etablir leurs nids. « C'est ce qui « est arrive, dit un voyageur anglais, a « I'etui de men microscope, qui etait « en acajou et ou, comme on le pense K bien, j ai ^te tres-surpris de trouver « un joiir ces insectes etablis. L'ayant « laisse, pendant un voyage que je fis « aux lies du Vent, dans les magasins « de M. Campbell, gouverneur deTa- « bago, je m'apergus a mon retourgue «■ les i'ourmis blanches y avaieut lait « beaucoupde degSts. Mon microscope « n'ayaut point ete epargne, tout etait « rong^, excepte le metal et le verre. « En revanche, je troutai plusieurs cel- ft lules sur le pied , qui etait de cuivre, « et sur leS verres, ou il resta une em- « preinte gommeuse que je n'ai fait dis- « paraitre qu'avec beaucoup de peine. « Quant au cuivre, il avait entieroment « perdu son poll. » Dans ce meme ma- gasin, ces fourmis criblerent de trous une piece de via vieux de Madere, dont toute la liqueur s'ecoula par les ouver- tures faites au tonneau. u M. Philip, capitaine de vaisseau, « ajoute le meme voyageur, m'a racont^ « qu'une personne ayant laisse, pendant « vingt-quatre heures, sa malle sur une « table, trouva ses habits perces d'une « infinite de petits trous et ses papiers « enlierement ronges; il n'en restait « que de tres-petites parcelles. Quant a « ses crayons, il n'en retrouva pas le « moindre morceau. Quelques pieces « d'argent furent couvertes de petites « taches produites par une liqueur si « corrosive, que le metal en est reste « marque tres-longtemps. » « Le genie malfaisant des termes ne se borne pas a ravager les magasins, a detruire les meubles d'un appartement ; ils attaquent quelquefois les ^diflces niemes, dont un grand nombre, en Afri- que et dans I'lnde, ne sbtit que de hois. Leurs invasions sont d'autant plus sdres et dangereuses, qu'elles ne sont pas apercues : ils commencent leurs premieres''approches sous lerre ets'eta- blissent sous les fondements de la mai- son oil ils veulent penetrer. Ils s'intro- duisent et s'ouvrent des routes dans les poteaux qui la soutiennertt , dans ceux qui les traversent et forment avec eux la cage du bStiment. Cette armee silencieuse de mineurs s'eleve ainsi jus- qu'a la charpente quiporte letoit. L'oeil n'apercoit aucun desordre, aucun chan- gement exterieur ; mais tous ces bois sont perces, ronges, evides ; bientot ils fl^chissent sous le poids, et la mai- son s'ecrouie, avant mSme qu'on ait soupconne le danger. « Quelquefois ces insectes, par ins- tinct sans doute pour leur propre con- servation, rempiacent la quantite de matiere qu'ils ont tiree de I'ihterieur des poutres et des solivfes par Uhe sot-te d'argile qu'ils preparent. Us en rem- plissent les excavations qu'ils ont faltes, et n'y laissent qii'un seul passage ou chemin, dont les embhanchements con- duisent a toutes les parties de la mai- son. Cette argile, en se dessechant, ac- quiert la duret^ de la pierre et donne aux bois, dans lesquels elle s'incruste, plus de solidite qu'ils n'en avaient dans leur premier etat. Cette difference de procedes, de la part de ces insectes, se- rait-elle fondee sur le sejour plus ou moins long qu'ils se proposent de faire dans les lieux oil ils s'etablissent? « Quelque redoutables que soient les devastations des termes, on ne pent s'empScher d'admirer les merveillesde leur Industrie, et surtout fart et I'a- dresse qu'ils mettent dans leurs erd- sions. Ces insectes fuient la lumiere rt semblent craindre le contact de fair libre ; aussi, tant qu'ils le peuvent, trd- vaillent-ils dans les t^nebres. S'ils s'em- parentd'une planche (surtout lorsqu'elle est de pin ou de sapin , especes de hois qu'ils semblent preferer), ils en creuserit toute I'^paisseur, sans toucher aux pa- rois des deux cotes ni aux deux sur- faces, qui se maintiennent parallelement et restent unies par I'appui que leur pre- tent quelques legeres parties de bois laissees ca et 15 dans finterieut. Un 37. fiW L'UJSIVERS. buffet, une armoire, ainsi envahis et travailles par ces invisibles mineurs, n'offrent exterieurement auciine trace de deg.1t ; leur ensemble subsiste et parait le meme. Cependaiit, de tous les ais qui les coniposent , il ne resle que les deux surfaces, aussi minces et aussi Jegeres que des feuillcs de papier. Au iiioindreclioc, lemeuble chancelle, s'af- faisse et se brise. n M. Smeathman rapporte qu'il a ete temoin de la marche d'une forte co- lonne ou armee de termes, qu'il croit d'une espece differente de celle dont nous venons de parler. Une colonne dMnfanterie europeenne ne garde pas mieux ses rangs et ne s'avance pas en pays eunemi avec plus d'ordre et de circonspection. « Je chassais un jour, « dit ce voyageur, aux environs du « fleuve Camerankoes , lorsque j'en- « tendis tout a coup, au milieu d'une « epaisse foret, un grand sifflement « qui me fit craindre rapproclie de « quelque serpent ; mais quelle ne fut « pas ma surprise, lorsque je vis qu'il « etait occasionne par une armee de « fourmis qui sortait de dessous terre « parun trou de ouatre a cinq pouces « de diametre ! Eiles etaient tres-pres « les lines des autres : a quelques pieds « de distance, elles se sont divisees en « deux colonnes, marchant sans se de- « tourner, sur un rang de douze a « quinze de front. Presque toutes « etaient de la classe des ouvrieres; on « voyait ca et la quelques soldats, dont « la fonction paraissait 6tre de mainte- •< nir le bon ordre ; plusieurs se tenaient « bors des rangs, sur les cotes et a " quelque distance de la colonne. lis « s'arr8taient de temps en teraps,comme « pour faire sentinelle, se retournant ■ de tous cotes, pour s'assurer, sans ■ doule, s'il n'y avait rien a craindre de « la part de quelque ennemi. D'autres « soldats montaient sur les plantes les « plus ^levees, et se perchant sur Icur « sommet, faisaient I'ofnce de vedettes, « tandis que I'armee defilait au-dessous. « JVutendis plusieurs fois le meme " bruit que j'avaisdeja observe en d'au- « tres circonstances : c'etait une de ces « senlinelles qui frappait centre les • feuilles d'une plante avec ses pinces, ■ et donnait ainsi I'alarmea cetieDetite « armee, qui repondait par une espece « de sifllement, et doublait le pas avec <• inquietude. La sentinelle n'aoandon- << nait cependant pas son poste ; elle y « restait tranquille, faisant seulement « de temps en temps, quelques mouve- « nients de la t^te. A quinze ou vingt- « pas de la, les deux colonnes se reuni- « rent , et les fourmis rentrerent sous « terre par deux ou trois ouvertures. « Quoiquejesois reste plus d'une beure « a les examiner, leur nombre ne m'a « paru ni augmenter ni diminuer. » « Plusieurs especes de ces fourmis blanches, telles que le termes bellico- sus, le termes atrox, le termes arbo- rum, pourraient encore nous fournir un grand nombre d'observations egale- ment neuves et piquantes; mais ces especes, plus repandues en Afrique et en Ameri(iue, paraissentetreetrangeres ou au moins peu counues a la Chine (*).» Vers k soie sauvages. II existe a la Chine trois especes de vers, dont les cocons sont utilises de- puis les temps les plus anciens, et qu'on y laisse vivre a I'etat sauvage, comme les chenilles ordinaires, sans autre soin que celui de couserver les oeufs et de deposer les jeunes larves sur les arbres qui doivent les nourrir, C'est au P. d'lncarville que nous de- vons la premiere connaissance de ces vers, qui sont tres-distincts de I'espece domestique; car ils en different par la forme, les couleurs et les proportions, aussi bien que par les habitudes et les produits. Son excellente notice, publiee dans la collection des memoires des missionnaires de Peking, date de I'an- nee 1777, « epoque, dit M. Leon d'Her- vey, oil la sericiculture commenc^ait a Feine a se faire jour en Europe, et ou on ne pouvait donner par consequent qu'une mediocre attention a eeite de- couverte; mais depuis que I'education des vers a soie est devenue chez nous une grande Industrie, les agronoiiu's, les savants se sont preoccupes de ces nouvelles races, et, lors de la derniere ambassade envoyee en Chine sous la direction de M. de Lagrenec, il fut re- (•) Voy. Grosier, Description genei-ale de la Chiae, Mil, p. 413-426. CHINE MODERNE. ;l comniande d'une manieve toute parti- culiere aux membres de la commission scieutifique de prendre a ce siijet de nouveaux renseignements et de faire parvenir en France des graines de ces vers avec les plantes necessaires a leur alimentation. « La commission aura sans doute ete dans rimpossibilite de se procurer des races qui ne se rencontrent point au voisinage de la cote, car nous ne som- mes guere plus avances aujourd'hui, a regard des vers sauvages, que nous ne I'etions au temps du P. d'Incarville; c'est a peine si Ton sait a quel genre appartiennent ces trois especes dans la famiile des lepidopteres, et il regne en- core plus d'obscurite sur la determina- tion des especes vegetales qui servent a leur nourriture [*). » Nous donnerons ici quelques frag- ments du memoire du P. d'lncarville, tel qu'il se trouve dans la collection mentionnee plus haut. « On conipte, dit le savant jesuite, trois especes de vers a soie sauvages , savoir : ceux de fagara ou poivrier de la Chine, ceux de frene et ceux de chene. Avant d'entrer dans aucun de- tail , il est essentiel de bien connaitre ces trois arbres. » « INous avons appel6 fagara le poi- vrier de la Chine, d'apres le P. d'lncar- ville, ajoutent les editeurs de la notice. II parait en effet lui ressembler, mais nous doutons que ce soit la meme es- pece. Comme cet arbre est d'une cul- ture aisee et tres-commun dans la pro- vince de Canton , ou abordent nos vaisseaux, il serait facile d'en porter quelques pieds en France; outre que les graines et surtout leurs coques peu- vent tenir lieu de poivre, ce qui serait un objet important pour le royaume, les vers a soie de cet arbre sont ceux qui donnent la plus belle soie et en phis gramle quantite. Sur la mauiere dont INF. Duhamel , cet illustre zelateur du bien public, a parle du fagara, il nous paraitrait fort douteux que celui de Chine put reussir dans les provinces septentrionales du royaume ; mais nous (*) Recherches sur I'agriculture et I'hor- licullure des Chinois , par le i)aron Leon d'Hervey Saint-Denys , p. iSa, sommes persuades qu'il r^ussirait tres- bien dans la Provence, en Languedoc et dans le Roussillon... « On distingue en Chine deux espe- ces de frene, savoir : le tcheou-tchin tl\e. hiang-tchun. Le tcheou-tchun est le meme que le notre, et c'est celui sur lequel on nourrit les vers a soie sauvages. Le kiang-tchun est fort dif- ferent du premier par sa fleur, sa graine et surtout son odeur , comme on le verra dans la notice que nous en envoyons. Nos modernes se sont peut- etre trop presses de se moquer de ce que Pline le naturaliste a dit du frene; nous ne serious pas surpris que le hiang-tchvn le justiGat completement. Le com pas de 1' Europe n'est pas assez grand pour mesurer I'univers. Que de mondes dans le monde des plantes et des arbres! Celui de Chine, qui est inunense, ne sera peut-etre pas connu en Occident de bien des siecles. « Le chene dont on nourrit une es- pece de vers sauvages est, si nous ne nous trompons , celui que nos botanis- tes nomment quercus orien talis ca- stanese folio, glande recondita in ca- psula crassa et sqiiammerosa. « Les vers a soie sauvages du fagara et du frenes ont les m^mes et s'elevent de la m^me facon. Ceux de chene sont differents, et demandent a etre gouver- nes un peu differemment. « La grande et essentielle difference entre les vers a soie du mdricr et les vers a soie sauvages, c'est que le Crea- teur s'est plu a donner a ces derniers un genie de'liberte et d'independance absolument indomptable. Le flegme, le sang-froid et I'industrie chinoise y ont echoue ; il serait done inutile de vouloir risquer de nouvelles tentatives. » p Le papillon de ces vers sauvages , dit le P. d'lncarville, est a ailes vitrees, de la cinquieme classe des phalenes , seion le systeme de M. de Reaumur. II porte ses ailes paralleles au plan de sa position et laisse son corps entierement a decouvert; il ne les a guere plus etendues quand il vole que lorsqu'il est pose. Ce papillon a a peine ses ailes sechees, qu'il cherche a en faire usage et a s'enfuir. 589 L'UNIVERS. « La nature apprend a ces petits vers a gagner vite les feuilles de I'arbre qui doit les nourrir, et a s'y r<^unirdans le in^me canton, siir differentes feuilles, comme pour y faire corps et effrayer leurs enneniis par leur nombre. lis ont m^me I'attention de se ioger sur i'en- vers des feuilles, ou ils se tiennent ac- croches a merveille, et ou ii est plm diHicile de venir les qttaquer. A peine se sont-ils seclics et accoutumes a Tim- pression de I'air.qu'ils se niettent k niauger de bon appetit, et attaquent leg feuilles du fagara ou du frene par les bonis, les entament et les broutentsans presque se reposer. Le premier jour precisement que j'avais port6 mes vers nouvfaii-nes sur I'arbre, dit le P. d'ln- carville, il survint tout a coup une grande pluie qui me donna beaucoup d'inquietude pour leur vie. Je crus que e'en elait fait d'eux, et qu'aucun n'au- rait resiste aux torrents d'eau qui etaient tombes. Des que Forage fut passe, j'allai voir si j'en trouverais encore queiqu'un. Je les trouvai qui mangeaient de grand appetit et avaient d^ja sensiblement grossi. o Les quatre mues etant passees, et elles s'operent, comme nous lavonsdit, de quatre jours en quatre jours, le ver a sole sauvage a presque toute sa crue ; il est plus gros du double au moins que les vers a soie du milrier. C'est une chenille de la premiere classe, selon le systeme de M. de Reaumur; elle est d'un vert mele de blanc, imparfaite- ment rase, a six tubrrcules sur chaque anneau. Les polls de ces tubercules sont charges dune espece de poudre blanche. Apres le dix-huitieme jour ou le dix-neuvieme, les vers a soie sauva- ges perdent tout appetit et passeut successivement d'une morne apatbie, ou d'un engourdissement, a des inquie- tudes et une agitation tres-vives. lis courent qa et la, comme s'ils craignaient de se meprendre dans le choix qu'iis vont faire d'une feuille et d'un endroit pour filer leur cocon et preparer leur resurrection de I'annee suivante. C'est ordinal rement entre le dix-neuvieme et le vingtieme jour depuis leur naissance qu'iis commencent ce grand ouvrage. Soit pout avoir de quoi arrSter les pre- miers fils du tombeau qu'il va se bStir, soit pour en augmenter I'epaisseur et la solidite, il recoquille une feuille en gondole et s'enferme dedans, sous la traine de la soie qu'il file, dont il Unit par former un cocon de la grosseur d'un ceuf de poule et presque aussi dur. Ce cocon a I'une de ses extremites ou- verte en forme d'entonnoir renverse; c'est un passage prepare pour le papil- lon qui doit en sortir. Avee le secours de la liqueur dont il est mouille, et qu'il dirige vers cet endroit, les lils bu- niectes cedent a ses efforts et il perce sa prison lorsque le temps en est venu. « En rassemblant tout ce que nous venons de dire , il est Evident que les vers a soie sauvages sont plus aises a elever, a bien des egards, qile les vers a soie du milrier, et m^riteraient peut- etre d'attirer I'attention du niinistere public, a qui seul il convient de decider s'il serait utile au royaunie de procu- rer une nouvelle espece de soie a celies de nos provinces ou des essais fails avec soin auraient prouve qu'on pent reussir a les elever. Tout ce qu'il nous convient d'ajouter a ce que nous en avons dit , c'est que ces vers sont une source de richesse pour la Chine elle- nieme, quoiqu'on y recueille chaque annee une si prodigieuse quantite de soie de vers de mdrier, qu'au dire d'un ecrivain moderne on pourrait en faire des niontagnes. « II est vrai que la soie des vers sauvages n'est pas comparable a I'au- tre, et ne preud jamais solidement au- cune teinture; mais, 1° elle c oiite moins de soins, ou plutot n'en coQte presque aucun dans les endroits oil le climat est favorable aux vers sauvages, parce que tout ce qu'on risque en les negli- geant, c'est d'avoir une recolte moins aboiidante : encore est -on maitre de Tavoir plus grande en multipliant le nombre des arbres qu'on destine aux vers; 2° comme on ne devide pas les cocons des vers sauvages, mais qu'on les file, ils depensent moins de temps et de main-d'ceuvre 3" la soie qu'iis donnent est d'un beau gris de lin, dure le double de I'autre au moins, et ne se tache pas aussi facilement; les tachcs meme d'huile ou de graisse ne s'y etendent point et s'effacent tres-aise- CHIINE MODER?JE. 583 ment; les etoffes qu'on en fait se lavent comme le linge; 4° la sole des vers sanvages, nourris sur des fagaras, est si belle dans certains endroits, que les etoffes qu'on en fait disputent de prix avec les plus belles soieries,quoiqu'elles soient unies et de simples droguets. Quand nous avons dit que cette sole ne se devide point et ne prend point la teinture, c'est un fait que nous racon- tons. L'industrie europeenne, aidee et eclairee par les elans du genie francais, viendrait peut-etre a bout de devider les cocons des vers a sole sauvages et d'en teindre la soie (*). » Nous croyons devoir reproduire la note suivante que IM. Julien Bertrand, missionnaire apostolique en Chine, oil il babite depuis plus de quinze ans , adressait, il y quelques annees, a Tun de ses confreres. Cette lettre donne des details fort curieux sur I'espece des yers sauvages du chene, mentionneedejapar le P. d'Incarville. M. Julien Bertrand nomme ces chenilles I'ers querciens, du nom de I'arbre sur lequel elles vi- vent. « Tliong-jln-fou, 19 juillet 1842. « Je crois vous avoir dit, il y a quelques aanees , qu'il se trouve ici une espece de vers a soie sauvages qui se nourrissent de la feuille de chene, vers auxqiiels le gouverne- nient francais semble altacLerun grand in- tcret. Je pense que vous serez bien aise d'en avoii' une uotion. Je regi-etle de n'^tre pas un peu naturaliste pour vous parler digne- nient d'une matiere si importante. « Ces vers se trouvent dans les departe- ments les plus montagneux du Kouei-tcheou, el aussi dans quelques deparlenients du Sse- tchouen. Quoiqu'oii les transporte el qu'on les eleve avec avantage dans divers lieux, on pent dire cependaut que leur patrie favorite est dans le Kouei-tcheou , sur les plus hautes inontagnes, ou I'air est plus pur et plus frais que partout ailleurs. Vous serez etonne sans doule que ces vers se developpent avec plus de succes sur les raonlagnes que dans la piaine ou le climat est plus doux, vu que les vers du nuiricr reussissent mieux dans les pays chauds que daus les pays froids. M. He- bert, delegue de France en Chine, m'en a temoigne sa surprise. Cela est vrai pourtant, (*) Memoires des missionnaires de Pe-king, t. II, p. 575 et suiv. et confirme par la longiie experience des Chinois, et en merae temps par les produits de ces vers, qui sont plus abondants sur les hautes montagnes qu'ailleurs ; car, sur les hautes montagnes, on fait deux recoltes de soie par an ; tandis que , dans les endroits has, on n'en fait qu'une, bien inferieure a la premiere, qui a lieu dans les regions elevees. C'est une preuve evidente qu'il faut auxvers querciens une temperature plutdt froide que chaude. « L'education des vers querciens est tout a fait differente de celle des vers miiristes. I^es vers querciens sont eleves sur les arbres, non dans les maisons. Des qu'ils sont nes, on les porte a la montagne et on Its met sur les arbres. Si on voulait les elever a la maison, en leur distribuant des feuilles de chene, comme on distribue des feuilles de mikrier aux vers mif- ristes, ils ne mangeraient pas et mourraient de suite : ils veulent manger sur I'arbre et se choisir eux-memes les feuilles selon leur godt. Les chenes sur lesquels o\\ eleve les vers quer- ciens nerequierentaucune culture parliculiere; ils sont dans leur etatnaturel. Avant d'aller plus loin, je dois vous faire ici quelques ob- servations sur les chenes. En Chine, on dis- tingue deux especes de chene : Tune appelee tsin-kan, I'autre fou-li. Ces deux especes sont tres-peu differentes; il faut les examiner de bien pres pour les distinguer. La seule diffe- rence consiste dans les feuilles et la durele du bois ; le tsin-kan est plus dur que \efou-U , ses feuilles sont longues et dentelces , elles ressemblent uu peu a celles du chataignier; le fou-li a les feuilles plus courtes et plus larges : a ma maniere de v^jr, c'est I'espece de chene qui se trouve en France, au moins dans le Velay, car dans les autres provinces je n'ai pas examine les chenes. Quoique les vers querciens mangenl les feuilles de fun pt de I'aulre, ils prcferent pourtanl le tsin-kan au fou-/i. Ici on ne laisse pas vieillir les chenes, tons les huit ou neuf ans on les coupe a ras de terre; de leurs racines pullulent des reje- tons que Ton coupe de nouveau au bout de huit ou neuf ans : ainsi toutes les foi-Ats de chenes ne sont que de simples taillis. Ici, toules les montagnes sont cOuverles de ces arbres. « Au bout de dix a onze jours, on voit re- muer, dans le panier ou les papillons quer- ciens ont depose leurs oeufs , des milliers de petites chenilles noires, qu'on se hate de transporter sur la montagne et de placer sur les arbres dont les feuilles ne sont qu'a demi formees, car c'est a la fin de mars ou au com- mencement d'avril. Une fois sur les arbres, on les y laisse et le jour et la nuit, qu'il pleure 684 L'UNIVERS. ou qu'il veiilo. II nest pas necessaire de les gardei- pendaiil la nuit; pendant le jour, il suffit qu'une personne se lienne tout pres {)Our epouvanter les oiseaux , et pour aider es vers a emigrer dVin arbre a I'autre et re- lever ceux qu'un coup de vent ou un autre accident aurait fait tomber a terre. « Les chenilles querciennes changent quatre fois de couleur : d'abord elies sonl noires, plus tard elles deviennent violelles, quelque temps apres elles sont jannes, et arrivent en dernier lieu a un violet qui approchc du noir. Le temps requis pour atteindre leurqnatrieme et derniere periode est de quarauie a cin- quante jours , et alors elles sunt grosses comme ie petit doigt d'un liomme ordinaire. Ces vers querciens sont doues d'un instinct parliculier pour se precaulionner contre les injures du temps : s'ii pleut , ils se placent au revers de la feuille ; si le vent est froid, ils savent aussi se mettre sur le cote de la feuille qui n'est pas expose au vent. En 1840, vers la fin de mars, je me trouvais dans une chretiente oil Ton eleve beaucoup de vers querciens; le 28, les vers recemment eclos elaient sur les arbres; le 3o, il tomba de la neige ; les trois jours qui suivirent, le froid etait si piquant qu'a la maison on ne pou- vait quitter le feu. Alors je me mis a dire aux Chretiens : Cetle fois-ci, je crois bien que vos vers a soie vont tons mourir. — Oh ! non , repondirent-ils ; ils sont un pen engour- dis, il est vrai, par le froid, mais ils ne mour- ront point. En effet, ils ne moururent point, car le 3 avril, en passant moi-meme par i'en- droit ou les vers etaieut sur les arbres, je les vis manger de tres-bon appetit. « Apres avoir mange des feuilles pendant quarante a cinquante jours, ils se mettent a ourdir leur cocon, dont la longueur a plus d'un pouce et dont la grosseur est celle d'une noix ordinaire. Comme il y a toujotirs des vers plus vigoureux que les autres, il se pre- sente aussi des cocons d'une taille plus forte quelereste; ils ourdissent leur cocon sur une feuille qu'ils roulent en cornet, et, si une seule ne suffit pas, ils en rapprochent une seconde. C'est la-dedans qu'ils font leur precieux ouvrage ; ils commencent par our- dir le dehors du cocon, dans lequel ils s'en- ferment el travaillent, et puis ils le terminent en dedans , ce qui ne demande pas plus de ti-ois jours. Ce cocon est de couleur jaune, tirant un peu sur le Wane. L'epoque de la recolte des cocons varie selon la difference des climats : ainsi, dans la plaine et sur les montagnes peu elevees, on recueille les co- cons vers le 20 et le 24 mai, ou quelques jours plus tard j tandis que sur les monta- gnes du Kouei-tcfaeou ce n'est que du i5 au 3o juin. Sur les montagnes, la vcgetatioa etaut plus tardive, les vers a soie sont aussi plus tardifs a sortir. << Dans les pays montagneux du Kouei- tcheou, et meme dans les endroils du Sse- tchouen, on ne fait pas mourir tons les cocons ; on en reserve une petite qnantite pour com- mencer de suite une nouvelle education. Dans les pays moins eleves, on se conlenle d'une seule recolte, parce que la seconde ne compenserait pas le travail et la peine, a cause des chaleurs de juillet et d'aoiit, qui feraient mourir presque tons les vers. « Sur les hautes montagnes , ou les nuils sont loujours fraiches et la chaleur lemperee par le souffle des vents, et oil les insecles en- nemis sout rares, les vers querciens se deve- loppent avec la meme vigueur que la pre- miere fois; celte seconde recolte se fail vers le l*' octobre. « La soie quercienne , quoique inferieure a celle des vers de milrier, ne laisse pas que d'etre tres-belle et tres-solide. Lorsqu'elle est tissee, elle donne une toile tres-fraiche. Je crois qu'en I'Yance on tirerait un tres-grand parti de celte soie. Ce n'est done pas sans raison que le gouvernenient francais attache un grand prix a I'acquisilion de celte race de vers a soie, el desire ardemment pouvoir la transporter en France (*). » L'hirondelle dite de la Chine ou la salangane. C^lebres nids d'oiseaux. La plus celebre de toutes les hiron- delles connues, la seule qui donne un produit aussi riche que singulier, est celle qui fournit ces nids comestibles, si recherches par tons les Apicius de I'Asie, et dont il est si souvent parle dans les recitsdes voyageurs. Un grand nombre de naturalistes Tout designee sous le nom A'hirondette de la ChinCy parce qu'elle frequenteses mers; d'au- tres I'appellent salangane , du nom qu'on donne a cet oiseau dans les iles Philippines. La plupart des ecrivains ornithologuess'accordent aussi peu, sur la configuration de cette iiirondelle et sur les lieux qu'elle habite, que sur la matiere dont elle construit son nid. Les uns la prennent pour I'alcyon des an- ciens, et pretendent qu'elle compose son nid d'une espece odorante de goemon , qui croit au fond de la mer, le long de (*) Annales forestieres, t. II, p. 644 (1843). CHINE MODERNE. 585 ses rivages. lis ajoutent que ces oiseaux traJnent leurs uids jusqu'au bord de la mer, et que, lorsqu'il s'eleveun ventde terre, ils dressent une de leurs ailes pour que le vent les pousse au large, et qu'ils voguent ainsi au milieu des eaux, places sur leurs nids. Cette idee est riante et poetique, inais ellene s'ac- corde pas avec les faits, puisqu'on ne rencontre jamais de ces nids flottants sur la surface des mers. D'autres ont avance que ces hirondelles, lorsqu'elles sont en amour, jettent par le bee une ecume blanche et visqueuse, dont elles se servent pour former leurs nids et les attacher aux rochers, ce qu'elles ex^- cutent en multipliant les couches de cette substance gluante, et en les ap- pliquant successivement les unes sur les autres, a mesure que les premieres se sechent. Selon quelques naturalistes, cet alcyon est de la forme et de la cou- leur de Vhirondelle ; U a des membra- nes aux pattes comme les canards, et Vextremite de ses ailes est d'unjaune aurore. « Les Anglais qui accompagne- rent le lord Macartney dans son am- bassade , nous apprennent qu'on trouve une grande quantite de ces nids dans le detroit ae la Sonde et dans I'ile de Java. Quoiqu'ils ne s'ac- cordent pas avec la plupart des natu- ralistes sur la substance dont ces nids sont formes, leurs observations ne peuvent que contribuer a nous en faire connaitre I'histoire. « Sur Tile « du Bonnet , dans le detroit de la R Sonde, on trouve, disent-ils, deux « cavernes qui s'etendent horizontale- « ment dans les flancs du rocher, et « contiennent une immense quantite « de ces nids d'oiseaux , qui sont si re- « cherches par les gourmands de la « Chine. Ces nids sont composes de « filaments tres-delicats , que reunit « une matiere transparente et visqueuse. « Les nids sont adherents les uns aux « autres, ainsi qu'aux cotes de la ca- « verne, et forment des rangs sans au- « cune interruption. Les oiseaux qui « les construisent sont de petites hiron- « delles arises avec le venire blanchd- « tre. Elles vont en troupes considera- « bles ; mais elles sont si petites et si « rapides, qu'il est impossible de les « tirer au vol. La m^me espece de nids « se retrouve dans les profondes caver- n nes des hautes montagnes qui sont au « centre de I'ile de Java et eloignees de « la mer. Aussi croit-on que les hiron- « delles qui batissent ces nids ne ti- « rent rien de la mer, ni pour leur « nourriture, ni pour leur deiicat ou- « vrage. II est en effet probable qu'elles « ne volent point au-dessus des hautes « montagnes qui separent la mer des « cavernes de Java, et qu'elles ne sont « pas meme en etat de vaincre les vents tt tempgtueux qui regnent souvent sur « ces montagnes. Elles senourrissent de « nuages d'insectes qui sont suspendus « sur les ^tangs stagnants des vallees, « et leur large bee semble etre fait « expres pour les prendre. Ce qui leur « sert d'aliment sert aussi a la cons- « truction de leurs nids. On les trouve « dans ces cavernes par rangees hori- « zontales, et a differents degres ; il y « en a a cinquante pieds de profondeur « seulement, et d'autres jusqu'a cinq « cents pieds... « La valeur de ces nids est fix^e « principalement d'apres I'egalite et la « delicatesse de leur texture. On estime «t davantage ceux qui sont blancs et « transparents, eton en donne souvent « a la Chine leur poids en argent. Ces « nids sont un commerce tres-impor- « tant pour les Javanais, et plusieurs « d'entre eux y sont occupes des leur « enfance. Lorsque les oiseaux ont « employe pres de deux mois a prepa- « rer leurs nids, ils pondent deux ceufs « dans chacun, et ils les convent envi- « ron quinze jours. Quand les petits « ont des plumes, on juge qu'il est « temps d'enlever les nids, ce que Ton « fait regulierement trois fois par an- « nee II est possible qu'il y ait « plusieurs especes de ces oiseaux « dont les nids soient ^galement pre- « cieux. >• « Les varietes et les contradictions que presentent les divers recits de voya- geurs anciens et modernes, nous laisse- raient dans une penible incertitude sur ce que nous devons penser de la nature de ces nids et des oiseaux qui les facon- nent , si nos doutes n'etaient fixes par un temoignage tranchant et decisif; nous le Irouvons dans une lettre de SM L'UNIVERS. M. Poivre, ancien intendant dans les lies (le France et de Bourbon, qui a parcouru lui-nieme plusieurs fois les niers qui baignent les extreniites de I'Asie, et dans qui Ton s'accorde a re- connaitre un observateur aussi eclaire qu'incapable d'alterer les fails qu'il trausniet. Dans cette lettre, adressee a M. de Montbeillard, qui avail pris le parti de consujter M. Poivre, nous apprenous quelle est Tespece et la forme de ces oiseaux , les parages qu'ils fre- quenlent, les lieux ou ils construjsent leurs nids, et quelle est |a matiere qu'ils eniploient pour les former. Voici les observations que cet habile voyageur a faites sur les lieux memes : « M'etant embarque, en 174(, sur le f vaisseau le Mars, pour aller en jj Chine, nous nous trouvames au mois «< de juillet de la meme annee dans le « detroit de la Sonde, tres-pres de Tile ? de Java, entre deux petites iles qu'on « nomnie la G^andp et la Petite-Toque. «• JNons fdmes pris du calme en ceten- « droit; nousdescendimes sur la Petite- « Toque, dans le d^ssein d'aller a la « chasse des pigeons verts. Tandis que a ines camarades de promenade gra- « vissaient les rochers pour trouver f dps raraiers verts, je snivis les bords « de la mer pour y ramasser des coquil- B lages et des coraux articules qui y • abondent. Apres avoir fait presque « le tour entier de I'ilot, un matelot « chaloiipier qui m'acconipagnait de- « couvrit une caverne assez profonde, " ereusee dans les rochers qui bordent « la mer; il y entra. La nuit appro- « chait. A peine eut-il fait deux ou « trois pas qu'il m'appela a grands cris. « En arrivant, je vis I'ouverture de la « caverne obscurcie par une nuee de " petits ojseauxqui en sortaient comnie « des essaims -, j'entrai , en abattant f avec ma canue plusieurs de ces pau- « vres petits oiseaux, que je ne con- « naissais pas encore. En penetrant dans « la caverne, je la trouvai toute tapissee, « dans le haul, de petits nids en forme « de benitiers. Le matelot en avail deja « arrache plusieurs, et avail rempli sa « chemise de nids et d'oiseaux; j'en de- « tachai aussi quelques-uns : je les trou- « vai tres-adherents au rocher. La nuit « vmt ; nous nous rembarquflmes, em- portant chacun nos chasses et nos collections. o Arrives dans le vaisseau, nos nids furent reconnus , par les personnes qui avaienl fait plusieurs Toyages en Chine, pour elre de ces nids si re- cherclies des Chinois. Le matelot en conserva quelques livres, qu'il vendit tres-bicn a Canton. De nion cote, je dessinai el peignis en couleurs natu- relles les oiseaux avec leurs nids et leurs petits dedans; car ils etaient tons garnis de petits de I'annee, ou au moiiis d'oeufs. En desMuant ces oiseaux, je les reconnus pour de vraies hirbndelies; leur taille etait a peu pres celle des colibris. « Depuis , j'ai observe en d'autres voyages que, dans les mois de mars et d'avril , les niers qui s'etendent depuis Java jusqu'en Cochinchine au nord, el depuis la poinle de Sumatra a I'ouest, juscpj'ii la P^ouvelle-Guinee a Test, sont couvertes de rogue ou frai de poisson , qui forme sur I'eau comme une colle forte a demi delayee. J'ai appris des Malais, des Cocnin- chinois, des Indiens Bissagas des iles Philippines et des Moluquois, que la salangane fail son nid avec ce frai de poisson. Tons s'accordent sur ce point. II m'est arrive, en passant aux Moluques en avril et dans le detroit de la Sonde en mars, de pficher avec un seau de ce frai de poissou, dont la mer etait couverte, de le separer de I'eau, de le faire secher, elj'aitrouve que ce frai ainsi seche ressemblait parfaitement a la matiere des nids de salangane. « C'est a la Qn de juillet et au com- mencement d'aoilt que les Cochin- chinois parcourent les iles qui bor- dent leurs cotes, surtout celles qui forment leur Paracel, a vingt lieues de distance de la terre ferme, pour chercher les nids de ces petites hiron- delles. « Les salangnnes ne se trouveut que dans cet archipel immense qui borne i'extremite orientale de I'Asie. Tout cet archipel , ou les iles se toucheut pour ainsi dire, est tres-favorable a la multiplication du poisson : le frai s'y trouve en tres-grande abondance; les eaux de la mer y sont aussi plus CHINE MODERNE. 587 « cbaudes qu'ailleurs. Ce n'est plus la « m^me chose dans les grandes niers. » « M. de Montbeillard a eu occasion d'examiner quelques-uns de ces nids de salanganes : ils representaient par leur forme la moitie d'un ellipsoide creux et coupe a angles droits par le milieu de son grand axe; on voyait quils avaient ete adherents au rocher par le plan de leur coupe. Leur subs- tance etait blanchatre et demi-transpa- rente ; ils etaient composes a I'exterieur de lames tres-minces, a peu pres con- centriques et couchees en recouvre- ment les unes sur les autres, comma on I'obscrve en certaines coquilles. L'interieur presentaitplusieurs couches de reseaux irregiiliers, formes par une multitude de fils de la m^me matiere que les lames exterieures , qui se croi- saient et recroisajent en tout sens. « M. Delatour avait recu aussi de Pe-king uiie boite de ces nids d'oiseaux : leurs dimensions en tout sens se sont trouvees moins fortes que celles qui leur sont assignees par iM. Tabbe Ray- nal ; mais il faut observer qu'ils n'e- taient plus frais, et que I'etat de dessic- cation dans lequel ils nous parviennent en Europe doit^ leur fairs perdre de leur volume. Desseches, ces nids ont une consistance de eire ou de come, et ne conservent plus la meme transpa- rence qu'ils ont dans leur fraicheur; bouillis, ils ressemblent a des cartila- ges de veau. « D'apres les eclaircissements donnes par M. Poivre, les salanganes, si long- temps inconnues , cessent de I'etre. Elles ne sont point des oiseaux de pas- sage; elles vivent eonstamment toute Tannee dans les tlots et sur les rochers ou elles ont pris naissance. Leur vol est celui de nos hirondelles, mais elles vont et viennent moins continuellement ; leurs ailes sont aussi plus courtes. Leur plumage n'admet que deux couleurs : I'une noir§tre, qui regne sur toute la partie superieure du corps ; Tautre blanchatre, qui regne sur la partie in- ferieure, et termine les pennes de la queue. Elles ont I'iris jaune, le bee noir et les pieds bruns. Leur longueur totale est de deux pouces trois lignes (*). » (*) Voy. Grosier, Description generate de la Chine, t. TV, p. 111-122. Le tapir de la Chine. « L'aninial qu'on designe sous le nom de tapi?' oriental etait encore si peu connu, il y a quatre ou cinq ans, qu'on doutait de son existence, et qu'on etait dispose a croire que le genre tapir etait particulier au nouveau monde. Pour se convaincre que cette opinion etoit une erreur, il edt sufli de parcou- rir les recueils d'histoire naturelle me- dicate des Chinois; on y trouve une figure assez exacte, ou du moins tres- reconnaissable, du tapir, et les explica- tions qui y sont jointes ne laissent auciin doute sur la realite des descrip- tions qu'on en a faites. Les ouvrages ^lementaires destines a I'instruction des enfants, eties encyclopedies cbinoi- ses et japonaises contiennent la figure du meme animal, au nombre des mam- miferes les plus communs. Ainsi les Chinois ont connu de tout temps cette espece, qui a cte si rece"mment trouvee a Malacca et a Sumatra, et dont la de- couverte est due a MM. Farquhar et Duvaucel... « Untres-anciendictionnajre chinois, intitule Eul-ya, donne le nom de J«e a une panthere de couleur blanche; mais les commentaires de ce dictionnaire, qui sont aussi fort anciens, disent que le 7)16 est semblable a un ours, et qu'il a la tete petite et les pieds bas; il est tacbete de blanc et de noir; il peut ronger le fer, le cuivre et le bois de bambou; ses os sont durs, compactes, les articulations droites et fortes, et ii a peu de moelle ; sa peau preserve tres- bien de I'humidite. « Suivant le Choue-wen, autre dic- tionnaire tres-ancien et tres-estime, le me est semblable a un ours, mais de couleur jaunatre. On le tire du pays de Chou; c'etait le nom que portait la pro- vince de Sse-tchouen avant la qua- trieme dynastie. « D'apres le Tching-tseu-thong, les dents du me sont si dures, que, si on les frappe avec un marteau de fer, c'est le marteau qui se brise ; si on les jette au feu, on ne peut les bruler, il n'y a que la come du ling-yang (sorte d'antilope) qui puisse les entamer. Le m^me lexicographe , toujours enclin a assembler des contes populaires, et 5S8 L'UNIVERS. les r^dacteurs du Khang-hi-tseu-tien, qui I'ont suivi en cette occasion, ajou- tent dautres particularites egaletnent fabiileuses et un trait d histoire qui u'offre pas plus de vraisemblance. « Le Pen-thsao-kang-mott,onTvii\\.Ci general d'histoire naturelie, va plus droit au but. Le me, dit-il , est sembla- ble a un ours; il a la tele petite et les jambes basses ; le poil, court et luisant, est tachete de noir et de blanc ; il y en a qui disent qu'il est d'un blanc jaun5- tre, d'autres d'un blanc grisStre; il a une trompe d'elepbant, des yeux de rbinoceros, la queue d'un boeuf et les piedsd'un tigre; il est tres-robuste, et pent ronger le fer, le cuivre, le bambou et devorer les plus gros serpents ; ses articulations sont fortes , droites , ses OS epais et presque sans moelle ; ses excrements peuvent servir a aiguiser les armes et a tailler le jaspe ; son urine dissout le fer; sps os et ses dents sont si durs qu'ils resrstent a Paction du fer et du feu, et il est arriv6 que des char- latans qui s'cn ^taient procure, les ont fait passer pour des reliques precieu- ses, comme les dents ou les os de Bouddha. « La peau du me sert a faire des matelas pour se coucher et des couver- tures;elle garantit de I'humidite, du mauvais air et des malefices. La repre- sentation ni^me de Tanimal produit cet effet; aussi, sous la dynastie des Thang, on avait coutunie de peindre sur les paravents des figures de me pour se preserver du mauvais air. « Suivant les geographies du midi , le me est de la grandeur d'un fine, semblable a un ours, etc. « A travers les extravagances dont ces descriptions sont remplies, il est impossible de meconnaitre les traits earacteristiques du tapir: sa taille, la forme de ses membres, sa trompe plus longue que celle du tapir d'Ameriqiie et comparable a celle de I'elephant, la solidite de ses os, naturelie dans un gros pachyderme, y sont indiquees de ma- niere a ne s'y pouvoir tromper. La fi- gure confirme aussi une particularite remarquable, en ajoutant a tons ces signes un indice de plus: cehii de la Iwree que I'animal porte quand il est jeune, suivant I'observation de M. Far- quhar. L'indication de sa patrie et les usages economiques auxquels on em- ploie sa peau sont aussi deux circons- tances assez remarquables , parce 3u'elles prouvent que le tapir habite ans les provinces occidentales de la Chine, et qu'il doit y 6tre assez com- mun. n Les livres chinois sont remplis d'ob- servations d'histoire naturelie, tres- curieuses et generalement assez exac- tes. II suffit de savoir les distinguer des fables qui y sont m^l^es , et c'est ce qui n'est pas toiijours fort difficile. La viie des figures que contiennent leurs traites de zoologie et de botanique per- met souvent de distinguer des especes nouvelles ou peu connues; et les des- criptions qui y sont jointes aident pres- que toujours a lever Pincertitude que peuvent laisser les figures. C'est une mine abondante que Ton ne doit pas negliger d'exploiter, et dont rien ne pourra remplacer les produits, tant que les Europeens seront exclus de la Chine, c'est-a-dire pendant longtemps encore, si le gouvernement de ce pays entend ses veritables interets, et qu'il ne mette pas en oubli le soin de sa tran- quillity (*). » AGRICULTURE. Par allele de Vagricnlftire de la Chine et de celle de V Europe. Un jeune litterateur que je m'honore de compter parmi mes eleves , M. le baron Leon d'Hervey Saint-Denys , a publie sur I'agriculture et I'horticulture des Chinois d'excellentes recherches, auxquelles il a joint I'analyse des ma- tieres contenues dans la grande ency- clopedic agricole et horticole intitulee: Cheou-chi-thong-khao. On lira avec interet le morceau suivant, ou I'auteur decrit rapidement, mais exactement, I'etat de I'agriculture chinoise, com- pare a celui de I'agriculture euro- peenne : « Les voyageurs et les missionnaires qui ont parcouru le Celeste Empire s'ac- cordent a nous faire le tableau le plus (*) Abel Remiisat, Melanges asiatiqiies, t, 1% p. 253-256 CHINE MODERNE. 589 seduisant de Taspect que presentent les campagnes. Point de ces landes arides ?[u'on rencontre si souvent dans nos plus ertiles provinces ; point de friches , pas un coin de terre oubiie: la culture a tout envalii , quelquefois ni^me jus- qu'a la surface des rivieres , qu'en cer- tains endroits elle couvre de jardins floltants. Partout aussi se presse une population industrieuse, principale- inent adonnee aux travaux agricoles. Des villes immenses, des villages qui, ailieurs , seraient des villes , une mul- titude de hameaux, relies entre eux par un veritable reseau de fleuves na- vigables et d'innombrables canaux, en- tretiennent et facilitent la prodigieuse activite du commerce interieur. n Si le travail et la production pou- vaient a eux seuls constituer la pros- perite reelle d'un peuple, la Chine de- vrait occuper le premier rang dans la hieragphie des nations civilisees; car I'excessif developpement de la culture semble y avoir attaint sa derniere li- mite. Malheureusement pour les Clii- nois, ces grands resultats sont dus a leur etat permanent de gene et de souf- france , et ce que nous admirons sur- tout chez eux , pour en tirer quelque- fois parti au point de vue europeen, ce sont les efforts continuels d'une popu- lation exuberante qui doit arracher sa subsistance au sol; efforts sans les- quels la disette, avec son hideux cor- tege de troubles et de maladies, vien- drait fondre sur le pays. N'est-ce point un spectacle digne d'interet que celui de ce peuple qui lutte avec tant d'ener- gie centre 1 appauvrissement seculaire d'un sol que le manque d'engrais ne lui permet pas de renouveler, et qui supplee en quelque sorte par les res- sources de son Industrie a la durete des conditions dans lesquelles se prati- que son agriculture? « Cette correlation entre de tristes causes etd'admirables effets avait frappe les savants missionnaires qui portent en Chine I'enseignement evangelique. Penetrant au coeur de I'empire et se- journant dans les provinces plus long- temps qu'aucun Europeen, ils sont cer- tainement plus a meme que personne d'apprecier a sa juste valeur I'agricul- ture chinoise prise dans son ensemble. « Nous croyons done ne pouvoir mieux conimencer I'esquisse que nous nous proposons de faire , qu'en pla<^ant ici tout d'abord le tableau qu'un de ces missionnaires tracait lui-meme au com- mencement du siecle dernier : « Que le lecteur jette un coup d'ceil sur la carte d'Asie , pour voir I'eten- due de notre Chine, la variete de ses climats et les peuples divers dont elle est eutouree. II trouvera qu'elle est d'une etendue immense, qu'elle reunit tons les climats, et qu'elle n'a autour d'elle que des nations errantes ou a de- nii barbares , et il en conclura d'abord que, reduite a elle-meme, elle peut et doit se suffire ; mais en songeaut qu'elle est prodigieusement peupiee et qu'elle le devient tons les jours davantage, parce que les grandes maladies sont rares , que les lois sont florissantes , que le mariage est en honneur, que le nombre des enfants est une richesse, et que la paix au dedans et au dehors est presque inalterable, il sentira bien- tot que ce n'est qu'a force de travail, d'industrie et d'economie qu'elle peut avoir, nous nedisons pas I'agreable, mais I'honnete et le necessaire. « En France , les terres se reposent de deux annees I'une; de vastes ter- f«A^ rains demeurent en friche ; les campa- gnes sont entrecoupees de bois, de prairies, de vignobles, de pares, de maisons de plaisance, etc. Rieu de tout cela ne saurait se rencontrer ici. La doctrine meme des aiiciens sur la piete filiale n'a pu sauver les sepultures dans les revolutions. Les petites surgissent et disparaissent dans les champs., d'une generation a I'autre; la superstition a aide la politique a releguer peu a peu celles des grands et des riches dans les montagnes ou dans les endroits steriles fermes a I'agricullure. Bien que la terre soit epuisee par trente- cinq siecles de moissons, il faut qu'elle en donne chaque annee une nouvelle, pour fournir aux pressants besoins d'un peuple innombrable. Cet exces de population, dont les philosophes mo- dernes de I'Europe n'ont pas meme soupconne les inconvenients et les sui- tes, "augmente ici le besoin de I'agri- culture, au point de montrer les hor- reurs de la famine comnie la conse- S9o L'UNIVERS. quencesubiteet inevitable des moindres n^cliccnc6S> « Sans les montagnes et les marais, la Chine serait absolument priv6e du b6n^fice des bois, de la venaison et da fibier : ajoutons qiie la force et I'in- ustrie de I'homme font toUs les frais de I'agricultiirfe. II faiit pliis de travail el plus d'hommes pour avoir !a nifime quantite de grains qu'allleurs. La som- nie totale en est iricohcevable ; cepen- dant elle n'est que sufflsatite, et ne suf- fit encore que parce qu'elle est regie et distribuee avec une econoniie pre- voyante, qui compense une annee par Tautre et qui entretient le niveau dans coutes les provinces. « Les cochons et la volaille soht presque la seule viande de la Chine, d'ou il suit qu'on doit en manger peu, distributivcinlmt, et que I'industrie a Desoin de toutes ses ressources pour en nourrirune certain* qyantit^. Nous avons dit prcs^ue, parce qus^ nous par- Ions de I'empire, envisage dans son universalite par ranport a cet objet. II ya, en effet, aes districts niieux partae^s h Cet egard et qui nourris- sent neaucoup de troupeaux. II y en a oil le labourage se fait avec des bocufs, des buffles et des chevaux; mais , proportion gardee , il y a au moins dix boeufs en France contre un en Chine. « L'auteur du m^moire que nous ci- tons se pose alors a lui-meme la ques- tion de savoir si la Chine est, en re- sume, plus mal partagee que I'Europe sous le rapport de la nourriture. II n'hesiterait pas a se prononcer pour I'affirmative, si la coiliparaison ne por- tait que sur le regime alimentaire des habitants de nos grandes villes. Mais, ajoute-t-il , il faut examiner impaftiale- ment a quoi se reduit en France, coni- me dans le reste de I'Europe , la bou- cherie des campagnes. D'ailleurs , c'est surtout dans les provinces meridionales du Celeste Eliipire que le betail est rare, et I'lisage de la viahde n'est ni n^ces- saire ni sain dans les pays chauds. Les anciens habitants de la Chine, auxquels la viande ne manquait point, eh hian- geaient encore nioins que les moder nes. Observons cependant, r que la Tartaric fournit tous les ans a la ville de P^-king et a toute la province une quantity prodigieusede boeufs, de mou- tons, de cerfs, etc.; que les cdtes de la mer, depuis la Grande muraille jusqu'au bout de la province de Canton, les lacs, les etangs , les rivieres, etc., donnent coutinuellement toute sorte de pois- soiis (la peche seule du grand Kiang, situe au milieu de I'empire, equivaut a celle des plus grands fleuves d'Europe reunis); 2° que les montagnes dont toutes les provinces sont entrecoupees , ont quantity degibier etde venaison ; 3" que la necessite , mere de I'industrie, a appris aux Chinois a tirer parti de beaucoup de legumes, d'herbages, de plantes, de racines qui croissent d'elles-memes dans les cainpagnes et qui ne deman- dent point de culture; 4° que, bien qu'il ne puisse pas y avoir beaucoup ae terres en vergers et en jardins , les enclos des maisons , les avenues des villages, les coUines y suppleent; et sans leur extreme population , la plu- part des provinces de Chine seraient au niveau des provinces de Ft^nce les mieux partag^es. « La Chine a peu delaines, et ne fait presque point de toiles de chanvre ni de lin ; mais la sole , les colons , les t-acines et les ecorces de plusieurs es- p^ces y suppleent abohdamment. La quantite de sole qu'on recueille chaque annee est incroyable. La recolte du co- ton va plus loin encore, parce qu'elle est plus generate, plus facile, et que toutes les provinces sont egalement bien partagees. Quant aux racines et aux ecorces, elles ne sont gu^re qu'un agr^ment , a cause de la ieget-ete des toiles qu'on en fait pour I'ete. Reinar- quons, en passant, que la cohsomma- tion en v^tcments est tres-restreinte dans toutes les provinces meridionales, et que, dans les autres m^me, elle est beaucoup moiudre qu'en Fralice pen- dant plus de quatre mois (*). « On sait aujourdhui que I'agricul- ture n'est plus un art a principes abso- lus , un art qui puisse s'exercer inde- pendamment des circonstances qui I'enviroiinent.Loind'fitreindepeiidatite, elle est essentiellement subordbdhee (*) Memoires des missionnaires de Pe-king, t. IV. CHINE MODERNE. 591 aux conditions politiques, tout au moins autant qu'a celles qui proviennent du sol ou du climat. La Cliiiie nous en four- nit I'exeniple : parce qu'elle est deme- surement peuplee , le morcellement de o la propriete fonciere a (jto pousse a ses dernieres limites. A part un nombre inflniment restraint de families qui possedeut encore des terres d'une cer- tains etendue , tout ie reste cultive des pafcelles tellement reduites , qu'elles ne comportent plus le travail des ani- mauxde ferme; et, d'ailleurs, comment nourrir ces animaux, lorsque le sol tout entier, sans cesse pressure par la culture, livre a peine ce qui est suffi- sant pour faire vivre la famille? De la resultant, a notre point de vue du nioins , les plus graves inconvenienls : outre la rarete de la viande et des au- tres produits animaux, il y a penurie d'engrais, malgre le soin extreme qu'apportent les Chinois a recueillir tout ce qui peut lendre a la terre un peu de sa fertilite. Le defaut de fu- mure fait qu'elle s'^puise et ne peut plus donnfir ces riches produits que nous offrent les champs de TAngle- terre ou du nord de la France. II faut des lors renoncer a la culture des es- peces exigeantes, pour se rabattre sur celles qui ne demandent presqiie rieri a la terre; abandonner le ble, si riche en principes azotes , pour lui substi- tuer le riz, si pauvre de ces monies principes ; substituer de nieme le co- ton et la soie a la laine et au chanvr6, comme le the a la vigne , c'est-a-dire remplacer, par des produits qui sont partout ailieurs du luxe , les objets que Ton considere avec raison comme les plus indispensables a I'existence. « Prise dans son ensemble , I'agfi- culture chinoise ne trouve done point son analogue dans Tagriculture euro- peenne, puisque cette derniere, outre qu'elle s'exerce plus specialement sur des cspeces vegetales dont le r61e eti Chine n'est que tres-secondaire, consi- dere la production du betail comme sa base la plus essentielle, et que I'axiome du vieux Caton, Bene pascere, est plus que jamais regarde cnez nous comme la regie dominnnte, pour ne pas dire I'unique regie, du cultivateur. Toute- tbis , si Ton abandonne I'ensemble de I'agriculture de I'Europe pour en scru- ter les details , on trouvera certains modes d'operer qui se rapprochent da- vantage des allures de I'agriculture chinoise. II existe, par exemple, une certaine analogie, une certaine ressem- blance m^me, au point de vue agricole, ehtre la Flandre et la Lombardie d'une part et la Chine de I'autre. En Flandre comme en Chine , la propriete est tres- morcelee; la aussi le travail de I'hom- me rettiplace en partie celui des ani- maux domestiques, et I'engrais humain celui des etables. La Lombardie, outre qu'elle nous montre un sol egalement morcele, se livre en grand a la culture du riz , suivant en cela des procedes qui ne s'eloignent pas beaucoup de ceux des Chinois. Mais \h s'arrStent les ana- logies , car pour ces deux contrees les resultats sont tout opposes : tandis que la Chine ne fournit rien ou presque rien a rexportation, consommantelle- meme la totalite de ce que son sol peut produire , la Flandre et la Lombardie comptent parmi les contrees les mieux cultivees et les plus riches de I'Ejirope, et fournissent d'immenses quantites de leurs produits a I'exportation. La dif- ference de ces resultats est, du reste, facile a expliquer. « Ainsi que nous I'avons dit, Tagri- culture est toujours puissammeiit su- bordonnee aux conditions politiques et commerciales, qui en determinent quelquefois d'une maniere absolue, non- seulement la marche, mais aussi les succcs et les revers. En Europe, il est rare qu'un pays ne produise que les objets qu'i I consomme, comme il est rare qu'il n'ait pas a demander aux pays voisiris quelques-uns des objets dont ii a besoin. De la ce mouvement com- mercial , cet echange des produits de la terre, qui viviQe I'agriculture en as- surant a chaque district agricole I'e- coulement des denrees que son sol est le plus apte a produire. La est tout le secret de la prosperite de la Flandre et de la Lombardie. Entourees toutes les deux de pays riches en bestiaux qui leui- four- nissent les engrais necessaires, elles peuvent consacrer la presque totalite de leur territoire a des cultures excep- tionnelles dont les produits trouveront dans les pays voisins un prompt et fa- 599 L'UiMVERS. cile debouclie. Ce seront le riz, la bette- rave, la garance, le lin, le tabac, ou autres plantes industrielles qui ne vien- draient point ou viendraient plus mal ailleurs. Mais que le sort de la Lom- bardie ou de la Flaiidre serait diffe- rent , si le reste de TEurope pouvait produire aussi bieii qu'elles, et a aussi bon marcbe , les denrees qui font toute leur richesse , ou seulement si leur po- sition geograpliique les eQt eloignees des principaux foyers de la consoinma- tion europeenne. « On voit qu'il serait inutile de cher- cher dans I'agriculture chinoise cette science des assolements, science tout europeenne , et nous pouvons ajouter toute moderne, puisque c'est elle qui a detrone I'ancien systeme des jacheres, qui regne meine encore en certaines provinces de France, pays oij I'a- gricuiture est loin cependant d'etre aussi arrieree que certains theoriciens affectent de le croire. La jachere elle- iiieine, qui est I'enfance des rotations, n'esl pas usitee en Chine , non par de- fajjt de connaissances de la part des Chinois, niais par suite de la necessite de deniander tous les ans a la terre les men)es produits. C'est la consequence forcee de cet extreme morcellement du sol , dent les causes ont ete develop- pees plus baut. « Nous allonsessayer de donner une idee moins superficielle de I'etat de I'agriculture chinoise, en empruutant quelques details aux notes pubiiees il y a trois ans sur ce sujet par M. Fortune, qui, independamment des rapports re- latifs a la mission speciaie dont I'a charge son gouvernement, envoie sou- vent au Gardner's Chronicle des arti- cles d'un vif inter^t. « Nous devons dire d'abord que jSI. Fortune ne professe pas une grande admiration pour le peupie chinois et i)our ses procedes agricoles. Peut-etre la comparaison qu'il a dil faire, en ar- livant dans le Celeste Empire, de son agriculture avec celle de I'Angleterre, I'a-t-elle conduit a exagerer I'inferiorite de lo premiere. Mais cette prevention ni6me en faveur de I'agriculture de son pays donnera plus de force a son te- moignage , lorsqu'il reconnaitra quel- quc superiorito aux uiclhodcs chinoi- ses, que ses connaissauces speciales lui permetlent d'ailleurs de bien apprecier. « Le sol des montagnes et des collines dans les provinces meridionales esttres- maigre. II se compose d'une argile se- che, ardente, mst. II y a aussi au Fo-kien beaucoup de plantations dont le terrain n'est pas absolument plat; mais parce que ce terrain est trop humide, quoique fer- tile d'ailleurs, les arbres a the qui y croissent ne sont ni aussi touffus ni d'une aussi bonne quality que ceux des lieux plats. Tous les endroits du Fo- kien qui reunissent les qualites enon- cees p us haut sont plantes d'arbres a the, principalement dans le district de King-ning. « Ces assertions, emanees d'une sour- ce aussi respectable, pour peu qu'on les pese, n'infirmentaucunement celles de MM. Davis et Bruce; elles donnent seulement a coniprendre que I'arbre a the ne se plait ni dans un sol trop aride, trop expose a un soleil d'airain, ni dans un terrain trop visqueux et trop marecageux; c'est la conclusion qu'avait deja deduite le P. Duh;ilde, en declarant que cet arbuste n'aimait ni le soleil ardent ni une humidite prolong gee, et qu'il etait froid de sa nature On sait, d'apres les recits des voya geurs vivanls, qu'il prospere en Chine CHINE MODERNE. 60 1 dans des contrees froides , et que la neigene lui fait aucun mal. Les Chinois estiment, suivant M. Bruce, que les sept dixiemes de la production totale de leur empire croissent dans les mon- tagnes,et les trois autres dixiemes seu- lement dans les plaines. Le climat qui lui parait le plus favorable est situe entre le 25° et le 33° de latitude, si on en juge par le succes de sa culture en Chine. Une temperature moyenne, telle est done la condition indispensable de la bonne venue de cet arbuste. On a pu s'en assurer en France, ou il reus- sit mieux dans le nord que dans le midi. « Suivant monseigneur de Carpena ,• la province du F6-kien et celle du Kiang-si, dans la partie qui y confine, sont celles ou existent les plus floris- santes plantations de the. Le terrain est soigneusement prepare ; on ne laisse ni herbes, ni broussailleSj ni vegetaux pa- rasites. Apres qu'il a ete bien sarcle (et M. Bruce dit qu'on repete celte ope- ratidn deux fois par an), on y fait des trous a deux metres environ I'un de I'autre. M. Delamarre, missionnaire en Chine , dans une iettre communiquee au Journal d' agriculture pratique par M. I'abbe Voisin, directeur des mis- sions etrangeres, pretend que cette dis- tance est seulementdeOm, 05; distance evidemnient trop faible et qui aurait des inconvenients pour la croissance et la culture de I'arbuste, non moins que pour la recolte des feuiiles. Ces petites fosses doi vent avoir, suivant monsei- gneur de Carpena, 33 centimetres de profondeur; elles n'en ont que 10, d'apres M. Delamarre. Ici encore nous adoptons la premiere assertion comme la plus vraisemblrible, d'autant mieux qu'elle est confirmee par le tetiioignage de M. Bruce. On jette dans chaque trou de six a dix graines qu'on couvre d'une poignee de fumier de brebis, de cheval ou de gros betail, niele avec de la cen- dre et reduit en poussiere; puis on comble la fosse avec de la terre sans la fouler. Cette operation se fait, non dans le mois d'octobre , comme le pretend M. Delamarre, mais dans le mois de fevrier, apres ies pluies, afin que le sol ne soit pas trop sec. Lorsque Ton seme sur couche pour transplanter ensuite , on a la precaution, en plantant chaque eleve, de fouler la terre autour des raci- nes, jusqu'a ce que la tige ait atteint la hauteur de 23 centimetres hors du sol. Quant a I'arbuste plante en pleine terre, on le ferait mourir en foulant la terre qui couvre ses racines et en sarclant les herbes qui croissent autour. On entre- lace ordinairement des petites baguet- tes sur les fosses, afin de reconnaitre les endroits ensemences et en ni^me temps les proteger centre les pietons et les bestiaux. « Les details que donne M. Bruce, dans son rapport, coincident parfaite- ment avec cette description. « MM. Bruce etde Carpena disent que les cultivateurs chinois n'empechent pas directement le the de croltre; mais comme ils en cueillent les feuiiles trois ou quatre fois I'an, cette operation re- petee sutfit pour arreter le developpe- ment de Tarbuste. Cette consequence est rigoureusement conforme aux prin- cipes les plus elementaires de la bota- nique; cependant, il ne faut pas lui donner iei un sens trop absolu. Sans doute qu'une defoliation trop repetee est un obstacle a la croissance de I'ar- bre a the; mais le plus puissant con- siste dans I'operation du recepage prati- que par les Chinois; ils ont m^mesoin de forcer Tarbuste a se ramifier par la section frequente des branches supe- rieures. Suivant les memes auteurs,dans le F6 kien et le Kiang-si, un plant de the, lorsqu'il est bien entretenu , peut donner des feuiiles pendant trente, quarante ans et plus; ensuite on le re- coupe au niveau du sol, afin que de la souche il s'eleve de nouveaux rejetons; ce qui indiqiie clairement que I'opera- tiondu recepage, au lieu d'etre praliquee dans ces deux provinces, commeailleurs, de sept ans en sept ans, ou de dix ans en dix ans, ne Test que beaucoup plus tard, enraison probablement d'une plus grande aptitude de terroir ou d'une cul- ture plus savante. « Les arbres a the se propagent g6- neralement en transplantant les racines des individus trop vieux ou en em- plovant la methode de boutures, car les "Chinois ignorent I'art de greffer; toutefois il y a exception pour le F6- 'T**^ kieuj ou on ne pratique que le semis. 90i L'UNIVERS. « Dans cette derniere province , la plupart des champs a the n'ont pas besoin d'etre arroses; leur position in- cline permet d'y creuser faciiement des rigoles et des tranch^es; mais dans cette contr^e , comme dans d'antres, I'anosage a bras ou par machines est de toute n^cessit^ sur les hauteurs es- carp^es et les plateaux des monta - gnes; il est meme a presumer qu'on je pratique avec une sollicitude toiite particuliere dans les grandes exploita- tions. « La plupart des voyageurs qui ont 6crit sur la Chine affirment que le fu- niage des plantations de the n'est ob- serve que par un petit nombre de cul- tivateurs. Sans infirmer leur temoi- gnage, que nous croyons impartial, ii est permis de ne rappliquer, T qu'aux terrains plats , hiimides , riches en hu- mus ; 2''nu'aiix panvres gens qui exploi- tent isolement leurs modestes propri^- t^s sans avoir les moyens de I'amender, etqui en Chine, comme partout aiileiirs, sont les plus nombreux. Mais le fuinage est indispensable pour les champs si- tues sur le versant des montagnes, sur le flanc des eollines ; car, de I'aveu des m^mes ^crivains, les inondations fre- quentes occasionn^es par les pluies y entratnent les terres vegetaies , qui y sont quelquefois si rares qu'elles iais- sent a nu les racines. Aussi les colons, pour reparer ces pertes ou suppleer a rinsuffisance du sol, sont-ils obliges de transporter dans leurs champs un en- grais qu'ils tirent du lieu le plus voisin et qu'ils ont soin de choisir, autant qu'il leiir est possible, analogue au ter- rain de leurs plantations. C'est a peu pres la meme methode que suivent nos vignerons. « Le docteijir anglais Falconer a «on- clu, d'apres une ^tude approfondie des diverses loealites oii le the se coltive en Chine, qu'il croit sous une temperature de 73° a 54' 5' Fahrenheit (22" cent, a 12°); qu'en ete, la chaleur ne va pas au dessous de80° (26° cent.), et qu'en hiver, lebarometre descend de 54" a 46° (1 2 " 7' a 6" cent.) ; que la difference entre I'ete et I'hiver sur les frontieres du nord 6tait de iJO" (14° cent.) et sur celles du sud de 30° (t°cent. au-dessous de glace); que les endroits les plus propices au the varient de temperature, annee com- mune, de 54° a 64° (22° a 28° cent.); que la pluie tombe egalement dans tous les mois de I'annee, et que I'humidite du cli- mat est generalement moderee. Ledoc- teur Abel, que nous avons deja nom- nie, a fait un travail curieux sur la structure geologique des terrains ou Ion cultive le th6. Ce travail s'accorde sur tousles points avec les observations de M. Falconer et celles des vovageurs qui ont explore les provinces a the de la Chine (*). » Classification des ihes. « Le commerce, observe avec raison I'abb^ Grosier. distingue plus de sortes de thes que la botanique n'en admet d'espcces reelles : I'age ou le choix des feuilles, les preparations plus ou nioins recherchees qu'on leurdonne, suffisent pour les faire distribuer en differentes classes sons des noms differents ; mais tous ces thes de qualites et de denomi- nations diverges peuvent provenir du m^me arbre. » Aujourd'hui les Chinois eux-m^mes ne reconnaissent que deux especes de thes, les this noirs et les this verts. Kous croyons que la classification adoptee par M. Brigdman , dans son grand ouvrage, intitule : ^ Chinese chrestomathy in the Canton dialect., est la plus exacte et K» meiileure, sous tous les rapports; c'est aussi la plus recente ; nous la suivrons done, en y ajoutant les documents curieux que Ton trouve dans la Monographie. Th^i noir«. FEKOE (duvet blauc). En chinois, pS-hdo; dans le dialecle de Canton, pak-ho. « Le pekoe a la feuille tres-allongce, d'un noir argente etcouverteri'un leger duvet blanc et soyeux ; ses cxtremites sont taeheiees de noir, dc gris et de blanc. Dans celui que I'ou tne de Canton, on trouve souvent des petits batons venant de la tige des feuilles mais dans celui de Russie, dout les feuilles sont presque toutes argentees, il ne s'en rencontre pas. (*) Monographie du llie, p. 4? cl suiv. CHINE MODERNE. 603 « Ce the est la premiere recolte de I'arbuste, lorsque les feuilles sont en- core en bourgeons ; de la lui vient ce parfum si delicat que les Chinois aug- mentent encore en y melant quelques fleurs de Voleafragrans^ dont on trouve frequemmentdes graines pariui ie pekoe. Com me ce the se torrefle tres-legere- ment pour n'en point alterer Ie parfum, il est plus susceptible que tout autre de se deteriorer par Ie voyage, I'humi- dite ou par Ie temps. « Son godt a I'infusion ressemble un peu a celui de la noisette fraiche. C'est Ie plus fin, Ie plus aromatise et Ie plus cher des th6s noirs. « En France, ou I'usage du the n'est encore repandu que parmi les classes aisees, Ie pekoe y est tres-connu, tres- appreci^, et notre marche est mieux ap- provisionne que celui de Londres pour les qualites qu'on y importe. Mais c'est la Russie surtout qui achete et con- somme les premieres sortes, dont elle va s'approvisionner a Kiakhta et a la cdlebre foire de Nijni-Kovogorod. Ces thes viennent tous des provinces sep- tentrionales de la Chine, et sont expe- dies par caravanesa traversla Tartaric chinoise. Soit en raisoa du mode de transport, du soin extreme qu'on ap- porte aux emballages, ou du sol ou on les recolte, ils ont un parfum superieur a ceux qui nous viennent de Canton; aussi leur prix en Russie s'eieve de 20 a 80 roubles la livre russe. Les Anglais n'emploient ce the qu'en Ie melangeant avec d'autres thes noirs, pour leur don- ner du parfum , et encore en mettent- ils fort peu. » ORija^GE PEKOE. En chinois, chdng-hiang ( parfum supe- rieur). « Nous ne designerons ce the que par Ie nom (orange pekoe) qu'il porte sur les caisses qui viennent de Canton , et que les Anglais lui ont donne en raison, sans doute, de sa couleur, qui est d'un noir fonce melange dejaune orange. 11 est tres-menu; son odeur est agrea- ble, quoiqu'elle ne paraisse pas na- turelle, car on trouve parmi les feuil- les beaucoup de petites graines sem- blables a celles de Volea fragrans, dont cependant il n'a pas Ie parfum. On Ie boit rarement seul ; mais en Ie melan- geant avec du sou-chong, il lui donne de la force et produitune boisson assez agreable, mais un peustimulante.Cette sorte n'est apportee sur nos marches d'Europe que depuis dix a douze ans. « C'est ce the qui, melange avec du Congo, se vend a Londres sous la deno- mination assez connue de howqua mix- ture. « Sa couleur a I'infusion est beau- coup moins transparente que celle du sou-chong. )' PEKOE NOIR. En chinois, hdng-mei (fleur de prunier rouge ). « Cette sorte est fort rare sur notre marche, et surtout en bonne qualite; la meilleure s'apporte en Angleterre. Sa feuille est inegale en grosseur; eile est frisee a la maniere de Torange pe- koe; on y trouve quelques parcelles blanches, des petits batons et des pe- tioles rougeStres. « Son arome a I'infusion serapproche du bon Congo. » En chinois, kong-fou ((ravaii). « Le Congo, qui est presque inconnu sur notre marche, est de tous les thes noirs celui qui merite le plus de ^xer notre attention. « En Chine, ou ses propriet^s bien- faisantes sont averees, il forme a lui seul la boisson journaiieredes habitants du pays; en Angleterre, ou le chiffre de la consommatiou du the depasse an- nuellement 30 millions de demi-kilo- grammes, le congo y figure a hii seul {tour plus des deux tiers, d'apres les re- eves officiels des importations de la Grande - Bretagne. Anciennement la Compagnie des Indes avail etabli des primes pour les raeilleurs lots qui lui etaient offerts ; mais depuis labandon de cet usage, on y importe souvent des qualites communes, qui cependant con- servent leur godt de congo bien dis- tinct. En Russie, ou on lui a donne le nom si heureusement significatif de « the de famille, » on le trouve sur toutes les tables. II y est certainement d'une quality superieiire a celui qui nous C04 L'UNIVERS. vient de Ciinton , niais son prix est beaiifoiip plus ^leve. « l.e Congo se recolte sur le mfime arbre qui a produit le pekoe, et se ciieille itnmediatement apres lui ; seu- lement il faut fjue I'arbre ait atteint rage de six ans. Ses feuilles sont min- ces, courtes, plus petites que celles du sou-chong; sa nuauce est d'un noir grisatre. C'est ainsi que le designent les essayeurs experts de la Compagnie des Indes. Les qualites inferieures sont plus fonc^es. n Le Congo superfin est plein d'a- rome et de saveur; son parfumaquel- que analogie avec celiii du ptekoe; aussi I'appelle-t-on souvent pekoe noir. II est sans contredit un des plus sains et des plus agreables que produise I'arbuste a the; etje ne mets point en doutequ'on ne lui accorde chez nous la preference qu'il a trouvee chez tant d'autres peu- ples, des que nous aurons pu appr^cier son merite incontestable par un plus frequent usage. « II donne a I'infusion un godtsavou- reux auquel se joint une sorte d'amer- tume agreable et presque impossible a deer ire. » SOU-CHOITG. Eb chinois, siao-tchbng (petite espece). « Ce the est fait avec les feuilles de I'arbuste qui a produit le pekoe et le Congo ; mais c'est la seconde recolte et lorsqu'elles sont arrivees a leur matu- rite. « Le sou-chong jouit d'une grande reputation a la Chine. Sa feuille est un peu plus large que celle du congo; elle est mince et tant soit peu concassee,'ce qui denote sa qualite, car les feuilles jeunes, tendres et bien torreflees se brisent plus facilement que les autres. C'est le plus fort des thesnoirs, et lors- quil est mel^ avec du pekoe, il forme une boisson d'un arome exquis. » roDCHONG. £a chinois , pao-tcliong ( espece a enve- loppes). « Ce the est sup^rieur au sou-chong et tres-estime par les Chinois. Les feuilles en sont larges, tongues et bien roulees; elles sont melangees d'une assez grande quantity de petioles. « L'o- rigine de son nom vient de ce qu'il s'apporte presque toujours en petits paquets enveloppes de papier d'un jaune clair ; ces paquets pesent envirou 200 grammes cliacun. « L'aromede ce theesttres-fm, suave et delicat. II est fort leger, et il faut en mettre un peu plus que d'une autre sorte, si Ton veut obtenir une bonne infusion ; il donne a I'eau a peu pres la meme nuance que le sou-chong. » CAMPOY. En chinois, kien-pei (choisi et seche au feu). « II est rare sur notre marche,etsur- tout en bonne qualite. Cette sorte est formee des feuilles les plus delicates et les mieux choisies de la troisieme re- colte. Elles sont plus longues et plus epaisses que celles du sou-chong, au- quel il ressemble beaucoup a I'infusion par sa couleur ; mais son goilt est moins aromatique et plus faible; c'est pour cette derniere raison qu'il est peu goilt^ des consommateurs. Cependant c'est un bon the, quand il est bien choisi, et, en Angleterre, on I'ordonne comme boisson rafraichissante. » THE BOBF. OV THE BOU. En chinois, woti-y ; dans le dialecte du Fo-kien, hou-y. \), mais il est plus touffu. Son tronc devient tellement gros, qu'il faut quelquefois deux per- sonnes pour I'enibrasser. II s'eleve jus- qu'a environ dix pieds. Les fibres de son bois sont blanches et d^liees. II est dur, lourd et susceptible d'un beau noli. Ses feuilles ressemblent a celles de I'ar- bre tou-tseu (cratxgus bibas, Loureiro, Flor. each., p. 391), mais elles sont plus petites. Elles ressemblent encore a celles de I'arbre tchun (frene), mais elles sont aussi plus petites. Elles sont minces, etroites , arrondies a leur extr^mite, brillantes et pr^opres a teindre en rouge. On cuit dans I'eau les jeunes pousses de cet arbre, on les fait tremper en- suite pour enlever leur amertume, on les lave avec soin, et on les assaisonne pour les manger. « Get arbre fleurlt dans le cinquieme mois (juin); ses lleurs sont blancnes, et ses graines ont la grosseur des teou (dolichos). Leur couleur est rouge. Ou peut deposer sur cet arbre, aussi bien que sur I'arbre niu-tching^ les insectes qui produisent de la cire. » Arbre choui-kin. « Les feuilles de I'arbre choui-kin ressemblent a celles du niu-tching, mais leurs cotes sont dentes en scie ; elles naissent cinq par cinq. Get arbre ne donne pas de fleurs. C'est certainement I'arbre que Li-chi-tchin appelle niu-la- chou oil Varbre femelle qui produit la cire. « Dans le pays de Chou (qui depend de la province d'uSse-tchouen),il y a un autre arbre sur lequel on place les insec- tes a cire, et qu'on appelle tcha-la. Ses feuilles ressemblent a celles de la plante kio [chrysanthemum indicum). II croit encore plus rapidement que cette plante. Des que I'arbre tcha-la (litt^ralement, appliquer-cire) a un an , on peut y pla- cer les insectes a cire. Au bout de trois ou quatre ans, son tronc est gros fcomme une tasse a mettre du vin; mais bientot il deperit, et Ton ne peut ainsi en ob- tenir de la cire que pendant fort peu de temps. Cet arbre est d'une espece differente du choui-kin. II pousse rapi- dement, memelorsqu'on y applique des insectes a cire; mais il a de la peine a devenir un gros arbre. Dans le pays de Chou, on eleve peu d'insectes a cire sur I'arbre niu-tching {rhussiiccedaneum). Le plus grand nombre vit sur I'arbre appele tcha-la. C'est pourquoi on dolt 608 preterer I'espece d'arbre du pays Chou (c'est-a-dire I'arbre tcha-la). » COLTUBK DK I.'aRBRE NIU-TCHIWO. (Extrait de I'ouvrage intitule : Pien-min-thou.) « On seme les graines dans le dernier raois de I'annee. Les premiers jets pa- raissent au printemps. L'annee sui- vante, on le transplante dans le qua- trieme mois (avril). Lorsqu'il a atteint la hauteur d'environ sept pieds, on peuty appli(|uer les insectes a cire [la- tchong). On piante les arbres niu-tching a peu pres de la meme maniere que les mdriers. On les dispose en lignes iongi- tudinales el transversales, en laissant entre eux la distance d'environ un tchang (dix pieds). Alors I'arbre grandit et acquiert de la force, II faut entourer les racines d'excellent fumier, et labou- rer tout autour de I'arbre une fois par an. Sil y pousse des herbes, il faut les oter avec lesarcloir ou la beche.Parce moysn les branches deviendront vigou- reuses, et Ton recoltera une grande quantite de cire. » L'UNIVERS. de CIRE D ARBRE. Nong-tching- (Exlrait derouviage intitule: thsioueH-chou.) « Avant les dynasties des Tliang et des Song (du VIF au VIII« siecle de notre ere), la cire blanche dont Ton se servait pour faire des bougies etait produite par les abeilles. La cire blanche produite par les insectes appeles la- tchong^ ouinsectesacire, n'a coinmenc^ a 6tre connue que depuis ladynastiedes Youin ou empereurs mongols , c'est-a- dire au milieu du XIIP siecle. IMain- tenant elle est devenue d'uii usage ge- neral. On en recolte dans les provinces du Sse-tchouen, du liou-kouang , du Yun-nan et du Fokien, ainsi que dans les districts situes au sud-est des monts Met-Ung, etc. ; mais la cire d'arbre du Sse-tchouen et du Yun-nan est la plus estim^e. » Meme ouvrage, « Siu-kouang-ki (auteur de I'ouvrage precedent) ajoute : L'arbre niu-tching donne de la cire blanche. C'est un fait qui ne se trouve consigne dans aucun ouyrage historique antorieur a la dy- nastie actuelle (il vivait sous les Ming, au commencement du XVII*' siecle). Maintenant cette cire abonde dans les provinces de I'estetdu sud de la Chine. Precedemment j'avais con^u des doutes a ce sujet : je ne pouvais croire que cette cire n'eflt pas ete connue des an- ciens, etje supposais que leur silence tenait uniquement a ce qu'ils n'avaient fias eu le temps de faire une excursion ointainepourie verifier par eux-ni^mes. Mais j'ai vu des habitants de i'arrondis- sement de ff^ou-tcheou qui m'ont ap- pris que c'etait seulement depuis vi/igt ans qu'ils ^levaient des insectes a cire. Dans I'arrondisseinent de Ou-hing, les cultivateurs me raconterent que cet usa^e ne datait que d'une dizaine d'an- nees. Dans mon pays meme, on ne le conuaissait pas non plus avant les cinq annees qui viennent de s'ecouler. Dans l'annee keng-siu (en 1610), j'ai com- mence a planter une centaine de pieds de niu-tching^ et j'ai obtenu de la cire en suivant la methode usitee aujour- d'hui. Dans le village que j'habite, on voit aussi beaucoup d'insectes a cire {la-tchong) qui naissent d'eux-m^mes. La moitie des insectes qu'on place ici sur les arbres est prise dans I'arron- dissement de Ou-hing ; I'autre tnoiti^ se compose d'insectes indigenes. Les gens du pays assurent que ces derniers sont preferables. II resulte dece qui precede quece produit 6tait inconnu des anciens. J'liurais eu le droit de rejeter un fait aussi extraordinaire, si je ne I'avais pas v6rifl6 de mes propres yeux. » SECOLTE ET EPO RATION DE LA CIRE d'aRBRB. (Extrait de rouviage intitule : So/ig-c/ti- thsa-pou.) « L'arbre tong-tsing peut venir de graine. Desqu'il est dans toutesa force, il convient d'y placer dans lecinqiiieme mois les insectes a cire qui y trouvent leurnourriture. Dans le septieme mois (aodt), on r^coltc la cire. II ne faut pas larecueillirentierement. Si Ton en laisse une certaine quantite, l'annee suivante, dans le quatrieme mois, on en verra sortir de nouveaux insectes a cire. « Lorsqu'on a recueilli la cire, on la fait d'abord s^cher au soleil. Puis on couvre avec une toile I'ouverture d'uu vase de terre, et Ton depose la cire sue CHINE MODERNE. 609 cette toile. Ensuite on place ce vase dans un cliaudron de m^tal rempli d'eau bouillante. Bientot la cire se fond et tombe dans le vase de terre. Elle se condense, se durcit, et offre une par- faite blancheur. Des ce moment, elle est propre a faire des bougies. Quant aux parties les plus grossieres, on les met dans un sac de soie que Ton jette dans I'huile bouillante. La cire pure se fond entierement et se combine avec I'buile. On peut I'employer immedia- lenient a fabriquer des bougies. «Lorsqu'on a eleve pendant trois ans sur un arbre des insectes a cire, il convient de le laisser reposer pendant trois ans. « L'arbre choui-tong-^sing (le tong- tsing des lieux humides), qui a de petltes feuilles, est tres-avantageux oour I'eleve des insectes a cire. » Mettle ouvfage. « Dans les pays de Pa et de Chou (qui dependent de la province du Sse- tchouen), on ne seme les graines de cet arbre (tong-tsing) qu'apres les avoir fait tremper dans I'eau de riz pendant une dizaine de jours, et en avoir ote la capsule (le pericarpe). Apres une pre- miere education, on coupe l'arbre pres du collet, et Ton y applique de nouveau les insectes lorsqu'il a pousse des jets vigoureux. Lorsqu'un arbre a nourri ces insectes pendant une annee, on le laisse reposer I'annee suivante. Pour recueillir la cire, il est necessaire de couper toutes les branches de l'arbre. On n'y doit laisser aucuns vieux ra- meaux, c'est-a-dire aucun des rameaux qui ont nourri des insectes a cire. » (Extrait d'un ouvrage intitule : Pen-thsao- loid'pieti.) tt La cire blanche d'insectes ne res- semble point a la cire blanche des abeilles. Elle est produite par de petits insectes qui se nourrissent du sue de l'arbre tong-tsing {ligustrum glabrum) et longtemps apres le convertissent en une sorte de graisse blanche qui se re- pand et s'agglutine sur les branches de l'arbre. II y a des personnes qui s'ima- ginent faussement que cette matiere est une dejection de I'insecte. « Quand I'automne est venu, on I'en- 39« Livraison. (Chinb MODEBi!fB.> leve en raclant, on la fait bouillir dans I'eau, et on la passe dans un filtre d'e- toffe. « Ensuite on la met dans I'eau froide, oil elle se flge et forme une masse so- lide. Si on la brise, elle prcsente des veines brillanteset diaphanes commela pierreblancheappeleec/a'-A-ao(s;eafi7e). Si on la niele a une certaine quantite d'huile, elle fournit des bougies qui sont bien superieures a celles de cire d'abeilles. « Observation. Suivant Siu-kouatig- ki, les bougies faites avec la cire pure dHnsecfes a cire sont dix fois plus avan- tageuses que les bougies ordinaires. « Si Ton y mele un centieme d'huile, elles ne coulent pas. C'est pourquoi cette espeee de bougie est devenue d'un usage general. Les arbres a cire se cultivent en grand nombre sans nuire aucune- nient a I'agriculture. » INSECTES A. CIRE. _j (Extrait du Peti-thsao-kang-tnou.) « Les insectes h cire sont d'abord gros comme des lentes. Apres I'epoque appelee mang-tchong (apres le 5 juin), ils grirapent aux branches de l'arbre^ se nourrissent de son sue et laissent echapper une sorte de salive. Cette li- queur s'attache aux branches, et se change en une graisse blanche qui se condense et forme la cire d'arbre. Elle a I'apparenee du givre. Apres I'epoque appelee tchou-chou (apres le 23 aodt), on I'enleve en raclant, et on I'appelle alors la-tcha, c'est-^-dire sediment de cire. « Apres i'epoque appelee pe-/o?< (apres le 7 septembre), cette cire se trouve agglutinee si forteraent a l'arbre, qu'il serait fort difficile de I'enlever. On fait fondre cette matiere, et on la purifie en la passant dans une sorte de filtre en etoffe. Quelques personnes la liquefient a la vapeur et la font decouler dans ua vase. Lorsqu'elle est figee et reunie en masse, elle forme ce qu'on appelle la cire d'arbre. « Quand les insectes sont petits (c'est- a-dire viennent de naitre), ils sont de couleur blanche. Lorsqu'ils ont pro- duit de la cire et qu'ils ont atteint leur vieitlesse, leur couleur est rouge et noire. lis se rapprochent entre eux , et 39 610 fUNIVERS. s'attachent par poquets aux hranches des arbres. Dans le commencpment, lis sont gros coinme des grains de millet et de riz ; des que le printemps est venu, ils croissent peu a peu et deviennent groscomme des oeufs de poule. lis sont de couleur violette et rouge. lis se tien- nent par grappes et enveloppent les branches; ou dirait que ce sont les fruits de I'arbre. « Lorsque cet insecte est sur le point de pondre, il se forme une coque (lit- teralement une maison) qui ressemble aux loges des mantes qu'on voit sur les inilriers. Cette coque s'appelle commu- nement la-tchong {cire-graine), ou la- tseu {cire-fils). L'interieur est rempli d'ocufs blancs qui ressemblent a de petites lentes. On les trouve reunis par paquets qui en renferment plusieurs centaines. A I'epoque appelee li-hia (le 6 de mai), on recueille ces ceufs, on les enveloppe dans des feuilles de gin- sembre, et on les suspend a differentes distances aux branches de Yarbred cire. « Apres Tepoque appelee tnang- tcliong (apres le 5 de juin), les oeufs ^closent et les enveloppes s'ouvrent. Les insectes a cire sortent en rampant et se cachent d'abord sous les feuilles ; ensuite ils grimpent aux branches, s'y installentet travaillent a la cire. Ilfaut nettoyer avec soin la terre qui se trouve au pied de I'arbre, et empecherqueles fourrais ne mangent les oeufs des in- sectes a cire(*). » Renseignements sur la plante textile tchoii- ma {urtica iiivea) , extraits des Uvres clii- nois et communiques a FAcademie des sciences , par M. Stanislas Julien. COLTCRE DU TCHOU-MA (uRTICA HIVE*). (Traite imperial d'agricnlt. cbinoise, liv. 78, fol. 3.) « Pour semer le tchou-ma dans le troisieme ou le quatrieme mois, on choisit de preference une terre sablon- neuse et legere. On le seme dans un jardin; si T'on n'a pas de jardin, on peut adopter un terrain situd ores d'une riviere ou d'un puits. On b^cne la terre une ou deux fois ; ensuite , on forme ♦ (*) Voy. les Gomntes rendtis hebdoma- daires des seances de rAcademie des sciences, par MM. les secretaires perpi'tuels, i" se- mestre 1840, n» t5, i3 avril. des plates-bandes larges d'un pied et longues de quatre pieds; apres quoi , on beche enrore une fois. On tasse la terre superQciellement, soit avec le pied, soit avec le dos de la b^che, et lorsqu'elle est un peu ferme , on I'ega- lise avec un nlteau. La nuit suivante, on arrose les plates-bandes, et le len- demain , avec un rSteau a petites dents, on releve la terre, puis on la nivelle de nouveau. ' « Ensuite , on prend un A^x\\\-ching (260 centilitres) de terre humide et un ho (.S2 centilitres) de grnines, et on les m^le ensemble. Avec un ho de grai- nes, on peut ensemencer six a sept plates-bandes. Apres avoir seme, il n'est pas n^cessaire de rccouvrir les graines de terre j car si on le faisait , elles ne germeraient pas. « On prend quatre k'itons, dont I'ex- tremite inferieure est taillee en pointe, et on les enfonce en terre en les ali- gnant, deux d'un cote de la plate-bande et deux de I'autre; Ton s'en sertpour appuyer unesorte de petit toit de deux ou trois pieds de haut , que Ton recou- vre d'une natte mince. « Dans le cinquieme ou le sixieme mois, lorsque la chaleur du soleil est devenue forte, on recouvre cette le- gere natte d'un paillasson epais. Si Ton ne prenait pas cette precaution, les germes de la plante seraient detruits par la chaleur. « Avant que la plante ne germe, ou lorsque les premiers germes commen- cent a paraitre, il ne faut pas arroser. A I'aide d'un balai trempe dans I'eau, on mouille le toit de nattes, de ma- niere a tenir humide la terre qu'il re- douvre. Chaque nuit, on enleve les nattes, afin que les jeunes pousses re- coivent la rosee. « Des que les premiers germes ont paru , si Ton voit des herbes parasites, il faut les arracher immediatement. Lorsque la plante a acquis deux ou trois doigts de bauteur, le toit n'est plus necessaire. Si la terre est un peu seche, on I'arrose legerement jusqu'a la profondeur de trois pouces. « On choisit alors une terre un peu forte, et Ton forme d'autres plates- bandes pour y 6tablir les jeunes plants. La nuit suivante, on arrose les pre- CHINE MODERNE. 6tl miferes plates-bandes oii sont encore les jeunes sujets; puis le lendemain ma- tin, on arrose les nouvelles plates- bandes qui les attendent. On les enleve avec la beche, en conservant une petite motte de terre autour da chaque pied , .eton les transpiante (on les repique) a la distance de quatre pouces les uns des outres. On bine frequemment. « Au bout de trois a cinq jours, on arrose une fois; puis, au bout de dix jours, de quinze jours et de vingt jours, on arrose encore. « Apres le dixieme niois , on les re- couvre d'un pied de fumier frais de boeuf, d'^ne ou de cheval. » MKME sujET extrait dii Traite general d'agri- culture , inlilule: Nong-tclilng-tlis'iouen- ckoit. « Lorsqu'on cultive le tchou-ma (ur- tica nivea) pour la premiere fois, Ton se sert de graines. Apres qu'il est venu de semis, les anciennes racines don- nent spontanement de nouveaux jets. Au bout de quelques annees, les ra- cines se croisent et s'entrelacent , et il faut separer les tiges et les replanter. « Aujourd'hui , dans le pays de An- king et de Kien-Jimg , beaucoup de personnes detachent avec un couteau des portions de racines et les replan- tent. Ceux qui n'ont pas pu se procurer de la graine imitent aussi le procede usite pour obtenir des plants de nifl- riers provenant des marcottes. Les re- sultats de cette pratique sont extrdme- ment rapides. « Mais dans les pays oii il n'existe pas de racines de tchou-ma^ et ou il serait difficile d'en faire venir de loin , il convient de recourir a la graine. « Des que les jeunes plants ont quel- ques pouces de hauteur, on les arrose avec de I'eau mSlee par moiti6 de jus de fumier. Apres avoir coupe les tiges, il faut arroser immediatement; mais cet arrosage doit avoir lieu la nuit ou par un temps couvert; car si Ton ar- rosait en plein soleil , la plante se rouil- lerait. II faut bien se garder de faire usage da fumier de pore. « Le tchou-ma pent ^tre plante tons les mois ; mais il faut que cesoit dans un terrain humide. » TBAWSPI.AWTATION RT MUf.TIPLTCATION DU TCaOU>MA. (Tra!j« IrapMat d'agricnltare , liv. 78, fol. 5.) « Lorsque les touffes du tcliou-ma sont tres-fournies, on creuse la terre tout autour, et Ton eu detache les nou- veaux pieds, que Ton transpiante ail- leurs, Alors le pied principal vegete avec plus de vigueur. Au bout de quatre ou cinq ans, les pieds anciens se trou- vant extremement fournis , on les di- vise et on les replante sur d'autres pla- tes-bnndes. « Quelques personnes se contentent d'abaisser les longues tiges, et obtien- nent des marcottes par le procede or- dinaire. « Quand une plate -bande est trop garnie, on en etablit une nouvelle qui est bientot suivie de plusieurs autres. De cette maniere , les plants se mulli- plient a Tinfini. « On choisit d'avance une terre grasse qui a ete bien labouree en au« tomne , et on la fume avec du fumier fin. Le printemps suivant, on trans- piante. La meilleure ^poque est celle oil la vegetation commence ; la seconde epoque (sous le rapport de la conve- nance) est celle ou les nouvelles pousses paraissent; la troisieme epoque (c'est- a-dire la moins convenable) est celle ou les tiges sont deja grandes. n On espace les nouveaux plants d'un pied et demi, et quand ils ont ete bien entoures de terre, on les arrose. « En ete et en automne, il faut pro- fiter du moment ou la terre vient d'e- tre humect ee par la pluie. On pent aussi transplanter les jeunes tiges jdaris des lieux voisins, mais il est essentiel de conserver une motte de terre autour de chaque pied. » MEMG SUJET. « Pour multiplier les plants de tchou- ma, on separe avec un couteau des portions de racines de trois ou quatre doigts de longueur, et on les couche par deux ou trois dans de petites fosses ^loignees I'une de I'autre d'un pied et demi. On les entoure de bonne terre et Ton arrose ; on renouvelle cette irri- gation trois ou cinq jours apres. Quand les nouvelles tiges ont acquis une cer- 39, 613 L'UNIVERS. taine 6I^vation , on bine fr^quemment. «Si !a terre est seche, on arrose, S'il s'agit de transporter ces plants au loin , ii faut que la racine conserve sa terre premiere, bien envelopp6e de feuilles de roseau. On les enferine, en outre, dans une natte pli^e de maniere h les preserver de I'air et de la lumiere. On peut alors les transplanter, en toute s6curit6 , a une distance de plu- sieurs centaines de lis (dizaines de lieues). « La premiere ann^e, quand la plante a atteint la hauteur d'un pied , on fait une recolte; on en fait une autre la seconde ann^e. Les flbres des tiges couples sont bonnes a filer. « Chaque annee , dans le dixieme mois , avant de couper les rejetons qui depassent la racine, on couvre la terre d'une couche ^paisse de fumier de boeuf ou de cheval. Dans le second mois , on enleve le fumier avec un r^- teau, afin que les nouveaux sujets puis- sent sortir librement. Au bout de trois ans, les racines se trouvent extr^me- ment fournies ; si Ton ne transportait pas une partie des plants ^ui viennent en touffes serr6es, ils s'etoufferaient les uns les autres. » fiECOLTE DU TCHOTT'MA. « Chaque annee, Ton peut faire trois r^coltes. A I'^poque ou Ton coupe les tiges , il faut que les petits rejetons qui sortent du pied de la racine aient envi- ron un demi-pouce de haut. Des que les grandes tiges sont coupees , les re- jetons poussent avec plus de vigueur, et donnent bientot une seconde re- colte. Si les jeunes pousses 6taient trop hautes , il ne faudrait pas couper les grandes tiges ; mais les rejetons ne pourraient prosperer et nuiraient au developpement de ces grandes tiges. « Vers le commencement du cin- quieme mois , on fait une premiere re- colte-, une deuxieme au milieu du sixie- me mois ou au commencement du sep- tienrie mois; enfin, une troisieme au milieu du huitieme mois ou au com- mencement du neuvieme mois. Les tiges de la deuxieme recolte croissent plus rapidement que les autres; leur ^ualit^ est infiniment preferable. « Apres la recolte , on couvre de fu- mier les pieds de tchou-ma, et Ton ar- rose immediatement; il faut bien se garder d'arroser en plein soleil. » TEILLiGE DES FILAMENTS DU TCHOD-MA. « Lorsque la recolte des tiges est finie, on prend un couteau de bam- bou , ou un couteau de fer, et on les fend a partir de I'extremite. On en- leve d'abord I'^corce, puis, avec le couteau, on ratisse la couche infe- rieure qui est blanche et recouverte d'une pellicule ridee qui se detache d'elle-meme. On trouve alors les fibres interieures ; on les detache et on les amollit dans de Teau bouillante. Si Ton teille le tchou-ma en hiver, on fait tremper d'avance les tiges dans de I'eau tiede ; ce qui les rend plus faciles a fendre. « La premiere couche du tchou-ma est grossiere et dure , et n'est bonne qu'a faire de I'etoffe commune; la deuxieme est un peu plus souple et plus fine; la plus estimee est la troisieme couche, qui sert a fabriquer une etoffe extremement fine et l^gcre. » ROCISSAGE ET BLANCHIMEMT DC TCHOU-KA. « On reunit les tiges et Ton en forme de petites boltes que Ton place sur le toit de la maison pour qu'elles soient humectees par la rosee de la nuit, et sechees ensuite par la chaleur du soleil. Dans I'espace de cinq a se-pt jours, elles acquierent d'elles-memes une blancheur parfaite. Si le temps est convert ou pluvieux, on les met secher dans un lieu couvert et expose a un courant d'air. Si elles etaient mouillees par la pluie, elles deviendraient imme- diatement noires. « Un autre auteur dit : « Apres le teillage des filaments, on les lie en echeveaux, on les arrondit en cercle, et on les fait tremper pendant une nuit au fond d'un terrine pleine d'eau, puis on les file sur le tour. Cette operation achevee, on les fait tremper encore dans une eau de cendres de bois de murier. "Apres les avoir retires du vase, on les divise par paquets de cinq onces; on prend alors, pour chaque paquet, une tasse d'eau pure que Ton m^le avec une egale quantity de chaux pul- CmNE MODERNE. 61! v^ris^e, et on les depose, dans un vase, au milieu de ce melange pendant une uuit. «Le lendemain, on les debarrasse de la chaux et on les fait bouillir dans une eau de cendres de tiges de bl6 : ils deviennent ainsi blancs et souples. Apres les avoir bien seches au solell , on les fait bouillir encore une fois dans de I'eau pure; en outre, on les agite dans une autre eau pour achever de les nettoyer, et enfin on les fait s6cher au soleii. « Cela fait , on les soude bout a bout sur le tour pour obtenir de longs fils , on en forme la chaine et la trame , et Ton en fabrique de I'etoffe par les pro- c6des ordinaires. » « Un autre auteur dit : « Apres avoir file les filaments du tchou-ma, on les fait bouillir dans de I'eau de chaux, et , quand ils sont refroidis , on les lave avec soin dans une eau pure. En- suite , a I'aide d'un treillis de bambou place a la surface de I'eau, on les etale par couches egales, afin que, pour ainsi dire , ils soient a moitie humectes par en has, et a moitie seches supe- rieurement. A I'approche de la nuit, on les retire , on les egoutte et on les fait secher; on continue de meme le lendemain et les jours suivants, jus- qu'a ce que les fils aient acquis une parfaite blancheur. C'est alors seule- ment qu'il convient de les employer au tissage. » « Suivant un autre procede, il y a des personnes qui , apres le rouissage ordinaire, filent le tchou-ma et en fa- briquent de la toile. Elles different en cela de celles qui ne rouissent le tchou- ma qu'apres le filage. « II y en a d'autres qui prennent les filaments bruts, les exposent la nuit a la rosee, et le jour, aux rayons du soleii ; puis , quelques jours apres , les filent au tour, et ne blanchissent qu'a- pres le tissage. « D'autres enfin , a I'exemple de ceux qui travaillent la plante Ao, coupent les tiges , ne tissent les filaments qu'a- pres les avoir ramollis par la vapeur de I'eau bouillante , et ne s'occupent plus de les blanchir. De tels filaments don- nent une toile plus souple et plus ner- veuse. » MANIERE DE RECUEILLIR LES MEILLECRES OR&IKES DE TCHOU-MA. « Lorsqu'on veut recueillir des grai- nes At tchou-ma pour le semis, on doit preferer celles qui proviennent des premieres pousses. Dans le neuvieme raois, apres I'epoque choang-kiang (apres le2octobre), on recueille les graines et on les fait secher au soleii ; ensuite on les mele avec une egale quantite de sable humide, et on les met dans un panier de bambou que Ton recouvre soigneusement avec de la paille. Cette precaution est neces- saire, car si elles gelaient, elles ne germeraient pas. Les graines de la deuxieme et de la troisieme pousse ne sont pas bonnes a semer. Au moment de faire des semis, on les eprouve avec de I'eau ; Ton emploie celles qui ont ete au fond , celles qui flottent a la sur- face n'ont aucune valeur. » Meme ouvrage, fol. 4. « On seme avant la premiere moitie du premier mois. Les meilleures grai- nes sont celles qui sont tachetees de points noirs. Apres les avoir semees , on les recouvre avec de la cendre. Si on les seme dru , les plants de tchou- ma viendront faibles et greles; ils ac- querront, aucontraire, de la force et ae la vigueur si les graines sont clair- semees. Des que les feuilles ont paru , Ton arrose avec du fumier liquide. Dani le septieme mois , on recolte les graines , on les met dans une toile de chanvre et on les suspend dans un lieu expose au grand air : cela facilite et hate la germination. » CDLTDRE DES M^RIERS. En 1837, M.Stanislas Julien,derins- titut, publia, par ordredu ministre des travaux publics, de ragricuRure et du commerce, un ouvrage qu'il intitula : Resume des principaux traites chi- nois sur la culture des mUriers et l education des vers a so?e. Traduiten allemand, en italien^ en grec moderne, en russe, en anglais, dans la Caroline du Sud , jamais ouvrage de ce genre n'obtint un succes plus eciatant. Nous croyons done que nos lecteurs nous sauront gre de trouver ici un apergu des methodes adoptees a la Chine pour 614 L'UNIVERS. la culture des inilriers. Le sujet nous est etranper ; mais nous avons consulte, rfur I'ouvrage de M. Stanislas Julien, un des iuges les plus cotnp6tents, et M. Rol)inet, dont tout le monde con- natt les int^ressants travaux , a bien voulu nous indiquer les passages a ex- traire. C'est d'apres lui que nous cite- rons : Plaiitaiion des muriert. « Dans le cinquieme mois (en juin), on prend des niQres et on les met dans I'eau, on ecrase la pulpe avec les mains et on la lave h plusieurs reprises. Quand on a separ^ la graine, on la fait secher a I'ombre. « Ou prepare par le labour dix ar- pents de terre fertile, ou, ce qui vaut mieux, des terres incultes, qui n'ont point ete cultiv6es depuis longtemps. On seme, dans cliaque arpent, trois cAtw<7 (espece de niesure) de graine de millet et de nii)res melees ensemble. Le millet et les miiriers doivent naitre en meme temps. On bSche, et Ton fait en sorte que les mflriers se trouvent a une distance convenable les uns des autres. Quand le millet est mdr, on le mois- sonne; en uoussant^ les miiriers attei- .gnent une liauteur egale a celle du mil- let; on les coupe rez-terre avec une faucille ou une serpe bien tranchante; on les laisse secher au soleil, et. lors- ?u'il faitun bon vent, on y met le feu. our cela, il faut toujours choisir le moment ou le vent souffle en sens con- traire. » Maniere de taiiler les grands mtiriers. « II faut uniquement ^claircir les branches, et surtout taiiler a temps. On doit faire en sorte que les branches Erennent de la force, et poussent de onne heure, afin que les vers a sole ne soient point exposes a manquer de feuilles. « Si Ton ^claircit les branches, celles 4ui restent acquerront de la force , et les feuilles deviendrontplus epaisses et plus nourrissantes. Si cette annee on laille en temps convenable, les longues branches deviendront fortes et vigou- reuses ; les feuilles de I'annee prochaine pousseront de bonne heure, et, de plus, elles seront Epaisses et luisantes. « II faut couper toutes les branches qui partentdu centre, afinqu'un homme puisse s'y tenir debout, se retourner et se servir aisemenl de la liache. Les branches et les feuilles tombent en de- hors de I'arbre; cela vaut beaucoup mieux que d'etre oblige de transporter tout autour de I'arbre un escabeau lourd et elev6. Un homme place ainsiau cen- tre de I'arbre peut faire autant de be- sogne que deux personnes qui travail- leraient en dehors. On ne doit pas laisser croitre les branches en trop grand nombre, autrenient on ne pour- rait les couper sans un travail long et penible; de plus, les feuilles seraient minces et depourvuesde saveur « La methode suivie dans le pays de Thsin s'appelle lo-sang. Dans le der- nier moisde I'annee (Janvier), on coupe toutes les branches surabondantes, et on eclaircit beaucoup celles qu'on laisse ; ensuite, sur les branches que Ton conserve, on laisse tout au plus quatre yeux, et on euleve tous les au- tres. L'annde suivante, les branches au'on aura laissees, seront devenues e forts rameaux ; les scions noirs qui sont sortis du milieu des yeux pour- ront avoir trois pieds de longueur ; les feuilles seront deux fois plus epaisses qu'a I'ordinaire, et presenteront une surface lisse etbrillante. Pendant toute I'education des vers a soie, on les cueillera avec la main; on laissera seu- lement les branches qui se jettent en dehors. Apres avoir pousse abondam- ment jusqu'a I'automne, elles pourront avoir atteint une longueur de huit a dix pieds. Dans le dernier mois de I'an- nee (en Janvier), on les coupera de nou- veau comme par le passe. Au bout de plusieurs annees, si les branches qu'on avait laissees paraissent tropsurcharger I'arbre, on les coupera encore a leur base. « Lorsque I'arbre a atteint son maximum de force et de croissance , on doit couper dans le centre la tige et les branches. « II y a quatre sortes de branches qu'il faut necessairement retranclier : « 1° Les branches qui pendent vers la racine ; « 2' Celles qui se jettent en dedans et tendent vers k tronc ; CHINE MODERNE. 615 « 3° Celles qui croissent deux a deux : on doit en couper une; « 4° Celles qui, bien que croissant dans une bonne direction, sent trop epaisses et trop diffuses. } « Le dernier niois de I'annee (Jan- vier) est le plus favorable pour la lai lie; le niois qui suit Test beaucoup moins. Dans le dernier mois de I'annee, la seve ne nionte pas encore, et la cessa- tion des travaux de la campagne laisse beaucoup de loisir aux cultivateurs. Les personnes qui taillent au prin- teinps n'ont pour but que d'ecorcer fa- cileuient les branches ( pour faire du papier), mais elles font perdre aux muriers una graade partie de leur seve. « Si Ton veut faire usage de I'ecorce de nidrier, on pent prendre les bran- ches coupees dans le dernier mois (Jan- vier) et les deposer, du cotedu midi , dans une fosse recouverte de terre. On les retire au second mois (mars), et elles s'ecorcent tres-facilement. » Greffe (fes muriers, — Greffe en fente. « On commence par scier horizonta- lement la tige du sujet, a une petite distance de terre. A I'aide d'un cou- teau bien tranchant, dont la pointe est tournee en haut, on fait a droite et a gauche, dans I'ecorce et I'aubier, deux entailles obliques d'un pouce et demi , qui vont en diminuant jusqu'a ce que leur extremite forme un angle aigu. On prend alors une greffe lon- guede cinq pouceset a pen presgrosse conmie le doigt; on la taille en forme dc prisme, a un pouce et demi de son origine; on la met dans sa bouche pen- dant quelques instants pour la rechauf- fer, puis on I'insere dans I'entaille qu'on a pratiquee lateralement sur le sujet. «I1 est tres -important que Tanion des deux parties soit etroite et precise, de maniere que le liber et I'aubier du vieil arbre coincident parfaitement avec le liber et I'aubier de la greffe (qu4 est destinee a I'ameliorer ou a le rajeunir). Le meme sujet peut recevoir ainsi plu- sieurs greffes en fente, quand sa gros- seur le permet. « On prend alors de la bouse frai- che, que Ton petrit avec de la terre, et Ton en forme une enveloppe autour de la greffe; ensuite on I'entoure soli- dement avec de I'ecorce fratche de mu- rier. Ce n'est pas tout : on cache en- core la ligature d'ecorce avec le m^rae empltltre qu'auparavanl; ensuite onre- couvre la greffe de cinq pouces de terre humide; eufin, on attache tout autour de cette poupee de terre des branches epineuses pour proleger la greffe. * Quand les nouvelles pousses seront sorties a travers la terre humide, et qu'elles auront un ou deux pieds de longueur, on les coupera en en laissant seulement deux ou trois. II est conve- uable de les maintenir par des tuteurs. « Siu-kouang-ki dit : La profondeur de I'entaille doit etre proportionnee a la force de I'arbre et a la grosseurdela greffe. II est important que I'ecorce et le bois de la greffe coincident exacte- ment avec I'ecorce et le bois du sujet; mais il y a une condition plus impor- tante encore: c'est la correspondance parfaite du point oil I'aubier se joint a I'ecorce. « Lorsqu'on veut greffer de grands mdriers, il convient de faire usage de la greffe en fente ou de la greffe par insertion. Quant aux petits mdriers, les greffes les plus favorables sont celles en oreitle de cheval (c'est-a-dire la greffe en flilte) et par compression (c'est-a-dire la greffe en ecusson). « Lorsqu'on greffe un arbre rez- terre, il rant I'entourer de terre glaise comme ceux dont nous venous de par- ler plus haut, et que Ton greffe en fente a nioiti^ de leur hauteur; seule- ment on se contente d'entourer I'en- taille avec du papier. Ensuite on I'en- veloppe avec un vieux morceau de uatte dispose comme une ecuelle (c'est- a-dire en forme de cornet tres-evase) ; on y met de In terre humide pour ali- menter la greffe ; on doit faire en sorte qu'elle soit a I'abri de I'air et du vent. Au lieu d'un morceau de natte, on pourra faire usage d'un vieux vase de terre sans fond. Quand on voitque la terre est seche, il faut I'arroser pour maintenir I'humidite. Bientot les reje- tons sortiront a travers la terre hu- mide qui enveloppe I'endroit greffe. II faut bien se garder d'oter cette terr&; 616 L'UNIVERS. inais a I'automne , lorsque les jets ont acquis de la force et que la 'greffe est solidement soudee, cette terre devient inutile. Des que les greffes sont bien prises et participent a la vie du sujet, on peut les laisser si la force de I'arbre et le noinbre des branches horizontales le permettent. » Greffe en ecttsson. « Lorsqu'on greffe par compression (en ecusson), on coupe unebranche ho- rizontaie a un pied de la tige. (On ne peut pas determiner rigoureusement la longueur qu'on doit laisser ; il faut avoir egard ala force de I'arbre.) Sur la greffe, a un demi-pouce en avant d'unoeil, on incise en carre la peau et la chair (I'e- corce et I'aubier) jusqu'a ce que la points du couteau soit arrivee a I'os (au bois) ; ensuite on enleve l^geremenl une pla- que d'ecorce et d'aubierportant un ceil. « Au-dessous de I'ceil et sur le bois , il y a un petit coeur (que nos agricul- teurs appellent corculum) qui est gros conime un grain de rrz : c'est le prin- cipe vital d'une petite pousse. Lorsqu'on leve I'ecusson, il faut I'arracher avec la pointe de I'ongle, de maniere qu'il reste attache a la petite plaque d'ecorce et d'aubier. « On met quelques instants dans sa bouche la plaque d'ecorce, et on I'appli- que sur la branche horizontale, ou elle laisse une empreinte humide. On la re- prend, et on la remetde nouveau dans sa boache; puis, en conduisant la pointe du couteau sur la ligne carree qu'a laissee I'ecusson humide, on incise I'ecorce et I'aubier, et Ton en enleve une portion de meme largeur, de ma- niere a denuder Tos (le bois). On prend alors I'ecusson et on I'insere a la place de la partie qu'on vient d'enlever (sur la branche horizontale). II est n^ces- saire que I'oeil del' ecusson soit tourne en haut. « On liera en haut et en has les par- ties greffees avec de I'ecorce fralche et mince de mdrier. La ligature doit ^tre serree d'une maniere convenable. Si elle I'etait trop, la viedu sujet ne pour- rait se communiquer a la greffe ; si elle ^tait trop ISche , les deux parties ne seraient pas assez rapprochees, et I'o- peration ne pourrait reussir. «0n petrit de la bouse avec de la terre glaise, et on en couvre les quatre cotes de la greffe en laissant I'oeil libre. « On proportionnera le nombre des ecussons a la grosseur de chaque ar- bre (•). ■> EDTJC^TIOIf DES VERS A SOIE. Le beau travail dont nous ve- nous d'extraire quelques passages , au sujet de la culture des mtiriers , nous fournira des renseignements tres- precis sur I'artd'^lever les vers fileurs. On sait que les Chinois ont consacre tons leurs soins au perfectionnement de la sericiculture, et si cette grande In- dustrie, comme I'observe avec raison M. le baron Leon d'Hervey, paralt^tre arrivee chez nous depuis quelques an- nees a un point tel , que Ton aitdesor- mais pen de chose a emprunter aiix Chinois , c'est surtout par I'etude ap- profondie de leurs methodes et de leurs rainutieuses pratiques que Ton est par- venu a rivaliser avec eux , apres ^tre demeure si longtemps en arriere (**). Logemcnt des 'vers a sole. «Les vers a sole aiment naturelle- ment le repos et craignent les oris bruyants ; leur maison doit etre tran- quille et exempte de tout bruit, lis aiment la chaleur et craignent Thumi- dite; leur logement doit etre construit en planches. Dans une maison tran- quille et retiree, ils ne seront point im- portunes par les cris et les clameurs des homnies. Dans une maison bien close, ils seront a I'abri des atteintes imprevues du vent du sud. Dans une maison construite en planches, ils se- ront a I'abri des exhalaisons et des va- peurs humides de la lerre « La maison des vers a sole doit ^tr.e eloignee des fumiers et des immondices (et de tout ce qui exhale une mauvaise (*) Pour les exlraits qui precedent, voyez I'ouvrage intitule : Resume des principatix traites chinois sur la culture des murigrs et r education des vers a soie , traduit par Sta- nislas Julian, p. II, 12, 28, 29, 3o, 3i, 58, 59, 60, 61 et 62. (**) Recherches sur I'agriculture et Thor- ticulture des Chiuois, par le baron Leoa d'Hervey Saint-Deny s, p. i5o. CHINE MODERNE. 6ir odeiir, comme les ecuries, les eta- bles, etc.). Ayez soin que, pendant la nuit, la lueur'd'aucunelampe ne s'insi- nue a travers les fentes des croisees , et ne vienne a rayonner subitement dans la demeure des vers a sole. IN'eteignez pas, dans I'atelier, de ces allumettes en papier qui repandent beaucoup de fu- rore. » Construction de I'etuvc. « II faut creuser au milieu de la mai- son une fosse dont la largeur et la pro- fondeur soient proportionnees aux di- mensions de I'atelier. La grandeur ordinaire de cette fosse doit etre de quatre pieds sur chacun de ses cotes ; on elevera des quatre cotes un mur carre de deux pieds de haut, en briques liees entre elles avec du ciment. On prendra de la bouse de vache bien se- che et reduite en poudre, et Ton cou- vrira le fond de la fosse d'une couche de cette poudre, epaisse de trois a quatre pouces. On etendra par-dessus un lit de morceaux de bois bien sees, ayant au moins cinq pouces de dia- irietre, qu'on aura coupes dans le der- nier mois de I'annee. On pourra pren- dre du mdrier, de I'acacia, de I'orme, ou tout autre bois dur et solide. Sur ces morceaux de bois on etendra une seconde couche de bouse seche et pul- verisee. Dans les endroits vides entre chaque piece de bois, on battra forte- ment la bouse pulverisee, de maniere a ne pas laisser le plus petit vide; car, s'il y avait des vides, le feu produirait une flamme qui pourrait endommager la maison, et, en outre, ce feu ne pour- rait durer longtemps. Quand on a com- pletement rempli la fosse, et qu'on a bien battu la bouse pulverisee qui cou- vre les morceaux de bois et en remplit les interstices, on y repand encore une couche de meme matiere. Sept ou huit jours avant la naissance des vers a sole, on place sur la bouse seche des char- bons allumes qu'on couvre de cendre chaude. La bouse seche prend feu , et degage, pendant cinq a sept jours, une fumee noire et jaune. Un jour avant la naissance des vers a soie, on entr'ouvre la porte pour dissiper la fumee, puis on la referme soigneusement. Des ce moment le bois et la bouse seche se trouvent compl^tement embrases jus- qu'au fond de la fosse. » Bains que I'on donne a la gralne des vers a sole, "Dans le district de Yong-kia^ on compte huit especes de vers a soie : <- r Les vers a soie appeles hang- tchin-tsan. lis forment leur cocon dans le troisieme mois (avril) ; ^ « 2° Les vers a soie appeles fc^e-/s«n, c'est-a-dire les vers que Ton nourrit avec les feuilies de I'arbre tche. lis for- ment leur cocon au commencement du quatrieme mois (mai) ; « 3° Les vers a soie appeles hang-tsan. lis forment leur cocon dans le quatrieme mois (mai); « 4° Les vers a soie appeles al-tchin- tsan, c'est-a-dire vers a soie cheris et precieux. Us forment leur cocon dans le cinquieme mois (juin); « 5° Les vers a soie appeles ai-tsany ou vers a soie cheris. Us forment leur cocon vers la fin du sixieme mois (juillet) ; « 6° Les vers a soie appeles Aan,-^ci^tn- isan^ c'est-a-dire vers a soie froids et precieux. Us forment leur cocon dans le septieme mois (aoQt) ; « 1° Les vers a soie appeles sse-tchou' tsan, c'est-a-dire vers a soie qui vien- nent d'une quatrieme ponte. Us for- ment leur cocon au commencement du neuvieme mois (octobre) ; « 8° Les versa soie appeles hati-tsan, c'est-a-dire vers a soie iroids. Us for- ment leur cocon dans le dixieme mois (novembre). « II y a des personnes qui arrosent la graine avec de I'eau saiee. Cette operation s'appelle sien-tsan, c'est-a- dire bain des vers a soie. Cette graine ainsi lavee produit les vers a soie les plus estimes. « Les vers dont on ne lave pas la graine s'appellent ho-tsan, c'est-a-dire vers a soie ardeots (ce sont ceux d'au- tomne). Us sont moins estimes que les precedents. « Beaucoup de personnes con- servent la graine de vers a soie dans des boites de bambou , ou elle est ex- posee a tons les changements de tem- perature humide, tiede, chaude ou brdlante. Si elle passe subitement du 618 L'UNIVERS. froid a une chaleur excessive, elle en est affect6e d'une maniere fuiieste. Les habitants de la'.province de Tche-kiang appellent cela tchingpou. Celte expres- sion vetit dire que les vers a soie con- tractent une nialadie iorsqu'ils sont eucore dans Toeuf (iitt^ralement sur la toile, ou sur les feuilles de papier). Les vers de cette graine sont jauues en naissant : or, les verts naissauts qui sont jaunes ne valent pas la peine d'etre eleves. On peut les comparer a un enrant qui a contracte une inaladie daus le sein de sa mere. A sa naissance, il est faihle et debile. II est dit'licile de le guerir de cette maladie inaee. En ge- neral, lorsqu'ou veut conserver de la graine de vers a soie, on etend les feuilles sur des planches de banibou, en faisant en sorte qu'elles ne soient pas exposees au vent ni au soleil. De plus, on les couvre avec une etoffe de soie, de peur que les papillons ou les insectes du colon ne les mangent. « On attend qu'il y ait beaucoup de neige, soit le premier jour de la derniere lune, soit dans le courant de la der- niere lune, et Ton etend au milieu de la neige les feuilles couvertes de graines. Au bout d'un jour on les retire et on les etend de nouveau sur les planches debambou, et on les couvre commeau- paravant avec une etoffe de soie « Lorsque les vers ne sont pas encore eclos, on pese la graine, et on en ecrit lepoids sur le dos de la feuilleou elle est attachee. Lorsque les vers sont eclos, gardez-vons de les balayer pour les separer du papier. II y a beaucoup de personnes qui, des qu'elles voicnt les vers eciore, les detachent du papier avec un petit balai ou avec un petit plu- nieau ; mais ces petitsetres, si delicats et minces commeun cheveu ou un brin de soie, ne peuvent supporter les bles- sures que leur fait le balai ou le plu- nieau. 11 faut couper des feuilles de niilrier en filets extremement fins , et les semer d'une maniere egale sur une grande feuille de papier. On applique le cote du papier ou sont les vers eclos sur celui qui est convert de filaments de feuilles de miirier. Les vers, qui aiment I'odeur des feuilles de murier, descendent d'eu.x-memes sur le papier destine a les recevoir. , « Pour faire eciore les vers a soie, il faut connaltre exactemcnt les degnis de chaleur ou de froid qui leur couvieniieut, et la maniere de hdter ou de retarder leur eclosion, de sorte qu'il n'y en ait pas im seal qui naisse avant ou apres les autres. « Voici le precede qu'il faut suivre : « Quaud les oeufs ont tous pris une couleur cendree, on reunit deux a deux les feuilles couvertes de graine et on les etend stir une claie parfaitement pro- pre. Ensuite on les route d'une maniere serree, on les lie des deux bouts avee une ficelle (de colon ou d'ecorce de mii- rier), et on place les rouleaux debout dans une chambre nropre , fraiche et ou il n'y ait point de fumee. « Le soir du troisieme jour on retire les rouleaux, on les deploie et on les elend sur des claies. C'est une chose tres-heureuse, si aucun ver n'est eclos. Mais si par hasard il y en a quelques- uns qui soient eclos avant les autres, on les enleve et on les jette. Ensuile on prend les feuilles trois a trois, on les roule ensemble d'une maniere lilche, et on les depose dans la chambre nou- vellement cjiauffee pour les vers a soie. On observe avec attention le moment du lever du soleil ; alors on deroule les feuilles et on les etend une a une sur des claies au milieu de la cour. S'il y a de la rosee, on placera les claies dans une chambre fraiche ou sous une es- pece de tente. Quelque temps apres, on transporlera les feuilles dans la chambre preparee pour les vers a soie, et on les etendra une a une sur des claies placees a terre. Au bout de quelques instants, les vers a soie nailrout tous ensemble, sous forme de petiles fourmis noires. II n'y en aura pas un seul qui nai.sse avant ou apres les autres. On pesera alors les vers eclos, avec les feuilles de papier, pour connaitre le noinbre de vers a soie qu'on aura a nourrir, et cal- culer d'avance la quantite de feuilles dont on aura besoin. « Le succes de I'education des vers a soie depend des precautions que Ton prend dans I'origine, afin qu'a I'avenir lis ne soient exposes a aucun danger. Si les vers a soie ne s'eveillent pas tons ensemble de leur premier sommeil , cela vient de ce qu'ils n'ont CHINE MODERNE. 619 point change de couleur et ne sont pas eclos tous ensemble. S'ils ne changent pas de couleur, et ne naissentpas tous ensemble^ cela vientde ce qu'on n'a pas suivi exactenient les regies prescrites pour bien conserver les ocufs. » Notirrilwe des vers a sole, « II faut absolument donner a man- ger aux vers a soie le jour et la nuit. Si ieursrepas sont multiplies, il en resul- tera necessairement qu'ils arriveront vite a I'epoque de leur vieillesse; mais si leurs repas sont rares et peu nora- breux, ils vieilliront lentement. « Quand les vers a soie vieillissenten vingt-cinq jours, une claie pent donner vingt-cinq onces de soie. Quand ils vieillisseut en vingt-huit jours, on n'en obtient que vingt onces. S'ils vieillis- sent en un mois ou en quar.mte jours, une claie ne donnera qu'une dizaine d'onces de soie. « Les personnes qui nourrissent les vers a soie doivent tScher de ne point dormir; la paresse a de graves incon- venients. « Chaque fois qu'on a donne a man- ger aux vers a soie , il faut faire le tour des claies et les visiter avec la plus grande attention; il est essentiel que les feuilles soient reparties d'une ma- niere egale. Si le temps est couvert et pluvieux, si I'air exterieur est froid, avant de donner a manger aux vers a soie, on prend des branches seches de miirier ou bien une poignee de paille de riz depouillee de ses feuilles ; on y met le feu, et I'on promene cette flamme au- tour et au-dessus des dales, afln de dissiper le froid et Ihumidite gui en- gourdissent les vers a soie. Apres cette operation, on leur donne a manger. De cette maniere ils ne contractentaucune maladie. Au moment de leur somuieil, on observe le temps oij ils sont tous endormis, et alors on suspend la nour- riture. Ensuite on ne leur donne a manger que lorsqu'ils sont tous eveil- les. Si on leur donnait de la nourriture lorsqu'il n'y en a que les huil ou neuf dixiemes d'eveilles, ils ne pourraient ar- river tous ensemble a I'epoque de leur vieillesse; en outre, il yen aurait un grand nonibre de perdus. « Depuis le second sommeil jus- qu'au grand sommeil (le troisidine sommeil), lorsque les vers prennent une teiute d'un jaune luisant et qu'ils se disposent a dormir, suspeudez la nourriture et transportezles sur d'au- tres claies. Lorsque ensuite ils sont tous tveUles, nourrissez-les lentement (c'est- a-dire donnez-leur des repas eloignes), et repandez les feuilles sur eux en cou- ches tres-Iegeres. Si les feuilles etaieut distribuees avec trop d'abondance , ils mangeraient sans appetit et tombe- raient malades. Or, comme c'est la nourriture qui donne aux vers a soie la force et la vie, il faut apporler la plus grande attention pour qu'elle ait toutes les qualites convenables. Les vers a soie redoutent beaucoup les feuilles impregnees de pluie ou de ro- see ; s'ils en mangent , le plus grand nombre d'entre eux tombent immedia- tenient malades. » Glioses iiuisibles aux vers a soie. « 1° Les vers a soie n'aiment pas a manger des feuilles humides; « 2° lis n'aiment pas a manger des feuilles chaiides ; « 3° Les vers naissants n'aiment pas I'odeur du poisson qu'on fait frire dans la poele ; « 4o Ils n'aiment pas a €tre dans le voisinage des gens qui pilent le riz dans des mortiers: « 5° lis n'aiment pas a entendre frap- per sur des corps sonores; « 6° Une femme qui est accoucbee de- puis moins d'un mois ne doit pas etie la mere des vers a soie , c'est-a-dire etre chargee d'elever les vers a soie ; « 7° lis n'aiment pas qu'un homme qui sent I'odeur du vin leur donne de la nourriture, les transporte d'un lieu a Tautre, ou les repande sur Its claies ; <<8° Depuis leur naissance jusqu'a leur vieillesse, les vers a soie redoutent la famee et les exbalaisons odorantes ; » 9" Ils n'aiment pas que I'on bri\le pres d'eux de la peau,des polls ou des cheveux; « to" lis n'aiment pas I'odeur du pois- son, du muse, ou I'odeur qu'exhalent certains animaux herbivores (comme lebouc, etc.); « 1 r lis n'aiment pas que , pendant le jour, on ouvre une croisee exposee au vent; 620 L'UNIVERS. « 120 lis n'ainient point a recevoir les rayons du soleil coucliant ; « 13" lis n'aiineut point que, lorsque la temperature de leur habitation est chaude, on y introduise un froid vif ou un vent violent; « 14° Lorsque leur habitation est frai- che, ils n'aiment pas qu'on y repande tout a coup une chaleur excessive; « 15° lis n'aiment pas que des per- sonnes sales etnialpropres entrentaans leur demeure ; « 16° II faut avoir soin d'eloigner du logement des vers a soie les miasmes et les ordures. » Entree des vers a soie dans la coconniere, « On fait le fond de la coconniere avee des planches de sapin, longues de six pieds et largesde trois pieds. Oncons- truit avee des bambous minces, dont on fait des fleches, un chassis dont la membrure est percee de grands trous. Dans ces trous on passe des roseaux ; f)uis on croise par-aessus en long et en arge des branclies de bambou depouil- lees de leurs feuilles. On recouvre le dessus de la coconniere avee une claie de roseaux tresses. « Les vers a soie ontalorsun endroit oil ils peuvent s'etablir en silrete, sans craindre de tomber. Lorsque I'interieur de la coconniere est bien dispose , qu'il offre la profondeur et la securite convenables, et que la claie ne presente aucun interstice, on y repand de suite les vers a soie. D'abord on inclinera un peu cette claie, jusgu'a ce qu'ils se soient vides des raatieres excrementiel- les; ensuite on les chauffera doucement avee de la braise. Quand ils auront commence a entrer dans leur filet (c'est-a-dire lorsque leur coque formera d^ja un leger filet), on augmentera peu a peu la chaleur. II ne faut point qu'ils s'arr^tent au milieu de leur travail; s'ils eprouvent un peu de froid, ils se promenent sur leur soie et cessent de filer. Lorsqu'on la devidera, elle se rom- pra fr6quemment. En general, on sera oblige de faire bouillir les cocons et d'en faire de la bourre de soie, parce qu'il est impossible de les devider d'un bout a I'autre. » Choia: des cocons. « Lorsqu'on veut garder les cocons pour en obtenir de la graine, il fautab- solument prendre ceux qui setrouvent au milieu de la coconniere. Ceux qui sont pres du haut donnent tres-peu de soie (ou une soie tres-mince); ceux qui sont pres du has donnent de la graine qui ne peut eclore. « II faut un grand nombre de personnes pour choisir en meme temps tous les cocons dont on a besoin; on les etend par couches de I'epaisseur d'un seul cocon , et on les conserve dans un endroit frais. Les papillons sortent tres-tard. De cette mauiere, on n'est point oblige de se presser pour devider la soie. » Manlere detouffer les chrysalides au moyen de la vapeur de Veau bouillante. n On prend trois corbeilles de bam- bou et un couvercle tissu en paille molle, que Ton applique sur I'ouverture d'une marmite remplie d'eau bouil- lante. « On place sur le couvercle deux cor- beilles, ou Ton a etendu trois a quatre pouces de cocons. On explore la tem- perature en mettant souvent le revers de la main sur les cocons de la claie su- perieure. Si la main ne peut endurer la chaleur, on retire la corbeille de des- sous, et Ton en met une autre sur la premiere. II ne faut pas que la vapeur soit trop forte, car elle ramoUirait trop la soie ; il ne faut pas non plus qu'elle soit trop faible, car les papillons ne manqueraient pas de percer les co- ques. « Si le dos de la main ne peut endu- rer la chaleur, la temperature de I'eau est au degre convenable pour le but qu'on se propose. Alors on trans- porte les corbeilles dans I'atelier, et Ton verse les cocons sur une claie ; puis on les remue legerement avee la main. Si les cocons remplissent la claie et com- mencent a former un monceau, on les partagera, et on etendra le reste (c'est- a-dire la seconde moitie) sur une autre claie. « On altendra que les cocons soient entierement refroidis, ensuite on les couvrira avee de petites branches de saute. CHUSE MODERNE. 621 « II faut exposer tons les cocons a la- vapeur dans le meme jour; car si Ton ne pouvait etouffer tous les papillons, ceux des coques restantes ne manque- raient pas de sortir le jour suivant. « II y a trois manieres de faire mourir les chrysalides : our laquelle on emploie la poudre ou imaille dc cuivre sonore (formeede 80 parties de cuivre et de 20 d'etain). Cette limaille de cuivre se fixe sur la piece a I'aide d'une pate de riz a la- quelle on la mele d'avanee, et qu'on en- leve ensuite par un simple lavage. Par la, la limaille de cuivre reste en place ; autremenl elle ne tarderait pas a se disperser. Pour souder des vases d'ar- gent, on fait usage de limaille de cuivre rouge. "Toutes les fois qu'on veut marteler un instrument de cuivre, par exemple un tcbing , appele vulgairement lo (un gong, t:im-tam a fond plat), il n'est pas necfssaire de fondre d'avanee le metal sous une forme arrondie ; on peut le hattre immediatement, sans autre pre- paration. « Mais si Ton veut marteler un tcho, vulgairement appele tambour de cui- vre (un tamtam), ou des ting-ning (cymhales), on fond d'abord le metal sous forme de plaque arrondie, puis on le bat au marteau. « Lorsqu'on bat un gong ou un tam- tam, on nese sert point d'une enclume. On etend sur le sol la masse ou la leuille de metal. Si I'instrument doit ^tre de grande dimension, plusieurs ouvriers se placent autour et la frapncnt h coups redoubles. De petite qu elle etait, la piece se.argit ct s'etend, et bientot du corps de I'instrument s'e- clioppent des sons vibrants quipartent tous des points frappes a froid. Lors- quc le centre du tam-tam a ete relevc en bosse, un ouvrier habile lui donne graduellement, en le batlant a froid, la aualite de son requise. On peut lui onner a volonte deux i-ortes de son : le son femelle (aigu) ou le son mAle (grave); mais il faut calculer, a un cen- tieme, et meme a un millieme pres , le degrede saillie ou de depression de la bosse centrale. C'est par un grand nom- brc de coups de marteau qu'on deter- mine le son male. « Lorsque le cuivre jaune vient d'etre martele, il est d'un blanc blafard ; mais il suffit de le timer pour lui rendre sa couleur naturelle(*).» FORCELA.INE DE T.A CHINE. L'histoire de la porcelaine de la Chine est tres-incertaine et tres-obs- cure. On ne connait pas I'inventeur de cet art ; on ignore, dit I'abbe Grosier, si on le doit au hasard ou a des tenta- tives reflechies; on ne peut mSme de- terminer avec precision quelle est spn antiquite. Suivant M. Davis, le pre- mier fourneau dont il soit fait mention fut etabli, vers le commencement du septieme siecle de notreere, dans la province de Riaiig-si, ou se fabrique encore aujourd'hui la plus belle et la plus parfaite porcelaine de I'empire; mais les fameux fourneaux de King-te- tcbin , situes a Test du lac Po-yang, ne furent construits, d'apres ce vbyageur, que vers I'an 1000 de Jesus-Chrisl. King-te-tchin est le nomd'unbourg situe. dans le departement de Jao- tcheou-fou , province de Kiang-si. Cette celebre bourgade a une lieue et demie de longueur, et I'on assure qu'elle renferme un million d'habitants (**). (*) Voy. la Notice siir la fabrication des tatn-Iams, par M. Stanislas Juiien. (Extrait des Comptes rendus des seances de I'Acade- mie des sciences, tome XXIV, p. 12 et r3.) (**) King-le-tcliin conlient environ cinq cents fourneaux a porcelaine, tous en acti- vile. Des qu'on approche de ce lieu a quel- que distance, les tunri)ilions de flannne et de fiimee qui s'elevent de differenls endroits CHINE MODERNE. 639 II existe un ou vrage chinois, en huit vo- lumes , intitule : King-te-tchm-tao-lou (Histoire des poteries et des porcelaines de la manufacture iniperiale de King-te- tchin) (*). La traduction de cet ouvrage interessant, faite par M. Stanislas Ju- lian, est actuellement sous presse. Nous devous aussi au P. Dentrecolles une lettre tres-detaillee sur la fabrication de la porcelaine chinoise. « Ce mission- naire, dit I'abbe Grosier, avail uue eglise ii King-te-tchin meme, et il comp- tait parnii ses neophytes un grand nombre d'ouvriers employes dans les ateliers. C'est d'eux qu'il a tire la con- naissauce des precedes relatifs a ce travail et a I'explication de quantite de details dont il ne pouvait s'instruire par lui-meme; il a de plus fait une etude particuliere des principaux ou- vrages ciiinois qui traitent de la porce- laine (**). « A defaut de I'ouvrage tra- duit par M. Stanislas Julien, nous allous suivreleP. Dentrecolles et I'abbe Grosier. Malicre de la porcelaine. Sa couverle (email). On connait les principaux mate- riaux qui entrent dans la composition de la porcelaine, \e pe-tun-tseu, \ekao- ting (kao-lin), le hoa-chi. « A ces ele- ments principaux ilfautjoindre I'huile, le vernis ou la couverte, qui donne a la porcelaine sa blancheur et son eclat. Cette hiiile est une substance blancliS- tre et liquide, qu'on lire de la m^nie espece de pierre dont on fait les pe- tun-tseu; mais on fait choix de celle qui est la plus blanche, et dont les la- ches sont les plus vertes. Ou obtient cette huile, quon nomme pe-yeou, en font connailre I'etendue et la profondenr de ce fameux boiirg. On ne permet point aiix eirangers d'y couclier. Cette police est jugee nccessaire pour maiutenir I'ordre et etahlir la surele. (Description generale de la Chine, par M. I'abbe Grosier, 2^ edition, t. I*"", r- 84.) (•) D'un autre cote, M. Jacquemart se propose de publier une histoire generale des porrelaines en Orient et en Occident. Un pa- reil ouvrage , auqnel I'auteur a consacre plu- steurs annees d'un travail assidu , doit inspi- Ttr l)eauconp d'interet. , (**) Description generale de la Chine, t.VII,p. 18. dormant a la pierre les monies prepara- tions dont on fait usage pour les pe- tun-tseu : on lave ia pierre, on la pul- verise, on epure son residu, qui offre une espece de creme. Sur eent livres de cette creme, on jette une livre de chi- kao, mineral qui ressemble a I'alun et qu'on a pile apres I'avoir fait rougir au feu. Cet alun est une sorie de presure qui donne de la consistance a I'huile, qu'on a soin cependant de inaintenir dans un ctat de iluidite. « Cette huile de pierre, ainsi prepa- ree, ne s'emploie jamais seule : il faut y meler encore une autre huile, extraile de cendres de chaux et de fougere, sur cent livres desquelles on a jete aussi une Vivre de chi-kao. " Voici la maniere dont on prepare cette seconde huile. On cboisit de gros quartiers de chaux vive, sur lesqiielson jette un pen d'eau pour les dissoudre et les reduire en poudre. On dispose ensuite une couche de fougere seche, sur laquelle on etend une couche de cette chaux amortie. On empile ainsi un certain nombre de ces couches alterna- tives, et Ton met le feu a la fougere. Lorsque tout le monceau est consume, on distribue ces cendres sur de nouvel- les couches de fougere seche, qu'on en- flamme, et Ton reitere cette operation jusqu'a cinq ou six fois. Quand on s'est ainsi procure une certaine quantite de cendres dechaux etdefougere, on lesjette dans uneurneoucuvepleined'eau, en y faisant dissoudre, pourchaque quintal, une livre de I'espece d'alun appele chi- kao. On a soin de hien agiter ce me- lange : on le laisse ensuite reposer jusqu'a ce que la surface de I'eau se charge d'une croiite de creme, qu'on recueille et qu'on jette dans une se- conde urne et ainsi successivement dans plusieurs autres. Lorsquau fond de la derniere il s'est fornte une espece de p^te, on decante I'eau, et Ton met en reserve ce depot liquide, qui est la se- conde huile qu'on doit m^ler a la pre-, miere. ' « Quand on fait ce melange, li faut que les deux huiles soient egnlement epaisses; pour s'en assurer, on plonge dans I'une des briques de pe iun-t.seu, et Ton juge, en les retirant, si I'epais- sisseraent est egal sur leurs surfaces. (Mo L'UJSIVERS. Quant a la proportion des doses, I'u- sage le pliissuivi est de mSler dix me- sures d'huile de pierre avec une mesure de I'huile faite de cendres de cliaux et de fougere. « Ces deux premieres huiles entrent dans ia composition de plusieurs autres vernis, destines a servir aussi de cou- verte a la porcelaine. Le plus beau et le plus eclatant est le vernis rouge, appei^ yeou-li'hong. Ce vernis se fait de la grenaille de cuivre rouge et de la pou- dre d'une certaine pierre ou caillou rougeStre « Un autre vernis dont les Chinois font usage est celui qu'ils nomment long-tsiouen, et qui donne a la porce- laine une couleur qui tire sur I'olive.... Le noir eclatant, appel6 ou-kin, lui communique un genre particulier de beaute qui la fait recliercher des con- naisseurs. Ce noir est plombe et sem- blable a celui de nos miroirs ardents : Tor qu'on mfile a cette couleur donne un nouvel eclat a cette sorte d'ouvra- ges. On execute cette porcelaine noire en la plongeant dans une mixtion li- quide composee d'azur prepare. II n'est pas necessaire d'y employer I'azur le plus beau et le plus cherj mais il faut qu'il soit d'une consistance un peu epaisse. On le mele avec les vernis pe- yeoii et tse-kin, et Ton y ajoute un peu d'huile de cendres de chaux et de fougere. Par exemple, sur dix onces d'azur pile dans an mortier, on melera sept tasses de pe-yeou, une tasse de tse-kin et deux tasses huile de chaux et de fougere. L'experience peutfaire va- rier les doses, selon qu'on veut obtenir un noir plus ou moins fonce. Lorsque cette couleur est seclie, on cuit la por- celaine; ensuite on y applique Tor et on la recuit dans un lourneau particu- lier. II faut avoir la precaution, quand il s'agit de faire cuire la porcelaine noire, de ne la placer que vers le mi- lieu de la hauteur dufourneau, et non a son extr^mite superieure et sous la vodte, oil le feu deploie sa plus grande activity. « On a essay6 de peindre en noir ^elques vases de porcelaine avec I'en- cre *(le la Chine ; mais cette tentative n'a ete suivie d'aucua succes. En sor- tant du fourneau la porcelaine s'estre- trouvee tres-blanche. Comme les par- ties de ce noir n'ont pas assez de corps, elles s'etaient sans doute dissipees par Taction du feu, ou plutot elles n'avaient pas eu la force de penetrer la couche de vernis, ni de produire une couleur differente de celle de la couverte. « Quand on veut donner a la porce- laine un vernis qui la rende extreme- ment blanche, on mele, surtreize tasses de pe-yeou, une tasse d'huile de cen- dres de chaux et de fougere, aussi li- quide que le pe-yeou. Ce vernis est tres-fort, et Ton a soiu de ne point I'appliquer a la porcelaine que Ton veut peindre en bleu, parce que cette couleur, apres la cuisson, ne parai- trait pas a travers la couverte. La por- celaine a laquelle on donne ce fort ver- nis peut etre exposee sans danger au plus grand feu du fourneau. On la cuit ainsi toule blanche, ou pour la conser- ver avec cette seule teinte, ou pour la dorer, ou ia peindre de diverses cou- leurs, et la faire ensuite repasser au fourneau ; mais si Ton se propose de peindre la porcelaine en bleu et si Ton veut que la couleur paraisse apres la cuite, il ne faut m^ler que sept tasses de pe-yeou avec une tasse de la mix- tion de cendres de chaux et de fou- gere, « La maniere dont on doit appliquer le vernis ou la couverte aux porcelai- nes exige encore beaucoup d'adresse et des soins particuliers, soit pour que la couche n'aitque I'epaisseur prescrite, soit pour la rendre egale et uniforme sur toute la surface du vase. On fabri- que des pieces de porcelaine si minces et si delicates, qu'elles ne pourraient supporter une couche epaisse de ver- nis: leurs freles parois plieraient sous le faix et se dejelteraient. Pour parer a cet inconvenient, on divise cette cou- che en deux autres plus legeres, donn^es successivemeut. Tune par aspersion et I'autre par immersion. Par exemple, s'il s'agit d'une tasse, on la prend d'une main par le dehors, et la tenant incli- nee suf I'urne ou est le vernis, on fait t'aillir de I'autre main autant de cette mile qu'il en faut pour mouiller toute sa surface interieure. On la reprend des Su'elle est seche : on insere les doigts e la main dans sa cavite, puis la sou. CHINE MODERNE. 64 < tenant de I'extreraite d'une baguette, passee sous sa base, on la plonge lege- rementdansle vernis, d'oii on la retire aussitot (*). >• Dernieres manipulations donnees a la matiere de la porcelaine. Fabrication des pieces. « Toutes les manipulations qui pre- cedent la cuisson s'executent dans les endroits les raoins frequentes de King- te-tchin. La, dans une enceinte spa- cieuse de murailles, on a bati de vastes appentis, ou Ton voit disposees en etages un grand nombre d'urnes de terre. G'estjdans cette enceinte que de- meurent et travaillent une inflnite d'ouvriers, qui ont chacun leur tache marquee. Une piece de porcelaine, avant d'en sortir pour etre portee au fourneau, passe par les mains de plus de vingt personnes; ettout cela s'execute sans confusion. « Le premier travail consiste a puri- fier de nouveau le pe-tun-tseu et le kao-lin. On precede ensuite au melange de ces deux matieres. On met autant de kao-lin que de pe-tun-tseu pour les porcelaines fines; pour les moyennes, on emploie quatre parts de kao-lin sur six A^ pe-tun-tseu. Le moins qu'oa en mette est une partie de kao-lin sur \TO\s Aq lye-tun-tseu. « Ce melange fini, on jette cette masse dans un large bassin bien pave et cimente de toutes parts; puis on la foule et on la petrit jusqu'a ce qu'elle commence a se durcir. Ce travail est d'autant plus rude qu'il doit ^tre con- tinu ; s'il etait interrompu, tousles au- tres ouvriers resteraient dans I'inaction. On detache de cette masse, ainsi pre- paree, differents morceaux qu'on etend sur de larges ardoises; on les petrit encore et on les roule dans tous les sens, en observant soigneusement qu'il ne s'y trouve aucun vide ou qu'il ne s'y mele aucun corps etranger. Un cheveu, un grain de sable perdrait tout I'ou- vrage. Faute de bien faconner cette pate, la porcelaine se fele.'eclate, coule et se dejette. La perfection des pieces depend de ce premier travail. « Tous les ouvrages unis se facon- (*) Voy. Grosier, Description de la Cbine, t.YII, p! 19 a 28. 41' Livraison. (Chine moderne.) nent sur la roue. Quand une tasse en sort, elle n'est qu'une espece de calotte. L'ouvrier lui donned'abord le diametre et la hauteur qu'elle doit avoir, et elle sort de ses mains presque aus«it6t qu'il I'a recue. II est force d'user de vitesse, puisqu'on ne lui paye que trois deniers par planche, et chaque planche est gar- nie de vingt-six pieces. Cette tasse est recue par un second ouvrier qui I'assied sur sa base. Peu apres, elle est livreeauntroisieme, qui I'applique sur son raoule et lui en imprime la forme; en retirant la tasse de dessus le moule, il faut la tourner doucement sur ce meme moule, sans la presser plus d'un cote que de I'autre ; sans quoi elle se bosselle ou se dejette. Un quatrieme ouvrier polit cette tasse avec le ciseau, surtout vers les bords, et en diminue I'epaisseur autant qu'il est necessaire pour lui donner de la transparence. Enfin, apres avoir passe par toutes les mains destinees a lui donner ses divers ornements, elle est recue, quand elle est seche, par un dernier ouvrier, qui en creuse le pied avec le ciseau. II est etonnant de voir avec quelle celerite et quelle adresse ces ouvriers se trans- mettent ces vases les uns aux autres. On assure qu'une piece de porcelaine cuite doit passer par les mains de soixante-dix personnes. « Les grands ouvrages s'executent par parties, qu'on travaiile separement. Lorsque toutes ces pieces de rapport sont achevees et presque seches, on les unit et on les cimente avec la matiere m^me de la porcelaine delayee dans I'eau. Quelque temps apres, on polit avec le ciseau , en dedans et au dehors du vase, la ligne de reunion, qui, bientot couverte du vernis, disparait et n'est plus sensible. C'est ainsi qu'on adapte aux pieces des anses, des anneaux et autres parties semblables. Ceci regarde specialement la porcelaine qu'on fa- conne sur des monies ou qu'on modele entre les mains , tels que les ouvrages canneles, les grotesques, les figures d'arbres, d'animaux, d'idoles, les bus- tes que les Europeens commandent. Ces divers morceaux se forment de quatre ou cinq pieces qu'on reunit, et qu'on perfectionne ensuite avec des instru- ments propres a creuser, a polir et a 41 04S L'UNIVERS* rechercher les differents traits que le nioule a rendus peu sensibles. Quant siux fleurs et aux ornements qui n'ont point de relief, on les marque par Tein- preiute d'un cachet. On tixe aussi aux pieces de porcelaine des dessins et des ornements en relief tout prepares, a peu pre« comnie on applique une bro- derie sur un habit. Quelquefois encore on les execute d'une maniere plus ex- peditive : on se contentc de dessiner les figures avec le burin sur le corps nienie du vase -, on fait ensuite dans leur contour de legeres entailles qu'ou arrondit et qui kur donaent 4" re- Me.f(*).«> Travait At fo»,rneau. Cuisson de la por- celaine. «Lorsque la porcelaine a requ sa forme, son vernis, ses couleurs, on la transporte du laboratoire au fourneau, qui se trouve quelquefois a une autre extremite de Ring-te-tchin. Le porteur place sur chacune de ses epaules une planche longue et etroite, sur laquelle sont rangees les pieces de porcelaine. Charge de ces freles ouvrages, il tra- verse avec une agilite surprenante les rues les plus turaultueuses et les plus embarrassees du bourg, sans qu'il lui arrive de perdre son equilibre, malgre les mouvements qu'il se donne pour es- quiver et prevenir les chocs. «Le travail du fourneau exige de nouveaux soins, non moius compliques que les premiers. Dans une espece de vestibule qui le precMe, on apeicoit d'abord des tas de cj^isses et d'et'uis fai^s de tcrre , destines a renferraer la porcelaine. Chaque piece, pour peu qu'elle soit considerable, a sou etui ; et 1 ouvrier chii;iois imite, par ce procede, celui de la nature, qui, i»our condMire les fruits a une juste maturite, les rc- vgt d'une enveloppe qui les defende ou de la trop vive ardeur du soleil pen- d[ant le jour, ou de la fratcbeur de I'air pendant la nuit. « Ces caisses, dont la consomraation est prodigieuse, se fabriquent dans un gros village distant d'une lieue de King-te-tchin. On y emploie trois sor- tesdie terre: la premiere est une terre (*) Voyez Grower, lome Til, p. 28 a 3a. jaune, fort commune; la secondc une terre forte; la troisieme une terre grasse et huileuse. Ces deux dernieres sont assez rares et cheres, parce qu,'on est oblige de les extraire d'une mine tres-profonde. Aussi, dans le melange qu'on fait de ces terres, a-t-on soin, par vue d'epargne, de faire dpuiiner la premiere : d'ou il resulte que ces caisses durent peu. Presque toutes cclatent lorsqu'elles out supporte le feu de deux ou trois fournees. Si elles ne sont que felees ou legerement fendues, on les environne d'un cercle d'osier ; le cercle se briile, mais la caisse n'en fait pas moins encore le service de cette ifour- nee et la piece de porcelaine n'en sout- fre pas. Ces caisses ne son) pas cuites avaut qu'on les emploie; mais il faut avoir soin de ne pas remplir tout un fourneau de caisses neuves; elle-s ne doivent former que la moilie du nom- bre de celles qu'on y admet. Ceiles qui ont deja servi occupent le haut et le bas des piles; le milieu est reserve pour les caisses neuves. « Au fond de ces caisses est une cou- cbe de gravier tin, qu'on recouvre de poussiere de kao-lin, afln que le sable ne s'attache pas trop au pied du vase : on le place sur ce lit de sable, qu'on presse un peu, pour lui faire prendre la forme du fond de la porcelame, la- quelle ne touche point aux parois de son etui. Le haut de cet etui n'a point de couvercle : un second etui, pareille- ment garni de sa porcelaine, s'enchasse dans le premier, de telle sorte qu'il le ferme entierement , sans toucher a la porcelaine qui est au-dessous ; et c'est ainsi qu'on remplit le fourneau d« hautes piles de caisses qui defendent les ouvrages qu'elles coutiennent de Taction directe dufeu. Les porcelaines qui ont un couvercle le conserventdans leurs etuis : il s'attache un peu a la piece pendant la cuisson, mais un le- ger coup qu'on lui donne Ten separe facilemeut. « Quant aux petites pieces de por- celaine, telles que sont les tasses ^ the, on les renferme dans des caisses communes de forme ronde, et qui n'ont que quatre ponces de hauteur. Chaque piece est pos^'e sur une soucoupe de terre de I'epaisseur de trois ou quatre CHINE MODERNE. Q-13 ligaes etde la largeur de son pied. Ces petites bases sont aussi recouvertes de poussiere de kao-lin. Quand ces caisses sont un peu larges, on ne met point de porcelaine au milieu, paroe qu'elle se trouverait trop eloignee des cotes at par la meme de Taction du feu. « Les porcelaines, avant leur cuisson, sont; des ouvrages si fragiles et si deli- cats, que I'ouvrier, en les touchant de la main , craindrait de les briser ou d'alterer leurs formes. Ce n'est qu'a I'aide d'un leger cordon qu'il les de- place et les transporte. Le milieu de ce cordon est fixe a deux branches un peu Qourbes d'une fourchette de bois , que I'ouvrier tient d'une main, tandis qu a- vec les doigts de I'autre ii saisit les deux bouts croises du cordon, qu'il ouvre et qu'il retrecit seion I'ampleur de la porcelaine. C'est apres I'avoir ainsi enlacee qu'il I'enleve de dessus la planche et la pose doucement au fond de la caisse. Ces attentions mi- nutieuses n'empechent pas que tout ce service ne se fasse avec une incroyable celerite. « Toutes ces piles de caisses se pla- cent dans le fourneau sur un demi-pied de gros gravier: celles de ces piles qui occupent le milieu ont au nioins sept pieds de hauteur. Les deux caisses qui sont au has de chacune restent vides, parce que le feu n'agit que faiblement sur elles, etque le gravier les couvre en partie. Par la meme raison, on ne rem- plit point la derniere caisse, qui se trouve la plus elevee. Les piles qui renferment la plus fine porcelaine oc- cupent le milieu du fourneau; on place dans le fond celle qui Test moins, et a I'entree toutes les pieces qui ont plus de corps et qui sont fortes en cou- leur. « Ces differentes piles sont (jisposees dans le fourneau fort pres les unes des autres; elles se soutieiinent mutuelle- ment par des morceaux de terre qui les lient en haut, en bas, vers le milieu, de sorte cependant que la flamme ait un libre passage pour s'insinuer partout et envelopper egalement toutes les piles. « Les fourneaux pu Ton cuit la por- celaine sont precedes d'un assez long vestibule qui conduit I'air et fait, en quelque sorte, I'oftice de soufflet : il sert aux memes usages que I'arch* des verreries. « Ces fourneaux, dit le P. « Dentrecolles, sont presentement plus « grands qu'ils n'etaient autrefois: ils « n'avaient alors que six pieds de hau- « teur et de largeur ; maintenant ils « sont hauts de deux brasses, et ont « pres dequatre brasses de profondeur. « La vodte est assez epaisse pour qu'on n puisse marcher dessus sans qu'on « soit incommode du feu. Cette vodte « n'est en dedans ni plate , ni formee <( en pointe -, elle va en s'allongeant, et « elle se retrecit a mesure qu'elle ap- « proche du grand soupirail qui est a « Textremite, et par oii sortent l£s tour- « billons de flamme et de fumee. Outre « cette gorge, le fourneau a sur sa tete « cinq petites ouvertures qui en sont « comrae les yeux : on les couvre de « quelques pots casses, de telle sorte « pourtant qu'ils soulagent I'air et le « feu du fourneau. « On juge que la cuite est parfaite, « 1° lorsque la flamme qui sort nest « plus si rouge, mais qu'elle est un peu « blanchStre -, 2° lorsque, regardant par «rune des ouvertures, on apercoit « que les caisses sont toutes rouges ; « 3" lorsque, apres avoir ouvert une « caisse d'en haut, avec une pincette de « fer, et en avoir tire une porcelaine, « on voit, quand elle est refroidie, que « le vernis et les couleurs sont dans « I'etat ou on les souhaite ; 4° enfin, a lorsque, regardant par le haut du « fourneau, on voit que le gravier du «fond est luisant. C'est par tons ces « indices que I'ouvrier juge que la por- « celaine est arrivee a la perfection de « la cuite. Alors on discontinue le feu, « et Ton acheve de murer pour quelque « temps la porte du fourneau. Ce four- « neau a dans toute sa largeur un foyer « profond et large d'un ou deux pieds ; « on le passe sur une planclie, pour en- « trer dans la capacite du fourneau et « y ranger la porcelaine. Quand on a « allume le feu du foyer, on mure aus- « sitot la porte, ny laissant que I'ou- « verture necessaire pour y jeter de^ « quartiers de gros bois, longs d'un « pied, mais assez etroits. On chaufte « d'abord le fourneau pendant un jour « et une nuit ; eusuite deux hommes, 41. 644 L'UNIVERS. « qui se relevent, ne cessent d'y.jeter « du bois. On eu briile communement, « pour une fourn^e, jusqu'a cent quatre- « vingts charges. A en juger par ce que « dit un auteur chinois, cette quantite « ne devrait pas etre suflisante ; il as- « sure qu'anciennement on brdlait « deux cent quarante charges de bois, « et vingt de plus, si le temps etait plu- > vieux, bien qu'alors les fourneaux « fussent moins grands de la moitie « que ceux-ci. On y entretenait d'abord « un petit feu pendant sept jours et n sept nuits : le huitierae jour on fai- « sait un feu Ires-ardent; ei il est a « remarquer que les caisses de la petite « porcelaine etaient deja cuites a part, « avant que d'entrer dans le fourneau ; « aussi faut-il avouer que I'ancienne « porcelaine avait bien plus de corps « que la moderne. On observait encore « une chose qui se neglige aujourd'hui : « quand il n'y avait nlus de feu dans le « fourneau on ne a^murait la porte « qu'apres dix jours pour les grandes « uorcelaines et apres cinq jours pour « les petites. Maintenant on differe a n la verite de quelques jours a ouvrir « le fourneau, et a en retirer les gran- n des pieces , car sans cette precaution « elles eclateraient; niais pour ce qui « est des petites, si le feu a ete eteinta « I'entree de la nuit , on les retire des « le lendemain. Ledessin apparemment « est d'epargner le bois pour une se- « conde fournee. Comme la porcelaine .■est br^lante, I'ouvrier qui la retire « s'aide, pour la prendre, de longues « echarpes pendues a son cou. » « La cuisson des porcelaines est su- jette a une foule d'accidents que toute I'habilete des ouvriers ne pent ni pre- voir, ni prevenir. II est rare qu'une fournee reussisse en entier; il arrive menie quelquefois qu'elle est entiere- ment perdue, et qu'en ouvrant le four- neau on trouve les porcelaines et les caisses reduites en une masse informe, aussi dure qu'unrocher. Un trop grand feu ou des caisses mal conditionnees suffisent pour ruiner tout I'ouvrage. II est d'autant plus difficile de parvenir a regler le feu, que la nature inconstante du temps pent changer en un instant son action, la qualitc du sujet sur le- quel il agit, et celle du bois qui Ten tretient. Le P. DentrecoUes rapporte qu'ou vint un jour lui montrer une de cps pieces de porcelaine que les Chinois appellent yao-pien ou trans- mutation. Cette transmutation , ou nouvelle combinaison de substances , s'opere daus le fourneau , soit par le defaut, soit par I'exces de la chaleur, meles sans doute a beaucoup d'autres causes qu'il est difficile de deviner. Quelquefois il resulte de ces jeux du hasard des morceaux precieux par leur singularite; tel etait celui qu'ou fit voir au missionnaire. L'ouvrier avait rempli son fourneau de porcelaines peintes en rouge souffle : cent pieces fu- rent totalement perdues. Mais dans cet •amas informe de porcelaines a demi fondues etvitrifiees, on trouva un vase dont la matiere avait Toeil, la transpa- rence et toutes les qualites de I'agate. Si la depense n'empechait de multiplier desessais de ce genre, on parviendrait peut-etre au secret de ces transforma- tions et aexecuterregulierementceque le hasard a produit une fois. C'est ainsi que les Chinois ont reussi a se procurer un de leurs vernis les plus eclatants, leur beau noir ou-kin, dont un caprice du fourneau leur avait of- fert le premier modele. « Placons ici une observation impor- tante, II faut avoir soin que les porce- laines dont le vernis contient beaucoup de cendres de fougere soient •cuites dans le lieu le plus tempere du four- neau, c'est-a-dire ou apres les trois premiers rangs de caisses qui forment la pile, ou vers la base de celle-ci, a la hauteur d'un pied ou d'un pied et demi. Si ces porcelaines etaient placees a I'ex- tremite sup^rieure de la pile, au haul du fourneau, oii les flammes, en se re- courbant, produisent la chaleur la plus vive, la cendre de fougere se fondrait precipitamment, et la couverte s'ecou- lerait le long de la porcelaine. Le meme accident aurait lieu pour les porcelaines peintes du vernis rouge, du rouge souffle, du vernis tong-tsioueti, a raison de la grenaille de cuivre qui entre dans la composition de ces ver- nis, et qui ne resisterait point a Pac- tion d'un feu trop violent. On cuit, au contraire , au haut du fourneau , les pieces de porcelaine qui ont recu le CHINE MODEKNE. 645 vernis tsoui-yeou, dont nous parlerons dans le paragraphe suivant. « Lorsque la porcelaine, apres avoir re(^u son vernis, a passe dans les grands fourneaux, souvent on la peint ou on la dore, et, pour fixer ces nouveaux or- nements, on la cuit une seconde fois. Les fourneaux destines a cette seconde cuisson sont beaucoup moins grands que les premiers. Les plus' petits peu- vent etre executes en fer; niais, plus communement, ils sont de terre comme les autres. Leur hauteur est de cinq a six pieds, sur trois ou quatre de lar- geur et de profondeur. On les cons- truit de materiaux formes de la meme pSte que les caisses a porcelaine : ce sont des plaques enterrecuite,epaisses d'un demi-pouce, bautes d'un pied et larges d'un pied et demi, posees de champ les unes au-dessus aes autres et cimentees avec soin. La base du fourneau, elevee de terre d'un demi- pied, porte sur deux ou trois rangs de briques epaisses. Tout autour regne une petite enceinte de maconnerie, au bas de laquelle on menage trois ou quatre ouvertures qui tiennent lieu de soufflets pour aniraer le foyer. Cette enceinte laisse entre elle et le fourneau un espace vide d'un demi- pied, excepte en trois ou quatre en- droits, qui restent pleins et massifs, pour servir comme d'arcs-boutants au fourneau. «0n ne fait pas usage de caisses pour renfermer les porcelaines qu'on veut faire recuire. On les range par piles dans le fourneau en placant suc- cessivement, et par ordre de gVandeur, les petites pieces dans les plus grandes. Mais il faut avoir I'attention d'empe- cher que les porcelaines, ainsi emboi- tees , ne se touchent par leurs cotes peints : ce seraient autant de pieces perdues. Quand I'inegalite des gran- deurs ou la diversite des formes em- peche cet emboitement, on dispose les porcelaines par lits, qu'on eleve les uns au-dessus des autres en les separant par de larges plaques en terre cuite. Des que le fourneau est ainsi rempli , on le couvre des memes materiaux dont on a forme ses parois. Les pieces de cette toiture sont disposees comme les tuiles , et fortement unies avec du mortier : on aisse seulement au haut une ouverture, qu'on ferme d'un tesson quelconque. « A.ussit6t que tous les preparatifs sont faits, on allume un feu vif sous le fourneau ; I'espace vide que forme au- tour du foyer la petite enceinte de bri- ques, est rempli de charbons ardents, et on les repand avec profusion jus- que sur le toit. Quand le feu est dans toute son activite, on regarde de temps en temps par I'ouverture superieure : lorsqu'on voit, jusqu'au fond du four- neau, toutes les pieces rouges et em- brasees ; lorsque les couleurs, bien in- corporees avec la porcelaine, ne laissent plus apercevoir de saillie ni d'inegalite sur sa surface, on juge que les pieces ont atteint leur juste'^degre de cuisson, et Ton cesse le.feu (*). » Porcelaine craquelee. « A la Chine comme en Europe, dit M. Stanislas Julien, les amateurs de porcelaine recherchent avec avidite, et achetent a des prix exorbitants, les vases a fond blanc ou grisStre dont l'^*. mail est fendille de milie raanieres, tantot en dehors, tantot en dehors et en dedans : c'est ce qu'on appelle des ra- ses craqueles. II arrive quelquefois, chez nous, que, dans une fournee de trois h quatre cents vases de porcelaine, il s'en trouve un ou deux dont la cou- verte (I'email) est en partie craquel^e ; maisjusqu'ici, quoiqu'onconnaisse bien la cause de la craquelure (elle tient a ce que I'email n'a pas le m^me retrait que la p3te du vase), on n'avait pas en- core pu la produire en grand et d'une maniere intaillible sur toute une four- nee. « Les Chinois la font par un pro- cede des plus simples ; le voici tel qu'il se trouve decrit dans I'ouvrage inti- tule : King-te-tchin-tao-lou ( liv. VI , fol. 7) : Tchouikhi ou vases craqueles. « Les vases de genre qui ont ete fa- ce briques sous la dvnastie des Song du « sud (entre 1127'et 1278) sont d'une « pate grossiere et dure : ils sont epais « et lourds. II y en a d'un blanc de riz (*) Voyez Grosier, t. VII, p. 46 a 59, B46 L'UNIVERS. n et d'un bleu clair. Pour obtenir la ucraquelure, on combine du Ima-chi « (d(! la steatite) avec la niatiere de I'e- « mail. Apres que le vase a ^t^ soumis « a Taction du feu, Temail se divise en. « un nombre inllni de rales legeres qui o courent en tous sens (en formant une « sorte de reseau continu), comme si le « vase etait fendu en mille pieces. On « prend ensuite de I'encre grossiere ou ■ de la sanguine, et Ton eti remplit les n feutes du craquele ; puis on essuie et « Ton nettoie le vase. II y a des vases « ainsi fendilles sur le fond uni des- « quels on dessine des fleurs bieues. » n L'auteur de I'ouvrage precite nous apprend que Ton imite parfaitement ces anciens vases craqueles, a la ma- nufacture imperiale de Rlng-te- tchin (*). w Porcelaines exiraordiiiaires oa mement de ce qui est soubz la domi- nation du grand Chan, empereur des Tartares, par Marc-Paul. Paris, K. Groulleau, in-4. 15(59. Gas par da Cruz. Tractado em que se contam muy por extenso as cousas da China, com suas particula- ridades y assi do reyno de Orinuz. Ecora., in-4. J 577. Bernardo de Escalante. Dis- curso de la navigacion al oriente y grandeza de la China. Sevilla, in-8. 1578. The strange and marveilous news lately come from the great King- dom of China which adjoyneth with the East-India; translated ont of the castlyu tongue by T. IN. London., F. Gardyner and F. Dawson. 1680. Ltttereannue del Giappone e della Cina. Roma, in-8. 1585. G. de Mendoca. Historia de (*) Note de M. H. Ternaux-Compans. (Bi- bliotiicqiieasialiqiieet a/t-icaine, p. 19 etao.) las cosas mas notables, ritos y coslum- bres del gran reyno de la China. Roma, Grassi, in-8. 1585. Libro y relacion de las gran- dezas del reyno de la China hecho por un frayle descalco de la orden de S. Francisco de seys que fueron pressos en el dicho reyno en la isia de Haynam en el aiio de 1585. S. 1. et a., in 4. 1585. Mendoca. Historia della Cina. Fenezia, in-8. 1.585. Kiao-yao on Catechisme en langue chinoise, par le P. Michel Rug- gieri. Quam-tum. 158(5. Historia de las cosas mas no- tables, ritos y costumbres del reyno de la China , por Juan Gonzalez de Mendoca, con un itinerario del iiuevo m\xm\ol Madrid , G. Flaminio, in-8. 1586. Le meme ouvrage, Barce- lona (*). 1 586. Mendozza. Historia della China, tradotta di T. Avanzo. Roma, Grassi, in-4. Id. Fenezia, in->8. Id. Genova, in-4. Id. Finegia, Muschio, petit 1586. 1.586. 1587. in-12. 1588. 1.588 Id. Fenezia, in-8. Mendoca. Histoire du grand royaume de la (!hine, traduite par Luc de la Porte. Paris, in-8. 1588. R. Parke. History of the great and mightie Kingdome of China, and the situation thereof, together with great riches, huge cities, politicke, go- vernement and rare inventions of the same. London, in-4 goth. 1589. Reschreibung des Konigreiehs China samt dessen Fruchtbarkeit , Reichthum, etc. (Description du rovau- rae de la Chine, de sa fertility, dV sa richesse, etc.) Francfnrt, in-l. 1589. Marci Henningii Nova et succincta,vera tamen historia de regno China, ex hispanica lipgua. Franco- furti. 1.595. Mfendoca. Historia de la China. Medina del Cahipo, in-8. 1595. Fernando de Vargas y Contre- ras. Historia del grand r^yno de la China. Medina del Campo, in-8. (*) Les editions oil versions de Marco- Polo et de Mendoca sont tres-nombreuses ; nous nous bornerons a en citer queiques- uow. CHINE MODERNE. 639 1599. Girard le Ver. Vraye descrip- tion de trois voyages de mer vers le royaume de China et Cathay. Paris, Chaudier, iti-8. 1599. Historica relatio de legatione regis Sinensium ad regem Japonum. Romx, in-8. 1600. Histoire de la Chine, avec un itineraire du nouveau monde et la de- couverte du Nouveau-Mexique, traduite de I'espagnol (Mendoca) par Luc de la Porte. Paris, in-8. 1600. Henningii. Chinae descriptio. Moguntise, Albinus, in-8. 1601. Historia de las islas del ar- chipelago y reyno de la gran China, Tartaria, Cochinchina, Malaca, Sian, Camboxa y Jappon , y de lo succedido en alias a los religiosos de la orden de S. Francisco, por Fr. Marcello de Ri- hadenevra. Barcelona, G. Grael et G. Dotii, in-4. 1601 et 1610. Historia de las mis- siones que han hecho los religiosos de la coinpania de Jesus para predicar el santo evangelio en la India oriental y los reynos de China y Japon, escrita por el P. Luis de Guzman. JLala, Vinda de J. Gracian, 2 vol. in-lol. 1601. Longobardi recentissima de regno China epistola, id. de statu Chri- stiana; apud regem Mogor et de morte Taicosamae Japonise monarchiae. Mo- guntise, Albinus, in-8. 1601. Japonica, Sinensia,Mogorana, hoc est de rebus apud eas gentes a pa- tribus soc. les. 1598 et 1599 gestis. Leodii. 1602. Nouveaux advis du grand royaume de la Chine, escripts par le P. Nicolas Lombard, de la compagnie de Jesus, et Iraduits en francais par le P. J. de Bordes. Paris, jouxte la co- pie imprimee a Agen, Rolin Thierry et Eustache des Bordes, in-8. 1603. Divers voyages et missions du P. Alexandre de Rhodes en la Chine et autres royaumes de I'Orient , avec son retour en Europe par la Perse et I'Ar- menie. Paris, in-4. 1605. Diego de Pantoja. Relacion de laentrada de algunos padres de lacom- pania de Jesus en la China, y partiou- lares succesos que tuvierou y de cosas muy notables que vieron en el mismo reyno. SeviHa, in-8. 1605. Variorum librorum Chinen- sium bibliotheca, sive libri qui nunc primum ex China seu regno Sinarum advecti sunt. Amstelodami , C. Nico- lai. 1606. Histoire du grand royaume de la Chine, situe aux Indes orientales, plus, trois voyages faits versiceluy, en 1577, 1579 et 1581 ; ensemble un iti- neraire du nouveau monde et le des- couvrement du Nouveau-Mexique en I'an 1583. Pans, J. Arnaud, in-8. 1607. J. de Pantoie. Advis envoy^ de Pequin, capitale de la Chine, sur le succes de la religion chr^tienne audit royaume. Rennes, Harran, in-8. 1609. Histoire du grand royaume de la Chine, contenant la situation, anti- quite, fertilite, religion, etc. Lyon, in-8. 1609. Linton's News of the art of navigation, and of the mighty empire of Cathaio together with the Straight of Anian. London, in-4. 1614. F. M.Pinto, Peregrinacam em que da conta de muytas e muy estran- has cousas que vio no reyno da China, no da Tartaria e em otros muytos rey- nos das partes orienta&s. LUboa, in-fol. 1615. Trigautius. De Christiana ex- peditione apud Sinas, ex P. Martini Riccii commentariis. Augustas Finde- Hcorum, in-8. 1615. Trigautius. Litterae a regno Sinarum annis 1610 et 161 1 conscriptae. Antwerpise, Bellerus, in-8. 1616. Histoire de I'expedition chre- tienne au royaume de Chine, entre- prise par les Peres de la compagnie de Jesus ; trad u it du latin de Nic. Tri- gaut. Ujon, in-8. 1620. Franciso de Herrera Maldo- nado. Epitome historia 1 del reyno de la China, con la descripcion de aquel imperio y la introduccion en el de nues- tra santa fe catholica. Madrid, An- dreas Parra, in-8. 1621. Historia y relacion de lo suc- cedido en los reynos de China y Japon, en la qual se continua la gran perse- cucion que ha havido en aquella igle- sia, por Pedro Morejon. Lisboa, in-4. 1622. Nouvelle Histoire de la Chine, ou la mort de la royne mere du roy de la Chine, lequel est aujourd'hui, les 43. 660 L'UNIVERS. ceremonies qui se firenta ses funerail- les et les dernieres guerres que les Chi- nois eurent centre les Tartares, sont fideleinent racontees ettraduites de I'es- pagnol de Herrera Maldonado, pari. J. Bellefleur. Paris, veuve Chatellain, jii-8. 1623. Nouveaux mernoires de I'^tat de la Chine, par Louis Legrand. Colo- gne, \n-8. 1625. Rerum mirabiliutn in regno Sinae gestarum litterae annuse. S. J. AntwerpiXi in-8. 1626. Antonio de Andrade. Novo descubrimiento do gran Catayo e dos reynos do Tibet. Lisboa, A. Pinieyro, in-4. 1628. Ordoriez de Cevallos. Tratado de las relaciones verdaderas de los rey- nos de la China, Cochinchina y Cham- paa. Jaen^ Pedro de la Cuesta, in-4. 1628. Advis certain d'uneplus ample decouverte du royaume de Catai avec quelques autres particularites notables de la coste de Cocincina et de I'anti- quite de la foy chrestienne dans la Chine, tire des lettres des Peres de la compagnie de Jesus de I'annee 1626. Bourdeaux, in-8. 1628. Les Voyages aventureux de Fernand Mendez Pinto, traduits du portugois en francois, par Bernard Fi- guier. Paris, M. Henault, in-4. 1628. Relation de la nouvelle du grand Cathay, ou bien du royaume de Thibet, par leP. A. d' Andrade. Pont-a- Mousson, in-8. 1630. Voyage fait parterre, depuis Paris jusqu'a la Chine, par le sieur de Feynes, avec son retour par raer. Paris, Rocollet, in-8. 1630. Terrentius.Epistoliuni ex regno Sinarum ad mathematicos Europaeos missum cum commentario Johannis Kepleri. Sayani, in-4. 1035. AdamusSchall. Historica Nar- ratio de initio et progressu missionis societatis Jesus apud Sinenses. Fiennse Justrix, Cosmerovius, in-8. 1639. Trigautii Regni Chinensis de- scriptio. Lugduni, in-24. 1642. Alvaro Semmedo. Imperio de la China y cultura evangelica en el ; pu- blicado por Manuel de Faria y Sousa. Madrid, in-4. 1643. A. Semmedo. Relazione della grande monarchia della Cina. Roma, in-4. 1649. M. Martin. China illustrata. Amstelodami, in-fol. 1650. llelacam da conversani da rainha e principesa da China a nossa santa fe. Lisboa, in-4. 1650. Barentz. Verhael vande eerste Ship-vaert der Hollander door Waygat by noorden, Norweghen, Moscovienen de Tartarien, na Cathay ende China. Amsterdam, in-4. 1653. Sommaire de divers voyages et missions apostoliques du reverend P. A. de Rhodes, a la Chine et autres royaumes d'Orient, avec son retour de Chine a Rome, depuis I'annee 1618 jusqu'a I'annee 1633. Paris, Lambert, in-8. 1653. Divers voyaj:;es et missions du P. A. de Rhodes, en la Chine et autres royaumes d'Orient, avec son retour en Europe par la Perse et I'Armenie , le tout divise en trois parties. Paris, Cra- moisy, in-4. 1654. Martini. Historic delle guerre seguite in queste ultimi anni fra Tar- tari e Cinesi. Milano, in-8. 1654. Briefve relation de la conver- sion notable des personnes royales etde I'estat de la religion chrestienne en la Chine, faicte par le P. Michel Boym de la compagnie de Jesus et rccitee par lui-meme dans I'eglise de Smyrne, en 1652. Paris, petit in-8. 1654. Martini. Brevis relatio de nu- mero et qualitate christianorum apud Sinas. Romae, in-4. 1654. Martinius. De Bello Tartarico in Sinis. Colonix, 1654. 1655. Artificia hominum miranda in Sina et Europa. Francofurti ad Moe- rmm, W. Serlinus, in 8. 1656. M. Boym. Flora sinensis. Fiennas Austrix, in-fol. 1656. M. Martini. Atlas sinensis, hoc est Descriptio imperii Sinensis una cum tabulis geographicis. Amstelodami, in- fol. 1660. Spizelius. Commentarius de re litteraria Sinensium. Lugduni Bala- varum. 1661. Regni Sinensis a Tartaris de- vastati narratio, autore M. Martini. Amstelodami,\s\ktmtT, in-12. 1662. Michel Baudier. Histoire de CHINE MODERN E. du roi de la Chine. Paris, praefeeto. S. I. 661 la cour in-12. 1662. Sapientia sinica , exponente Johanne Acosta. Kiunchan, in nrbe Sinarum provincix Kiam-si, in-fol. 1662. Ignace da Costa. Le Tai-hio, en chinois, public par le P. Prosper Intorcetta. Kiang-tchang-fou. 1664. Nieiihof. Ambassade de la compagnie hollandaisedes Indes orien- tales au Grand Khan de Tartarie, em- pereur de la Chine, avec la description du pays, traduite en fran^ais par J. Lecarpentier. La Haye, in-fol. 1665. Historica narratio de initio et progressu missionis societatis Jesu apud Chinenses, ex litteris J. A. Scball collecta. Fiennx Austrix^ Cosraero- vius, in-8. 1666. Nieuhoff. Ambassade des Hol- landais en Chine. Paris, in-fol. 1666. H. Ursini. Saerorum miscel- laneorum et philologicorum libri VI, accedit diatribe de Seribus sen Sinen- sibus. Norimbe7'gge .inS. 1667. Bartoli. Historia della comp. deGesu deli' Asia, della China et del Giappone. Roma, in-fol. 1667. Histoireuniversellede la Chine, par Aivaro Semmedo, avec I'histoire des Tartares, par M. Martini. Lyon, Prost, in-4. 1667. Beskrifnning paa trenne resor gienom Asia, Africa , Japan , China. (Description de quelques voyages en- trepris en Asie, en Airique, au Japon, en Chine.) Fiisingsborg. 1667. Rircheri China illustrata. Amsterdam, in-fol. 1667. Intorcetta. Sinarum scientia politico-moraiis. Goa , in-fol. — La premiere partie imprimee a Goa et la seconde a Canton, en 1667, selon Mon- gitore, et en 1669, selon Sotwel etLeon Pinelo. Leon Pinelo cite une reimpres- sion de cet ouvrage egalement en latin et en chinois. (Note de M. Abel Re- musat.) 1668. Kircher. Toneel van China. (Kircher. Tableau de la Chine.) Ams- terdam, in-fol. 1668. Liber organicus astronomise europeae apud Sinas restitutse sub im- peratore Sino-Tartarico Cam-hi apel- fato, autore P. Ferdinand Verbiest, academiae astronomicae in Pekinensi . in-fol. — Imprime It Pe-king, sur papier de sole. 1669. Webb. Historical essay on the probability that the language of the empire of China is the primitive lan- guage. London, in-8. 1670. Historia de la conquista de la China por el Tartaro, por J. de Pala- fox yMendoza. Paris, petit in-8. 1670. L'Estat present de la Chine et des autres royaumes voisins. Paris. in-12. 1670. Faits remarquables de la com- pagnie hollandaise des Indes orienta- les, sur les cotes et dans I'empire de la Chine, contenant la deuxieme am- bassade dans ce pays, par J. V. Cam- pen et C. Nobel; etia troisierae, sous les ordres du P. Van Hoorn, decrite par Dapper. Amsterdam, Van Meurs, in-fol., fig. 167D. Description de I'empire de la Chine par Dapper. Amsterdam, Van Meurs, in-fol., fig. 1670. La Chine d'Athanase Kirchere, de la compagnie de Jesus, iiliistr^e de plusieurs monuments tant sacres que profanes, et de quanlite de recherches de la nature et de I'art, a quoi on a ad- jouste de nouveau les questions curieu- ses que le serenissime grand-due de Toscane a faites depuis pen au P. Jean Grubere touchant ce grand empire, avec un dietionnaire chinois et iran- cais lequel est tres-rare, et qui n'a pas encores paru au jour, traduit par F. S. Datquie. Amsterdam, in-fol., fig. 1670. Embassies from the dutch East India company to China and Ja- pan, by J. Ogilby. London, 1670. C. W. Hagdorn. Aequian oder der Grosse Mogol, das ist Cninesische und Indische Staats, Kriegs und Le- bensgeschichte. (C. W. Hagdorn. jE- quian on le Grand Mogol, c'est-a-dire, histoire politique, militaire et biogra- phique de I'lnde et de la Chine.) Ams- terdam, in-8. 1671. Francisco Gracia. Relacion de la persecucion de los predicadores de Christo en la China. Sevilla, J. de Os- suna, in-4. I67I. Intorcetta. Compendiosa nar- ratione del stato della missione Cinese. Roma, Cizzoni, in-8. «02 L'UNIVERS. 1671. Le Secret de la medecine des Cliiiiois. (.renoble, in-12. 167t. Mnrci Pauli , Venet., de Re- gioiiibusorieiitaiihus libri III ; Haithoni historia orientalis, et Rliilleri, de Cathaia, dissertalio. Colonise Fran- deburgicse^ in-4. 1671. Antonii de Gouvea. Innocen- tia victrix sive sententia comitiorum Sinici imperii pro innocentia diristianae religionis, sinico-latine exposita. In Qttam-cheu metropoli provinciac Quam- turn in regno Sinariim. In-fol. 1672. Sebastiamde Magalliaens. Re- lac^ain do estado politico e espirituai da China, tirada do latin do P. Rogemont. Lisboa, in-4. 1672. Suite de i'Histoire de la Chine impriinee en 1671. P«m, He- naut, in-8. 1672. A. Schall. Historica relatio de ortu et progressu fidei in regno Sinensi. Hatisbonx, Hankwich, in-8. I»i73. F. de Rougemont. Historia tartaro-sinica ab anno 1660. Lovanii, Haliegaerde, in-8. 1674. Andreas MuUeri Observationes sinicae. Colonise Brandenburgicx , in-4. 1676. T'verwaerloosde Formosa of waerachtig verhael hoedanigh door verwaerioosinge der INederlanders in Oost-Indien, het eylandt Formosa, van den Chinesen mandorin ende zeerovers Coxinja overrompelt is geworden. (Formose negligee, on Description ve- ritable comment, par la negligence des Hollandais dans les Indes orientates, ils ont perdu Tile de Formose, conquise par le mandarin et pirate chinois Co- xinja.) Amsterdam^ in-4. 1676. Fernandez Navarrete. Trata- dos historicos, politicos y religiosos de la monarchia de Cfiiiia. Madrid, in-fol. 1676. Von der Sebyffahrt by dem Nordpole nach Japan, China, etc. (De la navigation par le pole nord vers le Japon, la Chine, etc.) Hamburg, in-4. 1680. Boym. Clavis medica ad Chi- narum doctrinam de pulsibus. Franc- fort^ in-4. 1682. Ferdinand Verbiest. Lettre ecrite de Pe-king i\ tons les jpsiiites de I'Europe le 1.5 aoilt 1678. ParlH G. Martin, Jn-12. 1682. Le m^me. Lettre ecrite de la Chine, oil Ton voit I'etat present du cbristianisme dans cet empire et lebien qu'on y peut faire pour le salut des ames. Paris, in-4. (682. Grammaire chinoise et espa- gnole. Fo-kien. — Cette grammaire, qui se trouve a la Bibliotheque royale, parait avoir 6t(^ composee par unVeli- gieux de I'ordre de S. Francois. (Note de M. Abel Remusat.) 1683. Relation d'un voyage de I'em- pereur de la Chine dans la" Tartaric, par ie P. Verbiest. Paris, in-12. 1684. Lettre ecrite parle P. F. Ver- biest, de la cour de Pekin, sur un voyage que Tempereur de la Chine a fait Tan 1623 dans la Tartaric orien- tale. Paris, Bouiilerot, in-4. 1686. Catalogus Patrum S. J. qui post obituin sancti Francisci Xavieri, abanno 1581 usque ad 1681, in impe- rio Sinarum Jesu-Christi fidem propa- garunt, ubi singuloruni nomina, pa- tria, ingressus et libri sinice editi re- censentur. In-4. 1687. Nouveaux Memoires sur I'etat present de la Chine, par le P. le Comte. Amsterdam, 2 vol. in-12. 1687. Defense des nouveaux chres- tiens et des missionnaires de la Chine, du Japon et des Indes, centre la mo- rale pratique des jesuites et I'esprit de iM. Arnaud, par le P. Letellier. Paris, Michallet, in-l"2. 1687. Lettre d'un theologien (M. Ar- naud) centre la defense des nouveaux Chretiens. In-12. 1687. Confucius Sinarum philoso- phus, sive scientia Sinannn latine ex- posita studio et opera P. Intorcettn, C. Herdtrich , F. Rougemont et P. Cou- plet. Adjecta est tabula chronologica Sinensis monarchiae. Parisiis, in-fol. 1688. Nouvelle Description de la Chine, contenant la description despar- licularites les plus considerables de ce grand empire, composee en I'annee 1668, parG. de Magaillans. Paris, in-8, 1688. E. Francisci ost und W^est- Indischer sowie nuchsinesischer Lnst- garten. (K. Francisci. Jardin des Indrs orientalps et occidentales et aussi de !a Chine.) Niirnberg, 3 vol. in-fol. 1689. Das machtige Kayserreich CHINE MODERINE. ses China und die Asiatische Tartarey vor Augen gestellt. ( Le puissant empire de la Chine et la Tartaric asiatique presentes aux yeux.) Augsburg, in- fol. 1689. Abdallah. Historia Sinensis, persice et latine ab A. Mullero. Jena, in-4. 1692. Histoire des differends entre les missionnaires jesuites, d'une part, et ceux de I'ordre de Saint-Dominique et de Saint-Francois de I'autre, touchant le culte que les 'Chinois rendent a leur niattre Confucius eta I'idoleChin-hoang. S. I., in-8. 1696. Mentzelii. Zeitregister aller Chenesischen Kayser. Berlin, in-4. 1697. Notizie varie del impetio della Cina con la vita di Confucio. Fi- renze, in- 12. 1697. E. Roland. De magno Sinarum imperio dissertatio. Holmiae, in-8. 1698, Portrait historique de I'ertipe- reur de la Chine, par le P. Bouvet. Pa- ris , Pepie, in-12. 1698. Adam Brand. A Journal of the embassy from their majestvs, John and Peter Alexiewitz over landi into China. London, in-8. 1699. Relation du voyage de M. Evert Ishrand, envoye de S. M. Cza- rienne a Tempereur de la Chine. Ams- terdam, in-8, fig. 1699 J. Bouvet. The life of Cang-hy, the present emperor of China. London, in-8. 1699. INovissima sinica historiam nostri temporis illustrantia , edente Leibnitzio. In-8. 1700. G. Ghirardini. Relation du voyage fait a la Chine en 1698, sur le vaisseau I'Amphitrite. Paris, in-12. 1700. Contormite des ceremonies chinoises avec Tidol^trie grecque et ro- maine. Cologne, Corneille, in-12. 1700. Relation de ce qui s'est pass6 a la Chine en 1697, 1698 et 1699, a I'occasiond'unetablissementqueM.l'ab- be de Lioune a fait a Nien-tcheou , ville de la province de Tche-kiang. Liege, in-8. 1700. Bracati. De Sinensium ritibus Parisiis, in-12. 1700. Historia cultus Sinensium. Colonia, in-12. 1700. Lefavre. De Sinensium ritibus politicis, sive de avita Sinarum pietate. Lugdmii et Parisiis, 5 vol. in-8. 1703. Arte de la lengua mandarina, conipuesto por el M. R. P. Francisco Varo, de la sagrada orden de N. P. S. Domingo , acrecentado y rcdticido a mejor forma, P. N. H. Fr. Pedro de la Piiiuela, por y commissario prov. de la mission serafica de China. Aiiadio se un confesionario muy util y provechoso para alivio de los nuevos ministros. Canton. — Le P. Horace de Castorano nous apprend que le P. Placide a Valsio est celui qui a grave ce livre espagnol en planches de hois. Parva elucubra- tio, ras. de la Prop. 1739, p. 13. (Note de M. Abel Remusat.) 1710. P. F. Noel. Observationes ma- thematicae et physicae in India et China factae, ab anno 1684 usque ad annum 1708. Prague, in-4. 1711. Le m6me. Sinensis imperii li- bri classici sex , nimirum adultorum schola, immutabile medium. Liber sen- tentiarum , Mencius , filialis observan- tia, parvulorum schola , e sinico idio- mate in latinum traducti. Pragse, petit in-4. 1711. Le rafime. Philosophia sinica. Pragx, in-4. 1718. E. Renaudot. Anciennes rela- tions des Indes et de la Chine, de deux voyageurs mahometans qui y allerent dans le IX« siecle de notre ere. ln-8. 1724. Voyages de Francois Bernier, contenant la description *des Etats du Grand Mogol. Amsterdam , 2 vol. in-12. 1729. P. J. F. Fouquet. Tabula chro- nolo^ica historiae sinicae. Rome. 1730. Theoph. Sigef. Bayeri Mu- seum siniciim, in quo sinicae linguae rt litteraturae ratio explicatur. PetropoL, 2 vol. in-8. 1737. Description g6ographique, his- torique, chronologique , politique et physique de I'empire de la Chine et de la Tartaric chinoise, enrichie des cartes g^nerales et particulieres de ces pays, de la carte generale et des cartes particulieres du Thibet et de la Co- res ;etornee d'un grand nombre de figures et de vignettes gravees en taille- douce; par le P. J. B. du Halde, de la compagnie de Jesus; avec un avertissement preliminaire,ou Ton 664 L'UNIVERS. rend compte des principales ameliora- tions qui out 6te faites dans cette nou- velle Edition. La Haye, 4 vol. in-4. 1737. Nouvel Atlas de la Chine, de la Tartarie chi noise et du Thibet , |)ar M. d'Anville. Grand in«-fol. (42 car- tes.) 1737. Steph. Fourmont. Meditationes sinicae, in quibus 1° consideratur lin- guae phiiosophicae atque universalis natura qualis esse, aut debeat, aut pos- sit; 2° lingua Sinarum mandarinica, turn in hieroglyphis, turn in monosyl- labis suis, ea mente inventa ac talis esse ostenditur; 3° datur eorumdem hieroglyphorum et monosyllaborum atque inde characterum linguae sinicae omnium, quamvis innumerabilium , et lectio et intellectio, sen ars legendi et intelligendi tota, qualis Pekinii abipsis doctoribus sinis traditur; 4° idque omneprogressu a libris mere europaeis, de Sina tamen, ad libros mere sinicos facto. Lutetix Parisiorum, in-foh 1739. Histoire de Gentchiscan et de toute la dynastie des Mongous ses suc- cesseurs, conquerans de la Chine, tir^e de I'histoire chinoise et traduite par le R. P. Gaubil, de la compagnie de .T^- sus, missionnaire a Pe-king. Paris, in-4. 1742. Steph. Fourmont. Linguae Si- narum mandarinicae hierogiypbicae grammatica duplex , latine et cum chavacteribus Sinensium. Lutetix Pa- risiorum, in-fol. 1765. Delisle et Pingr^. Descrip- tion de la ville de Pe-king. Paris, in-4. 1 766. Hao - kiou - choaan. Histoire chinoise, traduite de I'anglais par *** (Eidous). Ltjon, 4 vol. in-I2. 1770. Le Chou-king,un des livres sacres des Chinois, qui renferme les fondements de leur ancienne histoire, les principes de leur gouvernement et de leur morale ; ouvrage recueilli par Confucius , traduit et enrichi de notes par feu le P. Gaubil, missionnaire a la Chine, revu et corrige sur le texte chi- nois, accompagne de nouvelles notes, de planches gravees en taille-douce et d'additions tiroes des historiens origi- naux, par M. de Guignes. Paris, grand in-4. 1771. A voyage to China and the east Indies, by Peter Osbeck, together with a voyage to Suratte, by Olof Tor- ren and an account of the Chinese Hus- bandry, by capt. Ch. Gusto v. Ecke- berg ; translated from the german by John Reinhold Forster : to which are added a faunula and Flora sinensis. lM7idon, 2 vol. in-8. 1772. Kitaiskiia mysli (Pens^es chi- noises), traduites du mandchou en russe, par Alexis Leontief. Saint-Pe- tersbourg. in-8. 1773. £tat actuel de I'art et de la science militaire a la Chine, tire des li- vres militaires des Chinois , par de S. Maurice, de Saint-Leu et de Puy- segur. Paris, in-12. 1778. Krattchaichee opisanie goro- dam' dokhodam'i protchemou kitais- kago gosoudarslva Description tres-succincte des villes, des revenus et des autres particularites de I'empire de la Chine, et en outre de tons les em- pires, royaumes et principantes connus des Chinois, extraite de la Geographie imp^riale chinoise, imprimee a Pe- king en iangue chinoise, par ordre du khan actuel Khien-long (trad, en russe par Leontief). Saint - Pefersbourg , in-8. 1778. Kilaiiskia pooutcheniia ( Ins- tructions chinoises donnees par le khan Young-tching pour les militaires et Ic bas peuple , la deuxieme annee de son regne, 1724), traduit du chinois en russp. Saint-Pet ersbourg , iu-8. 1780. Sy-chou-ghei, to iest'tchetyre Knighi.(Les quatre livres avecles com- mentaires.) Premier livre du philosophe Confucius, traduit du chinois et du mandchou en russe par Alex. Leontief. Saint-Petersbourg , in-8. 1782. Voyage aux Indes orientales et a la Chine , depuis 1774 jusqu'en 1781, dans lequel on traite des moeurs, de la religion, des sciences et des arts des Indiens, des Chinois, desPegouiiis, des Madegasses, etc., par Sonnerat. Paris, 2 vol. in-4. 1783. Histoire gen^ralede la Chine, ou annales de cet empire, traduites du Tong-kien-kang-mou, par le feu P. Jo- seph-Anne-lMarie de Moyriac de Mailla, jesuite francais, missionnaire a Pe- kin; publiees par M. I'abbe Grosier et dirigees par M. le Roux des Hautes- CHINE MODERNE. 6G£ rayes, avec des figures et de nouvelles cartes geographiques de la Chine an- cienne et moderne, levees par ordre du feu empereur Kang-hi, et gravees pour la premiere fois. Paris, 12 vol. in-4. 1788. Rlanjourskago i Kitai'skago Khana Kan'-siia Rniga (Le livre du Khan mandchou et chinois Khang- hi ; preceptes de politique et regies de morale, recueillis par son fils le khan Young-tching, traduit du mandchou en russe par Alexis Agafonof. 1790. Joa. de Loureiro. Flora co- chinchinensis, sistens plantas in regno Cochinchina nascentes, quibus accedunt aliac observatae in Sinensi imperio , Africa orientali, Indiseque locis variis, omnes dispositae secundum systema sexuale linnaeanum. Ulyssipone^ 2 vol. in-4. 1797. An authentic account of an embassy from the king of Great-Bri- tain to the emperor of China, together with a relation of the voyage to the Yellow sea and gulf of Pekin, as well as of their return to Europa , taken chiefly from the papers of the earl of Macartney, by G. Staunton. London, 2 vol. in-4. 1797. Voyage de I'ambassade de la compagnie des Indes orientales hollan- daises, vers I'empereur de la Chine, dans les annees 1794 et 1795, ou se trouve la description de plusieurs par- ties de la Chine inconnues aux Euro- peens, et que cette ambassade a donne occasion de traverser, tire du journal d'Andre Everart van Braam Houck- geest, et publie en francais, par L. E. Moreau de Saint-Mery. ^ Philadelphie, 2 vol. in-4. 1801. Jos. Hager. An explanation of the elementary characters of the Chi- nese ; with an analysis of thier ancients symbols and hyeroglyphics. London, petit in-fol. 1802. De Murr. Litterae patentes imperatoris Sinarum Kang-hi,sinice et latine. Norimbergae, in-4. 1802. Monument de Yu, ou la plus ancienne inscription de la Chine ; sui- vie de trente-deux formes d'anciens caracteres chinois, avec quelques re- marques , par Jos. Hager. Paris, in-fol. 1804. Travels in China , containing descriptions , observations and compa- risons made and collected in the course of a short residence at the imperial palace of Yuen-ming-yuen, and on a subsequent journey through the coun- try from Pekin to Canton , by John Barrow. London, in-4. 1805. Description des medailles chi- noises du cabinet imperial de France, precedee d'un essai de numismatique chinoise, avec des eclaircissements sur le commerce des Grecs avec la Chine, et sur les vases precieux qu'on y trouve encore, par J. Hager. Paris, gr. in-4. 1806. Pantheon chinois, ouParallele entre le culte religieux des Grecs et ce- lui des Ciiinois, avecde nouvelles preu- ves que la Chine a ete conuue des Grecs et que les S^res des auteurs classiques out ete des Chinois, par J. Hager. Pa- r-is, Didot aine, grand in-4. 1806. Versurch einer geschichte der Juden in Sina (Essai d'une his- toire des Juifs en Chine, avec une des- cription de Icurs livres saints dans la synagogue de Khai-fong-fou, par le P. Ign. Koegler, et uu append ice sur Tori- gine du Pentateuque), publie parC. G. de Murr. Halle, in-8. 1809. Marshman.The works of Con- fucius, with a translation, vol. I, to which is prefixed a dissertation on the Chinese language and characters. St- rampore. Printed at the mission press. 1809. Die russische Gesandlschaft nach China.. . . (L'Ambassade russe eu Chine en 1805, avec une relation de la derniere persecution contre les Chre- tiens a Peking.) Saint- Petersbourg et Leipsig, in- 12. 1810. Ta-tsing-leu-lee; being the fundamental laws and a selection from the supplementary statutes of the pe- nal coae of China, translated from the Chinese and accompanied with an ap- pendix consisting of authentic docu- ments and a few occasional notes, by sir G. Th. Staunton. London, grand in-4. 1811. Abel Remusat. Essai sur la langue et la litterature chinoises, avec cinq planches, contenant des textes chi- nois^ accompagn^s de traductions, de remarques et d'un commentaire litt^- raire et grammatical , suivi de notes. Par-is, Treuttel et Wurtz, in-8. L'UNIVERS. 1811. Insohrift des Yii (Inscrip- tion de Tu, irad. et expliquee par IVI. Jules Kalprotit, nerlin, in-4. 1812. Ta-tsiiig-leii-lee,ou les lois fon- danientales du code penal de la Chine, avec \e clioix des statuts siipplementai- res, Iraduit du chiuois par G. Tli. Staunton, mis en francais avec des no- tes, par iVI. Felix Renouard de Sainte- Croix. Paris, 2 vol. in-8, 1812. Uorae sinicae; translations from the popular litterature of the Chi- nese, by the rev. Robert Morrison. Lon- don, in-8. 1813. Lepage. Recherches sur Iam6- decine des Chinois, avec cette epigra- phe: Educens nubes ab extremo terrac. Paris, in-4. 1813. Dictioniiaire chinois-francais et latin (du P. Rasile de Glemona), pu- plie d'apres I'ordre de sa majeste Pein- Sereur et roi Napoleon le Grand, par I. de Guignes. Paris, grand in-fol. 1813. W. Milburn. Oriental com- raerce containing a geographical des- cription of the principal places of the east Indies, China and Japan, with their produce, manufactures and trade, including the coasting or country trade from port to port. London, 2 vol. grand iri-4. 1813. Abel Remusat. Dissertatio de glussosemeiotice , sive de signis mor- borum quae e lingua sumunturpraeser- tim apud Sinenses. Paris , Didot, in-4. 1814. Journal of a voyage in 1811 and 1812 to Madras and China; retur- ningbytliecape of Good-Hope and Saint- Helena. ... by James Wathen ; illus- trated with twenty four coloured prints from drawings by the author. Lon- don, in-4. 1815. R. Morrison. A grammar of the Chinese language. Serampore, in-4. 1815. San-yu-low, or the three dedi- cated rooms, a tale, translated from the Chinese, by J. F. Davis. Canton. 1815 a 1823. A Dictionary of the Chinese language in three parts. Part the first containing Chinese and english, arranj^ed according to the radicals; part the second Chinese and english ar- ranged alphabetically, and part the third english and Chinese; by R. Mor- rison. Macao, 6 t. in-4. 1816. R. Morrison. Dialogues and detached sentences in the Chinese lan- guaae. Macao, grand in-8. 181(5. Abel Remusat. Le Livre des recompenses et des peines, traduit du chinois, avec des notes et des eclaireis- sements. Paris, in-8. 1817. L'invariable milieu, ouvrage moral de Tseu-sse, en chinois et en mandchou, avec une version litterale latiiie, une traduction fraucaise et des notes, precede d'une notice sur les quatre livres moraux commuiiement at- tribues a Confucius, par Abel Remu- sat. Paris, in-4. 1817. R. Morrison. Parallel drawn between the two intended Chinese dic- tionaries. London, in-4. 1817. The sacred edict containing sixteen maxims of the emperor Kang- he, ampliQed by his son, the emperor Yoong-chiiig, together witli a para- phrase on the whole, translated from the Chinese original, by the R. "Wil- liam Milne. London, grand in-8. 1817. Laou-seng-urh, or « an Heir m his old age, » a Chinese drama. London, 1817, in-12. 1817. Journal of the proceedings of the late embassy to China, comprising a correct narrative of the public tran- sactions of the embassy, of the voyage to and from China, and of the journey from the niouth ol the Pei-ho to the return to Canton, by H. Ellis. London, in-4. 1817. R. Morrison. A view of China, for philological purposes, containing a Sketch of Chinese chronology, geogra- phy, government, religion and cus- toms; designed for the use of persons, who study the Chinese language. Ma- cao, in-4. 1818. De la Chine ou descripLon« generale de cet empire, redigee d'apres les niemoires de la mission de Pekin, ouvrage qui contient la description to- pographique des quinze provinces de la Chine, celle de la Tartaric, des lies et des divers Etats tributaires qui en dependent; le nombre de ses villes, le tableau de sa population , les trois re- gnes de son histoire naturelle, rassem- bles et donnes pour la premiere fois avec quelque etendue, et I'expose de toutes les connaissances acquises et parvenues jusqu'ici en Europe sur le CHmE MODERNE. 6G7 gouvernement, la religion, les lois, les mceurs, les usages, les sciences et les arts desCliinois; troisienie edition, re- vue et considerablement augmentee, par M. I'abbe Grosier. Paris, 7 vol. in-8. 1818. Narrative of a journey in the interior of China, and voyage to and from that country, in 1816 and 1817, containing an account of the most in- teresting transactions of lord Am- herst's embassy to the court of Pekin, by Gl. London, in-4. 1819. Lao-seng-eui , comedie chi- noise; suivie de San-iu-leououles trois etages consacres, conte moral; tra- duits du chinois en anglais par J. F. Davis, et de I'anglais en francais par A. Bruguiere de Sorsum. Paris, in«8. 1819. Supplement au Dictionnaire chinois-latin du P. Basile de Glemona (imprime en 1813, par les soins de M. de Guignes), public par J. Klaproth. Paris, iu-fol. 1820. William-Milne. Retrospect of the first ten years of the protestant mission to China Accompanied with miscellaneous remarks on the li- terature , history and mythology of China. Malacca, in-8. 1820. Abel Remusat. Histoire de la ville de Khotan, tiree des annales dela Chine et traduite du chinois; suivie de recherches sur la substance minerale appelee par les Chinois pierre de Yu et sur le jaspe des anciens. Paris, in-8. 1820. Abel Remusat. Recherches sur les langues tartares, ou Memoires sur differents points de la grammaire et de la litterature des Mandehous, des Mongols, des Ouigours et des Tibe- tains. Paris, tome V" et unique, in-4. 1820. The affectionate pair, or the history of Sung-kin; a Chinese tale, translated by P. P. Thorns. London. 1821. Narrative of the Chinese em- bassy to the Khan of the Tourgouth Tartars, In the years 1772, 73,74 et 73; by the Chinese ambassador, and published at Pekin ; translated from the Chinese and accompanied by an. appendix of miscellaneous transla- tions, by sir G. Th. Staunton. London, in-8. 1822. Sir G. Th. Staunton. Miscel- laneous notices relating to China and our commercial intercourse with the country, including a few translntions from the Chinese language. London, in-8. 1822. Chinese novels translated from the originals, to which are added pro- verbs and moral maxims, etc., by J. F. Davis. 1822. Historique de I'instruction du Chinois qui a ete presente au roi, le 8 octobre 1821, par madame Celliez. Blois, in-4. 1822. ifel^mentsde la grammaire chi- noise, ou principes generaux du Kou- wen, ou style antique, et du Kouan- hoa, c'est-a-direde lalangue commune generalement usitee dans I'empire chi- nois, par M. Abel Remusat. Paris, grand in-8. 1823. J. F. Davis. Hien-wun-shoo, Chinese moral maxims, with a free and literal translation, affording examples of the grammatical structure of the language. Macao, in-8. 1823. J. Klaproth. Asia polyglotta. Paris, A. Schubart. 1823. History of a voyage in the China sea, by John White. Boston, in-8. 1824. J. Marshman. Clavis sinica, or elements of Chinese grammar, with a preliminary dissertation on the charac- ters and the colloquial medium of the Chinese, ami an appendix containing the Ta-hyoh of Confucius , with a translation. Serampore, in-4. 1824. Meng-tseu vel Mencium inter sinenses philosophos ingenio, doctrina, nominisque claritate Confucio proxi- muni, edidit, latina interpretatione, ad interpretationem tartaricam utramque recensita et perpetuo commentario e sinicis deprompto illustravit Stanislaus Julien. Lutetise Parisioriim , grand in-8. 1824. J. Klaproth. Memoires rela- tifs a I'Asie, contenant des recherches historiques, g^ographiques et philolo- giques sur les peuples de I'Orient. Pa- lis, in-8. 1824. G. Staunton. Notes on procee- dings and occurrences during the hri- tish embassy to Pekin, in 1816. In-8. 1824. Chinese courtship in verse, to w hich is added an appendix , treating L'UNIVERS. of the revenue of China, etc. By Peter Perring Thorns. London, grand in-8. 1824. Poutechestvie v'kitai tchrez' Mongoliiou (Voyage en Chine a trovers la Mongolie, en 1820 at 1821, par Timkovsky, avcc une carte, des plans et des dessins.) Saint-Peters- bourg, grand in-8. 1825. Traile de racupuncture ou zin-king des Chinois et des Japonais, par J. M. Churchill; tradu it de I'an- glais par M. R. Charbonnier. Paris, in-8. 1825. Sarlandiere. Memoires sur I'e- lectro-puncture. In-8. 1825. Abel Remusat. Melanges asia- tiques ou choix de morceaux de critique el de memoires relatifs aux religions, aux sciences, aux coutumes, a I'his- toire et a la geographic des nations orientales. Paris, 2 vol. in-8. 1825. Th. Myers, An essay on the nature and structure of the Chinese lan- guage with suggestion on its more ex- tensive study. London, in-8. 1825. Chinese miscellany; consis- ting of original extracts from Chinese authors^ in the native character; with translations and philological remarks, by Rob. Morrison. London, in-4. 1826. Werke des tchinesischen wei- sen Kung-fu-dsu (C8iuvres du philosophe chinois Confucius et de ses disciples, traduites jjour la premiere fols en allemand, d'apres les originaux et enrichies deremarques, parW. Schott.) Halle, petit in-8. 1826. The english and Chinese stu- dent's assistant, or colloquial phrases, letters, etc, in english and Chinese; the Chinese, by Shaou-tih, a native Chinese student, in the anglo-chinese college. ^a/acca. in-8. 1826. lu-kiao-li ou les Deux eousi- nes, roman chinois, traduit par Abel Remusat, precede d'une preiace oii se trouve un parallele des romans de la Chine et de ceux de I'Europe. Paris, 4 vol. in-12. 1827. Lettre a M. Abel Remusat sur la nature des formes grammaticales en general, et sur le genie de la langue chinoise en particulier, par M. G. de Humboldt. Paris. 1827. Voyage a Peking a travers la Mongolie, en 1820 et 1821, par M. G. Timkovski, traduit du russe. Paris, 2 vol. in-8. 1827. Tableau des Elements vocaux de I'ecriture chinoise, divise en deux parties, par Levasseur et Kurtz. Paris, lithog., in-8. 1827. Contes chinois, traduits par MM. Davis, Thoms, le P. d'Entrecol- les, etc., et publics par M. Abel Remu- sat. 3 vol. in-12. 1828. R. Morrison. Vocabulary of the Canton dialect. Macao, in-8. 1828. The Chinese classical works, commonly called the four books, trans- lated and illustrated with notes by the late rev. Davis Collie. Malacca, grand in-8. 1829. J. A. Goncalves. Arte China, constante de alphabeto e grammatica comprehendendo modelos das differen- tes composicoens. Macao, petit in-4. 1829. The fortunate union, a ro- mance, translated from the Chinese original with notes and illustrations; to which is added a Chinese tragedy, by John Fr.ancis Davis. London, in-8. 1829. San-tsi-tsin, ili trocslovie. . . . (San-tseu-king, avec le texte chinois lithog.), traduit du chinois en russe, par le P. Hyacinthe. Saint-Peters- bourg, in-4. 1829. Le P. Hyacinthe. Description de Pekin avec un plan de cette capi- tale, traduit du russe par M. Ferry de Pigny. Saint- Peter sbourg, in-8. 1829. Han koong tsew or the sor- rows of han ; a Chinese tragedy ; trans- lated from the original with notes, by J. F. Davis. London, in-4. 1830. Vindiciae philologicae in lin- guam sinicam. Dissertatio prima de quibusdam litteris sinicis quae nonnun- quam, genuina significatione deposita, accusandi casum mere denotant. Con- scripsit et exemplissiniceimpressisins- truxit et illustravit Stan. Julien. Pari- siis, in-8. 1830. Confucii Chi-king, sive Liber carminum. Ex latina P. Lacharnu in- terpretatione edidit Julius MoM.Stutt- gartise et Tubingx, in-8. 1831. Notitia linguae sinicae, au- ctore P. Premare. Malaccas, in-4. 1831. G. Pauthier. Memoire sur I'o- rigine et la propagation de la doctrine du Tao ou dela Raison supreme, fond^, CHINE MODERNE. 669 en Chine, par Lao-tseu, etc., suivi de deux oupanichads des Vedas, avec le texte Sanscrit et la traduction persane. Paris, in-8. 1831. Medhurst. Dictionary of the hokkeen dialect. Macao, in-4. 1831-1833. Diccionario china-portu- guez, e portuguez-china ; por J. A. Goncalves. Macao. 2 vol. petit in-4. 1832. Hoei-lan-ki ou I'histoire du cercle de craie, dranie en prose et en vers^ traduit du chinois et accompagne de notes par Stanislas Julien. London, in-8. 1832. Le P. Hyaeinthe Bitchourin. Histoire du Tibet et du Kukunoor, en russe. Saint-Petersbourg, 3 vol. in-8. 1832. Neumann. History of the pi- rates. London, in-8. 1834. Y-king antiquissimus Sinaruni liber, quern ex latina interpretatione P. Regis aliorumque ex see. Jesu P. P. edidit Julius Mohl. Stuttgartix et Tu- bingae, v. I, cum quatuor tabulis, in-8. 1834. Blanche et Bleue, ou les Deux couleuvres fees ; roman chinois, traduit par Stanislas Julien, Paris, in-8. 1834. Report of proceedings on a voyage to the northern ports of China, in the ship lord Amherst (by M. Lind- say). London, in-8. 1834. Journal of three voyages along the coast of China, in 1831, 32 and 33, with notices of Siam, Corea and the Loochoo islands, by Ch. Gutzlaff, to which is prefixed an introductory essay on the policy, religion, etc., of China, by the rev. W. Ellis. London, in-8. 1834. China. An outline of its go- vernment, laws, and policy; and of the british and foreign embassies to and intercourse with that empire ; by Pe- ter Auber. London, in-8. 1835. Le Livre des recompenses et des peines, ei: chinois et en fran^ais; accompagne de quatre cents legendes, anecdotes et histoires, qui font con- naitre les doctrines , les croyances et les moeurs de la secte des Tao-sse, tra- duit du chinois par Stanislas Julien. Paris ( printed for the Oriental trans- lation Fund of Great Britain and Ire- land), in-8. 1836. Foe-koiie-ki, ou Relation des royaumes bouddhiques, traduit du chi- nois et commente par M. Abel Remu- sat, ouvrage posthume, revu, complete et augmente d'eclaircissements nou- veaux par MM.KlaprothetLandresse. Paris, in-4. 1836. P. Goncalves. Vocabularium latino-sinicum. Macao, in-8. 1836. An historical and descriptive account of China, etc., by Hug Mur- ray, John Crawfurd, Peter Gordon, capt.Th. Lyon, William Wallace and Gilbert Burnett, with a map and thirty six engravings by Jackson. Edinburgh, petit in-8, 3 vol. 1837. Le Ta-hio ou la Grande etude, le premier des quatre livres depbiloso- pliie morale et politique de la Chine ; ouvrage de Khoung-tseu et de son dis- ciple Thseng-tseu, en chinois, en la- tin et en francais , avec le commen- taire de Tchou-hi et des notes. Paris, Didot, grand in-8. 1837. Stanislas Julien. Resume des principaux traites chinois sur la cul- ture lies milriers et I'education des vers a soie. Paris, in-8. 1837. La Chine ou description gene- rale des moeurs et des coutumes, etc. ; par J. F. Davis, ouvrage traduitde I'an- glais par A. Vichard. Paris, 2 vol. in-8. 1838. Le Tao-te-king, ou le Livre re- vere de la raison supreme et de la vertu, par Lao-tseu ; traduit en fran- cais et publie pour la premiere fois en Europe, avec une version latine et le texte chinois en regard; accompagne du commentaire complet de Si-hoei, d'origine occidentale, et de notes ti- rees de divers comraentateurs chinois. Paris, premiere livraison, grand in-8. 1838. G. Pauthier. Chine ou descrip- tion historique, geographique et litte- raire de ce vaste empire, d'apres des documents chinois. Premiere partie. Paris, Didot, 1 volume in-8 a deux co- lonnes, avec soixante-douze planches. 1838. Tchao-chi-kou-eul ou I'Orphe- lin de la Chine^ drame en prose et en vers, accompagne de pieces historiques qui en ont fourni le sujet, de nouvelles et de poesies; traduit du chinois, par Stanislas Julien. Pai-is, in-8. 1838. Theatre chinois ou Choix de pieces de theStre composees sous les empereurs mongols , traduites pour la 670 L'UNIVERS. premiere fois siir le texte original, pre- cedecs d'line introduction et accompa- gnees de notes, par M. Bazin. Paris, U\'8. 1839. Y-kirig, antiquissimus Sina- ruui liber quern ex latina interpreta- tione P, Regis aliorumque ex soc, Jesu F. P. edidit Julius Monl. Stuttgartix et Tubingx, vol. 2 in-8. 1839, P. Gongalves. Lexicon manuale I; lino-sinicum. Macao, in-18. 1839. Th. Pavie. Clioix de contes et nouvelies, traduits duchinois. Paris, in-8. 1839. R. Thorn, Lasting resentment of miss Wang-kiaou-lvvan, a Chinese tale, founded on fact. Canton, in-8. 1S40, Les Livres sacres de I'Orient, traduits ou revus et publics par M. G, Pautbier. Paris, in-fol. 1840. Portfolio chinensis, by J. L. Sbuck. Macao, in-8. 1840. ^sop's fables, written in Chi- nese by the learned Mun-mooy, and compiled in their present from, with a free and literal translation, by his pu- pil Sloth (Rob, Thorn). Macao, in-fol. 1841. Documents statistiques et of- ficiels sur Tempire de la Chine, tra- duits du chinois, par G, Pauthier. Paris, Didot, in-8. 1841, Confucius et Mencius, ou les Quatre livres de phiiosopbie morale et politique de la Chine, traduits du chi- nois. Paris, 1 vol. in-12. 1841. Systema phoneticum scripturae sinicaj, auctore J. M. Gallery. Macao, in-8, 2 vol. 1841. Lexicon magnum latino-sini- cum, auctore Gongalves. Macao, in- fol. 1841. A Lexilogus of the english, nialay and Chinese languages, compre- hendmg the vernacular idioms of the last in the Hok-keen and Canton dia- lects. Malacca, in-8. 1841. Le Pi-paki ou I'Histoire du luth, drame chinois de Kao-tong-kia, represente a Peking en 1404, avec les changements de Mao-tseii, traduit sur le texte original par M. Bazin. Paris, in-8. 1841. A Chinese Chrestomathy in the Canton dialect, by E.G. Bridgraan. Macao, in-4. 1842. Lao-tseu-tao-te-king , leLivre de la voie et de la vertu, compose dans le VI" siecle avant I'ere cbretienne par le philosopbe Lao-tseu, traduit en fran- ^ais, et publie avec le texte chinois et un commentaire perpetuel, par Stanislas Julien. Paris, in-8. 1842. Dictionnaire des noms anciens et modernes des villes et arrondisse- ments de premier, deuxieme et troi- sieme ordre compris dans I'empire chinois, indiquant les latitudes et les longitudes detous les chefs-lieux de cet empire, et les epoques auxquellesleurs noms ont et6 changes, par Edouard Biot. Paris, in-8. 1842. Hao-khieou-tchouan, ou la Femme accomplie, roman chinois, tra- duit sur le texte original par M. Guil- lard d'Arcy. Paris, in 8. 1842, Sinico-^gyptiaca^ Essai sur I'origineetla formation similaire des ecritures Gguratives chinoise et egyp- tienne; 1, Histoire et synthese, par G. Pauthier. Paris, in-8. 1812. iNotices on Chinese grammar, pari. 1, orthography and etymology, by philo-sinensis (Gutzlaff). Batavia, iu-8. 1842. Chinese and english dictio- nary; containing all the words in the Chinese imperial dictionary, arranged according to the radicals, by W. H. Medhurst, missionary. Batavia, in-8, 2 vol. 1842. Easy lessons in Chinese, espe- cially adapted to the Canton dialect, by S. Wells Williams. Macao, in-8. 1842. Recueil de nionnaies de la Chine, du Japon, de la Coree, d'An- nam et de Java, precede d'une intro- duction historique, par le baron de Cbaudoir. Saint- Peter sbour g , in-fol. (avec 61 planches). 1843. The Rambles of the emperor Ching-tih in Keang-nan, translated by Kin-shen, student of the anglo-chinese college, Malacca, with a preface by J. Legge, d. d. president or the college. London, 2 vol. in-8. 1843. Rob. Thorn. Chinese-english vocabulary, first part. Canton, in-8. 1843. Melanges posthumes d'histoire et de litt^rature orientales, par M. Abel Remusat, publics sous les auspi- CHINE MODERNE. C7I ces du ministre de IMnstruction publi- que. Paris, in-8. 1844. L' Agriculture en Chine, ac- compagnee de 72 figures d'instiuments (en russe). Saint-Petersbourg, m-8. 1844. An englisli and Chinese voca- bulary, in the court dialect, by S. Wells Williams. Macao. Printed at the office of the Chinese repository, in-8. 1844. Vocabularium sinicum, con- cinnavit G. Schott. Berlin, in-4. 1845. Anfangsgriinde der chinesis- clien graminatik , von Endlicher, rietine, in-8. 1845. San-koue-tchy, Histoire des trois royaumes, roman historique, tra- duit sur les textes chinois et maiidchou dela Bibliotheque royale, par Theodore Pavie. Premier vol. Paris, 'm-8. 1845. Memoire sur les principes ge- neraux du chinois vulgaire, par M. Ba- zin. Paris, in-8. 1845. Essai sur I'histoire de I'ins- truction publique en Chine, depuis les anciens temps jusqu'a nos jours, ou- vrage entierement redige d'apres les documents chinois, parfedouard Biot, premiere partie. Paris, in-8. 1845. Anfangsgriinde der chinesis- chen grammatik, von Endlicher, deuxie- me partie. Fienne, in-8. 1845. Dictionnaire encyclopedique de la langue chinoise, par M. Callery, tome 1, premiere partie. Macao, in-4. 1846. Manuel pratique de la langue chinoise vulgaire, contenant un choix de dialogues familiers, de differents morceauxde litterature ; precedes d'une introduction grammaticale et suivls d'un vocabulaire de tons les mots ren- fermes dans le texte, par Louis Rochet. Paris, in-8. 1846. The Shoo-king, or the histori- cal classic, being the most ancient authentic record of the annals of the Chinese empire, illustrated by later commentators, translated by W. H. ]Med hurst. Shanghae, in-8. 1846. The Chinese speaker, or extracts from works written in the mandarin language as spoken in Peking, compi- led R. Thorn. Ning-po, in-8. 1846. A manual for youth and stu- dents, or Chinese vocabulary and dia- logues , containing an easy introduc- tion to the Chinese language Ning-po dialect; compiled and translated into english by P. Strenenassa Pilay. Chu- san. 1847. Essai sur I'histoire de I'ins- truction publique en Chine, par E. Biot. Paris, in-8. Deuxieme partie. 1847. Voyage en Chine, Cochinchine, Inde et Malaisie, par Auguste Hauss- mann. Pat-is, in-8. 1847. The beginners first book in the Chinese language (Canton vernacu- lar) prepared for the use of the house keeper, merchant, physician and mis- sionary. Hong-kong,m-8. 1848. An enquiry into the proper mode of rendering the word God in translating the sacred Scriptures into the Chinese language, by W. H. Med- hurst. Shanghae, in-8. 1848. Description methodique des produits divers recueillis dans un voyage en Chine, par Isidore Hedde. Saint- Etienne, in-8. 18,50. S. Wells Williams. An anglo- chinese calender for the year of Our- Lord 1850, corresponding to the year in the Chinese cycle ajra 4487, or the 47 th year of the 75 th cycle of sixty ; being the 30 th year of the reign of H. I. M. Taukwang. Canton, in-8. 1850. Recherches sur I'agriculture et I'horticulture des Chinois et sur les v^- getaux, les animaux et les procedes agricoles que Ton pourrait introduire avec avantage dans I'Europe occiden- tale et lenord de rAfrique,suiviesd'une analyse de la grande encyclopedie Cheou-chi-thong-kao , par le baron Leon d'Hervey Saint-Denys. Paris, in-8. 1851. An anglo-chinese calender for the year ofOur-Lord 1851, being the first year of the reign of H. I. ]\I. Hieng-fung (by. S. Wells Williams). Canton, in 8. 1851. Le Tcheou-li, ou Rites des Tcheou, traduit pour la premiere fois du chinois par feu Edouard Biot. Paris, 3 vol. in-8. 1851. Histoire de la vie de Hioucn- thsang et de ses voyages dans Tlnde, traduite du chinois { fragment lu a I'A- cademie des inscriptions, par M. Sta- nislas JuHen. Pam, in-8. 672 L'UNIVERS. 1851. San koue-tchy, Histoire des trois royaumes, romati historique, tra- duit par Theodore Pavie, tome 2. Paris, in-8. 1852. LeSiecledesYouln,ou Tableau historique de la litterature chinoise, depuis I'avenement des empereurs mongols jusqu'a la restauration des Ming, par M. Bazin. Paiis, \n-8 1852. China, during the war and since the peace , by sir John-Francis Davis. London, 2 vol. in-8. FIN. ittntitlr^ dtrgioi /v//f^ f.'/i- ,//A,ff/y.'' f '/'/'• r/ ,,i //,i^J.t?{,'^ /it ./^^//i- t/ ^feiy/^ \ li^ S r ^ w \ I- ^ 1 f t t r K CHINE ,_y^e-ai-i^ ■ TABLE DES MATIERES CONTENUES DANS LA SRCONDE PARTIE DE CE VOLUME. ARTS, LITTERATURE ET MtEURS. Ph«>». THEATRE. Origines du tli^tre chinois 391 Coup d'ceil siir I'liistoire de I'ait dramatique 393 Forme ext^iieure du drame ; systeme dramatique des Chinois sous les Youftn ; rtle du personnage qui chante 394 Langue du th^^tre ; diction des pieces 396 Description du tli(5dtre ; appareil sc6nique 397 Des acteurs et des actrices ^a5.398 Liste des principaux auteiirs dramatiques de la dynastie des You6n 399 Classification des pieces de tli^fttre . . .». 401 Drames historiques. La Botte niyst^rieuse 405 L'Orphelin de la famille de Tchao 410 Le Trompeur tromp^ ib. Sie-jin-kouei 411 La Chute des feiiilles du ou-thoung 414 Sou-thsin , trans! de froid ib. Le Petit Commandant ib. Ou-youan , jouant de la llftte 415 La Route de Ma-ling ; ib. La Pagode du ciel ■ ib. Drames Tao-sse. La Transmigration de Yo-cheou •. 419 Le Pavilion de Yo-yang 425 Le Mai d'amour ; ib- Le Songe de Lin-thong-pin 427 Fleur de p6cher 431 Histoire du caract^re jin .". ib._ I Comedies de caractkre. • L'Avare 434 Le Libertin 439 Le Fanatique * •*• Comedies d^ intrigue. La Housse du lit nuptial 440 Le Marl qui fail la cour a sa femme 442 , Les Secondes noces de Wei-kao 445 , Le Gage d'amour ** La Soubrette accomplie 4^<> Le Mariage forc6 ^?^ La Fleur de poirier '* J Drames domestiques . ' J-e Vieillard qui obtient un lils ^^' 43* Lirraison. (Chine moderne.) 43 674 TABLE DES MATIERES. Puf* Le Sacrifice de Fan et de Tchang 460 Le D^vouemeiit de Tcliao-li «*• Drames mythologiques. T'chiing , Tanachorfete '461 Les Metiimorphoses 462 La D^esse qui pense au monde ih. La GroUc des pfichers 463 Drames judiciaires. Le Cr^ancier ennemi 464 Le Plal qui parle ib. \ Le Magol 465 • Histoire de ia Pantoufle laiss^e en gage ib. LITTfiRATURE MODERNE. Mcrivains du premier ordre. Les Thsai-tseu 466 Notices biographiques et Iitt6raires sur les ancieiis Tlisai-lseu 467 OEuvres des Tlisai-tseu raodernes. — Origines el caractfei e de cetle litt^rature .... 474 ) Premier Thsai-tseu. ■» San-rooe-tchi , ouTrage du premier Tlisai-tseu. — Appreciation litt^raire 476 R^Yolte des Bonnets-Jaunes. (Fragment.) 477 / f Deuxihne Tlisai'tseu. . , Hao-kbieou-tchouen, ouvrage du deuxi^me Thsai-tseu. — Appr^iation litt^raire 482 Ceremonies du mariage ib. Analy.se dii Hao-khieou-tchouen 484 Troisidme Thsai-tseu. Yu-RiAo-Li , ouvrage du troisifeme Thsai-tseu. — Appreciation iitteraire 490 /f Ceremonial des visiles a la Chine ; 491 . , _ Histoire de Yang-ko. ( Fragment.) 493 . Quatrihtie Thsai-tseu. . P'iNG-CHAN-UNG-YEN, ouvragc du qnatrleme Tlisai-tseu. — Appreciation litt^aire 496 Description d'un banquet imperial. (Fragment.) 497 Cinquieme Thsai-tseu. CHOCi-nou-TCHOUEN, ouvragc du cinquieme Thsai-tseu. — Appreciation lilteraire 500 Table des matieres contenues dans les deux premiers volumes du Choui-hoii- tclioueu. — Extraits de cet ouvrage 506 Sixi^e Thsai-tseu. Si-siANG-Ki , ouvrage uu sixieme Thsai-tseu. — Sujet du Si-siang-ki 520 Appreciation lilteraire 521 \j Septikme Thsai-tseu. • * Pi-PA-Ki , ouvrage du sepUeme Thsai-tseu. — Appreciation lilteraire ib. Analyse el extraits du Pi-pa-ki 522 Opinions de deux critiques ciiinois sur le Pi-pa-ki 531 Huitiime Thsai-tseu. HoA-TsiEN, ouvrage da huitieme Tlisai-tseu. — Sujet. — Appreciation litteraire 534 Neuvieme Thsai-tseu. PiisG-KODEi-TCBOUEN, ouvrage du neuvieme Thsai-tseu. — Analyse de cet ouvrage 537 Dixieine Thsai-tseu. PE-Koi)Ki-TCHi , ouvrage du dixi^me Thsai-tseu. — Prologue du Pe-kouei-tchi 538 Ecrivains du second ordre 543 Des romans chinois 544 I Fragments du Kin-p'hing-mei 545 ■» Des contes et des nouvelles 552 TABLE DES MATI£RES. 675 HISTOIRE NATDRELLE. P^,^ Miniraux de la Chine 554 Des min^raux chinois appartenant k la collection du Museum d'lustoire naturelle. . . 555 Traitemenl des m^taux ; proc^d^s chiuois 558 Botanique chinoise 504 Index botanique de M. S. Wells-Williams 555 Travaux de MM. I. Hoffmann et H. Schultes , sur la Qore du Japon et de la Chine! .... 568 Zoologie 571 Les abeilles " 573 La cigale 574 Papillons de la Chine ....!!!!!!]. 575 Les termes ou fourmis blanches 577 , Vers k soie saiivages ]'/,] 580 . L'hirondelle dite de la Chine. C616bres nids d'oiseaux '. 584 Le tapir de la Chine ." . 587 AGRICULTURE. Parall^le de I'agriculture de la Chine et de celle de I'Europe ; culture du riz 588 HORTICULTURE 595 Cultures particulieres. Des cultures du th6 , d'aprfes les missionnaires et les voyageurs 598 Classification des th^is 602 Nouveaux renseignements sur la culture des arbres k cire , extraits des auteurs chinois par M. Stanislas Julien , de I'lnstitut 606 Hlantes textiles 610 Culture des mOriers 613 Education des vers a soie 616 INDUSTRIE. Coup d'oeil sur I'industrie des Chinois 621 Description des procedes chinois pour la fabrication du papier 622 Fabrication du papier de bambou 623 Fabrication du papier d'^corces 625 Documents sur I'art d'imprimer, extraits des livres chinois par M. Stanislas Julien — 626 Travail de la laque a Canton 631 Notice sur le vermilion chinois 635 Miroirs niagiques 637 Fabricalion des tam-tams «*• Porcelaine de la Chine 639 Py rotechnie chinoise 647 FftTES. F6tes religieuses et civiles des Chinois 649 -Ji-^t JEUX. Jeu des echecs 655 Cierfs- volants • 656 BIBLIOGRAPHIE. Catalogue des principaux ouvrages relatifs k la Chine - 657 ^ .^ i i UNIVERSITY OF CALIFORNIA LIBRARY Los Angeles This book is DUE on the last date stamped below. DS 709 P28c /^ University of California SOUTHERN REGIONAL LIBRARY FACILITY in«; De Neve Drive - Parking Lot 17 • Box 951388 LOS ANGELES, CALIFORNIA 90095-1388 Return this materi al to the library from whic h it was borrowed. ^ JS^ytr.v^j^'^ M'^mmkM tiSi^nf^ii'"' "EGIONAL LIBRARY Fa: ^^ iii^ 1KB* ■• '^^-""■. f^-^c^lip^l '^g. K^'*^. ^'^,,^^'d illsiRc I . 'f* .VV^)^, i'fM^.lilf V -^w- v.-v i •;■■/■ t* * .' jP> *" '*.'^ ^-'i i.>^". "*i^^>:•^