JE—J^- m 0%; 'rsity of CaliforniT iitherii Regional brary Facility iv: 1^^^' L- vmmmtKA # # THE LIBRARY OF THE UNIVERSITY OF CALIFORNIA LOS ANGELES l\' RECHERCHES E T CONSIDERATIONS SUR LES FINANCES DE FRANCE. TOME TROisi^ me; RECHERCHES E T CONSIDERATIONS S U R LES FINANCES DE FRANCE, J)epuis ib^b jufqu'en lyxii TOME TROISIEME.' A LIEGE. M. D C C. L V I I I. vr: RECHERCHES ET CONSIDERATIONS S U R LES FINANCES DE FRANCE, Depuis ibc)b jufquen lyzi. Suite de l'Annee 1669. X-J- E trafic de 1667 chagrinoit •extremement les Hollandois , dont il genoit abfolument le =^ Commerce ; il y avoit beau- coup de marchandiles 6c peu de ven- te chez eux , comme le mandoit M. de Pomponne a M. Colbert. lis ne laif- ferent pas de diffimuler leurs pertes , & s'imaginerent que des menaces pour- roient faire impreilion. lis declarerent que fi Ton ne vouloit moderer le tarif , Tome lilt A jj, Recherchcs & Conjidlrations ils xnettroient fur nos denrees , & par- ticulierement fur nos vins & eaux-de- vie , de tels droits que nous refterions fans Commerce. La chaleur de queU ques-uns des Magiflrats du Confeil , & le prejuge oii Ton etoit pour lors en France que nous avions befoin des Hol^- landois pour faire notre Commerce , effrayerent M. de Pomponne. Mais M» Colbert ecoutoit de fang froid ces de- clamations impuiffantes , bien convain- cu que le Commerce de Hollande ne pouvoit diminuer , fans que celui de France s'accriit. L'importance de la matiere exige que j'infere ici une partie d'une defes depe- ches a M. de Pomponne : on y verra la fagon de penfer de ce grand homme, & les motifs qui le foutenoient dans fa refoiution. Puiflent-ils donner du poids au voeu de toutes les perfonnes inftruites de nos veritables interets ! Ex trait des Dspeches a M, de Pomponm, , ^4mha(fadeur en Hollands y du zi Mars 1 66^. ^ Sur le fecond point, je voiis dlrai ^^ en peu de mots que je ne crois pas ^f que le$ impofitions que les Etats veu^ fur Us Finances dc France, J ,5 lent mettre iur les viiis de France , 5, nous faflent grand prejudice ; voici ,, mes raifons. „ Les Hollandois viennent tous les „ ans dans les rivieres de Garonne & ,, Charente , avec trois ou quatre cent 55 vailTeaux , enlevent leurs vins pen- 5, dant les mois d'Odobre , Novembre 5, & Decembre ; ils portent tous ces „ vins dans leur pays oil ils payent ,, les droits d'entree ; ils en conibm- 5, ment le tiers ou environ ; les deux 5, autres tiers font conferves , accom- 5, modes & frelates , & enfuite , lorf- „ que la mers'ouvreaux mois, de Mars „ ic d'Avril , recharges fur les memes ,, vaiffeaux , & portes en AUemagne , 5, merBaltique& autres pays du Nord ,5 oil les vins de France fe corafomment ; „ &: ces memes vaifTeaux reviennent „ charges de bois , chanvres , fer & au- ,, tres marchandifes de gros volume 5, qui fervent a leurs batimens ; c'eft ,, ce qui produit leur puiflance & Ta- „ bondance de leur Peuple & de leurs ^, gens de mer. „ Si les impofitions qu'ils mettront 5, font egales fur tous ces vins , ils cou- 5, rent rifque que les Anglois & les „ Francois meme qui ne les payeront Ai; 4 Rtcherchcs & Conjideratloris 5, point , pouvant les porter clans le 5, Nord a meilleur marche qu'eiix , s'at- 5, tirent ce tranfport , qui eft tel qii'il 55 caul'e , comme j'ai dit, toute la puif- 5, fance des Hollandois. S'ils ne met- 55 tent ces impoiitions que fur les vins 55 qui fe confomment en HoUande , ils 5, ne peuvent retrancher cent cinquante 55 ou deux cent bariques de leur confom* 55 mation , qu'ils ne retranchent en me- 35 me terns un vaifTeau de leur nombre , 55 & la vie &la fubfiflance avingthom- 55 mes qui la trouvent fur ce vaifleau ; & 55 des lors qu'ils viendront par ce moyen 55 a retrancher le nombre de leurs vaif- 55 feaiix 5 les gens de mer iront dans 55 les autres pays chercher leur fubfif- 35 tance. 55 Le Roi d'Angleterre a fait la me- 55 me chofe dans Ton dernier Parlement ; 5, mais au lieu de nous faire du mal 5 il ,5 fe trouve que Ton n'a jamais enleve 55 tant de vins de France que cette an- 5, nee. » J'efpere que TemprefTement du » Sleur van Beuninguen qui a vii ici la » conduite du Pvoi &: les moyens dont » Sa Majefle s'eil fcrvie pour augmen- » ter les Manufactures &: le Commerce ^ par Mer de fon Royaume , aidera fur Ics Finances de France, 5 » beaucoup aiix defTeins qu'elle a for- » mes fur ce fujet ; en voici la raifon » generale. » Le Commerce par Mer de tout le » monde fe fait avec vingt mille Vaif- » feaux ou environ ; dans I'ordre na- » turel , chaque Nation en devroit avoir » fa part a proportion de fa puiffance » & du nombre de fes Peuples & de fes » Cotes de Mer; les Hollandois en ont » de ce nombre quinze a feize mille , &: » les Fran9ois peut-etre cinq ou fix cent » au plus. Le Roi employe routes for- » tes de moyens qu'il croit etre utiles » pour s'approcher im peu plus du » nombre naturel que fes Sujets en » devroient avoir. Si les Hollandois fe » fervent des memes moyens , il y a » lieu d'efperer qu'ils feront le meme » effet que Sa Majefte pretend , c'eft-a- » dire , qu'ils s'approcheront aufli du » nombre naturel qu'ils devroient avoir; » & en ce faifant , ils aideront beau- » coup aux defleins de Sa Majefte. La » preuve particuliere de cette raifon » generale feroit trop longue a vous » deduire , mais vous la penetrerez fa- » cilement dans la fuite de toutes les at^ » faircs de cette nature qui pourront » pafier par vos mains. A iij 6 Rccherches & Conjidirations »Nonobftant ces raifons, comme la » matiere dii Commerce eft tres-deli- » cate & tres-difficile k penetrer , je » voiis prie de m'informer avec foin de » toutes les refolutions que les Etats » prendront fur les propofitions du S^ » van Beuninguen , & lur tout ce qui » concerne cette matiere. » II feroit meme tres-important pour » le bien du fervice de Sa Majefte , que » vous fiiIiez[vos diligences pour eire » informe du nombre des Vaiffeaux qui » font a prefent aux Etats , & a tous » leurs Sujets ; » De la quantite des vins de France » qui entreront tous les ans ; » De celle qui s'y confomme & qui » fe tranfporte dans les Pays du Nord ; » comme aufli des eaux-de-vie , vinai- » gres , fels, fruits & autres denrees & » marchandifes du Royaume. » Faites moi aufli f9avoir tout ce qui » fe pafTe fur nos etofFes , merceries 6c » generalement fur toutes les modes de » France ^ tant a I'egard des femmes » que des hommes ; fur-tout faites ces » recherches avec adreffe &: fecret , 5> n'etant pas i propos de temoigner au- » cune envie de fgavoir toutes ces cho- » fes i il eft memc neceilaire d'affecter fur les Finances de France, 7 » de ne pas paroitre fi f9avant en ces » matieres , qui doivent tenir fort au » coeur des HoUandois. » Je fuis , &c. Jufqu'a ce que les vues de M. le Due de Sully fur I'exportation de nos grains, & celles de M. Colbert fur le Commer- ce des HoUandois ayent ete pleinement adoptees , nous n'aurons ni richefles folides, ni Marine puiffante , ni la con- fiance des Nations du Nord. Nous nous epuiferons pour foutenir un Pays dont TAngleterre tournera toujours les for- ces contre nous au gre de fon ambition & de fa haine. Le projet des HoUandois de fe pafler de nos vins etoit tres-reel ; & Ton ap- prit qu'ils negocioient le long du Rhin avec divers Princes , pour diminuer les peages & les droits. M. Colbert recom- manda tres-vivement au Miniflre du Roi h. Mayence de fuivre cette affaire avec autant de vigilance que de cir- confpe£^ion ; de s'informer exad^ement de la nature , du lieu de ces peages , des droits qu'on y per9oit, de la quan- tite des vins qui defcendent par le Rhin , II le pria d'en faire venir de plufieurs eiidi oits , 6c de former meme quelque A iiij ^ Recherche s & Conjidcrations entreprife de Commerce dans le Pays en fociete avec un Marchand de vins , pour apprendre furement tons ces de- tails fans paroitre les chercher. Afin de comparer lui-meme les qualites, il en iit tranfporter k Paris des eiTais de toii- tes les efpeces. On ne pourroitqne plaindre tres-foft quelqu'im qui trouveroit ces details trop petits : I'execution ne demande que de la mediocrite dans les talens ; mais le principe qui en decouvre la ne- ceflite appartient au genie. J'euffe bien defire, pour rendre un hommage plus complet a la memoire du grand hom- me dont je parle & pour I'utilite publi- que , avoir eu communication de fes depeches pendant les autres annees de fon miniilere. Puifque les lettres de i'annee 1669 ^"^ ^^^ recueillies , les autres doivent I'avoir ete : de pareils trefors devroient appartenir au Public. On ofe inviter en fon nom les parti- culiers , chez qui ils fe trouvent epars , a les rafTcmbler dans ce depot fi digne de la Majefte du Prince qui I'entretient en faveur des Arts. Les informations prifes au fujet des vins du Rhin tranquiiiferent en France fur Tevenement, & Ton peut dire que fur Us Finances de France; ^ la jaloufie des etrangers n'a point nui a notre Commerce , autant que nos propres faiites. M. Colbert avoit rai- fon , lorfqu'il remarquoit que nos vins de Boiirgogne , de Champagne &: de Bordeaux s'exportoient dans la meme abondance pourl'Angleterre & la Hol- lande ; mais il n'obfervoit pas que nos petits vins refloient : eeux du Rhin ne leur faifoient pas tort, puifque nos baf- fes qualites font trop au-defTous pour cntrer en concurrence. Mais les vins & les eaux-de-vie foit de Portugal , (bit d'Elpagne , les remplacerent inlenfible- ment , des que les droits etablis en Fran- ce & dans I'Etranger devinrent fi forts que les confommateurs aifes ne purent les acheter a un prix proportionne ^ leur valeur intrinfeque. Nous avons toujours fourni, &nous pouvons efperer que cela durera long- tems 5 aux befoins des riches ; mais ils forment par-tout le petit nombre , & il n'y eut pas eu moins de benefice a vendre aux plus pauvres. Cela efl im- praticable , tant que les vins des Pro- vinces oil les vignobles font mediocres payeront a la fortie les memes droits que ceux des Provinces oil la qualite eft fuperieure. 10 Recherches & Confidlrations C^Qi principalement dans le Nord que notre mauvaife politique nous a fait tort ; & comme nos denrees y font un des principaux alimens du Commer- ce des Hollandois , M. Colbert redou- bla d'efForts pour y etablir le notre de facon a ne pas recevoir la loi de cette Republique , en cas qu'elle en irouvat les moyens. Mais on eut encore recours a I'ex- clufif : c'eil un vrai malheur pour la France que le prejuge en ait fubfifte dans un tems ou elie etoit en etat de faire de grandes depenfes pour fon Com- merce. Les encouragemens ne pou- voient d'ailleurs etre plus grands : la Compagnie du Nord devoit faire pen- dant vingt ans le Commerce de Zelan- de , de Holiande , des Cotes d'Alle- magne , du Danemarck , de la Mer Baltique , de Suede , Norvege , Mof- covie. Tous les Sujets pouvoient y prendre un interet a condition qu'il ne feroit pas moindre de deux mille li- vres. Sa Majefte accordoit a la Compa- gnie trois livres par barrique d'eau-de- vie qu'elle tranfporteroit dans ces Pays ; quatre livres par tonneau fur les autres denrees du cru du Royaume % fur les Finances de France, 1 1 & autant fur celles qii'elle apporteroit k droitiire. Les munitions neceflaires k rarmement des vaifTeaux etoient exemp- tees de tous droits d'entree & de fortie ; I'entrepot des retours permis fans payer aucun droits la reexportation. Attendii qne ce Commerce fe fait pour la plus grande partie par echange , S. M. pro- met de faire prendre dans fes arfenaux les marchandifes propres a I'armement de fes vaifTeaux , apres que les Inten- dans des Ports les auront vifitees , & de les faire payer comptant , ou bien fur le pied de la fadure originate , en y ajoutant le change , le fret & les alTu- rances ; ou bien fur le prix courant que les memes munitions navales vaudront dans les Villes de Hambourg & d'Am- flerdam. Le Roi offrit encore de faire I'avance pendant fix ans fans interet dii tiers du fonds capital , meme de fup- porter fur fes avances les pertes qui pourroient etre fouffertes pendant ces fix annees. II fut permis ^ la Compa- gnie d'employer fur fes vaifleaux la moitie de matelots etrangers, lefquels au bout de fix ans de fervice devoient recevoir les Lettres de naturalite ex- pediees fans frais. Enfin il etoit defea- 1 1 Recherches & Conjidcratlons du de faifir les efFets de la Compagnie pour dettes des intereffes. II n'etolt pas poOlble d'ajouter a ces faveiirs. Toutes les caiifes de decoiira- gement font prevues ; le grand article ^QS proviiions navales eft regie toiit-a- la fois a I'avantage du Commerce & a eelui du Roi y qui ne pouvoit efperer de les acheter avec plus d'economie. Que manqua-t-il done a cet etabliiTe- ment pour le foutenir ? Quelle fatalite domine fur nos deffeins les mieux concertes en apparence ? L'exclufif re- pond a tout. Si le Roi eiit accorde les memes gra- ces a tous fes Sujets indiflin(^ement ; qu'au lieu d'avances de fonds , il eut daigne faire naviguer quelques Efcadres dans ces Mers dans la faifon oii le Com- merce en eil ouvcrt , nous aurions un Commerce du Nord. Quand meme on nieroit la conclufion , car le Peuple fu- perftitieux des Monopoleurs efi: obfline pour Tordinaire , on ne pourra pas dire du moins que Texclufif ait reuffi avec des conditions capables de creer une Marine, de porter un Commerce dans les extremites de la Terre les plus in- connues , pourvii qu'il y eut des re- tours a prendre. fur les Finances dc France, 1 3 On objedera que la guerre fur venue en 1672 contribua k detruire cette na- vigation ; & c'efl d'oii fe tire la preuve de ce qu'on avance centre la Compa- gnie da Nord. Toute Compagnie , ii puiflante qu'elle foit en capitaux , eft bornee ; ainii chaque perte coniidera- ble qu'elle eprouve , liir-tout dans les commencemens , diminue le nombre de fes entreprifes ; & 11 faut que celles qu'elle peut encore executer la de- dommagent non-feu lement de fes avan- ces , mais encore des fonds perdus. Ce- la eft fouvent impoftible a une Com- pagnie qui ne fuit qu un feul genre d'af- faires 5 qui a toujours un grand fonds de depenfes k fatisfaire^ foit qu'elle gagne , foit qu'elle perde. Loin de faire de nou- veaux fonds , le decouragement s'en mele ; il faut par un calcul demontre qu'elle s'ecrafe dans un certain terme. On obmet le peu d'a(^ivite dans I'admi- niftration & les autres caufes de deca- dence infeparables d'une Compagnie exclufive. L'exemple d'une pareille Compagnie une fois detruite fait une telle impreftion , que perfonne n'ofe fonger a la rele ver ; on ne remonte point aux caufes. La Compagnie eft ruinee, ce genre de Commerce eft ingrat , dit- 14 Rcckerchcs & Conjidcratlons on : d'ailleurs ces fortes de projets font d'une execution longue 6c penible ; voila une branche du Commerce de- laifTee. All contraire im Commerce libre efl la reunion d'un nombre infini de focie- tes volontaires. Dans chaque Port, un certain nombre d*Armateurs expedient leurs navires , dont les rifques font par- tages entre plufieurs interelTes. Si un armement ne reuflit pas , la portion d'interet de chacun eft fi foible que le Commerce n 'en refTent point d'interrup- tion ; des qu'a I'aide du calcul on trou- ve Feiperance d'un benefice quelcon- que dans de nouveaux efforts , on re- (ait des fonds , fouvent plus confidera- bles que les premiers ; on court apres fon argent, & on le rejoint toujours quand on le fuit fagement. D'un autre cote , fi I'armement de I'un ne reuflit pas , un autre qui s'y efl mieux pris , ou qui s'efl trouve dans une circonflance plus favorable, a ga- gne : fon exemple foutient les autres , ou fa profperite redouble fes entrepri- (es. Quand meme tous viendroient k perdre <1 la fois , les entreprifes feront nioins nombreufes , mais ne cefTeront pas , parce que i'habilete d'un Nego- fur Ics Financts dc France, i < ciant riche confiile prefque toujours a porter dans les lieux d'oii le plus grand nombre fe retire ; d'apres ce grand prin- cipe, que la furabondance produit la difette. On peut s'en rapporter k I'am- bition des hommes pour le furplus ; ce- iui qui a fait un profit eft bientot accom- pagne. Les petites viciffitudes que pro- duilent les accidens du Commerce ne font I'afFaire de perfonne que de ceux qui perdent & ne s'en plaignent pas : I'imprefTion qu'elles font fur I'efprit des mauvais Politiques , eft une crainte puerile. Si Lisbonnc ou Conftantinople ont re^u dans une feule annee ce qu'el- les ne peuvent confommer qu'en deux ans , ii ne s'enfuit pas qu'on foit une annee fans y envoyer: cela par deux raifons ; la furabondance baiflant les prlx , la confommationy fera plus gran- de , & dans le pays vendeur la diminu- tion de la demande fait diminuer les profits. De cette double diminution, nait la matiere d'une nouvelle expor- tation , foit dans un endroit , foit dans iin autre ; ainfi point de vuide dans I'oc- cupation du Peuple. Quand meme il y en auroit un peu , ce leroit apres tout avoir paye une journee double a un homme qui fe repofe le lendemain : mais J 6 Recherches & Conjidlrations encore un coup la chofe eft impoflible, elle n'eft jamais arrivee , ii la totalite du Commerce a ete libre. II eft bien certain qu'iine Nation re- duite a une on deux branches de Com- merce reflentira violemment Tinterrup- tion d'une feule y mais ft elle en a dix a fa libre dilpofttion , Tune dedomma- gera de I'autre ; elle n'en perdra aucu- ne , au contraire. Enfin, comme on I'a deja remarque , lorftjue le Commerce eft libre , la meme prudence qui engage le Negociant a partager fes rifques , Finvite a varier fes fpeculations. Ces matieres ont deja ete difcutees tant de fois , & beaucoup mieux qu'el- ies ne le font ici , qu'il paroitra fans doute fuperflu aux bons efprits que Ton s'ecarte dans ces fortes de digreftlons : mais qu'ils regardent autour d'eux ; la manne eft tombee du Ciel, cependant une partie du Peuple languit encore. Le Commerce du Nord merite plu- fieurs confiderations , auxquelles on ne peut refufer quelque exteniion. II eft d'un genre de neceftite premiere dans tout Pays oil Ton veut entretenir une Marine & une Navigation conftde- rable , puifqu'il en fournit la matiere. II eft ingrat , parce que les Peuples qui rhabitent fur les Finances de France, 1 7 rhabitent font paiivres & fobres : ainfi point d'argent a en retirer , peu d'im- portations a y faire. Les Anglois y por- tent de I'argent ; les Hollandois qui y trafiquent avec plus d'avantage , le contentent de I'echange. Les Hollandois ont etabli chez eux Tentrepot de toutes les denrees du monde ; la ils compofent les affortimens de chaque efpece qui doivent entrer dans chaque navire qu'ils expedient. Si le lieu oil ils doivent finir leur route &: prendre leur chargement principal n'eft pas propre a une grande conlbmma- tion , ils partent plutot & foni des ef- cales , foit pour porter des marchandi- fes a fret , foit pour y vendre la portion de leur cargaifon convenable aux Ports oil ils mouillent. Ainfi le prix du loyer du VaiiTeau pour tout le voyage eft paye moitie par les marchandifes portees , nioitie par les marchandifes rapportees. S'ils alloient a morte-charge , ce feroit fur les retours qu'il faudroit imputer la to- talite du fret. It eil done evident qu'en- tre deux Nations , dont I'une ira cher- cher des matieresdans le Nord avec un Vaiffeau vuide , & I'autre avec un Vaif- feau rempli , la derniere aura paye le:? Joim II L B 'l8 Rechcrches & Conjidirations matieres plus cher de la moitie du fref., II eft aile de conclure que fi les Fran- cois veulent etablir un Commerce dans le Nord au pair des Hollandois , il faiit qu'ils fe procurent les affortimens de denrees convenables a ces pays. Nulle autre Nation ne poflede iin plus grand nombre d'avantages natu- rels pour ce Commerce, ainfique pour tous les autres ; puifque nous poffedons line partie des denrees du Midi de FEu- rope, &: celles defon climat tempere, avec les productions du Levant & des deux Indes : mais cela ne fuffit pas. Si les Hollandois compofenr ia plus gran- de partie de leurs cargaiions avec les denrees de France , ils y font auffi en- trer celles du Portugal , de TEipagne , de ritalie qui conviennent a I'afibrti- nient de ces pays. Le Maitre d'une ho- tellerie qui n*auroit qu'une forte de vin a un feui prix ne feroit pas un grand debit. II eft done indifpenfable pour le Com- jnerce du Nord , de pouvolr entrepofer dans nos ports les denrees des autres pays, qui y conviennent mieux que les notres , q oique de meme genre. Si cet entrepot n*eft pas permis , nous ne fe- rons k Commerce ni de ces denrees m fur Us Finances de France''^ 19 des notres. Si au contraire nous les per- mettons , nous donnerons un double ac- croiffement k notre navigation & k nos cxportations , foit en penetrant dans le Nord , foit en nous procurant de meil- leurcs conditions de la part des Nations dont nous ferons valoir les denrees. II eft certain que , ce point capital bien etabli , nous reullirons avec de le* gers encouragemens : en voici unepreu- ve recente. II y a quelques mois qu'un Negociant Frangois convint d'un fret de trois deniers 6c demi a Amfterdam: fur un navire de deux cent tonneaux ^ pour prendre chargement k Archangel,. & le conduire dans un port de la Breta- gne , oil il avoit I'efperance de trouver un nouveaii fret pour Hollande. Le Na- vire partit d'Amfterdam a morte-char- ge , parce qu'Archangel eft un lieu de peu de debouche , & cette navigation fut de trois mois & demi. Si ce Nego- ciant eiit re9U huit livres de gratifica- tion par tonneau fur un navire Fran- cois , il eut ete au pair d'un fret de douze k treize deniers, prix couranf pour un voyage de neuf a dix mois k i'Amerique , oii les vaifteaux fatiguent & s'ufent davantage, ou les depenfes foAtpl'uschereSj oii Ton employe plus Bij 20 Rtchcrches & Conjideradons de monde ; & des-Iors il n'eut point fon- ge a recourir a iin Hollandois. Pour le dire en pafTant , cette dilTerence de trois deniers qui paroit etre a peu pres I'in- tervalle commun du prix de notre fret a celui de Hollande , vient en grande partie du taux de I'interet de I'argent ; car le Hollandois qui paye a trois pour cent, fe contentera de gagner ^ix pour cent, oil le Francois lera force d'en chercher dix au moinSjparce qu'il paye I'interet de cinq a fix pour cent. Les bois du Nord , avec lefqucls I'un ou I'autre feront conflruire leurs vaiffeaux, coLiteront done en outre quatre pour cent de moins au Hollandois qu'au Fran- cois. L'interet dumontant de ces quatre pour cent fur les matieresqui fervent a la conftruftion , ira encore endedu£lion des frais du Hollandois ; & ainfi de fuite. II efl: une autre obfervation h. faire fur 2e Commerce du Nord de I'Europe , en faveur de nos Colonies du Nord de FA- merique , qui peuvent nous fournir avi moins des matures , des goudrons , des chanvres , en attendant que le pays foit affez deffeche pour produire de bons bois ; car le climat en foi y efl plus favorable k ieur bonne qualite ^ fur Us Finances de France. 2 1 que celui dii pays du Nord de TEiirope oti nous les achetons. Si les denrees du Nord font plus favo- riiees que celles de nos Colonies , nous ferons eternellenient prives des reffour- ces qu'elles peuvent produire. La con- fommationde nos denrees y eft plus fure que dans le Nord de I'Europe , & plus avantageufe : il paroitroit done naturel d'accorder aux produftions de nos Co- lonies , qui peuvent nous convenir ac- tuellement , la meme faveur qu'a celles du Nord» Finlflbns par remarquer qu'en terns de guerre la furete de ce Commerce exige de grandes precautions , parce qu'il faut traverfer un canal etroit cou- vert de vaiffeaux ennemis. Si Ton navi- gue en flotte, le rifque eft grand, les vaif- feaux de convoi n'ont point de retraite en cas d'accident. Leplurfiir eft encore de partir vaifleau a vaifleau par un terns fait. Dunkerque, par cette ralfon & par d'autres, paroit la ville la plus propre a ce Commerce. On ne peut meme diftimuler que cette difficulte d'entretenir notre Com- merce du Nord pendant la guerre ren- dra toujours pour nous ce Commerce tin peu precaire ; car fa proteftion for- a 2 Ruherchcs & Conjidiracions merolt une diverfion confiderable a nos forces maritimes , fi Ton vouloit la ren- dre efficace ; & manquant de retraites le long des cotes de I'Allemagne , coni- me on I'a deja obferve, cette protec- tion devient meme difficile. Un Com- merce qui n'eft point exclufif a une na- tion, ne pent abloiument reprendre fon adivite , s'il a re^u une interruption de plufieurs annees. Un autre obftacle que nous rencon- trero. s a i'etabliffement du Commer- ce du Nord , c'efl la cherte de la navi- gation , & la mediocrete du benefice qu'ii offre aux particuliers , tandis que nous avons d'autres branches de Com- merce d'un grand produit , & qu'il nous en refte meme d'autres a ouvrir qui ne feroient pas moins kicratives & moins etendues. 11 n'eft pas non plus toujours poffible a I'Etat d'accorder des gratifi- cations coniiderables ; 6i lorfqu'il en accorde, ce ne peut etre qu'autant qu'ii pent pre voir le rerme ou fes Sujets Te- ront en etat de s'en paffer* Au milieu de ces difficultes, il {Qm- bleroit de Tinteret de la France d'adop- ter un fyfleme ccnforme aux eirconf^ tances & a fes interets politiques» Nous ne pouvoas evidemmeiit tirer fur Us Finances dc France, x^^ tout le parti poilible du Commerce du Midi , tant que nous nous contenterons d'y porter nos denrees , & que nos vaif- feaux ne feront pas affures d'un fret en retour. Pour leur affurer ce fret en re- tour , il faut abfolument trouver un de- bouche dans le Nord des denrees fuper- flues du Midi que notre Commerce peut nous apporter. II paroit prefque impof- iible que cette reexportation fe fafle par nous-memes ; mais les Nations du Nord , les Danois , Suedois , Mofcovi- Xqs , ont des hommes & des vaifTeaux a bon marche , & ces Peuples manquent de cnpitaux ; la longueur de leur voyage les rend chers, & elle eft forcee , parce que leurs Ports font fermes pendant rhyver. FournifTons leur ces capitaux qui leur manquent , diminuons la de- penfe de leurs voyages , en ouvrant dans nos P' rts un entrepot perpetuel & abfolument libre de droits a routes les denrees , foit du Nord , foit du Midi. La bafe de ce fyfteme de Commerce feroit une impofition de dix livres par tonneau fur tous les vaiffeaux etrangers fans diftindion , excepte dans le cas oil ils apporteroient les denrees de leur pro- pre C'u ou de leurs Colonies : de ma- niere que tous nos Traites de Commerce 14 Recherches & Conjidiratlons confifteroient dans le Tarif refpedlf qui feroit arrete avec chaque Nation des denrees reputees de fon cm & dii no- tre. On ne pent nier que notre propre cm fournit matures , bois de conftmc- tion , chanvres , huiles , vins , fmits , grains , lels de toute efpece , cqjrs , fa- laifons ; que nous avons par nos Colo- nies , brais , gaudrons , pelleteries , co- tons , foyes 5 indigots , fucres , tabacs , &c. Ainli nous fommes a Tabri de toute difficulte. D'un autre cote il eft evident que nous mettons dans leur interet tous les Peuplcs capables d'un Commerce aftif , qu'il n'en eft aucun qui ne retirat de cet etabliftement des avantages , dont il ne jouit point aujourd'hui, & dont il eft difficile qu'il jouifle autre- ment. Le Commerce du Levant ^ que la na- ture avoit femble referver exclufive- ment a la France , etoit devenu la proye des autres Nations-; leur induftrie avoit arrache fans peine de nos mains un bien dont nous ne favions pas ufer. M. Col- bert en fut moins le reftaurateur que le createur ; mais avant de lire le bel Edit qui retablit ce Commerce , il eft bon de connoitre i'etat deplorable oil il fe troii- voiK Les fur liS Finances dc France, i? Les Confulats dii Levant, ainfi que les autres , avoient ete eriges tn Char- ges hereditaireSjdans iin terns oii Tefprit de Finance dominoit a la faveur ties be- foins. Les Confulats fe vendoient, s'a- chetoient, comme un cfFet public ; on les faiioit exercer par dts Com mis on par des Fcrmiers , qui fans s'interefTer au bien du Commerce & de la Nation, fe fervoient deleur autorite poar exer- cer des monopoles. Leur mauvaife con- diiite attiroit foiivent des avanies a nos Marchands ; qiielquefois nieme ils eu- rent Tindignite de les fufciter , afin d'a- voir occafion de lever des taxes fur Ics Nationaux, ou de leur preterades u(l,- res exorbitantes ; de fagon que depv is line trentaine d'annees il fe levoit,indL- pendamment des douanes , quatre a cirq pour cent fur I'entree & la fortie d.s marchandi'fes , & jufqu'a milleou dou^e cent piaftres par vaifleau , fans qie des fommes fi prodigieufes euffent ac- quitte la Nation. LeRoi avoit commen- ce par ordonner a tousles proprietaiics tie Confulats dereprefenter leurs titres , de faire refidence , avec defcnfes tre.- cxpreffes d'emprunter an pretendu nom de la Nation. A Tegard des dettes an- ciennes , ils furent obliges d'en envoyer Tome III. C a 6 Rcchcrches & Conjiderations iin etat circonilancie , Forigine , l'a£le de confentenicnt , I'etat des recettes , & aiitres pieces : depuis on retira la pro- priete de tons les Confulats. La ville de Marfeilie eut permiiHon d'etablir des droits pour payer les dettes nationales ; mais les deniers furent ou diHipes oil mal adminiftres. Le plus grand defordre cependant venoit de la part des Ambafladeurs , qui , au me- pris de leur dignite , exer^oient des mo- nopoles pour s'enrichir. Chofe etran- ge, que la meme caufe de decadence , le monopole , fe retrouve dans toutes les branches du Commerce ! Pour donner une idee de notre fa- cheufe pofition au Levant , il fuffira d'expofer que TEchelle feule d'Alep de- voit deux cent quarante-huit mille fept cent foixante & douze p:aflres;celle d'A- lexandi'ie en devoit deux cent foixante mille , quoiqu'on eut leve jufqu'a trois &: quatre mille piaflres par vaifTeau , neuf pour cent fur toutes les marchan- difes 5 fans compter les droits du Con- ful , qui n'avoit garde de s'oublier, Une preuve fenfible de la mauvaife admlniftration , c'efl qu'en 1647 "^ nommc Favre , avec un feul droit de j^in^ pour cent^ avoit acquitte rEcheile fur Us Finances dc France, vj d^AIexandrie en cinq ans de quatre-vlngt mille cinq centpiaiires. A Seyde depuis vingt ans on ievoit deux mille piailres parvaifTeau, 6cla Nation nelaiflbitpas d'en devoir quatre-vingt mille. Par ces fails particuliers on peut juger des aii- tres : &: fi Ton fail attention a la quan- tite immenfe d'argent qui fortoit dii Royaume annuellement pour ce feul objet , quand meme notre Commerce fe fCit fait au Levant par echange, on doit concevoir une grande idee des relfour-r ces de ZQl £tat. Malgre un ii prodigieux ecoulement de fes richefTes au Levant^ en Italie , en Angleterre ; malgre des guerres inteitines & etrangeres de pres de foixante ans , & la playe des Trai- tans bien plus funefte encore, il n'etoit pas epuife d'argent ; il lui reftoit des marchandifes & des vaiiTeaux. Le Port de Marfeilie etoit prefque prohibe aux Negocians etrangers , fur lefqueis on ievoit ditferens droits , independam- ment de ceux dont on a deja parle : en voici Tenumeration ; le droit de gabeilp du port, d'un denier pour livre , des marchandifes qui entroient pour le compte des Etrangers ; les droits d'atr- tache & d'ancrage , originairement de cinq fols par vaiffeau; trois fols par Cij i8 Rechcrches & Conjidiratlons Polacre, deux fols par Barque, iin fol par Tartane appartenante aux Etran- gers, avoient hauffe fuccefTivement;. !e droit d'adoub de quatre ibis par quin- tal du port des vaiffeaux etrangers, ou quatre livres par tonneau ; le droit de Tintin de carene, ou de cinq pour cent fur les navires , mats , antennes , &c. vendus aux Etrangers ; le vintin a rom- pre carene, droit de vingt ecus par jnille quintaux du port des vaifleaux depeces paries etrangers ; le droit d'un foi par millerole d'huile & de miel , & d'un fol par baril de chair falee que les Etrangers faifoient entrer ou fortir. Enfin le droit d'aubaine dans toute fa rigueur; droitqileperfonne n'oferoitaf- fermer vingt mille livres en France , & qui la prive de confommations immen- fes , qu'y viendroient faire quantite d'E- trangers attires par la douceur de fon cliniat,& des moeurs de fes habitans. Ce n'eft pas qu'on entende, en fe re- criant.contre le droit d'aubaine , approu- ver la liberte qu'on laifTeroit aux Etran- gers de pofTeder parmi nous des mai- /bns oudes terres, des interets dans des entreprifes de Finances ou dans des com- ^.erces cxclufifs , fans etre habitans de fur Its Finances de France] %cf la France, Cette eondnite feroit aufli pernicieufe que la permiffion qui leiir eft donnee de placer leiir argent dans iios fbnds publics. On park fimplemenr da droit qui adjuge auxFermiersduDo- maine les meubles de quelques Etran- gers , qui venoient faire valoir parmt nous les fruits de nos terres & de notre induftrie. Cette police ne paroit propre qu'a eloigner de nous les hommes &C Targent , & elle eft contralre a I'equite lorique nous Texer^ons vis- a vis d'une Nation qui n'ufe pas de la nieme rigueur k notre egard. Ne luffiroit-il pas meme d'aftreindre les heritiers d'un Etrangef retire en France a vendre leurs herita- ges dansl'an &jour de la mort , a moins qu'ils ne devinftent en meme tems ci- toyens &C habitans de France en f"e fai- fant naturalifer? Ne devons-nous pas apporter tous nos foins pour prolonger parmi nous le fejour &c la confbmma- tion de ceux qui n'ont pas le bonheur d'etre nes Francois ? Si Marfeille eut eu aflez de capitaux en argent &c en vaifTeaux pour faire tout le Commerce que fa portion lui pro- mettoit , on n'auroit pCi lui reprocher les precautions qu'elle avoit prifes pour conferver fa navigation contre les en- C iij jcr Rccherches & Conjidcrations treprlfes des Navigateurs etrangers; mais au/n peu en etat alors de reinplir tons ces objets qii'elle Tefl encore au- jourd'hiii > elle avoir poufTe fes precau- tions contre le fejour des Etrangers jiif- ^ii'a line rigueiir deplacee 6c riiineiife pour I'Etat. M. Colbert voyoit toiites les bran- ches du Commerce en friche a la lois. Les Negocians fans viies , fans emula- tion 5 fans fortune , fe doiitoient a peine de leurs forces, &; fecondoient timide- ment fes deffeins. II prit habilement fon parti ; il appella les Etrangers a Marfeiile par des privileges , par la fup- preilion du droit d'aubaine , & de tous ceux qui etoient impofes fur leurs effets. II previt bien que les riches Negocians des Nations qui n'ont point de capitu- lations a la Porte , viendroient en foule avec de gros capitaux jouir des avan- lages naturels de ce Port pour le Com- merce du Levant ; qu'ilsy conflruiroient de nouveaux navires , dont Tarmement donneroit de Toccupation aux ouvriers & aux matelots Fran9ois , en forme- roit d'autres , & enfin en attireroit d'e- trangers que I'aifance naturaliferoit bien-tot. Son principe etoit trop fur ^our tromper fon attente i le pavilion fur Us Finances dc France, 3 f Fran9ois fe multiplia en un inftant clan§ toiites les Echelles , & nos manufadu- res animees parcette nouvelle concur- rence s'agrandirent. Quelque chofe qu'on ait dit depuis de I'exces de cette concurrence , & des effets de I'avilif- fement des prix , il n'en eft pas moins certain que dans Je terns meme ou cer- taines perfonnes s'ecrioient que tout etoit perdu , nos draps penetroient pour la premiere fois dans TArmenie 6c la Perfe ; que les Anglois deploroient chez eux la facilite que nous avions de ven- dre de mauvais draps en fi grande quan- tite , que les leurs reftoient invendus malgre leur fuperiohte. Ce font des faits qui doivent au moins nous ap- prendre a juger des evenemens par leurs veritables caufes , & a etudier les cir- conftances pour developper ces caufes, Ce n*eft jamais le gain de chaque parti- cuiier qu'il convient de calculer dans ces matieres ; mais le gain national ; & ce principe evident ieve tous les doutes. M. Colbert ne fe contenta pas d'in- viter les Etrangers a entreprendre le Commerce de Marfeille , il lefoulagea de maniere a rendre ce Commerce lu- cratif. Tous les droits quelconques fu- C iiij 3 1 Recherckes & Conjidiratlons rent fiipprimes , a Texception dii droit de poids & de caile , & de celui de Cottirno dont il reilea parler. En i66q les Negoclans de Marseille convinrent de lever demi pour cent fur toutes les marchandiies portees dans chaque Echciie du Levant. Le produit etoit delHne a payer une peniion de feize mille livres a i'AmbaiTadeur pour I'en- tretien de jeunes enfans Francois ele- ves a Conftantlnople dans Tetude de la Langne turqueiqiie, cS^ aracqulttement d'une dcttC que la Nation avoit ccntrac- lee avec les Anglois. Lors de I'etablif^ fement du Port franc , il fut fixe un tarif de ce que payeroit chaque efpece de batiment allant aux Echelles du Le- vant ; 6i fur la recette il fut ordonne de prelever vingt-clnq miile livres pour IVntretien du Port. Cette premiere ta- xe etant trop forte, fut depuis diminuee plufieurs fois. Le Commerce des huiles & fanons de baleine , celui de la poix & refine , etoient en traite , de maniere que le Partifan vendoit la permiflion d'en en- trer & d'en fortir. Ce monopble dan- gereux fut fupprime. Des 1665 , les droits exceflifs & arbitraires de vifiti? des Juges de rAmiraiite avoient ete re- fur Ics Finances de France, 3 5 diuts ; mais raugmentation du Com- merce les en dedommagea amplement. Pour mettre le Commerce du Levant en furete contre les Navigateurs etran- gers , il h\t regie qu'il feroit per^u un droit de vingt pour cent fur toutes les denrees du Levant qui n'en arriveroient pas a droiture , meine par un navire Francois , ou qui feroient apportees par des vaifTeaux portant pavilion etran- ger ; mais en mcme terns pour accou- tumer ces Etrangers a venir prendre \es denrees du Levant a Marieiile , ians al- ler eux-memes les chercher au Levant, on lour remit le droit de cinquante fols par tonneau , lorfqn'ils y apporteroient des marchandifes du cru de leur pays. Ces evpediens reuflirent fi bien que les Anglois meme vinrent charger k Marfeiile les denrees du Levant , juf- qu'a ce que leurs Loix y mifTent im ob- liacle. Cependant Fexclullon donnee fans neceilite aux autres Ports de Fran- ce a eu des fuites facheufes , mais qu'on etoitalors bien eloigne de prevoir. On a cru depuis que Taugmentation des capitaux & des Marchands nous permettoit d'enlever aux Etrangers cette portion d'interet que nous -leur laiffions dans nos profits au Levant en 34 Rccherches & Conjiderations faveur de leur fejour a Marleille. On fupprima une concurrence fans la rem- placer par une autre , qui fembloit toute naturelle , c'eil-a-dire la concurrence nationale ; on eut lieu peut-etre de ne pas appercevoir de changement au Commerce du Levant pendant quel- ques annees ; mais Taugmentation du commerce lucratif de I'Amerique ayant detourne une partie de la navigation de Marfeille , celle du Levant diminua fenfiblem.ent. Le monopole , toujours deilrucrif de lui-meme , tint le fret & les denrees ii cheres , que bien-tot il perdit le Commerce de reexportation. Les Marchands Italiens acheterent des Anglois a Port-Mahon , des Hollandois & de la Republique de Ragufe , la per- miiHon de naviguer fous le pavilion de ces Nations ; I'interet de leur argent etant plus foible & la concurrence plus forte , ils ont non-feulemcnt perdu I'habitude de recevoir les denrees du Levant de la main des Francois , mais encore il les ont reexportees concur- remment avec eux en Efpagne & ail- leurs. Les Hollandois par les memes raifons ont fait de grands verfemens fur nos Cotes du Ponent au detriment de la Navigation & des Manufactures ■^el'Etat. fur Us Finances de France, 3 5; II eft evident en foi que , fi tons les Ports de France eiiiTent ete ouverts an Commerce dii Levant , aucim des effets qui a fuivi le retranchement du pavil- ion n'eiit ete eprouve. Les Manufac- tures de nos Provinces feptentriona- les pouvant alors s'exporter a auffi pen de frais pour les cotes de la Mediter- ranee que celles de I'Angleterre , y euf- fent au moins balance les iiicces de nos voifms ; nos lucres , nos miels , nos firops, nos cafFes , y euffent ete repandus k plus bas prix par ia plus grande concurrence , & la confom- mation en eiit ete accrue. Avant de quitter la matiere du Com- merce du Levant , il eft bon de raftem- bier tout ce que M. Colbert fit en fa faveur. II engagea des particuliers ri- ches a armer des vaiffeaux de force pour ce Commerce , & forma meme en 1670 une Compagnie k laquellele Roi avan^a pendant deux ans deux cent mil- le livres fans interet , prenant fur cette fomme les pertes qu'elle pourroit ef- fuyer dans le meme intervalle. Dix livres de gratification furent accordees pendant quatre ans fur chaque piece de drap qu'elle tranfporteroir au Levant ; &enfin on y joignit entre autres priviie- 36 Rechcrches & Conjidcratlorts ges le droit exclufif de la vente du fene pendant les vingt ans qu'elle de- voit cliirer , a condition qu'elle eta- bliroit unerafinerie de fiicre aMarleille. Quelque protedion qtie cette Compa- gnie eut eprouvee , quoiqu'elle fiitcom- pofee de riches Negocians , la concur- rence des particuliers Temporta fur elle ; lors de la diffolution elle le rrou- voit en perte ; la vente du lene fut rendue libre. La Compagnie des Indes Occidenta- les fe trouvoit abfolument hors d'etat de foutenir fon privilege exclufif. Les Colonies manquoient des chofes necef- faires , & le bas prix auquel on pre- noit leurs denrees defefperoit les habi- tans. En vain les droits furent-ils aug- mentes fur les fucres venant du Brefil & des pays etrangers ; les retours de la Compagnie n'etoient pas plus abon- dans , Seles Interlopes Hollandois n'e- toient pas moins accueillis dans nos Ifles , malgre le renouvellemcnt des de- fenfes. La nccefTite ouvrit les yeux , on en vint au grand remede ; le Com- merce de rAmerique fut permis a tous les Francois indifFeremment. M. Col- bert ecrivit dans tous lesPorts pour invi- ler a Tentreprendre , & foUicitoit en Jut les Finances dc France, 3 7 partlculier les principaux Negocians de s'y adonner. Les Gouverneurs eurent des ordres tres-rigoureux d'ecarter les navires etrangers , d'accueillir, de fa- vorifer 6c de prevenir en tout les Na- vigateurs Francois. On vit bien que le Minillre voiiloit (erieufement que le Roi tut obei , & il le fut. On etoit biea elolgne alors de tomber dans TindifFe- rence fur cet article , fous pretexte qu'il etoitimpoflibie de Tempecher. M. Colbert avolt de la volonte qui eft Ic premier des moyens , & il fgut execu- ter ce que les Anglois 6c les Portugais ont trouve facile chez eux. Des frega- les en croifieres , 6c fur-tout des com- miflions aux Armateurs pour courir fur rinterlope , font des expediens afTures fi Ton veut reuflir. Cela ne fuffifoit pas cependant pour retirer toiit-a-fait ce Commerce de la main des Etrangers. Dans plufieurs Ports, & entr'autres a Nantes , on leur vendit des Paffeports pour aller aux Colonies , d'oii ils rapportoient chez eux les retours a droiture. Cette in- iidelite couta cher au Commerce ; car on obligea les Negocians de venir des- iarmer dans les Ports memes d'oii ils .ctoient partis, Reglement qui devint 3? Recherches & ConJidiratiGns plus pernlcleux a mefiire que le Com- merce s'erendit : auili le revoqua-t-on depuis ; mais il a ete reproduit fur iin autre motif, qui etoit d'affurer le droit des Fermiers. Le Commerce vexe ^z defole fut oblige de foufcrire lui-meme a I'arret de fa perte , pour eviter de plus grands troubles ; mais il eft certain que cette formalite eft infiniment cou- teufc , & deroute tout-a-fait un Nego- ciant dans les fpeculations qii'il pour- roit former. C'eft en partie a ce Regle- rnent que les fucreries du Brefil doivent im accroiiTement ft extraordinaire. Ne pouvoit-on pas verifier a i'Amerique le chargement des vaifteaux fur lefquels on payeroit en France r N*y a-t-il pas des Receveurs pour les droits qui y font dus ? Peut-on en partir fans im conge ? Enfin les Anglois ne le pratiquent-ils pas chez eux ? Si c'eft du cote de la folvabilite du Negociant que Ton fe de- £e , on peut exiger caution ; ft c'eft la ftdelite des Commis que Ton foupcon- ne 5 on repond qu'elle fera egale k celle des Commis de France : tous les droits de I'Amiraute & autres font percus fort regulierement. De quelque maniere que Ton s'y pren- . ne pour etablir la liberie de tranfporter fur Ics Finances de France, 3 9 !es denrees de nos Colonies a droiture dans les Ports etrangers d'Europe , on ne f9auroit trop repeter qu'elle eft in- difpenfable, &:qu'elle equivaudroit fur cette partie a I'ade de Navigation des Anglois, fans blefler les traites ni les autres PuiiTances. Ne laifibns point echapper iine ob- fervation qui fe prefentera fouvent a ceux qui reflechiront fur les ope- rations de M. Colbert. Aucun Miniftre dans la Monarchie n'a fait une amelio- ration auffi prodigieufe dans les Finan- ces , &: aucun cependant n'a ete plus exempt de cet efprit de Fife , qui facri- fie toute operation utile a Tinduftrie aux produits adueis. La tete de ce grand homme etoit organifee pour les calculs politiques ; & loin d'adopter dans la perception les raifonnemens timides d'un Receveur borne , la connoiflance profonde des fources lui indiquoit fur ie champ des remplacemens aflures. II ne manquoit plus au Commerce que d'etre une profeflion honoree ; c'eft ce que le Roi lui accorda par un Edit oil il permet a la Noblefle de le faire , I'y invite meme. Aucun politi- que alors ne parut allarme fur la chute (l€ i'efprit militaire , ni fur Tabandon 40 Rechtrches & Conjidiratlons des fondlions de la irjagiflrature ; & mal- gre les egards que Ton doit aux princi- pes de TAuteur de VEfprit dcs Loix , je ne puis me perfuader que Louis XIV. & les Miniilres ne connuflent pas mieiix que lui les confequences de cette de- marche. Le Monarque s'exprima enco- re plus pofitlvement dans un Edit pof- terieur : nous le verrons dans fon tems ; en attendant celui de 1669 merite d'e- tre rapporte. Edit du mois d'^Aout 1 GGg , qui declare U Commerce de mer ne point diroger a la, Nobkjfe, << L o u I s 5 &c. Comme le Commer- » ce , & pardculierement celui qui fe » fait par mer , eft la fource feconde i> quiapportel'abondance dans les Etats » &la repand fur les Sujets a propor- » tion de leur induflrie & de leur tra- » vail , & qu'il n'y a point de moyen » pour acquerir du bien qui foit plus » innocent & plus legitime ; aufli a-t-ii » toujours ete en grande confideration 5> parmi les Nations les mieux policees , » univerfellement bien re^u , comme ^ line des plus honnetes occupations de }i la vie civile : mais quoique les Loix fur Us Finances dc franc*. 41 » &: les Ordonnances de notre Royau- » me n'ayent propremsnt defendu aux » Gentilshommes que le trafic en de- » tail , avec I'exercice des arts mecha- » niques ^ rexploitation des Fermes » d'autriii ; que la peine des contraverr- » tions aux Reglemens qui ont ete fairs » pour raiibn de ce , n'ait ete que la M privation des privileges de NoblefTe , » fans une entiere extindion de la qua- » lite; que nous nous foyons ponesbien » yolontiers , ainfi que les Rois nas » predecefTeurs , a relever nos Sujets » de ces derogeances;que par la Cou- » tume de Bretagtie & par les privile- » ges de la ville de Lyon , la NobleiTe & » le negoce ayent ete rendus compati- » hies; & que par nos Edits des mois de » Mai & Aoiit 1664, qui etablifient les » Compagnies du Commerce des Indes » Orientales & Occidentales , il fait or- » donne que routes perfonnes,dequel- » que qualire & condition qu'elles » foient, y pourrontentrer& parriciper » fans deroger a la NoblefTe, ni prejudi-- f> cier aux privileges d'icelle;ne3nmoins » commeil importe au.bien de nosSu- » jets , & a notre propre fatisfa£lion 5. » d'eiTacer les refles d'une opinion qui » s'eil univeriiellement repandue, que le Tome III, D^ 42 Recherches & Conjidiratlons » Commerce maritime eft incompatible » avec la Noblefre,& qu'il en detruit les » privileges ; nous avons eftime a pro- » pos de faire entendre notre intentioa » fur ce fujet, & de declarer le Commer- » cedemer ne pas deroger aNoblelTe, » par une Loi qui fut rendu e publique , » & generalement re^ue dans touteFe- » tendue de notre Royaume. A c ES » CAUSES , defirant ne rien obniet- » tre de ce qui pent davantage exciter » nos Sujets a s'engager dans ce Com- » merce , & le rendre plus fiorifTant , Sc » dc notre grace fpeciaie, pleine puiffan- » ce & autorite Roy ale, nous avons dit » & declare, & par ces prefentesfignees » de notre main , difons 6c declarons ^ » voulons & nous plait que tous Gen- 5> tilshommes puiilent , par eiix ou par » perfonnes interpoiees , entrer en fo- » ciete 6i prendre part dans les vail- » feaux marchands , denrees & mar- 5> chandifes d'iceux , fans que pour rai- » fon de ce , ils foient cenfes ni reputes » deroger a la NoblefTe ^ pourvu tou- ->> tefois qu'ils ne vendent point en de» » tail , &c. Tandis que le Commerce de mer ctoit encourage dans toutes fes bran- ches ^ les Manufaftures qui en font a fur Ics Finances dz France, 45 bafe apres rAgriculture , ne recevoient pas moins de lecours. La nouvelle con- quete dii Roi cultivoit plufieurs Arts , dont il etoit important d'etablir la com- munication avec le Royaume , & prin- cipalement avec les Ports. Cette com- munication naturelle dans un fi grand voifmage avoit ete tcllement interrom- pue par le grand art des douaniers & par I'exces des droits , que toutes les denrees de la Fiandre s'embarquoient par Oftende , ou fe voituroient en Ita- lic , fans toucher aux terres de France. M* Colbert fentit I'avantage infini qu'il y auroit a determiner par la Fran- ce le paffage de toutes les marchandi- {^% de la Fiandre Fran^oife , &: meme Efpagnole , allant a I'Etrang^r. Les foins qu'il prit & les peines qu'il eut a reullir prouvent tout a la fois Timpor- tance de ces objets & les difficultes qui s'oppofent toujours a I'ouverture des canaux du Commerce , foit qu'ils foient creufes pour la premiere fois , foit qu'ils ayent ete detournes. II commen9a par accorder un traniit franc au travers du Royaume ^ toutes ces marchandifes : mais on n'en eut pas profile s'il en fut refle-1^. Les voi- tures des marchandifes de Lille & des ^4 Rechcrches & Conjidirations aiitres villes de Flandre etoient entre* prifes par des Allemands , auxquels il importoit fort de degouter les Flamands de la route de France^ II y envoya di- vers entrepreneurs Fran9ois5 pour faire des proportions aux Commer^ans , &: chargea I'un d'eux en fecret de prendre les voitures toujours a un quart au-dei- fous de ce que demanderoient les Alle- mands , s'obligeant de le dedommager de ce quart. En meme terns ^ il fit ar- mer deux VailTeaux du Roi au Havre^ pour tranfporter en Efpagne & en Por- tugal les marchandifes de la Flandre. II envoya un Capitaine pour les ofirir aux Negocians , conferer avec eux , avec ordre de s 'informer des prix courans du fret par Oflende , de demander le plus bas , meme'de fe contenter de ce qui lui feroit offert. II etoit refolu dB leur donner tous les deux mois cette fa- cilite , pour les habituer a prendre leur route par le dedans du Royaume, juf- qu'a ce que les particuliers armaflent un affez grand nombre de navires pour faire cette Navigation. II en ecrivit a- Rouen, a Saint-Malo , & dans d'autres Ports, invitant les Negocians a entrete- nir une navigation reglee avec le Por- tugal 5c i'Eijpagne, pour y porter les fur hs Finances dc France', 4 ^ denrees de la Flandre. « Car je connois » fort bien , difoit ce Minlflre , que ce » n'eft pas le fait du Roi de fe meier de » ces fortes de details. Si les Negocians » de nos Ports demandent afTiflance a » Sa Majefle pour entreprendre ccs » tranfports , je ne doute pas qu'elle ne » le fafle volontiers >?. Toutes les fois que le Gouvernement fe mele ainfi du Commerce , on n'en prend point d^ombrage affurement ; on lui decouvre meme des petits fecrets qu'il eft bon qu'il connolfle, & qu'on lui cache, non qu'ils ne foient utiles a FEtat, la profeflion eft: bienfaifante en elle-me- me, mais parce qu'on craint de dire jufqu'au bien que Ton fait. \.QS Confuls de Portugal & d'Efpa- gne re^urent ordre du Miniftre d'offrir aux Negocians de la Fiandra Fran^oife toutes les commodites dont ils pour- roient avoir befoin ; de Tinformer al'ar- rivee de I'etat des marchandifes , des precautions a prendre une autre fois. Son attention s'etendoit jufqu'aux plus petits details de proprete convenables a la confervation des marchandifes. »Faites bien valoir , ecrivoit-il a >> rintendant de Flandre , tous ces foins » aux nguveaux Sujets de Sa Majefte^i 46 Rccherchcs & Conjidcratlons » mais olifcrvei quElU veut Us convicr a »fe fcrvir dc cu Itabliffcmtnt pour Uur » avantagc & noniesy forcer. » Sentence admirable, foit qii'on la confidere du cote de la polique ou de Thumanite : faire aux hommes le bien qu'ils aiment^ c'eft un art qui n'appartient qu'aux gran- des & belles ames. On pourviit meme aux retours que les Marchands pouvoient recevoir ; i'exemption de tous droits fut accor- dee au tranfit des vins & autres den- rees d'Efpagne , venant pour compte des Marchands de Lille. Enfin M. Col- bert , pour couronner fes foins , envoya reconnoitre les routes de Venlfe , Mi- lan, Veronne parterre, afin d'etablir des voiturcs reglees , dont Fentreprife fut faite par des Francois. Les habitans de la Flandre demande- rent que leurs etofies puffent entrer en France pour fa confommation fur le pied du Tarif de 1664. Cette grace parut foufFrir quelque difficulte a caufe de la facilite d'y introduire celles de pa» reille efpece qui fe fabriquoient dans la Flandre Efpagnole ; cependant on s'y determina , en prenanr la precaution de faire marquer le^ ballots aux lieux du depart. t pour empecher qu'il ne s'introduife » quelque abus dansle paffage des mar- » chandifes que les Marchands des » Vilies reilees au Roi Catholique vou- » dront envoyer dans les Pays etran- » gers par nos voitures de terre & de » mer ; prenez bien garde de ne rien » faire qui puifTe iroubiernidiminuerce » Commerce ; au contralre travaillez » par toutes fortes de moy ens a Taug- » menter. Vous avez bien fait de faire » arreter le Commis Au Bureau de Mor- » tagnc 5 qui avoit rctarde le pailage » des bateaux de charbon ; ii eil de » tres-grande confequence que les Mar- » chands ne foient vexes fous quelcne » pre texte que ce felt ». II fit egaiement emprifonner & en- fuite chaffer un Commis pour avoir pris cinq fols pour un acquit. Encore un trait pour caraderifer ce grand homme , & developper fes pria- 48 Rcchcrchcs & Confidlrat'ions cipes : il recommandoit a M. cle Souzi trois maximes : « i'^. de ne jamais de- » cider qu'apres avoir entendu les Mar- » chands & les Fermiers , afin de main- » tenir la balance egale entr'eux ; 2^. » d'etre pliitot iin pen dupe des Mar- » chands fur les produits que de gener » le Commerce , parce que ce leroit » aneantir les produits ; 3°. d'obje£ler » toujours larigueur des Ordonnances, » afin que les Peuples f'entent que la » grace leur vient du Roi , &: qu'iis » Ibient portes a lui en avoir toute la » reconnoiffance. Tels ibnt les reports d\me adminil- tration , dont Tobjet eft de fonder la gloire & la puiffance du Maitre fur le bonheur des Sujets ; & telle fera la poli- tique de tous ceuxquiapporteront dans les alfaires du Gouvernement des prin- cipes, des vues , des combinaifons & du courage. On I'a deja remarque , & on ne fcauroit trop le repeter , il eut ete impoffible a M. Colbert de creer a la fois une Marine & un Commerce, & ce qui n'eft pas moins difficile , d'etre le reftaurateur des Finances ; de porter fi loin, en moins de dix ans, tant d'eta- bliiTemens ; d'entrer dans d'auHi grands details, fans retarder I'expedition des affaires; Jiir les Finances de France, 49 affaires ; u'ailer au-devant du bien avec tant d'adivite , fi ion genie n'eut cte guide par line meditation profonde , dontle courant des affaires ne laiiTe plus le terns iorlqu'on eft arrive au Gou- vernement. On ne compte pas s'etre ecarte de fon fujet en parlant du Commerce ; & Ton eut defire pouvoir donner I'idee d'un Miniftre parfait en citant ies me- mes attentions pour encourager la for- tie de nos grains & de nos vins , au lieu de fe contenter de diminuer les taifles dans les campagnes. , CeLte annee n'olfre d'autre opera« tlon de Finance que la creation d'un Grefner des affirmations dans toutes ies Coiirs & Sieges du Royaume , & celle de deux Treforiers Generaux du Do- maine dans chaque refTort de Chambre des Comptes , pour remplacer les Re- ceveurs be Controleurs du Domain e etabiis dans chaque SenechaulTee & Baiiiiage. L'augmentation des Fermes ne fe foutint pas cette annee , parce que Ies befoins diminuant , les droits furent aufli diminues des 1668 ; en particulier le prix du fel : voici la recapitulation. Tome 111^ E 50 Rechsrchcs & Conjidirations oo OO 9. o »>:? C ^ M CU n ^ ^ ^ 3 r^ ^ 1-3 W C/2 O L- ^ J? 3 8 S 3 OS ^8 w !: • . • <^ . . a- . ri • • . O . . o a a- n> CO f-t- >3 H H »^ O V -•^l ■vj H 4^ n N t-» o 0<5 v^ -J < N N s^J ^-^ 00 n V^J H t>< o -^ 3 s!w o N o Cs C\ o •-< -^ 8 o • o 00 N o o ON ^ O M vJi O c era fur les Finances ch France, ^ i L'impofition generale etoit moindre que Tannee precedente de fix millions fix cent cinquante-deux mille deux cent quatre-vingt quinze livres. Cependant les parties du Trefor Royal etoient aug- mentees de quatre millions cent quatre- vingt-un mille deux cent quatre-vingt- fix livres , par la diminution des Char- ges perpetuelles, &: le rembourfement de fix millions fix cent quarante-fix mille deux cent quatre-vingt-dix-fept livres fur les avances des Fermiers & Rece- veurs. Annee 1670. II fe faifoit fous divers pretextes une grande diflipation des amendes decer- nees dans les divers Tribunaux , & qui font deflinees en partie a payer les frais que le Roi fait pour la Juftice. On ^t compter les Receveurs de toutes les Jurifdidions par etats de recette & de- penfe depuis un nombre d'annees : ce revenu fut reuni aux Domaines ; &: pour I'accroitre , il fut defendu aux Ju- ges de moderer les amendes prefcrites par rOrdonnance. Le genie de M. Colbert embraflbit tous les details economiques , 6c ceux meme dont le rapport eut paru moins Eij 5 2 Rechcrches & ConJiJfirations lenfible k des yeiix ordinaires avec le bonheur du Peuple. II ne borna point ion attention a ramener I'ordre dans la recette des amendes ; il fentit que le la- byrinthe obfciir des procedures , & la longueur des formalites inutiles , etoient des charges fur les fujets , nuifibles au recouvrement qu'exige le maintien de la fociete. En effet , elles font Tafyle de la mauvaife foi : la difficulte de con- noitre & de remplir leur etendue , fou- vent la contradidion des jugemens qui en refultent , rendent les proprietes in- certaines. Les fommes enormes qu'el- les coutent ne font cependant pas plus onereufes que la perte du terns qu'elles occalionnent , foit en tenant \qs p!ai- deurs eloignes du travail & des ibins domeftiques , foit en fufpendant une infinite d'entreprifes utiles a Tamelio- ration des terres , a I'augmenration du Commerce. Combien de valeurs per- dues pour TEtat , par exemple , par Fabandon oil tombent les terres en di- reftion ! Quelle amelioration peut-on efperer d'un Fermier de bail judiciaire , qui n'a qu'un engagement de deux annees ? Quel art inhumain & ruineux pour la fociete , que celui qui autorife im Procureur a prolonger un fequeftre5 I fur les Finances dc France, ^ 3 jufqu'a ce que le produit de i^s proce- dures faffe paiTer le bien entier dans (qs mains avides? Ce fut par les confeils de ce grand homme que le Rol fit entreprendre la reforme des Ordon nances Civiles & Criminelles achevee en cette annee. Ce fut par eux que le Prince s'arma de fermete centre des reprefentations die- tees par un fond d'attachement aux an- ciens ufages , toujours refpedable s'il efteclaire, mais qui degeneroit alors en prejuge d'habitude. On ne f^auroit trop repeter que par-tout oil les Loix gouvernent, il convient d'etablir des formes ; que leurs inconveniens de de- tail font compenfes par Tordre general; mais la raifon leur prefcrit des bornes , & le genie du Legillateur les fait afr iigner. II femble qu'un Code de Loix auroit moins fouv^nt befoin de reforme , & que la Loi feroit moins difficile a ap- prendre , fi dans chacune le Legiflateur etablifToit nettement les principes d'oti elle derive , & I'effet particulier qu'il fe propofe. L'expreflion de la Loi ne pent embracer tous les cas poffibles , d'ou naiiTent avec le tems des modifications & des maximes eloignees de Tefprit E iij 54 Richerches & Confidlrations primitif de la Loi. C'eft ce qui compli- qiie la Jurirprudence &fait quelquefois degenerer la raifon en chicane. Les principes bien decides & bien etablis rappelleroient fans cefTe ^ eux les juge- mens particuliers ; on pourroit fuivre la filiation ,pour ainfi dire , des formu- les & des maximes introduites dans cer- laines circonflances. Les rembourremens d'Offices , de Gages & de Rentes continuoient tou- jours de fe faire d'annee en annee : il paroitpar unReglement du i4Avrilde cette annee, que les Rentes fur THotel- de-Ville divifees en quatorze parties fe trouvoient reduites a fix millions neuf cent quatre-vingt-qiiatorze mille deux cent cinq livres deux fols dix deniers , qui avec les gages des vingt-huit Payeurs & Receveurs montant a deux cent cin- quante-deux mille livres , formoient au total fept millions deux cent quarante- fix mille deux cent cinq livres deux fols dix deniers. Cette annee eil veritable- jnent Tepoque brillante des Finances {bus ce mlniftere , parce que dans au- cune il n'y eut moins de charges per- petuelles fur les revenus de I'Etat & moins d'impots fur les Peuples. fur hs Finances de France. 5 5 o Q o i6 hi OS r- Mv v— o o <^ c> o H O «^ - •^ o O G O O O O « K O 'I- o ^TN T^ o -^ rr\ O H M N t~~~ f^rs N O Tj-OO t^ C M "^ O OS OS so M-*-- i:< O O M H K OnOO vd o «^ o o t^ <^ o oc t^ Ns "^ - OS M " OS so »^ -I 00 C 1- O Os O ON o o 00 '^^ o ►- c en 00 ^C JJ _w O cS cS MJ . <^ . Q GO «U • I = . C fli C > N OJ W 1^ ^.^ N^ K^ CO 4-1 n3 ^^ B eo (U >^ (2 CO i3 CO r3 *> rt >^ ry CO WP-t ^OJ^ CO S C ^ "^ d, CO "^ rs c^ ^'-' ^ • i ^ CO CO (L> .CO O S^ rt O ?i C3 c^ !> ^ .S^ o ^ O o «-» G '> O S-i PS — c t O ^ c 1 c 1> to c O CO fi^ 'o lllj 5 6 Recherches & Conjidcrations Les parties du Trefor Roy al n'avoient point encore monte a ime fi forte fom- me; les Charges perpetiielles ne mon- toient qu'a vingt-deux millions environ. Dans cette fomme n'eroit point com- prife la fubvention annuelle du Clerge. II s*aPi^mbla cette annee a Pontoiie, & le determina a accordera SaMajeileun don gratiiit de deu7^ millions deux cent milleiivres, en faveur des efforts qu'il falloit faire pour reprimer la piraterie des Corfaires de Tunis & de Sale. Les grandes depenfes en meubles , diamans, tableaux & batimens, a Ver- iailles, au Louvre ^ a TObfervatoire & ailleurs , commencerent des cette an- nee rt exceder les projets de depenfe : la guerre furvint, & I'Etat rouia con- linuellement fur des anticipations de revenus , independamment des affaires extraordinaires. On en Jugera mieux par i'etat des depenfes de cette annee. La depenfe reelle excedoit la depenfe projettee de dix millions fix cent onze mille neuf cent quatre-vingt-quatorze livres , & les revenus d'environ neuf millions. Pour remplacer ces fonds en 1671-, on cherclia d'avance des expe- diens. Le droit de gros fur le vin fut augmente : & le Controle fut etabli fur Tome in. pnge <5 E 1670. ■ife reelle. Depenfe projettee. Treforierd(^4^oi3 | Chambre 310^0096 Argenterie 837475 Menus . . 480315 Eciiries. '475369 Achat des c nooo Treforier d^ 29^ s7 ETAT DEs Defenses de l'Anne 1670. Dcpcnfe reelle. Depenfe projettef. Treforier de la Maifon du Roi Chambre aux Deniers Argenterie Menus Eciiries r Achat des chevaux Treforier des Offrandes Prevote de I'Hotel Gardes du Corps Cent Suifl'es de la Garde Venerie & Fauconnerie Louveterie Maifon de la Reine Maifon de Monfieur Maifon de Madame Maifon de Madame Doiiairiere Recompenfes Comptant es mains du Roi BStimens Treforier general du Marc d"or Ligues Suiffes Extraordinaires des Guerres Depenfes du Camp Autres depenfes de I'Extraordinaire des Guerres. . . . Etapes Garnifons Ordinaire des Guerres Artillerie Marine Galeres ; Fortifications Canal de jonQion des Mers Ambaffades LaBaftille Traites etrangers Penfions , Gages du Confeil & Appointemens d'Offi- Appointemens des Marechaux de France 6i autres. . . Depenfes extraordinaires Acquits-patens Fonts & Chauffees Pave de Paris • Commerce & Manufaflures Rembourfemens de toute nature Interets d'Avances & Remifes . M^us Dons 6c Voyages Total Iiv > 54S0I3 1090096 '837475 480315 475369 IIOOO 19357 61050 I liv. / 8600000 184563 47738 159156 34193 1655850 981359 307000 151000 146513 ; 1041000 800000 6141818 5000000 14000 400000 400000 16000000 16000000 300000 300000 76.030 593631 400000 191.198 1800000 47388 481300 510771 10813843 I 0000000 1,34676 1000000 4169800. 4169800 914015 800000 516100 JOOOOQ 111959 I 00000 3000000 3000000 1810410 1711000 510000 510000 3141366 1000000 104500 100000 753661 300000 1.5738 100000 500G00 500000 1013S176 7000000 764378 586000 500000 79834565 69111571 r" fur Us Finances di France, 57 tons les ades fujets a fignification. Cette derniere nouveaute excita de grands cris , & M. Colbert lui-meme confeilla de retrancher ce droit ; la raifon n'en paroit pas bien evidente, &: il femble qu'il eiit encore mieux valu que le Con- trole des exploits eut ete iin pen plus fort , que d'augmenter le droit de gros. Ces fortes d'impoiitions paroiffent aflez douces 5 tant que leur portee n'eft pas telle que dans les petits intcrets , ils ab- forbent le fonds. Les detours & les longueurs de la chicane font un fardeau mille fois plus onereux. Si la multipli- cite des procedures inutiles multiplie la perception du droit , c'efl: la fautc des procedures ; & il exifte des exemples de reforme fur cette partie. Aprestout, fi le prix des formalites pouvoit rendre les hommes juiles , quel plus grand fer- vice feroit-il poflible de rendre a i'hu- manite? On previent le le£leur une fois pour toutes , que I'argent monnoye etoit a vingt-fept francs le marc : ainli les foixante & dix millions fept cent cin» quante-cinq mille cinq cent fept livres faifoient deux millions fix cent foixante- dix mille dix-nenf marcs ; lefquels au- jourd'hui formeroient cent trente-deux 5fS Rechcrchcs & Conjidiratlons millions neiif cent foixante-fix mille neuf cent quarante - fix livres quatre fols , toutes charges deduites. Le Roi avoit recompenCe des I'an- nee derniere les heiireux travaux de M. Colbert 5 en alTociant M. le Mar- quis de Seignelai fon fils aux fondions de fa Charge de Secretaire d'Etar. La gloire & la reputation d'un tel pere etoient une Charge difficile a remplir pour tout autre ; mais cet illuflre fils la foutint dignement, & devint le plus grand Miniftre de Marine peiit-etre qui ait exifte en Europe. M. Colbert le lui avoit promls a certaines conditions , qui furent remplies affez proprement , mais qu'il ne ceflbit de lui remettre fous les yeiix chaque jour. Les grands principes ne font jamais plus nettement developpes que par I'experience & la pratique : le perc voulut donner a fon fils cet avantage fur lui : il le fit voyager dans tous les Arfenaux du Roi, en Angleterre , en Hollande , en Italic. Le premier voyage fut celui de Ro- chefort. Qu'il me folt permis d'entrer dans des details dorneftiques que les fervices de cette famllie ont rendu fi intereflans pour I'Etat , & de co- fur Us Finances dc France. 5^ pier la premiere inftriidion que re^iit M. le Marquis de Seignelai, ecrite de la main de fon pere. Memoirc pour monjils , fur ce qiCil doit ohftrvcr pejidant U voyage qu^il va faire a- Rochefort, « Etant perfuade , comme je le fuis , » qu'il a pris une bonne 6c ferme refo-- » lution de fe rendre autant honnete » homme qu'il a befoin de i'etre , pour » foutenir dignement , avec eftime Sc » reputation mes emplois ; il eft fur- » tout necefTaire qu'il faffe toujours re- » flexion & s'applique avec foin au re- *»glement de fes moeurs, & fur-tout » qu'il confidere que la principale & » feule partie d'un honnete-homme eft » de faire toujours bien fon devoir k » I'egard de DiEU , d'autant que cepre- » mier devoir tire neceftairement tous » les autres apres foi , & qu'il eft impof- » fible qu'il s'acquitte de tousles autres » s'il manque a ce premier. Je crois lui » avoir aifez parle fur ce fujet en di- » verfes occafions , pour croire qu'il » n'eft pas necefTaire que je m'y ctende » davantage ; il doit feulement faire re- » flexion que je lui ai ci-devant bien 6o Reckerchss & Confidlratlons » fait connoitre que ce premier devoir » en vers DiEU (e pouvoit accommo- » der fort bien avec les plaifirs &: les » divertifTemens d'lin honnete-homme » en fa jeunejGTe, » Apres ce premier devoir je deiire » qu'il fafie fouvent reflexion a fes obli- » gations envers moi , non-feulement » pour fa naiffance qui m'eft commune >> avec tous les peres , & qui efl le plus » fenfible lien de la fociete humaine , » mais meme par Televation dans la- » quelle je I'ai mis , & par la peine & » le travail que j'ai pris & que je prens » tous les jours pour fon education ; & » qu'il penle que le feul moyen de s'ac- >> quitter de ce qu'il me doit, eft de » m'aider a parvenir a la fin que je fou- » baite ; c'eft-a-dire , qu'il devienne au- » tant & plus honnete-homme que moi, » s'il eft poflible ; & qu'en y travaillant y> comme je le fouhaite, il latisfafTe en » meme-tems a tous les devoirs envers » DiEU , envers moi & envers tout le >>monde, & fe donne en meme tems » les moy ens furs & infaillibies de pafTer » une vie douce 5i commode ; ce qui » ne fe pent jamais qu'avec eftime , re- » putation & reglement de moeurs. » Apres ces deux premiers points , & fur Us Fl nanus de France, 6 1 » pour defcendre aux details de cequ'il » doit fa ire pendant fon voyage , je de- » fire qiril commence inceilamment la » le£lurc des Ordonnances de Marine » qu'ii tronvera dans Fontanon, Con- » ference des Ordonnances , &c Ordon- » nances de 1619 ; qu'il emporte avec » lui les Traites de Clairac , &c life » promptement celiii des termes mari- » times ; & que dans le voyage il s'in- V ftruife toujours de la Marine avec M. » de Terron , afin qu'il ne foit pas tout- » a-fait neuf en cette matiere lorfqu'il » arrivera a Rochefort ; & je deiire » que pendant le fejour qu'il y fera , il » employe toujours trois heures du ma- » tin a i'etude , c'eft-^-dire k la Ie£i:ure » dans fon cabinet de tout ce qui con- » cerne la Marine ; &c meme quelque- M fois pour changer de matiere , qu'il ,^> pourfuive la le&ure des Traites que » je lui ai fait faire fur routes les plus » importantes & plus agreables matie- » res de I'Etat. » Aufli-tot qu'il fera arrive , il doit » faire une vifite generate de tous les » VaifTeaux & de tous les batimens de » TArfenal ; qu'il voye & s'inftruife foi- »gneufement de Fordre general qui 62 Reckerches & Conjidcrat'ions » s'obferve pour faire mouvoir line fi » grande machine. » Qu'il interroge avec application » fur tout ce qu'il verra , afin qu'il puiffe » acquerir les connoifTances generales, » pour defccndre enfuite aux particu- >} lieres. » Qu'il fe faiTe montrer le plan gene- »ral de toute I'eiendue de I'Arfenal, » tant des ouvrages fairs que de ceux » qui font a faire , & fjache !a deflina- » tion de chaque piece difFerente , en » voye la forme &: la figure , & en f^a- » che donner les raifons : qu'il ecrive » de fa main les noms de tous les Vaif- » feaux batis , & de ceux qui font en- » core fur les chantiers, ScTetat auquel » il les rrouvera , & en meme-tems une » defcription de tout I'Arfenal conte- » nant le nombre des difFerentes pieces » & leur ufage particulier. » Enfuite il fera la lifte des Officiers » qui fervent dans le Port, depuis I'ln- » tendant jufqu'au moindre Officier ; & » s'en fera expliquer lesprincipales fon- » £i:ions , dont il fera le Memoire. » Apres avoir pris ces connoifTances » generales ,il defcendra au particulier. » Pour cet etFet il commencera par la » vifite du Magafm general , laquelle fur Us Finances dt France, 63 » il fera avec le Garde-Magafin & le » Controleiir ; vena I'inventaire gene- » ral , & en fera , s'il eft pofTible , uii » recollement ;c'eft-a-dire , qu'il fe fera » reprefenter toutes les marchandifes » & munitions qui y font contenues , » pour voir fi elles font en la quantite » & de la qualite neceifaires ; fur quoi » il fe fera toujours informer. II pourra » meme juger fi le Garde-Magalin & >► le Controleur font bien leur devoir, » en voyant fi le Magaiin eft propre & y^ bien range , & (i tout eft en bon or- » dre , &. s'il tient un livre d'entrees & » iffues , qui eft abfolument neceflaire » pour le bon ordre. » Apres avoir vu & examine le Ma- » galin general , il vifitera le magafin » particulier des Vaifteaux, dont il fe » fera reprefenter I'inventaire , les exa- » minera & en fera le recollement com- » me ci-deflus ; & par ce moyen pourra » bien connoitre la quantite & qualite » des marchandifes neceffaires dans le » Magafin general pour I'armement d'un » auffi grand nombre de Vaifleaux que » celui que le Roi a en mer , & pareil- » lement tout ce qui eft neceftaire pour » mettre en mer un feul VaifTeau. » Enfuite il vifitera tous les atteliers 64 Recherches & ConjiMrailons » des cordages , de reiluve , des voiles, »des charpcnteries, chs tonneleries, » des calfateries /la tbnderie , le niaga- » iin a poudre , & generalement tons » les ouvrages qui fervent aux conllru- » dions , agres & apparaux des Vaif- » feaux ; examinera de quelle forte fe »font tous ces ouvrages, &C les difFe- » rences des bonnes ou mauvaifes ma- » nutadures , & ce qui eft a obferver » fur chacune pour les rendre bonnes » &c en etat de bien fervir. » Dans le Magafin general font com- » pris toute I'artillerie , tant de fonte » que de fer , les armes , moufquets , » piques , &c autres de tomes fortes , » enfemble toutes les munitions de » guerre. » II examinera enfuite les fonc^ions » de tous les Officiers du Port , verra » leurs inftrudlions , & fera de fa main » un Memoire de tout ce que chacun » Officier doit faire pour fe bien acquit- » ter de fon devoir ; & prendra le loin » de les voir Sl les faire agir chacun » felon fa fonftion , pendant tout le » tems qu'il fejournera audit lieu de » Roche fort. »I1 s'appliquera enfuite k voir & h examiner la conftruftion entiere d'un yaiffeau fur Ics Finances de France, 6^ » VaifTeau , en verra toiites les pieces » depuis la quille jufqu'au dernier bS- » ton de Pavilion , en ecrira lui-meme » les noms , & fera faire un petit mo- » dele de Vaiffeau qu'il m'enverra avec » les noms de toutes les pieces ecrits » de fa main. » Apres avoir vu & examine la con- » flrudion entiere d*un VaiiTeau , & » avoir f^ii les noms de toutes (cs par- » ties , il examinera encore I'economie » entiere de tons les dedans , & I'nlage » de toutes les pieces qui y font prati- » quees. » II verra placer toutes les denrees 9 » marchandifes , armes, artillerie, agres » & apparaux neceflaires pour mettre » un Vaifleau en mer , en fera lui-meme » le detail , I'ecrira de fa main , & pren- » dra le foin d*en faire charger & le » mettre en cet etat ; & pour cet effet, » s'il arrive affez a terns , il pourra pren- » dre un des VaifTeaux que M. le Vice- » Amiral doit commander ; fmon il pren- » dra le Breton qui doit etre prepare » pour le voyage des grandes Indes. »> Et en meme tems qu'il s'appliquera » a connoitre les noms de toutes les » parties qui fervent a la conflrudion » d'un vaiiTeau , & de toutes celles qui Tome III. F 66 Rccherches & Conjiderattons » font neceflaires pour le mettre en » mer , il fe fera informer de I'lifage de » chacime piece, 6c de toute la manoeu- » vre d'un vaiffeau , & de tout ce qui » fert au commandement & aladitema- » noeuvre. Pour cet effet , il pourra la » faire faire devant lui , foit dans le y> Port , foit €n montant fur les vaif- f> feaux, & allant deux ou trois lieues en » mer , pour voir le tout ; & en un » mot fera enforte par fon application » qu'il puiffe fgavoir le metier de tous » les Officiers de Marine , tant en mer » qu'en terre , pendant le fejour qu'il » fera audit lieu de Rochefort ; enforte ?> que non-feulement il puiffe en bien » parler , mais meme qu'il puifTe s'en » fouvenir pendant toute fa vie , & » apprendre a donner ics ordres a tous » les Officiers qui auront a agir. » Pour parvenir h. cette fin , il ne fe » faut pas contenter de voir & exami- » ner une feule fois tout ce que je » viens de dire ; mais il faut le repeter » & faire fouvent la meme chofe , parce » qu'il n'y a que cette repetition frequen- » te , meme avec une grande applica- » tion , qui puifTe imprimer les efpeces M dans I'efprit & dans la memoire , en- >> forte qu'elie les reprefente fidelement fur Us Finances dc France, 6j » toutes les fois que Ton en a befoin. » 11 doit encore s'intbrmer &: fcavoir » parfaitement toutes les fondions des » Officiers d'un vaifleau , lorfqu'll efl >y en mer ; fcavoir du Capitaine , du » Lieutenant , de I'Enfeigne , du .Mai- » tre , du contre-Maitre , Pilote , Mai- » tre Charpentier , Maitre Voilier , » Maitre Calfat & Maitre Canonier , » & combien d'hommes chacun d'eux » commande , & quelles font leurs » fondions ; & generalement de tout » ce qui s'obferve pour la conduite » d'un vaifleau , foit dans un voyage , » foit dans un combat. » II lira avec foin tous les Regle- » mens & les Ordonnances qui ont ete » faits & donnes dans la Marine depuis » que j'y travaille , enfemble mes let- » tres & les reponfes , afin qu'il tire » par tous ces moyens la connoiflance » parfaite & profonde qu'il eft necef- » faire d'avoir pour fe bien acquitter » de fa Charge , & pour le faire avec » la fatisfa£lion du Roi , & le bien & » I'avantage du Royaume. » II fera en meme terns neceffaire » qu'il apprenne FHydrographie & le » Pilotage , afin qu'il f^ache les moyens » de driiffer la route d'un vaiffean, 'Sc Frj 68 Recherches & Conjidcratiom » qu'il etudie aiifH la Carte marine. » Apres avoir dit tout ce que je crois » necefTaire qu'il faffe pourfon inflruc- » tion , je finirai par deux points. Le » premier , eft que toutes les peines » que je me donne font iniitiles , ii la » volonte de mon £Is n'efl echaufFee , 5> &c qu'elle ne fe porte d'elle-mcme a » prendre plaifir a faire fon devoir ; » c'eft cequile rendra lui-meme capa- » ble de faire fes inilrudions , parce » que c'eft la volonte qui donne le plai- » fir a tout ce qu'on doit faire , & c'eft ,v le plaiiir qui donne Tapplication. II 5> fgait que c'eft ce que je cherche depuis » filong-tems. J'efpere qu'a lafin je le » trouverai , & qu'il me le donnera , » ou pour mieux dire qu'il fe le donnera » a lui-meme , pour fe donner du plai- » fir & dela fatisfadion toute fa vie , » & me payer avec ufure de toute I'a- » mitie que j'ai pour lui & dont je lui » donne tant de marques. » L'autre point efl , qu'il s'applique M fur toutes chofes a fe faire aimer dans » tous les lieux oii ilfe trouvera, & par » toutes les perfonnes avec lefquelles » il agira , foit fuperieures , eg ales ou » inferieures ; qu'il agiffe avec beau- ^> coup de civilite & de douceur avec fur hs Finances dt France, 6<)> » tout le monde , & qu'il fafTe en forte » que ce voyage lui concilie reftime & » Tamitie cle tout ce qu'il y a de gens de » mer ; enforte que pendant toute fa » vie ils fe fouviennent avec plaifir du » voyage cu'il aura fait , & executent » avec amour & refpeft les ordres qu'il » leur donnera dans toutes les fondions » de fa Charge. » Je deiire que toutes les femaines » il m'envoye ecrit de fa ir^aln le Me- » moire de toutes les connoiffances qu'il » aura prifes fur chacun des points con- » tenus en cette inilrudion. Puis-je mieux rendre compte des progres que fit M. le Marquis de Sei- gnelai, qu'en tranfcrivant ici I'inftruc- tion qu'il fe donna a lui-meme lorfqu'il partitpour I'Angleterre Sc la HoUande ? Injiruciion pour le voyage de Hollandt & d^Angleterre, « Quoique !e voyage que je viens de » faire foit affurement fort utile , & » qu'il m'ait donne des connoiffances » que je pourrai mettre en pratique fe- » Ion les occafions , je dois confiderer » le voyage d'Angleterre & d'Hollande » tout d'une autre maniere ; je verrai JO Recherches & Confidiratlons » les deux PuifTances de mer d'Eiirope » qui ont le plus de reputation ; ainfi , » examinant bien tout ce qu'ils obfer- » vent 5 & tout ce qui les a fait reuflir » dans leurs entreprifes , je prendrai » Aqs connoiiTances fort confiderables , » & qui me donneront de grandes lu- » mieres pour la Charge que je dois » faire ; ainfi il faut done que je tra- » vailleavec application non-feulement » a conncitre en general ce qui fait » mouvoir toute leur Marine , mais » auili je dois defcendre dans le detail , » &; tirer de ceux que je trouverai fur » les lieux , oude leurs OfHciers niemes » s'il fe peut , toutes les inftrud^ions » que je pourrai , pour mettre apres en » pratique dans la Marine duRoi ce que » je trouverai qu'ils feront mieux que » nous 5 & ce que la longue 6c conti- » nuelle experience qu'ils ont a la mer » leur a apprls. » Je conlidererai combien ilefl impor- » tant que je m'applique extraordinai- » rement pendant ce voyage , puifque » j'aurai pendant toute ma vie affaire » de ce que j'y apprendrai , & que je » pourrai par ce moyen me mettre en » etat de bien fervir le Roi, 6c de lui » paroitre bien informs dans les ren- fur Us Finances dc France, 7 1 » centres ou j'aurai a lui parler de la y> marine. » Pour cet effet je m'informerai foi- » gneulement , 6c ferai des Memoires » de ma main. » Du nombre des vaifTeaiix de guer- » re qu'ils ont dans leurs Ports 6c ^ la » mer. » De leurs noms. >> Leur port & la quantite de canons ; » s'ils mettent leurs fabords aufli ou » plus proche I'un de I'autre que nous. » La m.aniere dont ils les difpoient. » Combien de canons de fer ils met- » tent fur chaque bord , combien de » canons de fonte. » D'oii ils prennent leurs canons de » fer. » Le gabaris de leurs vaiffeaux. » La maniere de leurs conftrudions. » La difference qu'il y a entre leurs » vaiffeaux & les notres , afin de remar- » quer les defauts pour les eviter , 6c » chercher ce qu'ils ont de meilleur » pour le fuivre ; tacher d'avoir un de- M vis exaft de toute la conftru^tion du » vaiffeau , & de toutes les pieces qui » y entrent , depuis la quille jufqu'au » baton du pavilion ; voir de quelle » maniere ils chevillent les bordages ; 72 Recherchcs & Conjzderatlons » en quels lieux ils mettent dii fer ou » du bois ; de quel bois ils fe fervent. » Tacher de ((^avoir les ralfons qu'ils » ont pour la conftru6lion de leurs » vaiffeaux ; quels avantages ils tirent » de les faire plus a plate varangue » que nous , 6c quels defavantages il » y a ; les inconveniens qui nous arri- » veroient en cas de guerre d'avoir des » vaiffeaux plus tallies qu'eux , & qui » par confequent prennent plus d'eau. » Examiner s'ils fe fervent de gale- » ries ou non, & les raifons qu'ils ont » pour ne s'en point fervir. » Voir fi leurs vaifieaux font plus » charges d'oeuvres mortes , & plus 5> envolumes que les notres , ou s'ils » font plus fregates. » S^avoir I'opinion qu'ils ont de la » Marine de France ; en titer leurs fen- » timens tant fur les forces du Roi que » fur Iqs manieres de conilructions ; fur » h bonte des Officiers & des equipa- » ges, & generalement fur tout cequi » regarde notre Marine. » S9avoir le nombre des equipages » qu'ils mettent fur chaque vaiffeau* » Combien de matelots. 5> Combien de foldats. >> Combien d'Officiers mariniers. a Leurs noins» » Com* fur Ics Finances de France. 73 M Combien de hauts Officiers. » Si je pouvois troiiver quelque ha- » bile Capitaine ou bas Officier , il » faudroit tirer de liii : » Les noms de tons les Capitaines , >> Lieiitenans , &c.. » Lcur merite particulier & Teilime » qu'ils ont dans leur Corps. » Leurs fondionstant en guetequ'en paix , en gros tems & en caime. » Les fondions des OfTiciers mari- » niers , & comment ils ibnt difpoles V fur chaque bord , tant en gros tems » qu'en calme. >f Ce qu'ils obfervcnt pour la manoeu- >> vre du canon & du Pilotage , 5^ pour » toutesles autres manoeuvres du vaif- » feau. » Quels Officiers ils ontpourcela. » Les fondions des grands Officiers ^ » comme Amiraux , vice-Amiraux , » contre-Amiraux & Chefs d'Efcadre , » s'ils en ont. Enfin fjavoir generale- » ment toutesles fondions defdits Offi- » ciers depuis I'Amiraljufqu'auxMouf- » fes de chaque vaiiTeau. » S^avoirtout ce qu'ils obfervent de- » puis que la rouche du vailTcau efl » acheveepourle mater , Tagreer^Tar- » mer & lefter , le fortir des Ports , le Tome 11 h G 74 Rechcrchcs & Conjidcratlons » mettre en rade , le gouverner dans le » calme & dans ie gros terns , & dans » le tenis de combat. » Scavoir s'ils ont Majors & Aides- » Majors , & quelle efl leiir fondion, » Examiner & faire une defcription » exade de toutes les differentes lortes y> debatimens dont ils fe fervent dans » les Ports & dans la navigation , tant » pour la marchandife que pour la » guerre. » Obferver & faire dediner les ma- » chines dont ils fe fervent pour le cu- » rement de leurs Ports. » L'ordre qu'ils tiennent pour le de* » leftage , & les lieux deilines pour jet- » ter ledit leile. » Tous leurs oiivrages & digues pour » garantir leurs pays des inondations , » enfemble tous les ouvrages qui fe font » pour leurs Ports. » La maniere dont ils ont bati leurs » moles. » Comment ils ont mis leurs vaif- » feaux a couvert du vent ; faire faire » les dciiQim & la defcription , & voir » les effcts que chaque ouvrage a pro- » duit. » Comme la proprete d'un vaiiTeau » 6c le foin qu'on prend de le nettoyer fur Us Finances de France, 7 5 » eft extremement confiderable , & ca- » pabledeconferverleditvaifTeau beau* » coup plus long-tems ; il faiit obferver » ce qii'ils font pour tenir leurs vaii- »> feaux propres 6c en bon etat , com- » bien de fois ils le grattent & gou- » dronnent , combien de fois 6c com- » nient ils le calfatent. » La maniere dont ils carenent , & » s'ils ont des formes ou non. » Examiner avecune fortgrande ap- » plication tout ce qui fe paffe dans leurs M magafms , I'ordre qu'ils tiennent pour » I'entree & lafortie des marchandifes , » & la maniere dont elles font rangees. » Tout ce qui fe fait pour les conHruc- » tions 6c radoubs des vaifTeaux , de- » puis que la quilie eft pofee , jufqu'k » ce que le vaifleau foit k la mer ; com- >> ment ils achetent leurs bois, les lieux » d'ou ils les font venir , combien ils » en ont dans leurs magafms , comment » i's font ranges , toutes les machines » qa'ils ont pour la facilite de leur conf- » trudion & de leur radoub. » Sijavoir s'ils font leur conftrudion » k prix faits ou a journees. » Si k prix faits, combien ils donnent » de chaque vaifleau , foit en fournif- » fant le bois par eux , fc^it par le Char- w pentier, G ij 7-6 Rcchcrchcs & Conjidlratlons - » Si a journees , examiner bien par- M ticulierement de quelle forte les ou- » vriers travaillent , ^ quelle hcure ils » entrent & fortent des atteliers , qui » en tient les roles , qui les paye , le »prix de leur journee , & generale- » ment tout ce qui fe pratique pour la » bonne police , I'economie & le bon » menage, » Examiner la quantite & qualite » des marchandifes qui font dans les ^ magafins , comme fer, ancres, chan- » vres , goudrons , mats , canons de » fer & de fonte; en f^avoir les prix >> au jufte .; f^avoir d'oii & de quelle j> maniere ils les font venir pour les *> avoir ^ bon compte , & generale- » ment tout ce qui fe pratique pour » avoir le tout bon & h. bon prix. » II faut fcavoir aufli de quel fer ils >> fe fervent dans leurs iox^^s , & d'ou » ils le font venir- » Comment ils font travailler a leurs » ancres , ou a journee , ou a prix faits. » Savoir les prix faits &: les marches, » S'ils les font faire a journee , de com- » bi@n d'hommes ils fe fervent ponr fa- » briquer une ancre, de quatre , cinq , >> fix ouvriers , & combien de jour? on ^> y employe ; obferyant I'etat auqu^l fur Us Finances de Frame, 77 » font les pieces defdites ancres , fi les » pattes , verges & bras font en etat » qu'il n'y ait plus qu'a les joindre ; coni- » bien ils payent les ouvriers qui font » les memes ferremens. » Pour la Corderie , favoir d'oii ils » prennent les chanvres , & comment » ils le peignent , le filent & le commet- » tent, fi a journee ou a prix fails. » De quelle maniere ils le goudron- » nent , en filde carret ou en cordage. »L'utllite qu'on retire de le gouciron- » ner en fil de carret , eft que le goudron » penetre davantage; il fe fait au Havre » de cette maniere; mais d'un autre cote » il ne fue pas; &: il eft dangereux que » rhumidite reftant, il ne pourrilie ledit » cordage. » Obferver s'ils ont des prix faits , » fcavoir les prix faits avec les pou- » lieurs , menuiiiers , fculpteurs , lanter- » niers, & autres , ou s'ils travaillent a >> journee. » Examiner ce qui concerne la fonde- » rie des canons. » Obferver enfin en detail tout ce >> qui fe pratique dans tons les Arfenaux » de Marine , dans toutes les fondrioiis » & metiers qui en dependent , pour » profitcr , dans notre Marine , de kuir G iij jS Recherckes & Conjidlrations » longue experience , & de tons les » moyens qu'ils pratiqaent pour la di- » ligence, la bonte & reconomle. Savoir comment ils levent & payent » les equipages de chaque vaiiTeau ; fi » c'ell: devant ou apres ; de quelle ma- » niere les decomptes le font aux Equi- » pages ; combien on donne a chaque » matelot, a chaque foldat, 6c ^ cha- » que Officier m.arinier. » La Iblde des Officiers pour en faire w le rapport avec celle du Roi , & en n connoitre les differences. » Savoir pour cela les differences de >> leurs monnoies aux notres. >^ Examiner avec foin de quelle ma- » niere les vivres font fournis, fiparun » Munitionnaire ou par les Capitaines. » Le prix de chaque forte de vicluail- >> les ; de quelle forte la diflribution en >> eft faite, & la maniere dont toutes les ;> marchandifes font difpofees. » Savoir combien de gardiensils met- » tent a bord dans le Port , &: la police >> qui s'obferve pour la place defdits 5> vaiifeaux , & pour leur nettoyement. Quelqu'etendues que puiffent paroi- tre ces connoiffances a beaucoup de Lefteurs , ceux qui ont une idee jufte de la Marine 5 & de Tadminiftration de fur Ics Finances dc France, j(^ cette grande partie , feront bien eloi- gnes de les croire fuffifantes pour un Mi- niflre. II lui eft indifpenfable de con- noitre reducation des Officiers de Marine dans les pays oil elle eft la plus la brillante , 6c perfeftionner celle qu'on leur donne dans fon pays ; de re- flechir profondement fur les motifs de I'emulation , fur les expediens les plus propres a I'entretenir & a I'augmenter , parce qu'elle feule produira des hom- mes propres au commandement & aux grandes operations. Exempt de preju- ges il faut qu'il fgache en meme terns nourrir ceux qui font utiles au maintien des bonnes inftitutions , & modifier a propos leur application en faveur du fervice public. Ce feroit retrecir la fphere de cqs de- voirs que de s'en tenir a ces vues & k ces details. Sans Commerce &: fims Co- lonies , la Marine d'un Etat feroit tres- foible , & toute depenfe k cet egard fe- roit fuperflue. La confervation & I'a- grandiliement de ces deux parties font la matiere d'une infinite de combinai- fons politiques. La population des Colonies , leur culture , leur police civile & militaire , eomprennent*tous les details du Gou- G iiij So Recherches & Conjiderat'ions vernement : c'eft , pour ainfi-dire , le foin d'un Etat particulier , qu'il faut rendre heureux & floriiTant , parce qu'il fait partie du grand Empire , & qu'il accroitra fa profperite. Aufli les autres Nations qui pofledent des Colonies ont- elles un Confeil particulier pour leur adminiflration, parce qu'il eft, humai- nement parlant, impoflible qu'un feul homme rafTemble toutes les connoif- fances elTentielles a un bon gouverne- ment. La liberte , la protection , I'encoura- gcment de la Navigation, de laPeche^ & du Commerce , exigent une vigi- lance & peut-etre une ambition aufH etendue que fuivie , des principes furs- appliques avec condance & fermete. La moindre erreur, la plus legere negligence dans les combinaifonsqu'of- ixQ cette grande adminiftration , de- viennent, pour I'ordinaire , des coups funeftes a la puifTance maritime d'un Etat. De-la depend la fubfiftance & le nombre de cette siilice precieufe qui enrichit I'Etat pendant la paix , qui le defend pendant la guerre , & fans la- quelle les Arfenaux militaires ne font qu'un vain appareil. Lf s vues fur le Commerce 5c les Co* fur les Finances dt France. 8 1 lollies entrainent la connoiflance exafte & detaillee de tout ce qui concerne les memes parties dans les Etats voifins ; de ce qu'il efl pofHble d'entreprendre con- tre les ennemis de TEtat ; de I'efFet des penes qu'ils peuvent efTuyer ; des moyens les plus capables de s'aiTurer des fucces , ou de fe les preparer pen- dant la paix comme dans la guerre ; des deffeins qu'ils peuvent concevoir a leur tour ; des mefures qu'il convient a la prcvoyance de leur oppofer. Si a ces diverfes etudes , ^ des re- flexions fur la force des pofitions 6i I'e- tendue des refTources reciproques , on Be joignoit quelques meditations furies plus celebres expeditions maritimes , fur les manoeuvres , & les anions re- marquables des grands hommes de tout pays , fur leurs maximes dans le metier dela mer, & fur I'application qu'ils en ont faite , il feroit difficile d'etre affure qu'on a mis les hafards en fa faveur au« tant que le comporte la previlion hu- maine ; on diftingueroit mal les occa- fions ou la bonne conduite , la fineffe des mefures , quelquefois meme I'auda- ce , font capables de fuppleer aux for- ces reelles, de celles ou il feroit dange- rcux d'entreprendre fams la certitude Si Recherchcs & Conjidiratlons de reuffir. Dans tous les tems on a vu de grandes chofes manquer ou reuiTir par de petits moyens, & Toiibli des ex- periences pafiees reproduit de tems en tems ces fcenes extraordinaires. Avec tant de qualites acquifes on pourroit cependant ne pas fortir de la mediocrite fans cette chaleur de volon- te , & cette adivite de genie a laquelle rien ne peut fuppleer , & qui caraderi- foit particulierement M. Colbert* Ce ne feroit pas une moindre erreur d'imaginer qu'avec du zele , des no- tions generates & le fecours des fubal- ternes on parviendroit facilement a rem- plir fon objet. On nefcaiiroit trop repe- ter que le tems des etudes profondes eil pafie lorfque le tourbillon des affaires nous entraine par fa rapidite. Si Ton n'attend les principes que de Texpe- rience des cas particuliers , ces princi- pes s'etabiiront lentement , & les in- certitudes ou Ton tombera continuel- lement conduiront a i'indecifion dans les affaires, c'eff-^-dire , au plus grand des malheurs apres la perte de I'emu- iation parmi ceux qu'on gouverne. Le fecours fes fubalternes ne produit ja- mais cette reunion de viies , cette har- monic d'operations qui fait la force fur Us Finances dc France, S3 d'lme adminiflration adive Sc vigou- reufe. Ce fecours pent meme devenir dangereux des qii'ils le fentent nQCQ^" faire : la realite du pouvoir ne tarde pas k pafler entre leiirs mains : eiix-me- mes infpirent les ordres dont on leur commet rexecution ; fi les abus s'in- trodiiifent , I'aiitorite fe trouve forcee de les legitimer 6c de les juftifier. Une pareille ufurpation n*a prefque jamais produit que la confufion 3>i le defordre dans les affaires , & ime ligue decidee centre les gens de bien & les fujets eclai- res. M. Colbert, qui connoiflbit la nQce^^ fite de fe rendre capable d'eclaircr ceux qu'on employe , ajouta beaucoup de chofes k rinflrudion qu'on vient de lire. Chaque objet fut la matiere d'une infinite de memoires particuliers que lui envoyoit Ton fils. Celui-ci faiiit d'une maniere furprenante Iqs vues & i'efprit de Ion pere ; fe rendant habile dans les plus petits details ; allant lui- meme dans les Provinces qui pouvoient fournir abondamment des bois a la ma- rine , reconnoitre les facilites du tranf- port , la qualite des bois ; s'informant du prix fur les lieux , des frais de Tex- ploitation & du tranfport ; memes re- S4 Rcchcrches & Confidlr adorn cherches fur les maniifai^ures cle tout zo. qui entre dans rarmement A^% vaif- feaux ; enfin fur chacune des parties qui pouvoient le conduire a Tecono- mie. Si j'avois a travailler fur la Mari- ne , je quitterois avec peine ces beaux recueils , tous ecrits de la main de M. le Marquis de Seignelai : mais je me con- tente d'en avoir tire de quoi donner une idee de fes connoillances & dc fon tra- vail. M.Colbert, tant qu'il vecut, re- vit tout par lui-meme en ami , en pere , en Miniftre. Ses confidences les plus fe- cretes refpirent un amour & un ref- peft lingulier pour la perfonne du Roi, & pour fes connoifTances; un zele pour le Public 5 poar la juftice & la verite au - i^t^ws de I'eclat de tomes les gran- deurs. Mon objet ne me permettant pas de m'etendre davantage fur la Marine, je me borne a donner les titres principaux de rinflrudion qui regardoit le depar- tement de la Marine, lis ne renferment pas un feul mot qui ne foit important. » 1°. Le Roi veut toujours avoir en » mer , dans les Ports , & Arfenaux de » Marine cent vingt vailTeaux de guer- » re , f^avoir : fur Ics Finances de France. 85 g S g Si ON £3 O § •4-« C > o o Oh 3 O r^ 9 ^ "^ ^ ♦> o o Si ^ . Irt ^ «« tJ^ CQ ti. 48 H r travaille a perfedionner & maintenir » tous les etabliffemens qu'Elle a faits » dans fon Royaume. » 5^. Le Roi veut avoir de bons Of- » ficiers de Marine , & qu'ils foient fort » exerces. » 6°. Le Roi veut qu'il foit etabli » des Ecoles de Pilotage & de Cano- » niers dans les Ports. » 7"^. Le Roi veut achever I'enrole- » nient general de tous les matelots de » fon Royaume. » 8"". Le Roi veut que la Marine foit » reglee par des Ordonnances. » 9**. Le Roi veut que toutes les » Mers foient nettoyees de Pirates ; que » tous les Marchands foient efcortes , » favorifes & proteges dans leur Com-. » merce. fur Us Finances de France, 87 On ne peut fe difpenfer de rappor- ter ici les belles paroles fuivantes : » Cefi a quoi monfils doit s'appUqucr : » il faut quilfentz aujji vivcmcnt tons » Us defordrcs qui arrivcront dans U Com- » mer'cc , & toutes les pcrtes quefcrom les » Marchands y comme fi dies lui etoient » perfonmlles, » 10^. Le Roi veur qu'il foit fait line » defcription exade de toutes les C6- » tes 5 & qu'il foit toujours travaille » dans fes Ports a dreffer des Cartes » marines fur les rapports & les jour- » naux de fes VaiiTeaux de guerre. Les avantages que la France avoit retires de la franchife du Port de Mar- feille eclairerent le Miniftre fur les v^- ritables facilitcs qui donnent de I'adi- vit6 au Commerce. II fit rendre une Declaration qui peut etre regardee comme un des expediens des plus ha- biles qu'il ait employes , & qui nierite d' avoir place ici. Declaration du Roi pour CEtape ginirale dans les Villes Maritimes, « Louis , &c. L'application que >> nous continuons de donner au reta- » bliffcment & augmentation du Com- S8 Rechcrches & Conjidiratlons » merce de notte Royaume , nous fai- >> fant decoiivrir de terns en tems les » nouvelles graces que nous pouvons » accorder , pour parvenir a une fin » qui doit augmenter la fortune & I'a- » bondance de tous nos Sujets ; nous » avons trouve qu'outre celles que nous » avons accordees par nos Tarifs & De- » clarationdu mois deSeptembre 1664, » tant pour la diminution de tous nos » droits , que par Tetabliilement du >♦ tranfit & de I'entrepot , nous pou- » vions encore augmenter la commo- » dite des Negocians dans notreRoyau- » me 5 de quelques pays & Nations » qu'ils foient , en leur donnant la fa- » cilite de fe fervir de nos Ports , com- » me d'une etape generale pour y tp- » nirtoutes fortes demarchandifes, foit M pour les vendre a nos Sujets , foit » pour les tranfporter hors de notre » Royaume, en leur faifant reftituer les 5> droits d'entree qu'ils pourroient avoir » payes. A CES causes , de Tavis de » notre Confeil, & de notre certaine » fcience , pleine puiffance & autorite >♦ Royale , Nous avons ordonne & de- » clare par ces prefentes fignees de no- y> tre main , ordonnons , declarons , ^ » voulons & nous plait qu'i Tavenir^ | »5C fur tc$ Finances dc France, St) ^♦ & a comniencer du jour de Tenre^if- » trement &: publication du prefent Edit » en nos Cours des Aides de Paris & » Rouen, tous Marchands , tant nos 5, fujets qu'etrangers , qui feront entrer :,, des marchandifes dans nos Ports & ,, Villes maritimes, defquelles ils n'au- 5, ront point fait leur declaration, pour ,, jouir de I'entrepot porte par nofd. Let- j, trcs dc Declaration du mols de Sep- „temb. 1664, pourront pendant letenis „ des Baux de nos Fermes , 61 m\ an 5, apres I'expiration de chacun d'iceux , „ recharg:er lefdites marchandifes pour „ les tranfporter dans les pays etran- ,, gers , fans payer aucuns droits de 5, fortie : & en ce cas, Nous voulons^ 5, 8c entendons que nofdits Fermiers „ leur rendent & reflituent les droits ,, d'entree qu'ils juftifieront avoir payes. On a deja du remarquer qu'en 1664 I'entrepot avoit ete etabu dans quel- ques Ports pour les marchandifes du Royaume deftinees pour Tetvanger. Son ombre fubiifle encore aujourd'hm , ma is prefque fans utilite pour FEtat , parce que les termes ont ete fucceffivement reduits. Cette nouvelle operation etoit infinlment fupcrleure ; on en a d<'mon'-- tre plus haut I'importance 6c la necefa.- ftO B^ccherchcs & Conjidlrations te pour le Commerce du Nord. Si Ton re s'etoit pas depart! de ces grands prin- cipes apres la mort de M. Colbert , la France feroit depuis long-tems I'en- trepot du Commerce de I'Europe. La claufe qui fpecifie que les mar- chandifes etrangeres pourront fortir li- brement & avec reilitution des droits dans toute Tetendue du Bail dans le cours duquel elles feroient entrees, etoit relative £ la maniere dont les Fermes generales etoient alors adminiflrees. Pendant tout le miniftere de M. Col- bert , comme fous celui de M. de Sul- ly , elle s'adjugeoient reellement a Ten- chere publique, & les Compagnies n'e- toient compofees que de fujets utiles. La reflitution des droits d'entree d'un Bail a I'autre eut caufe trop d'embarras dans lecas d'un changement deCcmpa- gnie , & c'etoit un defaut confiderable dans cette operation : un entrepot doit ctre egalement libre dans tous les terns. II eft iurprenant qu'un Miniftre auili clairvoyant & aufii bien intentionne pour le Commerce , n'ait pas mis en regie , non pas les Fermes , mais les Traites ; car fans cela jamais le Legifla- teur n'efl le maitre de la fortune du Commerce de fon Etat. fur Ics Finances dc France. ^ t Un autre vice de la maniere dont cet entrepot etoit difpofe > c'etoit de mettre les Negocians en avances de groffes fommes pour le payement des droits , Sc dont Tinteret rencherifToit cvidemment les marchandifes. II fembleroit polTible d'eviter ces di- vers inconveniens dans retabliffement d'un entrepot general dans nos Ports. II eft inutile que cet entrepot dure plus de quinze mois ; ce terns fuffiroit pour les fpeculations , &c la regie du Fermier en feroit plus facile ; c'efl-a- dire , que Ton auroit quinze mois dans nos Ports pour entrepofer les marchan- difes qui fortent du Royaume , & quin- ze mois pour faire fortir celles qui vien- droient du dehors fans payer de droits. On donneroit {implement k I'arrivee cautioii du payement des droits , & le Negociant feroit oblige de reprefenter ces marchandifes toutes fois & quantes dans Tintervalle , fous peine du paye- ment quadruple des droits. Au bout des quinze moisrevolus, le droit feroit acquitte fous quelque pre- texte que la marchandife fe trouvat dans le Port. Les marchandifes etrangeres qui for- tiroient de la Ville pour entrer dans le Hi] 9 2 Recherches & Confederations Royaume , payeroient en fortant les droits auxquels elles font fonmifcs par les Tarifs : les marchandifes de France ioumifes a un droit de fortie le paye- roient lors de remharquement. Cct arrangement , fni-iplc dans fa for- me , ne porteroit aucun prejudice aiix Fermes, puifque tout ce qui efl foumis a des droits les pay^roit : il occafionneroit A^s fpeculations &: des reexportations qui ne fe font pas , & qui feroient infini- ment utiles a i'Etat : fur cet article , la Ferme ne perdroitquelafaculte d'excr- cer un droit qu'elle ne per^cit pas dans le fait , puifque fur le pied oil font les chofes 5 il eil impoilible de fpeculer fur les reexportations en France. Le Negociant n'avancant les droits que lors de la vente , feroit en etat avec- de moindres capitaux d'entretenir dans DOS Ports Tabondancs ^ts, raatieres pre- mieres , que nous fournit I'etranger ^ & des-lors de nous les procurer a meil- leur marche. A N N E E 1 67 1. Les HoUandois fe refolurent eniin a defendre Tentree des vins , eaux-de- yie y & manufaftures de France 3 fur le fur Ics Finances de Franu, 93 refiis que Ton fit de moderer le tarlf de 1667 en leur faveur. Cette demarche hardie etoit cependant moins impru- dente en ce moment qu'en aucun au- tre, lis fentoientque nous n'avions pas encore affez de Vaiffeaux pour faire nous-memes toute notre navigation : ils efpererent meme d'irriter la fierte d'un Monarque vi£lcrieux , & de I'a- mener de lui-meme a une guerre qui feroit certainement fatale a fes nou- veaux etabliflemens ; tandis que Tinte- ret des autres Puiffances de I'Europe a defendre leur Pays les raffuroit du co- te de la terre. Un Confeil qui fut re- jette eut fait cependant echouer toute leur politique ; & tel efl le prix du mo- ment qu'ils obtinrent enfin leurs deman- des d'un ennemi viclorieux ; mais fans prevenir les evenemens , tirons de cette lecon qu'ils nous ont donnee I'inftruc- tion qu'elle porte ; obfervons quelle fuperiorite un Peuple acquiert fur un autre , lorfqu'il s'eft empare de fon Commerce a£tif. C'eft dans le Com- merce meme de nos denrces que ces Republiquains , naturellement pacifi- ques , avolent puife aflez de force pour nous nuire & nous braver. 11 eil €» meme tems tres-vraifemblable que^^ 94 Rccherches & Conjideradons fi I'on n'en fiit point venu a line rup- ture aufli prompte , ils s'etoient porte cux-memes le coup fatal. M. Colbert avoit pris des mefures avec les Ham- bourgeois, les Danois, les Suedois , pour animer leur navigation dans nos PcM-ts ; & les fecours qu'il donnoit a la notre etoient de nature a caufer en cinq a fix ans aux Hollandois , par des nioyens paifibles , un repentir eternel de leur demarche. . On ne rend point affez de juftice a ra£livite de notre Nation ; ellen'abe- foin que d'etre aidee ; le Commerce de i'Amerique en fournit une bonne preu- ve. M. Colbert reduifit cette annee les droits d'entree fur les denrees de I'A- jnerique a trois pour cent , & exempta de droits de fortie toutes celles qui y feroient portees. On comptoit deja cent Vairfeaux dans nos Ports dcflines a ce feul Commerce, depuis deux ans qu'il etoit libre. Les Hollandois cepen- dant continuoient d'y porter beaucoup de marchandifes , & entr'autres des boeufs fales que nous ne pouvions four- nir a aufli bon marche qu'eux. Des le mois de Janvier de I'annee fuivante , cette branche de Commerce leur fut cnlevee pour toujours au moyen d'une fur hs Finances dc France, 9 5 gratification de quatre livres par baril de boeuf fortant de nos Ports pour les Colonies. Plus de la moitie de la France fut revoltee contre cette prodigalite pretendue ; on crioit a la diffipation des Finances : il eiit bien mieux valu, di- foit-on , diminuer les entrees , donner des penfions aux Officiers, augmenter les gages des Charges de Robe. Le Peu- j^le jouoit Ion role ; le Miniflre ^t le fien , il reuflit. On doit cependant ob- ferver que le Roi ne payoit que la moi- tie de cette gratification , & qu'il fit payer i'autre par la Compagnie fur les droits qu'elles'etoitreferves. Ces depenfes extraordinaires n'e- toient pas les feules du Gou vernement : les Fortifications de Dunkerque com- mencees en 1665 , furent achevees ; I'Hotel des Invalides fut commence ; des lemons publiques de Chirurgie & de Pharmacie furent etablies au Jardin Royal ; une Academie d'Archite£):ure fut fondee ; les autres depenfes en ba- timens continuoient toujou^-s. II paroir qu'en cette annee les impo- fitions montoient a cent quatre millions cinq cent vingt - deux mille fix cent trente-une livres , y compris le don gra- tuit du Clerge de deux millions deux C)6 Rcchcrches & Conjidiratlons Cent mille livres accorde I'annee pfe- cedente , mais que la recette ne poii- voit etre evaluee qu'a foixante-dix-fept millions fix cent quarante-huit mille neuf cent onze livres ^ les charges 6c diminutions deduites. II falloit prele- ver quatre millions qui reftoient a rem- placer fur le manque de fonds de Tan- nee 1670, & les depenfes du Gouvcr- nement qui fuivant le projet montoient a foixante-quatre millions hu:t cent qua- tre-vingt deux mille livres , y compris trois millions deftines anx rembourfe- mens ; refloient par confequent en epar- gne huit millions fept cent loixante- fix mille neuf cent onze livres. Mais les preparatifs de la guerre tant au dedans qu'au dehors , avec diverfes augmentations fur les Batimens & en comptans cntre les mains du Roi , for- merent une augmentation de dix mil- lions huit cent cinqnante-un mille fix cent vingt-fept livres fur la depenfe ; ainii il fallut rejetter fur la recette de 1672 la fomme de deux millions qua- tre- vingt-quatre mille fept cent feize livres. Pour remplir cette fom.me & pour- voir aux depenfes extraordinaires que ia guerre alloit occalionner , on eut re- cours fur Us Finances dc France] <^j €onrs a divers expediens. Le Roi retira les poftes etrangeres qu'il avoit abandonnees a M. de Louvois (somme line gratification, & M. Colbert les afterma pour liv. trols ans 2700000 La creation de douze Subili- tiits du Procureiir General du Grand- Confeil valut ..... 60000 Les Officiers des Greniers a fel furent reduits du nombre de tes de Montpellier 300C00 Idem par la Cour des Mon- noyes looooo Idem par le Parlement de Metz 200000 Pour les Survivances de Se- cretaire du Roi , ii fut porte au Trefor Royal 1600000 . Total, ..... 14328366 D'ailleurs partie de ces fonds ne ren- Tomi III. page loi. 11. Table. PROJET DES DEFENSES DE L'ETAT, fuivant k Reglemem fait par k Roi a Dunkerque au mois de Mai 1 67 1 J pour I' Annie \6yi, Maifons Royales Syoooooliv. Extraordinaire 4 caufe de I'equipage d'armee 300000 ^"P" 1000000 Traues en Allemagne 2468000 ^"S'""'= 3000000 "^, ^^ ■ liooooo Ambaflades 400000 Comptant es mains dii Roi ^.^oooo ■ La BaftiUe ,, looooo Menus Dons & Voyages 5ooo„„ Depenfes extraordinaires ^oooo„„ Marine Galeres. . . 7°°°°°° _ .. . 1500000 fortifications du dedans du Royaume 800000 Ligues SuiiTes . . . /-, „. 200000 Commerce & Manufaftures , ^^ Canal de Jonftion Ouvrages pubUcs ^°°°°° Pav^deParis '.'.'.'.'.'.'.'.'.." \ZZl Rembourfemens .... Bitimens '.'.'.'.'.'.'.'.'.' ^°°°°° ExtraordinairedesGuerres.Artillerie'&Fortifications i^ZlTo Gratifications aux Officiers d'armees ,„„„„ ■ Pain de munition '°°°°° 4000000 ^°'*' 7^;;^^. ETAT DES REVENUS D E 1671. Fermes unies 197 11 548 Gabelles tie Lyonnois 1166116 /iem de Provence & Dauphine 1508711 Wot de Languedoc & Roufiillon 150118} Recette generale de Melz 150000 /. tra cju'en 1673, 1674, &: 1675. ^" liqiiida auiTi les alienations fur les ga- belles de Provence , Dauphlne & Lyon- nois : le rembourfementen fut regie cii fix pay emens d'annee en annee , le fonds employe fur les etats avec I'lnteret au denier dix- huit* Annee 1671. Cette annde les revenus etoient de foixante-quinze millions cinq cent foi- xante-dix-neuf mille cent cinquantc- quatre livres , quatorze fols &: onze de- niers , charges deduites , fuivant le de-# tail. Le projet de depenfe montolt a 'foixante-onze millions trois cent trente- neuf mille vingt livres. II fut depenfe de plus que dans le pro- jet trois millions trois cent huit mille quinze livres. Les appointemens dii Confeil & penfions de fix millions deux cent trente-deux mille livres n'y etoient point compris ; ainfi il falloit confom- mer fur 1673 lafommede cinq millions deux cent quatre-vingt dix-neuf mille huit cent quatre-vingt onze livres. M. Colbert defxroit que le projet de depenfes fut plus fort fur certains arti- clc'j; voici fes obfervations. liij 101 Rcchrches & Confidlrations « La Marine peutetre confidereeroiis 9> trois points de vue. Pour la feule » guerre defeniive, on pent fe conten- » ter d'une depenfe de quatre iniliions. » Pour maintenir le Commerce , Tenle- 5> vement de nos denrees qui ne pent V plus etre fait par les etrangers ; pour $> conferver le Commerce de la Medi- » terranee & i'otcr meme aux Hollan- » dois 5 pour maintenir les Colonies , M on ne peut depenfer moins de fept » millions. » Pour foutenir la Compagnie des ») IndesOrientales , ilfautdepenler huit » millions ; elle ne peut fubfiiler fans »> des fecours d'argent & fans une Efca- » dre dans les Indes ; ainfi il convient 5> de deiliner au Commerce cinq cent » mille livres. » II feroit neceffaire de rembourfer » au moins neuf cent mille livres aux » Officiers fupprimes; leurs gages mon- ♦» tent environ a trois cent mille livres ; » fi Ton eft oblige d'avoir recours au » credit, ceretranchement feroit beau- » coup de tort. » II n'y a plus que le Roi en France » qui fafie travailler les Sculpteurs , » Peintres , & autres ouvriers habiles : i* fi Sa Majefte ne les occupe , ils iron.t fur Us Fmances dc France, 103 >> chercher ailleurs de quo! gagner leur » vie. » II faut mettre le Louvre en etat de »ne pas perir, fermer les TLiileries, » couvrir TObfervatoire. » Si les Recettes ne fuffifent pas , les » feuls moyens de les augmeiiter , font ; » Les emprunts. » Les augmentations d'impofition. » Les alienations. » Ce font les trois moyens dont on » s'eft fervi par le paffe. » Les emprunts ne peuvent etre au- » deli de trois a quatre millions au de- » nier dix-huit , quelque chofe que Ton » fafTe. Les raifons font fondces fur ce » qui s'eft fait avant & depuis Tadmi- » niftration du Roi. » II faut obferver i I'egard des impo- » fitions , que le Roi tire plus dcs Pro- » vinces i prefent que les Tallies font » reduites a trente-trois millions , que »ronn'entiroiten i658qu'ellesetoient » a cinquante-iix millions ; neanmoins » elles peuvent etre augmentees d'un » million en cette annee 1672 pour les » Etapes , 6c d'un autre million en » 1675. » Quant aux alienations , le Roi a V retire tout 6c eft en poiTeiTion de qua- I iiij 104 RicJurches & Conjidlratloni » tre millions de revenus, foit en Gref- » fes , ibit en Domaines que Ton pent » aliener ; on en retirera quarante mil- » lions fur le pied du denier dix ^>. Ces reflexions prouvent que le credit ^toit encore altere , Sc peut-etre auiTi qu'on n'en connoifToit pas encore bien i'ufage. Car au lieu de propofer une alienation perpetuelle de quatre mil- lions de rente du Domaine pour qua- rante millions , dans le defTein de reve- nir un jour contre ce mauvais marche ; n'eut-ii pas mieux valu les aliener pour quinze a feize ans , &: n'en retirer que trente millions ? On n'eiit pas trouve d'acquereur , dira-t-on ; cela git en fait : mais I'experience juftifie qu'en fuppo- fant de I'exaftitude dans le Miniftre , les fonds fe trouvent d'autant plus facile- ment , que les conditions font moins onereufes au Prince. L'afTurance du payement efl plus grande : tel eil le reilbrt du credit. II eil a propot de remarquer que M. Colbert commen9oit toujours par de- duire les charges avant de former fes etats de recette ; methode eflentielle a I'ordre , a Fexaditude des payemens , au maintien du credit , & dont Toubli a toujours etefunefle. Lesprojets qu'on fur hs Finances dc France. 105 Verra dans cet ouvrage , n'etoient que des efqtiifTes preparees pour le travail du Roi ; mais le Miniftre les meditoit auparavant dans le plus grand detail.. On ne doit pas oublier que depiiis Tannee 1671, Icrfqu'il efi: parle des etats de recette , on fuit ce qui a ete trouve ecrit de la main de M. Colbert. Les etats precedens font pris dans d'au- tres fources ; & comme elles ne font pas tou jours conformes depuis 1671 aux details ecrits par le Miniflre meme, on les a abandonnees. A examiner les chofes de pres , cependant les produitf fe trouvent a-peu-pres les memes , par- ce que M. Colbert faifoit etat a part des fonds extraordinaires , meme de ceux qui entroient a droiture au Trefoif Royal. A N N E E s 1673 , 1^74 , 1675 > 1676 , 1677, 1678. L'Hiftoire des Finances n'a plus i nous prefenter que des affaires extraor- dinaires , qui ne font pas toutes heu- reufes. L'une des premieres fut untraite de quatorze millions, qui comprenoit les parties fuivantes. 1°. L'alienation de neuf cent mills io6 Rccherches & Conjldlradons cent mille livres de rentes Iiv. fur les petits Domaines. . looooood 2^. La creation de deux Offices de Receveurs 6i de deux Controleurs des Do- maines dans chaque Gene- raiite 600000 3*^. Les taxes fur les mai- fons baties hers de I'encein- te de Paris , lixees en 1638. 30C00© 4°. La vente des mate- riaux de la halle aux Draps & aux Toiles , & de toutes les echoppes , boutiques , places appartenant an Roi dans la nouvelle enceinte de Paris , & auffi de la per- miffion de batir aux pro- prietaires des places dans la nouvelle enceinte 130000® 5°. La confirmation du privilege des roturiers ha- bitans dans les Villes Tran- ches , pofTedant des Fiefs moyennant deux annees de revenu. 1410000 6°. La confirmation des proprietaires du Domaine aliene par Charles IX . . . 800000 Total 14420000 fur Us Finances dc France, 107 Siir les qiiatorze millions convenus avec les Traitans, ilsobtinrent la remi- fe d*un fixieme ; en outre il leur fut ac- corde de faire payer a leur profit le fbu pour livre des adjudications par les ac- quereurs ; & les deux fols pour livre lur les taxes qui feroient reglees au Confeil par les taxes. II eft difficile de concevoir comment au commencement d'une guerre on fe determinoit a ac- corder de pareilles conditions^ La remife valoit feule aux liv. Traitans .^ ^333333: pour laquelle on leur donna line Ordonnance de comp- tant. lis avoient de benefice fur les quatorze millions, fuivant revaluation de M. Colbert , 42000a Le fou pour livre fur dix millions 50000a Les deux fols pour livre fur quatre millions 400000 Total ...... 3^5333^ fur onze millions fix cent foixante-fix mille fix cent foixante-fept livres que le Roi retiroit : encore ne faifoient-ils comptant qu'un payement detroisniil- IOj Recherches & Confidcrations Ho IS , & le furplus en dix payemens de irois niois en trois mois, a compter du jour de renregiftrement de I'Edit. Tel eft Teffet ordinaire des trait es extraor- dinaires. II eft vrai qii'aii moyen des trois millions comptant , le Roi retiroit im gros revenu du reftant des Greffes : fur le rembourfement de ceux de Paris feulement evaliies a fept cent quatre mille livres , il gagnoit en gages vingt- fept mille livres , & iin revenu de deux cent trente-fix mille livres ; de facoa qu'en les alienant de nouveau , il iui rentroit en ftis un million fept cent trente-deux mille livres. On crea en- core des Offices de Grefliers Confer- vateurs des hypotheques , de Grefliers des arbitrages , Syndicats & direction des creanciers dans toutes les Jurifdi- £lions Roy a les. Cette affaire fut mife en parti pour cinq millions a la ftmple remife du fixieme , aux conditions de payer fix cent mille livres comptant , & le refte en fix payemens egaux de trois mois en trois mois , a commencer du jour de I'enregiftrement. II fut cree vingt- quatre Offices de vendeurs de volaille , gibier , oeufs , &:c. c\ Paris , pour aclieter les denrees des Marcliands forains a leurs rilques. fur ies Finances dc Frajicc, 109 ^ s'en rembourfer lur Ies acheteurs a la dedu£lion d'un fol pour livre. II etoit difficile d'imaginer un expedient de Fi- nance moins favorable a rAgriculture ; car detriilre la concurrence des ache- teurs , c'eft nuire aux vendeurs : d'un autre cote , qui peut repondre au Pu- blic que ces Officiers revendcurs fe con- tentent da fol pour livre qui leur eft accorde ? Enfin pourquoi arriver a foa but par un chemin fi difficile , tandis qu'on pouvoit percevoir ce fol pour li- vre aux entrees ? II valoit inille fois niieux impofer deux fols pour livre , en aliener un pour un tcms limite , & avcc I'autre faire annuellement le payeinent foit des interets , foit du capital. Le Peu- ple eft sur alors de ne payer que pen^ dant le terns du befoin ; Ies revenus de TEtat ne fe trouvent point engages pen- dant dc longues annees de paix , L Ecrivains a la Peau, net ,..,.,.... . 833334 25600004 25^00004 20O00OO looooa 50000 200000 far Us Finances dc France, 1 1 1 De I'autre part... 20. Offices : liberation de TEtat efl efientielle , & lent les foulager que d'y dciliner un laiTager, meme pendant le courad'ime raiibn d'line paix,. furlesobjetsdede- penfes les moins preffes • • • Impofitions extraordinaires . . ■ 80000000 Alafindel'anneeempruntpar Annuites a fix ans de terme a cinq pour cent par an . . . ._ Seconde annie de guerre. (Economies comme ci-delTus... Qu'il refte i dlfpofer fur les Im- pofitions extraordinaires Ala finde Tannee emprunt par annuites comme ci-deffus . . ■ 48000000 Troljitme armee de guerre. (Economies looooooo Qu'il refte i difpofer fur les Im- pofitions extraordinaires. . . 61400000 71400000 A la fin de I'annde emprunt par annuites comme ci-deflfus . . ^7600000 Qudtrieme annee de guerre. (Economies 1 0000000 (Ju'il refte i difpofer fur les Im- pofitions extraordinaires. . ■ ;oS8oooo 60880000 A la fin de Tannee emprunt par annuites comme ci-deflus . . . 69110000 130000000 Cinquieme annU de guerre. (Economies 10000000 Qu'il refte i difpofer fur les Im- pofitions extraordinaires. . . 37056000 47056000 A la fin de Fannie emprunt par annuites de mcme 81944 000 130000000 S'lxieme Mnnee de guerre. (Economies lOoooooo Qu'il refte ^ difpofer fur les Im- pofitions extraordinaires . . . 20467100 50467: A la fin de I'annee emprunt par annuites de mcme 99531800 Payemtnt annuel a fa'tre fur U. Uiites pour U rembourftmint 30O annuites de looo 1. cha , qui recevront cinq couponi ol. & undergo 1. c'eft-^. dire que Ics cinq premiers paye feront de 8000000 liv. & li dernier pour folde de 7200000 1. que les cinq premiers paye s feront de ' '" ° ' dernier pou 'oldedeS 57600 annuites de 1000 1. c ne , qui recevront cinq coup looliv.&undeiSoI.c'eli e que les cinq premiers paye- :ns feront de 11520000 1. & Ic dernier pour folde de io368< a-dire que les cmq premiers paye^ mens Icront de 13824000117. 5; le dernier pour folde de 1 144 1 600 nq coupo a-dire que les cinq premiers payt mens Icront de 16588800 1. & 1 dernier pour folde de 14919920 c'eft-i-dire que les c payemens feront de & le dernier pour : Ce Tableau a infi a la fin de uxPeuples neu e riJdigL^ pc liUions fur reillc fommc. nuites feroieni !Cgnerredefix annees; ipofitions extraordinai- ;s premieres : ndslibredeh re annee depaix,les &laifleroicn liUionsi rcftcroicnt i confervcr en fonds exiraordi nvlron foixantc-onie millions, aticndu que le dernier cou- lOnde chaquc annuitc eft toujours le plus foible. Dans la fcconde anncc dc paix,lcs fecondes annuities 'etejgnant lajfieroient un fonds libre de neuf millions fix ent mlUe Uv. reftcroient i confcrver en fonds extra- irdinaires foixante un millions. Dans la trolfieme annee de paix, leslroifiemes annuites 'eteignant laifferoient un foncfs libre de onze millions cinq Dans 1 e dc paix, les quatriemcs annui- tes s'cteignanl laifferoient un huit cent vingt-quatrc mille li fonds extraordinaires trcnte-I Dans la cinquicmc annee nuitis s'cteignant laifieroient un fonds libre de leize mil lions cinq cent quatrcvingt-huit mille huit cent liv. refte roit %. confcrver pour la fixieme annee un fonds extraoi dinairededix-huit millions pour folde. Ainfi fix ans apre la guerre il nc refteroit fucccflivement ni trace d'cmprunt r trace d'impofition. Avec la nieme fomme d'impofitions, en faifant dcs em pnints perpciutis an lieu de 397196S00 liv. il ne laudro erets, 468692214117. dont rembourfc emprunter que 170076711 Uv. Mais I'Etat fe trouverolt charee 4 perpetuite de plus de treize millions , & par con- fequent les impofitions leroient accrues d'autant & les ref- fources de I'Etat cptiifees dc la mcmc iommc , ^-moins qu A la paix on ne deftlnat une impofitlon de cinquante-quatre millions environ pendant fix annees pour Ic rembourfe- ment de cette dctte. L'operation rcviendrolt au mcme quant i la libL-ration de I'Etat, mais elle ne feroit pas ft ccr- lainemcnt faitc que lorfquc reng;igement eft formcllcmcnt contraac ; clle ne feroit pas fi commode au Public , parce qu'il convicnt toujours aux preteutsde connoiire le terme 6c I'arrangement des liquidations ; elle feroit moins con- forme aux principes du credit pubfic , parce que la dc- mande feroit trop forte ^-la-fois, & qu'au contraire les rembourfcmens annuels font mouvoir I'argent , le icndcnt pIuscomnuin,&fouiiennent la confiance. Enhn il paroit plus naturel que le fardeau des Penples diminue d\innce en annee ; rexaftiiude qu'il cprouve dans la premiere le confole d'avance de la durde des termcs qui reftent i cxpircr. Mais fi, fous prctcxte de menager le Pcupic pendant line (;ucrrc, au licit de quatre-vingt-dix millions de tonds C-, iK, j.i :: _ , . I i;\:ii faifoil que cinquante , & qu'on d , . . , . , lie I'Ecat dcviendroit impoflibIe,& qi. I . ■ . , . ! I i.iiL il faudroit augraenter k perpituilc It. i,.,;,..>-,ac |.iu. jLMugt-fixmiUlons. Ce Tableau iigurc a paru proprc k fairc coimoiire aux Peuples combien la liberation de I'Etat eft cflentielle, & que c'cft veritablement les foulager que d'y deftiner un fonds d'impofition palTager, memc pendant le cours d'une guerre j ^ plus forte railon d'une paix. fur Us Finances dc France^, 119 guerre peuvent etre fuppleees par I'ex- tindion des premiers emprunts , qui laifferoient de nouveaux fonds libres , & a toiite extremite par des engage- mens plus longs , ou par de nouveaux moyens de credit plus avantageux au Public , tels que les annuites viageres , par exemple , qui ont ete propofees dans le II. volume fous I'annee 1653, Le II Novembre 1675 , la fubven- tion annuelle du Clerge de douze cent quatre-vingt-douze mille neuf cent fix livres treize fols neuf deniers , fut re- nouvellee pour dix ans. Le Clerge y jolgnit un don gratuit de quatre mil- lions , qui ne forma pas un fecours bien prompt. Sur cette fomme, deux mil- lions quatre cent mille livres furent im- pofes fur tous les Beneficiers pour etre payes en quatre termes jufqu'a la fin de I'annee 1677. La fomme de quatorze cent mille livres a prendre fur les Offi- ciers des decimes par forme d'augmen- tation de Finance ; fjavoir un million foixante - feize mille livres payable ea quatre termes jufqu'a la fin de I'annee 1677; la fomme de trois cent vingt- quatre mille livres du fonds des gages du terme de Fevrier ; quatre cent mille Jivres fur les detenteurs des biens alie- 130 Recherches & Conjidirations nes par \qs Ecclefiaftiques ; trois cent millelivres a prendre fur les debets des Payeiirs & Receveurs des rentes da Clerge. Pour donner une idee des depenfes de cette guerre & de la proportion des revenus avec les depenfes , on a cru devoir mettre fous les yeux ce qui a ete raflemble de divers etats depuis 1 67 1. La depenfe excede la recette connue de vingt-cing millions neuf cent trente- neuf mille cinq cent quarante livres ; mais il avoit ete confomme fur les an- ri/ees fuiv antes vingt-deux millions. Il etoit du quelques reftes a compte de diverfes fournitures. II etolt du audi des inrerets aux gens d'affaires , par le moyen defquels on avoit fait face aux divers engagemens. Avec un fonds d'impofition extraor- dinaire de douze millions fur les riches feulement , tel qu'une capitati©n , ou le vingtieme des biens - fonds , ou quel- ques droits fur les confommations de la Capitale , & principalementfur celles de luxe , M. Colbert auroit pii par des annuites k cinq pour cent fe procurer les cent cinquante millions dont il avoit befoin , fans employer toutes les affai- Cur les Finances de France] 1 3 1 aordinaires dont on a vu la lifte y lupart contraires aux bons prin- .^^ i7;«on^p.c Onatre on cinq ans 1676 76969 J • ' ' • . . 105604667 1678 Total ( Affaires t. naires ] 80 I 69 I 079 ETAT DES RECETTES ET DEFENSES, depuis i6yi jufqu'en 1678. 167Z 1673 1674 1675 1676 1677 1678 Revenus. i;y r Projet de depenfe 64881000 liy, 77648911 -^ Manque de fonds de 1670 4000000 > 79735617 l_ Augmentation de depenfe 1085 1617 j r Projet de Depenfe 75695646 ^ Projet de Depenfe \ Augmentation . . 80859135 i"P'-°i"'''= Depenfe [, Augmentation . . 78456448 r Projet de Depenfe 77764377 \ Augmentation . . f Projet de Depenfe |_ Augmentation . . 80050919 /P''°i"''= Depenfe [_ Augmentation . . 80691534 Total 616747x34 p Affaires extraordi- ^ . naires 149004305 J 7i5?90io'l 808^5035 9540015 J 91064000 1 . / 107464000 1 5400000 J 91131000 1 .7068171 J •°9^°°'7' 91451000 1 ( 101451000 loooooooj 9780 106676969 97631000 1 ,„ „ , 1 106805 10 13048510 J ' 105604667 775751539 'iv 801691C fur Ics Finances de France', 1 3 1 res extraordinaires donton a vu lalifte^ & la plupart contraires aux bons prin- cipes des Finances. Quatre ou cinq ans apres, I'Etat eut ete parfaitement libere, & le Public eut en effet moins paye , puifque les Traitans n'eufTent contri- bue en rien k fecourir TEtat. II faut convenir cependant qu'il n'en fut pas le maitre , & que M. de Louvois avec le Premier Prefident du Parlement de Paris engagerent le Roi a preferer les emprunts a rimpofition. En 1674, M. Colbert avoit etabli line caiffe des emprunts au Bureau des Fermes unies , a iaquelle les particu-» culiers pouvoient porter leur argent, avec faculte de le retirer a leur vo- lonte avec I'interet an denier vingt, Le Trefor Royal etoit encore debiteur envers cette cailFe de quatorze millions cent quatre- vingt-treize mille deux cent quatre -vingt dix-huit livres dix-huit fols. On fera furpris fans doute de voir ainfi la recette exceder la depenfe; mais il faut obferver que des I'annee 1678, lorfque Ton vit les affaires de I'Europe prendre une tournure favorable a la Paix , M. Colbert fongea a retirer les alienations & a rembourfer les rentes. 132 Rccherches & Conjidcrations II reiloit de celles qu'on appelloit peti- tes tallies pour la fomme de quinze cent quatre-vingt-fix millefept cent quatre- vingt-cinq liv. Les diverges reductions qu'elles avoient efTuyees les avoient tel- lement decriees, que leur prix courant avoit toujours ete au-defTous du denier dix. Ellesfurent rembourfeesfur ce pied en 1678 5 moyennant quinze millions huit cent foixante-fept mille huit cent cinquante livres; ainli a la £nde cette annee il ne refloit plus d'anciennes rentes que Avec les trois mil- lions crees depuis . . . 8407419 II 5 Le Minlflre ne comptoit pas en ref- ter la ; & des que la Paix fut afliiree , il fit tous fes efforts , foit pour rentrer dans les alienations que la neceffite lui avoit arrachees , foit pour rembour- fer les trois millions de rentes creees au denier quatorze. Quelques efforts qu'il eut faits pour les placer plus avan- tageufement , le fouvenir du paffe avoit repandu des impreffions trop facheufes dans les efprits. Une demarche peu adroite qu'il fit les renouvella encore. li a ete remarque que les rentes appel^ Hv. f. d. 5407419 II 5 3000000 fur Us Finances dc France, 133 lees petites tallies n'avoient prefque des leur origine ete payees que d'un ou deux quartiers par an ; mais plufieurs proprietaires, par intelligence avec les Payeurs , s'etoient fait avancer la to- talite. En 1658 , on ordonna la recher- che de ceux qui avoient ainfi re^u a bureau non ouvert ; elle continua pen- dant pres de douze ans , & les reftitu- tlons porterent le trouble dans une in- finite de families. En 1674, M. Colbert fit rendre un Arret par lequel le Roi dechargeoit de toute pourfuite ceux qui pouvoient fe trouver redevables. Cette graced contretems, & I'annonce d'une liquidation des rentes appellees petites tailles , reveillerent les allarmes , & la defiance s'etendit fur les autres par- ties. Cependant, pour vendre les rentes Bouvelles , on eut recours pour la pre- miere fois a I'expedient le plus funefle peut etre qu'on ait jamais employe dans lesFmances. On invita les Etrangers a acheter ces efFets , & depuis cette ann^e la France eft devenue annuellement leur redevable de plufieurs millions. Ce ne fut pas le feul moyen qui fut fourni aux Etrangers de faire fortir no- $re argent. On fabriqua par traite des 'l 3 4 RcchcrcJus & Conjidirations pieces de quatre fols , au titre de dix deniers de fin , a la taille de cent cin- quante au marc , ce qui faifoit monter la valeur du marc d'argent a trente li- vres , quoique le marc des autres efpe- ces d'argent , a onze deniers de fin , ne flit qu'a vingt - fix livres quinze fols, AufTi le billonage fut-il tres-confidera- ble , &: le nombre des pieces de quatre fols fi grand dans le Commerce , que les payemens fe faifoient avec elles. Les trois millions de rentes entr'autres avoient ete payes de cette maniere par les acquereurs. Cette annee la valeur en fut reduite a trois lols fix deniers. Le defordre ceffa. Pour reparer en quelque fa9on les efFets de la furprife qui lui avoit ete faite , M. Colbert fit I'operation de monnoye la plus habile qui ait ete faite en France. On voyoit dans le Com- merce quantite de Pifloles d'Efpagne & d'Ecus d'or legers. On decria routes ces efpeces , &: meme toutes les mon- noyes etrangeres ; il fut ordonne de les porter aux Moanoyes , oil elles furent converties en louis d'or & en louis d'argent comme on parloit alors , aux frais du Roi ; de fa9on que les proprie- laires re^urent en poids &: en titre la fur Us Finances dc France, 13^ meme lomme qu'ils avoient portee. L'experience , dit Le Bianc , a fait voir qu'on n'a jamais rien pratique en Fran- ce de plus utile pour y attirer abondam- meiit I'or & Targent. Au moyen de I'augmentation du prix des matieres ap- portees aux Monnoies , le marc d'ar- gent jfin valut trente livres lept fols deux deniers , au lieu de vingt- ^oxio^xxon fe determina a une reforme des monnoies qui devint la fource de nos miferes. Cell ici I'occalion naturelle de par- ler du changement qu'avoit fait M, Colbert dans Tadminiftration des mon- noies. Avant lui , les monnoies etoient af- fermees , foit chacune en particulier aux Orfevres , Negocians , Banquiers ou autres qui fe prefentoient ; ou par un bail general , ce qui etoit plus re- cent. Le bail fe faifoit ^ fait fort, c'eft-a- 136 Rcchtrches & Conjiderations dire, aim benefice convenu fur iinnom- bre de marcs qui devoient etre fabriques dans le cours du bail ; ou a fort fait , c'eil-a-dire , moyennant ime fomme iixQ & independante de la quantite des marcs fabriques. On convenoit du titre , du polds des cfpeces , & de la valeur numeraire qu'el- les auroient dans le public : mais I'im- perfe£i:ion de I'art ne permettant pas de fabriquer les efpeces a un titre & ^ un poids precis , Ton accorda des remedes , c'efl-a-dire , qu'on permit de fabriquer les efpeces un pen au-deflbus du titre & du poids auquel elles etoient annon- cees ; mais a condition cependant de ne pouvoir exceder ces termes de grace ; & les Officiers prepofes y veilloient , comme aujourd'hui , fous I'autorite de la Cour des Monnoies. Cqs remedes pris ainii en dedans formoient un be- nefice que le Roi fe refervoit pour I'or- dinaire : mais fous une infinite de pre- textes differens , ces Fermiers trou- voient le fecret de s^Qn faire accorder la remife ; & on prit enfin le parti de comprendre les remedes dans le prix de la Ferme ; c'etoit alors un autre in- convenient , parce que les Fermiers em- ployoient alors les remedes en entier , fur les Finances de Franc:, 137 &£ ces remedes font toujours un afioi- bliffement de la monnoie. On eut epar- gne bien des pertes a I'Etat , & des af- foiblifTemens fucceffifs au Public , fi les remedes euflent ete pris en dehors , c'eil-a- dire, qu'on eut oblige foit les Fermiers , foit depuis les Regiffeurs y k fabriquer de maniere que la monnoie ne fut jamais au-deffous du titre ni du poids annonce, fous peine de la vie, lauf a la faire meilleure de quelque le- gere difference , pour ne jamais fe trou- ver en rifque & k leur evaluer cette depenfe a un prix ^xq par marc , ce qui n*eut jamais forme qu'un objet trcs- mince. En 1662, le Bail des Monnoies etoit general , & pafTe a Genifleau pour la Ibmme de cent mille livres; paries ar- ticles fix , treize, quatorze& quinze, le Roi s'engageoit a n'accorder aucun paf- feport pour faire fortir des ouvrages 6c matieres d'or & d'argent , a ne donner cours en aucune fa9on aux efpeces etrangeres , avec defenfe meme aux Affineurs d'en fondre aucune fans la per- million du Fermier , qui enfin avoit la facuhe de prendre par preference au prix du tarif toutes les matieres qu'it jugeroit a propose Tome Ilh M 138 Recherches & Conjiilrations M. Coiberf concut que de parellles clauses etoient incompatibles avec ies vues qii'il avoit pour fonder iin grand Commerce , & pour elever des tabri- ques , tant en doriires qii'en bijoute- ries. Comme Ies anciens ufages, quel- que vicieux qu'ils (blent, deviennent a la longue une efpece de Loi, il eproiw va tant de difficultes a faire un bail a des conditions plus douces, qu'ilrefo- lut d'etablir radmlnillration des mon- noies en regie dans i'annee 1666. Chaque Direcleur acheta, fabriqua & vendit avec iesfonds &pourle compte du Roi , moyennant un prix fixe par marc , qui lui fut alloue , de maniere qu'un Diredeur de Monnoie eft tout a lafoisReglffeur pourleRoi , ou Centre- maitre de la manufadure de monnoie ^ & entrepreneur des frais de la fabri- cation. Pour veiller ^ cette manutention , il fut etabli un Diredeur general des Mon- noies , charge de rendre compte au Con- feil de la Fabrication &: des frais. La Cour des Monnoies continua toujours Ies jugemens des boetes dans la forme ordinaire , & de condamner \qs Direc- teurs a payer au Roi Ies foiblages oa lemedes de poids> 6c ies* echarcetes fur ks Finances dc France, 13^ on remedes de fin employes fur la mon« noie. Mais le Diredleiir general comp- tant au Confeil dii detail de la fabri- cation , c'efl-^-dire , de la recette & de I'emploi, tant du poids que du fin , cer- tifies par les Ofiiclers particuliers des Monnoies, les Dired:eurs particuliers furent dccharges au Confeil des con- damnations de la Cour fur le certificat du Direfteur general. La Cour des Monnoies montra dans le terns & depuis beaucoupd'oppofitioa a cette forme d'adminiftration ; elle pretendit qu'on etoit plus porte k ufer d'indulgenee envers des RegiiTeurs qu'- envers des Fermiers ; que les certificats de recette , de fonte & de delivrance des Oificiers des Monnoies ne pouvant etre recufes , a moins de les accufer de faux, ce quiferoit prefque impolTi- ble lors meme qu'on en auroit les plus violens foiipgons , il pouvoit refulter beaucoup d'abus de leur connivence avec les Regiffeurs ; qu'il etoit meme moralement impoflible que cesOfficiers. viffent toutes les operations dont ils certifioient , ou qu'ils les viiTent de maniere a prevenir tout inconvenient ;. enfin que Tautorite du Diredeur gene-- ral pour la decharge des RegiiTeurs d£* Mil 140 Recherches & Conjidlradons pouilloit la Coiir d'line des plus impar- tantes fondions qui lui euiTent ete at- tribuees dans tous les terns. La paix terminec a Nimegue mit fin aux inquietudes du Miniflre , qui fe voyolt inieniiblement oblige d'aliener les revenus de I'Etat ^ apres avoir pafTe tant d'annees a les liberer. Pour aider a juger des augmenta- tions faites lur les revenus publics pen- dant la guerre , des redud:ions accor- dees au foulagement du Peviple & de Fetat des recettes ; on mettra ici en comparaiion les reeettes des deux an- nees 1678 & 1679. Si le Traite de paix agrandlt les Do- maines de la France , il porta une at- teinte confiderable a I'induflrie de fes habitans. La revocation du tarif de 3 667rendit aux Kollandois leur pre- miere fuperiorite fur nos Navigateurs he nos Manufaduriers. La Compaonie dts Indes Orientates V . . . etoit extraordinairement afFoiblie de fes pertes : le fieur CaronHoJlandois, charge dela conduiteprincipalede les a faires, iaifla echouer une enrreprife qui pou- voit porter un coup funefte ^ celle de Hollande. En vain le Roi fit-il don a la Compagniedesquatre millions qu'il lui avoit avaaees \ I'appel ^u'elle fit da Tome III. page 146 lii liv. «V5o^„,he-j,,,g,,,/| lenationso iminution I prix du fel. 749309 14773^7. 4oooOj^ • • • 340001 yon. 81 I 5868 ' Angmenta. ' tion du bail. 14905806 Idem, 452000 /^e/^. 340000 60000 Tome m. page 14, CoMPARAisoN des Receties des annees 167S & 167^. '678- 1679. ajooooi Domaines . ......... i^ooooof * ?'"''"'« 8175030 Gabelles de France, Lorraine & Franche-'J _ ._o„,„ s DimlnuS Comte j747^°'-°lrri.ium. 7493099 Cinq groffes Fermes 8115868" A.iB".ents- .4773S75 Aides & Entrees ,45„,8<,6 '^J^^''- 400000 Vente du tabac & Marque de retain .. . 451000 •''^™. 340000 Tiers-fur-tanx &c Quarantaine de Lyon... 340000 Droit des Vendeurs de poiflbn goooo 1400000 Gabelles de Langiiedoc & Rouflillon . . . ,168197 1380000 / fans atr tribuer a une feule forge Texclufif de la mine ; d'oii refulte un grand defavan- tage pour chacune dans la fonte , faute de pouvoir fe procurer les mixtions convenables , & une moindre qualUQ dans le fer. II eii egalement k propos d'obferver qu'aujourd'hui le prix d'un fol par ton- neau n'indsmnife plus le proprietaire Oij 154 Rccherches & ConfuUr adorn dii terrein fur le meme pied qu'eii 1682. Piiifque roccafion s'en prefente, il.n'eft point inutile d'obierver que nos tarifs ont toujours annonce une crainte peu fondee de manquer de fer. Ceux de 1664 & 1667 impofoient ^ Ten- tree 6c 4 la fortie les memes droits fur ies fers de France que fur les fers etran- gers. En 1701 la frayeur redoubla , fans doute ; car le fer etranger ne payoit que trente-cinq fols du millier a Fen- tree , & le notre dix livres en fortanr. Ce n'etoit affurement pa^la bonne me- thode d'animer cette Maniifatlure ; & £ Ton prenoit des mefures pour faire valoir la mine admirable de nos Pyre- nees , au lieu de la porter en Efpagne la plupart du terns , nous aurions d'e ^uoi fournir TUnivers de fers &; d'a- ciers excellens jufqu'a la confommation des {iecles. II y a de quoi etablir la plus belle & la meilleure fonderie de canons qui foit au monde ; & I'Adour en por- teroit ^ peu de frais les ouvrages a la iner» Quelle pofition I Les Pyrenees peuvent etre plus utiles a la France, £ on met leurs diverfes refTources en valeur , quel acquilition de la plus ri- che Province etrangere laillee a fon choix, Desforcts immenfes en fapins^ fur Us Finances de France, 165. qui peuvent etre partagees en folxante- dix coupes reglecs cle clouze a treize mi lie arbres chacune , cl'une qualite fupericure pour la duree & 1^ propor- tion k la qualite aduelle des matures du Nord ; d'excellens chenes ^ des plan- ches de toute efpece ; des mines de cui- yre , de- plomb , d'etain , de cobolt ^ de fer. Les entrailles de la terre n'at- tendent que Aqs mains induilrieufes pour nous prodiguer a peu de frais des richeffes que nous payons cherement aux Etrangers. II femble que tout ce qui appartient aux travaux de la terre foit meprife , ou du moins neglige par- mi nous. II eft un fentiment de douleur natu- rel a ceux qui aiment leur Patrie^lorl- qu'ils reflechiffent fur les caufcs d'af- foibliiTeraent du Corps politique. Tel eft I'efFet neceflaire que produit la lee-* ture de I'Ordonnance des Gabelles. Une denree , que les faveurs de la Pro- vidence entretiennent a vil prix pour une partie des citoyens, eft vendue che- rement a tous les autres. Des hommes pauvres font forces d'acheter au poids de Tor une quantite marquee de cette denree ; & il leur eft defendu fous peine de la ruine totale de leur faniille d'ea 1 66 Rccherches & Conjidlratlons recevoir d'autre , meme en pur don. Celiii qui recueillc cette- denree n'a point la permiflion de la vendre hors de certaines limites ; les memes peines le menacent. L'avidite dugainl'empor- te fur la crainte , & la faciiite d'eluder la Loi Tavilit. Des fupplices efFrayans font decernes contre des homines , cri- minels a la verite envers le Corps po- litique, mais qui n'ont point viole ce- pendant la Loi naturelle. Les befliaux languiffent & meurent , parce que les fecours dont ils ont befoin paffent les facultes du Cultlvateur , deja furchar- ge de la quantite de fel qu'il doit en confommer pour lui. Dans quelques endroits meme on empeche les ani- maux d'approcber des bords de la nier oil rinfcin^i de leur confervation les conduit. Une occupation importante dans I'Etat a prefque difparu , & elle ne fera point nommee pour ne pas trahir le fecret de quelques families dont I'in- duf^rie a jufqu'a preient echappe aux recherches. Tel q£i a peu pres le ta- bleau que prefente I'impofition des Ga- belles. L'Ordonnance qui en regie la per- ception pent etre belle , comm.e \\\\ rai- fonnement peut etre confequcnt 3 quoi- fur Us Finances dc France, 1 67 que le principe en fbit faux. II eft cer- tain du moins que fa iimplicite lui t( - noit lieu de quelque merite , & elle I'a perdu depuis. Prefque toutes les genes qu'elle pref- crit tiennent a la nature vicieufe de I'impot ; car elles font abfolument ne- cefiaires a la regie. De la I'embarras fatiguant & rifquable de la coUede dii fel : I'obligation impofee aux Collec- teurs de la taille de donner des denom- bremens exads du nombre des perfon* nes dans chaque famille , & I'amende portee en cas d'erreur malgre la diffi- cuite de Teviter dans une Paroiffe qui tient I'efpace d'une ou deux lieues , malgre I'interet de ces families a trom- per le Colle£leur. Encore Famende a- t-elle monte de vingt-quatre livres a cent cinquante. L'arbitraire accorde aux Aileeurs du fel , les emprifonne- mens , les faifies ^ la folidite des habi- tans , le rejet fur les ParoifTes ; toutes ces chofes oncreufes^ defirudives de I'aifance & de remulation parmi le Peuple, font cependant une fuite in- difpenfable de I'impot. La At^Qn^Q cCcm- ployer le fel d'impot a d'autres ufages qu'a celui du pot ^ de la faliere eft du meme genre j on peut k la verite fur lS§ Rechcrchcs & Conjidiratlons un certificat de pauvrete obtenir une permilfion particuliere , mais qui fup- pofe line requete , un deplacement , des frais. La diverfite des fituations a du va- rier les regies de la perception a I'infini, les genes ou la liberte du Commerce : aufli quelques Provinces font fr anches , par rimpoffibiiite abfolue oil il feroit de les trailer autrement ; d'autres font redimees , quelques -unes mixtes , 6c dans certains cantons uneParoiiTe jouit d'un privilege refufe acelle quii'avoi- iine. Que de motifs reunis pour porter ies hommes a mahquer au devoir qui leur elt impofe I & quels hommes ? des pauvres. La Province' de Normandie femble avoir ete choifie pour etre le theatre de toutes les rigueurs inconcevables & de toutes les efpeces de ccntradi£lions qu'emporte avec foi Timpofition des Gabelles. Dans quelques endroits il eA permis de faire du fel de bouillon , dont le quart appartient au Roi. Le nombre des bouillons eft limite dans chaque fa- line , & il ne peut y avoir q-ue huit fa- lines en travail dans un meme jour. Oa a pris toutes les precautions poiTibles pour que laNormandie ae vendit point fur Us Futanccs de France, 169 de fels aux En angers comme aiix Su- J€ts. Dans certaines Paroiffes, la qiian- tjte du fel blanc que Ton pent conibm- iner eft fixee ; le refte doit etre pris an Grenier. Dans d'autres le fel blanc peut etre employe aux menues iaiaifons , &: le lei du Grenier dans les groiles fa- hifons. Qiielles fources de contraven- tions , de proces , de vexations , de chatimens ! Si on demande pourquoi les peches du hareng 6c autres font fi mediocres fur les Cotes de Picardie & de Norman- die 5 pourquoi nous n'avons pas en France le quart des matelots que com- porteroit I'etendue de nos Cotes , de nos befoins , de notre population ; qu'on prenne la pe^ne de lire le titre XV de la falaifon des poifTons ; tant de forma- lites , de genes 6c de reftridions font in- compatibies avec I'inconflance des vents , la celerite d'expedition & la li- berte necefTaire aux affaires du Com- merce. II eftbeaucoup plus fiir de ne pas envoyer a la peche , & fon profit ne compenfe pas les rifques auxquels la moindre inadvertance expofe de la part des Commis. La Hollande n'auroit certainement ni matelots ni pecheurs , fi elle obfervoit la nieme police ; le de- Tomc III. P 170 Recherckes & Conjidirations tail en feroit trop long & n'appartient pas a cet oiivrage : mais on prie tout homme impartial 6c bien intentionne de lire ce Reglement , de fuivre le pro- diiit de nos peches jufqu'a leur confom- mation ; il fe demandera foiivent a lui- meme , comment il eft poflible que la France ait encore des pecheiirs. Ceil par de femblables traits que Ton ap- prendra a connoitre vcritablement le genie & les forces intrinfeques de cette Nation ; aucunc dir la terre ne I'a ja- mais egalee ; on le dlt avec confiance, & nulle efpece de prejuge n'a di£le cet eloge ; il eft fonde fur des comparai- fons & fur des faits. EUe n'a pas nn feul defaut dont le Legiftateur ne piuffe tirer parti pour le bien general de la fociete. Que la barriere foit ouverte , & le fucces paftera les efperances les plus ambitieufes. II eft facheux , fans doute , d'etre force d'abandonner des idees fi flateu- fes pour faire un retour fur les funeftes efrets de I'impofition des Gabelles. C'eft cependant par le recit des dangers que court un malade, & en leur comparant les avantages d'une fantebrillante , que le Medecin le determine a ufer de its remedes. L'humanite fremiroit en fur Us Finances dc France, 171 voyant la lifle de tous les fuppUces or- donnes a I'occafion de cet impot depuis fon ^tabliffement. L'autorite du Legif- lateur fans ceffe compromife avec i'a- vidite du gain , que conduit fouvent la neceflite meme, lui feroit encore moins fenfible que la durete de la perception ; I'abandon de la culture , le dccourage- ment du contribuable , la diminution du Commerce & celle du travail , les frais enormes de la Regie , lui feroient appercevoir que chaque million en en- trant dans fes cofFres en a prefque coute un autre a fon Peuple , foit en payemens efFedifs , foit en non-valeurs. Ce n'efc pas tout encore : cet impot avoit au moins dans fon principe I'avantage de porter fur le riche & fur le pauvre ; une partie confiderable de ces riches a f9U s'y fouflraire ; des fecours legers & paflagers lui ont valu des franchifes dont il faut rejetter le vuide fur les pauvres. Enfin , fi la Taille arbitraire n'exif- toit pas , rimpot du fel feroit peut-etre le plus funefte qu'il fiit pofTible d'ima- giner. Peu de perfonnes fe refuferont k I'evidence des faits ; a Texception peut- etre de quelques-unes qui y feroient in- tereffees , ou qui cheriflent les opinions Pi; ijj. Recherche s & Confidcradons fingulieres. Tons les Aiiteurs economi- ques & les Minifires les plus intelligens dans les Finances ont regarde le rem- placement de ces deux impofitions , comme Toperation la plus utile au Ibu- lagement des Peuples , a raccroifTement des revenus publics. Divers expediens ont ete propofes , & aucun julqu'a pre- ient n'a paru affez fur. La Dixmc royale , laiuTement attri- buee k M. le Marechal de Vauban, ell line fpeculation digne d'un citoyen bien intentionne ; au moins eft-ce a peu pres fur ce plan qu'il faudra tcu- jours travaiiier ; c'efl au meme but qu'il faut tacher d'arriver. Mais quand me- me I'expofe de c€ projet ne prefente- roit par diverges contradidions, quand meme les calculs en feroient aflis fur de meilleurs fcndemens , I'executioa en grand prefcnte des difficultes con- ilderables. Les revenus publics ne pa- roiffoient pas affezafTiiresrilferoittrcs- facile de les frauder ; & pour peu que la perception Ven fit avec une certaine exaditude 5 il efl vrai-femblable qu'^ la longue, eile etabliroit des formalites tres-prejudiciablesa I'agriculture ; ceux qui ont quelques idees de regie fe le l^erfiiaderont aifemsnt. fur Us Finances dt Francel 175 II a ete propofe de perccvoir rim- pot dans les (alines memes : mais en iiippofant cet expedient praticable , il pent etre regarde comme incompati- ble avec la confervation du commerce des fels* II faudroit rendre le droit k la fortie pour I'etr anger ; premier ob- jet de difcLiiHon entre le Fermier 6^ Ic Negociant. II ne faut pas croire que les navires etrangers viennent confommer des vivres dans nos Ports , payer des equipages & perdre du tems jufqu'a ce que les proces avec les Commis foierit decides. Les Etrangers ou les Natio- naux feroient des vcrlemens fur les Co- tes; nouvelle matiere de plaintes , de genes & de formalites. Enfin pourroit- on etre tranqiiille fur cette branche de Commerce , lorfqu'on voit qu'en 171 4 le Fermier fit defendre la fortie des fels de Bretagne pendant trois mois , jufqu'a ce que fa provifion fut faite ? Le muid tomba a quinze livres, & comme c'e- toit la faifon oii les etrangers viennent principaiementraclieter,iiss'enretour- nerent a vuide. L'Efpagne & le Porta? gal profiterent de cette fatale opera- tion , dont la Bretagne fereffentit pen- dant plufieurs annees. Enfin , confide- rons ce qui fe paiTe en Narmandie. P iii 1^4 Recherckes & Conjideratlojis II feroit beaucoiip plus iimpie d'ajou- ter a la capitation de cbaque Province la fomme qu'elle paye pour la confom- niation du lel^les trais deduits ; mais I'ar- bitraire refleroit ; les pauvres a la lon- gue fupporteroient toute la charge. Ce- la s'efl pafle ainli jufqu'a prefent au de- triment de TEtat & de la profperite pu- biique. LaTaille reelle , telle qu'elle eft affife dans laGeneralite deMontauban, dans le Languedoc & ailleurs, efll'expedient le mieux combing qui fe fbit prefente. Mais independamment de quelques de- fauts qui fe rencontrent dans la partie de I'induHrie, fon etabliffement pour- roit foufFrir des longueurs & des con- tradidions confiderables dans bien ^^^ endroits ; les biens nobles font plus com- muns dans certaines Provinces que dans d'autres ; la partie privilegiee de la Na- tion forme continuellement des preten- tions relatives a Torigne des impots : tout abuiives qu'elles font aujourd'hui , la jurifprudence eftmontee fur ces prin- cipes. On ne fe flate point d'etre plus heureux que les autres dans ce qui va etre propofe , quoique leur travail ait fervi de boulTole ; mais il efl utile que chacun s'exerce furies objetsintereffans fur les Finances de France, 175 au bien de la fociete , parce qu'une idee meme defei^ueufe pen devenir bonne entre des mains plus habiles. S'il efl convenable aiix interets de I'Etat de remplacer la Taille , la Ca- pitation & les Gabelles , il femble d'a- bord que ce devroit etre par un impot nouveau , dans lequel on ne feroit point pafler les maximes de la Jiirifprudence fuivie dans la perception des droits fup- primes. Le Roi pent ceiTer de les lever , & exiger un nouveau genre dc tribut qui n'auroit rien de commun avec eux , 6c dont perfonne ne feroit exempt. II convient toujours a la furete des deniers publics d'avoir un grand fonds affure , qui pafle fans frais par un petit nombre de mains ; c'eft un grand avan- tage qu'a la Taille fur les autres im- pois : fi I'induilrie etoit en furete cen- tre I'arbitralre , il efl conftant que la forme de la perception eft tres-avanta- geufe : & clle le feroit encore plus en la fimplifiant. Pour que la rentree des revenus folt exa^le &: facile, il faut que les impors ne portent pas tous fur un feul objet. Pour que toutes les claffes du Peuple fe foulagent & fe foutiennent mutuel- P iiij 176 Rech erches & Conjiderations lement , il faut que toutes payent une portion des tributs. Le poids de rimpoiition ne decourage pas autant les clafles induilrieufes, que i'arbitraire de fon afTiette , Tincertitude de la propriete , & la crainte continuel- le de paroitre induftrieux. II y a des hommes qui n'ont d^autre re- vena que celuideleurjournee; iinefaut pas que ces hommes payent au-dela de la proportion de leur I'alaire , car il ren- cheriroit ; mais il ne convient peut- etre pas qu'il n'ayent pas befoin de travailler tous les jours ; car s'il eft vrai que le goiit &: I'exemple de I'ai- faAce inlpirent I'emulation au travail , il Teft egalement de dire querhabitude d'une grande pauvrete nous engourdit quelquefois fur le bien-etre & nous conduit a I'oifivete. II eft important au bien de Tagricul- ture & au bon marche des f^ilaires , que rimpofition dans les Villes foit plus forte que dans les campagnes. Comme il doit necefTairement y avoir des pauvres ou des artifans dans \qs Villes 5 il convient pour la furete & I'agrandiftement du Commerce que I'impofition y tombe principalement fur \q$ riches. fur Us Finances dc France, 177 L'agrement & la commodite dcs Vil » Ics y appellera toujours ceux qui aiiront les facultes neceflaires pour y fubfifler k leur aife. On a cru devoir tracer la marche des idees qui fe font prefentees en reflechif- fant fur cette matiere , afin de faciliter auLedeur le moyen de faifir ce qui va etre propofe , ou de le redifier. Pour ne pas courir rifque de fe trom- per , iuppolbns dans le Royaume qua- tre millions de feux de quatre perlon- nes chacun ; autrefois on les comptoit fur le pied de cinq : mais depuis que la corruption des m(xurs & I'influence d'un luxe qui n'a point i'aifance gene- rale pour principe , a rendu le celibat im etat plus heureux dans les Villes , depuis que le mariage ^ft devenu une furcharge dans les campagnes , il paroit qu'en ne pent evaluer les feux a plus de quatre perfonnes chez les pauvres artifans , les journaliers de campagne & les petits Fermiers. Ce n'efl point d'ailleurs qu'il n'y en ait vrai-fembla- blement plus de quatre millions dans la totalite du Royaume : ainli I'exce- dent reviendroit en benefice fur ce cal- cul. Des quatre millions de feux , on lyS Rccherchcs & Conjidcrations en fuppofe deux miUions cinq cent mil- le repandus dans les campagnes. La claile la plus baffe fera compo- fee de fimples manoeuvriers , qui fub- fiflent du prix de leur travail journalier chez d'autres Cultivateurs, & du pro- duit d'un quart de journal de terre envi- ron, attache pour Tordinaire a leur mai- fon en forme de jardin. On pent leur fuppofer deux cent jours de travail dans Pannee , dent une moitie leur eft payee dans la plus gran- de partie de la France k dix fols , & I'autre moitie a douze fols , ce font cent dix livres. Le travail de leur femm.e etant evalue a trois fols par jour en fi.- lage de lin , de chanvre & autres ou- vrages , ce font trente- trois livres ; & le total formera un revenu de cent qua- rante-trois livres , Examinons la depenfe. * La confommation du pain n'ira pas a moins de trois li- vres par jour k un fou la liv. fols. livre 54 15 Cinq livres de lard , vian- de 5 ou autre nourriture fub- ftantielle par femaine,a deux fols trois deniers la livre , fur Us Finances dt, France, 1 79 liv. fols d. De I'autre part,.. 54 15 le Careme retranche ... 20 1 5 3 La confommation dii ci- dre & aiitres aiitres boiiTons ^ iin fol par jour ... 18 5 Chauffage , lumiere .... 6 Loyer . . . . 6 Habillement . . .16 (Eufs, laitages, &c. ... 4 Sel , Tallies , Capitation^^ 3 10 Alnfi le profit eft de quatorze livres environ , en {iippofant qu'il n'arrive point d'accident , & que les vivres Ibient continuellement autour du ni- veau fuppole. U feroit poflible d'aug- menter ce produit en retranchant quel- ques fetes; & de lui-meine, il s'accroi- troit infenfiblement , fi raifance pene- troit dans les campagnes. II eft furpre- nant que I'Etat n'ait pas encore eu re- cours a cet expedient dans les diverfes detrefles qu'il a eprouvees. On peut fuppofer que liir feize millions d'ames , il y en a fix millions qui ne vivent que du produit qu'ils retirent des jours de travail, & que leurs journees valent l8o Recherches & Corif derations dix fols rune dans Tautre. Aufli au cal- cul le plus bas, chaque jour defete coute trois millions aux pauvres de TEtat. On peut fans nuire au culte retrancher vingt de ces feres , & dans Tinilant on rend au Peuple foixanre millioRS. Cette grace ne lui valut-elle que trente mil- lions , voilala moitie de fa taille & de fa capitation payee. II n'oft pas poffible que ce foulagement important eprouve cjuelqueoppofition de la part des Minijf- tres eclaires de la Religion: iis fcavent, fuivant rexpreiiion de Saint Chryfoflo- me 5 que les Saints n'aiment point a etre honores avec Targenr que pleurent les pauvres ; enfia on fcait que ce grand FiOmbre de fetes n'exifte que depuis le Regne de Charlemagne , fous lequel on n'en connoifToit que trois annuelles t-C quatreoucinqputres. Lefuccesde cette reforme ne laifleroit pas cependarit d'e- tre borne dans les campagnes , tant que la taille y refleroit arbitraire , & que le Commerce des grains reileroit dans fon etat de prohibition. Sur le pied aduel , chacun de ces feux paroit pouvoir payer deux livres dix fols pour tout impot, & les deux millions cinq cent niille feux fuppoies fur Us Finances dc France, i S r cxliler dans les campagncs po.iirroient y etre taxes liv. uniformement - 5000000 Mais comme les joiir- nees font plus utiles a me- fure que le colon j ajoute line nouveile induilrie , il paroitrolt ccnvenable d'e- xigerquelque chofedeplus a proponion du fermage qu'il tient. D'un autre cote , le pro- fit du Fcrmier dun herita- ge de trois cent livres de rente efl proportionnelle- iPicnt plus fort que celui d'un heritage de cent li- vres ; & meme plus le fer- mage eltconfiderable, phis il y a d'economie 5c de benefice dans la culture ; ainfi la taxe devroit etre proportionnellement plus forte fur les grofles Fer- ines que fur les mediocres , & fur les mediocres que fur les petites. Regions la taxe a un fol pour iivre du fermage fur iSz Recherckts & Conjidcratlons llv. De raiitrepart... 5000000 ies heritages de cent a deux cent livres de rente. A un fol fix deniers fur ceux de deux cent a qua- tre cent livres de rente. A deux fols fur ceux de quatre cent a fix cent. A deux fols fix deniers fur ceux de fix cent a huit cent. A trois fols fur ceux de huit cent a mille. A trois fols fix deniers fur ceux de mille a quinze cent livres de rente. A quatre fols fur ceux de quinze cent a deux mille. A quatre fols fix deniers fur ceux au-delfus de deux mille livres. On fuppofe une taxe de vingt fols par arpent de vigne Ies plus communes , & a proportion fur Ies meii- leures : dix fols par arpent de bois : trois livres par fur Us Finances dc France, 183 liv. De Taiitre part... 5000000 arpent de 'paturages gras. On fiippofe huit cent cinquante-un mille cinq cent Fermes en terres la- bourables ; & on les dif- tribue ainfi. Deux cent mille a 150 liv. de rente Tune dans I'aiitre , la taxe a iin fol par livre ijooooo Trois cent mille a 300 liv. I'une dans I'autre , la taxe a I f. 6 den. pour liv. 6750000 Deux cent cinquante mille a 500 liv. Tune dans i'autre , la taxe k deux fols pour livre .... 12500000 Cinquante mille a 700 liv. Tune dans I'autre , ia taxe a deux fols fix deniers pour livre .... 4375000 Vingt mille a 900 liv. Tune dans I'autre , la taxe a trois fols pour livre . . . 2700000 Quinze mille a 1250 livres I'une dans I'autre , la taxe a trois fols fix de- 32825000 ro4 Reckerchcs & Conjidc rations liv. De i'autre part.., 32825000 niers pour livre . Dix mille k 1800 livres i'une dans I'autre , la taxe a qiiatre ibis pour livre . . . Six mille cinq cent a 2500 1, I'une dans i'autre , la taxe ^ qnatre fols fix deniers pour livre Trois millions d'arpens de pdturages gras a 3 livres Six millions d'arpens de v\"nc a trois livres Fun dans 1 autre Douze millions d'ar- pcns de bois a dix fols 3281250 3600000 3656250 9000000 180C0000 Fun dans Tautre . . . l\ feroit juile que le proprietaire de la terre , exempt de Capitation & de Gabelle , dont le reve- nu augmenteroitfans cefTe avec i'aifance des Culti- vateurs , contribuat pour fa part aux revenus pu- blics. Le produit de nos terres a ete evalue a fix cent millions dans la dif- 6000Q00 76362')00 tributioii fur Us Finances dc France. i8'5 De I'autrepart... 76362500 trlbution clesFermes; mais il y a des terres privile- giees pour environ cent vingt millions : ainfi il Yicxi relle aiix particuliers ini- pofables que quatre cent quatrc - vingt millions en- viron ; les maifons des Vil- les & des Bourgs n'y font point comprifes. On pour- roit impofer le vingtieme en attendant que I'exadi- tude des declarations per- mit de fe reilreindre. Ce feroit meme un motif de plus pour engager ceux dont les declarations font juiles a fournir les moyens de reclifier les autres ; un moyen bien juile de hauf- fer le produit , ee feroit d'evaluer fur le pied des meilleurs fonds les terres fouilraites a rutilite publi- que pour les convertir en cultures d'agrement , le vingtieme ci . . , . 14 000000 Total pafle . . . loooaoooo Tome ILL Q 1 86 Reckerchcs & Confidirations Je n'ai parle jiifqu'a prefent que des terres & de ceiix que leur culture fait fubfifter : Tavantage de cette methodc confifleroit en ce que la taxe du culti- vateur & celle du proprietaire des ter- res fe verifieroient mutuellement ; il eft facile de combiner ce que le Prince retire de chaque Paroiffe a raifon de la taille 5 de la capitation & de la con- fommation du fel. Si Ton craint de per- dre dans Tafliette du nouvel impot , it feroit facile de fixer d'abord une fom- ine a impofer pour tous ces objets dans chaque Paroiffe & fuivant le plan pro- pofe ; en remettant Texcedent , s'il s'en trouve, aux habitans. Par ce moyen, chacun feroit intereffe a decouvrir la veritable valeur du fermage de fon voi- fin ; & Ton feroit aiTure en deux ou trois annees , foit de la portee de I'im- pot , foit de la fidelite des declarations. Loriqu'elles feroient une fois affurees , il conviendroit au bien de I'agriculture & a I'encouragement de I'induflrie de ne les renouveller que tous les trente ans. ■ On con^oit une partie des objedions que i'on peut faire , & il femble que leur folution ne feroit pas impoflible s'il s'agifToit de trailer la matiere k fond. En cas d'augmentation ou de dimi- fur les Finances dc France, 187 nution de Timpot , on connoitiolt exac- tement la portee cle la remife ou dc la crue : nulle difciidion entre les contri- buables ; la Loi feroit £.xq , le plus fim- ple f9auroit ce qu'il doit payer & ce que doit payer fon voifin. La nourii- ture des beftiaux , prlncipe de la fecon- dite des terres, 6c fi negligee cepen- dant , recevroit un accroiflement infini de raffurance ou feroit le cultivateur d'en avoir autant qu'il le pourroit pen- dant le cours de fon bail , fans payer un fou de taxe de plus ; menies a van- tages pour les terres en friche , pour les mauvaifes meme qui ne laiiTent pas d'etre fufceptibles de culture. La feule fraude a craindre ell celle descontre-leitres & des baux fimules : mais il ne paroit point impoffible d'y re- medier : i^. en ordonnant que tout Fer- mier qui prouvera les conditions du bail fimule fera decharge envers fon proprietaire de la fomme convenue ta- citement; 2^. en permettantauxParoif- fes de faire faire I'eftimation des biens dont elles foup9onneroient les baux , par deux Experts que I'lntendant nom- meroit fur fimple requete. En fait de de- clarations de biens, le grand point eft de commencer ; le produit n'efl peut-etre 1 88 Reckerckes & Confidiratlons pas liobjet immediat qu'on clevroit fe propoier dans les premiers momens ; la verite des bornages & des enumera- tions eft d'une autre confequence; 6l Ton ne peut fe flatter d obtenir le tout a la fois. Que les fuppofitions employees foient fauffes 5 ou ne le foient pas, pen im- porte ici , puifque Teilentiel ell la ma- niere de proceder : on ne pretend pas non plus garantir rexaditude de la dil- tribution qui a ete faitc , foit de la po- pulation dans les vilies d>L dans les cam- pa gnes , foit dii n ombre & du revenii des heritages ; il efl vrai-fem.blable me- nie que le nombre des petites Fermes eft moins grand qu'on ne I'a porte ; & alors les feux feroient plus forts , le pro- duitde rimpofition feroit plus confide- rable ; mais dans des matieres auffi com- pliquees on a cru devoir fuivre la dif- iribution la moins avantageufe , telle qu'elle exifte dans quelques Provinces. Apres tout , le grand point eft de fca- voir fi nos terres privilegiees , ou non , prodiiifent au total fix cent millions de revenu. Si elles produifent moins , on peut impofer le dix-huitieme au lieu du vingtieme , & hauft'er les taxes pro- portionnelies de fix deniers^ il y aura er^« fur ks Finances dc France. i8c) core de I'a vantage pour les contribua- bles. S'il etoit permis aqiielqiies ParoifTes voifines dii Poltou ou de la Bretagne d'elTayer ce plan ; on fe perfuade qu'a- vant'trols ans beaucoup d'autres le de- manderoicnt avec inilance. il reile a poiirvoir an remplacement dans les villages, dans lesboiirgs 5c dans ies villes.' DVrbord !e dlxieme du revenii k payer par le proprletaire des maifons du Royaiime dans les Villes & Boiirgs devroit rendre environ huit millions trois cent mille livres , fans compter \qs maifons privilegiees. On employe le dixieme des maifons dans les Villes & les gros Bourgs an lieu du vingtieme ; parqequ'il conyient toujoursde rendre le fejour & la propriete des terres plus favorables que le fejour des Villes , & la propriete des autres biens. Dans les Villages , dont una partie des maifons font des Fermes , ou dont les locataires font des journaliers , il n'y auroit rien a chancer a leur eo^ard: mais il s'agit de pourvoir a la taxe des autres artifans qui s^y rencontrent. Aux principes employes a I'egard des Cultivateurs on en ajoutera im autre | 190 Rccherches & Conjidiradons c'eil que les profeflions etrangeres a la culture, qui font fous lesyeux des Co- lons , doivent leur paroitre moins heu- reufes que la leur : ainii il paroitroit con- venable de taxerle Maitre a neuf liv. a raifon de fes journees , a quatre liv. a raifon de chaque compagnon qu'il em- ploye , 6c a cinq livres par piflole denier dix ou onze 1660000 » Ainfi le total des em- >> prunts fera de quarante- Vf trois millions , 6c celui des » interets a payer de . . • , 305000P 20 8 Rcchcrchcs & Conjiderations » En continuant de cette manlere , » bientot il fe trouveroit deux ou trois » annees confommees. » Les interets augmenteroient a Fin- » fini , & le fonds des recettes diminue- » roit a proportion. » Si quelque occaiion glorieufe au » Roi fe prelentoit pour faire la guerre , » les fuites en deviendroient tres-fa- » cheufes. » Les fonds diminuant , & les em- ?> pruntsaugmentant, le credit s'anean- » tiroit ; & il efl a craindre qu'il ne fal- » lilt en revenir aux quinze pour cent. » Mais ce qu'il y a de plus impor- » tant 5 & fur quoi il y a plus de re- » flexion a faire , c'efl la mifere tres- >» grande des Peuples ; toutes les let- » rres qui viennent des Provinces en » parlent , foit des Intendans , foit des » Receveurs generaux ou autres per- » fonnes, meme des Eveques. » Si le Roi reduifoit les depenfes a » foixante millions , on pourroit encore » donner cinq a iix millions de diminu » tion au Peuplefur les Tallies de 1682 »& 1683. » II feroit encore tres-neceffaire d'ap- M porter dans la fuite de la paix quel- » que Reglement fur la Fermes des Ai- i) des ; fur Us Finances de France, 209 » des : la multiplicite & prodlgieufe » diverfite des droits etablis fur les avis » de toutes fortes de Traitans pendant » les guerres paffees , expofe les Peu- » pies a beaucoup de violences & de » vexations de la part des Commis. » Le principal point des Finances con- » fide lelon moi a employer tous les » ans au nioins cent miile livres , &: » lorfqinl iera poflible, au moins cent » mille ecus , pour gratifier ceux qui » font le Commerce de Mer , qui en- » treprennent de nouvelles Compa- » gnies 5 de nouvelles manufaftures ; » parce que ces moyens fervent a main- » tenir & conferver I'argent dans le » Royaume , a falre revenir celui qui » en fort , & a tenir toujours les Etats » etrangers dans la necefiite & le be- » foin d'argent oii ils font. » Je puis efperer que ii le Roi vent » reduire les depenfes fur le pied que » je propofe fans pafTer , en deux ou » trois annees au plus , fes Finances fe » retabliroient & feroient en meilieur » etat qu'elles ayent jamais ete. Je me fuis fait un devoir de tranf- crire tout ce que je trouve ecrit de la main de M. Colbert , parce que fes adions le peignent mieux & le loiient Tom& III. S 210 R echerch es & Conjidcratlons plus dignement que je ne pourrois \z f^ire. Je trouve que les depenfes furent re- glees a foixante & quatorze millions Ibixante & douze mille iivres , en y comprenant quatre millions pour les in- terets & remifes , & quinze cent mille livres pour les rembonrfemens. Mais la depenfe efFe£tive monta k cent trente- quatre millions cinq cent feize mille deux cent cinquante-deux livres & un fol , parce qu'il fut remboiir- fe cinquante millions. La recette des reve- nus de I'annee devoit monter, les anciennes liv. f. charges deduites , a .. . 80623730 15 II fut conftitue deux millibns de rentes fur la Ville an denier vingt. . . 40000000 La caiffe des emprunts devoit a la fin de Tan- nee au Public 24000000 II fut recu par avance de Baux fur les Fermes anies .... 6000000 Idem fur les Gabelles deLyonnois • . • 1000000 .351623730 15 fur Ics Finances dc France, 211 De I'autre part 151613730 15 La depenfe etantde 1345 16251 i Ilreftoit . . . 17107478 14 Pour payer les foixan- te millions de dettes non conftituees , qui ref- toient en 168 1 ; ce qui les auroit reduites a la fomme de . . . 42891521 6 Sans doute que par conroirimatlon d'avance fur 1682, il en fut paye neuf millions cent cinquante-troismille tren- te-trois livres un fol ; car je trouve qu'au dernier Decembre, les dettes exi- gibles montoient feulement ; fgavoir , La caiffe des em- liv. L prunts .... 24000000 Reftes dus de I'annee 1681 .... 33394§S 5 Idem de I'annee 1680 & des precedentes .... 3600000 AuxMuriitionnaires.. 2000000 Pour les etapes 800000 33739488 5 Pour les appointe- mens du Confeil &: pen- lions de 1 68 1 par ob- million dans i'Etat^ . , 4000000 3-773.9488 5 2 1 2 Rccherckcs & Conjidlradons Mais avant de pafTer a Tannee 1682^ obfervons que dans celle-ci les baux des FeriPiCS furent renouvelles , a Tex- ceptlon de ceux des Gabelles de Lan- giiedoc , RoufTillon, Provence, Dau- phine , Lyonnois : le bail commenca au premier Odobre pou5 fix annees : le prix fut de cinquante-fix millions {\y^ cent foixante-dix mille livres pour la premiere annee , a condition de Taug- ir.entation dans chacune des quatre an- nees fiiivantes de cent milie iivres ; de fa^on que dans les deux dernieres an- nees , le prix devoit etre de cinquante- fept millions foixante 6c dix mille ii- vres , S^avoir : Pour la Ferme generale liv, des Gabelles de France , 17750000 a la charge de I'augmenta- tion annuelle de cent mille iivres dans le cas 011 la paix continueroit , & d'une di- minution de deux cent mille livres par annee de guerre. Cette claufe prouve evi- demment que les confom- mations diminuent pendant le cours d'une guerre. Des- lors fi on les rencherit, elles diminuent encore dans la fur les Finances de. France, 215 liv. Del'aiitre pprt ... 17750000 meme proportion. Ceia proiive qu'il convient rare- ment d'augmenter ce genre d'impot , lorfqu'il efl porte a fon point ; & que Ton ne doit pas tout-a-fait fe bor- ner a celiii-la dans iin Etat. Pour la Ferme generate des Aides , entrees & droits y joints .... iioooooo Pour les cinq grolTes Fer- mes 1 1380000 Pour la Ferme generale des Domaines & droits y joints 5540000 56670000 L'argent monnoye a vingt-fept li- vres le marc, c'etoient deux millions quatre-vingt dix-huit mille huit cent quatre-vingt-huit marcs, ce qui re- vicndroit a cent quatre millions neuf cent quarante-qiiatre mille quatre cent livres a cinquanre francs le marc. L'article des Domaines explique une grande partie des rembourfemens faits dans ces annees : car en 1 679, le produit etoit reflreint a deux millions deux 114 Rccherches & Conjidiratlons cent mille livres ; ainli le rachat eft dc trois millions trois cent quarante mille livres 9 qui fur le pied de dix pour cent rendroient raifon de trente - trois mil- lions quatre cent mille livres des nou- veaux emprunts. Voici le detail des droits cedes par ce bail. Gabellcs de France. Droits dereventes a petites mefu- res. Voye de fel du Rethelois. Quarante fols de Bourgogne. Douze deniers par livre de Maccn- nois. Quart de fel de baffe Normandie. Trente-cinq fols de Brouage. Vingt-quatre deniers desControleurs Confervateurs. Droits de la Pointe. Droits des Greffiers des Roles de rimpot. Droits des Offices des Mefureurs , &c. Gabelles de Metz , Toul & Ver- dun. Domaines & Salines de Lorraine &: Comte de Bourgogne. Ferme des Aides &: entrees. Pied fourche dc poiffon de Paris » fur Us Finances ds. France, 2 r j Barrage. Qiiatrieme de la Generallte d'A- miens , Villes exceptees. Eledions de Bar -fur- Seine 6c Pon- toife fujettes au qiiatrieme. Quatrieme de Normandie. Ancienne impofition du Poiflbn , pied fourche 6c bois. Droit annuel , &c. Subvention fur le detail oii le fiui- tieme a coiirs & aiix entrees des Villes & lieux fujets au quatrieme. Subvention fur le detail du refTort de la Cour des Aides de Rouen & aux entrees des Villes 6c lieux fujets au qua- trieme. Vingt fols fur muid de Cidre & Poi- re entrant & paiTant dans la ville de Rouen 6c banlieue 6c croiffant en ladite baniieue , &c. Trois livres quatre fols fur muid de vin. Marque de fer , neuf livres dix-huit fols » 6i fol pour pot. Controle des bieres. Gros du PoifTon de Rouen. Amiens cinq fols. Awtres des Generalites. Cinq fols fur muid de vin vendu en gros en la Vilie & banlieue de Rouen* 21 6 Rccherchcs & Conjidcrations Droits des Vendeurs reunis. Controle du Papier, &c. a I'excep- tion de I'Auvergne & Angoumois. Sol pour Rame de Paris, tiers re- tranche. Marc d'or. Pied fourchc de Cotantin, Impots & Billots. Poids au Due , &c. Moitie des Odrois. Subvention <5c fubfiftance des Villes ^ &c. Tarif d'AIencon. Droits de Rouen reunis. Rentes & Charges locales dues par les Engagifles des Aides , des deux quartiers rerranches defditcs charges fur les Aides reunis. Entrees de Paris & Rouen. Droits du Pont de Joigny , &c. Trois fols fur le bols , &c. en entrant en la Ville de Paris , &c. Droits du Papier Sc parchemin tim- bre. Droits fur les eaux-de-vie entrant en la Ville de Paris. Droits de la marque des ouvrages d'or & d'argent , &c. Vingt-quatrieme d'Angouleme, Droits de Vendeurs de Volaiile , &c, Sol fur Us Finances dc France, 1 1 7 Sol pour livre de Vendeurs de poif- fon , &c. dans les ports. Droits des cinq groffes Fermes. Doiiane de Lyon &c Valence. Prevote de Nantes. Rivieres de Colme. Doublement des droits de fubven- tion , &c. Trois livres pour Barrique d'Eaii- de-vie. Cinq fols anciens & nouveaux de Calais. Quinze fols pour muid de vin &C pour barrique de iel , &c. Douze fols pour baril de fel entrant a Boulogne. Neuf livres dix-huit fols pour muid de vin, &c. k la referve du vin d'Ef- pagne. Neuf livres par tonneau de vin for- tant de Calais. Douze deniers pour pot de vin qui y fera vendu, &c. Cinq fols des acquits, &c. Peage de Peronne , &c. Entrees & forties de Flandres , &c. Trois livres pour tonneau des Vaif- feaux etrangers venans a Dunkerque , &c. TomcIII. T 1 1 8 Rccfurches & Conjidcratiom Convoi & Comptablie cle Bordeaux-, Traites de Charente. Trente livres pour muid de fel , &c. Huit livres pour muid, &c. Tablier de la Rochelle. Moitie de la Coutume de Bayonne , &c. Patente de Languedoc , &c. Traite foraine d'Arfac , &c. Bouille de Rouilillon , &c. Droits d'abord & confommation , Papiers d'Auvergne & d'Angoumois, - Sol pour Rame de Paris. Sortie des Vins par la Picardie , Soif- fonnois & Champagne , & des Vins , boiflbns & eaux-de-vie defcendant par la riviere de Loire , &c. Droits des Officiers des traites d'An- \o\\ & autres qui font leves fur la ri- viere de Loire , &c. Controle des toiles. Tiers des droits da via pafTant a Taiilebourg, &c. Deux fols huit deniers pour muid de fel , &:c. Huit deniers pour muid paffant J Mara;is, fur hs Finances de France, ii^ Droit de fret , &c. Droits des Courtiers de Bordeaux, Ferme du Domaine confidant , &c. Droits fur la vente du tabac, &Cr Sol pour livre pefant fur Tetain fa- ^onne en Bretagne. Deux fols fixdeniers aufli pour livre pefant aux entrees du Royaume , &c. Controle des exploits. Domaines de Paris. Droits des Juilices reunies. Droits de la traite domaniale de Bre- tagne. Greffes , &c. Inquans de Languedoc. Contfole des GrefFes &: des depens. Droits des prefentations /&c. Droits non alien es en ceux qui ont ^te rachetes & reunis , d:c. Droits de Biaye. Pefade d'Alby. Droits du Royaume de Nararre , &c^ Domaine de Calais , &c. Idem de Gifors , &c. Idem de la Capelle , &c. Idem de Roufliilon , &c, Domaine de Flandres. Domaines de Provence. Drogueries & Epiceries, 2.10 Rccherchcs & Conjldirations Table de mer , Poids 6c caffe de Mar- fellle. Ecu par quintal d'aliin , a la referve de la confommation de Marfeille. Deux pour cent d'Arles. Autre deux pour cent du Fort Ba- ron , &c. Autre Domaine de Marfeille. Domaines de Rhodes , Rochefort , &:c. Brouage. Domaine de Foret , 6cc. haute & baffe Manche, &c. Domaines de Rouen, &c. Droits des Notaires de Normandie. Domaine de Melun , &c. Peage 3e Pont-fur-Yonne. Terres ufurpees , &c. & reunies an Domaine. Domaines referves. Lods & ventes fur les rotures , fur l^s echanges , &c. Droits feigneuriaux jufqu'a looo 11- vres , jufqu'a fix de pareille fomme 6c du tiers de I'excedent. Droits feigneuriaux dans les Pays reunis au Domaine. Emphiteofes apres Texpiration, Faculte de retirer les Domaines Qn- gages, iScc. fur hs Finances de France, 12 1 Domaines ufurpes , &c. qui feront retablis , halles , boucheries , etaux , ^choppes , oiivroirs , places vaines 6c vagues , droits de voyeries, peages , &c. Communaux , marais , blecis , avoines, grains , vin , foin, &c. Droits de lods & ventes , faifines & amendes , quints, requints , &c. aubaines , batar- dife , desherence , confifcation , amen- des 5 &c. Refves , cofles deNarbonne , coupes de Montpellier , denier Saint Andre , loudenage de CarcafTonne , & generalement de tout ce qui depend de^dits Domaines. Amendes des Confignations. Amendes adjugees par les Maitrcs des Eaux &: Forets, a Texception de la moitie de celles de la Maitrife de Com- piegne , &c. Dans I'article des cinq groffes Fer- mes etoit comprife obfcurement une branche de revcnus qui eft devenue une des principales de I'Etat ; on parle de la vente exclufive du tabac. Nous avons vii le commencement de Tiifage de cetiQ plante dans la feconde epoque , & que le droit fur fon entree avoit ete fixe a vingtfbis par livre pc- fant. Pour la premiere fois la vente exclufive en fut accordee a wn Fermier Tiij 212 Rccherchcs & Conjidcradons en 1674, avec les droits fur I'etain pour la fonime de cinq cent mille livres pen- dant les deux premieres annees , & pour celle de fix cent mille livres pen- dant les quatre autres. Ces deux pro- duits ay ant ete ainii confondus , il fe- Toit difficile de deviner k combien la partie du tabac feule etoit portee. Le prix du tabac du Royaume fut fixe a vingt fols en gros & a vingt-cinq fois en detail ; le prix du tabac etranger k quarante fols en gros 6i cinquante fols en detail. II paroit qu'en reuniffant ces deux droits aux cinq groffes Fermes , ils ne furent pas e values plus haut. En 1687 le nouvel adjudicataire des Fermes en fut encore charge fur le meme pied jufqu'en 1689. Alors les Prevotes demembrees du Barois furent reunies auxtrois Eve- ches ; & fe trouvant comprifes dans le corps de ia Ferme , elles furent privees de la liberte du debit du tabac. Cette augmentation fut evaluee a fix mille li~ vres. Rien ne fut innove dans les baux de 169 1 &de 1697 ;maisdans cette dernie- re annee la vente du tabac fut diftraite du bail general , fur i'offre du fieur Du- plantier de payer au Roi cent clnquaa- fur Us Finances de France, 213 te mille livres , & de tenir compte an- niieiiement a la Ferme generale de cent mille livres pour tons droits d'entrees , forties & tranfports du tabac pendant fon bail. Les choCes continuerent fur ce pied jufqu'^ i'annee 1714, que le bail flit pafle pour(ix ans ^ Fittz moyennant deux millions pour les deux premieres annees , & une augmentation de deuj^ cent mille livres pendant les qiiaire dernieres. Ce bail n'eut pas Ton entiere execu- tion , parce qu'en 17 18 la Compagnie d'Occident s'en chargea fur le pied de quatre millions deux cent mille livres, a condition de tirer de nos Colonies les tabacs a fumer & a raper , & d'y en fa- voriler la culture. Le prix du tabac de premiere qualite fut fixe en gros k qua- rante fols la livre & a cinquante fols en detail , & les autres qualites k propor- tion. Puifqu'on vouloit abfolument tenter de nouveau la fortune de I'exclufif, ce pro- jet etoit au-moins digne d*une Compa- gnie deCommerce ; mais I'embarras des circonflancesne lui permit pas deTexe- cuter. II etoit d'ailleurs mal - aife que .dcs Negocians ne s'apper^uifent pas T iii] 224 Rccktrches & Conjideratlons qu'il eft impofTible d'ameliorer auciin etabliffement fous le joug deftrudif des monopoles. Aufli en 171 9 le droit fur le tabac fut-il convert! en un droit d'en- tree , avec defenfe abfolue d'en plan- ter dans leRoyaiime. Les revolutions de 172 1 replonge- rent le Commerce du tabac , 6c des lors la culture d'une de nos plus belles Co- lonies, dans TaneantifTement. La vente exclufive fut retablie en faveur de Du- verdier pour neuf annees ; le prix de la Ferme regie a treize cent mille livres pendant les treize premiers mois , a dix- huit cent mille livres pour la feconde annee , a deux millions cinq cent mille livres pour la troifieme , & a trois mil- lions pour les fix dernieres annees. 11 fut tenu envers les Fermes unies de continuer I'abonnement de cent mille iivres par an pour les droits d'entree & de fortie. Quoique ce Fermier eiit ftipule una indemnite afTez confiderable en cas de reiillation , elle fe fit en 1723. La Com- pagnie deslndes rentra dans la jouinan- ce de la vente exclufive du tabac , jnoyennant line avance de quatre-vingt- dLx millions qu'elle fit an Roi. En 172-6 fur Its Finances de France, 215 le prix de la vente fut fixe en gros a cinquante fols , & en detail a foixante fols. Enfin en 1730 le privilege en fiitreu- ni aiix Fermes generales , moyennant fept millions cinq cent mille livres pour les quatre premieres annees , 6i huit millions pour les quatre fuivantes. II n'en a pas ete fepare depuis. Cette impolition eft d'autant plus douce qu'elle eft volontaire. Cepen- dant M. Colbert la croyoit onereufe au Commerce par la forme de fa per- ception. Qu'eut-il done penfe, s'il eut ailez vecu pour connoitre les avanta- ges de la Louiiiane decouverte depuis pen de terns avant fa mort ? Pour rai- ibnner de cette matiere oil regnent beau- coup de prejuges , il eft bon d'etablir quelques maximes preliminaires. II eft evident que raccroiftement de cette confommation n'eft pas du au pri- vilege exclufif de la vente ; au contrai- re, s'il eft vrai que le bon marche d'une denree , qui n'eft pas d'une neceftite premiere , en accroift'e I'ufage , il eft probable que ce privilege nuit & anui a Taccroiftement de la confomma- tion. il eft conftant par experience que les 2i6 ReckcrcheS 6' Conjidiratio-ns tabacs de la Loiiifiane font fuperlenrs a ceux de la Virginie ; que nous ache- tons des Etrangers pour environ quatre millions de cette denree ; &: que la ii- berte du Commerce joinie a quelque encouragement nous cut mis en etat en moins de huit ans d'en vendre aux autres Nations pour une fomme pareil- ie , notre approvifionnenient fait. La liberte fut accordee en I7i9,mais Tencouragem.ent avoit mianque : les ta- bacs de la Louiiiane n'etoient pas plus enetatqu'aujourdhui de foutenirla con- currence des labacs etrangers ; & Tex- clufif effa^a en un inftant les traces du nouvel etabliiTement. Quand meme le revenu du tabac fe- roit de cinquante millions par an , il n'e- galeroit pas ce que la Louifiane en va- leur produiroit annuellement a I'Etat au bout de fix ans de ibins feulcment. Jamais la Louifiane ne iera en valeur fi les tabacs ne font achetes , parce que c'eft la culture la plus promte, la plus fure & la moins couteuie. Cell: par elle qu'ont commence tons les Cul- tivatcurs du lncre& de Tindigo , dont le Royaume aujourd'hui retire tant de millions, . Jamais les tabacs de la Louifiane ne fur les Finances dc France, iiy feront achetes k leur avantage fans la liberte dii Commerce. Trop peu de perfonnes parmi nous font encore en etat de fentir ces verites pour s'y arreter : mais au moins ces propofitions preliminaires aideront a connoitre combien il feroit avantageux de maintenir la balance entre le Com^ merce & la Finance. II ne s'agit point de renoncer ^ un produit fur la confommation du tabac , mais de regler la perception de ce pro- duit , de maniere que I'Etat augmente d'autres branches de revenus ; que le Commerce entretienne deux cent vaif- feaux de plus a la Mer en cinq a fix ans ; qu'il forme fept a huit mille nouveaux matelots ; que TEtat gagne annuelle- ment dix a douze millions de plus fur la balance de fon Commerce ; qu'il fe confomme a la Louifianne annuel! e- luent pour vingt millions de plus de nos denrees. Autant qu'un examen general pent conduire a la connoifiance de pareils details , il doit fe confommer dans le Royaume environ vingt millions de livres pefant de tabacs ; c eft fur le pied de quatre millions de perfonnes , ou du quart du Peuple environ, la confom- iiS Reckerches & Conjidirations mation de chaque pefonne a cinq li- vres. Ce que les uns confomment de plus que les autres redifiera a-peu-pres ce qui pourroit fe trouver de defec- tueux dans ces trois fuppofitions. Des vingt millions de livres , il efl vrai-femblable que la Ferme n'en vend peut-ctre pas les deux tiers , parce que le Comtede Nice, la SuiiTe, I'AUema- gne 5 la Flandre & la Hollande font des verfemens immenfes de cette denree* Le rifque eft grand , mais pour des mi- ferables tout eft compenfe par legain. Si Ton ajoute a cette non-valeur les frais de la Regie , on conviendra fans peine qii'un impot moindre de la moi- tie, mais per9u fur la totalite de la confommation fans frais , rendroit da- vantage. Pour que la totalite de la confom- mation foit foumife au droit , il faut outre les precautions ordinaires, qu'il foit de I'interet du confommateur de le payer : c'eft oil tend ma propofi- tion. La plus grande partie des tabacs verfes en fraude , comme tous ceux de Souabe , ne font pas bons : ceux de nos Colonies au contraire font fi fupe- rieurs a tous les autres , qu'en les don-. fur Us Finances dc France. 21^ nant a tres-bon marche , ils feroient preferes , & que li rifque de la contre- bande ne feroit plus compenfe par le gain. La plantation dii tabac efl defendue avec raifon dans I'etendue des Provin- ces oil la vente exclufive eft etablie : ainfil'entree pent en etre refervee a cer- tains Ports, comme Marfeille, Bayon- ne , Bordeaux , Nantes , le Havre , Dun- kerque. Les tabacs pourroient etre entrepo- fes pour les reexporter a Tetranger : mais en fortant de Tentrepot pour en- trer dans le Royaume , ils feroient por- tes k la manufadure du Fermier pour y etre plombes & ficeles , afin de pou- voir diftinguer ces tabacs. Le droit per^u a la fortie de la ma- nufadure , ou fuivant la foumiflion faite al'arrivee. devroit etre proportionne k la valeur sntrinfeque de la denree. On pent la ranger fous trois claffes ou x[ualites : & vrai-femblablement la con- fommation de la premiere peut etre -evaluee aux trois quarts du total. Sur ces quinze millions de livres , le droit pourroit etre etabli a trente fols , lorfque les tabacs feroient de crCietran- ger, 6c ^ vingt-cinq fols, lorfqu'ils l^O Recherches & Conjidiratlons ieroient dii cm de nos Colonies. Sur ce pied , leurs meilleurs tabacs fe poLirroient vendre trente fols la livre , & le produit des droits fur cette partie feroit au nioins liv. de 18750000 En evaluant la confom- mation de la ieconde qua- lite a trois millions de li- vres , &: le droit a vingt- cinq & vingt fols , le pro- duit feroit au moins de . . . . 3000000 Eftimons k deux millions de livres pefant la confom- mation de la troifieme qua- lite , & le droit a vingt 6c ^ ieize fols , ci . . . 1600000 23350000 Evaluant les frais a . , . • 5000000 II refteroit encore 1 83 50000 de net per^us comme aiiparavant,d'u- ne maniere tout-a-fait volontaire, mais bien autrcrhent avantageufe au Com- merce. II eft plus que probable que la confomniation aiigmenteroit joiirnelle'- th^m par la facilite de confommer ^ & le revertu par confcquent. Toute denree de luxe , dorlt la cul- ture eft irapoftibie ou prohibee dans 1^ i I fur Us Finances de Francs. 131 Metropole, eft la matiere d'un excel- lent impot ; mais en le percevant , il conviendra toujours d'examiner fes bornes , foit du cote du profit de la contrcbande , foit du cote du Commer- ee , finon on ruinera le Commerce , 6c on bornera le revenu. Le Caffe entrant dans le Royaume pour fa confommation pourroit payer davantage aflurement, fans que I'ufage en diminuat : maisil eft prcfque affure que cinq fols par livre payes aux en- trees produiront davantage qu'un pri- vilege exclufif de vendre celui de Saint- Domingue a trente fols , & celui de la Martinique quarante fols ; la raifon en eft toiite fimple. S'il etoit permis de Tentrepofer pour le reexporter , I'e- tranger nous le rapporteroit en contre- bande du cote oil nous fomnies ou- verts. Le profit meme animeroit cette culture dans les Colonies etrangeres ; fious cefferions bientot d'en vendre au dehors. S'il etoit defendu d'en reex- porter , ou s'il etoit charge de droits , ce feroit une meprife grofliere , puif- qu*on fe priveroit par-la de plufieurs millions de revenus fur la balance. Quand meme on n'auroit point a crairf- (drc de verfemens , on ne ferodt pas trois \ji Recherchcs & Conjidirations ans a voir le Commerce dii CafFc di- minuer des denx tiers , parce qu'au- ciine culture ne peut fe foutenir fans une concurrence d'acheteurs plus gran- de que celle des vendeurs. Si au lieu de cinq fols , on venoit k impoier huit fols par livre de Caffe aux entrees du Royaume , probablement avant deux ans,Ie nombre de quintaux qui avoit coutume d'etre declare , feroit diminue de moitie : cependant la con- fommation refteroit lameme ; & s'il s'e- prouvoit quelque changement, ce feroit dans la recette qui diminueroit. On de- mandera pourquoi Ton propofe en ce €as vingt-cinq fols par livre de tabac : c'eft que le tabac peut porter avec foi une marque diftindive. On a cru de- voir toucher en paffant cette matiere, parce qu'on entend dire chaque jour que le Caffe en parti vaudroit mieux que tel ou tel autre impot. Chacun en pareil cas decide pour I'ordinaire com- pile il lui conviendroit en particulier ,que les chofes fe pafTaffent; au moins -devroit-on regarder autour de foi & apprendre a douter. Rien au monde n'eft fi deiicat que la nature des impots fur les confommations ; ce font les plus 4oux , les plus abondans y mais ils ont des fur Us Finances dc France, 253: des proportions de rigiieur, folt avec les aiitres genres d'impots , foit avec une infinite d'autres circonflances. Re- gie generate fur cette niatiere ; c'eft dans les Villes principalement que fe confomment les denrees de luxe, c'eft la que fans gener fon Commerce , & fans crainte des verfemens etrangers , on pent affujettir les confommations aux befoins de i'Etat. Tout exclufif detruit & les Finances & le Commerce y il intervertit I'ordre public: &: la liberte rendue n'a pas encore repare les pertes que la manie des Monopoles nous a caufees. En parlant du tabac , on n'a envifage que rinteret de nos Colonies , par pre- ference a celui des terres de la Metro- pole 5 par pluiieurs raifons. Si k tabac etoit une denree neceflaire , il faudroit plutot en interdire la culture dans nos Colonies-, que de I'abandonner ou de la negliger ici : mais cette denree etant dans la claffe du fuperflu , le veritable calcul femble devoir porter fur la ma- niere la plus lucrative de nous la pro- curer ; & la plus lucrative fera celle qui occaiionera un plus grand travaiL Nous avons peu de terres propres ^ c ette culture , elles ne manquent poins Torrn Ilh y. 2^4 Rechcrckes & ConJideratioTzs d'objets de remplacemens utiles & ni- ceffaires , & nous n'avons pas aflez de matelots dans la proportion des for- ces maritimes qu'exige notre pofition. Cette annee parut une Ordonnance claire & fimple pourtoutes les Fermes^ En 1687 on crut devoir I'etendre ; les formalites s'accrurent. Depuis, les Or- donnances , Reglemens & Arrets , fur les cinq grod'es Fcrmes fimplement , fe font tellemcnt multiplies , que leurs li- tres feuls occupent aujourd'hui douze volumes in-quarto. La caufe de cette propagation eil facile a trouver ; les Fermiers ont ete long-terns en pofTcf- £on de dreffer eux-memes les modeles des Arrets du Gonfeil qu'ils deman- doient ; foit faute des connoifTances de leurs droits ou autrement , il eft peu de ces Arrets qui n'en ayent enfante d'au- tres en extenfion de claufes implicites* Telle eft en partie la fource des deme- les dela Finance & du Commerce. Les Negocians accoutumes i une routine deftyle oujtout ce qu'on veutdire eft: cnonce , ont reclame fans cefte la lettre de la Loi qui jugeoit en leur faveur ; Biais I'efprit etoit contre eux , & ils ont toujours eu tort. - Le Roi donna auffi un Reglement fur fur ks Finances dc France* 2 31 la forme des publications , encheres & adjudications tant des Fernies que des fous-Fermes. On ne pent rien ajouter k la fagefle des precautions prifes dans cette Ordonnance , pour etablir wn^ concurrence parfaite , une liberte en- tiere d'encherir , enfin pour retirer des baux le plus grand pi oduit qu'il fut pof- fible d'en efperer ; la rigueur alia juf- qu'a defendre aux Compagnies d'ad* mettre aucuns interefles qui ne fuffent compris dans Tetat fourni & certifie par eux ; donner aucune gratification , pen- fion ni prefent direftement ou indirec- tement , ious quelque pretexte que ce fut , fans une permiffion par ecrit fignee de Sa Majefle. C'eft un des moyens dont M. de Sully s'^toit fervi pour liberer i'Etat. M. Colbert cut egalement foin qu'- aucun de fes Commlsne fut gratifie ou penfionne par les Fermiers , & qu'ils ne fuffent intereffes dans les aifaires de Finance ; parce qu'une infinite de de- tails leur etant confies , ils fuffent de- venus en quelque fa^on Juges & Pap- ties. Ce fut vers ce tems-U que le Minif- tre fatigue des ptaintes reciproques du Commerce & des Fermiers , & perfua- 2^6 Recherchcs & Conjidcrations de que les Juges des traites faifoient pancher la balance vers le Fermier qui les payoit , imagina 6i etablit une ef- pece d'arbitrage , dont on reflentit les tons efFets en pen de terns. 11 etablit iTn Comite de tiois Negocians connus & de trois Fermiers generaux , qui s'al- fembloient une fois par iemaine chez M. Bellinzani , pour examiner de bon- ne foi toutes les difcuflions qui naiflent chaque jour entre les Negocians & les Commis des Feimiers ; M. Bellinzani departageoit les avis. Les Negocians des Provinces envoyoient leurs Me- moires avcc les pieces juftificatives a leur correfpondant pour les remertre \ I'un des trois CommifTaires ; les Coni- mis de leur cote inftruifoient les Fer- miers ; de cette facon les affaires etoiervt decidees fans frais a Tamiable, & cela dura jufqu'a la mort de M. Colbert* A N N E E 1682. Toujonrs fidele a {^s principes des qu'il le pouvoit , il fupprima trente-fix Offices de Receveurs Payeurs d^^s ren- tes , Receveurs des Confignations , De- pofiraires des debets de quittance, Com- • sniifaire aux rentes faifiesreellementj^^ fur Us Finances dz France, 237 GrefHers des feuilles & immatricules iic Commis y joints, & trente-fix Officiers de Controleurs des Payeurs a charge de rembouifement, II ne conferva que quatorze P^ece- veurs Payeurs des rentes , qui furent obliges d'acquerir au denier vingt , huit mille Hvres de gages ; il leur attri- bua en outre trois mille Hvres par for- me de taxations & de droits d'exercice fans payer de finance. Le Roi fe refer- va la iiberte de \qs rembourfer lorfque bon hii fembleroit , 6c voulut que le prix de leurs Offices ne piit exceder k I'avenir le prix de cent foixante mille livres. En 1670 ils joiiiflbient de fept mille cinq cent livres pour taxations & gages , & de mille livres pour fa^on & reddition de compte ; ainfi cette liqui- dation pour recreer avec augmentation de finance , avoit pour objet de faire en partie les fonds du rembourfement desfupprimes. Les Controleurs furent egalementre- duits a quatorze, en acquerant quinze cent livres de rente au denier vingt , avec attribution de fix cent cent livres pour draits d'exercice fans payer de finance. Le rembourfement des anciennes reu- 238 Rukerches & Conjidcratlons tes avoit ete commence des rannee 1680, & dans celle-ci il en fut cree pour cinq millions an denier vingt , la plus grande partie au profit des pro- prietaires des anciennes rentes. II pa- roit qu'elles furent d'abord afTez recher- chees. Cependant le cinquieme million ne fut conftitue qu'au denier dix-huit y preuve certainede difcredit. On ne s'ecarta point de la methode qu'on avoit fuivie jufqu'alors. Nous avons vu les rentes appellees petites tallies rembourfees au denier dix, Les dix millions quatre cent Tept mille quatre cent dix-neuf livres onze fols cinq deniers de rente qui fubfifloient en 1680 , etoient compofees de trois par- ties ^ Scavoir: liv. f. d. de 5407419 115 d'anciennes confti- tutions decriees dans le Public* de 3000000 . . . des annees 1673, 1674, 1675, 1^7^^ 1677, 1678 au de- nier quatorze , de de 2000000 . . . I'annee 1 679 au de- nier feize & dix-huit, II fut arrete que les anciennes rentes feroient rembourfees au denier quinze^ fur les Finances dc France, i y^ les nouvelles depuis 1673 fur le pied de Jeur conflitution ; Ainfi la premiere partie iiv» ne coutoit que . . . . . • . 81 11 1285 La feconde 42000000 La troifieme 34000000 1571 1 1285 Pour faire cette ibmme il fat cr^e en 1 68c un million - au denier vingt . . . zooooooo/ En 1 68 1 deux I millions de rente V, « au denier vingt . . . 4O000000 / 1 5^00000® En 168 i quatre millions au denier vingt 80000000 Un million au de- nier dix-huit .... J 8000000^ Par ce moyen les rentes fe trouve- rent reduites a huit millions , & I'Etat fetrouva foulage de plus de deux mil- lions de rentes. Tandis que par ces efpeces de vire- mens de parties M. Colbert cherchoit a diminuer les charges de TEtat, il s'qi-- forcoit de rcmedier a une fauife ope- ration de Commerce qu'il avoit faite* II a ete obferve que les Negocians avoient ete prives de la liberte de por- ler les denrees de nos Colonies dans 240 Rccherches & Confidaadons les Ports etrangers k droiture. Alors la cherte de notre fret en augmenta le prix ; & ies Etrangers en trouvant ail- leiirs ^ meiileur marche , ne furent pas difpofes a entrer dans cette compenfa- tlon , qui leur etoit indifferente. Com- me les Negocians etoient encore en pe- tit nombre , ils fe deciommagerent fur les prix de la vente des marchandifes d'Europe , de la perte qu'il y avoit a faire fur les retours ; de facon que les Habitans des Colonies fupporterent feuls cette revolution , & la culture en fouffritbeaucoup. Cependantaumoyen de I'entrepot 6c de la faculte de reex- porter lesfucres a TEtranger fans payer de droits , les fucreries fe foutinrent en- core un peu 5 lorfque les Rafineurs ima- ginerent un monopole aifez fpecieux. 1 lis reprefenterent que les Etrangers ' rafinoient ^ meiileur marche qu'eux , & nous vendoient leurs fucres rafines par preference a ceux de France ; que leur porter des fucres bruts , c'etoit en- core leur donner Toccafion d'accroitre leur manufa6lurc , tandis qu'on privoit les notres de matieres. Ce faux raifonnement , fi fouvent employe, & par nialheur toujours avec fucces fur Us Finanus dc Frcinct, 241 fnccss , iit imprelTion ; auffi-tot il fut defendu de fortir ^^s fiicres bruts. Alors les Colonies fe trouvercnt a la nierci d'line vingtaine de Monopoleurs, qui mirent ^ la denree le prix qu'ils voulurent : les Habitans tombereat dans le decouragement &c la pauvrete. Mais ce qu'il y a de remarquable, les Raffi- neiirs continuerent a vendre tout aufli cher du fucre mal raffine. En effet , ce n'etoit pas a ces caufes qu'il falloit re- rnonter , mais examiner la metbodc qu'employoient les etrangers , Icur eco- nomie,la pofition de leurs Raffineries, ieurs capitaux , le taux de I'interet de leur argent , le prix du chaufFage des cuves , les droits dans Tinterieur, 6c autres circonflances. L'abus devint intolerable ; le Com- merce & la culture pencboicnt vers leur ruine ; lorfque I'lntendant deSaint- Chriftophle , qui poffedoit les habita- tions , fit entendre a M. Colbert que le ieul remede etoit de pe^rmettre I'eta- bliflement de cinq Raffineries dans les Colonies , a rimitation des Anglois. Par-la, difoit-on, nous ferons nous- i-nemes le profit des Raffineries : deux livres de fucre brut rendent aux Co- lonies une livre de fucre raffine ; en Tome ///, X 2.42. Reclurchcs & Conjidcrations France , il en faut deux livres & de- mie : ainfi nous ferons en etat d'en vendre aux etrangers oc de n'en point recevoir d'eiix. M. Colbert y confentit ; mais il ne fut pas long-tems fans epronver que les principes Ibnt la ieule autorite en ma- tiere d'Etat , parce qu'elle n'egare ja- mais. En moins d'un an plus de cin- quante des Vaiffeaux qui faifoient le Commerce des liles reflerent dans I'in- adion ; les matelots manquoient d'ou- vrage & defertoient ; il ne s'en for- moit point de nouveaux. II crut for- tir de ce mauvais pas, en ordonnant que les iucres raffines des Ifles paye- roient huit livres de droits d'entree dans le Royaume ; fcavoir , fix livres aux fermes unies , &: deux livres au Fer- mier d'Occident. Ce fut un impot'tres- favorable aux Colonies des etrangers , dont les denrees n'etoient point foumi- fes a de pareils droits avant d'etre re- exportees dans les divers marches de I'Europe ; mais il ne remedia point au mal. Cet expedient ne pouvoit meme reuflir ; il ne failoit que prendre la plu- me ; notre fret etoit en general a douze deniers de la livre environ. Dix quin- taux , reduits k cinq au raffinage 5 ne fur Ics Finances de France, 243 payoient plus que 25 liv. de fret. Le droit etoit de huit livres , fur cinq quin- taux 40 liv. En tout, 65 liv. ci. ... 65 Les dix quintaux de "J fucre payoient de fret 50 | Pour les quarante fols 1 du cent 20 Pour une barrique de I plus & fon roulage, I foit a I'Amerique, foit VSB en France, & autres frais 2 Pour le coulage a dix pour cent, le fucre fe vendant alors 16 liv. environ 16 Difference fur dix quintaux 23 1. ce qui revenoita pres de trois livres par quin- tal. Pour les egalifer, ileut fallu impo- fer douze livres fur les fucres raffines ; &: autant eut-il valu afficher une de- fenfe d'en vendre aux etrangers. En 1684, on fut oblige de defendre d'etablir de nouvelles raffineries aux ifles de I'Amerique ; mais on laifTa fub- fiiler celles qui etoient etablies , puif- quelesparticuliers avoienten cela exe- cute les ordres du Prince. M. Colbert Xij 244 R^ch&rches & Conjideratlons Ics eut fait detruire en dedommageant les Propriitaires ; & vrai-femblable- ment il eut rendu la liberte au Com- merce des fucres bruts : car un grand homme eft fujet k I'erreur , mais il n'a point honte de la reconnoitre : voila peut-etre la feule difference effentielle qui foit entr'eux & le refle des humains. La France I'avoit perdu : les Raffine- ries anciennes fubfifterent, ^ il fe trou- va uneinegalite entre les habitans tout^ a-fait defelperante; les RafHneurs exer- ccrent un monopole veritable. La re- exportation des fucres bruts continua cependant d'etre defendue , & Ton comptoit alors que de vingt-fept mil- lions de livres de fucre fabriquees dans nos Colonies , il en reftoit environ fept naillions en furcharge. La culture , loin d'augmenter , fe mit au niveau de la vente, comme Ton peut penfer. Les Compagnies exclufivcs pour la traite des Negres les vendoient fi cher que les habitans n'avoient pas le moyen de les payer avec leurs denree?. Us fe fou- tinrent avcc le tabac, le cacao , Tindi- go ; mais apres la paix d'Utrecht , leur pauvrete etoit extreme , comme Ton fcait , & le nombre fort diminue. Le fu crc brut qui ea 1682 fe yendoit de fur les Finances de France. 14^ quatorze a qulnze livres en France, ne valoit plus que cinq h fix livres ; il n'al- loit pas cinquante Vaiffcaux dc tous nos Ports dans ces Colonies; enfin dies fe trouvoient moins avancees qu'en 1669. Depuis , les chofes fc font retablies ; niais nous n'avons pas laifl'e de perdre la moitie fur notre naviga- tion ; nos Raffineries de France , aux- quelles on a fait tant de facriHces , n'ont pas ete un feul moment en etat de hitter avec les Raffineries etran- geres. On ne pent fe refufer a trois obfef- vations importantes que prefente I'ex- pofition de ce fait. De quelle circonfpe£lic>n ne doit-on pas ufcr dans les decifions fur le Com- merce , puifque la premiere demarche entraine des fuites H longues & fi de- plorables ? Ou plutot doit-il etre fait nu- cune operation que le principe n'en foit demontre avec la plus grande evidence ? Car c'efl de-la que tout depend. On ne s'avifa point de revenir au but d'ou Fon etoit parti , parce que le m6tif de la premiere demarche etoit repute bon : niais dans le Commerce , comme dans la Phyiique , il ne faut pa^ tou jours croi- re les premieres apparences. Cette re- Xiij 2,46 Recherches & Conjidlrations cherche eft penible , fi les grands prm- cipes & leur enchainement ne font for- tement imprimes dans la memoire : avec eux il n'eft plus de route obfcure. Dans le cas dont il s'agit, la concur- rence bien connue eut enfeigne que , fi le nombre des acheteurs d'une denree n'eil pas proportionne au nombre des vendeurs , elle s'avilit ; que s'aviliffant , la culture en diminue : d'oii Ton auroit conclu que le nombre ordinaire des acheteurs du fucre brut etant force de fe retirer, leur aviliffement & I'aban- don de leur culture etoient une confe- quence neceffaire de la demande des Raffineurs. En portant le meme efprit dans Texamxcn de la fituation de nos Raifineries , & peut-erre fans fortir des confequences qui refultent de la con- currence , on eut trouve immanqua- biement le rem.ede certain. La feconde obfervation , c'eft que toutes les decifions en fait de Commer- ce font une affaire de calcul : les prin- cipes indiquent la maniere d'y proce- der & lui fervent de preuve. S'ils fe trouvent en contradidlion , ou le prin- cipe eft mal applique , ou le calcul eft fautif. II eft de toute impoftibilite de citer un exemple du contraire ; 6c Ton fur ks Finances dc France. 247 feroit un gros volume des faiites poli- tiqiies commifes dans les divers Etats de I'Europe, lorfque cette methode a ete negligee. Enfin remarqiions que notre fret etant aujourd'hui de douze a quinze denlers, notre Navigation paroitroit prefque doublee depuis 1 680 , eu egard a la dif- ference des efpeces. Cela n*efl: peut- etre pas ainli cependant en tout fens ; c'eil-a-dire que peut-etre nous n'em- ployons pas douze cent vaiffeaux a no- tre Commerce etranger ou eloigne : nous avons conftruit de plus grands vaiffeaux; la concurrence des tonneaux de mer eft quintuplee dans nos Colo- nies ; dans d'autres branches, principa- lementa Tegard de la peche , depuis la ceflion de Plaifance & de I'Acadie, elle a diminue. Ajoutons encore que la con- currence generate de toutes les Nations dans la navigation , les a forcees mu- tuellement a baiffer le prix du fret. II paroit vrai-femblable que la valeur de nos Colonies eft dix fois plus grande a prefent, valeur intrinfeque, qu'en 1680; que la fomme generale de notre Com- merce eft triplee , valeur intrinfeque ^ §C qu'il eft plus folide , mais il fembie X ili] 148 Recherches & Conjidlratiom doiiteux que le nombre de nos mat€- lots ait double : car volla la preuve lb- lide de raccroiffement de la Naviga- tion. Cependant , fi Ton excepte la Hol- lande , on verra que dans tous les au- tres Etats de I'Europe, leur nombre a triple au moins depuis 1680. Sansjouir de tous nos avantages , nous pourrions encore augmenter notre navigation de moitie en peu d'annees : car nous ne faifons a vCie de pays gueres plus du tiers du Commerce qui appartient k notre pofition. Des-lors ii I'influence du Commerce fur les revenus publics eil de cent milions , il y a une amelio- ration a faire de deux cent millions ; fans compter celle que comporte Fetat a£luel des chofes. On ne dit point ces ehofes pour etre cru par beaucoup de perfonnes; mais feulement afinque plu- iaeurs etudient alTez la queflion pour trouver des incredules ^leur tour. Snp- pofons cependant la proportion poffi- ble pour un moment , FEtat retentiroit de cris de joye ; qu'un traitant propofe vingt millions pour une affaire extraor- dinaire , le trouble eft dans toutes les families. Comme il eft bon de faire marcher Toir.i 111. page 149 PARTIES DU TRESOR ROYAL en 1682. Uecettes generales . . ; 19488757 16 Fermesunies 44955915 S Gabelles de Languedoc & RouffiUon 1x50000 7 les dequatre millions en deux annees, » & fur les Fermes deux millions. » En cas de guerre : la plus grande » depenfe pendant les guerres paflees » ayant ete de cent-dix millions, » Pour former cette fomme , 2 JO Recherchis & Conjidirations » Les revenus ordinaires » monteront a » Par augmentation fur » les Tallies pour les por- » ter k quarante millions . . » Augmentation d'un ecu » fur le prix du Sel .... » Sur le don gratuit de » Languedoc . » Sur ceux de Bretagne, » quatre cent mille livres; » de Bourgogne , quatre » cent mille livres ; de Pro- » vence , deux cent mille » livres » Alienation de cinq cent » mille livres de rente fur » la Ville de Paris au der » nier vingt Iiv, 9000COOO 10000000 1800000 I 000000 I 000000 I 0000000 1 13800000 » Par ce moyen fans aucune affaire » extraordinaire , &: fans trop charger » les Peuples , Sa Majefle auroit fon » fonds aifure pour toutes les depenfes » de [a guerre ». La recette de Tannee avoit monte a 85000000 Je trouve qu'a la fin de cette annee il etoit Defense effective faite en 1682. Maifon dii Roi 768318 Chambre aux Deniers 1561956 Ar|enterie 11 36947 Treforier des Menus 3^9691 Ecuries 714570 Achat de che^aiix iiooo Treforier des OfFrandes 149867 Prevote de I'Hotel 61950 Gardes du Corps 100165 Cent Suiffes de la Garde 5954' Venerie & Fauconnerie 310861 Louveterie 34^93 Maifon de la Reine I3i99'<9 Maifon de Madame la Dauphine 1100991 Maifon de Monfieur loioooo Maifon de Madame 151000 Recompenfes '37^13 Comptant es mains du Roi 1117000 Batimens 5957916 Ligues Suiffes 171000 Garnifons 1410457 Etapes . 1180890 Pain de munition 41191 Extraordinaire des Guerres 367S0186 Gratifications aux troupes 967963 Marine 6160330 Galeres 1619514 Fortifications 9x16981 Canal des Mers 456133 Ambaffades 845310 LaBaftille 75092. Penfions . 1389453 Gages du Confeil 1108157 Appointemens des Marecliaux de France 346875 Ordoniiances de comptant pour gratifications . . . . 1971147 Affaires fecretes 1167787 Acquits-patens 149700 Poms Si Chauffees ^98717 Pave de Paris 575^9 Payemens des arrerages de rentes 7038370 Commerce & Manufaftures 500000 Rembourfemens 90418098 Interets d'Avance 1665563 Menus Dons &c Voyages ' ^ooooo Total . ; ; : '90115383 fur Us Finances dc France, 251 liv» De I'autre part... 85000000 du par la Caifle des Em- prunts 28889698 Ilfutconfoiiimed'avan-)> 44622272 ce fur 1683.. '573^574. II fut conftitue , comme on Ta expliqiie , cinq mil- lions de rente au capital de 98000000 22762227:^ La fomme des depenfes fuivant le detail etoit de.. 190215583 Excedent de larecette.. 37406689 II a ete remarque qu'a la fin de I'an- nee 168 1, les dettes non conftitiiees montoient alafomme de 37739488 iiv. y compris vingt-quatre millions de la caifTe des emprunts. Si Ton impute en acquit de cette fomme Texcedent ci-def- fus,ilreftera 33^799 A ce refultat il convient d'ajouter la dette de la CaifTe des Emprunts. . . . 18889698 Total des dettes non conflituees 29222497 Sans compter le pret de fept millioas i 5 1 Recherckcs & Conjidcr aliens fur Ics Fermes renouvelle d'annee cri annee par convention du Bail. On avoit conromme d'avance fur 16831a fomme de quinze millions fept cent trente-deiix mille cinq cent foixan- te & quatorze livres ; ainfi la pofition des Finances etoit tres-delicate : il fal- loit en fortir promptement , ou fe re- foudre a rentrer imperceptiblement dans le defordre & la confufion. Cependant on ne manquoit point de reffources , pourvu que I'economie ne manquat point ; les rentes fe trouvoient reduites a huit millions , les autres char- ges a quatorze millions huit cent qua- tre-vingt-dixneuf mille fix cent quatre- vingt-cinq livres; en tout vingt-deux millions huit cent quatre-vingt dix-neuf mille fix cent quatre-vingt-cinq livres. La CaifTe des emprunts & le credit ^QS gens d'affaires avoient aide a ra- cheter les Domaines & autres aliena- tions faites a has prix ; ces rachats , avec quclques legeres augmentations de droits , mais particulierement la con- currence libre des encheres , avoient porte la valeur des Fermes fort loin; de fa^on que le Roi reglant les depenfes a quatre-vingt millions , la CaiHe des emprunts &: les anticipations fur les re- " Us Finances dc France, ^ 253 fiiffent trouvees amorties en ; trois annees. En pouiTant Parties da Trijbr Royal ai 1683. Fcrme generale des Domaines .......... 4470°36 Ferme generale des Gabelles 8730707 Secondes Parties de ladite Ferme 51917 Ferme des cinq groffes Fermes 10913854 Secondes Parties 116166 Ferme generale des Aides 11111017 Secondes Parties 6650 Second quart des 1160000 liv. en deduflion des 7300000 liv. dues par le precedent Fermier . . . 56 5000 Ferme des Gibelles de Lyonnois 1401144 /(ism de Provence 8c Dauphine 1549774 Ferme du Tiers-fur-taux & Quaranjieme de Lyon 340000 Ferme des Gabelles de Languedoc 1456393 Secondes Parties ' 4665 Ferme des Droits de I'Amerique & du Canada. . . . 1 19441 Recette generale de Metz & Impofitions d'Alface 633696 Recette generale & Don gratuit de Beam 15108 Recette generale de Bourgogne 5c Impofitions pour les garnlfons 86000 Don gratuit de Bourgogne & Subfiftance 88333 j Subfiftance de Breffe 105165 Impofitions de Franche-Comte 814115 Impofitions pour les garnifons de Languedoc .... 193 183 Don gratuit de Languedoc 1316194 Don gratuit de Provence & teires adjacentes .... 630000 Recette generale de Bretagne 104473 Don gratuit de Bretagne iiooooo Don gratuit d'Artois, refte de 1681 I3333J IJiin en lii'i 166666 Aides Sc Dons gratuits deFlaadre. . 1150600 Revenus cafuels . 1000000 Bois . . ; 101437} Recettes generates des Pays d'Eleflions ...... 11959961 Principale feconde Pariie 1980615 -Autre feconde Partie 530000 Total 86987011 q«atre millions environ en diminution fur les Tailles. 1069964 9195 I 90 > 466146 } 88797} .41755 53oii(» 60000 899607 130558 146077 94078 '055135 '5875 73705 398073 300854 10400368 fur hs Finances dc France, 2^3 vcnus fe fiiflent trouvees amorties en moins de trois annees. En poufTant meme reconomie plus loin de trois ou quatre annees encore , la plus grande partie de rentes fe trouvoit eteinte , & les Finances dans le plus bel ordre qu'elles fe fuffent jamais trouvees de- puis M. de Sully. A NN E E 1683. On en jugera mieux par la table des parties du Trefor Royal pour I'annec 1683. La totalite des impofitions etoitcent douze millions huit cent foixante & feize mille fept cent iix livres feize fols. II fut emprante des Fermiers fept millions fur 1684 > & ^^ CaiiTe des em- prunts fut limitee a vingt millions. On auroit fort defire pouvoir tou- jours mettre Ics objets fous Iqs yeux du Lc^eur avec la plus grande preci- lion ; mais on n'a prefque rie^i pCi re- couvrer que par parcelles detachees , don»t il a fall u etudier les rapports avec quelque foin pour en former un tout. On le prefente cependant avec d'au- tant plus de confiance , que Tapplica-, 2,^4 Recherche s & Conjiderations tion n'a point manque ; & que tous les Memoires du tems , fans entrer dans le detail , conflatent que telle etoit la fi- tuation oil M. Colbert laiiTa les Finan- ces. On peut fe reiTouvenir qu'en i66 c les impofitions montoient a quatre- vingt-quatre millions deux cent vingt- deux mille quatre-vingt-feize livres, les Charges a cinquante-deux millions trois cent foixante & dix-fept mille cent foixante & douze livres. Ainli il avoit diminue les Charges de vingt-fix millions quatre cent quatre-vingt-fept mille quatre cent quatre-vingt-quinze livres ; il avoit augmente le produit des impofitions de vingt-huit millions fix cent cinquante-quatre mille fix cent quatorze livres , & les parties du Tre- for Royal au total de cinquante-cinq millions quarante-deux mille cent-neuf livres. Sa reputation eft telle dans I'Europe, que pour louer un Miniilre , I'adulation meme n'a encore rien pu imaginer au- defliis de ce parallele. S'il n'eft pas le premier parmi nous qui ait combine la nature des divers impots , il en a per- fedionne les proportions , foit en rejet- tant fur les confommations libres une partie des contributions arbitraires , qui fur ks Finances de France, 2 5 s; felevoient auparavant fur la terre, foit par I'habilete qu'il eut de rendre ces con- fommations plus faciles , en limplifiant les droits , en les reunifTant fous una meme regie , & prefque toujours en di- minuant leur exces. Par cette methode il foulageoit reellement le Peuple , & groflifToit les revenus publics. Les de- penfes extraordinaires , auxquelles il fut oblige de pourvoir , etendirent ne- ceffairement ces droits fur une infinite d'objets , qui n'y avoient point ete fou- mis , principaiement dans la Capitale , dom il crut fans doute que TaccroifTe- rnent dangereux 6c journalier devoit au moins dedommager les Finances de I'Etat du prejudice qu'il portoit a routes fes Provinces. Sa politique , utile au Royaume, deplut aux habitans & fur- tout au peuple de la Capitale, que des menagemens, quelquefois forces , dans des terns differens , avoient accoutume a s'en faire une efpece de droits, & dont les plaintes ou les acclamations , fe fai- fant entendre plus facilement , font trop fouvent regardees comme le voeu national par ceux qui ne connoifTent pas les Provinces, ou qui n'envifagentqu'ua feul objet a-la-fois. 1^6 Recherches & Con/Aerations Ce n'eft pas que la conduite de M. Colbert n'efTuyat encore quelques re- proches dans les Provinces. II avoit trouve tons les odrois des viUes & leur adminiilration dans un tel defordre , que leur objet n'etok pas rempli , tandis que les Adminiflrateurs , c'eft-a-dire , prefque toujours les plus riches & les plusaccredites , avoient detourne a leur profit particulier k patrimoine du Pu- blic. L'ordre &l*economie qu'il cut la fagefle d'etablir dans cette partie ,la li- quidation qu'il fit faire des dettes des Communautes , le mirent en etat de faire porter au trefor public la moitie de ces o£^rois , dont I'aiitre moitie fut appliquee aux befcins publics , & les rcmplit mieux que ne faifoit aupara- vant la totalite. Ceux dont cette refor- me arretoit les pillages ne manquerent pas d'accufer le Miniflre d'enfreindre les privileges des villes, toujours ref- peftables fans doute lorfqu'ils font uti- les au Peuple, mais dont le Prince , qui eft le pere du Peuple , ne doit jamais foufFrir que lesinterets particuliers puif- fent fe prevaloir. La liberation des det- tes de TEtat ne pouvoit s'operer fans un accroiirement de recette ^ dt il etoit plus fur Us Finances dc Prance, 157 plus naturel de detourner en fa faveur line partiedesimpofitionsetabiies , que ^Qn imaglner de nouvelles. Le retrancheinent d'lia grand nom- bre d'Offices inutiles, & des privileges qii'ils avoient exceflivement multiplies, foit en llqnidant leur fi'nance, foit en les rehdant cafuels , fut encore un des moyens dont M. Colbert fe fervit pour angmentcr les revenus de I'Etat. Par cette operation il rendit des homines aux travaux utiles de la fociete ; il aug- menta la clalTe des contribuables a la taille , a Timpofition du fel ; il diminua les charges alfifes fur les revenus; mais il defola ^qs families qui s'etoient fon- de un etat fur les debris de la fortune publique. Un grand nombre regardolt deja comme un patrimoine hereditaire les alienations qui leur avoient ete faites de preXque tous lesDomaines , & d'une partie des droits des diverfes Fermes : ces Engagiftes n'eurent pas aflez d'c- quite pour voir , fans murmurer , TEtat rentrer dans fes proprietes & {qs reve- nus , en imputant fur le capital qu'il avoir re9u une partie des jouiiTances exceflivement ufuraires. La-redudion 8cle rembourfement de Tom6 HI. Y 2)S Rechcrches & Conjidcrations diverfes parties de rentes , vendues aiix Traitans a des prix fort onereux , fiit le cinquieme moyen par lequel M. Col- bert reullit a diminuer les charges qui abibrboient les revenus publics , & re- duifoient le Corps politique a rimpuif- fance abfolue , foit de conferver au- dehors I'influence qu'il devoit avoir, Ibit de rendre la pofition des peuples plus heureufe : mais par une economie^ qui peut difficilement etre juilifiee , 6i dont I'avantage fera trouve mediocre , s'il eil balance avec celui qui reiiilte de la confiance publique dans un Etat quf peut avoir de grands befoins , les an- ciennes rentes , creees fur la foi. publi- que, fe trouverent enveloppees dans la refornie generale de cette partie , fous pretexte qu'elles avoient partage dans le Public le difcredit general de toutes les affaires. Leurs proprietaires avoient ete aiTez malheureux de fe trouver pen- dant long-teins dans I'incertitude fur la valeur intrinfeque de leur capital , & d'eprouver deux retranchemens fuccef- fifs fur les intercts , fans en effuyer de nouveaux dans un terns d'ordre , & fe voir affigner un rembourfement au- deflbus de la rente reelle qui leur etoit confervee. Un petit nombre de millions fur les Finances de France i 259 epargnes par cette voie en coute beau- coup davantage , lorfque les befoins publics forcent dans la fuite de recou- rir au credit. Si jamais la bonne conduite generate d'unMiniflre pouvoit lui alTiirer le droit de faire quelques fautes, Tadminiftra- tion de M. Colbert ne permettroit pas fans doute de s'arreter liir quelques er- reurs ; mais la pofterite , qui n'envie pas les eioges bien merites , ne fuit pas nosi plus pour le blame d'autres regies que celles de la juftice etroite & rigoureufe. Elle n'en admirera pas moins le genie de ce grand homme & fon courage , fans lequel fon genie eut ete inutile , s'il eft vrai que ces deux qualites puif- fent etre feparees : la derniere fur-tout lui fut extremement neceffaire pour un etabliffement qui pent devenirfort dan- gereux , lorfqu'il n'eft pas fort utile , & dont les circonftances enervent prefque toujours I'utilite. Les Traitans avoient tellement abufe du malheur des terns , qu'ils fe trouvoient creancicrs de TEtat pour des fommes immenfes fur des ti- tres furpris ou chimeriques , ou en Ver- tu de traites dont la lefion etoit mani- fefte. La corruption des hommes eil telle , que jamais ges fortes de gens n'ont l6o Richerches & Confidirdt'ions tant d'amis ^dc protedeiirs, que dan^ les terns de confiiiion. Le luxe que pro- duit cette enorme inegalite de fortunes rapides , fi different du luxe qui refults de Taifance nationale , 66 que tant de perfonnes confondent , la cupidite que ee luxe vicieux allumc dans les coeurs y prefentent a la fois des motifs pour creer des Chambres de Juftice , &, les caufes qui en font prefque touiours per* dre tout le fruit. Celle que M. Colbert fit inftituer eut un fucces proportionne ^ Tetendue des defordres & des de- predations qui avoient precede fon mi- niflere , & a fa fermete appuyee par toute I'autorite 6c la confiance de fon. Maitre. Cependant, on ne peut difconvenir que I'exces des abus anterieurs n'euC contribue a rendre le fucces de ces ope- rations plusfenfible & plus brillant qu'il ne I'eut ete a la fiiite de ces terns , ou les formes de Tordre confer vees ne fer- vent qu'^ Gouvrir fourdeuient de leur ombre le mauvais arrangement & la diffipation lente des Finances. Mais cette reflexion , accordee. a k verite , ne pourra jamais fervir d'excufe ^ la foibleffe ou a la negligence des Minil- tre3 qui fe refuferont ides operations fur Us Finances dc France, I'^r juftes & vigoureufes : & elle ne dok pas dini-inuer la gloire de M. Colbert qui en merite plus d'une. Un Minifli'e moins habile & itioins afFe£lionne k la gloire de fon Maitre , auroit pu fe eontenter de la reputation que lui don- noit la liberation des revenus ; &: fe- parant, par une combinaiibn anili mal^ adroite que coupable , les interets du Peuple de ceux du Souverain , il auroit neglige les moyens d'accroitre la for- tune de i'Etat. Celui-ci trouva^dans Ton genie &: dans (on amour ponr la Patrie des resources pour accroitre I'ailance publique , dont TefFct neceffaire eft d'enrichir le Prince : il rappella les Arts, I'induftrie & I'a^^ivite, que lamifere-, I'exces des impofitions & la multipH- cite des Offices avoient bannis depuis long-tems : il prefenta a fa Nation les trois objets d'emulation qui lui arrache- ront toujours des prodiges , I'interet , la confiance , & les diflindions. Des Hianufaduresde toute efpece creees& perfedionnees en peu de terns , occu- perent une multitude de pauvres oiiifs , retinrent parmi nous les tributs immen- fes que notre vanite &: nos befoins pafyoient egalement aux etrangers , at- lirerent meme leurs ridaeiTes , donne- 262 Rechcrchcs & Conjidcrations rent a I'argent , & par confequent aux denrees , aux conlommations & aux Finances , iin mouvement inconnu juf- qu'alors. L'interet de I'argent tombe & fixe legalement a cinq pour cent pro- cura a la Noblefle & aux proprietaires des terres des moyens de fe liberer ou de faire valoir leurs domaines , aidales Negocians a foutenir la conciurrence des etrangers , reduilit le benefice des gens d'affaires , & diminua les avanta- ges de Toifivete. Les Francois decries & avilis au Levant y reprirent le pre- mier rang , & leur pavilion y fervit de fauve-garde aux autres Nations. Les Colonies , alienees par des fommes qui fufiiroient a peine aujourd'hui pour payer certaines habitations, & plus connues des etrangers que de nous- memes , furent reunies au Domaine de la Couronne , peuplees & cultivees ; en echange de nos vagabonds , du fruit de nos terres &de nos manufadures, elles nous envoyerent des denrees pre- cieufes que nous fourniffoient les au- tres Peuples , elles nous ouvrirent des peches abondantes , &: nous formerent des matelots ; en peu d'annees nous ne dependimes plus que de nous-memes , 6c la France fe fonda une puiffance ma- fur Us Finances dc France, 16^ ritime fur iin grand Commerce , fans lequel cette forte de puifTance ne peut fubfiiler. . _ Le Miniflre , veritablement createiir dans cette partie , forma fes projets & les executa en moins de terns qu'on n'en a quelquefois employe a difcuter fans fruit des ufages funeftes a I'Etat, ou des verites qui lui feroient utiles. Cette rapidite fans doute ajoute a la gloire du fucces 5 & demontre a la fois une eten- due peu commune dans les vucs , une grande jufteffe dans les mefures , &: une facilite furprenante dans le travaiL Mais quelques qualites qii'il eut re9ues de la Nature , elles n'auroient point produit les memes effets, fans une gran- de application aux principes , fur lef- quels doivent rouler les affaires du Gou- vernement , avant de les manier. M. Colbert, occupe des fucces du Commerce , ne perdk point entiere- ment de viiel'agriculture, comme quel- ques perfonnes ont afFedle de le dire , parce que tres-peu fgavent contenir leur jugement entre les extremes ; mais ii eut le malheur de fe meprendre fur les moyens de la foulager & de Tani- mer. Vivement afFede du fardeau des Tallies, fous lequel gemiflbient les cam^ 164 Recftcrckes & ConJiJeranons pagnes , il I'embia n'avoir cherche de nouvelles foiirces de Finances , que pour menager d'annee en annee cette branche qu'on deffechoit depuis un de- mi-fiecle : non content d'avoir dlminue les Tallies de pres de la moitie de la fomme a laquelle il les avoit trouvees^, il chercha a encourager la population par des recompenfes qui auroient peut- etre mieux reuili , s-'il etit ete moins dit- 11 ficile de les obtenir , mais qui ne farent * pas non plus infruftueufes dans les campagnes. II travailla a regler PafTjete des Tallies, a prevenlr ks maux- de Tarbitraire; enfin il protegea la noiir- riture du betail, veritable fource de la fecondite des terres, & il parvint me- me par des gratifications a en former un objet de Commerce qui s'eft perdu depuis, & dont la chute coute annuel- lement plufieurs millions a I'Etat. Mais par un defaut de combinailbn , qui ter- nit , il faut Tavouer , la gloire de ce miniflere , M. Colbert diminua plutot }a mifere des Agriculteurs qu'il ne ks cnrichit. En vain defiroit-il que la terre, mieux travaillee par ks foins du laboii- reur foulage , portat des recoltes plus abondantes , fi la gene dans le Com- merce des grains rendoit qquq abon- dance fur les Finances de France, 165 dance onereiife aiix Fermiers & aux proprietaires. En vain diQ% coteaux ari- des fe fiuTent-ils converts de vignobles, {i des droits trop confiderables , &; ine- galement repartis a la fortie pour I'e- tranger , reduifoient le vigneron a Tin* certitude de retirer les frais de fes fa- 90ns. Un coup d'oeil de comparaiibn fur les Manufadures Feut averri qu'el- les n'euffent jamais profpere , ii le Com- merce n'en eiit pas ete iibre au-dehors comme au-dedans , & que les plus flo- riiTantes etoient celles qvie la demande de I'etranger avoit rendues telles. Ce principe evident bien faifi fe fut allie faciiement dans Tefpritdece grand hom- me avec les mefures neceitaires pour la furete de rapprovifionnement na- tional. Une conduite difFerente priva le Royaume d'un produit confiderabie , qui auroit enrichi les terres direde- ment : les colons ne reffentirent TefFet des noiivelles richelTes introdultes que par des circulations longues & embar- ralTees ; les proprietaires connurent de nouveaux motifs de depenfer , fans trou- ver dans la vente de leurs denrees un accroifiement Tuffifant de nouvelles fa- cidtes. Ce qui devoit marcher enfem- ble & fe foutenir mutuellement , pa- Tome III, ^ l66 Reckcrches & Conjidirations rut avoir des interets diiterens , & le parti que favoriloit la liberte preva- lut. Lorfque des tems plus ditHciles fur- vinrent , ou que des mains moins ha- biles adminiflrerent les affaires , ie fou- lagement dont les campagnes avoient joui fut retire. II devint fi commode a \\n MiniHre de fe procurer dix millions d'extraordinaire par les Taillcs , que cette reffource fut bientot epuifee. Les habitans retomberent du mal-aife dans i'indigence ; a mefure que Timpofition augmentoit , que les privileges le mul- tiplioient, les vices de I'aibitraire fe faifoient reffentir plus vivement; la nourriture du betail s'aneantit fous la rigueur de I'impofition , des faifies qu'il fut permis d'en faire, & des pourfuites. La milice mina la population affe6lee a I'agriculture pendant une guerre lon- gue oc fanglante : enfin cette partie s'a- neantit fous les debris de la Finance avec le Commerce lui-meme , dont les fondemens etoient mal affures. Telle fut la fuite d'une faute commife par im Miniilre qui fem.bloit ne pour don- iier le modele de tout le bien dont ce P*.oyaume etoit fufceptible. Par une fa- talite inconcevable, Fefprit de fes meil- far ks Fifiances dc France, 167 laires inilitiitions n'a pas ete parfaite- nient fuivi, & Ton a copie fervilement fes erreurs, ou plutot on les a poitees a I'exces dans des terns oil ragriciilture etoit bien dechiie du point 011 il I'avoit laiffee. C'efl ainfi que la plupart des fucGeffeurs de M. de Sully , negligeant les-methodes dont il s'etoit fervi pour retablir le Royaiime , iirent un ulage immodere des rePiburcesruineufes qu'if avoit employees dans des momcns de crife qui ne laiflbient point la liberte du choix des moyens. On a deja obferve que M. Colbert s'etoit donne des entraves dans la par- tie du credit public ; cependant il n'ea fut pas totalement depourvCi, il f^ut fe fervir de ce qu'il lui en reftoit , 6z il ne donna pas plus de dix pour cent aux Financiers pour ieurs avances , comme on les a encore donnes long- tems depuis. Gene dans fes resources par la difticulte que fes envieux lui fuf- citoient pour de nouvelles impofitions generales , quoique pailageres , il fut oblige d'avoir recours aux Traitans , qui le tromperent quelquefois ; niais ii ne fortit point du principe qu'il s'eroit forme de borner les rentes perpetuelles fur I'Etat a la fomme de fept a huit mil- Zij a68 Reclurchcs & Conjldirat'ions lions. La guerre ^^ des depenfes extra- ordinaires le firent fortir de fes mefu- res ; il y rentra promptement , & fou- lae;ea plus cfficaccment la Nation par ceite conduite prevoyante, que s'il eiit augmente les charges perpetuelles fur la poflerite pour epargner a fes con- temporains quelques murmures paffa- gers. Quoiqu'ils le foup^onnafTent de du- rete, on a vii qu'en Miniflre fidele & Citoyen, il portoit dans toutes \qs oc- cafions ies belbins du Peuple aux pieds du Trone , interefTant toujonrs en leur faveur la gloire & rhumanite du Mai- tre. Le petit Memorial en forme de note , dont on va voir la copie fur I'o- riginal de fa propre main , prouvera , quoique trcs- court , fon zele pour le Public , I'etendue de fes vues , la vigi- lance 6c I'a^flivire de fes bonnes inten- tions. Snperieur a fapartie, & perfua- de de cette grande maxime, que Tai- fance du Peuple eil la richeffe du Sou- verain , on ne le vit point proteger les pretentions tl I'avidite des Fermiers contre les ccntribuables, & fous pre- tQxto. d'ameiiorer les diverfes branches desrevenus, etendre reellement I'im- pofition. 11 etablit des regies fimples & fur Us Finances de France, 269 claires pour la perception , dont Tob- icurite infpire toiijours la defiance aux Siijets , & ne fert o^\xk voiler des vexa- tions dangereiifes , ou des liirprifes fai- tes a la religion du Souverain. Aufli loin d'affujettir fes operations aiix ma- ximes des Financiers , il les for^a de regir fuivant les principes des Finances de I'Etat : 6l pour les tenir dans la juf- te dependance des interets publics, il bannit non-feulement le trafic honteux des emplols qui s'etoit etabli a la Cour , mais il fit oter par un fage Reglement aux Courtifans , tz a tous ceux qui en- tourent les Princes, la faculte d'avoir aucun interet dired ni indired dans les Fermes du Roi. II ny admit que des travailleurs ; & bornant leiir nonibre au necefTaire exad , PEtat re^ut en aug- mentation de Baux le montant des pen- fions & des parts que I'intrigue avoit diftribuees. Ses viies economiques s'e- tendirent fur des objets, dont le rapport avec les Finances n'eut pis ete appercu par d'autres moins profonds dans la connoifTance des fources ; & les foins qu'il prit pour la reformation de la Juf- tice, peuventetre regardes parlespoli- tiques comme uncalcul fort habile dans Z iij 2,70 Recherche s & Confidirations- rinfluence que devoit neceflairement avoir cette operation avec Taifancena- tionale. Tel efl: le precis de radminiftration de M. Colbert. Un efprit egalement juf- te & etendu lui fit concevoir de grands projets & de grandes efperances , dans iin terns de confufion ^ d'epuifement , & il executa ce qu'il avoit concu avec beaucoup d'ordre & d'adlivite. Occiipe d'un vafle plan, ii ne negligea jamais d'approfondir les details : il lent fe les procurer , en accordant un acces facile a tons ceux qui fe crurent en etat de lui propofer des objets utiles : &; il re- chercha avec empreffement les perfon- nes de merite qui pouvoient Taider. Plus fgavant dans les calculs politiques que M. le Due de Sully, plus fertile en expediens & plus adroit , il deve- ioppa avec une grande habilete les ref- fources inconnues de la France ; & s'il avoit auili-bien employe toutes celles qui lui font naturelles , il auroit eu la gloire de fixer feul par fon adminiflra- lion prefque tons les principes econo- miques , dont I'ufage pent conferver a cet Empire une profperite fuperieure a tous les evenemens humains. fur its Flndnces dc Frdnu» 27 3 Pour rendre compte au Roi de I'etat de fes Finances. Fcrmss des GubclUs. LaFerme des Gabelles, appellees de France pour la diitinguer des aiitres Fermes des Gabelles dii Lyonnois , BreiTe , Daiiphine , Provence & Laii* giiedoc , s'eiend dans les Generaiites de Paris , Amiens , Soiffons, Chalons, Orleans , Tours , Bourges , Moulins , Rouen , Caen ^ Alen^on , Dijon. Elle efl compofee de deux cent 6^ un Grenlers , & irente-une Chambres a Sel. En 1 66 1 , quatre-vingt-quinze de ces Greniers & onze Chambres etoient d'impot , & cent fix Greniers 6c vingt Chambres , de ventes volon- taires. En 1663 , le Roi remit au Peiiple un ecu par chaque minot. En i667,leRoi6tarimp6tenvingt- deux Greniers. En 1668 , le prix du minot a ete di- minue confiderablement , & reduit en fix clafles , pour oter toutes les diver- fites des prix qui fe trouvoient en cha- Z iiij iyi Rechcrches & Conjiderations cun Grenier par la difference des frais de voitures ; & par le meme Edit , Sa Majefte ota encore rirnpot en trente- fix Greniers on Chambres. En 1674, par Declaration du 30 Aoiit , le Roi augmenta le minot de fel de trente fols fur toiites les Fermes de it^ Gabelies. En 1678 , Elie remit an Peuple les inemes trente fols. Les Ordonnances fur le fait des Ga- belies ont remedie a iin tres-grand nom- bre d'abus , abrege les procedures , di- minue prefqu'entierement les proces , lam en premiere iniiance que d'appei. Fcrmz des cinq grojfes Fermes^ Tous ces droits reduits en iin feul par le Tarif de 1664. Les droits d'entrees & forties reduits confiderablement , particulierement les forties detoutcs les denrees 6c manu- fadures du Royaume. Tout ce qui fert aux manufadures diminuc aux entrees. Les manu failures etrangeres char- gees par le Tarif de 1667. En ce qui concerne le foulagement des Peuples, Ton doit faire mention ea fur Its Finances de France^ ij'^ cet endroit des etabiiiTemens nouveaux t->s v^ G o • s . 3 . (U 2 fcfi CO 3 w W rt 2:! Q So ON w a 2 o o 1-5. i&s avantfigcs , ibid, moyens d'y r^uflir , 18, oblta- cles qu'il faut effuyer , ibid, precautions qu'il faut pren- dre fur-tout en tems de guerre ,21. mdthcde des Hol- landcis, 18. obfervations lurle commerce relarivcment aux Colonies du Nord de I'Am^rique , 20. ai. moyens qa'on pourroit employer poury fuppMer , 22. 23. Communautis , d^penfes de ceiles de Paris , in. & fuiv, Compjgnie de Guinee ^ fa crt^&tion , 302. 303. inconve- nient du piivil^ge qu''cn lui accorde » 203. Compognie des Indes Orientales ^tabiie en 1605 , elle tombe,i40. elie demande de nouveaux fends aux a(flic'n- naircs, 292. 293. DES MATIERES. 317 Compagnie des In des Occidemales Stabile en 1664 , eft hors dMtat de puuvoir loutenir ion privilege exclufif , 36. fa chute ,141. Compagnic dii Levant, fon fort, 54. ^-/wiv. fa fituatlon , on r6/oque .es privild^es, »95. Compagnis du Nord , fon ctabliflement , 10. quoique ires- favor.fi^e , ne rdullit pas a caufe de Texclufif , ibid. Compagnie du Senegal ne lemplit pas fes engagemens , elie ne porte pas aux Hies tous les Negres convenus , Confommatlons , impofin'ons dont on pourroit les charger relativemenr a leiir n<^cefritd , lyi. t^valuaticn de cec impot , lyi. lya. il eft le plus convenable dans les Villes ,191. Confuls Fran90:s , abus au Levant fur Jcs Confulats , 25. Contremarque ( droit de ) dtabli fur la Vaiflc-lle , 501. Controle des ades , fon dtabliflcnient , 56. 57. Convoi de Bordeaux, obferyaiions de M. Colbert a cec ^gard, a6y, D Dipenfes de 1684, V' *9S' ^^ 1685 ,/?. 5C6. Depcnfe r^tlle &pro]ett^e en 1670, /?. 56, de 1671 , />. 95. 96. pro.jet pour I'annde iG-jz^-p. loi. obfervaticns de M. Colbert fur ce projet , 101. & fuiv. Depcnfei de- puis 167 1 jufqu'en 1678, ;?. ix8. en 1679 , p. 144. en \6%o. p. 106. en 1681 , avec les obfervations de M» Colbert ,/7 206. 6* yJ/iV. en i68» ,f . 250. Dcpenje des Suy rs du Roi, ou va-t-elle r aoo. Dixieme , on ppurroi.t le mettre fur le loyer Aqs maifons , 189. Domaine , on cn aliene une partJe pour quatre ann^es, Domaine d'Occident , fon origine , 141. Dorure , droits qui nuifent a ce commerce ,118. Dounne de Lyon, convention entre les Fermiers & les N^gocians dangereufe & injurieufe au miniftere , 295. n^i.e(ru(^ d'un Infpedteur general des Douanes , 294. Droit de qi)inze fols par balle de marchandifes forcant du Royaume; on rdduit a trois pour cent les droits d'entrde fur les dcnrdes d'Am(^rique , 94, Droit de Cottimo, fon origine , 32. Droit de marq-ie fur Targent nuit au commerce dedorure, 117. moyen de le remplacer, 118. lyroit de vingt pout cent etabli pour mettrr '- '^onrnerce Ddiij 3i8 TABLE du Levant en furete contre les Navigatcurs Stran- gers, 33- E Eaux-de-v:e de France ,les Hollandoisen defend. nt Ten- tree, 92. on diaiinue les droits dc ^ortie, 143. on di-- minue les droits fur celles de TOrldanois , 298. Epoque , quatrieme , 184. Etape gendrale ^tablie dans les Villes maritimcs , Decla- ration da Roi , S7. & fuiv. fes avantages & fes ddfauts 89. & fuiv. moyens d'en ^viter les inconvenicns , ibid. voyez Entrepot, Etrangcrs , on les invite k acheter des rentes en Fran- ce , 133. Exclufift il ne r^ufllt point pour le commerce du Nord , iz. & pourquoi , ibid. F ^er , vices dans les droits mis a rentrSe & a !a fortie , 153. 164, partie qu'on pourroit tirer des Pyrenees pour s'en procurer, 164. 165. Fe/s blancs , droits a TentrSe de PEtranger palTant par Tranfir , 310. Fermages , impoficion dont on pourroit le^ charger relati-^ veraent k leur valeur, 181. nombre qu'il peut y avoir de FermesenFrance,i83.produitde cette impofuion, 185. avamages de cette methode, 186. Fcrmes g^ndrales , moyens qu'on pourroit employer pour en augmenter le produit , 198. methode qu'on pourrait fuivre dans leur adminiftration , 198. 199. on en renou- velle le bail , le prix & les conditions , 112. en quoi con-^ Tiftent ces Fermes , 214. & fuiv. Ordonnances k ce fu- jet, 234. Stendues en 1687, ibid, obfervations de M. Colbert ,271. & fuiv. FctCy ce que chacune coute aux pauvres de I'Etat, 179. 180. on pourroit en retrancher pour augmenter le gain des manouvriers . 180. Feux , nombre qu'il peut y en avoir dars le Royaume, 177. leurdivifionrelativement aux impofidons, 17S. &fuiy. impot dont on pourroit les charger , iSo. Finances , leur Scat en 1671 , />. 95. expSdiens qu*on em- ploye pour fournir aux dSpenfes dela Guerre, <^6.& fuiv. Affaires extraordinairesde 1673 a 1678,^.105. &fuir<, rStat des Finances en 1679,;;. 12S. en 1682, p. a^Oo augmentations k faire en cas de guerre, 249. Stat oii les a laillt'es M. Co'bert, 254, obfervations gSnerales Ac >^ Col!;tert fur les Finances , 278. diminutions a fair? , DES M ATIERES 319 S*ll ^loit pofilble, dais lei recettes, »8z. iSj. lindga- Ht^ des riche/Tes dinninue Je produit des Finances , laj. avantages des bons principes , a84. %S^, flandre , M. Colbert le donue bien des loins pour fairc pafTer p.ir la France Its marchandifes de la Flnndve l:ran9oife & ilpagnole , 4^. faveurs accord^es aux Ne- gocians de la Flandre Fran9oife , 45. Forges, vices dans ies droits dont on les acharg^cs, i6i; difficult^s qu'ii y a pour les exiget; maniere d'y fup- pl^er , 162. le privilege qui leur tit accorde de pouvuic obliger un particuHer a laifler defunctr Ton champ pour en tirerdela mine de fer , nuit b. ragriculiure , 163. franc-Fief y trait^ a cet dgard , 98. on augmeute le forlait des Francs-Fiefs t i09. i ^0. G G-ihelle , Ordonnance des Gabelles* 165. ohfervations fur cette Ordonnance , 166. 6* fuiv. rcmarqiics de M. Colbert fur la Ferme des Gabelles , ayi. voycz SeL. Gogss , on cree des augmentations de gages , itj. aug- mentation de gages crudes au denier dix-huit , »88. oa en propole aux Officiers des Juflices Koyales qu'ils ac- quierent, 301. Grains , on perroei; d'en vcndre a I'^trangcr pendant un an , 308. on proroge cette permiffion , ibicL on dechar- ge les grains defcendans le Rhone & la Sa6ne de la moiti^ des droits & des phages , 509. Guerre 6.Q 1671 , depcnfes qu'eile caufa , 130. moyens qu'on auroit pu employer pour y pourvoir. ibid. ^ 151. H Hareng , raifon de la m^diocrit^ de cate pcche fur let c6« tes de Normandie & dePicardie, 169. HoUandois , ce qu'ils veulent faire pour engager la Fran- ce a changer le tarif de 1667, p. i. i. commerce qu'ils font des vins de France , 5. & fuiv, ils veulent y met- tre des impofitions ,2. ils cherchent a s'en paffer , 7, attention de M. Colbert , 9. faute que Ton fit , ibid, ils dependent I'entree des vins, eaux-de-vie & manufactu- res dc France, 9*. mefures priles en France pour les en faire repentir , 93. 94. on kur enleve le commerce des Colonies Fran9oifps en Amdrique , 94. 95. I Impofitions , fur qui doit-»on les mettre en cas dc befom, D d iiij 320 TABLE IZ5 , ce qu*il y a a oblerver en terns de paix & de guer- re , 126 1x7. L'impofition la plus convenable eft la laille rdtllc, 174. impt.fuions qui pourrroienc rcmpla- cer la Taille, la Capitation , les Gabel!es , 17;. leurs avanta^es , 196 , rtgles que Ton doit obferver dans les jmpofuions , 176. eiies dcivent etre plus fortes dans Jes Viilcs que dani les Campagnts, ibid, celle que i'on ppLrroit mttrre fur chaque feu , 180. fur les f:rniagcs , loi, fur les vignes , Its bois , les paturages , 1S4. far les propiidtaires des terres , ibid, fur les loyers, 190. fur les confonimations, ib:d. avantagts de rimpofition fur les confommations , 150. comment on augmente- roic les impofitions r-n cas de guerre , aci. Jmpuis , ils iont preferables aux alienations, 115. Le Pelletier, eft norr.me Contr61eur g^n^ral des Finances, 286 , ce qui ddtermina le Roi a lui donner cette place, 491. il fuit autani qu'ilpeut la m^thodedeM. Colbert* a86. Leuis XIV. dans une qucftion de Domaine decide centre Ion propre interct , 291. M Maitrifest abus des Maurifes , 110. iii. ellfs occafion- nent bi^^n des FroccSjiij. mauvcis reglement.i 14.115. Manouvri-crs , Icur gain , leur d^penfe & le profit qui leur refte, 178. 179. moyens dc Taugmentcr, 17^. Mcnufaciures , M. Colbert encourage les manufafturcs des pays conquis , 43; & fuiv. ks Ilollandois d^fendent Tentr^e des mannfhftures de France , 92. Manufactures de laine , on hau/Te les droits fur les ^tof- fes de laine dtrangeres en faveur de celles du Royau- me 113, Maine , M. Colbert ^ait voyager M. de Seignelay h Ro- chefort pour le mettre au fait de la Marine de Fran- ce , 58. enfuite en HoUande & en Angleterre pour connoitre celles de ces peuples , 69. ce qu'il y a a re- marqr.er , 71. connoilTances n^cefiaires a un Miniftre de la Marine , 79. plan de M. Colbert pour celle de France, 84. & ftiiv. lAarfeiLlt , ce port avant M. Co'bert ^toit prefque prehi- h€ aus (ftrangers, 27. droits qifi'.s y payoient, ihd. M. Colbert y appe'le les etrangers pour y retablir It com- merce du l-evanc, 30. ii y fupprime prefque icus les DES MATIERES 311 . droits &: les monopo'cs ,31.3*. il ttablit en favcur de cecte ville un droii de vingt pour cent, 33. ie privi- lege exclufif qu'elie a pour iecommrece dii Levant cft- il avantageux au Royaume ." 34. il eft favorife par Af. Colbert ,35. changcmens qu'il y a eu dans le commer- ce de cctie ville, ibid. Monnoyes , faute que fit M. Colbert fur la monnoye, avec la maniere dont il ia repara, 154. changemenc qui fe fit I'ous lui dans radminiitration des monnoyes, 137. &fuiv. MonopoUs , M. Colbert en fupprime , 134, O Ojfficcs , on en cr^e , 49. on en fupprime plufieurs , zi6» Ordonnanus Civilcs & Cri'r.inelles , 53. P Papier h parchemin , les droits qu'on a mis fur cette fa- briqueyont nui , 117. vices dans les droits dunt on les a charges , 160 le droit de marque nuit a ccclc ma- nufafture , ibid, obfervations de M. Colbert , 277. Paturages , irrlpofition dont on pourroit les -<,5 , p. 307. moyen d'augmenter les revenus du Royaume, 19S. & fuiv. Revcnus de 1' Angleterre , de la France & de la HoUande, fuivant Davenant , voye:^ Angleterre ^ France & Hoi' lands, Richejfes , moyens de rem^dier en quclque maniere a leur inegalit^ , 125. 126. Saijies reelles , on met en offices hdr^ditaires les droits i€s Commiffaires des Saifies reelles, 301. Sardines , on doit a M. Fouquet I'dtablilTement des pref- fes de la fardine, 232. Se'ignelay ( le Marquis de ) cftafToci^ a M. Colbert pour la place de Secretaire d'Etat , 58. m^moire de M. Col- bert fur ce que doit obferver le Marquis de Seignelay pendant le voyage qu'il va faire a Rochefort , 59.' 6* fuiv. inftru^lion, qu'il fe donna i lui-mcme pour le voyage d'Hollande & d' Angleterre , 69. d^ futv. il cher* che a fe rendre habile dans tous les details de la Marine, 83. 84. Set , reflexions fur TOrdonance des Gabelles , 165. ifi5. rigueurs que Pimpot fur le fel occafionne , ibid. La Nor- mandie fembic ctre le theatre de toutes les rigueurs qu'emporte rimpofition du Sel , 168. elle cil caufe de la mddioctiti^ de nos peches, 169. on lui a 6t6 les avan- tages qu''elle avoit, ibid, moyens propof^s powr en corri- ger les abus & les genes , 173. Soye , on fupprime \cs droits fur la fortie des Soyeries pour MarfeiUc & pour le Levant, »94» DES M ATIE R ES. 323 Sucres brats , on en defend la fortie ,241. cette defcnic a des I'uites fScheules , ibid, on veut y remddier en permettant d'dtablir des raffineries > ihid. ce qui aug- mente le mai , 142. on charge de droits k I'entr^e du Royaume les fucres raffines, ibid, reflexions I'ur ccs operations , 241. 145. Le gouverncment accordc v 1. par quintal k la fortie des fuctes raffines en faveur Aes raffincries , * »02. Fin de la Table dei Matieres du Tome troijleme. w ^ ^ t This hook isJOJJE on the last f^Gl&cdldimed below sr ^«i flLR t96*lQrp 9.^ 1972 fe v University of California Library Los Angeles This book is DUE on the last date stamped below. 3 1158 00575 6233 1 ,[iC SpUTHBRN REGIONAL LIBRARY f A 000 218 099 o "v.. n ^ i'-^^. „. .^ --J University of Californi Southern Regional