Bli MEMO IRES f OUR S E R FIR A L'HISTOIRE DE CHRISTINE RE1NE DE SUEDE. TOME' 'PREMIER. M E M O I R E S CHRISTINE RE1NE DE SUEDE, POUR SERVIR A L'HISTOIRE DE SON REGNE ET P RINCIP ALEMENT DE SA VIE PRIVEE, ET 4UX E7ENEMENS DE L'HISTOIRE DE SON TEMS CIVILE ET LITERAIRE: SUIVIS DE DEUX OU'V RAGES DE CETTE SAVANTE PRINCESS E, 177 N'ONT JAM ATS E'TE' IMP RIME'S. Le tout fonde fur fes Lettres , & recueilli des Hiftoriens & des Monumeris les plus Authentiques , tant manufcrits qu'imprimes , accompagne de Remarques Hiftoriques , Poliriques , Critiques & Literaires ; avec des MedaiUes oc un Appendice de Pieces Jullificadves ou Inflruftives. Etplus eft Patrice fafta referre labor. Ovid. Trift. Lib. II. vs. 322. T ti M E P K M I R. A AMSTERDAM ETA LEIPZIG, Che* PIERRE MORTIER, Libralre. M D C C L I. I , > L v U G ri y ^ CC r PREFACE c \. Oil fon expofe lesvues qtfon a cues dans cet Ouvrage , comment on a tdcbdde les remplir. s circonibnces dc Pavenement de CHRISTINE au Trone de Suede > apres la mort glorieufe du Grand GUSTAYE-ADOLPHE, fon Fere, la conclufion de la Paix de Weftpbalie II avantageufe a fa Couron- ne, la brillante reputation ou elle fc,ut porter le nom Su&doh, Teclat de fes talens pour les faiences, fa ^profonde Politique, enfin Teveneraent etonnant de fon abdication, fait tant de bruit dans le monde, que fon nom, de meme que celui des Heros & Heroines de TAntiquite, impofe, ficot qu'on Ten- [tend prononcer, Qiioiqu'elle n'ait qu'environ un Siecle d'anciennet , fa vie prelen- des Scenes fi diverfes & fi fingulieres tout enfemble, & eft melee \de particularites fi extraordinaires que, de quelque Nation que Ton pour pen de gout que Ton ait pour ce qui fe paffe de plus me- morable dans le monde , on ne pent qu^etre curieux d'une hiftoire fi-- dele & circonflanciee de cette Grande Princefle* Audi fe tlatte-t-on que les Memoires que Ton publie aujourd'hui, en tiendront lieu en quelque maniere , comme en contenant une bonne partie & repan- dant un grand jour fur le refte. Peribnne n'ignore , qu'apreslamort de fon Augufte Pere GUSTA- VE-AooLPHE/6' Grand, elle regna glorieufement , en partie fous la tutele des cinq premiers Grands Officiers & du Senat du Roiau- ine, pendant les douze annees que dura fa Minorite, en partie par elle-meme , les dix annees avant qif elle abdiquat. . Tome /. * Les ii PREFACE. Les affaires publiques de Sudde durant tout ce terns-la ont ete ecri- tes par Mr. le Baron de Pufendorf, avec une netete d'efprit & une integrit6 de bon Hiftorien, qui ont peu de pareilles ; defbrte qu'on n'a pas lieu de fe plaindre de manquer d'hiftoire a cet egard. II n'en eft pas de meme , i\ Ton confidere cette Reine dans fa vie privee & par rapport a fes adlions particulieres, qui ne font pas moins intereffcntes, ni raoins digues d'etre tranfmifes a la Poltem< - Car fi on les prend des fa premiere jeunefTe 5 ori trouvera d'tui co- te la maniere dont ejle flit elevee : Tamour qu'elle eonqut pour la li- terature en genera*! & les langues en particulierdans lefquelles elle fit des progres fort au-defTus de fon age: Teftime qu'elle eut pour les plus favans Hommes de ^Europe: le grand nombre qu'elle en fit ve- nir aupres d'elle : Pardeur qu'elle eut pour apprendre a fond les Bel- les-Lettres, & Tenvie qu'elle temoigna de penetrer jufques dans les fe- crets des SQiences les plus abftraites: les progres merveilleux qu'elle fit d'un pas prefque egal dans toutes ces S9iences : la facilite qu'elle eut k s'expliquer fur toutes fortes de fujets , en toutes fortes de lan- gues , avec les perfonnes les plus diftinguees par leurs lumieres : les louanges qu'elle s'en attira de toute part ; les amples recompenfes , les grofles penfions & les prefens vraiment dignes de fon rang 5 dont elle les honnora. Mais d'un autre cote on verra aufli , de quelle maniere cette ar- deur pour apprendre & favoir tout , commen9a a fe ralentir : & les reiTors qu'on fit jouer pour lui faire pafler ce fort attachement aux connoiilances utiles & pour y fubftituer le gout dti luxe & des de- penfes : comment elle fe laifTa feduire par de faux Savans , qui vin- rent a bout de lui infpirer des principes en Ita- lic, en France, en Alkmagne & dans fa Patrie, ou elle revint deux fois, mais auiH pendant tout le terns qu'elle demeura k Rome, ou el* le mourut en 1685;. Tout PREFACE. m Tout cela expofe dans fon vrai jour, formeroit fans doute un ta- bleau des plus varies & des plus intereflans. Ce n'eft pas , qu'il n'y ait eu des Curieux , qui ont tache de ra- mafler des mat6riaux pour e"claircir quelques points de cette hiftoire. Mais de tous les Ouvrages qu'on a publics fur cette matiere , on ofe aflurer , que jufqu'ici pas un ne fe trouve aflez conforme a la verite pour meriter le titre & Hiftoire de cette Reine. On n'en trouve aucun ou il n*y ait des fauffetes manifeftes. Ce ne font la plupart que des pieces remplies de fiel & de calomnies, un tiffu de circonftances peu cro'iables & dont Tabfurdite faute d'abord aux yeux d'un Ledeur attentif & impartial. Voici la liftc de ces pieces , autant qu'on en a pu trouver , & qui font, ou a peu pres, toutes celles qui ont etc imprimees furce fujet: 1 . Eritoe Rtlation de la Vie de CHRISTINE Reine de Suede juf- qita la demiffion defa Couronne & fon arrivement a Bruxelles (a). 2. Le Genie de la Reine CHRIS TINE de Suede (b) (*). 3. Hiftoria di Chriflina Regina di Suezia , del Conte Galeazo Gual- do Prior ato (c) (|). 4. Icon Chriftinse Autbore Sakmone Priezaco (d) (j). ^. Vita (a & &) L'une & F&utre de ces Pieces (V) Roma 1656. in 4. & Venezia 1(557. font imprimees en 1655. in 4. La i. eft de in 8. 19. fcf la 2. de 15. pages, Crf) Parifiis i6j(5. in 4. (*) Ces deux Pieces ont etc dcrites par le Sr. Cbevreau Se'cre'taire de Cbrijline & puis du Roi Cbarles-GuJtave. Elles fe trouvent aufll imprimees dans I'biftoire de la fie de CHRISTINE citee ci-deflbus de Tan 1677. pag. i. &c. & pag. 59. Ces deux pieces ont &t6 traduites en Allemand fous le titre de Kurlze LebensBe- fobreibung der Koninginn Chriftinse in Schweden 1656, & 1663. in 4. & en Anglois fous le titre : A Relation of the Life of Chriftine Queen of Sweden , ite & contient proprement les voi'ages de Cbrijline par la Suede, le Dannemarck , YAllemagne & le Brabant & de-la par I'Allemagne juf- qu'a Rome. Elle a ^t^ traduite & imprime en Anglois fous le titre de Hijlory of the Sacred and Royal Majefty of Chriftma Alexandra Queen of Sweden ; land ^. tot baar wederkom- Jle in den Jare 1660 (f)- G - a ct Vo'fages de S. M. la Reine de &^- r/^ depuis fon premier depart de kSto/(P Tan 16^4.. jufqifk fon retour en i(56o. 7. Recueil de quelques pieces curieitfes fervant a r^clairciffement ae PHiftoire de la Vie de la Reine Chriliine , cn/emble plufaurs votctgcs Ce meme Recueil atigmenta cjaut-res Pieces Sc impri- me fous le titre de 8. Hiftoire de la Vie. de /a Reine Ghriftine de Suede avec un table rtrit du jejouf de la Reine iilibme 3 ! '-gsp de la defenfe du Mart quis Monaldeski cow/r^ //? JJ^/72^ fa Si>e3e (^) 0). r> ^b^ii jinilinirj ^ tiV\c>! C i 2. Leben der IVeltberulffmten Koni^in Chriftine von Sclweden : e. a d. La Vie de la fameufe Reine Cbrjftine de Suede (d) (j). 1 3. -Ret Leven en Bedryfvan Chriiime Koningin van Sweden. ... tkor Gregorie-Leti (rix>itzien. (*) On trouve ici plufieurs harangues faites b Cbrifline a fa prdmiere arrivde en France avec fes reponfes. } . ^c. quelques-une& de fes letcres s qui feront cities dans la fuite. (f) Get ouvrage n'eft autre chofe qu'une reimpreflion de YHifloire des intrigues de Cbrifline, indiqu^e immediatement avant : excepte , qu'on a ajoutd k celle-ci deux Poemes Franfois, dont 1'un a pour titre: L'art de plaire d la Serenijfime Reine de Suede, compofe par Mr. Gilbert S6cre"taire & apres Refident de Cbrifline en France & imprime dans les Poefies diverfes pag. i. 25. Ces Memoires font aufll traduits en Anglois fous Iq titre: The Hiflory of the intrigues and Galanteries of Cbrifline Queen of Sweden (3) , & en Allemand (4). Le Tradufteur prefume que= 1'Auteur de cette hiftoirc a' ete autrefois au fervice du Marquis de Lavardin , Am- balTadeur de France a Rome , & enfuite a celui de Cbrifline. C|3 C'eft 1'Hiftoire la plus complette que nous ai'ons de la Vieprive"e de Chrif- line, Le Prof. Cfritien Stieffen a Brejhu , qui en doit e~tre 1'Auteur Q), fait ufa- ge prefpue par toutr de Tbjfloire des intrigues galantes cit^e ci-delTus. Le principal eft d'y lavoir diflinguer le vrai du vraifemblable ou du faux. II de"couvre en plu- fieurs endroits fa partialite. A en juger par le terns ou ce livre a ete imprime", il paroit que 1'Auteur a vo.ulu chagriner par-la les Sueclois , qui ferroient , de pres les Saxons en Pologne & s'cmpnrorent peu apres de prefque toute la Saxe. () Get Auteur n'eft qu-'un Tradufteur fidele & un Compilateur des Pieces . qui (i) A la Hayc 1663. in 12'. in 12. (2) A Utopia 1670. in 12. p.; 95, 146, 194. (4) En 1705. in 12. V. la continuation des & 213. &c. enfretiens de Tentyel ad ann. 1705. pag. 431. (3) ^y Philips Hollingwortb. London 1697. (5) V. Kobiers Miintz-Beluft. T. X.p. 357. *3. YI PREFACE. Leben der Konigin Chriflinse von Schweden (a) (*). if. Gefprecbe im Reicb der Todten^ ou Entretiens dans le Roiau- me des morts entre les Reines Elijabetb d'Angleterre & Cbriftinc dc Sutde 0) (t). 1 6. Jacobi Zabarelte Chriftina Auguftaftve Chriftinae Suecorum, Gotborum, Wandalorumque Regina tdugujt* Heroicaque Origines ? cum omnibus Europe Frmcipibus confanguinitas (c^. Get ouvrage ne contient que des tables g&iealogiques & eft ainfi peu propre a eclair- cir Ton hiftoire. 17. Entre les Auteurs de notre terns qui ont donn6 des particula- rites de la vie de Cbrifline , eft Mr. TAbb6 RArtigny^ connu par fes nouveaux Memoires de Literature , dont il a paru trois Tomes (I). Dans a) A Leipzig 1718. in 8. CO A Padoue, fans annec, in 4. A Francfort 1719. & 1742. in 4. qui avoient paru jufqu'alors , fur la Reine Cbriftine. Jl eft pourtant pre"fe>able aux autres, en ce que fur la querelle qu'avoit la Reine avec le Pape , au fujet des Franchifes des quartiers a Rom?, il produit quelques aftes & pieces authenti- ques que les autres Auteurs avoient omifes. Mais pour ce qu'il ait , qu'il avoit traduit cette Hiftoire de 1'Icalien de Gregorio Leti , il eft en eel a aufll peu digne de foi , que 1'Auteur Franfois de I'biftoire des Intrigues galantes de Cbrijline , quand dans la preface il dit, que c'eft del'/fa/i>n, que Fhiftqire qu'il donnoit, ^toit traduite: ^tant certain , que Tune & 1'autre n'ont e"te" ^crites qu'en Flamand & en Francois (i). f*j Ce Traite" fe trouve dans le Recueil du Curieufet Bucber-undStaats- Cabinets LI. und L1I. Eingang, & il n'eft proprement qu'un extrait du Leben der Weltbe- rubmten Konigin Cbrijiina cit6 ci-deflus. II y a un autre abre'ge' de la vie de Cbri- Jline, encore moins etendu, imprimd dansle Stoats und Gefcbicbts Spiegel . verfaf- fet von W. Z. v. B. (2). (t) Get ^crit ne contient que ce que 1'Auteur nomm^ Faffman a recueilli des Merits publics en Allcmagne fur la Vie de Cbrijline. Pour amuferfon Lefteur, il farcit les Difcours de traits fort romanefques , lefquels par confe"quent meritent auffi peu d'attention, qu'un autre Dialogifme connu fous le titre de Lucien enbel- le bumeur, ou il y a (Tom. I. pag. 291. &c.) un entretien aflez Etendu de Gujla- ve Roi de Suede jgdefafillelci Reine Cbrijline. L'auteur y fait parade d'un zele indifcret de Catholicifme , & on y peut compter plus de fautes groffie>es d'hif- toire , qu'il n'y a de feuilles. (|) Le titre en eft: Nouveaux Mtmeires d'HiJloire, de Critique ? de Literature par Mr. I'Abbi d'Artigny Tome I. a Paris 1749. & fuiv. in 12. La ledure de cet Ouvrage eft des plus amufantes & des plus inftru&ives. L'auteur y ramafle une foule de chofes mte"reflantes , & il les met en oeuvreavec beaucoup d'art. Mais ne l'auroit-il pas pu faire fans tremper fa plume dans un fiel li amer, en parlant des (i) Cfr. Bayle Oeuvres diverfcs T. IV. p. (2) Impr. ran 1^73. in 12. Num. IV. pag. 727. 217-264. PREFACE. Dans le i. volume, il a infere quelques pages , qtfil dit avoir du fat- re partie des Memoir es Secrets de la vie de Chrifune Marie- Alexan- dre de Sudde , Reine des Goths , &? des Fandales , qu'un ancien Ma- giftrat de la Ville de Fienne en Provence avoit eu deflein de publier comme une hiftoire fuivie de cette Reine. Heureufement ce Magif- trat, avoit brule, en prdfence de Mr. PAbbe , prefque tous fes pa- piers. Par cette aftion heroique il a difpenfe le Public de lire une hiftoire Romanefque de plus en ce genre. Car a en juger par les fragmens|que Mr. PAbb6 ftArtigny a fauve, ces papiers ont au ren- fermer autant de chofes triviales & de faufletes que de pages. Nous ferons quelques remarques fur ce qui nous en refte. Le long fermon de Boiffat eft mieux detaille autrepart que ne Pa fait PAmi de Mr. SArtigny. II n'avoit qu'k lire ce que Mr. PAbbe SQUvet en a dit en dernier lieu. Si Antoine Argoud , Doi'en de la Cathedrale de Fienne , en ha- ranguant Cbrifline^ n'a pas laifle echapper, une feule fois dans fon difcours le mot de Reine , pour ne lui pas rappeller Pidee qu'elle etoit femme : une pareille difTimulation , ce me femble , convenoit moms au caraftere d'un Kcclefiaftique qu'a tout autre , & on diroit , qu'il des Grands hommes qui ont travaille a la Reformation du XVI. Siecle? Mr, TAb- b^ eft homme d'efprit, il eft homme eclaire. Comme tel, il ne .difconviendra pas que cette Reformation n'ait ^t^ utile a V Europe, en la tirant de la crafle ig- norance, oil elle languiflbit, depuis fi longtems, & en la ddlfvrant du joug des Moines ignorans & vicieux, qu'on pouvoit qualifier a jufte titre Aveugles Conduc- teurs d' Aveugles. Et pour dire en pafFant ce qui eft des Aftes &Manufcrits, dont Mr. 1' Abbe d'Artigny s'eft fervi , en parlant de 1'emprifonncment & du fupplice de Servet; il me permettra d'ajouter ici, que rilluftre Mr. de Mosbeim, Chan- celier de rUniverfite" de Gocttingen, qui vient de publier un fupplement a fon hif- toire de ce favant Efpagnol , ai'ant eu communication de ces memesaftes, fait la-deflus cette remarque: c'eft que Mr. l'Abb fuit parfaitement la methodede plufieurs autres Ecrivains , fes Compatriotes , qui m^lant leurs propres penfees & leurs propres conjeftures avec les rapports hiftoriques, les donnent au Pu- blic comme des ve>ites inconteftables " (i). Entr'eux le dbat: c'eft au Pu- blic a en juger. Pour moi, je ne ferai pas fache, fi le zele de notre inge"nieux Abbe a la recompcnfe qu'il m^rite, un bon gros Benefice dans cette vie, & fran- chife du Purgatoire dans 1'autre. (i) y. La prtface de Mr. Jean Laurent de nrmbre d'infidelites q & que cequi en a paruen Allemand-, en Angloh^ en Hollandoh^ n'en a ete propreraent que des traduclions prefque literales Si quelqirun veut fe donner la peine de lesexaminer de plus pres , & de C*) Pour prcuve dc ce que 1'Autcur avancc ici,. on n'a qu'a cherchcr dans la aible des Macieres dc; ces Memoires, les articles de Cbrijline* de Boiffjit , c'e Mo- na'deski, de SentineUi, de Ctrl & de Juftintoni $ ou tout ce qui a etc dit ci-defius, ft cclairci avec plus de circonftanccs, PREFACE. ix de les comparer a ce que cTautres de la meme Nation ont ecritfurcet- te Reine; il fera fans doute etonne de trouver dans une memo Nation des fentimens fi diffdrens a Ton egard. Car en meme terns qu'il verra nombre de Savans & d'autres Autetirs Franpois s'emprefTer a Tenvi d'applaudira toutes fes adions & meme a toutes fes paroles; il en verra d'autres de cette meme Nation, la blamer hau- tement & vomir contr'elle les plus noires calomnies. Et fi Ton con- fidered'ou leur peat etre venue' non feulement cette diverfite, mais cette contrariete meme de fentimens, on aura de la peine a en trou- ver d'autre raifon, que le difcernement on la reconnoiflance des uns 3 & le caprice ou les pre juges des autres (*). Mais dira peut-etre quelqu'un: MelTieurs les Franpoistfont blame en Chriftine que ce qu'ils ont trouve de blamable en elle? A quoion repond: que ficela etoit vrai, onn'auroit autrechole a dire, qu'en ce cas meme, & en vertu du principe de la gratitude, il etoit moins feant a ces Meflieurs-la , qu'a qui que ce fut, de pafler les bornes de la moderation a Tegard de cette Reine. Us ne fauroient difconvenir, qu'elle n'eut des qualitds bien fuperieures a celles que Thiftoire d'aucu- ne autre nation nous produit dans les Reines. Us auroient du fefou- venir du grand nombre de Francois, qui avoient etc emplo'ies a fon fervice & des largefles qtfelle avoit faites a plufieurs de leurs Compa- triotes, fans qu'il foit encore conflate, qu'ils les aient merite prefe- rablement aux autres nations? Cen'eftdonc quefefprit de la medifan- ce qui a aiguife la plume de ces ingrats contre une PrincefTe, qui avoit. renonce a la Couronne, & de la part de laquelle par confequent ils croioient n'avoir ni punition a apprehender, ni graces, ni liberalites a attend re. Cbrjftine n'ignoroit pas d'ou partoit un procede fi lache. El- le en fentoit Findignite, comme on le voit, dans une de fes lettres, fur un livre injurieux qu'on avoit publie en France contr'elle. El- le declare dans cette lettre: qu'elle fe promettoit de lajufUceduRoi w de France d'obtenir un chatiment exemplaire de FAuteur de ce li- vre: que le Sieclela confoloit, quinedonnoitquartier a perfonne: que la calomnie s'attachoit pour Tordinaire aux plus grands meri- tes: que la Suede .^ Rome^ 6c tons les autres lieux, ou elle avoit 3, pafle (*) On ne manquera pas de les nommer & d'en apporter des preuves dans la fuite de cet Ouvrage. En attendant on peut confulter le teflament Politiquedu Card, de Richelieu Tom. II. p. 87. &c. Tome I. X P R E F A C E. 5, pafle fa vie, rendroient, du moins apres fa mort, temoignage de 35 la fauflete de cette calomnie Que cet Auteur etoit indigne de 5, vivre, en attendant qu'on pourroit prononcer centre lui cette len- 5, tence definitive, que donna autrefois un Auteur Ita//en centre un autre qui avoit mal parle du Pape : 11 Papa e Papa e tu fei Fur- 55 fante: c. a. d. le Pape eft Pape, & tu es un Coquin (*) ". line feconde caufe, & peut-etre la plus forte, a laquelle on puifTc attribuer Tanimofit^ de ces Ecrivains contre Cbriftine , c'eft qu'on ne Itii remarquoit plus cette complaifance aveugle qu'elle avoit cue aupa- ravant pour la Cour de France. L'experience lui avoit fans doutea- pris, quoique trop tard , qu'elleauroitdiienrevenirplutot: au moins eft-il certain, que fans cet excesde predilection, elle auroit regnetou- te fa vie glorieufement en Sudde, &ne fe feroitpasvuercdiiiteaman- quer de ce qu'il lui faloit pour foutenir fon haut rang, A mefure qu'on avancera dans la lecture de ces Memoires, on trou- vera c^a & Ik de ces contes abfurdes que les Auteurs Franpots ont de- bite d'elle dans leurs Relations, qui meme ne s'accordentpas avecles titres qu'elles portent. On en donnera pour exemple VHlJloire des Intrigues galantes de Cbriftine , com me la plus etendue de toutes & qui finit a la mort de cette Reine. Le titre promet un detail exad & fidele des faits hiftoriques qui regardcnt perfonnellement cette Prin- ceffe, & la Preface confirme cette promefle, T Auteur y parlant ain- fi : Le Lecleur aura la bonte de fe contenter de trouver dans ce livre la verite fans deguifement, TafTurant qu'elle y regne fans pa- rure & fans artifice ".... Mais fi on prend la peine de le lire d'un boutarautre; on trouvera quece n'eft pas Thiftoire de Cbriftine , mais pour la plus grande partie des contes romanefques fur quelques Etourdis de Francois & dltallens^ qui avoient malheureufement trou- ve mo'ien de s'introduire dans le fervice de la Keine & qui n'y a- voient pas dementi leur caraclere. Cela pofe en fait, comme tout le monde le pent voir par la ledu- re de Touvrage meme , de quel front cet licrivain peut-il mettre fur k compte de cette Princefle les impertinences & les irregularit.es defes Domeftiques, a moins qu'il ne prouve qifelle y eft entree pour quel- que chofcr Ou bien prctend-il que fes Lecleurs fcront aflez dociles pour Ten croire fur fa parole , ou en confideration des traits malins & (*) Voi'cz ci-dcflbusfalettre a 1'Abbc Bourdakt du (5. Novembre 1674. avecles rcmarqucs ajoutecs. F i A & fatiriques qu'il lance prefque partonjt controls K-N'aufoit-il pasplii- tot du penfer > que cette forte de ftile jure avec la veracite d'un bon Hiftorienj & qu'en perdant ce cara&ere, ils'expofe a perdre celui d'honnete-liomme? .0 m Or pour mieux montrer combien pen de bonne-foi il y a chefc lui , com me aufll chez preique tons les autres qui ont compofe quelque chofe fur la vie de cette Heine, depuis qu'elle abandonna la Couron- ne , il eft necefTaire d'avertir le Lefteur des bonnes fources d'ou 1'on a tire ce qu'on rapportera d'Elle dans ces Mtmoires & qui detruira ce qu'ils en ontgratuitement publi& ;; La premiere fource ou Ton a puife, (& perfbnne ne difconviendra que ce ne foit-la la plus pure:) c'eft les lettres memes de Cbrtftme, en original, avec d'autres Manufcrits & Adies publics egalement au- thentiques, par ou les faits hiftoriques fontbien plus furement confta- tes 5 que tout ce qu'on en peut debiter fur tout autre fondement. Ces lettres feront produites felon Tordre Chronologique, autant que lafui- te des ev6nemens& des reflexions le pourra permettre. Le plus grand nombre a 6te tire des Archives de Sude<> ou les originaux fe confer- vent foigneulement. Une autre partie confiderable de ces lettres a ete communiquee par des Perfonnes du premier rang en Sudde, dont par reconnoiffance on ne fauroit s'empecher de nommer ici en parti- culier, Madame la ComtefTe de Braht Douairiere du Senateur Comte Gylknftierna i Lers Excellences Mr. leComte Cronftcdt 3 Senatetir de Suede , Mr. le Baron Guftave Ralamb , quieftmort depuis pen, & le Comte Cbarles-Guftave Bielke^ President du College des Mines & du Comptoir d'Etat , Mr. le General 4xel Gabriel Oxen/tier na , & Mr. le Comte Gdran GyUenflierna Chambellan du Roi de Suede. Mr. le Colonel Cederkrantz a aufll contribu6 a ce Recueil , & pour les au- tres, on les nommera avec Dionneur qui leur convient, tant dans la Table de toutes les Lettres de Cbrtftine que Ton mettra a la fin de cet Ouvrage, que dans le Corps meme de ces Mtmoires. De toutes ces Lettres - ci il n'y en a eu que cinq ou fix qui a'ient ete imprimees. La troifieme partie des Lettres a ete tiree de livres&de pieces impri- mees: onze, par exemple, d'un petit Recueil que Mr. Colomies avoit publiden 1688 fous le titre de Lettres de Chr I/line &p d"autres(^}. Mr. de C*) Ce. Recueil 6toit devenu li rare, que le celebre Fabricius de Hambourg , en publiant Tan 1709. les Opufcules de Colonies, avoue, dans fa prefiice, que juf- iqu'alors il n'en avoit pii trouver aucun exemplaire pour 1'inferer dans cette Col- lee- xii PREFACE. de Meierri) fi connu par fes ^4tta Pads Weflpbaticd en a public* huit, que Chrjftine avoit Writes a Mr. Adkr Salvius alors Chan- celier de fa Cour & fecond Ambafladeur au Congres d'Osnabrug. Elles etoient en Sutdois^ maisMr. de Meiern en lesdonnant aujour, les a fait traduire en 4llemand. Quelque authentiques qu'elles foient & quelqne lumiere qu'elles repandent fur les affaires de ce terns- la, el- les etoient neanmoins entierement inconnties en Sujde, etant dcrites a rinfiju de tout autre a fon Confident Salvius. Le refte des Lettres de Cbrifline que nous produirons , a etc puife d'autres endroits que nous ne manquerons pas de marquer fidelement ; & toutes enfemble elles feront lenombre de deux cents & vingt 3 aulieuque,autant qu'on le piiilfe favoir, il n'y en avoit auparavant que cinquante publiques. On convient , que toutes ces lettres ne font pas egalement interef^ fantes ; mais le grand nombre fervira toujours a faire voir Theureux gdnie de cette Reine dt i'lmprimerie p. tement fa defenfe centre tout cc qu'on a debite detnoins avantageux fur fon compte. On avoue iranchement que la veneration qiron a pour la Mmoi- re de cette grande PrincefTe 3 auroit fait fouhaiter de trouver dans tous les Auteurs qu'on a confult6s 3 dequoi la blanchir juftement & equ* tablement de toutes les taches, dont les ennemis &les envieux de fagloire ont tache de la noircir. Mais comme il y a des Ecrivains de marque qui s'accordent afTez fur de certains faits, qui ne rendent pas toutes les actions de Cbriftlne e"galement glorieufes : TAuteur a cru qu'il etoit de fon devoir de ne pas deguifer la verite dans des cas , oil les fentimens des Hiftoriens impartiaux fe reuniflbient. Mais pour ce qui eft de la defenfe , on prevoit bien , qu'une chofe furtout paroitra etrange a de certains Le&eurs ; c^eft qu'au fujet de la fevere fentence qu'elle pronon^a contre Tinfortune Monaldes'ki , & de Texecution qui s'enfuivit aufTitot, on ait tache d'expliquer le fait & de foutenir la queftion du Droti, enfaveur dela Reine, quoiqu'el- le ait etc blamee prefque par tout la-defTus. A cela on repond que ce fait a trouve fes Partifans & les Defenfeurs, & a ete regarde 5 me- me par de Grands-Hommes , comme un fait, ou les raifons du pour & du contre dtoient prefque d'egale force*: en un rnot, comme fort problematique ; qu'en tout ce qu'on a dit & rapporte fur ce point , onn'a voulu deroger en aucune faqon au droit du Ledeur, de fe ranger du cote qifil jugera le plus jufte &le plus equitable; que pour le mettre en etat d'en porter un jugement tel , on n'a cache fur cette affaire miftdrieufe aucune circonftance, qu'on en a pu decouvrir, & Ton avoue au refle, qu'a la veritd on eft pour raffirmative dela quef- tion du Droit qu'avoit la Reine de prononcer une pareille fentence contre fon Domeftique: mais qu'on penfe moins favorablement pour Elle, quant a la queflion de fait^ ou Fexecution meme, qu'on defa- prouve, en faifant voir en meme terns, que ce coup fatal partoit de tout autre que de la Reine elle-meme. Parminombred'autreschofes pen honnorablesqui ont ete repandues contre Cbriftine^ celle d'avoir ete trop volage & meme fusceptible d'amour 5 jufqu'k franchir les bornes de Thonneur & de la modeftie y fe trouve marquee dans tous les ouvrages Francois , qui ont ete pu- blics a fon fujet (*). On De ce combre font tous les ouvrages en Francois cites ci-defTus fur la vie de xvi R E F A C E. On convient, que fi Ton combine plufieurs circonftances, quedes Perfonnes, meme de con fide" rat ion, ont ramaflees fur cet article, on aura de la peine a la juger innocente , du moins quant a ce qui eft de fauver les apparences. Mais fi on reflechit fur lecara&ere de prefque tous ces Ecrivains, qui par un defaut, commun aux Petits Maitres, tant de robe que d'epee , ne fauroient comprendre qu'une femme fe puifle entretenir feule avecunhomrr^ouconverfer librement en public avec une perfonne de ce texe , fans qu'il y entre quelque intrigue d'a- mour reel, & que d'ailleurs Ton confidere le naturel de Cbriftine qui vouloit vivre fans contrainte , & dire fur toute forte de fu jets fon fentiment, fansfaqon, & fans deguifement ; onferaplusporte aPab- fbudre, meme en fait de galanterie, qu'a la condamner fur les appa- rences. Bien plus, a cet egard on fe croit en droit d'en appelleraux temoignages que lui ont rendu Mademoifellede Monpenfier^ fille de Qafton de la Reine Cbriftine. De plus le ST. Marana (i) Auteur de YEfpion Turc, pu- bli en Francois avec permifllon de la Cour de France , qui en fit deer ce qui nc Jui convenoit pas (2). P^oiage d'Efpagne par la Comtefle d'Aunoy C:0- Memoirespourjervir a I'HiJloire Univerfelle (4). Memoires bijloriques , polit. critiq. f liter aires (5). Mirmires politiques , amufants & fatiriques (6). LANGLETDU FRESNOI, Mtibode pour I'HiJloire (7 _), Lettre de M A R i G N Y ecrite de Bruxelles a /a Haye (8). Osuvres de REGNARD (9)- Celui-ci voulant fe faire Ecrivain d'Anccdo- tes, de Poete qu'il etoit, commet lixlourdes fautes d'hiftoire a la pa- ge feule que nous venons de citer. On peut par-la juger du reite. L'entretien entre Guftave-Adolphe & Cbriftine (iq). Parmi les Auteurs d'autres Nations on en trouve qui ont port depareils ju^e- mens de Cbriftine, comme par exemple Tetitzel, (11) Feller, (12) Barker ("3) de Witt ("14) Holberg (15) Mederus ("16). Mais il y a toute apparence qu'il fe font fondes fur ce qu'en ont dbite les Ecrivains Francois par anticipation. (1) Tom. IV. p. 114. (10) Dans Lucien en belle humeur p. 258. (2) y. Cbarpenteriana p. 30 oit il eft ditque (n) Monatl. Unterred. Julii 1692 /;. 556. Mr. Charpentier etoit cbargc de la rtvifion de (12) Otium. Hanoi: . 126. Ctt ouvrage de Marana. (13) Lettres from the dead to the Living t>. (3) T.H.P.S.&C. 186. (4) 71 ///. p. 29. &c. (14) Lettres f Negotiations T. /. p. 263. (5) Par Amelot de la Ilouflaye T. II. p. traduftion de Rouflet. 350- (15) Hift. de Dannemarck. T. II. p. 873. (6) Par le C. de Braflei T. III. p. 227. T. III. p. 165. &c. & 699. &c. f dans fon (7) Tom. y. cbap.tf. p. 87. td.d'Jmfterdam parellele des Femmes illuftres T. II. p. 256. 17.17- n 12. 25 7 . fcfr. (8) Imprimte dans VHift. de la vie de Chrif- (16) V. I' fyigramme de cet homo ingcnio- tine , citte ci-dejjus , p. 29. ^r. fe Nequam dans Neumeifter Differt. de PC?- (?) T- ! P.. 3 7- tif German, pag. 103. A C E. fta/hn de France , Due .ftOrttanS) & Madame de MotteviHe> Da- me cThonneur de la Reine Anne ^Autricbe^ qui loin d'etre portees a- la flater, ont au contraire epie toutes fes adions durant le double fejour qu'elle fit a la Cour de France. Voici en qtiels termes Mad. de Montpenfier dit fa penfee rondement au fujet de cette Reine. ? 5 Cbriftine parut civile particulierement aux hommes, mais brufque 33 & emportee, fans donner aucun fujet eftectif de croireles mauvais 33 contes qu'on avoit faits d'elle 5 malgre qu'ils s'etoient repandus par 35 toute I'Europe a fon defavantage (a) ". Madame de Mottevilk s'en explique de cette maniere : ,, Rien ne parut en Chriftine de con- 35 traire a Thonneur, je veux dire a cet honneur qui depend de la 35 chaftete & fi elle s'etoit laifTee entamer fur ce chapitre, les charita- 3 , bles Gens de la Cour rfauroient pas oublie de le publier () ". A ces temoignages d'un fi grand poids Ton peut ajouter le jugement d'un autre Auteur fur la conduite que cette PrincefTe a tenu a Rome. II allure : que de blamer la Vie qu'elie y avoit menee , c'eft n'en 33 avoir eu aucune connoiflance , on vouloir la noircir centre fa pro- 5 5 pre connoiflance & Tevidence d'une verite, dont il y ades millions .33 de temoins. Ce n'etoit pas a Rome , oil elle eut pu vivre fans reli- ,5 gion & y etre epargnee par la medifance, qui 5 a moins que de 35 vouloir per^er dans le fond de 1'Ame par un jugement tout a fait 33 temeraire-3 ne difconviendra jamais 5 qu'elle n'ait pratique meme ,3:,tres airiduement & exemplairement tous les devoirs d'une perfon- 3V. ne attachee a la Religion qu'elle profelFoit..., . Au refte, ajoute-t- ,3 .i), toutle terns qu'elle a vecu a Rome^ a ete fi exempt defoupqon 53 du cote de la debauche & du libertinage, que ceux qui y vont, 3, ou qui y vivent quafi dans la feule vue d'epier les intrigues de cet- 5 3 tegrande ville, remplie d'un Monde de toutes les Nations, n'ont 5, pu aucuhement Tourriir des Memoires veritables pour avancer ce 33 que Moreri en a dit dans fon Diclionnaire Hiftorique (c) ". Mais, dira-t-on , d^ou vient que fes fentimens ont de tout terns et6 fi partages au fujet de cette Princefle, que fi elle a eu tant d'admira- teurs 3 elle n'a pas manque auili de Cenleurs & de Critiques ? La re- ponfe n'eft pas , ce me femble , fort difficile a trouver. Chriftine etoit d'un caraclere extraordinaire. 11 n'y avoit de fon terns aucune per- fon- (a) V. Mem. de Madle. de Montpenfier (^) V. I'Etat du Siege de Rome T. I. Tom. III. p. 165. p. 93 6 94- Nous aurojis occajlon de par* {/;) y* Mem. de Me* as Motteville T. lerp'ut (implement fur ce fujet 'dans le corps ll r . P. 502. de cet Quvrage. Tome I. * * * P R F A fc E. fonne de fa qnalite, qui lui fut comparable du cotd de Tefprit & fa genie, ni qui put lui contefter le premier rang entre toutes les Da- mes favantes. Des fa jeunefTe elle brilla deja de plus d'une maniere , & fa renommee pafTa T Europe & porta au de-la de fes bornes la gloi- re de fes talens & de fes rares qualites. Cette Renommee s'accrut & fe foutint univerfellement jufqu'apres Pepoque de fa defcente du Tro- ne action fans exemple dans fon fexe & & fon age, & accompag- ne de tant de circonftances fingulieres, qu'ellefit plus de bruit en- core , que tout ce que cette Reine avoit fait jufques-lk. Mais chacun en jugea felon fa portee d'une maniere favorable ou defavantageufe : & aiant bientot enfiiite change de Religion , elle fe mit par-la entre deux partis oppofes & animes Tun centre Pautre : deforte , qu'il n*eft pas fi etonnant, qu'autant qu'elle fut blamee par ceux qu'elle quitta, autant fut elle au commencement louee de ceux auxquels elle fe >,Ab3 ..j&"GiU:*,u t *>,- .:.'>;Mh't' M;-,>- y:\ -'^ Ce n'eft pas ici Pendroit d'approfondir cette matiere. On dira feulement, & comme en pafTant, qu'on ne fauroit porter un juge- ment plus fur & plus droit la-deflus, qu'en Pappuiant fur les propres fentimens de la Reine, qu'elle fit afTez connoitre dans quelques con- verfations & dans plufieurs de fes lettres, & particulierement dans celles qu'elle ecrivit , peu avant fa mort , k ceux a qui elle parloit a cceur ouvert (a). Et en efFet s'agiffant ici de chofes qui ne font point fufceptibles d'autre demonflration que de celle de pieces authentiques, on ne pent que s^en rapporter a ces lettres de la propre main de Cbrif* tine, (defquelles on peut meme produire quelques originaux qu'on a aftuelleraent entre les mains) , a moins que d'avoir des preuves d'u- ne force fuperieure ou egale du contraire de ce dont il s'agit, ou de vouloir rejetter tons les faits hifloriques dans les efpaces imaginaires du Pyrrhonifme. Ce qui aulTi ne doit pas peu contribuer k juflifier cette Reine par rapport a quantitede recks defavantageux , qui ont ete faits d'elle; c'eft la fituation ou elle fe trouva apres fon abdication & fon change- ment de Religion. Des lors elle fut placee dans les circonftances les plus delicates. Pour fe foutenir en face de tout le monde , qui tour- na & fixa fes yeux fur elle;. elle avoit fans doutebefoin deplus deme- nagement & de circonfpeclion , qu'il n'eftordinairementpoflible d'ea a- (a) ^. ci-aprh fes kttrcs d M. Olivekrantz Gouverneur Ghfral defes Domaints en Suede &rV. R. ? F t AI c E avoir a une perfonne de fon fexe & de fon age. /// A'iant fait fecretement profeilion kBruxelles de la Religion Catho- iique-Romaine, quelques mois apres Ion depart de SuMe; la bien- feance demandoit, qu'elle eut autourd'elle des Domeftiques delame- me croiance. 11 n'y avoit prefque point de Suddots aflez complaifant pour fuivre fon exemple, uniquement par refpeft ou par attachement pour eUe, El}e ne fe foucioit peut-etre pas d'engager a fon fervice des Allemam* voulant aller en Italic & a Rom^ ou on lui avoit fait ac- croire, qu'ils ne feroient pas les mieux venus. Vive, comme ellee"- toit, d'efprit & de corps, le naturel des Francois & des fattens aura en ce terns-la plus fympatife avec le Cen propre. Quoiqti'il en foit , comme il lui falut former la plus grande parti de fa Cour de perfon- nes de diverfes Nations & de toute autre Nation que de la fienne , par une fuite aflez naturelle, ce melange de Gens neputdevenirqu'u- nefource intaruTable d'envie, d'intrigue, d'ambition, de trahifon& cPautres pafllons femblables, qui font fort en vogue dans les Cours des Grands , chacun croiant meriter de la predilection & des faveurs par deflus les autres. Ces fortes de brigues & de concurrences etant fort communes entre les perfonnnes d'une Cour compofee d'une me- me Nation 3 ou chacun s^emprefle d'avoir la premiere part dans leg bonnes graces & les commillions les plus lecretes : par que! privile- ge la Cour de Cbriftine> compofee de quatre ou decinq Nations, auroit-elle ete exemte de tous cesmouvemens & de tons ces troubles? Louis XI V. quoiqu'homme, Roi &; Maitre abfolu, a-t-il pu, avec toute fa puiflance, preferver la Cour d' intrigues: 1 Temoins les Sce- nes qui y furent jouees par la propre Nation & meme a les propres depens (*). Eft-il done etonnant qu'a la Cour de CbrJftine> dans le terns (*) Dans ce nombre on pourroit mcttre la Sc^ne qu'on donna quand fa ftatue equeftre fut rigee en 1699 a Paris. A la dedicace, tous les Corps & Officiers, precedes du Due de Gewres Gouverneur de la Ville & du Pr^vdt des Marchans, allerent en ordre a la place de Louis le Grand & firent deux tours devant la ftatuli en la faluant refpeftueufement. C'^toit rendre a 1'image, dit un Hiftorien (i), les honneurs dus a 1'original , & il y avoit fans doute de 1'exces & de 1'adulation dans cette ce"rmonie, que le Roi-m&ne ne put approuver. L'autre Sce"ne fe don- (l) V. Larrey Hi ft. de Louis XIV. T. VII. qw le Monarque aimoit I'encens, on lui donna f. 154 3? 156. item la fuite de VHifl. de Fran- de I'encenfoir par le nez... V. Ses Mem. de la ce par Mezerai T. ///. p. 169. &c. LEve"- Gr. Brtkagne T. I. p. 672. 673. cfr. PufeuJ. fuc Burnet dit a cette occafion, quand onvit Hift. Brandenb. Libr. XIX. $. 35. xx P R fr F : A e E: terns qu'elle etoit eloignee des flens, &environnee de Gens de dif- fercntes Nations, contraires les imes aux autres, & qui ne negli- geoient rien moins qne leurs interets particuliers , il y ait eu des des- ordres, auxquels elle n'a pas toujours pu remedier .? Celt fans doute a tine telle difpofition de fa nouvelle Cour & aux confluences dangereufes, qui devoit entrainer cet arrangement bi- garre, que Chriftine n'aura pent-etre pas remarque des le premier reglement de fon oeconomie dans les pa'is etrangers. II lui arriva de fon abdication ce que le grand Chancelier Oxenjllerna & Phonnete homme Nicolas Heinfius lui avoient predit r car les dernieres paroles du premier furent fur la Reine Chrjftine', ai'ant demande, dit le 35 Sr. FaucienneS) a ceiix qui etoient aupjjes de lui, quelles nouvel- 33 les on- en avoit, il repartit: en foupirant fur ce qu'on lui en dit, 3, je lui ai predit qu'elle le repentiroit de ce qu'elle faifoit " (^7) Et lorfque Hem/ius eut appris qu ? elle vouloit abfblument refigner la Cou- ronne, illui eerivit en ces termes: 3 , Croie^-moi, Madame, quoi- 3, que quantite de Gens Vous aient adrefle leurs louanges 3 la plu- 3, part ont plutot revere Votre Etat que Votre Perfonne. Plufieurs ont lone la Reine y mais peu de gens -Cbriftine.... Rien ne Vous ., imoor* 31 Jr ^.<. .' -.. -.: v;-: :,- >, . .\y *v.. 4 (a) V. les Uim. dt Chanut T. II f. p. 472. donna peu aprcs que Louis XII 7 . cut fait drefler fon teftament. On vouloit lui diffiper Jes criftes penfdes de la mort par quclcjue fpedtacle, & pour cela on lui menagea une diftraftipn par une Ambaflade feinte dc la part du Roi dePer/e. Me- bemet^Riza-Bey (c'^tpit le nom que porta 1'Ambafladeur poftiche} dtaflt arriv^ a Marfeille vers le mois d'Oftobre 1714. n'arriva a Paris qu'au mois de Janvier 1'an- n^e fuivante, & n'eut audience publique que le 19. de F6vrier. Le Roi fcrev^- tit ce jour-la d'un habit le plus fuperbe que Ton puifle imaginer. Touxe la Cour imita la magnificence du Souverain , & la grande Gallerie de f^erfailles , pu fo donna ce magnifique fpeftacle, brilla alors de toutes les plus riches pierreri.es de la Cour & de la Ville. L'Ambafladeur temoigna d'etre plus frappe de Fair mar jeftueux du Roi que de-la pompe qui 1'environnoit. Cette galanterie lui value des honneurs extraordinaires qu'on lui rendit par tout & des prefens dontonl'ac- cabla. Cependant malgre" les grandes fommes qu'il en coiltoit chaque jour pour Tentretien de ce Miniftre & de fa fuite, on publioit alors, que ce n'e'coit qu'u^ ne Ambaflade feinte & fuppofe"e par les JeTuites, & Partifans du Pretendant a la Couronne KAngleterre, pour favorifer un dcfTein qui fut enfuite d^couvert. Ce qui fit penfer le monde ainfi, c'eft qu'a peine cette Ambaflade fut paflee les fron- tieres de la France qu'elle s'dvanouit & difparut fans qu'on piit dire ce qu'elle etoir devenue (i;. (i). V. Larrey /. c. T. IX. pag. 304-3015. item Mm. du Kegne de George I. Roi d' Limiers Bift. de Louis XIV. T. VII, p. 507. gleterre T t II. p. 97 : 99. P R E F A C E. xxi importe tant en cemonde-ciprefentement, que d'avoir des egards 3> pour ce qu'on appelle Fortune , puisque Vous Peloignez de Vous, j, quoiqu'elle foit le plus grand bien que les Rois puiffent fouhaiter... 35 Les defauts d'un Gouvernement ne peuvent pas fe cacher : on les 35 diflimule feulement, & on ne les manifefb pas , parlerefpeclqu'on 3, porte a Teminente qualitedes Rois. Mais penfez, en quittant IB 3, Trpne, que tout le monde ofera cenfurer vos actions, avec la 35 derniere rigueur, puifque Vous Vous etes depouillee de la prero- 33 gative Ro'iale, qui Vous mettoita convert de toute accufation & de toute pourfuite (a) Mr. Bocbart en avoit ecrit de la meme ma- 33 niere a Jfac ^offius-. le cceur me faigne, lui avoit il-dit, quand je 3, penfe que la Reine le prive volontairement de tant de moiens 33 de fairedu bien, quittant une fois hors de fes mains n'y reviendront yy plus. Elle s ? en repentira mille fois, quand il n'en fera plus terns;, w nefut-ce que pour le deplaifir qu'elle aura de voir Jes jugemei^s 33 defavantageux que fera' la plupart du monde: car on fe plait natu- 35 rellement a mordre fur les plus grands, furtout quand on en penjk avoir quelque fpecieux pretexte (^). EiFedivement aufll longtems que la Reine Cbrijl'me fut en dtat dfe- faire des largefles k ceux qui en etoient dignes, & de faire aulTi des- preiens conliderables a des parafites qui Tentouroient ; on ne trouve- ra perfonne, qui ne lui ait prodigue des louanges & briile del'encens comme a une Divinite. Mais la Scene ai'ant changee > que dans plufieurs portraits 5 ou fesEnnemis Pont fi fort defiguree. On y verra la force du genie de cette Princefle, & le haut & merveilleux degre de connoiflance 5 auquel fon efprit s'ell eleve. Entfautres lettres de cette Reine 5 on en lira avec plaifirquel- ques-unes en SuMois^ en Francois & en Italien^ remplies de tres- grands fentimens , 6c qui pafleront toujours pour de bons modeles , autant par la purete du langage, que par la nettete des idees & par les traits vifs & brillans qu'elles renferment. Ceft le jugement qu'en ont porte plufieurs Perfonnes tres-diflinguees par leurs lumieres , & en particulier Mr. Defcartes (d) Mad. de Motteville (e) TAuteur des Memoires pour fervir a THiftoire Univerfelle (/) celui du Mercure Hollandois (g) Mr. Manage (b) Bonaventure SArgonne (*_) deguile (a) K. Id-deJJus la lettre de Mr. Bayle (rf) Dansfes lettres par Clerfelier T.I. a I Abbt du Bos du a. Janv. 1697. dans p. is/8. N. 38. &c. ' (e) Dans fes Mem. T. I. p. 389. ling dans fes Difcours fur les Etats Cb. (f) L. c. T. III. p. 521. IX. . 17. p. 310. (g) y. Hollandfe Mercur adann. 1654. (fr) Monatl. Unterred. en 1692. p. 556. p. 28* (0 Bayle Dift. Hift. 6f Crit. art. Bo- (I) Menagiana T. II. p. 240. chare, tit. D. L P R- E FA C E. xxiii (*) dguife Jbus le nom de Hgneul Marvilk) (a ) Mr. Sarrau (V) le Sr. Malherbe (j) & autres, quiavouent tous volontiers, que les Let- tres de Chriftine ont ete admirees de tous & par tout , tant pour la yivacit6 des penfeesj que pour la beaute duflile & par la noblefle des fentimens, & qu'elle s'eft exprimee avec tant de facilite en plufieurs langues vivantes, qu'on eut dit, que chacune etoit fa langue naturel- Je. Aujfli le cdlebre Mr. de Leibnitz en convenoit-il fi ouvertement , que voulant faire un paraliele entre la Reine Chriftine & la pre- miere Reine de f ruffe (dont on a admire Tefprit judicieux & eclai- re 5 ) & parlant des lettres de ces deux Princefles, il fait cette ex- clamation : 5 , Plut a Dieu que des Gens malavifes n'eufTent pas bru- 16 la plupart des lettres de la feue Reine de f ruffe , qu'elle avoit 3 5 ecrites elle-meme 5 ou qui lui avoient dt6 ecrites! Nous aurions-la, 3, ajoute Mr. Leibnitz , de quoi oppofer aux lettres de la Reine 35 Cbriftine (0 (|). J'avoue pourtant, que malgre tous les fbins que fai pris pour re- cueillir toutes celles qui pourroient fe trouver ; il y en aura un nom- bre aiTez confiderable qui aura ediappe k mes recherches. J'ofe aflu- rer (a) Melanges d'Hift. 6f de Literal, T. jusd. Epijlola ad Chriftinam p. 262. 11. p. 292. CO IS. Leibnitii Ejnjt. par Kortholt (b) Sarravii Epiflola in dedicat. & E" 1. f p. tit. (*) Mr. Sayle dit (i) que ce Bonaventure d'Argonnc etoit un Chartreux , qui s'etoit de^uifd fous le nom de figneul Marville. II toit fils d'un Orfevre de Pa- ris & devint enfuite Prieur de la Chartreufe de Gaillon, pas loin de Rouen. ("t) Le Sr. Malberbe parlant d'une lettrc Frangoife que Cbriftine avoit ecrite a Mr. Gaffendi en i6r2. dit qu'elle etoit d'un langage auffi pur, que s'il etoit recem- ment forti de la (Jour de France (2). (|) Les Auteurs de la Bibliothtque Raifonnee marquent C3)c|ue 1'Editeur des let- tres de Leibnitz les avoit averti, qu'il avoit oui dire, que Mr. fiourguet, Profef- feur en Philofophie a Neufcbatel pofledoit les lettres que la Reine de Prutfe avoit ecrites a Mr. Leibnitz, &; qu'il avoit deflein de les publier. J. F. Cramer dit au fu- jet de la Reine Cbriftine & de fes lettres (4) Sed pace tarn urbani Sacerdotis (P. Bouhours) dixerim: unicorn Chriflinae Regina Epiftolam , five de publicir five de re. bus privatis ftriptam i unicum ejus acutb & facet e diclum, omnibus ingeniofis f w- nufl'is fententiis nojlri Germano-MaJligis & ejus Jimilium y intelligentes barum ele- gantiarum Arbitri praferunt ". (i) V. Lettres cboifies de Bayle par Mar- (4) Dans fes VIndicix Nominis Germanici chand p. 664. &f 869. contra quosdam Obtreftatores Gallos pag. 9. (a) V.fa Grammairt Fran^oife p. 287 S* cfr. Tentzel /. c. Fcbr.i695- P- 158. f Kort- 288. holt: Epift. Leibnitz. T. I. p. 282. (3) Jam-Mars 17^7. p. 131. xxiv F R E F A C E, rer , qu'il n'a pas tenu a moi de les decouvrir toutes dans ma Patric & dans plufieurs pals Strangers ou f ai voi'age. J'ai etc aflez heureux pour rencontrer prefque par tout des Perfonnes de diftinclion &defa- voir, qui rn'ont prete leur affiftance & ont feconde mon deflein: entr'autres Mr. le ProfelTeur SOrvilk , egalement difUngue par fon : grand favoir & par la douceur de fon caraclere: Mr. Royer, Paffeur de TEglife Franpoife a la Haye : le celebre Mr. Weijtein \ Profefleur a Amfttrdam\ rilltiftre Chevalier Hans Shane ^ ficonnupar toute r 'Eu- rope , par fon fameux Cabinet : Mr. de Riedefel, Aflefleur a la Cham- bre Imperiale k Wetzlar^ & Mr. de Ponikau^ Chambellan a la Cotu* penbague. Mr. Eftor Vice Chancelier de rilniverfitd de Marbourg. & Mr. Riefflein^ Gouverneur des Pages a la Gourde Cajjel^ &Mem- bre des Societes de la langue Allemande a Konigsberg & a Goetfin- gen-) qui a bien voulu deiliner les Vignettes & Medailles qui auront place dans cet Ouvrage. Je ne parle pas ici d'autres Perfonnes ega- lement obligeantes &honnetes a mon 6gard 5 & dont je n'oublierai pas de marquer les noms en fon lieu 3 t6moignant ici a tons ma plus vive reconnoifTance. Je ne faurois diffimuler, que faurois bien voulu encore avoir com- munication de plufieures lettres que fai.vu dans lesOuvrages des Sa- vans, leur avoir ete ecrites par Cbriftine. Mr. Manage parle dc celles qu'iljavoit eu Thonneur derecevoir de cette PrincelTe, & il'en parle de maniere a faire comprendre que lenombre n'enetoit pas pe- tit (a). On en dit autant de celles qti'avoit revues le celebre Sgr. Filicaia (b) Mr. de Saumaife (c) Mr. Defeartes (cT) Mr. Fr&Mric Spanheim (e) & autres (/). Je ne doute pas que des Curieux n'en a'ient des copies & d'autres lettres &; manufcrits de Cbriftine qui m'ont echappe, & qui pourroient repandre de nouvelks lumieresfur la vie Sc les Ad:ions de cette Reine. Je me fouviens d'avoir vu a Rome, dans la Bibliotheque du Cardinal Qttoboni, plufieurs volumes de Manufcrits & de CJiartres appartenant autrefbis a cette Princef- fe C-0 ^- Menagiana /. r. (?) Lettres cbo'fies de Bayle par Mar- (fe) V. Crescembem l^ilt degL Area- chand 7". /. p. 506. Mem. de MottcviJlc tli art. Filicaia Part. 11. p. 74. I.e. Grotii Manes vindic.p.Sttf. Diarium (c) Clementii Proleg. l^iice Salmafii p. Europium in Append, ad ann. 1676. p. 15 1. yi. (f) F. Lettre & ntgoc. de de Witt. Tom. (d) Clerfelicr Lettrss dc Defcanes /. r. 7. p. 363, PREFACE fe (*). Javois deja alors le defTein de faire tifage de ces lettres & d'autres aftes & papiers concernanc Chriftme en profitant d'une ren- contre fi favorable: mais le Conclave, qui fuivic peu apres, a caufede la mort du Pape Benott XIII. > m'empecha de les examiner de plus pres, parce qu'on ferma les Bibliotbeques du Vatican & prefque tou~ tes celles des Cardinaux. II eft vrai qu'un Seigneur de ma connoi fancea/to/^a qui j'enecrivis depuis5mepromitobligeamment copies de ces lettres & autres pieces intereflantes , qu'il pourroit trouver ; mais foit caufe de la guerre qui fe r^pandit enfuitedans I 1 } Italic , foit par d'autres confiderations, il n'a pas rempli la bonne efperance qu'il m'avoit donne. Un autre ami m'anon feulement offert, mais au fi deja rendu de bons offices la-deflus : comme je me flatte qu'il auroit cu la bont6 de le faire encore, fi j'eufle pu differer plus longteins la publication de cet Ouvrage (j). Mais quelle que fut mon envie de le ren- dre plus complet, des Perfonnes qui m'ont paru fouhaiter de le voir public , m'ont temoigne quelque crainte , que toujours occupe a cher- cher & a recueillir pour le completcer, je n'abandonnafTe a la fin la penfee de le mettre au jour; & ce qui n'a pas peu contribue aufli a me determiner a le donner tel qu'il eft 5 & dans la forme qu'il paroit; c'eft ("*_) Mr. Keijler en nomme XVIII. volumes , oil il y avoit plufieurs lettres de Cbrijtine couvrir ce Manufcrit nulle part: qu'au moins ilne fe trouvoit pas dans la Biblio- theque du Cardinal Ouoboni^ ni dans celle du Cardinal Bejbzzi: non plus que dans la Bibliotheque Laurentiane a Florence. On a mme lieu de croire, que la perte de ce Manufcrit de Pallavicini n'eft pas fort grande : car outre que ce Car- dinal aimoit extremement a flatter les paflions des Perfonnes dont ilparloit, (3) il n'a pas pu poufler fon hiftoire au de-la dc 1'annee 1667. qui dtoit celle de 'fa mort, & quant aux intrigues, que fes Confreres les Jefuites firent jouer en Suede pour la conversion de Ctrijline a 1'Eglife Catholique-Romaine, dont il aura pii donner un detail e"xacl:; je crois, fans vanite, les avoir dev'eloppees mieux que lui, par les nouvelles dccouvertes faites depuisce terns- la, & que Pall(ruicini2iUf- ra peut-etre entierement ignorees ou paflees. (1) Dans fes Pelages T. II. Lettre LII. in 8. p. 59* (3) Nous en donner ons des $r saves, en /ir- (2) Tom. I. pag. 88. impr. a Cologne 1707. lant du Pontifical rf' Alexander VII. . Tome L **** P ft E F ft C . c'efl que f efpere encourager par-la tons ceux qui font Dpofitaire's ' d'autres Ecrits de Cbriftme & d'autres Pieces fervant a fon Hiftoire, a fuivre mon exemple & a en faire part au Public: oubien a les com- muniquer an Libraire , Imprimeur de ces Memoires, quine manquera pas de letir en tmoigner fa reconnoiflance. Au refte, en cherchant par tout ce qui pourroit eclair cir la Viepri- vee de cette Reine 5 f ai eu le bonheur de rencontrer en Manufcrit fes Maximes , dont fon Secretaire Galderiblad Sutdois de Nation a- voit donne quelques copies a Rome en 1692, fous le titre ftQwira- ge de Loifir de la Reine Cbriftine de Suede. J'ai d'atitant moins ba- lance a 1'adopter dans ce Recueil, que cette PrincefTeen at6 recon- nue pour TAuteur 3 aufli bien que d'une brochure portant le titre de Reflexions diverfes far la vie / les attions du Grand-Alexandre. L'une & Tautre piece fera jug6e digne d'elle , comme renfermant plu- iieurs Maximes &Penfees fublimes, qui approchent aflez de cellesdes meilleurs Auteurs en ce genre (*). Pour decharger le Corps de TOuvrage, on a renvo'ie a la fin, en forme d'Appendice, diverles pieces iervant a eclaircir ou k juftifierdes faits politiques on literaires y dont on a eu occafion de parler. Quel- ques-unes de ces pieces a la verite font deja publiques: mais elles fe trouvent difperfdes dans nombre de livres XXVIH PREFACE. note fai place les Medailles frappees pendant la vie de la Reine, tel- le que Mr. Reinbold Bercb, Chef & Secretaire du College des Anti- quites de Suede > & fort entendu en tout ce qui a rapport a la litera- ture & aux Beaux-Arts, a eu la bonte de me la faire parvenir: avec quelques remarques en Sutdois. De plus fai ajoute trois Tables : Tune des noms des Auteurs des- Livres dont je me fuis fervi, avec le terns de leur impreffion : Tautre contient une lifte generate des Chartres & Aftes en manufcrit, qui entrenc dans ces Memoires ou quiy ont ete cites: La troifieme Ta- ble eft celle des Matieres & des noms des Perfonnes, dont il a ete; fait mention dans le Corps del'Ouvrage. J'ai auflimis en marge un fommaire des Matieres pour en rendre Ja deduction plus aifee a fui- vre & a retrouver au befoin; deforte qu'on a lieu de fe flatter, que da cote de Texaclitude le Lecleur n'aura rien a defirer. Enfin je n'ai rien neglige pour meriter Tapprobation du Public, qui de fon cote, fef- pere, aura de indulgence pour les fautes ou f aurai pu tomber, ea particulier a regard du Francois, langue etrangere pour moi,& dans laquelle je n'ai pu 3 & nepuism'exprimerqti'en Etranger. A ceux qui" voudront vetiller fur ce qui n n eft que forme ou purifme, je ne faurois donner d'autre reponle que celle 3 que (fauf la comparaifon) Luculte tit en pareil cas a Atticus: qn'il vouloit o^Attlcus s'apper^ut par fon hiftoire ecrite en langue Grecque, bc , Charles XII, & la RelneUlrique-Eleonore. Mais autant qu'on le fait , le nombre de ceux qui font morts dans tout autre mois , eft bien plus grand, defortc que ces vains obfervateurs fe font m^comt^s a regard de celui-la. (p) Pag. s. d 1'Edition de Rome in 4. Sc dc C?) Dans les Mc'moires da I'llluftte Maifon de !' Edition de Venife in g. Brake ad. ann. 1626. dont 1'original iiaiufcri: eu (*) Voyez ci-dcflous ad. ann. 16*0. Stteii-t fc confciye dans la famille. A 2 ME MOIRES CONCERNANT 3 aux kiens ^ es habitans, ni a leur Culte divin. Au contraire ii punk &'- verement ceux qui firent les moindres violences. II eft vrai , que ces ,, Hiftoriens attribuent cette moderation au deflein que Guftave avoit for- me de fe fra'ier par la le chemin a la Couronne Imperiale. A quoi ils ajoutent , que les converfations , que le Roi avoit cues avec les Catholi- ques, du terns qu'il faifoit fes etudes a PawV,fous le celebre Mathemati- cien Galilee, avoient aufli contribue." Mais quels qu'ai'ent etc les mo- tifs de Guftave , (lefquels dans un Prince aufli magnanime & humain qu'il 1'etoit , ne pouvoient venir que d'une bonne fource :) il eft toujours cer- tain que , quoique Vainqueur , il ufa par tout moderement de fa bonne for- tune, meme envers les Catholiques: & il feroit a fouhaiter, qu'on en put dire autant d'eux , quand ils font maitres dans des pai's Proteftans (*). si Guftave- Quant a ce que Gratian dit, que Guftave- Ahlphe fit fes etudes a Padoue , u?tIes e etu. un autre -Auteur Italian (a) en parle plus au long , en citant fes garants, ies Pa- qui pretendent tons, que ce Prince pafla plufieurs mois de fuke en cette Univerfite fous le nom de Comte de Sudermanie , huit mois apres la mort du Roi Charles IX. fon Pere, & qu'il s'en retourna en Suede 1'an 1612. Deux autres Auteurs Anglois (Z>) difent la meme chofe: a cette difference pres, qu'etant deja Roi il avoit fait fes voi'ages incognito fous le nom de Seigneur de G^RS, dont les quatre lettres faifoient les initiales de fon titre de Gufta- vus jddolphus Rex Suecia. Malgre cequ'en difent ces Auteurs, il ne s'en trouve rien demarche dans aucun Hiftorien de Suede: ce qui aura aufti donne occafion a unfavantSue- dois (c) de dire , que ce qu'en avoit dit Conmenus etoit deftitue de tout fon- dement (**). Cependant on ne fauroit pafler fous filence certaines circonftances , qui' au moins connoitre, que ce Prince, etant deja Roi , fit allurement (a) Comncnus /. c. pag. 287. 6? 288. (0 Guft. Benzelftierna danslavie deGuft. (&) Fuller /. c.p, 316. I). Waths carac- Moipbt par J. G. Mittag , traduite en Suedois ter of the Siveditb Intellig. P. III. p. 183. pag. 3- not. es incogni- to hors de (*) O auroit grande raifon de reprendre encore plus le ridicule de quelques Jejui- cJ iiphe pri$ tes de ce tems-1^ , qui ont pris Guftave-Adolpbe pour V Ants-Cbrift meme. Un lavant " r Ante " Anglois (i), qui en cite le paflage, dit que ces bons Peres avoient accorde a notre H6ros trois ans & demi de re"gner & pour faire des conqu^tcs: mais il ajoute, que fi ce Prince avoit ve"cu au de-la de ce terns-la, le vrai Ante-Chrift s'en feroit reflenti, &que les tragedies de Rome auroient atteint leur fin, dont le cinquie"me & dernier Ade e(t en- core a repr^fenter. (**) Comme cet ouvrnge de Conmenus ne fe trouve pas toujours , & que la narration jU '^ ^ a{t ^ e Guftave-Adolpbe , contient plufieurs circonftances remarquables, nous la donnerons en fon entier dans 1'Appendice de ces M(5moires. Them. Fuller dans fon Holy and Profane tions horribles centre Gufiavt-Adolphe, difant dans chft " P " Stttt pag. 311. oil il cite Defcriptio Belli Suecici ftr Anonymum pag. \%6. Voycz dc meme Vm. Siri Memorie Rec. Torn. VJI p Jjt. ]n Bavicie on alloit jufqu'a faiie des inopre'ca- leurs prieres: Defence i, oDcus, ab hofle b*re- ditario , Diafalv Sttsdo. v. Jo. Fags anatom. Bull. Jub. Innoeen:. XII p. n. ii. J. Wali'm, dc glad. mag. Gujl, Ad. pag. Ifi4. CHRISTINE R-EINEDE SUEDE, = J ties voiages incognito hors de la Suede. Car non feulement il eft dit dans L ' an les Regitres du Senat () , qu'il avoit traverfe la Mer Baltique avec trois 16 ~' J vaiffeaux de guerre au mois d'Aout en 1618. & avoit etc incognito en Bran- " debourg : mais il eft auffi conftant , par les memes Regitres , de merne que par les annotations Manufcrites du Chancelier Axel Oxenftierna , (b) que deux ans apres, ce Roi avoit pafle les mois de Mai & de Juin hors de la Suede incognito, ai'ant ete en cette qualite a Berlin , ou il avoit conclu fon manage avec la Princefle Marie-EUonorc , dont les noces fe celebrerent a Stockholm vers la fin de 1'annee 1620 (*). L'Eveque Jean Matthia, Precepteur de la Reine Chriftine, remarqueauf- fi quelque part, (c) que Guftave-ddolphe > tant pour raccompliflement de ce manage, que par 1'envie qu'il avoit de voirl'Empire Romain & particulie- rement \Allemagne , accompagna 1'an 1620. fon Beaufr ere Jean Cafimir hors de Suede , & fit ce voiage incognito avec lui ; qu'alors Son AltefTe cut toute 1'attention poflible a conduire heureufement le Roi par pluiieurs endroits dangereux & par des Pais Catholiques: &, qu'en etant venu a bout avecl'af- fiftance Divine, Cafimir reconduifit Sa Majefte fur les bordsde la Mer Bal- tique , & s'en retourna dans 1'Empire aupres de fon Epoufe , fceur du Roi. Si 1'on combine toutes ces circonftances , il eft apparent que Guftave- Adolphe fit , avec fon Beaufrere , quelque courfe vers YItaKe , & peut-etre meme vers Padoue. Mais qu'ii y ait paile huit mois & plus , comme le pre- tendent les Hiftoriens Italicns , c'eft ce qui eft d'autant moins probable , qu'a la mort du Roi fon Pere , & n'aiant encore que dix fept ans , il herita trois guerres avec le Dannemarck , la Pologne & la Ruffle , qui 1'occuperent trop , pour qu'il pftt emploier toute une annee de fuite en voi'age% n'y ai'ant meme aucune epoque de fa vie qui lui ait pii donner ce loiOr. Amateur comme il etoit des Belles-Lettres & des Beaux- Arts , on peut- p*!**-** 7 , r dolpbtzimt S ailUrer les Eelles- Lettresfc lei (a) Del'an 1618. pag. 320. dans Palms- (c) Dans fon Oraifon funebre du Prince Beaux-Arts, kold. Palatin Jean Cafimir Pere de Charles -Guf- (b) L. c. ad aim. i6io. p. 549. tave... dans les Perfonalia pag. 18 fjf 19. (*) Tous ces paffages fe trouvent dans les Palmskoldiana : & comme nous aurons oc- Le$ cxce -, afion de citer plus fouvent ces Manufcrits-la, il ne fera pas hors de propos d'avertiricw Re- ici le Lefteur, que feu Mrs. de Palmskold, Pere & Fi!s, ctoient Secretaires des Archi-cueilshifto- ves de Suede, ou ils paflerent bien des anne"esa faire des copies & des extraits de pref- r J, c l^ cs que tous les Ates& Chartresqui s'y trouvent & qui peuvent fervir d'eclairciflement $ rHiftoire Civile, Ecclefiaftique & Lit^raire de Suede. LeFilsfurtoutfe livra tellement ^ ce p^nible travail, que pendant fix ann^es de terns, a peine fut-il vifible a quelqu'un defes amis, s'occupant nuit & jour a fouiller les papiers & a en tranfcrire tout ce qu'il jugeoit convenir a fon but. C'eft de-la que viennent ces prodigieux Recueils hiftori- ques, fous le nom de Palmskoldiana, an nombre de pres de trois-cent volumes in folio ou in quarto. Tout ce que les Archives de Suede, auffi bicn que les livres imprimis, renferment dMnte'reflant fur ces matieres, s'y trouve detaill^ou au moins in3iqu. 11 y a au de-la de vingt- cihq- ans que rUniverfite" d'Upfal acheta ces pr^cieufes Collections des heritiers de PalmskoLd. Mr. le ProfeiTeur Olaus Celfius en fait un jufte eloge on peut voir auffi la-deffus les Monument* Palmskoldiana. pag. 30. 83. 8(5. 92. &c, (i) Dans fon Hiftoria Bibliotheca; Upfal. patr- i-7J A (5 MEMOIRES C0NCERNANT ^ >an s'aflurer qu'il a mis a profit ce terns de voi'age. On fait qu'il a poufle - I 2a - 1'Art Militaire & furtout la Taftique a un plus haut degre qu'on ne 1'avoit fait avant lui. Tout occupe qu'il etoit par fes guerres continuelles , il ne laiila pas de lire de bons livres dans le Camp & pour ainfi dire a la vfle de fes ennemis (*). Entr'autres il lifoit avec plaifir le Traite de Hugues Gro- tius du Droit de la Guerre & de la Paix , qu'il tenoit toujours fous fon che- vet , & fur les maximes duquel il portoit ce jugement remarquable , (a) que fi Grotius fe trouvok lui-meme a la guerre , il verroit que les belles lemons, qu'il pre'fcrit, ne fe laiflent pas toujours pratiquer". Le BaptS- Mais revenons a la lettre de Carmi , ou il rapporte au fujet de Chrijline, /?)L? e ar "q ue le premier Chapelain de la Cour , en la batifant , lui avoit fait , fans y penfer le flgne de la Croix , avec 1'eau benite , centre Je rite des Luthe- riens, qui regardent , dic-il , cette ceremonie comme fuperltitieufe, & que le Chapelain avoit eu de la peine a s'en difculper. Ce que Carini avance-la eit parfaitement ignore des Hiftoriens de Suede. On remarquera pourtant la-delfus , que s'il entend par 1'eau benite , Faqua lujlralis de 1'Eg'ife Romaine , il eft connu qu'elle n'e'toit point en ufa-e dans les Eglifes de Suede, plus decent ans avant la nauTance de Chriftine, & pour () V. Manes Grotii pag. 581. &c. Lungvitii Alexander M. redivivus p. 2. f 3. (*) Nous en donaerons ici pour preuve la lettre de Jean Skytte Secateur de Suede & Chancelier^jde I'Univerfite" d'UpJal, (Jcrite a 1'Eveque Jean Mattbice. Elle eft du 23 Juin I6-J.2. a tirec de 1'original qui eft dans laBibliotheque d'Upfal. Reverende f ClariJJlme Vir. Cum vereor, utilluflrijjlmus Pr biceps Dnus Carolus Gu- ftavus intra paucos dies profeftionifejit accinfl ur us , adeout omnisfacititas Celfitudinsm funm conveniendi mibi prcecidatur , bafce literas ad Eandsinfcribendasjudicavi t quibus bumillimi & devoti met animi ftudium tejtarer, & Jimul Celjitudinem Juam cobortarer , ne fe vel adu~ latorum illecebris & blandimentis 'commoveri , necdifficultatibusfrangi debilitarique patiatur t quo minus literarum fttuliis in pofterum fe obleftet. Imo vcrofuaj'or & autbor Jitm , ut avun- culifui, laud.recordats.GuilaviMagnidocumentum imitetur , qui in ipjis etiomcoftris&in Iqftiumfuorum quo/i conj'peftu ab optimorum autborum leftione non abftinuit. Ouodji itaque Celfit. fua ctiamnum npud Vos commoratur , non gravate bafce me a nomine off ere s : ji vero discejjlljun Celfit:, i;elCelfit:fu(BforonDn!sChnfiinx, velperfratrem perfertndas , -vel prajenti um ex- blbitori trades. Qtiod Juperejl Rev. /'. Dignitatem Deo priepvtenti commendo fc. Cette kttre refute aufli ceque ditMr. de Poltair e , donnant trop d'elfor afonefprit,* (i) Je f?.is que Charles douze & Guftave & Turenne N'pnt point bu dans les eaux qu'ipanche 1'Hipocrcne: Mais enfin ces Guerriers , illuftres Ignorans ; En ^toient moins polls, & n'^toient pas plus Grands (2). An fentiment de ee bel Efprit, pour etre grand Prince, ilfautetrcPoe'te: & des qu'on n'eft pas Foete, on elt ignorant. (1) V. Oeimesde Voltaire Tom. VI. pag. 397. un garant fur. ( V. Toin, III. p. 275. ad aim 1716.) vo'fez aulTI fes autres vers dans IcMcrcurede Frar.ee , &pour le Prince de Turenne , il eft dit dans les Odobre 1749. pag. 72. Oeuvres portumes de Mr. dc la Fontaine, qu'i! a- (2) Quant a 1'amour du Roi Charles XII. pour voit porte' 1'amour pour la Poefiefi loin , qu'il ciia- JfS Beaux- Arts Jc a la proteftion qu'il leuraccorda Tonhiftoirfc traduite park Confr. W^rw^o/f z eg eft voit recite des pieces cutiercsparca\ir. CHRISTINE REINE DE SUEDE. L'an 162$. pour le figne de la Croix, il fe pratique en Suede, comme en plufieurs an- tres Pa'is Proteftans , fans etre regarde comme une ceremonie fuperfti- tieufe. Aurefte, comme nous avons dit quelque chofe de 1'Horofcope de Gu- L d " or p*' ftave-4do!phe , nous y ajouterons une remarque fur Mr. Patin (a) , qui fait Mve- C dire au celebre Tycbo Brake, fans fon Traice de la Comete de 1572. qu'en phe> vertu de cette etoile naftroit , vers le Nord , dans la Fmlande , un Prince qui ebranleroit VAHemagne. & qui difparoitroit enfin 1'an 1632: &que ce Prince etoit precifement Guftave Roi de Suede. Mais Patin fe trompe doublement en rapportant la pre'di&ion de Tych* Brake de la mamere qu'il le fait. Car non feulement ce grand Aftronome (b) ne s'exprima qu'en termes generaux fur ce que fignifioit cette nouvelle etoile, & en faifant fes pronoflics fur Guftave-Adolphe , qui venoit de nai- tre, illui predit feulement une Couronne : Ce qui fut pourtant regarde a- lors comme quelque chofe de bien extraordinaire^ parce que fon Pere,qui regna depuis, fous le nom de Charles IX. , n'etoit en ce tems-lu que Prin- ce hereditaire de Sudermanie. II avoit lui - meme pen d'elperance de deve- nir jamais Roi , a caufe de trois Princes fes Freres aines. Le Roi Jean III. du nom, le fecond de ces trois Freres, avoit pour fils Sigifmond , alors Roi de Pologne, qui avoit aulli des Enfans plus pres de la Couronne que Charles IX. & fon fils Guftave-ddolpbe (*). L'autre bevue de Patin confifte en ce qu'il avance,que Tycho EraU avoit dit, que ce Prince naftroit en Finlande ,<\uvi+.p 4t item (t) ta taille douce s'en trouve dans le Theatr. Werwings hift. Sigismundi k Caroli IX pag. 17* Eurtp. en i6ji. p. 4>i. & 4>3- avec la Defcrip- Bleckt Anmarkn: p. 37* 4J. 0C 4, LvHtnittf tion. item dans le Rblinifihur Antiwar, p, 51^, Theatrum Comet, p $74. &*' 8 MEMO IRES CONCERNANT Lutzen pres de Leipfa en Saxe. Mr. le Baron Samuel de Pufmdorf (a) & grand Guftave-'A- (a) Comment, de Reb. Suec. libr. IV. J. 63. nes Grotii p. 305-330. Larrey /7(/f. dolpKe. item Jon Iliftoire de Suede Tom, //. p. 297. T. IV. p. 105. Loccenii Hiftor. Suec. Libr. PHI. fin. Ma- te colomne, aiant la face couverte d'un Cafque & tenant une Epe"e nue dans la patte droite. 11 y a quelques annes quc la rapidit du Rbin ai'ant min ret endroit, le me- na^a d'une rui'ne,qui auroit emport6 le Monument meme. Apresquelques4ifputesavec les Catholiques, Seigneurs du pals d'alentour, S. A. S. Mgr. le Lantgrave de Hefle Darmjladt le fit tranfporter un peu plus haut fur le meme terrain. Winckelman rapporte, qu'un Officier de 1'Empereur Ferdinand II. avoit arrachd I'e'pe'e de la pattQ du Lion & la lui avoit apporte"e, dans I'efp^rance d'en fitre largement recompenfe" ; mais qu'au lieu de recompenfe , il auroit 6t pendu fans rinterceffion des Seigneurs les plus di- Les Poetes de ce terns-la ne manquerent pas de .q.e'le'brer ce paiTage de Guftave. Nous mettons ici la piece pleine de force , que fit fur ce fjujet , en forme d'infcription , 1'illuftre Grotius, laquelle jufqu'ici na point t6 rendue publique, du moins que Ton fache. Oo 1'a copied fur 1'original meme, (2) qui s'eft trouv^ darw la^ibliotheque du grand Chaij. lier Oxenjlierna. Monumentwn. Immortali. Memoria. MAGNL GUST API. JDQLPHL Suecorum. Regis. Qui. veterem. Gotborutn. P'andalorumque. Gloriam, Reftituit. auxitqbe. Hoc. in. loco, pojitum. Ubi. locum, fpecuiatus. ipfe. Mox. duabus. cum.fcapbit. Infpettante. boftis. Exercitu. Rbsnum. amnem. transgrejju?. nil. Decembris.die. anni. CL31DCXXXI. Ripam. nequicquam. defenfam. Tenuit. Immenfo. 6?. apud. Pofteritatem. Fidem. vix. reperturo. Fortitudinis. exemplo. DISCE. MILES. M1L1TARE. Sarmatia domitor geminee Guflavus ad Alpes Codano vincens venit ab ufque finu. l^ijlula quern dominum , dominum cognoverat Albis Tranftulit beic ilium fubjuge Rbenus aqua. Voici encore une piece, qui, quoiqu'un peu trop affec^e, ne laifle pas d'avoir beau- coup de force : Ad Rbenwn fluvium. Rbene Pater fulmitte caput , nee Jit tibi priibro Cederc Suecorum Regi, cui Vijlula cejfit, Van- (0 Wmckflm, Hflifehe Hiftorie Fait, II. cap. (2) Dan$ les PdmsltfldiaKa par Alr. t l've _ Colonel Fakkenbergy qui perga le Roi d'une bale de piftolet , & lui me me aiant ete tue , un autre Wejlphalien nomme Scbneberg paflk fon epee au tra- vers du corps du Roi & lui ota la vie , & une chaine d'or , que Guftavc- Adolphe avoit accoutume de porter fur lui. Furftenberg ajoute , que cette chaine d'or fe trouvoit encore de fon terns au Chateau d'Heri/lall, apparte- nant a cette famille en Wefiphdie (*). Quoiqu'il en foit, il y a toute apparence, qu'il a ete aflaffine par un ou plufieurs parricides , qui etoient autour de lui. Car en examinant la Cami- fole du Bufle qu'il portoit a la bataille & qui fe conferve a 1'Arfenal de Stockholm , on voit par le trou oblique ou eft entre la bale , que celui qui lui a tire ce coup , eft venu derriere fon dos & que pailant le bras par def- fus 1'epaule du Roi , il lui a perce le cote droit de la poitrine fans qu'on s'appercoive que la bale ait traverfe le corps, puifqu'on n'en voit aucune marque de 1'autre cote du Bufle (**}. Soit (a) Dansfes Monumenta Paderborn. pag. 216. & 217. (*) Pufendorf n'ignoroit pas non plus ce qui fe drfoit de Ton terns de ce Falckenberg, rcgarde comme I'AiTaffin de Guftave - Adolpbe , mais il n'a pas pour cela chang^ de ftMitiment. Mr. Mencken a tache d'en difculper le Due de Saxe-Lauenbourg mais par de foibles raifons (i). Pufendorf an contraire en a rapport** de nouvelles preuves dans unc Lettre, done void 1'extrait: (2). ,, Commentarii mei de Rebus Suecicis fuo jure aliquamfibi gratiam expetere poffe vide- ,, bantur apud eos , qui in biftoria jolidam magis f incorruptam rerum veritatem quam ,, inania verborum lenocinia qucerunt , inodo earn veritatem publics innotefcere ipforum nibil interfet. Nam apud reliquos , qui fua fuorumque aft a ftlentio premi maluerunt, nan potuie ,, non ifta odium peperiffe.,.. quod idem circa Saxones meos contigit. Sed & irce rejederunt ,, apud Ducem Lauenburgicum , quas concepiffe dicebatur, quod patruum ipjius Francifcum Albertum cadis in Regem Guftavum Adolphum patratce arguijfe vtfus effein , cum tamen non meam , fed communem Suecia nationis fententiam exprejjerim , quam aliquot ratio?ribus ,, adflruere placuit , ne is Princeps injuria ijiius facinoris infimulatus fuiffe "aider etur. Quin a me duce circuinftantia prateritec funt non parum ad rem facientes , quarum unam exprejfit Paulus Piafecius, (3) quod ab ifto Principe cades Regis primum Wallenftenio nunciata Jit. Altera non nifi paucis in Suecia cognita eft , fed revera maximi mo- ,, menti. Fuerat ifle Francifcus Albertus aliquot ante bellurn annos in Suecia , ubi cum Rex eum ,, aliquando in aitla Matris jux licentius agentem deprebendijjet , effervefcente Jubito motu bile, alapam ifti impegit, quo nomine in duellum defcenfuri fuerant , ni Axelius Oxen- ,, flierna id impediffet. Quamquam autem poft qualiscunque reconciliatio intervenijjet , man- Jit tamen alta mente repojlus jenfus ignominice, qua quanti viris militaribus, id cumprimis faftigii, babeatur , nemini ignotum eft (4). (**) Le Sr. Kuchelbecker (s)parle d'un autre Bufle oa Coletin, qu'on fait voir dans le (1) Dans fa Differtation de dubio Guftavi A- (3) In Chronico aci ann. itfjz. pag. 43. dolphi mortis genere pag. 122-125. item Glaffei (4) Majelino Bifac eioni rapporte la meme His- de gladio Guft. Ad. pag. 13. toire clans fes Memorie Htflnrkhe Part, II. pag. (2) Cette Lettie eft ecnte le 29. Juillet rfisj. i. &c. au Sr. Pregitzer Confciller de Wurtenberg & fe (5) Dans fa Defcription de la Ville de Vier.v.s trouve dans la Scbvetdi/ibe Bibl'iathcc, par Mr. p^g-isfio. V. la Di/T de Glafti de Gladio Ga- ic tiatitobdt, Y. Partie paj. 9 o. ftavi Adelphi. p. 24. &c. CHRISTINE REINE DE SUEDE. n Soit que ces Aflaffins fuflent fubornes par quelque Cour ennemie on jalou- L ' an - fe de la gloire de ce grand Roi , foit que cc fut par les Emiffaires du Car- I632 ' dinal de Richelieu (d),commeront debite quelques Speculatifs (*) , toutefois il eft hors de doute , que Guftave-rfdolphe fut trouve more fur le champ de Ba- taille (a) r. I'Hifl. 4necd. du Card. Richelieu fcfc. Moreri DiS. Hifl. art. Guft. Adol- & du P. Jofeph Capuctn T. II. p. 97. fc. phe. Larrey Hifl. d'dtigl. T. 17. pag. io<5. La France d'apres Nature p. 114. f 115. 107. Hifl. du Marecbal de Gaflion T. I. p. no. le Cabinet de metes de 1'Empereur, que Guft&'oe-Adolphe avoit porte" lorfqu'il fut tu pres de Lutzen. Mais on aura de la peine a le croire, a moins qu'on ne veuille imiter ici la multiplication des reliques des Saints, & dire, que le Roi avoit ordinairement ou alors par hazard , deux Bufles 1'un fur 1'autre : car fon corps n'e" tant pas tombe" en- tre les mains des Impe'riaux , qui furent contraints d'abandonner le champ de bataille aux Vainqueurs, il n'eft pas a preTumer, que les Sutdois aient laiffe 1 ou livfe" aux enne- mislesde"pouillesde leurRoi. Ilenferaapparemmentde meme defonEpe"e,qui s'eft trou- ve"e dans le Cabinet de Mr. le Profeffeur Rinck a Altorf, & appartient a preTent a fon gendre, Mr. le Profeffeur Gloffei. (*) Voici ce qu'en e*crivit Jean Adler Salvius, Miniftre de Suede a Hambourg a Mr. Grubb Secretaire de la Chancellerie le 10. De*c. 1632. (i). ,, Fatalis fuit Menfis November Magnis multisquc Capitibus, Rsgifummo Reguin, Re- gi Bohemias, Vice Regi Daniae, Regi Regis Galiiac, Duci Schombergio, Dud Momo- ,, rancio fc. Vides , dolos , aftus , fraudes , tecbnar Jefuitarum! O'jftupefcite Cecil! U/IUIK minim Tibi dicam, quod commode velim loco debito injinues. Dicitur quidam Princeps.... ,, confcio nonfolum Eleftore Saxonies , verum etiam Cxfare ^f quibusdam aliis magnis inter- ,, feciffe Sm. R. Mm. piaculum ne quidem gebenna piandum! fecundo , vsrba bic Hamburgi publice nuper diStafunt, eadem con/ilia agitari adverjus incoinparabilem Heroem Regni Cancellarium Axelium Oxenftiernam; folutam Diaboli licentiam! Eo aus dem wegge- raumet omnia fua fponte ruitwa perfuafijfimwn babent. Canjule itaque , mom , Juads , i roga t ut tarn in cibo & potu, quam vifitatione & omni conversations fecure ac tuto agat. ,, Diaboltts omnibus fur Us f Erynnibus compedes folvifle videtur , ut Bejlia adbuc Evan- gelio infultet: fed ufque quo Domine I Un autre Auteur contemporain (2) s'exprime la-defTus en ces termes; Fama tune tern- ., poris fufurrabat , Regem Guftavum Adolphum in difta pugna a quoclam perduelle Jicario , a tergo incautum globo tormentario perfide trajeftum fuijje : qui feeler -e nefario perpetrato , ' ,. obequitans vociferabatur : Regem Sue cice occidijfe , vel quo criminis fufpiciomm afe ama- liretur , vel quo injefto terrors noftros in fugam ageret. On avoue , que tout ceci ne determine pas encore aflez le cas , & qu'il femble , com- me le dit Mr. Larrey cite" ci-deffus, que la fortune n'avoit pas voulu, qu'une indigne main fe put glorifier d'avoir coup^ le fil d'une vie fi illuflre dans la fleur de fes anuses & au milieu de fes triomphes. Mais peut etre en feroit-on mieux e"clairci, fi feu Mr. le Confeiller Kuchelbecker , Bibliothecaire a Caffel, avoit public" la relation du vrai genre de mort de ce grand Prince, qu'il avoit promis de donner au public en X. ou XII. feuilles, & ou il vouloit faire voir, par des preuves inconteftables, que ce coup fatal e"toit parti du D. de W... pre"tendant au refte que Pufendorfm 1'avoit pas ignore", quoiqu'it n'eut pas trouve' propos de reveler alors cette affaire avec toutes fes circonftances (gi). Ceci e"daircira & reaifiera en meme terns les Muntz Belu/iig: de M. Koebler (4). (i) V. Palnnkold Epift. viromm illuftr. les Litetaires de Hamliurg le 18, Mars 1735. (a) Annales Sueco-Goth: Mfc. ^uftore Jac: pag. 199. Ruilbeelih Prof: ad ann. iiijz. dans Palm>kotd. (4) fait. IV. ?. 331. & 332. (j) V. Les Hamburg; Btrishtt , ou les Nouvel- B 2 is MEMOIRES CONCERNANT L ' an - taille , qu'il gagna pour ainfi dire apres fa mort,' & qui donna lieu a une * 632 ' _ Devife , dont le corps eft un Elefant , qui pique par un Dragon , tombe mort fur lui & 1'ecrafe par fa maffe , avec ces paroles : Etiam pofl funera Viftor. c. a d. Je triomphe meme apres ma mort (*). Ceft aufli fans exoneration, qu'on peut dire apres Foiture., que le grand Guftave, etoit un Conquerant , en qui la moindre qualite etoit celle deRoi, & qui a'iant toutes les vertus SAkxandre , n'avoit aucun de fes vices. Le Sonnet, qui fut fait en ce terns- la a Paris fur ce Heros , exprime en quelque facon 1'idee qu'on avoit generalement de lui (a). Plus vite que 1'eclair , plus craint que le tonnerre , Et portant avec moi la terreur & la mort , J'ai pafle comme un Mars des rivages du Nort(**) Partout ou m'appelloit la Juftice & la guerre. UAlkmagne m'a vfi brifer comme du verre Tout ce qui s'oppofoit a mon puiflant effort, Et mon fecours fatal lui fervit de fupport Lorfqu'il ne fembloit plus qu'elle en eut fur la terre. Le plus jufte aux Confeils , le premier aux hazards J'ai terni par mes faits le luftre des Cefars Et rendu 1'Univers etonne de ma gloire. Quel fiecle vit jamais un fi grand Conque'rant ? Vivant j'ai triomphe, je triomphe en mourant, Et choifis pour tombeau le champ de la viftoire (***). Eu (a) V. Bouhours Penftes ingtnieufes pag. 179. (*) La grande Mf^daille, qui fut faite apres fa mort, exprime le meme fens par ces mots: ETVITA ETMORTE TRIUMPH O. On n'a qu'a confulter Mr. Bren- ner la-deffus , qui dans fon Tbefaurus Nummor. Sueco- Gothic, pag. 153. & 154. donne une explication de'taille'e de toutes ies diiFerentes parties de cette Mddaille. On remarquera & cette occafion, que quoique Mr. Koebler ait produit .dans fon ouvrage cit ci-deffus Part. III. pag. 198. &c. une lilte de cent foixante-fept M^dailles, qui ont ^t6 faites fur les exploits du Grand Guftave , il fe trouve pourtant chez les Amateurs de ces fortes de collections en Suede, encore d autrcs pieces fur ceHe'ros, qui ne font pas contenues dans la note dc Mr. Koebler. (**) On a remarque" que Guflave-Adolple init le pic$ en Allemagne Ie25. Juin 1630. le meme Jour que cent ans auparavant, la Confeffion d'Augsbourg avoit t6 preTente"e a 1'Empereur Charles Qtiint (i). V. 1'Append C***) Nous renvo'ionsa 1'appendice quelques autres belles Epitaphes, qu'on fit de luU num. a. Rome, (0 V. Le Mtc. dis Archires dc SxSde pag. n. 8c Wohlmhaus XII. Lutherfchc Kirchen par. 257, CHRISTINE RE INK DE SUEDE. $3 Eu e'gard a plufieurs aftions de ce Heros & aux paroles qui lui t'toient L ' an> echape'es en plus d'une rencontre , il paroit , qu'il avoit des preflentimens fecrets , qu'il ne vivroit pas long-terns. Auffi avoit-il dit plus d'une Guftavc A- fois , en voiant le grand cas que tout le monde faifoit de lui , que Dieu c^iff*'^' 1'oteroit inopinement de cette vie, puifqu'on avoit trop de confiance en un Mortel , comme lui. " Void comment les Hilloriens rapportent ce fait memorable (*): Au retour de Guftave-Adolphe en Saxe 1'an 1632. peu a- vant la bataille deLutzen, lepeuple pariit tellementrevenu defoneffroi, & fit des acclamations fi extraordinaires a 1'arrivee de ce Conquerant , qui venoit le delivrer une feconde fois de 1'oppreflion des Impe'riaux, ,, que fa Majefte ne put s'empecher de dire au Do6teur Fabricius fon ,, Chapelain. Nos affaires font en bonne (ituation: mais je crains que Dieu ne me puniffe de la folie du peuple. Ne diroit-on pas que ces ,, gens me regardent comme leur Divinite? Celui qui fe nomme le Dieu jaloux pourra bien leur faire fentir &a moi-meme, que je ne fuis qu'un nomme foible & mortel. Grand Dieu ! Tu m'es temoin que tout cela me deplait. Je m'abandonne a ta Providence. J'efpere que tu ne per- mettra point, que la bonne ceuvre commencee pour la delivrance detes veritables Serviteurs , demeure imparfaite (a). " Un autre traic d'e'levation d'efprit & desfentimens de ce grand Roi , eft , fans doute, fa penfee judicieule au fujet des Conquerans, telle qu'un Qf- Adoiphe fur ficier Francois nous 1'a donnee, difant:,, J'ai autrefois oui prouver un les Conqu< ^ paradoxe au Roi de Sutde y qui revenoit aflez a ce que j'ai dit. Quel. qu'un louoit fes grands progres en Alkmagm & fgutenoit en fa prefen- ce, que fa valeur, fes grands deflbins & fes hauts faits d'armes e'toient les (a) V. Pufeudorf /. c. Libr. IV. 5. 65. Viv. p. 244. VaiTor /. c. pag. 360. ? Chapuzeau Europe Rome, a Londres , en Hollands & en Suede. La Ville de Nurenberg, pour tcmoigner fa reconnoiflance envers le Roi qui 1'avoit d^livr^e de 1'oppreflion des Impe'riaux, lui Monument fit conftruire un magnifique Monument avec fa ftatue ^queftre, pour le mettre fur la & statue e- place, ou il avoit termini fa vie. II en eft parl dans les Rgitres du S^nat, (i) com- me d'un ouvrage qui 6toit d^ja achev^, & il 7 eft marque" , qu'on en e"criroit au grand Chancelier Oxenftierna, pour qu'il en parlat brEle&eurde Saxe. On ne fauroit dire ce qui en aura empecbe 1'^x^cution , fi ce n'eft la guerre, que cet Elefteur s'attira de la part des Suedois , par la paix feparee qu'il lit avec TEmpereur, 1'annee apres a Prague & fur laouelle on fit ce Diftique : Praga atrox orbi qua protulit impia bellum, Qiio patto pacem redderet ilia bonam? (*) La mfime choie eft dite dans Bougeant & d'autres (2). & felon Gal: Gualdo , Gufla- ve-Adolpbe avoit dit: La mia bora i J'criUta in Cielo: nonfi pud mutarla in terra: Mon heure eft crite au Ciel: on ne peut la changer fur la terre (3). Qu'on juge done, par tons ces traits de Guftave-ddolpbe , de ce qui eft dit de fes entreprifes en dllemagne, dans les Memoir es de I 'Academic de Berlin en 1746. p. 3- & c - & de Ctftnbague? (4) fi) Falnnkoldcn igj. & i34- fs) v - fon Hift - di Ferdit. III. p. 4H- (2) V. fon Hift. de la Paix de We/lpbal. T. (4) T. i. p. 365- & 366. item Hamburg. Freyr j. p 204. item MajoL Bifacdoni Mem. Hift. p. Urtheilo. Janv. 174*. P a g- ."J- u 1 " GrimmiM in aji. item Monros Exped. and obfeiy. by the Get- Scriptii Societ, Acsd Hafnicniis. main War P, II. p. 168, B 3 ME MOIRES CONCERNANT les otivrages les plus accomplis de la Providence qui furent jamais : que 32< fans lui la Maifon tfAuniche s'acheminoit a la Monarchic Univerfelle, & a la definition de la Religion des Proteftans: qu'i! paroiifoit bien par les miracles de fa vie, queDieu 1'avoit fait naitre pour le falut des hom- ,, mes, & que cette grandeur demefuree de fon courage etoit un prefent de fa toute-puuTance & un effet vifible de fa bonte divine. Dites plu- tot, repartit le Roi, que c'eft une marque de fa colere. Si la guerre que je fais, eft un remede, il eft plus in fuppor table que vos maux. Dieu ne s'eloigne jamais de la mediocrke pour paffer aux chofes extre- mes, fans chatier quelqu'un. C'eft un coup d'amour envers lespeuples, quand il ne donne aux Rois que des ames ordinaires. Celui qui n'a point d'elevation exceflive, ne con^oit que des defleins a fa portee. La gloire & 1'ambition le lailfe en repos. S'il s'applique a fes affaires , ,, fes Etats en deviennent plus heureux, &s'il fe decharge de fes foinsfur ,, quelqu'un de fes fujets , a qui il fait part de fon autorite, le pis qu'il ,, en pent arriver, eft, qu'il fait fa fortune auxdepens de fon peuple, qu'ii ; impofe quelques fubfides pour en tirer de 1'argent , & pour avancer fes amis, & qu'il fait gronder fes egaux, qui ont peine a fouffrir fon pou- voir. Mais ces maux font bien legers , il ne peuvent etre en aucune confideration , fl on les compare a ceuxque produifent les humeurs d'un grand Roi. Cette paflion extreme qu'il a pour la gloire lui faifant per- ,, dre tout repos, 1'oblige neceflairement a 1'oter a fes fujets. II tient 3 , pour ennemi ceux qui neveuleut point e~tre fesvafTatix. C'eft un torrent ,, qui defole les lieux par ou il pafle, & portant fes armes auffi loin que fes efperances, il remplit le monde de terreur, de mifere & de confu- fion. " (a). Ces idees font fans doute dignes du Grand Guflave &. com- battent folidement 1'etrange prevention que la plupart des Hommes ont fur les Conquerans (li). Lerortrait Nous ne finirions pas fi nous voulions rapporter les eloges & les portraits magnifiques & etendus, que nombre d'Ecrivains ont faits des hautes qua- lites de Guftave-Adolphe. Mais nous fommes d'autant plus tentes d'inferer v. rAppend. ^ ans 1'appendice le parallele qui a ete fait de lui & d' Epaminondas par Mr. de num. III. _ 1 /^^x , , 11 / o vi - Rusdorjf (*) quon ne le trouvera nulle autrepart imprime , &qiul conticnt en meme- terns 1'abrege de fes grands exploits en Alkmagne. Le beau cara&ere que ce Rusdorfi donne de ce Heros nous eft laifle en (a) F. Cailleres Fortune des Gens de qua- Tom. i. f . 95. ? la preface a Vabre^ de lUfl. lite 1 Part. II. chap. X. p. 199. andenne de Rollin par Tailhie f. I. pag. (b) Mr. Bayle Penjtes fur les Cometes 42. fc. (*) 11 1'^crivit imm^diatement apres la mort du Roi en forme dc lettre date'e de / Ilaye le / T Janv. 1633. Ce Mr. de Rusdorjf gentilhotmne Allemand, t^toit Confeiller de la Cour El'iftorale Palatine & un des plus zclc-s Partifans de la caufe de 1'Elefteur Fre- deric V. Roi de Bobeme. II pnroit par une de fes lettres ecrite an Chancelier Oxenfiierna, le 3. Janv. 1632. qu'il tiroit une penfion fixe de jla Gourde Sutde. Mr. ^. von Loon qui a public" les Con/ilia fcf Negotia publica de ce meme Rusdorff, die dans la preface , qu'il CHRISTINE R E I N E DE SUEDE. 15 en racourgi par un Hiftorien Italien en ces termes:,, Guftaue, dic-il, fera L'a toujours compte au nornbre des plus grands Rois. Tout etoit vafte & _ I<5 3 2 grand en lui & digne de la Couronne; fes deileins vaftes, pofledant cou- tes les vertus Militaires & Civiles, un genie invincible aux paflions : uniquement avide de la gloire , qu'il cherchoit non feulement par les ar- mes, mais qu'il s'etoit auili acquife par 1'etude de la fagelTe & par fa probite. La Fortune , quoique trompeufe & chancellante ne 1'abandon- na prefque jamais, dans plufieurs guerres difficiles, qu'il cut a foutenir, & dans la derniere defquelles il fit trembler toute \Allcmagne. II demeu- ra vainqueur fur le champ de bataille, ou il finit fa vie a la fleur de foil age , favoir a trente-huit ans (a) (*). Per- (a) V. Gratiani Hift. Veneta Lib. VI.$. 364. qu'il a chercht* en vain d'autres de fes lettres & e'crits pour les mettre au jour, (i) Mr. lion Loon a fans dome ignore* qu'il y a quatre gros volumes in folio dans laBibliotheque de Caffel tous remplis de lettres & d'autres pieces interelTantes de ce Rusdorff, relatives aux affaires politiijues de ce tems-la, tant en Latin qu'en Francois. Un de ces Volumes renferme cinq-cent lettres fort e"tendues , e"crites par lui au dit Chancelier fous le titre de Republic A , in quibus diverforum Region , Principum & Rerumpiiblicarum Status , Confilia arcana fc. libera ingenuitate notantur & reprafentantur". Ce litre feul fera juger de 1'importance de ces Manufcrits. Us font venus a Caffel en 1679 avec grand noinbre d'autres, ineme d'imprim^s, de la Bibliotheque de Heidelberg legu^s par le fils de la Princefle Charlotte de Heffe , Epoufe de 1'Eledteur Palatin Charles. * Nani dans fon Hiftoire de Pienife , dit a fon fujet: ,, ftando le virtu di Goftavo con- ,, Jolidate ed unite , non fe fapeva difcernere, fe alia militare peritia b alia civile dovejfe la palma " (2). Voyez auffi Burgi Commentar. de Bello Suecico p. 64. item Pufendorf (3). Thuldeni Hift. Europ. (4) Did. Saavedra &f le P. Maimbourg bift. du Lutheran. (5). item Oratio paneg. de vita ? oiz'twGuftaviMagni recitata a Guftavo, Guflavi Magni filio 6f a Dan. Heinfio (6); o^utre grand nombre d'autres Ecrivains citt^s dans Stiernmar, (7). itemLarrey Hift. d'Angl. Tom. IV. p. 94. 99. 105. f du Mont Mem. de la Paix de Ryfvxk. Tom. I. p. 28. &c. Fittorio Siri affure que le Pape Urbain VIII. apprenant la mort de Guftave avoit ,, dit, que c'&oit le He"ros le plus accompli & le Roi le plus doue" de grandes qualities. ,, Surquoi tin des Cardinaux ai'ant r^pondu , que 1'Eglife Catholique avoit pourtant<^t6 perft^cut^e par lui en Allemagne, & qu'on n'ignoroit pas que Rome avoit & prife & faccage par les Goths, il y avoit mille ans? II eft vrai , lui repliqua le Pape : ,, mais 51 n'y a guere plus de cent ans paffe's que les Efpagnols ont traite" Rome plus en barbares que les Goths memes ne 1'avoient fait (8). Thorn. Fuller rapporte le portrait qu'un autre favant Anglois a fait de ce grand Prince difant qu'il In templo phis quam Sacerdos: ,, In Republicd plus quam Rex: In fententia dicenda plus quam Senator: In Juiicio plus quam Juris Confultus : ( i) Le Volume de Me. von Loen eft imptime (j) Symb. . p. jc. ?c Malmb. p. atf. a Frantfort fur le Mcin lyzy. in fol: (6$ V. fon Recueil des Oraifons tun. mtituU (z) Lib. IX. p. 490. Gu/tavus Magnus. fi) L. c. 6. 6*. (7) BiWi. Sueco-Goth. p. ij;. &c. (+/ Lib. III. p. IJ7. See. l; V. Kotbltn Miwu Bel. P. III. p. Is;. 16* M E M O I R E S C O N C E II N A N T I/an. 1632. Lettre re- imrquable de Gullave- S> Adolphe au grand -Chan- celier Oxen- Jllerna, Pcrfonne n'en fut plus fenfiblement touche que le grand Chancelier Oxen- jliema, qui fentoit plus qu'aucun autre la perte irreparable que les Proteilans en general & la Sidde en particulier venoient de faire par la mort inopinee de ce Grand Roi. Pour faire voir combien grande etoit la confiance que GitJIave avoiteuci dans la perfonne de ce Chancelier , fon premier Miniftre (*) , comme auf- fi les fentimens de piete , dont ce grand Prince etoit anime , le Lecleur ne trouvera pas mauvais qu'on joigne ici la traduclion d'une lettre qu'il lui ecrivit en Suedois , deux ans avant fa mort & qui n'a pas encore paru en Franpois , qu'on fache : Bien aime Chancelier , &c. Grace & faveur fpeciale ! J'ai recu vos a- vis fur les operations de la guerre pour Tanne'e prochaine, qui m'ont e- te autant de marques de votre fidelite envers moi & la Patrie. Celui qui vivra , verra le fucces des affaires & la pofterite chantera vos louanges , fi a vos avis falutaires vous joigne'z votre diligence & votre zele ordi- ,, naires a mettre les chofes en execution. II feroit a fouhaiter qu'il s'en trouvat plufieurs qui entendiffent & maniaffent les affaires avec la me- me dexterite, le meme efprit& lameme fidelite que vous le faites. Sans doute le fervice du Roi'aume & le falut commun de nous tous fe trou- veroient alors mieux affermis. Mais comme le Tout-puiffant difbribue fes dons d'une maniere fort diffe'rente, & que les homines a caufe du peche , font fujets a plufieurs fautes ; j'en remarque de fi grandes en quelques uns de nos Officiers , dans le maniment des affaires publiques , que j'ai fouvent lieude douter de leur bonne iffue, a moins que Dieune nous affifte merveilleufement dans le befoin , ou Ton ne voit aucurie ai- de humaine. Continuez done a bien faire, & ne vous laffez point de travailler a mon fervice & a celui du Roi'aume , furtout en perfeftion- nant votre projet an fujet du commerce de ble (**) : car je me repofe plu- 55 35 In Exercitu plus quam Imperator : In Ade plus quam Miles: In Adverfis perferendis injuriisque condonandis plus qitam Vir : ,, In publica Libertate tuenda plus quam Civis : ,, In amicitia colenda plus quam amicus : . ,, In Convittu plus quam Familiaris : In Venatione ferijque domamlis plus quam Leo : In tola reliqua vita plus quam Pbilofopbus (i). (*) Entre un grand nombre d'autres lettres familieres il y en a une, favoir celle dc 1'annt^c fuivunte, ou le Roi lui dit: ,, que s'il ne connoifToit pas a fond fa grande capa- cit(5 & fon habilete", il aimeroit mieux refigner le fceptre & la Couronne, que de continuer a adminiftrer les affaires (2). (**) II eft parlt^ dans le Mfc. cit^ ci-deffus & dans Wicquefort (3) d'un Hollandois nom- (T) V. Dr. Haekialls Apology for Divine Pro- (3) Mfc. fat les Archives de Sue'de en Allemaml vidcncc Lib. IV. cap. XI. pag. 545. pag. 9. & IVicquef. Ambaflad. Liv. I. Seft. V. (2) V. Les Extraits AtPalmskild des Rcgitrcs pag. 52. & 60. item Sect. XXVIII. p. 4:1. tin Scuat dc Tan ifiji. pag. zji. CHRISTINE RE INED.E SUEDE. 17 ,, plticot fur vos avis , que fur ceux d'aucun autre. J'avois abandonne 1'i- I i' an dee de tirer quelques fecours de ce blc , non que je n'eufTe compris les . avantages, qui en pourroient provenir , mais parce que je ne connoifTois " perfonne, qui ne voulut manger la farine& m'en lahTerle fon. Orcom- prenant , que vous voulez prendre cette tache fur vous , je m'en rejouis ,, & j'efpere de trouver en vous un grand foutien,pour m'aider a porcer le pefant fardeau, dont je fuis charge. Quele Tout-puiffant nous fajfe paffer 1'hiver heureufement , je me promets , que moiennant votre favoir-faire & vos foins , 1'ete ira mieux ! JeprieDieu, quijufques ici nous a fait profperer, quoique non fans peine, qu'il veuiiie nous accorderla grace, de faire triompher notre jufte ,, caufe, & qu'elle prenneune bonne fin, a lagloiredefon tres-faintnom, ,, au repos de fa fainte Eglife, & a notre falut temporel & eternel ! (*). Je vous detaillerois notre etat, mais ma main , qui eft encore roide des ,, coups recus pres de Dlrfcbau^ ne me le permet pas. Sachez pourtanc, que 1'ennemi eft foible en infanterie , auifi bien qu'en cavalerie. II ne 3 , laifle pas d'avoir de grands avantages dans fes quartiers par deflus nous, car toute \Allemagne lui eft ouverte pour proye. ]e raifemble ici mes troupes pres de la riviere , dans 1'intention de 1'attaquer bien-t6t , & de lui enlever les quartiers. Et quoique la caufe foit bonne & jufte, HUlie de la guerre eft neunmoins incertaine a caufe du pe'che. On ne peut pas non plus compter fur la vie de Thomme: c'eft pourquoi je vousex- horte, & vous prie pour 1'amour de Cbrift, que fi tout ne nous reulfit pas a fouhait, vous ne perdiez pas pour cela courage. Je vous conju- re d'avoir en recommendation mon fouvenir & le bien de ma Famille, ,, & de faire envers moi & les miens ce que vous voudriez que Dieu fit envers vous & les votres , & que je ferois envers vous & les votres en nommd Spiring, annobli apres fous le notn de Silfwerkrans , qui avoit confeille" au Roi Gujiave , d'etablir une Douane a Memel &a Pillau\fai le b!6. C'eft apparemment de ce commerce de hie* dont il eft parlt^ ici. Ce qu'il y a de fur , c'eft qu'en ce tems-la, le Iloi dtoit encore en poffeffion de ces Villes (Sc d'autres en Prujfe , qui ne furent reili- tu^es qu'en 1635. (*) Tous ces traits & d'autres pareilsde la piete* folide de ce grand Prince, paroitront peut-etre un peu e'tranges a ces He"ros & Chefs d' Armies de nos jours, qui dans leurs entreprifes & exploits militaires, ne demandent qu'un Dieu neutre, qui leur laifTe fai- re le refte. Mais voici une autre preuve de la contiance entiere , que ce Roi , vraiement Tres-Cbretien, avoit en Dieu. C'eft qu'au fort de la bataille pres de Leipjic en 1631.. dans le terns que 1'afFaire fembloit etre le ifioins d^cidee , il defcendit de fon cheval , fe mit a genoux ,& detnanda en toute humilit^&a haute voix I'alMance & le fecours du Tout-puiflant. Puis remontant a cheval, il encouragea fes troupes a com'oattre vaillamment pour le faint Evangile, les adurant, que le Dieu des Anne'es les afllfte- roit & d(5truiroit les ennemis de fon Eglife. Jl attaqua la-defTus 1'ennemi avec tant de force, qu'en moins de peu d'heures, il le mit en fuite,& gagna une des plus figna- l^es viftoires dont parle 1'Hiftoire ,, . . . (i) fi) Ce fait fe trouve marque dans la Uffchrei- primee en Allcmand in 4. trois jours apres cette lu*g , ou la Relation de la jouruc'ede Leipjie ira. bataille pag. 4. Tome /. C M E M O I R E S C O N C E 'R N A N T pareilcas, s'il lui plait , que je vous furvive, & que les votres a'ieirt .*6,3o. befoin de moi. Je me confidere, comme a'iant deja depuis vingc an- " nees gouverne notre Patrie, quoique non fans bien des foucis, mais Dieu foit lotie, avec beaucoup de gloire, cheriflknc & honorant la Pa- 3, trie & tons les fideles fujets, & aianc facrifie, pour leur reputation, ma vie, mes biens, & mes commodite's: n'ai'ant cherche dans ce mon- de-ci nul autre trefor , que de remplir les devoirs de 1'e'tat , dans lequel Dieu m'a fait naftre. S'il m'arrive quelqtie chofe d'humain , les miens font dignes de com- paflion , a caufe de moi , & par plufieurs autres confiderations. Ce ne font que des perfonnes du Sexe: la Mere, fans confeil: la Fille, jeune Dame en bas age : Infortunees fi elles gouvernent elles-rnemes , & en peril , fi d'autres les gouvernent. L'affeftion & la tendrefle naturelle , (ft^gd naturalis^) fait fortir ces lignesde ma plume, de laquelle jemefers aupres de vous, vous, dis-je, qui eces un inflrument, que Dieu m'a a- 3, corde, non feulement pour m'aider afoutenir plufieurs grandes affaires, ,, mais aufli pour les bien preparer , contre tout ce qui pent arriver, & en tout ce qui me tient le plus a cceur dans ce monde-ci (*). Neanmoins 3, je le remets tout a fa fainte volonte , comme auffi ma vie & tout, cequ'il m'adonne, comptant fur le mieux dans ce monde & efperant apres cette vie le repos, la joi'e, & le falut eternel. C'eft aufli ceque je vous fouhaite en fon terns & a fon heure 1 Je refte & je reilerai tant que je vivrai Toujours votre gracieux & GoldnAu le bien affeftionne. 4. Ddcembre 1630. Guftave-Adolphe (**). Tel fut le Pere de la Reine Chrlftine. Sa mere fut Marie Eleotitre 9 fille de Jean Sigismond 9 Elefteur de Brandebourg, pour laquelle le Roi fon Epoux avoit beaucoup d'amour (***). II prenoit grand plaiQr , die Mr. Cha- mit (*) Le Roi avoit en Oxenftierna une confiance auffi entiere, que jamais un ami pour- roit 1'avoir en fon meilleur ami. Etant en Pruffe t & voulant un jour hazarder une en- treprife, ou il y avoit beaucoup de rifque, Oxenjlierna, Ten diiTuada, en hii faifantvoir le grand danger, qu'il courroit. Gujlave lui dit: Vous etes toujours trop froid dans toutes vos aiFaires,& vous m'arretez dans ina courfe. II eft vrai, Sire, r^pondit Oxen- Jlierna, je le fuis : mais fi je ne jettois pas quelquefois de I'eau dans votre feu, Vous feriez d^-ja tout brul<^. ,, Turn Rex ad ipfum: Tu vero nimi s frigidus es femper cunttis in ,, negotiis , currentique moram injicis. Ad quod fapienter A:\elius: At ego niji hoc /rigors , caiorem tuum reftinguerem fubinde , ac temperarem , lotus jam olim fl agraffes (i). (**) La r^ponfe pleine de tendrefTe & de foumiflion , que ce Chancelier Oxenjlierna tic a cette kttre du Roi, eft dat5e d'Etbing le 17 Janvier 1631. & fe trouve darre Palwkold (2). ^**^ j^ j u rr er de ce mnriage par h lettrc que le jeune Elecleur, George-GuiUamne , en c " v ^ ^ Laurent Gembickio, Miniftre du Roi de Pologn? , c'^toit bien malgr^ lui, que teur , qae Mufa V fa C " CO V. M.ar.et Crot'tl jwg. J4- (') Vo'iim: Epirtolarutn ilhtftr, Jjoeut. CHRISTINE REINE DE SUEDE; ^ ,j mn , (a) a la voir paree, & vouloit qu'elle eat foin de fa perfonne, parce qu'el- L>SK le etoit belle , & d'une humeur fort douce. Mais comme elle fe dormoit toute I632 $, au perfonnage de femme, & que les affaires ne chargeoient point tanc " 1'efprit de ce Prince , qu'il s'en entretint dans le domeftique ; Ja Reine n'en prenoit point de connoiflance. Apres ]e de'ces du Roi fon Epoux , les Re'gens confervant leur autorite avec jaloufle , ne lui avoient donne aucune part au Gouvernement , done elle etoit par ticulierement offen fee centre le Chancelier Oxenfllmia (*), & pour le combattre, elle fe con- duifit par les avis de perfonnes depeude valeur, & de petite condition: defobligea fes anciens ferviteurs , & fuivit enfin les confeils,qui lui furent fuggeres pour fa retraite hors du Roi'aume, par le Refident de Dane- mark. Cbanut ajoute, qu'elle for tit en un terns, que la Reine fa Fille ,, n'etoit pas en age d'en avoir du deplaifir. Les Grands en etoient bien aifes, & le peuple avoit pen d'affection pour elle, parce qu'on Jui fai- ,, foit entendre , que les prodigalke's de cette Princefle, etoient capables de ruiner le Roiaume, & qu'il etoit dangereux , que fa fille fe format fur fon exemple "(**). Toutefoisil eft tres-certain, qu'elle avoit pour le Roi L fon Epoux , une grande tendrefle , qui dura meme apres fa mort. Elle 1'a fit eclater par ce Diltique , qu'elle fit pour etre mis fur fon tombeau : Sein tugend und ehr 9 und tapfer unfterblicb In leben imd tod mit triumph ob/iqget hat. Ce que le Sr. Ogier a rendu ainfi en latin : Illius virtus & honos In vita ac in monefuum retukre triumph tm De plus, pour le tranfport de fon Corps en Suede, elle voulok que Ton en- (a) V. Mem. de Chanut par Vauciennes (i) Pi Car. Ogerii her Dan. Suec. f PC- T. I. p, 284 &? 285. Ion. p. 219. f 246. Guftave-ddolpbc ^poufoit la Princefle fa foeur. Nous donnerons cette lettre ci-apres (i). (*) Dans les Ne"gociations fecretes, touchant la paix de Munfter & d'OJhabrug (2), V.l'Appcui, comme aufli dans le Recueil de Buder (3) , fe trouve une lettre fur 1'Etat de la Suede en No< 1V - ce terns -la, oil le Chancelier Axtl Oxenftierna eft accufe", entre autres chofes, d'avoir ft .^ prefqu'oblige'e la Reine Douairiere de fe retirer hors de Suede. Cependant on s'aper- accu f" ^ C,oit facilement, que cet ^crit vient de la plume de quelque voifin jaloux de la Suede. f aux . C'eft prefqu'en pareils termes, que Mr. de Holberg parle de cette affaire (4). Mais Palmskold cite d cette occafion, les propres mots de GuJlave-Adolpbe , qui renfcrment un tout autre fens (5). (**) Voici comment Pufendorf s'en explique : Difpiciebantur matrona , qua curam tdu- ,, candx (i) Ttree de la Bibliotheque ftOxtiftierna par (3) V. B:iiers Samlung p. 500-637. PEveque Norman, & communiquce par Mr. Pe- (4) V. Dxnifch. tlifi. T. II. p. gi 1-524. jrtxs fon Neveu Confr. au Parlement de Suede. (;) V. Ses Ftttthkjt Maximtn pag. 434. (-z) T. 1. j. i$o. &c. C 2 20 ME MOIRES CONCERNANT L'an. 1633. . ' envoiat en Alkmagne le Diademe des Rois & du Roiaume, pour etre mis fur Ton cercueil , aim d'augmenter par la , 1'eclat de fa pompe funebre dans les pai's par ou il devoit pafler (a). Quand il arriva a Stockholm , elle fouhaita ardemment que )e Corps fut pofe quelque part dans 1'Eglife , on elle pun fouvent Taller voir, pour 1'amour qu'elle lui portoit (), gardant toujours aupres d'elle, fon Coeur renferme dans Line boete d'or, & fufpendu au lit, qu'elle vifitoit tous les jours en faifant de grandes lamentations. EC quoi- que le Se'nat & le Cleric obtinlTent a la fin , que pour fon propre repos el- le permit, que cette boete fut mife dans le cercueil aupres du Corps (*) . f on amour pour ce grand Roi , ne cefla pas pour cela : car elle inftitua un Ordre,en forme d'unCceurenMedaille,fur laquelle etoitgraveuncercueil, avec ces lettres G. A. R. S. qui vouloient dire: Guftavus Adolpbus Rex Sue- cice, & autour cette infcription: Poft. Mortem, triumpbo. Morte. mea. vicL Muhis. defpeftus. Magnalia. fed. c. a d. Je triomphe apres ma mort. J'ai vaincu par ma mort. Meprife de plufieurs, j'ai pourtant fait des merveil- Jes. Au revers on lifoit ces mots : ,, Mit meinem tod babe icb bezeugt yy Meines Hertzens beflandigkeit : yy Und mm Ihr Helden all hernach 3) Verfolgt denfelnd mit ernftcr racb. c. a d. J'ai montre par ma mort la conftance de mon Coeur. Vous autres He- ros,tous tant que vous etes,vangez-la a toute outrance fur les ennemis.... JDans la relation , dont on s'eft fervi (c) , il eft remarque , que la Reine Douai- (fl) V. la-deffus la lettre rf'Oxenftierna d la Reine-Mre du 12. Fevr. 1633. clans Palm- skold. (b~) V. Palmskold ad arm. 1633. p. 356. f 357. item la lettre d'Oxenftiernaa lam- me du 4. Off. 1633. conf. Rofenflicrna de Or din. Equeflr. Suecice pag. 74. 75. (c) Communiques en Mj'c. par Mr. le Ba- ron Ralainb , Pre/tdent au Confeil des Mines en Suede.F. de mme Rofenftierna /. c. pag. 57. ,, candtz Regime in locum Catherine amitce Chriftinae/tt&zn? poffent. Onibus inter alia id pracipue iiijungebaiur , ut ne ajfe&us fuos uni alicui mancipet , ab ejufqne folius placito dependeat: quod Principibus a Domo Brandenburgica familiare fer compertum erat. Nam ,, inatrem ab educati one filits excluders dudum nece[farium videbatur , querulam f regioni ,, juxta ac Nationi Sitecicce infenj'am, ne pari labe filice animum imbueret : cujus aStiones Reftoribus Suecice multis modis moleftce erant , quia f commcrcia literarum cum boflibus ,, regni nlebat , & iniiitis iftis fujpe&a colloquia cum Danis mijcebat ,ac neminem Suecurn inter Mi,iifteria fua ferre volebat (i). Les cc r - (*) A Touverture des Cercueils de Guftavc-4dolpbe,& de la Reine Marie Eleonore, fon cueils de Epoufe , qui fe fit Je 24. Nov. 1744. en pre" fence de quelques S^nateurs de Suede & d" U ]!,f rC g^~j, d'autres Perfonnes; on y trouva, fur le vtjtement mortuaire, cette boite, de la gran- la Refne Cc ^ eur tl'une carte a joiier, oil le Coeur du Roi etoit renferme 1 . Le vifage de Guftave, ne ouveits. parut d) V. Pufenj,. Comment: de Rebus Saec. iiber den ftaat. C. IX. $. 14. p. 501. & Ludolfs Libr. XI. 5- * conf. idem de R.eb. Brand. L. I. Schaub: ad ann. 1659, p. /zy. 81 730. $. 34. item O^r-r 1. c. p 146, Cundlingi Difc. CHRISTINE RfilNEDE SUEDE. 21 Douairiere diftribtia cet Ordre a fes Parens , & aux premieres Dames de fa I/an< Cour, Nous en donnons I'empreinte ici. I<533> * ^ i BPZEVGT MEIKES HER JBESIWNDIGKEIT rHEHELDEN ACH VERFOLGT FEIND TE Nous aurons occafion dans la fuite de raporter encore d'autres circonftan- ces de cette tendre Reine. En attendant nous remarquerons ici en peu de mots, que la mort de Guftave-Adotybe , caufa des mouvemens bien diffe'rens dans la plusgrande partie de \ Europe 9 felon 1'interet, que chaque Puiflance devoit y prendre (a). Le s Imperiaux fe confolerent aifement , dans 1'efpe'rance que deformais les de Guftave forces des Suedois alloient fe diffiper d'elles-memes , & que tous les Allies venant a fe divifer entre eux, tomberoient les unsapres les autres fousleur domination. D'autre part il y avoit une terrible confirmation parmi les Proteftans, qui s'etoient flates d'affermir, par le mo'ien de Guftave-Adolp'he , & leur Re- ligion & leur Liberte (*). Us ne voipient perfonne,qui fut capable derem- plir fa place. L'ouvrage , auquel n avoit travaille avec tant de force , n'e'- toit point encore acheve. D'ailleurs il furvint bientdt des defiances &des mef- (a) Pufend. de R. S. Libr. IV. J. 65-68. Tom. II. pag. 299. &c. & L. V. 5. 1-6. item fon Htftoire de Sue els parut prefque point changer la couleur & la grofleur des fourcils, des mouftaches & delabarbe ^tant encore bieu confervees , & fort reflemblantes a celles des portraits, qu'on trouve par tout de lui (i) (*) Entre autres leDr. Michel Walther Sur-Intendent d'Oftfrife, exprima alors lesfen- timcns des bons Proteftans , dans cette epigramme. Siccine nos miferos , R E X inclyte , deferis amis Exutus , Patriam , qua juper aflra , petens. Nofter eras Mofes redivi-vus , Jofua, David, Et Macaba'ius Juda , Cyrusqite pius. Vi&or viEtus obis , R E X , Papa terror , f orbit Unica Teutonicifpes, decus atquefalus. Viftus Fitter eris , Mundi dum fecla meabunt : Et fimilem parient tempora nulla tui (2). ri) V. li-defllis la Relation Mfc. du Sr. Wer.- fd Diflert. de gladio Guft. Ad. pag. to. dtliui conf. la-deflus la lettre de Mr. de Kofernz (z) V. Relation Hiftorique des exploits oc de Saxt, du i. Dec, i Cjz. dans Claf- Gujlave- Adolf he , en S*4dw p. zt. C 3 aa M E M O I R E S C N C E R N A N T me (intelligences , tant entre les Princes Proteflans^ qu'entre la Couronne de '^ Su&de & ces memes Princes (*). Quoique la France non feulement eftt une joye fecrete de la mort de ce Prince , mais auffi , que peu s'en faith , qu'elle n'en fit des re- joujffances publiques: (d'une maniere auffi peu decente, que le firenc Jes Efpagnols ouvertement (**),) comme font attefte ceux qui etoient a Paris, (a) lorqu'on y aprit, que le Roi Guftave avoit etc tue (***). Le Cardinal de Richelieu fut pqurtant d'avis , qu'on devoic tacher d'entretenir amide avec hS'jedc , tant pour prevenir les Imperiaux, & les empecher de venir fondre fur la fraitce avec toutes leurs forces , que dans 1'efperance , que la France, a ja fa veur des troubles de 1'Empire, trouveroit moien de s'emparer de tout le pa'is an de la du Rbln, depuis Bale jufqu'a la Mofelle. Par ces confiderations & d'autres pareilles , le Roi de France affura la Regen- ce de Suede de toutes fortes de fecours, & les Anglois & les Hollandois en firent a peu pres autant. Pour la Cour de Danemarck, f;i jaloufie diminua confidcrablement apres la mort de Guftave:& leRoi fe flata furtout, defai- re epoufer Ja jeune Reine Chrifiine , an Prince Ulric fon Fils. Quant (a) V. Pufend. fur les alliance: entre la Rouflet , au fupUment du XVIII. Tomedejon Suede & la France, dans les Recbercbes de Recueil pag. 8. C5 3 Larrey Hift. (*) Nous fommes en ces termes, dit le Chancelier Oxenftierna (i), avec la pliipart ,, des Elefteurs, des Princes, & des Etats de 1'Empire, que quoiqu'ils n'aient rien a 3 , nous reprocher: ils ont ndanmoins la den^contre nous, & font affez d'accord entre eux pour nous hair; en cherchant chacun leur utilite" particulie're , & quoiqu'ils ne ,, puiffent pas fe paffer de notre fecours, ils nous hai'iTent pourtant, parcequ'ils nefont Jjf pas en e*tat de s'aider eux-memes , mais qu'ils fe trouvent neceffite's d'avoir recours a nous : deforte que ce qui devroit leur infpirer de I'amour & du refpecl pour nous , nous attire leur haine & leur jaloufie. (**) Voict ce que Mr. J. Camerarius , Miniftre de Suede , en dcrivit de la Haye , !ei Jan- vier 1633. au Chancelier Oxenftierna (2). Satis, apparet in univerJdEuropzob mortem glorioftj/lmi Regis noflri mutata confilia , Q* animos in diverfum abreptos , prout quisqite aut amat aut odit. Indigna autem eft Hifpa- norum protervia gwiRomae, Bruxellis &f alibi ludicris fpettaculis fummi Regis mani- bus, non aliter, quam Leoni mortuo timidijjimi Lepores injultant, illuferunt. Qiio ipfo de- ,. monflrarunt , quantum Jtbi ab ejus virtute & magnitudine metuerint, cum tarnen alias ,, pro: fe ferant, quod nullos mortales metuant. (***) C'itoit d^ja duvivant du Roi, que la Cour de France 1'avoit craint, le foupgon- mnt , de penfer a la Monarchic univerfelle (3). Pufendorf le dit expretl^ment : (4) ,, Nee Gallici fcriptores abnuunt, ni fata Guftavum Regem abripui(]ent, Gallos , aliosque ipjius focios, in eundem armafuijjc captures." Vittorio Siri, Hiftoriograpbe de France, (5) en eft garant quand il dit. ,, Di quel tempo cbe s'udi la bataglia da Guftavo gnadagnata con- tro i/Tilli al Lech, il Re Liugi XIII di propria bocca diffe a Giovanni Soranzp Anibas- ciadore di Venezia, cb'era tempo boromai cbe la Maejlajua e la Republica penfaffero ad arreftare col communi conjigli e colic forze la troppo veloce carriera ddle vittorie di quel Goto (i) V. h lettre d'Oxcufiierna au Scnatdc Sut- Larrey 1. e. Je t du 2. Fevr. 1634. dans Ptlmskold conf. fes (4) De Reb. SuCC. Libr. IV. $ q ue j es Regens du Roi'aume & les Officiers Militaires eurent foin de conferver entre eux, font un excellent modele, que fe doit propofer une Nation , qui fe trouve en de pareils embarras , apres la moa d'un Prince enleve a fes fujets, lorfque fa vie leur eft la plus neceflaire. Pour preuve du grand fens & de la fagacite du Chancelier Oxenftierna, dans un terns ft critique , on alleguera ici fa reponfe fur un cas de gran- de importance, fur lequel il fut confuke. Le Senat fe trouvant alors embarrafle fur le choix des Perfonnes, a qui on confieroit 1'ad- minifbration des affaires du Roi'aume, demanda an Chancelier, qui etoit alors en Allemagne, fon fentiment la-deiTus , & quelle forme de Regence il efhimoit la 'plus convenable an Bien de 1'Etat dans la prefen- te crife , & durant la Minorite de la Reine? Voici ce qu'il repondit dans fa l ettre ^ u Senat du 12 Fcvricr 1633 () Pendant que le Roi Guftave-Adol- Fonnc du pfo etoit en vie , la Regence fe trouvoit affermie chez nous ; car fon grand Gouverne- J -',. r rj'-'jpr /-i'- mcnt de j> g e n^, Ion application, la dextente & Ion courage luppleoient aux suede alors. ?j defauts , & a la nonchalance de nous autres... . Quant a J'adminiflration de 1'Etat, durant la minorite de la Reine, je penfe que plus elle de'pendra d'un grand nombre de perfonnes , qui feront a la tete des affaires , plus I'exccution en fera retardee, & plutot cela pourra-t-il tourner an defa- \'antage & a la ru'ine du Roi'aume, fur-tout dans un Etat qui eft accoft- 3, tume d'etre regi par un feul. Le bon fens & les exemples nous le dic- tent afTez: toute autre forme etant contraire a la pratique & auxDecrets ,, du Roi'aume, comme aufli aux idees , que les Rois de'funts ont plus d'u- ,, ne fois manifefte'es la-deflus. Le mieux fera done, a mon avis, ou ,, qu'un feul, ou un petit nombre de perfonnes foi'ent conftitue'es Chefs de la Regence. Ce n'eft pas qu'il n'y ait des raifons politiques , pour & con- 5 , tre (a) Hifloirs de Louis XIII. Liv. XXXII. (&) V. Palmskold Epift. Illiiflr, H. A. l>. 472 & 473. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 25 trexres deux fortes d'adminiflrations des affaires :& il fant ayouer, qu'un L ' an * .,, adminiflrateur feul, a autrefois eu lieu en Suede: a quoi on fera meme l633 ' . oblige d'avoir recours , quand quelque neceflite preffante le demandera. . Cependant feue fa Majefte , n'y fut jamais portee , que je fache. Au con- traire elle deftinoit toujours radminiftration de 1'Etat aux cinq Chefs des .,, Hauts Confeils ou Colleges , comme le Senat ne 1'ignore pas : en fuite de cela elle approuva aufli 1 ordonance projettee pour le gouvernement du Roi'aume (*). Cette Regence de cinq perfonnes garantira mieux le Roi'aume centre 1'ambition d'un feul ; puis que Fun d'eux ne fauroit en- treprendre plus que f autre, etant tous outre cela obliges de gerer & de ,., mettre les affaires en execution par 1'autorite du Senat affe'mble en corps , comme auffi par celle des Confeils ou Colleges. De plus fi un ou deux ,j de ces cinq regens venoient a mourir ou amanquer, radminiftration fubfiftera pourtant; & il ne fera pas neceffaire d'en elire tout auffitotun ^, autre a la place, comme cela arrivera a la mort d'un feul Adminiftra- ,, teur, qui, comme cela arrive ordinairement , abattra ce que fon Prede- ceffeur aura bad: au lieu qu'ici toutes les affaires iront Jeur train or- ,, dinaire. Je ne trouve done rien de plus convenable, foit pour lafurete de la Reine, foit pour radminiftration impartial des affaires du Ro'iau- *, me , que la dite Regence de cinq Chefs des Confeils , etablis par 1'autorite des Etats ; & en ce cas il fera neceffaire que la Forme projettee dugou- vernement foit folemnellement approuvee & ratifiee. ' Si on trouvoit qu'un ou plufieurs articles demandaffent une delibera- ,, tion plus meure, on en pourroit renvoi'er la deeifio.n a un autre terns, reglant toujours la Regenee en confequence. J'avife a eela d'autant plus 39 volonders , qu'il vaudra mieux avoir quelque forme de gouvernement , que.de n'en avoir abfolument aucune, (ut fit atiquapotius Refpublica qiiam .,, nulla ,)on pourra difcuter apres les articles & les points conteftes, dtta- ,, cher d'en redrefler les defauts, fans laiffer deperir la force meme du >5 gouvernement, & fans fe trouver oblige de remedier aux affaires ., quand ,,, la defunion mutuelle fera deja trop enracinee , ce qui ne fe feroit que par des moiens dangereux , eomme feroit quelque forte faignee &c. " Voila quel etoit le fentiment du Chanceiier fur la forme du gouverne- ment, qu'il croioit convenir le mieux a la Suede t dans la crife ou fe trou- voit cet Etat apres la mort de Gujlave-^dolphe. On 1'a raporte ici tout au long pour faire voir combien il etoit eloigne de gouter un gouvernemeut defpotique, mais qu'en meme-tems il etoit peu porte pour la forme d'une pure Republique. Chriftme proclamee Reine de Suede etoit alors en has age (*) Le brouillon mSme de cette Forme de Gouvernement de Suede, drefle & de la propre main du Chanceiier Oxenjiierna & approuv^ enfuite des Etats du Ro'iaume a la Di^te de 1'an 1634. eft entre les mains de S. E. Mr. le Comte Cronftcdt Senateur, de Suede, avec plufieurs Aftes relatifs a TEtat public de Suede, dans un gros volume in potto, eonf. Wilde dans fon Hiftoria Pragmatica Sueciae (i). (O Cap. III. Seft. $.IH. 38. p. tftfi. &c. to P**ni. de B.eb, Stiec. Libt, V. $. 27. Tcme L D ' A ' 2(5 ME MOIRES CONCERNANT T/an age. Cette circonftance feule demandoit , que 1'adminiftration du Roi'au* I6 33-^ me f e c a peu pres de la maniere que le Chancelier 1'avoitprojette'e, con- formement aux vue's du feu Roi, comme il le difoit, laquelle ne laiflbitpas- aux cinq Chefs des Confeils un pouvoir fi. grand, que les autres Senateurs en Corps ne le puffent balancer , & que tous en general ne fufTent refpon- fables de leurs actions aux Etats du Roiaume , qui s*affembloient fort fou- vent alors quoique pour peu de terns. On auroit eu de la peine a trou- ver un temperemment mieux modifie ni mieux afford a 1'Etat de la Suede que celui que le Chancelier venoit de propofer. Auffi gagna-'t il 1'appro bation des Etats , & cette forme de Gouvernement a-'t-elle etc prife'e des Nations etrangeres & de tous ceux qui 1'ont examinee a fond. Par ce qui vient d'etre dit, on fera en etat de juger dans la fuite,,fl ceux , qui ont reproche au Chancelier , d'avoir voulu etablir en Suede la forme d'une pure Ariftocratie , ont eu raifon de le faire. Nous en parle- rons encore ci-apres, fuivant le fil de notre narration, Les deliberations du Senat ai'ant befoin d'etre confirmees par les Etats Generaux du Roiau- me , ils furent convoques a StockJjolm , peu de terns apres la mort de Gufltf ve-ddolphe. .cfoiution On ne fera pas fache de lire ici 1'extrait d'une re'folution prife dans une _ P"^ es circonftance fi particuliere & fi remarquable (a) ,, Nous Senateurs & ia mort de^ Etats du Roiaume de Suede, Comces , Barons, Eveques , Nobleffe, Clerge, Officiers de guerre, Bourgeois & Membres des Communautes, Tous convoques a la prefente Aflemblee, favoir faifons par les prefen- tes, en notre nom & de la part de tous les pai's & confins du Roiaume, dont nous avons le plein pouvoir, qu'aiant plu a Dieu de nous affliger par la mort du tres - illuftre & tres - puiffant Prince le Seigneur Guftave- Adolpbe Roi des Suedois , des Goths & des Vandales , Grand Prince de Finlande, Due d'Eftonie &c : Notre tres- clement Roi & Seigneur, de nous priver du Pere de notre chere Patrie y fous le gouvernement duquel nous vivions en repos & en furete : & de nous enlever un Monarque , dont les fages entreprifes & les vi6loires incroiables feront 1'admiration de la pofterite, fans lui avoir donne aucun Enfant male capable (*) de ,, remplir fon trone, apres lui; nous avons trouve bon de nous affembler fuivant les Lettres de Convocation en voices par les louables Senateurs du Roiaume , afin de deliberer entre nous fur ce qui regarde la furete de 1'Etat & de la Couronne du feu Roi de glorieufe memoire , & fur les moiens propres a preferver la Patrie de toutes fortes de malheurs & de dangers. Apr^s de mures deliberations nous avons refolu & confirme ce qui s'enfuit: Con- (a) Cette Piece fe trouve tout au long ad ami. 1633. p. 849-855. dans les A&es publ: en Sutd: de Stiernman (*) II avoit un fils naturel nomm6 Gu/lave Guftaffon, ou fils de Guftavc, dont nous aurons occafion (ie parler dans la fuite. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 2? ^ttHt$^ A ,. \ Conformemcnt a ce qui fut conclu dans I'afTemblee de Nork'dping, L ' a ,, Tan 1604, & a la refplution prife depuis dans cette ville de Stockholm, I<533 ' Tan 1627 , que nous tiendrions pour notre Reine & Princefle Heredi- taire,Dame Chriftme ,Fille du Roi,s'il arrivoit qu'il mourut fans enfans Males, en cpnfideration des bienfaits fignales dont nous fommes redeva- bles aux Rois Guftave I. &f //. Enfin pour fatisfaire a notre promefTe 3 , & obligation pre'cedante , nous reconnoiflbns & declarons d'un confen- tement unanime & fans aucune contrainte, que la tres-illuftre & tres- puiflante Princefle Dame Chriftine> fille du feu Roi Guftave II. furnon> me le Grand (*), eft Reine elue & Princefle heredkaire des Suedois, des Goths & des Vandales &c. promettons & nous obligeons avecceux de notre Corps & avec tous les Etats, Sujets & Habitans du Roiaume, d'etre fideles a fa Majefte & de lui rendre fervice & obeiflance en touc ce qu'elle voudra nous commender. Nous confirmons tous les droits & toutes les prerogatives de la Reine & fommes dans la refoludon d'emploier pour elle & notre chere Patrie, nos corps, nos vies & tout ce qui eft en notre pouvoir. Cependant nous nous refervons & au Roiaume, que lorfque Sa majefte fera parvenue a 1'age de majorite & pourra prendre le gouvernement & 1'adminiftration de TEtat, elle en confirmera tous les droits, libertes & privileges, felon ce qui a etc pra- tique par les Rois fes predecefleurs & particulierement par le feu Roi ,, Git/lave le Grand. . , . La-defllis, la Tutele de Chrift'me fut confiee aux cinq Senateurs, Grands Lamtcied Officiers du Roiaume , favoir au Drotfet , ou Grand Juge & Senechal , qui Chri J iinl - etoit alors le Baron Gabriel Oxenftierna Guftaffon : au Grand - Marechal ou Connetable , le Comte Jacob de la Gardle : au Grand- Admiral le Baron Gylden- hlelm: au Grand-Chancelier le Baron Axel Oxenftierna , & au Grand-Trufo- rief de la Couronne, le Baron Gabriel Oxenftierna : lefquels tous etoient en. meme-tems Chefs des Hauts Confeils ou Colleges de Juftice , de Guerre, de Marine , de la Chancelerie & des Finances. La direction generale des affaires etrangeres & particulierement de eel- La direaic les flAllemagne fut deferee au Chancelier Axel Oxenjlierna , au nom de la J r anSle? Reine & de la Couronne de Suede , avec un plein pouvoir prefque illimite , deferee au de regler tout ce qui concernoit la guerre ou la paix dans V Empire ou dans chanceher les Etats voifins , comme il jugeroit le plus convenable au bien du Roiau- me (*). U (*) On remarque en paflant , que Guftave-ddolpbe eft appell^ ici par les Etats du Roi- aume, Pere de la Patrie & Guftave II. furnomme' le Grand. On pent conferer la-def- fus 1'Ouvrage de Brenner (i). (**) Void en quels termes ce Plein-pouvoir ^toit conqu: (i) Nos Chriftina , Dei gra- tia Suecorum, Gotborum & Vandaiorum Regina fcr. Notum teftatumquefacimus , nos illu- JlriJJlmum (0 C'tjlfen Thefauius Numifm, Sutco - Gttbtr. (z) In talraskoldianis ad bunt ann, f*. 15 Jl. D 2 28 ME MOIRES CONCERNANT L'An ij ac cepta cette haute charge , malgre les grands obftacles qu'il avoit & **' furmoncer , (a) tant a caufe de la grandeur & de la dignite des Eie&eurs & des autres Princes Proteftans , peu difpofes a fe regler fur Fes ordres d'un Gentilhomme e'tranger , qu'a 1'egard de la jaloufie des Generaux > dont plufieurs etoient .originates SAllsmagne. Oxenft'mna aplanit pourtant peu a pen toutes ces difficulte's avec une arf- drefle & une capacite , qui le firent regarder , & avec raifon , comme ie plus habile Miniflre de \' Europe. II infpira an nouveau courage a ceux, que des vftes particuiieres commen9oienc a detacher de la Suede : il rompit les mefures de Brunfookk : il fit comprendre a tous les Allies , qu'ils ne troir- veroient leur veritable interet , leur furete , leur falut , que dans leur union. (*) Par-la il ferra les nceuds qui les tenoient attaches a la Suede * en ltd eon- (a) Pufend. ie K. S. Libr. r. J. 8. &c. item Wicquefort Ambaffadeur Liv. I. Sett. fin bifl. de Sued. T. II. p. 204. Le Vaflbr ///. pag. 35. /. t. p. 479. &c. Bougeant /. c. p. 210. fc. Jlriffimum nobis finsert dileftum ac fidektsi noftrum Regnique noflri Senatorem & Canrella- rium Dnum Axelium Oxenftierna, Lib. Baronem in Kimitba. in Fyb&lm & Tidoen, E.- quitem Auratum , apud omnes Germanics Or dines & Status > necnon vicinos Reges , Princl- pes ac Res publieas , Amicos Q* Inimicos , Jlcuti & quoscunque in Germania conflitutos n- ftros ac Regni Suede exercitus , Legatum cum plena &f abfoluta poteftatt conftituijfe Jicuti etiam vigore harum Eundem in Legatum nojlrum ac Regni Suecice eum plena p abjoluta po- tejlate conjlituimus , ita ut nomine nojlro Regnique Suecias conjilia Belli ac Pads dirigat ac regat. Exercituum omnium nobis Regnoque Suedes additorum Generaiibus ac Ojfidalibus , tit 3* Gubernatoribus , Prcefeftis, Legatis, Commijjariis , Agentibus f quibuscunque Mi- niftriSm cum fumma autoritate prce/it: omnes Expeditiones beliicas ordinet, pafem, indu- cias , ftedera, Jive ipfe, Jive per CommijTarios fuos ineat acjlatuat: deque Us .omnibus, qua nojlrce Regnique Sucda confervationi acjecuriiati commodoque publico conducunt pro djjcrg- tione ac judicio fito agat, decernat ac concludat: qua nos omnia ac Jingulo, amni mettvri inodo, rata grataque fumus babiturce , inque Us ut difto nojlro Regnique Suedes Legato, fi- des ac (refpeftive) obfequium prcefletur , ab omnibus &fingulis bajccvifuris, uti par efl , ro- gamus ac requirimus. Quas in majoremfidem &c. Dat. Holmia 2635. die 3 Januarii. Sign^ des Cinq Tuteurs delaReine. *'envic fluff (*) C'e*toit cette urrion que les Catholiqucs furtout tachoient de rompre. Mais vo- les ennemis 'i ant qu'ils ne pouvoient pas I'efFettuer par des infinuations direftes aupres de quelques fa. la suede uns des Etats Proteftans de FEmpire, ils noircirenc & d^crierent les actions d'Oxen- ?- rtent i- au 7^ zerna <^ ans Fefpe"rance d'en venir ^ la fin bout. Voici, par exemple .comment un dfe leurs Partifans des plus zel^s, (i) apres s'etre emport^ en invectives centre le Roi Gu- *' Jlave , s'explique au fujet du Chnncelier. .. . Sed Guftavus perfonam adbi+c regiam fufti- ,, nebat. De Oxenftiernio Legato Suecico quid dicam ? ille nubilis t r ansmar ini Regni , 5* Juce prtpe" condittonis immemor 5 alienee, anteambulonibus Principibus Germanis uti, ab iisdem fuam ab tttroquo later e ambiri Rhedam: dctefto capite Jibi porrigi lavanti aquam , mantile , dopes : 3* Ele&ores ipfos , fuos velut inter aulicos , numerari fujlinuit arre&a , fronte , ac fupercilio quodam afpernari , cafligare , pleftere , ft quid in Gerinania 3* Ger- , manis adbuc antiqui impetus, "E SUEDE. 29 W ^ ' - * r* . coniervant toujours la principale direction des affaires , & prefqu'autant L ' am d'autorite , qu'elle en avoit eue du vivant du Roi Gujlave de Suede. (*) Mais . Qxenftierna garda en referve par devers lui cette maxime - ci contre tout e- " venemenc que, quelque train que priflent les affaires a la fin , il vaudroic toujours micLix attendre , que les Suedois fulTent obliges de quitter \Allema- gm, par la force fuperieure des Armes , que de Tabandonner fans faire re- iiilance ; que plus on feroic paroitre de vigueur , plus on empecheroit Ten- nerru ne libertatem Suedcam, potuiffent. Qirin imb, ilk media in Germania, tanquam Do- minus dijponere de Germania ,& Germania, aberrantis dfuo Ccefars , projettumftudium, in fe Legatmn , vir ampliJJimaux de 1'Arm^e fe qualifient felon la charge qu'ils out Gneiaux, Mar^chaux, Colonels de la Reine Eteritiere & de la Couronne de &ie^:coinme parexemple: George, par la grace de Dieu, Due de Lu- nebourg & Brunswick, General de la Reine Heritiere & de la Couronne de Suede, dans le Cercle de Wejlpbalie& dela Saxe infe"rieure. Bernbard Due de Saxe, General de la Reine Heritiere & de la Couronne de Suede en Franconie. Knipbaufen Marshal de la Reine Heritiere & de la Couronne de Suede. Ainfi fe qualifient ces Meflieurs. BoneDeus, quo-res eunt! Ton a imput ci-devant a crime &a blame aux Princes & Etats Allemands de s'allier avec un Roi ouun Prince etranger: maintenant ilsfefou- mettent a une Mile , voire a un enfant de fept ans , au nom de laquelle les affaires de tant d'importance & cette guerre de fi longue dur^e eft conduite. Dieu eft admira- ble en fes osuvresT..,. (ij V. .Ba<&r *|Samlung pag. ij. &c Hi/?. Rrandent. Lllr. V. $. 71. 7. 73, Hift, 3 MEMOIRES CONCERNANT L'an nem i d'approcher des frontieres de la Suede } jufqu'a ce qu'on eftt occafion d'obtenir une paix honorable. (*) En continuant d'exe'cuter les arrangemens pris pour les affaires de de- jeunc j^g ? j a Regence de Suede n'oublia pas celles du dedans du Roi'aume , ni rien de ce qui etoit propre a donner a la jeune Reine une education con- venable a fa naiflance. Sa Nourrice s'appelloit Anns von der Linden, Mere du Baron de ce nom, qui devint enfuite Felt-Marechal & Senateur de Suede. Chriftine ne fut pas commife a la direction de la Reine-Mere par la rai- fon marquee ci-deflus , mais a celle de fa Tante , la Princefle Catherine, Sceur uterine du Roi Guftave & Epoufe du Prince Palatin Jean Cafanir ,Pe- re du Roi Charles Guftave. Cette Princefle eut foin de 1'education de fa Niece jufqu'a 1'an 1639 , qui fut celui de fa mort. Apres elle , d'autres Dames de haute qualite & de fentimens grands & eleve's en furent char- gees , & a ce que difent les Auteurs , (a) on leur enjoignit d'infpirer de bonne heure a la jeune Reine, de ne fe pas trop fier a une feule perfonne, & de ne lui donner pas toute fa confiance. Prefqu'auflitot que 1'entende- ment & le jugernent commencerent a fe developer , on remarqua deja en elle un efprit tres-vif, une conception extraordinaire , des paflions mode- re'es , & un grand enjouement : tout cela joint a une taille libre & degagee. Elle n'etoit pas encore fortie de 1'enfance , qu'elle favoit les premiers rudi- mens de la langue latine : & comme on s'apper^ut , qu'elle pouvoit faire des progres dans les etudes , on ne negligea rien de ce qui pouvoit cultiver une difpofition (i heureufe a de plus hautes fiences , & en meme-tems on lui fit encore apprendre plufleurs Langues etrangeres. Precepteur Le Roi fon Pere avoit deja 1'an 1630. nomme pour etre Precepteur de de la Reine. fa FHle qui n'avoit que quatre ans , fon Aumonier Jean Matthitf , Dofteur en Theologie , auparavant Redleur & ProfeiTeur du College illuftre etabli alors a Stockholm. II entra en charge des 1'an 1633. e'tant en meme-tems Grand- Eiiefaitde Aumonier de la Cour , & il reuflit.fi bien aupres de fon Eleve , () qu'a grands pro- y^gQ de dix huit ans , Elle lifoit Thucydidc & Polybe dans leurs propres lan- leUes * i!et e . s gues , & etoit en e'tat d'en raifonner , aufli bien que de porter fon juge- trcs. ment du coritenu des autres Auteurs , tant Latins que Grecs. Progres merveilleux , dont aufli tout le monde fut furpris ! On aura dans la fuite occafion de parler de ce Precepteur de la Reine & du fort qu'il eut a la fin. On (a) Pufend. I. c. libr. IX. $. 2. Ogier /. 796 ? 79? Cur. Bucher u. ft. Cab. LI. Eing. c.pag. 246. Leben.rfer Konigin Cbriftince . I. p. 47 f 56. Meiern Atta Pac. T. K p. 12. Gal Gualdo I.e. p. 6. prafat. Staats Gefch. von Riga p. i<5. fc. (i) Bazii Invent, bifi. Ecclef. cap. l.pag. Leben ChriftinK pag. 14. (*) Toutesces confiderations du grand Chancelier fe trouvent dfiduites plus an long 'dans la lettre tiAdler Salvius a It R^gence de Suede: dat^e de Hambourg le 13 F^vricr 1633- (0- (i) Dans les Rttutllt d PtlmtftiU, & Pufend. dc R'.b Sute. L, VIL $. tt. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 31 On ajoute feulement ici , qu'etant iflii d'une ancienne famille appellee Up-. L>an lanningar, il fut la tige de celle d'OHwcquift , done il n'y a plus de male. 11 J^_ devint Eveque du Diocefe de Strengnas dans la Province de Sudermanle, ou " il mourut Tan 1670. Guftave-Adolphe lui avoit, entre autres chofes, forte- ment recommande de faire lire avec attention a Chrlft'me un livre en vieux Suedois intitule Injlltntlon des Rois &f des Regens , (a) qui eft rempli des plus belles & des plus faines maximes du gouvernement (*). Et afin que ce Pre-. cepteur ne fut pas le Maitre de regler feul a fa fantaifie Jes etudes de fon Eleve, non feulement les Etats du Roiaume en recommanderent exprefle-. ment ia dire&ion aux foins de fes Tuteurs & a la Regence du Roiaume,, mais encore ils firent dreifer a la Diete , Tan 1635. , une Inftruftion ge- nerale fur la maniere dont Chrlftine feroit elevee ; comme la piece ci-join- te, traduite du Suedois en fait foi. (Z>) Avis & fentiment des Etats de Suede fur la maniere dont Sa Majefte , d Eufsdu la jeune Reine Chriftim doit etre elevee ; donne a Stockholm le 24 Roiaume de Mars 1635. ffittSL Lan 1635 le 24 Mars, quand nous foufignes etions de la part des Etats de ! a convoques ici a Stockholm , pour deliberer fur quelques affaires de la der- Reiae ' niere importance pour le Roiaume , il y a aufli eu une amiable confe'-. rence entre la Regence etablie & nous , fur la maniere dont Sa Majef- ,, te , notre tres-clemente jeune Reine pourroit etre le mieux elevee & inflruite ? Et bien que cette affaire eut ete commife par tous les Etats , a la derniere Diete , au foin particulier de la dite haute Regence , afin que comme Tutrice de Sa Majefte , elle eut cette education en fingulie- re recommandation , & quoiqu'il n'y eut nul lieu de douter , que ces Seigneurs n'y tinflent la main , fans qu'on eut befoin de leur en rafrai- chir ulterieurement la memoire ; Neanmoins , comme il eft d'une trop grande importance , tant pour la Perfonne Roiale de Sa Majefte , que pour tout le Roiaume en general & pour chaque Sujet en particulier , qu'on en faffe fouvent mention ; Nous n'avons pas trouve fuperflu , mais au contraire conforme a notre devoir , d'y ajouter encore ces tres-hum- bles & tres-fideles remontrances , que nous trouvons dignes de toute ,, 1'attention requife. 3 , j. Sa Majefte conftituant la Perfonne , qui un jour gouvernera par elle- (a) Mfc. de Mr. dt Stiernman Confeiller (fc) Tirle des ASes publics $ubliis par le de la Cbancelerie & Stcrttaire des Archives mSms T. II. p. 926. &c. de Suede. ^^(^^^^^ l ^i<*^^ 1 ^^'S^S^^5<^t<^S^'^^ > ^?^S > ^^'^^^^! N ^^'@? > ^^^^^^!Si<^^^J < ^J w ^ J!^i&v!&v-S^>-S&vi^> : :^z&*S^>S&S&^ (*) Ce livre ^ t traduit en latin par Jean Scbeffer fous le titre: Inflitutio Regia cum notis Scbtfferi IrnprimtJ ^Stockholm 1669. in folio. Voiez la lettrc de Nic. Heinfius a Gronovius (i). Mollerus dit (2),, Autor bujusfcripti prxcipuis Padagogia Regice M& rails Scriptoribus accenfetur a Morhoffio. " (3). (i) Dans Burmanni Syil. Epift. illujlr. T. III. (3) Daas fon Ptlybijltr. Lib; II,e*p. XII. p. f*z. to. 46. (i) DanS fes Hyftmn. *i. SUM. lit. pag. 351. 5* ME MOIRES CONCERNANT ,, elle-meme le Roiaume , & le devoir de fes Sujets requerant d'eux , non ,, feulement qu'ils lui pretent toute obe'ifTance , mais auffi qu'ils lui main- tiennent fon pouvoir & fon autork-e Roiale : & le bien & le falut des deux Parties & de toute la Patrie confiftant dans 1'obfervation de ces de- n voirs re'ciproques. II eft tres-neceflaire , que comme fes dits Sujets font 11 obliges de tdmoigner a Sa Majefte un entier & tres-humble devourment , , & fidelite , en facrifiant meme pour Elle leurs vies & leurs biens , qu'en dchange Elle ait pour eux toute forte de bienveillance & d'afle&ion , qu'Elle s'accoutume a les aimer & eftimer, chacun felon fa condition & 99 fa qualite: a parler bien de Fetat prefent de la Patrie & de la Regence: ,, a refpedter duemen-t fes Tuteurs & le Senat du Roiaume : a fe compor- >, ter gracieufement envers tous les Sujets & a foutenir un chacun dans la pofTeffion de fes libertes conformement aux loix ; 2 En outre, que Sa Majefte voi'e & apprenne les manieres & ks coutumes etratigeres, autant que befoin fera pour fa haute condition : Mais qu'Elle retienne & obferve particulierement & fur tout les manie- ,, les & les coutumes Suedoifes & qu'Elle y foit dreffee foigneufement. EC 5, afin que Sa Majefte foit d'autant mieux afFermie dans ces moeurs & ma- nieres eonvenables a elle & .au Roiaume; tant pour 1'efprit que pour ,, le corps: (animicwporifquc moribus:) Nous trouvons en premier lieu neces- faire , qu'on donne a Sa Majefte tels Gouverneurs & Precepteurs , com- me auffi telles Gouvernantes , qui non feulement comprennent & fachent ,, eux-memes, comment une Reine doit etre forme'e; tant pour Tame que ,, pour le Corps, mais auffi qui ai'ent a coeur de mettre tout cela en e'xecu- M tion de leur propre mouvement, de bonne volonte & avec zele, & qui foient aflez inftruits eux-memes dans 1'ufage du monde, pour le pou- ,, voir faire avec le refpeft & les egards eonvenables: & enfin que cc's ,, Perfonnes fe trouvent toujours prefentes & autour de Sa Majefte, non ,, feulement quand elle fait fes etudes, rnais auffi quand elle eft a table & , j dans d'autres aflemblees , afin que fi fon y entend quelques difcours & entretiens peu honnetes ou qu'on y voi'e des geftes, mines & actions inde'centes , qui pourroient donner occafion a des idees & a des fenti- mens dangereux ou a de mauvaifes moeurs; les dits Pre'pofes les diffipent & les refutent tout auffitot avec raifon & douceur. Ep fecond lieu , qu'on donne a Sa Majefte quelques Demoifelles de fon age , qui en me- me-tems ai'ent etc .elevees par leurs Parens dans de bons fentimens & des moeurs irreprehenfibles , afin que Sa Majefte puifTe quelque fois fe ,, recreer avec elles , & par une pareille converfa'tion s'afFermir d'au- tant plus facilement dans la bonne Morale. Par ces memes raifonj il n'eft pas^ moins neceflaire , qiie leg Perfonnes qui feront les femmes de chambre & les fuivantes de fa Majefte, foient elles-memes ve'ritable- ,, ment pieufes & bien elevees, afin que par leurs difcours, geftes & ac- tions elle ne lui fournijQent que des idees qui tendent a la Piete, a la Vertu & a 1'honneur. ,, 3 Pour ce qui concerne les Etudes de Sa Majefte celles qui rcgardent )9 1'arc de gouverner les Ecats & les Ro'j'aumes en Spuverain Chretien , en doi- CHRISTINE REINE DE SUEDE. ^ ;, doivent bien faire le principal obje't. Mais comme cette forte de fien- L ' ar * ce s'apprend plfttot avec 1'age & par 1'experience, que par les etudes de l635 ' ^, la jeuneffe, & que la veritable connoiflance de Dieu & de fon culte eft " le vrai fondement de tout le rede; le plus falutaire fera, que Sa Majefte fafTe, prefe'rablement a toute autre chofe, fa premiere etude de la paro- le de Dieu, des articles de la Foi & de toutes les Vertus chretiennes, & que tout cela foit puife dans tels ecrits de bonne morale, qui feront juges propre pour cela : car ce fondement e'tant une fois bien jette & af< termi, le batiment qu'on y elevera , fera d'autant plutot acheve , & de? M viendra plus ferme & de plus de duree. ,, EC comme FHiftoire eft un des principaux points qui conviennent ^ a un Souverain; il faut que Sa Majefte emploi'e auffi bien du terns a j, 1'e'tude des hiftoires de la Bible, lefquelles outre cela font le fondemenc de toutes les autres. ConjointementSa Majefte peut apprendre a bien ecrire & a compter, i, comme auffi les Langues etrangeres , que les Tuteurs trouveront neceG- faires jufqu'a ce que Sa Majefte foit plus avancee en age: En attendant ^, des hommes favans & d'experience confe'reront enfemble pour drefleir ,, une certaine methode au fujet des Auteurs , comment , quand & avec quel choix Sa Majefte les etudiera; comme auffi quels exercices Elle y ^, joindra. ^,, Taut , & qu'il faut encore ecarter le mal & lever les obftacles; nous trouvons ;, indispenfablement necelfaire que, non feiilement il ne foit point permis - a Sa Majefte de lire des livres -ou ecrits inutiles, encore moins perni- cieux, mais auffi que Sai4 ' Cette Princefle Catherine etoit 1'Unique Xante de Chrijline, comme Chrifti^ m etoit fon unique Niece. On a deja dit, que 1'education de Chrijline lui avoit etc confiee en confideration des belles qualites qu'elle pofledoit. Le Roi Guftave-Adolpbe , en partant pour 1'expedition SAlkmagm^ avoit laifle a fon Beaufrere Jean Cafimir, Prince Palatin, Epoux de Catherine, 1'Inten- dance CHRISTINE REINE DE SUEDE. 35 dance des finances de Suede. On lui fit refigner cette charge apres la mort du Roi, de peur fans doute qu'elle ne lui fervit de pretexte pour avoir part au Gouvernement du Roiaume en qualite de Tuteur, ou pour etre Corre- LcBeaufrT. gent avec, le Senat, dans la vue peut-etre de fraicr par ce moien le chemin ".J^ s *" du trone a Charles-Guftave fon fils, en le mariant avec la jeune Reine (a), n'cft pit ad. Ceft apparemment par cette raifon que, lorfqu'il demanda au Senat, quel-* u ? Ri - ' i 11 i ... . . ,. f, -*_. guicc QC que terns apres, de quelle maniere on jugeoit, qu il devoit clever fes En- suede, fans , li Ton vouloit que ce fut a la mode de Suede ou a celle SAlleniagne? Les Senateurs, qui comprenoient bien le fin de cette demande, lui re'pon- dirent aflez froidement : que cette education etoit une affaire particulie- re, qui ne les regardoit point, & que c'e'toh a lui, en qualite de Pere, a favoir , comment il vouloit clever fes enfans. " Un autre Hiftorien (b) ajoute , que le Prince Palatin vo'ioit avec chagrin des mefures qui lui etoient fi peu favorables. II feignit de vouloir s'en retourner en Allemagne & fembla chercher a fe faire prier de n'abandonner point la Suede. Les Senateurs , attentifs a retabliflement de leur autorite , 1'amuferent de bel- les paroles , jufqu'a ce qu'elle fut bien affermie : Pleins de courage & de refolution , ils pourvurent au repos & a la furete du Roiaume , a la con- (ervation des Conquetes , & particulierement a celle des Places prifes en dllcmagne fur le bord de la Mer-Baltique , aux moi'ens de continuer la guerre & de prevenir toutes les occafions de rupture avec les voifins. Bien loin de paroitre deconcertes par la mort de leur Roi , ils affefterent de temoi- gner, que la Su&de n'avoit rkn a craindre au dedans & qu'elle fe trouvoit en &at de pourfuivre les defleins formes par Guftave : comme ils le firent auffi fans demander la-deffus les avis de fon Beaufrere. Cependant 1'an 1641. s'aguTant au Senat de fubftituer quelqu'un a la place d'un des Tuteurs de Chriftine, qui venoit de mourir, on y delibera, fi on en laifleroit la nomination a la Reine meme, qui pourroit choifir le Prince Cbarks-Guftave fon Coufin. Voici ce qu'elle en ecrivit a fon Oncle: TjOcbgebobrner Furjl loertzlie- Sereniflime Prince & tres-cher " ber Fetter. E. L. dis mal Oncle - Le difcours d'hier, dont je mt mem fehreiben ZU befucben vais yous faire part , me donne cet- . , J n. ' JJT te fois occauon d ecnre a Votre Di- lat mir der geflrige difcQursan- , e6tion> Hier mon Prdcepteur fut leitung ZUgegebert) welches E.L. appelle par le Seigneur Charles chez ZU refer iren ich dis mal bereit lui, ou etoit le Sieur Skytte. Y etant bin. .Geftern ijl mein Preceptor venu, il lui dit, qu'on avoit delibere von Herren Carel gefordert wor- au Senat ces jours pafles , fur le fujet *., r aucb Sr. Joban Sckytte ^~WMijg duSieur gewefen, da ernun hmkommen encore ^ d&idfc _ La R ^ ge ^ ce war , fagte er , esijt m dijen avoit auffi vouju me demander la- tagen deffus "H (a) Ogerius /. c. p. 145. Anecdotes de J. . 67. JMr. V. J. 7. Libr. X/, J, 2. Suede p. 37. 6f 38. Pufend. de R. S. Libr. (b) Le Vaffar I. c. pag. 473. MEMO IRES CONCERN ANT L ' an - tagen conjuhiret worden , tvem ' man in S. Gabriels Jlete nemen folte , dber nocb nicbt s conclude ret ; bat auch die regirung urn der felbige fache mich fragen wollen , wen icb am liebflen wol- te daw baben , aber fie ftunden nocb in zweiffel ob Jie mich ge- iviffe Perfonen furfetzen wolten auf daft icb eine von denen er- web/en mocbte 3 oder attcb dafs icb einenfolte von micb felber nennen ?{j$je fagten 3 dafs fie ?er- ^ % / <^> / / CJ> nefeben , dafs icb S. C. nente , ba- ten aucb dafs er wolte mir fol- fbesfagen. Da icb es vernabm, lies icb antworten , das icb aus ibren ratb wobl fpubren konte die treue affe&ion ge^en mir , in dem fa einen mir jo naben verwanten dor zu baben bilte es aber nicbt ratbfam icb micb undt ibn aucb in folcben '-pcricel fetzen jolte , wufte aucb wol , das E. L. das nicbt zulas- fen wurde. Was aber das andere belanget , bab micb refolviret al- 20 zu antworten , dajs mir nicbt fo viel zuftunde mir jelbcr cm } r ormunder zu fetzen (wo fa mir keinen nenneten) oder aucb icb willfagen , das wo man den Can- celer aus feinem Collegia* miffen kdnte 5 fo ware er am bejhn dar- zugefcbikt) aufdas icb mir fa- vor bey ibm e Hangen kdnte : wo fa aber micb einen nenneten^ will icbfagen , es find' meriterte per- jbnen , meinete derentbattenyman [dt lofsdarum werffen. \Mit die- fer deflus mon fentiment & qui je fou> haiterois le plus d'avoir, Mais ila ont encore balance , s'ils me propo- feroient des Sujetspourenchoifirun, ou fi }'en nommerois quelqu'un moi- meme ? Us ont dit , qu'ils verroiens volontiers que je nommafle le Sei- gneur Charles, ajoutant meme , qu'ii n'avoit qu'a me le dire. En ai'ant etc informe'e je leur fis repondre , que j'avois bien remarque, par leur avis, leur affe&ion fidelie envers moi , en ce qu'ils vouloient avoir un de mes proches parens : mais que je n'e'tois pas d'avis de courir avec lui ce ha- zard,, lachant bien que V. D. nele voudroit pus permettre. Quant a 1'autre point, je refolus de leur re* pondre,. qu'il ne m'appartenoit pas de me nommer a moi-meme un Tu^ teur: s'ils ne me nommoient point des fujets- pour cette charge : ou bien de dire, qu'en cas que Ton put fe pafler du Chancelier dans leur Con.- feil , il feroit le plus propre pour cela , afin de gagner par-la fa fa- veur. Mais s'jls me nommoient quelques uns , de repondre , qu'ils etoient tous gens de merite , & que le mieux a ce qu'il me fembloit ,. c'etoit de laifTer au fort la decifion de la chofe. Ils ont etc fort com tens de cette re'ponfe & m'ont prie d'en ecrire a V. I>. Je la prie done de vouloir confiderer tout ceci , au fujet du Seigneur Charles & de fe preter a mon fentiment. Si je le nomme, la Regence croira, que je le fais pour apprendre tout ce qui s'y pafle , & ea fecond lieu ,, oo pourra; CHRISTINE REINE t>E SUEDE, fr Jer antwort waren fie wol zu- pourra , pour fe defaire bientot de jrieden und baten dajs icb E. L. lul > lui - - . . . . Votre 1641. m- meilleure dumonde, reflechilfez pas affez. Je prie V. D'. de me faire connoitre fon fentiment la-deflus par eerie. on fentiment Je fuis de V. darum zufcbreiben wolte. Icb bit- tcE. L.wollen dasvorige umSgr. Carel confideriren , und &eine tneinung boren ; wan icb ibn nennen wolte y Jo wilrde die re- girung meinen 5 das icb es darum tbu> das icb alles mbgte verne- men was da gefcbiet 3 zum an- dern mogte man ibm wol . . . auf dafs man ihm bald wegknegen kbntej S/e meinen es wol von bertzengut, fiber fie bedenkenficb nicbt recbt. Icb bitte E. L. wollen micb bier auf ibre meinung wieder fcbrei- len. Icb verbleibe E. L, Getreue bas bis im todt Stockholm den 3 . Cbrtftina. April 1 64. !.> Le Sujet de cette Lettre de Chriftine, qui fans doute part uniquement de Remar q l fa plume, eft alTez delicat. Le Tuteur qui venoit de mourir, etoit le Ba-f u ron Gabriel Oxenftierna Guftaffon , premier Senateur & Drotfet de Suede^ Celui qui lui fucceda fut le Comte Pierre Brahe* II y parvint par la decifion du fort, que la Reine avoit propofe elle-meme (*)^ On voit affez par cette lettre de Chriftineles grands egards que le Senat avoit pour une jeune Reine , qui approchoit de JUge de majorite , ou elle prendroit elle-meme les renes du Gouvernement. D'un autre c6te ,- oh voit les raifons folides , qu'elle marque a fon Oncle pour dtfluader fon fils le .Prince Charler-Guftave , Coufm germain de Chriftme, de penfer a deve- nir un de fes Tuteurs , bien qu'il paroiife que le Pere de ce Jeune Prince le fouhaitoit. Elle tache de fe tirer adrohement de ce pas gliflant , en faifant pourtant comprendre, qu'elle donnok la preference a Oxmjliernamemv, pour '. ..TV:.. 1 ,*'^;-:.> La fidelle Niece jufqu'au tombeaa w,\ . Stockholm ce f - 1641. (*) L-Auteur de la relation anecdote d<3 Su$de, (i) cite ci-defTuc, allegue comme un chef d'accufation centre le Chancelier, que pour primer par-tout, il avoit reavo'Ie" le Csmte Brabi en- Finlands mnis que rnalgrt'iui, cetui'-ci dtoit devenu par fort D'rdtfft dc- Sucdg , ce qui e"toit alors la premiere dignit& du Ro'iaume. t) V. le RecutU de Swier pag. zz,JJcc. sememe an de 3 5 MEMOIRES CONCERNANT pour gagner fa confiance. Ce fut aufli par 1'avis de ce Chancelier, qu'on lui donna 1'entree dans le Senat Tannee d'apres , qui etoit la Seizieme de fon age, afin, comme le.dit un Hiftprien, (a) de I'accouturner a delibe- rer fur les affaires publiques , & a ne pas s'en raporter uniquement a fes Miniftres & autres Officiers. . En meme- terns qu'on apprenoit a la Jeune Reine a ecrire des Lettres en Suedois & en Alkmand on la formoit aufli de bonne heure a en compofer en Latin. Nous en produirons ici une quinzaine tout de fuite avec leur tra- duc~lion Franfoife. jLIuftriffime Princeps , Affinh * ch&rijfime. Precor Vobh cum novo hoc anno omnia faufta &P notum facio me cum ferenifjtma Matre rette* valere. Fatiet Deus nt vos quoque ex animi fcntentia valere pojfais. Ego^omnijlu- diO) amore & benevolentia vos projequi non intermittam , quam- diu vixerO) cujus rei teftes pr Jludiorumque Con- (*) Ludolphs Scbauliibnc ad am, 1624 fag. de Votre Dile&ion la tres-affeftionne'e CHRISTINE. Illuftriflime Prince, mon tres-cher Coufin. Nous avons enfin obtenu , felon nos fouhaits, de mon Illuftrif- fime Tante que nous retiendrons au- pres de nous Eleonore la cadette de vos filles , pour s'e'xercer avec nous dant nos etudes & pour nous tenir com- CHRISTINE REINE DE SUEDE. Condifcipulam & vittf fociamba- bercmus. Non dubitamus quin Celfitudo reftra nqftro quoque- defideriopaternajua approbatio- ne locum fit datura. ' Dabimus certe operam , ne nee Parentes> nee Filiam pceniteat unquam bu- jus &P aliorum erga nos merito- rum. ralete 5? nos amate , ne- que dubitate quin nos vobis in a- more refpondeamus. Holmitf d. i an. 1636. Celfttud: reft. AddiSijfima Cbrifiina jLluftriffime Domine, Comes Pa* * Jatine-) affinis perdilede. Et- Ji Jlnguks in dies adventum ve- Jlrum ad nos expeffem 3 attamen ne plane labor em fcribendi 3 op- portuna occafione-> fubterfugere wdearipaucis bis verbis Jingula- rem erga vos affettum meum de- clarare volui. Deumoro ut fo- Jpites ? incolumes quamprimum ad nos veniatis. dab. Holmia d. 26. Oftobris 1636. Mea. reft. Studiqfiffima Cbriflina jLluftriffime Princeps , Comes * Palatine , Affinis perdileffe. Vetere jam anno elapjo & novo ingrediente 3 intermittere nonpo- tui , dileftioni vejlra tarn de prijco feUdter exatto gratulari, quam de profpero veftro fucceffu , infuturum 3 Deumprecari. Faxit compagnie. Nous ne doutons pas que Votre Altefle ne nous accorde, par fon approbation paternelle, ce que nous defirons. Nous tacheronscer- tainement de faire en forte que les Parens ni la fille ne fe repentent ja- mais de nous avoir fait ce plaifir, auffi bien que d'autres. Portez-vous bien , & nous aimez , & ne doutez pas que de notre cdte nous ne vous aimions aufli. de Votre Altefle f ,. * . * T*. I^a tres-devouee % ' -.'* j 4p* *"* T CHRISTINE Illuftrifllme Seigneur , Comte Pa- latin , mon tres-cher Coufm. Quoi- que j'attende tous les jours votre ar- rivee chez nous , cependant pour ne pas paroitre negligente a vous ecri- re par une fi bonne occafion, j'ai voulu vous donner par ce peu de lignes un temoignage de mon affec tion. Je prie Dieu que vous veniez au plfkot chez nous en bonne faute. ecrite a Stockholm. . . . de Votre Dile&ion la tres-devouee CHRISTINE Uluftriflime Prince, Comte Pala- tin , mon tres-cher Coufm. Comme 1'annee eft finie, & une nouvelle commencee , je ne puis manquer de feliciter Votre Dileftion d'avoir pafle heureufement 1'annee derniere, & de prier Dieu en meme- terns qu'il vous comble a 1'avenir de profperites, Dieu veuiUe ^ue Votre Dilewionvi- ve 46 MEMOIRES C O N C E R N A JST f T ^yy ' "~ ' D. K plurimos adbuc ve encore un grand nombre d'annees * 6P ceft une occafion ou je * &. J . >L * * ne puis manquer d'ecrire a Votre Di- imermittere 3 \Q^- iQn p ar ce t te VQ ^ Q ^ p 0ur vous \QCCaJione ad tilled. Ve- faire mes complimens & pour vous Jlram lit eras darem 3 quibus Di- temoigner la continuation de mon letl. Vejl. falutarem cum tejlifi- amitie & de mon affection , aiant catione perpetu* amititi* & con- cette entiere efpdrance, que Votre r;/z,/? x7/?i./7*/r Dilection aura aufli toujours pour Jjilect. affect us , ^ , ,,. , , J . M r n moi la meme fide lite & a meme bien- ' veillance qu'EUe a eue- ci-devant. - de Votre Dilelion tota jDiletf. priflinajua fide mlentia mibi nunquam defutu ram. Holmia d. n. Oil. 1637. DiJetl: Veftr* ' Addi&ifftma Chriflma R. S. CHRISTINE Rcme de ' Suite OEreniffime Princeps, Affinis Serdniffime Prince, mon tres-cher' *^ CbariJ/ime. Ex literu Tuis Coufin. J'apprens par votre lettre intettigo S. T. bene vatere, gjp W* vous V0lls P ortez bien,.& je. ab- Deo peroptimo Maximo Tibi [ ouh r m ? ^ Q Die " us ac S,? rde tou ' *. ^Q r j-tr tes lortes de profpentes ; Ceftpour- optima &? fecundijftma precor. quoi je nQ ^ nf an ' de VOI V S td . Et quoniam cum bac occafione mo igner par cette lettre ma joi'e, prater ire non potui quin cumbac ma bienveiljance& mafaveur; -mais epiflola jmgularem benevolent tarn n'ai'ant autre chofe pour le prefentu ac favorem qftendam ; fed quia ^crire a Votre Altefle, je la recom- nthi( ejl quod jcribam S. T. Jub mande la n Divinam protettionem commendo. I 28. Apr. 1638. Di/etf. reft. Addittifftma ^ tres-devoue'e. Cbriflina. R. S. CHRISTINE Re'me de SuMe. //- II- de Votre Dileclion CHRISTINE REINE DE SUEDE, jLluftrilfime Princeps? Affinh * Charljfime. Ex Itteris Veftris Di/eft: Feftram falvam & inco- lumem effe mibi volupe fult co- gnofcere. Ego cum men per Dei gratiam reffe va/emus. Deus Fbs in pqfterum quoque db omni *malo P incommodo dementer confervare dignetur. Adventum DIM-. Veftr* &P Mater & Ego avide expeftamus. Quod Ji au- tem ferius expettatione no/Ira Di- lettio Feflra accefferit^ non vo- luntati Jed occupationibus Dileff: Vejlra adfcribendum effe libenter agnofcimus. Judicium meum Ju~ per reditum filii , Confanguinei mei charijfimi , ex literis Pr<$- ceptoris licet cognofcere. Rettqua autem qua ad res ve/lras priva- tasjpettent) admutuum nqftrum colloquium differri poffe cenfco. Interea Dilett: Vejlram divin tas pecunias Wimmarienfa Mi- litia Tribunis obtulit. Gallic Rex fimihter bis aureospoJlicetur Montes, modo Erifacenfem Civi- tatem fibi cedere velint , qua Jponfa in/tar, omnes in fu quin Tibi referrem 3 ut viderc pojjit Dtfeft. Veft> quantum om- nes vereantur illam urbem. Pre- cor ut Deus velit confervare Di- led. Feft. diuturna vaktudinei quod ex animo voveo. Dab. Vlf- fundad. iz.Ott.^l. 1639. Dilett. Veft. Addittiffima Cbrijlina R. S. QErenifflme 6? Ittuftriflime & Princeps, Affinh Cbariffime. DHeft. Tua liter* beri mibi ad- juntt* funt .> adeoque etiam nova pro quibus maxima* gratias ago. yam etiam video ex Uteris Di- M. Tua quo ufquam venerit Di- lett. Tu3g ij'j. c. 4 8 ME MOIRES CONCERNANT L'an Nortlingue & de donner bataille , & que par -la il fut caufe de la perte de 39> cette place & de deux armees : que la France profita de cet echec , qui lui ouvrit le paflage dans \Alkmagne : que le Due fe defiant de Horn , qui lui imputoit le malheur de la Bataille , negocia fous main (a) pour entrer au fervice de la France : qu'elle 1'acheta un peu trop cher , dit le Laboureur , vu 1'etat de fes affaires & qu'elle le fit creer General de quatre Cercles de rpiexite ok la Honte-jflletnagnc , au grand regret tfOxenftkrna, qui defiroit cette charge ient les p 0ur f on gendre: que vCt la perplexite ou etoient alors les affaires de Suede > 3*46*1* C Oxenjlierna ne penfoit qu'a la confervation de la Raffe-Allemagm & partit de pyorms en prennant le chemin par la France & la Hollands a caufe des dan- gers qu'il coiirroit de la part des troupes Imperiaks & Efpagnoles pour venir a Magdebourg : qu'il y trouva le Due de Saxe declare pour le parti contraire , & negotiant pour 1'Empereur avec la qualite de Lieutenant Ge- neral de Y Empire & avec une Armee de trente mille hommes: ai'antau fur- plus fouleve 1'armee de Boner , attire a Ton parti le Major General Lebufen avec fon Regiment , & excite les autres chefs a demander les uns qu'on, acceptat la paix de Prague , les autres qu'on les pa'iat , palfant jufqu'a ce point d'infolence de retenir le Chancelier Oxenjlierna dans Magdebourg pour gage de ce qui leur etoit dfl : que Ies Suedols etant reduits a une Armee de quinze a feize mille hommes, dont la plupart etoient Allemands, nonob- du itant cela le General Saner fit voir ce que vaut a la tete d'une armee , ou 1'on craint une revoke , la prefence & la refolution d'un homme de coeur & d'experience (b) : qu'il tira hautement de nuit le Chancelier Oxenjlierna de (a) Le TraMfut conclu le 27. Ot^. 1653. Part. I. pag. 118. & 119. Foiez du Mont. Carps Diplom. Tom. VI. (V} Le Laboureur / c. pag. 70. f 71. defcendoit 1'illuflre' Comte Arvid Horn, (r). Sdnateur & Pr^fident de la Chancclerie de Suede , qui contribua tant d etablir 1'heureufe Conflitution du gouvernement de la Suede, apres la raort du Roi Charles XII. It fut trois fois Marshal de la Diete, & s'acquita fi bien de cette haute charge, qu'en reconnoiflfance, les Etats du Ro'iaume 1'honor^rent 1'an 1720. d'une magnifique Mt^daille, dont la face preTente le bufle de ce Comte, & fur le rovers de laquelle font repreTentr/hentre Louis X/// & Madame la Lantgrave, contraire prefqu'en tout a 1'autre: (3). d'ou on pourroit conclure, que celui-li n'avoit pas e"t ratifie de part ni d'autre. (i) Miintz Btl: Part. IV. p. j?o. fs) Idem ibidem pag. 178. & Ijo. 8c Pufcr.4, (t)Du Mont. 1. c. Tom, 'VI, fait, J.fag. I7. de ^<*- *s. iabl, Xi. 9- 3* Twe L G L'an 1639- fes conquetes de tout fon pouvoir. Mais le Marechal de Eaner repondit a cela fort froidement , (informe , qu'il e"toit,de fes intentions ) que ce n'etoit pas a lui qu'on fe devoit adrefTer pour difpofer des Conquetes de la Cou- ronne , & il donna avis de tout au Confeil de Suede. " Enfin , emportant a force ouverte Brifach (a) reputee alors prefqu'impre- nable, cette prife caufa une joi'e inexprimable auRoide France, (*) qui la vouloit avoir a tout prix & fe confer ver le Vainqueur. Le Due au contraire ne vouloit pas s'en defaifir (b) & quand le Mare'- chal de Gudbriant, lui fit des remontrances pour 1'engager a remettre cet- te place , il lui repondit brusquement : que c'etoit demander a une f,He fagefonpucellage & aun homme de bien fon honneur".La repartie qui fui- vit, fut, que peu de jours apres le Due mourtit le 17 Juillet 1639 a Neu- lourg , ou comme le pretend le Laboureur (c) les Medecins reconnurent qu'il avoit la pefte : mais d'autres foup^onnent avec plus de vraifemblance qu'on lui avoit donne une mechante fouppe, qui 1'avoit fait paffer , dans 1'autre monde (f). II fembloit dit le Laboureur , (d) qu'apres la mort du Due , toutes fes. viftoires fuffent a 1'ancan , ou que , comme autrefois 1'Empire , elles fuflent tombees au pouvoir des Soldats & dependiflent de Jeur fuffrages, & Brijach s'efl pu dire un terns la ville la plus marchande & la plus marchandee de 1'Univers. Comme on y rejevoit toutes fortes de propofitions , il y en eut qui parlerent encore pour le Prince Palatin Charles & on lui donna affez d'aflurances de la bonne volonte des Chefs & des troupes, pour lui perfua- der d'entreprendre le voi'age expres. II fe traveflit a ce deflein & paflant par la France, il y fut reconnu & retenu jufqu'a la conclufion du Traite' (e). avec (a) Le Laboureur I. c. pag. 102. &c. ? Pufend. Lib. XII. $.41. (&) Item. pag. 122. (c) Pufend. de R. S. Libr. XL g. 39-43- fon Hifl. de Suede T. II. p. 349. Gundlings Difcours I. c. g. 15. 303. Struvii Arclo. P. II. p. 115 -121. Londop. ASa Tarn, ll pag. 707. (d) L. c. pag. 134. fcf. (e} Ce Traitt fe trouve dans du Mont. c. p. 185. (*) Le Laboureur raporte (i) une lettre du Roi de France du 6 Janvier 1639. au. Comte de Gue'briant, ou il lui dit: je defire plus que jamais de vous donner mo'ien de pourvoir puiflamment a la confervation de cette place : (Brifach*) : fi importante a- toute la Chre'tienete' , au bien de la caufe commune, & a notre reputation. (f) Voici ce qu'un Hiftorien en dit, (2) quelques tins ont cru que le pre"tendu Em- poifonneur fut fuborne'par Richelieu ,&& de fe vanger du me'pris avec lequel Bernard re- jetta la propofition qu'on lui fit d'e'poufer la Niece du Cardinal & d'obtenir plus facile- ment Brifach apres la mort du Due &c Voiez aufli la - deflbs Pufendorf de R. S. (3). Nous avons allegue" ci-deflus la raifon qui peut avoir ^pargntS a Pufendorf la peine de faire I'doge de ce Due. Ceux qui en fontcurieux n'ont qu'a le chercher dznsKoeb- ler 1. c. p. 333. il eft tire" de Gualdo hift. delle guerre liv. XVI. pag. 463, O) 1. c. pag. ictf. (2) Vaffor 1. c. D, hiftor. " ' & 2 Armee de Weimar , (f) comme etant les vieux foldats du Grand Gujlave^ () qui faifoient partie de fa vieille armee, &que non feulement ils avoient &e leves au nom de la Suede , mais qu'encore iJs avoient fait ferment de fidelite a cette Couronne , , & que le Pere Bougeant (c) avoue, que la France avoit cede au Due Bernard le Lantgraviat d'sllface (j) (qui com- me on fait n'appartenoit pas a la France) ces Meflieurs, dis-je , entendent, que tout cela ne s'efl fait qu'avec la refervation mentale de pretemion & d'efpd- ;...:, & n.: b iii:?i t. --'.- -' !.w::nr/ ~'J> u^l i:q-3ir^va n *- (a) Le Laboureur /. t, Liv. III. cb. i. ad arm. 1647. p, 1333. fc. Vitt. Siri Mer- P<*g- J 33 &f 134- confr. Difdier Negoc. de cur. T. X. pag. 1586. Nimdgue vers la fin de la Preface. (e) L. c. T. I. Liv. F. g. 66. p. 377. i- (fc) Pufend. /. c. $. 49. 53. f 55. item tern Auberi bijt. de Richelieu p. 345. &c. fon hift. de Suede pag. 350. Tbeac. Eur. (*) Tout le monde trouva ce coup de Richelieu contraire a la juftice , & la Mere du Prince Palatin Reine Douairiere de Bobetne reclama I'interceffion de la Reine Cbrijlinc pour I'elargiflement de fon Fils. Elle en e'crivit nne lettre afTez forte a Louis XIII. & une autre pour confoler la Mere, qui fe trouvent dans Lunig (i). (f) Le Laboureur (r) dit entr'autres chofes a ce fujet. Les Allies ne pouvoient fouf- frir 1'union de ces vieilles troupes IVeimariennes avec celles de France & fous 1'obe'if- fance d'un General Francois Mr. de Guebriant jugea bi'en que cette entreprife de s'etablir dans la Lieutenance Ge'ne'rale & de fupprimer la Direction autorifee par le tefta- ment dufeu Due de Weimar t etoit une affaire d'inte"ret, quoique de perfuafion , & qu'il y faloit agir avec plus de douceur & de complaifance que d'autorit< Gene pouvoitetre, dit-il , pendant que nous e"tions avec les Sue'dois. Encore qu'ils nous enf- fentcede leur droit fur les ll'rimariennes., ils n'eufTent pas laiiK de nous travtrfer fourde- mcnt On voit done que Mrs. les Francois eux-memes reconnoiiToient le droit de la Suede fur les troupes Weimariennes , mais jufqu'ici ils n'ont pas prouv^ que la Suede leur ait jamais cede fon droit fur ces troupes-la. (].) Voici les propres termes d'un article fecret du Trait^ (3) que le Due avoit fait avec Lonis XIII au mois d'Oftobre 1635.,, Sa Majeftt^ donne& delaifle au Due Bernard ,, le Lantgravint d'dlface pour en joulr fous le titre de Lant grave d'^lj'ace avec tousles droits qui ont appartenu ci-devant a la Maifon d'Autricbe dans' le dit pals : & au cas ,, qu'on (i) Liter* Procerum Europ. Tom. I. pag. z5l. (3) V. Cypriani. MvtrfnT. hifler. Dsh Jicm- & 2^4. &c hardi />/? 3* (i) Livr. VII. chap. I. p. [450. &c. G 2 52 ME MOIRES CONCERNANT L'a't Severance , que quand le Due s'en- feroic rendu maitre , il ecbutcroit des * 639 ' propofitions d'accommodement v au gre du Miniflere de France. Le Due neanmoins ne fe trouvant pas d'humeur de fe defaifir de fes conquetes , & la Suede n'emendant pas que fes troupes appardnflent a aucune autre Puil- fance qu'a elle , (*) nos Hiftoriens Francois n'apportent pour toute raifon de la contravention ouverce aux Stipulations paflees , que le Eon Plalfir de la France, ou comme Bougeant dit (a) a la marge de Ton Hifloire. La Fran- ce veut retenir les conquetes du Due & fun Armee. C'eft dans ce meme efprit que le P. Bougeant (/)) expofe avec emphafe dans plLifieurs endroits de fon ouvrage, que durant la guerre desoannees; la Suede avoit agi contre toutes les regies de la bonne- foi : qu'il ne te- noit pas aux Suedois qu'ils n'euflent trahi la France , .en Tabandonnant malgre la foi des Traites & les Affurances reiterees ; que les Suedou avoient manque de parole aux Francois : q.u'ils detruifoient le lendemain ce qu'on avoit fait la veille avec beaucoup de peine : que c'e'toic un in- teret pecurviaire q.ui etoit le principal motif d'une conduite fi irreguliere y que tout 1'argent de France auroit a peine fuffi pour fatisfaire 1'avidite des >t Suedois: qu'ils fembloient ne connoitre d'autre article du Traite d'Alliaa- ce avec la France ,. que celuidu Subfide : . q,ue. leurs pretentions etoienc ambitieufes & peu equitables ...... &c, Vgila des exprelTions contre une nation fi etroitement alliee de la Fran- ce, aux quelles on n'avoit pas lieu de s'attendre de la part d'un Auteur Franfois 9 & furtout d'un Reverend Pere Jefuhe , qui d'ailfeurs polTede toute la polhefle de fa langue, & qui la fait ii bien mettre en oeuvre, quancf il s'agit de parler aux Dames (f) .vlais on voudroit bien favoir ce qui Ta empeche d'apporter de bonnes preuves de ce qu'il avance? Ou bien fe (a) L. c. Tom. I. L'v. V. . 66. p 3l6. & . 74 p. 306. itemLiv. FI. J. 19 p. 402. conf. P u fend, de Reb. Suec. Libr. VI. . 83. ^ 414. Tain. II. Liv. //^.g. 45.^^ Sommnire- 97. (fc. p. 447. 448 & 5,58. p. 468. T. 111. Liv. Vllf. (/>) L. c. Tom. f. Liv, IV. J. 70.^.302. $.5.^.223 ^7*224. item $.2.9. p. 271. r qu'on vint a faire un Traitt^ de paix , S. M. proniet dc faire tout fon pofTible pour faire conferver an dit Sieur Ducla jouiiFance du dit pals A r 4lfae & de toutes lei donations- qui lui ont tkd faites par la Couronne de Sufrle &c, (*) Ce feroit envain qu r on voudroin en appeUer a ce meme Traite (i) oil il eft dit,, dans un autre article fecret, q'u'fl reconnoitra I'autorit^ du Roi< deFrance par deflus tou- te autre, & le fcrvira avec Ton arm^e envers tons & contre tous? Carle Due n'etoitpas en droit de prendre de pareils engagemens ^ Tinf^u & fans le confentement de la Suede. 11 tenoit a elle par un double lien , non feulement coinrae engag^ ^ fon fervice militai- re, mais aufll comme fon VaJJal, parrapportau Duch^de la Franconie, qu'il tenoit en Fief de la Couronne de Suede. (2). (f) II eft connu- que ce meme P. Bougeant eft PAuteur du Traitl du langage des Bet es , lefquelles il fuppofe etre poflTed^es chactine de quelque De"mon, & oiientr'autresil faic conterfleurettes a dtspetitschiens couches fur le fein des Dames, qui ces Creatures ! (iennentlesdifconrs les plus g.alants, comme finotre Ke'v. Pere avoit ^t^dlev<$ dans J'Eco- le de Cytbire ( 3). (i) V. DH Mor.t I. c. pac;. 118 & 119- pig. I- &c. ft) Puftni. 1. c. Libr. V. . 40. Kihlcr 1. c. ft) On n'a qu'^ lire le Tnite mcmc ,. impr. * Tut IV. i>ag. jjo. Cyritr.i Advfacia hiftot, Parit !?jp. & a Amft, iz^ : - CHRISTINE REfNE DE SUEDE. 5$ fcra-t-il imagine, ce bon Pe're, que fon axiome la Frame k vcut, otera a **'*<* tout autre Etat fouverain la liberte de vouloir autrement qu'elle? Ce n'eft pas que eet Hiftorien ne tache toujours de colorer les faitsqu'il Mailmen rapporte, de quelques raifons quelles qu'elles foi'ent, pour mettre la Sutde J lc ^ a dans le tort, comme quand il par'e (a) des reproches que les Miniftres de pr'eteT ia Suede faifoient a Mr. de Servien au fujet des negotiations fecretesde la ^raw avec la Baviere & qu'il die, que Mr. de Servien s'etoit fonde fur le Trait^ d'AIliance entreles deux Couronnes, ou il etoit marque: que Ton con- traindroit par la force, ou qu'on rameneroit par la raifon les ennemisde ,, la paix:' r pretendant par-la que la/VYm-tfagiifoitconformementauTraite. jVlais fi la France jugeoit & agilfoit ainfi,il etoit done permis a h Suede d 1 a- gir de tneme, & de traiter feparement avec TEmpereur, pirifque le Traite etoit reciproque entre la Su&de & la France, & la partieegale des deux cotes. Quant au reproche que le P. Bougeant fait aux Suedois, en appellant le.urs pretentions ambitieufes & pen equitables , on ne le fera fouvenir ici quede ce qinl avoue lui-meme (b) par rapport aux pretentions de la France en ce terns-la. II dit qu'en 1639 les defleins du Cardinal de Richelieu ne tendoient a nioins qu'a acquerir a la France les Pais-Bas, \Alface & Philipsbourg. Apres, quand on vint en 1644, au Traite de Paix, le Card. Mazann fe propofa de confer ver toutes les acquifitions de la. France, faitesen/ta//>, en Alkmagne , en Efpagne & dans les Pais-Bas. Deplusen 1 645. ce Cardinal vouloit que les Sue- uois retinflent la Seigneurie de Benfeh avec fa dependance de 60. villages , & qu'ils les veiidiflent a h. France, afin que tout 1'odieux de cette alienation re- tombat fur la Suede.Uzn. 1646. ce meme Cardinal con^ut le deflein d'echan- ger les Pdis-Bas & la Franche-Comte pour la Catalogne Tout ceci eft re- garde par notre Pere Jefuite comme des pretentions raifonnables: maisje crains qu'elles ne paroiffent a tout autre qu'a lui, auffiambitieufes que peu equitables. Mais pour lui faire voir combien petr foutenables font les reproches qu'if fait a la Suede & aux Suedois, on loi dira, qu'il y a longtems qu'elles font refutees par un Hiftorien d'un autre poids que lui. Ceft Pufendorf qui n'eft pas mains celebre par fes ouvrages d'Hiftoire que par ceux de Morale & de Politique. Ce qui convient au fujet dont il s'agit, fe trouve amplement deduit dans fa Dij/ertation fur les Alliances entre la Suede & la France (*). 11 y met au grand jour toutes les manoeuvres de la France par rapport a la Sue~de depuis le commencement de eette guerre jufques vers fan 1680. Ce. feroit (a) Bougeant /. c. Tom. II. Liv. III. 10. 53. item T. HI. Liv. VIII. $. 40 p. 295 fcf J. 61 y 62. p. 3,28, df $ 86. Liv. r. . i. 2:1,0* p. 198. (*) II fit cetteDiflfertation, parordreduChancelierde Stride, fur des aftes quifetrou^- voient dans les Archives. II la compofaen latin & e!le fut imprim^eTan i 709. la Haye , a- vecunetraduftion/'Vfln;oy^. Mr. RouffctTa fait reim primer (i) fous le litre de Recbercbes- fur Its Alliances entre la France & la Suede , oil Ton trouve iointes quantite" d'autres pieces r relatives aumeme fujet (SiauiTi inte>efiantes que la premiere. [t) Dan Ion facut U tl 1 AiStss , TraitesScc. fervant da fupplem;nt au XVIII. Tomer, G a 54 ME MOIRES CONCERNANT LVm feroit dommage, que notre Pere ne 1'eut'pas lfl. Car Ton ofe fe flatter, 4I ' ._ que cette lecture auroit pu non feulement le guerir de fon etrange preven- tion, mais encore lui fournir le moi'en de fe convaincre, que ce n'etoitpas la Suede , mais bien la France , qui en ce terns-la , en plus d'une occafioh n'obfervoit pas trop fcrupuleufement les regies de la bonne-foi&lesengage- mens contracles (*). Avant tout cela il faut luirendre lajuftice,qu'illedon- ne aflez a connoitre lui-meme dans plus d'un endroit de fon hiftoire (a). Mr. le Laboureur (b) n'en difconvient pas , non plus que Fittorio Slri (c) , Hiftoriographe de France. Mr. Cbanut meme (d) alors Ambafladeur de France a la Cour de Suede, ne fut que reppndre quand Cbriflme lui fit la-des- fus des remontrances, & qu'elle en ecrivit des lettres bien feches tant au Roi de France , qu'a la Reine Regence & au Cardinal Mazarin (f). La Reine Chrifline , qui fut piquee au vif d'etre abandonnee de fon allie dans Mjdajiies de un . terns ou elle s'y attendoit le moins , voulut perpetuer la memoire P r f/r ffut de cette demarche par deux medailles qu'elle fit frapper (e\ Sur 1'une les Alliances . . . r ^ A -A r ' r 11 L r avec la Fran- on voit la Suede fous 1 embleme dune Perfonne, a laquelle un bras fora " des nue's tend la main , pendant que le Cocq qui reprelente la France , s'envole. L'infcription eft: A socio DERELICT A, A DEO RESTITU- TA S U E T I A. La Suede abandonnee de fon Allie , mais retablie par le Tout-Puiffant. Sur le revers de 1'autre Medaille eft reprefente un Lion : (les armes des Goths & fuppots des Armes deSue'de') a tete levee avec 1'infcription. CONFI- PENTEII ET SOLUS: avec aflurance quoique feul. . . . Au refte , on remar- quera dans plus d'un desEcrivainsdelaNationfeK/0j/,quec'eftaJaleurde tenir () V. Bougeant/. c. Tom. II. Liv. L 5. (d) Chanut Mem. T. I. p. 188 fc? 189. 1 8. p. 40 & 41. Liv. II. g. 57. p. 212. &?. Meiern A8a P. W. T. I. p. 282. fif T. III. 70. p. 225. item Liv. III. . 20. p. 286. Liv. p. 718. &fc. item N^goc. Secret. T. III. p. V.. 72. p. 575. fcf Tom. III. Liv. 1X..4J. 348. item Lunig Epift. Proc. ad ami. 1647. p. 434. OM ces lettres de Chrifline fe trouvent tout (fc) L. c.item Livre H.cbap. IX.pag.126. au long. T. I. p. 392. 395 & 397. (c) Mem. Recond. T. VIII. p. 309^313. (e} Brenneri Tbef. Nummor. SnecoGotb. & Mercur. Tom. IX. pag. 372 & 375. & T. Tab. IX. pag. 192. (*) Lalettrequ'e'crivitacefujet Adler Salvius ^Chrifline en 1646. eft tres-remarquable, Dans une de fes lettres pre'cedentes en 1 638. de Hambourg eft infere ce diftique. Frangentifidcm , fides frangatur eidem : Sinonviffalli, fugias commcrcia Galii. (i). (f) Voici encore un trait de la bonne-foi d.u Minift^re de France en ce tems-la. Aux Traite7. UePaixcn Wcftphdielcs AnibafTadeursde/'r^zcedonnerent en 1645 la propofition pour la paixdclaptirtduRoide.FVa?2C, auxM^diateurs dela paix, fans la comimmiquer aupara- vant aux Ambafladeurs Pl(5nipotentiairesde Suc-ie. Ceux-ci les reprirentd'avoira^i par-la contrel'alliance, comme fi la France cheschoit de fatre un Traite" ft-pare". Mais les Franfois , n'apporterent pour touteexcufe que les ordres & la volont^ de leur Roi. (2). (i) V. Palmsktid ad h. ann. turn Manes Grotli j*6. &c. Libr. XVII. 0. 92. conf. la preface de p. 419 & 433. item Pufend. de Reb. Sec. Libr. Kappen de la Rcpubl. liter, par Saavtdra pag. jo. VIII. 5. 8i. XIII. 715. 77. XVII. $. 64.67.79-91- J4- &C. & iZ5- Libr. XVIII. $. 79. ittni de Reb. Brand. (z) V. Ne'pociat. Secret. Tom. I. pap. 335-J3S. li- X. $. as. Libr. XVIII. 5. i. p. jji. 734- & fufsnd, 1, c, Libi, VII. $ IS. 4^- J^i CHRISTINE REINE DE SUEDE. 55 tenir fes Allies comme en tutele. II y a plus d'un fiecle qu'elle a cru que L ' an cela lui appartenoit de droit. Grams, Ambafladeur de Suede a la Cour de I64r> France en ce tems-la , le dit rondement dans fa lettre au Chancelier Oxen- " ftierna 1'an 1638- Nous la rapporterons dans les notes, (*) puifqu'elle fert d'eclairciflement a 1'arfaire du Due de Weimar, qui a donne fujet a ces re- marques hiftoriques. Nous y ajouterons encore , que le Due etant mort , fon Armee, comme nous 1'avons dit, fut eorrompue par 'argent & par de grandes promeffes de la France , lefquelles elle oublia prefqu'auflitot qu'elle le fut rendu Maitrefle- de Brifacb. Cette Armee tomba infenfiblement dans un etat tres- deplorable par le Miniftere de ceux qui ne 1'avoient de- bauche'e, que pour 1'empecher de devenir aufli peu formidable a la France, qu'a fes ennemis dans 1'Empire. (a). Les affaires, de la Suede en Allemagne en fouffrirent confiderablement , <& Mort du ce qui derangea encore plus fes mefures en ce tems-la fut la mort du Mare- Felt ' Mar ^" chal Saner, laquelle arriva a Halberftat le ?f de Mai 1641* non fans foup- c on de poifon (). Peu de jours auparavant la Reine Chriftine avoit eerie ces Lettres au Prince Palatin fon Oncle. TJocbgebobrner Furft^ Hertz- " Ueber Fetter. E. L. kan left ley diefer gelegenibeit nicbt ver- baltey was. man cClbier leiderjur zeitungen fpubret , nemlich 3 dafs Baner jehr krank 5 und alkr menfcblicbkeit nacb zu fagen , wirdt er gewifffterlen. Erfollal- Jezeit Grubhenzujicb wunfehen. Hat aucb keinen bey fab 3 dem er was (a) Bougeant /. c. Livr. VII. J. 58. p. Suede pag. 350. 171 f 174. Le Laboureur Liv. III. p. (fc) Pufend. deR.S.libr. XIII. 183. & Liv. V. p. 222. Pufend. bift. de fon biftor^de Suede/, c. p. 357. Sereniflime Prince , & tres-cher Couiin. Je ne puis laifTer ignorer a V. D. dans cette occafion les trifles nouvelles qui ont etc apportees ici : que Saner eft 'dahgereufement mala- de & qu'il n'en rechapera pas felon' toute apparence humaine. II defire toujours que Grubbe vienne aupres de lui. II n'a meme perfonne a qui il puifle rien communiquer. On ne fe foucie gueres de cette nouvelle ici. On 14. (*) Void le morceau de cette lettre de Grotius au Charrcefier Oxenftierna le T |N"ov. 1638. Quantum ex Veneti &p Heufdti ferinonibus colligo, .Galli aut bellum trabere vo- lunfy ant venire ad inducias : neque id mirum , cum nibil in Gallia teneat boftis, ipfe autem in externo folo multum, qua per inducias fperant fe poffe retinere, pace nn item. Interim res Duds Vimarienfis non ut ey re eft fociorum Me curari , - manifeftwn eft. }> Multum metuit Cardinalis ne boc & ex ajiis Jumtis obtentibus , Suedi fcorjim a Gallia pacifcantur. Ego omnibus affir mo , omnia prius futura , quam ut gens Suecica fidemfal- lot. Apparet & hoc efle Gallorum confilii , in omnibus qua? cum- hofte , -aut direde ,, aut per Conciliatores agentur, res Sociorum fui arbitratus facere. " Quod cum olfe- c erint Batavi , in Diplomatis, pro itinere cemprebendi jub generali nomine Gallic non ex ufu fuo ctuxerunt. (2). (zj Lettre en Mfc, tir^e d^ }a M E M O I 11 E S CONCERNANT, was mit communiciren kan. Hier acbtet manfolcbes wenig. Man meint man kan bald einen in der Jlete bekommen. Aber die kerb lajjen fab nicbt aus der ermel fibutten. Stirbt Baner, fowird es ubel daber geben. Salvius ver- mant zumfriedcn. Aber bier ift esdes R... C...ernft ntcbt. Er bekomt filze wenn er von tratta- ten fcbreibet. Vergangenen win- ter folte Grubbe weg ziebn zum traftiren und aucb zwei von den Rdtben , aber fie find nocb alle bier. Jnnerbalb etlicbe tage wird Jo. . . Ox. . . aus ziebn. Er und Salvius werden traftiren^ aber fte werden fcbwerlicb uber eins kommen. Grubbe wicrdubermor- gen zieben. Hiemit E. L. Gbttli- cber obbut empfeblend verbleibe. E. L. Getreue Bas bis Stockholm den im todt Chrijlina On s'imagine d'en trouver blentot un autre a fa place. Mais de tels hommes ne tombent pas de la man- che , on a beau pour cela la fecouer. Si Baner vient t a mourir , les affaires n'iront pas bien la. Salvius exhorte a la paix. Mais ce n'eft pas la ce que le C... du R... a dans le coeur, Ainu* Salvius n'a que des mercuriales * quand il parle de traites de paix. Grw/W'fdevoicpartir 1'hiver pafleavec deux Membres du Senat pour la ne- gociation des Traites : mais ils font encore tous ici. Jo... Ox... partira dans peu de jours. Lui & Salvius i- ront au Congres , mais difficilement feront-ils d'accord. Grubbe partira apres demain. Je recommende V. D. a la proteftion divine & je fuis tofljours. J _ de Votre Di 23 Mai 1 64.1. Stockholm ce 23 MM 1164. La fidele Coufine jufqu'au tombeau CHRISTINE. Voici une autre Lettre que la Reine lui doit avoir e'crite peu de jours a- pres celle-ci. TfJOcbgebobrner Furfl ^Jreund- " licber Hertzlieber Vetttr. Wk wohl daft nocb keiner bey rnir mit den avifen gewefen ift ; fo babe icb docb nicbt unlerlaffen w oil en E. L. durch mem fibre i- ben zu avi/iren was man mit der voriger fojl vcrnommen hat^ nemlicb , dafs die Jrau mutter fall einJcbiffvomKonige in Den- nemark bekommen babcn^ damit in Se're'mflime Prince , aimable & tres-cher Coufin. Quoique je n'aie pas encore lu les gazettes; je n'ai pourtant point voulu- manquer d'ap- prendrea Votre Dileftionlesnouvel- les qu'on a cues par 1'ordinairepafle, favoir: que leRoi de Dannemarck en- voiera un vaifleau a Madame maMere pour la tranfporter en Prufle. Cepen- dant, on n'en eft pas encore bien af- fure. Tous les officiers,tant les Chefs & les Capitaines , que les trois Gene- 'CHRISTINE HEINE DE SUEDE. m Preujjen zu zieben. Fiir ge- w'jjj weis manes nwbt. Die qffi- ciers jamtlicb ^ fo wobl die Obrt- Jlen und Capiteinen 3 ah die drey 'Generals, Pfuhl, Wrangel und Wittenberg : (we/cbe dreybocre- ben her gefchrieben ^bittend , man wolte ibnen eine fwnma geldt ge- ben. Wo dafs gefcbehe > wohen Jic trculicb beyftebm : fo feme aber dafs nicbt ge icbe.be , wolten fie fur der. welt excufirt feyn , .ivenn fa abgmgen. Bitten aucb daneben , dafs der fo in Baner feme ftelle verordnet wtirde , .mogte nit wie Er nach feinen ei- genen ratb commendiren ^fondern communi illorum confilio. Mti der Franfofifihen alliance ifl es nocb in worigem ftand. Icb bore der Franfos will uns die armee de~ bauchiren. Es ware leicbtlicb zu tbun. E. L. bier mit Gott he* fohlen verbkibe* E. L. Getreue Cbriftina S7 raux, Pfitbl, Wrangel & Wittenberg: (ces trois com mandent 1' Armee pre- fentement:) ont ecrit ici pour de- mander une certaine fomme d'ar- gent, marquant que fi on la leurre- mettoit, ils continueroient de fervir fidelement , ii non , qu'ils comp- toient d'etre excufts dans le monde, s'ils quittoient le fervice. Us defi- rent en meme -terns, que eel ui qui aura la place de Baner ne commande pas comme Jui , a la fantaifie, mais de leur avis commun. Pour ce qui -eft de Talliance avec la France : la chofe eft encore dans le-meme e'tac ou elle a ete. J'apprens auffi que les Francois nous veulent debaucher no- tre armee. Cela fe pourroit facile- ment faire. Je finis en recommen- dant V. D. a la proteftiou divine, etant De Votre Dile&ioii La fidele CHRISTINE Ces deux Lettres de Clriftlne font aflez comprendre 1'e'tat dangereox ou Le$ ^^^^^^x^^< v ^^'^^< x ^^^?< > ^><^5 i ^5y'^? <^^< v ^^<^^' v ^^ v ^^ 1 ^^^^^^^^0s^ < '^i^ ^^^^^^ >*&\*:^^>-::^^&j<:&>^^*'*;^?^^^^v^&t>^^^&v-.^> : -3^i<^&):^^^ (*) Plus d'un Ecrivain taxe 1'exces qu'a fait le Marshal Baner dans Ie vin. (i). Mais II (i) Le Labaurtur 1. c. chap. VII. p. ipo &3V- Gal: GuaHtl. c. paj. Miffon. Voy. d'ltalieT. 1 p. $$ CHRISTINE REINE DE SUEDE. 59 reconnoitre les lieux , fe trouvant le premier aux coups & a la tete de fes L ' art troupes. Ii s'eft montre incorruptible a toutes les offres de 1'ennemi , meme I64 ' & celles qu'on lui fie a la derniere campagne du Haut-Palatinat , de le faire " Prince de 1'Empire & General centre les Turcs avec de grands appointe- mens , s'il vouloit abandonner fes Confederes & induire la Suede a confentir a une paix particuiiere. ^ Aufli n'etoit-il point avare. ... Sa plus grande gloire eft, qu'apres la defaite de Nortlingen & la paix de Prague, lorfque les Proteftans avoient quitte ou ete fur le point de quitter T Alliance des Sue- dois , il a maintenu le Parti avec de petites forces, que fon adrefle fitcroitre de jour en jour, & a fu diminuer celles de 1'ennemi, remetcant en equi- libre la puiflance des uns & des autres. Sa premiere Epoufe fut une Pful, la feconde une Comteffe de Naflait , & la troifieme une Princeffe de Ba- den (*). Quant a la nouvelle, dont Chrifline fait mention dans fa lettre, que le . v * T * j T^ 7 ... -rr r i r T, * < " e la Roi de Danemarck envoieroit un vameau pour tranlporter la Reine -Mere Mere hors de Sutde, 1'evenement la verifia peu de terns apres; car elle s'e' Je 29. Juillet Tan 1 640. Voici comment cette affaire le paffa (a). Reine Douairiere Mere de Chrifline faifoit fon fejour ordinaire au Chateau de Gripsholm , fitue dans la Province de Sudermanie 9 ou etoit fon Douaire. Ai'ant pris la refolution de quitter la Suede a la fourdine , elle avoit entre- tenu pre'alablement une correfpondance fecrete en Danemarck fur les moi'ens de s'e'vader. En etant d'accord avec ceux qui etoient du fecret , elle fe tint quelque-tems de fuite avec quelques unes de fes Dames d'atour dans un appartement , d'ou Ton pouvoit defcendre dans le Jardin du cha- teau. Tout cela fut colore du pretexte , qu'elle vouloit palfer quelques jours en jetine. Elle allegua la meme raifon a la Reine Chrijline fa fille, quand (a) Palmskold Extraits des Regttres 4u de Suede fag. 373. Pufend. de Reb. Brand. Senat de la dite annee pag. 735. f la lettre Libr. I. J. 34. 36 f 37. Theatr. Europ. de la regenct de Suede au Cbapitre d'Upfal Tom. IF. p. 167. & Cur.Bucher und flaats du 10. Aoiit en 1640. item Pufend. de R. Cab. I. c. . 4, fag. 53. S. libr. XI 5. 2. Libr. XIV. $. 48. fon Hift. il pouvoit le fupporter. Ainfi 1'Auteur des remarques hiftoriques fur les M^datlles , n'avoit pas befoin de tant relever a fon t5gard un vice, qui <^toic alors en vogue par toute VdllemagneMx. Koihler (i) rapporte la belle Me'daille qui fut faite (urBaner avec 1'infcription : Enfem proque Deo Dexter a fertque Sueco. (*) Sur fon mariage avec cette Princefle, il y a cette particularity, que Mr. Salvivr manda a Gyldenklo le 27 Juin 1640. (2). Savoir,,, que Mr. le Marshal Baner a'iant eu avis a Arohzsn, pendant que le Miniftre donnoit la benediction nuptiale a lui & a la PrinceflTe de Baden, que 1'ennemi e'toit en marche; il avoit quitt^ la compagnie ,, fans autre cer^rnonie & fans paifer la nuit avec fon Epoufe, & qu'apres avoir fait mettre le feu a Fritzlar , comme 1'ennemi 1'avoit fait a quelques villages dans le Pais de Heffe, il avoit patTe" le pont de Caffel en de9a du Wefer," allant a fa rencontre pour lui difputer le paffage: & cela fait il retotirna nupres de fon Epoufe. (0 1, c. T. IV. pag. J4J. (*) V. Les Extcaits dc FalxukiU. II 2 V o M E M O I R E S CONCERN* A N T L'an qtiand elle quitta Stockholm fi promtement, ai'anc appris Tarrivee du Pilots' E ' 640> Danois fur les cotes de Nicoping. Ses Dames etant deja accoutumees a da " pareilles abfences , dans fes terns de jeunes , n'y pre'noient plus garde de fi pres. En attendant, a'iant fait tenir tout pret pour fon depart,- & eloigne d'aupres d'elle fon Marechal Iwar Nil/Jon ^elie fit dire qu'elle vouloit redou- bler fes jeunes fix jours de fuite & ne retint aupres d'elle que la Demoifelle de Bulau (a)* Mais la nuit du lendemain elle fe coula tout douce- ment dans le jardin, d'ou elle fe fit tranfporter par eau aTautre bord du lac, & fe mit la- dans le carofle qui 1'attendoit, & fit diligence avec des chevaux de relais que fon Gentilhomme Penzer avoit fait poffcer fur la route de Nicoping. La elle s'embarqua fur unEfquif Danois qui la tranfporta a I'lfle de Gonland, oil fe trouverent deux vaifleaux de guerre de Danemarck,, commanded par TAmiral Eric Ottefon. Elle monta fur 1'un d'eux- & fuc ainfi conduite en Danemarck,. Nous avons remarque ci-deflus a quoi Chanut & Puferuhrf (b) ortt attribue la fuite de cette Princeife. Mais le P. Bwgeant (c) , pretend , d'apres les- De'peches du Comte $jfoaux., qu'une paffion plus forte en fut le reffortfe- eret. On fera peut etre bien aife, dit-il, de voir ee que le dit Comte en ecrivit lui-m^me a la Ducheffe de Savo'ie. Le void:: Un Roi & une Rei- ne du Septentrion fe'pares par un bras de Mer, qui Text de frontiere a leurs Roi'aumes , ont fouhaite fe rapprocher davantage. Leur bonne in- _,, telligence a commence par de fecretes AmbafTades qui ont etc commifes a la dexterite d'une femme d'efprit, qui en fait afliirement plus quetous ,, nous autres Ambafiadeurs. Un Gentilhomme qui re'fide en 1'une des ,, deux Cours, a eu auffi quelques part a ce petit Traite, dont rexecution 5 , ne laifla pas de manquer il y a quinze mois par la jaloufie de deux Na- tions. Mais qui peut refifler a deux volontes fi bien unies & foutenues de la Puiffance Souveraine? Un beau matin avantjour, la belle Princef- fe, fuivie feulement d'une Dame & d'un Cavalier, monte a cheval & par des bois & des rochers inconnus fe rend au bord de la. Mer & pafle le de'troit dans une mechante Chaloupe plus courageufement que ne fit ,, Leandre. Mais au milieu de fa courfe elle eft rencontree par un Amiral , >, qui la rejoit a fon bord au bruit de toute fon Artillerie , faifant ainfi re- ? , tentir de tous cote's un miftere qu'on avoit jufqu'alors cache avec tant ,, de'foin. L'Hiilorien de Sutde ajoute a ce recit (*) que les vaiffeaux de ., TAmiral Danois deflines a recevoir la Reine e'toient magnifiquement or- nes (a) Mr. Salvius dit ci-deffous que c'ttoit (c) /. c. Ttm. I. Liv, VII. $. 43. pag, une Demoifelle de Kutzau. 433 f 434. (6) Voiez ci-dejjus pag. 19. 20. ^f not. (*) Le P. Biugea'it cite a la marge Pufendorf: mils il s'en faut beaucoup qu'il rap- orte cet ^venement comme le faic notre Pere Ttfuit:e. Au contraire il dit (i) que l pieds. ( i) V. Budcis Samltng fag. 617 & S}2, fz) Exttaits de PalmsktU ad b, enn, H- 3 C2 ME MOIRES CONCERNANT I/an, conferverent leur autorite , a caufe qu'elle avoit des perfonnes aupres d'elle , . 164I> .. qui etoient bien aifes de la tenir eloignee & lui perfuadoient, qu'on 1'enle- veroit pour l'emmener en Suede. Cependant le Danemarck ne fut pas quitte a fi bon marche de Taffront que les Sue'dois difoient avoir ete fait a la Nation , par 1'enlevement fecret de leur Reine Douairiere. Us en exagererent beaucoup les circonftances (a) en ce qu'on avoit voulu ajouter le ridicule a 1'injure, aiant appelle 1'un des deux vaifleaux la Patience & 1'autre le Singe, & conduit la Reine-Mere par la Mer-Baltique , comme en triomphe, & pafle douze jours au port de Lubeck , ou Ton avoit fait un tintamarre epouvantable en tirant le Ca- non , touchant les timbales & fonnant de la trompette. Qu'apres on 1'avoit jnenee a Coppenhague , puis a Friderichsbourg, Helfing'dr & enfin dans Je Holjlem. Un Ecrivain Danois (b) tache d'en difculper fa Cour, difant entre autres chofes , que le Roi de Danemarck n'avoit pas fait conduire la Reine Dou- airiere de Suede, mais lui avoit feulement donne des Vaifleaux pour la tranfporter de Scanie, ouelle s'etoit retiree, (*): qu'ilne pouvoit pas s'em- pcher de le faire, en etant follicite par une Reine en detrefle, qui avoic dit dans fa lettre a Mr. pyiebe Refident de Danemarck a la Cour de Suede, qu'elle, qui avoit ete peu auparavant la defenfe & le refuge de toutlemon- de, fe trouvoit reduite a vivre de la grace d'autrui Mais fi Ton confidere toute la trame de cette affaire felon les circonftan- ces bien verifiees & rapportes ci-deflus : on s'appercevra fans peine que tout ce que Mr. de Holberg dit ne porte pas coup : non plus que la lettre (c) qu'on obligea la Reine-Mere d'ecrire deux ans apres de Coppenhague, pour en difculper tant le Roi de Danemarck & le Comte Woldemar envoie ex- pres pour cela en Sue*de, que le dit Refident Wiebe , comme s'il n'avoit eu aucune part a cette evafion: mais que la Reine s'y fut portee d'elle-meme par de grandes raifons , & en confequence du ferment qu'elle avoit fait de fe retirer de Suede , donnant le dementi a tout ce que George Guillaume Po- grel, Gentilhomme de fa Cour, pouvoit avoir dit au contraire, dans la confeflion qu'il avoit donne par ecrit a la Reine fa fille & a la Regence du Roi'aume Encore une fois , qui ne voit que tout cela n'eft dit que pour colorer u- ne mauvaife caufe , en voulant repondre au Manifefte de la guerre que Ja Suede (a) Palmskold Maximes Pol. T. I. p. (, appartenoit alors au Danemarck. Cette province, la plus m^ridio- nale de Suede , eft a pres de foixante lieues d'AHemagne de 1'endroitd'ou la Reine Dou- airiere s'e"vada. C'ed done une bdvue bien grande & bien vifible que de dire, qu'elle s'y e"toit retiree 6c qu'on Tavoit tranfporttje de 1A en Danemarck. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 63 Suede declara an Dannemarck 1'an 1643, lequel porte a 1' Article, (a) ou il L ' nn - eft parle de cet evenement , que la Suede le regarde comme un affront faic a la Memoire de Guftave le Grand, & comme contraire au refpeft du a la " Reine fa Fille, a I'illuftre Corps du Senat du Roi'aume & a toute la Mai- fon de Brandebourg. Cette guerre entreprife au milieu de celle tfAllmagne y lorfque le Roi de N Danemarck s'y attendoit le moins, Jui fut aflez fatale. Les Suedois foutin- rent Tune & 1'autre avec autant de bravoure que de bonheur (b). Mais & lc , Dane comme ils vouloient fe debarafler de celle de Danemarck le plutot poffible,*" on entamales negociations de paix 1'anne'e fuivante. Le Chancelier Oxenjlier- na fe rendit en perfonne fur le lieu du Congres a Broemfebro, fitue alors fur les confms de Smalandie, entre la Suede & le Danemarck. 11 rendit compte a la Reine du progres des negociations. Elle lui repondit la-deflus en parti- culier. Voici trois lettres remarquables , qu'elle lui ecrivit a ce fujet. JJdgtdrade HerrRiksCantzkr. Monfieur & bien-honore Chance- " \Jti mit fidfta bref gaf jag Her du Roi'aume. Dans ma prece- fuller minatanckar ojwer freds dente j f ai fait connpitre en partiemes trattaten ntigorlunda tilkanna ; ^ees fur le Traite de Paix , & je . P.. . . luis bien aife d y avoir rencontre vo- ocb dr mtg kart at jag Jer mig t re fentiment , puifque je puis aflez wara ijamma menmgjomj^idct j uger par vo tre procedee, que vous at iag of ' Eder procedure nogjamt avez en tout compris ma volonte. kan domma at min zui/je i ah af Je m'apper^ois bien des difficukesqui Eder dr fattad. Hivad difficul- en feront infeparables , furtout apre- teter der bos villa fatta, kan iag fent ^ ue Jf? Danois fe ^ ref ^ .7 i r i -j-r* ^^^ %> accommodes , quant au fond de laf- wal befinna.halft nu tnedan de faire . deforte ; ^ ue ce]a ne dent . Danske fig in fundamentahbus qu ^ en g tre bien fun A cet ^ gard f&widt accommoderat bafiva ) Ja on fera fujet a plufieurscalomnies, at der det nu pa Cautionenftan- tant de la part des ennemis que de nor, fa skal man manga Calum- celle des amis, & le meilleur expe- nler wara underkajlad bade af dient la-deflus fera difficile a trouver. ^ . j /o / jujf w ....afc..*..' Quoiquil en puille etre, laflurance finder Ja walomaf wanner , ^ Iac 4 autiond j ivent . 6t rereelles, car ocb lar Jordenskul god rad wara fans ce]a ]a guerre f eroit C0 mmence'e dyr 5 det ga buru det will , fa inutilement , & one guerre ouverte mafte Cautionen bttfwa real^ ty nous feroit plus fupportable qu'une eYieft dr krlget fafdngt begynt , paix mal-afluree. Le terns eft venu , Ocb dr Ofs ett uppenbart krig qu'avec lid- (a) V. Theatr. Europ. ad ann. 1644. p. XV. J. 80-82. &c. ^p /on Hifl. de Suede /. aooWa^A &<: Vitt. Siri Mercur. T. I. p. c p. 371. item Meiern Atta, P. IV. Tom. 174 & '. Pufend. de R. S. Libr. XIV. g. IV. pag. 51. 85. 183. 633- fcfr. 6f Boecle- 4.8 &c. 6? /on bifl. de Suede T. II. pag. ri bifl. Belli Sueco-Danici p. 358. &c. qui O-TO fc?c. & Boeder! bifl. Belli Sueco-Da- fert de Commeutaire Jur les Imrtf JitivatMS nici'pag. 54. ?c. de Chriftine. (t) V. tt-dejjus Pufend. de R. S. Libr. M E M O I R E S CONCERNANT V545- lidligare an en ofakcrfred, det drkommit til den //W, fit Efterkommanden i framtiden bade orfak at beklaga deras An- tecefforers negligence ; bailer alt- fa. Jor bdft-> at man f tir later pg fa Gud^ ocb fin rdttwifa fak, altid befallandes bonom utgangen 3 ocb den af bans milda bandjor- wantar>> ocb att man ma fa diri- gera ivafendet > at ingen^ hw arc- ken i de tiderfom nuare^ eller i de fom tilkommande war da , med skid! skola kunna wara attioner llamera , ocb dr det juller ivifl at omdyeligit falter at obtinera det fom forefldgit firemen docblikwal skal neppeligen war faker het kun- naftabilieras pa nagot annatydr fordenskull af ntiden at tratta- ten traineras pa det emellertid man matte kunna dijputera Cau- iioncn af pofleflbrio ocb altfa Idttdigare na deffelnen. Dettaar fa bivad tag denne gang bafwer at skrij.wamedanen lit en opafflig- het mig mcommoderar, ocb wil bdrmed bafwa Eder den bogfte recommenderad 5 med forfdkring at lag dr ocb forblifwer Eder altid wtil- Stockholm den 12. bpnarpn April 1645. *%&i Cbnjlma qu'avec 1'alTrflance de Dieu, 1'affairc doit'Ctre pouflee a bout , furcout com- me on voit en perfpe&ive de (1 grands avantages, quinousen reviendronti & quoique les difficultes n'en foi'ent pas moindres , on en peut pourtant conjevoir la meilleure efperance du monde. Autrement il pourra arri- ver , que fi on laifle echapper cette occafion , on fournira a la pofterice des raifons de fe plaindre de la non- chalance de fes PredecefTeurs. Le mieux fera done de fe confier en la juftice de fa .caufe -& rant que je fuis toujours Votre bien affe6tionne'c Stockholm cf i Avril 1645. CHRISTINE Mon- CHRISTINE REINE DE SUEDE. Jjogtdrade fJcrr Ri&s Cantz- " ler. Utaf Edre skrifwelfer hafweriag nogjamt fprnummit , iuru wida det rnedfreds tratta- ten war kommit^ja walfomMr. de la Tuillerjs dijcourfer mtd Eder om tautionen. Nu feder- mera bafwa de Danske skriditja- ken ndrmare med Halmftads til- hud: men fornimmer dock med Jenafte pcft? dem intet wilia gripa fig ndrmare an. Medan J nocb uti ett afEdre skrifwelfer'.mena at entcligenftadnapa Hallandot'^ Blekin^e, skulle fuller war a det fakaftrc , ocb mafte med Eder bekdnna^at med mindre man blif- wer realilfime forjakrad, wore icke ens til tdncka pa frid; men orjaken Jbm mig bafwer bewekt at gifwa Edergradus atfi'gaja wldt neder 3 fain uti rejoiutionen glfne , are ibland alia andre , icke den ringafte*, at jag wdl marker mdftedelen af ware Rikfcns Rad warafafl uti en annanmenmgdn badej ocb jag i det fallet war a hmna. Trucbtar ockforc , at ddr det komme til jlbehimgen, skulle jomUga gdrna , at bielpa kriget.af) utan caution war a at contentera. Jag will ingen be- $kylla> men docktroriagwJft) at tidernes aflopp skal gibra min ord fanna , ocb warder iag i detta Stdndernes utskott fuller kanske merafdrnmmande^ Jkunneti wdl befmnaburu fwart skal mig f alia atftrdn^a pa den fa ken , fern fag wet atjomligc wdl funno radc/i- Tojne I. . Monfieur tres-honore Chancelier du Roaaume. J'ai fufiifamment com- pris par vos lettres , a quel point le Traite de paix eft avance , comme auffi les difcours que Mr. de la Tuillerle a eCis avec votis, touchant la garantie. Les Damns fe font appro- dies depuis , en faifant 1'ofFre de Helmftat: quoique la pofle derniere nous marque qu'ils ne veulent pas aller plus loin. Je ferois de votre fentiment, comme etant le plus fur, de fe fixer a la Hallahde & Eleckln- gue , & j'avoue avec vous , qu'a moins qu'on n'eut urie fCirete reelle, il ne faudroit pas penfer a la paix ; rnais entr'autres raifons , qui m'ont portee avousdonner de^ degrespourdefcen- dre jufqu'au point qui vous eft mar- que dans la resolution, celle-ci n'eft pas la moindre, favoir, que je m'ap- pergois que la plupart de nos Sena- teurs du Roiaunie font d'un fenti- ment tout autre que vous & moi le pourrons etre,en ce cas-la. Jecrains meme, que fi 1'affaire venoit au point de la de'cifion, il n'y en eut quelques- uns , qui , pour mettre fin a la guer* re, fe conrenteroient dy donner les mains, laifiant-Ia la garantie. Jen'ac* cufe perfonne , mais je crois fure- ment, que le terns vurifiera ce que je dis, & j'en apprcndrai,peut-etre, encore plus, dans le Coinite prc'fcnc des Etats. Vous comprendrez bien qu'il me fera difficile d'infifter trop fur ce point -la, puifqiie je fais que quelques-uns trouveront a propos de fe relacher de cette afiFaire : laquel- le pent - etre fera auffi desapprouvee de ceux-memes, qui, en casdequel- que incident facheux , devroient fou- tenir les avis concertes avec leur con* fentement. Car,-(i cela ne reufflt pas bien , on dira'que ce jeu n'a ete commence que par quelques tetesin- I qui^- L'aJi. 1645- 1645. MEMOIRES CONCERNANjT quiettes, & qu'il a continue parmon ambition , & celle de quelques au- tres. De plus , ma jeunefle inno- cente feroit fujette a cette calomnie , qu'elle n'a pas ete capable de pren- dre des confeils falutaires, mais que tranfportee du defir de dominer, el- le a commis de pareilles fautes ; car je prevois que : mon fort fera tel y que (1 je fais quelque chofe avec foin & apres j avoir penfe murement , d'autres en auront I'honneur: mais fi quelque chofe fe neglige, a quoi d'autres auroient du penfer , la faute en rejaillira fur moi. Toutefois j'ai la confiance en Dieu que tout ira bien ; s'il plait a fa bonte" divine de donner vent en poupe anotreflotte, (*) j'efpefe de pouffer 1'affaire an point d'obtenir quelque chofe de plus. Je plains la perte d'un terns fi pre- cieux ^.qui s'ecoule infruclueufement : mais on n'efl pas en etat de 1'arre- ter. II faut abandonner le tout au Bon Dieu , dans 1'efperance , que fa Toute - puiilance , qui jufqu'ici a con- duit fi merveilleufement cet ouvra- ge, Tamenera aufll en fon terns a une fin defirable. Sur quoi je dois vous dire , que quand j'examine bien votre avis, je ne faurois que Tap- at skulle blifwa improberat til af- wentyrs a] dem^ fom ddr nagot pakomme, bilfigt borde fbrswara de confiliafom med deras conjens woro tagne ; ty det skulle fe dan bet as ) ddr det annars an walaf- ginge , Jadantfpel allenaft war a begynt of nagre oroligebufwud > ocb genom mm ocb andra fleras ambition wara continuerat. Se- dan skulle mm oskyldiga ungdom war a den calumnie under kafl ad ^ at den icke bade war it capabel til belfosamma rad utan tran- fporteradaflibidinG dominandi , bafwa fadane fauter begangit ; ty tag kan wdlfe mm Jort wara fadan , at om nagot walbetankt ocbflitigtgiors afmig> fa bafiua andra ddr dran af, men ddr nagot forfummasfom borde tagas i akt afandrom 3 mafte skulden war a min. Dock lag will til Gud bop- fas , at det skal ah ga ivdl of. Tdktes bans gudommehga wili a at gifwa war flotta wind,) boppades jag at drifwa werket fa widt , at man til dfwentyrs kunde bafwa bopp> nagot mera at obti- prouveT (*) Ceft fans doute celle de trente vaifleaux de mo'ienne grandeur que Lou'isdeGeer avoit obtenue de quelques particuliers en Hollands: a caufe que les Etats- Gtntraux n'en votiloient point envo'ier, quoique les Suedois les en euflent requis en confluence du Traite d'alliance qu'ils avoient fait avec eux. Mais les Etats - Generaux n'avoient point eu e"gard a cette r^quifition, fous pre"texte , qu'on avoic entrepris cette guerre, fans leur communication. Mais dans le fond la ve>ite''efl:, comme le dit Pufendorf, (i) qu'ils cherchoient i pecher en can trouble & a tenir la balance entre les deux partis -fous ombre de mediation. CO Dans fen Hiftoire dc Suedt ad h. ann. CHRISTINE REINE DE SUEDE. obtincra Jag bcklagar bogt den edle tiden , jom Ja onyttigt loper fm kos , men detflar en intct til andra* utan mafte befallat Gud> med bopp at bans gudommeliga almakt^fom bdrtilsfa under tiga bafwer fordt werket , warder det ock i finom tjd forandes til en onskelig atgang. Ocb will bar med Kit a Eder fornimma > at nor iag rdtt confidererar Edert con- filium^ mafte iag det belt appro- bera ocb bafwa Eder Jaken re- comen derad^pa detj magenglora conditioner de b'djle ocbfakrafte Eder mdijligit dr. Eder flijt , trobet ocb forftand dr mig nog- Jamt bekdnd) ddr dr iag aldeles utan forg at afEder nagot skal fdrfummas. Recommendcrar alt- fa denna tra fiats utgang i Guds ocb Edre bander; beder allenajl at i icke wiljen trottas ivid detta befjoarllga arbete , utan altid varaforftikradat iag intet bogre aftundar 5 an at med tacksambet forskyllat mot Eder ocb Edre ^bujlru ocb Barn ;pa det at iag ma i iverket bewifa mig altid wara ocbjorblifwa in til mm dod Eder wdlbendgen Stockholm den 20. Chriflina. Junii 1645. JjOgtdrade Herr Riks Cants- [* ler Ddrtil med at iag dageligenfinner fa flora difficult | ler ifortfdttiande afkrigtt 5 fa at det will falla fivart med fa ringa medel ettfaflort wefende at prouver entierement ,- Vous recom- mendant au refte toute 1'afFaire, afin que vous fafliez les conditions les meilleures & les plus fures qu'il fera poflible. Votre capacite , votre ge- nie & votre dexterite me font affez connues : De ce cdte - la je fuis fans apprehenfion que vous negligiez rien , & c'eft pourquoi je remets 1'iflue de ce Traite entre Jes mains du bon Dieu & les Votres. Je vous prie feulement de ne pas vous lafler de ce penible travail , & d'etre toft- jours aflure , que je ne fouhaite rien tant que de Vous en marquer & a Votre femme & a Vos Enfans ma gratitude , afin de prouver par 1'effet que je fuis & ferai jufqu'a la more Votre bien affe&ionee Stockholm ce 20 n 1(545- CHRISTINE Monfieur le Chancelier Je trouve . outre cela tant de difficultes a continuer cette guerre, quejecrois qu'on aura bien de la peine a condui- re un fi grand ouvrage avec des mo'iens fi petits: de forte que ce fera donner beaucoup au hazard que de I 2 re- L'an, 1645. M E M O I R E S C O N C E R N A N T I/,. 1645. at continuera , bwilket icke utan . hazard at taga de condtiionesjom pi* biudas , skal afga : Mr bos med mafte ock befmnas 5 buru Jwart detain f alia at Supporter a den calumnienjom ojspa kommande warder bade bos defwenskafielf- wa^fa wtilfom bos fremmandc > bwilka alia ddrfredengingeifdr^ skulle imputera skuJden til alias war outjldckeliga ambition , den ddrfig pafieljwa ortittwijanjun- derade 5 ocb ingen annan finern bade , tin en begdrligbet ad do- minera. Ocb fa/dm lag icke bai- ler mig rdttjorfdkradom Hoi- Iwdarens cooperation , altfafruk- tar lag , at ddr deffe Jorejlagne conditiones icke blefwe aceeptera- de, skulle de J oka at blifiva ar- bitri belli & pads \ fa at deras jaloufie kanske , nagot o/ormo- deligit bos dem caujera kunde: oanjedt iagjarttger bwadaf Po- lacken pratticeras kan. Sedan det fid/fa ocb jornamfta ar 3 at font enter a Jin egen confcientie y fa at man ma kunna for Gud ocb alia iverMen betyga at man Jig til alia skdlige fredsmedel accom- moderat bafaer Upfala den 24. Junti 16^.5;. Ene r walbendgen Cbrtflina refufer les conditions qui nous fonv ofFertes. Outre cela il faut auili COP." fiderer, qu'il feroit bien difficile de fupporter les caloranies qui fe repan- dront tant chez les Suedois que chez: les Etrangers , qui tons , au cas quc la paix fe rompit , en attribuerons la caufe a une ambition demefurec de notre part , qui ne fe fondoit que fur I'injuftice meme , & n'avoit pour but que de dominer.. Et comme je ne m'alTure pas tout a fait de la cooperation des Hollandois ; je crains ,. que fi les conditions propofeesne font pas acceptees, ils ne tachent de de- venir les arbitres de Ja guerre & de la paix: de forte, que leur jaloufie les fera , peut - etre , entreprendre quelque chofe d'imprevu : (*). fans parler de ce que les Polonois pour- roient faire. Enfin la derniere & la. principale confideration efl , qu'il faut fatisfaire a fa confcience , & faire paroitre devant Dieu & devant tout le monde, qu'on s'eft prete a tous les moi'ens raifonnables pour obtenir la paix a Upfal ce 24. Juin 1645. Votre bien affe&ionne'e CHRISTIN& (*) On auroit bien pti encore ftipuler davantage pour la Couronne de Suede, dit Pu- fendorf, (i) fi on avoit of^ fe fier aux Hollandois , quiavoientenvoie" une Flotte dequa-. rante huit vaiffeaux dans le d^troit du Sond , fans declarer pr^cifement quo! ^toit leur deffein : de forte qu'on ne favoit alors coniinenc on en dtoit avec eux. (i) /. cdar. CHRISTINE REINE DE SUEDE. *0 Ces Lettres de Chnftine, qui n'avpit pas encore dix neuf ans , petivent fervir de preuve de fa capacite , & d'exemple de fa maniere de donner des ordres & des inftru&ions a fes Miniftres , qui fe trouvoient dans la per- GrancfTc plexite des Traites & des Negotiations epineufes. Ce n'efl pas qu'il man- P adte '. de ' quat au Chancelier Oxenjlierna aucune des qualites neceflaires a un grand datfi'es'afi Negociateur: Lui, qui depuis plus de vingt ans manioit les affaires les plus ir b es ^ dedicates d'une grande partie de {'Europe, & dirigeoit acluellement encore * "T celles de 1' 'Empire, ou il avoit tant d'interets differens a menager. Bien loin n S*?"!** de-la, la Negotiation de Broemfebro y quoique d'une grande iniportance^J^/j 11 ' pour la Suede, en particulier , ne J'embaraflbit pas rant, qu'il ne put fuffire ie Aiuuitew! a mille autres incidens , ou Ton avoit befoin de 1'entendre & de fe regler fur fes avis. Ceux qui ont eu occafion de lire les Regitres & autres Aclesde ceTraite deBfocmftbrOyqm fetrouvent dans les Archives de Suede >& font un gros Volume, ecrit, la plus grande. partie, de la propre main de ce grand Chancelier , conviendront facilement , que c'efl un chef d'oeuvre en fon genre, qui ne cede en rien a aucun des ouvrages imprimes de cette efpece, comme les Lettres & Negotiations du Cardinal tfOJJht,du Cardinal Perron, du Prefident Jannin , de 1'Ambafladeur Walfingham , du Comte dAvaux & d'autres femblables. II dirigea auffi ce Traite de Paix d'une maniere fi avantageufe , & en meme terns , fi conforme aux idees de Chnftine , que toute la gloire en revint a la Reine, 1'avantage a la Suede, & le merite a lui-mme , malgre la grande jaloufie que la France & d'autres PuhTances en con^urent contre Jui (*). Pour marque de la fatisfaftion entiere que Chnftine cut de les grands CM/KM fervices , elle 1'honora de la dignite de Comte & lui donna une Terre {^""f * confiderable qu'elle erigea en Comte , & folennifa cet A6r,e de declaration dc par une belle Harangue en Suedois , qu'elle fit en plein Senat le 27. No- vembre 1645. a laquelle le Chancelier fit une reponfe fort-humble & fort- eb- (*) Void par quels reproches Mr. de Vauciennes debute dans fes M&noires tir^s des d^peches deCbanut: (i) Pendant quetous les Princes de VEurope ^toient aflembltisa Munfter , pour rendre la pzix.z\'Ailemagne&. terminer ime guerre qui 1'avoitdefoMede- puis trente ans , la Sutde , enffi^e par les viftoires & les heureux fucces qu'elle avoit eus, s'imagina que tout lui e"toit permJs, & que les moindres foupgons que lui donnoient ,, fesvoifins, fuffifoient pour les traiter d'ennemis. Sur ce fondement elle fit entrer a 1'improvifte une Annee dans le Danemarck, & comme elle furprit ces Provinces, qui n'y fongeoient pas , elle y jetta I'^pouvante , & y fit en.peu de terns de grands progres.... La France courut auffi-t6t a cet embrafement pour l'e"teindre, le Danemarck e'couta volontiers les propofitions de paix, & la Suede fe voiant blamde de fon mauvais proced(5 par fes allies, retir.i fes troupes & donna les mains a un accomodemment, &c;" Voila les fentimens du plus intime ami de la Suede, comme la France le vou- loit paroitre, & qui elle- meme avoit porte* la Suede a attaquer le Danemarck en vertu du Traite* conclu alors a la Haye entre les Prenipotentiaires de Suede & de France, & les De'pute's des Etats Ge'neraux. (2). Mais que diront fes voifins & fes allies, des guerres que la France a entreprifes depuis ce terns - la ? (i) Tom. I. pag. I. &c. C) V, Les Nc'gocut. Secretes T. I. pag. 4?c, i a 7 o MEMOIRES CONCERNANT eloquente , pour lui temoigner , combien il e'toit fenfible a la grace qu'elle venoic de lui faire. La premiere piece e'tant de la compofition de "Cbriftim meme , on ne fera pas fache qu'on lui donne place ici avec la tradu&ion. jr/dlborne Eerr Canceller. Elm- *V ru wdl manga orfaker kun- na bafiva bewekt wore for fader och framfarne Sweriges Rikes konungar at inrdtta det Gref- welige fto.ndet\ fa kan det war a buru det will: intet twifivel dr, at deju bafiva dermed welat lata fe )fig icke war a injenjlbks att Jl- gnalera fine trogne Tienare , och dem fadane pramia virtuth na- deligen meddelat. Ty oanfedt ock andre dretitlar bafwa baft fit eftime ; fa dr likwdl intet twlf- ivel 5 at denne bafwer fynnerh- gen warit ofwer andre warde- rad. Ocb efter nu gift mlg , ge~ nom Gudsnade^ tlUjdlle^ atbe- neficera dem 9 fom, bafiva giordt mlg goda och anfeenlige tienjler ; /a kan fag utan nagons prejudi- ce mcd skllil fdja , det Q J bafiven fa emphyerat de 34. ar, omiag riitt efter tdncker^fpm i bafkven tient^ bade win S. farfader^jom ockfedan mm S. kidre fader dddde, ocb fatedes comporterat eder uti Anibaffader 5 Commlffioncr ocb ombcirodde gouvernemente r , at i -lui/Jerligciibafiven tedt Eder en ft or minljler^ bos en ft or homing. Dot borde fuller intet mlg kail a bonomfa , men det ar likwiilwerl- den kunnigt 5 at ban for ft bafiver fralft ofs utur den vilitet wi til forenefato uti, ocb fordenskuhl bit* Noble Seigneur Chancelier. Quels qu'ai'ent ete les motifs qui ont porte nos ancetres, & les Rois de Suede nos PredecefTeurs , a inflituer Tordre des Comtes dans ce Roiaume, on ne fau- roit douter qu'ils n'a'ient voulu par-la faire connoitre, qu'ils n'etoient pas infenfibles au plaifir de diftinguer leurs fideles ferviteurs , en leur con- ferant gracieufement de femblables recompenfes qui font dues a lavertu. Car quoique les autres litres d'hon- neur ai'ent leur prix , on ne pent ce- pendant revoquer en doute , que celui-ci ne 1'emporte fur eux. Etant done , par la grace de Dieu , en e'tat d'en honorer ceux qui m'ont rendu de bons & importans iervi- ces ,' je puis dire avec raifon & fans faire tort a qui que ce ioit , .que du- rant les trente quatre anne'es , (fi je m'en fouviens bien, ) que vous avez ete au fervice de mon Grand- Pere & de mon Pere de bien heureufe me- moire , de meme qu'au mien , apres leur mort, dans les AmbafTades, les Commiifions , & les Gouvernemens , qui vous ont ete confies , Vous vous etes conduit de manie're, a vous fai- re certainement reconnoitre pour le grand Miniftre d'un grand Roi. Jl ne me Tied peut-etre pas bien de nom- mer ainfi feu mon Pere. Mais tout le monde fait , qu'il a rendu le nom des Suedois plus iJluftre qu'il n'avoit jamais ete , & qu'a cet e'gard , il me- rite bien que nous lui donnions le ti- tre de Grand. Je ne veux pas entrer dans CHRISTINE REINE DE SUEDE. ) afofiftor eftimeras. Jag mil m intet oprepa alia particu- lar it eter, efter jafom det skulk Iddera Eder modejlie. Det ar nog, at jar en for) abrade, Gud Jer edre aL}ioner-> edert famwete kan fig tryggia der ivid, pch en Jlor konung bafiver det I at it Jig bebaga^ bwilken^ ibland annat 3 ocb derafbafiverwarit lyckofam^ at ban bafiver afGud war it be- neficerat med en ft or Miniftreof- werbwilken ban bafiver bap dran at commendera. Sa ar icke eller det ringa at skatta, at eburu- wtil i bafiven want focius confi- liorum, ocb altjd cooper er at at conducera affair erne til gode ocb onskelige utjlag ; /a bafiven i lik- wdl tvelat rejpedera eder konung fom eder Herre ; bonom med tro- bet, flit? dexteritet^ ocb skyldig borfambet wdlgadttilbanda. Se- dan ndr Gud tdcktes minf. Herr fader bddankalla 3 ocb mig bar qwarldmna ett omyndigt Barn , fa bafive i troligen tientfdder- nes Landet) ocb med edre med- Colleger fa anrdttat mm ungdo- wsar, at iag nu wal drkommen til den aider 5 ocb uti min antrdd- de Reger ing funnit alle faker uti fadant onskeligit til/land^ at ivi alle derafnu kunne taga icke rin- ga contentement. Det kunde en annan til dfiventyrs icke bafwa wet at undraga , ocb fdttia mo- dnm ambitioni: Men i bafwe af fadane vaniteter intet Unit eder tranfportcra^utan alt id betdenkt den dans le detail des particularites qui vous regardent, craignanc de blefler Votre modeflie. II fuffit que vous " foi'ez perfuade que Dieu regarde vos actions : que votre confcience fe repofe la-defllis, & que vous avez eu 1'approbation d'un grand Roi, qui a etc heureux d'avoir rencontre en vous un grand Miniftre , fur qui ii a eu 1'honneur de commander. Ce qui n'efl pas moinseflimableenvous, c'eft , qu'en I'afliftant de vos Con- feils , & en travaillant tofijours avec lui a conduire les affaires a une con- clufion bonne & defirable ; Vous avez neanmoins fu refpe6ter votre Roi , comme Votre Maitre , & vous lui avez donne en tout & par tout des preuves de votre fidelite , de votre a6livite,& de votre dexterite, de-mme que de 1'obeiflance que vous lui deviez. Apres qu'il eut plu au Tout-puis- fant d'appeller de ce monde a lui le Seigneur mon Pere , & de me lais- fer orpheline en bas age , vous avez fidelement fervi la Patrie, & avec vos Collegues vous avez pris foin de me faire bien emploier les annees de ma jeuneile , & fait en forte , qu'aT- ant atteint fage oil je fuis , j'ai trouve a mon entree dans la regen- ce, toutes chofes dans 1'etat ou on les pouvoit fouhaiter , & dans uu fi bon ordre , que nous tous ne pouvons qu'en etre tres - contens. Un autre que vous , n'auroit peut- etre pas ete capable de fe mode'rer & ME MOIRES CONCERNANT den refpeft fom i Gud ocb mig^ eder laglige ofiverbet , bafiven war it skyldig. Tttermera oanfedt den tjden ar kortjomiag^bafaer futet widRegementet'ifabafwer iag likwal dfkverflodigt fornum- mit eder vigilant z 3 dexter it et^ forfland ocb boge qualiteter , icke hafwa warit utan effeil. Det ar allom kunnigt , at det Danske kriget 5 formedeljl ivapnens fort- fattjande^ ocb edert forficktige conduit e i fynnerbet wid freds- trattatens utforande , bafwer nadt det onskeltga utjlaget , fom wi nu kunna ofs bogeligen bugna dfiver. Delta fom bar allenafl ifumme-wis ar mentionerat , fa at alle wal kunna marckia war a mycket forbigadt , ar faledes-kor- teligen allenafl attingerat, at i maforj dkra Eder det jag edre me- rit er erkdnner. Ty fafom i baf- iven fielfskattat eder skyldigbet, troligen ocb veal tiena ;fa bafwer ock iag ballit mig obligerad ^ cdert arbete, flit ocb dexter it et beborigen at ibugkomma. Jag mil forboppas 3 at J foreballe edre Barn icke allenafl medexem*- pel) utan ock mcd formaningar^ at de inga edre fotspar , giora Jig meriterade bosfdderneslandet ocb mig , fom Gud och naturen bafaer fatt til deras rdtta of- iverbet 5 ocb zuanfa af mig all gunft ocb nade , intet twiflandes derom at iag icke skal deras tien- Jler anfe 5 ocb dem efler skal ocb occafionernebeneficera^ for- blif- de mettre des bornes a fon ambition; mais vous ne vous etes pas JailTe em- porter a de pareilles vanites, a'iant tofijours eu devant les yeux & le refpe6l dfi a Dieu & celui que vous me devez comme a Votre Jegitime Souveraine. Enfin, quoiqu'il n'y ait que peu de terns que je tiens en main Je timon du gouvernement, combien n'ai je pas eu de preuves des bons effets de votre vigilance, de votre capacite, de votre genie, & de vos eminentes qualites? Cha- cun fait , que fi la guerre avec le Dammarck au eu une fin fi heureufe & dont nous pouvons tous nous re- jouir , c'efl par les armes & par Votre fage conduite , particuliere- ment dans la Negociation de la Paix. Je ne touche que legerement tous ces points , & de maniere que tout le monde remarquera quej'enpairefous filence un grand nombre d'autres. Vous vous tiendrez neanmoins pour allure, par le peu que je viens de dire, que je connois votre merite. Et comme vous penfez , qu'il eft de votre devoir de me fervir bien & fi- dellement ; je ne me crois pas moins obligee de reconnoitre vos travaux , votre affiduite , & votre habilete. Je me flatte que non feulement Vous continuerez de donner un fi bon exemple a vos Enfans , mais encore que vous les exhorterez a fuivre vos traces & a fe faire un merite envers la Patrie & envers moi, que Dieu & la Nature ont etablie leur Souve- raine ; de fervir avec fidelite & , de s'attendre par - la a toutes fortes de graces & de faveur, e'tant aflures, que j'aurai egard a leurs fervices & que je les recompenferai felon la rai- fon CHRISTINE REINE DE -SUEDE. 7* (3 llifivandes bade Eder ocb dem fon & les occafions ; Vous etant L>a)l Jamteligen> med fynnerlig gunjl & a eux tous tofijours tres-affec- _ I64S ; id bewagen. tionee. . (*) II n'y n perfonne qui ne fache, (i) que Grotius s'^chappa de fa prifon par 1'arti- fice de fa femme. 11 lui en donne aufli tout Thonneur dans ce beau Poe'me qu'il com- pofa fur la route d'dnvers a Paris : il y dit : nos multum debere fatemur Conjugio &c & fmit par toucher 1'injuftice qu'on lui avoit faite , en violanc en fa perfoune les Loix du pa'is : Et proculcatas in noflro corpore leges ?c. (2). (f) Outre la haine que la focie'te' des Jefuites portoit au Pere de Mr. de Tbou , a caufe (i) V. La Preface des ceuvres dt Grotius t item (a) V. Hubert du Maurier Mem. de Hollande Manes Grotii p*flim& Prtfat. Obrechti d Grotii 1'art. de la tie de Crttius pag. 339. Jus Belli & 1 Pacts. pag, i , &v. Tome L K Comme I'illuftre Grotius revint cette annee de fon Ambaflade de France, & qu'il mourut en chemin peu apres, s'en retournant dans fa Patrie; il nefuTeud'a? ferapas hors de propos d'inferer ici quelquescirconftancesderHiffoi>edece fe ^<>n <* grand homme , qui ont rapport a celle de Chrijline & du Chancelier Oxenftierw. /SSi* 6 Tout le monde fait, que Hugo Grotius s'etant fauve de laprifon (*) fere- J? ourl /iria pag. o. &c. & 86. &c. CHRISTINE REINE BE 'SUEDE, ft qui avoit e'te fait avec lui-meme (*). A cette explication le Cardinal fut La'n. oblige d'acquiefcer & de traiter Mr. Grotius, comme une perfonne revetue I(545> du caraclere reprefentatif (f). Au:refte, comme il etoit irreprochable "' crivit le 8 Juin 1635- entre autres chofe* (i),, Rem gratam fcceris , eximimn. illud be^ nejicium conferejido in fummum virum^ Hugonem Grotium : in quo nefcio plus .ne ameirt eximiam pietatem, atgue ut ereftani, it a fuavijfimam indolem : an vero magis mirer divi- num ingenium &? incomparabilem doftrinam: non equidemdiffiteor, jupereffe aliquos, qui aliud malint , fed fert , qui vel vebemetiter Iceferint , velmetuant, ne tantis fuis- obftruaf luminibus. ..... (*) Le Chancelier Oxenflierna s'autorifoit lui-meme dans toutes fes negotiations du plein pouvoir, qui lui avoit e"te" dpnn au nom de la Reine -Cbrijline & du Roi'aume de Sutde, & en confluence il conftituoit tel Miniftre & Ambafladeur, que bon lui fem- bloit. Auffi Mr. Grotius fur la difficult^ que lui avoit faite la Cour de France , s'ex- pliqua-t-il de cette maniere-ci dans la lettre qu'il e"crivit au Chancelier de St Denis le * ^^ I(S 3S- (2) Sextus jam dies eft cum buc ad me venit Regis mifflonalis Co- ty mes Brulonus. Scire voluit quo nomine advenijjem. Dixi nomine Regina Serenifftmce t) Suedorum Legatum , ex poteftate illuftrijfimce Excellentice veftrts conceffa. Difputare cce- J? pit f dicere : numquam admijfos Legatos , quos olim mijijjet Dux Maynius poteflate Jt Regis Hifpani inftruBus. Dixi, non minim id, fervente hello f odio Maynii, faftum. Hagce cum inducia fierent , Legatos , quos 4rcbiduces, nomine Regis HifpanicE miferant, t , ut Regis Hifpani Legatos bonoratos a Gallic Britanniteque Legatis. Et cum Cardinalis Richeliaeus a Rege poteftate liberrima, belli Italia tempore , inftruQus effet,Ji Lega- tos mijijjet, apudjapientes omnes eodem futuros loco fuiffe quo ii quos ajuo later e Rex mifijjet. Poteftatem vero Tuce IlluflriJJimce Excellentice ab regno univerfo datam non, ,. pojfi controverjiam trabi, cum f Legatos ex ea poteftate mijjos complures, etiam po- Jlremos, Rex ut Legatos Regios excepijjet , f Regis Legati cum illuftr. Excellent ,, Tua ut talem babente poteflatem fecijfent. ..... (f) En cette qualit^ Mr. Grotius n'alla jamais faire vifite au Cardinal de Ricbelieu, parceque celui-ci ne vouloit pas lui donner la main chez lui (3), Le premier ne fut pas content non plus de la reception que le Chancelier de France lui fit. II le mande dans fa lettre Oxenftierna le T | Nov. 1638. (4) en difant:,, Quce nuper de Francis Cancellario fcripfi , vera erant , imo vero minus fcripjeram. Nam neque obviam mibi ve~ nit ut mos eft , neque de more debitum dedit locum , neque dtduxit quoufque mos eft. Ce- terum cum medius tertius ad me venit Comes Brulonus , dixeritque , prqfentibus etiam Cancellarii -Domejlicis , Ji quid fuiffet quod mibi minus placer et , id incuria magis quam conjilio adfcribendum : velle Regem a Miniftris fuis , eum mibi babere honor em, qui Re- gum Legatis darifoleret, boc quoque non celandum fublimitatem Tiiam judicavi Palmskold remarque dans un autre endroit, (5) que Mr. Grotius allant rendre vifite au Cbancelier de France & s'apper^evant qu'on, lui avoit deftin^ un fiege au - deffous de lui, il ne I'accepta point, mais prit la place qui lui e"toit due. .." Nous rapporterons a cette occafion I'hiftoire plaifarite qni arriva a la fille de cet Am- bafladeur e'tant ^ la Cour avec fa Mere,, (6) une fois que Madame Grotius, qui e"toie d'une grofleur prodigieufe , ^toit aflife au Cercle : (car elleyalloitquelquefois qcand fon Mart fut Ambafladeur de Suede}: Mr. le Cardinal dela Vuktte , fendan't lapref- fe pour s'approcher, & envifageant de loin cette grofle. femme qu'il ne connoiflbit point , demanda a une Dame du Cercle Poreille qui 6toit cet Ours ailis aupres de la ,, Reine? a quoi aiant r^pondu , C'eft ma Mere, Monfieur: (car il s'^toit juftement adrefliS (i) G. J. Vejfil Qper. T. IV. pag. 197. Hi Suec. L. tl. $. 7. (z) Mfc. tirce de la Bibliotheque &'0xenftier- (4) Tiree dela Uibl. ftOxtttftienui, a. (s) Mfc. ad ann, 164*. pag. 491. (jj Manet GrttH p, 3?1- & sal. f*fmli ** (*) dtfsri fa tfattrisrl f- P*S" 3? K 2 L'nn 1645- 7 6 .;ME MOIRES CONCERN ANT RicheK&- fut force de 1'admirer. II ]e gouta infiniment , & lui de- manda meme pardon du paffe, attribuant fa fortie.de France au Pere Jofcfh Capiidn, qui e'tpit comme on fait le grand favori de ce Cardinal, (a) {*) L'unique chofe qui Jui deplaifoit en Grotius etoit fa roideur, & qu'il ne vouloit pas etre fouple aupres de lui, comme il fouhaitoit que tout le monde fut (b) , mais Oxenftierna le lui avoit expreflement defendu. Quoi- qu'il en foit , le caraftere dont il etoit revetu n'empecha pas fes ennemis , meme ceux d'entre fes Compatriotes , de lui porter de terns en terns des coups fourres & de lui fufciter des chicanes (c). Cependant Oxenftierna le foutint toujours de fon autorke & cherit en lui la droiture & la probite qui lui etoient naturelles. Enfin apres la mort (f) du Cardinal, le Chancelier Oxenftierna , n'a'ians plus le meme credit aupres de Cbrijline , qui 1'annee auparavant avoit com- mence a regner de fon Chef (j), fouffrit, que Ton accordat a Mr. Grotius le (a) V. Manes Grotii p. 370 f 377. (b) Pufend. /. c. . 78. Wicquti. /. c. T. II. p. 20 & 21. . (0 Man. Grot. /. c. p. 375. Ckri 'flint pcen. 215. not. item la fuite de 1'hift. de Mezerai r. I. p^37S- 37>- &T II. p. tgl. Jl. p- *;s- Stc. . (3) Tom. IT. p. i2< &c- (4) Loccen. hift. Sued. Libr. VII. p. 731 item Brenr.eri Thef. num. pa?. Utf. & Ltabntr: Sam- 1. A- J7J8- ^S- *c. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 77 le rappel qu'il avoit lui - mSme demande (*) & qu'on lui fubftituzU en quali- L>an te de Refident un nomme Duncan , EcofTois d'origine, qui fous le nom de l645 ' Cerifante (f) avoit fait d'aflez bonnes habitudes a la Cour de Stockholm pour " faire rappeller Grotius, en quoi il reuflit. Cerifante plus propre cependant pour le theatre que pour les affaires , quitta fon pofte & partit de la Cour -de France Ji J'infcii de la Reine fa Maitrefle, allant chercher fortune ail- leurs (a). Pour (a) Mem. de Wicquef. p. 214. Ne"goc: rifante lit. C. Nemeitz. Fern. Ged. P. V. p~ Seer, de Weftpbal.T. II. p. 67. Oeuvresde 151. &c. Segrais T. l.j. 48- Bayle, Diftion. art. Ce". Mr. Grotiuslz fdlicita la deflus parcette belle lettre Scribe de Paris le T * Janvier 1645 , 1) quoiqu'il fe foit me"pris e:i la fe"licitant fur fon couronnement, qui ne fe fit que 1'an 1650. SereniJJlma ac PotentiffimaRegina,Domina clementijjlma. Per tot maria ac terras famct hue venit de corona regia impojita Augufto Capiti Majejtatis Tua mart Majorum in Jig- ,, num confolidati regiminis cum jure regnandi. Sit hoc Majeflati Tuce T-egnoque feiixfor- ,, tunatumque .' Si tot coronas ex lauru imponerentur Majeflati Tux, quot non dicam vi8o- rias, fed iiluftres vil orias obtinuit, non ejfet locus ubi ponerentur. Duas adbuc fperamuz videre aut audiri , alteram ex myrto, alter am ex oliva: nan ultima, id eft coelejtis , qttam ,, divina bonitas Imitatrici fu& largietur, Jicut Majeflati Tiue nunquam veniet nimis cito , ita, quamquam diutij/ime dilata , nunquam non nimis cito populis imperil Maj. Tug: qui- bus permittere delet Majeflas Tua, ut bac Una in re vota faciant Majejtatis Tux votif f , contraria. Etrum vota f Ego Serenifflma ac Potentifflma Regina, Domina clemt ntijjlma fubjigno , utpote Auguflce Majeflatis Tux oledientijjimus fubditus H. GROTIUS. (*) A fon arrive a Stockholm il en fit fes remercimens a Oxenjlierna , qui e*tokalors abfent, dans fa Lettre du 25 Juin 1645. (2) oil il dit,, Seneficiis fummis Excellentias Vejlres in me f boc acctj/lt , quod adjutus Ejus diplomate feliciter Stockholmiam per- vent". Ces deux grands perfonnages s'entraimoient tendrement. Grotius crit a foa ami Auberi du Maurier (3),, Oxenftiernae amicit id me fpeciojiorem quam ipfa Legations, , t cenfeo & autre part : Oxenftierna me in umbra literaria delitefcentem in lucem refque magnas vult producer e. Ego vero nihil niagis metuo quam, ne opera mea tanti viri con* cepta de me Jpei minus rejpondeat". On s'apperijut enfiute que Mr. Groiius fe laflbit Ue la vie genarite des Miniftres & des Courtifans. II dit a fon ami du Maurier: (4) Aula me natum faftumque baud effe. (j) Deux- ans auparavant Mr. Grotius lui-meme avoit ^crit une lettre bOxenftier~ na en faveur de ce CMfante. Lavoici,,: (5) Serizantius Callus homo nobilis, prxterea, eruditus mibique commendatus a inultis amicis meis , etiam ab illuftribus Suedis qui bic i, funt , & fuper hoc operibus etiam Juis i qua fcripfet oratione vinfta &foluta, magno fpi- ?> ritu , nee minor i ingenio, cum Suediam velit petere , f ex armorum Suedicorum commi- ,, litio , majus Jtbi quam aliunde decus fperet, dignus inibi vifus efl quern notifies fublimita- ,, tis Tuce traderem. dab. Lutetia d. i\ Febr. 1643. Mr. drnauld, Abbe de St. Nicolas, Mi- (i) tircc de Palmsktildiant. num. 187- & 161. {*) Lettre en Mfc. tiieedela Bib. d'OxtnJiitr- (4) GrttH Epift. lat. num. 77. isa. (s) T|tce d la iiibl $Qxinjnent, esfenti- S'etant embarque il fut furpris par une violente tempete, qui le jetta fur :ns dans ] es c ^tes de PruJJe , d'ou il fe rendit par un mauvais terns & dans une voi- 5?mo S umt7ture fort incommode, a Roflock. II y arriva fort malade le 17. d'Aout, & le Medecin Stockman n'en concevant pas de bonnes efperances , il fit venir le lendemain aupres de lui Mr. le Dofteur Quiftorpius , Miniftre Luthe'- rien , qui dans fa lettre ecrite la veille de la St. Michel en 1 645. au Do6leur Calovius , afTure entre autres circonftances , que Mr. Grotius mourut dans de vrais fentimens d'un bon Chretien de 1'Eglife Proteftante. (*). Au phc (a) Bayle /. c. art. Grotius lit. H. Prae- fat. Oper. Grotii. Manes Grotii p. 474 fc? 475. Auberi Mim. p. 359. M^nagiana T. 11. p. 321. Bayle 1. c. lit. H. Holberg Pa- ralleles des Dames Tom. II. p. 207. (fe) Mim. de Hollande p. 359. M^nagia- na T. II. p. 321. Bayle /. c. lit. H. item Holberg paralleles des Dames Tom. II. pag. 207. (c) Manes Grotii pag. 476. fiptf. Mr. Koehler fe mfyrend en ne lui dormant que treize cent ecus en cuivre v. fes Muntz-Bel. Tom. V. p. 147. Gundling lui donne douze mille Ducats v.fes Difcoursjur les Sciences Tome I. p. 1150. ,, Miniftre de France a Rome dit de lui dans fes Negotiations : (Tom. V. p. 342. not.) Serizantes ^toit ne~ dans la Religion Proteftante : mais aiant formii le deflein d'em- brairer la Religion Catholique, il quitta le fervice de Suede & fit fon abjuration a Rome en 1647. Comme il &oit fans fortune, on lui donna 1'emploi de fuivre Mr. le Due de Guife a Naples en qualit^ de ReTident du Roi de France , oil il eut quelques mortifications, comme on le peut voir 1. c. pag. 343. 349. 397 &c ". V dit entre autres chofes:,, ^ccejffi, propemodum in agone virum cnnftitu* turn ojfendii compellavi, f , me nibil maluiffe, qffirmavi, quam ut mibi cum ipfo inso- lumi fermones fociare licuijfet. Regerit ille : Ita Deo vifum eft. Per go , ut ad beatam emigrcmionemfi cmponat, peccatgrem ft ognofcat, Juper commijja doleat, moneo. Cum- CHRISTINE REINE DE SUEDE. 79 Aurefte, on a remarque, que Grotius reflembloit fort au Grand Gufta- L'an ve-Adol-phe tant de vifage , que par la taille & la forme du corps. L'Au- I 11 / > . i ~ * Homme incomparable, dans la lettre qu'elle ecrivit a fa veuve, qui de- voit iui envo'ier les Livres & les Manufcrits de feu fon Mari (*). On 1'in- fereici, quoique hors de Tordre chronologique , accompagnee, dans les notes, du commentaires , que le favant Mr. Mufaus a faits la-defTus. jul IVJ- Adame. jTai apprh de votre Jettre du\6 Juilkt^ comme quoi - mon Ambajjadeur a execute les ordres que je hi avois donne toucbant les Livres de feu Monfaur Grotius, votre mari; gjp que non-obftant les offreS) que d^autres avoient faties 3 pour s'en rendre pojJeffeurS) vous avez eu plus de confederation pour mes defirs, que pour les wantages 3 que Ton vous faifoit efperer de ce cute-la. jTa- voue, que dans le plaifir > que je prens a la letture des bons Au- teurSi jefuis tellement amoureufe des Merits de Monfaur Grotius, que je ne rrfejlimeroispas content l e, Jljeme voiois decbue de Tefpe- rance de les ajjbcier a ma Bibliotbtyue ',(}*) Mon AmbaJJadeur vous peut (0) In Prtzfat. ad Jo. Paulini Olivekranfii Tdbulas in Grotium de J. B. ? P. pag. 3. 4. f 5. ,, que inter loquendum, Publicani peccatorem fe fatentis , f ut Dens fui mifereretur pre- ,, cantis , meminiQem , refpondit. Ego tile Jum Publicanus .' Progredior , ad Cbriftum , extra quern nulla eft falus , ipfum remitto, fubjicit ille: Infolo Chrifto omnisfpes mea eft , , repofita. Cette lettre fe voit en entier dans les Manes Grotii, comme aufli dans la Bi- bliotheque de Colomies (i) qui dit qu'il ne paroit pas par cette lettre que Grotius foit more dans la Religion Catholique-Romaine . Le r.e'cit que Mr. Menage en fait eft done peu conforme a la ve"rit, & c'eft en vain que le Pere Pe'tau dit la Mefle pour le re- pos de Tame de Grotius, comme s'il ^toit mort dans la Religion des Catholiques (2). (*) Palmskold remarque dans fes Extraits , que la Veuve de Mr. Grotius regut Tan 1650. un prefent de trois mille ecus de Cbriftine pour 1'Hiftoire des Goths compofe'e & traduite par feu fon Mari. II y a deux de fes lettres ^crites de Paris a Mr. Schmalc- kius, f^cr^taire de la Reine, le ;* Juill. 1636 & le 26' De"c. 1637 oil il dit (3) Quod mibi a publicis negotiis fubcejivi eft temporis , id rerum Suedicarum antiquitatibus inqui- ,, rendis injumo fc : (|) O Reginam in Seculi ornamentum natam , quce laffatos late excurrentis regni nego- tiis Spiritus , non vanarum cupidinum laxamentis , fed bonorum librorum lettione reficere conjuevijfet : boc pretiofo labors otiafua condens, bis Itetata deliciofis mentis beroiciz ntt- trimentis .' interim quam felices funt Grotiani ingenii partus, quorum amore tanta Regi- ,, na exarjit ; fe? quos per legatum procata eft ? qua nullus mortaliiim fapienkius ^f incor- ruptius , de Authorum merito & librorum valore judicium tulerit. (i) Pag. 48Z & 483 & Colomies p. iff. confr. Gruberi Epift. Leibnitz. T. II. p (i)Mina S iana T-II. p-sti- Mem.d'-4$ iltfy auroit run en monpouvoir que je rfcmploiaffede bon cceur pour cet effdt (f). Jugez de la 5 que vofys ne fauriez mettre fes beaux monuments P r cliques entre des mains , dont ih fo'ient mieux refus ? trait^s^ que les miennes; p puifque la vie de leur Auteur trfa ete fiutile^ ne fouffrez pas que fa mort me prive entierement des fruits de fes illuftres peines (j). J'entens^ qtfavec les Livres^ que d'autres ont faits> vous me fajjiez tenir tousfes Memoir es Manufcrits s? Extraits, fuivant la promejfe que vous me fait es dans votre lettre. Vous ne me fauriez jamah mieux temoigner votre bonne volonte ^ qu* en ce rencontre > &fai> Dieu merci, dequoile reconnoitre ^ & vous en recompenfer ; (S) Ainfi que mon Ambaffadeur vous donnera a entendre plus particuliere- menty auquel me remcttant > je prie Dieu> qtftt vousmaintienne en fa faint e grace. (*) Sitfficit Grotio adfcma immortalitatem , quod Auguftiffima Hue Seculi nojlri He- r oina , magnified de ejus eruditions , editifqtie ingenii Monumentis Jenferit. Hcec enim gloriojiflima Princeps, cum futures Jit erudite pofteritatis miraculum, omnes quosprobat, iaudat f protegit , Jimul mori vetabit , &p per immenfos temporum orbes , aternaturce face gloria fidere colluftratos, circumfcret: in quam nibilcafuum injuriis licebit. Tametji enim liter 'i . .' *"'" A quoi on pourroit ajouter: Et cuiplus Leges deberent reflafequenti: Mais continue cet Auteur, qui eft-ce qui n'apas fes ennemis? Grotius*. Voit dent quelque chofe centre le changement arrive en 1618. quoique le tout ne touchatque des points indifferens, de la Religion: les Ceremonies en ai'ant etc de tout terns regardees , comme le lien de la devotion dans le Culte divin. Et certes, il ne faut pas douter, que fl cethomme incompa- rable avoit vecu dans le terns des anciennes Republiques de la Grece & de Rome 9 on ne lui eut drefle des ftatues pour tranfmettre a la Pofterite des marques d'eftime & de reconnouTance envers lui & rendre par la juflice a fa vertu & a fon merite. Voici 1'Kpitaphe que lui-meme s'etoit faite (ft). Grotius hie Hugo efl Batavum Captivus 5* Exul (*), Legatus Rfgni, SuedizMagna, tui (f). Nous (a) Aitzema J. *. ad arm. 1645. pag. 89. (fc) V. Palmskold Epijl. Grotii fol. 915. genius. Chriftinae Magnae Cognomen, quod immenfa meritorum gloria inter Reginaspro- frium fecit, literatorum turba afferet, & non ingrata pofteritas vindicabit. Dignum vero beroicce Tuce, o Chriltina Magna, virtutis, maximorum Principum imitations e- 3 , xemplum, quanta pauciores imitabuntur 9 vel imitari poterunt , tanto gloriojlus omnibus ap- parebit, 6f religiojius ab obnoxiis mufis ore calamoque celebrabitur : quern fidei f obfe~ quii conjtgnandis monumentis accinttum, Ji atramentum defecerit, tingent infanguine. (*) Nous mettrons encore ici Hugonis Grotii Scazontes de fuo Careers ad Ramoldmn Hogerbetium part cuftodice addiQum : Ouos Matris alvus Careers edit in lucem : Queis Corpus Minimum more Carceris vincit : Qnos morte fim&os Terra Career exfpe&at : Nunquam nimis timere Carcerem debent. ({) Sur une M^daille que nous avons dans I'Hiftoire M&allique de la Udpublique de Hollander Hugo Grotius eft appell^ le Pbenixde la Patrie:V Oracle de Delft: leGrani Efprit: la Lumiere qui eclairs la Tens. (i). Mfm (i) Vigneul Marvillt Melanges hift, T, III. p- ?4. Xothler Muati-Bcl. T. V. p. JJ4 Tome /. L MEMOIRES CONCERNANT L'an Nous avons dit ci-deflus, qu'apres la mort du Felt-Marechal Sanef\ le I6 45- Comte Leonard Torftenfon fut nomine G^neralilTime de 1'Armee Suedoife eri re comte AttsmagM. Afin qu'il put acquerir de I'autorite & du credit a 1'emree de * T A fte ? fon Ton Generalat (a) , on lui donna de bonnes troupes & beaucoup d'argent ir e d3ns (*). II trouva au commencement de grandes difh'cultes a mettre les chofes If m) rapporte de lui une maxime , qu'il a oui dire a une perfonne de qualite , a laquelle ce Connetable avoit dit: qu'zV rfy a rien de-plus temeraire que de hazarder une batailk, vfi qu'onpeut la perdre par mile cas imprevus, lors meme qu'on a exaftement pris toutes les mejures q*e la -prudence mllitane la plus confommee peut fuggerer* Void la lettre que ia Heine ecrivit a Torftenfon en lui permettant de quitter le eommandement de i'Armee. > ' : .- ^ - v jT/alborne Htigt abrade Herr Noble & tres-honore Mr. le Felt- " Felt Marftbalk. Eburuwal marechal. Quoique j'eufle fort fou* iag bade bogt qftundat, at Edre ^ ^ e votre ^ ^ A P ermis Irafter had? tfter latit FJsr nt ^e garderle eommandement des trou- krajter haaeejter iatitaer,at & de continuer ^ poufrer ^ COntmuera knget , OCb utjora goureufement, jufqu'a la fin le grand detta wafendet) fom nu en rum ouvrage, que le bon Dieu a beni, tid<> formedelft Ederforfichtige par le pafle, de progres fi heureux (mdwt och Jlora valeur i med & merveilleux, en fe fervantpour faflore,lyckeligeochmiraculeufe cela de votre fae conduite d de , Drovrefor 'bar waritafdenMztte votre valeur extraordinaire : pr ogieyer oar warn aj aen aogjte moins ^ uvant - u er tant par vos combleradf, Men medaniagnog- pr o p reslettre S> quell rapport lautres famt bar kunat ddmajawdl af perfonnes, dans quel etat pitoiable Edre skrifwelfer 3 fafom andras les grands travaux que vous avez berattelfer 3 bwad ynkeligit til- fupportes dans le fervice du feu Sei- (land, de flora travalier.>utjland- S neur m J Pere, auffi bien que dans ne uti minfabl. Herrfaders , mm le mie ? * celu ? d r e la ? atne ' vous f r..j T jr * n. i f ont a la fin reduit: je*ne puis me ccbfadernesLandfensHenfl,baf- dif nfer plus }o n g tems de ^ous ac- wa numera bracbt Eder uti 9 Ja cor d er la demiffion que vous m'avez bafwer iag fdrdenne gang , icke tant demande'e, & je vous 1'accorde Idngre kunnat neka Eder den comme a une perfonne quipbuvoity ions: ft begierde dimiflion; ocbfa- pretendre de bon droit & par de ju- fomden dar med bogjle ska/ ocb fte , s raifons,& a qaidle ne pouvoit fir dar til Mr kunnat Kratende- q" mjuften J ent etre plus ^"^ jog aar m nar Kunnat pratenae re f u ^ e . j e vous env oie done Z,*/- ra>ocbbwdkenutamnjujliceidet- H ~^ m avec cette demiffion pleine ta ei bade kunnat utjlas ; ddrfore & entiere & une refolution fur tous pa det at J bdrmed skulle bene- les points qu'ii a eu a produire en ficeras >bafwer iag affardatUil- public. Prefumant que le tout fera lieftrom til Eder med Eder ///- kom ex* (V) V. Sa lettre a lui du XI. May. 1646 () Dans Jen Diftion. lift. art. Timoleon iflfwPalmsk61d. voiezfeslouanges rfawBoe- lit. I. item Pufend, /. c. Libr, XX* 5. &C, cleri btft, belli S. D. p. 321. gV. L 2 MEMOIRES CONCERNANT L'an. 1646. komlige dimiflion ocbrefolutionpa alle de faker ^ban in publicis baf- wer baft at andraga : Will for- moda at alt til Edert contente- ment skall wara skiedt : detta bref bafwer iag fogat darbos til en nadig tackfdgelfe for de lang- lige<> trogne ocbflitige tienfterfom of Eder bewifte are; ocb onskar af hiertat at den bog ft e tdcktes forbielpa Eder medgodt till/land hem i fddernejlandet igen , oeb gifwa Eder denftyrckan at kunna adfiftera waremedEdra Con/ilia; Efter fom iag for minperfonbdr til Eder det fortroende at J uti deffe bejwdrlige tider icke warda mig undfallandes ,/a mycket Edra kr after det Eder til fat a ^ me dan iag lefwer i denfarboppning , at de naderfom Eder afminfablige Herr fader i jamangfallig mat- to bewifte tiro> dnnu ifafrhkt ininne tiro , at de Eder skola pa- minna den plicbt J migskyldige are, emedan Gudfa bar skickat at iag den dr^/om numera endaft lefwer efter bans dod , bwilken y are obligerade at bewifa Eder skjldige tro ocb tackfambet ^bwar wed y obligera mig at continuera emot Eder den nadfom J alltid df min Herr fader niutit bafwer^ ecb bela werlden at convincera- i den fat fade opinion om Eder^ fom den tbcr bafwer af begynnelfen bar a fold efter at trada den rtitta, 'ecbfanna^docbaffa trampade wti- fen til en folide och ren dygd. Jag typas at dm admonition dr bos Eder expedie fc votre contentement , fai voulu y joindre cette lettre de ma main pour vous remercier gracieufe* ment des longs , fideles & affidus fervices que vous m'avez rendus, fouhaitant de bon coeur que le Tout- puiflant veuille vous ramener heu- reufement dans la Patrie & vous ao corder des forces fuffifantes pour affi- fler nos confeils des votres , parce- que j'ai cette confiance en vous , que vous ne voudriez pas vous en difpen- fer dans des conjonfturesfidelicates, autant que votre fame le pourra per- mettre. J'efpere que les graces , que feu le Seigneur mon Pere a repandues fi abondamment fur vous , auront fait fur votre cteur de fi fortes im- preffions , qu'elles vous feront reflbu- venir de votre devoir envers moi, puifque Dieu a voulu, qu'apres la mort je fufle Tunique a qui vous fus- fiez oblige de temoigner votre fidelf- te & votre gratitude. C'eft auffi ce qui me portera a vous continuer la grace & les bienfaits du Roi Mon Pere , & a conlirmer tout le monde dans la bonne opinion qu'il a con^ue de vous , que vous avez de tout terns tache de marcher dans le bon & fe vrai fentier , quoique fi peu batu , db la vertu pure & folide. Je crois que vous n'avez. pas befoin de cette re^ montrance , connoiflant deja par vous-meme lajuflice&l'importance de tout ce qu'elle renferme. Elle ne fera pourtant pas fans fruit, & vous lui donnerez dans votre coeur la- place que tout honnete Suedtii ne. pourroit lui refufer. Quant CHRISTINA RE I NE BE SUEDE. 85 "Eder bfwerflodig , fa font den dct wal tiUfdrende bafwer betdnkt : wet doch lickwdl at loan icke skal lopa utanfrucbt of, utan winna bos Eder detrumfom bennesliker fios bwar tirlig fovensk man finnan- des warder', hwad ang&r de foli- citationer font Lillieftrom bafwer baft pa Edra wtignar at andra- ga , bafwer lag mdftedeh upsku- tit till Edre lychelige bemkomjl^ bwilken lag af biertat onskar Jnart bdnda Det Jom lag hos mtg bafwer rejolwerat , bo f pas lag shall gibra Eder godt contente- went : bwad bdrutinnan for rin- ga skedt dr , del shall om Gud will) drfdttias wld Eder hem- komft 3 med meliorerande of Eder condition ocbftand, faocb andre marckelige beneficier ocb all par- ticular nades ocb eftimes betyg- mng uti alia fore fallande occa- Jioner. Jag for mm Perfon be- gierer at j wille frambdrda uti den under danige devotion fom iag tiltror Eder bafwafor mm tienfc ocb baft a* ocb befaller Eder bar \j * +j med i then bb'gftas milda bekierm ocb forblifwer Eder altjd n&dige Quant aux follicitatioifs , dont Ullieftrom a eu commiffion de votre part en particulier, j'ai differe 1'efFet de la plupart jufqu^a votre heureufe arrive'e,quej 'attends avec impatien- ce. J'efpiere que ce que j'ai refolu en moi-meme , Vous contentera. Ce qu'il y manquera , fera ajoute a Vo- tre retour par rammelioration de Votre condition & e'tat , com me auffi par d'autres bienfaits eclatants & par le temoignage de mon eftime toute particuliere pour vous , quand les occafions s'en prefenteront. Pour moi je ne vous demande que de eon- tinuer dans le devourment tres-hum- ble que vous avez eu jufques icipour mon fervice & pour mes interets: priant au refle Je Tout-puilTant qu'ii vous ait dans fa fainte garde. Je fuis toujours Votre gracieulc 4 Stockholm ct IQ.. Mai CHRISTINE. Stockholm den May 1646. Cbriftina.. Cette meme annde Chrlftine envoi'a le Comte Magnwde k Gardie en Am- iaflade a la Cour de France & le chargea d'une lettre au Prince de CondL pour . . c . ff. T o i r- j la lui raire parvenir en pallant. Les armes de frame avoient eu dans ce "tems-la en Allemagne un fucces fort inegal & le Vicomte de Turenne avoit etc rr~ . * i n * T i -n i /-. 7 / i- ailez maltraite pres de Mwgentbeimi mais le Prince aeConde laiant joint avec un renfort conftderable , J'aida a s'en venger fur 1'armee de Bavtere. Us de- meurerent Maitres du champ de bataille pres de Nort!ingen 9 &c'eft la-deffus que la Keine ecrivit cette belle lettre de felicitation au Prince d$ Conde. L Hon- I/au 1646, . ticuhere de chri/iine P ou . r Ie _ pri P: 8(5 M E M O I R E S C ON C E R N A N T Monfteur mon Coufin. DTefperant pas que Monfteur le Comte de la Gardie, mon Ambaffadeur ^ vouspuiffe voir, fai cru que ce ri* etoit pas affl'z de me remettre au compliment d*un Gentilhomme , qusje lui ai command^ de vous envoier , Ji je ne vous temoignois de ma main la haute ejlime que fai pour une vertu auffi extraordinai- re que la Fotre. Je Fous ajjiire que mes propres fucces ne ttfont jamais toucbe davantage que vos belles viftoires. Et quand Fbus n'auriezfait autre chofe que de v anger avec tant de valeur les ma- nes de mes Soldats a Nortlingen, jeferois obligee d? avoir desfenti- mens tous particuliers pour votre gloire. J'efperois^ Monfieur^ la continuation de ces grands exploits en Allemagne , p mes propres inter ets me faifoient fort foubaiter que vous paffafflez k Rhin enco- re une fois, pour achever d**abbattre le cceur de nos ennemis. Mah quelque part qtfilplaife au Roi mon Frere d^empMer vos armes^je vous temoignerai ton jours par la jme que je repevrai de vos projpe- rites 3 que jefuis> Monfieur mon Coufln % Vttre tres-ajfettionnee Coufint CHRISTINE. CbrlJKm regardoit toujours ce Prince comme fon He'ros, peut-6tre dans le gout de 1'ancienne Chevalerie , qui , au milieu du fiecle paffe , etoit en- core aflez a la mode. Quoiqu'il en foit, elle avoit pour lui une eflime par- ticuliere , a caufe de fon intrepidite & de fes autres grandes qualitds. El- le ne lui refufa pas meme , apres fa mort les louanges qu'elle cro'ioit dues a fon merite (*) malgre les pointilles qu'il y avoit cue's en 1654. entre elle& Jui a Bruxelles , fur le Ceremonial. C'etoit dans le terns que Chriftme s'etoit declaree pour YEfpagne , qu'elle vouloit menager , comme faifant alors fon fejour dans les Pa'is-Bas Elpagnols. Le Prince de Conde s'y etoit auffi retire en portant les armes contre la France. Mais la Reine s'accommoda a la fin avec lui comme nous le verrons ci-apres. En attendant on ne trouvera pas fuperflu qu'on ajoute ici la belle reponfe (*) que le Prince fit a fa lettre. MADAME, Je dois a la bonte de votre Majefle Tobligation des bons fentimens qu'elle (c) Ellefe trouve dans le Rtcueil de Harangue* pag. 106. 5Sk! : !!^ > ^^^J^^^ l @^^^^5^^5^^<^5<^?<^I<'^5<^J< x < > ^i< < ^< N ^<^^^fJ ( J^^^J' v ^< ^i< ^2< *&i<^&vZ&Z^g^;:^&J!^3^;Sg\>$^-S&v^ <^\>^\ (*) Vo'icz la lettre de Cbrijline a Madli. de Scudsri du 30 Sept. 1687. ci-deflbu*. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 6? a pour moi. I-es progres que j'ai faits en Memagne font bien plus L ' ai juftement dus au bonheur des Armes du Roi & des votres , (*) qu'aux * 6 * 6 ' effets de mon courage. II n'appartient qu'a votre Getierofite , Mada- me , de faire palter des actions mediocres pour des vicloires illuftres. Je n'en dois faire eftime que parle prix que V. M. leur a voulu donner. ^ Jl eft vrai que les conquetesdu grand Guftaw, votre Pere, rn'y devoient faire efperer de plus fameux fucces. Mais comme il etoit ne pour etre r inimitable, & qu'il efk falu le reflufciter pour achever lui-meme Jes grands ouvrages qu'il avoit commences: il ne faut pas s'aonner que je n'a'ie pu faire ce qu'il cut fait. Je me contente d'avoir vange devant Nortlingen une injure que la fortune avoit faite a fes armes apres fa mort , y , qu'elle n'eut ofe entreprendre pendant fa vie. Je confefle , Madame , 3, que pour la reparer j'y ai combattu dans les interets de fa gloire & de la v6tre , afin que fes Ennemis , fur lefquels il avoit gagne tant de bataik 3, les , ne ie puflcnt vanter d'en avoir emporte fur vous.- Je me fuffe e- ftime meme trop heureux de finir ma vie dans un fi glorieux emploi , fi les defleins & les affaires du Roi Jui euflent permis de me le continuer. Mais fok que fbn fervice & le votre m'obligent de porter les armes au dela ou en de^a du Rhin , je n'aurai jamais de plus forte paflion que de temoigner, en toutes occafions, a Votre Majefte, que je fuis &c. Pour ce qui eft dit dans ces deux lettres de la premiere Bataille de Nort- eriy nous avons remarque ci-deffus que les Generaux AUemans (f) force- rent pour ainfi dire (aj Guftave Horn a hazarder la bataille par leurs repro- ches importuns , voulant taire pafler la prudence de ce Chef , pour une ef- pece delachete. La nouvelle de cette perte accabla de deplaifir & d'in- quietude le Chancelier Oxenjiierna. On lui entendit dire enfuite plus d'une fois, qu'elle lui avoit fait pafler une feconde nuit dans Tinlbmnie en Alk- wiagne, a'iant pafle ainfi la nuit du jour qu'il avoit appris la mort de Gufla- . (J.) & qu'une troifieme nouvelle , pareille a 1'une ou a I'autredet VT/ meat il foti- tint pour-- tant les af. (a) Pufend. de R.S.Libr. VI. fi. 73*75. Loccen. Hifl. Suec. pag. 640. (*) V. CofteHiftoire du Prince de Conde Liv. I. pag. 77. Nous mettrons ici, ce que 1'Auteur de I'hiftoire du Prince de Turenne dit au fujet de ces deux lettres : (Tom. 1. p. 136.) Cbriftine de Suede ^crivit une lettre de fa propre main au Due d'E>iguien pour lui temoigner la joiie qu'elle reflentoit de ce qu'il avoit effac; par fa vifloire 1'affront que les Suedois avoient autrefois re^u au meme lieu. Quoique le Due d'Enguien eut don- ne'e d'illuftres marques de fon courage dans ce combat, il reconnutgt^n^reufement dans une lettre qu'il crivit a la Reine, que la plus grande partie de la vktoire ^toit due a ; la valeur & a la conduite du Vicomte de Turenne. C'efl pourtant ce que 1'on ne re- raarquera pas dans cette lettre du Prince de Conde, a Cbrijline. (f) Dans la lettre cite"e ci-deiTus de Buder p, 617. il eft dit: que le Due Bernard de' Weimar avoit rifqu cette bataille pour abattre par la le pouvoir exorbitant du Chance- lier Qxenftierm, ou perir lui-meme dans la Bataille. (4) Autrement ce Grand Chancelier ^toit d'un temperament fi heureux, que quoi- ' de la direction des plus iniportantes affaires, il ne s' que de combler de faveurs & de carefles la perfonne de fon Ambafladeur, & que fans doute la France tireroit de laun notable avantage, en ce que fi quelqu'un dorenavant avoit part dans lesCon- feils de cette Princefle , il etoit probable , que ce feroit plutot de la Gardie qu'aucun autre, qu'ainfi la France s'acquereroit un puiflant ami:& que fila Reine fe refervoit 1'entier gouvernement de fon Roiaume , ce feroit un motif pour augmenter fon amitie pour la France, voiant qu'on auroit de- fere a fon choix & a fa bienveillance pour le Comte (*). Mr. Chanut n'a- voit pas befoin d'ufer de tant de precaution a 1'egard de la perfonne de I'Ambaffadeur qui naturellement etoit fort affeclionne aux interets de la France, de 1'aveu meme de Chriftine (c). Aufli ne manqua-t-on pas a fon arrivee a la Cour de France de lui donner le bal & la Comedie , de grands repas & toutes fortes de divertiflemens (d). Ce font les propres termes de Madame de Motteville, (e). Dame d'honneur de la Reine de France. El* le fait un ample recit de la reception du Comte (/) & dit entre autres cho- fes:,, La Reine re^ut alors un Ambafladeur extraordinaire de la Reine de Suede, qui nevenoit apparemmentque pour travailler a 1'union des deux Cou- (a) Pufend. I. c. Libr. VI. J. 75-77. f fon Hifl. de Suede pag. 319. 321. 324. 0) Chanut Mem. T. I. p. 28. fcf 130. Pu- fend. de R. S. Libr. XV11L $. 179. (c) Chanut le dit lui-mSme I. c. pag. 373. (d) Ntgociat. Seer. T. III. pan;. 298 ? 366. (e) Mi-moires de la Reine de France Tom. I- P- 387-390. (/) Cette reception fe fit le 13. Sept. 1646. lit pour fe repofer, qu'il s'endormoit tranquillement, jufqu'a 1'heure qu'il trouvoitbon qu'on 1'tveillat pour reprendre le fil des affaires (i). (*) Le P. Bougeant dit: (2) le Comte de la Gardie Ambafladeur de Suede dtoit un Seig- neur d'un m^rite diftingue", qui plaifoit beaucoup a la Cour & que la Cour s'appliquoit a manager, tant pour plaire a fa MaitrefTe, qui avoit bien donn^ d connoitre qu'elle s'y attendoit, que pour efTa'ier de le gagner lui-meine, y a'iant lieu de croire qu'il fe- roit un jour le plus puiflant d fa Cour On ne peut rien ajouter a la fubtilite 1 des raifonnemens que le Cardinal faifoit a ce Seigneur pour lui perfuader, qu'il faloit que la Suede fe relachat de fes pr^tenfions & pour Tengager a en perfuader lui-meme la Reine Cbrijline &c. (0 JMfc 4 i. C. livi. V, fi. 73- 332- &c. & CHRISTINE REINE DE SUEDE. {$ Conronnes. Celui , que cette Reine envoi'a , s'appelloit le Comte de la L '** ,, Gardie. II etoit fils du Connetable de Suede. Son ai'eul etoit Francois, a ce qu'il fe difoit, d'aflez mediocre naiflance (*). II etoit bien fait: ii " avoit la mine haute & reflembloit a un favori (f). II parloit de fa Rei- ne en des termes paflionnes & fi refpeftueux , qu'il etoit facile de le foupgonner de quelque tendrefle plus grande que celle qu'il lui devoitpar la qualite de fujet. II etoit accorde a une Couline de cette Reine qu'elle- meme lui faifoit epoufer (j). Quelques uns ont vouludire," ajouce Madame de Motteville , que fielle edtvoulu fuivre fon inclination, elle 1'au- roit pris pour elle. Mais qu'elle s'etoit vaincue par la force de fa raifon & par la grandeur de fon ame , qui n'avoit pQ foufFrir ce rabaiflement. D'autres difoient qu'elle etoit nee libertine, &qu'etant capable de femet- tre au-defTusde la coutume, elle ne 1'aimoit pas, ouelle ne 1'aimoitplus, puifqu'elle le donnoit a une autre. Quoiqu'il en foit, cet homme parCit aflez digne de la fortune, mais plus propre a plaire qu'a gouverner. De la maniere dont il parloit de la Reine fa Maitrefle, elle n'avoit pas ,, befoin de Miniftre: car elle - meme , quoique tres-jeune, ordonnoitde toutes les affaires. Outre les heures qu'elle donnoit a fes etudes, elle en emploi'ok beaucoup , a ce qu'il difoit , au foin de fon Etat. Elle agis- foit de fa tete , & il afluroit , que fon moindre foin etoit rornement de fa perfonne. De la fa$on qu'il nous la de'peignit, elle n'avoit ni le vifa- 5 , ge , ni la beaute , ni les inclinations d'une Dame. Au lieu de faire ,, mourir d' Amour les hommes, elle les faifoit mourir de honte & dedepit, & fut depuis caufe, que ce grand Philofophe Defcartes perdit la vie de cette forte, parce qu'elle n'avoit pas approuve fa maniere dePhilofophie. Elle ecrivit a la Reine, a Monfieur Oncle du Roi, au Due d'Enguien & aux Miniilres, des lettres, que j'ai vftes, & qui furent admirees par la galanterie des penfe'es, par la beaute du ftile & par la facilite qu'elle te- ,, moignoit avoir a s'exprimer en notre langue, qui lui etoit familiere avec beaucoup d'autres. On lui attribuoit alors toutes les vertus heroi'ques. , On (*) Le P. Maimbourg & Typotius difent la meme chofe. Mais Bayle prouve le con- traireapres Oernbielm. Vo'iez i'art. de la Gardie & Typotius, dans fon Diftionaire Hiftor. & Crit. (i). (f) Mr. le Ct. de Lwnne dcrivit a Ton fujet aux Miniftre de France : (2) il faut di- re a la louange de ce Seigneur que tout a plu de lui. Sa harangue en latin etoit me- fure'e & fon gefte relev^ , &c. 11 y a une Lettre pandgirique que le Sr. Rangouze lui a adrefTtJe dans ce tems-la. (|) Feller rapporte, comme dit par Mr. Leibnitz : (3),, Comitem Magnum de la Gardie Chriftina Regina mire amabat. Ad ejus Sponfam dixit : Eum tibi do , quo ipfa frui non pojjum. Poftea Magno infenfa fatta in odium cjus evexit Schleppenbachium , qui ,, auj'us efl ei contradicere , imo in faciem mendacii inculcure. On a de la peine a a- jouter foi a tout cela. ft) confr. MefTen Scondla, Tom. VI. pag. 31. & 29 J. & Rangaaze Lettres panegir. aux Heros de Mai., du Noyer Lettr. gal. r.ura. 59. peg. 202. la France III. Part. pag. 104. &c. . (2) Du Mont Ne^o:- Secret. T. Ill- p- 62. IZJ- C^) Da Q s ^ on Otiunt Hantver. J. I2tf. Tome I. M *>- n ;, On la mettoit au rang des plus illuftres Femmes de 1'antiquite. Tourer 1646> les plumes etoient emplo'iees a la loner, & on difoit que les hautes fcieiv ces ecoient pour elle ce que r'egtiille & la quenouille font pour notre fexe.. j, La renommee eft une grande caufeufe : elle aime fouvent a pafler les li- mites de la verite : mais cette verite a bien de la force , elle ne laiflfe pas longtems le monde credule abandonne a la tromperie. Quelque terns apres , on connut que les vertus de cette Reine Goihique etoient medio- ^, cres : elle n'avoit alors gueres de refpecl pour les chretiennes , & fi elle pratiquoit les morales, c'etoit plutot par fantaifie, que par fentiment. Mais elle etoit favante a 1'egal des hommes les plus favans, & jtifque-la elle avoit confervee une haute reputation dans fa Cour , parmi fes peu- pies , & dans toute \ y Europe (*). es inte'- Pour rcprendre les affaires de &&, voici ime toute autre fcene que nous OUV re 1'c'tat ou elles etoient alors. Les lettres fuivantes de Chriftine a Mr. Sahius y fervkont de prologue & contribueront a mettre le Ledleur mieus vius Chance- au f^ lierde la Com de Sue' fiTalborne Herr Hof- Canceller. Noble Mr. le Chancelier de fa I a? bafwernozfamt for- Cour - J' ai vil par votre lettre ecri- ^J ** CJ -S / .. 1 T S-^L | J TVT n. t .1 * -, , . 7 r 77 & t*.-av-'ii w i tt x cii/\ > CILIIL* Hfv<3 M**^ wda medjreds handelen avance- Jes O bflacles & les difficultes qui y rat ar-> ocb hw ad binder ocbdif- peuvent furvenir. Te vous remercie fculteter ddruti kunna forefal- gracieufement des foins & des pei- la: betackarmigjordenskull na- nes que vous prennez pour conduire (lelwenfor eder anwande flit ocb C ette , S rande affaire ^ une bonne fin, giorda communication: beder j & de la communication que vous c> ' . /,. .v men faites. Te vous prie auili de wille darutmnan mtet fortrot- ne pas vous ^ ^ ^ de cond . tas 3 tttan J a bdreper Join bar- nuer toujours ce zele que vous aver tils fort far a i den i fiver , fom j temoigne jufqu'ici pour mon fervice bafive alt bdrtil temoignerat for & pour celui de la Couronne. En mig ocb Cronans tienfl y forjd- recompenfe je vous affure, que quand krande Eder , at ebnruwdl kan meme P^fieurs chercheroient pent- 7 o *-j~f + , ri 11 eLre a vous noircir ici , cependant, sto manga tiiafwentijrs Mle . ne ttrai jama / s \ ^ aucu ^ Joka at demgrera Eder , UkwM d eux V ous faile du tort en aucune skal ing aldrig tiUata at nagon maniere : mais au contraire, fi skal kunna skada Eder i nagon Dieu vous fait la grace , de revenir matto ici (*) Quoinue la Reine Chrifline n'ait pas 1'honneur dc plaire a Madams de Motteville, nous nc laiiFerons pas pour cela dc la citer encore dans in fuite. F.lle fe Fera toujours connoitre tcl!e qu'elle elt, c'e(l-a-dire, pr^venue pour fa nation, cainoie fi c& tt'dcoic ricn ou pcu dc chafe que toutcs les aiures en comparaifo'n. CHRISTINE REINE DE SUEDE. matto 5 utan nor Gud bielper E- dermed bdljan 5 ock wdlforrdtta- de faker hem igen , skal lag wal lata i werket paskrna at tag dr och forblifwer Eder alt id med all gunft bewagen. Stockholm den 12. December 1646. ici en bonne fante & avec un bon fucces dans ies Negociations ; Te vous ferai bien connoitre par des effets, que je fuis & demeure toQ- jours votre afft6lionnee a vous fa- vorifer Stockholm ce 12 Decembre 1646. CHRISTINE. P.S. Hwad win ytterfta willia och mening dr^ hafwe j at Je of mit fiub/ica href til Eder Jamteligen. Bar til Eder det wijja fdrtroende at jingen tingltiteEderdarifran mover a-) och rccommenderar E- der harmed fredens avancement pa det bogjla^ dock med den con- dition , at j med EderCollega icke en fot bredd cedere of det Eder i bemelte brefforeskrifwit dr. dngaende de i ooooo Riksda- Jer^fom Gref Magnus bafwer optagit i Paris>drdetintet skedt utan min willia ocb expreffe be- f alining; Eeder forthenskul at j icke mile till at a (fa mycketE- der tiiftar} at bans owdnner im- pune ma calumnieran , medan ban dr belt oskyldig , utan at j bonom forsware fa mycket E- der momlMt dr. Hwad nu E* +f <_> dre privata angel dgenbeter an- gar'y warder GrefGofaF Eder min mening skrifwandes , dar pa lag Apoftille Pour ce qui eft de ma derniere volonte & de mon fentiment de'fi- nitif, Vous n'avez qu'a Ies voirdans mes Jettres publiques que je vous ai adreflees conjointement. Je mets en vous cette entiere confiance, que vous ne vous en laifferez detourner par quoique ce foic , & je vous re r commande tres-expreffement par la prefente 1'avancement de la paix: cependant avec cette condition , que ni vous ni votre Collegue ne vous detourniez en la moindre chofe de ce qui vous a etc ordonne dans mon fusdit refcript. Pour ce qui concerne lescensmil- le ecus que le Comte Magnus (*) a empruntes a Paris , cela ne s'eft pas fait fans ma volonte, ni fans mon ordre expres. Ceft pourquoi je vous prie , autant qu'il dependra de vous, de ne pas fouffrir, que fes ennemis le calomnientimpunement, car il eft tout a fait innocent. Pren- nez done fa de'fenfe autant qu'il vous fera poflible. Pour ce qui regarde vos affaires privees , le Comte Guftave (f) vous en ecrira mon fentiment , a quoi je me rapporte , & je vous re- com- (*) C'tkoit le Comte Magnus Gabriel de la Gardie AmbalTadeur de Suede a la Cour de France. ([) C'<^toit le fils naturel du Roi Gujlave-ddolpbe , dont nous parlerons dans unautre cndroit. M 2 9* MEMOIRES CONCERN A NT L> iag mig ockwil bafwa refer erad<> commande a Dieu. Donne comme ocbbefallcr Eder Gudi. Datum tens leslettres. ut in literis. TjErr HofCanzler. lag bafiver " fatt twdnne Edra skrifwel- fer 5 bwilke mig mycket fdgnat hafwa , ocb medan iag denna gan- gen intet bafiver for tidens kort- bets skill d legenbet ddrpa at fwa- ra ; beder fordenskuld at j pa mi- na wdgnar ocb pa det aldra bog- ftetacke Mons:d' l Avzuxfdr den flora ocb rcmarquable tlenjl , ban mig bar bewjft, ocb giorer min enskyllan pa det flit igafte , at Jag icke denna gangen kanfwara. lag bar fa mycket at giora ,fa at iag icke nog kan skrifwa. lag boppas at ban aldrig Idr twifla om min tacksambet. Med ndfla poft skal iag intet manquera at complimen- tera bonom. Hivad freds traftaten wed- 'kommer , bar iag optdkt Eder Mgge min mening ocb refolution. Poujferer den faken join bon Jig be/I giora later, lag rdds at iag Idr Jafa mycket sknjfa bar bem- ma J'a at iag wdl ma tacka Gad at kunna fa nagorlunda en god fred. J forftan bdttre an iag , quamarduum, guam fubjeftum fortunse regendi cun&a onus. Mera intet for denna gangen , utan iag beder j tvtf/e skrifaa mig Edert rad, om jag skill le kunna benada , utan min preju- dice , Gref Magnus med Benfeid ^" in medan iag maftega det qwitt Monfr. le Chancelier de la Coun J'ai regu deux de vos lettres dont le contenu m'a fait beaucoupde plaifir. Je ne puis pour cette fois y repon- dre comme il faudroit, parce que le terns me manque. C'eft pourquoi je vous prie de remercier de ma part & de la meilleure maniere Monfieur d'dvaux du fervice eflentiel qu'il m'a rendu & de lui faire tres-exprefle- ment'mes excufes, de cequejene puis lui repondre aujourd'hui. ' J'ai tant a faire a prelent, que le terns ne fuffic pas a toutes mes occupa- tions. J'efpere qu'il ne doutera ja- mais de ma reconnoiflance. Je ne manquerai pas par le premier cou- rier de lui faire mes complimens. Touchant les Traittz de paix , je vous ai declare a tous les deux mon fentiment & ma refolution. Pouffez les chofes le mieux , qu'il vous fera poflible. J'apprehende d'avoir ici beaucoup d'occupations , tellemenc que je rendrai graces a Dieu , fi je puis obcenir d'une ou d'autre manie- re une bonne paix. Vous favez mieux que moi combien la charge de gou- verner toutes chofes eft penible & fujette au hazard , quam arduum , qitam fubjeftum fortune regendi cuncta onus. Je n'ai rien de plus a vous mander pour cette fois. Je vous prie feule- mcnt de me donner votre bon con- feil en me difant, fi je puis fans prejudice gratifier le Comte Magnus de Ja Seigneurie de Benefeld, furtout fi je dois la ceder par les Traitez. Je fuis auffi plus aflure'e de liifideJjtc en- vcrs CHRISTINE HEINE DE SUEDE. ined trattateri) och lag or for- jlikrad om bans trobet mot mig mer an om nagon ting t iver/- den. Han wet intet af delta, ocb jag wil icke at ban bailer skal fa wet at for an jag bafhver intagit Eder mening , om det for aJlebande confiderationer kanske: ocb later ingen meniskia fa weta ddraf, men communicerer det Jub fide filentii Comte ^Avaux 5 ocb later Gr^GuftafTon icke bailer fa wet at : harmed Gud befallan des fdrblijwer Eder altid no.- digjle vers moi , que de toute autre chofe du monde. II ne fait rien de cela , & je veux qu'il n'en fache rien , juf- qu'a'ce que j Vie appris votre fenti- ment , fi cela peut fe faire par toutes fortes de considerations. N'en fakes rien favoir a qui que ce fbit : mais communiquez-le aMonfieur d'dvaux fous la foi du filence. Nele decou- vrez-pas non plus a Gujlaffon. Je vous recommende a Dieu , & je de- meure toujours votre tres-gracieufe Stockholm den 13. Febr. 1647. Cbrijlina. H 1 Err HofCanzler. lag skul- le Icke bafwa bemb'dat Eder med denna min skrijwelfe^ddr ic- ke bogjla noden dettaaf migba- de for drat. J wete Eder at pa - mmna , at lag uti nagra Edre skrifwelfer bar formd/t om de i ooooo Riksdaler jom Gref Ma- gnus bafwer optagit uti Paris : ocb oanfedt ban det icke utan min fpeciak bef alining giordt bafwer^ likwdl medan jumman wil falla nagot Jlor , fa at nagra fynas gluncka ddr om Hkafom den skul- le war a Jufficient at arrejlera ocb forhindra de progrejjer ,fom Feltmar skal ken \Vrangel bade kunnat giora fig bopp om 5 dllr ban lamina fiimma bade kunnat blifiva macbtig. Hwad delta nu kan til mit prtejudicio af jig fo- da 5 kunne j latteligen domma , -ij;> fcj^tr;: :,/; -\ V"\i..ij',. w. .-a i_ CHRISTINE. Sx/y^ Ifcv^fcW" c r .k^^iVl^".:; ; ftf.>.x.'.. * . yT . Monfieur le ChancelierdelaCour. Je ne vous incommoderois pas par cette prefente Lettre , fi le befoin le plus preffant ne m'y contraignoit. Vous vous fouviendrez que je vous ai fait mention dansquelques-unesde mesprecedentes, de cent milleecus, . que le Comte Magnus a negocies a Paris. Et quoiqu'il n'ait pas fait ce- la fans un ordre fpecial de ma part , cependant puiique cette fomme , pa- roit trop grande, & que quelques- uns veulent faire entendre, que cec argent fuffifoit pour empecher & ar- reter les progres des enneniis, & que le Felt - Marechal Wrangel auroit pd efperer de le faire , s'il avoit eu cec argent. Vous pouvez juger facile- ment du prejudice que celamepour- roit porter dans les conjon6tures pre- fentes en plus d'une maniere. Jene veux pas vous en convairicre par beaucoup de circonftances , car je fuis affuree, que vous coraprenez L'an. 1(547. M 3 mjeux ME MO IRES CONCE R. N ANT I/an 1647- ty detta kan mig i manga matto itinda tilforfang. lag will ic- ke med manga omjldndigbeter E- der detta perjuadera , ty lag dr nogfamt forfdkrad at j bdttre min meningfurjla , an lag fielf den exprimera kan. ExempJa politica dro Eder alt for wa'/be- kandte , bcb dageliga forfaren- bcten bar nogfamt utwift , buru gldrna man drriperar tie occajio- ner fom kunna tiena I deraskram fom altjd winldgga fig at kunna giora nova imperia odiofa. Hdr finnes ock nagra fom skulk intet manquera i detta fallet , dar? det Gud fdrbiude^ nagon olycka skulk band a af denna orfaken , medan de alia wet a dt Gref Ma- gnus bafkver baft min exprejfe order bdrom , ocb ma j Eder wift forjdkra , at ban det utan den , ocb bogfta noden , tike bade giordt 5 ddr ban pa annat Jdtt bade kunnat Jalvera min reputa-. tion ocb rej'peff. Detta alt bar fororjakat mig at i denna extre- mitet leda til Eder , fafom til den fom i alia tjder nogfamt bar tcmoignerat buru bogl: j bafwe aftundat at ivara funnen ibland dem fom fig med skdl kunna kal- la mine trognafte tienere -, ocb ef- ter jag Eder ddr ibland skattar ; altj a bafkver jag eburu wdl ogdr- na , nu denna gangon tankt at taga om denna Eder trobet ocb affeclion det infalliblefte ocb wif- Jafte prof fom j-kunne gifiva mig, iller lag begdrar af Eder. Ocb pa mieux mes fentimens que je ne puis vous les exprimer. Les excmples po- litiques vous font trop bien connus, & Texperience de tous les jours a aflez fait voir , combien les gens aiment a faifir les occafions qui les accommodent, & a tacher de ren- dre odieux de nouveaux Regnes : No va reddere imperia odiofa. II s'en trou- ye auffi quelques - uns , qui, en cas qu'il arrival quelque matheur de la fusdite chofe , (ce que Dieu veuille ddtourner) : fe prevaudroient de ces raifons , car vous favez que le Comte Magnus a eu mes ordres ex- pres la-deifus , & vous pouvez etre tres - perfuade , qu'il ne I'auroit pas fait fans mes ordres pofitifs& fans ti- ne extreme neceffite, s'il avoit pft fauver d'une autre maniere mon hon- neur & ma reputation. Tout cela me met dans une telleextremite, que je m'addrefTe a vous , comme a un hpmme qui a aflez temoigne de tout terns , combien il defire d'etre du nombre de ceux qui peuvent fe dire avec raifon mes fideles ferviteurs. Puis done que je vous mets de ce nombre , je penfe a prefent , quoique malgre moi , a re^evoir de cette me- me fidelite & affeclion les marques les plus certaines & les plus infailli- bles que vous me ptiifliez jamaisdon- ner, ouqueje puille exiger de vous. Mais pour ne pas vous amufer' par beaucoup de detours , il faut que je vous dife en quoi confide ce que je fouhaite. C'eft, que fans perte du terns , vous aiez en recommendation cette affaire, quevousfailiez en for- CHRISTINE REINE DE SUEDE. pa Jet lag icke matte ballaEder wed manga ambages Idnge oppe, fa ar jag twungen atjtija Eder, at mm begaranjdruti beftar> at j uti tjd willie hafiya Eder den- nafakcn befallad, och ju fa la* ga , at jirmeen bdrigenom icke ma Ijda nagon men , utan at j f$ manga' penmingar pa Eder ere- dit 5 wills upbandla , at denna Jumma til Armeens bebof kundq Juppleras. lag wet nogfamt buru fwart detta skal falla Edcr : men jag ar ock forfakrad) at j mig icke undfallande warde , utan at den* na faksrnes fajl omoijeligbet far ja mijcket mera flimulera den ambition fom j bafive at giora Eder mera och mera om mig meriterad , b til ft erne dan delta ar uti en fa import ant e fak , pa bwilken j icke Idr mig undfalla. J mageje , at iag ddremot intet *allena foker Eder til min nytta at bruka , utan at jag ock Jo- ker Eder ddrbos skdligcn at con- tentera\altfa bar jag redan tdnkt pa me del bw armed jag Ederkun- de jatisfaciera <> ocb flatter dejje twtinne i walet at utwalia bwil- ket Eder beft kan til r,tatto ocb redaft ocb wisfaftjynas: ocb ma- ge j bafwa walet antingen at la- ta Eder dcnna fmnma giorasgod antingen af de penningar Jom- frankriket gifwerjdr mina skepp, eller ock at I at a Eder lefwerera utur fiverige { a manga skeppmd koppar fomj finne skaligt at ndm- na te que 1'Arrnee n'&n fouffre aticun dommage, &. que pour cet efFet, , vous negociiez fur votre propre ere- ' dit autanc d'argent qu'il faudra pour fuppleer a hi dice fomme poui- le be- foin de 1'armcc. Je fais aflez combien de peinevous dohnera cette commiflion. Mais auf- fi fuis-je certaine, qne vous ne me manquerez pas, & que, comme il fembJe prelque y avoir de 1'impofli- bilite a m'aider dans une affaire aufll importante, votre ambition vous y poufTera encore plus fortement , a- fin de vous rendre de plus en plus ra^- commendable aupres de moi par vos fervices. Outre cela , conflderez, que je ne cherche pas a me fervir de vous en cette occurrence uniquement pour mon interet, mais que je fonge auffi a vous recompenfer duement. C'eft pourquoi' j'ai imagine des moiensde pouvoir vous fatisfaire, & je vous en propofe deux differens , pourque vous choifitiiez celui des deux qui vous paroitra le plus promt &le plus fur: c'efl que je vous donnerai une aflignation fur Jes deniers que la Fran- ce me pai'era pour mes vaiffeaux , ou bien que je voqs ferai livrer enSidde . autant de'quintaux de cuivre que vous trouverez bon de me marquer par u- ne lettre. Je vous protefte par tout ce qu'il y a de plus cher & de plus precieux, & aufli fortement qu'on puifTe jamais donner une aflurance , ou 'qiie vous en puifliez exiger une "de moi , que je vous dedommagerai entierement, &que vous n'aurez ja- mais fujec de vous repentir de m'a L'an. 1 6. '.7. voir I, 'an. 1639- na mlg igenom et href, och for- jakrar jag Eder wid alt det join bogt ocb dyrbart ballas bor , ocb Ja bdgt Jom nagon forjdkring nagonfin gioras kan , eller ockj afmig begarer^ at Jag skalbal- la Eder aldeks skadelos , ocb att y aldrig skole bafwa orjak atan- gra den tienft J mig i dettafal- let bewije. Jag wet wift at J nogjamt are forjakrade om min affcttion for Eder : Men J ma- ge w'fi fro 5 at Jag bar igenom fororfakas at wara pa alia me- del betdnkt 3 buru Jag i werket matte Eder betyga icke allenafl mm affcttion , utan mycket mera win tackjambet , hvuilken Jag warder obligerad genom denna Eder affion at betyga. Eeder Eder fordenskuld at war a wift fdrfiikrad 5 at intet kail i wart fader nes land dr fa bogt^ ddr J icke iframtiden skulle kunna ad- fpirera ///, ddr Gud fpar Eder btilfan ocb Ufwet. Stdller fdr- denskull delta alt i Edert skidn, men recommenderar Eder denna fak , ocb bwilken J wift Itir exe- quera efiermin willa^ faframt J icke bafive mift det upfat fom J altjd bafwe baft at giora min willia tilfyUeJl , ocb befaller E- der banned Gud \rned JorJ tikran at lag dr ocb blifwer Eder altid wdl ajjeftionerad Cbriftina. voir rendu fervice en cette prefente occafion. Je fais certainement que vous etes fuffifamment affure de mon affeftion. Mais vous pouvez aufll croire en toute verite , que je feral portee par-la a fonger a toutes for- tes de moi'ens , comment je pourrai vous temoigner non feulement avec realite mon affe6lion, mais encore beaucoup plus la gratitude , a.laquelle cecte aftion m'obligera. C'efl pour- quoi je vous prie de compter ferme- ment,que, fi Dieu vous conferve la vie & la fame, il n'y aura point de charge, dans la Patrie quelque confiderable qu'elle foit, a laquelle vous ne puif- fiez afpirer avec le terns. Je remet done toute cette affaire a vos foins & je vous la recommende comme une chofe qui m'importe extreme- ment , & que vous executerez felon ma volonte , il vous perfeverez com- me de coutdme dans 1'intention que vous avez eue jufques ici d'y fatis- faire entierement. Je vous recom- mende a Dieu, & je vous aflure que je fuis & demeure toujours votre bitn- affeftionnee C n R i s T i N 5. Fes Icttics le Chriftint pubiiecs C'efl a feu Mr. deMcicrn, Confeiller d'Etat d'Hanovre, qu'on eft rede- vable de la communication de ces Lectres & de quelques autres que nous don- JE REINE DE SUEDE. # ttonnerons ci-apres que Chriftine a ecrites a Mr. Adler-Sahius , alors Chan- L ' an celier de fa Cour & fon Ambaffadeur au Congres d'Oswbnig. On ne trou- _ Ig4r te nul veftige de ces lettres dans les Archives de Su&de. Elles lui ont ete p^MTdT ecrites feparement pour lui tenir lieu d'inftruftions fecretes de la Reine , ^ eifr "S oat avec laquelle il entretenoit une correfpondance particuliere. Mr. de Meiern , Hans feaere qui s'eft rendu celebre par la publication des Afta Pads Weftphalicce en plu- l llfr ^ l m fieurs Volumes in folio, accompagnes d'un recit hiftorique for.t mftruftif g'and q hon n pour eclairtir les affaires fans nombre, qui furent debattues & reglees dans""" 1 " * "'" Je Congres le plus fameux, qu'il y ait jamais eu; a infere ces lettres de Chriftine dans le V me Tome de ces acles , apres la preface. Les originaux font en Sutdois. Us s'y trouvent imprimes avec la traduftion en Allemand & paroiflent ici traduits du Suedois en Francois. (*). Mr. de Meiern regarde ces Lettres comme autant de preuves de 1'efprit & du jugement folide de cette grande Reine, & ne douce nullement, que les autres lettres publiees fous fon nom ne foient des productions de la plume mSme de Chriftine. On n'a pas lieu d'en douter apres un fi grand nombre* d'autres lettres originales , pas moins belles que celles-ci , dont une grande partie portent les memes marques d'autenticite , je veux dire , de petites ratures par-ci par-la; car c'etoit la coutiirne de la Reine de ne pas fairedes brouiilons, comme on en peut meme juger par ce qu'elle dit a Mr. Sdtoius dans fes lettres du 6 Juillet & du 4 Septembre 1647 9 lie 1'on verra ci- deffousi. A la le&ure de ces Lettres, on s'apperjoitque Ckriftine 1'entretient fami- lierement & lui parle a coeur ouvert. Pour en favoir la raifon , il eft ne- viut en fa celfaire de remarquer, que cet Adkr-SaMus , quoique ne de Parens fort cSTaT pauvres, s'etoit fraie le chemin par fon merite perfonnel aupofte deChan- P r s . d . e celier de la Cour. La Reine fa Maitrefle lui ai'ant connu un efprit vafte , r t * cultive par de belles connoiflances t & fort propre aux affaires d'Etat, fe 1'attacha , & fit fa fortune a un point , que parmi un grand nombre de bons fujets, dont le Senat & laChancellerieduRoiaume, etoient alors pourvus, il fut juge digne d'etre le fecond Ambaffadeur de Suede au Congres de la paix generale dans 1'Empire , ou il y avoit mille chofes epineufes & tant de differens interets a menager. La Reine , qui 1'avoit deja honore de fa confiance, & qui par 1'accroiffement de celle qu'elle donnoit aujeuneCom- te Magnus de la Cardie, commenjoit a en avoir moins pour le ChancelierO- xenftiema, etoit bien aife de trouver dans la perfonne $ Adler-Sahius unfu- tt e o. \Q ftierna & J p, Salvius Ambafladcurs dc Snide* (*) Les Auteurs de la Bibliotheque Germanique (i) felicitent Mr. Meiern de la d~ couverte de ces lettres, & difent, qu'ils pourroient un jour en donnerla traduction en Franfois: ce qu'ils n'ont pourtant pas fait jufqu'ici. On remarqtiera en paffant , qu'4 la lettre, par laquelle 1'Editeur de ce Recueil demanda a Mr. Meiern les originaux de celles de Cbriftine , dont il eft ici queftion , celui-ci r^pondit, qu'il les lui remettrois volontiers, s'il n'en avoit pas fait preTent, peu de terns avant la reception de fa lettre, a Mgr. 1'Eveque de Wiirtzbourg , c'etoit 1'an 1737. (T) Tom. XXXY. en 1736, pag. an, & Tom XLIII, en 1738. p. 7. Tom. L N 9$ MEMOIRES CONCERNAN'F L'an. jet capable d'etre oppofe au premier AmbaflTadeur a ce Congres favoir le I6 4 I - Comte Jean Oxenftierna , fils du Grand Chancelier (*). On aura remarque ci devant que dans une des lettres de la Reine a foa Oncle le Prince Palatin, (a) elle difoit: que difficilement ces deux Am- bafladeurs feroient d'accord : que Sahius exhortoit a la paix, mais qu'il n'en etoit pas de meme du Chancelier : " d'ou Ton peut inferer , que les fentimens de 1'un & de 1'autre des Ambaffadeurs etoientbien differens fur ce point-la , & qu'ils etoient partis pour le Congres pre'venus de cet efprit de contradiction , qui les agita encore plus fur les lieux de la negotiation : Fun s'appu'iant fur la haute protection de la Reine, & 1'autre fur 1'autorite de fon Pere, a qui la direction des affaires etoit confiee presque fouverai" nement. Parmi d'antres preuves de Tantipatie des humeurs de ces deux Miniilres r il eft plaifant de lire le commerce de lettres qu'ils eurent enfemble au moia de Novembre & de Decembre en 1641; Oxenftierna fe trouvant alors a Stralfund & Sahius a Hambourg* Celui - ci ecrivit a 1'autre, qu'il convien- droit de donner le titre d' IlluftriJJime &f Excdlentijjfime a Mr. Grotius : ( Am- bafladeur de Suede , en ce terns , a la Cour de France) parce que felon le ce- remonial de toutes les Cours , ce titre convenoit a la dignite d'Ambaf- fadeur , & que cette dignite etoit celle qui approchoit le plus de celle des Rois. Oxenftierna, qui fans doute crdt que Mr. Sahius vouloit par-la lui faire comprendre , que le titre $ Excellence etoit egalement du a Mr. Sahius. , deja nomme pour le fecond Ambalfadeur au Traite de Weftpbalie & devenu ainfi Collegue de Mr. (S Oxenftierna 9 au lieu de le fatisfaire , lui repondic aigrement, & entre autres chofes, qu'il ne le reconnoiffoit pas alfez propre a lui donner des lejons. Sahius rompit la-defliis brufquement cette corres- pondance , (b) en difant , qu'il s'en expliqueroit plus amplement une autre Ibis. A en juger par les entretiens que Sahius cut dans la fuite avec Mrs d'dvaux & Servien , Ambaffadeurs de France au meme Congres de paix > fur le chapitre de Mr. d 1 Oxenftierna 9 on diroit qu'il en eut toujours une dent centre lui. On en voit plufieurs paflages que les Miniflres de France ont communiques a leur Cour , & entre autres celui-ci (c) Mr. Scthius- } , fait des excufes, & dit que Lui & Mr. Rofenhane , qui avoit epoufe la Coufme Germaine $ Oxenftierna , font leur poffible pour apprivoifer cet homme , mais que celui-ci changeoit tons les jours d'avis qu'on de- voit. (0) Cttte lettre eft du 23. Mai 1641. Vo- Petrrcus Confeiller au Parlement de Suede 3j/fl ci-dejjiis. m'a communiquees. (1) Elle conjijle en fept lettres que feu Mr. (c) V. N(^goc, Seer, de la Paix T. UL VEvgque Nornnan a tiroes des Originaux Part. IV. p. 15. item Tom. IV. pag. 50 ? de la fiibliotbeque d'Oxenfcierna & que Mr. 51. ? Part. II. p. 18. (*) II y a une lettre (i) dans les de"peches des Miniftres de France a leur Cour, oil on marque une grande joi'e de ce que Salviusofoit r^filter a Oxenftierna. (i) V. Mem. Seirttes de la Paix de Mun/ler Tom, II. p. 38. CHRISTINE HEINE DE SUEDE. ' $9 ' voit confiderer que le dit fieur Oxenflierna eft le premier des deux ; qu'il eft Senateur du Roi'aume & qui pis eft : (ce font fes propres termes :) fils du Chancelier. Mr. de Rofenham (a) plioit les epaules a tous ces dis- cours & temoignoit les approuver entierement . . . . Mr. Sahrius ajoute, qu'ils orient dans la Chambre, ou Mr. d'Oxenftierna gardoit le lit a caufe ^, d'une indifpofition, comme les Avocats font 1'im contre 1'autre quand ils font au bareau, mais qu'apres ils vont boire enfemble. . . ." Quant au fils du Chancelier, il etoit naturel, que le Pere le foutint de tout fon poflible. Le fils, qui prevoioit les difficultes qu'il rencontreroit a . Le chance. ce Congres, ou il y avoit un cahos immenfe d'interets oppofes a ddbrouil-jj" r ^Tn. ler , & ou chacun des Plenipotentiaires craignoit que fon adverfaire ne fe ftruit f n fils prevalut de fes avances & meme de fa facilite a ecouter les premieres pro- Sdewff" pofitions; (b) vouloit s'en difpenfer & demanda a fon Pere qu'il envoiat quelqu'autre a fa place a Ofnabmg. Sur quoi le Chancelier lui re'pondit, qu'il n'avoit rien a craindre : que le tout fe developeroit par la fuite du terns, & enfin il lui dit: Annefcis, mi fill, quantilla pmdentia regitur Orbis : ne fais tu pas mon fils avec combien peu de prudence le monde feregit(c). L'Editeur de ce Recueil avoOe qu'il n'a pas vu cette lettre du Chancelier a fon fils: mais il en inferera ici une autre traduite en Francois qui a e'te 5a L cttreii- deja imprimee (d) & qui a aflez de rapport a ce fujet. Elle eft du i cr De- deffu s f o . cembre 1643. Tres-cher Fils, 5) La lettre de Mlnden du 14. du mois palTe eft bien arrivee par la der- >, niere pofte. Par icelle j'ai con^u quelque elperance de ta reconvalefcen- ce. Le bon Dieu te la donne & te fortifie felon fa volonte paternelle! car inter privata je ne defire, ni fouhaite rien tant. Quant a ma perfon- ne , je commence a me mieux porter ; il eft vrai que I'e'refipelle ne me veut aucunement quitter. Pour les autres bons amis , ils font tous en fame , felon Je tems & la faifon. Sa Majefte la Reine fe trouvoit bien mal. Elle eft maintenant en bonne difpofition. J'apprens auffi que Mr. Safaius eft a Osnabrug; cela, a ce queje puis connoitre, ne peut pas apporter grand prejudice, tant que vous demeurerez coi & en repos a Minden, jufques a ce que les Francois foi'ent arrives, II eft bien vrai , que cela apportera peu d'utilite au public , & que pour cela nous n'en acquerons pas meilleure affecTion envers les Danols, & moins envers YEmpereur: mais fi cela peut effe&uer quelque chofe, ce fera uneja- 3 , loufie aux Francois & fomentera dequoi penfer; fur quoi nous ne pou- vons pas fonder nos confeils: toute fois lechoixde la Conftitution eft tel, qu'au (a) // ttoit aiijjl Miniftre de Suede a ce un peu aittrement dans fon Lexicon Erudit. Traits dePaix. V. fa vie dans Meiern Afta T. II. p. 399. art. pads T. VII. pag. 32. &fc. (rf) N<'goc. Secret, de Munfter Tom. Lp. (fc) V. le Droit Public de TEurope Tom. 340 fcf Tom. H-pag. 118 f 119. confr. Mei- J. pag. 8. em Aft a Pads Tom. L pag. 340, (c) le Sr. Mencken rapporte cette biftoire N 2 MEMOIRES CONCERNANT L'an. 99 qu'au cas qu'on nous donne plus grand fujet, oubien, fi quelqu'un ne nous donne d'autres confeils , nous les devons a bon droit opprimer montre feulement an monde au travers de tant de images , fit paroitre a cette province deTo* lee le foleil de fa delivrance.. Mais pour revenir aux Miniftres de Suede au Congres, la jaloufie qui regnoit entre ces deux Ambafladeurs avoit beaucoup de rapport avec la contrarie'te qui etoit encore plus grande entre les deux Ambafladeurs de- Francs. (a) fciez la nrtrique de cette lettre L c. 77. pag. 8. 46. 66. z^B.-item TV 777. p. 30. (fc) L 'original fen trouve cbez Mr. le Ge- fcf P. 7/7. p. 14. item T. IV. p. 34. ?c. ntral Cointe Axel Gabriel OxenfliernaflrrfeVff (f) V. Ses Int^rets dts Princes, art. AI- Neveu du Cbancelier. lemagne pag. 32. f 33. confr.i Mem. de (c) V. Palm sk old. Extraits des Reg. duSe- Du Mont de la Paix de Ryswyck not I' an 1636 p. 551. pag. > fc. (rf) V. N5gociat. Secret. /. c. T. 77. P. N 3 162 MEMOI&ES fcOftCERNANT France, au meme Congres, Mr. le Comte d'dvaux & Mr. Seroten: le mier etant la Creature de la Reine-Mere & 1'autre celle du Cardinal Chriftine qui le favoit fort-bien , ne manqua pas de faire a celui-ci des f m. politefles , done fa lettre a Mr. Sahius du 4 Septembre 1647 fait foi. La / \ voici: (a). TjErr Hof Cantzler. Jag fer *~* at nu merafreds Trattaten nr fa godtfom belt flannad^ ocb at alle man afwenta denne Cam- pagnies utjlag , twiflar intet med mindre j pa Eder ftda Idra gio- ra eder yttcrfta flit , at bringa detta langfamma werket til end- skap 5 det den bogfte Gud nade- ligen forldne ! Jag bafwer den- ne gang intet fynnerlig at skrif- iva 5 utan recommenderar eder pa nytt de drender , fom Eder nog faint kunnige dr. Giorereder flit at alt utrdtta till nut conten- tementja my eke utanfreds bratt skie kan. Jag innejluter bar bos et bref till Servien det bonom med forfta ma ofwerjdndas. Jag bar intet kunnat med bqflig- bet fdrbigct) at fwara bonom pa fit bref^ fom for en tjdfedan ban bar skrifwit mig till. Jag wo- re den obofligafle pa werlden, ddr lag late det obejwaradt , me- dan ban ddrifa hogt offer arar fig til mm avantage. Det dr nodigt at J forfdkrar bonom om mm affettion ocb at tag bailer god correspondence med bonom ; ty y matte Confiderera at ban dr bosCardinalen Creatur. Jag wet wdl Franfofernes lag 3 at de mdft civile Monfieur le Chancelier delaCouiv Je vois que le Traite de paix eft dans le meme e'tat que s'il avoit ceffe , & que tout le monde attend 1'ilTuedela Campagne. Neanmoins j'efpere que de votre cote vous emploi'erez tons les foins. poffibles pour mettre fin a ce long ouvrage: ce que le Tout* puiflant veuille accorder par fa gra- ce! Je n'ai rien de particulier a ecrire pour le prefent, finon, que je vous recommende les amis qui vous font connus. Donnez vos foins & vos attentions pour que tout s'acheve a mon contentement, autant que la chofe fera faifable fans rompre la Paix. Je joins ici ime lettre pour Mr Strom. Envoi'ez-la lui au plutot* Je ne puis m'empecher de repondre par civilitd a fa lettre ; autrement je ferois la plus inciviledu monde, par- ce qu'il s'offre de fi bonne grace a mon fervice , & qu'il parle auffi beaucoup , au lieu ou il eft, a mon avantage: ainU il eft neceflaire que je Taffure de mon affe6lion & que j'entretiennea- vec lui ime bonne correfpondance : car vous devez confiderer qu'il eft Creature du Cardinal. Je connois fort bien d'ailleurs les manieres des Franfois , & que la plus grande par-* tie de leurs moeurs confide en com- plimens. Cependanc par la civilite on (a) ELlefetrtuvien$\.idQ[s(lcins M^iern. I.e. CHRISTINE RHINE; DE SUEDE}, 103 _ i compliment en 3 men ge- on ne perd rien , & on les paie de la- L>a ". nomcivilitelappas intet >ccb man nieme monoie qu'ils paient les au- I<544> let alar dem medfamma mattfom ^ Le J. complimens qu'eux & d'au- " i tres me tont inntnp'nnr^cfl'jt-Qi.i^,- atten* Jom de skrifwa j e me reC onnoi s pourtant obligee flflb ta/tf , ty W/V? meriter kan derendrecivilitespourcivilites. Pour die fadane lof-ord intet jbrtie- cette raifoncareffez- le&d'autres auf- na>> dock finner lag migobligerad &. Temoignez auffi I'affeftion que at tidra cmlitt hen', care/Jerer [ ai P" r ^ Reine auffii^ienquepour ffordensMd denenaoc* an- dra^ temoignerandes altjd mm devez faire bonne mine a fes Creatu- effect ion ^ bade mot droUnmgen^ res . Je vous prie de me procurer Ja wdl jom mot Cardinalen \ ty une copie de cettelettre inclufe, car det dr banjom alt regerar^ ocb je n'en ai point id. Adieu, je vous matte j fordenskuM gtira bam affure de ma race Creatur bonne mine. lag beder j willie skqffa mig copian afdet- ta bos gaende bref ^ ty iag bar benne intet fielf. Adieu. Forfa- krar Eder om min nad CHRISTINE. Qbrlflina* On peut juger par cette lettre de Cfmftme, qu'elle vouloit etre bien tant aupres de la Reine-Mere de France & aupres du Cardinal , qu'aupres des fadeurs de deux AmbafTadeurs Franpis, qui etoient fi animes Tun centre 1'autre. IlSfm7s f nu y cut neanraoins cette difference entre les Miniflres des deux Cours , que co "e i'au- les querelles entre les Ambafladeurs de Suede, n'allerent pas a une rupture trc * ouverte, comme entre ceux de France: ce qui a la fin obligea leur Cour de les feparer. II y a tout un Traite imprime la-defllis (a) & quoique fit la Cour de France , elle ne put jamais les reconcilier tout de bon. Void u- ne lettre qui leur fut ecrite au nom du Roi Louis X1F. pour les exhorter a depofer leur animofite. j, Meffieurs les Comtes SAvaux & Servien. C'efl avec un grand fenti- ., ment de deplaifir, qu'au lieu de vous temoigner la fatisfaftion que j'ai ,-, des fervices importans que vous me rendez tous les jours & a cet Ecat, je me vois oblige de vous faire connoitre, combien jefuismal e'difiedes ,-, mefmtelligences que j'apprens qui font entre vous. La continuation en feroit fi pre'judiciable a mes affaires , qu'il faut en toute facon en couper (a) Le litre en eft; Lettres de Mrs.d'^- Seer. T. 1. pag. 75-109. T. II. p. 114. 188 vaux & Servien concernnnt leurs DifF^- 194. 199. &c. item Part, II. p. 9. 77. 78. rends & leur Reponfesde part & d'autres... ^c. ran 1650. en 12. Vtiez aujji les Ne"goc. 164 ME MOIRES C O N C E R N A N f L'an ^ jufqu'a la racine, & veritabletnsnt les divifions particulieres s'accordetit fi mat avec le deiTein que vous devez avoir d'accommodertes generates, & avec le nom de Pacificateurs; que je vous avoue, que j'ai peine a comprendre , comme quoi deux Perfonnes fi fages & ii intelligentes , ^ qne j'eftime au point de les avoir choifies entre tons mes fujets, Comme etant capables de traiter la plus grande affaire, qui fe foit prefentee de- puisplufieurs fiecles, vivent pourtant en divifion. Enfin que pour eta- blir , a la gloire & a 1'avantage de cette Couronne , le repos de la Chre'- tienete par une paix generate, ils ne puiffent trouver moi'en de la confer- ver entre eux-memes, au fcandale non feulement de toutela France, qui 3, en eft abbreuvee, mais des Nations e'trangeres, a qui votre defunion n'a pu demeurer cachee. C'eft ce qui m'etonne d'autant plus , qne je 3, fais que vous n'tes portes tous deux que d'tin meme efprit, qui eft de 3, me fervir dignement & utilement. Vous 1'avez deja fait avec tant d& ,, de zele & de fuffifance, en tous les emplois confiderables qui vous one 5, ete confies , qu'ai'ant chacun de vous bien meritd de cette Couronne , & ,, acquis toute 1'eftime & la reputation, que vous fauriez fouhaiter, il me 3, femble que vous auriez eu la penfee (ce que je ne puis croire) de pren- dre chacun des avantages d'honneur fur fon Compagnon. II ne vous en refte plus de moi'en que par la moderation que vous fauriez temoigner 1'un plus que 1'autre , puifque chacun demeure egalement perfuade de 3, votre affection & de votre capacite, & qu'il fera toujours difficile d'y 3, trouver de la difference au prejudice de 1'un des deux. ,, Je defire done & vous ordonne, qu'aufli-tot que vous aurez recucet- telettre, en quelqu'etat que les chofesfe trouvent entre vous, &aquel- 3, le extremite d'aigreur , de proteftations & d'ecritures ou vous puiffiez etre engages de part & d'autre , que vous en arretiez tout ce qui fera 3, paffe: en forte que non feulement il ne s'enparle jamais, mais que vous en perdiez , s'il eft poflible , la memoire , & que vous faffiez outre ce- 33 la autant que vous le pourrez une fincere reconciliation & liaifon d'amitie, qui foit dorenavant de bonne foi entretenue. Je ne veux pas douter, que 3, vous n'ai'ez toujours garde les apparences devant lemonde; que vous ne vous foiez vifites fans difcontinuation, & que vous n'ai'ez toujours confere enfemble fur les affaires qui vous font commifes, comme le bien demesaf- 3, faires le requiert abfolument. J'ajouterai feulement a ce que deffus, pour vous ,, obliger d'autant plus a vivre enfemble fraternellement, la proteftation que je 3 , vous fais , que le moi'en le plus certain que vous aiez de meriter aupresde ,, moi , c'eft la retenue & la patience que vous temoignerez 1'un pour i'autre. Je veux croire qu'il n'en fera pas befoin, & que vous defe'rez tous ,, deux affez a mes volontes, pour vous y former avec tant de refignation, ,3 que je n'aurai jamais occaflon de vous en faire des reproches, mais feu- lenient de vous temoigner le gre que je vous fais des fervices recommen- dables que vous me rendez continuellement; priant Dieu qu'il vous ait, 3, Meffieurs les Comtes d'Avaux & Servien , en fa fainte garde. a Fontainebleau le 2 Aout 1644. (#). (a) Cette lettre fe trouve dans les N^oc. 188 & 194, item P, II, p. 77 & 78. Secret. T, H.pag. 114. fc vriez yiiffi &. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 105 Toutes ces exhortations ne purent rien fur leurs efprits trop ulce'res. Us fe brouillerent encore, fe reunirent & fe brouillerent de nouveau. Le Comte d'Avaux s'en expliqua tout net a laReine-Mereen lui ecrivant (a) Je recevrai refpeftueufement 1'ordre qu'il plaira a votre Majefte de me donner , foit de m'en retourner en France , foit de demeurer ici avec un autre Collegue: car il eft bien vrai, que le Sr. Semen & moi n'y pour- rons plus fervir conjointement fans un trop grand prejudice des interets de la France & de 1'nonneur de la Nation. Les Miniflres de Suede craignant les flutes facheufes que cette defunion pourroit avoir pour la caufe commune , firent la - deflus des remontrances au Comte d'Avaux, () en reponfe a fa lettre de conge.,, Nous lailTons, lui dirent-ils, a la prudence de V. E. a confiderer, fi le bien commun, fi celui de toute la Chretiente & de tous les Allies, fi 1'amour meme de la Patrie, fi I'eftime qu'elle s'eft acquifepar festravauxde tant d'annees, peuvent permettre , que dans le commencement Je plus vif du Traite , elle abandonee la chofe publique fous le femblant d'y etre obligee pour fes affaires particulieres & par une pique perfonnelle. Si elle en iife de .,, la forte, elle augmentera nos foupons, & elle nous fera perdre 1'efpe'- .,, xance de faire une paix honnete & glorieufe pour les deux Roiaumes. Nous attendons de meilleures chafes de V. E. la recommendant toujours .,, tres-affe&ueufement a la grace de Dieu. Tout cela ne fervit de rien aupres de lui: & a la fin Mr. Servien preva- lant dans I'efprit du Cardinal , reuflit fi bien par des tours peu digues de fon caraftere, dont il fe fervit contre d'Avaux, qu'il le fit tomber dans la dilgrace de fa Cour (c). On a parle ci-deflbus de la froideur & meme de 1'averfion iecrete Chnjline avoit ague's pour la maifon d'Oxenftierna. Pour etre un peu' fait de ce qui en etoit la caufe, il n'y a qu'a confiderer,: que laReineetant^ s j, a n ^ ai - nee & elevee dans un terns de guerre & de troubles continuels, fouhaitoit/" d'autant plus volontiers de le changer ^nun terns de calme& de paix, qu'a- pres avoir pris elle-meme les renes du gouvernement , elle cro'ioit pouvoir mieux etablir & aflfermir fon autorite dans un e'tat paifible , au lieu que plus la guerre dureroit, plus fes armes feroient expofees aux viciflitudes de la fortune , & elle-meme toujours incertaine , fi elle pourroit s'en tirer aufli glorieufement que les conjon6lures d'alors le lui faifbient efperer. Comme il fe trouve toujours a la Cour des gens qui fuivent les fenti- mens qui y font le plus en vogue, fans fe donner la peine de les approfon- dir , il y en cut a celle de Suede qui appui'erent fortement la-deilus , & p.erfuaderent a la Reine, que les Oxenftiei-na ne vouloient pas la paix, & le (o) V. Lettres d'Avaux ? de Servlen^w (6) /. c. pag. 210 ^f an. item. N^goc. 38. 4out 1644. pag. 201. f p. 267. dans Seer. T. T. p. 338. &fc. les M<*m. &N^goc. Seer, de la Gourde Fran- (c) Foiez-les tout au long dans I'Hifl. du Tt toucbant la Paix de M under T. IV. oit P. Bougeant. Livr. IX, , 6. &c. pag. 19. toutes ces Lettrcsfont aujfi imprimis de la 26. fcfc. page 113. fcfr. ; Tume L O MEMOIRES CONCERNANT le Chef des affaires, favoir le Chancelier, d'autant moins, qu'il craignoit que fon me'rite ne diminuat a mefure que Ton n'auroitplus tant befoin de fon fervice (*). On n'oublia pas d'y ajouter (a) , que ce Seigneur portant fes vues plus loin, penfoit a donner fon fils Eric en manage a la Reine: ce qu'elle ne trouveroit pas un parti fortable pour elle (t). Pour preuve de ce qu'on vient de dire & que de pareils bruits eurent eours en ce terns-la, on produira une Lettre du Chancelier a fon fils Erie alors Gouverneur en Livonie. Elle eft date'e de Stockholm le 29. Juin 1647 (). Vous favez mieux , mon cher fils , que je ne faurois le dire , quel e'toit 1'etat des affaires ici , quand vous partites , I'annee paflee. Tout a e'te fur le meme pied depuis , tantot aflez rnal , tantot pis. Vers les Fetes de Paques ou un peu avant, Sa Majefte notre Reine a ecrit une Lettre de fa main aux Plenipotentiaires a Osnabrug, mais une mercurialei feparement a mon fils Jean, comme vous le verres par ,, la ci-jointe. II n'eft pas difficile de juger qui en eft la caufe, & j'efpere r , que Dieu le trouvera en fon terns. Je crois que les Fmnfois r tant les Plenipotentiaires la - dehors , que le Re'fident ici , y ont contribue du leur, en abufant du credit qu'ils ont. Je renferme ici la copie de la re- ponfe que Jean a fake tout feul a fa Majefte. Cela m'a trouble un peu, ,, & ' (a) conf. les Annotat. de Charles-Guftave (&) L'original en Sue"dois fe trouve cbez en Mfc. & Pufend. de R. & Libr. XX. $. 5. E. Mr. Is Cointe Gronftedt ,- Senateur ds n r . ' LT- o \j >-i termes : (/) L union n eft pas li etroitement etablie en Suede qu ils es- fai'ent de publier. La divifion vient de plus haut , & celle qui eft en- tre les Regens de Stride, done, rautorite vient d'etre etouffee par, la ma? ^a) Elle s'appelloil Elifabeth Brah^ ? (c) Mem. de Chanut T. I. p. 422- ce Comte Eric I'fyouf*. Apres fa mort la Com- (d~) Chanut /. c. pag. 23. f Vitt. Sin teffe fa veuve cut en Jecondes n6ces le Prince Mer curio T. IX. pag. 344. Adolphe-Jean , frere du Roi Charles-Gufta- (i) Staats-Gefch.^ow Rigaund Liefl.pag. ve de Suede, (v. Moreri DiS. art. BraW.) i6.-6fc. (ft) V. Negoc. Secret. rfffMunfterfef rf'Os- (/) Negociat. Secret, de. Munfler T. t nabrug T. IV. pag. 1.23; P. //. p. 18. CHRISTINE R E I N E D E S U E D E. 109 jorite de leur Reine , donnera fujet a quelque nouveaute en la Cour. Mr. Sakhis qui y eft en credit foutenu du grand- Maitre : (le Comte de la Gar- (Re:) & du Gdneral-Marechal , eflai'e de faire comprendre , que quand " cette Couronne feroit privee du Chancelier , elle ne laifleroit pas de fubfifter, & peu apres: ceux la eifaieront de prendre part dans les af- faires , dont 1'autre les avoit prives. Le Cardinal Mazarln recommende j, la-deflus a fes Miniftres de profiter de cette defunion des Suedois: mais il ajoute: que quoique le Chancelier Oxenftlerna foit plus en confidera- ,, tion qu'en faveur, il y a ne'anmoins apparence que fbn me'rite & fes fervices 1'empecheront de dechoir , d'autant plus qu'il venoit de faire le Traite de Danemarck extremement avantageux pour la Suede. Mr. Chanut Miniftre de France, a la Coar de Sitede 9 tres-hommede bien, fort goute de la Reine, (a) meme du cote des belles-lettres , ou il e'toit fort verfe, & ai'ant de bonnes habitudes au pai's de fa reddence, donne presque la meme idee 1'an 1646. de ces brouilleries. Car ai'ant eu en ce terns -la des ordres de fa Cour de de'couvrir s'il fe pouvoit , les pen- fees de celle de Suede fur la Paix & a quelle condition on la voudroit: (b) ,, il avoit trouve, que tous les Miniflres etoient tellement fur leurs gar- des , que tout ce qu'on en pouvoit tirer alors , n'etoit que des conjeftu- res fur 1'etat prefent ou fe trouvoit la Cour , qui etoit comme parta- gee , d'un c6te par la Reine , la Maifon du Connetable de la Gardie , les Princes Palatins & le Marechal Torftenfon : & de 1'autre pare le Chancelier Oxenflierna 9 le Marechal Horn , le General Wrangel & tous ceux du Senat , qui regardoient les Princes & le Conne- table comme etrangers. Ce dernier parti etoit moins affeftionnee a la paix que celui de la Reine qui avoit deflein de defarmer, afin d'eta- blir fon autorke pendant la Paix , & quand il faudroit armer , de com- c ^f ^L a , mettre fes troupes entre les mains de perfonnes afide'es. ..." La Reine ta ia pTix qui fe voi'oit traverfee par ce parti du Chancelier pour dtablir le fien plus d n Aileraa " fortement, refolut enfin d'envoi'er le Comte Magnus AmbafTadeur Extraor- g " dinaire en France* Ceci pofe, il ne fera plus difficile a comprendre pourquoi la Reifre s'ex- plique 6 pofitivement & en fi grande confidence dans les lettres a Mr. Salvws, que coote qui coute il tachat de conclure la paix, & qu'en leur ecrivant a tous deux la Lettre foudroi'ante du 10. Avril 1647. ou elle Jeur tettre f r- fait des reproches fanglans de ce que la Negotiation de la paix trainoit fi r ,^". te de r < - D Tt/r o ; r i Chnjitne aux long-terns, elle previent Mr. balvms par une Jettre particuhere, que dansAmbaiTa- Fautre elle ne vouloit parler que de fon Collegue le Comte Jean Oxenftierna de tout feul. Nous joignons ici cette Lettre de Chriftine a ces deux Miniftres avec la iraduclion Franfoife. Mes- (a} V. la Preface de Vauciennes aux Mem. Mersur. T. II. p. 258. &fc. Wgoc'. Secret. de Chanut T I. it. Wicquef. Anbaff. Liv. T. II. P. II. pag. 122. item T. IV. pag. 18. II. Se8. XVII. p. 215 & 216. item les Ne'goeiat. d'Arnauld Abb6 de St. (t) Chanut /. c. p. 27. f 28. Vitt. Siri Nicolas T. IV. p. 517. f T. V. p. 197. O 3 tib MEMOIRES CONCERNANT L'an. ftAEffieurs. Deffe fa ord tiro Meffieurs, J'ajoute eepeudemots M allenafl adioufterade til mit a ma Lettre pubhque uniquement " Dubltiuebref, pa det jag matte P our vous dfouvrir de mapropre ptwuyiM vo- tre bien affe&ionnee Stockholm ceio. 1647. GlIKI'STI'NE. , Cette lettre ne regardoit proprement que le Cbmte Jean Oxenjlierm tout cette feul. LaReine, dans fa lettre parriculiere a Mr. Satviur, le pria de ^^ e r f e g apprendre quelles grimaces Oxenftierna auroit fait a la lefture d'une tellete U 7^ mercuriale. De plus, elle lui recommenda de la maintenir dans la bonne o- ^fe pinion des Francois a Ton egard , afin que le pen d'affeftion qu'un Parti fai- fok paroitre centre cette Nation ne lui fut pas impute'e. Voici la lettre ineme. H2 MEMOIRES CONCERNANT TTdgtaradt Heer Ho} Cantzler. Monfieur le Chancellor de la Cour. " Af vtskittixe Edre skrtf- J3uapprifuffifammentparvosdiffe- ** Ie eiel dtac fe "ouve er bar lag nogfamt forjtatt i * e ti i **& J r / rfL^n.^ la Negoci inis (ig freds Tialia- tres . g ien par _ Ja les r j- j 'iv. " ~-~v-iation de la paix. Te vois bwadtermintsfig freds liatta- tres . g ien par . la les ins qu j e vous ten befinner 5 fer mer an wal , e- prenez pour te rminer une guerre auf- der giorde flit at afbielpa det ft longue que dangereufe & fanglan- langa 5 farliga ocb blodiga krig te, qui afflige &accableprefquetou- fbmnuen fa langtidhafauertrykt te 1'Europe. Je vois auffi par tou- naflan be/a Europam. Deremot Jtn- 1* Parti ne pouvant renverfer entiere- fer lag aj alle omjlandigbcter ment ks raitds , cherche au moins SIM/, at en partjokia at protra- ^ les reculer ; ainfi ^ ne manquerai bera Trattaten, atminflone dtir pas d' un C 6te d'avoir e'gard par tou- deicke alldeles denkunna renver- tes fortes de graces avotre fideleap- fera. lag skal icke undcrlata at plication, mais d'un autre je me con- recompenlera med all nade eder duiraiavecle Parti contraire d'une trobet ocb flit, ocb med det an- mamere > ^ uet ^ e la terrepourra .^ 77. r<> fi-i remarquer que la faute necoit point dra Partiet skal tag migj&jtal- de mon ^ Je ferai voir auffi k la<> at tag skal wifa all werlden , tout j'Univers que R. C. (c'eft-a-dire dt skulden icke ar bos mig 3 OCb \ e Chancelier du Ro'iaume] n'eft point skal Kit a werlden fe , at Icke du tout capable de remuer tout feul better R. C. formar allena rdra te monde du bout du doigt: Sapienti werlden med ett finger > Sapienti f at [ , r **-+ t f r Kz^iL* + Ma iettre ci-ioante eft addrellee a fat. Ma bref fern barhosjo- yous deux & re ^ ettez . la fur le cha gadtar til eder b&gge , matte 3 G ^ o ( c ' eft . a -dire, AU COM- lejwerera atG. }. O.; ocb eburu- TE J E ANOXENSTIERNA)& quoi- wal lag der utlnnan tajlar eder que je Ty touche vivement auffi bien bart an , fa ar ban dwb allena que vous, cependant ce n'eft quede termed ment. Lager fa at (T A- lui feul que je pretens parler. Fai^ vaux/ar wta desj Contenta, tes en forte que d ^ W en appren- ~, r r , / ..* ne econtenu, ann n"* te* i^ai pa det at Franfofener icke jatta * O MS wrange tanckar om mig , utan moi ? mais qu ' ils pu jfr e nt~ voir de at de matte fe bwars skulden dr. que i cote eft la faute. J'envoie Jag Jandtr Erskein at om alt Erskein arm qu'il vous inftruife plus widlyjtigare infomera eder 5 om amplement tant par rapport au pai'e- Soldatesquens contentment; tag ment des_Soldats qu a_celui des Of- bar giordt daryti fa mycket fom bar skie kunnat^ twiflar mtet at j barefter fom bdrtill /are afflj- Ura wercket efter bogfte moye- 3 ; mage aldeles warafdr- fakrad vra- que vous n'appui'ez auffi dorena- yant de tout votre pouvoir cet ou- CHRISTINE HEINE DE-SUEDE. fdkradt at tag ska/I bUla Eder shade/Ids , ocb ndr Gud en gang bielper Eder mcdfredbem, skal dre giorde tienfler med Sanato- ria dignitate recompenjeras. J zveta pelf at det ar den bogfta aranfom en drlig man kan ajpi- rcra til i wart Fddernejland^ wb der fafom nagon bogre gra- dus honoris wore, skul/e lag in- gen sky draga eder den at confe- rera. Eburuwdl det utan ftor invidh intet Idrer skie; men fa waj fdya; contemmint novita- tem meam , ego illorum igna- viam : mihi fortuna , illis pro- bra objedantur 3 Jom Marius fa- ger apud Salu-ft : j det o frige bar tag den tilforficbt till Eder> at j med famma trobet drifwen wer- ket-> Jom j uti alle occajloner fa berdmligen hafwe altid temoigne- radt ; Joker for ahing at con- fervera mig en god opinion bos Fmnfoferne 5 pa det at iag icke watte niuta til ondo det fom en part lata paskina emot den na- tionen. lag boppas at iagwijar i wercket buru iag drjlnnad. Gref Magni interejje recom- menderar iag eder Jom om det wore mit. Ddr j kunne gifiva mig et confilium eller f or/lag <> buru iag kundc beneficera bonom 7^^/Benefeld , belter nagot annat anfenligit) wore det mig af bier- tat kidrt. lag skulle gierna do- nera bonom Benefeld 3 men iag bar confederation at gidrat for Hn iag barjorftatt eder mening. Tome I. For vrage , comme vous avez fait juf- qu'ici, & que vous ne foi'ez aflure ^ que je vous dedommagerai, Et fl JDieu Vous fait la grace de revenir avec la Paix, je recompenferai vos fervices par la dignite de Senateur. Vous favez vous-meme que c'eft dans notre Patrie la plus haute dignite , a laquelle un honnete homme puifle afpirer , & s'il y avoit de plus hauts degres d'honneur, je ne ferois pas difficulte de vous y clever. Et quoi- que cela ne fe put faire fans vous attirer beaucoup d'Envieux , vous pourrez pourtant direalors avec Ma- rms dans Salufte : Contemnunt novita- tem meaim, ego illarum ignaviam: mihi for- tuna , Us probra objeftantur : c'eft-a-dire, ils memeprifentparceque jefuis un homme nouveau , & moi j'ai du me- 5> pris pour eux, a cau(e de la vie fai- neante qu'ils mdnent : ils merepro- chent cequi n'eft qu'un efFet de la ,, fortune, &jeleur reproche leur propre turpitude." AurefteJ'aien vous cette confiance, que vous poufle- rez cet ouvrage avec la meme fidelite, que vous avez temoignee dans cha- que occaflon. Sur tout tachez de me bien entretenir dans 1'efprit des Francois, & de faire en forte qu'ils a- ient bonne opinion de moi, aim que ce qu'un certain Parti fait paroitre contre cette Nation ne me puifle faire du tort. Je me promets que je ferai connoitre en efFet 1'intention & les fendmens que j'ai. Je vous recommende les interets du Comte Magnus , comme les miens propres. Si vous me vouliez donner votre a- vis pour le gratifier de Benefeld ou d'autre chofe de confequence , vous me feriez plaifir. Je lui donnerois volontiers Benefeld mais je fais diffi- culte de le faire , que je ne fache au- paravant votre fentiment. Sur toute P cho- L'ara L'rm 164.7- M E M O I. R E S CONCERN AJN T For alt ing hjJler delta fecret, til chofes , tenez cela fecret jufqu'a ce defs lag far wet a om det kan ta quejefacheficelafepeutfaire. Iln'en lag; banwetfwlfintet derafocb fait rien ^i-meme& encore moins mycket mindre Gref Goftaffon. Comce WW> Voi ' ez P ar avance Ser Eder w a/ fore , bwad Jden- ne fenafte Communicere, Curtius Jdger: Nee res magnae fuftmeri poffunt ab eo , cui tacere grave eft. Mais partis a Monfieur le Comte *f Avau x de cette affaire. J^ofe me promettre de fa court oi- fie , qrfil nefera jamais difficult^ de rendre un fi confiderable offi- ce a un defcs plus affedlonnes a- wis &fervtieurs , ou plus tot je trois , qu'il ne trouper a pas mau- vais , fi je dis qu 1 en travail lant ce que vous communiquez a ce der- nier. Qulnte Curce dit : Nee res magnce fuftineri poffunt ab eo r cui tacere grave eft. ,, celui qui ne peut gar.der le fe- cret,n'e(l paspropre ade grandes affaires". Mais parlez a Monfieur le Comte d'dvaux de cette affaire, j'ofe me promettre de fa courtoifie qu'il ne fera jamais difficulte de ren- dre un fi confiderable office a un de fes plus affe&ionnes amis & fervi- teurs: ou plfitot, je crois, qu'il ne trouvera pas mauvais fi jedis , qu'en travaillant pour un ami, qui lui eft fi acquis , il me donne a moi une de? -. j . r pl us fignalees marques de fon affec- pour un am qui lui efl fi acquis f ion> | ue je lui demanderois jamab tl donne amoi une des plus figna- &j e vous prie, Monfieur, affurezle ttes marques defon affettwn,que dit Monfieur tiAvaux de 1'eflimeque je lui demanderois jamais , &P je j'ai pour fa perfonne,-& que les fer* vous prie, Monfieur, affurez le vices particuliers qu'il m'a rendus, ^V Monfieur ^Avaux de Tefti- ^/^SgSST^^iSfJ i !9^ me que fat pour fa perfonne 5? que les fer vices particuliers, qtfil 11? a rendus, me font fi con- fiderables que je tnourrois de re- grdt fi je rfavois refpe'rance de wfacquiter au moins tFune parti de ce qtfil a fait pour mon int- Jag flutar harmed och befal- ler eder Gud, med den forma- ning , at j fe wdl til, at Skym- welen intet skenar ofwer skack- lan. lag forblifwer Eder altjd will affettionerad* rois de reg , retj fl je navois lef P e * r ^ nce de m ' acquitter au moins d ' une partie de C e qu'il a fait pour mon jnter.ec. Je finis ici & je vous recommende a Dieu, en vous exhorcam de tenir la bride haute au chevalretif, de P eur ^ n , e faute t&^< mon> j e demeure touiours Votre /-/->/ * affeftionnee Stockholm ce ro 1647. Stockholm den jo. April 164,7. Cbriftinc. REfNE El E S U E D 4. t\$ lag betir liter mig weta bwad grimajfcr G. J. 0. gidr Je vous prie de me faire favoir mdldlandet afmit breftilEder q^ijes grimaces aura fait G J. O. en lilant ma lettre & mes ordres ad- - drefles a vous Deux. ; En confequerice de tout ceci , comme aufli parce qui fe lit dans les Me- moires de Chanut & ailleurs, on feroit difpofe a croire, que le Chancelier n Oxenjlicrna n'etdit pas, en ce terns-la, fort porte pour la conclufion de laP* s Paix. La France toftjours attentive a fes propres interets vouloit pourtant pki que la Suede la fit , pour faire cefTer les clameurs de la Cour de Rmne & d'autres PuifTances de fa Religion, fur les grands prejudices , queles.M- dois, les bons allies des Francois, portoient a la Religion Catholique par la duree de cette guerre $A\kmagne. Aiifli ce fut pour balancer les progre"s des armes de la Suede dans 1'Empire, que la France prit plus d'une fois le Due de Bavtire & d'autres Etats Catholiques en fa protection cc fit avec eiix des traites & prit des engagemens fepares, peu conformes a ceux que fa France avoit conclUs avec la Suede (*). La France etoit fi prevenue en faveur da Due de Baviere, que la profperite de leurs propres arrnes leur deplaifoit, parce qu'elle contribuoit a celle de Sudde. . . Ce font les propres termes du Comte de Brienne, Secretaire d'Etat de France dans fa lettre au Miniftre de France a Rome, (a) De la venoient auffi les plaintes reitere'es des Fran- foiSy li tot qu'on touchoit tant foit peu a quelques prerogatives des Catho- Jiques- Remains (f). La difpofition de TEv^che d'Osnabrug en faveur de (o) V. la. Differtatlon de Ptrfendorf/wrkj- M^m. &Ngoc. Seer, pour la Paix de Mun- dlliances entre la Suede f la France re'im- fter T. I. p. 145 ^f 14.6.. Tom. IIL p. 34.8. primit par Rouflet. item Pufend. Hift. de &c. item les Negotiations d'Amauld Tom. Suede T. II. p. 389. Ludolfs Scbaulubne ad IV. pag. 102 oil eft In lettre de Brienne du ann. 1647. p. 1472. Vitt. Siri Mem. Rec. 30. Nov. 1646. T. vn. p. 475- & T- vm. p. 809-813. (*) Cela fe fit plufieurs fois pendant lecours de cette guerre, &meme de*ja du vivant de Guftave-ddolpbs. On joint dans 1'Appendice une relation traduite de \'Alle,mnd & v. 1'Append. imprim^e en ce terns- la. Elle fera connoltre ce que ce H^ros en penfoit. num ' vlllt (f) Voici un morceau de I'inftrii&ion que la Cour de France donna a fes Miniftres au Congres de fPcftpbaiit en 1646 : ,, Les preventions des Suedois font exorbitantes & ,, font gnnde peine a hi Reine parce qu'elle voit , qu'clles tendent principalement a relever le Parti Proteftant en Allemagne par 1'abbaiflement des Princes Catholiques. Lafeule configuration , qui a port^ la France , dans le commencement & le progres de eette guerre, & joindre fes armes 4 celles de Suede & des autres Proteftans, a &- ,, t6 la ne'ceffite^ abfolue qu'elle avoit de mod^rer la puiflance de laMaifon A'Autricbc, qui alloit s'augmentant chaque jour aux d^pens des autres Princes, & qui vifoit a ,, s'accroitre auili aux ndtrcs & a fe rendre a la fin MaltrefTe de tout, fi elle eiit piV ,, Mais aujourd'hui dans 1'etat ou font les affaires, il y a raifon a craindre dans \'AHe- ,, magne, la trop grande puiflance du Parti Proteftant, foutenu comme il eftdelaCou- ,, ronne de Swecte, qui s'efl rendue confid^rable, & qu'on voit. m^prifer les grar.ds a- ., vantages qui lui font offerts poiu' la Paix, connoiiTant la facilit6 qu'elle peut rencon- P 2 ,, trer n6 MEMOIR ESCONCERNANT de Guftaffon, fils nature! du Roi Guftave - Adol^he y & Taffaire d'un fimple Cure Catholique en Weftphdlie rempliflent plufieurs pages de Plaintes que Mr. Charnit en fit a la Cour de Sutde. Auffi trouve-t-on dans les dites depe- ches SArnauld, plufieurs traits de jaloufie des Miniftres de Prance centre ceux de Sue de , parce que ceux-ci fe faifoient Protefteurs des Proteftans en Alhmagne , en attendant que le Miniflere de France faifoit fbnner haut a la Cour de Rome fes foins pour la Religion Catholique- Romaine (). Le chance- Mais ce n'etoit pas propremcnt cec eloignement pour la Paix qui e'toit Su'SSSe regarde comme le peche originel dans laperfonneduChanceHerOse^Vrmz. de. France. C'eft qu'il n'avoit pas des fentimens aflez Franpis & n'etoit pas fort docile pour les prendre , dans un terns , oil les vrais interets de fa Patrie devoient avoir la preference fur toute autre consideration : (*) voila le grand mal. Mr. Chanut sen explique aflez clairement (b) quand il parte d'une vifite qu'il avoit faite au Chancelier qui lui avoit dit,que les maux, qu'il avoit . foufferts (a) V. fes Aftw. T. I. p. 313. ?c. item 0) P. Ses Mtm. 1. c.pag. 319. itemWiC- f. Bougeant /. c. Livr. IV. . 58. &f Livr. quef. Ambaff. Liv. 11. Sett. XVII. pag. 21 3. VllL . 34. p. 287. & p. 326. item lei Nt- Bougeant /. c. T. III. Liv. Vlll. g. LVlll. gociations d'Arnauld T. IV. p. 443. 467. &? pag. 317. 485. item T. P.p. 98. 140. 159. &c. trer, dans la eontinuarion de la guerre, de relever toufours de plus en plus cePar- - ti, pour la ruine des Catholiques; de fagon que fi 1'ambition de'mefure'e de laMaifon d' dutricbe nous a oblig de nousfervir detousmoiens pour lui former des obftacles: Nous ne devons pas nous endormir, lorfque nous reconnoiflbns que 1'application & la paflion, avec laquelle Its Proteftans dchent de fe rendre redoutables , ne font pas ,, moins craindre, d'autant plus qu'outre Fa raifon d'Etat, que nous avons feulement . a regard de la dite Maifon d'/lutricbe, nous avons a pr^fent celle de la dt^fenfe & de la confervation de notre Religion, pour nous oppoferaux deffeins des Proteftans: Et comme fous cette couverture de la Religion , I'Efpagne a toOjours procur^ fon aggrandiffement, la Suddc- aujourd'hui procure efFeftivement les avantages de la fien- ^ ne fous le pre'texte de fa grandeur & nous- fait fervir a fon deflein contre notre pro- pre int^rSt & notre intention; Sa Maje(r;6 recommende pour cet effet aux Srs. Ple*nipotentiaires de faire entendre aux Miniftres de Suede dans les termes qui feront eftime's les plus convenables, que la France n'eft pas r^folue de les feconder dans le deflein qu'ils t^moignent avoir de ruiner la Religion Catholique en dllemagne.... (i). (*) Wlcquefort dit; /. c. Les Oxenftierna, tant le Pere que le fils, n'aimoient point la France, ni les Franfois. La Reine au contraire ne pouvoit pas fouffrir les autres Na- tions en ce terns-la. On lit dans les d^peches des Negociations fecretes de la Paix de Munfter, (2) que le Roi de France recommende a fes Miniftres de tacher de gagnerfur tout Mr. d'Oxenftierna, par les offres des faveurs , que le Roivouloitlui faire avoir dans fa patrie & par des preTens qu'il lui veut envoler & a fon Collegue. Et dans une au- tre lettre, le Cardinal Mazarin laifle aux Miniftres de France la difpofition libre des pr^fens pour les Miniftres Suedois, parce qu'ils pourroient venir en telle conjonclure, qu'il vaudroit mieux les jetter, que les remettre a qui ils font deftins, pour ne pas donner lieu d'jijouter la mocquerie aux autres mauvais traitemens. (3). fi) Ceci eft tire du Mrfm di Roi de Frame Seer. T. I. p. 6j 6j, k fes Pleu'pot'ntiaires a Mutfl'r date du 21. (z) Tom. II. P. II. ?*? 7*. Join itfiS. & iinpriins dauj Iss Mem. 8c Negoc. (jj 1. c. Tonu III. paj. />. CHRISTINE REINE DE SUEDE, foufferts dans fa maladie, J'avoient fait fonger aux affaires de 1'autrevie. L>a!> - Mais que Chanut s'etoit apperpu aux travers de fes discours qu'il revenok I ' 647 ' ii vobntiers a celles du fiec'e. Ce meme Chanut fe fache bien plus , quand il fait quelque terns apres le recit d'une promenade du Chancelier a la fuite de la Reine hors de Stockholm & dit qu'Oxenftierna la fuivit acheval tout le refle du jour, comme 1'auroit fait un jeune homme en une pro- menade hors de la ville. Chanut ajoute , qu'il avoit etc a fouhaiter pour le fucces des affaires de la France, que ce Chancelier fut parti pour 1'au- tre monde, comme il le difoit lui-meme, il y avoit deja long- terns: en- core qu'il n'eut pas tout ]e credit, qu'il cut bien fouhaite fur 1'efprit dc la Reine , les raifonnemens qu'il faifoit au desavantage de la France y la lui rendoient moins favorable , car il lui etoit echappe de dire , que 1'alliance des Francois etoit: fort prejudiciable auxinterets de la Suede, & que fans doute elle auroit fait fes conditions incomparablement meil- leures, ou auroit porte fes prolperites plus-avant, fans cette alliance, & qu'il n'etoit point d'avis , que la Suede s'engageat en des confidera- tions fi etroites ,qu'elle n r eQt pas la liberte d'ufer de fa bonne fortune (*). Toiitefois , continue Mr. Chanut > il y avoit grande raifon de ne rien j, hazarder contre la conduite de ce Miniflre , qui etoit coloree des avan- tages de 1'Etat, & foutenue du credit & de I'autorite , que fes grands fer vices lui avoient acquife: c'eft pourquoi Ton ne devoit paslechoquer, de droit fil, fans une grande neceffite (^i). ' Le Cardinal Mazarm en convint lui-meme & ecrivit Tan 1646. aux Miniftres de France en ces termes: Le Chancelier Oxenflierna eft un Miniftre ficonfomme, que bien qu'il paroifle dechu de credit, il ne laiffera pas d'avoir grande part a 1'adminiftration de ce Roi'aume , & la Reine , qui defire de s'inftruire des grandes affaires, ne fauroit puifer dans une fource plus vive & plus nette que la fienne (). Et certes, le vafte efprit de ce grand Homme, qui connoiflbit a fond Le chance . la combinaifon des interets differens de tous les Etats de Y Europe, lui fai-j.' n'envi- foit envifager ceux de fa Patrie dans une toute autre perfpe&ive que ne^S! 3 1'aU- Proteftans fc celui de la Sutdt. (a) 1. e. pag. 22. 143 6? 368. (i) F. N^goc. Seer. /. c, T. III. pag. 321. (*) C'eft ce que de la Court Rdfident de France avoue lui-meme , que les Suedois au- roient pu faire, difant dans fa lettre au Miniftre de France a Rome en 1648. Je ne vois pas que les Suedois s'e'Ioignent du defir de la Paix, quoiqu'ils fe puifTent tout pro- mettre de leurs profp^rit^s, qui font telles, qu'effeftivement ils fe pourroient ren- dre rnaitres de I'sJllemagne, s'ils fe vouloient flatter dans leurbonheur. Mais ilfem- b!e qu'ils veuillent mettre un clou a la roue & fe contenter de plus folides avantages qu'une Couronne puifTe jamais remporter... (V. Les Nt^gociations &4rnauld Tom. V. p. 467 & 469.) & puis il dit pag. 471. Apres tant de remifes, devant qu'il foit quinze jours, nous verrons les chofes faites, ou rompu?. Cela depend entierement des Suedoit, qui fe font rendus glorjeufement les Arbitrcs de la Paix, ou de la Guerre.. P 3 n8 M E M O I R E S C O N C E R N A N t L'an 1'auroit voulu le Miniftere de France (*). Ne perdant jamais de vile le ^ loutien di: la Religion froteftante , pour la defenfe de laquelle Guftave- Adolpht avoic entrepris la guerre SAlfanagne, qu'il avoic felee de fon fang, & par laquelle la Suede continuoit de s'epuifer d'hommes & d'argent (f ) ; il comprenoit fore bien , que fi les affaires des Proteftans dans 1'Empire ri'e'toient pas alors bien affermies par les engagemens les plus autenriques ; le changement des conjon6tures a venir entraineroit a la fin la rui'ne des Proteftans, fans efperance, peut-etre, d'y apporter le fecours necefTiire^ qu'on avoit alors en main. Les armes de Suede ai'ant auffi repris en ce terns-la leur ancien eclat par les batailles decifives gagnees Tune apres Tau- tre, il ne faut pas douter, que le Chancelier ne joignit a ces confidera"- tions de Religion, celle de Taggrandiflement de la Suede. Mais ce qui lui tenoit beaucoup a coeur & lui rouloit dans la tete fur tout laderniereannee, avant la conclufion de la Paix, c'etoit, de faire declarer tons les Eveches & autres grands Benefices Ecclefiaftiques en Allemagm alternatifs entre les Proteftans & les Catholiques : deforte que les perfonnes de 1'urie & de 1'autre Religion en puflent joiur fucceflivement , fur le meme pi que cela fe pratique de nos jours par rapport a' 1'Evechd d'Osnabmg , en conformic^ du Traite de Weftphalie. Et meme , fi Ton doit croire le P. Bougeant , - (a) qui cite les depeches du Comte d'J4vaux, les Proteftans travailloient a difpofer toutes chofes en forte, que la Couronne Imperiale put tomber fur une (a) Dans fonHifl. dela. Ptix Livr. Fill. goc. Seer, de M. f O. T. IV. p. 62. J. 29. pag, 171 &c &f 300. fc. item N6- (*) De la Court R^fident A Munfter fe plaint dans fa lettre en 1646. a Mr. ArnauU Miniftre de France a Rome de ee que la Nation Sutdoife, qu'il appelle altiere & fuper- bc, voudroit traiter fes affaires a part , & qu'elle ne regoit les avis & les confeils de fes amis qu'autant qu'ils font conformes, a fes int^rSts . . . Mais onne s'apper^oit nal- lepart que les Miniftres de France a'ienc relkh^ quelque chofe de I'inte'ret de leurCour: 6t on ne croit pas que le Sr. de la Court eut pris pour une politefle , fi pour cette rai- fon & parce qu'il accufe le Pape meme de ftupidite' ,on avoit appelle* la nation Francoife altiere & fuperbe... V. fa lettre dans les Negotiations dCArnauld Tom. IV. pag. 67. 379 & 380 item pag. 517. (f) Les fubfides , que la Suede devoit tirer de la France & de la Republique de Hellan- tle pour foutenir cette guerre , montotent a fept tonnes d'or par an : mais la Suede feule y fourniifoit autant du fien chaque ann^e (i). Nous remarquerons ici que Mr. Koebler fait comprendre par I'avidite' qu'il attribue aux Sutdois de fe faire des provinces en Al- lemagne , fous pre"texte de la Religion , que la Suede auroit dfl foutenir tout le fardeau de la guerre, prefque pour rien. Mais c'eft pr^tendre plus de la Suede , qu'aucun au- tre Etat n'admettroit jamais en de pareilles circonflances. Car ou en trouver en Euro- pe qui emploieroit des millions en argent & en homines pour le foutien defes allies par pure g^ne'rofite' & fans envie de s'aggrandir me'me aux ddpens de fes voifins? Et les Pa- bliciftes qui traitent des pr^tenfions que les Etats forment 1'un centre 1'autre, & ceux ile 1'Empire Romain plus quelerefte de 1'Europe, que veulent-ils dire par-la; finon que chaque Souverain t^.che d'dtendre les limites de fes Etats & cherche a s'aggrandir dans des conjonftures favorables. Comme cette maxime a &l& fuivie dans tons les fiecles de- puis () V. Meiern Ada Executionis Tom. II. p. v. Keehltr Muntz-Bel. Part. XVIII. p. 312. 14*. & Ftlrai&ld Annot. ad. Extr. ad. Aim. 1647. CHRISTINE REINE DE SUEDE. une tete Lutherienne. II die, que les AmbafTadeurs Suedois avoient tenu I -' n * un confeil fecret la-dcffus avec les autres , fous ferment de n'en rien reve- ler. EC que celui qui epouferoit Chriftlne y ou qui lui fuccederoit an Ro'iaume , e'tanc defonmais un des Princes de 1'Emplre , devoit etre elu Empereur ou Roi des Remains , ajoutant que le Chancelier Oxenftierna avoit enfante ce grand projet pour faire epoufer fon fils a la Reine&pour le faire elire Roi des Remains (*). Quoi qu'il en foit de cette Anecdote, on a lieu de prefumer , que le Chancelier croioit avoir trouve , par 1'alterr native des dits Benefices , le moi'en le plus efficace d'affurer a perpetuite la liberte de confcience aux Proteftans dans 1'Empire , & de mettre par Ig leurs forces au niveau de celles des Etats Catholiques dans le Corps Germa- nique. L'Hiftoire porte de plus, qu'il etoit bien pres lui-meme de devenir Archeveque & Ele6teur de Mayence, car non feulement les Etats Evangeliques ftan$ iui Jui firent offrir cette dignitedes 1'an i(>34,comme Jesaftes publics de ^^' & autres monumens en font foi (a) , mais encore quand il en demanda 1'avis du aya Serial de Suede ? celui-ci ne s'oppofa pas a 1'acception de cette offre, a condition pourtant, qu'il ne fe de'partit point du fervice de la Suede, jufqu'a cequ'el- le cut eu par la Paix quelque fatisfa6lion (b). Et fi on coniidere Te'tat ou fe trouvoient alors les affaires de la JMaifon d'dutriche en comparaifon de celui ou ctoient celles de Suede en Allemagne , on a fujet d'ajouter foi a ce que dit la meme hiftoire , que I 1 Empereur auroit donne Ja main a ce projet & on allure que fes Miniflres au Congres d'Osnabrug avoient eu commis- fion d'y confentir , dans le tems - meme que 1' 'Empereur vouloit faire une Paix particuliere avec la Suede a 1'excluflon de la France., ou la Suede auroit La Su certainement fait fes conditions bien plus avantageufes (c"). Ce fut deja en 1645. que le Comte Saavedra Miniflre dEJpagne t en fit des proportions fort ferieufes au Comte Oxenftierna. U Jui reprefenta, dit le P. Bougeant (^ (a) F". Stiernman Bibliotb. T. II. pag. 35 p. 1475. f 36. item Koehier Muntz-bcl. T. Ill p. (c) Wiequef. Amb. Ljv. IL SeS. XX.p. 145. Vitt. Siri Mem. Rec. T. Fill. ^.113. 370. Clerc -vie de Richelieu T. 11. p. 153. (d) 1. c. Liv. 7F. J. 12. p. 38. Vitt. Siri (fc) Palmskold Pol. Gr. Regl. T. I. p. Mercur. T. IX. p. 372 f 375. item T. X. 356. le Vaffor bift. de Louis XIII. Livr. p. 1,579. fc?c. Pufend. je R. S. Libr. XML X.XXII. p. 481. Ludolf Scbaub.ad ann. 1647, $. 92. p'. 6-ix. puis la formation de differens Etats dans le monde; Mr. Koebler auroit pu mieuxba- zarder fa reflexion contre bien d'autres Etats de nos jours, que centre la -Suede. (>*) LeP. Boitgeant donne 3 entendre (i) que Salvius avoit trahi le fecrct. CememePe- re parlant d'un entretien entre les Corntes d'Oxsnftierna & d'dvaux dit, (2) que^celiii- eis'irritant des prdtenfions des Suediis avoit dit a i'autre: vous deinandcrez bient6t Tce- ties & Mayence? Pourquoi non? avoit re"pondu Oxenftierna : tout fe peut faire avec le tems, pour pen que dure la guerre. Au refte le P. Boug/mnt fe fache bcauconp} le ce que la France n'empecha pas les Suidois de prendre un fi grand empire dans lane 1 - gociation des affaires de Religion. Mais il auroit du examiner, fi la France ^toit alers en ^tat de le faire? (i) L. c. Lir. IV. 5- 74 & gi. $. j8- item Liv. VIII. 5- 34- P- 3*& (i) Uwu 1. c Lir. VIII- pag. 325* & Liv. -IV. 120 MEMOIRES CONCERNANT que puifque la France traitoit avec la Bavttre & les Etats Catholiquesfans 47 '__ les Suedois , & que ceux-ci fe verroient trompes par la France , qui de " tout terns avoit viole les Traites les plus folemnels .... la Suede ne de- voit pas refufer d'accepter d'honnetes conditions pour terminer une ,, guerre fi funefte. " Mazarin, qui en fut averti par Ton Efpion a Vien- ne , (a) en congut une extreme inquietude. Pour rompre cette negocia- tion il ordonna aux Miniftres de France , d'infinuer aux Ffpagnols , que les Suedois leur avoient revele leur fecret , & aux Suedois , que les Efpa- gnols le leur avoient dit. C'etoit pour mettre la defiance entre les deux Parties. ... II y cut une autre circonflance favorable a la Suede pour une paix particuliere & avantageufe. Ce fut auffi-tot apres la prife de Prague, qui expofa toutes les Provinces he'reditaires de la Maifon dAutricke a 1'in- vafion des Suedois (*). UEmpereur y auroit pu alors donner les mains, d'au- tant plus facilement, qu'il n'y feroit rien entre du fien, & que les autres Etats Catholiques n'etoient guerres en etat d'y refifter , ou d'en empecher 1'execution. Non obftant tout cela , il falut que le Chancelier fouffrit qu'on hatat la fignature du Traite de Weftfoalie , au lieu de tirer tout le fruit des avanta- ges que les armes de Suede avoient remportes fur ceux de la Ligue Catho- " ^ c l ue ft)' ^ c ^ a au P art J QU* l a i ^ tolt fuperieur a fa Cour , oil la Reine cntierement portee pour la France , avoit deja , quoique jeune , etabli fon au . (fl) Mr. Kap^en dit dans la preface der Salvius en avoit trabi le fecret aux Mini/Ires gelebrten Republic vonSwvedra pag. 55. que de France. (*) .L'Auteur du Droit Public de I' Europe dit: (i),, Tant que la guerre laifla a la Cour de Vienne quelque legere efpe"rance de fucces, les conditions n^ceflaires pour affer- mir la tranquillite" publique parure^it impraticables. Bientot la Paix mSme ne fut plus le premier objet des Ne"gociateurs , ils ne fong^rent qu'd f^parer d'int^ret 1'un Parti & 1'autre, &c. - v , (f) Toutes ces confid^rations - du Chancelier Oxenflierna font aflez voir, que c'eft a faux & centre la ve'rite' que Pfannerus (2) & d'autres Ecrivains d'Anecdotes accufent les Miniftres de Sudde au Congr^s d'Qsnabrug de s'etre laifl^s induire par la Cour dc Vienne a abandonner les Proteftans dans les pa'is h^r^ditaires de la Maifon d'^utricbe en Allemagne, laiffant a fa difcretion Texercice libre de leur Religion & ne refervant aux Garants de cette Paix que la liberte" d'interce"der pour eux dans les circonftances. Quoique ces Ecrivains pr^tendent etre exaclement informes, meme de la fomme d'ar- gent qu'ont rec,u les Miniftres de Suede pour ce defiftement , & qu'ils font monter, d fix-cent mille ^cus: ils fe trompent pourtant aflur^ment. Pour en etre convaincu, on n'a qu'^ confulter les Aftes de la Paix de Wejlphalie publics par Meiern, oil cette affai- re eft traite"e a fond & oil il produit Particle fecret du Traite" (3) , que fit la Cour de Sue'de, avec celle de 1'Empereur; lequel trait^ de"truit entierement le faux bruit, que les envieux de la Suede repandoient la-deflus en ce terns-la. Et files Miniftres dc Suede fouffrirent alors patiemment ce blame, c'eft, qu'ils ne vouloient point re"ve"lerun Trai- rt, (i) Tom. T. pag. t. (i) V. Les Prefaces de fes Afta T. I. pag. 45. (i) Dans fon Htftoria Pads We/lphal. ad ann. & T. II. p. IX. &X- item RouJJet Suppl. au Corps i4- p- J8o & s8i. item Felleri Otiura Hano- Diplomat. T. VL p- J7; & 4i- ran. 0. us- pag. izi&izz. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 121 sutorlte & pris un entier afcendant fur le Corps des Senateurs du Roi'aume, par la force de fon efprit , la folidhe de fes raifonnemens & la fermete de les refolutions: qu'elle favoit meler fi bien avec la douceur & les carefles, felon que 1'exigence des cas, done il e'toic queition, le requeroic (*). Toute fois , quand la Suede cut fait fes conditions de Paix a ce Congres SQsmbrug (t) , avant que la fatisfa&ion demandee par la France cut ete reculelal'aJK re 1 , qu'on e"toit convenu de part & d'autre dc tenir fecret , & 011 la Suide s'e'toit ftipu- lee la fomme de fix-cent inille cus de la part de 1'Empereur, parce qu'il fut rerais en pofleffion de plufieurs places fortes occupies alors par les troupes de Suede, tant en Bobeme qu'en Moravic. (*) Cbanut dit: (i) La Reine Cbriftine de"libe"re dans fon Se"nat de toutes les affaires qui concernent le gouvernement de I'Etat. II eft incro'iable comment elle eft puiffante dans fon Confeil, car elle ajoute i la qualit de Heine, la grace, le credit, les bien- faits & la force de perfuader, jufques-la que fouvent les Se'nateurs mmes s'e"tonnent du pouvoir qu'elle a fur leurs fentimens , lorfqu'ils font afiemble's. On trouve chez Palmskold (2) par quel moien elle s'e'toit rendue fi abfolue dans le Snat & aux afieuible'es des Etats. C'eft, dit le Comte Brabe , qu'elle avoit pris le par- ti de mettre de la defunionentreles Etats du Ro'iaume, qui, jufqu'al'an 1639. s'e"toient fort bien accorded enfemble, mais alors I'Ordre des Paifans fe heurta contre celui de la Nobleffe, a caufe de certains fonds de terres que la Noblefle vouloit affranchir entie- rement: & depuis, la parfaite union ne reparut plus. Ajoutez ^ cela.que Cbriftine, par fon me'riteperfonnel& extraordinaire, avoit 1'art de gagner &de charmer tout le monde. Le Chanceliermeme tint pour principe, (3) que Cbriftine e"tant la premiere de fon fexe, de la Nation Suedoife, qui gouvernat la Suede, on devoit la r^garder & refpefter com- me un Roi, puifqu'on ne pouvoit pas changer le fexe. De la vient, que les Reines regnantes en Suide font proclam^es a leur facre7?ou (4)& non pas Reines , commecc- la fe fit en dernier lieu au couronnement de la Reine Ulrique Eleonore. (|) On fait que la plus grande difficult^ qu'il y cut a ce Congres confiftoit dnns la ceffion de la Pomtranie a la Suide, 1'Elefteur de Brandebourg pr^tendant qu'elle lui ap- partenoit & ne voulant nullement fe relicher (5). Mais li on veut prendre la peine de lire les Traites de confederation & d'alliance entre Guflave-Adolpbe , Bogiflas Dae de Pomeranie , & la ville de Stralfund, (6) on y trouvera des claufes, qui autorifoient la Su&de a retenir cette Province , & cela de I'aveu meme des Ecrivains de Brandebourg & de France, (7) deforte, que le Sieur Koebler en parlant de cette affaire fe fert tres-im- pertinemment, quant aux Suidois, du mot de Rapteres Pomeranice, (8) & qu'on ne fe tromperoit pas quand on diroit, que ce n'eft que par ce meme principe d'envie &deja- loufie que le Comte d'4vaux d^clame tant dans fa de'peche ^ fa Cour en 1647. centre 1'inconftance & rinfuffifance des Ordres de la Cour de Suede a cet e"gard, difant entre autres chofes: (9),, qu'il fait bon oui'r la fuffifance des Ordonateurs qui difpofent ain- fi des Etats & des Principaut^s de 1'Empire, & qui revoquent un ordre quand il eft 5 , excut : ce qui fera pris de tout le monde pour une preuve certaine , que la Cou- ronne de S:iede ne veut point de Paix.... " Car non feulement PElecleur de Brande- l/ourg fut a la fin fi abondamment indemnif^ de cette partie de la Pomeranie qui revint a (i) Mem. T- I- p- 243. ^7) Mta>> dt 1'Acad. des Sciences de Berlin (z) ad ann. 1647. P a g- 7 2I< T - I- P- 3 66 & Marquis de Torcy Hift. des Trai- (3) Palmsk- ad ann. 1641- P^g- 49- tcs de Paix T. I. p. i'3- (4) Kl-ins Samtal ou entrctien I. c. p. 71. (g) Kohler Muntz-bel. Tom. VI. pag. 2*4. O) V. Pufend. de R. S. Libr. VI. 0. 46. Libt. (y) Negtc. Seer, de la Paix T. IV. pa. jo & IX. $ 41 jo. & Libr. XIV. . 42. &c. 51. Mem. Seer, de la 1'aix d Mwnfter Tom. IV. (6) Dtt Mont Corps Dipl, Tom. V- pag. 606. pag. 23. fc Part. II. p. J4j. Tome I. Q tion de 122 MEMOIRES C O N C E R 'N A N T I/an. reglee, & que par cette coniideration la Cour de France travailloit a fon, 6 ' tour de touces fes forces a empecher que la Paix de Weflphalie ne fe con- clut; la Reine Chriftine en fidele alliee de la France fit declarer plus d'une fois, qu'elle laifferoit plutot venir les affaires a une nouvelle rupture, que de permettre qu'on ne contentat pas la France. La Reine aflura en meme- terns Mr. Chanut (a) qu'il ne devoit point douter ni de fa fidelite dans 1'aU liance, ni de fon affection aux interets de fon Roi: mais elle y ajouta: qu'il faut foumettre routes chofes a la raifon, afin que les amis n'exigent les uns des autres que des chofes equitables : (*) qu'il etoit jufte d'exa- miner les points de la fadsfaction demandee, puifcju'il n'y avoit qne cela qui retardat la concluflon de la paix , & voir s'ils etoient tous de telle confederation pour la France qu'on due perpetuer la guerre , au cas qu'el- le ne fut pas fatisfaite: que la Reine ne les jugeoit pas tous d'une meme importance pour la France , & qu'il faloit chercher des temperamens & ne priver point VAllemagm de la Paix". ta Paixfe ^ la fin on trouva ce temperament, dont Cbriftim temoigna fa grande. " Satisfaction a Adler-Sdww dans fa reponfe du 21 Juillet 1648. que void: . (a) Mem. T. I. p. 3" &f Ji2. cfr. Ni- ? T. jr.. p. 198, goc. d'Arnauld T.1V. p. 443. 464 466. 724. a la Suhle , que les Provinces, qui lui furent laiffe'es en d^dommagefnent, lui valoient trois fois plus que la portion qu'il avoit ce'de'e; Mais encore quand la Suede cut fait fes conditions, & qu'il ne tenoit qu'a la France de conclure aufli, ce fut elle-memequi vouloit difpofer des Etats & des Princes de 1 Empire & il n'y cut point de reflbrts que fes Miniftres ne fiffent jouer pour reculer la conclufion de la Paix jufqu'a ce qu'elle- cut fait fes affaires: & ce fut a ce fujet que le favant Forstner comnmniqua a Frijcbman- ees fix vers: (i). Gallia vult pacem, turbas tamen undique & arma, ,, Foederaque in pacem continuanda ciet ; Gallia vult pacem , litefque ex lite reducit , ,, Hoc eft in media quarere notte diem. Gallia vult pacem , Jed bellis implicat erbem : Gallia da pacem , vel dare ye lie nega. Forflner ajoute dans fa lettre,, G A L L i firmanda fibi Aljacia pacem neceffariam nonig-- norant, Suecorum praterea potentiam fujpettam habentet & vix ultra ferentes arrogantem & imperiofam focietatem , pace exarmandam ipfijudicant." Mr. Boeder ^crivant au fa- vant Portner dit aufll la-delTus: (2),, MONMORII epigramma fatyriciim accept. Illudex . eo genere eft quod tantum virum vix decere poteft. Sed ilia nimirum fcabies eft invidia Gallica in nomen .Suecum : nee ignorant Sued , Gallesfub amicitice- & focderwn fpeciofts ,, nominibus baud minus adverfi ftruere , quam apertos hoftes". (*) Entre autres pr^tenfions de la France, que le P. Botigeant trouve afTez ^quita- hles, (3) ^toit celle, d'exclure leDuc de Lorraine duTrait^ de Weftpbalie, &que TEm- pereur s'obligeroit de ne donner nulle affiftance a VEfpagne. Des chofes pareilles font regard^es comme fort juftes par notre Rdv. Pere, au lieu que ce que la Suede demau- doit, &oit ambitieux, exorbitant &c. Voiez ci-delTus pag. 115. fi) V. Heffm^.nt Series Rerum pag. jo. (jj L, c. Livr. VIII. f. 40. pa^v 33$. (i) V. Epift'ils. ani Lojium j>ag. 351. CHRISTINE REINE DE SUEDE. *j[4g kan rcke nog faint betyga J" mingladie ofwer de bugneli- ga tjdender fom tag med nafla poflfick afEder. Gud late ojsnu enteligenfa denfdgnan at Je en goddnda pa detta blodiga kriget. Ser til at j i tjd ofwcrlagge med HertigCzd ocb de andre af Rd- det buru med folckets ofwerfor- fel ballas skal; ty tjden fatter alt for kort+at jag nagon ordreddr^ em skul/e kunna giora. Kunde tag blifwa det fremmande folcket quitt wed dran> wille lag ballat for en ft or lyckfaligbet > ocb ddr Ja wore) at de 2. millioner kun- de befparas til andra mina nod- wandige utgifter , wore det wdL uppa. Wore Jag fa fyck/a- Jig , at jag matte fedan fdttla Cbri/lenbeten i ro , wore det alt mit begar ocb skuUcacktadetfor 7 j T j*+ ?.'* 4-1*^^ :* mtndeL I&t#frig**MrwJag Ederfljt ocb dexter itet alt at menagera til min tienft: ocb tac- kar Ederfor den iviUighet fom j bafwe latitpaskina ideaffignatio- nerfom lag bar gifivit pa Eder. lag Je ne^faurois vous exprimer la joi'e que j'ai reflenti des nouvelles a- gre'ables que j'ai re^u de vous par 1'ordinaire dernier. Que le bon Dieu vous fafle enfin fbrtir heureufemenr de cette fanglante guerre ! ne ne"gli- gez pas de convenir a terns avec le Prince Charles & les autres du Senat au fujet du tranfport des troupes, car le terns eft trop court pour que j'y puifle donner ordre, Je tiendrois pour un heur , fi je pouvois me honnetement des troupes etrange- res , & ce me feroit un grand avan- tage , fi je pouvois epargner les deux- millions pour mes autres befoins; (*). Ce que je defire le plus j'eftime au-delms de toute autrecho- fe, c'eft de pouvok rendre la paix a la Chretiennete. Au refle je me repofe fur votre aftivite & dexte'rite a menager tout pour mon fervice. Je vous remer- cie de la promtitude que vous avez fait paroitre dans 1'affaire des remi- ies , que j'ai donnees fur vous. Je ne i'oublierai jamais & je vous don- ne- (*) Ceux qui blament Chrijline, (i) comme a'iant de"penf inutilement les cinq -mil- lions que devoient pa'ier les Cercles del'Empire pourcontenter les troupes conge"die"es apres la Paix de Wcftphalie , verront par h teneur de cette lettre de la Reine qu'ils ont tort, & le Sr. Koebler plus qu'aucun autre, qtiand il dit a cette occafion, que les Suedois ont plus maltraite F Allemagne que les Turcs & les Tartares ne Fauroient fait. II ne fauroit ignorer , que la plus grande partie des Armies de Suede dans FEmpire &- toient des Allsmands , qui s'entredetruifoient eux-memes comme ils ne Font fait que trop, meme depuis ce terns-la: au refte, on voudroit bien favoir ce qu'il en feroit uu- jourd'hui de la libert des Etats de FEmpire, fi les Suedois ne FeufTent foutenue &raf- fermie meme au prix de Icurs biens & de leur fang? (i) Ki'bler MntZ-bcl. T, XVI. p. 3S9> Sc Hxberi inftitut. hill, civilis. T, III. p. J55 124- MEMOIRES CONCERNANT lag skal aldfig latat olont^ och skal altjd bevifa mig nadig och tackfam emot Eder igen. lag forjakrar , at i altjd lore finna en trogen iv an bos Gref Magnus. Jag wil war a bans caution. Ncir inftrumentum Pads ar fdrdigt ^ fa kommen fietfbitdar med. Tag taflundar b'6gt at fa tala med E- der. Gudgifive ofsfrid, fa bop pas Jag at komma a bout de tons vies defers. B/ifwer fnd, fa fa wi godt kiop pa langa no/or bar bemma och wi fa Jdija : Viclrix caufa Diisplacuit 5 fed yiCta Catoni. Sapient! fat ! adieu far er wdt. Cbriftina. nerai des marques de roa faveur & de ma gratitude. Je vous allure que vous trouverez toujours un ami fidele dans la per forme du Cornte Magnus. Je veux etre fon garand. (*) Quand rinftrument de la Paix fe- ra acheve , Vous me 1'apporterez vous -me me. Je defire ardemment de m'aboucher avec Vous. Si le bon Dieu nous donnelaPaix, j'efpere de venir a bout de tous mes defirs. Si la paix fe fait, nous en verrons ici plufieurs avec un pied de nez , & nous pourrons dire alors: Viftrix caufa Diis placuit 3 fed vifta Catoni (a). Sapientifat! Adieu portez-vous bien. CHRISTINE, Cec- (a) Le Gel eft pour les fieureuy! i Mais Caton n'eft pas pour eux. Grande con- (*) ^ n aura vu P ar ^ e l u ^ a ^ dit ci-devant, que la Reine s'inte*reflbit fort en ce fiance entre tems-l pour tout ce qui regardoit ce Comte. Pour preuve de la grande confiance qu'il tie la. Gardie avoit en Adlev - Salvius , on donnera ici la traduftiori de fa r^ponfe fur ufie queltion a *: Saiviut. { ez ^pineufe, que le Comte de la Gardie, lui avoit donri< a reToudre& quifertd^clair- ciirement a 1'^tat de la Cour deSudde d'alors: (i). ,, Monfieur. J'ai re que tout le fit dans cette ville-la, & Seroien vouluc atcirer les Deputes de Les deux 1'Empire a Munjler pour y decider Ja plGpart des affaires comme fous les Trait fans des ordres fecrets a lui donnes n'oferoit pas etre contraire. Voici la traduclion de cette lettre. Tres-puifTante Reine & tres-gracieufe Dame. Nous avons conjointement, Mr. Salvius & moi, tres-humblement s , rapporte a Votre Majefle en quels termes fe trouve a prefent cette Ion- gue & penible Negociadon de Paix: deforte, que je n'ai pas cru ne- ceffaire d'y rien ajouter en mon particulier , fur-tout Mr. Salvius a'iant fans doute 1'honneur , felon fa coutume , d'en informer Votre Majefle & de lui en donner des relations pardculieres. Ainfi i! ne fera pas a j, propos que je fafTe la merae chofe. II faut feulement que je dife 3, en peu de mots qu'il y a a prefent cinq femaines que nous nous te- nons coi dans 1'efpe'rance d'amener la Negociadon a fa fin. Mais les Franfoi's & Mr. Salvius trainent d'un jour a 1'autre les Traites en lon- gueur fous pretexte de la reflexion qu'on doit faire fur les Alliances, ,, auffi bien qu'a caufe des fubfides : deforte que non obftant toutes les ,,, peines que je me donne dans cette affaire, je ne puis pas 1'avancer auffi bien, que 1'ordre rigoureux donne de la propre main de V. M. nous ,., le prefcrit. II me femble qu'il faut que V. M. ait donne un autre ordre a' part a Mr. Salvius fur fes intentions , lequel ne s'accorde pas avec la ,, minute de la lettre que V. M. nous a addreffce conjointement a nous deux i fans_ cela je ne crois pas qu'il fe comportat comme il fait. Le terns 128 MEMOIRES CONCERNANT L'an. n terns fera connoitre toutes chofes. Cependant je ne manquerai pas c 7 e 48> if _ contribuer de tout mon poffible pour finir 1'ouvrage. Touchant le paieraent des gens de guerre , je ne puis non plus rien determiner ici, parcequenous ne pouvons recevoir auffitot la-deffus 1'ex- plication du Felt-Marechal , ce qui eft fort facheux , car je prevois que le terns neceflaire qu'il faut pour avoir cette reponfe donnera occafion ,, de nous blamer & de nous charger de la faute de la lenteur de la Ne'go- ciation. Ceft ce que je crois devoir rapporter pour me difculper dans la fuite, fi la faute du de'lai de la Negotiation me devoit etre imputee , comme il a plu a V. M. de faire dans la Lettre fusmentionnee qu'elle nous a ecri- tedefa propre main : furquoi je mefuis de'ja auparavant tres-humblement explique. Mais comme il n'a pas plu a Votre Majcft^ de me faire la grace de me notifier, fi ma reprefentation lui a ete rendue, il faut que je laifle cette affaire jufqu' a mon retour en Suede, s'il plait a Dieu, que 9) je fouhaite de grand coeur. Je finirai ici, defirant ardemment que Dieu conferve V. M. dans une longue & haute profpe'rite , & lui donne un 3, regne heureux ! Je demeure , &c. a Munller le 28 T /^ A Juin 1647. JEAN OXENSTIERNA AXELS-SON Soit qu'il eftt fait ces Lettres a la Reine de fon propre mouvement , foit qu'il les eftt ecrites par 1'avis prealable de fon Pere, il eft probable, que ces deux reponfes venant a la connoiflance du Senat y auront excite des mouvemens differens, felon que les uns fe feront declares pour la Reine, ou pour le Chancelier. II femble auffi qu'on aura pil trouver quelque con- trariete dans la conduite de la Reine , qui , dans la lettre qu'il n y avoit qu'environ deux mois qu'elle avoit ecrite a Oxenflierna , le reprimanda vi- vement, comme s'il y avoit de fa faute dans le retardement du Traite de Paix , mais qui a prefent ne vouloit pas qu'on vint a une condufion fina- 11 fe fait le , vti que 1'interet de la France le demandoit ainfi. Quoiqu'il en foit , 1'ef- d"a C ccommo- ^ c ( 3 ue cette correfpondance produifit , fut une efpece d'accommodement dement en- entre la Reine & le Chancelier (a) : lui ai'ant declare qu'elle n'avoit pas e- grsm'd-' cr ^ c ^ ^ on fi' s l a ^"re de reprimande en mauvaife intention ou manque de bicnveillance pour lui. Ce fut auffi dans cette occafion que Ton fit com- prendre a la Reine qu'elle ne devoit pas trop fe fier aux infinuations de la Cour de France, (b) puifque ce n'e'toit pas tout de bon, que cette Courtra- vailloit a retablir la paix en Allerwgm; elle meme ne voulant pas faire fa paix avec YEfpagne. Mais les envieux du Chancelier avoient le fecret d'en- treten ^ r toujours la Reine dans fa forte inclination pour les Franfois, & tou- cette lettre a Mr. Salvius en fera une nouvelle preuve. jours portee pour la ( a ) Vdez ci-deffuf U lettre du Cbancelier (&) V. Ludolf /. c. ad ann. 1647. pg* 1473. CHRISTINE REINE DE SUEDE. ^JAg bafiver imdfatt twenneE- J'ai regu de vous, Mr. le Chance- / draskrifweljer, Herr Hof- Her de la Cour , deux lettres > par Canceller , fowwv*/ toff w# /wr ^ uelles J T al vC ! ! n S uel f Eat fonc Jes .. rr* rt .. *ita~j Iraitez. Te nai nen ay remar- mtagit Trattaternes Jilftand^ f ino J nqueje fuis fort conten- wet ddr wid mtet at pammna an te de vos Negotiations, &que vous at lag dr belwal contant med e- f a i te s bien d'appuier la demande des (Ire negotiationer , alknajl will Francois & de parler aufli pour eux tag ddrbos delta formcila , at j ^veczQ\e:p^rticulieTQmQntdansM- giore wal at afjiflera Franfofer- ^! re contrz YEmpereur , afin qu'il ne i deras poflulater y talandes ^oit contramt de ne pouvo^r doniier j ?r A j r j i - j " u iecours a 1 LJpagne contre la rran- uiedafaarfordem-Jerdeksiden ^ n r emb ie que c eft - la mon pro- jaken mot Keyfaren.at ban mat- pre i nt eret aufli bien que celui de h te twingas at tike ajjiftera Spa- France. Je crois auffi que vous pou- nien mot Franckrike. Detjynes vez par-Ja chatouiller les Francis wara mlt egit intercjfe /a wal d ' une bonne m aniere , fur tout pen- fomFranckrikes, ocbmigtykerj ^nt que le grand ouvfage s'accro- kunnen med godt nuiner cba- toullkra Fran/bferne med det- ia, bdlftmedanwarcket des for - utan Jladnar wld foldatesquens content ement ; mafte jfordenskull ctrripera denna Occafion til at giora mig bos Franckrike gra- tieufe. Elljeft) jafdnder jage- der en Copia afG. ]. O. breftil che a Particle du pai'ement des trou- pes. C'eil pourquoi vous devez fai- fir cette occafion pour me rendre agreable aux Francois. Au refte je vous envoi'e ci-jointe la copie de la lettre que G. J. O. m'a ecrite. Vous pouvez juger par- la , comment il eft intentionne a vo- tre e'gard. Mais confolez-vous-en , puisque je fuis plus que contente de ce que je ferai connoitre bien- ,; kunneddrafdomma, bwad tot & en effetpour la mortification mod ban mot eder bar ^ men tro- de ceuxqui vous portent envie. Con- Jler eder ddraf^ at lag dr med tinuez feulement la fidelite que feu eder mer an wdl tilfrcds, ocb le Seigneur mon Pere & moi avons qu'i! - - ^./poffible 1'affaire de Bcnefeldt. Si nares jdrtrct. Tarer allenaft ] es Franpois ne peuvent garder 1'Ar- fortja iv dl bar eft er Jom bar tils cheveche de Strasbourg , faites atten- at bewifa mig den trobetfom ba- de win Salige Herr Fader ocb lag bafiver ja ofta afederfpordt. 1 det ofrlga mil lag eder an- nu en gang bafwa den Benfiil- diska Jak rccommenderad , ddr franfojen icke kan fa Stiff Stras- Tome 1. bourg, R tion t'an 1647. I 3 o MEMOIRES CONCERNANT L'an 1647- bourg, Ja at det ma komma ut POL det Jlaget Jom j uti edert poft- fcripto forniitia ; och later mig dlirpafa wifs och baftig refolu- t ion, pa det tag ma wet a migder efter atrdtta^ och befaller E- der harmed Gud alsmdcbtig na- deligen. Stockholm den 6. CMftina. Juli 1647. P. S. Jag fogar Mr bos et breftil *f Avaux, later nug zveta bwad ban iudicerar oin win claka skriftwelfe ock excufcren mig at iag ja haftigt ocb ilia skrifwer. lag bar ) Gud wet, i ftor baft skrifivit det; mina affaires til- lata mig icke mycket langt be- tdnckiande. Laga at j kunnefa Copian derafocbfdndm mig bar. tion que cette aifaire fe tourne de la maniere que vous en parlez dans vo- tre apoftille, & me taites favoir une promte & pofitive refoludon la-des- lus , afin que je puiile prendre mes mefures. Je vous recommande gra- cieufement au Dieu Tout - puis- fant. Stockholm ce 6 Juillct 1647. CHRISTINE. Apoftille. Je renferme dans cette lettre une autre pour Mr. d'slvaux. Faites-moi favoir ce qu'il juge de ma mauvaife lettre & lui fakes mes excufes de ce quejel'ai ecrite,Dieu le fait , fort a la hate , car mes affaires ne me permet- tent pas d'y emploi'er beaucoup d'at- tention. Faites que vous en aiez une copie & me i'envoi'ez ici. S'il en faut croire Mr. de Wicquefort 9 qm etoit au faitde toutes ces affai- res , (a) la Reine fe mocqua de la lettre d'Oxenftierna & Fenvoia a Sal- vlu? y qui la fit voir a Servien , afin de detruire par - la 1'opinion que les Francois pouvoient avoir de la difpofltion de la Caur de Stockholm , com me fi elle eftc etc capable de traiter fans fes Allies. Void comme il en parle dans un autre endroit : (b) Oxenjllerna & SaMus n'etoient pas ennemis de- dare's , comme d'Avaiix & Servien , mais ils etoient prefque toujours de fentimens contraires. Le premier fuivoit ceux du Chancelier fon JPere , & 1'autre dependoit entierement de la Reine, dont il avoit la confiance. On en voit des marques dans une infinite de rencontres fur tout en 1 647. quand Oxenjllerna alloit par de bonnes raifons achever un Traite avantageux avec YEmpereur , a I'exclufion de la France y fi SaMus cut voulu le iigner avec lui. Qxenflierna fe plaignit a la Reine du refus de SMus. Mais il ne fut point. (4) V. fon Ambafl. Liv. //. Sett. XX. ft. Port. II. Se& V. pag. 50. corfr. Pufenirf*- 370 R. S. Libr. XWL {. 92. ^ Libr. (b) L, c. Sett. XVI. p. 369- item. Liv. II. J: 59. 76-78. "CHRISTINE REINE D . SUEDE. 131 point e'coute (*); JFkquef&rt ajoute (). Les Princes ne rencontrent L ' an pas toujours des Miniflres qui meritent leur confiance comme il paroit par Seroien & Salvius, qui n'avoient d'autres vues que Jeur propre interet qu'ils trouvoient en la fatisfaftion de ceux qui les emploi'oient. Auffi a 1'egard de S*biuf 9 Chrijline, qui fe piquoit de favoir recompenfer le merite , Jui promit plus d'une fois de J'honnorer de la dignite de Senateur, & meme d'une fonftion plus eminante, s'il y en avoit une telle dans le Roi'aume. Ses expreflions la-deffus dans fa lettre a Salvius du lo.d'Avril i<547rappor- . Ls [; res -tee ci-deflus font bien flatteufes pour lui, & celles que contiennent deux "]"? autres de fes lettres, ne le font pas moins; Les void: Satvw. Stockholm den 18. Novem- bre 1647, Stockholm le 18 Novembre 1647. *Ag bafiver nu i hinglig tld II y a long-terns que je ne vous ai J intet skrifwit eder till , mi- ecrit. Tant d'affaires que j'ai fur les ne mange affaires bafwa mig fa ^ ras > m 'nt tellement occupee, que occuperat , at tag icke bafwer J 6 , ^' ai P u trou ver le terns qu'il me kunnat anwandaja mycken tjd fa]oit P our cela. Vous me fenez un fomdartilfordras, d^giort j mig /for tort , darjfdUe nagot a 1'arTeftion que vous vous etez ac- judicium dar om^Jom kundeprtf- quife aupres de moi par votre fide- judicera den ejllme oeb goda af- lice , par vos bons fervices , auffi 3 fom eder trohet ocb im- bien ^ ue P ar d 'autres grandes quali- ' portante tienfler , fa wdlfom e- e P re de vous maruer bien- dre andre Jlore meriter fig bos '^ ce ne font P 01 ? C r ? /-.. y / 7 r J ^ fa wo- re det mycket godt , ocb giorde y mig en bebagelig tienft dermed\ dock matte alt drifwas med ma- neret-> fine publico detrimento, foutiendrai votre fortune centre tous vos envieux , & que je ne permet- trai jamais, qu'ils vous oppriment, puifque je fais adez que toutes les perfecudons qu'on vous fait, n'ont d'autre fource,que celle-ci , que vous avez agi en honnete homme. Dans les affaires publiques vous n'avez qu'a vous conformer purement & {imple- ment a mes inflruttions publiaues, parce que je vous y ai declare & cir- conftancie mes fentimens. Ainfi je ne faurois me refouvenir d'autre cho- fe pour le prefent. PICit a Dieu que les affaires per- miffent que vous puiffiez faire un voi'age ici ! car je voudrois bien vous confulter fur certaines chofes que je ne puis mettre fur le papier. Ce- pendant il fatit que je prenne patien- ce , & que je voie comment les cho- fes iront. Si les Ne'gociations de paix du- roient plus long - terns , je ibuhaite- rois d'avoir avec vous un commerce de lettres en chiffre , dont aucun au- tre que vous , le Comte Magnus & Nils NllJJbn n'euffent connoiflance , car je me fie entierement a vous trois. Cependant le terns nous in- flruira de ce qu'il faudra faire. Je vous prie d'emploi'er vos foms au fujet de Bemfeld & de m'en don- ner tres - exa6tement avis. Si mon projet pouvoit reuflir , ce feroit une fort bonne chofe, & vous me ren- driez en cela un agreable fervice. Ne'anmoins tout doit etre poufle a- vec les formalite's requifes , fans qu'au- cun dommage foit porce a 1'interet ccb pu- CHRISTINE REINE DE SUEDE. 133 och "bejaller Eder harmed i Guds public. Je vous recommende a la L ' &n protection Divine. leskydd. Cbriftina. CHRISTINE. Voici la feconde lettre de la Reine a Sahius fur le meme fujet. de Stockholm le 27. Nov. 1647. Je me fuis fuffifamment explique'e dans ma pre'cedente lettre des inten- tions que j'ai pour votre perfonne, & ainli je fuis afTuree , que vous au- rez fujet d'en etre content. Ne craignez point vos envieux , & croi'ez que je vous protegerai & vous de- fendrai centre eux. Je n'en parlerai pas davantage pour cette fois , mais je remettrai tout a Dieu & au tems. Tout eft ici , graces a Dieu , en bon e'tat. Je fouhaiterois que Dieu voulut nous accorder la paix au tems fixe pour mon couronnement. Le Chanc fait fort le fouple. Mais quoiqu'il en foit , je crains les Grecs , lors mme qifils apportent des prefens. (fed quidquid eft , timeo Danaos & donaferentes.) Jeremarque tous les jours de lui ce que Tacite dit de Tiber e: jam Tiberium corpus y jam nires , nondum dijjimulatio deferebat* Sed dabit Deus his quoque finem. Le corps & les forces manquoient deja a Tibere , mais la diffimulation ne 1'abandonnoit point encore. Mais Dieu mettra auffi fin a tout ceci. Cependant Dieu me preferve de lui fouhaiter du mal. II faut que j'attende comment les Ne'gociations de Paix fe pafleront. Pouflez-les le mieux que faire fe pourra. Chanut fut chez moi ces jours pas- fe's & me dit , qu'il avoit ordre des Ple'nipotentiaires qui font a Munjler y de me prier,,que je vous ordonnafle d'aider par une cooperation aflidue a R 3 fa- ^JAg bafiver i mit forcgangne J brefi mig nogfamt fbrklarat om mm intention emot eder Per- fon, fa at lag ar forjdkrad ^ at i skole bafiua fujet de Contente- ment. Frucbtar eder mtet for edra invidos, ocb warer forjdk- rad, at lag skal maintinera eder emot dem. Jag wil denne gan- ger, intet mera rora ddrom^ utan remitter a alt til Gud ocb tiden^ bar bemmajlar alt Gudi skie laf ! i goda Terminis. Jag skulle onska , at Gud wille fbrldna frid till Kroningen. Riks Can. . . fait fort le fouple ; fed quidquid eft, timeo Danaos & dona fe- rentes. lag Jpor alle dagar pa bonom det Tacitus fdger om Ti- berio. jam Tiberium corpus, jam vires , nondum diflimulatio deferebat. Sed dabit Deus his quoque finem. Docb ware det Jangt ifran mig , at iag bonom nagot ondt onska skulle. Hum freds bandelen afldpa wil , mafle iag forbida , dr'ifwer den med alle macbt fom Jig baft giora la- ter. Cbanut war bos mig for nagra dagar je dan > ocb fade baf- wa ordre af Plenipotentiariis i Munjler , mig at bedia om befall ning til eder 3 at j wi/fe Me/pa med 134 MEMOIRES CONCERNANT L'an 1648. medflltlg cooperation at facilitc- , ra dcras Trattat > ocb i Jynner- bet at j a pled ferine 3 willejla up- ' pa tiilikameddem*> uti Lottrin- giskefaken , ocb om den affj/len- cejom Key Jar en pratenderar at giora Spanicn. Giorer derutln- nan eder flit ocb affifterer dem med en godrejolution ocb belt alf- ivar. Jene doute point que MeJ- fieurs les Plenipontentiaires ne vous par lent plus amplement fur ce fu jet. Content 6s leur defer a~ vec la meme paffion que je m'y in- terej]e> & J aches que je vous re- commande les inter ets de la Fran- ce a les tr alter & de vous y em- ploier aujjl foigneujement que vous lefaites aux miens 3 afin de t6- mQigner a tout Tunivers que no- tre amitie & notre alliance font indijjolubles. Adieu Chrijlina. faciliter leurs negotiations, & parti- culierement d'infifter conjointement avec eux de pied ferme fur les affai- res de Lorraine , de meme que fur 1'afli (lance que YEmpereur pretend donner a YEfpagne. Fakes done en cela vdtre poflible , emploi'ez vos foins , & Jes foutenez d'une bonne refoludon & d'un zele ardent. Je ne doute point que Mrs les Plenipo- tentiaires ne vous parlent plus am- plement fur ce fujet. Contentez Jeur defir avec la meme paffion que je m'y interefle , & fachez que je vous recommende les interets de la France , de vous y emploi'er auffi foi- gneufement que vous le fakes aux miens , afin de temoigner a tout 1'u- nivers que notre amitie & notre al- liance font indiflblubles. Adieu. CHRISTINE. Cbriflint fait Sa'-jius Se- nateur de Suede. II demands In continua- tion de la protection dc la Keine. Quelques mois apres la Reine effe&ua la promefTe qu'elle avoit fake a Sahhis & le de'clara Senateur de Suede , avec le Baron Little alors Gouver- neur de Leipfic. Mr. Chanut dit la-defllis : (a) que par cette elevation de &z/- WMJ-,perfonnageconnu par les emploisqu'il avoit eus& par fa fuffifance , qui e'toient les feuls degres par lefquels il montoit a cet honneur, on efpe'roit qu'au fujet de cette promotion , 1'e'galite qui fe rencontreroit entre le Com- te Oxenftierna & lui , les maintiendroit en intelligence : Mais d'autre cotd la Maifon d'Oxcnftierna s'e'tant oppofee autant qu'elle avoit pu a fa recep- tion dans le Senat; il y avoit lieu de craindre, que cela n'aigrit davantage les efprits & ne rompit toute leur apparence d'union. Cependant la Reine, qui favoit fi fouvent aflure de fa protection centre tous ceux qui lui etoient contraires, n'ecoit nullement d'humeur de leur a- bandonner fon ouvrage. Salvius Ten fupplia de nouveau dans fa lettre de remerciment. 11 y fait en racourci le detail des fervices qu'il avoit rend us a 1'Etat pendant trente annees, & tache de prouver par des raifons & des exemples, meme de fon terns, que le merke& la capacite ne font pas tou- jours (a) Duns fes Mem, Tom. I. />.ij. 272. CHRISTINE RE INK DE SUEDE. jours 1'appanage de ceux qui peuvent produire leurs feize quartiers. La L ' 3n - Reine s'expliqua la-deflus elle-meme dans le Senat en ces terries (a) Quand _ 16 ^' il eft queftion de bons avis & de fages confeils, on ne demande point L'efpm les Seize quartiers , mais ce qu'il faut faire. Salvius feroit fans doute un " >eft P ai homme capable, s'il etoit de grande famille. Cependant il peut comp- de p s p eize ge ter pour un avantage qu'on n'aic autre chofe a lui reprocher. II m'im- , MS- Ql iiS G. V. nuper de bonorttus fcripfet , projocis accipio , talefque repono.... Quid d: mea manfione tandem futurum fit, etfi anxie inquirere non conftitui, tamen follicitudo -jsl invito obrepit , itaque cum quid intellexerit G. V. quafo paucis aperiat. ,, Nullibi enim vel domwn vel bortum,vel quidquam aliud pour la retraite de la vieilleffe, ,, fi diutius I'ivere debeam , rerum omnium incertiis parare poffum. Quod qttamquam viro ,, forti minus grave mdtri debeat , non exigua tamsn buir.ume feiicitatis pars eft , /cz're, ,, ubi commode fenescas f moriaris. Sed oportet omnes Aulicos Stoicos ejfe, ^ boc unico mundano remedio folari , cetera e divinis Jupplere. (i) Palnnkold 1. C. 136 MEMOIRES CONCERNANT 99 q u { augmenteront , plfltot que de diminuer par leurs applaudiflemens les peines de ce*te fortune-ci , ne cro'iant perfonne autre digne d'y parvenir que ceux qui peuvent faire montre de feize quartiers. Ceft pourquoi j'aurois bien voulu eviter 1'envie & toutes ces peines & n'en refter pas moins durant toute ma vie fidele fervkeur de Votre Majefte. Mais puifqu'il a plu a Dieu, & a V. M. dedonner en ma perfonne a tous les ferviteurs fideles & qui aiment la vertu , un exemple fi eclatant & qui fera porter a tout le monde ce jugement de la bonte & de la fa- gefle de V. M. (repetidere virtuti & bene meritisfua pramia) qu'elle recompen - fe la vertu & les bons fervices , puifqu'il lui a plCi de gratifier un homme pour en encourager plufieurs autres ; ma reconnoilfance me doit atta- cher d'autant plus a bien fervir V. M. II eft vrai que je ne faurois produire mes feize quartiers. Je neconnois pas non plus un feul Roi'aume ou Republique , qui regarde cela comme eflentiel a un Senateur (de fubftantia Smatoris:) quoique je trouve equjta- ble, que ceux, qui non feulement par leurs propres qualites & fervices ont me'rite depareilles marques de fa veur, mais dont encore les Ai'eux ,, les ont acquifes par des actions vertueufes, jouiflentde prerogatives mo- derees , & je tacherai toQjours de m'acquitter envers eux de ce qui leur eft dft , comme auffi de refpe&er & d'eftimer tous & un chacun felon leur naiflance , etat & merite. Mais j'efpere en meme- terns, que comme je ne i^arviens pas acegra- de fans 1'avoir merite en quelque maniere, que jefuis deja dans le declin de l'age,& qu'a caufe de celaje nepuisguerresetre Senateur que denom, ,, n'a'iant pas non plus des enfans, de la part defquels les envieux pour- roient apprehender quelques prejudices d'engagemens ; toutes les perfon- nes raifonnables fouffriront bien , que je jouifle pendant le peu de terns qui me refte a vivre de cet honneur qu'ils fa vent devoir expirer a ma j, mort , qui n'eft pas fort eloignee. La chofe au refte n'eft pas fans exemple dans la Patrie. Car fans par- ler du vieux terns , il n'y a guerres plus d'un fiecle que les Eveques a- voient feance au Senat. Us etoient rarement nes Gentilhommes , nean- moins ils occupoient les premiers fieges au Senat. On remarque enco- re la meme chofe dans la Grande-Bretagne , meme depuis la reformation de 1'Eglife. Dans I' Empire , en. France, en Efpagne, en Pologne, en /- talie 9 les Miniftres d'Etat fontadmis, fansegard au Fere ou a la Mere, mais uniquement par leur merite, au Confeil intime, &font recompen- fes comme les autres. Le Prince d'Eggenberg n'etoit au commencement ,, que Notaire: Le Baron P/Vfo/wejwetoitPrecepteur des Enfans de Traut- mansdorff. Le Comte Pignoran Ambafladeur d'Efpagne & Andrade celui de Portugal, ont tous les deux etc Profefleurs en droit. Le Comte Ser- vien etoit Procureur au Parlement : mais il a re^u aujourd'hui une lettre de fon Roi, qui le declare Miniftre d'Etat, & iciil n'a et que Lcgatus, Envoie , mais il eft deftine a prefent a devenir Chancelier de France. Bullion n'etoit d'abord que fimple Avocat, eft a prefent Surintendentdes sy finances ou Treforier clu Ro'iaume. Le Cardinal d'Offat ne favoit pas lui- 3> -CHRISTINE RE I NE DE SUEDE. 137 _ lui-mSme qui etoit Ton Pere ni fa Mere? Prefque tous les Miniftres de L>afl - ce Congres ne font que des Dofteurs en Droit. Perfonne ne leur repro- che pour cela qu'ils ne font pas de naiflance, ou qu'ils nefuflent gens de tete ou d'honneur. Ce font aufli eux , qui dirigent prefque tous ies Ca binets & Confeils non feulement en Allemagne, mais aufli dans la plu- part des Etats de \' Europe. Je n'allegue pas ceci dans 1'intention de vou- loir, en aucune maniere, prejudicier aux hauts Ordres (car il eft jufte qti'on ait pour eux le refpeft & qu'on leur rende 1'honneur qui leur eft dti) mais pour faire remarquer que ces Ordres ne doivent pas blamer ou deshonnorer les autres pour ne pouvoir pas produire letirs feize quar- tiers. ,, La Famille de Store eft eteinte. Si le dernier Comte Sture reflufcitoit ^, avec le .premier Gentilhomme de ce nom , je ne crois pas que le Com- te diroit que ce Gentilhomme n'a nulle naiflance, parce que celui-ci a etc le premier annobli & la premiere origine de 1'elevation des au- tres (*). Le droit d'annoblir n'appartient pas moins a Votre Majefte Roi'ale& au Roi Guftave le Grand qu'au Roi Magnus Ladulas. Par quelle raifon les Creatures de V. M. s'ils font gens de merite feroient elles done plus meprifables que les autres? Les difputes qui furent agite'es il y aquelques annees entre les Senateurs de Suede & ceux de Danemarck a 1'egard des 3, titres, font connues de V. M. & des autres. Par ces confiderations je m'aflure , que perfonne (a moins que d'etre fort prevenu) ne trouvera etrange que Votre Majefte m'ait confere cette grace, ni que je 1'ai'e acceptee avec une parfaite foumiflion. J'en rends done mille graces tres-humbles a V. M. & je tacherai en confequence de 1'obligation que m'impofe mon ferment, que je joins ici, de faire ufage de cet honneur pour obeir a V. M. & fervir fide'le- ment la Patrie. J'honnorerai , je refpe6lerai & j'eftimerai tous & chaque Ordre felon fon merite , & en particulier je me comporterai envers le Senat du Roi'aume de maniere a lui faire honneur & nul deshonneur. 5) Solum Majeftatem veftram obfecro, utfavoreperpetuofaftumfuumjiivet, nee y) defer at quern Ipfa fecit. Ego enitar ut potero , ne clement lam Feftram fefel- )) tiffi ^ me prior fama vldeatur. Veftri muneris erit communem caufam tueri. In bonis fenatoribus majorem gloriam qiicerit temporum fama quam jiidicium. c'eft-a-dire je fupplie feulement V. M. d'aider fon propre ouvrage par la continuation de fa faveur & de ne pas abandonner fa Creature. Je ferai tout mon poflible pour empecher, qu'il ne paroiffe que la bonte de V. M. a etc trompe'e par le bien qu'on avoit dit de moi. C'eft a elle a fou- tenir (*) La famille de Sture dtoit une des plus anciennes & des plus diftingue'es de Suede. II y cut trois perfonnes de ce nom, que les Etats firent Adminiftrateurs du Roi'aume, vers la fin du XVme. & au commencement du XVIme. Siecle , & qui rendirent des fer- vices fort e*clatans a leur Patrie. Vo'iez Pufendorf & Loccenius Hidoire de Suede. Tome / S * 3 8 ME MO IRES CONCERNANT L ' an - tenir la caufe commune. On s'attend de la part des bons Senateurs a I<5 4 8 - M quelque chofe de plus glorieux , par ce que la renommee public d'eux en certains terns , que par ie jugement qu'on fait de leur meiite perfonnel. Plufieurs perfonnes ont pourtant applaudi a mon elevation, & ces deux jours de pofte j'ai re$u de Suede vint-neuf letcres de felicitations , outre celles de bouche , dont tout ce Congres m'a honnore (a}. Que le bon Dieu conferve V. M. en fame & en bonne difpofition, & lui accorde bient6t un regne paifible & heureux ! Ce font les voeux que fait & que fera du fond de fon Ame tan: qu'il vivra de V. M. R. Le plus devoue Serviteur JEAN ADLER-SALVIUS Peu apres Mr. Sahhis te'moigna une violente paflion de faire un voi'age en Sulde pour prendre fa place au Senat , fe lier avec fes amis , & recon- noitre 1'air de la.Cour (). Comme la Reine defiroit aufli de voir une per- fonne qu'elle avoit elevee malgre de puilfans ennemis & de qui elle s'atten- .doit d'etre pleinement informee des affaires; (c) Elle jugea plus a propoa de laiffer encore quelque terns le Cointe Jean Oxenftierna a Osnabmg & per- mit au Sr. Sahhis de rapporter en Suede la ratification de YEmpereur fur le Traite de Paix. Mr. le Senateur Salmis y vint done & fut fort gracieufe de la Reine, a laquelle il refta toujours attache, qtioique la mort ne lelaiila jouir que quatre ans de fa nouyelle dignite. Pour ce qui eft de fon caraclere, voici comment en parle Mr. Servien, Miniftre Plenipotentiaire de France au Congres de Munfter, le mettant en parallele avec Mr. Jean Oxenftierna. II dit (^/) ,, que s'il avoit le choik d'agir avec 1'un des deux Miniftres de Suede , il aimeroit mieux leComte Oxenftierna que le Baron Safo'ms , jugeant qu'il lui feroit plus facile de ,, reduire les inegalites du premier, que de fortifier la mollefic de I'autre". & en verite, quand on epluche un peu les Memoires qui nous reftent des Negociations de Sahhis , fa conduite , reglee fur une fineile ou circonfpec- tion trop grande , ne fauroit etre tout a fait exemte de critique (i) (*). Quam (a) V. Meiern A&a Pads Weftphal. (rf) Chanut /. c. pag. 375. Tom. IV. pag. 754. 760. &fc. () elle fe paffoit de lui en plufieurs rencontres , ne le confultant que comme les auires Miniflres fans mar- quer la difference tres-grande , qu'il y avoit de fon experience a celle de fes autres Confeillers." Ainfi il etoit affez naturel , qu'un homme de (a) Ambaff. L. II. Sett. IL pag. 20. "- Tern. //. p. 150. tern Mem. Secrets de la Paix de Munlter ^b) Vans Jes Mem. Tom. I. pag. 163. & frivole de notre J^fuitefied bien peu a un Ecclefiaftique, qui a peine auroit pii fefer- vir de pareillcs expreflions, s'il avoit eu a parler de quelqu'un des Miniftres des Iro- quois. Ce meme Ecrtvain (i),> dit de Mr. S&lvius, qu'il avoit beaucoup de capacitd & une grande connoifiance des affaire?. II manioit meme avec beaucoup d'addreiTe une nd- gociation. Cette addrefle ^toit cependant en lui un peu tnrdive & n'(toit que le fruit de plufieurs reflexions. II e"toit extremement diffimul^, habile acacher fes fendmens, & attentif a d^couvrir ceux de fes adverfaires. Mais fa penetration alloit fouvcnt trop loin & le rendoit inquiet & foupqonneux. II - roit jamais, qu'il avoit ete fon prifonnier: Mais comme Charles etoit regar- de en France comme extremement attache a la maifon d'dutriche, on trou- 'va qu'il valoit mieux avoir en Pologne un Roi , qui changeat fouvent que (fen avoir un qui fut conflant ami des ennemis , & que fa detention aiant ete jufle, comme le pretendoit ia France, il n'avoit pas fujet de fereflentir de la prifon oil il avoit ete traite fort-civilement (*). Sur ces entrefaites Chriftine reciit deux lettres de Pologne, 1'une de la Rei- ne &' 1'autre du Prince Charles, oil Ton demandoit inftamment 1'appui de la Suede en faveur de ce Prince. Ce fut aiiffi une des raifons qui porta la Reine (*) C'eft ainfi que Chanut s'expliqtic dans fes Mmpires & le P.. Bougeant en apport'c encore d'autres excufes (i). Mais c'eit tout p.utrement qu'Ebcrhard Waffcnberg (2')par- Comment j e ^ C ette prifon du Prince Cafiinir. L'occafion en fat, que ce Prince voulapt aller Ca/mir fut en 1638. en Efpagiie , fut jett^ fur les cotes de France dans la M^diterran^e, ou il fut cirpriibmic reconnu, arrttt^ & conduit a Salon, de la a Sifteron, &a la fin dans une prifon allezdi:- cu Fr,is..c. re au Bois de llacennes , d'ou il nefortit qu'aux inftancesreiterdes d'une Ambafiade fo- 'cnnelle.du lioi Uladijlas de Pologne, fon frere, & apres avoir donn des aflliranccs formelles, de non offendendo , c'eft-a-jire, qu'il ne t^moigncroit auctin rcffemiment de fa dt'.'rcution. (\j \. c. pnc 379. cer Gallicus pafliui. (i) Dans Jikar.r.is Cafimiri Principis Pol. Car- CHRISTINE REINE DE SUEDE. Reine Chriftine as'interefler pour lui, preferablement au Prince Cafimir (a). L ' ari Neanmoins comme tous les avis qui venoient de Pologne , difoient , que le parti du Prince Cafimir etoit en apparence le plus fort , & que celui-ci s'e- " toit aufli addreffe fecretement a la Reine par une lettre, ou ce Prince 1'affura , que fi elle favorifoit fon election , il reconnoitroit cette grace par une eternelle amjtie, & qu'il apporteroit de telles facilites a la paix entre les deux Roi'aumes, qu'elle en feroit contente, ce fut fur cette affaire que Cbriftine ecrivit au Chancelier Qxenftiernapour lui demander fon avis, .Voi^ rf>ri/f; " f ci la lettre: - Upfalce 9 Septembre 1648. Chancelier K H\ rogtdrade Herr Riks Cantz- ler. Jagfickrattnu paftun- den Edert brefmed Prints Cafi- mirs derbosfogat 3 ocb me dan jag ett Jlikt icke latteUgen bade for- want at, sa kommer det nog baf- tigt uppa, at iag icke pelf wet bwad i'ag derom skaldomma : Jag f cinder det bar bos in originali, beder om godt rad i faken bwad mig befl dnftar at giora ocb bwad iag darpa skaljwara. Jag kan an icke Je nagon raifon jom mig matte mover a atforandra i Can - teri inftruffion: docbjlaller iag alt til Edert goda betanckiande ^om i medlertid mig nagot infaller > skal iag gifwa Eder det tilkanna. Et kommer mig sal jamt fore , at ban legdrar mm affiftance i konunga- ivalet ocb ticxklikwal gijwer ban fin Brode'r. tiiukn af ' S wer ige 1 3 . ' bivilkef fuller mafle kommas tbog genom Can tern m. At ban sbij- wii i Fransoska ar utan twijwel for dm orlakensskuldat undwika Controverfien med tittlar yOm pj, famma fprak skal Jwar as ft aller iag (a) Cbanut /. c. pag. 333 ^f 338. Tres-honore Sieur Chancelier du Roiaume. Je viens dans ce momenc de recevoir votre lettre avec celle du Prince Cafimir, & comme je n'ai pas eu lieu d'en attendre une pareil- le , elle me furprend deforte , que je ne fais qu'en penfer. Je vous.l'en- voi'e ci-inclufe en original , defirant de favoir votre fentiment fur ce qu'il me conviendra Je mieux de faire, & fur ce que j'y repondrai. .Je ne trouve encore nulle raifon qui punTe me porter a changer I'milrucliion de .Canther. . Mais je me remets en tout a votre bon avis. Si en attendant il quelque chofe dansl'efprit, je ne manquerai pas de vous en fai- c'eil qu'il dernande rnon affi fiance pour I'ele6lion au trone, &quemal-' gre cela il donne le titre de Prince de Suede a fon Frere. On ne doit pas oublier de Je faire remarquer au Sr. Carithcr. Qua le Prince . : ait ecrit en FranfoiSy la raifon efi l lera ians doute , pour eviter les difficuiteidans les litres. Je laifTeavotre jugernent, n 144 MEMOIRES CONCERNANT tag OcktilEdert betanckande ^ocb fi Ton repondra dans la meme lan- befaller Eder bar med IGuds be- S ue - J e vousrecommende a laPro- skdrm ocbforblifwer Eder altid tedlon Dlvme & J e fuis toa J our * Witt ajfettionerad Votre bien-affeftionnee Cbri/lina. CHRISTINE. . P. S. Apoftille Printzen utifit brefformaler Le Prince fait mention dansfa let- t annat fom Comte de Bregy tre d '"" e e bafwa skrifwit mig til. JJS*? i j * 7-7 / j r^H-j pas recue. Jwr dft tikwitf mtet Jan. f ormer de Jag ber j wille informer a Eder - m n ter - lSt bos Chanut buru dermed dr be- Aiant donne celle-ci au Courier skaffat. lit in literis. pour vous la porter , mon Secretai- Sedan iag hade gifwit detta re vient de me rendre la dite lettre brefwet fa Enfpdnnaren fom det & *&$* cha * ^ avoit donnee didlp fnr* in Inm min Secret- P our m etre remife ' J e vous i e " V( ? ie tfuuejora, jakommm secret- ci : ointe en or ig ina i ? &j e fouhaite rerare ocb fickmig ojwannambde que rune & rautre me fofcnt ren . Bregis bref> fom Chanut bonom dues. bade gifwit) mig at ofwerlefwe- rera. lag Jdnder det ock bar- bos in originali ocb fage gierna at iagfinge dem bade hit til ba- kars igen. Enreponfe, le Chancelier demeura d'accord, qu'il etoit de 1'avantage lief ?r nce " ^ es d eux Couronnes, de Suede & de France, que Cqfimirf&t prefere, mais pond. nue la Reine ne devoit pas encore fe declarer ouvertement en faveur de Fun ni de Tautre des Freres: qu'on auroit, en attendant, pour agreable que les AmbafTadeurs de France en Pologne emploiaffent tous leurs offices en jfaveur de ce Prince: que pour le titre de Prince de Suede que le Prince Ca- fimlr fe donnoit , on trouveroit des moi'ens d'ajufter par un Traite de paix cette pretenfion avec les autres points conteftes : qu'il feroit bien a fouhai- ter, que fa_Su.ede pfit parvenir a la conclufion de ce Traite avec la Repu- blique meme avant que l'elecl:ionde fon Roi fut faite, (^)&que cette paix fe feroit a ces deux conditions , favoir , que la Pologne renonceroit pour ja- mais a la Uwriie, & les deux Princes Roi'aux a toutes leurs pretenfions fur laCouronne de Suede: que pour la Livonie, fa Suede ne la pofledoit pas feu- lement par le droit des armes, mais qu'elle avoit outre cela d'autres bons litres : que pour les pretenfions de ces Princes , il y avoit pres de cinquan- te (a) Pufend J. c. Chanut /. c. pag. 112. 342 ? 34P- CHRISTINE REINE DE S'UEDE. te ans , que les Etats du Roi'aume de Suede avoient declare leur Pere & L ' fln toute fa poflerite dechus de leur droit a la Couronne de Suede , pour avoir embraffe une Religion qui en etoit bannie par les loix fondamentales du " pais : que quant aux avantages que ces Princes vouloient qu'on leur accor- dat, s'ils renonjoient a leurs dites preventions; le Chancelier etoit d'avis, qu'on ne pouvoit Jeur rien offrir, parce que,, toute paix ou une des par- ties cede du fien,,ne fe fait jamais, que par force &contrainte" &que la Pologne, en retatfTinterregne ou elle etoit, &attaque'e par les Tartares, feroit apparemment bien aife de s'affurer du cote de la Suede par une paix perpetuelle:: qu'enfin , il valoit mieux n'entrer point en traite" avec les Po~ /omr, que de s'y engager , avant qu'ils fuffent re'folus fur ces deux points : qu'autrement I'affemblee fe romproit aux premieres feances , & que ce fe- roit abufer les Mediateurs (a). Telles etoient les confide'rations du Chancelier , qu'il envoi'a par ecrit a la Reine, qui-etoit alors kUpfal d'ou elle lui avoit ecrit Ja lettre, dont il eft queftioa, & ces raifons avant eu 1'approbation de la Reine: il fit ex- pedier des lettres de recommendation a la Republique de Pologne en faveur du Prince Cafimir, avec ordre au Sr. Canther, de ne les prefenter qu'apres avoir confulte Jes Ambaffadeurs de France ^ & de ne les point donner, 4 moins d'un effet certain en faveur de ce Prince: qu'autre*ment le Sr. Can- tier fe ferviroit d'une autre depeche en faveurdu Prince Charles, H ce Prin- ce , par ce moi'en pouvoit obtenir la Couronne. i La decilion de cette affaire balanja aflez long-terns entre les differens -andidats, qui s'etoient faits prefenter a I'ele&ion d'un Roide Pologne. On cut pourtant des nouvelles reiterees des bons offices que les Ambaffadeurs aJ^don de France , portes par 1'interet propre de leur Cour , avpient rendus dans a uiadiji* s cette affaire. Mais la Reine Chriftme ne fut pas peu^chee de ce que ces ^^ ^ Ambaffadeurs avoient traite le Prince Cafimir de Roi de Suede, & fe plai-de Roi de gnit que la France lui faifoit tort en cela. Le Sr. Chanut ne put s'en mieux SueJe ' excufer qu'en avoiiant que la Cour ai'ant appris les avances , que fes Am- baffadeurs avoient faites les avoit desapprouve , & qu'elle cut bien defire que fes Miniflres fe fuffent abftenus de donner cette qualite a ce Prin- ce (*). A la fin, au mois de Decembre 1648. arriverent les nouvelles, que le Ca ,. r a Prince Cafimir avoit etc elu Roi de Pologne , & qu'il fe faifoit un mariage Rol '?"jv entre lui & Ja Reine Douairiere, Marie Louife de Gonzagne fille du Due cte2S* da ^[ Man- guerre qu'il s'attira de la (*) A la deinande que Cbriftine fit a Cbanut (i) a cette occafion, fi le Roi de France , en e'crivant au defunt Roi de Pologne, lui avoit donnt* le tltre de Roi de Su&de, il rt^- pondit que non : ne fachant pas autrement, a ce qu'il die. Mais il eft certain, que la Cour de France traita le Roi Uladijlas de Roi de Suede , & quand la Cour de Suede en porta des plaintes, celle de France repliqua, qu'elle avoit donne ce titre au Roi de P- iogne, comine inpetitorio, & au'Roi dc Su&de comme in pojfejforio dc ce Roiaume. f i) 1. c. pag. 357 & 3 eg , Tome L T 146* MEMOIRES CONCERNANT L'an 1648. Mantoue. Chrijline en temoigna beaucoup de joi'e. Mais comme apre 1'abdication de cette Reine , le Roi Cafimir publia une proteftation (a) con- tre J'avenement du Roi Charles-Guftavc au Trone de Suede > auquel Cafimir pretendoit par droit de reverfion , malgre les aflurances donnees au con* traire , & que ia Republique de Pologne vouloit revendiquer fes droits fur la Livonie ; le Roi Charles-Gvftatoe fut oblige d'attaquer la Pologne de vive force J'an 1654, ou dans la premiere campagne, iiconquit la meilleure partie de ce Roi'aume, & en chafla Cafimir, qui fut omtraint de fe fauver. en Sikfie. L'annee d'apres , il voiia fon Roi'aume a la fainte Vierge & le recommenda a fa protection ; mais cela n'empecha pas , qu'il ne perdit la grande Bataille de trois jours , pres de Varfovie , centre le Roi Charles- Guftave & I'Eie&eur Fredmc-Guitiaume de Brandebourg. Apres la mort du Roi de Suede en 1660. la paix fe fit a OKva r oii le Roi Cafimir, & la Republique de Pologne, renoncerent a perpetuite aux pre- tenfions qui avoient occafionne cette guerre. Cafimir, qui en tantde ren- contres avoit eprouve I'inconftance & les revers de la fortune , fe fentant moins propre que jamais au gouvernement de fon Etat , apres la mort de la Reine fon Epoufe, prit la refolution de refigner fa Couronne 1'an 1668. & mourut 1'an 1672. a Nevers en France, fans laifler d'enfans. C'eft avec lui que s'cteignit cette branche Pohnoife de la Famille Roi'ale Suedoife de Wafa : car quant a fon frere Charles-Ferdinand: il avoit embraffe 1'etat Ec- clelkftique , fut Eveque de Breflau & de Plotsko,&. mourut fans poflerite. Pendant que 1'affaire de l'eleel:ion d'un Roi fe traitoit en Pologne 9 le cou- rier apporta a Stockholm le 31. O6tobre 1648. les nouvelles de la con- fl'i. clufion de la paix de Weflphalie. II y avoit apparence, dit Chanut , (b) que %e a termi- tout; ] e monde en feroit content , mais les mouvemens qu'il fe donna pour aer a gua- ^ couvr j r ce q u ' on en penfoit le convainquirent qu'il y en avoit quelques uns qu'elle avoit plus etonnes que rejoui's. Pufendorf rapporte diverfes con- fiderations fur cette paix , a peu pres en ces termes: ,, Apres qu'on cut contefte fept ans au fujet des Preliminaires , on entama la negociation a Munfter & a Osnabmg , pour eviter les conteftations qui auroient pii fur- venir entre la Sueds & la France- touchant la prefeance (*) comme aufli ,) par- (0) Pufend. de Reb. CaroliGuft. Libr. I. Suede T. II. p. 407. Mercur. di Siri Tom. J c Prade Hijl. de Guft. Ad. ^f de Charles X. p. 344. Nani Hifl. di Fenetia Lib. HI. laix de Weftpbalte & motifs Guft. pag. 288 f 289. Kockou a Kochows ki Amal. Pol. paj/im. ft) /. c. pag. 353. 354- Pufend. Hifl. de p. 116. Relat. Hiftor. ad ann. 1648. p. 69. 76. fcfcr. ~Li France (*) Ce fut par cette confide'ration de I'e'gnlite' entre les Couronnes qu'on choifit au eherche la Congres de cette Paix tin endroit a diftance d-gale entre Osnabrug & Munfter , ou les gre'feance Ambafladeurs des deux Couronnes pufTent fe rencontrer au commencement du Traite",. pour s'entretenir enfemble, fans que Tun put fe vanter de quelque avantage fur 1'autre. Ce n'eft pas que la France n'ait toft lours cherche" ax'ec empreffement la preTe"ance furies autres Couronnes. Le Sr.de Qbarflajje" Ambaffadeur de France envo'it 1'an 1630. versCw- flave-ddolpbc pour conclure un Trait d' Alliance entre lui & Louis XIII. pretendoit tovu lurles autres couiotmes. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 147 w parce que les Suedois ne vouloient rien avoir a demeler avec le Nonce du Pape, ni eel ui - ci avec eux. On n'avoit jamais vu jufqu'alors d'aflem- blee fi folennelle ni fi confide'rable , compofee d'un fi grand nombre d'Ambafladeurs & Miniflres Plenipotentiaires des Potentats de V Europe. C'eft-la , que toutes les fmefles des Negociateurs furent mifes en ufage. Ce qu'il y eut de plus glorieux pour les Suedois y c'eft, qu'ils contribue- rent tellement a remettre un bon ordre dans V Empire , que la plupart des differens, qui jufqu'alors avoient divife les Etats d'AUemagne* furent entierement termines. II y en eut plufieurs qui rentrerent dans Ieurs biens,& enfin la Religion Proteftante, & les privileges de tous les Etats de tout de bon : que le Roi de Sutde devoit laifler la main d celui de France dans les deux inftrumens de ratification. Mais Guftave-Adolpbe qui avoit autant de fierte", que de gran- deur d'ame,,, lui re"pondit fe"chement: qu'il ne reconnoifibit d'autre difference entre les Rois que leur me'rite: & d cet tgard dit Mr. Le Clerc, Louis XIII. ne luietoit com- parable ni pour le corps ni pour 1'efprit". La lettre que Guflave - Adolpbe e'crivit la- deffus, de StralJ'und, au Roi de France le 13 Septembre, 1630. eft conc,ue en ces ter- mes (i),, que quoique cela foit une chofe de peu de confluence, qui ne convenoit nullement, a la diminution, ni augmentation de Tune ou de 1'autre Maj'efte'; toute- fois nous avons eftime' e"tre du devoir d'un Roi de ne pas ne'gliger les moindres cho- fes, qui concernent la dignite' Roi'ale: plut6t euffions-nous fouffert la rupture de ce Traite, que de relacher aucune chofe de cette dignite", que nous avons re9ue de Dieu & de nos Ancetres Nous efpe"rons de Votre Majefte* toute afftftion r^cipro- que, & qu'elle reconnoitra que nos Majefte"s ne dependent que de Dieu feul, & ne voudra foufFrir aucune chofe contraire a notre dignite" , &c. Quoique l^galite" fe foit toujours obferv^e depuis, les Ecrivafns Franfois n'ont pas lame 1 pour cela d'indfter fur la pre'fe'rance pour lenrs Rois. Fittorio Siri & Charles O- gier (2) entre autres all^guent la-deflus quantite" de raifons en faveur de leur Cour mais tiroes de fort loin. Mrs. de I' Academic Francoife vont jufqu'a dire pofitivement que les Rois de France, ont toujours e'tfS en pofleffion de pr^c^der tous les Rois de 1' Europe: inais I'ufage qui s'obferve a tous les Congres entre les AmbaflTadeurs des Tetes Couron- n^es leur eft contraire,' & ils auront oublie' ce qui arriva a regard du Roi de SutdeVaa 1632. quand le Cardinal de Richelieu fit propofer par le Marquis de Breze, fon Beau- frere, une entrevue entre Guftave-Adolpbe & Louis XIII. a Metz. Le Roi de Sudde n'y confentit qu'i condition d'avoir le pas par tout fur le Roi de France, e"tant alors chez-lui. Nous avons dit ci-deflTus que cette entrevue n'eut pas lieu, & nous infere- rons ici ce qu'en a rapport^ le favant Cbifflet (3),, Suecice Reges infcuto cceruleo trespra* ferunt aureas Coronas, Suecorum, Gothorum & Vandalorum, ob quas cum ineunte anna MDCXXXH. Guftavo-Adolpho Regi Germaniam devaftanti, mutuus ajfatus cum Lu- dovico XIII. Francite Rege , Metis tune agents , per Brezaeum Marcbionem , Cardi- nalis Richelii nomine proponeretur. Refpondit Rex Guftavus , fe cum Ludovico Rege itct demum collocuturum , Ji is religiofe' ^f ad amttfflm obferuatam vellct dignitatis prce* rogativam, quam ipfe Suecus in gradu , fcde , ingreffu, Jibi deberi affirmabat. Qiw accepto refponfo , turbatus Richelius , ac pudore Jujfufus , urgere congrejjum Re- gum ulterius deftitit. (i) V. DuMont Corps Diplomat. Tom. V. Part. 471. Ogerii Ephemcrid. pag. 374- &c. Hijioire de \. pag. fiij.. V'ttt. Siri Tom. VII. p. 192- &c. Louis XIV. par les Me'dailles pag. 68. Me'm. de Ttmple pag. ??4- Roujfit Recherches (3) Oper. Polit. Hift. cap. XIV. confr. Meffenii pag. 8. Le Cltrc vie de Richelieu T. II. p. jz. Scand. illuftr. T. Ill pag. 57. ou il rapporte Me'm. de Cbanut Tom. II. pag. 353. 1'hiftoire arrive'e a ce fujet au Concile de Bafle. (z) Mtmgrie Rwnd. Tom. VII. p. 357- & v. auffi Pufend, de Reb. Suec, Libi. III. J. a, T" I 4 8 MEMOIRES CONCERN ANT L>nn de Y Empire furent confirmed (#). C'etoit neanmoins de quoi la France 48> fe mettoit peu en peine, parce qu'elle etoit toCijours bien aife, de voir, qu'il y edt des troubles & des brouilleries en AHeinagne, pour en profi- ter dans les conjon&ures (*). Quoique par ce Traite la Su&de acquit beaucoup de gloire , & qu'outre cela elle gagnat encore de grandes Provinces: il y eut pourcant des gens fort fenfes , qui s'imaginerent que les Suddois avoient fait la paix avec trop de precipitation ; qu'ils avoient rendus a trop bas prix les avantages qu'ils avoient remportes , & qu'ils auroient pfi. ftipuler , tant pour eux , que pour les autres, des conditions plus avantageufes , s'ils avoient encore continue la guerre quelque terns : au lieu, qu'enfuite, apres a- voir mis bas les armes , ils ne furent plus fi confideres. On peut ajouter , que les SuMs pofledant en Allemagne plus de cent places, ou ils avoient garnifon , tant dans les pai's hereditaires de la Maifon SAutriche , que dans d'autres provinces de Y Empire, pouvoient metcre fous contribution tous les pai's qui s'etendent depuis la Mer Baltiqiie , jufqu'aulaede Conjlance ; que le nombre de leurs troupes montoit au de la de foixante - & - dix mille hommes (armee tres - formidable en ce tems-la) tons gens d'elite & vieux Soldats, qui avoient de 1'experience , & qui entendoient tres-bien le me^ tier de la guerre ; que les Generaux , & les autres Officiers qui les com- mandoient, pouvoient pafler pour, les plus braves de leur terns, deforce, qu'il n'.y avoit, dans toute Y Europe-^ aucun de Souverain qui eut une armee fi refpeclable. De tout cela enfin on vouloit conclure, que fi on avoit attendu encore un an, on auroit pu porter la guerre de- 1'atitre cote du Danube , jufqu'au cceur de YAitriche & faire trembler YEmpereur. Le Lee- teur a pu voir que cette paix ainfl precipitee n'avoit point etc agreable au Ghancelier.O^^Vnz^i, ni aux autres Generaux (f). Malgre toutes ces raifons, Chriftine avoit des motifs tres-puhTans (^) qui. ]a, portoient a mettre fin a la guerre, dont les evenemens font d'ordinaire fort incertains. Ses raifons etoient entre autres, que la Hollande, qui avoit abandonne les Allies , avoit fait fa paix avec YEfpagne : que les troubles com- (a) La Harangiied'OLVerel'ms la-deffus, (b") Pufeed. Hift. de S,uede I.e. p. 408 ?, dansfes Opuscula. ,^.357. ^fc. merited' 4- 409. tre lue. (*) Pufendorf dit la-deffus : (i) Quin {>rxftare putabant Galli, executionempacis infuf- penfo relinqui, quo in futurum nova \Jitis inateria effet, quain pro re nata in ufusfuos con- vertere poffent. n Cure in- (I) Cbanut rapporte.a cette occaflon, (a). qu'il arriva dans le terns que Ton chantoit je&tve 4 le Te Deum a Stockholm pour la fignature de la Paix, qu'un Cur de la paroifle de Is Stockholm ville, qui ^toit affedfte a la Nation dllemande, fit une grande inveftive en pleine chaircr ntre cette con ^ re cette paix, a caufe que Ton n'avoit pu obtenir la Iibert6 de la Religion Luth- rienne dans les- pais hereditaires de I'Empereur & d'^clama rudement contre les Catho Jiques, cethomme, dit Cbanut, etoit Creature du Chancelier Oxenjliernu , mais ajou v te-t-il, il n'y avoit la rien de !a prudence decefage Miniftre. (^ De Reb. Suec. Libr. XXI. $. jj. (t) Me'ai. Tom. I- pagj 3tf- - . CHRISTINE REINE DE SUEDE 149 commencoient a eclater en France: deforce , que la Suede couroit rifque L?art d'etre feule chargee de tout le fardeau de la guerre. D'ailleurs que fi les , Suedois venoient a perdre une bataille generate , comme les Imperiaux vi-"" foient toujours a les conduire a ce point, ils rifquoient de perdre tout d'un coup le fruit de tant de travaux & de tant d'annees (*). Que les Etats d'dllemagne etoient las de la guerre, & pourroient prendre des refolutions defefperees; en cas qu'on attendit trop long-terns a faire la paix. Ajoutez acela, que les foldats AHemandr,qui faifoient une grande partie de 1'Armee de Suede, s'ennui'oient tellement, qu'ils n'avoient prefque plus de crainte, ni de refpeft pour leurs Officiers. Enfin que la Reine C^r/yfrnevouloitvivre en repos, & ne pouvoit plus fouffrir que fon Etat de'pendit du fucces in- certain de la guerre ni du caprice du fort. C'e'toit auffi pour cela, dit Chanut , (a) que la Reine ai'ant recu les nou- velles de la fignature du Traite de la paix SAlkmagm y cette Princefle en avoit temoigne publiquement une grande joi'e & que comme quelques tins aimoient a traverfer le contentement des autres, lui difoient, qu'il etoic fort a craindre , que cette paix ne fut pas de longue duree , & que VEmpe- r-eur ne reprit fes avantages aufii-tot que les Couronnes feroient desarmees : Sa Majefte avoit repondu : qu'elle favoit bien qu'il n'y avoit point de paix eternelle au monde, mais que la meme providence, qui avoit retabli la liberte de YAlkmagne par les armea des Roiaumes voiilns, les aflilteroit en- core pour la conferver. La Cour de ^France prevoi'ant fans peine , qu!apres la concluflon de eette La Frmte Paix, la Suede ne tarderoit guerres a licentierlaplupartdes troupes qui com- vouiou pofoient fon Armee en Allemagne , & craignant en memertems que ces trou- f^ pes ne priffent parti avec les ennemis de la France, le Roi Tres- Chretien troupes fit folliciter la Reine de Suede, que^'irdemeuroit en' guerre avec I'Efpagne, 1 * il lui plut de remettre fes troupes entre les mains de la France, & ne fouf- frit pas que fes ennemis eh profitaflent. La Reine, en aflurant le Sr. Cha- nut de fa bonne volonte la-deffus, trouva a propos qu'il en parlat a quel- ques uns des principaux du Senat. La reponfe que lui donna le Conneta- bl^' (a) L. c. -pagi 3(5r. (*) Mr. Sobering Rofenbane Miniflre de Suede demandant au favant Mr. Forftnerusfon s ent j mens fentiment fur 1'tkat des affaires de Suede en _Allemagne-^ ceiui-ci le lui'expliqtra entre r) e Ftrftner\ autres en ces termes: (i),, Poftremo audeone Tibiin auremdicere, SereniJJimam Reginam fur l 'e tat des- ,. Feftram & vos ipfos morbis in tarn tenera ^f vix incipiente (State crebro recurrentibus arTaires de mortalitatis admonere , f aulam veftram Procerum cemulatu f fa&ionibus dijjldere ! fed abominor dicere, quod cogitareabborreo, fntis eventuum, fatis cafuuml Eo quoque gloria armorum ^f vifforiarum decor ibus progriffi ejlis , ut vix ultra poffitis : Navum &johtm vittoritz genus deeft , vos ipfos vincere , bella jure, non jura bello definire , juftitiam t prudentiam ; quanta ignara militarilus animis , tanto laudabiliora capeffere , gloriojlus putare pacem fapientia firmaffe , quain bellum per acies confecijje : Sociorum civiumque. cbaritatem omnibus munimentis anteferre: belli prxmia non tarn rap ere quom accipere, (-,) Ad fio. Epift. VU- for/lntri pag. 51. ijo MEMOIRES CON C E R N ANT bi e Torjlenfon fut entre autres : que fi la France obtenoit par Ton traite 164 '.... de paix en Allemagm, que i'Ewpereur ne put en aucune fa^on aiTifter le Roi d'Efpagne centre la France, il feroit impoffible & meme deraifon- nable, que la Heine de Sw^fedemeurat en pouvoir d'aflifter la France ou- vertement centre YEfpagneique ces conditions etoient toutau moins reci- proques, & en leur egalite plus dures pour I'Empereur, qui avoit plus de liaifon avec la maifon d'Efpagne, que les Couronnes dcSutde &de France n'en avoient enfemble : qu'ainfi il eftimoit que cette affaire fe devoit trai- ter fecretement & en grande diligence pour prevenir, que les Chefs Im- periaux ne debauchaflent la plus grande partie des troupes pour le fervi- ce d'Efpagnc. A ces raifons le Chancelier Oxenfliema ajoutoit encore, qu'il etoit a craindre, que ce licentiement ne fe put f'aire, fi-tot qu'oa >, fc 1'imaginoit , a caufe des difficultes qui furviendroient dans 1'executioa 5 , de la Paix , & que meme il n'etoit pas hors d'apprehenfion que I'Empe- reur ne licentiat aucunes de fes troupes fous des pretextes bien fpecieux (*)". La Reine mme quoique fort portee pour accommoder la France de ces troupes , ne vouloit pourtant pas les engager a fon fervice qti'a con- dition , que le Roi Tres-Chretien promit par ecrit de 1'aider de ces memes troupes, & de les rendre, ou preter a la Suede , fi elle fe trouvoit fi pref- fee d'ennemis, qu'elle en eCit jjefoin.^ Cependant on ecrivit plus d'une fois (a) au Prince Charles- Guftave, Ge- neraliflime alors des Armees de Sudde en Allemagne, de s'appliquer ferieu- fernent a faire pafler au fervice de France les troupes que la Sut-de licentie- roit, & ce que Chriftine lui en ecrivit, fait foi de 1'empreflement de cette Reine a cet egard. ':. i i: '/li}-! Ov ;j> 7]//0 C ttpuiffe a- voir efperance d* engager en fon fervice les troupes quiferont licen- tites du mien. J'ai trouve cette follicitation trh-jujle & facbant que vous pouvez en cela nous rendre bon office , je tfai pas voulu man- quer de vous faire favoir 3 que vous meferez grand plaifir de tra- vailler (o) Chanut /. c. pag. 324- 327- fcf 3?o. (*) Cbanut parolt trouver Strange (i) qu'Oxenftierna voulut faire difference entre I'o. bligation de la SuMe envers la maifon d'Efpagne & celle de France , mais ce Miniftre Franfois aura oubli^ que la Suede , devenue Membre de I'Empire par la Paix de Weft- fbalie , comfne 1'^toit alors I'Efpagne par le Cercle de Bourgogne , elle ne pouvoit qu'en cas de grande ne"ceffit prendre ouvercement parti centre I'Empereur, dont la Maifon & & celle d'Efpagne Etoient iffues d'une mme tige. CO L- c. pag. 370. CHRISTINE REINE DE SUEDE. I 5 t tiaitier tour la fathfattion du dit Roi y won Frere^ felon /es ordres 7 ' i ... que vous aurez 'par lexpres que je vow envmerai*) qui vous dlra won intention. Men. Excujez ma nonchalance 3 ? affurez- vousde la continuation de mon amitie. Le Prince Charles n'etoit pas non plus contraire en cela a la Cour de Fran- ce- II fournit meme lesmoi'ens qu'il croi'oit les plus propres pour en vern'r a bout. Mais les difficultes pour 1'execution de la paix en Allemagne, (a) croiffant de jour en jour , donnoient aux Suedais de grandes defiances de la bonne foi des Imperiaux , qui tachoient peu a peu de porter la Suede a li centier fes troupes : rnais le Generaliflime , qui n'avoit pas eu le terns de fe fignaler dans la guerre en Allemagm y nidefaire de grands progres, tachoit au moins de faire obierver ponctuellement les articles flipules dans le Traj- te , afin de n'emporter pas avec lui en Suede , de fimples parchemins (*X C'eft pour cela qu'il perflfta todjours a retenir toutes fes troupes, julqua ce que les principaux points duTraite fuflent executes: (&) & les troupes > quoique diiperfees dans fix difFerens Cercles SAllemagm fe trouverentpour- tant partagees d'une telle maniere , qu'en peu de terns elles pouvoient fe raflembler toutes en un corps , en cas de neceflite. L'interet de la France fut meme feconde par la , puifqu'on avoit lieu de croire , que les Efpagnok auroient attire ces troupes a leur fervice, fi on les avoit licentiees pluto^. (c) Une autre conlideration non moins forte, qui arreta hSu&de &l'env pecha de precipiter le licentiement de fes troupes en Attemagiie, fut la pro- reflation formelle, que le Nonce du Pape, le Cardinal Cbigi^ (qui devint apres Pape lui-meme, fous le nom d'Alexandre FIL) interjetta an Congres de Munfter, a la conclufion des Traites de Paix de PFeftphalie, centre 1^ reduction des Archeveches , Eveches & d'autres Biens Ecclefiaftiques , qui furent fecularifes pour fervir de fatisfaclion aux interefTes dans cettepaixGe- nerale. On avoit prevu , que la Cour de Rome ne manqueroit pas de re- muer & de protefter contre une demarche fi oppofee a fes vues (d). C'efl .pourquoi on avoit fait inferer d'avance dans les inftrumens de cette pais, que (a) Pufend. de- R. S. Libr. XXL J. 74 (0 Idem ibid. ^.3S4-3<53-376. &? 418. &f XXII. g. 34 &f 48 item Jon bifi. de Sue- (V) V. I'lnjlr. de la Paix d'Osnabrug. de I. c. p. 409 f 410. fcf Chanut /. c. p. art. XVII. $. 3, (5* Pufend. de R. S. Lib. 384. XX. 5. 210. (fc) Chanut /. c. pag. 423. 424 3* 425. (*) II y a dans le Recueil de Mr. Meiem une nouvelle (i) venant de Nuremburg le ii Janvier 1650. Savoir;,, que les De"puts Catholiques, a 1'infligation des Pldnipo- tentiaires Imperiaux, avoient fait dire aux De'pute's Proteftans, qu'en cas que ceux- ci vouluflent abandonner lesint^rets de la Suede, euxfe d^clareroient auffi pourl'^m- pereur, ce qui feroit un mo'ien de trainer les affaires en longueur & peut-etre de fe fparer fans rien conclure. (0 Afta Pac. Esecut. T. II. p. w> 152 MEMOIRESCONCERNANT que nulle Puiflance , foit feculiere ou Ecclefiaftique , ne pouroit difpenfer les Contractms & interefles, de 1'obligation de remplir fidelement tous Jes points qui avoient eces.arretes & ftipules de part &d'autre par les Traites de paix. Bulk *! Malgre tout cela le Pape innocent X. fit expedier fa Bulle contre tous les con7re fa Paix ^ eux inftrumens de paix d'Osnabmg & Munjler , fulminant terriblement contre les Heretiques (a) , mis en poffeffion de plufieurs biens autreFois Ecclefiaftiques , desapprouvant au refte non feulement qu'on eut altere le it nombre de fept Elefteurs , autrefois rarrete par 1'autorite Ecclefiaftique : Re/." mais auffi annulant, condamnant & reprouvant toutes les conventions me- tte ' me fortifiees par ferment. . . . Cette Bulle fi finguliere eft datee de Rome le 26 Novembre 1648 ():Ie Nonce du Pape la fit reimprimer a t / ienne& afficher par tout , mais YEmpereur donna ordre de Pdter : & pour que la Cour de Rome ne s'imaginat pas que cette proteftation lui pouvoit fervir -quelque chofe pour le prefent , ou qu'elle en piit tirer quelque avantage -pour Tavenir , on enjoignit au G&ebtQ'fferman Conrmgius, de prendre fur lui la refutation de cette -Bulk. II s'en acquitta en homme , qui entendoit parfaitement bien le Droit Public-Univerfel & les Conftitutions de }' Empire en particulier. Cette piece fe trouve imprimee dans fes ouvrages, (c) & il y prit auffi en particulier la defenfe de la Reine Chriftine , en ce que le Pape dans fa Bulle ne paroiflbit pas la reconnoitre en cette qualite , mais y faifoit mention feulement des Suedois & de la Suede } comme fi ce Roi'au- me n'avoit alors aiieun Souverain. On trouva cette idee de la Cour de^o- me d'autant plus deraifonnable, que I'Empereur, tous les Rois & les autres -Etats en Europe 1'avoient reconnue pour Reine de Suede. En qualite de -Pontife, il ne pouvoit pas, dit leSr. Coming, lui refufer ce titre, puifque 4e Pape , Pie III. avoit autrefois declare aux Ambaffadeurs de 1'Empereur Frederic III. que le fiege de Rome avoit accoutume d'appeller Roi, celui,, qui toit en pofleflion du Roiaurne ou de Ja Roiaute (*), Qu'on (fl) N^goc. Seer, de la Paixde WeftphaL (!>) Meiern A&a Execut. T. II. p. 781. fcfa _T. IV. p. 510 fcpc. (c) Opera Conring. T. 11. p. 531. fc. (*) Void comment Conring s'explique li-deflus : (i),, Huic injuries decimam meri- to annumeraveris , SerenijjlirKK Regina Suecorum Chriflina; faStam. Potiebatur ilia tune temporis rerun in regno Suecice , non minus atquc Ferdinandus HI. Ccefar in Imperio 9 f Lodovicus XIII. in Gallia. Chriftinje tamen nomen nufquam in declara- ,^ tione comparet , fed Suecorum quafi regia dignitate carentium: quod tamen faQum effe in gratiam Poloniae Regis nemini non fubolet : quafi videlicet penes bunc jure fuerit regia dignitas, Chriftina ilium titulum non meruerit. At vero illam agnoverttnt Sueco- corum Reginam Casfar, Reges Galilee, Hifpanias, Dania;, imo ipfemet Polonl& 9 ne quid dicam de aliis Univerji orbis fummis Poteftatibus. Quod Innocentius itaque unus ne- )yi .get, id quod omnes agnojcunt, id profe&o baud vacat Jumma injuria , prafertim cum ' Friderici III. Cafaris Legatis ref ponder it quondam Pius II. Papa : Morem effe Apojlo- liccefedis eum Regem appellare, qui Regnum teneret, ceu legitur in Commentariis illius lilr. (j) Oper. Ctnring. J, c- cap. V, fin- pag. 537, CHRISTINE REINE DE SUEDE. fa de Maaame oa mere, i IHIULIC AHUCCUC ^imcae J^UJUUMU 9 aonc ia aermere Lettrcs d< quoique de compliment , auffi bien que la premiere , donnera matiere a * r #"" * . i * rr- . . &M//6MM quelques remarques qui ont du rapport aux affaires que nous venons de vi. Land- toucher s r * ve de loutner. Htj j. t & * JJocbgeborner Furjl^freundllcb " geliebter Herr fatter. Diefe wenige worte find nur E. L. zu dancken wegen getbaner gratu- lation zu meinerangetretenenre- glerung mlt dero bandfcbreiben , mlr durcb Mr. Hoif prefentiret \ und zur revanche E. L. a/tes gluck und beyl zu dero landen aufkomfl zu wiinfcbcn: me auch mlcb mlt E. L. zu dero nm an- gefangenen beyratb zu erfreuen und zu wunfcbendaffderalmacb- tlge feme gnade verleyen ivolle dajj dlefelbe zu femes hocblobli- cben nahmens ebre und E. L.con- tentement angefangen und vol- bracbt werden moge : wie icb denn von grund meines hertzens E. L. biezu alles glucks und beyh will gewunfcbetbaben^ und fcbllejllch fie verficbern , dafs Icb allezett feyn und vwbleiben werde E. Liebd. Freundlicbe Muhwe Sereniflime Prince & Ce peu de lignes n'eft que pour re- mercier Votre Dileftion de m'avoir felicite de mon entree dans 1'admi- niftration de mon Roiaume, par fa lettre que le Sr. Hojfm'a pre&ntee. Par un jufte retour je fouhaite a V. D. toute forte de bien & de bonheur pour I'accroiflement de fes Etats : comme je partage aufli avec V. D. la joi'e de fon mariage nouveilement conclu. Je fouhaite que le Tout- puiffant le fafle tourner a lagloirede fon tres-faint nom & ati contentemenc de V. D. Ces vceux fmceres par- tent du fond de mon cceur , aiTuranc au refte V, D. que je fuis & ferai a jama is De Votre Dile&ion Tante &amie AStockbtlm Juillet StcKkholm den jo. Juli 1646. Chriftina. ChriftinA libr. 2. Quid, quod bodie Chriftina ab ipfo Alexandro VII. omnique Romana Curia Sue- corum R egina falut etur , non fnutato regnandi jure ? nifi forte ab Alexandro iA mutatum ,, Jit, cujus nulla ipji facultas , nullumjus competit. Tm. I. V 154 M E M O I R E. S C ON C E R N A NT Cbri/lina* Dei Gratia Sueco- Chriftine par la grace de Dieu rum , 'Gotborwn , Vandahrum- Reine des SAfo/j, des Goths & des que Regina, Magna Princeps f^^ Grande - Prmcefle de fm- J. , f? "f-m A lanue Finlandi<<) Dux EJfbontaj La- rclitf >, Bremtf , 'Vei d> Princeps Rugitf^ nee non Domina Ingria gjp Whmarltf p. Jlluftriffima Princeps > Confan- * guinea ? arnica cbariffima , D//" 1 "- V r *'- til eras die 28. ;;//?$ Septembris noviffime elapfi Cas- Je/is exaratas , ^w^wy certiores A 7 os redder e dignata eft, de fo- lenni illo rltu , quo m aniplifjmm variorum ordinum bominumque prtefentia fe? conjejju jam trede- cim annorum Jpaiio laudabillter Gdmiriijlrati tutelar i-s Regim'mh Landgraviatus HaJJiaci Magl- Jlratu officioqueje abdicare, avi- taque dltionh gubernacula fu# 2)j/nis. lliuftriffimo Domino Filio fuo traders placuit , bijce diebus reffe accepimus: Nobis publica Idtitia omnium RegniNoftriSta- tuum> atque ex aufpicato perac- tis Coronationis Aloft r^e Regime Solemnibus ve hit 'nuncupate gau- dlo obcupatiS) nibil fane gratius acceptiusve ac cider epotuit , quam prosper rim^e bujus beat it at is fla- tus utriujque Dil nis - f nuncio maximopere latificari atque adfi- ci , Deum obtejlantes , ut perinde atque prudentijjlma Dil nis - F r(E - cur a atque adminiflrat-ione 5 nee non/umma ejujdem in grav{/fimo etiam Illuftrifllme PrincefTe, tres-chere Confine & Amie. Nous avons reju ces jours paffes la lettre que Votre Dileftion Nous a ecrite de Caffel le 28- du mois de Scptembre-, par la- quelle il lui a plude Nous apprendre qu'en prefence d'une grande aflem- blee de differens ordres & Perfon- nes , elle a refigne 1'adminiftration tutelaire de la Regence du Landgra- viat de Hefle, qne V. D. a foutentie avec ta-rit de gloire durant 1'efpace de treize ans & qu'elle aremife&ntre les mains de Monfieur fon fils. Rien de plus agreable ne pouvoit nous parvenir, pendant qu'a la jioi'e &aux acclamations publiques de tous les Etats de rrotre Roiauine , Nous etions occupee a celebrer ici-les fo- lennites de notre couronnement , Nous avons ete ravie d'apprendre en meme-tems la nouvelle de 1'heureufe fituation & de 1'etat de vos deux Dile6lions. Et comme par le foin& radminiftration pleine de. prudence, aufli bien que par la grande conftance de V. D. durant les terns les plus difficiles &. les plus remplis de trou- ble , les pai's du dit Landgraviat non feulement fe font conferves eri leur entier, mais encore font montes a un plus haut degre dedignite & d'ac- croiflement , qu'ils n'ont jamais dte ci-devant; Nous prions le Tout- puiflTant , qu'il plaife a fa bonte divine de CHRISTINE REINE DE SUEDE. etiam turbulentiffimoque rerum fortunarumque -ftatu conftantia prtftatli Lantgraviatus Ditio non modo inconcu/Ja & incolumis JleterU^ Jed adillud etiam f aft i- gii^ dignitatis atque amptificattf Eminent ia culmen provetta fit , quo antebac nunquam eft gavija> velit ex diuina bonitate beneficio Juo adder e perennitatem , quo di- gnitas refque jumma laude par- t< ijarttf projpertfque quam diu- tijjime maneant &conjeruentur i imo magis magifque omnigenisfe- licitatis incremento -cumulentur ! Quod nos attinet r feria mentis inclinatione ac ftudio ferimur pro- fequendi perpetuandique cum Dil e F ra Ejufdemque cbarifjlmi fitti Domini Lantgravii Dil K fm- er# & fidmtis antic it i) a donner des ba- tailles , a forcer des places : & de la maniere qu'elle agiflbit , elle fit avouer qu'elle en favoit autant que fes Generaux. Elle en fut traiter un comme il meritoit, pour lui avoir repondu trop fierement, & quoique peut-etre il lui fut encore neceflaire, elle lui temoigna pourtant, qu'elle pouvoit fe pafler de lui, & que dans le bonheur qui accompagnoit fes armes, elle ne manqueroit pas de gens pour la fervir. A la Paix de Wefl^lmlle^ elle Tut fi bien manager les inte'rets du Land- grave fon fils , que de tons les Princes , qui y etoient intereifes , aucun n'y fftt plus avantage, a proportion de la Sereniffime Maifon de Cqflel, a la gloire de la Princefle Aimlle , dont le grand genie fut admire de tous ceux qui la connoiflbient. Jamais on n'a vu une Dame plus intre'pide qu'elle, ni plus mode'reedans les adverfites. En void un grand xemple (a). L'an 1646 1'armee de Ccffel affiegea Paderborn : mais la ville etant fecourue , cette arme'e fut bat- tue & obligee de lever le fiege (*). La Landgrave en regut la nouvelle etant a table, & a'iant Ifl la lettre, elle dit. Mon armee a ete battue & le fiege de Paderborn efl leve. Quelque mauvaife que foit cette nouvel- le (a) Leti Hift. dt Brandeb. Part. I. pag. 179 f Pufendorf de Reb. Suec. Lib. XIL 414 419. Ngoc. Seer. T. III. pag. 404. g. 14. fcfc. Larrey Hi ft. rf'Angl. T. IV. p. 260. (c) Leti /. c. Freinshemii Orat. IX. p. (&) ChappuzzuAllemandeProteftantepag. 281. &c. confr. Nt'goc. Seer. T. J.pa (*) Le Sr. de la Court , Re*fident de France a Osnalrug , manda cette difgracearAhWde Si. Nicolas Miniftre de Francez Rome, en difnnt (i) Madame la Landgrave a perdu Pa- derborn que les Suedois lui avoient donne" dans le commencement de la campagne en r^- compenfe d'une grande fomme qu'elle demandoit pour avoir nourri & entretenu leurar- ni^e de toutes chofes nt^ceffiaires pendant deux mois. C'eft une grande perte pour el- le, car elle eftimoit cette place dans le traite" de la fattsfaftion plus de trois cens mille Cependant voila une quittance qui ne lui fera pas agre'able. (i) V. fa lettre dt) 6- Dec. 1646. dans les Negociat. $Arn&vtt de S, Nicolas T, IV. p. cfr. T. V. i>- 474- V q 158 MEMO1RES CONGER NAN T L'an. 1650. ,, le, il faut toCijours fupporter le malheur pour ne pas s'enorgueiller dans Je bonheur " & cela dit, elle continua de diner, comme fi de rien n'e- ,, toit. Au fortir de la table, elle fit auffitot emrer fes Midftres dans le Cabinet pour avifer avec eux de ce qu'il y avoit a faire. Ce qu'on a toCijours admire dans cette Princeffe, c'eft fa promtitude dans 1'expedition des affaires , & qu'elle a ete infatigable dans le gouverne- ment. On a admire fon eloquence au Confeil en propofant les matieres, fur lefquelles il faloit deliberer : fa fubtilite a penetr-er dans 1'interieur des affaires en queftion: fa capacite a comprendre les fentimens d'autrui, & fa prudence a choifir le meilleur parti: deforte que dans fon Confeil, ou fon fentiment prevaloit toCijours fur celui des autres, ou celui-la 1'empop- toit qu'elle jugeoit etre le meilleur. Son nom etoit en fi haute eftime au dehors qu'on accorda a fesEnvoies & Miniftres des honneurs estraordinaires par tout. Elle avoit le don par- ticulier de fe faire aimer & craindre. Elle etoit toCijours obei'e de fes pen- pies par tendreffe & affedtion. Sa Cour etoit brillante. Elle entendoit differentes langues : Elle parloit avec grace & ecrivoit avec folidite. Elle avoit 1'air fe'rieux, mais non pas hautain. Toujours affable avec tout lemon- de: genereufe a recompenfer les fervices rendus : gracieufe & humaine. Elle aimoit beaucoup les belles-Lettres & faifoit du bien aux gens favans (A. ' Elle (*) Comme il y avoit beaucoup de conformite" d'inclinations & de gtbie entre cette Princefle & la Reine Cbriftine', Mr. Freinsbem fit un jufle parallele de ces deux grandes Dames dans la belle harangue qu'il pronon^a a Upjal , en 1646 a 1'occafion des n6ces du Landg.r?.ve Frederic & de la PrinccfTe Eiionore -Catherine (i) foeur de Charles - Guftavt Prince Palatin , qui furent cele'bre'es a Stockholm. Voici un morceau dc oe parallele par ou on peut juger du refte. Vidua btec Princeps (Araalia Elifabetha)^mz//iwMV cum Chrirtina ftucliis atq,ue artilus fexus fui gloriaiti mirifice fuftentat , in tantum , ut non minus quam foriifflmus aliquis Imperator fiduc iamfocii s , bojlibus terrors in, Juis prtcjtdium , nniverjis admirationem adfe ' rat , Q* poft Sueciaj Gal!ia;que Reginas tanto jam tempore tenius fit Imperialism partinin metus Haffire Landgravia. Nee immerito fane , quippe maximi Coujugis obitu magis ex- citalu quamfratta mulier beroicifpirituf , quum velut erepto mediis in tcmpeftatibus [ eritijfimo gulernatorc Navis Reipnblicce HaJJiaccs fluQuaret , animoji/fime fuccejfit ad clavum , neque modovefanientcsventos&furoremundarum incumbcntium citra noxam fuftinuit , verumS' tiffin bonam curjus partem feliciter pet egijfe , & nuiic baud ita procul ab optatofalutis atque tran Jiibvenerunt ". Environ ce terns-la Cbriftine tit encore la merae grace a rUnivevfite' de Wittenberg en Saxe. Elle la protegea & voulut bien que cette ville fut r^gardt^e com- me neutre, dans la guerre qu'elle faifoit a 1'Elecleur, qui avoit pris alors le parti de I'Empereur. Nous donnerons dans TAppendiee la belle lettre de remerciemens, quele V.l'Appen<& grand Orateur Bucbnerus t^crivit a la- Reine au nom de cette Univerfit^. Kum ' X * (*) La Princefle fa Mere le fit vo'iager en France en 164.7. Mais elle ne doit pas a- Vo y a7e de voir t:te trop contente de la reception qu'on lui fit a la Cour, ou on-le logea a I'h6tel Guillaume des Ambafiadeurs , au lieu qu'on logeoit le Due de Parme au f.ouvre, & qu'elle fe flat- VI- Landi toit que le Prince fon Fils auroit le meme traitement que le Due (i). C'eft pourquoig5 ave perfections qu'il en faut pour releVer 1'excellence de mon ouvrage. La Heffe me fournit en votre Perfonne dequoi fatisfaire a ce manquement. Votre prudence , Ma- dame, & la grandeur de Votre courage rend croiable tout ce que les Romans racon- tent de leurs He'ros & de leurs He'roines , & ce qui jufqu'ici a palF^ pour des fables. Apres avoir tire" de votre feule vertu la confolation de la perte d'un Epoux incompa- rable, vous avez conferve 1 & affermi la tranquillite" de vos Etats. Vous les avezde 1 - fendus contre tous les e"fforts de vos voifins, & la conduite de Votre Altefle a it fi prudente & fi g^ne'reufe, qu'elle lui a donn^ le pouvoir de groflir par fes Troupes celles de fes Aloe's. C'eft elle, Madame, a qui les Suedois doivent une p'artie de leur fubfiftance & de leurs conquetes. La France feroit meme ingrate- fi elfe nfi re- ,, connoiffoit que vous avez beaucoup contribue" a lui faire obtenir les avantages qu'el- le a remporte's en Allemagne fur fes Ennemis; Les plus experiment's Capitaines de ,, votre Arme'e, qui vous ont acquis en toutes lesCampagnes des anne"es pauses , &en- core en cette dernie're, des Places fort conflde'rables, que les Impe"riaux de'tenoient ',, injuftement, font d'autant plus fatisfaits de combattre fous vos ordres, que Votre ,, Altefle s'y porte fouvent elle-meme, aim d'animer par- fa pre'fence le courage de fes foldats, & de pouvoif recompenfer avec plus de juftice les belles actions dont fes yeux ont 6tt les fiddles r^motns. Enfin, Madame, votre vert-u eft fi grande, que la libert^ de toute la Germanie a crii ne pouvoir trouver de plus a (Turd refuge que dnns vos Etats. Je ne vous pafle point de Teitime qu'elle s'eft acquife en notre Cour. n L (i) Mgee. Setr.l.c. Tom IV. pig 163. Tom. II. pag. 31, {?.) Yt)iez les Lettres Panegiriq. de itfo MEMO I RES CONCERN ANT L' an Elle lie vecut guerres plus d'une annee apres avoir refignd la Regence & 4-2 '_ mourut comblee de gloire le 8 d'Aoftt 1651 e"tant nee le 22 Janvier 1602. II y avoit deja da. terns qu'avec le nom de la Su&de les eminences qualkes ^ e Chrift'me failbient le plus grand bruit par toute Y Europe. Cette Princef- fe avoit dcquoi plaire par tous les avantages de fon fexe. Elle fe faifoit vcc cbrijiine. f urt0 ut admirer par les plus brillantes qualites de 1'efprit. L'dclac d'une Couronne , qu'elle devoit partager avec Ton Epoux , etoit un appas bien flatteur ajoute a tant d'attraits. II n'y avoit point de Princes qui ne fuflent frappes de Ton merite & plufieurs fe feroient eftimes heureux de la pofleder. Auili le nombre de ceux qui tachoient de s'inlinuer aupres d'elle & de gag- ner fes bonnes graces, etoit-il fort grand. ^ es ^ eux P rmces Frederic & UJric fils du Roi de Daneimrck furent les pre- niiers Concurens qui afpirercnt a ce mariage (a). Et a en juger par les lettres que le Chancelier Oxmfllerna ecrivit a ce fujet au Senat , (b) il pa- roit que la Reine Mere concouroit a faire reuflir le Prince Ulric. C'eftpour cela que le Chancelier pria le Senat d'avoir Toeil , que la Princefle ne flit pas entretenue dans de pareilles idees par fes JDames d'atour & d'autres perfonnes , lefquelles croiant affurer par de femblables projets leur propre etat, ne feroient, faute d'un jugement folide, que ce qui tourneroit a la fin a leur propre rurne. On fait outre cela , dit il , que la Reine-Mere n'entre que pour peu de chofe, ou point du tout, dans 1'affaire du maria- ge de fa fille, puifque 1'interet du Roi'aume fait le principal objet de luper- fonne de la Princefle, & que le moindre qu'on y confidere eft celui de la Mere. Feu le Roi Guftave-Adolphe en etoit fi perfuade , qu'il n'en a jamais voulu difpofer de fon propre chef, au prejudice des Etats du Roiaume. A plus forte raifon la Reine Mere ne doit-elle pas s'en meler : autrement ce- la ne ferviroit qu'a mettre le trouble & la defunion dans la Patrie & a la renverfer par des factions , de la maniere que cela s'eft fait en Norvegue, & qu'on 1'a tente autrefois avec la Su&de .... car (1 tot que Sa Majefte voudroit entrer en accord la-deflus avec leRoi deDanemarckiOuzvec fonfilj, lesSe- nateurs & les Etats, qui voudroient defendre le bien & la liberte de la Patrie , s'y oppoferoient a toute force , d'ou une guerre civile s'allumeroit a 1'improvifle , qui non feulement y mettroit la confufion , mais pourroit auffi (a) Holberg Hijl. de Danemarck Tom. He Mars 1633. cf/ ff trouvent dans les Palm- III. pa,?. 23 cfc. skold. (fc) Elles font du 12 de Ffor. de i. fcf 2. Le glorieux ^ccueil que Monfeigneur le Landgrave votre fils y a re^u , eft une mar- ,, que certaine de la haute reputation en laquelle vous y etes, & des fenth ens de re- j, connoiffance qu'elle a des bons offices que vous nous avez rcndus. C eft de lui, ,, Madame, que vous apprendrez avec joi'e, que pinais Prince Etranger ne s'dtablit ,, fi puiflarainenr dans les efprits de tous les Francois. Dieu vous le conferve longues anndes; & a lui une fi digue Mere, pour le bonheur de fon AltefTe, & pour la gloi- re de Ton Augufte Maifon. Voila les plus Cncdres ddfirs que puifle avoir pour vo- tre Altefle, &c. " CHRISTINE REINE DE SUEDE. sruffi occafionner, que la jeune Reine couroit rifque defa perfonne &mS- r me de fon droit a la Couronne. Outre les deux Princes de Danemarck VEhfteur PaJatin eut des vues fur Chrift!ne 9 & le jeune Eletteur Frederic Guillaume de Brandebourg s'emp reflates de la faire demander en mariage. C'etoit lui auffi que le Grand-Guftavc a- "*.' voit deftine a fa fille, dans 1'efperance d'augraenter par ce moi'en la puif-^I* fance de la Suede, en joignant les Etats de lEk/Skeur aux autres conquetes B '"~ n Alkmagne (*). Les infirruations formelles en furent faites en 1641. par PAmbaflade que J'Ele&eur envo'ia en Sudde fous pretexte d'accommoder les interets de la Reine Mere qui s'etoit evadee en Danemarck. On parloit diverfement de ce mariage dans les Cours de I 1 'Europe. L'Elefteur feroit devenu par la un voifin redoutable anx Rois de Danemarck & de Pologne. Les Rois de Suede liuroient eu des lors un grand Etat en Alkmagne & y auroient balance la puiflance de la Maifon tfAutriche. La France meme & Y Italic n'auroient pas vu avec plaifir un fi grand accroiflement de Puiflance dans un Prince Proteftant. U Angleterre feule & la Hollands, dit le Pere Bougeant , (a) ap- plaudiflbient a ce projet, apparemment par un motif de ze!e pour la Reli- gion Proteflante , ou par Poppofition d'interets , que ces Etats avoient avec la Maifon SAutrlche, L'Armee Suedoife toute ccmpofee de Proteftans fai- foit fur tout eclater la joi'e que lui donnoit 1'efperance de ce mariage, & deja ces Soldats buvoient a la fame des nouveaux Epoux. Mais de fi bel- les efperances s'evanouirent (Z>). La mort du Roi Guftave avoit change la face des affaires , & les Regens le croi'oient obliges de fuivre d'autres vues. Cependant la negociation de cette affaire fe fit encore en fecret, & le Senat pour la cacher a la Reine , lui fit faire un tour dans les Provinces du Roiaume. Le but de ce voi'age fut pourtant decouvert, & on re- marqua que , malgre les bonnes efperances que de certains Senateurs affec- terent de donner a 1'Envoie de Brandebourg , de la reuflitedefafollicitation, il croioit avoir aflez de raifons de ne pas s'y trop fier. Neanmoins I'Elec- teur ne manqua pas d'en rafraichir de terns en terns la memoire aux Tu- teurs (a) Hifl. de Negoc. de Weftph. ad. tmn. Lib. L J. 2. Ludolfs Scbaub. ad ann. 1637. 1641. . 44. p. 435- p- 588 &? ad ann. 1642. p. 998. &fde PO~ dinal , parvint a la Couronne de Pologne. Mr. Cbanut fait de faines refle- l sne ' xions (a) Mem. T. III. p. 83. &? n<5. ft. Hoi- 758. land. Merc, ad. ann. 1654. p. 28. &adann. (i) Dans fa Relat. de vo'iage de la Reine 1(555- P- 97- it. Burman. Syll. Ep, T. UL p. de Pologne ///. Partie p. 57. L'an 1646. 3Le Prince falatin Charla- nverfa- tion de Cbrijline avee Char- fur fon ma- *age avec ^ni. ME MOIRES CONCERNANT r ^B*>PVr "aP*^-^* !?* xions (a) fur un parti aufli mal aflbrti que cclui la, & dit entre autres cho* . fes: que la difproportion d'age, les pretenfions de fa maifon fur la Cou- ronne de Suede 9 la diverilte de Religion, fa robe de Jefuite & plufieurs au- tres raifons rendoient cette affaire abfolument importable. La roideur de la Cour de Rome a ne pas vouloir lui accorder le titre d'dlteffe ou $ Eminence Rolale, iflii comme il etoit de fang Ro'ial; le Jafla de cette dignite Eccle- fiaftiqtie. Mais venant d'apprendre , qu'on lui deftinoit le Pere Falerian Ca- pucin pour Succefleur, il protefta qu'il demeureroit plutot vingtans en cet- te place , que de fouffrir qu'elle fut remplie par un Moine. Le Comte Bregy ajoute dansfalettre a \Abtt de St. Nicolas , Miniftre de France kRome: qu'outre 1'averfion que ce Cardinal de Pologne peut avoir pour ce Capucin , lesjefuites, qui ont encore acces aupres de fa perfonne, ne lui feroient pas naitre d'autres fentimens. II eft pourtant remarquable, que le P. Bou- geant , Jefuite lui- meme , ne dit rien de ce Prince Jean- Cajimir , mais que la France avoit fait la proportion (b) de manage de Ladljlas (*) , Roi de Pologne 9 fon frere aine avec la Reine, apres qu'il eut dit, qu'il ne s'offen- feroit pas d'un refus. Surquoi la Regence de Subde avoit repondu , que cette proportion fe fit fans eclat, pour ne pas interefler 1'honneur de part & d'autre. Mais celui de tous,qui avoit leplus d'apparence qu'il feroit prefere a tons les autres Concurrens, etoit Cbarks-Guftave y Prince Palatin, & Coufin de la Reine Chriftine. Nous avons dit ci-deflus, quel'Education de cette Prin- cefle avoit etc confide a fa Xante, Mere du Prince Charles. Des lors Chri- Jlme lui temoigna beaucoup de bonte, & fouvent meme, en fe jouant, iorfqu'elle etoit toute jeune , elle lui promit de fe marier avec lui, quand elle feroit devenue nubile. Cbarles-Guftave s'attacha fl fort a elle, & lui marqua tant d'inclination , qu'il n'auroit tenu qu'a la Reine, que le maria- ge fe confommat (f ). La converfation que ce Prince eut avec elle a ce fujet en prefence du Com- (a) Mem. T. T. p. 61. it. Mem. d'Jrtag- f Tom. IV. p. 292. 418. 398. ri pag. 488. 6f ^ s Negotiations d'ArnauId (i) Bougeant/. f. Tom. III. liv. II. $. 52-. dc St. Nicolas T. III. p. 180. &c. pag. 325. (*) Cette affaire doit avoir ^t^ traite'e fortferieufement a la Cour de France, comme on le pent voir dans un long m^moire du Cardinal Mazarin de 1'an 1644. (i) ou les raifons pour & centre ce manage font de"duites tout au long de part & d'autre. C'e'toit fans doute une belle tut> a ^"' i r ondancc dans la Bibliotheque d'Upfal. Les lettres da Prince Cbarlss-Guftai's du 5. Nov. 1648- m'in. 3. du 13 Mars num. 5. & du 5,. Avril num. 6. de 1'an 1649. comme aufli du 16. Mai en 1651. num. 10. en font les plus int(ire!Tantes. (i) Tom- II. M.fcellan- pag. 71. 2<. 166 MEMOIRES CONCERNANT fan. J} plieroit Sa Majefte de 1'emploi'er dehors laiffant a juger dans quel tron- I(54 7- . }J ble il pafferoit (on terns en Suede ^ s'il retournoit fans efperance que la Reine fe fixat une fois. Dans fa lettre de 1'an 1649. il paroit etre fore content, que la Reine Mere avoit diffuade lapropofition delafucceffiou ,, du Prince, feflattant, qu'elie voudra d'autant plus pouffer 1'affaire du mariage aupres de la Reine, fa fille, ....mais que fi elle ne vouloit pas fe refbudre pofltivement, il eftimoit le plus convenable pour lui de paffer fon terns dans quelqu'endroit fur les cotes de la Mer Baitique & d'y vi- vre tranquillement & comme en retraite. Dans fa lettre de 1651 , etant en Suede, il fe flatte encore que ia Reine pouvoit changer de rcfolution en fa faveur & rejecter fon projet precedent , en confideiant qu'il n'effc pas fi facile de mettre en execution ce que I'homme fe propofe ; furtouc ,, comme c'eft toute autre chofe de la Perfonne de Sa Majefte, ou ducel- le cl'iin particulier, qui la plupart du terns n'a a demander que fon pro- pre interet & contentement : au lieu que le bien & le bonheur de la Pa- trie depend principalement de la Perfonne de Sa Majefte, qui pent la j, conferver ou la faire pericliter ". Aufll par cette confideration , des Fan 1646, les Etats du Roiaume, gui ne fouhaitoient rien plus que de voir leur Reine mariee & la fucceiTion aifuree par fa pofterite, trouverentce parti leplus convenable pour Chrifti- ne. Les Ordres du Clerge , des Bourgeois & des Paifans , donnerent le branr le: & la Noblefleai'antappris, que le Clerge avoit propofe, en fon afTem- blee a la Diete , de prier la Reine de fe marier, refolut de lui faire lesme- mes prieres: mais laNoblefle en voulut conferer auparavant avec leSenat, ou il fut refolu, qu'on lui en feroit la propofition, fans lui defigner aucun parti. La Reine les tint egalement en fufpens (a). Elle les remercia de TafFec- tion qu'ils temoignoient pour fa Perfonne , & leur dit , que n'a'iant point prefentement d'inclination pour le mariage , elle n'etoit pas neanrnoins e- loignee d'en prendre pour le bien de 1'Etat, & le contentement de fes Su- jets, & elle leur propofa le Prince Palatin fon Coufln, pour favoir d'eux fi , fon inclination l'y portant , ils agreroient cette propofidon ? a quoi les Deputes repondirent, que la Sw^auroit toujours pour agreable la Perfon- ne de ce Prince , s'il plaifoit a la Reine de le choifir pour fon Mari. Les Etats du Roiaume voi'ant que cette affaire ne s'avan^oit pas plus pour ce- la, firent encore 1'annee 1649. tons leurs efforts pour lui perfuader de de- figner un terns pour fon mariage. Elle rejut bien leurs prieres , les remer- cia de leur aff^6lion, mais elle ne repondit pas clairement , deforte qu'il etoit aifc de juger qu'elie ne vouloit point fe lier de promefTe , ni par au- cune deftination, qu'elie ne fut couronnee. A en juger par le defir du Senat, des Erats du Roiaume & du peuplede Suede, il n'y a mil lieu de douter, que ce mariage avec le Prince Pab.tin n'eut (a) Pufen'l /. c. Libr. XX- 5. 6r. f Vb, . 40. 49. 64. Chan. /. c. pag.izz. 145-260. XXL g. 109 & 113 fon bifl.de Suede T. f 397. fluetii Comment, frag. 105. //. p. 423. fain/on lift, de Brandeb. L. IL CHRISTINE REINE DE SUEDE. ttf? n'eftt contente tout le monde. Car outre plufieurs qualites qui rendoient ce Prince agreable, il etoit ne en Sulde & y avoit e'te eleve; & il la regar- *'"' doit comme fa Patrie. Cependant Chrijline eloigna de plus en plus de fon D>oh vcnoit efprit I'accompliflement de eette promeile. II feroit difficile de dire pour 1'eioigne- certain , d'ou pflt Jui venir cet eloignement , fi c'etoit un fendment infpi- "/");,' re par 1'elevation de Ton ame, ou li elletrouvoitderaifonnabledefedepouil-pouriema. kr d'une partie de fa liberte en faveur d'un Epoux. Toutefois paroit-il, na s c< que Tun ou 1'autre de fes favoris dans ce terns-la lui doit avoir infpire de 1'averfion pour le lien conjugal (*). Et fi Ton ajoute foi a ce que le Sr. Chcmut dit (a) , que la Reine avoit avoue depuis elle-meme , il faut , que le Comte Magnus de la Cardie, y ait beaucoup contribue ; car 1'an 1654 que Chrijline vouloit reflgner la Couronne, elfe avoit envoi'e le Prefident Baron Flennmng a Cbarles-Gnftave , en lui enjoignant de dire au Prince que le Com- te Magnus (alors difgracie) etoit indigne qu'il efit aucune afFeclion pour lui , ni aucune compaflion de fa difgrace , vu les deflervices qu'il lui avoit rendus tant qu'il avoit etc aupres d'elle. Qu'elle vouloit qu'il filt , que fi elle n'avoit pas epoufe le Prince , le Comte en etoit la caufe : qu'elle s'e'- toit trouvee quelquefois en des difpofltions telles , que s'il les cut voulu me'- nager, comme il le pouvoit bien aiiement, & s'en prevaloir en fa faveur, elle ne doutoit point qu'elle n'eut confenti au manage , mais que le Comte Ten (a) Dans fes Mem. T. III. p. 312, (*) Chamtt rcmarque qu'elle lui avoit dit, Tan 1651. (i) qu'elle avoit tant d'averfion pour le lien du mnriage, qu'elle choifiroit p!ut6t la mort qu'un Mari : & I'Auteur des Anecdotes de Suede, pretend que I'atluj^tilTement, oil eft une femme marine, lur don- na du degout, aiant fouvent t^moign^, qu'elle ne pouvoit jamais foufFrir qu'on agit a- vec elle comme un paifan avec fon champ. Se fentant une fois tropprefle'e par les fiens de fe marier elle leur r^pondit : j'aime mieux vous defigncr un bon Prince &SuccefTeur capable de tenir les renes du Gouvernement, ,. quedeme marier d 1'heurequ'il eft: il pourroitauffifacilement naitre de moi unNeron qu'un Augnjle: " tarn enim facile nafci ex me Nero quifpiam quam Auguftus poflet(2\ Voici des Epigrammes que firent Finftrup &. Freinsbem fur cette obitination de Cbrifline. Ad Sereniff. Reginam Suecice Dn. CHRISTINAM qua nondum viro nupjit, Vinceris a nullo , tu fortis , Amajio , Amazon : ,, F'iSrici cedent Marjque Venusque tibi : Nee te blanda Venus , nee Man tefubjugat atrox , ,, O Reginal Decus prorfus Amazonicum (3). $$$ Inter Jrifcorum fertur pracepta Sopborum . Conjugem lit accipiat femina virque parem. SI tibi mens eadem, fed ne Jit, Nympba, rogamuf, Sperabit tbalamos nulius in erbe tuos. JOAITNEJ FREINSHEMIUS. O) Mem. Tom. II. pag. 3^3. Anecd. deSuefe Riche'oourg ult. veiba Morient. in Append, png 17. fag 60. cfr. Ter.tzel Monat. Unterr, Mat. 1689. p. (3) f. Vinflrupii Epigrammat. Lib III. fol j:j & sj6. pzi. aliud ejiifd. mat. v:r Rots a de mSme atfez fait connoltre (i). Notre Patrie a e'prouve' des effets de I'un ,, & de 1'autre gouvernement alant eu des Rois par election, & enfuite des Rois par yt naiflance. Ceux qui par ambition & envie one prdfere* 1'Eleftion a la SucceflSon , n'ont eii ,, pour but qiie de trouver .par-la occafion de renv'erfer 1'ordre e"tabli de la fitcceffion. Maif s'^tarit rendus parjures, ils n'ont pas e"chappt au chatiment, & aux jxiltes juge- . mens de LXeu. Toutefors cela n'a pas manqu^ de caufer beaucoup de trouble & d'ef- fufion de fang dans la Patrie. Pour prevenir de pareils malheurs, nos ancetres, tous les Etats du Roi'aume & nous-mSmes , dont il y a encore quelques uns en vie, avons en divers terns redrefle ia Forme du Gouvernement & 1'ordre de -la Succeffion : comme durant le regne du 'Roi^an A Stockholm, durant celui de Charles a Norkoping & en dernier lieu , du vi- ,, vant du Roi Guftave-ddolpbe, Pere de Votre Majefte", de glorieufe m&noire. Get ordre de Succtffion ainfi r^tabli a non feulement e^e* confirm^ par ferment de notre part, apr^s avoir e'te' ^tendu jufqu'aux Filles & au Sexe femicifi.,& par conf^queata la Perfonne de Votre Majefte",- mais il y a auffi 6t6 flattie", comme il feroit proced^ au manage de cette Princeflfe , afinqu'il en proviatdes h^ritiers, des Succeffeurs, & qu'on ne vint pas a e"lire des Rois. C'eft aces anciens Statuts & a ces De"cre.ts louables, que non feulement les Etats . a !a derniere Diete , mais auffi preTentement chacun en ville & a la campagne , tant ceux de. la Noblefle g^ii(ralemenj:, que ceux duClerg^, de la BourgeoLfie & des.Pai- fans, veulent fe tenir fermement, ne fouhaitant rien plus ardemment, .que de voir Votre Majeft agr^er & mettre en execution le plutot poffible les Avis, les bonnes . Ordonnances & la Pre"vo'iance de fes tres-illuftres Ancetres, en donnant a fes Sujets la confolation & 1'efp^rance de voir, que la Patrie ne fera pas de'pourvue', a tout'e'- v^nement humain , de Succefleu* h5r^ditaire; faute de quoi il eft a craindre que les ,, plus Puiflans du Roiaume ne viennent a s'entredifputer la Regence, d'oii a la fin s'eufuivroit la prife des armes & I'effufion du fang, comme cela eft arrivt^ ci-devant, & feroit de meine arrive certainement a la raort du Seigneur le Pere de Votre Ma- jefte" , fi V. M. n'avoit pas &t& declaree auparavant He"ritiere a la Couronne. .A cet <5gard , & comme il a te", dit ci-de(!us , que les bommes ne font pas nis pour .,, eux-memes, mais pour la Patrie, il eft.tres-important que V. M. confid^re par quel } , mo'ien elle peut rendre a fa PatrFe le fervice le plus eflentiel, & que non feulement elle falTe hater fon Couronnement , mais qu'elle ne tarde pas non plus d'entrer dans le louable ^tat du Mariage, afinquetoute la Patrie en g6i^rat, comme auflTi plufieurs perfonnes particulieres qui ont e^e" gratifl^es de Terrts & de Fiefs, puiflfent jou'ir de 1'efp^rance d'une Regence tranquille, mo'iennant la grace & la bdnddiftion du Ciel. V. M. s'en acqu^ra un noin immortel chez tous fes Etats & tous les Habitans du Ro'i- aiune, au lieu qu'autrement les perfonnes particulieres , qui ont regu des bienfaits & des (i) Le contenu dc ce livrc a etc remarque ci-deflus p. 31. n Tome L Y I 7 o M E M O I R E S C O N C E R N A N T L'an. extremement tous ceux qui y etoient prefens, Elle leur dit: (a) que depuis quelques annees elle avoit etc continuellement follichee a fe ma- ,, rier; qu'elle ne pouvoit pas desapprouver la prevenance de ceux qui ai- moient leur patrie & deflroient qu'on prevint les malheurs qui arrive- roient probablement , fi Dieu la retiroit du monde, fans un Succefleur aflure , que ce foin la touchoit plus que perfonne , a'iant confacre tous fes interets & fa vie au falut de 1'Etatdes le moment qu'elle en avoit pris n le gouvernement , que la fujetion du manage avoit certaines conditions , qu'elle ne pouvoit encore gouter , ni meme determiner , quand elle pourroit vaincre la repugnance qu'elle y fentoit prefentement ; que pour cela elle fe trouvoit obligee de donner a la furete de fon RoiaUme , ce que plufieurs pourroient penfer n'etre pas utile a fa perfonne , qui e'toit de prefenter aux Etats un Succefleur a la Couronne , lequel etant defi- gne & agree, delivreroit tons fes fujets de rapprehenfion de fa mort; qu'il etoit vifible que le Prince Charles, fon Coufln , avoit toutes les qua- r> lites requifes & qu'il etoit du fang Ro'ial. Elle fit brievement 1'eloge de fes vertus ; elle pria le Senat de 1'agpeer pour fon SuccefTeur a la Cou- n ronne & dit , qa'elle le propoferoit le meme jour aux principaux des Etats , qu'elle manderoit pour le leur faire entendre , & avoir enfuite le 3, confentement general de tous les ordres." Ce Difcours qui n'etoit attendu d'aucun du Senat furprit la. Compagnie , & (a) Pufend. de R. S. Libr. XXIT. . 41. Tout cecife lit d'une maniere plus circonft&n- &c. item fon hift. de Suede T. II. p. 410. dee dam les Regttres du Senat le 23. 26* 6f Dclibera. & les Etats fur la Sue- ccfiion de Charles - Gu- Jlave a la Couronne de Suede, (*) Quant a la Maifon de Brabe, Vittorio Siri dit: (i) que le Secateur Comte Brabe avoit fait entendre: qu'en cas que Cbrifline ne vouliit pas fe marier, il ^toit pour une nouvelle eieftion, qui pourroit tomber fur fa Maifon,.., Mais le^ Sr, Siri ne doanenul- le autre preuve de ce qu'il dit ici. Q) Les raifons & les confide>atiohs aliegu^es pour & centre dans la deliberation c?e cette importante affaire fe trouvent expofees plus au long dans une piece dans Lunig-, oil la Reine dit*entre autr-es chofes(2),, queperfonnene trouveroit Strange qu'elle vou- lut pour Succeffeur , cekii que les Etats du Roiaume lui avoient deftine pour E- poux: qu'au contraire tout le monde auroit fujet de s'^tonner, fi elle permettoit qu'il fut exclu de la fucceflion:" Mais toutes ces importantes Deliberations du S- nat & des Etats de Suede font trop remarquables pour n'en pas rapporter ici au moiris le precis, tildes des Regltres oil elles font couchees (3). C'eft du 23.26. 27. & 28 Fe- vrier 1649, &.cecieclaircira benucoup ce qui vient d'etre deduit. Ce fut le 23 du dit mois que la Reine mit. fur le tapis dans le S~ehat la propofition de la Succeffion, & apres de long difcours, elle laiQa aux Senateurs deux points a confiderer plus murement enfemble, favoir i. fi le mariage de la Reine etoit 1'unique mo'ien d'affurerunHdritier auRo'iaume,,ou zfi de declarer Prince Hdreditaire, leCom- te Palatin & Due Cbarles-Guftave , en cas que Sa Majelle. vint d mourir , n'affureroit pas mieux le Bien du Roi'aume? ,, Elle repondit: que cela fe pourroit faire dans h fuite: mais qu'elle renrarquoitbien que le Senat fouhaitoit que le Roiaume devint eie&if, ou que fa forme changcat en ,, Ari- II- (i) Mercuric. 6 vcro Hiftoria Tom. IX. p. 344. (i) Dans Tcs E'.u'opxifcJi; Staats- Conftlieu T. CO T!S font feizC feuilles en Manufcrits dans CHRISTINE REINE DE SUEEXE. i 73 Cependant Je Senat voiant que les Etats etoient prets a conciure, & ceux Comhient la fucceflion de Charles- Ariftocratie: qu'on n'ignoroit pas ce que le Chancelier & le Drotfet du Roiaume ^. Gu fl ave ft voient trame"... enfin "glee, ,, Le Conne" table Torftenfon repHqua. Que fi ce n'e'toit par confide'ration pour fa ,-, Perfonne de S. M. on n'auroit jamais eu d'e"gard pour le Due Charles... que d'aller fe faire efclaves me"ritoit trop de reflexion ; que cependant ils n'avoient jamais penfe d'introduire dans le Roiaume la Forme Republicaine. La Reine. Plufieurs verroient peut-etre volontiers qu'il y eutici deux Rois, coirt- ,> me on en voit deux acluellement dans les troubles en France & en Angleterre? Le Gonnttable. La tirannie, qu'a e"xerce" le Cardinal Mazarin en opprimant les E- tats & les de"pouillant , de leurs biens, dontil s'eftenrichi lui-meme, e"tant fans naif- fance & fils- d'un Laquais , (i) a fait, que le Parlement 1'a chafl'e' aufli bien que les autres qui ont pr^varique" & malverfe 1 dans les revenus publics : mais tous les bons Franfois font ported pour le Roi & ont mis pour cela dans leurs dtendars Regemquce- ,, rimus: Nous cherchons le Roi. En Angleterre le Tribunal a dit: que fi le Roi a- voft voulu fuivre de bons avis , il ne fe feroit pas pre'cipite' dans un fi grand maF- ,, heur. ,, La Reine. Si je me marie avec le Due Charles, vous reconnoitrez fans doute feS 3i enfans pour Roi : mais fi je meurs , je gage mes deux oreilles T qu'il ne viendra jamais au tr6ne. De"clarez-Ie mon Succelleur; apres, il pourra etre fait Prince he'- re"ditaire a de certaines conditions. ,, Le Connetabk. Je crois que le Due ne fe mariera jamais , s'il ne peut pas e"poufer ,> Votre Majeft^. La Reine. Oh que ouil L'amour nebrule pas abfolument pour un feul. UneCou- ronne eft une jolie Fille. Je lui ai dit, que c'eft une grandeentreprife, que lui, qui n'efl: qu'tin petit Prince, ofe afpirer a (poufer une Reine: qu'il lui fuffiroit, qu'il en fut feulement parl^; & je le lui ai dit en confideration de ma propre elevation & du refpecl: qui m'eft du: & a 1'heure qu'il eft, je ne trouve pas ccnvenable demema"- rier: cela m'ett impoflible. Je fuis entierement d'accord avec Ie Se"nat, que le Due & Charles n'a nul droit a la Couronne; mais je.prie feulement qu'on le reconnoifle mon ,, Succefleur par grace : en cela , je n'ai aucune autre vue que le Bien & la Suret du ,, Roiaume:car fi je meurs & fi vous etes incertains d'un Succefleur, vous & vos enfans ,, veus- entredifputerez 1'^leclion,, & plus d'une autre perfonne ofera pre'tendrea la Coir- ronne; A la fin , la Reine pria les Secateurs de d^Iiberer entr'eux fur cette affaire & de lui en rendre r^ponfe, comme aufli d'avifer fi on la communiqueroit apres aux Etats du Roiaume ou a leurs De"pute"s. Le 27 Fe"vrier, on continua cette deliberation, & la plupart des S^nateurs e'toient ,, d'avis qu'on renvoiat 1'affaire a la prochaine affembl^e des Etats. Ouelques uns trou- ,,< v-oient cet avis dangereux, la chofc aiant deja trop delate" , a quoi Benolt Skytte ajou- ta: que preTentement les Etats pouvoient faire leurs conditions les ineilleures: au lieu que fi S. M. mouroit, le SucceOeur les leur preTcriroit : fur tout-le Due qui au- ,, roit gagn^ 1'afFedlion de 1'Arm^e & du Peuple. Le Connetabk jugeoit que ces raifons e'toient peu valables:... ,, Le Grand Treforier recommendoit amplement la perfonne du Due: i. comme iffu du fang de S. M. 2. comme n& & t!ev<^ dans le Roiaume 3. comme attach^ a la-me- f , me Religion. 4, comme applaudi de tous. 5. comme commandant 1'Arm^e & 6. enfin comme un guerrier qui s'e"toit deja rendus recommendable & qui' fe fignaleroit enco^ f, re plus pour la Couronne: mais que^puifque le refus de Manage & 1'Oftroi de la ,,, Succeflion paroiflbit d'une dangereufe confluence & lui attiroit peu de refpeft dela part de la Soldatesque, furtout s'il arrivoit quelque t^chec ou quelque malheur, il jugeoit, que le mieux etoit de laiffer repofer cette affaire jufqu'a la Diete prochaine. Lt Li-) II etoit rie dans le Bourg dc Pifcina dans I'Alruzzt Cfn i6oz. v. les Ditfitntiaires hiftor.'&& Y q MEMOIRES CONCERNANT L'an. ceux qui dependoient de la Reine n'ofant pas lui contredire , enfin la chofe 1649. f ut LeSenat e"tant all aux voix en confluence, la Reine dit , qu'elle e'toit fache'e, que cette affaire cut e'te' porte'e plus loin qu'ils ne 1'euffent fouhaite", & qu'elle vouloit preTentement leur expliquer fes raifons au contraire, favoir: i- que S. M. avoit re- ,, fle'chi fur cette affaire tous les jours trois ans de fuite, & ne vcx'ioit nulle raifon qui ,, put empecher qu'on ne la comnumiquat aux De'pute's des Etats a. que de leurenfai- re part, avant que S. M. fe fih refolue au Mariage, ne feroit pour eux d'aucune confluence: car cela. feroit pi u tot penfer au Peuple, que S. M. .ne prendroit aucun autre que le Due Charles, qui feroit declare 1 Succeffeur, & perfonne ne feroit e"ton- n^, qu'elle voulut procurer la fucceffion a celui, ayec qui .elle vouloit vivre & mou- rir. 3. que fa Succeffion une fois e'tablie' le feroit plus refpefter & confid^rerdel'Ar- m^e. 4. que le refus que S. M. faifoit defe marier & qu'elle communiquoit auSe"nat,el- le ne le communiquoit qu'a ce Corps , & que (I jamais elle prenoit la reTolution de fe marier, .elle avoit 1'ame trop e"leve"e pour donner la main a un fimple Comte Pa- latin: mais que lielle fe de'terminoit fe marier & a prendre le Due Charles, elle ne le feroit jamais avant qu'il fut declare' SuccefTeur du Roiaume: que c'e'toit auffi par ce moien qu'on dteroit au Roi de Pologne toute efpe'rance de parvenir au Tr6ne de Suede. A la fin il fut conclu que le Comite" des Etats, qui avoit ^t^ deux fois De"put a la Reine au fujet du Mariage, feroit appelle" au S^nat le lendemain, Le 28. de Fe"vrier, la Reine fit la meme remontrance aux Deputes des trois Etats,, que pour preVenir & d^tourner du Roiaume toute diffention & tout danger en cas que le Succeffeur ne fut pas d^fign^ & que S. M. mouriit fans he"ritiers, elle avoit propofe le Due Charles, puifqu'elle ne pouvoit pas fe r^foudre fi tot au mariage. ... Le S^nateur Benott Skytte fit la-detlus la propofition en remerciant la Reine defon foin pour le Rojiaume, 1'Archeveque Lenaus en fit autant de la part du Clerg, & . le Bourguernaitre , Nicolas .Nilfon de Stockholm, de la part de la Bourgeoifie: & ils fupplierent tous S. M. d'accomplir fon Mariage avec le Due Charles , jugeant ne pouvoir pas fans cela communiquer cette affaire aux Etats. Le Gouverneur Jean Berndt dit la-delfus: Votre Majefte" demande notre coeur en entier comme nous le lui devons: pa;r la fupceflion propose nos cqeurs & nos affec- tions feroient partag(5es en deux. ., Apres bien des pour-parlers & des raifonnemens de part & d*autre:; la Reine r^pon- 3 , dit: Vous ne tirerez-pas une parole de moiau fujet du Mariage, avant que vouspre- niez la R^folution de faire fucce'der le Comte Palatin a la Couronne: d'ailleurs, ii m'ell: impoflible de me marier avant mon couronnement. L'Eveque Jean Mattbia dit la-deffus. Votre Majeft^ eft obligee de fe marier en conft^quence des Dt5crets du Roiaume : car a caufe de cela la fucceffion ht^r^ditaire a .,, ^t^ (^tablie dans les Unions h^r^ditaires des Etats. La Reine repliqua. Perfonne au monde ne me peut contraindre a cela fi je nc m'y rufous pas moi-meme. Je ne nie point, que je ne Ie faffe un jour. Se marier pour ,, le Bien du Roiaume , eft un grand motif: mais quand je trouve un inoien e"galement bon pour affurer le Roiaume, que peut-on demander de plus de moi? La Succeffion ,, n'empeche pas que je me marie. Ce que j'ai promis au Due Charles, je le lui tien- ,, drai religieufement. Mais vous n'apprendrez pas cette fois-ci ce que je lui ai promis. Je pourrois Pepoufer apres qu'il fera dclar Succeffeur au Roiaume, declaration qui pourroit fe faire plus commode'ment a pr^fent: mais perfonne, ni au Ciel, ni fur la j, Terre , ne m'y contraindra. UEvlque. Votre Majeft^ ne court en cela aucun rifque : mais il y a beaucoup de j, danger pour nous, fi nous nous ^cartons des D^crets du Roiaume. La Reine. Perfonne au monde ne me fera changer le deffein que j'ai forme 1 . Si je a , me marie, je n'^pouferai quele Due Charles, foi d'honnete femme. Mais je ne vous dirai pas preTentement , fi je me maricrai; vous le faurez au couronnement. L'Eveque pria la Reine qu'elle voulut difpenfcr les Etats d'avifer ^ cette affaire ci.e ,, Sue- CHRISTINE REINE DE SUEDE. 175 fut re'folue d'tin confentement unanime hormis du Chancelier, qui protefla L ' am ne vouloir pas s'oppofer a la deliberation commune qui I'emporterok con- . tre fon gre , difant par forme de menaces a ceux qui e'toient plus jeunes " que lui , qu'ils fouffriroient un jour les mauvaifes fiutes de cette election (*). La JReine qui f$ut tout ce qu'il avoit fait & dit , fe plaignit dans le Se- Succeflion jufqu'au terns de fon couronnement. La Reins. Nullement: ce ne feroit que trainer cet ouvrage & donner oceafion a des Tetes remuantes de raettre des obftacles a ce ban deflein. Nous pouvons en de 1 - couvrir les raifons & Pheure qu'il eft, auffi bien qu'au Couronnement. L'Evtque. Le bruit court par toute {'Europe que V. M. a declare" qu'elle vouloit prendre pour epoux le Due Charles. Combien le monde ne fera - 1 - il pas furpris en apprenant tout ceci? Au couronnement, cela fe feroit de meilleure grace & avec plus- d'honneur, fans que perfonne y put avoir a dire la moindre chofe. La Reine. Quand ils en auront afiez parle" , ils trouveront bien d'autre fujet d'en- tretien. Je ne vois pas non plus aucune raifon qui puifle empecher de communique* 1 cette affaire aux Etats du RoTaume: & je juge qu'on ira au plus fur (I Ton en donne ,, part a tous les Etats , comme d'une chofe qui ne doit pas fe traiter en particulier. II n'iinporte pas que quelques-uns fo'ient abfens ; felon la Forme du Gouvernement,- ,, & Pordonnance de la Chambre de la Noblefle , tous les individus des Etats -ne fo trouvent jamais tellement enfemble, que quelques uns n'en foient abfens, ,, Les De"put6s du Clerg<5, & de la Bourgeoifie demanderent de cornmuniquer 1'af- faire en queftion a leurs Ordres refpeclifs. Le Marecbal de la Diete demanda qu'on leur fit part du fentiment du Sdnat : fans quoi ils ne pouvoient pas s'expliqijer autrement la-deflus qu'ils ne 1'avoient d .bre 1650 (*). La Ceremonie s'en fit avec plus de pompe & de magnifi- cence qu'on n'en avoit jamais vu auparavant dans ce Roi'aume (f) ; & la joi'e & les applaudiifemens etoient d'autant plus folides , qu'ils n'avoient pas pour objet un gouvernement incertain , mais une adminiflration des plus glorieules ,- illuftree par une infinite de belles aciions & de triomphes. Voici la Relation qui en fut publiee a Paris cette meme annee : Encore que le Couronnement de la Reine de Suede cut ete refolu des Tannee 164$ ft efl-ce qu'il a ete differe de terns en terns, a caufe de plu- fieurs x (a) Pufend. de R. S. Lib. XXII. . 45. ad ann. 1650. p. 52. ff. Theatr. Eur. Tom. ? 47. Chanut Mem. Tom. I. p. 135. ? W. p. 906 &c. 1147 &c. Lunig. Tbeatr. 213. Tom. II. p. 122. 128. Holl: Merc. Cerem. Tom. L p. 1389- 1392. (*) On avoit eonclu trois mois auparavant favoir le || Juillet, la Convention de Nu. renberg pour I'e'xe'cution de la Paix de Weftpbatie. Dans la relation e"tendue (i) du grand repas que donna zk cetee occafion le Prince Charles - Gujlave , Gne"ralilfime de Suede; il eft dit, que tous les Ge'ne'raux & Hauts-Officiers des deux Parties Contrac- tantes, qui y voulurent, encore pour la derniere fois, paroltre en Soldats anne"s de toutes pieces , formerent entr'eux une Coinpagnie , & eTurent les Officiers : que le Prince Palatin Charles - Guftave & le Due d'dmalpbi, Ge"ne"ral del'Empereur, furent faits tous deux Capitaines , le Felt- Marshal Wrangel Caporal, & les autres Ge"n- laux & Officiers ne furent que de fimples Soldats : qu'apres cela , tous bien ranges ,. Us firent d'abord quelques tours autour de la table dans la grande fale en y tirant des- coups de leurs annes ; qu'enfuite marchant en bon ordre par les rues & venant au Cha- teau, ils y tirerent eux-memes plufieurs voltes de Canon : enfin, qu'alors le Colonel Kraft les conge'dia tous, comme fi Ton n'avoit plus befoin de leur fervice. Au refte, ette Relation marque , comme quelque ehofe d'extraordinaire que , malgre 1 la gran- de foule de nionde , il n'y cut ni qu^relle, ni defordre, ni malheur, ni parini les Grands : ni parmi le Peuple , auquel on donna deux boeufs rotis & deux fortes de vin. Lc lendemain , fl y eat un feu d'artifice dont les- emblemes faifoient allufion a la ceflation de la Guerre & au re"tabliflement de la Paix. Enfin , on frappa quantit^ de M<^clailles fur la Paix de Weflpbalie , & fur le Trait^ d'Exe"cution de Nurenberg : ces me"dailles fonc preique fans nombre ; tant on e"toit ravi par tout que le calme revint apres une guerre de trente ans ! Sentiment (t) Les jugemens fur la pompe & fur le fafte de cette et-r&nonie Etoient partag^s. At Prufehenk Voici ce qu'en difoit le Confeiller Prufcbenk dans fa lettre a 1'illuftre Mr. de Boinc- fur la pompe bourg : Qf) Quid de eo fentJis mibi refcribe, quod Regina Sitecorum, poft impojitam dc ce Cou- ^ capiti Coronam , currum confcenderit triumpbalem, more veierum Romanorum, tribus equis colligatis per plateas vetta. Equidem viro. tale facinus , qui ex bojlibus viftoriam repor- taffet , condonandum effe exijlimaverim : quamvis hoc modo triumpbare plane Jit infolitum : ejuj'modi verb quid fceminam audere, infolens Jane ac ambitiojum mibifaSum uifetur; at- que bac facile mibi perfuaferim , exjlituros , qui fcenam hoc nonnihil olere , adsoque vel iftbanc folennitatem neutiquam fuiffe ex dignitate Regina Suecix , forte non inepte* arbi- trabuntur." La harangue que fit Mr. Olaus Ferelius a Paris au fujet du Couronnement: de Cbrijlinc eft des plus belles qu'on puifle lire. (3). fi) Dans les Palmsfoldi<*na. (i) Elle efi imprime'c dans fcs Optifcula (i; Struvii fafc'.cnl, ult. ait, literal, pa^. 44. 4.^8- &c- CHRISTINE REINE DE SUEDE. 179 fieurs preparatifs, par lefquels Sa Majefte defiroit le rendre plus pompeux L' a ^ &. magnifique , mais principalement aufli , au fujet de f execution retardee l6s - -de la Paix tfAllemagne , avant laquelle on ne jugeoic pas qu'une femblable - "" folennite fe fut paflee avec aflez de joi'e, ni avec tant d'eclat, tandis que Jes plus illuftres Capitaines & Generaux de cecte nation demeuroient enco- xe occupes a rnettre a fin cette Paix tant defiree: jufqu'a ce que finalemenc au commencement de la pre'fente annee 1 650. comme felon toute appa- Tence les affaires de la guerre devoient cefler entierement, & que tout fe difpofoit a un repos & loifir plus libre & aflure , Sa Majefte conjointement avec le Senat , trouva bon de mettre a effet le dit Couronnement. A cet- te fin , elle fit convoquer tous les Etats vers le mois de Juin , pour s'as- iembler dans la Ville Capitale de Stockholm , & y propofer & refoudre en- femble ce qui pourroit concerner les demandes & fatisfaftions reciproques entre Sa Majefte & les dits Etats du Roi'aume, enfuite de quoi il fut re'fo- lu qu'ils fe trouveroient prefens au Couronnement, & fe feroient des Ser- mens mutuels pour une nouvelle confirmation de leur ancienne obligation au bien de 1'Etat. Le mois de Juin e'tant venu , on commenga f Memblee des Etats par une propofition que la Reine leur fit faire , dans laquelle , apres avoir re- prefent^ 1'etat pr^fent du Roi'aume , principalement en ce qui regarde [a guerre ou la paix avec les Etats voifms , elle demanda leurs avis touchant le Gouvernement futur , & leur remontra la neceffite de contribuer quel- que fomme d'argent pour pai'er les dettes faites pendant la guerre pallee , & pour fubvenir aux frais des AmbafTades extraordinaires qui fe devoienc faire apres ce Couronnement. Sur cette propofition , & principalement fur les moiens de trouver de 1'argent , les Etats ont etc occupes prefque deux mois : & ce qui caufoit principalement entr'eux quelque difficulte & differend, c'etpit les biens^ clont, depuis quelque terns , la Reine avoit fait don a plufieurs Gentils- hommes: les autres des dits JEtats, favoir le Clerge, les Villes & lesPaifans demandant que ces biens fuflent reftitues a la Couronne , dans 1'opinion que la Reine jouiffant de tous ces revenus , auroit moinsde fujetde les charger. Enfin toutesces affaires etant pour la plupart heureufement accommodee^, 4& les Etats ai'ant fort infifte envers la Reine qu'il lui plut de fe marier , afin de mieux aflurer le repos & 1'union de la Couronne pour 1'avenir , Sa Majefte , pour les contenter en quelque forte , & pour les aflurer mieux de la Succeffion future , leur propofa la perfonne du Prince Palatin Charles- Guftave , fon Coufin germain , pour etre declare heritier prefomtif de la Couronne , tant pour lui que pour tous fes Defcendans Males. Ce qui fuc agree auflitot par les Etats, bien qu'on ne fache pas encore au vrai, a qui le dit Prince fe doive marier, puifque Sa Majefte ne tcmoignoit point d'inclination pour le mariage. Au meme terns que tout ce que deflus fe traitoit , ce Prince arriva 8AI- lemagne a Stockholm , ou il fut regu de tous les Etats avec autant de joi'e que de refpect : Et comrne il ne fembloit plus rien manquer pour le jour du Cou- ronnement, on le determina au f; d'Oftobre fuivant. Or il le trouve que Z 2 de i8o M E M O I R E S CONGER NANT L'an. de totite anciennete on a pris d'ordinaire pour cette grande ceremonie h [<5s ' ville dUpfal, fiege Archiepiscopal da Rouiume, deforte qu'on ne fait que deux Rois-de Suede qui ai'enc ete couronnes a Stockholm: neanmoins a caule- des embaras qu'on jugea a propos d'eviter duns ce Couronnement plus ma:- gnifique qu'aucun des precedens, tant que pour tout tranfporter a Up/at 9 que pour y fairealler une fi grande multitude de perfonnes, ontrouva cette fois plus a propos de le faire a Stockholm , outre que vraifemblablement les Etats ne fe font pas tant foucies de fuivre en eela 1'antiquite , qui femble attribuer quelque chofe a une ville plus qu'a 1'autre , ou comme fi les Rois devoient aller prendre leurs Couronnes plutot en un lieu qu'en un autre. Le is d'Oftobre approchant, la Reine fortit de Stockholm le H pour aller a une demie lieue , a Jacobftad Maifon du Grand Connetable de la Gardie, afinde faire de la deux jours apres fon entree en cette ville. Pendant que la Reine fejournoit a la Campagne du Comte de la Gardie, ce Seigneur n'omit rien pour la recevoir & traiter avec la plus grande magnificence , & ce qui a le plus fait eclater fa liberalite, c'efl, que le premier & le dernier jour , pour faire boire tout le monde, il fit couler depuis le midi jufques au foir, quatre fontaines de vins d'Efpagne & de France, blane & clairet. Le jour etant venu que Sa Majefte devoit faire fon Entree, qui fut le jeudi i| d'O6lobre, toute laNobleffe dans Tequipage le plus lefte, fortit de Ja ville pour aller a fa rencontre. L'entree commen^a entre deux & trois heures , & dura jufqu'a cinq heures & demi. Un Regiment de Cavalerie , arme de cuirafles de fer & portant des Echarpes bleues , ouvrit la marche. Ceux-ci furent fuivis par cinq Compagnies du Regiment de Gardes habilles de jaune & noir ; enfuite marcherent en fort bel ordre les plus beaux che- vaux de Selle richement harnaches & les Seigneurs qui en avoient le plus , firent fuivre quant & eux, leurs Ecui'ers & Pages. Entr'autres le train du Prince Palatin Charles fe fit beaucoup remarquer, I. Six de fes Trompettes & fon Timbalier avec des Timbales d'argent ouvrirent la marche fuivis de quinze chevaux de felle , & de douze Page& tons habilles d'une fort belle Jivree de velours bleu & jaune, avec un paife- ment d'argent. JI. Douze Trompettes de la Reine, fuivis de 24. Officiers de la Cour. III. 24. Chevaux de Selle de la Reine, tons couvers de houfles de ve- lours noir enrichies de broderie d'or. IV. Le premier Ecu'ier de la Reine avec vingt-quatre Pages de 1'Ecune, qui etoient fuivis par nombre de Carofles de plufieurs Gentilshommes. V. Six autres Trompettes de la Reine fuivis par le Marechal de la Cour, a la tete d'un grand nombre de Gentilshommes de Sa Majefte , & de la Nobleffe de Livonie. VI. Deux Secretaires de la Reine habilles en Herauts, ai'ant chacun un fceptre a la main , & fe faifant fuivre par fix autres Trompettes. VII. Le refle de la NoblefTe du Pais. VIII. Tous Jes Senateurs du Iloiaume , chacun dans fon CarofTe. IX. Le Prince Adolpbe. X. Les Caroffbs de Meffieurs les AmbafTadeurs de Brandebourg , de For-* tugal & de France. XL Le CHRISTINE REINE DE SUEDE, igr XL Le Prince PaJatin Charles. '.. tf "i. XII. Le grand EcuJfer, le General Wachtmcifter , qui marchoit devanr\_ le Carofle de Sa Majefte. Ce Carofle etoit de Velours noir tout convert de bro Jerie en or ; quan- tite de Pages de la Chambre , Halebardiers , Archers , & Volets de Pie marchoient fur les c6ces & derriere. XIII. Le train & la Perfonne de la Heine-Mere. XtV. Dans plufieurs Carofles , toutes les Dames de la Cour. XV. Douze Mulcts richement harnaches , & fix Chariots portant fe bagage de la Reine. XVI. Toute cette Pompe etoit fermee par quelques autres Compagnies du Regiment des Gardes & de la Cavalerie toute armee comme les pre- mieres. Aurlhdt que Sa Majefte fut arrivee dans fa chambre , on donna le fi- gnal de la tour du Chateau , pour tirer tout le Canon aux environs de Stock- holm, tant fur la terre, que fur les Vaifleaux. Ce qui dura deux bonnes heures , parce qu'on fit deux decharges ; & a chaque fois on en compta jufqu'a neuf cens coups : le refle de la foire'e fe pafla en un banquet, ou les principaux Seigneurs de la Cour furent invites. Au fujet de cette Entree il ne faut pas omettre de parler d'un Arc-Triom- phal que les Se'nateurs avoient fait drefler a 1'entree de la Ville. C'etoit la chofe la plus fuperbe qui fe pouvoit voir ; il codtoit feize mille ecus bien qu'il ne fut que de bois ; mais il etoit tellement couvert de toile , qui etoic li bien peinte qu'il fembloit etre conftruit de pierre; tout autour on voi'oit les defleins des batailles donnees pendant la derniere guerre SAlkmagm , avec quelques emblemes , convenables a leur fujet , comme i tine Couronne avec cette de", ife , Felix cum non dot honorem y fed reciph. 2. un Soleil levant & naiflant fur plufieurs beaux fruits, plantes & fleurs dont la devife etoit. Tot pulcra per unum 3. un Lion tenant le foudre en une de fes pattes, & au- deflus cette devife : Nos etlam Jovis arma decent. 4. un cep de vigne, duquel pendoient plufieurs belles branches ; cette figure etoit expliquee dans ces mots Junfti Icetamur in uno. L'infcription de 1'Arc etoit en lettres d'or fur noir, & contenoit ce qui fuit. Cbriftina Gujlavi Magnl FiRa , Principi optima 5 ani- mi magnitudine , pietate , prudentid , clementidque 5 ^ cdteris regnandi artibus fupra fexus 8? atatis fu& cap- tum infigni , atque ipjb fortune fli<& faftigio props majori 5 cum tratlatis aliquot Minis felidter Regni babe- ms , propugnatd Religions 5 Germanid liberatd , confer- vatis Sociis 5 pulfis boftibus 5 fundatd quiete multumque auffd P atria gloria & cultu 5 atque edito egregio regendi Z 3 Jpeci- fp^cimine 5 Coronationis folennia ingenti populi applaufii &? gratulatione cekbraret ; Regni Senator es officii quoquz Jui memores arcum fmcera voluntatis promptaque obedien- tia fignum^ communis L&titia^ gratianimi^ atque inti- ~ma f^enerationis Monumentum 3 Majeflati ejus devotifji- mi 6? faujla qu&que apprecantes dedicarunt. Tout autour on lifoit ces vers ecrits : Forte parum eft, Princeps, portam tibi ftare patentem , Poftquam virtuti tot patuere tuae. Sed datur indicium tibi pervia cunfta relinqui Totius & populi corda patere tibi. L'Arc etoit furmonte de quantite de Drapeaux & Enfeignes, prifes pen- dant les dernieres guerres. L'entree etant done ainfi faite , on n'emploi'a les Vendredi & Samedi fuivans a autre chofe , qu'aux preparatifs du Couronnement qui fe devoit faire le Dimanehe fuivant; il n'y euc rien de remarquable , finon que pen- dant ces deux jours, on porta a la Reine les prefens de plufieurs Etats, & Villes fujetes de cette Couronne, comme des Etats de Livonie, & de Po- meranie , des Villes de Riga, Stetin, Stralfund, Stockholm , & autres. Ces prefens etoient fort riches & tres - magnifiques. Le Dimanehe tous ceux qui fe devoient trouver a cette Ceremonie, s'af- femblerent dans la grande Sale du Chateau , & vers les onze heures , on commen^a la marche vers 1'Eglife , & prenant le tour par les meilleurs en- droits , les plus peuples , & par les plus grandes rues de la ville. L'ordre y fut obferve comme il s'enfuit, 1. Deux Herauts ai'ant des Sceptres d'argent a la main. 2. Huit Trompettes & une couple de Timbales. 3. Le Marechal de la Cour. 4. Les Gentilshommes de la Cour de Sa Majefte , comme aufli ceux de la fuite des Princes Palatin & des Senateurs. 5. Un autre Marechal de Cour fuivi de toute la NoblefTe trois a trois , tous a pie en fort bel ordre & equipage. 6. Deux autres Herauts, fuivis de huit Trompettes. 7. Le Grand- Maicre fuivi de tous les Senateurs, qui par la rue fe fervi- rent de Jeurs CarofTes ; & entrerent deux a deux dans 1'Eglife. 8. Le Grand Treforier portant la Clef d'or. 9. Le Chancelier portant la Pomme d'or. 10. Le Sieur Guftave Horn, au lieu du Grand Amiral de'funt , portant le Sceptre. u. Le ' J r / /^ ** ' *j * f| T I ''''' CHRISTINE RE INK DE S tf E D fc 11. Le Grand Connetable portant 1'Epee, mais d'autant qu'il avoit perdu L ' afl la vue depuis quelques annees, il fe fit mener par fon fils, le Comte I650> jaqws de la Gardie* 12. Le Grand Prefident de la Juftice, portant la Couronne. 13. Sa Majefte, dans un Carofle de Velours cramoifi, en broderie d'or tres-riehe. Ce Carofle etoit entoure de plufieurs des Principaux Officiers de la Reine , & des Pages & Halebardiers , dont quelques - uns por- toient le Dais , & le Comte Magnus de la Gardie portoit la Baniere Roiale. 14. Le Prince Palatin Charles - Gujlave ,- habille d'une longue robe d'her- mine, & couvert d'un chapeau fourre de meme, accompagne de quan- tite de Seigneurs , Gentilshommes , Pages & Hafebardiers. 15. La Reine -Mere menee par le vieux Prince Palatin & le Landgrave de HeJJe. 1 6. Les Princefles , Comtefles r & grandes Dames & Demoifelles de la Cour chacune dans fon rang. Toute cette belle Compagnie s'approchant en cet ordre de 1'Eglife , FArcheveque & tous les Eveques parurent devant la porte pour recevoir Sa Majefte, a 1'arrivee de laquelle 1'Archeveque tenant dans fa main le vafe qui devoit fervir a Tonflion, fit a Sa Majefte un compliment rempli de voeux & de benediclions. Tous etant entres dans 1'Eglife dans 1'ordre rap- porte ci-deflus , on entendit une belle Mulique, & 1'Eveque de Strengnds fit un Sermon , apres lequel on commenja les Ceremonies du Couronne- ment. Alors 1'Archeveque a'iant fait quelques difcours , le Chancelier s'approcha lifant le Serment que les Rois de Suede ont coutume de faire , & que Sa Majefte fit en repetant toutes les paroles de mot a mot. Ce qui etant fait, TArchev^que, prenant avec deux doigts de la pretieufe onftion du vafe qu'il tenoit, en oignit Sa Majefte fur diverfes parties de la tete, fur laquelle il mit la Couronne. Apres quoi les autres Grands Officiers de la Couronne s'approcherent aufll pour lui prefenter 1'Epee , le Sceptre, la Pomme d'or, & la Clef. Enfuite un He'raut fortit du choeur , criant au peuplequi etoit prefent. La tres-puiffante Reine CHRISTINE eft couronnee , & point (fautre Perfonne. Apres cela on eleva un Trone vis-a-vis de TAutel ou Sa Majefte s'affit fous un dais , foutenu par divers Generaux de 1'Ar- mee , comme les Sieurs Konigsmark , Wmemberg , & autres. Le Prince Palatin Charles fe tint de fon cote , & tous les Senateurs approcherent en tel nombre qu'ils fe pouvoient agenouiller devant la Reine , pour lui faire leur Serment de fidelite : dans lequel on comprit auffi la perfonne du dit Prince Palatin , a favoir de le reconnoitre pour Succefleur de la Reine apres fon deces. Au fortir de 1'Eglife, Sa Majefte s'aflit fur un fuperbe Char detriornphe, tout d'ore & traine par quatre chevaux blancs. Devant eile marchok fon Treforier,jettant quan tite deMedailles d'or & d'argent parmi le peuple. On obfervadurefte au retour le meme ordre qui s'etoit obferveen entrant a 1'E- glife. Auffitot que Sa Majefte fut arrivee dans fa chambre, le Canon com- inenga a jouer par tout, ce qui dura bien deux heures. Le refte du foir fe pafla MEMOIRES CONCERNANT I /an. p a fl- a en un f e fti n dans ] a g ran de fale du Chateau , ou 1'on traita a plufieu- 1650. res tg fo\ S , Sa Majefte fut affife feule a une table , le Prince Palat'm Adol- ..pbe lui fervit d'Echanfon , & le Comte Charles Lewenhaupt d'Ecu'icr tran- chant. A fa main droite etoit une table dreffce ou s'affit la Reine-Mere, TAmbafTadeur de France , ceux de Portugal & Brandebourg, le Landgrave, & autres PrincefTes & ComtefTes , & plus has , il y eut une autre table pour les autres Dames de condition. A main gauche etoit preparee une autre table oil le Prince Palatin Charles fut affis au haut bout, & tons les Senateurs enfuice pir ordre. Plus has il y avoit une autre table, ou Ton traita tons les Generaux & Gemilshommes de Condition , fans parler de quantite d'autres tables , ou Ton traita du monde hors de la grande Sale. Ce feftin Ro'ial continua de cette maniere trois jours de fuite. Au troifie- me, tous les Etats preterent leurs hommages de fidelite a la Reine; les Comtes & Barons, s'agenouillant devant Sa Majefle, demanderent & ob- dnrent la continuation de leurs Fiefs. Le Mercredi fuivant, 2 Novembre, on ferepofa, lejeudi, Ton cou- rut la bague, ou Monfieur le Prince fit faire de belles entrees s'etant ha- bille en Remain , & fe faifant fuivre par plufieurs Cavaliers vetus de meme. Le Landgrave de HeJJe , Frederic , y fit aufli merveilles , & ce qui caufa le plus d'etonnement, fut-un beau char de triomphe , qui avana de lui- meme tout le long de la carrie're, fans qu'on pdt decouvrir le reflbrt , qui le faifoit mouvoir. De - meme on vit patter une montagne de la hauteur d'une maifon fur laquelle des perfonnes habillees en Deciles , qui repre- fentoient 1'aifemblee des Mufes, firent entendre une tres - agreable Mu(i- que. Depuis ce jeudi, on commenga a traiter d'affaires ferieufes , toirchant la conclufion de rAflemblee des Etats, ce qui n'empecha pas qu'il n'y eut encore quelques rejouiflances , pour couronner la folennite d'un Evene- ment fi celebre. < L'AfTemblee des Deputes de 1'Empire a Nurenberg felicita Cbriftine tant fur la conclufion de la Paix en Allemagm , que fur fon Couronnement , comparant fes vertus heroi'ques a un Corps lumineux qui repandoit fes ra'ions par tout 1'CJnivers (a). On fit a Stockholm un grand nombre de pieces de Theatre a fon honneur, & une entr'autres touchant la preemi- nence du Sexe fur les Hommes, & pour monument des Solennites qui y avoient etc celebrees , on drefla une piratnide comme erigee a Clmfline par Antiope } PenthefiUe & Thakftris t les trois Reines des Amazones (*). ' (a) V. cette lettre dans Lunigii Epijl. Proc. Eur. T. I. p. 1019. p Eur. Herold T. II. p. 279. ") C'eft a cela que Grotius fit allufion dans ces vers d^ja Tan 1641. Rtgia Progenies Guflavis edita Mr.gnis Sceptrafero duris fufpicienda Gothis. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 185 Ai'ant touche ci-defilis quelque chofe des troubles dont la France fat agi- tee interieurement, avant ia Paix de Weftphallc; nous ajouterons ici qu'ils _ continuerent meme apres ce terns la , & que le mecontentement a 1'egard Troubles da du Miniflere les fit eclater. 5uTs'al euIi Les cruautes gue le Cardinal de Richelieu exerca fouvent, du terns qu'il comment etoit premier Miniftre , font aflez connues pour nous difpenfer de les mar- 9^'^ r f % r. r rr i i T* !/ i ^, ir'-. ,- , s intcrelu i quer ici (a). Son luccelkur dans le Mimitere le Cardinal Mazarm , pre- les faite nant au commencement un chemin tout oppofe, vouloit gagner les efprits finllt par la douceur & les bienfaits. Mais tous les trefors de France n'y pou- vant pas fuffire , il falut avoir recours a de nouveaux impots. Le peuple en murmura & Jes Grands du Roiaume , qui vouloient avoir part a 1'admi- niftration des affaires , fouffrirent impatiemment d'etre gouvernes par un etranger (*). . Ses principaux ennernis etoient les Princes du fang , & les pre'mieres Dames vinrent a leur fecours. Elles fe preterent a tout pour apprendre les defleins fecrets du Cardinal Mazarm (f). Le parti oppofe au Miniffcre fe declara publiquement Tan 1648. fous le nom de Frondeiirs, (Z>) qui devoient , comme David , abattre le grand Goliath des Philiflim. Le (ignal fe donna par quantite de pafquinades qu'on re- pandit de cote & d'autre. Ceux qui etoient pour les Frondeurs, portoient un bouquet de paiile fur leurs chapeaux & furent appelles \^L Faction dePailk; ceux qui tenoient pour le Cardinal, mirent un morceau de papier fur leurs chapeaux, & furent nommes la Faction de Papier. Apres (a) On n'a qu'a lire la-dejjus le Journal du 92. &c. Mem. de la Minorite de Louis Card, de Richelieu en II. Pomes in 12. XIV. padlm. Mem. ds Saulx Comte de Ta- (V) V. Memoires de Mr. L... fur les Guer- vannes. p. 7. 18. 39. 51. 53. 67. 80.90. res Civiles en I'Tance , paffim. Mem. de 177. 5*. Larre7 Hifl. d'Angieterre T. If r t Mad. la Ducbejfe de Nemours pag. 66. 84. p. 264. 354. 396. &c. '*- pugnata legit qui pralia jitflu , Sanguine me jun&am credet Amazonibus (i). On trouvera dans I'Appendice quelques lettres que le Comte Benoti Oxenflierna & le v. I'Append. Baron Guftave Poffe lui ecrivirent a ces occafions. N. XL XIL (*) Dans un Ecrit publi en France 1'an 1644. ( 2 ) ^us le tltre de XXIV. Obfervafions XIIL &c. il eft dit en particulier au fujet de Mazarin Ne favez-vous pas que Richelieu eft Efprit&e'Ie- reflufcite & qu'il y aun nouveau faux Prophete qui a un double efprit,celuid'^rwfl?id ration de de Richelieu & le fien , & que toute la France doit lui obe"ir? La Heine-Mere a donn6 Mazarm. tout fon Roiaume & toute fa gloire a un Stranger & lui a dit: Tu domineras fur toute ma Maifon , & tout le peuple obi:ira au commandement de ta bouche, & il n'y aura que le Tr6ne entre moi & toi. Cette explication ferma la bouche a O. O. qui e'couta tranquillement les autres qui dirent auffi leur mot : entr'autres , que rAnagramme de Jules Mazarin dtoit je fuis I'Armand, (f) Sui copiam facicbant i lit arcana Cardinalis rimarentur , dit Prioleau f Mr. dt Ro. chefort dit: en ce terns- la les femmes faijoient tout en France (3). (i) Epift. Grotii impr. pag. 911- (3) Hift. Galliz Libr. II. n. 4z. cf. Bayle Dicf. (z) II eft impiime dans les Ne'goc. Seer, de la art. Guebrlant tit. G. item Mem. de Mr. L. C. Paix de Weftph. Tom. I. p?g. 266. P:c D. R. p. 170. Tome L A a M E M I R E S C O N C E R N A N T Apres les difputes , on en vint aux faits ; la Cour fit arreter quelques 65 ' ._ Membres du Parlement, qui etoic prefque tout Frondeur. Le tumulte fuc grand dans la journee des Barricades. II falut mettre les prifonniers en li- berte , & la Cour, ne trouvant plus de ftirete a Paris , fut obligee de s'en retirer. Pen s'en falut , qu'il n'y eut alors une guerre Civile declaree. L'affaire fe racommoda pourtant an mois de Mai en 1649. Mais les en- nemis du Cardinal le voulant perdre lui firent prendre , Pannee fuivante, la vigoureufe refolution de mettre en prifon les trois chefs de Parti , le Prince de Conde, fon frere le Prince de Conti, & leur Beaufrere le Due de Longue- ville. Ce coup hardi fit grand bruit par toute 1' Europe , & tout le monde cria a la liberte des Princes du fang. II n'eft pas a douter que CMflme ne fut de ce nombre par I'affection particuliere qu'elie avoit pour le Prince de Conde, d'autant plus qu'il 1'avoit fortement follicite dans une lettre bien am- pie de s'entremettre de cette affaire. Void cette lettre du Prince tiree fur 1'original , qui jufques ici n'aura pas vfi le grand jour (*). Madame N'efloit la difficulte que nous avons trouve Mefiieurs le Prince de Conti 9 le Due de Longuevil/e & Moi de faire tenir nos lettres a Voftre Majefte ; Et enfuite I'intrediclion que Ton nous a faite de nous veoir , il y auroit long temps , Madame, que nous aurions pris la liberte conjointe- ,, ment de la prier de remonitrer tant a la Royne Re'gente de France, Man* fleur le Due d' Or leans Lieutenant d'icelle; Qu'au Confeil d'Eftat, qu'ils 1 ,, ne doivent pour 1'interefl du Roy pendant fa minorite, & noftre reten- ,, tion, fouffrir au Cardinal Mazarin de continuer de difpofer des meilleu- ,, res charges de la Couronne ; Gouvernements , places & finances de ,, France y comme il faifoit pendant noftre liberte: Non plus que de le lais- 5, fer emprilfonner ceux qui parleront doresnavant pour le bien de I'Eftat^ comme il nous a fait, nous oppofants a fes mauvais defleins: Qui font tres afleurement, Madame, de former pendant la ditte minorite un party puiflant en France pour fe mettre la Couronne fur la Tefte; & deftruire tous les Princes de France: ce qui lui feroit deja peut-etre tres facile 1'ayant lanTe non feulement fe rendre Maiftre de nous trois ; mais aufli d'un bon nombre des meilleurs ferviteurs du Roy , & des meilleures pla- ces du Royaume comme dit efb , avec la plus grande partie des finances de France ^ qui fe font perdues depuis le Regne du Roy , lesquelles il a a prefent en fa poflefTion & diftribue de jour en jour pour s'acquerir Jesau- tres fortereffes & perfonages de France qui lui pourroient refifter en fon entreprife ; C'eft pourquoi , Madame, comme cela eft de telle impor- tance (*) L'Original de cette lettre fe trouve parmi les Manufc-nts de feu 1'Archeveque de Suede Eric fienzelius , & c'eft fer. fun frere Gnjlave Bcnzdjlisrna , qui m'en a communi- qu'^ une copi CHRISTINE RE INE DE SUEDE. 187 tance a la France, & que je fyay que Votre Majefte eft tout a fait portee L ' 311 au bien d'icelle: Joint auili que nous n'avons jamais pen obtenir la grace de faire tenir aucunnes de nos lettres a la ditte Dame Royne , Due d'Or- leans, & Confeil d'Eftat pour leur donner cet avis, & les prier de nous permettre de nous juftjfier; outre que quand nous leur aurions donne, nous croyons qu'ils n'en auroient fait grand eftat, d'autant qu'ils fgavent le jufte fubjecl:, que nous avons d'eftre irrites, contre le dift Cardinal; ,, puisqu'il eft le feul motif de noftre detention : & ainfi qu'ils auroient 3 , plutot creu que la paflion de nous vanger de luy,nous feroit parler , que ,, Je propre intereft du Roy; de quoi je prend Dieu en tefmoin; & veux ' qu'il m'extermine flee n'eft fon feul intereft ,& a tous les pauvres Fratifois, qui m'enhardit de faire cefte importunite a Votre Majefte; d'autant que de-la depend le repos & la tranquillite du Royatime; redoubtant nulle- ment qu'ils ne s'arment des 1'inftant de 1'advis de Voftre Majefte , de mefiance du di6l Cardinal ;& travaillant inceffament a affeurer le Royau- me ; j'ai bien voulu moi feul lui faire cefte inftante priere , en ayant ,, trouve le moien par ce mien Gentilhomme porteur de la prefente , lequel m'ayant promis de le hazarder de revenir en France en habit deguife pour nous faire fcavoir la refolution de Voftre Majefte laquelle j'attens ,, avec grande impafliance comme il pourra faire facilement par le moyen d'un Soldat de ce chafteau , qu'il nous 1'a promis moyenant deux cent piftoles , & d'autant qu'il ne pent aller chez lui ni chez aticuns de nos amys pour avoir de 1'argent de crainte d'etre descouvert; j'ofe encore 5, importuner Voftre Majefte de lui en faire donner pour cet effet, com- me auffi azile & protection tant que le dicl Cardinal aura le gouverne- ment abfolu de la France, & nous en captivite; affeurant Votre Maje- fte de fa fidelite a fon fervice , comme pareillement de la noftre, au quel nous ferons a jamais inesbranlables , comme a celle a qui non feu- lement nous, mais toutela France en general aura obligation de la ma- nutention de la Couronne de France a la Maifon de Bourbon, & de la ,, confervation de beaucoup de fang Franfois quifeverroit a la veille d'eftre refpandu a ce fubjedl, fi par Voftre Majefte, il n'y etoit remedie. Ce que j'efpere qu'elle fera, & qu'elle me pardonnera la temerite que j'ay de tant efperer d'elle fans 1'avoir fervi, puisque la plus grande ambition que j'aye jamais eue eft de faire cognoiftre a Votre Majefte combien je lui fuis Madame Au Chafleau Pincennes tres humble & tres obeif- le 26 Mars mille fix fant f erv i teur cent cmnuante. T . , n , Louis de Bourbon La firite de cette affaire fut , que la Reine de France fe trou- va obligee de lever 1'arret des Princes & d'eloigner de fa Perfonne A a 2 le M E M O I R E S C O N C E R N A N T I/an. ] e Cardinal Mazctrm (*). Celui-ci fe retira Tan 1651. aupres de 5 ' 1'Eledleur de Cologne dans le Chateau de Brie! , fans efpeVance de re- tourner en France, d'ou il avoit etc banni pour toftjours, par un arret du Parlement. La fortune ne 1'abandonna pourtant pas jufqu'a ce point la. Quoiqu'abfent , fon efprit dirigea encore les Confeils du Miniftere. Us produifirent des effets fi favorables pour lui , que la defunion fe mit parmi les Frondeurs. Le Prince de Conds entra en intelligence avec YEfpagne & prit les armes contre fa Patrie. Cela fervit de pretexte a la Reine-Mere pour rappeller Mazarin, qui revint Tan 1652 en France & a la Cour, bien efcorte par le Marechal de Hocquincourt. La haine publique contre le Cardinal ne diminua pas pour cela ; on lui jmputa tous les malheurs & toutes les miferes dont le Roiaume etoit acca- ble. Pour prevenir les fuites facheufes de cette perfuafion qu'on avoit mife dans 1'efprit du peuple , il retourna de fon propre mouvement dans fon exil, pour faire voir, que ce n'etoit pas lui, mais le Prince de Conde , qui etoit le grand refTort des troubles & des calamites dont la France etoit aflli- gee. Cette retraite defabufa fi bien le Public , que le Cardinal regagna la confiance, a mefure que le Prince la perdit. Celui-ci s'en facha jufqu'au point de fe retirer aupres des Efpagnols & ne revint en France qu'apres la Paix des Pirenees. En attendant, le Cardinal Mazarin fut rappelle de fon ^xil , & recu par tout avec de.s acclamations publiques , & comme en triomphe (#). Sur ces entrefaites , la Reine Chriftine , que ces troubles inquietoient beaucoup, ecrivit an Roi de France, pour le prier de rendre le repos a fon- Roi'aume. Void la lettre : Monfieur mon Fr$rc. Le tous les biens dont le Ciel nous a com* IU en dormant la paix a la Cbrttiennett ; il ny en a point 'ni de plus precieux ni de plus confiderabk pour moi-> que celui de n? avoir donne, par le mown de cette paix^ le droit de pouvoir afpirer a I'bonneur de Tamitie de V. M. Jefais tant etat de cette acqulfi- tion y que je la prefire aux plus grandes conquetes , que les plus btureux conquer ans out jamaisfaites j demandant tr$s-mftamment a (a) Mlm. de Tavannes pog. III. &c. f 187. &c. Feuxde joYe (*) Madame In DuchefTe de Nemours dit d ce fujet: (i) Le jeudi gras 1651. que les fur relarjris- trois Princts arriverent a Paris, on y fit des feux de jo'fe pour leur elargrflemcnt, corn- foment des me on avoit fait auparavant pour leur prifon. Mais a dire la verit^, les deruiers ne fe trois Pun- f jrent n ; d* un fj jj On coeur< n { avec tant de gaTetd que les premiers : car le Peuple eft bien Strange dans fes divers mouvemens , & il en avoit donne plufieurs jnarques ail fujet de ces trois Princes. &c. (ij P:ms fcs Memoircs pag. 51, item Mem- de Ta-jar.ncs pag. 63. 8cc. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 139 a V. M. qifelle mepermettede tirer vanite" de cette acquifition. Main- I/a " tenant , Monfieur^ 'fejpere que V. M. achevera ce qifelle a // glo- rieufement comment & ne permettra pas ^ puijque F. M. a voulu temoigner, en beaucoup de chafes, k defir qtielle a de faire mettre en promte execution une paix tant defir ee dedans r Europe , que quelques legeres difficult l es , qui rejlent^ empechent Tentttre gkire qui lui revimdra d 1 avoir rendu k repos a Jon Empire. Ceft pour ce Jujet, que fat envoie mm Secretaire^ k Sr. Biornklau, a la Cour de Fotre Majejle^ afin qu'ilfa/Jc refouvenir F. Al. des cbofes qui reflent dans cette execution , comme auffi pour nfintroduire dans la po/Jeffion de Jon amitie. II f era auffi mes excufes a V. M. de ce que je ne mefuhpas plutot acquit ee de ce devoir ^ que la bienfeance' nfimpofoit. ^ M. comme 'fejpere , aura la bonte pour lui , en Te- coutant favorablement 5 de le recevoir comme venant de ma part. Quant a moi, Monfieur^ je recbercherai toute occafionpour rendre a 7. M ma reconnoiffance , la priant de croire que c*ejl du plus in- time de mon cceur que je luifoubaite toute forte de bonbeur & f eli- cit e^ defir ant d'etre recue entre le nombre de Jes amis^ comme je juis entierement Monjleur mon Frire de Stockholm ce 1 5. Votre bonne Soeur. Tan. 1651, /> CHIUSTINE. -. Elle ecrivit prefqu'en meme terns au Roi d'Efpagne, qui etoit alors en giierre avec celui de France & leur offrit fa mediation , craignant fans dou- te que le Roi Philippe n'aidat plutot a fouffler qu'a eteindre la flamme des troubles in teftins en France. Void cette lettre, avec fa tradu6lion : A JOS Chriftina D. G. (Tot, Tit.) Nous CJmfline par la grace de Dieu ^ V SereniJTimo ac Potent I ffimo &?',' (^ ot - TiL^ftdbacona sw Princirt Fratri Cmfano-uinen Serenjffime & tres-pui/Tant Seigneur ****&&* Matn, Lonjangumeo phili 1V Roi $ E fp agnc &c . ( To t. 8P Jmico nojlro cbarifftmo, Do- Tit J^i ut & toutes fortes de bon- wmo Pmlippo 5 ejus nominh quar- heur. to , (Tot. 7/V.) falutem P pro- Tres-haut & tres-puiflant Prince , Jpera quavis comprecamur. Frere , Coufin , & tres cher Ami. Sereniffime & Potent if time L 'extreme paffion que nous avons Princeps , Prater , Confanguinee P our r ]a f lx & la , tran( l uillit e , , nous cjs i i -rr o / fait foiihaiter ardcmment. qu apres & * Amice cbanjfime 5 Summum il- ^ a m ^ , a Bonl e divine d'^teindre iud quo in pacem ac tranqimlita- tem ferimur Jludium^ mater iam no- A a 3 les 100 MEMOIRES CONCERNANT L'an. 1651. nobis prabet opt and i, ut fedato jam 3 Div/ni Num'mis ope , Ger- maniri belli imendio 3 etiam inter reliquos amicos noftros qui bello diftringuntur , pr e Ro1 "es-Chretien tout * . auili-tot , & nous nous efforcerons exoptata pacts cogttationesper- de mfime de , e porter k des iddes ducere pojftmtts. Atque bijce Ji- d * une paix fl defirable. En finiflant nientes , Z&awi O /W. rogamus, nousprions Ie Tout-puiflant de com- Scr f / eft m omni felicitate cuniu- bier V. Sere d e toutes fortes depro- let, imprimis vero amabili pads iperitds , partkulierement du vrai teo Cbriftianis omnibus tant- bien de la paix tant chene de tous <*wre erhptitn Dahantur in Re- ^ Chretiens. Donne dans nocrePa- opere expettto. uauantw in &e- laig Ro . fal ]e j {mvier I6 07^7 noftra Stockbolmienji die 31. Januarii anno 1611. ' De votre Serenite Seren* V* Bona for or , Confangpi- La bonne So eur , Alliee & Amie nea & Arnica Chriftina. CHRISTINE. La Reine Chrlfline , qui depuis long-terns avoit pris le Prince de Conds pour fon heros, ne temoigna pas moiiis de joi'e de ce que ce Prince avoit etc mis en liberte, que de la tranquillite de la France, a laquelle elle 1 ex- horte de travailler fe'rieufement. Voici fa lettre : TUlOnpeur mon Coufm. jTofe dire que parmi la joi'e fubtique de * ** la France fep parmi tant de perjonnes inter effves , // y a peu qui ont pris phis de part au bien de I'otre liberte que moi. Je juis tant inter ejjee dans ce qui toucbe le bien 5? le repos de la France, que je rfai pu itfempecber de faire eclater ma joi'e lorfque fai fu qiCon alloit rompre la prifon dc celui qui a gagne Tart des batailles .pour rendre glorieuje & triompbante la Regence de la Reine ma Sceur. Les memes raijons Ji import antes nfont fait defirer avec pajfion Ie bonbeur de procurer une glorleufe fin a vos maux, ?/^V bligent de ne porter point envie a ceux qui Tont obtenue avec une facilite 5 que je ne devois pas efperer. Je veux joubaiter de tout mon c&ur, que Fotre vertu, qui^ au milieu des malbeurs a triom- pbedefoi-meme^puijje acbever cc qui rejle pour rendre la tranquil- lite a la France, gjP que cette vertu foit dh a prejent plus que ja- mah la terreur des enrlemis 5? Pappui d'un Etat dont vous etes la gloire & ks deiices. II ne tkndra plus qita Vous de dormer a Ta- venir des preuves invincibles de Yotre innocence > Affaire avouer a tous 192 MEMOIRES CONCERN ANT v tous ceux qui vous ont cm crimind de vous avoir meconnu 5 lors- 3K , qifih vous jugdrcnt capable de fa ire quelque cbofe qui pouvoit d- mentir la grande opinion 5 que vous avez dome de votre vertu a tous ceux qui radmirent en vous. Outre ces inttrets communs de la France , qui m'obligent de vous Joubaiter cet accompliffement de gloire', Je fuis portee tfune inclination non commune a ejlimer votre vertu , & Jbuhaiter a votre Perjonne un comble de bonheur > / un deftin tcl que merite le plus illuftre Prince du monde. Je vous prie^ Monfieur^de croire que je ntinterefje tan fa Votre gloire ^qm je croirois perdre en tout ce quipourroit rob/curcir-, & que ce fe- rolt avec beaucoup de deplaifir que je me repentirois d? avoir Joubai- te votre liberte" ft quelque faute commife contre votre devoir n?o- bligeoit de changer la haute eftime que je fais de votre perJonne. Mais puijque votre vertu ep generofite me met a convert de cette crainte-, & rtajjure que mes ejptrances ff celles que toute la Fran- ce fondent fur vous ne font point vames, je ne balancer ai plus de vous engager ma parole d'etre toujours> avec autant d'affettion &* tendreffe qtfil mefera pof/ible, Monfieur mon Coujin > de Stockholm le 1 2 Fotre tres-ajjeRionnee Coufine 5? Amic de Mars 1651. ^ CHRISTINE. Mais cotfime 1'accommodement fait fut aufll-tot rompu, & que leg troubles recommencerent en France plus fortement que jamais , Chrijline en grande amie de la France 9 regarda comme une partie de fon devoir & de fa gloire , d'offrir fa mediation aux Partis oppofes , dans le defTein de faire tout ce qu'elle pourroit pour mettre ce Roiaume en repos. C'eft le fujet de la lettre fuivante, qu'elle ecrivit au Due d'Orleans, en 1651. es Tfoes couronnees ne doivent pa'sfcukmentfappeller parent es P alliees^ man iljaut encore qu'elle s en donnent des preuves, gp qu'elles en faffent voir les actions-, quand k$ occafions fen prefentent. Les armes de la France ont ete trop necefjalres a Tetabli foment de mon Sceptre 5 ? trop favor able s a la gloire de mon Roiaume , pour ne pas vous temoigner les rejfentimens que fen ai-) & le fie fir qui me rejle de contribuer tout mon pojfible pour empecber que les Francois, qui ne fauroient fare vaincus de per- forme , ne viennent a Je dttruire eux-memes. Le Genti/bomme , qui vous rendra cdle-ci, a eu commandement de presenter les jalen- nes au Roi> & a la E.einsja Mere ^ pour kur temoigncr le dcplai- fir CHRISTINE REINE DE SUEDE, 193 fr oil je fuh y de voir fan Etat en proie a nos ennemis communs 5 &? Poffre que je me fens oblige 1 e de faire^ d^envoier un Ambaffadeur Extraordinaire pour tocher tfeteindre le feu que je vois allum dans le milieu & toutes ks frontifres du Romume. Fotre Alteffe Roi'ale a trop $ experience pour ne j (avoir pas qtfil rfy a rien quite- moigne Advantage que Dieu eft en colere contre une Nation ^ que lorsqtiil permet que ks peupks s'oublient de r amour 5? du refpetl qidls doivent au Souverain ; & que c*eft r ordinaire des guerres . dviks d'etre plus cruelks ? plus animees que Us etr anger es , quoi-. qtfelles rfaient jamais que de foibles pretext es , p de petit s com- mencemens. Le defordre s^y rencontre incomparablement plus grand que dans ks autres , 5? pendant que Tun & Tautre parti protejle. qtfti ne prend ks armes que pour confer ver rEtat^ Us Je decbirent entierement , , 5? un bon Roi a toujours regret d'etre vainqueur. en cette rencontre ^parce tpfil dtfait fespropresfujets,& faffoiblit foi - meme. Je fais ks raijons que vous avez d'eloigner un Etr anger qui veut vous fair 'e la 70/, 5? qui veut acbever de tout perdre; ? quand notre Religion tfauroit aucun avantage que d'etre txempte 5? decbargee de I' ambition P du dertgkment des gens d^Eglife 5 ce ne nous feroit pas une petite conJoJation de voir nos peupks ? nos Provinces en r epos fans Eve que s 5? fans Cardinaux; pendant qtfon nous ajfure que tous vos troubles j? toutes vos ruines ne viennent que des fattions P des cabales peu Cbretiennes de cesgens-la^ qui devroient preferer leurs temples ? kurs minifleres aux grandeurs. 5? aux intrigues de la Cour, s^il eft vrai, comme Us dijent^ qu'ih font Minijlres de Dieu , p k ur vocation toute Apojlolique. Voiez Monfieur , ce que je puis pour votre jatisfaftion particuMre p pour la tranquillite (Tun grand Roiaume^ou vous avez t ant de part ^ P duquel vous ties en quelque fa$on refponfabk pendant k bas age du Roi votre neveu 5 pouvant vous ajjurer que vous deve-z attendre de moi toutes ks cbofes 3? toutes ks ajjijlances qm dependront de Votre fcfV. Cette lettre & une autre que Chrijl'me e'crivit auParlement, ont ete imprimees a Paris feparement ayec des reflexions qui auront leur place ci- deflbus. Mais pour les autres de Chri/lineah Reine-Mere, au Cardinal de Retz, au Due de Longueville, dont il y efl fait mention , on n'a pu les trouver : & a la place on en joint ici une a Mademoifelle de Montpenfier , e b ^ pour marque de la bonne correfpondance qu'il y avoit entre Chrifline & avec ia . cette PrincefTe. La voici, 'avec une autre Lettre audit Envoie Palbltzki laquelle fert de preuve de ce que nous venons de dire, TomeL Bb Ma- IP4 MEMOIRES CONCERN ANT L> * n IMddmoifeUe ma Confine. Vous avez eu k Join de itfaffiirer par 165 *_ *'* des lettresfe obligeantes de votre affeftion^ que jejerois la plus ingrate perfonne du monde 5 fi je ne vous faijois connoitre a quel point je vousfuis redevable. Ma reconnoiffance fera toujours te/Ie que je la dois a la plus accomplie perfonne du monde , fep quand it me Jbuviens que mon bonbeur itfa procure Tamitle tfune Princejfc , qui aujourdbui s*eft Jignaltepar des attions qui furpajjent celles que les flecks paffes ont admirecs en leurs Heroines 5 je commence avec raijon^de tlrer vanitt de ma bonne fortune. Vraiement^ Made- moifelk) Fous ties la feule quifoutienne lagklre dufexe^ ? vous faltes voir que noire fiecle ne manque pas deproduire des miracles auffi bien que les paffe$> four egaler fa glolre aux autres^ ne fuffit-ilpas qitil ait produit un Prince de Cond6, 5? une Prmcejje telle que vous etes! La vertu de cc Prince egale tout ce que les fie- des paffes ont admire ? ? je uois meme que peu de perfonnes au- ront droit de pretendre a Pbonneur de lui etre comparees. Pour ce qui eft de vous> ma Coufine> je vois que tous ceux de votre ft xe *DOUS cederont toute la part qtiils pourroient pretendre a la glolre^ 5? je crois que cbacun donnera a votre merit e le prix qui lui eft du avec tant de juftke. Tour mot , qui fais plus que perfonne prof e/~ fion tfeftimer la vertu , je confcffe que la Votre nfa cbarmee. Je puis dire qtfautrefois fat eu pour vous une ajjeftion qui me fembloit ne pouvoir Jbuffrir tfaccroiffement ^ mais je mejuis vu trompee^ & je nfapperc^ois qtfil faut changer de langage^ puifque c*eft explifuer foiblement les jentimens que fai pour Fous que de kur donmr le caratlere d'unejlmpk affeffion. Ceft un amour ardent qui nfoblige d'etre toujours 3 Mademoifelk ma Confine, Votre tr$s-affettionee & trh-acquife Coufme P Amie CHRISTINE Mr. Palbitzki. 7 At ete trds-fatisfaite de voir dans votre kttre 3 le foin que Ma- demoifelk prend de s" informer de moi. Vous ne me fauriez rien faire de plus agr6abk> que de lui temoigner de ma part k rejjcnti- ment que fai d'une amitie fi cbere que la fienne. Vous ne manque - rez pas de la voir pour cefujet^& de lui renouvelkr les ajjurances de la fincere affeffion que je lui ai vouee ; lui donnant a connoitre k deplaifir que fai , que k vofage oil je me.trouve irfempecbe de ILL; CHRISTINE REIN:E DE SUEDE. 195 M en fair e wol-m/me. fefyere Dependant , qtfel/e aura ferula lettre que je M tirivis, ily a quelque terns y & qu'elle aura remar que par cet effet de ma diligence^ qu'ilfaut que jefois bien empecbee four ne fas rendre mestivilites a uneperfonne que faimefi tendre- ment. Fous faurez aujji le ztle que fai pour la mediation entre la Cour f Mef rs les Princes ; Fous ferez entendre a Mademoifelle^ que je ne me re/acbe point &P qtfelle me f era une amttiefignatte de finfinuer h M k Due Jon Pfre, dont les interests p la Jathfattion meferont toujours tr&-a cceur. Nykoping le 23 -,, f/J . juin 1652. Chrifttne. On s'appergoit aflez par la lettre ci-deflus de la Reine au Due d'Orleans , <|u'autant qu'elle incline pour les Princes du fang , autant parotc-elle con- traire au Cardinal Mazarin, qui etoit pourtant la Creature de la Reine- Me- re, que Chrijline aimoit & eftimoit. On n'en peut attribuer la caufe qu'aux infmuations du fameux Boiirdekt , qui , comme nous le verrons ci-deflbus , preta fes offices tour a tour aux Franpois & aux Efpagnols, dfc parut etre alors fort porte pour le Prince de Conde, pour lequel Chrifline avoit une effime toute particuliere , & du Pere duquel le Pere de Bourdelot avoit ete Medecin. Le commerce de lettres de Mademoifelle dc Montpenfier avec la Reine y aura aufli contribue. Car d'ailleurs Chrijline avoit beaucoup d'egards pour le Cardinal (a). Non feulement elle accorda a fon iriterces- fion la liberte du Cardinal d'Harracb (que Ton avoit arrete a la prife de Prague en 1648.) en confideration , dit-elle, des grands fervices que Ma- zarin rendoit a la France. Mais auffi Chrijline lui avdit fait prefent 1'annee auparavant d'un vaifleau de guerre conltruit expres pour cela , en me me terns qu'elle en envo'ia un autre d'une valeur confiderable a la Reine-Me- re (*). Tout ce que Ton peut dire du changement de I'affeftion de Chrifiine a Tegard de ^ce Cardinal eft , que la Reine fouhaitant ardemment que les troubles de France fuflent bientot appaifes , elle auroit compte le facrifice >du Cardinal pour un mal bien petit , en comparaifon de celui d'une Guerre civile , ou les innocens ont ordinairement le plus a fouffrrr. Mais a la lettre de(7/v//?m^auDucd'0;7^72j,joignonsdes circonftances & des reflexions qu'il ne convient pas d'omettre. ,, La Reine de 6w&& , eft-il 5, ajoute , non contente d'avoir ecrit au Roi, a la Reine fa Mere & a Mr. le -^Wr* - ' |4 J. (a) F. Chanut Mem. T. I. 141. 239. 347. 359. fc? T. H. p. 467. (*) Le vaifleau de guerre envoie nu Cardinal s'appelloit Julius qui e"toit le nom de cette Eminence. II .portoit trente deux Canons de bronze & ^toit eftim^ quarante mille e"cus (i). (i) V- Theatr. Eur. ad aon. 1647- pag- 296 & 4M. Bb 2 i<)6 MEMOIRES CONCERNANT 5 , le 'Due d' Orleans, pour les porter a la Paix tant generate que particuliev 6sr V ,, re, en a fait encore autant a Mr. le Prince, au Parlement de Paris utres let- au Cardinal de Rctz & a Monfieur de Longueville, avec charge au Sei- * gneiir PaMzki , qui les a recues de les porter toutes & de les rendre en main propre pour en tirer reponfe. Celle du Roi , aiant etc vue " dans 1 Confeil qui fe tint a S. Germain en Laie un peu auparavant que affet cues Sa Majeffe en partit pour aller a Corbeil, le Mazarin, qui le compoloit . ^ f u j ^ f cn( J. ?, trefle. Mr. le Prince ajoutant, que non feulement il lui abandonnoit ,., tout ce qui le regardoit , mais encore fa. propre vie pour en difpofer ,, comme elle voudroit ; parole digne d'un Mars 9 qui veut gagner une Reine a qui rien ne re'fifte. Le Cardinal de Retz.z recu la iienne, qui ,j n'a repondu autre chofe que des civilites , pour avoir auffi peu de part y.) en cet accommodement , comme les Princes , a qui 1'affaire touche , ont jufte fujet de le tenir fufpecl: en tous leurs interets , puifque les fiensiront. 3, toujours devant , arm d'avoir la place, du Mazarin, & redoubler nos ,., maux par ce changement dangereux ; e'tant certain que cette nouveile Pourpre ne fera pas plus favorable a la France, qu'une plus vieille qu'il ^ en. veut chaffer, & que pour changer le bouchon, nous ne laiflerons pas de boire toujoursTauffi mauvais vin, comme on dit de Catherine de Me- diets , lorfqu'elle fit femblant de laifler le gouvernement des affaires au: Roi de Pologne fon Fils. Ce Seigneur Suedois- fe difpofe d'aller en Normandie pour donner a Monfieur de Longueville celle qui lui eft addreffee : apres quoi il retour- nera. a la Cour pour demander les depeches qu'il en attend pour la Rei* ne fa Maitrelfe: refer vant de prefenter celle du Parlement tant qu'il ver- ra fi le Mazarin fait toujours auffi peu d'etat des prieres de cette Hero'i- 5, ne. incomparable , que de 1'indignation de nos Princes, des arrets de nos; Parlemens, & de la haine de tout le Roi'aume, encore qu'il fache par> 3 , experience que : Nullum gravius fupplicium eft odio publico ,. dit un plus 3 , grand Miniftre d'Etat que lui , qui eft Seneque (*). 11 ne faut pas douter, que 1'avis de Mazarin, dont il eft fait mention dans ces reflexions ne foit de lui, favoir, que la Cour de France ne pou- 3,. v,oit permettre que la Reine Chrlftine prit connoiflance des diffe'rends qui , font. (*) Ces r^fl^xions font imprimdes avec la fusdite lettre de Cbriftine au Due d' Orleans, P.aris chez Ifacob Chevalier proche Saint ^em de Latran MDGLI, in 4. CHRISTINE REINE DE SUEDE. font entre le Souverain & fes Sujets: " a cet egard il ne peut pas etre blame , puifque c'eft une des premieres Maximes de gouvernement : de prendre garde , qu'un Prince etranger ne fe mele point des affaires domefti- ques d'un autre. C'eft aufli par ce principe, que le Senateur Adler Salvius, alors favori de Chriftine, avoit; dit franchement, dans une vifite qu'il avoit rendue a Picques Refident de France z Stockholm, (a) que ce n'avoit point etc de fon avis , que fa Reine avoit offert foil entremife pour cet ac- commodement domeftique , ne voi'ant pas que le Roi de France la dut accepter." Mais la Reine , prevenue des differens bruits qui lui ve- noient de toutes parts des grandes emotions du Parlement de Paris, & quel'Etat de France e'toit toujours en danger de fedition , croibit bien faire, de vouloir s'entremettre pour raccommodement de ces troubles. II paroit auffi que la gloire, que Cbriftim fe promettoit en cas de seuflite de fesbons offices y y entroit pour quelque chofe , & que dans ceftte intention , elle avoit charge fon Refident Rofenhane des 1'an 1649^ d'en faire 1'ouverture a la Cour de France. II eft a preTumer , comme dit 1' Aute&r de ces reflexionsj- que le Cardinal Mazarin , qui s'apper^ut, qu'il n'y avoit rien de bon pour lui en cette negotiation, ne put pas la trouver fort agreable, & qu'en la diffuadant en bon politique , il tachoit de la rompre entierement. C'eft auifi par-laqu'on peut eoncilier les plaintes, que Chanut (b) alors Miniftre de France en Suede , eut ordre de faire a Chrifline de fon Refident Rofenhane r fijr ce qu'il avoit parle au Cardinal Mazarin de cette affaire avec fi peu de moderation, qu'il avoit oblige fon Eminence de lui temoigner , qu'il dou- toit que Sa Maitreffe la Reine Chrijline f avouat , puifqu'il s'etoit emporte jufqu'a menacer , que la Suede penferoit en particulier a fes affaires , fi on n'accommodoit promtement les troubles de Paris-: & que non content de cela, il avoit envoie a fa Maitreffe des relations fi extraordinaires de ce qui fe palfoit qu'il etoit a craindre, que fon Miniftre ne.fe laiffat preoccu- per des fentimens du Parlement (*),. Quoi (a) Chan. Mem. T. II. p. 476. S'Wicquef. (ft) Mem. T. I. ' pag. 343. 403- &c. ^mbajf. Liv. II. SeSt. W. p. 39. 40. (*) II paroit par un petit Traite" en latin aflez rare, imp.rim6 en 1649, in i2. fous Semimcnj le litre de Qbjervationes politico fuper nuperis Gallic motilus, dont ce meine Rojenbane de Rofenha- eft Auteur, (i) qu'il ne donnoit pas au Parlement de Paris toutle tort des troubles qui ne *j" J " agit<;rent alors la France. II y dit entr'autres chofes a ce fujet. (2),, Rex modernus in- j^ c "gf c fans ? pupillus efl Regina proba f facilis. Inter Cardinalem fcf Parlaintntum Pari- \'i,^ e O u Jienfe de autoritate Regia Us efl : Hie bane affertam cupit, Jed violenter f tanquam Regil'oa e'toit majori : boc. illamjalvam defiderat , fed falvis juxta Conftilutionibus Regni f privilegiis la-deflus er fubditorwn , ac inter tutelarem adminiftrationem feu primi Miniflri & ipjius Regis, dif-^ tt ^ f> _,, ferentiam inejje ajferit , quam ills negat. Hinc indicate deluit pars r eliqua jubditor um , cui O) V. Meur* Afta P. w. vol. VII dan*-lc3 (2) JL. c. p^ 15, 2*s, 2*j, 8t. iio> Vies des Minifies pag. 32. L'an plaintei centre le Aliniftre de Suede a la Cour de franct & comment Chriftine y lepondit. .-MEMOIRES C O N C E R N A N T Quoique Chriftine fut interieurement piquee du refus indireft de fon. en- rremife dans les plaintes portees centre fon Refident , ^ elle ne laifla pour- tant pas de repondre a Chamt en des termes fort polls : (a) qu' elle etoit ravie , que Leurs Majeftes n'euflent point doute en cette rencontre de fes bonnes intentions , & que fes fentimens nejfuflentdiffe'rens de ceux de fes Miniftres ; qu'elle ne voudroit pas donner a la Reine Regente des confeils -qu'elle ne prendroit pas pour elle-meme , & que ceux qui ne favoient pas conferver leur autorite toute entiere, la pourroient encore moins defendre quand ils auroient fbuffert , qu'elle fut partagce. . . Chamt ajoute , que Chriftine avoit prie d'excufer les difcours de fon Miniftre Rofenhane , qui n'avoit pas eu ordre de les faire & qu'elle lui ecriroit fes volontes enforce, qu'il fe conduiroit dorenavant plus conformement a fes intentions. Sur quoi Wicquefort fait cette remarque: (b) que comme Chriftine favoit que les intentions de Rofenham etoient bonnes, parce qu'il craignoit que lesbrouil- leries de France n'empechaflent 1'execution de la paix SAlkmagm , ou n'y allumaflent une nouvelle guerre , elle ne condamnoit point fon procede , & qu'aiant de 1'eftime pour le Prince de Conde , elle n'approuvoit point celui du Cardinal. C'eft apparemment a caufe de cela & par jaloufiecontre le Cardinal qua 1'inquietude de Chriftine fe reveilla en 1652. quand -elle aprit la refolution que (a) /. c. pag. 403. 405. (J) Dans fon Amlaff. livr. II. pag. 218. cui adbterendum erat &f auxilia commodanda. Sed dum illi Spettatores egerunt & ne- minem confiliis viribufque juvanint pari fortuna decertatum eft, & indecija lite pax qualiscunque fafta eft, ex eadem reli&o dijfentionum jeminc , ad infenjius bellum prope* ,, diem eruptura... Sur la fin du fufdit Trait^ Mr. de Rofenbane donne au Cardinal des maximes a fuivre , difant : unicum addo quod Mazarino nuper in Qurem ^f ex officio a- mid, dittum crat , triajibi cavendum fore , Ji velit falvus effe : i. avaritiam moderetur ,, & inutili pscunia amicos paret f dignis pramia & largitiones non invideat. 2. Ditit fidem adbibeat & minus Jit verfatilis c? 3 vifibilem fe prcebeat ^ follicitationibus magit facilem. Qua an ufu edo&us corigat , f melius fames ac fecuritati fua confulat, vidc- ,, bimus. On tkoit meme en 1648 dans 1'idde en Suede, (i) qu'il dtott ndceffaire, que 1'autori- te" Ro'iale en France fe relachat un pea de 1'abfolu pouvoir d ; une pure Monarchic. Si cette idtte ^toit venue a quelques-uns du S<5nat de Sutde des fentimens de Rofenbane on de-quelque autre, c'eft ce qu'on ne fatiroitdirepofitivement. Mais toujours elt-il certain que laR^gence de France fe plaignit de lui comme d'un Miniftre qui fe meloit des affai- res domeftiques de France, (2) & que pour cette raifon la Reine Rtgente , a 1'inftigation du Cardinal (qui favoit que cet accommodement ne pouvpit fe faire qu'au d^pens de fa fortune) non feulement infifta fur fon rappel, mais qu'a la fin elle 1'obtint aufli en confideration de I'amiti^ perfonnelle que Cbriftine avoit pour la Reine Regente. Avec tout cela elle ne condamna point la conduite de Rofenbane par la raifon ci-defTusallegue'e. Par un julle retour de la part de la Cour de France, nous avons vii de nos jours un de fes Minittres rappel!6 pour s'etre inger^ trop avant dans les affaires domefliques dupai's ou il rdfidoit. On n'a pas laiffi pour cela de fuivre le meme fifteme qui a coutti ff chcr a plufieurs Etats. (3). (i) Cfranut Mem. T. L p. 314- (zj Wlcqutf. 1. c. (i) Rstt/et Rccueil T. XI, pag- 401. &c. CHRISTINE- REINE DE SUEDE. rp/j r/nn que la Reine Regente avoit prife de faire revenir pour h feconde fois le Cardinal Mazar'm , qui avoit etc oblige de s'eloigner de laCour pour pacifier les affaires : (c) EHe repondit au Refident Picques , qu'elle etoit bien aife d'ap- prendre , que le Cardinal eut par -la moi'en de Faire voir a tout le monde quefon adminiftration , & les grands fervices qu'il avoit rendus a la France, meritoient une autre reconnoiflance , que celle qu'il avoit rejfie' : mais qu'elle apprehendoit que ce Cardinal ne put pas demeurer a la Cour , a. caufe de 1'oppofition des Grands & des Parlemens; & qu'elle croi'oit, qu'il lui feroit plus avantageux defe retirer de France, apres fa juftification, que d'y demeurer avec la haine publique. (*) En attendant, comme les troubles en France ne ceflerent point , & que Cbiftine vouloit au poflible y emplo'ier fon interpolation , Elle avoit ecrit la-deflus une feconde lettre a Mr. le Prince de Conde , (f) en 1'exhortant p ? rii pour d'apporter toute la facilitd poflible a faire cefler les troubles dans fa Patrie. Void cette lettre avec fa traduction: _qui arm a. ATos Chriftina &c. &c. Celjifli- * * me Princeps , Confanguinee & Amice chanfflme , Cum ad- verfa Franciae , haudfecus ac no- jtra-) nos officiant , nonpojjlnnus qumborrore concutiamur^ quod inclutum iltud Regnum in tanto difcrimine verfari intelUgctmus. Nam prtfterquam quod ibi inte- ftinis motibus omnia turbentur? etiam fores omnium vicinarum gentium odio atlibidini pat ere vi- dentur* H:z Suk 200 MEMOIRES CONCERNANT operam no ft ram ft gratam Us quo- rum inter e fly nee fine fpe felicis eventus effe cognovcrimus ; non inter mitt emus , fubinde ac de ea re edotttf fuerimus proper e per Legatum noftrum commodare. De Ctftero, cwnD 9 V ra> fummaer- ga regemfuum fide , infigni pru- de ntia fortibufque fattisfatis Ju- perque teftatum fecerit , quam bcne Regi Patri Sueoo w/5 -Gotborum^ VmdaloriWi que Regina^ Magna Trinceps ^-ixEft-onirt) Pome- i qui Regni fores omnium vicina- rum gentium odio^ pradaque a- periat. H> ojjicii nqftri effe dmimus mediationem no/Irani ad tentan- das inter paries diffidentes con- Tome I. cor- I N SU E D E. : . .ne jde Suede, des Goths & des 'l r anda- >flsa ' les , Grande Princefle de Ftnlande', Duchefle de Pomeranle , Caffiibie &c. Princefle deRugen , Dame d'lngrie, de Vismane &c. Souhaite des^confeils de Paix , &. la ; jofe^gui les Tr.es rllluftre Aflsroblee , nous confiderons > av.ec,attentioii 1'e- tat preTerit du Roiautne de France ; certaine horreur nous furprend a'l ? a- fpecl du danger evident auquel: noos le voi'oris expose , -. non -foukment a raifou des mouvetnensinterieurs, doot il eft. agite , mais principalement, en ce que 1'Ennemi du dehors..appeJie au dedans de fesentrajllesjfemble en avoir ouvert la porte a la iiaine & a la -proi'e de toutes les nations voiiines. Toutes ces chofes& leursconfequen- ces nous paflent dans la penfee , & attriftent nos affections. -t combien que nous ne nous ingerions pas vo- lontiers dans Ja,con,duite ni dans les affaires 'des autres Couronnes , & que nous ne doutions pas que ceux qui font intereffes dans ces calamites pub'liques , n'embrafTent & ne recher- chent. d'eux-memes toutes ,les voi'es par lefquelles on peut eteindre cefu- nefle incendie de Guerre Civile, juf- ques dans fon fo'ier , & mettre la France en Paix : Nous ne voulons pas pourtant demeurer oi fives dans un peril fi evident, que nous eflimons commun ; c'efl, pourquoi ai'ant egard au falut public , & a cette Amide & Alliance,reciproque , qui lie ces deux Roiaumes , Nous avonsjuge faire devoir d'Amie & d'Alliee, de faire offre de notre entremife , pour tacher de trouver les chemins d'un. bon accord entre les Partis anirnes : Et comme nous n'ignorons pas le credit & 1'autorite de votre illuftre Corps dans le Roiaume, ,& que tou- Cc tcs t/an 1652. 02 cor di# vias benevolo affettu offer - re: Ataue ut inclytum Ccetum wflrum , author it ate & gratia in 'P atria F'eflra plurimum pofje novimus ; denique it a vos affec- tos ejje , ut falus '&* tranquil lit as 'ejusdem cor di Jit ac conjtliis ve- JlriS) it a pro Jingulari de vobzs animi noftri aftimatione confidi- mus, nihilper vos, quantum hi vobis eft , impediment^ fore , quo- minus inteftina Pads ineantur confllia y qua Rei Columina pu- blics confirment. Ergo quicquid pro Gallic felicitate opera no- Jlra affere poterimus i & offer i- mus &p pollicemur; ft modo me- diationis ojfficia qua ad condTian- das difcordes partes obtulimus y grata effe atque accepta renun- cieth; qua dumjuo iempore ex- peffamus , Dcuwprecamur ut vos tueatur incoluwes, Cbriftianiffi- TJii Regis 5 patriaque Feftr a bo- no. Dabamus in Rcgia noftra Stockbolmenjl 4, Idus Cbriftina. tes vos Deliberations ne veillent que pour fon ialut &. fa tranquillite r auffi dans 1'eftime particuliere que nous faifons de tanc de fages Teces qui le compofent , nous elperons que vous n'apporterez aucun empeche- ment a la Paix Civile , qui doit etre la ffirete de tout 1'Etat. Nousoffrons done & promettons d'apporter tout ce qui depend de nous pour le bon- heur de la France, fi tanteftque vous nous fafliez favoir que vous avez a- greable Tentremife que nous avons prefentee dont vous nous ferez favoir des nouvelles : Cependant nous prions Dieu qu'il vous conierve pour le bien de Sa Majefte Tres-Chretienne & ce- lui du Pa'i?. Donn^ en notre ville Roi'ale de Stockholm le io Avril 1652. CHRISTINE^ On voft par la date de cette lettre qu'elle efl anterieure a la refolution prife par la Regence de France , de rappeller le Cardinal de fon e'xil. Chri- fllne s'e'toit fans doute laifTee perfuader, qu'il y avoit peu d'apparence que Je Cardinal Mazar'm retournat jamais en France en ai'ant etc banni pour. tod- jours par un arret du Parlement , comme Perturbateur du repos public. Mais elle avoit en meme terns donne ordrekPalbitzki de ne pas produire fa lettre au Parlement , que quand les circon fiances de 1'affaire le requerroient. Soit que Palbitzkl s'en foit laifle impofer par le Parti contraire au Cardi- nal , foit qu'il n'ait pas pd prevoir les fuites que la produdlion de cette let- tre pouvoit avoir, on trouve par les Me'moires d'OmerTalon, Advocat Ge- neral en la Cour du Parlement deP^m, (a) que la lettre de la Reine Cbriftinc avoiC (a) Tern. Vlll. $ag. x88. 189 CHRISTINE HEINE DE S U E D & 203 avoit etc apponde a la Compagnie le 7 Juin 1652. que ledit Parletnent de L ' an - Paris avoit trouve cette letcre couchee en termes fort civiles , & que le President avoit temoigne qu'il n'y avoit rien a requerir, fi non que la- dite lettre fut envoiee au Roi: mais que Talon avoit reparti , que ce n'etoit pas le fendment du Parlement, parce que la lettre ne venoit pas d'un Prince qui fut en rupture avec le Roi, ni de perfonne qui fut en difgrace : Mais que la Reine de Su^de etoit alliee & confederee avec la Couronne, que fa lettre avoit pft etre ouverte & que reponfe pou- voit lui etre fake: que la Compagnie pouvoit confiderer fa lettre comme un effet de fa gene'rofite & d'une grandeur de courage qui furpaflbit fort fexe , mais non pas fa condition ; qu'elle avertiflbit les Francois des maux qu'ils fentoient, & les excitoit par leur propre interet a fonger a latran- quillite du Roi'aume : qu'elle offroit meme fon entremife & fa mediation, qui ne devoit pas etre rejettee. Talon ajoute , que par ces confiderations & d'autres femblables , le Parlement avoit conclu pour I'eloignement du Cardinal Mazarin, comme le feul &.l'unique remede fur les occurren* ces des affaires prefentes. De la maniere que la lettre de la Reine Chrljline fut regardee au Parle- ment , elle n'ayoit pas fujet d'en etre malfatisfaite. Mais la Cour de Fran* fe, qui n'etoit pas d'humeur de deferer en aucune fajon aux remontrances du Parlement fur I'eloignement du Cardinal & fur la miferepublique, ai'ant cu avis du contenu de la lettre de Chriftine, qui fans doute lui rafraichit la memoire de la maniere , dont elle avoit apoftrophe le Cardinal dans fa let- u - e au Due d' 'Orleans, donna ordre a fon ReQdent Picquesen Su&de, de faire plainte a la Reine Chriftine (a) de la conduite de Palbitzki au fujet deU lettre de ChriftinC) qu'il avoit produite dans le Parlement. Quoiqu'on ait raifon de croire qu'elle avoit eu un lenfible depit, de ce que fes bons offices pour accommoder les divifions en France, & principa- lement celles du Prince de Cbnde avec le Cardinal , n'etuTent pas eu lieu ; elle n'oublia pas cependant d'afTurer ledit Refident Picques, que c'etoit la faute de Palbitzki d'avoir rendu fes lettres au Parlement & aux Princes , a- vant que d'avoir fii la volonte du Roi de France: que Palbitzki avoit eu grand tort d'en avoir ufe de la fajon , qu'il avoit fait tout le contraire des inftruc- tions qu'il avoit re$ ue's : & que la Reine lui en avoit deja fait & en feroit encore des reprimandes. C'eft a peu pres en ces termes que reflerent les offres de la Mediation de Cbriftine pour accommoder les deux fa6lions qu'il y avoit en France en ce tems-la. Le Cardinal Mazarin de retour de fon exit I'ai'ant emporte fur fes enne- mis, (Z>) & les Princes traitant avec lui a^des conditions avantageufes pour eux, cc-ux-ci ne vouloient pas que le Parlement eCit part a cet accommo- dement. Aufll cette Compagnie fut-elle releguee a Pontoife, jufqu'a ce que la .(a) Chanut. I e. Tom. III. p. 3. &c. Card. Mazarin f*g. 8 fift. 2S 2 & 379* Wicquef. /. c. Liv. II. Sett. II. fag. 39. 40. &c. (6) Gal, Goaldo. Hift. du Minifttre du Cc a MEMOIRES CONCERNANT la paix s'enfuivit en 1653. & la meme anne'e le Cardinal Mazarin y - apres la reddkion' de Bmirdeaux, fit fon entree pubiique a Paw comme en triomphe. Quinze ans apres le Parlement de Paris eut encore le chagrin , que le Roi de France 'lui enjoignit d'oter de fes regitres tout ce qui s'etoit fait centre fon- autorhe depuis 1'annee 1647. jufqu'a la fin de 1'annee 1652. C'eft Mr. de Lionne qui le remarque dans fa lettre au Comte d'EJlrades (a) &-ilyajou- te. La Compagnie a fans doute fen ti le coup, m'ais ce ne devroit etre, dit-il, que par la douleur de n'en avoir pas pris elle-meme la re'folu- tion, il y a long- terns, & qu'il a falu que ce ne fut plus qu'un effet de 3, fon obeiffance." Dcmsi'n./-j - ii-r-/-- tun. que terns auparavant , oc c elt lans doute a cet egard , que la Reine ecnvit en 1647. a ^ r - Sahius: J'apprehende , lui dit-elle, d'avoir ici beaucoup d'occupation , deforte que je dois rendre graces a Dieu , fi je puis ob- ,,. tenir d'une ou d'autre maniere une bonne paix La difpute rouloit entre la Nobleffe <& les autres Ordres de 1'Etat. (/;) Ces derniers infiftoient fur la revocation d'un grand nombre de biens & de terres appartenantes a la Couronne & donnees a la NoblefTe. Le Peuple s'etoit retire mecontent , apres avoir reconnu fes forces , & les Ecclefiafti- ques , n'en fortant pas plus fatisfaits , prefumoient du poids qu'ils donne- roient aux affaires. II eft vrai que 1'autorite de Chriftine etoit encore aflez grande pour les retenir, mais il ecoit comme inevitable , qu'elle ne fe trou- yat elle-meme dans d'extremes 'embarras. La haute Noblefle , qui regar- doit comme fon patrimoine les premiers Emplbis de 1'Etat & les avantages qui y etoient attaches , ne voioit qu'avec peine ces emolumens pafler entre Jes mains des Creatares^de la Reine: le Peuple accoCrtume a la frugaHce <& a la modeftie , ne pouvoir fnp'porter 1'eclat & le faftetjui s'e'toient intfo- duits a la Cour : & il fremiflbit de voir , que plus le trefor etoit epuife, plus Chriftine donnoit d'etendue a fes liberalites.' Gependant, li la Reine eut voulu cefler de donner y combien n'eQt-elfe pas mecontente de'^ens, qui pretendoient me'riter les'memes faveurs , que ceux qui avoient deja ete recompenfe'S'? &.fi, pour fournir a fes depenfes, eHe eutjpris le parti de mettre de nouveaux imp6ts , elle eiJt couru rifque tie mettre le peuple au defefpoir. Eh attendant , la Reine qui favoit profiler de cette mef intelli- gence des Etats , s'etoit fervie fi prudemment de 1'occafion , que bien loin de voir donner des b'ornes a fon autorite , comme plufieurs Grands le preten- doient , elie s'etoit rendue 1'arbitre de tout ce qui fe paflbit a cette Diete par (a) Dans fes Lettres fcf Negoc. Tom. VI. fag. 200. fc. Jaegeri Hifl. T. I. lib. I. e. p. 234.. /X. pag. 13. Wilde bift. prag. Suecicc Cap. (b) Pufend de R. S. libr. XXIL 5. 38- UL S:ft. III:. 39- H- 7- ^- 24- fcrV. 40 Libr. XXIII. 5. /. item de Rub. C'iro!i oil il decouvre-j'olideinent-lcs fourccs decssdi- (jiitluvi L br. I. J. 4. Ciianut. i. c. T. II. vif.om entre les Etats de Suede. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 205 par les divifions elevees entre les differens Ordres de 1'Etat. Cette emula tion fe fit aufli remarquer dans le Senat , & fat caufe , que plufieurs des anciens Senateurs fe retirerent d'eux-memes fur leurs terres , & quoique lc Chancelier Oxenftierna reftat a Stockholm j c'etoit; comme difoient les gens de bien, pour ne pas dormer occafion de faire mal jugerderadminiflration prefente, dont pourtant il defapprouvoit les irregularites (*). Pendant ce defordre le Comte Magnus crohToit en faveur & en credit au- pres de la Reine; elle le fit loger dans le chateau comme Grand-Maitre decr fa Maifon , & il etoit le feul a qui Ton s'addretfbit pour toutes ies graces': favcur - ce qui lui fit bien des-envieux. Cependant le Prince Charles -Guftave 9 qui etoit fage & couvert , fe ca- choit dans fa Maifon de campagne : il fe lavoit les mains du Gouverne- ment, auquel il ne prenoit nulle part. II careflbit indifferemment tout le monde, faifoit profeffion d'une foumiflion aveugle aux volontes de fa Bien- faitrice: mais il etoit a craindre que les chofes rie puffent durer 5 lon2 -terns tenteme s , ,. ' ' ' -r' c i R " el cpune- en cet etat ; les finances etoient epuiiees il fe retiroit fur le champ , de peur qu'on ne crfit qu'il entroit en conference avec les Sena- teurs, ou autres fur les affaires de 1'Etat. Mais du refte, il ne negligeoit lien pour gagner par des manieres gracieufes I'affe&ion des Grands du Ro- iaume. Enfin Cbriflme communiqua fon deflein au Grand-Marechal & au Chan- celier , () leur enjoighant de le faire favoir au Prince hereditaire , afin qu'il fe difpofat a venir prendre pofleflion du Gouvernement. Son Altef- Je Ro'iak , en reponfe , les pria , de faire leur poflible aupres de Sa Majef- te pour la detourner d'une pareille demarche: il les exhorta a la prier in- ftamment, de vouloir condnuer un gouvernement qu'elle avoit conduit a- vec tant de gloire & tant d'avantage pour le Roi'aume : il proteila dans fa Jettre a la- Reine, qu'il demandoit au Ciel, que Sa Majefte ne fe laflat pas du Gouvernement : & il donna les plus fortes aflurances , qu'il auroit toft- jours pour elle une profonde foumiffion , une entiere obeiffance & une fi- delite inviolable, comme fon Sujet, fans deiirer jamais autre chofe, tant ri/jint de- qu'il plairoit a Dieu de lui conferver la vie. Malgre ces inflances , Chrifti- o r n ne declara le 2$ O<5lobre 1651. en plein Senat la refolution qu'elle avoit a- formee de remettre 1'adminiftration du Roi'aume entre les mains du Prin- n ^ r ^ ta i re > & de mener une vie privee. Elle dit, (c).,, qu'apres a- Senat voir murement reflechi fur une affaire de cette importance , elle n'avoit cequ"i"fi? point trouve de meilleur moi'en que celui-la, de pourvoir a la furetede ^ouri'cndc'-,, 1'Etat & au repos des peuples, qui fouhaitoient de voir alfarer la fuccef- mer * fion au Trone en voi'ant naitre des heritiers de la Couronne: que com- me elle ^toit fermement refolue a ne jamais fe marier , le Prince e'tant une fois declare Roi, il feroit oblige de prendre une Femme, & que les enfans qui lui naitroient , tireroient la Nation de la crainte qu'elle avoit 3 , des maux qui accompagnent ordinairement les elections des Rois. Elle s'eten- (a) Pufencl. de Reb. Car. Guft. lilr. I (0 Pufend. /. c. Libr. XXII. J. 44. item . 4. fon bift. de Suede T. II pag, 420. fc. (&) Pufend. /. c. libr. XXHL J. 3. tfc. Chanut I. c. p. 321. 322. Theatre Hift. par Chauut /. c. pag. 266 & 314. &c. CudeviUe d arm. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 207 s'etendit enfuite fur les vertus du Prince & fur les efperances que Ton de- L ' an * voit former de fon gouvernement." _ l6sr> Les Principaux Senateurs firent tous leurs efforts pour ddtourner Chrifti* tie de ce deffein. ,, Us lui dirent que Dieu leur avoit donne une Reine: & que tant qu'il plauroit a Dieu de lui conferver la vie , ils n'en recon- noitroient jamais d'autre : ils appu'ierent fur 1'epuifement des finances du Ro'iaume, dans un terns,* ou tant le Couronnement que le Mariage du Prince demanderoient des fommes confiderables". Ils alleguerent encore d'autres raifons non moins prefTantes : mais les Senateurs , voi'ant qu'ils ne pouvoient detourner cette Princeffe de fa refolution , lui dirent qu'il etoit neceflaire de faire convoquer les Etats Generaux du Roiaume pour le mois de Fevrier fuivant : qu'on delibereroit avec eux fur cette grande affaire & qu'on feroit enforte de la refoudre. Ceux qui croioient etre au fait du fecret , pretendoient que Chriftine ne fe portoit a cette refolution, que parce que, jaloufe de fa gloire, elle con- noiffoit qu r elle 1'avoit fait monter au plus haut point qu'elle pouvoit defi- rer: quene pouvant plus raugmenter, elle comprenoit qu'il lui feroit dif- ficile de la maintenir dans le meme etat, attendu Tepuifement des finances & 1'inilabilite des chofes humaines : que fatisfaite d'avoir porte la reptita- tion de la Suede au plus haut degre qu'elle cut jamais ete , elle auroit la confolation qu'on ne lui imputeroit pas les maux qui pourroient arriver ; qu'au contraire on en eleveroit davantage fon Regne, & qu'on laregrette- roit. De plus on pretend qu'elle etoit perfuadee , que fon abdication lui augmenteroit encore fa gloire : qu'on regarderoit comme un prodige fans cxemple , qu'a fon age elle efit quitte le Gouvernement d'un fi puiffant Etat & meprife le mariage pour fe donner toute a elle-meme & a 1'etude de la fagefle. Chamt ajoute, (a) qu'il dtoit vrai , gu'elle portoit un juge- ment fl fain des choles humaines , qu'elle ne les eflimoit qu'autant qu'elies devoient 1'etre , a la fajon des anciens Philofophes ,, dont elle affe&oit de pratiquer les maximes. Cependant les Senateurs & les Notables des Etats du Ro'iaume , qui fe trouverent alors a Stockholm , firent au mois de No vembre une nouvelle tentative pour furmonter la refiflance de Ckriftine. Ils y emploierent les prieres & les fupplications : en un mot ils firent tant d'efforts qu'ils lui perfuaderent a la fin de continuer radminiflration du Ro'iaume. Ils furent tous en Corps lui demander cette grace. Le Chan- celier Oxenftierna porta la parole, & fit un difcours fort eloquent & fort perfuafif: () II remercia premierement la Reine au nom de toute laNa- don des loins qu'elle s'etoit donnes jufqu'alors pour la gloire & le repos- >5 du Roiaume , & de ce qu'elle 1'avoit rendu le plus noriflant de toute Y Europe. II lui reprefenta Timpoflibilite , qu'il y avoit , qu'il put fe con- ferver dans le meme etat fi elle abandonnoit le timon des affaires ; la re'- ,, folution que le Prince de Su&de avoit prife de ne point fe charger de Tad- ^ miniflration de 1'Etat , tant qu'il plairoit a Dieu de conferver a Sa Ma- ^ jefle les forces & la vie; le fenfible deplaifir qu'elle auroit de voir per- dre (?) I'C.pag. 335. 338 ? 339 CO Pufend. di R. S. Libr. XXIII, $./-. 2oS ME MOIRES C ON C E R N ANT dre par fa retraite les fruits de tant de veilles, & de tant de peines qu'elle avoit prifes. II ajouta. Que la gloire: ne confifloit pas tanc dans ion acquifition que dans fa confervation, qu'il auroit mieux valu que fon ,, adminitlration cut ete moins heureufe, que de la-vodoir abandonner a- pres 1'avoir portee a un point, ou les peuples de Ja Terre ne la pou- voient confiderer fans admiration & fans etonnement: que les princi' ,, paux Officiers du Roi'aume connohToient parfaitement la verite de qe qu'ils pre-noient la liberte de lui dire par. fa bouche, qu'ils etoient perfua- dts .que la ruinede leur-Etat fuivroit infailliblement fa retraite , qiuls lui declaroient franchement , que fi elle abandonnoit le timon , ils abandon- neroient le vailfeau, qu'aufli t6t qu'elle fe retireroit, ils en feroienttous de meme a fon imitation, qu'ils fe demettroient tous de leurs Charges, li elle ne fe laiflbit toucher a leurs prieres, & fi elle ne leur accordoit ,, la grace qu'ils lui demandoient a mains jointes & avec les plus grandes ,, inflances, ne voulant pas que la Pofterite put leur reprocher d'avoir confenti a une chofe fi prejudiciable a. leur Patrie. Alors le Ghancelier s'addreflant plus particulierement a la Reine, lui demanda fi elle etoit mecontente de fes Sujets; fi elle fe plaignoit qu'ils n'euffent pas pour elle aflez de refpecl: & qu'ils ne lui rendifTent pas affez d'obeilTance ? II la pria qu'il lui pi Tit de le leur declarer franchement, parce qu'ils lui feroient eux-memes jultice ; qu'ils s'expoferoient a tout cequ'el- le exigerok d'eux ;qu'a 1'avenir ils s'etudieroient plus, qu'ils n'avoienten- ,, core fait, a lui plaire & a lui etre agreables, qu'ils n'epargneroient rien 5 , pour maintenir fa grandeur , fes droits & fon autorite , qu'a cet eiFet ils lui ofFroient de nouveau leurs vies & leurs biens , &que.commela Couronne etoit fort endettee , ils etoient pr^ts d'acquiter de leurs bour- fes toutes les dettes, & de faire un fond fi confiderable pour 1'entretien de fa Maifon, qu'elle auroit moien de la foutenir fur un auili haut.pie qu'aucun Roi du Nord." Le chan- Enfin le Chancelier -allegua de fi fortes raifons: il parla avec tant decha- ecHerOxM- leur , & caufa une telle emotion dans les coeurs de toutel'Alfemblee, qui fijjjyjfp'avoit les larmes aux yeux , que Chriftine fe laiffa perfuader. Gagnee par ia force par leiirs prieres , elle leur promit qu'elle retiendroit radminiftration del'E- cours'ia'cie- tat j ma ^ s e '^ e Y m ^ une condition i CQ fut qu'on ne lui parleroit jamais de termine a manage , a quoi elle n'avoit aucime inclination. On confentit a fa de- contmucra i o i / r i i- !'/ r regner. mande , oc chacun temoigna par les acclamations combien il etoit fatisfait Les feiicita- d'avoir obtenu que Chnjl'me demeureroit leur Reine. Le Prince Charles - c^r;/7; lie ^fl^ 6 ^ temoigna de meme combien il etoit fatisfait de ce qu'il avoit pJu rccu't d"e to'i- a la Reine de continuer fon adminiilration , qu'il prioitDieu qu'elle luifur- tc part. vecCit, & que de fon vivant il n'accepteroit pas le Gouvernement. penfa q d' n Ceux , qui cherclioient les motifs qui auroient pti porter Ja Reine a changer fa premiere refolution , pretendoient (a) , que cette Princeife a- lant a P r ^ s ^ ue ^ on ^ e ^" ein n'avoit ete, ni loue, ni approuve dans lesCours etrangeres , elle s'etoic defabufce peu a pen. -D'autres vouloient , que les prie- (fl) M-m. de Chanut I. c. pag. 35*5. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 209 prieres des Grands de Ton Roi'aume, & la preuve qu'elle avoit qu'iis 1'ai- L ' att moient & qu'iis preferoient fon Gpuvernement a tout autre, firent unefor- I6si te impreffion fur Ton efprit , qui fe roidiflbit naturellement centre la refi- ftance, raais qui fe laifloit flechir aux fupplications. Enfin il s'en trouvoit, qui difoient, qu'il pouvoit etre arrive a Chriftine la meme chofe qui arrive a ceux qu'une pailion violente fait courir par defefpoir a la more , mais qui s'arretent fur le bord du precipice , lorlque les douceurs de la vie, qu'iis vont quitter, fe prefentent a leur efprit. En effet , ce changement de la Roi'aute a la vie privee a d'etranges circonftances pour quiconque le regarde de- pres. II n'y cut pas jufqu'aux favans des pai's etrangers , qui allarmes de 1'abdication de Chriftine , ne temoignaflent leur joi'e de ce qu'elle avoit bien voulti changer de defTein (*). Les Miniftres etrangers lui en firent de me- me leurs complimens, qu'elle re?ut gracieufement : mais Chriftine dit a ce- 3ui de France: ()que quoiqu'elle n'eut pas pu refufer cette fatisfaftion a fes Sujets , elle n'y avoit pas u fort renonce , qu'il ne put bien encore arriver quelque jour qu'elle mit fon deflein en execution. Pendant que tout le monde etoit ravi de ce que Chriftine s'etoit laiflee perfuader de continuer fort gouvernement , elle fit donner le 18 Decembre, qui etoit fon anniverfaire , un grand feftin a tous les Miniftres etrangers , & aux autres perfonnes de dillin6tion , & les jours fuivans , des Jeux , des Carroufels , des Courfes de Bagues & des Combats a la Barriere. De pa- reils divertiflemens etoient en ce tems-la fort en ufage a la Cour,ou la jeu- nefle fe diftinguoit par fon addrefle & emportoit des grands prix qui y e- toient propofes (b) , Voici un billet de Chriftine a fon Coufin Jean-Adol$he frere de Charles-Guftave , qui y a quelque rapport: nAQnfiew mon Coufm. Etant obHg&e de par fir pour me r entire **+ au plutot chez ma Mdre^ pour M purler de quelque affaire que je n'ofe commettre a aucun autre ^je vomprie (T avoir join pen- dant mon abjence que le Ballet Jolt danje 5? apris (t) le plutot qifil [era poffible. Je viendrai Lundi 3*11 plait a Dieu ; en atten- dant 0) Chanut /. c. fag. 352. /I. 128. 158. 366, T. HI. p. 76. Burman /. (b) Chanut Mem. T. I. p. 116. 117. T. c. T. III. p. 248 & 664. (*) Hadrien de Valois en crivit a Nic. Heinfius (i). Ex Suecia nuper allatus eft ftt- I/ho nuntius horribilis , Reginam fceptrum fuum Principi Carolo traders velle , cejjlmemque Regni Ordinibus gratam & ratam fuijfe. Quod Ji verwn eft, magnum Muja prajidium amittunt. (f) Cbrijline danfa quelquefois elle-meme a ces Ballets. CMfante, qui eut la place de Grotius a la Cour de France , accompagna le portrait de Cbrijline, qui fut donne* au Cardinal Mazarin, d'une belie Ode: ou, repr^fentant cette PrincefTe danfant de fort bonne grace , il dit: Trabit fequentes poft vejtigia gratia* (2). (i) Burman Syll, Ep. T, V'pag. 703. Tom. (z) driery Mem. d'lMIande pag. 35. J. VI. p. 83 6? 84. Chanut T. I. pag. 156. 1474. (*) Le Grand juge de Suede s'appelloit Drojl ou Dntz: charge done le Sinateurs du Ro'uumc etoic CHUISTINE REINE DE SUEDE. 'Sr. -Chanut ajoute: qu'on fit enfuite toute forte de diligence centre ce mi- ferable: mais qu'on ne decouvrit ^autre-chofe, fi non qu'il etoit veritable- merit four & que jamais, quoiqu'il fut fans raifon, on ne lui pdt faire a- vouer qu'il avoit eu deflein lur la perfonne de la Reine , mais feulement for celle du Preftre. Cet attentat ne paroiflant nullement concerte , on r-etint ce phrenetique en prifon , de crainte que la fureur ne le reprit (*). L'annee fuivante 1648. (a) que Chriftim alia recevoir la Reine fa Mere de retour ^Allema- gne a Dahkroen^ ellefuc furprife , pendant deux a trois jours , par une grande tempete qui a peine lui permit de gagner le rivage fur une chalou- pe. Elle fut attaquee deux fois Tan 1650. d'une fievre tres-violente, qui fie apprehender une inflamation des poumons. En 1651. a'iant fait vifite a la Reine fa Mere a Nyttoping & etant ^n chemin pour revenir a Stockholm , elle tomba en fmcope comme elle foupoit , & fut plus d'une heure fans pouls & fans parole. Cette defaillance furprit^tellement ceux qui etoienc prefens, que perfonne ne fongeoit a la faire revenir. Elle fut Telpace dc fix heures travaillee de douleurs fort violentes, mais avec tout cela elle ar- riva a Stockholm avec un aflez bon vifage accompagnee du Prince de Suede. On attribua ces facheufes attaques a fa continuelle contention d'efprit & a & trop grande application aux etudes en ce terns-la , aufli bien qu'a un ex- ces de fobriete , b^vant trop d'eau pure , fans y meler une goute de vin (f). L'accident etrange, qui manqua de caufer la mort a la Reine & qui lui .arriva f annee d'apres au mois de Juin , merite aufli d'avoir place ici (/;). Ua &C Dd 3 MEMOIR ES COttCERNANT 1'une des deux contient apparemment les remerciemens qu'elle lui fit do* lui avoir decouvert la trame de Meffenw , dont nous venons de parler : Les void. Stockholm le i$ Ftvr. itf? 2. * * ' . i L. : . ' On Cou/tn. Je vous dois un remer dement , &p je meferois de- ja aquittee de ce devoir, ftje tfeujfe attendu le depart du Sr. Kaage pour le folennifer. II vous dira de ma part les fentimens de reconnoijfance qul me re/lent dufoin que vous prenez de m^obliger. Vosrivilite's 5? vosfervices rendus vous ont acquis une amitie eter- nelk. Continue* Je vous prie , de nfobliger 5? croi'ez que je ntefti- merai toujoun beureufe tant que je vous ferai redevable : & afin queje lefois toujours, ajoutez aux obligations que je vous ai cells de croire, que je ne ferai jamah ingrate envers f^ous. Jefuis , Mon Coit/in? Fotre trfoajjettionne'e Coufine Cbriftme nfieur won Coujin. La fatisfattion que je mefuis procure" e h moi-meme, en vous donnant du content ement 3 etoit Ji grande qtfiltietoit nullement befoin y que vousy ajoutajjiez celle, que fai refu par la lettre que vous m'avez e'er tie pour n?en remer cier. C^ejl k moi de rendre graces a ma bonne fortune qui m* a fait naitre cet- te nouvelle occajion de rendre ma reconnoijjance d'autant plus indu- bitable , par cette derniere rencontre qui s^eft prefentee ft a propos a moi, pour me donner le moien de itfacquitter en par tie des obliga- tions que je vous at en confederation de.s bons ? fidtle s offices que vous rtfavez toujours rendus. Je vous prie mon Coujin , de croire que je conferverai toujours les fentimens tfamitie ^? d'eftime que fai pour Pout & que je ferai toute ma vie y Mon/ieur mon Coufm , Fotre tr$s-affettionnte Coufine Chriftine. Ces fortes de civilites n'empecherent pas Chriftine d'entretenir comraerce lettres avec les Savans , comme nous le ferons voir ci-apres. Void T\AOnfi IV*- de uae reponfe qu'elle fit a Mr. Godeau , Eveque de Graffc. CHRISTINE HEINE D S U E D F, JlAOnfieur , Fotre nitrite nMtoit deja connu & Jur quel^uesuns W* de vos ouvrages favois deja jugt de la capacity de Poire ejprit aux belles chofes. Je ne doute point que celles que vousni'envoi'eZ) & dont je vous rens graces 5 ne me confirment dans h jtigemcnt que fai deja fait de vous ; &P la lettre qiie vous rtfavez ecrite ejtje bienfaite^ qtfon ne pent raifonablement attendre des cbojes medio- cre s d'une perfonne qui penfe /ibien y $P qui s^exprime Ji jufle & (i agreabkment. Ce rieft pas que la louange que vous my donnez , itfen ait fait aimer les beaut es ; au contraire , ft favois puy trou^ ver quelqite cboj'e aredire , fauroit etefans doute ce que vousy di- tes (Tavantageux pour moL Mais les bonn&es gens de Fnince font fi accoutumes a louer, queje n'ai point etefurprife que vous nfavez louee> & je tfofe pas me plaindre d'une coutume ft generate ;jevous avoue meme que fai fujtt d"en tire fatisfaite.. Jl y a du pJaiftr defe voir louee par des perfonnes qui meritent de Tetre; & comme parmi ceux qui font prof effion des belles lettres 5 vous tenez un des premiers rangs , je n'ai pit voirfans en etre toucbee , Tejlime que vousfaites de moi. Les vceux^ que vousfaites pour ma conversion A la creance que vous enfeignee^ n'ont pas fait les memes impre/fions dans mon ame. Je ne puis confentir^ que vous defiriez / que vous efpericz une cbofe qui ne pent arriver. La principale application de mon efprit a toujours ete dans la recbercbe de la verite 3 p je nepourrois cbanger Jans nfehigner du but quc je me fuis toitjours propofe. II y a long-terns que je fuis perjuadee que les cbofes que je crois , font celks que Ton doit crwre. Ce Jeroit plutot a moi a Jbubaitcr que parmi tant de belles lumieres dont votre ame eft eclai- ree , vous euffiez encore celles que fai fur tette matiere. Je ne Jaijje pas apres tout d'etre fatisfaite du Zele que vous temoignez pour moiy & la difference^ qui eft entrenous^ tie pent niempecber cTeftimer votre amitie. auffl bien qu-e lesautres cbofes qui me viennent de la part des- votres; leur approbation eft fam doute laphisfolide recompense que je puijfe recevoir de r amour que fai pour les belles cbofes , 5? les Mufes nefauroient reconnoitre plus avantageujement la paffion que fai pour elles^ qtfennfacquerant leur fuffr age fep le votre. Je tacberai de uten rendre digne par le Join que faur aid' en- trctenir > dans mon ame > ce bel amour ^afinde conferver un bienque je doisplutot a ma bonne fortune qtfa-mon merite- Ces belles exities fep leurs amans trouveront toujours un appui aupres de moi , & je forai toujours gkire de partager avec eux les avantages de ma nais- Jflnce & lesfiiveun de la fortune. . . Cbrrftme. Ce L'sm Ce Mr. Gockau , (a) qui avoit fait de grands progres dans les Belles Let- m tres, fut un de ceux qui donnerent occafion a fetablifiement de V Academic Franpoife aPtfw,qui avant cela,n'etoit qu'une fociete de Beaux-efprits , qui s'aiTembloit chez Mr. Conrart pour y conferer de leurs etudes & y lire les pieces de leur compofition. II s'acquit une grande reputation par plufieurs beaux ouvrages qu'il mit au jour , & s'attira une eftiine generate par les bonnes maximes de la mo- rale Chretienne , qu'il pratiqua dans toute fa conduite. Nous allons avoir bientot occafion de faire quelques remarques fur ce que la Reine Cbrijlim repondit aux vceux qu'il avoit faits pour fa conver- fion , quand nous aurons vu la reponfe qu'elle ecrivit quelques mois apres a Char les -Gujlane Prince de Suede. Celui-ci lui avoit marque I'apprehenfion ou il etoit , que fon Beaufrere le Prince Frederic Landgrave de HeJJe - Efch- wege ne changeat de Religion a 1'imitation du Landgrave Ernefl de Heffe- Rhelnfeh qui s'etoit fait Catholique en ce terns-la (*). Cbrijlim tache de calmer 1'inquietude du Prince la-deflus par la lettre fuivante qu'elle lui ecrivit (a) r. P^lifTofi Hift, de VAcat. Frang. Hommes illuflr. Tom. VIII. pag. 71. fcfc. pag. 273. ed. Par. 1729. 4. Niceron bift.des ruifon du (*) Ce Prince Ernefl devint depuis un Catholique ze\6: on conferve encore dans la changement Bibliotheque de CaJJel deux livres AllemanAs , oil il a marqu< de fa propre main, que de Religion d ans f a jeunefle il avoit lu avec beaucoup d'attention YOpus Catecbciicum Ztcbarice Ur- Enefi & fes^"* ' ma ^ s ^ u '^ ' a ^ C( ^ ure ^ e ' a replique du Cardinal du Perron a Cafauboh , ou plut6tcon- Difbutesla- tie le Roi Jaques d'dngleterre , il avoit eu de tout autre lumiere que jamais aupara- deflus avec vant. 11 repete tout cela d'une maniere plus circonftanctee dans fa lettre aux cinqMi- Drelincourt. niftres de la Religion ReformtJe de Paris en 1659. (i). Sa correfpondance & fes Dif- .putes avec le ct^lebre Miniftre Drelincourt au fujet de fon abjuration & des points con- 'teft^s entre ceux de la Religion R^formee & ceux de la Religion Catholique -Romai- ne, font fort remarquables. Ce Prince ne ceffa pas de revenir a la charge & addrefla encore a Mr. Drelincourt en 1664. une autre lettre qui n'a jamais te imprime'e, que 1'on fache, mais qui meritoit bien de 1'etre. Cependant comuie el!e eft trop ^tendue& ^crite avec trop d'animofit on dira feulement qu'elle eft dat^e du 30 Janvier 1664 & re'fute'e amplement quant aux controverfes de Religion , par Mr. Drelincourt fous le ti- tre de trois lettres a Mgr. le Prince Ernefl. Ce qui furtout avoit cheque" fon Alteflb , c'etl que Drelincourt 1'avoit appell^ Cadet de la Maifon de Hejjs, mais il fait voir dans I'avertiflement de cet imprim6, (2) que le Prince n'avoit nulle raifon de s'en plaindre, I'afiurant qu'on parle ainfi en France, fans qu'aucune desMaifons illuftres s'en offenfe: la principale qualit^ des Maifons ne fe donnant qu'a 1'ain^. II cite Balzac qui dit dans fon Prince : ,, outre que je fais profefllon de rev^rer en gdme'ral les PnifTances fouverai- ,, nes, je fais le refpefb qui eft du a une Maifon, dont 1'Empereur n'eft que le Cadet". : Au refte Mr. Drelincourt confeille a ce Prince d'abandonncr la plume & de ne pluspen- fer a mettre des livres au jodr: all^guant 1'^xemple ftAntoine, qui, pour complaire a Cliopatre & aux Egipticns, voulut pecher a la ligne, oil il r^uffit fi mal, que le ddpic qu'il en cut, donna raifon a Cleopatre de lui dire:,, Laifle-nous, Seigneur, a nous autres Egiptiens la ligne: ce n'eft pas ton metier, Ta chafle eft de prendre & de con- (i) Impr. a Liege 1*63. p. 9. TT. 14. c. it. (2) Pag. 4, &c- item pag. 217, dans i'ouvtage p. 63. & 14;. &c. it. dans le Motiva Coaverfio- memc, nis Ernefii Haflls Landguvii. CHRISTINE REINE DE SUEDE. r^' * jtaot an u- ne me fonfok que par I ejperance ferme ^ que fat 3 que Dieu ne per-i* ^ M*< mettra pas qu'un femblabk malheur trouble k contentement dont H$ He de vous jouijjez au milieu de tant de ftlicites dont k del a ete liberal tnvcrs vous. J' e'er is au Sieur Landgrave fur ce /ujSt. Si je puts etre affez beureufe pour k detourner de ce mauvais dejftin ; faurai beaucoup de fatisfatlion , p cejera pour moi un grand plaiftr d'a- voir tu k bonbeur de vous avoir ete utik. Jefuis^ Mon Coufm 5 Stockholm , ie x y t n trds-ajfettwnnee Coufme Cbriftine. Void cette lettre qu'EIle ecrivit Ie meme jour au Prince Frederic meme, Lettre de pour Ie detourner du deflein qu'il auroit pu avoir d'embrafler la munion Romaine. pour qu'il ne changeic Coufm. jTavois profongd kfiknce que favoh jufqrfici gar- ^ ' * V* de pour ne vous etre point incommode par we lettre qui ne vouspeut etre agreabk 5 puifqtfelk vous fera connoitre k bruit qui court id du cbangement que vous meditez a Fexempk de mon Couftn^ Fotrc Frre, qui s'e/l enfin declare" de la Religion Catholi- que, Mais Tamitie que fai conjervee avec vous depuis tant d^an- nees ne me permet pas de vous dijjimukr k jugement desavanta- geux que tons les votresfont de vous en cette rencontre, Je croh que vous ne k pourrez ignorer quand vous y ferez quelque atten- tion .> conqu^rir des Villes & des lloiaumes ". Peut-^tre, Monfeigneur, ajoute Dnlit> court, avez- vous entre les gens de lettres quelques Serviteurs qui vous aiment, qui prendront la libert^ de vous dire:,, Laiffez nous la plume a nous autres gens de robe: ,, laiflez-nous la plume, & accompliflez votre deflein d'aller a la guerre contre leTurc: car vous acquerrez plus de gloire & plus d'honneur a tirer I'e'p^e contre les Infideles & a ticher de reprendre ce qu'ils out ufurp^ fur les Chretiens, qu'a emplo'ier votre plume contre les Miriiftres qui feroient invincibles, tandis qu'ils demeureront dans leur Fort & qu'ils ne fe de"partiront point de la Sainte Ecriture". Ce Prince compo fa enfuite un livre intitule 1 Difcret-Catbolifcber, ou Ie Catholique difcret , oil il taxe ^galement les vices de toutes les Seftes Chre"tiennes : ce que la Cour de Rows n'a nul- lement pii fupporter, & c'eft la veritable raifon de la raret de ce Livre (i). (*) V. les Eptft. Leibnitii 4 Kortbolt T. IV. pag. 241. Torn. /. Ee MEMOIRES CONCERNANT tion , fe? vous jugerez aifement que feft fur les inftances qtfih nfontfaites que je vous park fur ce fujdt. Ih out jugt par F in- dulgence que votre amitit a toujours -eue pour moi 5 quefavois af- fez de pouvoir fur votre efprit pour k rcmettre dans fes premier $ fentimens , & c*eft pour cela qtfils nfont follicite'e a fair e ce der- nier effort aupres de vous , efperant qtfil nefera pas inutile. Ceft done pour content er kur defer & pour nfacquitter du devoir , que Tamittt nfimpofe , que je vous ecris cettc kttre , vous priant d^y faire reflexion. Ce rf eft pas a moi de tr alter cette matiere de la manidre qtfelk fe traite dans les Colleges , ou fur ks Chair es de Predicateurs. Je laijje a ceux , qui font profeffion de trailer ks eontroverfes , a s^gorger la-dejfits felon kur plaiftr ; ilferoit mal- Jtant a moi de vous precber des chojes ft ekignees de ma profeffwn. C* eft pour quoi je mettrai a part ks difputes que vos Doffeurs ont avec ceux de FEglife Romaine. Et puifque jefuis d^une troifieme Religion ) qui^ aiant trouvt la Verite 5 s'ejl ekignee de kurs opi- nions^ qtfelk a r)ettees comme fauffes ; il eft jujle , que je vous park comme une perfonne neutre , qui ne vous toucher a qtfunfeul point qui vous doit etre fenfebk 3 fep feft celui de Phonneur que je veux vous repr^f enter. Pouvez-vous ignorer combien ceux qui cbangent font bais de ceux des fentimens dejquels Us Mkignent^ p nefaurez-vous pas y par tant d'iUuftres exemp/es 3 qu'ilsfont me- prifes de ceux auprds defquels ilsfe rangent r Confederez> s^il vous- plait) combien import e a la reputation d"*un Prince 3 P opinion qtfon a defa con fiance , /Joiez certain* que vous fait es grand tort a la votre , fe vous fait es une femblabk faute. Quand vous confuUre- rez bien ks circonftances que je viens de dire 3 je itfaffure one vous llamerez facikment votre dejfein. Et je ne crois pas que vous vou- lufflez commettre une aflion qui , a mon avis , eft fe propre a vous donner du repentir 5 kquel feroit irremediable , ? vous taifferoit le refte de vos jours un remord eternel. Penfez-y , je vous prie 3 5? donnez a votre reputation , 5? a vos amis ce qui eft de votre de- voir. Pour moi , faurai une grande Jatisfallion auand je feral confirmee dans P opinion que fat , que vous etes difpofe a ne faire jamah atlion qui puijje deplaire a ceux y qui font autorifes a juger de ce qui eft bien. Outre cela, il y a plufeeurs chofes qui pour- roient vous confirmer dans ces fentimens. Mais il mejembk que ce feroit voys faire tort que de vous ks alleguer apres avoir parle de ce point principal. U inter ft de votre fortune ^ qui vous attache a ctfui de votre Mdifou , w doit pas, $re t&ate a celui de votre bon- neur CHRISTIN'E RE1NE DE SUEDE. 219 neur , &? teferoity prejudicier que de tourner la vuefur tout au- ire inter et 5 apres que celui-ci vous eft prejente. Fous vo'iez queje itfacquitte ajjez bien de la parole queje vous avois donnee , 5? que je ne irfenfonce pas dans des queflions. Et je crois garder la bien- feance avec ajfez dejoin pour ne pajfer pas les homes queje ttfetois prefcrit. Les fcrupuleux bldmcront peut - etre ma retenue 5 mats je leur dirai pour toute excuje , que faurois mauvaife grace de quitter ma metbode pour leur plaire. Mon bumeur p ma profef- Jion me difpenfent de cefoin 5 5? nfordonnent de trmter avec vous d?une manure plus convenable a mon inclination. Us ri*en feront pas Jcandalifes ) lorjqtfils fe fouviendront que nousfommes nes pour les Sceptre s<> & pour les Armes^ &p qtfaprds en avoir fait ft bau- tement laprofejfion , ceferoit profaner lefanftuaire que dy entrer pour manier les cbofes faintes. Mais pour ufesccufer je ne prens pas garde que 5 pendant que je me juftifie-y je fan une Jaute qui a la veritt rfefi pas tout h faitfigrande^ que feroit celle de faire If Theologien. Elle ne laijfe pas pourtant d'etre digne de reprthen- fwn. Jem'tloigne trop de la fin de ma lettre 3 laque Ik vous attendee avec impatience. Je confeffe ma faute , vous le voi'ez , &,je vous en demande pardon. Je ferai toutes cbofes pour la reparer , lorC- que mes offices vous feront neceffaires. Je tacberai de vous faire voir, que je nejoubaite rien avet plus de paffion , que la fatisf ac- tion de vous pouvoir frre utile. Faites-moi le plaijtr d^ajouter foi ^ en attendant 3 aux proteflations que je vousfais de la durh de mon amittt. JefuiSy Mon Coujtn 9 Votre affettionnte Coujine CHRISTINE. En combinant les motifs que la Reine allegue-la a ce Prince pour le dif- fuader de fon deffein , qu'il abandonna auffi , avec les raifons , dont elle fe ioTa'ior fert dans fa reponfe a Mr. Godeaii , que nous venons de donner ci - deflus , i 01 '?" 6 ' 6 on auroit lieu de fe perfuader , qu'elle etoit encore en ce teras-la fort e'loi- ra gne'e de vouloir changer elle - merne de Religion , ce qui arriva pourtant deux ans apres. II femble done que cette idee n'ait fait irapreffion fur elle qu'au terns que le Medecin Bourdelot y & le Miniftre d'Efpagne , Antoine Pimentelli , eurent gagne tant d'afcendant fur fon efprit. Car fi Ton en juge par la reponfe qu'elle donna a Chanut fur ce que la France pre'tendoit Tan 1648 d'exterminer la Religion Proteftante dans les Pais conquis d'^?- kmagnc , elle n'etoit alors nullement portee pour la Religion Catholique. Ee 2 Elle 120 ME MOIRES CONCERNANT L'MI Ejj e i u i (jit ^ ^ qu'elle ne pouvoic aflifter la Fra dans fes pretentious" a * 52 ' fans blefler fa reputation & fa confcience : qu'il feroit bien etrange r ,, qu'elle fervit a detruire en Alkmagne cette liberte de la Religion Prote- llante, qui avoit etc le principal motif qui avoit fait entreprendre aufeu Roi fon Pere tine fi perilleufe guerre: qu'elle croiroit en cela faire une infidelite a Dieu , & que jamais fes Pretres en Sulde ne lui pardonne- ,, roient cette action. Cbanut ajoute qu'elle avoit etendu fi loin ce refus d'affifter la France en cette pretenfion , qu'elle avoit quafi fait entendre qu'elle s'y oppoferoit." Si Ton joint a ce fait, ce qu'elle repliqtie a Mr. Godeau fur les voeux qu'il lui avoit faits en 1651 pour fa converfion, or* a lieu de croire qu'elle ne s'etoit pas encore ecartee en ce terns-la. des prin- cipes d'une bonne Proteftante ; puifqu'elle lui dk entr'autres choles : II y a longtems , que je fuis perfuadee que les chofes , que je crois , font celles que Ton doit croire. Ce feroit plutot a moi a fouhaiter, que par- mi tant de belles lumieres dont votre ame eft eclairee , Vous eufliez en- core celles que j'ai fur cette matiere. Nous verrons pourtant ci-apres qu'en moins de deux ans de terns, on Uii infpira de tout autres fentimens fur fa Religion. A 1'heure qu'il eft nous entrerons en quelque detail par rapport a la relation qu'avoit Cbrijline avec les Savans de ce tems-la , n'ai'ant Qufques apres la concluflon de la Paix ea Alkmagne) pas moins d'ardeur pour J'ecude des Belles -Lettres que pour les Tons ics Sciences. Elle y avoit auffi fait tant de progres, qu'elle s'etoit atrire 1'ad- Sus a c6tc8 miration & I'applaudiflement de tout ce qu'il y avoit de favans en Europe. font Pjwrljiine. tr'eux , mais encore elle en combloit plufleurs des marques reelles de fa> liberalite. Les uns & les autres s'empreflerent a 1'envie a 1'encenfer de. route part & a chanter fes louanges en toutes fortes de langues. On a Uetide douter qu'il y ait jamais eu au moiide une autre Princefleque Chrifli- ne a qui on ait dedie un fi grand nombre de livres & d'ouvrages, & it Thonneur de qui on ait compofe tant de pieces en profe & en vers. Nous produirons ci - apres une note de plus de cent Pantgydquts & Harangues differentes, qui lui out etc faites & qui font imprimees, & nous pouvons afTurer , qu'il y en a un pareil nombre de celles que les Suedois lui ont ad- dreflees , y comprifes celles qui n'ont pas paru; fans compter mille en- droits dans les ouvrages des Savans de ce tems-la , ou ils lui donnent leur tribut & lui afllgnent les dtres les plus flateurs & les plus pompeux , done les Belles- Lettres foient fufceptibles (*). Ce Titres pom- (*) On inft^rera dans la fuite une note des principales pieces composes a fa loup.n- peux que lesgc: mais ici on fcra un Extrait des litres pompeux, que lui donne'rent les Snvans dcce Savans doa- tems-la. Guy Patin & ^a/coHm,rappelIerent (i) Mufarum Decima& la Nouvells Sy- ]}iile du Ss P* entr i n ' Mr> Sarrau (2) Regum Rcgina. Mr. de Boinebourg (3) Nmfui modo Sy Lettres a Spin. T. IT. n. ij & 158 2c ^) Dans la Dedic. dc fes S)U. Ejjift. T. V. p. ^47; O) Struiii Ait- fafc- tilt. p. 55, CHRISTINE HEINE DE SUEDE. Ce feroit un travail infini & prefqu'inutile , & dont on ne pourroit pent- tre pas venir a bout, que de faire un recueil exaft de toutes ces pieces & 1<5 5Q de tous ces morceaux a la gloire de cette grande Reine. Mais pour faire " connoitre qu'elle meritoit alors ces louanges? voici le portrait que fait de fon genie & de fes connoiflances un fage Miniftre, qui cut 1'honneur de la voir plufieurs annees de fuite , & qui en meme-tems etoit fort verfe dans toutes fortes de Literature & de Sciences. Elle fe plait quelquefois , dit- il , (a) a parler comme les Sto'iciens de cette eminence de la Vertu , qui fais notre fouverain Bien de la vie. Elle eft merveilleufement forte fur ce fu- Beau jet, & quand elle en parle avec des Perfonnes qui lui font familieres> trait qi & qu'elle entre fur 1'eftime veritable que Ton doit faire des chofes hu- " maines; c'eft un plaifir extreme de lui voir mettre fa Couronne fous les pieds , & pubJier que la Vertu eft 1'unique bien , ou tous les hommes doivent s'attacher indifpenfablement fans tirer avantage de leurs condi- tions. Mais parmi cet aveu , elle n'oublie pas longtems qu'elle eft Rei- ne (a) Chanut Mem. Tom. I. p> 241. &c. votez aujfi la preface de ces Memoires. fed fcp noflri Ssxus Regina. Barlaeus (i) Maxima Semide&m filia. Guy Patin (2) Cbrifli- ne efl autant illuftre par les Lettres que Jon Pere par les Armes , & dans un autre eu- droit: (3) Et Spes & ratio Jindiorum in ilia Principe tantum: Sola etenim trifles bac tem- peflate Camrenas rejpicit. Ferrarius 1'appella (4) Naturce Miraculum & Freinshemius, (5) Princeps inimitabilis , qua ob profe&um in fludiis prafenti xvo decus incompar&bile , futuris admirationem fummam inftruxit. Voffius (6) Divina Domina. Medonius (7) Ma- gnanima Regina. Heinfius (8) neque Majus, neqne ^mabilitis neque Divinius quicquam bac Principe toto orbe reperiri poffe exiftimo. Henricus Valefius (9) O felices Literates quos alloquiofuo dignatur Chriftina Heroina. Nic. Heinfius (10) Cceleftis Heroina. Mei- bomitis (11) Sapientiflima Regina. Bourdelot (12) 1'honneur de 1'Univers. Manage (13) Heroidum prcejlantijjlma & Reginarum doftijjima. Balzac (14) Do&ijfima f difertij/ima Princeps. Buchnerus (15) Piijfima Principum, Regina Maxima, Delirium ac Amor Chri. ftiini Orbis : Henricus & Hadr. Valefius (16; Cbrijlina Alter Sol: Altera Pallas ac Miner- va Suscica. Gronovius (i^lncomparabilis Cbrijlina. Gervafius (18) ilia Regina Amala* lunla, 'Ibeodorid Regis filia, grace ac latine eruditifflma , jam in Cbriflina renata vide- tur. Jcfuits Oenipontani (19) Novus Mundus Cbriflina.... Ce que Maraviglia, Madia- barba, Gafl'endi, Huet, Naudt, Coflar , Pafcal, Scitderi , Spanbeim, Scbottusft. d'autres ont dit de flateur d'elle, fe trouvera r^pandu dans les notes de cet ouvrsge: & aulieu de le tranfcrire ici, nous ajouterons la r^fl^xion qu'un Auteur a faite la-deflus, favoir R e 'flcxie (20). Que tout ce fatras de litres & de flateries qu'ils lui prodigu^rent dans fa jeunef- fur tout ce fe, peuvent lui avoir autant pt 1'humeur, que fes lib^ralit^s exceffives a toute forte fatras de ti- de perfonnes, auroient pu diminuer peu a peu lahaute opinion que les Suedoifavoient tres pom " d'elle & 1'amour naturel qu'ils lui portoient. peus> (i) Bartei Poifm. P. II p. j9- Tta) Dans fa letfre i Gaffendi ca itfjz. (z) Guy Patin a S'jn en 1649 P- Jj8- (13) Dans la dedicace des leures de JSa'zOf. ^3) Patin* Spin i6jo. T. I. p. St. (14) Dans fes Oeuvres T. II. p. s. (4) Of. Ferrar. T. I. p. 245- (ij) Epift. ad. Chrijlin. u. 169. p. 2^7, (j) Freinsb. Orar. IX. p. nj>. (15) Eunnanni Syll. T. V. p. 700. (6) Burnt. Syll. T. V. p. 63- (17) Burnt. T. III. p. 233. (7) L. C. T. III. p. 214- (iZ) Burm.T. II. p 763- r) L. c. T. V. p. 700. (IP) Par.egyr. Jefuitarum nomine Ao. *6ss* (9) Burnt. L C. Oeniponti diet. (10) Ibid. (20) Curia*/- Eiic/j. u, SlMts. Cab. i. c. j. IV. (!i) In Defeat, Ma/iees Aut. pag. 57. Ee 3 222 MEMOIRE S* CO NCERNANT ne. Elle reprend incontinent fa Couronne : elle en reconnoit Je poids , & met le premier degre pour aller a la vertu , a bien s'acquitter de fa profeflion. Auffi a-t-elle de grands avantages de la Nature poury reuffir dignement: car elle a une facilite merveilleufe a comprendre & a pene- trer les affaires: une Memoire qui la fert fi fide'lement, qu'on peut dire que fouvent elle en abufe. Elle parle Latin 9 Franfoif 9 Alkrnand, Flamand, Suedois, & elle etudie la Langue Grecque. Elle a des perfonnes favan- tes qui 1'entretiennent a fes heures perdues de tout ce qu'il y a de plus curieux dans les Sciences: & cet efprit, avide de connoitre toutes cho- fes , s'informe de tout. II ne fe pafle jour , qu'elle ne life quelque cho- fe de 1'hiftoire de Tacit e , qu'elle appelle un jeu d'ecbecs. Cet auteur , qui j, donne a penfer aux favans , lui eft tres -intelligible dans les endroits les plus difficiles, & ou les plus docles s'arretent comme he'fitant fur le fens des paroles , elle les exprime meme en notre langue , avec une fa- ,, cilite merveilleufe. Mais elle fuit, ou du moins elle neglige de paroitre avoir lu & favoir. Elle prend un extreme plaifir a ouir traiter des queftions proble'matiques particulierement parmi des perfonnes favantes, qui font de fentimens differens, fur lefquels elle ne dit jamais fon fenti- ,, ment, que tout le monde n'ait parle , & encore en peu de paroles & le tout fi bien raifonne, qu'il peut pafler pour une decifion formelie &po- fidve. Cela vient de ce qu'elle penetre les chofes a fond avec lumiere & fans precipitation, & quand elle parle de quelque chofe , elle y re- ,, flechit plufieurs fois avant que de dire fon avis. Sa retenue paroit plus 5 , dans les Affaires, que dans les Sciences &c. &c. Si Ton confidere ces beaux traits du caraftere de Chri/line , que le Sr. Chanut traja & envoi'a 1'an 1648- a fa Cour , a quoi on pourroit ajouter un autre portrait pas moins avantageux , que fit le Chapelain du Miniftre d'Efpagne refident alors a Stockholm, du grand favoir & des belles qualites de cette Princefle ; (*) on ne trouvera pas etonnant , qu'elle re^ut des louanges fi flateufes de tous les favans , & que plufieurs s'empreflerent d'avoir part a fes bonnes graces (f). Us la trouvoient , dit un auteur oo (*) L' Auteur de ce portrait, que nous donnerons ci-apres, qui fut fait 1'an 1653, i:tenduc de enc h^ r it fur Mr. Chanut: car au lieu que ce dernier dit de Cbrifline , qu'elle favoitcinq teOkrtfinel lan S ues > ce premier marque , qu'elle en favoit bien dix ou onze, comme \a Latine t ' 'la Grecque, la Franfoije, I'ltalicnnc, I'Efpagnole, I'Allemande, VAncienne & la Moderns Suedoife, IzFinnoife, la Danoife & quelque chofe de VHebraique & de I'Arabique. II ajoute encore qu'elle avoit lu les Poe'tes anciens & qu'elie favoit parcosur tous les Mo- dernes Italiens & Franfois; qu'elle lifoit les Ecrits de plufieurs Peres de VEglife, & qu'elle aimoit beaucoup La&ance, Clement d'dlexandrie, Arnobe, Minucius Felix & u- ne partie de St. J drome & de Cyprien , inais qu'elle pre'fe'roit Gregoire de Nazianze a tous les autres &c. c'eft le P. Manerscbied qui en parle plus au long dans fa Relatio Epiftol: de Cbriftince ejujque vitte inftituenda ratione f Regni adminiftratiene d. Stockbotmix d. 10. Dec. 1653. Elle aura place clans 1'Appendice, ci-apres. (t) Nous donnerons dans 1'Appendice un autre bel e"chantillon de la lettre que lui - ^P, C y cvlvit le favant Jstw Gerard Poffius de"ja 1'an 1645 ou 164(5. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 223 (a) beaucoup plus admirable encore par d'autres endroits, que parceux, qui leuretoient communs avec Elle, c'eft-a-dire l'efprit& la connoiflance m 47 V. des lettres humaines. L'amour propre fe recherche tofijours. Nous " ,, ne trouvons rien plus v~oloflciers dafls autrtrr , qoe ce que nous voi'ons qui nous diftingue nous - memes. Chriftine avoit de la vivacite & de la penetration', encore plus d'etude. Accodtumee des fa plus tendre jeunefle ", a ne donner que cinq a fix heures au fommeil, elle avoit du terns de refte ,1 pour la le&ure & 1'entretien des Savans de toute efpece , auffi confide- res dans fon Palais, que 1'etoient autrefois les Philofophes dans celui de 1'Empereur Julien" Elle en prevenoit meme quelques-uns par des let- tres gracieufes qu'elle leur ecrivoit & qu'elle accompagnoit de terns ea terns de prefens , dignes d'elle & elle en invitoit d'autres a la venir voir en Suede. Mr. Defcartes , dont la nouvelle Philofophie faifbit alors grand bruit en chrifline ^ Europe 9 fut un des premiers qu'elle eut envie de connottre perfonellement t v r e e ut D C J-"rr?ri & avec qui elle fouhaita de s'entretenic. Le commerce literaire, qu'il eut& i'aire ea alors & auparavant avec Chriftine , merite bien qu'on en fafle mention & u qu'on en rapporte des circonftances particulieres. D'abord fi Ton confidere que Cbamt etoit grand ami de Defcartes (b") & que ce Miniftre de France etoit fort eftime de la Reine , il fera facile de eroire , que Chanut lui difant beaucoup de bien de lui , 1'aura prevenu en faveur de notre Philofophe. Auffi trouve-t-on que Chanut lui avoit de- mande deja en 1646. de la part de la Reine , fon fentiment fur la quef- tion : ,, Quand on ufe mal de f amour ou de la haine : lequd de ces deux dereg-Ie- y , mens ou mamals ufage eftleplre"? Surquoi Defcartes r pour fatisfuire la Reine, avoit fait au commencement de 1'an 1647. la belle DifTertation ? que nous avons au I. volume de fes Lettres. Apres cela il envoia a Cbrif- tine fon fentiment fur le Sou VERAIN- BIEN , qu'dle lui avoit demande (*). C'eft-ce qui donna occafion a Defcartes de lui ecrire fa premiere lettre d'E-- gmonden Nort - Hollands ail mois de Novembre 1647. dont la Reine fut egale- (a) Mem. pour Vbifl. Univ. ad 0*111.1689, 3'H. 331- &c. item fon Abregi Liv. VII, p. 520. 5- & P- 2 46. f . XII. pag. 254. &c. (6) V. Baillet vie de Defcartes in 4. pag. (*) Dejcartes s'explique amplement fur cette queftion & fmit par ce raifonnementr (i),, Car pour les Biens du Corps & de la Fortune, ils ne dependent point abfolument Eh ,, de nous & ceux de 1'Ame fe rapportent tous a deux chofes: qui font 1'un de connoi- &$ art "\4 ,, tre & 1'autre de vouloir ce qui eft bon. Mais la connoiflance eft fouvent au delade lesrnf" nos forces: c'elt pourquoi il ne refte que notre volonte", dont nous puiilions abfolu- Eiea. ment difpofer: & je ne vois point, qu'il foit pofllble d'en difpofer rnieux, que fi Ton a toujours une ferme & conftante reTolution de faire e'xaftement toutes les cho- fes que Ton jugera etre les meilleures & d'emplo'ier toutes les forces de fon efprit a les bien connoitre. C'eft en cela feul que confiftent toutes les vertus: c'eft ce!a feul, qui, a proprement parler , m^rite de la louange & de la gloire :. enfin, c'eft ,, de (0 V. Cltrjjttitr 1. c. Lettre I pag, i. coafr. fa lettie 31. i h Piinceffc Palatitn Elfokttb pag, 1^7 224 MEMOIRES CONCERNANT L'an egalement contente. La-deflus elle le fit inviter par Chanut a venir a * 8 '._ Stockholm (a). II allegua d'abord quelques difficultes qu'il trouvoit a fe rc- " foudre a ce voi'age : mais il s'y determina enfuite fur la reponfe de la Rei- ne accompagnee deremerciemensdece qu'il lui avoit communique fon fenti- ment fur les queflions qu'elie lui avoit propofees (*). II en temoigna fa joi'e non feulement dans la lettre qu'il ecrivit a Chanut (f) mais autli dans la reponfe qu'il fit a la Reine-meme & que void (). '.j.l-X-i il TKKJ- ,, MADAME. S'il arrivoit qu'une lettre me fut envoi'ee du Ciel & que je la vifle defcendre des riues , je ne ferois pas davantage furpris & ne la pourrois ,, recevoir avec plus de refpecl: & de veneration que j'ai re$u celle qu'il a plu a V. M. de m'ecrire. Mais je me reconnois fi peu digne des re- merckmens qu'elie contient, que je ne lepujs accepter que comme une faveur & une grace , dont je demeurerai tellement redevable , que je ne m'en faurai jamais degager. L'honneur que j'avois ci-devant re$u d'etre interroge de la part de V. M. par Mr. Chanut touchant le Souverain- Bicn y ne m'avoit que trop pa'ie de la reponfe que j'avois faite : & depuis j, a'ianc apris par lui , que cette reponfe avoit ete favorablement rejue, cela (a) F. Lettres de Defcartes^ar Clerfeiier (V) Elle eft dans Clerfelier au nombre de num. 33. 42. 43 & 44. XXXIX. pag. 203. de ceh feul , que r^fulte toiljours le plus grand & le plus folide contentement de la vie. Ainfi j'eftiuie, que c'eft en cela que confifte le Souverain-Bicn.... Cbriftine a- voit auffi oblig^ le favant Freinsbemius de traiter cette matiere dans un Difcours la- tin de faro Bono, ou du Souverain-Bien , qu'il pronon^a a Upfai en 1647. en preTen- 3 , ce de la Reine & de plufieurs Seigneurs, & qui eft imprim^ parmi fes Haran- gues (i)". (*) Cette lettre de Cbriftine a Defcartes t^toit du 12. Dc. 1648- Baillet la cite ainfi I. c. pag. 332. fans la produire. On 1'a fait chercher par tout a Paris & dans la Biblio- theque du Roi de France, mais perfonne n'en a pii trouver ni 1'original ni copie. Mr. TAbbe" Salier Chef de cette Bibliotheque a pourtant dit, qu'elie s'y trouvoit. Mais Tobjet e"toit apparernent trop petit pour perdre, a le faire chercher, quelques momens de fes aifes , tant d'ailleurs trop occup^ pour que les Etrangcrs puiflent fe louer de fon accueil (2). (f) 11 lui dit entr'autres chofes (3),,. Vous avez grande raifon de penfer, que j'ai beaucoup plus de fujet d'admirer, qu'une Reine perpetuelleraent agiifante dans les affaires, fe foit fouvenue , apres plufieurs mois, d'une lettre que j'avois eul'honneur , deluiecrire, & qu'elie ait pris la peine d'y r^pondre, que non pas qu'elie n'y ait point repondu plut6t. J'ai ^t< furpris de voir, qu'elie crit fi nettement & fi facile- ment en Franfois. Toute notre nation lui en eft tres-oblige"e, & il me femble, que cette Princeife eft bien plus creee al'image de Dieu, que le refte des Hommes , d'autant qu'elie peut e"tendre fes foinsa unplus grand nombrede diverfes occupations en mcme terns. . . (i) Freimh: Orauo XVI. pag. 330 5cc. O) Cette lettre eft du If- Fcrr. 1649- num (*) V. k Voi'age literaire dc Mr. Jordan XXXVIII. . nj. ,, CHRISTINE REINE DE SUEDE, 225 cela m'avoit fi fort oblige , que je ne pouvois pas efperer , ni fouhaiter L ' an - rien de plus pour fi peu de chofe , particulierement d'une Princefle que 47 ' Dieu a mife en fi haut lieu , qui eft environnee de tant d'affaires tres- importantes , dont elle prend elle-meme les foins , & de qui les moin- dres actions peuvent tant pour le Bien general de toute la terre , que tous ceux qui aiment la Vertu , fe doivent eftimer tres-heureux , lor qu'ils peuvent avoir occafion de lui rendre quelque fervice. Et parce que je fais particulierement profeflion d'etre de ce nombre ; j'ofe pro- ,, tefter a V. M. qu'elle me fauroit rien commander de fi difficile, que je ,, ne fois toujours pret de faire tout mon poffible pour Fexecuter , & que fi j'etois ne Suedois ou Finlandois, je ne pourrois tre avec plus de zele, ni plus parfaitement que je fuis" Mais Defcartes pour etre plus fur de fon fait , s'il devoit entreprendre le vo'iage de Suede , ecrivit a Freinsbemius , Bibliothecaire de la Reine (a) (Mr. Cbanut etant alors abfent) de lever les fcrupules qui lui reftoient en- core, le priant de preflentir, fi Lui (Defcartes:) aiant des ennemis en qualite d'Auteur d'une nouvelle Philofophie , & etant Catholique Remain , on n'avoit point preoccupe 1'efprit de la Reine la-defliis pour lui rendre de mauvais offices. Frtinsbemius diflipa tous ces doutes & le prefla de fe rendre aux inflances de la Reine & de venir la voir au plfttot. II ne tarda plus a le faire, & en 1649. au mois d'Oftobre il arriva a Stockholm, ou la Reine le re9ut fort gracieufement. Defcartes en rend compte lui - meme a la Princefle Palatine Elifabeth (*) & tout le monde fait , que cette incom- parable Reine , que les foms de fon Etat tenoient continuellement occu- pee, ne pouvant prendre pour divertiflement de fes etudes , que le terns qu'elle deroboit de fon repos , ordonna a Defcartes de venir 1'entretenir tous les jours a cinq heures du matin dans fa Bibliotheque. A ceci le Sr. Bail- let ajoute : (b) que la Reine ai'ant reconrm la capacite de 1'elprit de Def- (a) V. cette lettre I. c. pag. 214. XXII. p de lui Mr. Brucker dans fon Hift. (bj L.c.pag. 389. 396 411. 432. item Crit. de la Pbilof. T. W. P. II. p. 243. it. fon Abrtge Liv. VII. 5. X7IIL XIX tf pref. de Clerfel. des lettres de Defcartes. (*) Cette lettre eft la some, mais fans date. Il y dit:je fuis a Stockbolm depuis 4. 3 5. jugemcnt ie jours.... Je n'ai encore eu 1'honneur de voir la Reine que deux fois,,. Mais il me Defcartes fetnble la connoitre de"ja affez pour ofer dire , qu'elle n'apas moins de m^rite&plus tie vertu, que la renoinmee lui en attribue. Avec la ge'n^rofite' & la Majefte qui ^- ciatent en toutes fes adtions, on y voitune douceur & une bont6, qui obi igent tous ceux qui aiinent la Vertu & qui ont 1'honneur d'approcher d'elle, d'etre eniierement d^voues a fon fervice.... Elle eft extremement portde a 1'etude des lettres. Mais parce que je ne fais point qu'elle ait encore rien vu de ma Philofophie , je ne puis juger du gout qu'elle y prendra, ni fi elle ypourra emplo'ier du terns, ni par confe"- quent fi elle fera capable de lui donner quelque fatisfaclion & de lui etre utile en quelque chofe. Cette grande ardeur qu'elle a pour la connoifTance des lettres 1'inci- te furtout maintenant d cuitiver la Langue Grecque & a ramaiFer beaucoup de livres anciens. M;iis peut-etre que cela changera, & quand il ne charjgeroit pas , laver- , s tu, que ie remarquc en cette Princeffe, m'obligera toujours a pref^rer 1'utilit^ de Tome /. F f Tom 226 MEMOIRES CONCERNANT Defcartes 9 qui s'etendoit encore a d'autres chofes qu'a la Philofophie, ,, ne tarda point a le mettre de fon Confeil fecret, & que la confiance, qu'elle cut en lui , la porta a regler fur fes avis fa conduite particuliere & m me divers points concernant le Gouvernement de fes Etats : que ce credit avoit allarme les Grammairiens & autres Savantafies du Palais , qui s'etudierent foigneufenient a lui nuire & a ralentir 1'ardeur, que la Reine faifoit paroitre pour fa Philofophie... Us tacherent, continue Baillet 9 de perfuader aux Seigneurs de la Cour , combien il etoit etran- ge, que ce nouveau venu eut tout 1'honneur de la confiance de la Reine, & combien il etoit dangereux qu'il efit part a d'autres affaires que celles qui regardoient la Philofophie & les Sciences." Voila ce que dit Baillet en favour de fon cher Defcartes: mais que Ton prenne garde (comme enco- re quand il pre'tend , que c'etoit a Defcartes & a Cbanut , qu'etok du la Con- verfion de Cbriftine au Catholicifme , qui le manifefla quelques annees apres la mort du premier (*):) que tout cela, dis-je, ne fert qu'a faire voir, avec quelle taciiite on exagere ordinairement le merite de fes amis (f). Car a en juger par la propre lettre de Defcartes a la Princefle EKfabeth , tranfcrite ci-deflus il paroit alfez, que toute 1'envie de ce grand homme fe bornoit a trouver moi'en de faire gouter fa Philofophie a la Reine: ce qinl pouvoit tres-bien entreprendre , fans avoir befoin pour cela d'etre admis a fon Confeil fecret. Et quant aux avis de notre Philofophe, eft-il croi'able, que Chriftine, elevde dans la meilieure Ecole politique, qu'il y cut alors en Europe, fa voir le Senat de Suede, oil il y avoit grand nombre de Seigneurs confommes & rompus dans les affaires les plus importantes de la guerre & de la paix , eut pu apprendre de Defcartes , qui fortoit de fa folitude , quel- que chofe de nouveau en ce genre? Kile encore, qui d'elle-meme , bien. du terns avant 1'arrivee de Defcartes en Susde > poifedoit toutes les qualites requi- Ce qu'etoit probable- men t Dtf- cartet felon uri Auteur Bailltt tour ne en ridi- cule fur 1'exagjra- tion de fon e!oc;e de Drf;arts. ,, fon fervice au defir de lui plaire , enforte que cela n'empechera pas de JIH dire fran- chement mes fentimens (*) Un Anglais dit conformement a cela (i) que Defcartes par fes converfations a- greables melees de difcours de Religion, avoit infill u(S des principes de Gatholicifme a la Princefle Palatine Elifabetb, au Prince Philippe tiAngleterre & a la RelncChri/line: & que s'il avoit v(5cu plus de terns, il auroit feduit un plus grand nombre de perfonnes de ditlinftion, aiant probabletnent t^te un Jefuite cach6 & un Millionaire de cette So- ci^tt^ r fous la cappe de Gentilhornme , de Savant, de Soldat, de Philofophe & de Ma- thematicien (f) Menage fe mocque de I't^loge outr4 que Baillet fait de Defcartes (2) que le Pi- lote qui avoit pa(Te Defcartes de Hollands en Suede le louoit beaucoup micux au gre" du Sr. Baillet. Car la Reine Cbriftine lui demandant: quelle efpece d'homme il cro'ioic avoir conduit dans fon vaiffeau? 11 repondit:,, Madame, ce n'eft pas un honimc que j'ai aiTienti a Votre MajefttJ: c'eft un demi-Dieu ". Mais les Difciples de Mr. Dejcar- tes fatisfont parfaitement I'Hittonen, lorfqu'iis font de leur Maitre un Dieu tout eii- tier, en relevant parfaitement au-de:Tus de la condition humaine. Peut-eire nca:i uioins lie veulcnt-ils par-la, que le mettre au rang des intelligences du premier ordto. f ! ) Guideon Harveys Vanities ef Philofophe an.d Phyfik. dans ]a Ptefac*. (z) V' I'tir.ti- Baillet iom- ill. Part. II. H JUSTINE REINE D E SUEDE. requifes pour gouverner les Etats les plus vatles? Au refte, on paflera fa- cilement au Sr. Baittet f endroit ou iJ dit {a) que la Heine lui avoit demande m le plan d'une Academic, done elle devoit etr-e Chef & Prote&rice , ai'anc " defiein d'en etablir Defcartes ]e Direfteur , (*) car fur ces fortes de chofes -on lui accordera plutxk la capacite neceflaire , qu'a manier les affaires d'E- tac. Quoiqu'il en (bit, les conferences Philofophiques de la Reine avec Defcartes ne durerent gueres plus d'une couple de mois (b). Soit que cela vint du changement .de la maniere de vivre de ce dernier , ou de t'aprte oit a fon re- pos. Le Sr. Sorbiere rapporte dans deux de fes Icttres (3) qu'on foup^onnoit du poifon s>il y a eu dans la maladie de Defcartes : mais ajoute-il; j'aide la peine ^ le croire. C'efl un hon- du poifon neur que les Philofophes n'envient pas aux Princes: n'^tant pas non plus la coutume dans cette du Nord d'emploier ces inftrumens dc vengeance, & fiirtout pour un inte'ret de bel ef-ort. prit, que les Grammairiens de la Reine rje cro'ioient pas moins pofleder que Defcartes. (J) Mr. de Lomenie Comte de Brienne les rapporte tout au long .(4) comme auffi Bail- let & Clerfelier. On les inf^rera ici pour autant qu'elles regardent la Reine Cbrifline : n'e"- Ex Eremo Pbilofophica in lucem & ornamentum Aulte vocatus,. Pofl quartum menfem morbo interiit t Etfub hoc lapide mortalitatem reliquit; Anno Cbrijii CIOI3CL. Pit* fate LU\ Et omijjls Furtuilorum ftudiis In Fillula folitarius , prope Egmondam in Hollandia Ajjidua XXV. annorum meditatione aufo potitus eft. Hinc Orbe toto celeberrimus ,, A Rege fuo conditionibus bonorificis evocatus Redierat ad Contemplations delicias : Unde avulfus admirations MA XI MM REGINM, Quce quicquid ubique excelluit , fuum fecit, Gratiffimus advenit : Jeritt eft auditus , ^f defletus oliit. ,, Quod Summum tandem eft Ita per Creaturarum gradus ad Creatorem eft conatus u Uc opportunus Cbrifto , Gratia Autori , in avita Religione quiefceret*. ,, / nunc Viator f cogita Quanta fuerit CHRISTINA, & qwlis Aula, Cui mores ifti placuerunt. Son Parent Mr. Joacbim Dejcartef avoit intention de faire conftruire un autw Alcnu- aiccr. A la main gauche de la facade. A la main dr.? ire de la CHRISTINE REINE DE SUEDE. lofbphie, & en firent une Se6te. Cela caufa neanmoins da trouble quel- que mentd 1'endroit oil Rent Defcartes futenterre", & ou, comme fl dit, une partie des- cendres & du refte du Defunft fe trouvoient encore. Mais ce deffein n'a pas e"te" ex<- cute'. Cependant nous mettrons ici 1'infcription que fon Parent auroit mife fans cela fur ce Monument : Carthefius (Joachimus) Gatlus, Renati Affinis, Regi Galliarum & Confiliis Militarifqut*. Discipline Prcefeftus , durabilius &? magnificentius Monumentum RENATO Affini Suv ,, in C&mitcrio ad S. Olaum Suburbii Orientalis vulgo Nordermalm propediem exjlrui cu- rabit in forma Pyramidis marmorece plane illuftris , cujus primum latus babebit antiquam Infcriptionem : alterum : D. O. M. Regnante Cbriftina p c. tertium fequentem f no- vam quartum (i). ADSTA VIATORETLEGE Hie inter Parvulos conditus eft anno MDCL Vir morum Jimplicitate f innocentia verc famulus At ingenii Jimplicitate Maximuf RENATUS DESCARTES Galliarum totiufque Orbis Pbilofopbur, Qualis quantujque fucrit intelliges ex infra fcriptis elogiis ,, Caduco informlque antebac tumuto A Firo Nobili PETRO CH A N U T Galliarum tune Legato appofais; ,, Hujus quidem offa curis f fumtibus Generofi PETRI D'ALI BERT Gener alls Franclcs Quejioris Hinc eruta Lutetiam tranfiata funt anno MDCLXVI. Et in JEde S. Genovevec pofaa: Sed exuviarum Ejus pars non exigua hoc fupereft loco , pro Virl meritis decoraret Illujlriff. Joa. Anton de MESMES Eques, Comes d'A VAUX. LUDOr.XIV. Regi Cbrijlianifflmo a Secreiioribus Confiliis Regiorum Ordinum Commendator eorumque Ceremoniis prccpofitus fummus Magijier; Ad Rempublicam Venetam, dein Batavarn, Hinc ad J A COB UM. II. Magnce Britannia Regem in Hibernia degentem? Turn ad CAROL. XI & XII. Suecice Reges Legatus Proinfeta MEMMIORFM Genti erga Liter as f Literatos propenjione Ad Pbilofopbia bonorem ^f Gallicinominis immortalitatem Immortalis memoriae Pbilofopho Gallics Decori M. Decembr. MDCLX7II. _ Hanc qitalemcunque Infcriptionem Illuflriff. Galliarum Legato vovet & confecrat il~ lius Author Edmundus Pourchotius Senenjis Jur. Utr. Lie. Academics Parifiens, ,, Reftor Antiquus & emeritus Philof. ProfefT. L'Auteur y ajoute cet avert hTe- inent: Je dis, felon ce que nous apprenons, par ce quej'hiftoire rapporte de la mort ,, de Mr. Defcartes, qu'il tut enterr en lieu oil 1'on met fes petits Enfans morts apres leBateme, comme auOl les Orphelins. M. Cbamt le voulut ainfi, parce que nous _,, cro'ions, que les petics Enfans nes de Parens, qui nefont pas denotre Communion,, M morts apres le Bateme, font fauv^s. II crut que cette place convenoit mieux a Mr. Defcartes que tout autre: & la Reine Cbriftine gouta la raiCon (2)". 11 faut pourtant. fi) V. ]oh: Teftelii Hift. Philofophi* Carthef: pat;. j & 86, (a) <* eft tiie d //&"' Litirau fait, IV. Ff 3 230 MEMOIRES CONCERNANT L'an que terns apres dans rUniverfite d'Upfa! , fous fe Regne de Charles XL 6 S- Prefque tons les ProfefTeurs de la Faculte de Philofophie , etant portds pour " celie de Defcartes , les Se&ateurs de la Philofophie Scolaftique en porterent des plaimes en Cour. Elle s f jr entremit & approuva la bonne methode d'examiner & d'etabtir la verite felon des principes fermes & de bonnes v PA end ex P er * ences P our t ^ c ^ ier d e perfedtionner par-la les arts & les fciences num. xv. (*). Pour conclufion de cet article nous donnerons dans Tappendice 1'abre- rcmarquer fur ceci , que Defcartes ne fut pas propremcnt enterre' au-Jieu oil Ton met Ics Enfans inorts apres , raais avanf le Bateme , lefquels felon 1'Ordonnance des Eglifes de Suede, font communement enterre"s au Nord des Cimetie'res (i), Herm an (*) ^ n trouve ^ ur ces Controverfes plufieurs Ecrits publics par Mr. de Nettelbladt, Conring con- (2) outre ceux qui reftent encore en Manufcrit. Parmi grand nombre d'autres Savans t.raire a Dcf- qui n'approuve^rent pas cette nouvelle Philofophie, fut le c^lebre Herman Conringius yui cartes. fro^ & Stockholm en ce terns- la. Voici 1'Epitaphe qu'il lui fit (3), L'Epitaphe qu'il lui &, Epitapbium Cartejii Cineribuf Sacrum: RE NATO DESCARTES Matbemalico Clariff. w Veteris doctrines omnis , quaiwvis fibi ignotce , Hojli accerrimo , Pbyfiees Nova , c? nunquam (Hen} adolefcendce Magiftro infelici , Quern Animcefuts male metuentem At Corpori annorum centurias pollicentcm Mors indignabunda Subtio rapuit. In hoc um tamen benigna , Quod nova ilium Pbyjicce Jtipervivere Non Jit pafla : Novitatum quarumvis Admiratores Collatitio are Flebile boc Monumentum F. F. F. HERMANNUS COKRINGIUS Litfi Holmia Sueon. 1650. MenJ. Aug. Ce que pen. Mr. de SorlUre ecrivit en ce terns-la a Saumaife (4). Ve*ritablement je regrette foit Mr. de ,, ce Philofophe: mais je ne tiens pas, que tout le bon fens du monde foit mort avec " ' u '' ^ Je cro ' s ^ u '^ nous re ^ e ^ es P er f nnes Qui peuvent travailler aufll heureufe- " ment que Iui ^ nous d ^ couvrir les Secrets de la Nature : ^M , quid Jit pulcrum , quid turpe , quid utile , quid non Plenius ac melius nojlro Cartefio dicent &c. C'ell dequoi on eft plus convaincu aujourd'hui que par le pafle 1 : & pour ce qui eft de la fource ou Defcartes a puife fon nouveau Sifteme, le Sr. Pafcbius a fait reinar- quer CO V. Ste. Clar* JWmt ou les Mcmoircsdcs &c. Eglifcs de Ste. Claire & de St. Olave a Stockholm ("3) V. Cenringii Oper. Tom. VI. pag. js>r. i>ar le Dr. Nordberg. (4) V. Ses Lemes pag. ; jy. (i) V. Sa Bibliothequc Suidoifc 1. c. pajj. iif. CHRISTINE HEINE D SUEDE. 231 ge d'une Brochure qui parut a Paris en 1695. Ce Traite (*) eft devenu fort rare, au moins dans ces quartiers-ci. L'auteur y expofe agreablemenc ]a Philofophie Scolaftique attaquee par celle de Defiant* , qui eiFetivement " lui a donne la mort. Comme Claude deSwmaifc etoit un des premiers favans que Chriftim avoit cbri/iine &i fait venir aupres d'elle , aufli fut-elle d'abord extremement prevenue en fa venir s * u \ faveur. Mr. Huet en parle de cette fa^on; (a) Chriftine ai'ant un genied'lik a & prc 5, fort flexible , dependoit beaucoup des jugeraens de ceux qui s'etoient combien ce acquis quelque efpece de reputation, & dans le terns qu'elle s'app!iquoitde V p1mt U ces avec ardeur aux etudes & aux feiences , & s'etoit Jivre'e a la difcretion bont * 3 - de Saumaife & de Voffius ; elle fe laiflbit conduire a leur faritaifie , defor- te , qu'elle faifoit venir aupres d'elle les favans que ces deux Meffieurs Lui propofoient & trouvoient dignes de leur approbation". Patin qui etoit du nombre, mais qui n'y alia pas, approuve iort le gout de la Reine pour Saumaife, a qui, a ce qu'il dit dans un endroit , (/>) elle avoit envo- i'e fon portrait & autres beaux prefens & avoit ecrit plufieurs belles lettres pour 1'attirer en Suede. Saumaife lui avoit repondu ; qu'il faifoit pour lui , qui etoit maigre , trop froid en Suede , & trop chaud en Angletene : crai- gnant d'etre pris en chemin par les Angkis , contre qui il avoit ecrit une defenfe pour leur Roi (f). II vouloit apparemment fe faire une douce vio- lence; tn attendant fon arrivee, la Reine, naturellement avide de connoi- tre (rt) Commentar. de Reb. Sttis pag. 104. (b) V. Ses lettres Tom. I. p. 91. ? nouvelles lettres T. I. p. 258. quer (i) qu'en traitant des Idees, il en a emprunt^ les iddes de Platon, ajoutant, que _, v la Reine Cbnftine meme le lui avoit fait entendre: & qu'il avoit pris fon dogme de carl ( f, i ^ Betes de 1'ouvrage de Gometio Pereira , Medecin Efpagnol, qu'il intitula jintoniana Mar- ^ philofo^ garita, du nom de fon Pcre & de fa Mere, & dont on pretend que Dej'cartes fit dif- phic. paroitre tons !es Exemplaires , a deux ou trois pres qu'on fache etre confervas. Je tiens deMr. Spangeiiberg ProfefTeur en Matht5matiques a Marbourg, que Defcartes3.pro- fit^ de la conversion duSr. Fnulbzber, (Tifleran de profeflion &apres In^enieur a Ulm fa Patrie, mais d'ailleurs fi connupar les d<5couvertes qu'il a faites dans 1'Analyfe) pen- dant le terns que le Ge"ometre Francois ell refr^ a Ulm (2). Du moins voit-on dans le Traits' de Faulbaber intitule* Miracula dritbmetica fs) qu'il s'eft fervi de cctte M^thode de Comparaifon longtems avant Def cartes , qui ne la publia dans fa Gt^ometrie que 1'ar* 1637. qu'elle fut imprirn^e po-ur la premiere fois en Francois. (*) Le titre en eft: Hiftoire de la Conjuration faite a btockbvlm contre Mr. Defcartes. G'eft un in 8. de 53. pages. (f) Patin dit 1. c. .,. Si les Anglais ont traite" fi mal & fi rudement leur" Maitre, que ne feront-i!s pas a leur ennemi Sxumaife". L'ann^e apre? 1(551. Boinsbourg 6crivit a Linker: ,, mans'jit Salmr.flus in Suedia quod propter defenjionsm Regiam fuam wifquam tu- to commorari pojje credatur , niji inter Reges (4) ". (i) De Novis Inventis Cap. III. VI. pag. ,, ctr.ferre ntuttoties cplt r nonrullaque nova de- IJ+. &c. Moreri Dicf. Hift. art. Gunxz Perdra ,, tex'tt. item Brucktri Hift. Grit. Philof. Tom. IV. Part. (i) Public a Augtbour^ par David jrerhzius II. p. 529. Camo- Lubeanus en :6i:. pag. 61. fc 6+. in 4. (z) Mr. Brucker dit a ce fujet 1. c. p*g. ;TI. cfr. C art eft i Gcometria Libr. II pag. 49. Cum eo ''Fauih^bero ,, C.irtcfius lor.gredi fepiits (4; V. Grubtri Anecd. Baincb. T- I. p. i3 ,> x de ratior.i'yus slrit/jmetitisatque Gcimeiricis , Coinmcre. Epift. Leibnitz* 3 ME MOIRES CONCERNANT L'an. tre toutes chofes, qu'elle croi'oit apprendre de lui, lui demanda la permif- 1 5 ' flon de Her tin commerce de lectres avec lui,& de le confulter fur la manie- re de regler fes etudes : & a ce que die 1'auteur de la vie de Saumalfe (a) la Reine doit lui avoir ecrit plufieurs lettres , quelque fois de fix a iept pa- ges , toQjours en latin (*). Mais a la fin comme Saumaife differoit fon voia- ge pour la Suede, elle lui ecrivit qu'il fe depechat de venir aupres d'elle , ou qu'il faudroit qu'elle allat le trouver , ajoutant , qu'elle 1'auroit deja fait , 15 les circonftances , ou elle le trouvoit, le lui avoient (ft permettre. II fe mit done en chemin & arriva a Stockholm 1'Ete de 1'an 1650. II y pafla plus d'une annee. Pendant le fejour qu'il y fit, il fut loge dans le Palais Roi'al , pour etre d'autant plus pres de la Reine , qui le gracieufa extreme- ment. Gar etant tombe malade a ne pouvoir quitter la chambre pendant quekjues mois , il n'y eut forte de foin que la Reine ne prit de lui (f). Elle 'alia v oir fouvent elle-meme. Mais il paroit que toutes les vifites ne furent pas egalement edifiantes. On alleguera la - deiTus dans les remarques un pailage (j) (jui fera un trait du caraclere de notre Savant. Avant que de quitter la .Suede la Reine lui fit des offres avantageufes pour le retenir au- pres d'elle. Mais parce qu'il avoit donne fa parole aux Curateurs de I'LJ- niverfite de Leyde d'y retourner , il partit de Stockholm au mois de Septem- bre 1651. comble de graces & de liberalites de Chriftine. Elle lui conferva dans la fuite fa bienveiliance, & voici en quels termes elle lui ecrivit envi- ron deux ans apres fon depart de Suede. Pious V. Clementii vita Salmafii hujus Epljlolis pramiffa p. 51. &c. (*) L'Auteur de ces M^moires a vfl plufieurs de ces Lettres a Rome dans la Biblio- theque du Cardinal Ottoboni, mais il n'apii les avoir a fa difpofition par 1'empechemenc que le Conclave d'alors y mit (i). (t) Ces (bins n'allerent pourtant pas jufqu'a lui K '<^ il ferma au moment qu'il la vit entrer,.. Ha, ha, dit la Reine, voi'onsceque Chri/iine\ c'eft! Montrez-m'en les bons endroits. Saumaife lui en ai'ant montr^ un des meilleurs Saumaife. ]ii| e le lut tout has en fouriant. Apres quoi, pour fe donner plus de plaifir, a- dreflfant la parole a la belle Sparre, fa favorite, qui entendoit le Fraiifois : Vien -Sparre, s'ecria-t-elle, vien voir un beau livre de devotion, intitul^ leMoyende parvenir. Tien, lit moi cette page. La belle Demoifelle n'eut pas Id trois lignes qu'arret(fe par les gros mots, elle fe tut en rougiflant. Mais la Reine, qui fe tenoit les c6t*.Bourdelot , Tetat on je me trouve pour L ' an> le prefent. 11 vous informer a des fentimem d'eftime que je confer- ve pour votre merite. Je vous prie (Ten fare enticement affure 6? de croire^ que je les conjerverai toute ma vie, teh que vous les avez vu naitre par la connoijjance que fai eue de ce que vous valez. Confervez-moi Votre amitie 3 & Joiez certain qtfil rfy a perfonne qui vous ejlime a Tegal de moL Stockholm ce 6. -., . _ . juin 1653- Cbriftme. La Reine donna des marques de bontes, mme apres la mort de Sau- maife, a fa Veuve & a fes deux fils, dont un mourut en Pologne au fervice du Roi Charles - Gujlave , fucceiTeur de Chrifline. Nous infererons ici la belle lettre de condoleance & de reproche qu'elle ecrivic a Mad. deSaumaife le 19. Decembre de la meme annee : la mort du grand Saumaife eft aujourdbul le fujet de deplaifir de tout ce qtfily a de gens raifonnables au monde , & que de toute part Ton vous enconfole; jugez que I doit etre mon rejjentiment dans cette perte irreparable. Fousjavez que lie etoit T ejlime dont fhonnorois fon merite 5? vous etes temoin que favois pour lui des fentimens de tendreffe aujji veritable* que je lesauroispu avoir pour un fere. J'etoisjur le point de lui en renouveller les proteftations lor f que Jafunejle nouvelle de cette mort inopinee me fit tomber la plu- me de la main.) 5? me laiffajans autre penjee que celle de regretter la perte d'une Perfonne qui m 1 etoit ft cbere. Imaginez-vous aprh ce- la queh font les mouvemens de douleur que J'ai reffentis , -p n'efpj- rez-pas de moi que 'fentreprenne de vous conjoler. Votre douleur eft jufle^ vous devez employer le rejle de vos jours a pleurer cette perte & le crime d'bomicide que vous avez commisfurfes Merits (*). E- tes-vous ft ennemie de votre propregloirc & de la memoir e du Defunft) que vous aiez ofeprofaner vos mains par un telfacriUge ? Votre obeif- fancc (*) Le Sr. Clementius, pane"gyrifte de Saumaife, tourne a fa grande louange Ton cou- rage d'avoir fait jetter au feu quantite d'ecrits de controverfe qu'il avoit cornpofes con- tre fes Adverfaires (i), Patin lone de incline Nicolas Heinfius d'avoir retranche de Ton Ouvrage une Elegie qui e*toit centre Saumaije . a caufe de la mort de celui-ci ,,. Qiod quidem eximium egregiumque fattum laudo , dit Patin, (2) Jive hoc fecerit pbilofopbice & a , cbriftiane, five fecerit jubente & imperante Suedorum Regina, quce Salmafiuin tanquam ,, magnum Jidus cotuit & Jerio redamavit. (r) L c. pag, j4. CO Lettres n, LXXI1. pag. 382, Tome I. Gg MEMOIRES CONCERNANT t ' fln< fame eft crueUe^ & je ne vous pardonnerai jamais ft avoir fait mu- l653 ' rir pour lajecondefois celui dcs bommes qui m&ritoit k m'mix d'etre immortel Pardonnez> je vousprie, ce travfport. L" indignation itfemporte 3 5? je ne puts vfempecber de vous reprocber cette perte ineftimable $ que je voudrois pouvoir racbeter par un trefor. Mais puifque k malbeur a voulu que nous cuffions unfi ample fuj^t de re- gretter cette mort ; // eft jufte que par k reffentiment que fen te- moigne^ je me juftifie des foupfons cTe'tre me decrement inter effee h lagloire de cet bomme. C*ejl ce qui me refte a fair e pour me laver du Crime que vous itfimpofez : , &p. quoique vous a'iez fait pour me donnerjujdt de me plaindre de vous , je me fouviendrai pourtant toujours que vous etes la Feuve de ce mme Saumaife que fai alme comme un The ? dont fbonnorerai toute ma vie la memoire. Je iff en fouviendrai toujours & je feral voir en vous p enfes Enfans Tamitie $p Tejlime que j^ai port ee au Defuntt. 11 ne tiendra qtfa vous de me fair e f avoir en quoi je pourrai vous favorifer 5 5? jwez certaine 3 qifil ri*y a rien que je ne faj]e pour votre fatisfaction 5 pourvu que je rfi'gnore pas en quoi je pourrai vous fare utile. Et pour ce qui eft de votrc fils dont vous me parlez 3 facbez que je pre*- tens avoir part a fon Education 3 & que je veux que vous-meme m'en rendiez compte , pwfque je veux contribuer 5 autant qtfil de- pendra de moi y a k rendre Aigne fils d'unji grand P$re. Cbriftine. Tout le monde convient que Mr. de Saumaife avoit une prodigieufe lee- & ,..,., .^ . . -. . -Y ,, , . , , de ture , tx qu il etoit ne pour la critique : Mais il 1 exer^oit avec tant dehau- teur ^ ^g prefomtion , qu'il fe fit encore plus d'ennemis que d'approba- teurs. II traita les autres Savans, meme du premier ordre, comme de la populace en comparaifon de lui. Lui , Gaulmin & MauJJac fe rencontrant un jour dans Ja Bibliotheque du Roi de France , Gaulmin die aux deux au- tres: je penfe que nous pourrions bien, nous trois,' tenir tete a tous les Savans de i' 'Europe ? A quoi Saumaife repondk brufquement : Joignez-a tout ce qu'il y a de Savans au monde & vous & Mr. MauJJac , je vous tiendrai tte, moi feul (/z). Par ce principe de fuffifance, il chercha querelle aux gens les plus diftingues , & entr'autres il traita Grotius avec mepris (Z>) quoiqu'il lui fut redevable en grande panic de ce qu'il favoit. Fojflus & lui etoient grands amis, mais leur amitie fut rompue parce que Voffius aiant fait preter de 1'argent au fils de Saumaife , celui-ci ne vouloit pas le lui ren- dre, (a) V, Mnnes Grotii p. 605. item Dift. gny T. II. p. 172. te Moreri art. Sauuiaifc & Mem. d'Arti- (&) Manes Grotii p. 604. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 235 dre (a). Pour farcroic de malhear pour Vojjl.is, Chrijline aunt apris, qu'il vouloit ecrire centre Saumaife 9 lui fit dire, qu'elle ne le vouloit plus voir. De me me Saumaife fe brouilla encore avec Nic. Heinjhs, done il avoit at- taque rudement le Pere: outre quantke d'autres favans de grande reputa- tion qu'il meprifa fouverainement: &, par le moi'en de Bourdelot, fonEmis- faire, il fit enforce, que Chrijline perdit , pendant quelque terns , J'eftims qu'elle avoit jufques- la temoignee pour les trois grands homines, done on .a fait mention ci-deflus. Mais on n'a qu'a lire certains pafTages dans le Recueil des Lettres des Savansque Mr. P. Burman a public (b) avec ceque d'autres grands hommes ont dit de Saumaife & de fes Ecrits , & on verra quelle opinion ils en avoient (*). Perfonne u'ignore dit Mr. Bayk(c) qu'il trampoit fa plume dans la bile la plus amere. On cut dit, qu'il avoic pofe fon trone fur un monceau de pierres , afin d'en jetter fur tous les paiTans : & bien loin qu'il falut lui rendre graces d'avoir aflure la liberte de la Republique des Lettres, comme Mr. Balzac lui en rendoit, il femble au contraire avoir afpire a etablir fa tyrannic par tout 1'Empire de 1'erudition." Avec tin courage fi mal place , qui auroit crfl , qu'il fe feroit laifle do- miner par une femme hautaine & chagrine, qui fe vantoit d'avoir, mais non pas pour Maitre, le plus Savant de tous les Nobles, & le plus Noble de tous les Savans ? (d) Et qui auroit dit , qu'un homme qui avoit autanc de lumiere que lui, auroit eu la foiblefle d'interpretcr lesfonges? C'efl pour- Co) Menag. ;. c. T. I. .350, 351. T.IIL 637. 651* 666. 66p. T. V. p. 713. Menag. p. 386. Colom. Opufc. p. 98. 99. Vign. T. I. p. 351. Bayle Oeuv. Div. T. I. p. Marv. T. I. p. 9. p 10. Gruberi Com. Ep. 565. fefc. T. II. p. 746. (c) Osuvr. Div. Tom. II. p. 205. (fc) Burm. Syll. Epifl. T. HI. p. 339. (d) Olivet bift. de I'Acad. Fran?, p. 395. (*) Le Cardinal Richelieu difoit(i): qu'il ne connoiflbit au monde que trois hommes Parall^Ie de fouverainement Savans, qui ^toient Mr. de Saumaife, Grotius & Bignon. Feu Mr. de Saumaif: & Peirefc difoit que Grotius valoic deux Saumaife. Mr. Bafnagc le nie & dit, que Gro- de tius ^gale feulement Saumaife & Scaliger. Je parierois bien, dit Vigneul Marville , pour Mr. Peirejc centre Mr. Bafnage: & il y auroit bien des gens, entr'autres Mr. Colo- inies , qui feroit de mome" avec moi. Mr. de Saumaife avoit i'efprit tres-vif & la md- moire prodigieufe. Autant de livres de fa fac,on, autant d'impromtu. Mais il nedigd- roit pas aflez les matie'res qu'il traitoit. Ce qu'il donnoit au Public, il ne le donnoit que tout cru avec de\iain, & comme tout en cole"re. II fembloit jetter fon grec, fon latin & toute fa fcience a la tete des Gens. Grotius au contraire confide're tout, 1'or- donne & le range fagement. II refpefte & me'nage fon Le&eur. Son Erudition eft comme un grand fleuve , qui fe re'pand largement & fait du bien a tout le monde. Autant d'Ouvrages de Grotius, autant de CheT-d'ceuvre en tout genre: Ce qui eft fans e"xemple chez les Anciens & chez les Modernes. Jatmis Auteur n'a mieux choifi fes Sujets d'dcrire : il s'aggrandit avec eux, & ils s'aggrandiflent avec lui: Crefcit cum am- plitudine rerum vis ingenii. (0 ^S Marvillt T. I. p, 5. & ic. Gg 2 L'an 1653- Bturdelet favorife de Cbriftine a la re com- mnndation 236 MEMOIRES CONCERNANT pourtant ce qui lui eft arrive (*) & ce qui aura donne lieu a Cbriftine de J'appeller une fois omnium fatiwrum doftijfimum (a) (f) car comme jl alloit de Paris a Dijon, fa femme fongea qu'elle jouoit du luth & que tout a coup les cordes etoient venues a fe detendre. Mr. Saumaife lui dit: que comme elle etoit' dans le neuvieme mois de fa groffefle, ce fonge fignifioit qu'elle accoucheroit bientot , &qu'ainfi, fans pafler outre , etant pres $Auxene> elle devoit s'y arreter. Elle le crut & accoucha d'une fille le meme jour. On voit dans la vie de Saumaife e'crite par leSr. de la Mare, laquelle ne fera peut-etre jamais imprimde,qu'apres ce terns-la ils'attacha fort a interpreter les fonges (). S'il ne fut jamais venu en Suede 9 on n'auroit pas tant eu de fujet delui imputer les mauvaifes iddes qu'il avoit fuggerees a la Reine , lefquelles Bowdeht acheva (c) (|). Car cc fut pen apres fon depart de Stockholm , qu'il mit ce Bourdelot dans 1'efprit de la Reine fur le pie d'un homme favant & doue de plufieurs autres belles qualite's. Mr. de Saumaife enfle des hon- neurs qu'elle lui avoit faits & fouhaitant de primer fur tous les autres favans de (a) Lettrf de Vofllus a Heinfius en 1653. dans Burman Syll. T. III. p. 666. &le Le- xicon des Savans par Jocher art. Saumaife. (6) Salengre Mem. de literal. T. I. Pan. II. p. 257, (c) Huet. Comment. T. III. p. 339, p. 103. Burm. Syll. (*) Non obftant cela il mande dans fa lettre a VnJJius , fans doute par mocquerie , que Freinsbemius au retour de Suede en Allemagnc avoit prophetite quele regnede Cbrift fur la terre fuccderoit imme'diatement a celui de Cbrijline (i). (f) Milton tire vanit de fon Trait contre le Roi d'^ngleterre (2) pre"tendant que Cbrijline avoit fait tant de cas de ce livre qu/elle avoit pail^meme jufqu'a mdprifer Saw- Difgrace & ma ij e i Qui ^tolt alors a fa Cour. Quoiqu'il en foit , Cbriftine fe facha tout de bon con- Saumaife & tre lui de ce qu'il n'avoit pas meme daign6 lire la lettre que VoJJius lui avoit ^critepour lettre deBo- lui demander pardon, mais 1'avoit jett^ fur le champ au feu. Voici ce que Bocbartmzn- chan la-des- fa % j, r JJi U s le 24 May 1653. de fon entretien avec la Reine. Elle lui dit:,, je traite- rai Foffiut de telle facon qu'il aura de moi piein fujet de contentement. Mr. Saumai- fe, en confid^ration duquel je 1'avois loign de moi pour un terns, n'eft plus en humeur de revenir ici: & quand il reviendroit, j'en aiaffez fait & je n'en veux point faire davantagc. Mr. VoJJius 1'a recherch & s'elt voulu reconcilier, & lui s'eft tou- jours eloignii de toute vo'ie d'accommodement : & au lieu d'interce"der envers inol pour VoJJius, il atoiijours tach^. . . &c. C'eft poiirquoi je ne fuis plus r^folue de I'ecouter , ni de m'accomnioder a lui: c'eft dequoi vous aflurerez ledit Sr. Vof- fius (?) - (|) Nic. Heir.fius ^crivit de Stockholm a Gronovius en Fdvricr 1655 ,,. Conflans bic ejl rjpinio vSalmafii j Pourdelotii opera Chriftinam periiffe ". (4). Notez, que SalmaKusefi. appelle dans cette lettre ^lajlor , Scurtlelut sfrcbiater , & la Reine Hera. Mr. JBurman a ainfi expliqu ces mots dans fes notes par-ci par-la. (i V. Epift. Hotcmann. num. XXXIX. 481. i- tem Brunei. Ehrentemp. II. Zchcnd. rrg. 79. (^ , Defens. II. pro. fop Angl. p. 8- 52. & 96. Eaylc D'A rrt Milton lit. F. (3) Cctte lettie de Bcchan eft tire'e du i vol. Ccd. Wlc Zpift. de la Kiblicthcque des Rcmcn- Uans d'slivjiejdam. J'en fris iede\abic au eel. Profelt Mr. Wetfiein , qui a eu la bonte' de me la communique! avscunequinzained'autrcs, dont jepouirai faire ufage dans la fuitc , & qu'en atten- dant je ne manque rai pas de citer dans les occa- fions. (4j ur*, 1. C. T u III. p. 35>, CHRISTINE REINEDE SUEDE. 237 de I 1 'Europe , n'avoit garde de quitter la Cour de Suede fans faire Ton poffi- ble, pour que fonefprit gouvernat encore la flexibiiite de celui de Chriftine I 5 *' en 1'entretenant toujours dans la prevention qu'elle avoit pour fon rare me- rite. Cornme il s'appercevoit qu'un fimple commerce de lettres , dont la Reine continua de 1'honnorer, ne parloit pas aflez en faveur d'un homme abfent ; il crut devoir choifir une perfonne affidee , qui fut le fidele inter- prete de fes fentimens. Ce choix tomba malheureufement fur un fujet des plus chetifs, qu'il y eut peut-etre dans toute la province, d'oti etoit Sau- matfe. Get homme s'appelloit proprement Michon , fils d'un Barbier de Sens qui avoit apris la profeffion d'Apothicaire , & etoit Bourguignon , comme 1'etoit Saumalfe lui-meme. (a) Son Oncle Bourdelot etoit Medecin & comme il avoit de la reputation parmi les gens de lettres, notre Michon adoptafon nom , pour s'acquerir plus de confideration & fe faire regarder comme un ics bonne* homme favant. Quelque avanture le fit pafler en Italic, & de retour de la non feulement il fe fit appeller Medecin par tout,mais il poufla 1'effron- terie jufques a debiter qu'il en avoit exerce la charge aupres du Pape t/r- bain VIII. & que le St. Pere 1'auroit fait Cardinal , s'il eut voulu refter plus long-terns a Rome , & qu'il n'eut pas ete oblige de retournerprecipitamment en France (Z>). C'efl apres ce voi'age que Saumaife lui connoifTant toutes les qualites requifes pour feconder fes intentions aupres de la Reine , 1'envoia en Suede avec de tres-fortes lettres de recommandation (c). Bourdelot s'e- tant infinuee dans les bonnes graces de Chriftine par les etourderies, par de bons mots & des traits fatiriques , qu'il favoit lacher a propos , fit fa prin- cipale etude, des fon entree a la Cour, de connoitre a fond I'humeur &le caraftere de la Reine. II n'y avoit rufes ni foupleffes qu'il ne mit en ceuvre pour fe mettre feul dans la confiance aupres d'elle , & il emploia (i bien fes tours de Charlatan , que Chriftine s'en infatua , & qu'il palfa dans fon efprit pour un homme univerfel , tel que Saumaife le lui avoit depeint. II favoit chanter de petits airs : il jouoit de la guittarre : il s'entendoit a toutes fortes de parfums: il n'ignoroit pas meme la cuifme. Mais pour ce qui etoit de belles lettres & de fciences folides , il n'en avoit prefque point de teinture 00 (*) Con- (a) Huet. /. c. pag. 103, Patin T. I. Let- (0 Hiiet. /. c . &f p. 104. Burin. T. III. tre LXXIV. Leben Chriftinse p. 17. pag. 637. Olivet /. c. pag 394.. (6) Chanut Mem. Tom. I. p. 204. Leben (d) Burman /. c. p. 651. Huet. /. c. Le- Chrift. p. 1 8. ben Chriftinae p. 18. Gal. Gualdo /. c.p. 23. (*) 11 y a plufieurs traits de fon ignorance dans Burman (i) Medonius ^crit zi Hein- fius : Pantomimum, Bourdelotium perbelli novi: Virum elegantem narras. O! infelicem ,, ffinfauftum, quiinfefuam ipfe artem non exerceatl poft lolliginis plenum caput p Koupov o-Ts-ipfiet,,. - Ccpendant il y a dans la Bibliotheque ffUpfal une lettre en la- tin de ce Bourdelot a 1'Eveque.Matfifi? & une autre en Franfois a Mr. Gajfendi, oil il dit, cju'il ^tudie fort avec Mrs. Eochart, Naude, Meibomius &c (2). (i) Syll. Epift. T. UI. p. (47. 643, 751. 75*- (2) V. Epi$. Ga/ertdi pag. 33*. fee. Tom, V. p. ). Le Sr. Vauciennes ajoute , qu'a mefure que Bourdelot fe rendoit maitre de 1'efprit & de la faveur de la Reine , jufqu'au point qu'elle faifoit peu de chofes fans les lui cornmuniquer , il ecartoit d'aupres d'elle tous ceux- meme de fa nation , qui lui pouvoient faire tant foit peu d'ombrage. II fit plus ; II entama peu apres le grand Treforier , Cointe Magnus de la Gar die , jufques-la le premier favori de la Reine ^ & il y reuflit fl bien, que ce Seigneur dechut tout d'un coup de la haute faveur ou il etoit. II ne voioit plus la Reine , & on tenoit qu'il etoit plus malade de fa difgra- ce, que de fa fievre, de laquelle il n'y avoit gueres d'apparence qu'il gue- riroit fltot : & on favoit que Bourdelot en etoit uniquement la caufe (c). Tous les Grands du Roi'aume , comme on peut facilement fe I'imagmer , con^urent une extreme jaloufle centre lui. Us fe plaignoient tous, qu'il leur otoit la fatisfa6lion de voir leur Reine & de 1'approcher : faifant cou- rir le bruit , que tous les changemens , qui fe faifoient , tous les jours , dans la Maifon de la Reine , etoient de fon invention, Les Medecins ja- loux de la confiance que la Reine avoit en lui , difoient , qu'il ne con- noiflbit rien en Medecine: qu'il avoit tue tous les Senateurs qu'il avoit trai- tes pendant leur maladie. La nobleife meme prevenue par ces Gens - la fupplia la Reine de 1'eloigner d'aupres d'elle , & de ne pas remettre fa fan- te entr'e les mains d'un homme qui n'etoit nullement Medecin (f) : & il y avoit (a) Huet p. 105. Olivet p. 394. Chanut /. c. p. 658. 664. Tom, III. p. 97. (c) Chanut /. c. pag. 92. Burman /. c. p. (fc) Chanut /. c. pag 95. Huet /. c. Burm. 659. (*) Henry Valerius dcrivit en 1653 a Heinjius: (i),, Rumor in bac Urbe (Parifiis) eft, Aulam Suecicam Viris doftis amplius non pater 'e & fperni illicftudia literarum, idque culpa Nebulonis cujufdam (Bourdelotii) qui SerenijJ. Regince animum Aferiisftudiis ad ,, ludicra f inania traduxerit "' Comment (t) Mr - Cbevrau dit : (2) Ce Charlatan (Bourdelof) qui ne manque point de faire des meur- maginoit (j) Eurtuan< 1. c. Toai, III. pag, ^$, (*) Oeuvrcs melees Tom. I. pag, ij ' CHRISTINE REINE ,ITE S'U E D E. 239 avoir a apprehender , cue cela ne produifitquelque c'efordre dans 1'Etat (a). L ' an - Mais toutes ces remoiitrances ne produifant point fur 1'efprit de la Reine _ 1'effet qu'on s'en etoit promis , un confidant du Comte Magnus s'addrefla on au Sr. Picques , aJors charge des affaires de France a la Cour de Suede, & lui demanda, s'il n'y avoit point de moi'en de retirer Bourdelot hors de Sui^ de & de le faire rappeller par le Roi, fouspromefle de qnelque bonemploi? Qu'on rendroit en cela un fervice fignale a la., Suede , fi on en pouvoit oter cet hpmme, que Ton craignoit qu'il ne fut caufe de quelque defordre. A quoi le Sr. Picqiies avoit repondu : qu'il y vo'ioit beaucoup de difficulte ; la Reine de Suede i'eftimant & le protegeant au point qu'elle le faifoit: que le Roi de France aimoit crop la Reine pour la vouloir priver d'un homme qu'elle jugeoit fi neceffaire a la confervation de fa fame : outre que du ge- nie dont etoit Bourdelot , il fe prevaudroit extremement aupres de la Reine de ce rappel, en appu'iant fur les idees avantageufes que la France, en le rappellant , temoigneroit avoir de lui , & braveroit h mauvaife opinion que les ennemis a la Cour de Suede auroient concue de lui. Le Sr. Picques ne difconvenoit pas , que Bourdelot etoit tellement preoccupe de fa bonne fortune, qu'il meprifoit tousles aver thTemens qu'on lui donnoit : qu'il fe vantoit d'etre plus en etat de nuire a fes Envieux , qu'eux de lui faire du mal : que cette maniere d'agir alienoit fort de la France I'afFedtion des Grands & de tous les Snedois , qui en etoient jaloux & qui fe plaignoient qu'on ne vo'ioit plus aupres de la Reine que des Francois , qui occupoient tout le Chateau & gouvernoient la Maifon de la Reine II ajoutoit : que ce que la France avoit a apprehender , ^toit les longues conferences que Bourdelot avoit avec 1'Envoie d'Efpagne & le Grand Maitre d'Ulfeh (qui a'etoit refugie de Dammarck a Stockholm:) & qu'il etoit a craindre, qu'il fe laiffat gagner par Pimentel pour fuggerer a .la Reine des penfees contre la France, car on le foupgonnoit deja d'etre partifan du Prince de Conds 9 dont fon Oncle avoit etc Medecin & pour lequel Chriftine avoit une eftime per- fonnelle (b). Autant que la' Cour de France avoit ete jufqu'alors indifFerente debarrafTer celle de Suede d'un homme qui lui etoit fi a charge , autant inontra-t-elle d'activite , auflitot qu'elle commenca a craindre , que Pimen- tel Envo'ie d'Efpagnc pourroit fe fervir du Miniftere de Bourdelot , pour donner a la Reine de mauvaifes imprellions du Gouvernement^de ''France. Ce qui en augmenfa les foupcons , fut la remarqne qu'on fit, que Pimentel s'infinuoit toujours plus dans la confiance de drift ine (c). Car cet Efpa- gwl, (a) Chanut Mem. T. III. pag. 93 &f 95. (c) Chanut /. c.pag. 117. f 128. (b) Chanut /. c. pag. 95. 96. ? 112.' ties quand il entrepend de faire des cures, s'eft imagind, qu'on devoit gu^rir des En- gu ^ r ; r de thoufiafmes par les Exorcifmes, pour avoir oui dire, qu'un Grec a ^crit, qu'il s font i'Enthcufia*- formes d'une humeur m^lancholique, & qu'un Arabe a foutenu, que cette humeurdoit me. venir da Diable. II a decri^ ici (a Stockholm) toutes les Mufes. 11 n'a epafgn<^ iii celles qui joucnt de la Lyre, ni celles qui fe fervent de la Troropette, 240 ME MOIRES CONCERNANT t'an giwl, foit pour donner de la jaloufie a la France , foit pour gagner 1'efprit >52 '... dc cette PdncefTe pur fes afliduites & fes importunites , ai'ant des audiences journalieres & afliftant a tous les diver tiOemens de la Cour, fuppofoit fou- vent d'avoir reju des lettres du Roi d'Efpagne fon Maitre, pour les com- muniquer a Sa Majefle, afin d'ecarter , par ce faux pretexte d'audience, d'aupres de la Reine , tous les Miniftres des autres Princes etrangers (*). Dans ces entrefaits , Mr. Chanut AmbafTadeur de France etoit emploie camme Mediateur entre la Suede & la Pologne au congres de Lubec , & Bourdelot difpofant entierement des fentimens de la Reine , ne gardoit plus aucune mefure. II meloit 1'impiete avec fon effronLerie infupportable. II faifoit prefque profeflion publique d'Atheifme (f). Les Franfois-meme, qui etoient aupres de la Reine de Suede 9 s'eleverent contre lui, & le char- _ ^ gerent d'avoir foutenu devant Chriftine des opinions impies (a). Les Sue- bonsfenti." dois 1'accufereiit d'avoir perverti 1'efprit de leur Reine & toutes les bonnes STdlfju:'- difpofitions qu'elle avoit pour la Religion Proteftante : qu'il avoit des pen- ligion de la fees etranges fur le Chriftianifme , & qu'il etoit a apprehender, que la Rei- re, qui fembloit n'approuver deja pas trop la Religion de Suede, ne tournat enfin en ridicule toutes fes maximes & fes ceremonies. Les Grands & les Petits en etoient dans une affliction fenfible , & le Clerge , qui craignoic qu'il n'y arrivat quelque defordre dans la Religion , refolut de lui faire des remontrances fecrettes. La Reine-Mere de Sa Majefte , PrincefTe fort pieufe & fort zelee pour i Religion , ai'ant apris Ie deflein du Clerge , le voulut prevenir (/;). El- fit a chrijtine\Q crut que la qualite de Mere lui donnoit pouvoir de remontrer a la Rei- ne, fa fille, Tapprehenfion ou etoient fes Peuples & 1'exhorter a leur don- ner quelque fatisfa6tion la-deffus. Elle prit pretexte de lui en parler en lui demandant permifCon de fe retirer a Nykoping. Mais avant que de s'en- ga- (a) Chanut /. c. p. 189. Holberg Hifl.de (&) Chanut /. c. pag. 125. &c. Dann. Libr. III. pag. 97. fcp 98. (*) fPtcquefort remarque (i) que Pimentsl <5toit Log6 dans Ie Chateau de la Reine & n^gocioit imm^diatement avec elle. Bocbart & Lager dcrivirent tn x ce terns a VoJJius: (2),, Nous attendons votre retour ici avec bien de Pimpatience. Vous trouverez bien du changement a la mani^re de vivre de notre Cour. La Reine eft dans Pappartemenc du Comte Magnus ft. Sa Majeft6 n'eft prefque plus vtfible pour perfonne. (t) VoJJlus ^crivit le i jour de Pan 1653 a Heinjlus en ces termes (3),, Bourdelotius ne ipfo quidem Jove fefe minor em exiflimat. Solus omnia iflic terrarum poteft. Menfam babet inft ruttiorem , quam babeat Comes Magnus, vcl alius quifpiam Magnatum in bee Regno. Is vero Comes longs minori eft in gratia quam nuncjlt ictTpxteiTmiir ifte. For- fan idea tabefcit , nam etiamnum decumbit , opera Protomedici iftius , cujus in re eft , ne unquam convalefcat. Bonus ifte vir non tain clanculum, quin facile omnes animadver- tant, docet f profitetur iftic atbeismum. Ait enim nullos tjje Deos: Coelum inane, &? mera effe verba Virtutem, lucum ligna. Hate Junt ejus myfteria, quibus initiates ef- , fe oportet , qui ullam illi captare cupiunt gratiam. (i) V. Son AmbafT Livr. II. Seft. II. pag. ij. d' Amflerd. nuta- 303. & 383- (zjLcttrsMfc. clans la Bibliotb, des Remontraus (3) Vvrman I .c. Tom. HI. pag. 659. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 241 gager a cette entreprife , elle confulta quelques-uns des principaux Sena- teurs, afin d'avoir leur avis fur la conduite qu'elle devoit tenir en cela. Le 1<5s3> pas e'toit delicat & gliflant, mais s'e'tant refolue de lui en parler, elle com- ' menca fon difcours par le peu de plailir qu'elle trouvoit a la Cour , & Ja refolution qu'elle avoit prife de fe retirer a Nykb'ping , ou elle ne trouve- roit pas tous les embarras qu'elle avoit a Stockholm. Mais avant que de partir, qu'elle fe fentoit obligee de I'avertir des plaintes que fes Peuples & fon Clerge faifoient du Sr. Eourdelot : qu'ils apre'hendoient , qu'il ne lui in- fpirat quelques maximes contraires a la Religion de fes Peres : & que le Grand Guftave fon Pere ai'ant re'gne fi glorieufement dans la Religion Pro- teftante de Suede 9 elle ne la croioit pas capable de le laifler gagner a des fuggeftions qui n'y fufTent pas conformes. La Reine 1'e'couta d'abord fort pailiblement ; mais comme elle vit que fon filence lui donnoit plus de har- diefle a parler, elle rincerrompit , & lui die qu'elle lui etoit fort obligee des bons avis qu'elle lui donnoit: mais que ces matieres etoient trop relevees pour elles & qu'il les faloit laiffer a leurs Pretres. , . Le Sr. Picques ajoute : que la Reine -Mere voulut retourner a la charge: mais qu'enfin la Reine lui repondit brufquement : qu'elle connoiflbit bien ceux qui 1'avoient porte'e a lui fairece difcours: qu'elle leur apprendroit aufll ce qu'elle etoit, & qu'elle leur feroit fentir leur imprudence.*.. Sur cela Ja Reine fortit , & laifla fa Mere , qui fondoit en larmes. Deux heures apres on 1'avertit , qu'on ne la pouvoit approcher , ni 1'empecher de pleurer. C'efl-elle-meme , dit la Reine , qui s'efl atdre'e cette mauvaife fatisfacl:ion. Toutefois cinq ou fix heures apres, ai'ant apris qu'elle etoit inconfolable, elle en fut touchee. Elle la viilta fans lui parler de ce qui s'etoit pafle , & 1'efprit de cette Prin- cefTe fe v remit un peu: mais cela n'empecha pas qu'elle n'exe'cutat la refo- lution qu'elle avoit prife d'aller a NykSptng* Le mauvais fucces de la tentative de la Reine-Mere ne rebuta pas fes ' Grands du Roi'aume. Leur chagrin centre Bourdelot & centre fon indigne e , ft aaq uc ' manege , les determina a s'en defaire & a le perdre. Mais par un tres- en"^"" grand bonheur pour lui, il echapa de leurs mains, quoiqu'apres il n'ofa eft me P rife/ prefque plus fordr , que bien accompagne. Le Savant Meibom , commode** par fon livre de la iVIufique ancienne, ne fit pas tant de facons (b). Bour- chr W inf - delot qui jouoit toutes fortes de tours aux Savans , qui fe trouvoient alors a 3a Cour de Cbriftine , engagea la Reine d'obliger Meibom , qui n'avoit pas la voix belle, a chanter un air felon la Mufique qu'il avoit publiee, & le Sr. Naude a executer fes dances Grecques & Romaines. Us ne pouvoient pa? fe difpenfer ci'obeir aux ordres. Mais comme fun & i'autre de ces Sa- vans s'acquite'rent afiez mal de leurs fonclions , ce qui donna matiere a rire aux Speftateurs en pleine Cour , ou cette Scene fut jouee : Meibom furtout s'en trouva fi cheque , que peu apres il donna de bons coups de point au vifage a Bourdelot. Mais celui-ci portant des plaintes a la Reine de I'affront qui (ri) Chanut /. c. pag. 92. Fellerus /. c. . und Staats Cabinet /. r. Jt. XL p. 6(5. Bibl. 125. p. 201. German, en 1728. T. VI, p. gi. (fc) Lebcn ChriftiiicC pag. 24. Bilcher- Tme L Hh ME MOIRES CONCERNANT qui Hu avoit etd fait dans fa Bibliotheque ; Meibom fut difgracie & oblige de quitter la Suede (*). Cependant Mr. I'AmbafTadeur Cbanut etoit fur fon retour en Suede, ou il etoit renvoi'e par fa Cour pour la raifon alleguee ci-defllis (a). La froi- deur entre la Reine & le Comte Magms faifoitunepartiedefoninftruftion. Bourdelot , pour effacer la memoire de ce qu'il avoit dit autrefois centre le gouvernement de France, avoit change de langage auflitot qu'il avoit apris que les affaires de fon Roi alloient mieux , & incontinent que le Sr. Chanut fut retourne en Suede , il s'attacha aux interets de la France : & la Reine de Suede a'iant etc obligee de dire publiquement qu'elle le voulok congedier pour detourner cette haine publique qu'on lui portoit (f); il dit a Cbanut , aue ce n'etoit point un conge qu'elle lui donnoit , mais que cette Princefle 1 cnvoi'oit en trance pour traiter de fa part de chofes fi importantes & ft avantageufes (|) , que Ton y reconnokroit I'afFe&ion de la Reine de Suedt pour (a) Chanut /. c. pag. igp-ior. (*) Voici ce qu'en dit Bocbart dans fa lettre a Voffius du 12. Avril 1653. (i),, L pauvre Mr. Meibom apres avoir et quelque terns a notre table & pret a fe voir Pr- cepteur pour le Grec de Sa Majefte", a et fort honteufement chaflfe de la table & du Palais indifid, caufd, pour avoir t aux prifes^tT* rS *p%teiTpn, qui bahet foenum in cor- tin... Pour moi j'en ai le cceur ft ferr< , que je crains d'en etre malade. 11 ne faut ici qu'un mot de travers centre cette Idole (Bourdelot) pour perdre un houime, Que vous etes heureux d'etre retourn fur vos pas, la oil nous nous quittames. . . . Quand j'en ferai delivr borum meminiffe juvabit: Et la Perfonne qui le croit le plus, connoitra quelque jour fon erreur, & aura un regret iuconfolable de s'^tre laifle" ainfi furprendre & n'avoir pas f$u quid diftent cera lupinis. (f) Cbrijtine , dit un Auteur, (2) difFerant toujours de renvoier Bourdelot, y fut por- t^e i la fin par un fennon du Chapelain Erici , qui , en preTence de tous les S^nateurs , dit 4 la Cour: que Dieu e'vomira un jour tous les mauvais Re'gnans &c. Ce qui e"im:t & ebranla la Reine, qui n'ofant pas fe venger fur le Pre"dicateur , au fecours duquel tous les Domeftiquesdes grands Seigneurs feroient accourrus, dit feulement: Vousau- icz pour Roi celui que vou? fouhaitez , mais il tirera vengeance du tort qu'on me fait.... Pour ajouter foi de pareilles Anecdotes il faudroit avoir des preuves. Mais Tauteur n'en produit point. (^ ^ n combinant 1 S circonihnces & la difpofition de la Reine en ce terns-la, on ne uroit douter que ces belles cbofes ne regardaflent le changement de Religion de Cbrif- iet &c Pimen- tine & le uio'ien d'introduire le Catholicifme dans le Roiaume de Suede. Non feulement tel voicnt Gal: Gualdo dit (i) que Bourdelot & Pimentel etoient du fecret de la r^folution qu'eux- mifes dans m emes avoient fait prendre ^ la Reine de changer de Religion & de fe ddmettre de fa Couronne & que Bourdelot fut envo'i^ en France pour fonder le Minifte're, fi elle pou- voit y faire fon fejoar apres I'abdication de fa Couronne: mais d'autres Bcrivains (2) raportent plus au long ce que Ton voulut que Cbanut fit en Suede pour I'avancement de la Religion Romaine, que la Cour de Rome fe propofoit alors d'introduire dans ce Roiaume. Voici comment Wicquefort en parle:,, Ceux de la Congregation qu'on appel- k de propaganda fide y aiant refoiu a Rome d'envoier en ce Roiaume -la trois Jacobins tra- fi) Tom^ i, num. 374. Epift. Mfc. Bibl. Am- (4) V"itt. Stri Mercurio Tom. VTU. pag. 8.44. Jitlodaiaenfii Remonftr. &c. & T. IX. p 346- &c. tficqttcf. 1. c. Liv. II. Cz) Ftlttrl Ot. Hanov. $. izy. pag. aoi. Seft, IV. pag- J> &c- cfr. Oger. phem pig. (j) Hiit Ui Qbriflina. pag. 13. jj. CHRISTINE REINE D SUEDE. 243 pour la France Le Sr. Cbanut remarquant a 1'entretien de Chriftine, L ' an ' qu'elle avoit toujours de la confiance en Bourdelot; il fe tint indifferent fans I653> prendre parti ni pour ni centre lui , puisqu'il voioit , dit-il , que c'etoit " une chofe refolue qu'il fortiroit de Suede, & que Cbanut 1'avok reconnu fort porte a fe donner au fervice du Roi de France. Bourdelot pretant ainft tour a tour fes offices aux Coursd'Efpagne & de France, toujours aux depens de celle de Suede (a) on ne fauroit nier , qu'il contribua le plus a gater ks meilleures & les plus heureufes difpofitions., que peut avoir une PrincefTe, telles que les avoit la Heine Chrifline. Au refte il avoit fait fi bien fes affaires , que non feulement il emporta de Suede de bonnes fommes d'argent, car fans compter tous les autres avan- tages, la Reine, a fon depart au mois de Juin 1653. , lui donna non feule- ment des lettres de faveur pour la Cour de France y mais lui fit compter dix mille Riksdales & donner une lettre de change de vingt mille pai'able dans fix mois. Le Prince de Suede lui fit prefent d'une chaine d'or avec fon portrait dans une boete couverte de diamans : le Prince Adolphe lui donna auffi le fien quoiqu'ils euffent tous deux une averfion mortelle pour lui: {a) F. Chanut I. c. pag. p6. 112. 127. 162. ? 189, traveftis , comme Miffionnires , firent prier Chanut par Guejfier Refident de France & Rome, de feconder leurs bonnes intentions? Cbanut re'pondit, qu'il ne pouvoit don- R , O nfeie ner retraite a ces Religieux, fans ordre expres du Roifon Maitre, qui fans doutene cbenat fur lui en envoieroit point , dans 1'^tat oil ^toient les affaires : qu'il jugeoit que c'dtoit rintroduc- une affaire domeftique, & qu'il y avoit du danger a hazarder, fous le nom & fous tion du car 1'autorit^ du Roi, une miffion qui feroit inutile. Que !e Chancelier Oxenflierna qui thohaimc avoit toujours tach^ d'^toufFer la mauvaife volont qu'il avoit pour la France, la fe- en roit clater en cette occafion , pour y rendre le nom Franfois odieux, & pour re- commander fa perfonne & fon zele aux Ecclt^fiaftiques du pai's:" que la meme rai- ibn qui avoit oblige les Suedsis a abolir 1'ancienne Religion , les obligeroit a maintenit la nouvelle, qui etoit fi bien dtablie dans le Ro'iaume, qu'il fembloit qu'il n'y en cut jamais eu d'autre: Que Ton ne fouffroit point, que pas un habitant fit profdlion dela Religion Catholique-Romaine, fi bien que parmi tant de millions d'ames, il n'encon- noiiroit qu'une, qui en cut les fentimens: Que Ignorance de la langue du Pai's s'op- pofcit abfolument au deffein qu'on formoit a Rome: Que la Cour de Stockholm n'etant pas accoutum^e de voir une grande affluence d'^trangers chez elle, ces Religieux nc paroitroient pas plutot, que leurs vifages nouveaux & inconnns exciteroient la curiofit6 de ceux qui voudroient favoir leur profeffion, aufli bien que le fujet de leur vo'iage: & que s'ils s'avifoient de parler de controverfes , cequi eft tres feverement defendu paries Joix du Ro'iaume, ils expoferoient leurs perfonnes a des perils tres-evidens , & 1'auto- rit^ du Roi a un affront inevitable: Que toute la faveur qu'on pourroit obtenir pour ux, ce feroit de les faire chaffer honteufement & avec fcandale: qu'avec cela la Cou- ronne de Suede auroit fujet de fe plaindre au Roi , de ce que fon Ambafladeur s'inge- roit dans les affaires domeftiques du Ro'iaume, & qu'au lieu de travailler a conferverla bonne intelligence entre les Allies, il donnoit afile & retraite a des gens qui ^toient capables de troubler le repos de 1'Etat, meme aupr^judice deslnt^rets de la France., .. Ces remontnnces de Mr. Chanut a'iant fans doute et trouvees convaincantes a fa Cour, & la France ne voulant pas, pour fon propre inte'ret, que Cbriftine fe de'mit de fa Couronne, donna a ce Miniftre des ordres fort preflans de Ten diffuader, comme ?ICKIS 1-e vsrrons ci-deflbus. Ilh 2 *44 MEMOIRES CONCERNANT lui: mais pour plaire a la Reine, il faloit 1'imiter (a). Malgre toutes ces *3_* liberalites Bourdelot eut atfez d'impudence pour debiter qu'il n'avoit rien ga- gne en Suede , mais qu'au contraire il y avoic depenfe du fien au-de-la de vingt mille florins (b) (*) & n'ai'ant pas la confcience bonne il craignit, que les lettres que la Reine lui donna pour la Cour de France, ne fuflent ecri- . tes a fon desavantage pour le faire tomber en difgrace. Toutefois Bour- delot revint a Paris fort prevenu de fon propre rherite. II y trancha du grand & voulut a peine reconnoitre fes anciens amis (f). Comme toute chofe change dans ce monde , dit 1'Editeur des Memoi- res de Chanut (c) ; la faveur , que le Sr. Bourdelot avoit aupres de la Reine de Suede 3 s'evanouit auffitot qu'il en fut parti La fuite en fut telle , qne fat ' ' if '9?i iff '<'\t'- 1 "1 ';' ) H - It'.fft 'I 1 ' (fl) Idem Tom. HI. p, 205. 206. Mem. de c. p. 189 &f 206. laHoufT. T. II. p. 350. (c) Mem. 1. c. p. 243. 254 f 255. (ft) Burman T. HI. p. 673. fc? Chanut. /. Singuliere faveur de Eourdelot au- pres de la Reine 5t cjmbicn d 'argent il emporta de SuMe. Vanite ex- treme de Eourielot & rabaiflement ds ce per- (*) VoJJius&crivit'dHeinfiusaumois de Mars i652.(i),, Bourdelotius gaudet titulo pri- , marii Arcbiatri honoribufque amplijjlmis. Nullus unquam Princeps majori exceptus eft , pompa. Qiiatuor Jcutatorum millia illi fingulis annis perfolvenda idque Jex menfibus ante- , quam tempus folutiony expiret. Etegit (iBidaliopro impenjis itineris quatuordccim florsno- , rum millia. Obtintt praterea domicilium amplijfimum inArce regia ., ferculaque accipit in- , numera ex culina regia. Vi,des quid non poffit impudentia gallica. Qiiis non jurct Dcsmo- , num fieri inftinStu , quotiescumque probus aliquis & prudens vir aulam ingreditur ? Ve~ rum de Us liberius aliquando coram". Dans une aucre lettre du lo.Juiliet 1653 VoJJlus dit au merae Heinfais: (2),, Tonforis ruftici filius abiit, evafit , nejcio aurone an diris onuftior. Valde aftive viaticatus illuc venerat : Auferet vero nimc plus quam quirt* ,, quaginta itnperialium inillia. Infinit as de i llo coram narr-alio fabellas n .. Un autre Ecri- vain rapporte a fon fujet: (3),, Bourdelotum Sued ob maxima* in ilium collatas liberalita? rt tes odio proj'equebantur. Ferunt enim illi centum millia thalerorum donata fuiffe , Sued- que quod exteris dabatur fuis molendinis fubduci nee immerito cndebant ". (]) Guy Putin ^crivit a Span (4),, notre maitre Bourdelot fe fait ici porter en chaife, , fuivi de quatre grands Eftafiiers. II n'en avoit par-ci - devant qvie trois, Jed e paucis , diebus quartus accejjlt. II fe vante d'avoir fait des Miracles en Suede: mais je penfe , que ce font de tels Miracles que ceux des JeTuites auj.apon. II a dit a un tie fes A- , mis, qu'il auroit 1'Abba'ie qu'on lui avoit proinife. Ne voilzk pas du Bien de I'E- , glife hien colloqu^ & dignement emploie"? Qu'ii faloit envo'ier un horn me en Suede & qu'il efpe"roit d'avoir la commiflion de cette Ld-gation. He bien, le Compagnon, ajoute Patin, n'a-t-il point bonne opinion de fa perfonne, pour le fi!s d'un Barbier de Sens'? Ne ferez-vous point ^toun6, voire meme tout ravi de joi'e, quand vous ,, 1'entendrez nommer, Mr. de Bourdelot, AmbafTadeur du Roi Tres-Chre'tien envers la Se're'niffime Reine de Suede. Voiia ce que vaut 1'ambition d'un homine, & un cfprit myftique, relevt^, mftaphynque , tel que celui la! Dans une autre lettre Patin dit:" Les Rteurs ne font plus du cote' de Bourdelot , j'apprens de bonne part , que Bourdelot n'eft point bien avec la Reine de Suede, & qu'il eft en grand danger de n'etre ni Ab- be", ni Ambaffadeur: qn'elle a e"crit centre lui a la Cour, & en ce cas-la, que devien- dra ce Palladia de bonne fortune, qui par-ci-devant etoit Barbier & fils dc Barbier: Qjti Tonfor fueras toto notijfnnus orbe. &c. ,, -Ouid fades iteritm, Cinnainc? 'lonjor enr. (r) P.urmar. Syll. Tom. III. pag. . I6S. cfi- Kni Stats Cab. $. XII. p. 72. (4) D.nns fes lettres Tom. I. num. 71. 71. & 74. jng 38i. ^c. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 245 Fa Reine n'en parloit plus qu'avec horreur & mepris. Elle ne voulut point L ' an du tout voir fes lettres , ni lui ecrire (*), Un jour que le Comte Magnus -- 6S3 ;_ deraandoit la permiffion a la Reine de pouvoir fe reflentir des termes inju- rieux dans lefquels Bourdekt avoit parld de lui , en paflant en Hollands & depuis qu'il etoit a Paris, & qu'il la prioit de ne plus honnorer de fa pro- tection un homme qui en etoit fl indigne ; la Reine lui repondit : qu'el(e ne le protegeroit nullement, & qu'alors elle ne le confideroit , que comme elle 1'avoit toujours fait , pour un hornme rempli de vanite , ajbutant* qu'auflitot qu'il e'toit arrive a la Cour , elle 1'avoit connu pour tel : mais qu'elle avoit voulu voir , jufqu'ou pouvoit aller fon ambition. Et comme ii avoit abufe de la grace qu'elle lui avoit faite j elle promit au Comte Magnus de faire ecrire en France , que Bourdekt n'eut point de Benefice , en confideration de la recommandation de la Reine en fa faveur. Le Prin- ce de Suede ne lui vouloit pas non plus de bien , puifcju'il fe tenoit fenfi- blement offenfe de ce qu'il s'etoit vante qu'il avoit rompu avec le Comte Magnus pour 1'amour de ce Prince , & le Prince Adolphe fe plaignoit auffi de lui, d'avoir public par tout, qu'il lui avoit fait fort la Cour, outre plu-' fieurs autres fotifes que Bourdekt avoit debitees pour faire connoitre juf- qu'oiraUoit fon credit a la Cour de Suede. Quoique tout bon Suedois euc etc bien aife , que Bourdekt ne fut pas recompenfe en France , il fut pour- tant aflez accreclite aupres du Cardinal Mazarln pour obtenir peu de terns apres 1'Abba'ie de Majfay en Berry. Mais un 'homme d'un efprit auffi re- ^ordfiot muant que le fien , ne pouvoit pas jouir longtems tranquillement de ce be- ^ Majfa nefice. II etoit fans celfe en querelle avec fes Moines & eux avec lui. fo caae Patin dit a cette occafion (a) : Bourdelot plaide fort contre fes Moines & c 5 , les Moines contre lui. II a eu peur de 1'impofition de leurs mains , & ,, afin d'obvier a ce malheur, qui pourroit arriver une autrefois , il va fe faire Pretre, afin que s'il vient a etre battu & bien frotte, il puifie faire faire le proces a ces gens -la , comme a des Batteurs de Pre'lats". A la fin il devint tout atrabilaire de corps & d'efprit, fee & fondu (f). Tel (a) Lettres de Patin num. 93. Tom. I. p. 118. (*) Un jour la Reine a'fant trouve' une lettre de Bourdelot dans un paquet qu'elle a- Cf q^cfo;, voit recu de Francf , elle la prit & la porta a fon lie's, & puis hi fit fentir a un de fe?y?/^ fit alors Domeiliques qui e'toit aupres d'elle, & lui dit: Ha, que cela fentla Medecine, & jel- d'une lettre ta la lettre fort loin d'elle, fans 1'ouvrir, ni la lire: & meme, envo'iant le Sr. du Fref-.de Bourdelot ne , en France , pour quelques affaires , dont elle avoit parle a Bourdelot avant qu'ii ^ coni ^'^ n parth; elie defendit a -du Frefne de lui en donner aucune connoifTance, difant, qu'elle fo.j-f jt ^ ne vouloit plus en aucune fagon avoir de commerce avec lui (i). fes nouvel- (*) Paiin ecrit a Charles Spon (2),, Bourdelot n'eft gueres mieux, a ce que m'en ont les. apris deux des Notres, qui 1'ont quitt^ pour fes- inepties. It eft tout atrabilaire de Tri ^ e c : tnt j, corps & d'efprit, foe & fondu. II dit qne tout le monde eft ignorant : qu'il n'y a jamais eu au monde de Philofophe pp.reil a Defcartes.... que tons les Mddecins d'au- jourdhui font des Pedans, avec leur Grec & leur Latin, & qu'ils n'ont pas 1'efprit de (^ Cf.'anut I. c. psj. 23^. 5c 240, (i) L. c. Lettre num. 152. a Spon. Till i 246* MEMOIRES CONCERNANT 'L'an Tel etoit ce mechant perfonnage , qui par la forte recommandation de Ton :653> Compatriote le Sr. Saumaife fut fi bien re^u a la Cour de Cbriftine pour le " plus grand malheur de la Sutde:& par ce qui a etc raporte ci-deffus deces deux hommes, Nicolas Heinfius a eu grande raifon de dire (a) qu'on etoit fortement perfuade en Suede , que par Je miniftere de Saumaife & de Bourdelot la Reine Cbriftine s'etoit perdue." Le portrait qu'a fait de cet Abbe Mr. P. Barman le jeune , revient a ce qu'on en a dit & lui reffemble fort (*) , auffi bien que 1'epigramme qu'un Jefuite fit centre lui de fon vi- vant (f). II mourut a Paris en 1685. par un accident funefte (). II prit une partie d'un morceau d'opium , qu'un valet inconildere avoit mis dans un pot de Rofes mufcates. Comme dans 1'etat de fon aflbupiflement on s'empreflbit de Te'chaufFer, il fut brftle' au talon par une bailinoire,- &n'en fen- (a^ Burman /. c. pag. 339. vo'iez ci deffus I'art. de Saumaife pag. 234. lot (V) DiCt. Hifl. par. Moreri art. Bourde- Tortrait dc Bmrddot. Epigramme co ntre de s'adonner a la recherche de quelquesreme'des non vulgaires, quorum novitate capian- tur f alliciantur &gri, qui volunt decipi. Ne voila-t-il pas un homme de bien pour un Abbe*. II dit, qu'ilfe gue*rira lui-meme, puifque les Me'decins ne peuvent le gue"- rir: ne"anmoins il doit craindre 1'hiver prochain, puisqu'il eil fi de'charne' : au moins fera-t-il beaucoup s'il peut gu^rir fon efprit : qui eft bien extravagant". Jl y a une lettre de Made, la Palatine fur ce que TAbbe 1 Bourdelot avoit dit, que 1'Efpe'rance e'toit maigre & que le DeTefpoir e'toit gras. Elle eft jointe a une autre que Mr. le Comtede Sujfy e'crivit a Made, de Corbinelli le 8 Mai 1671. (*) Bourdelotius Callus , natione Burgundus, dit Mr. Burman, (i) qui mirificamin aula ChriHin fcenam tune temporis egit, 3* quum earn nugis levibus, di&eriis nonnullis acu- tis , aliifque biftrionicis artibus , quas impudentia ^f popularis dicacitas , individuce ignorantia focice , comitabantur , inirum in modum infatuatam fafcinarat , plurimos viros egregios & folide do&os ex Aula Ejus deturbarat, interque eos Valefium noftrum, quern ut Padagogum traducere , & qui nibil aliud legerat , autfcire prater Aminianum Mar- celliuum fcf varias leftiones Cadiodorl: (ex quo infcitia ejus patebatyfe verb noffe ridere ? ferere jocos , qui Chriftinae plactrent , cor am ipfa Regina jattare ? effutire , aufut fuerat. In cujus fane~ bominis malignitate imaginem fuam ultra agnofcere debent nonnulla ejusdem nationis villa ac foeda Aularum Mancipia adulatoria, qui cum ex Milejiis qui- busdam fabulis ac fimilibus vernaculis cbartis yolufianis faceti ? ingenioji fafti , fed om- nium fcientiarum "fcf elegantiorum literarum rudes , nee niji levitate , arrogantia ac gar- rulitate confpicui Jint , mentis tamen virsrum doftijjimorum , quos fatuo Pedantium nomi- ne profcindunt , ,petulanter detrabere , f egregia eorum fcripta , quorum ne titulos quidem per tranfennam unquam infpexerunt , traducere fuftinent , Jed interim peritioribus genui- nam fe novce Arcadia progeniem ejje produnt. . . . (3). " (f) La void (3). BOURDELOTO ARDELIONI: Fama eft , ignaro quondam Jove , nomina multa Et fumjijje fibi munera multa Deos. Se trino imprimis jattabat Jlemmate Phoebus. Nam Medicus , Vales & Ciibarcedus erat. (i) Ehrmir. inPrxfat. ad Htnrici Valt/Ii Emen- Ait. & Critic. Libros. (z; Yid- JBurmanni Syll. Epift. Tom. III. p. 6+9, (3) V. MenagiatlAT, III. nn^t y repond. {>. 373. ou Mr. Mi- -CHRISTINE REINE DE SUEDE. 247 fentit rien qu'apres etre revenu de fon aflbupuTement. Peu de terns apres L>an Ja gangrene s'y mit, & il en mourut. Tout comme Cbanut avoit fait entrer Defcartes en correfpondance avec chrijiint' Chriftine , ainfi Ifaac Voffws porta le celebre Samuel Bochart a lui ecrire Ie attire5 *<' premier. Void quelle fut fa reponfe. **/ que fai defire avec pajjlon de pou- voir vous fore utile. A cette beure que vous me donnez occajion de vous fair e connoitre mesfentimens 3 & que vous itfavez temoignb lesvotres par une lettre pleine de termes Ji obligeans , je croirois commettre un crime , fljene vous rendois mes remerciemens. Jevous prie done , Monfieur , d* accepter ces foibles marques de mon affec- tion envers vous , gfo'e croire, que je fait tant d'eftime de vos grands merites p de votre profond J avoir ^ que 'fejlimerois a grandc jatisfatlion Ji je puis avoir celle de vous compter parmile nombrede mes amis. Si jepuis obtenir celade vous y je vous ajjure , que je ne vous donnerai jamai&fujdt de vous repentirde m 'avoir donne" vo- tre amittt , puifque je ne vous denier ai jamais la mienne. Per met- tezdonc que dorenavant je me vante de cette conquette^ p qflurez- vous que vous tfyperdrez que fort peuipuifqitene 1 change vous aves acquis Feftime & raffettionde Stockholm le 5. Chrrfl/nP Oftobr. 1650. WtyfffK* II Ah .' nimium eft , intuit , fupernm Pater : eligat unum De tribus : una jufficit ara Dee. Obtrettare nefas : fed quid retineret Apollo Dudum animi pendens bajit, & bceret adbuc, Bourdelote, eademfors tua, non labor idem : Nempe , trium fupereft optio nulla tibi. Negligeris Medicus: Votes contemneris: Ergo Vd nullus pofthac , vel Citbarvdus eris. L'an ft a lequelfe trouve en votre Juite. Je lui com- mande de retournerjurjespas P defe rendre en Hollande pour y attendre mes ordres pour un plus long vo'iage. Jefuisfacbe' que Jon inconfiderationm "'oblige de lui ordonner pour Ja difgrace unvoia- ge qtfautrefois mon fer vice me lui a fait propofer. J^ai toujours eu le dejjein de renvoter en Angleterre ? en Efpagne pour faire des recherches pour augment er & embellir ma Bibliotbdque , mais dans ce t ems-la je rfavois pas P intent ion que fai maintenant^ & je vous prie de croire que perfonne n'a travaille aja perte que Iui-me"me 9 5? vous trouverez mon bumeur dljpojee de la forte 5 qtfaucun ne pourrafe vanter tfavoir le pouvoir fur mes inclinations. Elles fe portent toujours ou je trouve le merit e 3 P quandTon a eu part dam mon eftime , je nefuls pas accoutume'e de m'en dtdire 3 ft ce rfejl qu'on . ' j-) . (a) V. Huet /. c. png. 72 ? 105. (*) On le voit dans les re"ponfes de Bocbart Vojjius dont les originanx fe_ confervent V.l'Appcnd. encore dans la Bibliotheque des Remonftrans 4 Amflerdam (i). Nous en donnerons auui. XVI. une ci-deflbus, oil, entr'autres chofes, il fait e"clater fa jole d'avoir re^u la premiere lettre de la propre main de la Reine, & marque la raifon pourquoi il ne pouvoit pas venir auflitot en Suede. Ci) V. aufll fes autres lres XIV t Cal, Dec. itfjo, & dii 13. Mars xtfji. Tomo III, opei. Btcharti p. izji CHRISTINE RE INE DE SUEDE. 249 qu 'on s*en rende indigne par quelque faute. Fenez done fans cram- L ' an - te P croi'ez qu'il tfy a perjonne qui eflimera au plus jufle prix vo- -* 52 '_ tre nitrite que moi Chnftme. On remarquedanscette lettre la refolution qu'avoit prife Chriflinede cha- griner Voffius en le renvo'iant fur fes pas , pour demander pardon a San- maife, qu'il avoit deflein d'attaquer dans fes Ecrits , on centre lequel il de- voit avoir deja ecrit quelque chofe , comme on 1'avoit fait croire a la Rei- ne (a). Nous avons parle ci-devant de la fource de cette querelle , pour la fin de laquelle FoJJlus fouppnna Bourdelot d'avoir fuggere a Cbriftim de lui impofer cette amande honorable (*). Tout cela ne devoit en rien regarder Mr. Bochart. Auffi e'tant arrive' a Bourdei* Stockholm il fut reu fort gracieufement de la Reine , qui lui donna des f lf quc marques publiques de 1'eftime qii'elle avoit pour fon erudition (f). II eft 'eut pas vrai qu'il y vint dans des circonftances , ou il ne trouva pas tous les agre- ' mens, auxquels il avoit lieu de s'attendre. La fant^ de Chriftine chancel- , loit. Trop ^application a 1'etude y car elle y paflbit les nuits entieres , na lui avoit echauffe le fang. Bourdelot fon medecin 1'avoit oblige a rompre & tout commerce avec les Gens de lettres dans 1'efperance de la gouverner feul. Malin qu'il etoit , il ne vouloit pas que des Perfonnes folidement fa- vantes entraflent dans la confidence de la Reine plus avant que lui. H redoutoit Bochart , & c'efl pourquoi il tacha de le chagriner & de lui jouer de petits tours (). Entr'autres, Bochart devoit lire quelque chofe de fon Phaleg dans une aflemblee , ou la Reine avoit dit qu'elle vouloit tre. Le jour fut pris pour raflemblee. Mais Bourdelot qui difpofoit de 1'efprit de cette Princefle, & qui vouloit 1'empecher de faire cet honneur a Bochart, lui tatant le poulsle matin du jour de cette afTemblee, lui dit, qu'elle avoit de 1'emotion , &; qu'il faloit qu'elle prit un remede. La Reine ai'ant fuivi 1'or- (a) Menagiana Tom. I. pag. 350. refti- Niceron Hommes ill: T. 7. p. 53. Huct /. fi au Tome III. pag. 386. c. pag. 155. (fc) Olivet Hifi. de FAcad.>Fr. pag. 394. (*) VoJJlus en e"crivit a Heinjius le 19. Jui!. 1652 (i) Procul dubio Aliptes Hie aliquod o-o Elle s'in forma feulement le lendemain, comment la chofe s'e'toit paffee. Mais cela ne fut pas capable de confoler Bochart de la piece que Bourdclot lui avoit jouee. II s'en plaint ame'rement dans une lettre a Voffms (a) &dit entr'aucres chofes : J'ai lu le principal du Phaleg devant trois fortes d'au- diteurs: les uns do6les & judicieux, qui en ont temoigne de la fatisfa6tion beaucoup plus que je n'efpe'rois, & de ce nombre a e'te en certaine aclion la Reine elle-meme . . . d'autres ignorans & gens de bien , qui ont fuivi le branle de ces premiers: d'autres bref ignorans & malins, qui ont fait leur poflible pour le decrier, mais n'ont fait que de fe decrier eux-memes, & s'attirer la jufte colere des gens d'honneur , qui les regardent comme mon- ftres, mettant Bourdelot dans cette derniere clafle. Cela n'empecha pas pourtant que Bochart ne fut toujours vft de bon ceil de la Reine. I! rendic meme de bons offices aupres d'elle a fes amis pendant un an & plus qu'il fejourna a Stockholm (*). Ce fut a la perfuafion de Chriftine qu'il fe init k travailler meme en Suede fur fon Hierozotcon on I'hiftoire des Animaux de I'Ecriture (ft). Bochart lui te'moigna aufli, quelque part, fa gratitude, des bons Manufcrhs Arabes qu'elle lui avoit fournis a ce deflein (<:). Cet ou- vrage & fon Phaleg & Canaan , qui font les deux parties de la Ge'ographie facree , font remplis d'une erudition prefqu'inconcevable , ont acquis a Bo- chart une reputation immortelle. 11 partit de Su&de avec Naude , a la fuite de 1'Ambafladeur Cbanut , au mois de Juillet 1655 ( ^ e K^ nie celebrex longo memorantur in tcvo ,, Vix dues, & in mundi partibus oppojitis : t> Una Noli Regina , Jacris pridem inclyta libris t Altern in dt&oi car dine nata Poll. f ,, Quas fe contuleris , qitamfit praftant'", Orbem ,, Ouce regit jtrftoum , carmine dijct brevi : ,, Ilia docenda fuis Salomonem invijit ab oris , Undique ad hanc dotti , quo doceantur , einit. Id Ton remarquera en paffant , que (I Mr. de Voltaire cut kl cette Epigramme , oa s'en fut fouvcnu, il fe feroit t lon " u &O* Guftave fucceileur de Chryttne ; c eit un rait entierement ignore en Suede , que les Auteurs des Acta Literaria Suecia , de 1'aveu meme de Mr. Niceron (i) ont refute d'une maniere invincible. Voici en abrege ce qu'ils en one dit (/) : Si le foin d'elever le jeune Prince Charles fut des le commence- ment de 1'annee 1660 confie par le Roi fon Pere a Mr. Figrelius Gripen- blelm: fi les Tuteurs de ce Prince, apres la mort de fon Pere, qui arriva la meme annee, Ten jtigerent capable: fi ces Tuteurs favorifoient fi peu la Religion Catholique-Romaine, qu'ils ne permirent pas meme a la Reine Chriftine , qui etoit en ce terns-la a Stockholm , 1'exercice public de fa Reli- gion : s'il ne fe trouve aucun veflige dans les regicres des Archives , ni dans les Inftru&ions du Comte Tott, qu'il en dut faire la propofition a Huet: & fi ledit Gripenhielm a toujours refle Pre'cepteur du jeune Prince a la facisfac- tion de tout le monde ; avec quelle vraifemblance pourra-t-on avancer , que Mr. Huet) homme favant a la verite, mais Catholique-Romain de Reli- gion, auroit pu etre appelle, d'un confentement commun des Tuteurs & du Senat de Suede , pour donner 1'education au Prince & diriger fes etudes? C'eft done en vain que Huet pretexte 1'aprete du climat&de la Nation pour n'avoir pas voulu accepter la place qu'on lui deftinoit (g). II a pu aifement la refufer, puifqu'elle ne lui a jamais etc offerte. Cependant il eut 1'ho- neur dix ans apres d'etre nomm6 fous-Precepteur du Dauphin de France fans (a) Huet I. c. p. 107. Olivet I. c. p. 394. item Eloge Hiftorique de Huet dans les Hue- tiana. (fc) V. ces Ecrits dans Tilladet Differt. T. I. pag. 1-36-194- (c) Olivet /. c. pag. 396. au- ;I Ji .! ^ Huet /. c. pag. 232. ? Huetiana /. c. Mem. des bommes .ill: T. I. pag. 53. ? 60. (/) A6la liter. 5"tted fl?zw. 1723. p. 466. ?c. it. pag. i86.fupra. (g) Huet /. c. pag. 232. (*) Voici ce paflage traduit en latin: ... ,, Et cibus ipfe per Ferbum Dei & orationem p a {f affe d'O- ,, confecratus, Jecundum illud ipfum quod materia conjlat , in ventrem aliit f in receffum r igfne centre ., ejicitur" f en Francois : . . . Si tout ce qui entre dans la bouche va au ventre & la Tranffub- puis eft jette au retrait : aujjl cette viande qui eft fanttifie'e par la parole de Dieu & par la ftantiatiou. priere , felon ce qu'elle a de materiel va au ventre f eft jettee au retrait, . . (i). (i) Rappottc par Tillafat 1. c. 254 M E M O I R E S C O N C E R N A N T I65 ' Autres fa- commerce autre appui que Ton rnerite (a). Neuf ans apres il publia fon excellent II- vre, la Dsmonflratim Ev angclique 9 qui lui fit beaucoup cfhonneur dans les pais etrangers , mais lui attira plulieurs adverfaires dans fa patrie (Z>). H fe loue beaucoup de ce que cet Ouvrage avoit trouve' , entr'autres , 1'ap- : probation du celebre Samuel Pufendorf, qui fur ce fondement I'avoitexhorte a travailler a la reunion des Catholiques & des Proteftans , faifant compren- dre par une lettre a fon Frere Efaie Pufendorf, (c) & apres a Mr. de Feu- quieres Ambafladeur de France en Su&de , que fi la methode, dont 1'Auteur s'etoit fervi , etoit emploi'e'e a cette reconciliation , on pourrok s'en pro- mettre une favorable ifliie & qu'il fe rendoit prefque garant du Parti Lu- therien. L'Abbe Tilladst ajoute, que quoique la difficulte de Tentreprife parut devoir effraier Mr. Huet\ tant de belles apparences le raflfurerent , & qu'il jettoit deja le plan & le fondement die 1'ouvrage: mais que les prepa- ratifs que Ton faifoit des - lors en France pour la revocation de 1'Edit de Nantes , avoient fi fort effarouche les efprits des Miniitres & des affemblees des Proteflans en ce pais-la, qu'ils fe defierent des invitations amiablesque Huet leur fit faire, & que ce projet de conciliation fe diflipa comme tant d'autres de cette nature. Mr. Huet fe demit de fon Etfeche ftAwanches a caufe de fes infirmites & pafla le refte de fa vie au College des Jefuites a Paris , oil il mourut Tan 1721. age de nonante & un ans. On feroit en etat de fournir encore des particularites aflez interefTantes fur plufieurs autres favans Francois qui furent en ce terns la a la Cour de Chriftine , on qui eurent quelque commerce avec elle. Mais comme cela nous meneroit trop loin , & ne feroit pent - etre pas du gotit de tout le monde , nous en toucherons feulement quelque chofe , & nous indiquerons les fources oil Ton peut puifer une plus ample inftru&ion par raport a la liaifon que ces gens one eu avec cette Princeile. Du nombre de ceux tiui paiferent plus ou moins de terns en Suede , fu rent Rtybwl Tricbet du trefne Garde du Cabinet de Medailles & de Peintu- res de la Reine , d'ou il emporta plufieurs Pieces curieufes avec lui en France (f). Naudtsus ou Naudt prepofe a la Bibliotheque de la Reine , qui fut apres dpil^. On voit par fes lettres a FoJJlus & a Gqffindi (^?) que Chriftine en 1'appellant en Su&de a la recommandation du premier , fon ami , lui avoit e'crit elle-meme & avoit accompagnee fa lettre d'une bonne lettre de chan- ge : que lui ai'ant de grandes obligations au Cardinal Mazarln , comme Chef de fa Bibliotheque , ne vouloic le quitter qu'avec fon agrement : que lui & les autres Francois paflbient le terns fort a leur aife a Stockholm : que Chrijlme Co) .Olivet /. c. pag. 396. (b) Huet /. f. p. 284 &? 285. le} Tilladet /. c. dans la pref. J. XXXIJS {f? XXXP. & Tom. II. pag. 180-186. oufe trouve la lettre de Pufendorf a ce J'ujet. (d) Huet/. c. pag. nr. Burman I. c. Tom. ///. pag. 12 ? 659. Leben Chriftine p. 17. . Heinfii adPutean. in Epiflol. Maglia>- bechi Tom. I. p. 207. il eft dit dans le Supl: du Dit. Hift. de Moreri qu'il avoit hi Ri- UiotUcciire de Chriftine & qu'il s'ttoit ac~ quite dignement de cet emploi : mais le Umol- gnage de Heinfius pre'vaut id Juries Ch^vte- ana. ( I>A PP*"* r j. o num. XVII. tout au long ce que nous venons de dire, c* nous remarqueronsapres Mr. & xviu. Qmringius , que Naude devenu Bibliothecaire de Chrijline , s'y acquit les grandes connoiflances qu'il n'avoit pas encore , en arrivant en Suede (). Cahagnefius Fierville partit de Suede avec Mr Huet (Z>). Cbevreau devint Secretaire de Cabinet du Roi Charles Gi/fiave apres avoir ete an fervice de la Reine. II eft auteur de la piece nominee -le Genie de Chrijline , qui ne s'accorde gueres avec 1'Ode qu'il compofa a fa louange lorfqu'elle pafla en France (c). Duriez & Sorreau Medecin & Chirurgien de la Reine. Le premier tira les revenus d'un Monaftere de Bremen. II etoit favant , mais hableur & grand Comedien, .faifant parade de ce que d'autres avoient invente avant lui (d). Courtin 9 Piquet , Lager & Gilbert etoient Secretaires de la Reine. Le pre- mier le devint du Succefleur de Chrijline & puis (on Miniltre en France & au retour celui de Francs a la Cour de Suede. II eft connu par fa tradu6lion du Traite de Grotius du Droit de la Guerre & de la Paix (e). II y a deux lettres de Piquet ecrites a GaJJcndi de Ja part de Chrijline (f). Lager en ecrivit auffi une a Balzac , qui vouloit envoi'er un livre de fa fa'^on a la Heine. Gilbert devint fon Reildent en 'France , ou il 1'etoic encore en J<557 fe) (*) Ceri- (o) F. la preface des Oper. Conring. Tom. 111. pag. i. (fe) Huet /. c. pag. 114. (c) Chevrenu Osuv. mtlees I. Part. pag. 18. Colomef. Opujc. pag. iii.Fellerus I.e. J. 146. p. 211. Nouv. Recueil de harangues fag. 14.9- (d) Burman /. c. pag. 649. Chanut Mem. T. I. p. 142. T. ///. p. 308 Roberg Vies des Me'decins en Suede MJ'c. art. Duriez Me'wi. de la HouflTaye T. II. p. 250. (e~) Moreri DiEt. art. Courtm. Chanut T. III. p. 194. J.eben Chriftinae p. 18. (/) GaQcndi Epift. Append, pag. 336. (g) Ojuvres de Balzac T. 1. pag. 1023. Menagiana 2\ /. p. 41. (*) Ce Gilbert , dit Menage (i) , a vo it fait une Com^die , dont les vers Etoient tin R a iiferied peu libres. II la lut chez Mr. le Due de Guife, en pr^fence de la Reine , qui t-toit a-i a Reine toa- lors a Paris, & a qui elle plaifoit fort. Mr. Cbapelain fut le premier confult^ fur cette chant Cbape- piece. II fit honnetement connoltre, qu'il en trouvoit les vers un pen trop libres. La^' w ' Reine en demanda enfuite le fentiment de Mr. Menage. 11 re"pondit en bon Coiirtifa que c'e"toit une de? belles Comedies, qui eut paru jufqu'alors. Cette PrincelTe conten- te de fon approbation, lui repartit: ,, je fuis bien aife , Monfieur, qu'elle foit de votre gout: on pent s'en rapporter a vous. Mais pour votre Chaplain , que c'elt un pau- vre homme! II voudroit que tout fut Pucelle: " faifant allufion au Poeine de Chape- ' (I; I- c. pag. 44. 256 MEMOIRES CONCERNANT L'an. Cerizantes , celui qui fuplanta Hugo Grotius dont nous avons parle ci-def- 15 1 '__ fus (a). Un certain Marquis de Marigny , qui etoit prefent , quand Mr. Grotius prit conge de la Reine. Mr. Nemeitz dit qu'il pouvoit beaucoup aupres 4 d'elle. Cela ne 1'empecha pas de faire enfuite un portrait fort injurieux de cette PrincefTe : marque afluree d'un cceur bien noir () (*). Mais d'autres favans Francois en plus grand nombre , fans venir en v. I'Append. Sti&de eurent un commerce de lettres avec Chriftine. Nous ne pouvons pas numixx* &nous difpenfer de produire dans 1'appendix entr'autres , la belle Ode que Mad. la Comtefle de la Suze lui addrefla , & la lettre que le ce'lebre Mr. Blaife Pafcal ecrivit a cette Reine en lui envoi'ant fa Machine de la Roulette nouvellement inventee. Pour les autres Franfois nous ne nommerons que les plus connus , fans egard ni au rang ni a la chronologie. Mr. GaJJendi avoit fait deja trop de bruit dans le monde par fon grand favoir & fes autres belles qualites , pour- que Chriftine , qui etoit alors dans le fort de fes etudes put ignorer un fl grand homme. La lettre , qu'il lui ecrivit le premier. , fait voir , que Bourdelot lui en avoit ecrit & lui avoit donne lieu de le faire. On peut li- re cette lettre de GaJJendi dans 1'appendix. Voici la reponfe flateufe que num A xx" Chriftine lui fit. Elle eft du 27. Septembre 1652 (f). Mr. () V. ci-deflus pag. 77. it. Manes Cro- (If) Manes Grot. pag. 476. Nemeitz Ge- t'ri p. 471. Wicquef. Mem. num. 578. .pag. danck. pag. 151. Menagiana T. II. pag. 213. 321. Chevreau /. c. pag. 99. la'm fur la Pucelle a" Orleans, a la compofition duquel il emplo'ia trente ans, dont il fut railM par ce diftique du Sr. Mommor : Ilia Capellani dudum txpeftata Puella ,. Poft tanta in lucem tempora prodit anus. (*) C'eft dans une lettre ^crite de Bruxelles (i). C'eft ce meme Marigny qui a fou- tenu qu'un bon Poete n'eft pas plus ne'ceflaire dans un Etat qu'un excellent Cuifinier: ou qu'un bon Brodeuf felon la penfe'e de Pafcal : ou qu'un bon Joueur de quilles felon Malherbe , dit Mr. Cbevreau (2). ((f) C'eft la veritable date de cette lettre ,. comme on le voit par la premiere lettre, qui eft du mois de Juillet de la iiifime ann^e, que Mr. GaJJendi Ecrivit a Cbriftine. Mrs. Malberbe , Colomits & PAuteur du Nouveau Recueil de Harangues fe trompent done , en citant cette lettre de Chriftine coinme ^crite en 1642. Au refte Malberbe dit au fu- jet de cette lettre de la Reine : (3) qu'elle eft d'un langage auffi pur , que s'il ^toit re'cemment forti de la Cour de France. On s'appercevra fans doute, ajoute-t-il , que les mots ejlime & ejlimer y font fr^quens : mais il faut penfer aufli , que c'eft une Reine qui e"crit, & d'une maniere trop facile , pour s'arreter a I'e'xamen des mots, que fa plume a trace's. Cette forte de negligence femble meme convenir a une ima- gination auffi vive, qu'dtoit celle de cette Princefle". (i) EUe fe trouve imprimee dans 1'hiftoire de (3) y, Sa Grammaire Franp. pag. tgy 8c iss. la Vie de Chrijiir.e png. jg. &c. Now. Kti . de Harangues pag. io|. ' (i) Dans fes Oeuvres melees I, Part, pag. 99. CHRISTINE REINE DE SUEDE. JUIR. Fous tiesfigeneralementbonnore & eftimt de tout ce qui fe *'* trouve de perfonnes raifonnables dans le monde &p /'on par /e de vous avec tant de veneration 3 que Von ne pent fans fe faire torti vous eftimer mediocrement. Ne vous etonnez done pas jV/ ft trouve au bout du monde une Perfonne quife volt intereffee h vous cjlimer infinime'nt 3 5? ne trouvez pas Strange qtfelle ait fuborne 1 vos propres amis , pour vous faire connoitre qtfelle ne s^loigne pas de tout le genre bumam, lorfqtfil eft queflion de donner a votre merite une e/time non commune. Je refte infiniment obligee a celui qui vous a fait connoitre une par tie desfentimens d'eftime que fai pour vous, &P je lefuis d'autant plus , puijque ce bon office ejl un Jurcroit des autresfervices qu'il m*a rendus. Et encore queje con- feffe de lui devoir la reftitution de mafante fep de ma vie> & qtfil femble qtfaprds cela ilne puijfe rien ajouter ace que je lui dois\ ntanmoins favoue que Tobligation de m? avoir procur6 ces ajjuranr ces de votre eftimc egale tous les autresfervices dont je luljiiis re- devable. ^uffi efl-il vrai qtfil ejlfeul digne defe vanter de m'a* voir procur^ ce bien. filais je vous prie de me donner la fathf ac- tion de la duree de notre commerce : 5? puifqtfil ne m'eft pas per- mis tfejperer le bien de pouvoir enprejence vous protefler mon ejlimt fef ma bienveillance ) permettez au moms que mes lettres vous ajfu- rent desfentimens avantageux que je conferverai toute ma vie pour vous $p que les votres mepuijjent donner les confirmations de votre bonne volonte. Souffrez que mes lettres interrompent quelquefbis vos meditations fep votre loifir. Je vous confulterai comme FOra- cle de la verite pour m^claircir de mes doutes 5 fep Jl vous voulez prendre la peine d'inflruire mon ignorance , vous ne ferez autre cbofe, Jinon d" augment er le nombre de ccux qui favent vous ejli- mer dignement. Je vous prie de croire^ que j^obferverai vos pre- ceptes auffi religieujement que Pon eft accoutume d'obferver les do- gmes des plus celebres Legijlateurs. Jugez apres cela combien je vousferai re devable des lumieres que me donner ont vos belles con- noijjances fep crol'ez que je ne ferai jamais ingrate envers vous & queje veux cultiver avec foin Feftime & la bienveillance d\m Jt grand bomme que vous ties. CHRISTINE. Mr. Gqffendi meritoit les louanges de Chrlfl'me incomparablement plus qu'un grand nombre d'autres favans de ce terns- la, & on a raifon de fou- haiter , qu'elle n'eut jamais connu que des Perfonnes de fon caraftere. Sa Tme I. Kk pro- 165-2. 258 MEMOIRES CONCERNANT profonde connoiflance en toutes fortes de fciences & de literature eft trop connue pour en donner ici quelque detail. Le temoignage que la Reino lui 'en rend en voulant Je confulter comme \' Oracle de la Write , mit le com- ble a la haute reputation qu'il s'etoit acquife. ,, Quel honneur, s'ecrie Malherbe, pour la memoire de ce Philofophe, d'avoir porte fa reputa- tion jufqu'au fond du Nord & de s'etre attire , fans y penfer , 1'eflime & 5, I'affedtion d'urie Reine , qui n'avoit pas befoin de 1'eclat du fceptre pour tre la gloire de fon fexe & une des plus rares merveilles de fon terns , foit par la connoiflance qu'elle avoit des belles lettres en diverfes lan- gues, foit par bien d'autres vertus infeparables de fon augufle Perfonne !" On verra ci - apres par les autres lettres que Chrifline ecnvit a GaJJendi , que meme apres fon abdication elle ne diminua en rich de 1'eflime qu'elle avoit v.i'Append.pour lui. En attendant nous donnons dans 1'appendix fa reponfe a la lettre ji.xxii. prece'dente de la Reine a lui. Scarron ecrivit a Chrifline une jolie lettre en lui envoiant une de fes Co- medies: (a) Au fiecle d' Augufle, dit-il, on paioit en vers & en profe ,, ce meme tribut au Patron des beaux Efprits, defunct .Mecenas, quiaete un tres - galant homme. Quelque bruit pourtant que fon nom ait fait , il n'a fur Votre Majefle que 1'avantage de la primaute feulement, & je 3> gagerois le peu de bien que j'ai au ParnafTe, que Votre Majefle lui au- roit ote toute fa pratique & I'auroit fait enrager comme Votre Pere le grand Guflave auroit fait enrager fon maitre Augufle , s'ils avoient eu a difputer enfemble 1'Empire de 1'Univers." L'eloquent Balzac ai'ant regu en prefent de Chrifline une chafne d'or pour ies Ouvrages qu'il lui avoit envoies , il Ten remercie dans fa reponfe en di* fant : (b) que d'une meme CHAISNE Sa Majefle avoit fait & lie deux pri- 5 , fonniers. . . . & au fujet des vers (*) qu'il lui envoi'a, il lui dit: fachant, Ma- (c) Richelet. lettres Tom. I. pag. 232. ' Oeuv. de Balzac. T. /. p. 1024. &JV. , (b) Cette lettre eft du 25. Mars 1652. v. /*-\ L es V oici : (i) Ad Sereniffimam Chriftinam Reginam, Suecia cum illi Autor opuku- > Fabriciuin He f Scipiadem, Chriftina videbis ^ , ,, Maxima , Jed magno cor da minors Patre: n. xxfiu " > Guftavus tibi namque Pater: non Juliatantum 9 f rf ). Non babuit natum Jupiter ip[e par em. . Ad Eandcm Do^iJJlmain f DifertiJJlmam Principem : V. 1' Append. n. xxin. Hie te etiam invenies , Chriflina , bic Palladis artes, ( *) Quas colis , bic fummi fulmen utrumquc Patris : Gujtavus nempe ut dextrajic ore tonabat ,, Et tanto exemplo Cbarta fuperba mea eft. Nous donnerons ci-deflbus le bel Eloge, qu'il fit de Cbriftine, 'dans I'avantpropos Je fon Arijlipps. Mr. Menage en d^diant a Cbriftine les Poemes latiiu de Balzac , lui do- (i j E*k*c 1, c. Tom. II. paj. r CHRISTINE RE INK DE SUEDE. 259. Madame, que vous n'etes pas moins intelligence que vous etes liberate, ^' a * je ne puis que je ne tire encore plus de ^loire de votre jugement que de ... ;, votre don... puifque j'ai etc Joue de la bouche de Cbriftine 9 je n'envie ni a Claudien fa ftatue , ni a Petrarque fon couronnement ---- je prie Dieu de tout mon coeur de la conferver pour la felidte de fon peuple , pour ,, 1'honneur de fon fiecle & pour 1'exemple des autres Princes." A ces deux Beaux - Efprits , que Ton vient d'indiquer, comme ai'ant eu quelque relation avec Cbriftine , il faut joindre encore Mrs Adrien & Henry de VakiS) dont on a les belles Epigrammes latines fur la Medaille de cette Reine, que nous produirons ci-deflbus. De plus Henry de Falois addrefla a Chriftine la belle harangue qu'on a de lui , ou entr'autres Eloges il la kwe de les progres dans 1'Art de la Critique (a). Nous ne ferons que nommer Mrs Bernard Mtdonius, Bartbelemi d'Herhelot Triftan FHerwite, Chapelain, PoJJln Jefuite, Segrais, Benferade: (dont d'ail- leurs nous aurons occafion de parler ci-deflbus) en nous raportant aux Au- teurs cites an bas de la page , qui parlent de ces illuftres favans (b). Pour Roland Defmarets nous donnerons , dans 1'Appendice , la belle lettre qu'il v. 1'Append. e*crivit a Chriftine Tan 1650. ou 1651. & pour Mr. le Profefleur GariJJblles, num> XXIll> on raportera qu'il fe fit connoitre a la Reine par fon"Poeme Epique ou il chante les grands exploits de Guftave- Adolf he & qui auffi eft intitule YAdol- phique. Cbriftine re^ut gracieufement ce Poeme & fit beaucoup de carefles au fils aine de 1'Auteur , qui le lui prefenta. Le Pere en fut honore d'unc belle Medaille d'or & le fils fut amplement pai'e des fraix de fon voi'age (c). Mr. de Scudery en lui dediant fon Alaric , Lui parle de cette maniere : (d) La grandeur de votre ame & celle de votre efprit mettent autant Vo- treMajefte au deflus des Reines , que les Reines font au defTus des autres 9> Dames. . . je fuis oblige d'avouer , que le Nord a maintenant fa Miner- ve dans Stockholm, comme il y cut autrefois une Diane dans Tauris: que 1'ef- (a) Burman /. c. Tom. V. pag. 700. Sar- Menag. Poem, pag. 119-126. Nouv. Rec. ravii Epift. pag. 230. Burman Junior /. c. de Har. pag. 171. pag. 3 -log? p. 183. Emendat. Crit: (c) Bayle Dib. Hift. Crit. art. Gariflbles. p 53> de quinze cent francs (). Elle Tinvita plufieurs fois non feulement a la " venir^oir en Suede, mais auffi apres fon abdication^ elle le pria de la venir ]om^j^Bmxelles. Etant arrivee en Flandres elle lui envoi'a un pafleport en lui rifedant, qu'elle avoic fait la p!us grande partie du chemin , & que I'affecVion qu'elle avoit pour lui, valoitbien la peine, qu'ilfit le refte (c). Quoiqu'il cut beaucoup de veneration pour cette Princerfe , il s'emifa to.fii- jours , aimant trop fes aifes. II lui addrefla plufieurs de fes pieces de poe- fies , en Latin , en Francois & en Italien , qui fe trouvent dans fes ouvra- ges (d). La Reine, ccfmme il le dklui-meme, 1'honnora fouvent de fes nouvelles, & toutes les lettres qu'elle lui ecrivit, etoient d'une purete qui palfoit ia capacite ordinaire des Etrangers. Elle avoit etabli dans fa ville capitale une Academic , qui s'aiTembloit les Jeudis. Pour-lors dit Menage on s'afTembloit chez moi les Mercredis. Cela lui donna occafioh, en m'ap- prenant ce nouvel etabliflement , de m'e'crire en ces termes : Ma Joviale eft tres- humble fervante de Vttre Mercurials. J'ai tofljours crQ, ajoftte-t-il, que ce trait n'etoit pas d'elle : il eft trop Francois pour partir d'un Etran- ger ! (e) Mais ne pourroit-on pas avec raifon rire de ce raifonnement de Menage! II avoue que les lettres de la Reine etoiem d'une purete quipas- foit la capacite ordinaire des Etrangers, & il ne veut pas admettre, qu'un feul trait Franpis, pour etre trop Francois (quoique ni Jupiter , ni Mercury ne 1'ont jamais trop ete) pftt partir d'elle. II raporte pourtant plufieurs au- tres traits pas moins Francois , nimoinsvifs, que cette Princefle avoit la- ehes en fa prefence & quelquefois a fes depens (*) , & Mr. Huet , entr'au- tres , avoue franchement , qu'il n'avoit connu perfonne d'une vicacite d'eP- prit pareille a celle de Chriftine (f). Mais que ne fait pas la prevention qu'on a ordinairement pour foi-meme & pour fa Nation ! Tous ces Meffieurs & tant d'autres de leurs Compatriotes, & des excel- lens Ar tides me me, comme Bourdon , Nanteinl & Parife , fame ux Pein tres & Gra- (o) Manage Anti-Baillet T. VII. Part. 2i4.Menagii "Dedicat-Mifeellan. Reg. Chri- II. pag. 103. itinse. Menagiana T. 7. p. 201. PerrauU (&) Menagiana Tom. Ip. 201. Horn. iil. Part. I. pag. 146. (c) L. c. Tom. I. p. 87. 88. P 360. 1 ; .. (e) Menagiana Tom. II. p. 240. (d) Menag. Poem. p. 106.107. 170.207- (*) P. e. II dit lui-meme: (i) Cbriftine &ant a Paris, on parloit de mes Originesde Tra ; tg ri la langue FranfoiJ'e devant elle. Elle re"pliqua fur le champ : non feulement Mr. Mena- j e Chrijiine ge veut favoir d'oii vient un mot, mais encore ou il va. Nous .avons rapport^ ci def- fus un autre trait de Cbriftine fur fon fujet & on en voit de parelis dans les Menagiana. (f) C'ert Mr. Huet qui dit: '( 2 ) Tres novi atatis bujus doftifliwiAS fcf ingenii famace- Trois fi!!es lebratijfimas Firgines , Chriftinam Reginam, Schunpaniam Uttrajelir:am& Scuderiam: celebresdana quarum unicuique Ji propria fua lavs ^f peculiaris tribuenda fit , acris & ignei ingenii c ^f 1 '^ ,, celerit&te repentinifque motibus j>reeftitijje dixerim Chriftinam. (i) Mer.agiana T. II. p. 17*?. v. plura T. I. France Decemb. 1749- I- vol. p. 144, p. 41- 41. 5c 175, T. 11. p. 140. item Merture de (i) Huet Commentar. pag. zi?\ Kk 3 a (a) V. Lettre de Naiide* a Gaflendi 1652 214. 327. 358. 758. fife, fcf Tom. V. pag. dans I' appendicc. item Brenner Tbef. pag. 1 60 630. 635. 636. 696. 700. 741. 770. 771. fif 189. item Burman Syll. Ep. Tom. III. p. &c. Extreme K- Eieralice de Ckrijline. (*) La Reine auroit bien fait d'ufer de mefure dans fes libe*ralite*s. Surquoi Mr. Snr- rau, dans le reinerciement qu'il lui fit de la lettre qu'elle lui avoit e"crite, de Ton por- trait & de fa Me'daille d'or, qu'elle lui avoit envo'fe'e, parle de cette manure:,, Pote- ras , Domina, ifta feorfem diftribuendo plures gratiarum afyiones mereri. ^liquis di- cerct, manii oportuiffe ferere , non ipfo facco. Tuvero, liber alitate & magnificentia Ve- terum & recentiorum exempla non ttntum provocas, fed etiam fuperas , novamque bene- faciendi viam aperis , quam verendum non efl , ne nimis multi ingrediantur(iy.... (^uant d la Me'daille d'or dont nous venons de parler & dont Cbriftinc fit preTerrt a plutieurs Savans , elle y eft repre'fente'e au milieu avec le cafque de Minerve fur la te- te, regardant fixement un rameau d'Olivier, vis-a vis duquel efl ce mot Cbriftine. De 1'autre c6te" on voit le Soleil r^pandant tout au tour fes rai'ons & occupant tout le re- vcrs fans aucunc infection (2). Mr. Sarrau aTant & Swn, p. ii. iz. 6t if. F, ur>nani Syll. Tom. Mt-na&ana Tom. J. pag. j/e/ CHRISTINE REINE DE SUEI>E. 263 Mr. Claude Sarrau, Confciller au Parlement de Paris, nefutcertainement pas Imperio digna bcec fades armata Minervas Solis ab Eoo cardine , ad Hejperium. Sol radios expande tins : Ecce I cemula terrif Cbriftina fulget lumine inocciduo. Quatre autres Savans a qui Cbrijline fit enfuite preTent de la mSme M^daille , eh te*^ raoigii&ent aufli par ces vers leur reconnoiflance , & en premier lieu Henry de Valw. Sol nova Vandalicte Jlupet ad miracula term Etfe Chriftinae cedere Pallas ait. Pbcebus Hyperboreas cum Pallade cejjlt ad oraf '*H Hinc vejlros vatum turba ciete Deos. M Nunc meliora licet jperetis Suecula , Do3i : dltera jam Pallas, Pbcebus & alter crit. Vnum nonpotuit Chriftinam abfolvere numcn: Perficer.e illam Dii vix potuere duo. O^jAtet v yt &ef ta-rett iroXis : cpper ,, NS> e^5 tufiircH " O^mv , epps 'PoiJaj. JlrQoas cum Sol lujlraret lampade terras Chriftinam adjpiciens, tun' mibi Pallas? ait. Volti d'autres difliques de fon frere Hadrien de Palais. ddfpirat ftudiis jam non Tritonia Pallas Chriftina , ^ pacem bellaque Virgo gerit.- binos Soles quondam atbero*vifos? Et babet f Solem terra Suecufuum Splendors cequiparat Solem , virtute Minervam Chriftina , ^ binos induit una Deos # Altera jam Pallas fub feptem nota Trione : * Nunc te ? Tritonem conde, Minerva, tuum, j, Soils babet radios Majeftatemque corufcam Chriftina, p Magnce Palladis ingenium. Void les vers de Mr. Huet au rngme fuj^t : Pbcebus Chriftiraae pi&os in imagine vultut Utvidit, tales mijit ab ore fonos : Chriftinara quisquisfe pingere poffe putavit Pingere Jeque mea bic lumim pojfe putet. Menage loue fort 1. c. 1'^pigramme que Mr. Guiet a fait a ce meme fujet^ quevoici Hxc paces , bar. bella gerit , velut altera Pallas: Hcc radii gelidam, Jolis vice, temperat MEMOIRES CONCEftNANT ^' nn pas du nombre de ces ingrats. Ne avec un efprit aife & penetrant , il p 1652 ' approfondit les belles lettres & les fciences. Ses Lettres imprimees font aflez voir qu'il etoit en relation avec plufieurs favans du premier ordre. Cbrijiine qui aimoit beaucoup a recevoir de fes lettres (*) ne manquapasde lui repondre. Voici deux des reponfes qu'elle lui fit : T\AOnjleur. Je vous demand e pardon de ce que je ne vous ai pas ***- plutot remercie de cet excellent prefcnt que vous m'avez envott par le $r. Vbflius, & de ce que je rfaipas plutot fait reponje a la lettre que vous avez pris la peine de rrfecr'ire. Ne croi'ez pas, Monfieur , que je Jois meconnoiffante envers une perfonne qui vta voulu donner part d?unfiprecieux trejor 5 qtfeft celui que fat refu de vous : ni que je fois infenftble cnvers lei ojfres d'affettion qityn hotftme de votre mirite en afaites par une lettre ft civile. Je vous con- jure de croire , que jefai eflimer Tun p Fautre commeje dois 3 5? queje ne me rendrai jamais indigne ni par ingratitude , ni par injenfibili- te 5 de re/lime que vous temolgnez avoir pour mot. Et puifque vo- tre civilit^ s'eft Jervi de cestermespourm^ajfurer de votre affe^lion^ par lefqueh) vous me voukzfaire accro.ire que vous vous etes donne a moi; je vous dirai que fefl avec joie que je vous accept e au nom- bre des miens > & ce Jera dorenavant avec votre permijjion que je me vanterai de cette acqulfition. Je vous prie de croire que fufe- rai du droit que vous itfavez donne jur vous > avec la re/erve =? la difcretion que je dois avoir pour un bomme de votre merits : 5? je ne vous ferai jamais fentir , combien je fuis abjolue , qtfen vous commandant de changer la qualite de Jerviteur en cellc d'ami. Ceft en cette qualite que je vous accept e entre les miens 3 &p tfeft a ce feul egard que je pretem d'exercer le pouvoir que vous nfavez don- ne. Du mme en grec: 5, 'Etpww ye waAfjuav tytptt u ,, K.O.I irvpt tut V.l'Append. II y a d'autres pieces de poefie qui fe raportent au me'ine fujet 6c dont quelques-ures num. xxiv. doivent Stre mifes au deffus du Portrait de Cbrijiine. Nous les produirons dans l'.Appen- Lettres con- dice. oH/?"-' (*) Dans lellecueil de lettres de Mr. Sarrau de la Bibliotheque de Gudius, non feu- dans I'eVe- ' ein ^nt fe trouve I'Epiftola deilicatoria Is: Sarravii ad Reginam Chriflinam idib: Sept: A. cueil de Mr. 1644: mais aufll trois autres de fes lettres 4 Cbriftine du 3. Sept. 1650. num. 244. da Surrau. 17. & 25. Mars 1651. num. 262 & 265 qu'on donnera dans 1'Appendice. Les deux r- v. 1'Apend. ponfes de Cbrijiine que nous aliens infe"rer ici , s'y trouvent and) a h page 239 & 256. xx'vi XXV> Ilum * 2 ^5 ^ 2 ^ c> ^ e m ^ me H ue ^ a ' e ^ re ^ e condolence pag. 277. num. 277. CHRISTINE -REINE DE SUEDE. 265 iie. SiaprJs-cela iljne refic encore Fbs deux lettres, queje refus bicr^ irfont donnt ties mouvemens fl diver* que je me trouve eurpecbee h vous expri- mer les fentimens qtfelles nfont caufes. Et puijque vous avez prh la peine de me rendre de fi bons offices 3 fans que je les a'ie merit e; je me vois engagte de vous en tenrngner ma reconnoiffance. Je de- firerois de pouvoir lefaire dignement par la prtlente , encore qu'c je ne pretendepas nf acquit er .a flbon marchd envers vous. ye vous protefte que je rfignore pas combien je dois eftimer la gn&r$fite qui uvus porte a travailler avec tant d'ajfe&ion ajervir une perfonne^ qui en eft ft indigne que moi 3 puijque par aucun mtrite je rfai pu pri'tendrc a vous obliger dc pt^endre tant tie peine pour mes affai- res. Fous nfavez voulu ttmoigner par facbat de mes Manujcrits que je m ntttois pas trompee , hrfque j\Jperois de votre gMrofite feffet des proteftations que vous m'avez faites, jfe vous prie dc sroire celle que je vous fait a prvjent & de ne douter point de la refolution que fai prije de rtcbercher avec Join les occajions par /ej- quelles je fuifje ntacquiter envers vous. Si je k fais jamah au point que je le defire , je wfaflure que vous rfaurez point jujet de vous repent ir de m * avoir donne quelque lieu dans votre affeffion. Au refle Monfieur je vous dirai touchant la Bibliotbeque que vous marcbandez pour moi 5 que ceux qui Jen veulent de f air e font in- juftes d'en demander une Jommc qui etonneroit tout autre que moi* Je vous laijfc la difpofition d'accorder avec nix gP "Vi*-i'. *i ; ' ., >">* Adame. Je fuis toucbee fi fenfibl'ement de la pert e que vous a- vezfaite de Mr. Sarrau que je ne fuis $as capable de faire & prefent autre chofe pour votre conjolation que de joindre ma dou- leur a la votre gp de plaindre avec vous &P tous les gens de bien un perfonnage d'un ft rare merite. Ce regret augment e encore davan- tage lorjque je penfe a PqffeUion qtfil a toujours con fervee pour mon fer vice 3 p que pendant fa vie je rfaipas eu occafion de M temoigncr, comme feuffe Joubaite 1 fapajjion que fai de.nfen reffen- tir. Et c'eft ce qui ni "oblige a vous convier a me donner lieu de fai* . re connoitre afes procbes la gratitude dont fa mort a prevenu les effects: & que fate fuje't de me juftjfier envers la memoir e tfun jl digne bourne de la vecmnoi fiance que je devoisafon zek & afon ' CHRISTINE REINE DE SUEDE. 267 amittt. Vous trouverez en moi uneparfatie inclination a vousgra- L ' am tifier & la volontt de vous tire conftamment I6sr \ a Stockholm ie i. CM/tinc. Juillet 1651. A 1'occafion de ce qni eft dit dans les lettres precedentes de la Biblio- o>iieftioiii theque de Mr. de Mefmes, que Chrifiine vouloic acheter par le foin de Mr.deMwSi Sanaui on raportera ici quelques particularity's des Collections de Livres & cries &de' des Manufcrits dont fa Bibliotheque fut compofee. Siloff Un des principaux qui cut commiflion d'en ramafler de toute part, fut que de le celebre Job Ludolpbe , qui favoit jufqu'a vingt deux langues (a). 11 fut ^""' charge de fe rendre a Rom* & de faire tout fon poffible pour trouver & ravoir les Acles hiftoriqties & les Chartres publiques touchant le Roi'au- me de Suede , que Jean Magni & fon Frere Olave , Archeveques d'Upfal avoient emportees avec eux en fe retirant en Italic du terns de la Refor- mation (Z>). Job Ludolphe, rapporte lui-meme, & apres lui le Sr. Juncker, qui nous a donne fa vie , que du terns qu'il etoit a Paris , gouverneur de Mrs. les Barons de Rofenhane , fils de TAmbafladeur de Suede a la Cour de France, celui-ci ai'ant eu ordre de la Reine , d'envoi'er pour cela a Rome une perfonne intelligente dans 1'affaire , il choifit notre Ludolfe , le- quel muni de bonnes lettres de recommandation , arriva a Rome Tan 1 649. Quoiqu'il ne fut pas fort heureux dans les recherches qui faifoient le prin- cipal objet de fon voi'age , (car on I'afllira que les dits Manufcrits ne s'y trouvoient plus, mais avoient ete tranfportes dans les Archives de Pologne., du terns du Roi Sigifmond , iffu de la Famille Roi'ale de Suede} Ludolfe ne laifla pas pour cela de mettre fon voi'age a profit & de faire de bonnes ac- quifitions qui accomode'rent la Reine. De retour a Paris , il alia I'anne'e d' apres en Suede , avec fon frere George Henri. II fut fort content de la reception gracieufe que le Chancelier Oxenftierna lui fit a fa Maifon de carapagne & d'avoir vfl. la Reine. Mais comme la Cour de Cbnftine commencoit a changer de face & que par le favoir faire du Sr. Bourdelot, les favans n'y etoient plus tant confideres , il abandonna le deflein qu'il a- voit d'ecrire I'hiftoire du Roi Gujlave L Bifaieul de la Reine & partit de Suede 1'an 1652 (*). Ce 00 r. Morcri Di&. art. Ludolphe. pag. 45-54. item Celfii Vile Job. fcf Qfavi (fc) Ludolfi Hifl. JEthiop. Comment. Protsm. Magni paffim. Curieuf. Biich, u Siaats- Cab. L p. 29. ad. aim. 1649. Junckcr. vita Ludolfi c. . IX. p. 63. (*) Huit ans apres, favoir en 1659. le Roi Charles- Guftaxie le nomtna gouverneur de fon fils naturel le Comte Gujlave Car If on qu'il avoit eu de la bdleBrigitts Alerts dcNu- reriberg (i). Nous parlerons de ku dans la fuite. Quant Ludolfe il retourna en Sutide 1'an 1675. charge des commiflions du Due de Saxe-Gotba, au fervice duquel il e'toit alors , & y fut engag^ jufqu'd fa mort (2). ( i) Moreri DISf. art. Charlei'Gzfiave. (2) Jtwckfr I, c. pig. 51. 5c pi, LI 2 MEMOIRES CONCERNANT I/an Ce que Ludolphe avoit pu ramafTer en Italic n'e'toit rien en comparaifon des Livres & des Manufcrits que Kicoks Hc'mjius & Jfaac Vaffws (*) ache- te'rent pour le fervice de (.kriftine. Le premier y'fut envoie expres com- me nous le rapporterons ci- apres , & yojjlus roda par tons les Pats* Bas 9 ^ar la France & par \Allcmagne , oil rien ne lui echappa de tout ce , qu'ii crut digne de la curiofite de Cbriftine , en fait de Livres & de Manufcrits. ' C'etoit encore 1'epoque , oil tile fut fort appliquee aux etudes , & alors Vcjpus qui la fortifioit dans la langue grecque , etoit pour ainfi dire en fa- grajtfe faveur aupres d'elle (a). II eft done a prefumer qu'il avoit carte- blan- che de Chrijlinc, pour lui faire fes commiflions a tout prix. Audi trouve-t- on qu'il n'a rien epargne , & on fe perfuadera fans peine , que perfonne autre que lui n'auroit tichete deux Manufcrits au prix qu'il le fit. C'eft Jam* btichi Chronicon Babyhmcon & Phlhjlcrgn An'mm Hijloria Ecchjiaftica, quidoi- vent avoir coiite cent foixante mille ecus. On auroit peine a fe 1'imaginer quoique le rapport en foit fait d'un favant voiageur (f). Nous avons enco- re d'autrcs indices de pareils achats de Voffms. Etant a Paris il traita avec Mr. Petau Confeiller de la Cour de fa Bibliotheque, qui lui venoit defeufon Pere (Z>). Jl accorda avec lui pour la fomme de quarante mille livres, dont il delivra aufli-tot trois mille comptant , a la charge toutefois , qu'elles fe- roient perdues , fi la Heine de Sutde ne vouloit pas tenir le marche qu'il avoic (a) Cefl I'expreJ/lon dont fe fert Manage pag. 164. dans fon Anti-Baillet T. Vll. P. n. p. 103. (fc) V. let lettre de Patin a Spon en 1650.: l r . Huet I. c. p. 71. f 104. Efprit de Patin Tom. I. p. 334. I/engage- ment de fijjtus au fervice de Cbrijline. (*) La lettre de treinsbem & VoJJlus dn 13. Oft. 1648. nous apprcnd que celui-ci fut alors appelle" en Suede. Freimbem lui e"crit: (i) Sereniffima ? optima Regina mea bi- nas bodie mibi literas qftendit , clarijfime Vofll, alteras tuas , alteras lenerandi Parentis tui, utrafque ad vinnn Nob: Joachimum Camerarium fcriptas. Favet ilia jam olim eru- ditioni nominique tuo, f cum Jludia retta, bifque cxcultos homines incredibili quodam affeftu profequatur , vebemejiter illi placuit ingenuitas tua , quod pralentiam operamque tuam tarn promte oltitlifli. Siquidtm igitur , quemadmodum Jignificajti t bnc tibi vidza- tur accedere, fe dicit effttturam, ut, Jive manere , five difcedere , tuo commodo mails , ncqite molejlice te pcenitere neque laboris merito debeat, quern ea de caitfafufceperis. Hac ipfius mandatufcripfi. (|) C'eft Aclamits Ebertns Profefleur a Francfort fur YOder fous le nom d'Auhis A- prmius dans fes Reife-Befclreibwigen, ou Voi'ages d'Allemagne, des Pa'is-Bas , d' Angle- en roy>usun terre , de France, d' Italic & de Sidle, Merits en Alltmand. 11 parle de ces pre"cieux Wa- bonCom- nufcrits en deux endroits de fon Itind-raire (2), comme fe trouvant encore de fon terns dans la Eibliotheque de Cbrifline a Rcme , quoiqu'il ireut pas le plaifir de les voir. Les Auteurs des AQa Erudit. Lipfievfia en faifant rapport des voiages d'Elertus, aflurent pourtant (3) que le Cbrotricon Jjabylonicon n'^toit pas une vra'ie hiftoire, mais feinte , comme ccile d'Helicdcri JEthiopica: d'oii Ton reut juger quel homme d'afFaire Cbrijline avoit en V Bibliotheque de St. Benoit fur le Loire, qui e"toit une des plus ricRes du Roi'aume de Du fort des France, fat pill^e 1'an 1562. , a ce qu'ils difent, par lesHe'rdtiques... Les Manufcrits Manufcrits furent rendus a Mr. Petau Confeiller au Parlement de Paris & a Mr. Bvnghard, qui tau'&fc'ia. aiant et^ envo'i^ en .stllemagne par le Roi Henri IV. porta a Strasbourg , oil' il avoit Bibliotheque coutume de faire^fa Refidence, fa part des Manufcrits. Apres fa mort, le Prince de- Palatin les acheta & les -traofporta dans fa Bibliotheque d' Heidelberg. Mais le Due ,, de Bavie'rs, a'iant pris 1'ajj 1662. cette ville, il s'empara de la Bibliotheque & en fit prefent au Pape^ Grtgoire XV. qui la mit au Vatican. Quant a la" part de Mr. Pc- taw, fes h^ritiers qui aimoient mieux de 1'argent que dii Parchemin, la vendirent a la Reine Gbriftine de SuMe, qui la porta a. Rome & qui en mourant la l^gua auPn- pe: & de la forte toute la Bibliotheque de St. Benoit a e"t incorpor(e dans celle du Vatican ". Nous remarquerons fur ce re"cit , qu'il n'eft pas vrai , que Cbriftine le- ua fa Bibliotheque au Pape, & nous verrons dans la-fuUe comment il en entra une bonne parfie dans ceiles du Vatican & d'0ue6oi, (i) V. Mentf, Bibl. Uibliothecarum Mfc. Tom. 97. 8c pag. 3. Tom. HI. p. 221 Huet /. c. pag. 106. Manage /. c. Grandeur de la Bibliothe- que de Chrifline & d'ou elles'e- toit fbrmee. (*) Par tous ces achats de Livres & de Bibliotheques , d'oii FoJJius favoit faire fon profit, Saumaife n'avoit pas fi grand tort de ne le pas appeller Bibiiothe'caire , mais Col- porteur de la Reine. Nan Bibliothecarium/erf Bibjiopolam Regium , Voffium appellabat Salmafius (i). (|) Voici ce que Huet e'crivit aMmfcnmeni<553 aufujetde la Bibliotheque de la Reine (2),, RefertiJJlma eft BibliotbscaRegia. Fix earn capiunt perampla quatuor concla-via. Conftat partim ingenti librorum copia , quosolimexGermaniacutn opimis fpoliis f pretiojis manu- bits riolmiam advebi curavit Guftavus Adolphus Rex Suecorum, Chriftinse Pater. Librorum illorum maxima pars Olmucii, qua urbs efl Moravia; primaria a Jefuitarum f Capucinorum domibus detraQa eft , uti librorum iftorum tituli prceferunt. Accejjcrunt Bibliotbeca Ger- hardi Johannis Voflli, AlexandriPetavii, Senaforis Parifienjis, quts folis Manujcriptis Gratis f Latinis Codicibus, & GilbertiGaulmini, Supplicum Libellonim Magiftri, quas jolis Arabicis itidem manu exaratis conftant, p plurima prceterea Folumina in auttione Blbliothecce Mazarinianse , empta. Hccc omnia ingenti pretfo comparata: " Oclav. Ferrarius dans fa lettre a Carcavius Biblioth^caire du Roi de France, faitde memecom- prendre que la quantite" des Manufcrits que Cbriftine avoit fait venir d' Italic, ne doit pas avoir etc" petite. Voici ce qu'il lui en marque (3),, De libris manufcriptis arduum magis acfpij/ius negotium erit: quandoquidem non pauciex Germania atque Anglia phi- } , rimos bine exportarunt ab illis emtos , qui fenio viftas Jituque putridas cbartas auro muta- , y ri facile pajfifunt, pari avaritia t? literarum negle&u. Neque ita pridem certi homings. a Chriftinu Augufta delegati , Bibliotbecarum Spoliis naves onerarunt : nam de illis qua. ,, in Cienobiis affervantur , vix ulla fpes relicla eft".... (i) Jabbers Gel. Lexicon art. J^offiui. pag. 27?. lz) Tilladtt Diffcnations diverfes Tom. II. (3) Oper. Ferrari! Tom. II. p. aiz t .j o CHRISTINE REINE DE SUEDE. 271 des fommes immenfes ; fe diffipa en tres-pea de terns , & prefqu'en moins de deux ans. Car fi Ton a lu le morccau de Ja Jetrre de Mr, Huet a Mr. Manbrun dans la remarque ci-defllis ; on aura vu qu'il y parie de la Biblio- . theque de la Reine , comme etant encore 1'an 1655. en fon entier a Stock- .holm. Or combinant les circonltances & les indices qui nous en reftent encore ; on pourra dire fans exagdration , qu'elle renfermoit au de - la de huh mille Manufcrits. En voici un trait qui nous mettra an fait da refle. Voffius etant en difpute avee le P. Simon fur fanciennete de la pon&uatioti du Vieux Teftament Hebreu , en appella aux fept cent Manufcrits de la Bibliotheque de Chriftim : (a) d r qu J'on peut infe'rer , que s'il y en avoi: tant de 1'Ancien Teilament > il devoit autfi y en avoir un tres-grand nora- bre du Nouveau , des Peres de 1'Eglife , des Codes Orientaux & des au- teurs Clafliques en grec & en latin , dont elle faifoit fes plus grandes delices. Neanmoins ii fe trouve par le denombrement qu'en fit, Mr. Luc Holfteniur peu apres 1'arrive'e de la Reine a Rome) qu'il n'y avoit que 2 145, anciens Manufcrits, dont apres fa mort 2111. entrerent dans la Bibliothe- e^ue du Vatican (b). Mais demandera-t-on qu'eft done devenu tout le refle de ces Manufcrits & la prodigieufe quantite d'excellens livres imprimes , dont tout le monde jj * r , ^ a Bi - fait que la Bibliotheque de Chriftine etoit compofee ? Ceft a quoi Ton ne &cbnj}?iH fauroit rcpondre autrement, qu'en difant qu'elle a etc pillee, & que ceux qui y etoient pre'pofes y aufli bien que quelques-uns des autres favans etrans gers , qui etoient a Stockholm , dans le terns > qu'elle avoit fermement re- iblu de quitter la Suede , en firent le paitage entr'eux. II eft vrai que le Sr. Picques, Reiident de France , raporte, (c) qu'elle envoi'a cent ballots a Gothenibourg pour etre tranfportes hors du Roiaume , mais Ja plus grande partie renfermoit fes precieux meubles & Cabinets en Medailles , en Sta- tues de Bronze & de Marbre , en Peinture & autres chofes d'un grand prix & de gros volume (d). Plus le terns s'approchoit , ou Chriftine de- voit abandonner la Couronne & fe retirer de Suede, plus la confufion etoit- elle grande. Un chacun abandonne a lui-meme & a fes propres idees fai- foit alors ce qu'il trouvoit de fa convenance , & il n'eft nullement a doti- ter, que la Reine derobant a fes propres Sujets la connoiflance de fes veri- tables defleins , ne laifla aux Etrangers Jes mains libres a faire ce qu'ils trouvoient a propos. Elle-meme avoit a penfer a toute autre chofe qu'a avoir focil fur ce qui fe paflbit dans fa Bibliotheque : & , fi Ton excepte i'honnete homme Heinfms , on aura de la peine a nommer un feul de toua ks favans etrangers , qui etoient autour d'elle , qui fe fut fait confcience de s'en appropner ce qui ne lui appartenoit pas. Mais afin que Ton ne La Bib!io , s'imagine point , 'que c'eft a faux qu'on avance des chofes fi peu honnora- fheque de bles fur leur compte; en voici des preuves des perfonnes dignes de foi qui moTffonne^ \Q par les Fran- cois & g'.anes (a) WolfF Bibliotb. Hebr. Part.. H. pag, (c> Chanut mim. Tow.. III. p. 240. par ri/i. 3,25. (d) II y a une note generals IfcdeJJus dans (b) Mabillon Muf. Ital. in A&is Lipf. les Pahnskoldiana V. aujjl ce qii'&ndit Nan- -KS97. pag. 207. Montfaucon Bibl. Bibliotb, d A Gaflendi en 1652. 1. G, M/c. f . 14-61 97.. 272 ME MOIRES CONCERNANT L'an 1654- le demontrent clairement. Mr. Hemjius , ctant alors a Stockholm, ecrivit aia mois d'Aoftt 1654. a Ton ami Grotiovius en termes pofidfs , que ies Fran- fois avoient pille la Bibliotheque de la Reine, & y avoient fait une reed- te fi abondante, qu'ils n'avoient laifle a yojjiits qu'a glaner-; & que lesSz^- .dois avoient etc indignes de ce precede des Etrangers. D'atitres bons Ecri- vains, que nous ckerons dans la note , aflurent la meme hofe (*). Us .continuerent cette belle manoeuvre du terns que Chriftine faifoic Ton fejour en Brabant. Nous avons deja cite un paflage de Hemfius qui porte , qu'ua Francois , a qui la Bibliotheque & Ies Cabinets de Chriftine etoient confies , avoit etc canvaincu d'en avoir emporte plufieurs pieces deprix: (a) 11 ajoute : que la Reine avoit bien fa Bibliotheque & fes Cabinets aupres d'el- fe, mais qu'il craignoit , que Ies meilleurs livres n'en euflent deja etc enle- ve's. Mr. Hemfius ecrit a CaJJlan du Pity Tan 1 655. (b) que Vojftus etoit a Anoers 9 *ofo. il mettoit en ordre cette Bibliotheque, pendant que Cbriftine fe rejouiflbit a Bruxelles : & c'eft dans cette epoque , que Coffins lui - meme manda rondement a Hemfius 9 qu'il s'etoit approprie Ies doubles des livres qu'il avoit trouves parmi ceux de la Reine , pretextant qu'il lui en avoit autrefois faitprefent^&qu'ilsmanquoientafa propre Bibliotheque (f). Mais quel- (a) Targionii Epift. Magliabechi T. 1. 07. (6) I c. p. 211 & 213. (*) Voici ce qu'en e"crivit Heinjiusb Gronovins : (i) ,, Voffius fpolia p amplij/i mam pros- ,, dam , Jed v&lde invidiofam ex Regia Bibliotbeca iv, JBataviam -uportavit. Fremunt enim )t bic oinnes , ? illi uni imputant direptam Siblio&ectun, quanquam ultimus accefferit ad depopulundum agrum tarn fertilem , cum reliqui prxdando jam defatigati effent , nee quicquam abftulerit prceter fpicilegia pojl diligentijpmam Gallorum weffem",.. Mrs. Bsc- tnan, Fellerus & Forftner en difent a peu pres autant , & Heinjius dam une autre lettre a Caff. Puteus, parlatK de Cbriftine dit (ft)',, ibliotbe.cam penes fe babet cT* Tbefauros omnes , quanquam opinar libros meliores direptos effe. Gallus .quidam certe , cui tarn Bi- bliotbecam quam reliqua cimelia crediderat , furti conviftns effe dicitur , quod inter ejus farcinas multa magni pretii Jint inventa , q^ie ad Regwam pertimtijfe c'onftet : Ipfa tamen clementer out ignovit iUi , aut ignuviffe fe Jiwulat... Mr. de Boinebourg en ^ciivit auflj a Mr. Conring (3) Vofllo non fuit difficile ex Chriftinae Bibliotbeca. prxdam agere : illaw verb panitet & redimere ab eo poftulat ".... Mr. Morboffius rappcrte a Mr. Mauritius : j'ai vu moi-meme pres de quarante Volumes de Chimie en Mfc. dans la Bibliotheque de Voffius, qui font venus de Prague de la Bibliotheque de I'Empereur Rodtd- , pbc ,".... (|) VoJJlus ^crivit a Heinjius le 10 Juin 1655,,. Interim ita habeas, me non paucos li- , bellos rariores , qui bis inter libros Regina extarent , mihi attribuiffe , turn quod illi msx , deeffsnt Bibliotbeccs : (olim enim donavi Serenijjimte Regime} turn quod exiftimarem , cos , intuis, iiet jaltem paternis extare libris"...^}. Heinjius avoit a pr^tendre de la Reine quelques arr<5rages : furquoi VoJJlus lui ^crU vit le lendemain de fa lettre pre'ce'dente : (5),, DefummA qua tibi debeturbene Jpero, de ,, pecunia tamen defpero , fed piftitris , librif , gemmis, aliis rebus, puto, ut comhenfa- ,, bitur , Tom. III. pag. 333. cfr. (3) Bureb. Hift- Bibl. Wolfenhut. Part. HL pag. jif. VI. $. VIII. pag. 6j. (t) Burmar. \. c, Tom. Ill pag. 683. itcuv J, Heff.nanr.i 3 3 3 ", C. P3J. 673, Ep. (i) Burman Syll I c. pag. ii. & 6{ 9 (z) Hift. Orb. .Cip filter: otium Hanov. $. nj. p. zoi. lilies libi. II. p. 53. Tar^iinhs 1. ?. CHRISTINE HEINE DE SUEDE. 273 ^uelle pauvre defaite de cet homme-la ! II dit en avoir faic prefent a la I; ' aw Keine : lui , qui ft; fie pai'er fes Jivres vingt miiie florins , trois ou quatre l654 ', ans, auparavarrt ? Qubien, auroit-il faic prefent a Cbriftme des fcconds e'xemplaires, dont elien'avoit pas befoin? Autre abfurdite! Concluons plQ- tot des eclairciflemens , que nous Fourniflenc les rapports & les lettres de Perfonnes d'honneur & de merite de ce terns-la, que la Bibliotheque & les Trefors de Cbriftine font tombes entre les mains d'hommes reputes fa vans , mais fi peu touciie's des preceptes de la bonne Morale , dont ils faifoient parade, qu'on feroit pone a croire qu'ils en etoient entie"rement depour- viis , & qu'ils fe feroient fait auili peu de fcrupule de voler toute auire chofe facree , comme 'ils avoient pille la Bibliotheque & les Cabinets de Cbrifi'me. Quant a Voffw en particulier , en eonfequence de ce qu'on vient de raontrer, on ie perfuauera faciiement , que dans fa belle Bibliotheque , ou il y avoit 762. Manufcrhs Grecs & Latins (a), qui fut vendue apres fa mort a 1'Univerfitt^ de Leide, trente fix mille florins, & ou il ne manquoit pas de ces precieux Manufcrits de Pctau, que Chriftine avoit achetes ; il y avoit bien moins de ce qui lui appartenoit de droit, que de ce qu'il avoit efcatnote de la maniere qu'il le dit lui-meme dans fes Iettres citees ci-deflus. Deux aucres vices qui lui etoient propres, etoient la medifance & 1'envie. Feller cite un paflage de Leibnitz , ou celui-ci dit : (b) que Voffius haiffoic fi fort les Aliemands ^ les autres favans, qu'il ne faifoit point de fcrupule de de- biter fur leur compte les plus grolTiers menfonges. On dit, ajoute Feller, qu'il a vole plufieurs Manufcrits, & qu'il avoit peine a fouftrir , que les autres en euflent a bon droit, ai'ant mal parle de G^Mi,quiravo}tprevenu gians fachat de quelques Manufcrits (*). Quoiqu'il en foit, la Heine s'en (o) Moreri Dift. art. VofTius & Colo- fcrits de Voffius. lilies qui a dreffe le Catalogue des Manu- (&) Otium Hanov. J. 174. pag, 223. ,, litur. Ita omnino ego facers p r op q/i '".... II fe trouve aufli dans les Iettres de Foffius , qui fe conftrvent dans la Bibliotheque des Rtmontrants a Amflerdam , des pretenfions de quelques milliersu'Ecus a la charge de la Heine, dont il voulohqifelle lui fut redevable, niais il paroit , qu'elle auroit pu lui faire tout un autre compte , puifque fes manoeuvres e"to"ient affez connues : car Bcccler ccrivit encore 1'an 1664. deux fois a Boimbuurg : Voilius magnain preedam egit ex Bibliotbcca Chriiiinaj (i) ".... (*) Voici une autre preuve citcc par Fabricius: (2),, Ifaacus VofTius in Epiftola, refert y r rr; us par j e Ferrarium, quod Chriftina Panegyricum Ejus legerit avidiffimd of wgenium oratoris m al des faciuuliamque non mediocribus extnlerit laudibus. Addit TRO.T in opprobrium nojlrt Gen- dllcmands 6c tis , Reginam ns quidem fine nanjea Germanoium orationes refticere putuiffe , iwd pudo- inconiide'i*- ,re [uffufam fuiffe , quotient viderit fe colt a talibus Panegyrijlis aut magnifier i.... Ssd 111ut - Parafito huic Aulico rcfpondet Uoecierus, in Mu{eo Ju'o finem, eumqtie pro Conviciatore babet , qui ut placeret aliis , contra noftros audaEler pronunciavit "... Ces di Scours inju- rieux de VaJJllis font d'autant plus blimables de fa part , que ion Fere <2toit Allcmand lui-rneine. CO Gruberi Commerc. Liter. Lcibniiz Par; II. (z) V. Opera Ferrarii Tart. II. pag. 63^ item 7>a. loci & ioiy. p. 55. &c 87. Tome L M in s 74 MEMO I RES CONCERNANT L'an. defia par mauvaife opinion de fa fidelite , on par le fouvenir des penfees li- 1654- bres qu'il lui avoit debitees du terns qu'il etoit fon precepteur en Grec , ou ' * par quelque autre raifon jointe a celle-la, dix ans apres, favoir en 1662. qiuirid il lui envo'ia fa Chronologic a Rome , & lui fit connoitre qu'elle n'e- toit-pas contente de lui. En meme terns elle.le railla joliment fur cette nouvelle Chronologic , lui difant (a) , qu'ordinairemenr les homme's veu- lent paroitre plus jeunes qu'ils ne font, & qu'elle s'etonnoit qu'il vouliit ' faire le monde plus vieux de deux mille ans centre Topinion commune, Texhortaiit au refte ferieufement a ne point fe meter des queftions epineufes de la Theologie. Chriftine atira fans doute eu de bonnes raifons pour lui faire cette Mercuriale. Car fi c'eft avec verite que Chevreau dit quelque part () qu'il avoit entendu la Heine louer .5ntf&r mourant pour s'etre eerie, a- n ue la vcrtu rfetoit qu'un now. &? ww chimere , il y a tout lieu de croire , qu'el- & le avoit puife cette Morale dans 1'Ecole de Foffuis & de Eourdelot (*). En effet ce n'etoit pas un confeil a donner a quiconque auroit voulu s'inftruire dans la Religion Chrctienne, que de lui dire qu'il n'auroit qu'a frequenter Fbjjnu pour s'y bien fortifier. On fait , dit Mr. Boyle (c) que le cara&ere de fon efprit renfermoit beaucoup de travers. Jl faifoit des livres pour prouver, que la verlion des Septantes etoit divinement infpiree,& il temoi- gnoit en meme-tems, par fes entretiens particuliers , qu'il ne croi'oit point de revelation, credule d'ailleurs pour tout ce qui etoit extraordinaire, fa- buleux & eloigne de toute cre'ance (f). Charles IL Roi SAngleune , qui connoiflbit bien fon caraftere, 1'entendant un jour debiter des chofes Mi- cro- (a) Burman /. c. pag. 474. 933. item Mor^ri Ditt. art. If. Vofllus f (fc) Oeuvr. mSlees Part. I. pag. 17. ad Des -MailTeaux Vie de St. Evr^mont p. 59 mm. 1654. f 414- (c) Oeuvr. Div. in fol, Tom. III. pag. fa. (*) Conring dit la-deflus : ,, Matt ille homo (If: Voflius) meritus eft de Chriftina idque vant mais ,, -multi s modis , flexo fcilicet incautce foemince animo ad Atbeifmum & malos mores, Jur- impie & ^ reptis ? libris ^f aliis nonnullls baud levis pretii. Ego ilium dtprehendere mibi vifus d un me- ^ j um d ft um equidem grace f valentem ingenio , fed impium fjf plura jaftitantem , quam tere" 1 fe"uit pf^fl^^ lJJ^ fai* quidem viribns , dij/lmulantemque qui c quam jibi a Patre relittum quo Cl.rljline. ,, pfiffit juvori (i)". Ce meme Conring dcrivit a Boinebourg en 1662. entr'autres chofes ,, fur Vojjius:,, Nan aliud animo agitat Vofiius , quam ad Aibeifmwn vfain clanculum mu- nire(z)"... ircr'd lit' ^ ^ OICI un tra ^ ^ u Chriftinnifme de Vtffms, que le faincnx Ailrien Beverland ra- ile J^rjlius. porte dans fa Icttre a Jaccb G(,yer (3),, Cum Decar.us VindeJ'orierfis ilium (Vofluim) w ,, merits corifinio vijitaret , urlaueque ei.tn ad fa cram Cxnani invitaret, dixitVoQlus, Do- ,, ceto, quomodo pojfim meos Colonos ccmpellare ad Jolvendas pen/tones fuas: Hoc facito. ,, Qua "verba ne jiniftre iiite rpreteris , Jcias hoc quotidiani ferments genus ei fuijfe nativum. ,, Simile refponjum dedit Canonico Vir,deforieiifi Francifco Junio Sacram quoque Ctenam of- ferre cupienti. Hocfpeeiojwn inftituium pro Peccatorilus : Avunculus autein msus nibil mi- ( i) Oper. Cor.rlr.gll Tom. VI. psg. $?;. & ( i). Cruler. J. c. png. Stfp. plura pag. 613- item JJectnan 1. c. $. VII. pay (3) Epiftolsc Xll. hue ufquc anecdotz pag- (. 613, CHRISTINE REINE DE SUEDE. 275 cro'iables de la Chine , fe tourna vers quelques Seigneurs qui etoient avec L ' ai1 lui & leur dit : Ce favant The'ologien eil un etrange homme , il croit tout m hors la Bible. Quelques foins, quelques precautions que Ton prit, on ne "" .put jamais 1'engager a reconnoitre en gerferal les verite's de la Religion Chretienne.. 11 s'obftina a garder la-deflus un profond filence (*) , d'ouMr. Sayk conclut: qu'il s'etoit affermi dans cette penfee, que 1'irreligion ne lui cauferoit aucun mal apres cette vie, & que n'y aiant' : fien ni a perdre, ni a gagner pour lui, de quelque maniere qu il mourut,* ce n'etoit pas la pei- ne de dire un menfonge a cenx qui le qtieftionnoient fur cette matiere. . . . & c'eft dans de tels fentimens que mourut JJaac Poflius Chanoine de Wini- for le 21. Fevrier. en 1689. Nicolas Heinfius fon Compatriote etoit tout autre. Au.cara&ere d'hon- E *ceiiet nete homme il joignoit un efprit orne des belles lettres , qui le firent efti- cmacte d mer de tous les ConnoiiTeurs. Son Pere ayoit deja e't) tant eftime de Gu- Hetnjiltt ftave-ddolpbe, Pere de Cbrift'me> qu'il 1'avoit voulu avoir au nombre de fes Confeillers , & le Chancelier Oxenftierna entretint longtems .commerce de lettres avec lui. On peut lire dans 1'appendice une lettre qu'il lui ecrivit v. I-AP- deja I'an 1624 (f). II avoit fait le Panegyrique des exploits furprenants de xxviii!' m ce minus efl'quam peccator".... Cela refute ce qu'en Ecrivit Mr. Des-Maiffeaux & Mr. Eayle au mois" d'Avril 1706. difant qu'on n'avoit pas feulement propoK la Communion a If. FoJJlus (^i). (*) Le Savant Henry Dodwcll qui connoiflbit notre Ap6tre VoJJius t lui Ecrivit cette ? Q ,, ett // c lettre remarquable 1'ann^e avant qu'il mourut (2). Doftijfime atque AmiciJJlwe Domine ! ,, Senefcere te minufque firma indiesvalitudine obfervav i par iter atque dolui. Utinam ita ,, mortem ob oculos habeas ut ea tamsn cogites potij/imum, qute mortem confequentur. Fac quizfo , ne pereant tanti tui f tarn injignes in re literaria labores. Mercedem cogites & , qttidem diiiturniorem illam , quam qua a pereuntium bominum ore f vita pendeat : ne , rapiant indofti ccelum, dum eruditi faniam & leviorem pluma gloriam aucufiantur. Villa , ilia mortis in confpeftu videantur oportet , qnce fanos plentmque homines fcf f'pe longcevita- tis Jibi blandientes a rebus avocant gravijfimis ac momentoftj/imis. Per , qucsfo , placids Q* , amice bane meam infaluti! tux eterna caufa, Kapptiriiti. Trlbite amicitia , qua me di- \ gnatus es : Tribue gratitudini , zelo tribue future tuce felicitztis [ludiofijjimo. Fac ea , , obj'ecro, qua te moribunditm fecijje juvabit. Tolls mibi follicitudinem : Dz at de pietate , tua pariter ac ernditione fincere & exanimogaudccm, quiidunicecupio, Tu tit in (Sternum , gaudeas. Vale vir clarijfime , Valetiidinem tuam & falutem cura. Oxonii Jul.zo. 1688". Tuns ex animo HENRICUS Don WELL-US. (f) On remarquera pourtant, que malgre 1 la grande reputation que Mr. Daniel Ihin- Jius s'etoit acquife , on trouve dans le Journal da Comte ^-371 , fils da Chancelier, que fon pere lui recommande deux diverfes fois, d'eviter de tout Ton poffible la compagnie de ce Heivjius, a caufe de fes grandes debauches & de fa vie debordee (3). (i) V. Lettres choifies de JSayle publie'es par Epift num. 750. Marchand pag. 912. (3) Mr. IVarmMtz Confeiller de la Cour ciu (^) Tiree de 1'Original dans la Bibliothcque Roi de Suede a 1'original ds ce Journsl : ccspas- des Remontrans ftdmflerdam Tom. L Mic. fages fe raportent a I'an i ut i- te- CHRISTINE HEINE DE SUEDE. 277 terum r evert atur: $? nunc quo- fils. II fera aupres de moi, fi vous L ' aH que iter ad te par at , me non re- le vo " Iez bien , & il n'y fera pas feu- 1 5 \ quo //- ! eil ?, en r t , mais 1 Y fera bien co me apud me fruuntur flioigiturtuonefisjolhcitus: a- pud me enhrir erit ) fiidperteli- ceat : & non erit taiitum^ fed & benc erit utjpero. Quod ad negotium ipfi cmmlffum, ita ba- ? * / L- leas ve/m , mtbi non minus quam imcurajore, uttuojruarh. M- W tamen promitto. Scias enim moris non ejje rnei mult a promit- tere. Hoc tamen tibi fpondeo^ curaturam me ut&hac occafwne feP multis aliis innotcjcattf me mores illorum odijje^ qmjpe tan- turn homines laaare Jolent , ^ nt fclas contrariummihi ab bhef- Je anlmum 3 iterum adftrmo mal- k me plura pr aft are quam pro- mittere. Vale Holmla d. XIX. Jan: MDCL. que je n ' aurai pas moins de foin que vous-meme , que vous obteniez ce que vous fouhaitez. Cependant je ne vous promets rien. Vous faurez que J e n ' ai P as accoutume de promettre beau f ou P-, Cependant je vous donne parole quen cette occafion & en ^ uf]eurs 4 autres je vous ferai connoi . 4re que je hais le caraftere de ceux qui ont coCicume de nourrirles autres d'efperance, & que le mien eft tout oppofe. Je vous aiTure encore une fols ' q^ j'aime mieiix plus faireque Cette PrincefTe connoifTant le me'rite & la capacite du fils , le deftiaa a faire la colleftion des Livres & des Manufcrits, qu'elle vouloit ramaflerde toute part pour en former une Bibliotheque magnifique. Elle 1'envoTa done en Italic pour cela & pour y faire acquifition d'autres morceaux de 1'anti- quitc; & !e pourvut de bonnes lettres de faveur & de recommandation, dont en void une qui nous eft parvenue , quoique nous ne puitlions pas dire au jufte le nom de 1'Asibaflkdeur a qui elle a ete ecrite (*). Chri- (*) Nous tenons cette lettre de Cbriftine , de Mr Bsblen c^lebre ProfeiTcur a Maien- cs. Si eilc a e'te Ecrite a 1'Ambafladeur que la Cour d'Ejlugne entrctenoit a Fenii'e } cu a Rome, c'eft ce que nous ne faurions dire precif^inent. Mm .3 fan 1651. MEMOIRES CONCERNANT Chriftina Legato Regis Hifpa- Lettre de Ckrifime a L'AmbafladeUr niarum. S. P. CUm mibi perfuaferim , llluf- trijfime Legate , exftare in quibujdam ReigiiNeapolitaniBi- bliatbeds pr nee commJjJliram ^ ut q ue J e ne trou ve pas 1'occafion de quldde ccehfolique nqflri afperi- vous rendre la pareille, je me flate, f ., J .. 2 j r e > que vous fatisferez mon defir. Par tate , idem etiamde ammo & ^ mgme vous me ferez connokre moribus nojtris ext/times. Quod d'autant plus votre magnanimite & fi nulla de te bene merendi detur j e vous en aurai d'autant plus d'obli- occafio y nibilominus 3 utopinor^ gation. Dieu vous fafle profperer. fatisfades pojlulato meo. It a t>onne a St ockholm le i Janvier 1(551. f//w T^W ^i? magnanimum effe- cognofcam 5 ^o ivro 7o^ //- ^/ ^ro devin&ior. vale. Holmia C10UCLI Kalend: Jan: ~, ./j. Chrijline. Cbrljtina. He'mfius fe mit en voi'age en 1651. & rendit, par lettre, un compte fi- de'le a la Reine du fucces de fes commiflions (*). Chemin faifant il iui a- prend plufieurs particularites de 1'etat de la literature & des favans en Italic, II Iui marque quels Manufcrits , Me'dailles , Statues , Livres rares il pour- roit acheter pour Sa Majefte , s'ii etoit pourvu d'argent : (f) combien le nom de Chriftine etoit en veneration chez les Italiens : & que plufieurs fa- vans de ce Pai's - la avoient fait des Pane'giriques d'elle & Iui avoient dedie leurs ouvrages : que le Pape avoit defendu pour 1'avenir de pareilles dedi- caces , parce que Chrijline n'etoit point de la Religion Catholique - Romai- ne : mais que Fortunius Licetus , qui venoit d'imprimer fon Traite de Gem- mis (*) Les particularites indiques ici fe trouvent dans les foixante neuf lettres de Ni- colas Heinfius a Cbriftine , imprim^-es dans le Sylloge Epiftolarum illuflr, Burmanni (i). (f) Nous avons produit ci-devant une lettre de Ferrarius ou i! dit qu'on avoit fait transporter par mer grand nombre de Manufcrits d'ltalie pour le fervice de Cbriftine. yoiez d- On en peut conclure, que cela fe fit par le minifte're de notre Heinfius, qui effective- defllis pag. ment manda de Rome a la Reine, en 1652, que les Italiens e'toient indign^s de voir7 0> qu'on tranfportoit arnfi jufqu'au fond du Nord ces Ihftruiiiens d'^rudition, coronje ils les appelloient (2). r Yi) jufqu' Burman 1. c. Tom. V- depuis la page 734. Comet, p. 294. qu'a la 800. 5t au deU cfr. LuHtnietx Thcatr, (z) BttTmn 1. c. pag. 74$, L'an. 1652. .MEMOIRES CONCERN ANT mis Veterum Amularibus & Lucernis Antiquonim recondhis, (a) le lui avoit de- die, dans 1'exernplaire qu'il lui avoit envoi'e , laidant fans dedicace ceux qui devoient refler en Italic : (*) (Z?) qu'O&uv'o Fcrrario avoit recu la Chai- ne d'or dont la Reine lui avoit fait preterit pour la harangue qu'il avoic faite a fon honneur fous le litre de Pallas Suecica , qu'on fouhaitoit fort a Rome d'avoir le portrait de la Reine, que le Due de Brsjje avoit grave une Medaille de fa propre main, que Heinfius dit pourtant ne lui pas trop res- lembler, & que fi elle trouvoit bon, qu'on en fit une autre , il faudrok qu'on lui envo'iat fon portrait tire au naturel (c) (f). Que lui Heinfius pas- fant par 1'lor-ence (j) & le grand Due Leopold ai'anc apris que Chrijline aimoit la poe'fie Italicnne , ce Prince avoit donne ordre de faire une collection des plus belles pieces qui fe trouvoicnt parmi fes papiers & qui n'auroient pas encore paru pour etre prefentees a cette Princefle: qu'il y en auroit deux Tomes (a) Impr. Utini 1652 in fol. (6) Barman /. c. Tom. V. p. 749. 751. 762. (c) Burman/. c. Tom. III. p. 277 f <58i. T. V. p. 745- 747- 754. tf 758. item E- 734- &c. pift. ad. Magliabech T. I. Batavor. peg. 211. fur II defcnfc faite aux Catholi- 5 ones de de- , dier leurs li f vres a ceux d'une autre ' fcaifonne- (*) Au fujet des deTenfes faites aux Cathoiiques de dedier leurs Ouvrages a des Per- mensde fonncs qui n'^toient pas de Icur Communion, on raportera ici les K 4 flxions qu'cn a 'fa.Btxyle: (i). II dit entr'ciutres chofes: ,, que Bellarmin toit tellement perfua- d, qu'il entroit dans le carafte're d'un Orthodoxe de nelouer jamais un Hcrtkique, qu'il dit pofrtivement (de not. Ecclef. cap. XVI. art. i). qu'on ne trouve pas que jamais leg Cathoiiques a'ient Iou6 la doctrine & la vie des He"re"tiques. Dan. Francus a pourtant fait voir a Sillarmin: (2) par les e"loges que Coclatus, Mn. Sylvius, Pog- ge Florentin, le J^faite Clavius, Mr. de \'4ubejpine ICveque d'Orleans & Caramudont donne a des Hdretiques, que fa pierre de touche n'eft pas trop fure. On ne hide pas, dit Bayk, de connoitre par-1^ 1'efprit de 1'Inquifition. C'eft quelque chofe de fort particuiier: car ces Meffieurs veulent que Ton efface des livres , les Prefaces, les Epitres D<5dicatoires & gentrralement tout ce qui peut faire honneur a des perfoa- nes fe"part"es de la Communion Romaine, fans en excepter les Princes. De-la vient ,, que les Indices Expurgatoires ordonnent, que fi quelque Hiftorien a dit: Unteljour eft ni Cbriftopble illuftre Due de fVurtemberg. Praclarus Dux Wurtembergenfis: on ,, effice le terme illuftre, Prceclarus, qui e(t n^anmoins de (i peu de confluence , ,, qu'on le donne en latin au moindre Ecolier.... L'Auteur Francus n'oublie point de ,, remarquer le peu d'^gard que Ton a en plufieurs pals tres-catholiques pour les De- crets de cette Congregation: ce qui ne peut que faire un grand prejudice i route 1'Eglife Romaine , tant parce que les bonnes gens fontfcandalifes de voir que 1'auto- i> rite du Pape foit fi peu confid^rt^e, que parce que les Proteftans en prennent fu;-'t ,, de dire, que Ton ne raifonne pas confequemment , que Ton fe contredit en iniile ,, manieres.' (f) ,, Vivam ir*teri a fin que fenvoie les cbanges pour votre vo'iage. Je ne vous puts rien dire^ fi non> que le remettant a votre dijcretwn^ fansfacon^ ilfaut que vous [acbiez, que je veux que vous nequit- ticzpas ricalie , fans avoir vifite la Sicile. four votre demeure en tout gP par tout , faites-lh auffi Jongue ? auffi courte commc vousjugerez qtfilfoit befoin pour monfervice. fous me rendrez un trh- (*) Adrien de Valois crivit ^ ffeinfius en 1654.: (i) qu'on avoit en France un pareil La Cour di dertein, & que parordre de la Cour on publieroit un Volume de toutes les Pieces com- &**" vou - pof^es a 1'honneur de Cbriftine. On ne fait pas fi Tun ou 1'autre de ces Ouvrages ap^cudliT/ae 6 " ru. Le nouveau Recueil de Harangues faites an Roi &aux Reines, oil il y a plufieurs i m p r i mer ies Pieces qui regardent Cbriftine , nepeutpas etre celui, dont ileft queftion ici, puifqu'il pieces faites devoit aufli contenir des Pieces en latin, dont il n'y en a pas une dans ledk Recueil. Voi- ir ci comment de Falois en parle: Claudius Menagius undiquaque colligit quce in maximum de ,, Reginarum laudes a No/iris conge ft a font patrio latinoque J'ermone. Hocjibi onus a Rege ipjo delegari , librum typis ac Jumtibus regiis vulgari curabitper Amicos , quos, titfcio, multos & magnos babet ". (|) Cette lettre de Cbriftine eft tire"e du Recaeil de Mr. P. Btfrwan. (2) Mais on ne peut fe difpenfer d'y faire cette remarque : que I'impreffion en eft tres-fautive furtout pour 1'Orthographe. Il fe peut bien que Burmann'a pasfiju mieux d^chifFrer le carafbe- re de Cbriftine , quipourtant eft afTez lifible, comme on peut le faire yoir aquiconque le voudra, & prouver par-la , que la Reine orthographioit bien mieux !e Francois, qu'il ne paroit a en juger par 1'imprim^ de Burman. 11 y a meme dans cettte lettre des expref- fions, qui n'titant pas trop bonnes, ne font pas non plus du ftile ordinaire de Cbriftins , d.ms fes autres lettres:ce qui fait preTumerque celle-cipourroit bien etre tronquee. (i) Burma* 1. c. pag. 70;. Epift. ad. Ma$lial>. (*} V. fon Sylloge Epift. Vir. llluftr- Torn, c. p 19 J- V. pag. 750. Tome /. * Nn Si EM (D flR TS< &&& C E R 3^ A N T - grand cffcc , /7 wftf /w/ivs nejaire temr Cbcvalier del Poz^o ^ quclque-s 'mitres'G'tnbdb'nieritc. Je fe~ red ravie de cujtiver kur amitie ^ jVA m'cn -demerit qwlqiie petite marque. Aiez auffijom de remarqucr ceitx, qui travaillent citey vers on en projepour inon honneur^ a fin que fcnfoh ponttuejlemcnt averti pour les pouvoir regakr. Fous javez que je fun ^curieufe. ne vous embarquez point en QUCUH aduit , pourvu que jejoisfnftryi~ te de ce qui eft rare. Je dijp.qferai fyen du refte. Je renouveik^ HeinJ'ius follickz. toCijours inutilement, & a en juger par les lettres que Mr. Bwman a.publiees,- il n'en re^ut qu'un nombre de livres a bon compte, & foffiwAui fit efperer fbn,rembourfementj en livres , en peintures , en anti- quite's & chofes pareilles, au lieu d'argent comptant (b). Mais Voffius fe mk de part, a la maniere d'harlequin, en s'appropnant a lui - meme les mellleurs livres/ pour rien. l Ai- -, G'eft a cette -ioccafion que feu Mr. Pierre Burman, Profefleur a Leyde, 315ms que s'eft donne carriere pour fe dechainer contre la Reine Cbrifline .(c). 11 pa-? ^"[^ roit qu'il ai recherche les mots les plus expreflifs pour decrier ia conduite ftement fiw envers Hemfius. Mais fans tant d'exageration , il fuffifoit , ce me femble , .^ hr ^ ln de dire implement : qu'il etoit bien dur a un honnete. homme , commeJ Heinjius , de fe voir renvoie & prive d'une fomme qui lui etoit due, dans le terns qu'un grand nombre d'indignes grammairiens & de pareilles gens s'etoient empares dela confiance de Chriftine t & mettoient a fee fes libera- lites & fes. finances (d). Mais comme Mr. Burman n'a pas voulu garder. cecte bienfeance, en prenant fait & caufe pour Mr. Heinfuis , on auroit pu lui demander; par quelle raifon il n'avoit pas voulu. aller a la fource de cette corruption, qu'ii dit avoir regne en ce tern's- la a la Cour de Chrifline, & reveler les noms des perfonnes qui en etoient les principaux inftrumens. Mr. Burman ne fauroit dire, qu'il avoit ignore ceux qui en etoient la caufe, ; puif- . (d) Burman /". c. T. HI. p. 679.' 6%p. f Sylloge Epijlolar. Virorum illuflr. Tom. V. p. 549. (d) Bafllet vie de Defcartes Urn. VII. $. (i) Idem. /. c. T. III. p. 679 p 683. XVIII tf XIX. pag. 269. &c.item P. Bur- f T. V. p. 777. fcp 798 u. ci-dejfus I" art. man jun. prafat. in Valefii emendat. crit. deVoflius pdg. 272. pag. 8. (c) Vfj'iez^la preface du V. Tome de [an (*) La lettre d'afllirance & d'obligation de Cbriftine fe trouve dans Burman (i) & Heinjius y eft appelle" Minifter Nojlcr , Regiiqne Conclavis ab Epiftolis latinis Secretarius. (f) Nous infe'rerons dans 1'Appendice cette lettre vive & forte de Heinfiiu&CbriJtine. Elle eft date'e de Stockbolm, Nonis Jaiiuarii Jul. 1655. (0 L- c. Tom. V. pag. 774. cf. Tom, III. pag. 331. & .67^, a Nn 2 284 MEMOIRES CONCERNANT L'an puifqu'ils font peints de nom <% de cara&eres en plufieurs endroits des l654 ' Jettres des favans, qu'il avoit alors publiees, & qu'il doit avoir connuplus particulierement encore, par celles qu'il ne lui a pas plu de rendre publi- ques (*). II devoit done dire, que Saumaife, grand Doi'en de tons, en- vo'ia fon miniftre Bourdelot en Sutde, & que celui-ci , s'aflbciant avec Naude , du Frefne & autres femblables , fe faifit de 1'efprit de Cbrijline & fit tout au monde pour eloigner d'aupres d'elle les honnetes gens (#). Mr. Burman en decouvrant ainfi lesfources, auroit pu aller plus loin. II au- roit pu faire remarquer,que ces memes Gramraairiens d'accord avec d'au- tres perfonnes, aufli peu honnetes gens qu'eux, ai'ant infpire a la Reinede certains principes d'une Morale relache'e, lui avoient mis en tete : que 1 la plus glorieufe a&ion qu'elle put faire, feroit, de fe debarafler des foinsdu gouvernement & de refigner la Couronne: que la Reine encore jeune, eblouie de 1'eclat de cette faufle gloire , que ces gens-la lui faifoient entre- voir , acquieca aux raifons qu'ils lui alleguerent , & principalement a celle- ci : qu'il n'y avoit pas un feul e'xemple d'une fi belle aftion dans toutes les hiftoires de 1'antiquite (f) : que des que fa re'folution d'abdiquer eut eclatd , v. d-deffus ces-memes fe mirent les premiers a piller la Bibliotheque & les Cabinets de ? *7i. j a R e i nj en s'appropriant tout cequi leur convenoit, fans que rien leur en appartint : qu'enfin leurs belles manoeuvres aiant mis la Reine enpeinede s'acquiter envers Heinjius de ce qui Jui revenoit, il fut oblige de fe renfer- mer dans les bornes de follicitations infrulueufes. Si , dis-je , Mr. Burman s'etoit explique de la forte , le Lefteur auroit TU clairement pourquoi Heinjius refloit feul , fans etre rembourfe , dans un tems , ou d'autres perfonnes tout-a-fait indignes etoient comblees de pre- fens & de liberalites. II faut pourtant avoiier , que le Neveu de feu Mr. Burman a fupplee en partie a ce defaut de fon Oncle (b). Et quoiqu'il ne nomme que Bourdelot , paflant les autres fous fifence > on dira toQjours que ce Bourdelot etoit un de la bande, c'efl-a-dire, un Grammairien moinsdotle ' C i" 3 d 7 eflll$ que les autres (c). Or fi c'etoit Bourdelot & fes Partifans, qui dans ce terns- la () V. ei-de[Jus pag. 24.9. item Burma*. Crit. f Oral, Henr. Valefii pag. 8. *y//. Ep. T. III. p. 659. &c. Huet /. c.pag. (c) Burman /. c. T. III. p. 651. 669. &? 103 &f 104. Olivet /. c. pag. 39].. ^cChe- T. V. p. 713. item Lettre de Fatin >ijl. Mjc. num. 395. (t> Cette IB we eft a* V. vol. ic ti Sjllt^ pag. jji. & 771- CHRISTINE REINEDE SUEDE. 285 & avoient gate les bonnes difpofitions que Chriftine avoit conferve'es juf- L ' nn ques-la; a qui doit-on imputer qu'a ces hommes-la , que la Reine n'ait pas __ fatisfait alors a une dete fi legitime ? EC fi on leur joint Voffius , en vertu "" des preuves deja alleguees de foil mauvais cara&ere, ne paroit - il pas que c'eft ce parfait Trio qui a perdu Chriftine ? Voila des circonftances que Mr. Burman auroit du raporter, y refle'chif- fant de fang froid , avant que d'attaquer infolemment (*) une Reine , a qui grand nombre d'autres Savans avoient des obligations infinies. Aprestout, le patrimoine de Burman avoit-il ete appauvri de ce qui n'avoit pas e"te paie a Heinfius ? Avouons plutot que ce n'efl qu'une haine tres - indifcrete concre Cbrljline qui a dirige fa plume. Sans cela il fe feroit fouvenu de cent endroits de lettres qu'il a publiees lui-meme, ou route la foule des Savans de ce terns- la lonoit cette Princefle a qui mieux mieux. S'il cut dit que c'etoient des laches flateurs ou des ecerveles , on lui auroit repondu , que chacun de ces Savans etantaufli verfe queJui dans les belles lettres, il don- noit lieu de mal penfer de fon etude favorite (f) : mais ce qui rend la caufe de Mr. Burman encore moins favorable , c'eft qu'il a fupprime , comme k deflein , les fentimens que 1'honnete homme Hmnfius conferva pour la Rei- ne , merrie apres fon abdication , & quand elle demeuroit a Rome , difant toiijours beaucoup de bien d'elle , & aiant pour fa perfonne une veneration pleine;de tendrefle (|). On s'affure meme, que ii Heinfius s'etoit tenu dans les bornes, lorfque la Reine etoit fur le point d'abandonner la regence, & un ou deux ans apres, fans faire des reproehes mal-a-propos a un perfon- ne aufli delicate qu'elle fur ce chapitre ; on s'affure , dis-je , que malgre le de'fordre de fes finances , Heinfius ne fe feroit pas trouve fi longtems en ar- riere a 1'egard de fa pretenfion. Car au bout du compte, il faut que Mr. Heinfius ait ete paie, & void les raifons, qui me portent ale croire. Com- me j'ai eu occafion de fouiller nombre de chartrcs & depapiers concernan* Cbriftine (*) On rapportern ici quelques traits de cette preface de Bur-man au V\ volume du . . Syll. Epift. illuftr. comme quand il dit, parlant de la Cour de Cbrijline:,, in corruplif- de Mr . '^ fima ilia ff impia Chriftinae, Regince Suecia , aula & comitntu.... parlant d'el'e, il dit xan coatrc ininutilitam ingrafts famines minijierio.... item aturnis opprobriis mtmori am perfidce Regi- Cbrijlitr. no: onerabunt omnes eruditi &c. Parlant de Heinjius il dit: cinSum qnetidie totfcelera- tijjlmis Mezentiis W vilijffimis Regina A dulatoribus & Spoliatoribus"... & cependant les foi-difants favans hommes faifoient le plus grand nombre de ceux-ci! (f) II eft p!ut6t a prefumer, qu'efc d^pit deCir//?tnal'tie de la ibnune. itipulee & enjoinc a 'ion ^ouX^erneur. General: de lui ehvo'ier an plucoc & la Bibliothequq:& 16 Cabmet. e fait -^tancancontef- table, orife faic donher une lettre d'amortitleinent: ce qui aura fuffic en ce cas-ci :. Mrr Heinfius etant aii reite trop homme de bien pour'vouloir fe fairepai'erdeux fois'la mme dece. Voici la lettre de Chriftine au fenateur Baat, fon Gouverneur General. .: - Ghriftina Alexandra. &p. E- der ^ Walborne Herr General Goiivsrneur Baron TS&blfiff Baat^ sKarbarmedkunnigt war a 5 huru- ledes mg med Heinfio i deffe da* gar ha fiver en bandel trtiffat och bonqm afkiopt bans Bibhotbek ocb Medaglier fom utt -Swerige tiro 3 jamwal allaredo bonom Jlorfla dekn of den accorderade Jumman bet alt. Later Ederfdr- denskuld war a angel agit at Jam - maBlbliotbek ocb Medaglier E- der -ChriftiM Akttdiidra--&c. Jene.ai- rqis vous 'laiffer ignorer j que ces jours pafles, j'ai fait im accord avec Heinfius touchant fa Bibliotheque & fes Medailles qui font en Sujiae que j'ai achetes de lui: lui ai'ant ddjapaie la plus grande partie de la fomme flipulee. Ai'ez done foin, que Jadite Bibliotheque & les .Medailles vous' foi'ent diiement remifes entre les mains & empaq^tees , le mieux qu'il fera pofliblef dans destonnaux, des caiffes & des ballots , pour m'e- tre (*) Ce volume fe conferve dans la magnifique Bibliotheque defeuMr.Je Baron & P/e'ff- dent R'lamb: & tant la lettre de Cbrijline que la r^ponfe de Mr. de JB.Mt du 7. Novem- bre de la ineine ann^e, s'y tiouvent a la page 878. C H R I S T 1 N E R El N E T>1E S U:E D E. ifer .faltrligen watic lilftalte ocb tre en Voiees ici an plutot ; par Foc- pa (let blifta'lirt turner , kiftcr cafion cit , . ' o T * (Jlil X-lvJJ.JiiLIj / / C / / /-,//. ^l'** f o?$qniiqn ij sroT^- SA icon . ' r 4 * U. .%*.-< . >.afr ; r.-:-V.T4i ^Alv.AAiYi^i\A. _ . 'I .M\l..*.. 1 66<5. ^ rrj -.Vw'^ Vu^ Cbriflind Alexandra - <^ ^ j j. Gammat. STIJCJ nsnsr*; :>.r:iido*8 wS^^filWsJL>3t> jnov wt \iv^.lO ';> ^wvovwn-r :viflt iii\'uVi:jf > \\. .yjififi D'jr.3;nLorn & f tnncLio w\^ :>ob Quant au^ laraqntations, que fait Mr. Burman^u terns perdu de Hemfms a.- v Ja Cour de Chriftim, .qu'il auroit pu mettre mieux a profit en. deveBant ^Profeffeur de queique Academic, {*) on remarquera fe^lement, qu'a.c^t egard Mr. Meinfius n'eflpas tant a plaindre: puifqu'ai'ant ete npmme Mi- ( niftre public de.la "Republique des Provinces-Unies a la Cour de Suecle , fans Impute en . cpnfide'ration des bonnes habitudes qu'il s'y etoit faites, pendaot .fon iejour (s'y etant/fait aimer & eftimer); il eut : par-la pccafipn de paffer .plufieurs annees hors de ;fa Patrie, ou on lyi av.oit deja fait foHffi-k'.milje chagrins & perfecutions , % de 1'aveu n^erae de JV^r. Barman (a)* Si Heinfhis etoii;ivenu Profelfeur chez lui ? cet emploi auroit-il pu le garantir des pro- cedures violentes v qui . furent faites contre lui? Etau refle une charge auffi importante.que celle de Miniftre Public d'un Etat Souverain dans lesCours etrange'res (car il fut aufli pomme par fes Maitres pour aller a la Cour de RuJJlej (f) ne doit-elle pas etre regarde'e. par.un homme d'efprit & de.ca- pacitq cpmme , pkls Ijpnnorabje , que d ? enfouir fes taleris dans la pouffieue Academique , ou de refter toute fa vie Regent de quelque Ecole?-, Concluons de tout ceci, que Mr. Bur-man s'efl laiffe emporter par une violence pafiion, a dire du raal d'une PrincefTe, qui ne lui avoit pas fait le moifc- (fl)'"X. c. Tom. V. p. 803. fc. 5* Jurtout dans la Preface, oii il s'agit d'un fils qu'il a- "'* d'une femm.e debauchee. (*) Sed inecum dolebunt fimul , ditMr. Burman dans cette preface, omnes eruditionis ? elegantia Hterdriee cultores, tantum Virum , optimam atatis partem, quam majori cum ,, literarum emolument/) in otio erudito vel Academica provincia adminiftranda potuijfet exi- gere , in inutili tarn ingrattz foemina minifterio perdidijffe. (f) Mr. Ntmeitz s'eft mpris i; en difant qne Mr. Heinfius r^fidoit a Florence en quali- //<;/;* t6 de Miniftre de la Reine Cbrifline (i). On voit par ce qiit a e^e* ditci-deflus , cequin'etoit pas a a e'te' le fujet de fon voi'nge en ftalie, & que ce ne fut que bien du terns apres ^^i-^*"*^^ " cation de la Reine, que Heinjius devint Miniftre des Provinces - Unies en Suede: d'ou ^'-^.j. il entretint plus de dix nns apres un commerce de Icttres avec cette Princefle, qui de- meura a Rome la plus grande partie de ce terns-la. (0 Vwn. Gcdiackcn I. c, pag. xy7 MEMOIRS SCONCERN ANT L'an. jnoindre tort au monde , & qu'il a outre fes expreflions en parlant d'efle. 6S4 ' Car, malgre les foiblefles, qu'on pourra lui trouver, elle ne laiflera pas de pafler dans 1'efprit des gens raifonnables pour une Reine douee de grandes qualites , & dont le cara&ere brille de traits admirables & extraordinaires. Apres cette digreffion que nous n'avons pas pu nous difpenfer de faire : nous ne ferons que nommer les autres Savans des Pa'is-Bas qui dans le terns ^ e Chriftine s'etoient rendus aupres d'elle , ou fe firent connoitre a cette crijiir.e. Reine par quelques autres endroits. Du nombre des premiers furent Fran" fois Junius & un Wullcnius , ou Weulles Hollandois, comme Baillet 1'apelle (a), Medecin de la Reine , qu'elle envoi'a traiter Defcartes dans fa maladie , mais dtant repute ennemi de ce Philofophe, des le terns de la guerre , que les Theologiens d' 'Utrecht lui avoient declaree, Defcartes s'obflina anerienfaire de ce que Weulles ordonna , & mourut peu apres. Wulknms fuivit Chriftinc en BraJmnt 1'an 1 654. & retourna apres en Su&de. Le fameux Bourdelot etoit aufli venu de France voir la Reine a drivers} () mais elle le renvoia d'abord en lui faifant entendre, qu'elle n'avoit pas befoin de Medecin. Ceux qui fouhaitent de connoitre les autres Savans de ces Pai's-la en tanc qu'ils ont eu raport avec Chri/line, comme Gervatius , Varftms^ Utilius, Gronovius & autres , en trouveront des particularites dans le Recueil de ]eurs lettres publiees par Burman , & quant au favant Boxhorniuf , qui fut ap- pelle en Sude , on peut corifulter ce qui en eft dit dans fa vie par Bafelius (*). Nous ajouterons au fujet de Jean Frederic Gronovius etabli alors a Deventer, que Cbriftine avoit tine eftime tres-particuliere pour lui , qui de fon cote ne pouvoit aflez admirer & loner les grandes qualites de cette Princefle. Elle fe diilingua aufli du grand nombre des autres , en ce que paflant incognito par Deventer en 1 654. elle defcendit chez Gronovius & pafla toute la nuic dans fa Bibliotheque a s'entretenir avec lui fur toute forte de literatures , tant elle etoit charmee de 1'etendue de fon favoir. Elle en fortit au point du jour , fans attendre la reception diftinguee , que le Magiflrat de la Ville lui preparoit. S'etant fixe pendant quelque terns en Brabant Mr. Henri Thomas Chiff,et y fils du celebre Jean Jacques Chifflet entra a fon fervice , en qualite de fon Chape- (a) Vie rfe Defcartes L. VII. 5. XXI. pag. (f) Burman /. c. Tom. HI. pag. 227 & 280. Moreri Diet. art. Junius. 233. Gal. Gualdo bijL de Chrift. fag. 45. (ft) Burman /. c. Tom. III. pag. 677. (*) Kile eft mife devant les Epiflolas f Pocmata Boxbornii , ou il eft dit,, Free ceteris gratia valuit apud Zuecos , quorum Regni Procerum aliorumque Magnatum filios & Pro- pinquos quum non fine fruftu injlrueret , ab Axelio Oxenflierna Regni Cancellario Regince ., ^? eorundem Procerum nomine ad amplij/imas dignitates in Zueciam evocatusfuit, Jed a- morein prcetulit Patrice f apudfuos mediocri in conditions ejj'e matuit , quam apud exte- n ros alto in fajligio collocari. Dans lo Recueil de fes lettres il y en a quelques-unesaux premiers Seigneurs dc Suj- de , & parini fes Poe'mes une excellente Epigram tne fur la mort de Guftave-Adolplie pa^ 1 7. & pag. 66. deux aut-res fur la paix , que Cbriftine donna d I'dllcmagw. CHRISTINE REINE :DE SUEDE. 28? Chapelain. II fe fit connoitre par fa diflertation latine fur les Othons en' bronze, ou il decida rondement: ,, que de trouver un Othon en bronze, ce ^ feroit trouver la Pierre Philofophale", s'en rapportant au refte , a 1'autorite de la Reine , comme etant la-deflus du meme fentiment que lui. Ce fera fans doute lui , qui aura porte cette Princefle a faire offrir en ce terns-la a; un favant antiquaire en Suiffe, trente miile florins, s'il Jui procuroit un tel & veritable Othon (a). Mais Chifflet changea depuis de fentiment & avoua qu'il y en avoit de veritables en bronze (b) , & aujourdhui cette croi'ance du fiecle pafle eft entierement efTacee par la quamite des Othons de ce me- tal qui fe trouvent dans les Cabinets , & dont on n'oferoit dilputer 1'anti- quit6 , d'autant moins , qu'ils nous font venus d'Orient (c). Chriftine cut aufli a fon fervice des favans dAllemagne: quelques uns gavan ,,., defquels, qui etoient de la Communion Lutherienne , elle. fit Profefleurs a /<**"* quf Upfal: car elle avoit un foin tout particulier de cette Univerfite. Non feu- lement elle en pourvut les Chaires , des plus favans liommes de Sutde & des pais etrangers , mais encore , tant pour exciter 1'emulation entr'eux , que pour les encourager eux & leurs Etudians , elle y vint fouvent en per- ionne affifter aux exercices publics. Mr. Chanut en parle dans fes Memoi- res & dit : (d) qu'il avoit ete prefent avec Chriftine a une harangue que le celebre Freinshemius avoit prononcee a Upfall'kn 1647,16 jour de lanaiflan- ce de la Reine , qui lui valut un prefent de mille ecus (*). II etoit alors BibliO- () Leben Chriftinse pag. 394-398. en bronze avec une infcription Grecque. (fo) V. Car. Patini Imp. Rom. Numism. (<:) V. Jobert ffience des Me'dailles nouv. pag. 129-133. ou fe trouvc aujjl fa lettre a edit. Tom. I. p. 37, f 56. f T. II. pag. 2. Charles-Patin '& ou il dit entr'autres cbofes , (d") Tom. I. p. 171. 214. 315. Molleri/fy- que Francois Gottifredo Chef des Cabinetsde pomn. p. 454. Manes Grotiip. 478. Chriiline lui en avoit communique une piece (*) C'eft la meme harangue que Mr. Hambrctus Suedois^ Profeffeur en Langues O- rientales a I'Univerfit^ de Paris, traduifit apres en Francois & l*y fit imprimer en 1655. Freinsbemius favoit la louer finement&en citant de belles penf^es qu'il lui avoit fouvent T u d{ c j eu f e , entendu dire: comme: qu'a moins que la moindre qualite" d'un Roi ne fut celle de penfees de la Ro'iaut^, elle ne 1'eflimoit pas pour un grand Prince: ce que Freinshem exprime Chrijline. encore avec plus de nettete" en latin : Necfemel audivi Chriflinam dicentem: Nonji- bi videri magnum Regem e'Je , niji in quo minimum Jit bac ipfaitt, quod regnet... item: que trouve-t-on, dit-elle,"a redire, fi quittanr & n^gligeantles autres concentemens, j'ahne cet ^xercice , par lequel j'apprens avec un honnete plaifir , quantit^ de bonnes chofes,quim'acheminenta .lavertu &ala prudence? Si j'emplo'ie en de belles recherches le terns que d'autres confument malheureufement ou a dormir,ou a fe parer, ou bien a faire des promenades inutiles? Etce fans prejudicier aucunement nia la R^publique, ni a ma fantd... item: qu'elle feroit extremement pafllonnde& foigneufe des Etudes, fi les plus doftes en devenoient plus Gens de bien.... item j'emplo'ievolontiers le terns a la leflure , d'autant que je m'aper^ois que par ce moi'en je ne perds aucun moment de ma propre vie: meme, je raugmente de beaucoup par celle d'autrui. Car ceux- la me font part de leur vie, dont je lis les bonnes aclions, les belles fentences &les fages avis.. . Mr. Freinsbem dit d'elle : jamais je ne me fuis aper^u qu'elle portat un autre vifage que celui, que je lui ai vu des le commencement, que je lui vo'iois hier & que je lui vois encore pr^fentement. Je 1'ai vue toujours joieufc, r^folue, ^gale Tome I. Oo dans 1649. MEMOIRES CONCERNANT Bibliothecaire de la Reine, & etant nomme Profefleur, elle ecrivit auCon- fiftoire d'Upfal , de 1'y faire jouir de tous Jes avancages attaches a fa fonc- tion (a). Entr'autres preuves de 1'eftime particuliere qu'elle avoit pour lui , celle-ci n'eft pas peu confiderable , favoir qu'elle remit a Ulm , fa ville na- tale,la plus grande partie de la quote-pare du tribut de la guerre de 30 ans qu'elle devoic pa'ier. La Reine Ten tint quitte a la feule intercetfion de Mr. Fmmhemius (b) (*). Le climat de Suede etant contraire a fa fante , il fat oblige d'abandonner les avantages des deux mille Ecus d'appointement & plus qu'il tiroit par an. Quoique Chrifllne temoigna du depiaifir d'etre pri- ve d'un homme de fi grand merite , elie ne laiflTa pas de le combler de frieh- faits, quand il partit pour fa Patrie & de lui contmuer fa' penfion. EHe le nomma auffi fon Confeiller en 1655. quand elle traverfa VAllemagne pour aller en Italie (c). II conferva toujours la mdmoire des bienfaits qu'jl avoit regus & mourut Tan 1660. Nous joignons aux notes une de fes odes qu'il fit au depart de la Reine d'Upfal pour Stockholm (f). Nous (a) Lettre de Chriftine 1651- dans les Re- . (c) F. Moreri Dift. Hi/}, art. Freinshem. gUres de I'UniverJite 1 . Bruckers fchrentemp. 2... Tb: pag; 78. item (&) Schejferi Mem. Suet. Gentis. Cap. Lettre de Tungel tiree des Mfc. 'de Gorman, XIII. g. VI. p. 83. comme aujji dans les Palmskoldiana. dans les profpe'rite's & les adverfite's, d'un efprit mod.r dans les rejouiflances & d'un cceur magnaniine dans la triftefle & les accidens facheuk (i)". (*) II s'en loue lui-meme & dit a Cbriftine (2),, Et id fecijli, quod adbuc vix proferre andeo, turn ob magnitiidinein rei , turn ob magnitudinem gratiarum, quastibi, quum de- beam amplijfimas , in prafentia minime pojjum explicare... Nam mea commendatione Vangidnum Urbi majorem pecunice in militum ftipendiunn debitce partem clefaentijfime remijifti: quo beneficio confervatam illam effe rear, & rite atque ordine fa&uram , Ji te . tanquam itlteram Conditricem fuam , in omne deinceps cevwn, qiiam poterit honoribus celendam arbitretur"... (|) In difcejjum Regince Chrifthias, Ode propemptica : O Deem noftrum pariterque Mundi Unicumfeptem columen trionum, Quam genus clarum , Jimul alma Virtus Vindicat dfiris. Ito! Sed fauftis Avibus , potenti Te tegat dextra Dstts, atque foj'pes Holmice optatas mdeas ut Arces , Numin'e ducat. Attamen ne nos nimium relinqnas , O Parent vtre Patrice , Jubinde Sed revifas Upfaliam benigno Optima vuhtt. Namque uti Phtebu<; rntilante Mwidum Igne colluftrat , nitidum Jed alto Oimm caput ccelo abjlulit, atra terras Nox premit Sic (i) V. Oration. Freivstxrnii en latin prig. 364. Jfi7, & en frAKfois pag- jo. 66- gj. 5cc. (2) Dans fa De'dicacc des Supplement a. pag. 20. CHRISTINE RJIiNJE D E SiU avons deja dit quelque chofe des 'deux favans AHemans Meiboin & JLudalphe. Avant leur-arrivee en S&fe , le ce'lebre Rexre .&fr/fcn y etoit ' Ig52 \ deja mort ; void quelques circonftances de cette mort (a), rtfne.- grande " maladie 1'ai'ant fait renoncer a la direction des Ecoles que le Magiflrat de Mrcflau, ou il e'toitne, lui avoit confiee, il s'appliqua touc entier a la Me- jdecine & apres avoir vu bien des Pai's & s'etre tranfporte avec fa famille en PruJJe, il cut occafion d'entrer chez le Chancelier Axel Oxenfti&-na , qui ,le mena en Suede , ou il fuc honnore d'une chaire de Profefleur en Me'de- cine dans 1'Univerfke d'Upfal 1'an 1636. avec le cara&e're de Medecin de Ja Reine. Les forces de fon corps ne fecondant plus la vigueur de ,fon ef- prit, il n'y vecut qqe quatre ans & mouruc en 1640. On aiTure dans fon r ljpitaphe qu'il entendoit vingc fix langues & on remarque dans fan oraifon funebre qu'il mela beaucoup de pie'te dans la pratique de la Medecine. Mr. Bayle fait la-defTus cette reflexion , que ceci ne feroit pas moins rare , que fon deflntereflement , fi on fuivoit les bruits vulgaires de la Religion des Medecins: car il comptoit pour rien 1'efficace des remedes , fans 1'affiftan- ce de Dieu, & il faifoit dependre de la be'nedi6lion celefle le fucces de la Medecine. Chrift. ^^fz/j- ; futun des Do6les diAllemagne que Chnfllne appella en Sid- de. On voit par uue de fes lettres au Confifloire d'Upfal (b) qu'il y fut Profefleur Extraord. en Langues Orieiitales , en meme terns que Freinshem Profefleur en Eloquence. Ravins s'en retourna apres en Allemagne. Mais la lettre de Naude , alors Bibliothe'caire de la Reine , ecrite a GaJJendi en v i> Ap9t n$. 1652. nous apprend , que Chriftine avoit achete la Bibliotheque de Raviusniim. xviui & Tavoit jointe a la fienne. Quoique le fameux Jmn Amos Cmenius ne remplit pas quelque Chaire de Profefleur en Suede., il n'y eut pas moins de part & d'avantage qu'au- cun des autres Etrangers. Car ai'ant public fon livre intitule -Janua Lingua- rum refermta , qui devoit fervir d'introduftion a une nouvelle Methode d'en- feigner les Langues; la Regence de Suede lui fit offrir 1'an 1638. la comm.if- fion de reformer les Ecoles dans tout le Roiaume (c). II ne trouva pas a pro- (o) Witten Memoria Medicor. p. 109. (fc) Elk eft du 4. Oft. 1650, v. les attts 117-120. Molleri Hypomn. p. 449. Bayle du Confiftoire. . Diet. art. Kirften. (c) Bayle f Moreri Dift. art. Comenius. Sic tuns vultus refovet fereno Omnia ajpe'Stu, quoties am(ena Luce privamur Domince , fjlefcunt Omnia luftu. Mr. Schaller ^crivit a Reibotbius en 1649. (i),, Itafane Regina ilia dquilonis, nonmi- Trois fs- nus ac Regina olim Auflri , fcientiarum avida tres viros jam e nojlra A<;adewia Argen- vans Horn- iorcaenfi tranfportavit ,Vneinsh&mlam t Hiftoriographum Regium, Schefferuin , Profeffo- ^f s ; 5" e r t rem Skytikum (Profeffor blc Skyttianus appellatur a Senatore Regni Suedes ) & lui dit: qu'a la gloire de Dieu , il pent & doit avouer , qu'il prevoit deja de plus en plus non feulement la poffibilite , mais aufli la facilitd de leur pro- jet (*). . . Mr. Baylc n'a pas fait mention de ces particularity's , mais il a- joute , que Comenius repafla en Suede , pour y rendre compte de fon Ouvra- ge de la reformation des Ecoles. Que fon Ecrit fut examine par trois Com- miflaires, qui le jugerent digne de 1'impreiTion , apres que 1'auteur y au- roit mis la derniere main. Que c'eft a quoi Comenius s'occupa les deux an- nees fuivantes , & qu'apres avoir parcouru bien des Pai's , il fe fixa a Amf- terdam , ou fon principal Mecene fit imprimer en 1657. fon ouvrage -de la Methode d'enfeigner. C'eft un in folio qui couta , dit Bayle , beaucoup de veilles a fon Auteur & beaucoup d'argent a d'autres , & dont la Republi- que des Lettres n'a tire aucun profit. La Reformation des Ecoles, ajoute Bayle, ne faifant plus fon principal entetement, il fe coeffa d'autant plus , des Propheties , des Revolutions , de la ruine de VAnte Chrifl , du regne de mille ans & de femblables traits d'un dangereux Fanatifme. 11 re- cueillit les vifions de Kotterus , de Chrijline Poniatovia & de Drabichts & les publia a Amfterdam. Gitftave-Adolphe & Charles-Guftave 9 Rois de Suede, Crmnwel & Ragotski avoient etc promis , comme les Executeurs de ces ma- gnifiques propheties. Mais 1'evenement n'y repondit pas. II s'attira de- ls une reponfe foudroi'ante de Nicolas Arnold , ou il fut reprefente comme un Efcroc & un veritable Chevalier d'induftrie. Arnold fit remarquer entr* autres chofes , les rufes que Comenius emploia envers Louis de Geer pour etre le feul poffefleur de fes liberalites & pour les faire durer longtems. La Panfophie , ou le fin de toutes les faiences feroit renferme , qu'il promettoic & qui ne venoit jamais, etoic toOjours retardee, difoit-il , par des occur- rences (a) Du || Juin 1643- de Dantzic 1. c. (J) Du 8. OSf. 1643. /. e. (*) Dans les lettres cities le Chanc. Oxenftierna avoit fait demander a Comenius : Utrum ille fperet ferib reformationem Univerfalem , rerun fcilicet humanarum tarn prolap- forum in melius emendationcm ? A (juoi Comenius rdpondit: In gloriam Dei confiteri poffnm ac debeo , videre me indies magis totius propofai noftri poflibilitatem , imd jam & ,t facilitatsm &c'\ Oo 3 294 ;M 'Q I#UE ;S . ;C /N C R N L'an -rences memorobles | ainfi , a force .de differed , il la rendoifientierement m inutile, felon fes principes , car il pretendok > que le regne de mille ans " commencerok fan 1672. Or alors on n'avoit que faire de fa methode dte- tudier. II reconnut enfin la vanite de fes travaux , & mourut a 4infte,-dam le 15. Novembre 1671. Pour peu qu'il cut vecu davantage , il auroit ete temoin de la fauffete de fes promeffes a j'egard du regne de mille ans , dont .il s'etoit tout infatue. Decethomme extraordinaire nous paflbnsa d'autres de fesCompatriotes" .plus folides & plus utiles a la Societe humaine , quifurent appelles en ce terns-la en Suede. De ce. nombre furent Mrs.Loccenius & Scheffer (*) , Be- aupere & Gendre (#). Us s'etoient deja^fak connoitre en Allemagne par de favans ouvrages de literature , & .ils fe diftinguerent particulierement ;en Suede, en ce que Tun & 1'autre, quoiqu'etrangers , acquirent une fi grande .eonnoiOance des aotiquites des Pai's du Nord, & les illuftrerent d'une ma- .nire ii eclatante , que leurs .ouvrages en.ce genre portent encore, de nos jours des preuves tres-fenfiHes de leur propre diligence & de celles qu'ils exciterent en ce terns -la dans les favans -du pai's. Mr. 'Scheffer fucceda & la menie Profeffion qu'avoit cue Mr. Freimhem. La Reirte le granifia d'une bonne penfion , qu'elle continuoit encore fan r66i (#). Qiiatre ans -a- pres que Chriftim revint en Suede pour la feconde fois , -il fit une belle ha- rangue dans 1'auditoire public d'UpfaL, quand le'jeune Roi Charles. XL y vint fa-ire fes etudes, & il ne manqua pas a cette occaflon de lui reprefen- ter, que Chriftine avoit fouvent honnore cet Auditoire de fa prefence & y avoit plufieurs fois ailiite aux exercices publics (f). Quant (a) V. les Did. de Bayle &f de JVToreri (6) V. Itj^ Rtgttres Je Sevsdt ~B$5t P4R. ' art. Loccen. f SchefF. item- Schefferi Siiec. 194. chez '.lit. Re'clement C*) P&*Mhd a remarqu^ 1. c. au fujet de Loccenius, que ce fut felon 1'avis qu'il don- de Chriftine na a Chriftine qu'elle lit un reglement pour les Univerfit^s de Suede, qu'aucun Etudiant pour les Uni-ne fercic regu Maitre en Philofaphie,:a moins qu'il n'y cut foutenu r deux fois des The'- ve-. fites de f es ou Difputes irapriinees dans les Auditoires publics de 1'Academie : ce qui fe pratique Su -* e ' encore de nos jours. ChrMinehon- ' (t) Voici comment il s'exprime la -deffus (i),, Revocabitur in memoriam Amlta tua non fouvent M Chriftina, vere altera Septentrionis Minerva, de cujus ergo, Upfalienfes Jludio amoreque de ft prefeu-,, faiius exiftimy filere , quim nunc velut in tranfcttrfu, pauca dicere : Eos inquam , Clui- cc runiverfi-^ ilina, quce tarn cbaras habuit literas, qua eruditionem oinnem tarn tenere dilexit, fuccur- to aUpfal. ^ ret frequentijfime , hunoremque pr cef entice faa tain crebro, tarn benigne , gratiofeque prce- Jlitum animis fubjiciet noftrif. Ipfafedes ifla, qua Rex optime recumbis , confcientiam examinabit fuam, atqua quotient tamfuave onus Jiijlinuerit , enumerare conabitur. Nul- Ins erat annus , quo non hue a curis & moleflia imperil , quodfolebatipfa dicere, in liber- t'atem Imnc & tranquillitatem excnrreret. Nullo tempore hue venerat , quo non ad negotia ,, defcenderet, nojlra, labores Docentium.Difcentiumque luftraret, commendaret" On -rfiri en paHant que ce Scheffer eft defcendant de Pierre Scheffer ou Schoiffer , qui aida '.Jean Faujlus a perfeftionnor 1'Artd'imprimer. II obtint en 1518 un t(Jmo:gnoge public de VEmpereiir Maximilicn'I. que 1'Lnprimerie avoit ctj. 6c 277. 7 ? U -""' : Hift. de I'lmpr. p. 4J . Sc Struvii faicic. Ill- Act. Liter, pag. i$. (z) Gruberi Anecd. Bgintburg. Tom. 1. pag. 14, M E M Q I R E S C O N C E R N A N T L'an conge qui lui fut accorde. II tiroit alors pres de deux milleEcus, d*ap- l652 ' pointement par an , & la Reine pour le confoler , lui fit un prefent de " quatre mille Ecus, avec tine chaine d'or de deux cent Ducats, & lui donna urie Patente en vertu de laquelle il auroit toujours le tftre d'Hiftoriographe (*) & de Confeiller & jouiroit d'une penfion viagere de huit cens Ecus par an (a). On rapporte entr'autres raifons de fa retraite (b) , 1'envie qu'il por- toit a Frcinshem & le defir qu'il avoit de 1'abaifler. . D'autres difent qu'il de- manda Ton conge dans 1'intention d'etre emploi'e dans ie Confeil de Chriftine y pretendant que c'etoh 1'unique moi'en de le retenir en Suede. Mais n'etant pas venu a bout de Tun ou de 1'autre de fes defleins, il quitta le pa'is Tan 1652. (f). Cependant la Reine 1'honnora toujours de fa bienveillance. Auili a-t-dn de lui quatre harangues qu'il prononja a 1'honneur de Chriftine, de fes rares qualites & de fes talens extraordinaires tant pour les belles let- tres que pour Tare de regner (I), Mr. (a) Palmskold dit que fa penjion ttoit de (i) Witte Memor. Philof. Dec. IX. Bur- quinze cens ecus par an. man T. III. p. 242. fcf 245. qu'on en fit), gracula , inodo dare voluit , aftoris quoqueipjius debebat perfonamjufcipere. Id quod cum autant a facere renuiflet , indignationem incurrit non levem. Hinc Upjalienjibus Studentibus jam d'autres ^ ante ob nimis duram difciplinam , cumprimis Sueconibus invijus , male habitus adeo fuit , irotelleurs. ^ M difce[]Tum p arar e neceffum baberet vir huge eruditijfimus. Ferunt nofte interceptum ,, platea p virgis oiolentijjime ccejwn fuiffe. Doleo ipjius vices. Sed quam veilem & a- ,, His idem accidere"! II faut encore remarqucr ici que 1'an 1660. Mr. Boeder foliicita par fes lettres a Mr. le Comte Torjlenfon & a Mr. Ilsbodinus , qui e'toient alors a Rome , de lui faire avoir une atteftation de Cbriftine, comment elle n'avoit pas ordonn^ qu'on ]ui donn^t des coups de Mtons, ^tant a Upfal: (i) ce qui fait neauimunsprefumer, que dans une autre rencontre les Etudians 1'avoient fefl^ , comme le dit ici Mr. de Boine- toitrg. (*) A'ufH avoit-il e"crit Hiftoriam Belli Sueco-Danici , imprim^e a Stockholm en 1676 in 4. qui cil a(Tez eftimee. II la dediu 1'an 1666. a Cbrijline, an Roi Cbarles-Guftave&a\i S^nateur Bi&rnclou. (f) Soit que Mr. Boeder ne put oublier 1'affront qui lui avoit 6t6 fait a Upfal, foit qu'il y eut laiiT des Gens qui ne lui vouloient pas du bien, nous donnerons dans 1'ap- V. 1' Append, pend ice la lettre qu'un Anonyme ^crivit fur fon fujet de Paris a un Theologien a L/p. num. XXXI.^a/, laquelle lettre ne lui eft nullement favorable. Elle fe trouve dans les Palmskb'l- diana. (|) Voici quelques traits de ces Pane'gyriques: (2),, Quid de fingularis exempli Re- Beaux traits ^ ginadicam, quce non [no magi s nomine , quam toto Liftituto (loquitur Me de Alexandrine , r " es h j ran " Mufeo)femper celebrabitur? Hsc illuflrium omnium ^f fui cevi animaruii*, non ad me- lio'der a > moriam magis in Bibiiotheca , quam ad colloquium f ufum domsjlicum in Regia Concilium 1'honneur de,, cosgit: Hcec tanquam Minerva aliqua, non ta;n ex fabulis quam ex mentis commendanda, Cbrijline. >? quicqttid in moribus bominum & ingenio abditi erf retruji , explorare judicio , videre ant- ,, mo, autoritate moderari , inter occu">ata temporafua, cum effet muneris ^f negotii regii diligentijfima , otiifiti negotiolum habuit (3) Idem Tomo IV. Praterquam autem quod ne- (i) Ccs deux lettres tirees des Originaux, font T. IV. p. 44. & 45. imprimees dans les Aft a liter. Sutci an. 1722. p. (3) C'eft auffi par cct endroit que Henri de 3-8- 3c 3 -,9. Vo'i'ez audi la lettre da 1 uc. Ho'/ie- faltis la loue finemcnt dans fa belle harangue 1. nius a /Joider de 1'anneJ 1660. imprimec dans c pag. 5. confr. Jlurchardi Hift. Libl. Ber^ri di itr. di L ; bris rar. f). 14 pag, zio. not. (i) V. Baeeleri Op;:. To:n, III- pag 294. & CHRISTINE REINE DE SUEDE, 297 Mr. Herman Conring etant repute Thomme le plus favant SAllemagw en L ' an ce terns-la , il cut etc etrange , que Cbriftine n'eut pas eu envie de le con- 16S2 '__ noitre perfonnellement. Elle chargea done le fe'riateur Adkr Salvius du foin de le faire venir en Sutde , & celui-ci 1'amena avec lui a Ton retour du Con* gres de la paix de JVeftphaUe (a). Mr. Conring fut fort gracieufe de la Rei- ne & des Grands du Roiaume , &..Ckriftine conjut.pour lui une eftime 11 particuliere, qu'elle voulut le fixer dans le pai's. Elle-lui fit pour cela des v, ofFres fort avantageufes , qu'il s'excufa d'accepter fur ce qu'il ne pouvoic pas abandonner fon fejour de Helmftedt. .Cela n'empecha pas que la Reine le nomma fon Confeiller (*) & premier Medecin, & ne le comblatde pre- fens magnifiques a fon depart. Elle fit plus. Elle lui afligna quelque terns *&J apres un falaire de feize cents ecus par an & le voulut attirerde nouveauen Su&de. Mais il n'y avoit point de promefles ni d'offres aflez grandes pour le faire quitter fon polte fi cheri a Helmjledt 9 ou il mourut fur la fin de J'an- ne'e 1681 (f). Nous (a)' V, la -vie de Conring dansfes Opera. Burch. Hifl. Bibl W. P. HI. p. 182. &c. infol. Tom. 1. pag. 3. &c. item Smidii vita &. p. 262. Bruckers Ebr. Temp. IV. Ze- Conringii pag. 8. fcp 9- t. Gruberi Commerc. hend.jp. 159. 161-166. Epift. T. l.p. 13. $ T. II. p. 1000. item ,, nemo fantts detre&are poteft evidentiam divince ordinationif , qua tales Minijiros (qhos meros Drufos, Germanicos, ^grippas , Meccenates diverts*) non niji tali Reginte nafci fie- riqne volute : etiam iliud meminijje debebant , qui de rebus grandibus &Janttis prof aria ,, aut bumilia fapiunt , Magnorum Mintftrorum nomen vixfalutare effe Reipublicte , niji fubMagno Principe, cujus prudentiam & virtutem cogantur revereri Attingam pau- ctffimisfed verijfimis verbis : Nemo prorfus ex iftis pace belloque illuflribiis Proceribus^ quorum fapientia Reginii fuevit uti , quin admiretur &fafpiciat Regime fuce prudentiam- in omnia expeditam., animumque in arduis magnum, infutiiris providum, in dubiis foler- tern, ir. eligendo perfpicacem, in agenda celerem , in ordinandis rebus compofittim : Nema ,, eft quiferiarum cnrarum confcientiam adbibitus non recedat admirabundus , fibique f Pa- ,, tries de Regina incomparabili gratuletur. .. . Veniant , Jicut venenmt baftenus , varies Nations s , varii bomine s , f hoc in minimis ponant , Ji Reginam audient ftta Italis, (ua Gallis , Belgifque verba redder e , Eruditorum linguas ipfes eruditis melius callere. Nam Ji magna pojjunt caper e , non alio potius exemplo , -virtutem rerumque laborem , nee minus fortunam utriqite amicam condifcere optabunt" (*) En cette qualit^ la Reine lui donna la commiflion en 1652. de mettre en ordre les Archives du Duche" de Breme (i) enfuite dequoi il publiaen faveur de la Sue~de fon Trait( de Juribus Archiepifcopalibus in Urbem Bremen/em , au fujet duquel il ^crivit la lettre a la Reine que nous infe"rerons dans 1'Appendice. Le Roi Cbarles-Guftave Succef- v . feur de Clriftine lui continuant les memes honneurs & la meme penfion, Conring (5cri- vit, du terns de la guerre centre le Roi Cajimir de Pologne,\ine piece intituled,, Cyriaci Tbrafymacbi Epiftola ad Andream Nicanorem de juftitia armorum Suecicorum in Polonos" & une autre fous le titre de,, Cafus Mirus de cafu Caftmiri excu[)us, 1'an 1656. in 4. " Nous avons marque" ci-defTus pag. 152. qu'il prit la d^fenfe de Cbriftfne & de la Suede, centre la Bulk du Pape , qui contenoit les proteftations contre la Paix de IVeJlfialie. (f) Void l^pitaphe que Henr. Meibom lui fit (2). Epitaphs do * Conrinzius. Hoc twnulo clauditu* Regum Principumjue Conjiliarws: Juris Naturalis , Gentium, PitUici (i) V. Ctr.rir.g. Op. Tom. I. pag. 84^. 8c T. (i) V. Msreri Di(l t art, V. pac;. zz. item P&lmd$ldn Tome I. Pp MX M I R E iS C O N C E R $T A N^T 't'an Mous aurons encore occafion dans la fuitede parler d'autres Sarans tant demands que d'autres nations , a qui Cbrijline fit part de fee 4ibera!i:es , comme a un Laurent Eodock , Profeileur de 1'Univerfite de Roftock , qui ti- ra de cette Reine la penfion de trois cents ecus par an depuisfan 1646. bien des annees de fuite (a) (*). Et pour Jes Savans d'ltalie ,, qui ont eu quelque liaifon avec cette Princefle, nous differerons d'en- parler jufqu'a ce que nous foions aii periods du fejour de Chrifline dans ce pais-la. Cepen- dant comme nous avons die ci-deflus quelque cljofe de la belle harangue que enavio F) (f) nous ajouterons aci , que ce fut le Baron Ba- en confid^- yw .ration aupris ( a ) ^ /^ p n i, ns ^61diana art. Bodock. pera Ferrarii T. l f $ag, 260. ?c. eft,. (b) Cette harangue je tnuve- dans les O- T. II. p. 91. ,-i r !; ,,. Publici DoSor: Pbilofopbia ,, Peritijfimus Pratticce ? Tbeoreticce : Pbilojopbus infignis : Orator: Poetar Hiftoricus: Medicus : Theologus :. ..! Multos putas bic conditos? Unus eft HERMANKUS CONRINOIUS, Sts-culi Miraculwn. (*) Par la' vie dti fameux ^" Joachim Becber, qui eftmife devant fon Trait^ intitu- Id / Foligjage & la foils fagejje , il paroit, qu'il a & du terns de Cbriftitie a Stockbolvi & qu'il y. a-connuMrs. Dejcartes, Saumaife, Naudt, Boeder, Freinsbem, Scbeffer & au- tres Savan? qui fe trouvoient environ les anne"es 1650 a 1653 la Cour de cette Reine. 11 ne fe peut done, comme le pretend Tauteur de fa vie (i) que Becber ne naquit a Spi- re que Tan 1645. puifqu'alors il n'eut eu que cinq a huit ana , & par conft*quence qu'il' cut & peut capable de fe m^ler avec ces Savans du premier ordre, qui de leur-cdt^ fe feroient peu fouci< d'un garden de cet ge-!a. Cependant comme Becber lui -meme dit dans fon Trait^, qu'il a et pr^fent a Stockholm, quand le Colonel Slndre Reufner, for>! intime ami comme il I'appelle, entreprit de conduire les eaux par-defius la Montagoe de Bninkeberg , fitu<5e au Fauxbourg du Nord, molennant un fiphon de plomb , qui lui i^uffit fi mal& lui fit perdre une gageure fake la-deffus avec leG^nt:ralde^ r wn2(2), cela contirme bien ce qu'il a dit, qu'il a fait quelque fejour a Stockholm: mats le terns de la uaiflance dc Becber doit en conf^quence etre reculti plus avant, meme en comparantles difF^rentes avantures qui lui font arriv^es en plufieurs Etats de Y'Europe, durant fa vie, & qui femblent demander un age plus meur & plus ayanc, que oclui qu'on lui donne commun^ment, favoir de quarante ans en- uiett.int celui de fa mort a 1'au 1685. Mr.. Jvcber dans fon gelebrte lexicon Art. Becber, le fait naitre en 1635. & mourir en 1682.. Le Sieur Meiijcbsnius pnrle d'un autrt favant sJllemand nomint^ Jufle de Braining (3) qui s'^toit rendu a Stockholm' en 1649 & avoit etc" regu fort gracieufenient de Cbrijline , a caufe de fa grande Erudition. Mais pour ce qu'il y eft dit, que Braining, avoit (he 1 arbitre des controverfes entre SaumaiJ'e & Vojjlus , lefquels tous deux Mr. MeuJ'cbe*. pretend avoir ^t^ alors preTents a la Cour de Suhle', je m'aiTure que Meujcben fe trom- pe vifiblement, car Saitmciife n'arriva a Stockholm qu'environ ?u milieu de 1'ann^e 1650* & a ce que Meujcben dit lui-meine, Bruining en ^toit parti 7. 8. mois avant cetems- la. 11 y a done tout lieu de croire que. le re"cit de J'Arbitrage de Bruining entre ces deux favans hommes n'a Jte fait qu'a plaifir. ' ^ I'Ap. fj) Nous infcrerons dins I'Appendice la cerrefpondance qui fe pafla Ia-de(Tus cntre num. Voffms & Ferrnrio & la lettre que celui-ci en ^crivit a la Reine (4). XX HV' (0 V. la vie de Betbtr 1. c. p.- j. & u. & (3) V. Mtufchntli vitx. Efudit. Viror. P. Mortri Di&. art. Decher. p. }(io. 161. (z) L- t- r. II. art. XXIX. p. ijo.. (*,) V. Op. FerrariiTona- II. p.. 8;. 87. gp.& C H-JL fcS:T IrN^E .& E 1 N ! ID E S W wr/V fife dirChef dos armees de &^<& en- Mmagne j& Pro-Re&eiir albrs ds r'Univerfice dc Patbue', qui 1'y excita & J'y determina. Qitte harangue .pluc cant a ia Heine , (*> qu'elle lui fit prefent d'une Chaine d'or de la va- v .r Append leur de inille ecu* d'o (millonorum Aureomm torque) (a\ Fermria s'en fie uri nui n. xxxv grand honneur, en meme terns que fes CoJleguea eo CDOpirent; contre lui -une extreme jaloufie (^). Mr. Heinfms ecrivk ia-deflusa Cbriftine, quecom- jne d'autres 6avans fen pourroient prendre occufion dp:, lui aiddr >clieroi!r d'err empecher aw moins li foule des mediocrerrrent lettries , & qui n'approchoierit pas de la capacke de Mtu Ferwrio (X)i QUelque jei'e qa'euc celu^, C a)F./aF;^W.rerr a no/.,.^.( 5 i3. (*) Cette hanmgue eft ^crite-styec toute la d^iicatefle poffible & voici en quels cer- nves il a'exprime vers la fin au fujet de Cbriftine (i) ,, Et mirabitur quijqtiam , aut In a- ftentatibnem regie magnifies ntia; fo& urn putabit , ut in toto orbe nullus jam fit, literarwn ,, ac monumentonitn fama confpicuus , qui in cwnitatu tuo non conj'piciatur , qui non aut ,, fponte tibi facramentum dixerit , aut amplijjtmis tuis pramiis in tantam fortunam non Jit 3 , evocatus? Ex omnibus Academiis , ex umni do&vrum c&tu , ex. omni-pene terraruw an- , gute, aulcanttuan, novum. hoc tempeftate pryttmeum celebrant, nuliifque re i familiar if , inconsnodis nut curis-avocati., optima fide immortalitatem negotiantur. Scilicet ingenia ia.ui , fvvere quaim aftimare novijli, fuifque momentis expendere , cf ideo foves , quia judicafti: , Nullo cogriitori aut fujfragatore tibi innotefcunt. Anie tibi expetiti , quam fe cognitos ne , Jperare quidem auderent. QiianVus , Dii Deteque , eorum ftupor & infelicitas , quorum , laudesji latino, oratione prodantur , metuere pojjunt, ne Jibi injcitia , ne /ocordia objec- teturl Tu pares ac modefit, laudibus tuis frueris , ad quas intcUigendas non eft tibi opuf interprets, qua fi doBos non invenifles, tamen facdre poteres. Nee wins modo , aut al- ,, terfolo ingenii cenju aults principibus adnumeratur, avideque exterorum oculis quaritur, fed circa te do&orwn popuius efl , dumque literas ac dij'ciplinas per orbem profeminas , i geniis orbemfpoliafii, u facilius Jit , in tatito fervientium- grege eruditum quam bomineitt invenire. Nullus tamen numerum facit , cum-quilibet -borum J'oitts vel etiam regiam nobi- litare pojjit : viri in omni doctrinarum genere fummi , capita libros omnes ac fcientias pcr- ^, vagata, exoticarum linguarum totiufque antiquitatis peritia duraturijque eeternum monu- ^ mentis feculo majores , qui olim neminabantur , nunc intelliguntttr -. ut jam vel ex jolafa- milia-y quanta fis, etjlimari poj/ts. Hostu allonuio &. obvia etiam ignatis comitate tibiob- ftringif, opimis congiariis ditai , labors provocas , cemuiatu accendis, f ad bene de po- .,, Jleritate merendum inflammas: denique fcribendi exemplwn ^f mater iamfuppeditas. Jz<- ,, f e igittir tantv ingeni or urn proventu , tot que literarum beroibus , novis ijiis Atbenis , no- ,, wan peplutn-tibi janEliori Minerva cmtexi poteft^, quod panatbenaicis tuis prtzferatur. Nos bic facris fiienti um prcgftabimus. Efcum nobiliori hac poiapa Germani , Galli, Bata- wi, dnglii &, Ji nonfaftidis, Itali, laudibus tuis defatigentur . diverjisque linguisac ,, dijjbno plaufu nomen tuum adjidera vocent, vox tamen populorum jonat una, qua Sueci- ca Pallas, Mujarum dccima, regnantium prima, Guilavi fcboles, Patrice, Senatits ac Caftrorum Mater , literarum- ac- difciplinarum certijjlma falus ac miraculum prcedicaris. Dtxi. (f) II en parle ainfi (1. c. pag. no.) dans fa lettre a Heinjius: F/r did poteft qnan- ,, tamtempeftatem regiutn munus cammwerit : qui furor , ne dicnm, livoris rabies exarfe- ,, rit: quibus non alium toryucm de paupere loro opto, fed hoc unum fuppliciurX ut perpe-tuo ,, ringantur. (|) Voici ce qu'il en dit (2) Omnium literatorum oculos in Te, Domina, convertit Tw (i) V. Opera Ferrarii T. I. p. 279- 281, (j) Burma* Syll, Ep. Tow. HI, pag. 7*4. Pp 2 ' 3 oo MEMOIRES. CONERNANT celui-ci du prefent qu'il avoit re^u , ce ne fut rien en comparaifon de celle n qu'il fentit a la reception de la reponfe que la Reine lui fit encore de fa - propre main. Elle eft en latin & il eft fur qu'elle 1'a compofee Elle-meme: Tous les Connoiffeurs avoueront qu'elle pofledoit cette langue en perfec- tion (a). La voici avec la tradu&ion. Ottavio Ferrarto S> PAnegiricam tuam orationem^ qua bond Principis exempJum Gtque imaginempublico dediftifub umbra mei nominis , munufculo jam pridcm teftata fum , non in- gratam mibi fuiffe. Nibil pro- feffo caujtf erat 5 cur eo nomine gr alias iteratafcriptione ageres , Ferrari politi(Jime ; quamquam compcllationes cjufmodi 3 gf tuas & a Tuisftmilibus profecJas ha- beo atque babebo acceptiflimas. Qu Torquatus nojlcr. Munus enim ipfum collo appenfum eircumferre nonnwnquam foist pro nitore gentis. Metus itaque eft , ne regiam 'liberalitatem admirari incipiant etiam illi ^ ^ ce ^ eras virtutes Tuas ceftimare non pojjunt , fcriptifque tantum non trivialibus f qitc- ^dianis promifcue tuum patrocinium imploretur. Oitamquam curat mibi erit pracipue , ut dekftus ingeniorum babeatur, ut paucis imitari liceti feirariuin , viilgusque ajacris tute longe CHRISTINE REINE DE SUEDE. 301 viri eruditione pr . S.U E D E. 05 helavfans opulence! (a). Mr. toparle de ce Rabbin, comme d'un homme I/m fres-favant & d'un efprit fubtil (/;). Mr. Barleus I'aitnoit fort, comme on m peut le voir par ces vers, qui lui firent enfuice bien des affaires: -99 Si fapimus diverfi y Deo vivamus Amid: , 9 Doftaque mens pretio conftat ubiqitefuo. Hacfidei voxfutmna mea eft: Hoc crede MenaJJe: Sic ego Chrijliades: Sic -eris Abramides (*). Jufques ici nous avons tache d'eclaircir les differentes correfpondances qu'eut la Reine Cbriftine avec prefque tout ce qu'il y eut de plus favans .Hommes en Europe, & du nombre defquels il y en eut fort peu, a qui elle ne fit fentir les effets de fa bienveillance & de fa liberalite. La confequen- ce la plus aifee qu'en tirera d'abord le Le6teur, fera fons doute, que tout cet empreiletnenc d'une jeune Reine a vouloir entretenir commerce de let- xres & fe Her familierement avec des hommes d'un profond favoir ; que (es invitations reiterees pour les attirer & les faire venir en Suede; que fes ef- forts pour les retenir aupres d'elle ; que fes liberalites quelquefois detnefu- res, qu'elle faifoit aux uns & aux autres,- que tout cela, dis-je , n'abou- tuToit gueres a autre chofe qu'a faire parade de fon favoir , de la vivacite de fon efprit , de fon application aux belles-lettres & aux fciences : enfin , qu'a fe faire par - la un nom dans le monde & a porter les favans a chanter fes louanges, en toutes les langues qui leur etoient familieres. Je ne difconviendrai pas abfolument , que dans cette conduite deDu princ.>e Cbriftine 9 il n'y entrat queique portion de cette ambition, & meme, fi on f e e m 1 ^u i d fi es '' veut , de cette vanite , qui flate tous_ceux qui fe trouvent en etat de Kctr&mt * produire du cote le plus brillant, & qui ont le coeur aflez noble pour faire! du bien & des generofites aux autres , en ne demandant pour toute re'tribu- tion que queique teraoignage public de leur gratitude. Mais ii on veuc fe donner la peine de reflechir un peu plus fur cette maniere d'agir de Chrtf- tine, on trouvera furement , qu'elle cachoit un but beaucoup plus releve, & qu'elle avoit principalement en vue le bien de la Nation Suedoife en ge- neral. Car , comme on aura remarque dans one de fes lettres a Mr. Sar- (a) V. Bafnage /. c. pag. 998-1008. item (?) V. Prafat. Demonftr. EvangeL fag. Bayle Did. art. Spinoza lit. A A. item Bi- 3. & dans les Huetiana pag. 224.. Wotbique An^loife T. XIV, P. I. pag.-pS. &c. (*) Bafnage dit a ce fajet: Menafleb u'^toit pas de ces Juifs incommodes, qui fuient- la foci^ti des Chretiens. II avoit des Amis entre les perfonnes de 1'Etat. La chofe al- Ja fi loin, que quelques Savans & Thdologiens s'en allarmerent , & firent un proces 3 Barlaus, des vers qu'il avoit publics a la louange de fon Ami. La guerre s'dchauffa, chacun prit parti , & le Poe'te eut du deffous centre un homme qui cro'io'it plaider la caufe de Dieu Ci). ,{i) V. Hasnagt 1. c. pag. 95$. Toms L Qq 306* ME MOIRES CONCERNANT ^ >an * rau , 011, en lui recommandant 1'achat de la magnifique Bibliotheque de 1<5s - 3VIr. de -Mefmcs , elle le prie inftamment, qu'on n'cn otut aiia.n ancien Ma- nufcrit , & qu'on lui envoi'e le tout auplutot. L'unique raifon qu'elle lui allegue de Ton empreflement pour cette acquifition , c'eft , qu'elle vouloit introcluire en Sui'de le goftt des belles chofes, dont la France abondoit: d'oii il pafoit, que tout le refte n'e'toit rien pour elle, aii prix des belles-lettres & des fciences , qu'elle avoit envie de rendre plus communes dans fes E- tats, qu'elles n'y avoient etc jufques-la. Et en verite quand on confidere les ( tems les plus recules de la Samdinavie , on voit que les belles-lettres & ks fciences n'etoient pas des chofes dont les habitans fe miffent beaucoup en peine. Uefprit de conquete tenoit "bien plus a coeur aux anciens Goth? & Suedois. Us prefdroient une grande fimplicite de mceurs & une maniere innocente de vivre a tout ce qu'on appelle literature. Toute leur fcience le bornoit a la Mythologie (*) ou a quelques mifteres du Cuke divin, cjoiit les Pretres e'tOient les principaux Depolitaires & a une efpece d'Hif- tolre melee d'autant de fables que de verhes hiiloriques (f). Les memes tene- (*) Ce^te Doctrine a t tranfmife jufqu'a nous dans les Ouvrages des plus anciens Mytholpgiftes des Peuples Septentrionaux, favoir, d'Edda & de Volupfa , que de Sa- vans Antiqriaires out tache de rt^luire en Syfteme (i). Mr. Wilde a fait voir quecet- te Mythologie eft une des meilleures de celles des auu-es GentUs , & qu'elle , s'accorde aflez avec la Revelation, ^f) Tels font cntr'autres tous ces anciens ouvrages qui portent le titre de Saga en Sticclois ce qui autrefois vouloit dire une Hiftoire ftjrieufe, mais fignifie aujourdhui des Contes de VieHIcs,a caufe des eV^nemens extraordinaires & romanefques dont le recft hiftorique y eft farci & embelli. II s'en trouve grand nouibre en langue Gotbique & If- laiuhije dans les Archives des Antiques de Sutde, dont une bonne pavtie aetii publit5c au d(5pens du public avec la traduftion en Suedois moderne & en latirf. Comme ces hiftoriens he laiffent pas de re"pandre beaucoup de lumi^re fur 1'ancienne 'hift-oire du Nord; il y a au de-la d'un fit^cle que les Rois de Sittdc entretiennent plu- fieurs Savans Antiquaires Reinterpretes dans ces Archives-la, pour en fairelatraduciion & mettre ces Ouvrages au jour. Get inftitut fera bien 1'unique en fon efpece dans toute I'Europe & c'eft par le mo'ien de cette foci^t^ & d'autres favans du pa'fs que la Sntde peut fe flater que fes antiquit^s font mieu'x: d^velop^es qu'aucune des autres Na- tions de la partie feptentrionale de 1' Europe, pour autant qu'on puifle monter au terns Jes plus recule"?. Ce qui n'y contribue pas moins, c'eft que par ordre de la Cour il eftenjoint aux Univer'fitc.s duRojaumed'encourager les Savans, & lesluudians,guiafpi- rent aux grades, de travailler par portion fur ces matures & de lespublier pourl'inftruc- tion du Public. C'eft de-la qu'eft venu ce grand nombre de Trait^s & de DiiTertations des Antiques & de la Geographic de Suede, lefquelles ramad^es dans un Corps, de- puis Je terns de Cbriflive, jufqu'a prefent; feroient bien cinq gros volumes in folio, comme on en peut juger par le projet de Mr. de Nettelbladt , pr^fentement Aflefleurde Ja Chair.bre de 1'Etnpire , qui avoit 1'intention, il y a quelques anne"es de les publier par voi'e de foufcriprion.... II n'eft pas a douter que ces Antiquites n'eclairciflent aufTI en bien des endroits celles d'sJllemagne & d'autres Pa'is, dont plufieurs faits & coutti- mes anciens refteronta jnmais inintclligibles, fans une connoifTance fufBfante des Antiqui- tes de Suede: n'y aiant aucun pais, du Septentrion, ou il y a tant de beaux reftes de cho- ( i) V. Loccenli Antiq. Suec. Goth. Libr. I. &c. & c. VI. p. ij- &c. & Wilde Hift. Prag. cap. III. & Libr. II. cap XIII & XIV. p. 13. Suec. c. II $: 10. item la me me trad, en Su (his 70.. 74. &c. item Dnim Hift, SBCC. c. v. p. uj. p. 36, 37 & "* 8cl'Aj)pend. $. ij. pag. joz. Sec. CHRISTINE REINEDE SUEDE. 307 tenebres , qui cbuvroient alors la plusp3rtdespaisdumon.de, dtoient d'autant plus epaifles fur 1'horizon de la Scandinavie , que ce ne fut qu'au I<5 5- commencement du IX.fjecle,que le Chriftianifme y prit confiftance. Bien- " tot apres fuivirent les fiecles des Moines & de 1'ignorance , auxquels fucce- da 1'epoque malheureufe des troubles & des guerres civiles , qui durerent au de-la de deux cents ans. La Providence, pour de'livrer h'Sutde de 1'opprefilon & d'une mine to- tale , fufcita Guftaye. I. de la famille. de Wafa , qui la preferva du joug de la fervitude , oil toute la Nation etoit fur le point de tomber. Eclaire , comme il etoit , il introduifit la Reformation dans la Religion & dans J'E- tat, & fachant le luftre que les belles-lettres donnent a une Nation , il ne tint pas a lui , qu'elles n'ai'ent fleuri deja , pendant les quarante ans qu'il gouverna heureufement la Suede. Jamais les Biens Ecclefiaftiques ne furenc mieux emploi'es que par lui ,- puifque non feulement il en d6ta plufieurs Hopitaux & Ecoles pour rinftru&ion de la jeunefTe du Pa'is 3 & furtout rUniverfite" d'Upfal , mais qu'il y joignit encore une bonne parde de fes propres terres , comme le tit apres lui le Grand Guffaw- Athfyhe fon Ne- veu: deforte qu'il y a peu d'Univerfites en Europe pourvOes a 1'egal de la premiere en Stride (*). Chrifline fuivit les traces de fon Fere , augmenta encore chofes Antiques en pierres f^pulchrales , avec des infcripttons Runiques, en Tombes &. en d'auti'es Monumens du vieux terns, qu'en Suede, done on voit un grand Recueil a Stockholm dans les Archives des Antiqutte's. (' ;i ) A cette occafion nous touchwons quelques particularity concernant la Btblio- D C j a ?ran . theque d'Upfal, &. nous profiterons pour cela de I'Abr^g^ de I'hiftoire qu'en a donne\i eB !blioi:he- Mr. le Profefleur Olave Celfius , (i) le-fils, & des remarques qu'a faites la-deflus Mr. que d' AnAri Norelius', Chef de la dite Bibliotheque (2). Le premier rapporte, que Guftave- & ' ll1 4dolpbe y appliqua he refte des Livfes & des Manufcrits du Ro'iaume, & que non feur. ieux lement il lui donna fa propre Bibliotheque, mais encore plufieurs qui fe trouv^rent dans -les pais conquts en Liuonie , en P ruffe & en Allemagne, entr'autres. celle de IVurtSr bourg; & apres fa mort, celles d'Olmutz & de Prague, que Chrifline y fit entrer, e- toient fort confide'rables. Cbarles-Guftave 1'augmenta notablement des de'bris d'autres Bibliotheques qu'il fit tranfporter 1 en Suede', au tern's 'de la guerre de Polvgne : deforce qu'avec les acquifitions qu'elle a faites depuis par j'es lib^ralit^s du Chancelier Corate Magniis de la Gardie, de-Mr, de Sparwenfelt & d'autres, outre les achats qu'elle a faits de fes propres revenusj les volumes impritrie's, qu'eile pofTe'de afhiellcment, pafTent le nombre de cent mille , non compris les Manufcrits, dont, ^ la verite*, le rtombren'eft pas fort grand, mais dont'il y en a ponrtant d'alTez important?. Le phis pr^cieux de tous eft celui de 1'Evangile d'UlpMlas, qui , pour I'ancftnnete' des cara6leres Gotbiques^ furpafle tous les Manufcrits de la Bible, que Ton connoit dans la Cbretiente 1 , a'iant e"td e*crit au milieu du quatrie'me fieple qui eft le terns oil vivoit Ul-pbilas Eveque des Goths (3). Les carafteres en font dor^s & argentt^s, d'oii il eft appelle* CODEX ARGEN- TEUS, & non de la couverture d'argent, en laquelle il eft relic 1 . 11 s'eft trouv6 au- trefpis dans 1'Abba'ie de Werden pres de Cologne, & a e"te" tranfport^ de- la a, Prague, 1 pu (i) DansfaBibliotheca;UpfalienfisHiftoriapag. fj) II eft dit da;ns lesRegitres du Senat ad ann . li. 20. 25. 36. 50. 85. 117. 153. item Le;eenii i<56i. pag. 723 dans Palmskold que 1'antiquite de Hift. Suec- Libr. VIII. pag. 589. ce Mfc. pafle quinze cents ans. cfr. les voiages de (z) Dans fes ftrifturs in Biblioth, Upfal : Hif- la Mottraye T. II p. jif... toiiam. Germ. Prsfat, f. XLVI. 1650. 3 oS M E M O I R E S C O N C E R N A N/3D encore de beaucoup les revenus & les avan cages de fon Uaiverflte (*) & ou le Felt-Mare*chal Konigsmark le prit avcc la Ville & 1'envo'ia a Chrijline. On veut bien , que la Reine en fit preTent A Ifaac VoJJius , (i) mais il ell plus probable, que Vo'fez ci- Voffius 1'emporta fon infiju , lorfque la Bibliotheque de Cbrifline fut pillde par les Fratifois & par Voffius lui-meme. Enlin Mr. le Comco Magnus de la Cardie 1'acheta tno- lennant deux-niiUe ecus en Brabant, & en fit preTent a la B-ibliotheque d'Upfal (2). Le favant Archeveque feu Eric Benzelius y a remarque" un paiFage de plus dans 1'Evangilc de S. Luc. Ch. IX. v. 50. qui ne fe rencontre dans aucun Manufcrit Grec , & qui fem- ble y devoir tre. 11 en parle dans fa lettre d Jean Albert Fabricius & lui dtt:,, Antta- n ne a Te quafivt, num unquam legeris vel in Mfc. Codicibus five Gratis, five Latinisj ,, vel apud Paires Ecclejice hoc additamentum commatis 50. Cap. IX.Evangelii Lucce, quod , t in Codice Ulpbiano reperi, de indujtria a Fr. Junto &? Marefchallo omiffum? Nemo enin j, fft V 1 * non operator virtutem in nomine meo. In grceco hand dubie fuit,.. confr. M'arc. IX. 39(3)". Outre les deux Editions qa'en ont faices Francois Junius&.Ge8rgeStiern- biilm. t dont parle cet Archeveque (4), il en- a laifle une copie plus^xadle,. que Mr. Leye, fort verf^ dans les Langues Septentrionales , fait aduellement impriiner a GJC- fort, oil les caracleres Gothiques, dont s'elt fervi Junius, font auffi confervas. A ce que tant d'autres ont te Libra , qiie;n Codicem ArgtnUum appellat, quoniam jcriptus in Membrana. violacei coloris eft. Diu jervutus fitijje dicitur bic Codex in Abatia- Verdenfi prope Co- loniain Agrippinam , pojlea in Sueciam tranjlitus , cwn aliis Jcriptis ex urbe Pragcnfi. Incertum quomodo poftea. in Flandriam tranjierit, ubi Comes de la Gardie, GanceUariuz Regis & Regni Suecisz , eundein emit ducatis jexcentis , donavitque Bibliotbecce Upfalicn-? fe. Niaic dicitur ejje paffim nimio bumore correptus, foliis etiam parturbatis in. to non ' paucis. Ve rfionis hujus Gotbicce Autor fuijje Ulphilas creditur, Gothics. Gentis An- tiftes. de quo fcrififit Theodoretus libr. IV. Hi\l. Ecclef. cap ult. Socrates Libr. IV. cap. XXXI. &c. Sozomenes Libr. VI. cap. XXX71I. & bunc [ecutus efl Nicephorus Callift. Libr. XL cap. XVIII fc". Sur quoi nous remarquerons en p^u. de mots x que fi le P. Montfaucon emend que ce Manufcrit fe foit gU(5 depuis qu'U eft en Suede, il fe treinpe : car non feulement il ell renferme* dans un boete trtis - propre fait cxpres pour cela, mais le Msc. me'ine eft ent^reraenc couvert d'argent cifele, oil d'un cocoon lit ces mot? : Ulpbila- redivivus 3* Patriot reftitutus euro, M. C. de la Gardie R. S, Can- cellarii A. 1669* & de 1'autre font reprtifente'es les Armes de ce Comte. Au refte le c^lebre Conr-ing f.iifoit tant de cas de cette verfion d'Uipbilas, qu'il la pr^f^roit auxver- ions Syriaque, Arablque, Etbiopienne & a d'autres (6). On n'a qu'a lire !es remarques de Mr. Norelius pour etre convaincu que c'eft en langue Gothique que ces Evangilea ont e'te' Merits (7). (*) Car outre deux Profeffeurs & dcnxMakres de Langues de plus, elle y ^taBliturt Apothicaire ci en fie expe"dier les privileges enfaveur. d'un AUemajid nomm^ Simon Wz- lim- fi) Eneberg om Upfala p. 59. &CT- item Loecevii Antiq. Succ - Goth. LiBr. I". Cap. (2) Ceifli hift. 1. c. pag, ii . XIV. pg. 70. Plaz.ii theatrum anouymor. num. fj) V. fa lettre du 4. Mai 1729. a Fakrititti 1718. pag 67- 6e 672. dans fa vie par Mr. Remarks pag. ut. (6) V. Jiurcbard hill: Bibl. W/tlfenb. I^art. It.. (4) V. Ju:. S-.ren-.i Dicitoa. Anglo- fHCthicura p. 67. (Jans la preface pag g-i:. (7) Norciti ftriv .\_>i i Ji ibi cica: nui>tes.. REPNfc^D'JB SUEDE. 30? en etablit une nouvelle a Abo en Fmlande, (*) accordant acellerd les metnes L '*$ privileges qiui 1'autre , deforce qu'il n'y avoit alors plus rien a defirer que des Perfonnes capables d'inftruire la jeunefle du Pai's pour faire de cette De'i-unF Univerfue une pepiniere de bons Sujets pour le Civil & pour le Militaire. On ne fauroit nier, que ibus 1'heureux Regne de Guftave L il n'y eut dtja des Suedois verfe's dans toutes fortes de literature gui firent honneur a \r> beaux Arts "* ea Suedt, limbaus, tige commune de la famHle des Comtes de Gyllenborg. La patente pour leur Grand-Pere eft datce dUpjal, le treize Juin, Tan 1648 (i). ' (*) Nous remarquerons a ce fuiet tn pairant.que ce'fut Gujlave-ddolpbe le Grandc\m e"riga 1'Ecoie d' V. 'MEMGITIES CONCERN A: NT !'"" blis Profeflcurs a Up/i/, il n'y en cut qtie cinq on fix, done les Principmix l620 - font Frelnshem, Boeder , Loccen , & SfOfffer^Si. meme d'entr'eux, il n'y euc que les deux derniers, Beaupere & Gendre, qui s'y fixerent pour toute leur vie, au lieu que les autres s'en v allerent Fun apres 1'autre, en moins de deux, trois ou quaere ans. On aura reinarque ci-devant, que les Brands appointemens & autres douceurs, done jouiflbient ces Ecrangers, donne- rent de la jaloufie aux Suedois^ & il eft a croire, que Boeder fur-tout, qui n'avoit pas 1'htimeur fore accomodante, ne s'attira en partie les chagrins qu'il cut a eiftuer , que par ce meme principe. Mais fi on dit , que les li- beralites, que Chrijline leur fit, etoient trop grandes, eu egard a d'autres depenfes plus preiFuntes, auxquelles il faloit fubvenir en ce terns-la; cela meme fervira de preuve, en faveur de cette Princefle, de fon grand em- preilement a avancer & a faire fleurir les fciences dans fes Etacs. Pour moi, je ne regretterai jamais les liberalites qui. one etc fakes a ceux qui reellement coopererent & concourrurent efrhacement avec elle a un but fi falutaire. Car, fi cela a donne quelque jaloufie aux Re'gnicoles, le bien en a ete d'autant plus grand , que cela les a eguillones en meme terns a tra- vailler & a fe rendre capables de remplir dignement les pofles qu'ils occu- peroient un jour, & a donner ainfl de bons fajets a la Patrie. C'eft autli line grande fatisradtion pour tout bon Suedois de reflechir fur ce terns , oil Chrijline etoit fi attachee aux etudes, & de voir en combien peu d'annees grand nombre de Suedois, a fon imitation & a celle des favans Etrangers, s'y perfeclionnerent a un point que les Univerfites du Roiaume purent fe pailer de tout fecours etranger. EC pour en convaincre le Lefteur, nous allons produire plufieurs de ces'Savans Suedois, & marquer par quels en- droits ils fe diflinguerent & fe tirerent de la foule d'autres gens de lettre de cette meme nation, defquels le but, que nous nous fommes propofe, ue nous permet pas de faire mention. Je remonterai un peu plus haut que Cbriftine &. je commencerai par le, Roi Charles IK. Pere du Roi Guftave-Adolpbe. Mr. de Stiernman nous donne la lifts (*) de vingc cinq ouvrages, en partie compofe's par lui-meme, en savn$ iiom. partie faits par fes ordres & fur les idees qu'il en avoit fournies : outre feixt autres morceaux de Politique publics de fon terns. Parmi fes propres ouvrages eft furtout recommandable fa Chronique des Rois de Su&de, qui commence des le premier Roi & va jufqu'au terns de Chrijliern IL comaie auffi la Chronique de fa propre vie en vers Suedois 9 dont i'original fe con- ferve encore dans Jes Archives du Roiaume (). Pour (a) Dans fa Bibliotheca Sueo-Gothica. Tom II. p. I. 8. ? Schefferi Suecia literata > 53 & 376. *) Je ferai bon ufage dan? cet nrticlc-ci de cette Bibliotheque de Mr. Stiernman, Con- fciller de la Chancc-Herie & Chef des Archives de Suede depuis bien des nnnt ! es. JJlIc 9 pour titre:,, Bibliothsca Sueo-Gotbica in VII. Tomos diftributa, rw/KJ- &bm&S l fvtMffltt, jiiem Sfftfininiy inftur in iwem piblicam froiluxit , illujlres Jcriptora ab anno Chrifii CHRISTINE REINE DE SUEDE. 313 . Pour fon fils Guftave-ddolpbe le Grand, non feulement il favoit plufieurs L>ai * langues qu'il parloit parfaitement , & dans lefquelles il donnoit fes reponfes I(53 *_ aux Miniftres etrangers qui lui etoient envo'ies (*} : mais il pofledoit fi - bien 1'art de perfuader , qu'on ne pouvoit pas s'empecher de tomber d'ao cord du fentiment qu'il foutenoic (a). Aufli le Sr. Stiernman a-t-il donne les litres de vingt quatre harangues qu'il fit aux Etats du Roi'aume en differen- tes circonftances outre 1'hiftoire de fa propre vie : le journal de fes voi'ages : les raifons de 1'entreprife de la guerre en Allemagm : non compris une pro- digieufe quantite de lettres ecrites en Suedois,en Alkmand& en Latin, wee une nettete d'efprit & de ftile, qui fert de preuve du vafte genie, dont il etoit doue, & qu'il n'etoit pas mediocrement verfe dans les belles-lettres & les fciences (Z>). Nous en avons donne quelques echantillons ci-defTus, &v. ci-defl ii n'y aura peribnne qui ne convienne, qu'il a porte 1'art milkaire plus loin pas * * v qu'aucun avant lui, & qu'on a bati fur les principes qu'il en a donnes,tout ce qu'on a invente depuis dans cet art-la. Le Coufin & SuccefTeur- de Chrijline, le Roi Charles-Guftave , n'etoit pas fans doute un Profefleur , mais il avoit des etudes convenables a un Prince (c). II avoit pafle quelques annees a rUniverfite d'Upfal & apris en perfe6tion tous fes exercices a Paris. II avoit le grand talent de s'enoncer & de per- fuader, jufqu'a etonner Cbrifline , quand il la harangua dans 1'Aflemblee des Etats a Upjal, lorfqu'elle refigna la Couronne (J). Ces deux Rois de Sulde avoient chacun un fils naturel , 1'un appelle le Comte Guftave Guftaffon , ou fils de Guftave , & 1'autre le Comte Guftave- Carlfon ou fils de Charles-GuJlave (e). Leurs Peres leur avoient fait donner une education convenable a leur naiflance & avoient eu foin de les faire inftruire dans les belles-lettres & les fciences les plus utiles % dans le genre de vie auquel ils etoient deftines. Nous avons dit quelque chofe de 1'un & . 1'autre, & nous aurons occafion dans la fuite de parler plus particuliere-pag.". * ment de tous deux. En attendant nous dirons feulement , que le premier faifant fes etudes a Wlttemberg en Saxe , y prononja un panegyrique fur fa vicloire que fon P^re avoit emportee en 1631. fur les Imperiaux pres de Leip- 00 Stiernm. /. c. p. 184. 187. P Palm- ad Magliabech. T. I. p. 197. flambraei Op. skold. Suec. impr. Parijiis. item Pufendorf. de Re- (fc) Lunguitii Alexander M. redivivus p. bus Carol! Guftavi Libr. VII. J. 3. 2 ^f 3. Sued. Intelligencer A. 1633 p. 181. (d) V. ci-deffous ad aim. 1654. f<:. (0 Stiernin. /. c. p. 753. (c) Stiernm. /. c. Heinfii Epift. in collet. 1600. ad 1632 exbibet, typis impreffus Holmitg 1731. in 4." L'auteur a compof^ cet Ouvrage fur des pieces authentiques tiroes des Archives-meme, & j'y ajouterai d'autre* chofes.remarquables, qui ne s'y trouvent pouit. (*) Pour preuve de cela Stiernman dit (i),, Ed polluit linguarum plurimarum notitia, lit Legatisfna lingua orantibus , eadem ipfes max rejpondsre potuerit , referente clar Sagit- tario in not. ad Juftinura f ex illo D. Faes annot. in Amaranth. Kceiiigsmark pag. 4. (ii L. c. gag. 17;. Tome L Rr . l6 3 gi 4 MEMOIRES CONCERNAN'T Leipzig (*) , & qu'a Lry^n il fit une Oraifon funebre fur la raort de ce grand Hcros (). II etoit en'poffeffion de PEveche d'Ofnd&ntg du terns du Traite de la Paix de JVeftphalie, qu'il ceda moiennan-t quatrevingt mille ecus, en confluence de ce Traite. Sa poflerite fleurit encore en Suede fous le nom de Comte de Wafabor^. Pour le Comte Carffon, H n'etoit pas moins bien verfe dans les fciences, fon Pere lui ai'ant donne le celebre Ludolphe pour gouverneur (). II fut dans la fuite Colonel au fervice des Hollandois. Amateur des belles-lettres, il fe fixa en Frife , ou il vecut tranquillement & mourut a Leeuwaardenen 170$. fans pofterite male. Pen de terns apres fa belle Bibliotheque fut vendue publiquement felon le catalogue imprime qui fe trouve encore par ecca> fion. Le Comre Axel Oxenftierna, grand Chaneelier de Suede, a rendu fon nom trop celebre pour que perfonne doute qu'il n'eut de folides fondemens dans les belles-lettres & les fciences , pour pouvoir atteindre au faire de la gloi- re, ou il eft monte (c). AulTi trouve-t-on que pendant le terns qu'il faifoit fes etudes dans 1'Univerfite de Wittcmberg , il y a foutenu quatre fois glo- jieufement des thefes publiques , meme en Theologie outre un grand nombre de pieces politiques & de lettres qu'il ecrivit en Suedois , en Alle- mand & en Latin (d) (f). 11 en avoit compofe la pliipart dans des conjonc- tures fort delicates & durant les negociadons les plus epineufes,dontil etoit charge pendant la guerre tfAlkmagne & auparavant pend'ant les gtierres avec la Pologne, la Ruffie& le Danmmarek , qooiqu'il fut charge de ces ne- gociations qu'il dirigea prefque feul & conduifit a favantage de la Suede , ce qui lui a merite a juile titre le nom de Salomon de Su&de. De plus il a com- pofe le fecond. Tome de la guerre de Suede en Attemagne, (Hljlor'ia EeUl Sueco-Germanici) quoique Chemnitius en foit communement repute 1'auteur (e) & il a dirige le meme Chemnitius- dans la compofuion d'un autre euvra- ge (a} Elle eft jointe au Recusil ). Nous en avons donne des preuves ci-defTus, & le beau prefent qu'il fit de foixante cinq Manufcrits a I'Univerfite d'Upfal, quand il en e'toit Chancelier, prouve aflez fon amour pour la belle literature. Pierre Brake , premier Comte &Se'nateur de Suede, s'e'toit applique des fa jeunefle a toutes les fciences propres a former 1'efprit d'un homme de Con- feil & de Cabinet (c). II protegea taujours les Arts & les Sciences & fa- cilita rinllallation de i'Uni verfite $Abo, tfont il fut le premier Chancelier. II compofa entr'autres un ouvrage osconomique , qui confervera toujours fon prix. 11 le fit publier dans fa propre imprimerie qu'il avoit etablit dans fa Re'fidence de JVi/ingibGrg , fitue'e fur la belle ifle Wifingjo dans le lac Wettern, &. qui e'toit fon Comte. 11 y a plufieurs autres bons livres qui y ont ete imprime's de fon vivant. Eric Schrodems Traducleur du Roi'aume, qui vivoit encore Tan 1645. a mis au jour au de-la de quarante trois ouvrages, la plapart traduits de lan- gues etrangeres en Suedols & entr'autres les principaux auteurs claili- ques (d). Nicolas Gran ou Granius fut Profefleur en Phyfique a 1'Univerfite de Helmftadt , ou il donna un cours entier de Philofophie en XXXIV. differta- tions, qu'il y publia. Apres fa mort, fa Bibliotheque fut affectee a 1'Uni- verfite (e) ou elle a fervi de fond a celle qui y eft actuellement , ai'ant ete fort augmentt'e depuis par le Due Rodolphe-Augnfle. L'Archeveque Laurent Paulinus 9 qui mourut en 1646., publia au de-la de quarante cinq ouvrages plus ou moins etendus (/) , dont les livres de Mo- rale , en plufieurs volumes , comme auffi fon Hiftoire du Nord (ZBftoriac Arftoa Hbritres) jufqu'a la mort de Gujlave- Adolf he , font encore fort eftime's. Ce fut au fujet de fon ouvrage Hillorique que Chrifi'me lui ecrivit & lui ordonna d'en oter une relation qui y e'toit inferee fur que'que trahilbn qui fe feroit paffe'e en 1626. a Riga (g). Voici cette lettre de Chriftine. . Cbrl- (o) Stiernm. /. c. p. 716. G. J. Voffius 1. (<) Stternm. /. c. p. 12 f 16. Scheffer /. c. p. 396. ^? Lubienitz Tbeatrum Cornell- c. p. 64. &c. cum p. 290. (e) Scheffer /. c. p. 134. Moller. /, c. p. (6) V. Celfii Mfl. Bibl.Uph\.pag. 77-113. ; 390 f 391. Stiernm J.c. p. Si.&pc. item. Er. Norelii Stri&nrte pag. 36 t*f 37- V. la lettre 13enzelii Oratio. Funelr. Olivekranlli. Mfc. de Boxho'rnius ^ ce Seigneur Kal. Maji (f) Stternm. p. -8g. ScheiFer I.e. p. 58* 1643. pag. 203. &c. f Lubienitz /. c. p. 63. ? Moller /. c. j.ag. 377. Spegelii bift. 303. 348. 354. EC clef. Arcbiepil'c. UpQil/A r . Fill. (c) V. les Mem. Mfc. de la, famille de (g 1 ) Ftiez lli-dejjus Nettelblad Schweil. Biah. Bill. T. III. p. 33 7. Rr 2 MEMOIRES CONCERNANT L'an 1640. mod Guds nade &C. Chrlflme &c. Notre grace & fa- ynneft ocb nadig a- veur fpeciale &c. Monfieur 1'Arche- bendgenbet &c. Herr Lottor ^que ocb 'Arkebiskop. J warder E- der paminnandes Herr Arke- biskop buruledes Borgmdjlare ocb Rad i Riga bafwa iforledit dbr Vous vous fouviendrez en- core de quelle maniere les Bourgue- maitres & le Magiftrat de Riga nous firent porter des plaintes par leurs De- putes , 1'annee paflee , de la rela- qui fe trouve dans votre Hif- tion , igenom deras Deputerade under- toria Arftoa fur quelque trahifon , qui danigst fig befwdrat om tben re- r - r v -^ "*>" * 7? < v " lation.fom sker uti Eder Hifto- A . /-.. .. , . ria Arcloa ofiver ett orradene fe feroit P a f de en l626 - *-T ^T eS attend , us , la feuille. ou ell contenue la ditere- ladon } mit ddja corri ^ e & rdim . det abr 1626. utt Riga skuthjo- pr i m ^ e , en coniequence de notre - Mais comme les relupit war a. Nu bade wifor- brdre gracieux modat) at det enaarket^ fombe- fusdits Bourguemaitres & Magiftrats melte relation inneballer , attar e- nous en ont fait de tr ^s - humbles re- danfordettapawarnadigabe- montrances ulterieures , & que nous falniw skulle war a corrizerat ne P ouvon , s que , n( ? us louer de J? fi ~ juuurt SK.IMIC wufu wr rjgfj ui> d ^jj t ^ ^ du Z g] e de ceux de j^tt a ocbomtrykt. Menfombem: Borg- depuis . ils font fous la dom ination mdjiare ocb Rad t Riga bafwa de Suede : ainfi notre volonte & or- dn ytterligare bos ojftberom un- dre gracieux eft, qu'au cas que vous der danigst paminna latit , ocbwi n'ai'ez pas encore change, ni fait ingen annan orfak bafwa an tbe Rigiskestro ocb upriktigbet ifran forfla t her as fubjeffion til at be- romma ; Ty dr war nadiga wil- lia ocb befalning 5 at bwarj fam- ma relation til dato icke bafwa fordndrat ocb omtrycka latit ^ j ta later war a Eder angeldgit tbet famma dnnu med forderhgqfte at ft alia iwdrket , pa tbet tbe Ri- giske saledes skdligt contentement ma wederfaras 5 ocb icke bafwa orfak fig ytterligare in for off iberbfwer at befwdra. Ocb wi befalle &rV. Datum Stockholm den 8. Aug. 1637. Cbriftina. Le fils de cet Archeveque s'appelloit Jean Pautiwts. Le Pere lui aiant renurque beaucoup de genie pour les etudes en prit un foin tout particu- lier. reimprimer ladite relation , vous le fafliez fans perte de terns , afin que ceux de Riga foient raifonnablement fatisfaits & qu'ils n'aient pas fujetde nous en porter de nouvelles plain- tes : Et nous vous recommandons a la protection divine Donns a Stock- boltn le 8. Aofa 1637. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 317 lier (a). Le jeune homme y fie de fi grands progres , qu'a 1'age de 17 ans L ' nrt il pouvoic fe patter de toute inftru&ion privee. Bon Philofophe , bon Juris- - ' I630> Confuke , bon Politique , il s'acquit bientot la reputation d'un fort favant homme. Chriftine informee de fes talens 1'annoblit peu apres , fans qu'il en f$ut rien d'avance , & lui donna le nom d'Otivekrans. Entr'autres Traices il reduifit 1'excellent ouvrage de Grotius de Jure Belli & Pads en forme de tables tant eftimees de tous les ConnoiiTeurs. Nous parlerons encore de lui dans la fuite. Jean Botwidi Eveque de Linkoping mort en 1635. s'eft rendu celebre par vingt quatre ouvrages & autant de fermons qui ont ete imprimes (). II eft raporte de lui, qu'etant grand Aumonier de Guftave - Adolphe , & fe trouvant a la bataille qui fe donna en PmJJe pres de Meve entre les Suedois & les Polonois, il monpa avec les autres de fon Ordre fur une'Montagne pres du champ de bataille pour prier Dieu pour 1'heureux fucces des armes de fon Roi, Guftave. Celui-ci s'en etant aper$u , le fit venir apres la viftoire & lui dit, que cette journee n'awit pas pu lui etre trop difficile a gagner puifqu'il awit vu Moife fur la montagne , priantpourun heureux fucces (r). Jean Meffenlus , infortune en ce qu'il lui falut garder la prifon pendant vingt ans, etant foupgonne d'entretenir une correfpondance fecrete avec Sigifinond Roi de Pologne , ne laiiTa pas avant ce terns-la , auffi bien que durant fa pril^5n , de publier au de-la de cinquante huit ouvrages , reputes encore de notre tems les premiers & les meilleurs pour 1'illuftration des an- tiquites & de 1'hiftoire de Suede. II compofa auffi quelques Comedies Sue- dolfes (d). Sa Scandla illujlrata en XVI. Parties 1'emporte fur tout ce qu'on a eu jufqu'ici en ce genre , au penchant pres qu'il fait paroitre pour la Re- ligion Catholique. En confideration de tant de travaux il fut mis en liber- te, mais il mourut en chemin, enallanta Stockholm, Tan 1637. a Ublea. C'efl a fon egard que le Chancelier Oxenftierna dit: ,, qu'un genie de la forte du fien doit etre traite comme le feu, auquel on doit fournir quelque nourriture pour 1'entretenir toujours , afin qu'il ne fe detourne pas pour faire du mal" (e). Au reile , la famille des. Meffimus a eu une fatalite fin- guliere, en ce que des Bifaieux jufqu'aux Petits-fils, ils ont ete accufesd'a- voir trempe dans des crimes d'Etat & ont ete punis prefque tous de mort. Nous verrons ci - deflbus ce qui arriva en dernier lieu au Pere Arnold & a fon fils Jean fous le regne de Chrifline', Tan 1652. Jean Rudbeck , Eveque de Wejlerabs , a publie plus de foixante & dix Traites , la plupart Ecclefiaftiques & desJDiflertations (/). Son livre pu- blie en 1636. in 4 to fous le titre de Privileges desDotteurs, d&Maitres esArts, des () Mufsei Lettiones in tab. Olivekr. png. p. 128 Palmborg Fita'M.eften- Mfc.it. 2-21. Holm, liter, p. 31. &fc. item. Difdier Vita Meflen. Videkindi Hift. Guft. Adol- dans la preface de fes Negoc. de Nim^gue phi p. 7. f 351. p. 14. (e) Palmsk. Regttres du Senat I' an 1640. (&) Stiernm. 1. c. pag. 116. p. 4-67 fcf 489. (c) V. Son Oraifon Funebre. (/) V. Palmsk. f Stiernm. p. 161. 269. (/) Scheffer & Mollcr /. c- p. 83 &c. SchefFer & Moller p. 79. ^f 379. p, 380. Monumsnta Palmsk. />. 54-56. Stiernm. Rr 3 3 i8 'ME MOIRES CON C R N A N T des Etudians & des Ecolcs c. fut fi ma I re9ii lors de la Regence, qu'on fe 16401 _ fit aufli-tot feverement defendre & en faifir tons les Exemplaires." Le Se- nateur Jean Skytte dit de ce livre dans le Senat, que depuis bien des annees on n'avoit vCi paroicre un ecrit fi daflgereux & I'lmprimeur fut oblige d'en livrer toutes les copies , fous ferment de n'en avoir garde aucune. II n'eft pas moins remarquable par rapport a lui qu'en 1646. comme il etoit au lit de mort , la Reine Chriftine lui vine faire vifite & a cette occafion H lui dit entr'autres chofes ceci : " Qu'elle devoit fe garder des flateurs & de ceux qui cherchok-nt a lui parler entre quatre yeux fous pretexte de lui decouvrir des chofes fecretes, la priant de ne dire a perfonne, qui les lui avoit revelees. Que c'etoit juftement ces gens-ra centre lefquelselle devoit eire le plus fur fes gardes, afllire'e qu'ils etoient les plus mediants de tous, & qu'ils avoient dellein de lui. faire da rrnil & au Roiaume:" II finit fon difcours en difant, que s'il plaifoit a Sa Majefle d'avoir egard a ce qu'il venoit de lui dire, elle eprouveroit dans la fuite la verite'dece teftament qu'il lui laiffoit, & qu'elle auroit un Regne heureux (era f , (jive fludlum pi(e vitte^) fint necsffaria adj'alutem? dffirmal Hornejus. Mtftici dicuni ,, ejfe necejjaria, fed non ad falutew. Sublatis iftis dualus vocibus , ad Salutem, de rdi- quo conjentiunt. Solutio: Sunt nectffaria ad falutem non efficienter , fed ul totiaitio fubfeai ,, falvandi. Ego foleo dicere : quia tres funt flatus bominif , Natures , Gratia, Glorice , i- deoque neminem venire adftatum glories, mifi fuerit inflate grati<. Deftatu gratia au- ,, temqn&ritur, quomodoacquiritur , confervztur , amittitur t recitperatur? (plane ficut J+- M ris Confulti bgc quarunt de rerum dominiis*) Status gratia acquiriturfola fide , etiam [e- ,, cundum Pontificios : confervat ur fide f bonis operibus feu pie vivendo. Amittitur infi. ,, delitate vel male vive ndo , vel utroque , quia non Jolum non credendo , fed etiam co/ura- Decalogi pracepta peccando erdditnus gratia Dei. ^Recuperatur'panitenti'a f qu ad ,, earn requiruntur. Guam tifcejJaria ergo-funt bona Opera Jen ftudiiim- pid vitce ad hoc ut ., fimus-in gratia Dei, tarn ntcuffaria Junt ad gloriamjettfilutem ceternyn: non quad bonis ,, operibus mereamur Vitam aternam, fed ut conditifc Subject. Htsc opiuor-ejfeerlbudiixa, donee contrarium probetur. Vale & ignofce Tbeologizanti Politico. (i) V- Sa. Icttre en 1645. an Secretaire Ar.fr i Gyller.&oo clans Ics Palnuktildiana.. 3 2o M E M O I. R E S C O N C E R N A N T L' an Roi OJave Skottkommg , qui avoit dctruit le Paganifme en Suede , & 1'autre ,Guftave Wafa> qui avoit delivre le Roi'aume de la fervitude du Roi Cbri- " ftiern II. & du joug du Pape. Ses autres ouvrages paflent le nombre de trente & un (a). Jonas Petri, Eveque de Linkoping , a public plufieurs ouvrages de pie- te" : mais il s'eft plus fait connoitre par ion Di6lionaire Sue'dois , Latin & Allemand, imprime en 1640. in folio (). Les Ouvrages d'antiquites de Suede compofes par Martin Afchenius , dont il y a vingt-fix Traites en Manufcrit dans les Archives des antiquites de Suede 9 nous fervent d'uutant de preuves de fa capacite en ce genre de li- terature (c). II ne faut pas douter que le Dodteur Jean Matthias , que Guftave-Adolphc choifit lui-meme pour etre Precepteur de la PrinceiTe Chriftine, fa fil!e,ne fut verfe dans toutes les branches des belles-lettres. 11 paffa plufieurs an- nees dans les Univerfites de Suede & des pai's etrangers , ou il donna de .bonnes preuves de fon erudition. Apres cela Gttftave le fit Profeffeur en Poefie a Upfal. 11 fuivit le Roi en qualite de fon Chapelain dans 1'expedi- tion tiAttemagpe , & ai'ant etc defigne Precepteur de Chriftine ,- il entra au- pres d'elle en cette charge & comme Aumonier de la Cour (d). Nous a- v. ci-deflus vons dit ci-deflus , quels grands progres la jeune Reine avoit faits dans fes pag. jo. etudes fous fa direction. L'an 1643. il fut fait Evque de Strengnas: mais fe voi'ant foup^onne de pancher vers le Syncretifme & d'autres innova- tions dans la Difcipline Ecclefiaftique , que le Clerge du Roi'aume croioit etre cachees dans fes dix Traites publics fous le titre de Kami Oliva Septen- trionalis; il prevint lui-meme unepourfuite ulterieure en refignant fonEve- che en 1 662 & mourut deux ans apres (e). II etoit fort laborieux & on a de lui plus de cinquante-cinq ouvrages imprimes , dont Mr. Stiemman don- ne la lilte (/) ? & entr'autres la Grammaire latine qu'il compofa a 1'ufage de Cbriftine intitulee Grammatica Latina & reduite .en trois ou quatre feuilles feulement , dont , par la nouvelle Edition que M. Zuerius Boxhornius en pro- cura , quelques Ecrivains 1'ont fauffement appelle 1'auteur. L'Eveque Mat- thitf mit au jour en 1659. ^* es principes de la Religion Chr^tienne en latin, qu'il dedia a Cbrijline , en 1'exhortant a fe fouvenir des belles lemons de Mo- rale & de Chriffianifme , qu'il lui avoit donnees dans fon enfance. La belle lettre qu'il lui ecrivit fur le bruit qui s'etoit repandu qu'elle alloit chan- ger de Religion , fera infere'e dans Ion lieu. Elle continua d'avoir toQ- jours de Teflime & de 1'amitie pour fon Precepteur , lui faifant donner & a fes fils & gendre de bonnes penfions , leur donnant meme des terres & des emplois dans fes domaines (g). Jonas (a) F. Stiernman /. c. pag. 206. () V. Preuffich. Zehend. P. III. pag. (fc) Idem pag. 215. 367. Rango Suecia Orthod. />. 235 & 265. (c) Idem p. 217. . Palmsk. Regttres du Stnat en 1647. p. 721. (d) SchefFer Suecia lit. p. 123. ?r. item (/) L. c. pag. 221. &pc. Stiernm. /. c. p. 319. Moller Hypomn. p. (g) V. Les Regttres de Mr. de Itadt cbez 387-389. RSiamb Part. I. p. 370. 532. &c. C-HRJSTINE REINEDE SUEDE. 32: Jonas Magni, Dofteur en Theojogie & Eveque de W#u8 , n't'toit pas. J ' aT1 moins laboneux que 'Jean Matthlce , y puifqu'il nous a lajile au de-la de cm- I6|5 1_ quante cinq DiiTerutions & Traites de Philofophie, on fur des maueres Theologiques (a). Jean Canuti Lenaus , Archeveque de Suede , etoit LHI Prelat de grande capacite. 11 favoit ii bien foutenir 1'autonte du Clerge , qu'il s'atcira par-, la toute fa confiance. Entre vingc quatre. Traites qu'il a public's , celui de la Verite.& de fexcellence de la Religion Chretienne & fes Commemaire^ fur plufieurs Livres de la Bible, font fort eftimes. II mourute-n 1669 (fa). Ifrael Bring, Profefleur en Droit, a laifle quelques Traites fur des fujets du reflbrt de fa .profeflion. II inourut en 1648 (c). Laurent Wdttin, Eveque de Str-engnds etoit un homme fort eloquent, qui en a laifle de bonnes preuves dans pl.uiieurs Pieces d'Eloquence qu'il a pu- bliees a 1'occafion de ia mort & des funerailles de Gujlave-Adolphe & d'au- tres , a'iant mis au jour au de-la de cinquante DifTertations , Sermons & Harangues (d). Jtan & Siglfmond Gylknjlierna y deux Freres -d'une naiiTance ttes-diftin- guee, etoient fort verfes dans les belles-lettres , ai'ant entr'amres reduk en Aphorifmes les Livres de Politique de JuJle-Upfe (e). Olave Verelws ProfeiTeur a Upfal , entendoit tres - bien les belles-lettres & les antiquites de ia Patrie. Sa Runographia Scandica antiqua^ fon Hiftoria Gotharum, fes Lettres & fes Opyfcula varia font d'un %le comparable a ce- iui des auteurs de la belle Latinite (/). Jonas Hambraus , Aumonier de 1'Ambaflade de Gr-otius a Paris , etoit tfes-favant dans les Langues Orientales : ce qui porta le Roi de France a le nommer fon Profefleur Extraordinaire da-ns ces Langues a Paris. On lui confia la revifion & la correcltion de plafieurs Ouvrages des Peres de 1'E- glife qui s'imprimerent alors dans fimprimerie Ro'iale (g), 11 a public vingt-quatre 1'raites , dont il y en a de traduits en Francois , comrne 1'EG- chauguette de MeJJenlus & la Harangue de Frc'mshem a 1'honneur de Chrlfti- tie. 11 fe trouva fort embarraffe a Paris a caufe des detes que des Siiedois avoient contralees pendant leur fejour en France & dont il s'etoit rendu caution. Ces Debkeurs , tardant de s'acquiter de leurs. detes , 1'oblige- rent d'expofer le cas dans deux ou trois Traites imprimes a Paris enSuedois:, ou il prie le Roi de les contraindre par voi'e ,de juftice a fatisfaire a leur devoir (/;). La querelle qu'il eut avec 1'Ambafladeur de Suede , eft aifez plaifante pour avoir place ici. L' Amide Grotius en fait le rapport en cester- mes (i). Les djmanches au matin prechoit dans 1'hotel de Grotius un Mi- (fl) Stiernm. /. c. pag. 236. (g*) V. Celfii Merita & fata Jonae Ham- . (fc) Scheff. y Moileri c. p. 100 sfc.^f brsei pajfiw. Scheff. Suec.iit. p. 103. Stiernm. p. 385. Stiernm. /. c. p. 244 & 284. p. 313. Moller /. c. p. 385. Paimsk. art. (c) Idem p. 295. liainbr. (rf) Stiernm. /. c. p. 301. (/j) V. Ses Traitds Jur les DStes de quel. (e) Idem p. 312. ques Seigneurs Sucdois a Paris 1662. ^fc. (,u (f) V. la preface des fes Optifculcs. item -il produit dujji fes Patentee du Roi de France. Sdieffer /. c. p.^py^fipS. item Mollet /. c. (i) Aubery da Maurier Mhn. ds f. 408-410. pag. 337. Tome L S s 3 22 MEMOIRESCONCE R*N ANT ' an - Miniftre Suedols nomine le Do&eur Hambraus, Lutherien tres-opiniatre . 99 (*) >& I GS apres-roidi il faifoit precher un autre nomme Mr. d'Or, atta- " che aux opinions de Calvin. Ces Miniftres, & fur- tout Hambraus, ail lieu d'expliquer purement & fimplement la parole de Dieu , fe jettoient a corps perdu dans la controverfe avec tant de paflion & de violence , que leurs fermons n'etoient pleins que d'inveftives , dontMr. Grotius s'e- ,, tant enfin lafle les exhorta d'expliquer 1'Eyangile, fans blefler la chari- te Chretienne. Sur quoi le Dofteur Hambr&us lui dit : qu'il ne pouvoit s'empecher de dire ce que Dieu lui infpiroit : & Mr. d-otius lui a'iant enfin ordonne ou de s'abflenir de dire des injures, ou de ne plus pre- cher, cet Hambraus , le quittant en colere , & defcendant le degre , di- foit en grondant que c'etoit une chofe dtrange, queTAmbafTadeur dela Couronne de Suede voulut fermer la bouche au Saint Efprit , ce que Gro- tins me conra , crevant de rire , & me difant , que cet Hambraus fe plaignoit par-tout, qu'il fermoit la bouche au Saint Efprit, parce-qu'il voulut 1'empecher de dire des injures a fon Prochain. Ifaac Rotbffoius , Eveque $Abo , etoit un grand Theologien , que le Chanceiier Oxenfllerna eflimoit beaucoup & avec qui il entretenoit un etroit commerce de lettres. II y a vingt-deux Ouvrages de Theologie & de Piete publics fous fon nom (a). Jonas Bergen Rothovius ne cedoit pas au Frere en fait de literature. Nous ne citerons que fes ,, Chueftioms MifceJlaneas Hebraicas , Caldaicas ,' Syriacas, Gracas 6? Latinos Peteris ? Novi Tejlamenti publiees a Jena 1603.'' qui lui attirerent une grande reputation au dehors (b)..' Jean Franckmms , ProfeiTeur en -Medecine etoit tres-favant & fort expe- rimente: ce que prouvent les vingt trois Traites & Differtations egale- ment folides & curieufes qu'il a publiees. II mouruten 1661 (c). L'an 1640* il lui fut enjoint de faire publiquement des DifTeftions Anatomiques , mais il ne 1'entreprit que par ordre expres de Chriftme , pour n'etre pas expofe a la critique , parce que c'etoit quelque chbfe de nouveau en Suede , que d'anatomifer les Corps humains , comme 1'a remarque le celebre Profeffeur Roberg, qui dit auffi a fon fujet, qu'il alloit toftjours botte & eperonne, meme a 1'Eglife, & que ce fut en cet equipage qu'il fut mis dans le cer- cueil (es exemplaires de cette hiftoire fuflent diftribues, pour ne pas rendre fufpeftde fauflete le reftede fon hiftoire (*).. On en trouve pourtint des Exemplaires , d'oii ces endroits ne font pras 6tes. Laurent Stigzelhis y Archeveque d'Upfaly etoit un homme profondement ^ favant 3 au jugement duquel les Theologiens Lutheriens dans quelques A- cademies d'Allemagne en appellerent dans les controverfes qu'il y avoit a- tors entr'eux.. La Heine Chrijline fe fit unplaifird'aller fouvent de Stockholm (a) Palmsk. Mfc. art. Rezandfer. C0 Palmskold Mfe. art. Baziii? 6fSchcf- (tf) Sticrnm. /. c. p. 473. item Scfieff. fcr /. c. p. 72. it. Moller /. c. p. 378. Suee. lit. p. 14.1. (Y) Cette lettre.a liti ecrite ejl du (c) Roberg Ftiit Medic. Suec. art*. For- en 1643. CHRISTINE REINE D SUEDE. a Vpfal pour affifter aux exercices Academiqiies , ou il prefidoit. Sa con- fiance en lui etoit fi grande , qu'elle ne concluoit rien en fait de Religion fans 1'avoir confulte prealablement. Les ouvrages qu'rl a publics pa/Tent le nombre de trente fix , & fes Commentaires fur plufieurs livres de lu Bible mentent bien d'etre publics. 11 mourut en 1677 (#), Enevald Suenonius , Profefleur a Upfal & A la fin Eveque a Lund en Scanie. Plufieurs de fes ouvrages montrent fon travail & fon erudition. De ce nombre font fes commentaires fur le Pentateuquc & fur les Prophete* Daniel, Hofe & Joel, quiVont pas pourtant etc publics. Comme il etoit Recleur de 1'Univerfite d'Upfalen 1650. lors du couronnement de Chr'tjl'me, elle lui fit donner autartt de velour pour fon habillement qu'aux Evequesdu Roiaume (b). Jean - Stiernhok fort lettrd , & eftirrre de la Reine Cbriftine.- II a pir- blie quelques ouvrages de la Jurisprudence , & fon Traite du Droitancien des Suedois & des Gotbs, de Jure Suconum & Gothorum vetufto, lui a attire une approbation generale, meme chez les Etrangers. 11 laiflk une fille Mat'- guerite Stiernhok , dont on a de grands Recueils & extraits tires des meilleur's Auteurs Latins & autres, qu'elle avoit Ids avec beaueoup d'atfention. Elle i\it mariee au FrofelFeur Pierre Rudbeck (c), Jean,Benoit & Jacob Skytte, trois Seigneurs tres-verfes dans la belle lit^- rature. Le premier fut Precepteur de Guftave-Alolphe &. devint , apres plufieurs Ainbaffades , Senateur de Suede & Chancelier de rUniverfite" d' Vpfal. Ce fut Tan 162,2. qir'U y inftitua une ehaire de Profefleur en Hiftoire & en Polidqiie, lequel de fon nora eft appelle S-K?TTI ANUS. II lui afljgna des terres <&-des biens en fond fi confiderables, qu'elle y eft rpute& la mieux dotee de toutes les ProfeiTions. Le premier inftitut vouloit que cette Chaire fut remplied'un Sujcc etranger, qui eut aequis une grande reputation dans la Republique des lettres , afin d'exciter par fon exempie ks Profefleurs regnicoles a s'acquiter duement de leurs fonclions (*). Le Roi tiAngktetre lui fit & a fes Freres 1'honneur de les creer Chevaliers. Us ont compofe plufieurs Traites d'Hifboire & de Politique,dont quelques-uns le trouvent encore en Manufcrhs diins les Archives, ils eatretenoient une cor- to) Stiernm-. I c: p. 48?. Scheffer p. 136. -Ah. lit. p. 22 &'ro- gre? des jeunes E'tudians & leur faciliter les mo'iens de faire leuis ^tuJes &. lfi;rs voia- j^js avec d'autant plus de commodite". \'o'icz k-s preuvcs awes lit. (a}ala page fuivsnte. 326 MEMOIRES CONCERNANT L'an correfpondance familiere avec J. Gerh. Coffins (*) & d'autres favany de I( H5- leur terns (a) Andre Burceus , Secretaire du Roi a rendu un bon fervice a la Patrie , par les bonnes Cartes Geographiques de Suede qu'il a publie'es, & qui out fervi de raodele a toutes celles qui ont paru dans Ja fuite (/;). Jean Thomte Buraus, du njeme nom, mais d'une autre famille. Guftave- Adolphe le fit Ton Bibliothecaire , en joignant a cet emploi la charge d'anti- quaire , parce qu'il entendoit parfaitement les antiquites du Nord (c). L'an 1647. Chrijlim recommanda fort cette etude dans fa lettre au Confiftoirc d'Upfal & qu'on devoit ramafler toutes les infcriptions de groiles pierres, dont le Roiaume etoit parfeme , ordonnant qu'on laifTat a Burattt quelques Penfionaires du Roi a 1'Univerfite d'Upfal qui lui pretaffent la Main & fif- fcnt des voiages dans les Provinces, pendant 1'Ete, pour tirer une notice exacle des antiquites qui s'y trouvoient (d). Buraus etoit amTi fort dans les Mathematiques , particulie'rement dans 1'Aftronomie, dans la Mechani- que, dans les langues & meme dans la belle Poefte: Mais a la fin il donna dans le Myftique (e] & publiaen 1644. un Traite en Suedois, fous le titre de fupputation du terns des Cherubins & du rugiiTement du Lion du Nord, qu'il de'dia a Chriftine , oil il annonca , que le premier terme de la fin du IVJonde arriveroic le 5. Mai 1647. & le dernier Tan 1674. La-def!us il diftribua aux pauvres tout ce qui lui reftoit en propre , jufqu'au premier terme qu'il avoit pre'dit. Mais par malheur pour lui , le dernier jugement ne vine point & il fe vit oblige de folliciter la Reine pour avoir dequoi fub- fifter. II 1'obtint bien a la nn, mais il n'eut pas avec cela ies rieurs defon cote'. 11 mourut 1'an 1652. 11 y cut encore un de ce nomappelle Jacques Zabrazynthus Burceits, Ev<- que de Strengnas , qui mourut en 1642. Chrijllne fit voiager fon fils a fes de'pensjce qui lui donna lieu de fe perfelionner dans toutes fortesdefien- ces ; & apres avoir ete Profefleur Extraord c en Droit & fecre'taire au Par- lenient de Stockholm, elle le fit Prefident a Norkoping , qui faifoit partie de fes ' (a) V. Bazii Jnventar. p. 715-736. item (c) SchefFer /. c. p. 49. f Moller /. c. Teftament Fdrordn. til. Upfala &c. Schef- p. 375. fer /. c. 46 & Moller /. c. p. 374 &f 375. (rf) V. lo-deffus les Regttres de I'Univerf. Stiernm. /. c, p. 541. Felled Ot. Hanov. d'Upfal. . 127. Voflii Op. Tom. IV. p. 230. 249. (e) Palmsk. Mfc. art. Atvlr. Buracus. it. 258. fcfc. item. Boeder! bift. Belli Sueco- Brunneri Ora. Funebr. Bursci & Block fur Dan. pag. 316. les Prognqftics p. 102. 103. (b) Stiernman /. c. p. 346. (*) Ce Jacques Skytte 6toit charm de voir les belles- lettres fleurir en Suede fous la Reinc Chriftine & en ^crivant A Voffius en 1649. il lui en te'moigne en ces termes-ci fa fatisfadlipn (i),, Neque inopia literarum f Literatorum bic laboramus , quorum fub hac de- mum Regina fpero pulcherrimam mejjem futuram : ut ad Gradivum ilium Patrem Martem Afrollinem adjunSum iri Prcefidem noftris arvis , leeto augurio ominemur. (i) Vejfri Op. 1. c. p{. ).C CHRISTINE REINE DE SUEDE. 3*7 fes Domaines, ou il mourut en 1681 (a). II eft la tige commune de la fa- mille de Burenskold & fon fils a ete Gouverneur en -Scame. Nous avons parle ci-deffusde deux Mrs. Palmskold, Pere & Fils ,& pour " ce qui eft des bons ouvrages qu'ils ont publics, on peut confulter Scheffer y qui en donne la lifte dans fa Suecia literata (b\ Egide Girs s'eft rendu celebre par fon hiftoire de Guftave I. d'Eric J.IF. & de Jean III. Rois de Suede (V). Schering Rofenhane homme excellent, fort entendu en toutes fortes de li- terature & fi bien verfe dans plufieurs langues, qu'il parloit parfaitementa chacun des Ambafladeurs , au Traite de JVeftphalie, ou il etoit de la part de la Suede. 11 fut envoi'e enfuite dans la meme qualite a la Cour de France (d). Entr'autres Traites qu'il a publics , fes Observations Politiques fur les troubles de France en 1649. f nt v i r > 9 u 'il n'approuva pas toute la conduite du Cardinal Mazarin. Ce Traite fut aufii la caufe de fon rapel : mais dans la fuite il devint Senateur de Suede (e). Michel Wexlonms Gyldenftolpe, Profefleur & enfuite AiTefleur au Dicafte- re d'dbo, etoit tre's-favant & prefque le premier qui ait re'dige en forme le Droit Public en Suede.. II fut annobli par la Reine Chriftine. Ses Ouvra- ges d'Hiftoire, de Morale & de Politique, font encore eftimes. II y en cut un fous le titre de Politica admodernum Imperil Succo-Gothici ftatum ac- comodata , dome/lids paffim exemplis illuftrata , Aboa 1657. in 8" qui fuC de'fendu par Charles- Guftave , a caufe de ia diftin&ion qu'il y faifoh de Su- jets Mediats & Imme'diats: inter fubditos & mere fubditos (/) (*). Jean Suenonius Raumannus Fenno prit le Doclorat a Marbourg en 1604 & fut le premier Dodleur en Theologie en Suede, depuis la Reformation de 1'Eglife. II fut premier Pafteur a Stockholm en 1610. & enfuite Vice-Chan- celier & Re&eur perpetuel de rUniverfite d'Upfal. On fit fur lui ce dif- tique; Tan- (a) V. Palmskold f Litzenii Differt. de Weftph. T. VII. p. 32. Stiernm. /. c.p. 553 Norkopia P. L p. 105. &c. Rudling /. c. f 558. Kappens Vorrede zu des Saavedra pag. 66. Gel. Republ. p. 49. ^fc. '(&) Item Holmia liter, art. Palmskold. (e) Stiernm. /. c. p. 84. 102.. 105 ?no, ut & Monumenta Palmskoldiana p. 30. 86. &? Centur. Anonym, p. 17. Wicquef. slmb. 92. &c. Liv. IL p. 218. (c) Stiernm. Bibl. p. 549. (/) Stiernm. /. c. p. 559 ? Ab. lit. p. (d) V. Meiern Vila 'Legal, in dftis Pac. 27-44. (*) Cette diftinftion fut pourtant admife 1'an 1650. Car la Reine Cbrijline difant an S(5nat: que la prt^rogp.tive de la Commune ou des PaiTans de Suede eft tres-grande en ce qn'ils font un Peuple Libre & ingenui Subditi Regni, qui ont Voix dans les Aflem- bl^esdes Etats duRo'iaume: Le Senateur Pierre Brake lui re*pondit: Nous fommestous Sujets du Ro'iaume: mais les Palfans des Sujets Mediats , & nous auties Immidiats : Rujiici Cities funt Mediati: nos vero Immediate (i). (i) Palmskjold Exnaits ad h. ann. pag. jst. I/an 1645- Voiez ci- jdeflus pag. ZZ7. M E M a I R E S C O N C E R N A N T )y Tandem Raumannus quo tune non do&ior alter: Illofolus criun tempore Dottor erat. Son Commentaire fur le Nouveau Teftament fe trouve encore en Ma- nufcrit. II a ecrit centre Bellannin de feccato, outre d'autres ouvrages qu'il publia en 1646. & 1647. (a) Jean George Gezelius , Profefleur a Dorpt en Livonie a ete enfuite Eveque iS Abo en Finlaude. l\ a publie lui-meme une Lille des Ouvrages & des Traites qu'il a compofes <& publies, depuis Tan 1641. jufqu'en 1683 , qui pafle le nombre de cent - cinquante (b). La Reine Cbrljtine 1'avoit choifi pour membre du College de Theologie, qu'elle vouloit etablir ert Alkmagns en faveur de la Religion Evangeliqtie, pourqu'on y travailkit a la reunion de toutes les Eglifes Proteflantes. II entreprk de faire fur toute la Bible des Commentaires , que fon fils, aufli Eveque a Abo , acheva & perfection- na par un travail de trente ans, & qui font les meilleurs Ouvrages qu'on aic en ce genre. Le fils de celui-ci , encore Eveque en Finland? , les a tous mis au jour en trois gros volumes in folio. A ce que Mr. Stiernman raporte de vingt deux Perfonnes celebres de 1'Univerlite $Aho , dont il a ecrit les vies , nous ajouterons , au fujet de. Martin Henrici Stodius 9 qui y devint premier Profefleur en Langues Orienta- les 1'an 1640 , & en 1654 Profefleur en Tjieologie (*) , qu'entr'autres ouvrages, il a compofe en latin une Cabbala ou Ne'cromancie , "dont To- riginal fe doit encore trouver dans les Archives (c). La copie de la pro- mefle par ecrit , qu'un de fes Difciples lui avoit donnee , de tenir fecretes ces connoiirances (f) fait juger , que tous les deux ont ete fort prevenus pour cette fcience chimerique (d), Nous (n) Palmskold Jj/fjc. art. Raumannus ^? Cbranicon Prcej'uium Suecise. item SchefFer /. e. p- 76. &c. ._ (&) Palmsk. ib. an t Gezelius & Stiernm. Aboa lit, pag. 69-77. '* Spegclii bift.Ecfl. ' Epifc. Aboenf. N. X. (0 Dans Jon Aboa Liter, pag. 19. fc. i- tern Scheffer /. c. p. 317. & Moller /. c. p. 391.' (d) Voiez Palmsk. Mfc.trt, Stodius. (*) Scliffer d.it de lui 1. c, ,, Martinus Stodius in nova interpretations Bibliorum &~ tranjl .itioae in linguam Finnonicam fociatain opera?;: praftitit Efchillo Pctrceo, win cwn Georgio Mathaei Paftore Pukenfi ^ Henr. IIoiFinan Paft.MafcboiinJi. vo'uz aulfi Plac- tii Tbeatr. slnonyin. pag. 671 A r . 2727. (|) Voici cette promelTe tiree de Palmikold: ,, Ego Ericus Michaelis V*. admodum Revti* Difcipuins i ndignijfunus , juro & promitto per virtutem or.inipotentis Dei, per S'ingiiinem Dni nojlri'jeCu Chnili '& per refurre&ionemmortuorum & extremum judicium &? per falutem animx me a in fide S. Calbolica omnipotentis Dei & V Rt' 1 * Prceceptori, Fautwi ) Prc/nvtori longs colendijjlmo , M. Martino Stodio : me quoad Spiritus bojce meos rexcrit arms, in cunclis r ebus fi-Jelem atque obedientem effe, firiniterque en fideliter om- nia qux auditurus jwn a V. /?'*'<*, fervare occulta nee ulli rei-elare , vel aliqmm docere, Ji'ii R* V* "jtiluntate P confen'u. Infiiper in eadeni vinute juro ? prowi'lto , quod tinn &H$Mfcisnti* contra Dsum & ejus mzndata, nee cur.tr a Minijlros ejus & jufli- CHRISTINE REINE DE SUEDE. 35^, Nous ne ferons que nommer ici quaere grands Theologiens favoir Pierre L ' ;1? ; Lang, Abram Thawrims , Jean Flacbjcnius & Henri Carftenius , done le der- __L nier etoit ne a Hclfmgfors, ville capitale de la Province deNylande en Finlan- de. Apres avoir fait leurs etudes dans !es Ecoles & les Univerfites de Sue- de & acheve leurs voi'ages dans Jes pai's etrangers , iis s'acquitterent li bien ds eraplois, qui leur furent confies dans la Patrie, qu'ils devinrent a la fin tons quatre Tun apres 1'autre Eveques dans le Diocefe de Wibourg. Les on- vrages qu'ils ont public's fe trouvent dans Stierntnan & Schcffer (a). Sigfrid Aw-onis Forjius y ou comme il fe nomme dans fes Pronoftics Af- tronomiques da 1'an 1605 Slgfrldus Aronus Helfingforfius etoit ne dans la vil- le Helfmgfors (b) ; a'iant fait de bonnes etudes dans fa jeunefle , il fut gou- verneur de Mr. le Baron Guftme Horn de Kankas., qu'il accompagna dans fes voi'ages hors de Suede. De retour avec fon Eleve , qui s'engagea dans le Militaire & devint Felt-Marechal & Goiiverneur General dePomeranie, notre Forjius , s'e'tant acquis la reputation d'un bon Mathematicien , fiic fait Profefleur en Aflronomie dans TUniverfite dUpfal 1'an 160^. Pen avant ou apres ce tems-la, il fut envo'ie avec un H. jS/>d'Mf(?rjufqu'aufond du Nord, pour tirer une exa6le connoiflance de ce pai's & en obferver.la longitude & fa latitude (c). Hen a donne une defcription curieufe avec des Tables, qui fe trouvoient encore dans les Archives de Suede do. terns de Scbejfer. II continua toiijours a publier fes obfervations A{trologiques,qui en ce tems-la e'toient prefque par-tout en vogue. Mais ai'ant eu le malheur de pronofliquer au Roi Charles IX. que 1'ifTue de la guerre de Pologne lui pouvoit etre funelle , comme cela arriva; il fuc en attendant renferme dans le Chateau d'drebro, 1'an 1610. furtout parce que fes ennemis 1'avoient rendu fuipecl: de quelque intelligence fecrete avec le Roi Sigifttion(1(*). Trou- ve innocent & mis en liberte il devuit Profefleur Roi'al en Aftrologie & Pafteur de 1'Eglife de Ridderholm a Stockholm , & ne laiffa pas de publier prefque toutes les annees fes Pronoflics Altrologiques. J'en ai vu des an nees 1605. 1606. 1607. 1608. 1620. 1621. 1622. & 1623. dont il dedia quel- 00 V. Aboa lit. pag. 66-84. & SchefFer (<) V. Schefferi Lappsnia illuftr. cap. II. 1. c. p. 320. & Molier /, c. p. 471. p. 13. (fc) V. Palmsk. Mj'c. art. Forfius. ,, liam vel ceqititatem. Sic me Deits adjuvet f Jic falvet in extremo judicio : Hcec omnia ,, prcedi&a ut eo conftantius atque fidelius a me indigno fervanda fint , occitltS hoc meo cbi- rograpbo me obis obligare at%ue pradifta confirmare volo. Anno Domini 1639. d, 26. j, Martii ERICUS MICHAELIS KYRKESLETTENSIS (*) Mefftnius en parle ainfi (i): ,, Sigfridus Artnus Helfingforfius incomparalilis Reg- ni Suecici Ajironomus, ab inimicis apurj Regem Carolum A. 1610. vocatus in fufpicionem ,, fa&ionis cum Rege Sigifmundo f bujus in Finlaridia oecidtis faitiorikus 3 Orebrogiae c i- tra culpam fuit graviter cruciatus. ~) Bekftroem le dit aujji au 3. Indice (rf) V. la preface du Schibolet par I'Evl- de fa PJ'almopoegrapbia Suec. art. Aronus qiie Swedberg. item Palmsk. Regttr. ad a. Forfius ow H cite le Cantique Suedois que 1626. pag. 353 p dans les Regttres du Con- Forfius a compofe. fiftoirs rf'Upfal ad H. A. (*) Sa pi^ce juftificative en latin eft de trois feuilles du 19. Mai 1619, II la preTenta au Confiftoire de The'ologie tfUpfal (bus ce titre: ,, De jua slftronomia , dftrologia, ,, Pbyfeognomia , Meteorologia , Cbiromantia & nobili ilia Cbymia. (f) Et non pas a Ekenes en Uplande comme le dit Rudling dans fa defcription de Stock- lolm p. 120. En quoi aufli Scbejferi Suec. lit. p. 68, qu'il cite, lui eftdireftementcon- traire. (}) Le Savant Allemand Joachim Seil fit cette e*pigramme fur fon Portrr.it devantfln de fes Trait^s imprimd a Lubec: Sigfridi Arrmi vera eft , pie Letter, imago ,, If>fius ingeniwn pingere nemo potajt. ,, Mente celsr , calawo celer, celer ore, fed ejus Ingenium pingunt editaScriptafatis. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 331 imprime des Tan 1620 in 8. II a fait encore quaatite d'autres Traites & Pieces d'un plus petit volume (*). 3 V La Baronne Vendela Skytte, fille du Senateur Jean Skytte, pofTedoit par- faicement, outre fa langue maternelle, la Latine, la Francoife & I'Alkmandc & aflez bien la Grecque (a). Elle a laifle quantitede Lettres &d'Oraifons, qu'elle a compofees elle-meme & traduites d'autres langues en latin. 11 y a unin 4 imprime a Riga en 1630 , rempli de fes louanges. Elle mourut en 1629 a 1'age de 21 ans. Elle avoit deux fceurs Heldina &. Anne Skytte pref- qu'auffi favantes qu'elle. Elle fitpafTer, commepar heritage, fbn favoir a fa fille Heldevig Kyle. L'illuftre Baronne Catherine Eaat etoit de me me bien verfee dans les Belles - Lettres. Les favans de Suede ont extremement lone fes tables Ge- nealogiques des families Suedoifes , dreflees & peintes par elle-meme, & ou elle reftifie, en plufleurs endroits, les fautes que Jean MeJJenius a commi- fes dans fon Theatre de la NobleJJe de Suede. C'eil dommage que cet excel- lent ouvrage n'ait pas encore etc public (b). Charles Gyldenhielm , fils naturel du Roi Charles IX. , Se'nateur de Suede, etoit folidement favant, & ai'ant en le malheur d'etre garde an de-la deXII. ans dans une etroite prifon en Pologne , il cut encore celui d'etre tres-fou- vent follicite de changer de Religion , par les Jefuites,qui lui furentenvoies pour cet efFet. Mais tous les chagrins , qu'on lui fit endurer , ne furent point capables de 1'ebranler. A la fin il fut relache & donna une defcrip- tion exa6te des tourmens qu'on lui avoit fait fouffrir. Le titre en eft Schofa Captivitatis. &c. II a encore compofe d'autres pieces (c). Eric Emporagrius , Eveque de Strengnas , compofa les remarques que le Clerge produifit contre les Ecrits de 1'Eveque Jean Matthice 9 auparavant Precepteur de Chriftine, dont nous avons parle ci-deflus. Mais a'iant range dans 1'explication du Catechifrne , qu'il fit imprimer , les Femmes parmi les biens meubles ; la Reine Hedvige Ele'onore , Epoufe du Roi Charles - Guftave en fut li fcandalifee, que, du terns de fa Regence, elle fit defendre ceCa- techifme. La plupart de fes autres ouvrages confiftent en nombre de fer- mons qu'il a publics fur des textes choifis de la Bible (d). Jean Axehielm fut tres-favant dans Jes Antiquites de Suede. Quoiqu'il n'y ait (a) Stiernm. /. c. pag. 597. (c) SchefF. f Moller /. c. p. 155 f 395. (b) Scheffer /. c. p. 206. Boecleri Pere- it, Stiernm. p. 619. grinat. German, pag. 18. Moller /. c. p. (d) Palmsk. ad b. art. Rudling /. c. p. 6f. 412. f Stiernm. /. c. p. 646. (*) Palinskold 1. c. rapporte fur la foi de 1'Archeveque Haquin Spegel, quele Cur^de la Paroifle de Tertievalla en OJlrogotbie, lui avoit dit, que Forjius avoit cach^ dans la muraille de cette Eglife quelques Pieces manufcrites de la Finland: & des Monoies an- tiques. II eft plus probable , que parmi les papiers qu'on avoit enleve"s a Jean Meffe- nius , 1'Hiftorien, il s'ell trouve" quelques Chroniques de Finlaiide, 4crites par ce inl- ine ForRus , comme Mfjfenius 1'avoit maraud de fa propre main. Tt 2 332 M E M O I R E S C O N C E R N A N T ait que la moindre partie de fes Ouvrages qui ait ete imprimcV/- ; les Litres feuls qu'cn a donne Mr. Stiernman , font aifez voir , qu'il avc\it une vaflc connoiflance des antiquites de fa Patrie. Sa femme Catherine B-ctrcea a aufli ine'rhe place parmi les femmes favantes de Suede (#). Matbias Mylonius Biornkloii , ne de Parens d'une condition mediocre , fe pouiTa par degres jufqu'a la premiere dignite du Roi'aume, qui efl celle de ienateur. 11 rut emploie en des Commiflions fort importantes , pendant la guerre de 30 ans & apres ce tems-la (). Le Roi Charles'- GuftavJ lui ren- dit le tenaoignage , dans fa lettre du 2. Nov. 1657. , qu'il ne connonToit perfonne a fon fervice qui fut meilleur The'ologien & plus homme de bieu que lui. II avoit ete Precepteur du Comte Magnus de la Gardie. Les Me- moires & Traiies en fait de Politique, que Biornkloii drefla, marquentbien la nettete de fon (Hie & la capacite dont il etoit doue. II maria fes trois filles a trois fils d'Eveques , fa voir a Olhekrans , fils du Do6leur Paulinus, a Mr. de Klo fils de I'Archeveque Lemeus & a. Lillieflycht , fils de 1'Eveque Emporagriitt (f). Andre Gyldenklou eut un fort aufli favorable que le precedent,. & apres a- voir jette des fondemens folides dans les Univerfites du pa'is & au dehors, il monta d'un de'gre d'honneur a 1'autre jufqu'a devenir Prefident du Confcil d'Etat & du Tribunal de IVtfmar. II fut aufli un des Ple'nipotentiaires de Suede a la paix d'Oliva en Pruffi. Les douze Pieces, qu'on a de lui, regar- dent la plfrpart les affaires d'Etat (d). Pierre Scboinmerus 9 a e':e fur-Intendant du Diocefe de Calmar. Avant que de devenir Profeffeur en Theologie a Upfal, il s'appliqua fort a 1'etude des Mathematiques & furtouta 1'Aftronomie & publia entr'autres Ouvrages un Traite fur les Aftres , fur les Cometes & fur de noitveaux phenomenes du Ciel (. 27. QV. Scheff. fif Moller /. c. p. 154 (/) Idem p. 779. & 395- (g) Idem pag. 875- (c). Palmsk. Regltres du Senat ad b. ann. (o) Idem p. 817 & dans Jon . Aboaht. />.- |^g. zaig. 3.2. &c.. CHRISTINE REiNE DE SUEDE. 33 Ie cbemin & s'avan^a par degres jufqu'a 1'Epifcopat $Abo en Fmkmde. Chrif- tine 1'eftima beaucoup & lui enjoignit de traduire le Vieux Teftamenc en latin, fans s'arrerer aux tradu6tions publiees jufqu'alors. 11 executa cet or- dre quant aux quatre premiers Livres de Moife, qui fiirent imprimes in 8. en 1652 (a) ,mais a la Diete de Tan 1660. ai'ant eu le malheur de deplaire a la Reine Chriftine, par la trop grande liberte de fes difcours , dont il fat oblige de fe juftifier, il cut encore une autre affaire fur fon explication du Catechifme de Luther , ou i'on trouva des expretiions peu orthodoxes , com- me on difoit , touchant la diviiiori du DeeaJogue , les bonnes Oeuvres , ie Bapteme, la defcente de Jefus-Cbrift aux enfers &c. ce qui 1'obligea de re- fjgner fon Eveche 1663. n dit 9 Ll '^ f Qt depuis Vicaire d'un Pafteur dans rifle d'AIande pendant deux ansr Apres quoi il fut fait Pafteur de Rldder- /"///, & de Ste. Claire a Stockholm & enfin en 1671. Eveque de Linku- ping 9 ou il mourut en 1678. Parmi fes vingt-neuf Ouvrages , il y en a de fort eftimes , comme fa Chronologie facree , fa verfion de la Bible en latin, fake avec toute I'exa&itude poflible. Cette verfion n'a point paru encore, a 1'excepdon du Pentateuque , qu'en manufcrit (/;). Le Comte Be'noit Oxenjlierna, Senateur de Suede & Chancelier du.Roi'au- me& de rUniverfite d'Upfal , excella en toutes fortes de literature & de connoifTances propres a le faire master aux plus hautes dignites de fa Pa- trie. Nous aurons occafion de parler de lui ci-deflbus (c~). Le Comte Otto Komgfmark ne merita pas moins le nom de iavant. II fit furtout de grands progres dans Tetude de la langue Grecque (d). Mais le temoignage que le celebre Sam: Pufendorf \m rend, en lui dediant un li- vre de ce genre (e) fait voir, qu'il n'etoit pas moins verfe en d'autres f^ien- ces folides (*)- Entr'autres il a compofe un Ecrit, foils le titre de detrimen- tis, qua Refpublicas viris literati s defeftasfequuntur. Les Barons Charles Mornei', Jean Kruus, Jean Emft Creittz & Gujlave Pojje ont laiffe des preuves de leur erudition dans plufieurs parties des belles-let- tres , en latin & en Francois (/). Outre cela le premier a public les Eloges de Chrijline en latin. Le fecond a traduit la Vie de Tarquin le Tyran & Je Bon Prince par VirgUe A/fltezifde I'lralien en latin > comme auffi lesPenfees mo- Voiezfe-s lettres au Confiftoire ^'Up- xenftierna. ial du 10. Mars en 1649. & du 13. Mars 1650. item la preface de Terferus dans fes re- marques fur la G^nefe. Stiernm. /. c p. 821 f 838. Rudling Art, Konigsmark. (d) V. Plantini Hellas fub Artto. (e} Cejl Meurfil MijcelL Laconica. Am- fterd. 1 66 1. in 4. V. Joecher Gd. lex. 1. c. p. 122. fr. Spegel Hift. EccL Suec. pifc. Linkop. N. XII. (c) Idem p. 845- Palmsk. Mfc. art, O (/)Scheffer & Moller I. c. p. 164 396. I/Jim 1650, (*) Scilicet, dit Pufendorf 1. c. ,, eafuit divini ingenii tui reQituclo, eafelicitas, utin omni eruditiwis genere verfari prceclarum dttceres, nee quod plurimis ijlo loco natis , lobe nonbujus modofeculi, folemne eft t letter duntaxat liter as delibttret , fed fenitus Us ft , immergeres. Tt 3 334 MEMOIRES CONCERNANT L'an. morales de Marc Amonin Empereur , de foi & a foi-meme , en Francois (a) >45> (*). Le troifieme, favoir Mr. de CratfSjentr'aucresOuvrages de cette for- te, a traduit la Pietra del paragons Politico de Boccalini , .en latin, fous le titre de Lapis Lydius Politic us (b). Gujlave Adam Baner n'etoit pas moins eftime pour les grands progresqu'il avoit faits dans les belles-lettres & les fciences. II etoit fils du Grand Co- netable de ce nom. A fon arrivee a Padoue t on le proclama Pro-Re6leur de TUniverfite (f) , & pour en conferver la memoire , les Etudians en Droit firent mettre dans le veilibule de 1'Auditoire cette infcription qui s'y lit encore (c). ADAMUS BANER, Magni Imperatoris magnum incrementum , quum />- peratorias Artes in contuberniis fapient'us peterct, neunquam privatus ejjet, Gym- nafium (lo Studio) regere jujjus y ita impcravit ,quafi diu paruiflet : it a pace u- fits, utfummi Duds augurium expleverit. Juris Studiofi PP. MDCLL (j). Eric f Andre Broderi Ralamb fe font acquis de meme la reputation desper- fonnes lettrees. Leurs Defcendans ont toujours confer ve le gout pour les belles-lettres & les beaux arts (d). George Stiernhidm , un des plus grands genies que le Nord ait produits , naquit en 1598 (^). Apres des Etudes folides en toutes fortes de liceratu- qu'il fortifia dans fes voi'ages dans les meilleurs Etats teV Europe , ils'at- re tira tant d'eflime de la Reine Chrijl'me , que non feulement elle 1'annoblit, mais (a) Jmpr. ^'Elzevir a Utrecht 1636. in 12. ? I'antie Traite 1659. in 12. vid. Stiern- man Cent, /.Anonym, p. 18. (/;) A Amfterd. 1642. 12. v. Bayle Dift. art. Boccalini lit. L. (c) Plura Vid.fupra art. Octav. Ferrarius f hujus Oper. Tom. II. p. 573. (d) Stiernm. /. c. pag. 384 &? 385. (e) V. la -vie de Stiernhielm Mfc. en Su^dois. (*) La d^dicace eft adreflSe au tres-illuftre Gabriel Oxenftierna, premier Sdnateur de Suede, qu'il appelle fon Pere, en fe nommant fon fils tres-obeiflant. Mr. Boxbornius parle amplement de ces ouvrages dans fa belle lettre a Kruns Kal. Nov. 1634. pag. 53. &c. & fes Poemata pag. 14. (f) C'eft d cette Univerfit^ feule des Catholfques, oil les Proteftans.peuvent, meme de nos jours, devenir Pro - Refteurs , & Syndics & oil en cas de mort, on leur donne une f5pulture honnorable, des qu'ils fe font fait infcrire couime Etudians , dans les Regitres de 1'Univerfit^. (f) Ferrario fit encore a fon honneur une autre infcription au nora de la Nation Alls- mande en ces termes 1. c. Hoc front is bonore placidoque fulgore luminum ac promijja ccefarte avidd populis fpetta* batur GUSTAVUS ADAMUS BANER, cum a Parentif fortijjimi Imperatoris tropceis recent Patavini Gymnajii regimen capejjerct & laureatis utrimque fafcibus in complexu Mnfarnm imperatorice indolis flos injpem non unius triumpbi affnrgeret. Natio Germani- ca Martis ac Mufarum Aluinno Patri Militaris filis litcraria "gloria Reparatori felicijfi- mo. M. P. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 335 mais qu'elle le combla de bienfaits. II a fait paroitre fon talent poetiquedans *r' an le terns que Milton compofoit en vers blancs Ton fameux Poerne du Paradis perdu. 11 a, avec raifon, entre lespoetes Suedois le rang que Balkan don- ne a Malhcrbe entre les Fraiifois (f). II laifla un difciple en cet art nom- ine Samuel Columbus qui a aproche de fort pres de lui. Stiernhielm excella auffi dans les Mathematiques (j.) ce que prouve fon Archimedes Reformatus , qu'il dedia a Cbriftine, 1'appellant les premices de fes idees en ce genre. Sa tinea Carolina en eft une autre preuve , comme auffi fon algebre manufcrite en Suedois , ou il a porte cette faience auffi loin qu'aucun autre en ce terns- la. Outre cela il etoit fort verfe dans les langues anciennes & fur - tout dans I'hilloire : ce qu'il a fait voir dans fon Traite de Origins GentiKum & L'mguarum (J). II entretint commerce de lettres avec les favaris de Y Eu- rope } (*) Nous ne pouvons pafier fans remarque le jugement frivole, que le Sr. Crameras a porte", felon Pajcbiits (i), fur cette poefie de Stisrnbielm, dans fa re"ponfe au Traite 1 du P. Boubours , intitule Hifloire Poetique de la guerre declares entre les slnciens f les Modernes. Selon lui ce poe'me de Stiernbielm eft peu de chofe. Mais c'eft juger com- me 1'aveugle jugeroit des couleurs. Car s'il avoit aflez entendu la langue Sutdoife & compris le fublime de cette poefie de VHercule en vers blancs, il auroit, en bon con- noilfeur, regard^ cette Piece comme un chef d'oeuvre en fon genre. Pour ce qui y eft dit (2) que la langue Alkmande eft regarded en Suede comme une langue f^vante, il faut qull ait voulu parler de gens de metier & d'artifans de fon pa'is , qui ne fachant point s'exprimer autrement, fe fervent de leur langue maternelle. Car pour les Univerfite's de Suede , les langues proprement dites favantes, y ont e"te" jufqu'ici a proportion mieux cultiv^es , meme par les gens -de qualite , qu'elles ne le font au moins aujourd'hui dans celles d' ' Allemagne. (f) Voici ce que Boileau dit de Malberbe & qu'onpeutjuftementapp!iquera&/mj/?/m.. Enfin Malberbe vint & le prdmier en France Fit fentir dans les vers une jufte cadence, D'un mot mis en fa place enfeigna le pouvofr, Et rdduifit la Mufe aux regies du devoir. V. Boileau art. poet, vers 131-134. (|) On rapporte de lui , qu'il fut le premier qui fe fervit en Sue~de de verresoudemi- roirs ardens, & qu'avec un de ces verres il brula la barbe a un Paifan, dtant a FEglifer qu'il fut citt5 pour cela devant le Juge & accufe" par le Paifan de fortilege. S'il n'eut montr^ le miroir & comment tout cela fe faifoit fort naturellemen-t, il auroit eu une fentence peu favorable (3). (g) Nous avons dit ci-deffns que Cbrijline voulut que 1'Eveque Terferus donnit une nouvelle traduclion du Vieux Teftament. Elle lui enjoignit aufll d'^crire un Traite"fur I'int^grit^ du Texte H^braique. Puis elle fe rendit expres a Upfal pour etre preTente quand Terferus foutint des TheTes fur ce fujet centre Stiernbielm, qui fut charg^ de fai- re la fonftion d'Oppofant. Elle fe plut infiiiiment a entendre ces deux Savans hontmes Staler leur vafte Erudition (4). fi) V. fes Nov. Invent, pag;. 53. & loj. c&. (?) V. Palmskold, & dans la viede Stitrnhi{l Axilii Axtlfon difl. de Pocfi Sueg^ titee ci deflus. (2; L. c- pag. ?j, (4> Y, Ealmil&lA att, ME MOIRES CONCERNANT rope , de 1'un defquels , favoir le celebre David Elondel , on trouve une . reponfe imprimee dans les a6tes de fgiences de Suede (a}. Son GloJJarium & fa preface a J'edition des Evangiles d'Ulphila (quoiqu'un peu fufpefte de principes des Preadamites) qu'il publia en 1671 , eft un excellent morceau & une bonne preuve de fa protbnde connoiflance de la langue Gothique (). Dans Ton Anti-Chverius , qui fiit imprime apresfa mort, il refute folidement Cluverms en ce que ceiui-ci pretendoitque les Goths n'etoient pas originaires de Sucdc. II a laifie un pareil ouvrage fous le titre $ Anti-Bochartus , ou il fait voir que celui-ci rapporte envain 1'origine de plufieurs mots Suedois a la langue Phenicienne (c) , au lieu qu'on doit la chercher chez les Celtes & les Schytes: furquoi il y aun morceau infere dans les acles cites ci-deflus , &l'on peut confulter Ja-deflus la reponfe de David BIondela.Sticrnhielm (d). Schejfer a fait le catalogue du refte des ouvrages qu'il a publics (e). II etoitd'unehu- meur enjouee , qui le faifoit recevoir fort bicn a la Cour & dans les belles- compagnies. On le querella quelquefois fur fes penfces trop libres fur la Religion : ce qui dans fa derniere maladie lui fit demander a fon ami Colum- bus quelque livre fur la certitude de la Religion Chretienne , difant qu'il en avoit alors grand befoin. II revint de fon libertinage, car fon ami intime 1'Eveque Terferus , alors Pafteur de 1'Eglife Ste. Claire a Stockholm, quil'af- fifta dans ce dernier moment, dit dans fon oraifon funebre, qu'ala verite, il n'avoit connu perfonne qui eut parle de Dieuplus librementquelui , mais qu'il ne connoiflbit auffi perfonne, qui eut temoigne a fa mort un repentir plus fincere de tout ce qu'il avoit dit de trop libre pendant fa vie. II mou- rut a Stockholm en 1672. Harold Ap^elbom avoit des etudes folides & entretenoit commerce de let- tres avec les plus favans hommes. On peut juger par la lettre qu'il ecrivit Tan 1641. a ^!. G. Voffms que la literature & les faiences etoient plus en vogue & mieux recompenfees en Sutde en ce terns-la , qu'autre part (*). Devenu depuis Miniflre de Suede a la Cour d'dngkterre , le Roi Charles II. le prit en fi grande affeclion , qu'il dit , qu'il lui confieroit fa Couronne & fon Sceptre (/). Edouard Philippe Ehrcnjlein etoit tres - favant & fi promt a s'exprimer ele- gamment en latin , que lorfqu'il y avoit a repondre quelque chofe publi- que- (a) F. Atta Soc. Scient* Suec. I'an 1725. (c) Dans fa Geograph./ocr. Part. IL Libr. p. 29. L cap. 42. (/O F. Pa'msk. Reg. du Senat en 1672. p. (d] L c. pag. 29. 1058. item la preface de I'EvHque Eric Ben- (e) Dans fa Suec. lit. art. Stiernhielm p. zelius devant Serenil Lexic. Anglo-Sueth. 178-180 fcf Moller /. c. pag. 401-404. fag. 9. (/) Palmsk. Reg. du Senat. Ian. 166$. (*) Voici fes propres paroles (i): ,, Omnia in Patria in melius mutata invent. . . M:if& , extorres fedibus prioribus in Septentrioncm migranmt ^f bic t antijper J'edem fixentnt , dum alili Mars detomierit Video otia bcec & pretia etiam ejfs Uteri s qualia in pacatijjltm Rtpublicafub opthno Magiflratu ponifolent. (i) V. Vojji Opcr. Tom. IV. p. 293. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 337 quement de la part de la Reine Chriftine, a Stockholm ou a Upfal, elle Tap- pelloit fouvent par fon nompour porter la parole dans rAflemblee. Ilmon- I65 ta par degres aux plus hautes charges en Sutde> & apres avoir ete Miniftre " f *^* Plenipotentiaire en Angletem, en Hollands & au Congres de Cologne , il foe fait Senateur de Suede & mourut en 1686 (). Jean tfttechindi , Hiiloriographe du Roi'aume, e'toittres-favant; entr'au- tres Ouvrages il a ecrit 1'hiftoire de Guftave-Adolpke , qui pour n'avoir pas fubi la cenfure avant que d'etre imprimee, fut retiree. II fit une harangue a UpfalYan 1654. a 1'abdication de Chrtftine en fa prefence , & devant le Roi Charles- Gajlave 9 comme le Maitre-es-Arts Eric Simonius harangua Chrif- tine en 1667. qu'elle revint pour la feconde & derniere fois en Suede (). Laurent Gunnari Banck s'etoit acquis dans fes voiages de France , $ Italic & d'Efpagne une fi grande confideration , qu'apres en etre revenu , on lui donna une chaire de Jurifprudence a 1'Academie de Franecker , qu'il occu- pa quinze ans. Bayle parle fort au .long (c) du Traite de la Taxe de la Chancellerie Romaine, qu'il publia en 1651 , ou dans fes notes il explique beaucoup de termes difficiles a entendre, qui font une efpece de Gloflaire. Outre les Ouvrages que Bayle cite de lui , il en a public un de Arrejlo & Cambio , une autre DifTertation deftruftura & ruptura Aurea Bulks Car oil IV. Franekerai66i. in 4. & fes Bizzarerie Politicks ib: 1658 in 12. II mourut en 1661. A ces Savans-la nous pouvons de droit ajouter Jean Gabriel Sparwenfelt , premier Introdu6leur des Ambafladeurs , Seigneur d'un profond & vafle favoir. Jl parloit & ecrivoit parfaitement quatorze langues , outre un bon nombre de dialedles qu'il entendoit paflablement (d). Apres avoir dej a voi'a- ge dans la meilleure par tie de Y Europe, il fut envoie plus d'une fois auxde'- pens de la Couronne pour chercher des monumens des Goths dans tous les pais ou ils avoient autrefois fixes leurs demeures , & il n'y pas de pais en Europe qu'il ne parcourut pour cela. II pafla meme en Afrique & en AJie 9 d'ou il apporta un threfor de Manufcrits qui fut place dans la Bibliotheque d'Upfal & dans celle du Roi a Stockholm, &dont les Catalogues font impri- mes (e). II fut trois ou quatre fois a Rome & y fut toujours tres-bien reju de Chnjlme , pour laquelle il avoit des lettres de recommandation du Roi Charles XI (*). II eut un bonheur que perfonne avanc lui (entre les Catho- li- (a) V. fon Oraifon funebre Jar Vultenius (d) P. Sparwenfeldii Parentalia de Mr. it. SchefFeri Suec. lit. p. 175. VEvHque Wallin pag. 61. &fc. (b} Idem p. 184. (e) V. Celfii Bibl. Upfal p. 50. ?<;. ^ (c) Dans fan Dit. bifl. art. Banck item Norelii ftritt. in eandemp. 39.it. Parental. dans fes lettres cboifies parMarchand /;. 776, /. c. p. 73. (*) Void la derniere de ces lettres que nous jugeons digne d'etre infe"r des clefs pour aller feul & fans te'moin fouiller & examiner les Archives de fon Palais , quand bon lui fembleroic. Ce qu'il fit au grand profit du def- fein qu'il avoit de rechercher exaftement tout ce qu'on pouvoit decouvrir de Manufcrits , qui traitoient des anciens Goths & des autres peuples fep- tentrionaux. Au refte, ce que lui procura cette favetir, c'eft: que laCour Ecclefiaftique de Rome , voulant rectifier les anciens offices des Ulyriens & des Sclavons , a qui , depuis un terns immemorial, il etoit permis de ce'le- "brer le fervice divin en langue du pai's , & ne trouvant perfonne aflez ver- fe'e dans leurs langues , Mr. Sparivmfeh lui pre'fenta le Di6tionaire Sclawn , qu'il avoit compofe , & lui fournit par -la le moien de venir a bout de ce qu'on defiroit. 11 etoit en etroit commerce avec les plus ce'lebres favans de I Europe, dont il a laifle une prodigieufe quantite de lettres qui aflurement ineritent d'etre publie'es (*). Leibnitz connoiflbit fon me'rite & entr'autres l'Au> (a) V. Ses Parentalia pag. 52. &c. anciens Goths & Suidois. J'ai voulu envoi'er un homme capable dans les divers Pai's, ou les anciens Suedois & Goths ont pafl^ ou fe font ^tablis , pour en faire des recher- ,, ches & pour les recueillir , fi par hazard on y trouvoit encore quelques beaux reites, ,, qui y fervifient d'dclairciffement. C'eft a cette fin que j'ai choifi nion fidele fijjet le ,, Noble 'Jean Gabriel Sparwenfeldt & lui ai ordonne" de fe charger de cette commit'- fion,tant ^ caufe defa capacite'.vu qu'il s'ed rendu familiere la langue Sclavonne que parce qu'il poffede 1'aneienne langue Runique & prefque toutes les langues vivantea- de YEurope , outre une parfaite connoitFance qu'il a. de 1'Hiftoire Suedoife & Gotbi- ,, que. Je ne doute nullement que Votre Majefte', qui jufqu'ici a donnd tant depreu- ves ^clatantes de fa bienveillance & de fon emprelFement a contribuer d tout ce qui' , peut fervir d 1'honneur & A lagloire de la Nation Gothique & Suedoife , ne veuille >t encore concourir avec mot au meme but, d'autant plus, que V. M. yeft elle-meme fi fort inte'refle'c. C'eft pourquoi dans une pleine confiance en la g^ncrofitf* de V. M.. je la prie tres-inftamment, de vouloir accorder audit S^zrwenfeldt un acces libre ati- ,, pres d'elle, & non feulement de lui faire avoir communication des pieces & desmo- numens, que V. M. aura fait ramafler en ce genre dans le lieu de fa refidence, mais encore de daigner 1'honnorer de fa puifTante recommandation aupres d'autres per- ,, fonnes, qui font en pofieflion de pareilles chofes, ou qui pourroient lui donner oc- caflon d'en avoir d'autre part. Je me promets de la boutt^ de V. M. qu'elle voudra bien aggr^er ma demande : en revanche je ne manquerai pas de reconnoitre fon nf- feftion dans toutes les occurences qui fe pr^fenteront : lui fouhaitant d'un amour fi- lial toutes les profpe"rit^s qu'elle pourroit defirer elle-meme. Donn6 & Stockholm , ce 6. Avril. 1689. CAROLUS ff. Bergenhielm. (*) Parmi fes lettres il yen a de fort familie'res que lui e'crivit le celebre Magliabschr Bibliothecaire de Florence. C'eft pourquoi on a de la peine ajouter foi au raport qua lui fit en 1699 Jacques Gronoiiius de ce qu'un Benzelius lui avoit ditau fujetdece grand homme. Narrotibi , dit Gronovius d Magliabecbi (i),, ante paucos dies adfuitmihiRen- zelius, Epifcopi filius in Suecia, etiam pofteb venturus ad Te. Is aliquandiu Ultrajetti babitavit. Qui illic fermones ab illo homine excepti fuerint , non hariolor. Sed is eoftul- titia venerat , ut Magliabechium eruditum ejfe negarst, obftupefcente me: & cum inqni- rerem (0 V. Civ. B qui ait transmis fes lettres a la Pofte- rite. (a) F. Leibnitz dans fa preface defa Man- Suec. lit. p. 165. &c. & Holmia lit. p. 4(5. tiffa ad Corp. Juris Gent: p. 3. p Leibnitii item Kappens Vorrede der Gel. Rspb. durcb Epift. ad Sparwenfeld. Tom. III. p. 173. ^f Saavedra p. 50. & 51. 335. &c. Burchardi Bill. Wolfenb. P. III. (fr) V. Stiernm. L c. p. 739. item. Schef- p. 324. Junckeri vita Lud. p. 166. SchefF. fer /. c. p. 164. rerem, a quo fie formatus ejjet, non cunttarter nominavit Suecum nomine Sparrenfte- nium (Spanvenfeldium) quifumtibus Suecice Regis fuiffet in Syria &? te quoque faluta* ,, viffet , nunc vero in Aula, ijla effet etiam gratiofus. An recordaris tali nomine bominen tibi adfuiffe ? Potes facile inducere in animum, quo patto ilium exceperim. Tuplurapo- teris intelligere , Ji quando te falutabit. Sedjic ifli garruli &fgmidoti inter Je illic cort' ,, ferunt jermo7ies. (*) Mr. PKveque Wallin dit enfin de Sparwenfelt : quicquid in Pignoriis futs & ,, Kircheris laudat ^f ja&at Italia: in Ciaconiis & Laftanofis Hifpania: in Scaligeris, Peirefciifque Gallia: in Camdenis Cottonifque Anglia: in Lipfiis Bufbequiisque Bel- ,, gium: in Wormiis Borichiifque Dania ; id omne in uno Sparwenfeldio babuit, in un Sparwenfeldio ami/it Suethia. (f) Voici comment il s'exprime lui-meme (i) ,, Ego Hunterns Magnus quondam Up- Jalite , Succorum , Gothorum , Sudermannorum , Smolandorum f Finlandorum Depofitor , qui novam illam Sueticam , Gotbicam, Sudermannicam , Smolandicam f Finlandicam Re- ,, ligionem depofui : quo nomine ad Regcm ipfum f pracipuos Regni Coiifiliarios dilatus ,, fwn, & Depofitor depojitus.... Ct) V. fcs Partnta!: p. 78 . cfr. Aftalit. Sued* (z) V. Hunteri Epift, pag. 1^3. |c 241 A. 2727- p. a<>3 paffim. VV 2 MJEMOIRES CONCERNANT rite'. Dans ce recueil de lettres, Rentes d'un ftile yif & afTez comique , il ' 630t y en a plufieurs a des perfonnages tres-illuftres & a des Savans de Suede, " de Hollands , $Angleterre> de France & SAllemagm avec leurs reponfes (*). On y voic fes voiages en Hollande & en Angktcne , a Paris & a FJenne (a), cl'ou auffi bien que d'autre part , il fe recrie fort centre les Proteftans , di- fant que parce qu'il s'etoit fait Catholique-Romain , Je Roi Guftave-ddolphc 1'avoit banni de fa Patrie (f). II remercie 1'an 1 630. I'Elefteur de Mayen- ft de la Charge de Secretaire aupres de I'Empereur. Mais il fe plaint bien- t6t apres , qu'avant que d'en avoir pris pofleflion il 1'avoit perdu , parce qu'il etoit Su&dois , (Z>) (j). A la fin de ce recueil il y a une harangue ou panegyrique , oil il felicite le Comte PPratiJlas de Furjlenberg fur fon ma- nage. Laurent Skytte 9 Neveu de Jean de ce m6me nom dont nous avons parle ici-deflus , etoit Refident de Suede a la Cour de Portugal (c). II changea de Religion & fe fit Capucin. II avoit un profond favoir , & fur-tout il con- noiffoit parfaicement bien les Etats de Y Europe (J). On lui offrit un Eve- che (0) V. Ses Epitr. pag. 20. f 47- p. 96. C fe ) ' * P- 38i. 395 ? 415. 142. 163. 194. item pag. 219. 254. 304. & (c) V. Palmskold art. Laurent Skytte. 417. (*) Quoiqu'en ait ditMr. 1'Archeveque Eric Benzelius a Mr. Stiernman(\. c. pag. 739.) il y a une lettre de Hugo Grotius a Hunter. Elle eft de ran 1630. & Ginmis-au dit: Video ex literis tuis ej[fg te in domo eminente admotum fpei Adolejcentis illuftris , qui , fe'licite* de s^tre alii de variis peregrinationum fuarum fru&ibus : ja&ent fe vidijfe multorum bominum mores & urbes ; ego non alia no- mine magis glorior, gratulorque felicitati me ditum me amplius vult (2)... Q) Voici fes expreffions : Nibil eft difficiltus' quam magnum & juftum dolorem part- bus verbis depingere atque exprimere. O craffum infortunium! Antequam felicitatem Se- cretariatus mei noffem, exemtusfum. Ultimum mal'orum eft, Jecundum Stoicts ,ex viv9- rum numero exire , antequam moriaris... In Suecia ob fidem Catbolicam capite diminu- tusfwn: in Germania Secretar iatum perdidi , quia Suecus fum... lucundum eft quod ba- ,, bui : bumanum quod perdidi : Deprimitur niji pes alter , non tollitur alter : Sic cafu alterius tollitur alter homo (3). () Laurentius Skytte, dit Norrman (4) , a Catbolicis doSis inter Allatium , Kirche* Jrum Q* Holflenium locum for titus eft. fl) Huntfri Epift: p. 412. (4) V. ffornaaniana p. 214 eft. urmani Syll. (2) Hunter I. c. pag. 3? 2-340* Ep- T. V. pag. 75. & Ntttelblafai >leni. Re(ht (0 Utut ibid. pag. 4IJ-4XJ. Ccc. Scmi-Dccas I. pag. il. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 341 che*, mais il aima mieux refter dans le froc fous le nom de Frate Laurentio ft D. Paulo Nobile Sueco: quoiqu'on lui fit meme entrevoir & efperer uncha- ^ peau de Cardinal. II preflda fouvent a la Congregation des Capucins , & fut fort bien recu de la Reine Chrijline a Rome : mais a la fin il gata tout aupres d'elle par fa trop grande franchife. Les ouvrages qu'il a mis au jotir font confeffio veritatis Ecclefiae Catholics &c. a Cologne 1652. in 8. item Peregrinatio Santta. Roma 1658. item Scala PietatisRoma 1668. 8. item Ramus Oliva Septentrionalis revivifcens infua OKva antiqua & unica. 1672 in 12. Jean Paftoviuf Gotbus, Protonotaire Apoftolique , Chanoine de JVarmie & Bibliothecaire de Sigifmond Roi de Pologne , s'eft rendu celebre par fa Fitis Aquiknaris y ou les Vies des Saints qui wt illujire la Suede , qu'il dedia a ce Roi (a). George Boraftus , Do&eur en Droit & Secretaire de Cabinet du Roi Si- gifmond. III. II publia un Ecrit en latin fous ce titre: Les raifons pour- quoi le Roi Charles - Guftave a entrepris la guerre de Pologne 9 ou il ta- ,,, che de les reftuer. impr : a Lublin & a Dantzig. (^)". Hunter felicite Boraflus dans une lettre de ce qu'il avoit pris la defenfe des Jefuites , con- tre les Univerfites des Proteftans : fe plaignant fort , que fon Hiftoire de Suede depuis 1'an 800. jufqu'au terns de Guftave-Wafa n'eut pas encore etc publiee avec fa defcription amufante de la Lapponie (c). II y avoit encore un autre Suedois au fervice de Pologne , nomme Nicolas A Palmgarten, qui a compofe un Ecrit fous le titre de REGALE TES- T A M E N T u M , feu kgalis Manifeflatio , qua conditionem Religionis haredita- 99 riis Regni Suecice Regibus , tejlamento SereniJJimi & Potentifllmi GUSTAVI I. Suecorum, Gothorum, Wandalorumque Regis imperatam non ejje , dejure non y) fubfiftere demonflratur : Auftare Nicoho a Palmgarten Palmerio y SereniJJimi 3, Principis CAROLI FERDINANDI Polonice & Suecice Principis , Eplfcopi Wratif- 9) lavicnjis Confiliario & Cancellario" : d'ou Ton peut juger , que Mrs. les Je- fuites , par eux memes ou par leurs EmuTaires , ont fait tout au monde pour foutenir les pretenflons des Princes de Pologne de la derniere ligne Ja- gellonique fur la Couronne de Suede (*). Chrijline avoit auffi a Rome a fon fervice deux Suedois fort favans , Tun fe nommoit Jean Walerman , dont le celebre Ottave Ferrario faifoit grand cas , comme on le voit par le commerce de Jettres qu'il entretenoit avec lui (a) Stiernman /. c. pag. 403. item Celfii (&) Idem ibid. p. 404. ? p. 37. lift. Bibl, Upfal. p. 35 fcf 36. (c) Hunteri Epift. pag. 252-254. (*) Ce Manufcrit de 50 ou 60. feuilles in fol. eft entre les mains de Tilluftre Mr. le Baron vow Kocben, Chancelier de la Cour de Suede. II 1'a acquis err Pologne lorfqu'il fuivoit le Roi Cbarlts XII. en fes campagnes, comme emplo'i^ dans.le d^partement des affaires ^trangeres. On remarquera en paffant, que 1'auteur de ce Manufcrit, derive le mot de Feudum du mot Suedois Feida c. $. d. faire la guerre. Le mot Felonia de celut de Fela qui veut dire manquer a fon devoir: de meme femot Va[]al de Suedois Val & Sail, qui veulent dire bien & heureux. On peut confeier ce que dit Mr. de Rofenftiernn de ce Palmgarten 1. c. pag. 91, 92. Vv 3 342 M E M O I R E S C O N C E R N A .N T k' aH lui () (*). L'arutre dtoit dndrj Galdcnblad fecreraire de la Reine pour les 1<55 ' affaires de Suede. La correfpondance qu'il avoit avec 1'illuftre Mr. de Sparwenfelt , fait connoitre qu'il avoit beaucoup de favoir (Z>). C'eft par lui que I'Ouvrage de Loijlr de la Reine Chriftine a ete communique a Ro:ne, 1'an 1692, comme le porte le titre de quelques-unes des copies, qui en one ete tire'es. Nous aurons occafion d'en parler ci-deflbus plus au iong. En attendant, nous remarquerons ici, que le fils'de ce Galdenblad devint Pere- Refteur du grand College des Jefuites de .JJntz en Autriche , ou il a legue une fomme confiderable pour 1'entretien des jeunes Gens du Nord , qui y viendroient faire leurs etudes (V). Cauroit ete- la fans doute unepepiniere d'Emiflaires Catholiques vers le Septentrion. Mais il eft a prefumer, qu'ii y a todjours manque des Penfionaires de cette region. Voila, tant dans la Noblefle que dans les autres Etats, un nombrerai- fonnable de Sitedois , qui tous ont ve'cu, ou out ete e'leves dans le terns que Chrijline occupoit le trone, ou environs , & qui par les belles-letttres & lejs faiences, qu'ils poffedoient, ont me'rite le nom de Savans. Je ne pretend pas avoir nomme tous ceux qui fe font diftingues par leurs lumieres: & il fe peut bien, que j'en aie omis plufieurs, qui meme ne cedent en rien a ceux que j'ai cites. Qtfon me pardonne la-deffus mes omiilions, qui ne viennent principalement que de la crainte d'etre trop - long. D'ailleurs> j'ai indique des Auteurs, d'ou ceux, qui fouhaiteront une inflrudlion plus complette , pourront tirer des fupple'mens. J'ajouterai feulement , comme une remarque utile que prefque tous ces favans , dont je viens de parler, apres s'etre bien fondes dans leurs etudes aux Univerfltes de Suede , one pafle plus ou moins de terns dans Jes Pa'is etrangers, pour mettre d'autant mieux leur loiiir a profit & tirer d'autant plus de fruit des converfations avec les favans du dehors. Quoiqu'il en foit , apres 1'indice que Ton vient de voir de tant de favans Su&doiSt du terns de Chriftine, on ne peut que regarder comme unepreven- U vient tion affez ordinaire a des Franfois tels que Naude, ce qu'il avance dans fa ' ' Mr. igttre a GafTendi (d] : qu'il y avoit de fon terns 11 peu d'hommes dottes aude nit, , ,* v >> ' > . -/y n i / ue de fon en Suede , qu il n y en connoilloit point encore d autre en cette qualite, s ii n'y que i a R e j ne Chrijline feule". Le Sr. Naude fait bien d'aj outer le mot ir pas des V, ~* ... ^ , ,. , - ... , . , r, ,, f dencore (quoiqu il y cut deja quelques mois quit etoit a Stockholm). II n avoit ^^ prendre un peu la peine d'en chercher ,' & certainemtnt il en auroit trouve qui 1'egaloient a la prefomtion pres , par ou certaines gens ont ac- coOtume de fe faire valoir, meme aux depens d'autrui. Mais de Mrs. les favans (a) F. Ferrar. Oper. T. II. p. 214. 2i<5 (c) V. Ol. Celfiiv/teMeflen.'pflg. 'n. not. fife. W Elle eft du 19. Oft. 1652. Wiez ci- (&) V. le Recueil de jes lettres en Mfc. cbez debits a la page. 262. Mr. I' ArcbevSque Eric Benzelius. y. I'Append. (*) Nous inft^rerons ces lettres dans TAppendice comme fervanc d 1'eclairciiremenfde X T . xxxix 'quelqucs points de la literature de ce terns-la. * XL. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 343 favans Franpois , qui (e trouvoient en ce terns- la en Suede, pas un feul, L ' an que je fache, ne s'eft d9nne la peine de fortir de Stockholm apres s'y etre J[ fixe, ni ne s'eft mele avec les gens du pai's pour pouvoirjuger par lui-meme de ce qu'ils valoient. Apres tout , le reck que le Sr. Naude fait a Ton Ami Eioge & dans fon hiftoire de Charles XII: ^ , qu'elle airaa mieux converfer avec les Savans que de rt^gner fur un petiple qui ne connoillbit que les Arnies (2)". Cette illuftre Reine, comme Voltai- re 1'appelle a jufle titre , avant que de quitter la Su&de , ^toit plus favante.que grand noinbre de eeux, qui veulent paflTer pour des homines univerfelsr &non feulement nous avons uiontr^ ci-deflus & le montrerons encore, qu'elle pofT^doit les Arts & les Scjen- v c ;. e ces i un point qu'elle n'avoit pas befoin de les aller ehercher (3): mais encore, qu'ily pa g. 2 " JO< . avoit tn Suede, foit dans la NoblefTe, foit dans les autres Ordres, durant le Re^ne de Cbrijline , tant de Savans en tout genre de fcjences , qu'on ne peut dire avec fonde- ment, que ce Peuple ne connoiffoit alors que les armes. (f) Mr. Huet, quoique prtivenu comme la plupart des Francois, pour fa nation , e"- Beau portrait erivit au Sr. Pierre Mamlrun , le I. de May 1653 : ,, De slrctoa ilia Regina quod fclre que Mr. Huet ,, vis, jam accipe. Flos , qui non defuit, needum maratit. Non tuto creditur iconibus il- Us qua circ umferunt ur ; namfaciem tetricam 5* aujleram , corpus procefum & junceiun exbibent, cwn babitior ilia fit & obejior , at citra mediocrem corporisftaturam, aluroetiam burner o gibbera. Vultu eft eleganti ^f venufto, flaveo capillitio : oculis vero ita micanti- bus, itt foiam illam in Suecia oculatam dice re pojfis. Mores videntur integri : nibil enim msror fparfos in contrarium rumttfculos , per Germanium prafertim: Cufajimt ifla in Auf- triacis officinis. Pudorem vultu prafert, f ex ruhore arguitur , quoftatim juffunditur ,. Ji quid intemperantius diftnmfa&umve Jit. Memoria eft felicijjlma , ingenio fupra fexurti, dotirina fupra cetatem. Facile s Junt ad illam aditus : comes enim eft 5* manfueta, Majeftatis lamen retinemijjima. A feveritale vert Gerwanica & Boreali morofitate ita eft aliena, ut illam Roma vel Lutetiq natam dicas. Gallos fupra modum fovet fef tite- tur , quos tola Suecia , Gens imidiofa, odit f devovet. Non tarn vere de fe pradicat Tullius , quam de ilia did poteft , non effe mitlti cibi , fed multi joci : nam abftem-ia eft , licet Sueca : pares enim f jejune comedit : jocis autem , feftivitatibus f facet e dic- tis mirifice capitur ^f dele&atur (4). d-amres tle cetle (i) V. fa rcponfe au Prince Roial dc PruJJe dans fcs oeuvres Tom. V. p. 364. &c dans fa let- tre ecrite a S. A. R. de Suedt Je z Mai 1745. (z) Dans fon ktft. de Charles XI L T. I. L. I. p- 10. fj) V. ci-defTus p. 2 ye -art. Bochart 5c fon Epi- jrramc oh il dit , que les Savans vcnoient cher- cher !es fjiences aupres de Chrifline. C4) V. T-.liadit Recaeil dc Diflertations Ton, II. p. 272- 344 MEMOIRES CONCERNANT L' an homrnes, il n'y a aucun art, aucune faience, dont elle ne connut aumoins les principes. Car comme nous 1'avons montre ci-deflus par des auteurs leTbeiieTiet-contemporains, elle favoit jufqu'a neuf ou onze LANGUES (a) dont elle fT *es" parlor plufieurs comme fa langue maternelle & dans lefquelles elle ecrivoit parfaitement bien. Patin difant, par exemple, qu'a 1'egard du Latin 9 elle en favoit plus que beaucoup de gens qui en font profeffion (6). A cela nous ajouterons des temoignages d'autres bons auteurs , qui funs intention de flater Chri/line, atteftent, que non feulement elle aimoit les Sciences & les beaux -Arts, mais encore qu'elle y etoit plus que mediocrement verfee. Chriftine, dit Menage , ne preferoit point Jes Modernes aux Anciens. Elle etoit pour les Anciens (c). Ce qui donna a Defcartes occafion de fe plain- dre , qu'elle etoit extremement portee a 1'etude des lettres (d). A 1'age de dix huit ans, dit 1'Auteur de fa vie, elle Jifoic Thucydide & Polybe (e) & peu d'annees apres elle Id: Plat on (*) , & les meilleurs Peres de 1'Eglife Grtcs (a) V. ci-dejjusp. 221 fcp dans le CairaQerc (d} Dans fa lettre a la PrinceJJe Palatine de Chriftine p. 4. T. I. p. 228. (&) V. I'EJprit de Patin p. 28. (e) Leben Chriftinae p. 14. (c) V. Menagiana Tom. I. p. 360. ,, Ego cum effem Holmia, dit Mr. de Bomeburg a Jean Conr. Dieteric, prodigia re* ,, rum inaudio de induftria Chriftins, quam collocat in cultu & pertra&atione bellij]lma~ rum literarum. Loccenius, Freinshemius, Boeclerus, quanta , amabo te , nomina! ,, J is per Reginam bene eft, ut ne quidem meliuf culquam fui ordinis alibi effe pojfit. Rarum utpote quid , f Jingulis annorum centuriis velut ortus Pbasnicis, tributum merc- ,, tur tarn in/ignis adeo potentis animas erga literas earumque amantes propen/io (i). ,, Illuftria Firtutum j'pecimina , dit Maraviglia , qua divija e multorum Heroum monu- ,. mentis cegre repetuntur , ? in bac unc Chriftina ^f magnitudine fengularia ? varietate multiformia f genere ipfo cateris omnibus fublimiora confpiciuntur , ut merito dicer es Chriflinje Auguttae nomen f famam totius orbis pofteritati velut difciplinam effe relin- quendam, ingeniofolis virtutibus immolato , fudore difciplinis libato , vigiliis denique in omnium rerum ftudiis fedulo femper impenjis atque excitatis... Qitin etiam veterum 5a- pientum leftiones ita libenter fingults diebus percurrit, ut licet multis magnifque interim , gravetur curis , nunquam tamen boras A ftudiis vel a libris abdicatas pajjajit in vacuum abire : , nunquam in expeditionemjine libris proficij'cens, nunquam fine tentorie , in quo libri ajjerva- , rentur, Juscipiens iter. Eaque laus > qua ab Homero , UlyJ/ifapientiJfimoviroconceljaeft Qui mores bominum multorum vidit f urbes Multa quoque ? Ponto paffus Nee deefl fapientij/lma Regintx , qua peregre proficifcitur ea duntaxat cupiditate detenta, , qua queat pro regionum difterminatarum varietatc, bominumque vita dijjentium confuetu- dine t f perfeEtius formare mores f cumulatius adaugere doftrinas, qua propter pere- grinantem bane Palladem in amplius femper miraculum excrej'centem omnium jam fequun- tur corda devota, omnes obfequuntur obftupefcentes animi (2). (*) Void le tthnoignage queFreinsbem lui rend la-deffus en 1649. en difant:,, Quum, Grcecarum literarum amore flagrares , ifta tua arte faftum eft , ut poft experimenta in ,, Polybio, in Plutarcho/afifa, Platonem, at que m Viruml ita legas ut opera meis vix ,, leviter egens, curjim exponas eleganti latinitate verbisque fignificantifflmis : adeoque rzon- nunquant OJ V. Ejus Ipiftoli 1 Qlelfuhftrt pag- 70, (z) In fua Cbrijlin* Augufta delinet p, 37 CHRIST I.NE REINE DE SUEDE. 345 Grics (*) & Latins (a) en faifant voir de grands fentimens de la Divinite & un L ' a attachement fidele au Chrijlianifme comme le dit Mr. Chanut (b). 63 - Pour laPniLosoPHiE, ce meme Miniflre aflure , qu'elle prenoit foin " d'en acquerir une connoiflance generate, & fe plaifoit quelquefois a parler comme ies Stoi'ciens de cette eminence de la vertu , qui fait notre fouve- rain Bien en cetce vie : & quand Defcartes etoit aupres d'elle , elle en favoit aflez pour lui faire entendre , qu'en traitant des idees , il avoit puife dans Platon fon nouveau fyfteme des idees (c) & a ce que dit Mad. de Motteville Defcartes mouruc de depit , parce que la Reine n'avoit pas approuve fa maniere de Philofophie. C'efl auffi a ce fujet que dit le Pere Labat : que la favante Chrifline n'a pas fait difficulte de dire, apres avoir bien etudie, pefe & examine Ies fentimens de tous Ies Philofophes : que ksfottifes ancim- nes valoient bien Ies nouvelles (/.el\'uisinvitajua, Lingua bujus cer- te non imperitam fuiffe , fidem facit ingeni um Jubactifimuin Johannis Terferi, quo In- fonnatore heic ufa fuit. % (r) V. La Dedicace des fuppUnte ntorum Livia- adlor. Lipjienf. A. 1741. Tom. IV. p. 273. Sc ntrum Deceit par Freinshem pag. *;. & 16. 374. (z) V. Gi/ttziut de Prindpibus graece do&is (j. (4) In Ejus Difieit. de Abdications Regia 6i. pag. 15. (3) V. Ejus Htllai fub ArUo in fupplemcnt. Tune L Xx 340' M E M O I R E S C O N C E R N A N T JLA-m ]QS jours queique chofe de 1'hiftoire de Tacite, qu'elle appelloit -no JJEII d'E- _ dices (a) \\ ne faut pas clcwter qu'elle nc f^ut .parfahement THiiST'O.iR.& ~,ANCIENNE & 1'Hiftoire-Romaine. Par cette lecture affidue, elle avoit: acquis une experience anticipee qui 1'avoit mis en etat d'avoir, comme le die le meme* Mr. Cbanut., .par la force de fon efprit & de fes raifonnemens un pouvoir presqu'abfolu fur les fendmens de fes Miniftres , lorfqu'ils etoient ..aflembles en Confeil & detournant dans le Senut du cote qu'elle vouloit -les efprits de tant de vieux & de fages Confeillers ; il eft auili inconteftable^ qu'elle n'etoit point novice dans I'HJSTOIUE MOD-ERNE & dans la bonne Politique, puifqu'elle appliquoit de fi faines maximes d'Erat atfxnom- breufes & importances affaires qui etoient alors fur le tapis. - Elle s'exercoit dans la CRITIQUE & y travailloit plus que petit-etre on tie croiroit fans le temoignage du favant Henri de Calais (b) (*). Elle avoit tant de gout .pour les MA THEM A T i <^u E$ & furtout pour J'AsTRONOMiE, qu'a Rome elle obferva quelquefois elle-meme, avec le celebre Cajjlni qui etoit a fon fervice, la Comete de 1664. & facrifia fes fiiiits a cette curiollte (c\ Elle fe plut tant a fes obfervations , dit un autre Auteur, qu'a I'occafion de la Comete de 1680. elle promit mille piftoles a celui qui Texpliqueroit aflez pour en afleoir un jugement folide (J). Elle fe fit un plaifir d'entendre la CHYMIE & d'autres faiences curieufeSj lie voulant rien laifler echapper a fon genie avide de connoiflances &. de tout ce qui eft du reflbrt de h Republique des Lettres. Auffi tenoit elle des ASSEMBLE' ES LITERAL RES tant a Stockholm qu'a Rome , ou tout ce qui s'y trouvoit de Savans avoit entree (e). Pour preuves de la connoiflanoe qu'elle avok des ANTIQTJITE'S on peut alleguer fes grands Cabinets en toutes fortes d'Antiques & en Medail- les qu'elle connoiflbit & expliquoit , comme auroit fait celui qui y avoit donne toutefon application .(/) Elle fit meme creufer dans les campagnes autour de Rome pour en tirer des antiquites & y faire de nouvelles decou- vertes (g). Elle n'aimoit pas feulement la P o ES i E , mais meme elle s'y exer^oit & y reuffiflbit fort bien: eloge que lui donne Mr. Menage, en lui dediant les Poe- (a) Mtm. de Chanut /. e. p. 242. & 244. ci-dijfixts ou m parlera des Savant rf'Ita- (b) Dans fes Emsndat.. f art~ Crit . Libr. lie. I. p. 183. (/) r. Spanheimii pr&fat. I. edit, de ufa (c) Fontenelle Eloges des Academic, p. & prteft. numijm. 117. 122. f 141. (g) V* Mabillon Itinerar. ltd. ^.195. fc? (rf) V. la Fie de Rozelli T. II. p. 38, 196. (ac (a\ (* : ). A$ efWe'poufcla--foire fa^on, qui y furent infere's & qui, dans 1'e'didon,. qui en a paru fous le nom d'Erih dwtwo; Pafteur Arcadien, fe vo'ient marques alamargedfcs pages. Mais nous en avons fait 1'ex trait , ajoute Crefambeni , dans 3, notre Arcadie, , ou il en eft parle amplement (f). Enfin nous joindrons a ces Memoires deux Ouvrages de Chriftine: 1'iin fes Maximw & Penfies divcrfes , &*l'autre fes Reflexions fur la Vie d' Alexandra qui marquent bien fa grande lecture , fa grande connoiffance du monde & du cceur humain & fes f^rieufes & profpndes meditations. C'efl domagc que fes Apopbtkegmes 9 que le Sr. Bourdelot a recueillis , fe foi'ent perdus (4-). C'eut etc fans doute tin autre monument de fon efprit e'galement folide 8$ enjoue. A tous ces egards done le Sr. NauiM avoit raifon de dire, comme nou$ favons. rapporte ci-deffus, qu'il ne mentira pas en affurant que Chriftine a tout vu; qu'efle a tout lu: qu'elle fait tout & qu'elle en donne des preuves judicieufes.... Douee de ces qualite's & connoilTant 1'excellence & le prix des Belles- so/ns qu* Lettres & des Sciences au point qu'elle le faifoit, ce qui lui attiroit de toutes parts dejuftes louanges (J): rien tfeft plus naturel, comrne nous Tavons 8c les Arts fon (a) ^u II. Tome des Oeuv. de Balzac ? (6) Hiflor. della volgare Potfa Lib. IV. Burin. Syll. T. HI. p. 233. p. 235, (*) Heinfeus ^erivit a Gronovius en 1649. a ce fujet: PdSji prafertim ita capitur ce- leflis Heroina, tit battenus non aiderim qui caper etur magis (i)..-. &f Te Poeticen, die Manage a Chriftine, non inodo vebtmenter aware, fed etiam feliciter adeo exercere audio , ,, utfi non aliarum fitlgare virtutwn virtus ijla perjiringeretur , inter precipuns Poetrias: poneiida meritb fores (2). (f) V. Son Arcadie Libr. IV. prof. 7. (I) Vff i us en parle dans fa lettre a Hsinjius en 1652 :' Bourdelotus defcripjit va lumina fatis grandia cum hoc titulo : LES APOPHTHEGMES DE LA REII*-E DE SUEDE. Nefcio an lucem videbunt: puto tamen (3). (5) Mr. Boxburn dit la-deffus: CHRISTINA excelji Heroina animi, que ut (1) Burman 1. c. (3) Buraa 1, & pfi- ff |j (2) Dans la preface des Oeuvics de Eakx^ Xx a 348 MEMOIRES CONCERNANT L'an deja touche plus haut , que le foin qu'elle prit pour infpirer le bon gout a TA^rt* /* aliis omnibus , qua proprias Principum hint y virtutibus, nibil bic nunc dicam, omni Dif- ciplinarum & Literarum genere ornatij/ima , Sapientiam & Sapientite Magiftros , quod hac atate rarum, maxima in pretio babet, promovet fovetque liberaliter (i). Le P. Pollione eft d'accord avec lui en difant : Si alia Chriftinam tulijfent Secula , reducem i Celo Minervam credidijfent. Hcec ui pacatce fapientiis , ita belliae fortitudinis gloria pmcellens, lingua pr (eft ans & mente , in- ^, genio valens fuit & pe&ore (2)... C'eft & cet egard que le Sr. de Bukisb appella CHRISTINE,, Principem Literarum gloria & Literatorum amore clarij/imam y ac in medio Armorum ftrepitu Mujis ami- cam (3)- O ! fortunatam Sueciam , dit Hadrien de Valois a Nicolas Heinfius , cut tarn clarumji- dus illuxit! 0! felices Literatos, quos alloquio fuo dignatur , quos partim bonorariis t partim donis amplifflmis locupletat ! (4). Eft enim certe, dit fon fr ere Henri de Valois, eft qucedam Refpublica Literarum , que inter dum floret, inter dum decrefcit ac labitur , prout Reges ac Principe s illam aut jublevant aut contemnunt. Ceterum interitus expers , nee folum immortalis ipfa eft , fed etiam immortalitatem optima cuique largitur. ftuic Te, CHRISTINA, Reipubliclis, de pifturis f gemmis, de viribus berbarum f lapidum, de arc anorum jcient ia &magia, de Aftris & efficacia Planetarum , defec- ts nis ftp tbeatris, de fidibus f inujica , delufibus & jocis, de venatione ? canibus , de floribus &f berbis., de natura ft? arte, de vita f morte , de rebus 'divinis ? bumanis, de omni denique rerum libsralium cognitive. In bis omnibus & pluribus praterea fer- mo~ (i) V. fon Hift. Univerf. ad aim. 1550. pag. {4) Burma.nl Syll. Tom. V. p. 700. IO59- (s) V. fon Panegyr. in Art. Critic, pag. 10. ("z; V. Crefetmbeni Vite degli Atcadi T. II- (6) V. Opei. Ferrar. ad ann. 169), T. I. o> (jj In Nwilt* Hiftor. p. jy. CHRISTINE REINE DE SUEDE. fes fujets & le fixer pour tofljours dans fes Etats. II n'y eut pas meme jufques aux Dames & au beau Sexe qu'elle n'encourageat par Ton exemple. Aufli en avons nous cite fix ou fept, qui, de fon terns, meritoient le nom de femmes favantes- ^ EJle donnoit aufli a des Sutdois de fortes penfions , tant pour faire leurs etudes dans les Univerfites du pa'is, qtie pour aller fe perfeftionner dehors & faire des voi'ages jufques dans \Aratie pour s'infor- mer des moeurs de ces peuples& apprendre les languesorientales(*). Parmi nombre de bons reglemens qu'elle fit pour le bien des Etudes , elle defendit, qu'aucun Theologien ou Pretre fut admis au nombre des Profefleurs dans la Faculta de Philofophie , & qu'aucun Profefleur La'ique prit 1'ordre de Pretrife, pendant qu'il etoit charge de donner des lemons de Philofophie. Elle eftima fans doute , que par cet arrangement chacun fe renfefmant dans fa fphere & ne s'appliquant qu'a un feul genre d'inftruftion , cela contribueroit beau- coup aux progres & a 1'avancement de la Jeunefle. Voici comment elle en ecrivit au Confiftoire d'UpfaL f^Hrijlina med Guds nade &c. ^ War ynneft y nlidige willia och benagenhei &c. EmedamWi fdrnimme Herr Pro-CanccIIarie , Rettor och JamteUge Profejjbrcs uti War Academic i Upfala., fom skal det gifwa confufion ivid Ungdomens informer ande bos E- der , at Prdftman tiro worclne bartih CHRISTINE par laGracedeDieu &c. Notre faveur , bonne volonte & bienveillance &c. Ai'ant appris , Mr. le Pro - Chancelier, Refteur & Pro- fefleurs de Notre Academic d'Upfal, qu'il y a quelque confufion dans 1'in- ftru6lion de la Jeunefle chez vous , en ce qu'il y a eu parmi les' Profef- feurs de la Faculte de la Philofophie, des perfonnes qui ont pris 1'Ordrede h L'an. 1 6 so. wonwrn argument!*, nunquam non rerum dicendarum copia Chriftinae prtsflo e-jl : ipfa qua profert , ut recentia adbuc Jint ^? indelibata , attendit. Unde & jure dicere po- ,, tefl: Lac mihi in sedate no vum, non frigore defit: Utique cum fermo illius , etiamlac- ti dulcedinem contendat. . Enimvero in oratione ejus tanta ineft tumfuaviias, turn puri- tas ^f profluentia, tamque expolita elocutio, ut ultra ejjis meritum non fit, fi Mufarum cioro, velut dim, Sappho, in augmentum numeri adjungatur (i). A tous ces Auteurs nous ajouterons ce que le Sr. Pajcbius dit au fujet de Cbrijline : tv Literarum cum multis Cardinal ibus, Salmafio , Heinfio , CarteGo, Kirchero, aliijque celeberrimis viris tiabuit commerciwn, nee non tot eidem diQi panegyrici ac infcripta li- bris Dedicationes fapientem illam atque literatiffimam communi orbis fuffragio pronun- ciant. Et nifi etireo-Ttto-lct famte fligmn inujjljfet , laudem bominum virtute fua heroics longe fuperaffet Neque Chriftina vicennaria literas exaQe excolere, literatos impen.- fe ceftimare didicerat, fed bodiequefeptuagenaria, (fexagenaria} 'Alcbymia aperam dare , Aftra obfervare, ftatuas Jubterraneas fcf lucernas, urnajque effodere perbibetur. O Ter~ ra Cteloque digniMma proles ! (2). (*) On voit la-de(Ius plufieurs de fes lettres dans les Regkres du Gonfiftoire entr'autres celles du 29. Janvier & du 10. Mars 1649. (O V- Novus Muodus , Ckriflint &c. 3t- fiC 19* () In Gynacceo Dp/ ce chads' ieront exercees /rfi relnhjpr/it at harefffr iLta. par des Lai< l ues ou P erfonne s reve- (Ktonjmerai) atiwejteriata ttigs d ' emplois civiies . deforce q'a ^ aywien betters aj Potitl- r ave nir nul Thuologin ou Precre (a cis , /a enkannerligen 5 anedes chaires de Praftman (dem umknt^andes. ProfefTeur en ; PhiJofophie) n'y fera lorn nu fittia i no^on af ProfelJk- P !us admi - Noi ; ls V011S v . "fc j *-* ** 'J-. r*citt-cL nn + rti flfrlr^nn-^ n/- ro 7 i- o IK>US VUUHJUS qua vuus ici vc ue re* harmed Jadan war nadige . g i e , que vons n'admetiez plus dore- fbrordnmg och godtfinnande ; ocb navant aucun 1 Tk^ologieft-4 1-unc -o wele,at Jdet bafwe Eder til ef- a 1'autre chaire de la Faculte de Phi- terrattelje.ocbefterdettaicketil- loforfjie, nique- vous laiffiez p Tbeologum til en el- dre rOrdre de ?, retri . re * aucijn , -. O nni=> i-An/l-3rt nn il froito f^c fifnH/ , ,. , / 7^ que pendant quil traite les etudes de mfacultatc J hilo p f hie> ^ fin cette notre Or . - ellerocklatmordl- donnance ne foit violee en maniere Poltiicum , medan quelconque. En vous ordonnant de ftudia philofophica trade- \^ous regler Ja-defTus , nous vous re- rar , til Prdjl > denned tbenna commandons a la proteftion divine. War forordning matte kunna ^"^a Stockholm ce $. November an violeras. Detta Eder faledes til l651 ' : tfterattelje : befallandes Eder Gud Alfmacktig nadeligen. ^4f Stockholm den ?. Novembris An. i6ji. CHRISTINE. CHRISTINA. ' Ou'on loue done , dit Mr. Balzac, qu'on bemlTe la fille du Grand ^ Gujtave-Adolphc , Ja grande , rincomparable CHRISTINE, pour les bons exemplcs qu'elle^donne a un mauvais Siecle; pour avoir acheve la guer- 3 , re , & pour avoir fait la paix : pour favoir regner & pour n'ignorer rien iy de ce qui merite d'etre f^u. C'eft Chriftine qui s'efi: oppose a la barba- rie, qui revenoit, & qui a arrete les Mufes qui s'enfuioient. C'eft elle qui connoit fouverainement des Sciences & des Arts. 'Elle met le prix aux Ouvrages d'efprit. Comme elle re^oit des applaudiflemens de tons' les peuples , Elle rend des Oracles en toutes les larigues. On ne peut point appeller de fes opinions : non pas meme a la Pofterite. (a). C'efl (a) V. I'wwtproifts df /'Ajriftippe de Balzac dans fes Oewrcs Tom. II. pag 128 CHRISTINE HEINE D SUEDE. C'-eft aufll a itous ces ^gards , qu'on peut avec raifon lui appliquer , ce qu'tm aucre Atit ' Reftauratriee. , qu'tm aucre Atiteur a dit de Fratiftis I. Roi de France : Qu'elle fut Ja riee.des Arts & des Sciences en .6W? (*): qu'elle augmenta le >v 16 * On peut ap- .- pliquera Chrijline ce que Charles & Guy Pat in (*) Ceil A quo! deux de fes M^dailles font allufion. Le fevers ^de I'unc e Ics trots Mufes, la premiere tenant la Lyre. 1'autre le Barbiton & Ja troifieme un Li- vre en m^iin avec I'infcription: Dukes ante cmnia. Sur 1'autre Medaille, Chrijline eft - reprefent^e comme Minerve prefque en face avec le Cafque en tete, & de 1'autre c6t6 fhonneut de la mieine figure de bout, tendant la main droite vers un Laurier & portant un rameaua Chriflint. la main gauche. Vis-a-vis on lit le mot REPERTRIX. La fable dit, que le Laurier, Symboledes Devins, a <5t6 dicouyert dans VEmonie, pres de Tempe. Et comme laRet- ne Cbrifline avoit la premiere cultivt^e les Sciences & les Arts en Suede , a un plus haue degre" qu'ils n'y etoient av^nt fon terns; c'eft de droit qu'elle s'en fait regarder comme la premiere InveDtrtce dans ce pats-la (i). Void ces Medailles en empreinte, fi) V. Srtnmri Tkef. Numlfa. Suteo-Coikle. , i4. & 186. j, Nous remarquerons potirtant Mr. . 258. p. 452. CHRISTINE REINE DE SUEDE. atque initlo nojlri commercii llte- rarti projpera qu anno L'an 1652. Mr. Ludolphe remarque (a) que le Roi des AbiJJins alors regnant s'appel- EtatdeIa loit Bafilides > digne de memoire en ce qu'il avoit retabli dans fon pai's les Religion rites de la Religion Chretienne de fes Ancetres, & demande un Metropo- fnsS?i litain au Patriarche tfAUxandrie en Egypt c : les Jefuites ai'ant porte le Roi Sufnerus , predecefleur de Bafilides a introduire les rites de 1'Eglife Catholi- que Romaine, au grand chagrin de fes fujets. Ludolphe dit autre part(#), que les Abifjins ne reconnoiifent que les trois Conciles Oecumeniques, fa- voir celui de Nice , de Conftantinople & d'Ephefe. II y raporte la Confedipn de la Foi Chretienne du Roi Claude ecrite 1'an 1555. qui, comme LudoJpbe le fait voir dans fes notes, differe peu dans le fond de celle des Proteftahs, quoique bien difFerente pour les rites & les ceremonies. Ce meme Auteur pretend, que la Reine Lacafa ,eft la-meme que Candau, dont il eit parle aux Acles des* Apotres Chap. VIII. le nom de Candau etant felon luiunnom common a toutes les Reines d'Ethiopie , & il dit, que depuis cette Reine la Foi Chretienne s'eft fo'utenue dans ce Roi'aume , malgre les guerres intefti- nes , que des Princes ambitieux & des Ufurpateurs y ont fufcitees & qui font caufe que le Chriftianifme a plus d'une fois etc fur le point d'etre extirpe. II ajoute (c) , qu'il y avoit un Prince Ethiopien a la Cour de France Tan un Prince l6ld. E*b l9 P ie ?* ' J r 9 la Couc clc Frtnce, xaminer qui de deux a plus de ral/bn? cfr. Larrey bjft. de Louis XIV. Tom. VII. p. 157- 163 &f 165. (c) Hift. -fluhiop. Libr. II. cap. VII. J. 53-60 Ejusd. Comment. Libr. II cap VII. \, 35. item Ludolphi MJ'c. Bibl. Caflel. n. 76. in 40. (A) Cnmmsntar. ad Hiftor. ^Ethiop. Libr. II. 5. 29. (/O Hift. ^thiop. Ill cap. XII. XIII. f KIT. g. /. &c. Jer. Lobo voiage hiftor. rf'Abiffinie T. I. p. 80. 337. ff. Ce Ji fuite Portugal's tdche de rettifier en quelques cndroits ce qiie Ludolphe a avance dans fon n-ne pag. 10. 40. 87. Refte a e- Tume I. Yy liiftoire 354 M E M O I R E S C O N C E R N A N T I/nn 1634, qui fe difok fils du Roi Jacob tue a la bataille de-Fan 1607. le prd- *" _ tendu Prince tiroit line penfion confiderable de la Cour de France , appa- remment a la reeommandation des Gens d'Eglife , qui i'auroiit voulu pro- duire comme pretendant aa Roi'aume SAbiffmie pour 1'y re'tablir un jour, en depit de ce qfl'ils en avoient etc chafles en 1632. Ludolpbe dit pourtanc que ce Prince fe livra a la debauche, a'iant meme ece cite devant la Juftice pour caufe de rapt de la femme d'un Confeiller du Parlement.. II cut afTcz de hardiefle pour repondre aux Juges qu'un homme comme lui ne ren- doit raifon de fes actions qu'a Dieu feul. A la fin il fut mis en liberte , a condition , de comparokre en juftice quand on le requerroit. II mourut peu apres a Paris de poifon , ou, comme d'autres difent , d'une pleurefie. 11 fr'appelioit Zaga-CMft ou Tzagaxus- & on lui fit cette Epitaphe, Cy git le Roi d'Ethiopie- Cejl I' original ou la copie (*). Quant a VAcaJaxus ou Akalaxftis^ dont il eft fait mention dans la prcce- dente lettre de Chriftine, Ludolpbe raporte (a), qu'il avoit cherche inutile- ment la ville $ Erfurt en Allemagne, n'a'iant trouve apparemment performs qui entendit fon langage pour la lui indiquer. Son intention etoit d'y voir Mr. Ludolpbe lui -meme, mais n'a'iant pu trouver-ce qu'il cherchoit il palTd. Tan 1 654, au mois de Septembre par \Allc magne en Italie. tertreen- Chriftine ne favoit pas feulement ecrire toutes fortes de lettres ferieufes r '^cbrStire a e ^ e en ^ cr ^ V] " c au ^ ^ e badines dans 1'occafion. Temoin celle-ci qu'elle er> M/.'iie Be /- vo'ia en ce tems-la a Mr. de Renferade. rode. r Ouez-uous de mtre bonne fortune qui vous empecbe tfafler crv " Suede. Un efpritji d&licat que le votre sy fut morfondu^ P vousjeriez retourne enrume jpirituellement .en votre cceur. On uous> aimeroit trop a Paris avec me barbe quarrte , une robbe de La- pon 5? la cbauflure de meme revenu du pats dcsfrimas ! ye irf ima- gine que cet equipage vous feroit triompber des vieitles : Nan 3 jc vous jure que vous tfavez rien a regreter. Qtfauriez-vous vu en Suede? Notre glace y eft telle qu'elle Jeroit cbez vous^except^qu'el- le dure icifix mois plus. Et notre Ete^ quand il fe met enfureur y , eftfi violent 3 qtfilfait trembler les pauvres flmrs quife melent de rej- (a) Comment. Hift. JEth. proem, n. XIII. fag. 196* 2. 31- item Libr. I. cap. XIV. n. LXXXIX. (*) II y a une hiftoire imprim^e de ce pr^tcndu Prince Rtbiopien a Paris 1635, le titre: Les hranges evenemens du I'tfage de Son Alteffe le StreniJJlinc Prince ZA.GAt CHULST. Mais Air. Ludolpbe re&arde cette hiitoir.e comme tout a- fait fabaleufe.. C Ml Rl S T f N E R E IK E . D El S U ETD E. 355 rejjembler au jafmm. Un Benferade at'anf fcjprit poll & galant^ que peut-ilfoubaiter , etant dam la plus belle Cour du Monde au- pres $un Prince jeune^ qul donne de ft hautes efperances de fa ver- tu a ceux quijont inter effez en faglotre ; apres avoir fbonneur de Papprocber^ que peut-il dejirer? Continuez a vous immortali/er au divertijfemcnt de cet almable Prince & -donnez-vaus de garde de meriter cet exiL Je voudrois pourtant que par quelque crime vous pttffiez meriter un j^mb fable cMtiment , afin que notre Suede put votr ce que la France a de plus galant ? de phis fpirituel. Fo$ sy font infiniment ejlimes 3 & la pcrjonne a qui vous Jes avez vous en ejl obligee* Continuez ce commerce & faitcs lui des productions de votre ejprti* CHRISTINE. On r-emarquera au fiijet de Mr. Bwfemde, que fans etre ce qu'on appelle Particular* favantj i) fut re5u dans FAcademie Franfoife 1'an 1674. a'iant alors plus dede S M". (5o. ans. Ce defaut d'erudition dit Bayle (a) fervit de matiere d'un eioge Benfer rafine qu'on fit de lui apres ia mort. Voici comment le Sr. Charpentier .s'exprima la-deflus: La Compagnie a perdu en Mr. de Bmjerade un de fes omerrie-ng. C'etoit un efprit original , & qui ne devoit qu'a lui feul toute Fa reputation. Sans rien emprtihter des anciens, nimeme les avoir trop-bien coimus, il les a egales : & fi on aper^oit dans" fes ecrits quel- ques-unes de leurs penfees, c'eft un effet du hazard, plutot que de Fi- ^, mitation. II a montre qu'il fe pouvoit faire quelque chole de nouveau ,, Fous le Soleil; & ce caraaere de nouveaute lui a etc fi naturel, que fitot 5, qu'il Fa voulu abandonner, il ri*a plus ete le meme, & le commerce qu'il ,, avoit avec les Graces demeuroit interrompu, quand il travailloit Fur d'autres idees que les fiennes . . . ." Jl etoit ne dans la Religion ReFormee, mais il n'y fut pas eleve, car il etoit fort jeune, lorfque Fon Pere Fe fit Catholique. Quand il dut recevoir la Confirmation, on le mena la veille voir FEveque qui devoit le confirmer. Cet Eveque le voiant fort vif pour fon age, car il n'avoit encore que fix ou fept ans, & fachant qu'il s'appelloit IJ'aac, nom qui lentoit I' Huguenot * il lui demanda s'il ne vouloit pas changer de nom ? Que me donnerez- ? , vous de retour ? Repondit le petit Benferade. On ne donne point de re- tour pour changer de nom , lui repondit 1'Eveque. Je garderai done le mien , repliqua-t-il. Vous avez raiFon , mon fils , lui dit FEveque en ,, Fouriant, car quelque nom que vous aiez vous Faurez bien le faire vaioir. Dans la fuite aulFi fe fit-il connoitre a la Cour par fes vers & par fon efprit, & eut-il le bonheur de plaire au Cardinal de Richelieu , a qui on veut qu'il .apartint du cote de fa Mere qui portoit le nom de la Porte , qui ecoit ce ui de (fl)'Diftion. lift, de Bayle art. Benferade art. item la vie 4s Eenferade mifc devanifff .Hi. A. B. jp. f Did, de "Moreri au mUme Oeuvref. Yj 3, 35 <5 M E M O I R E S C O N C E R N A N T i<5p- de la Mere du Cardinal. Peut-etre que cela 1'avoit en partie determine ale L>an deputer a la Reine Chnjline. Quoiqu'il en foit , ii paroic aflez par la reponfe ii fut defi- qu'elle lui fit, qu'il devoit Jui etre envo'ie, & void une autre preuve, que g 5w JI ?a I co!u ~**yi? en a Meg ue ' C'eft une lettre de Coftar a la Marquife de Lavardin , o ii ^Suedt. il s'exprime ainfi touchant Benferade. On vous aura mande que la Reine- Mere 1'envoi'e en Suede & qu'il part d'ici dans huit ou dix jours. 11 fe morfondoit fort a Paris- (*): je ne fais s'il fe degelera a Stockholm, & fi 1'air du Nord fera plus favorable a fa fortune , que n'a etc celui de la Cour.- J e m'afTure que tout le froid du Septentrion , & que toute la neige & la glace du pai's de Bife , ne feront pas capables d'eteindre ce j, beau feu qui 1'anime, & que la prefence de la plus brave & de la plus fpirituelle des Reines lui infpirera des chofes dignes d'etre con$ues fous un meilleur Ciel & fous im climat plus doux. . ." \ Cette miflion n'eut pourtant pas lieu & c'ell ce dont Chriftine tache dele confoler. Scarron ne put pas fe taire la-deflus, & voici comment il date une epitre a la Comteffe de Fiefque. L'an que le Sieur de Benfcrade n'alla point a fon AmbafTade. Quoiqu'on n'en fache pas mieux , quelle eft cette annee, non plus que par la reponfe de Chrijlme , que Colonies a fait imprimer fans date , on a cru ne fe pas tromper en la mettant en 1652. fur la fin. Quoiqu'il en foit en'oSe d" re ^ cecte ann ^ e ^ e ^ a legation de Bmfemde , voici une autre lettre egalement cbrijiint a la belle & enjouee de Chrijlme a la Comtefle d&Brdgy. Elle eft du 2 Avril 1653^. Comtefle de yE nejai ce'qui nfempeche de vous dire des injures , aprh tout ce que vous nfavczfait pour my obligcr. Ouoi? Faut-il aprdsa- voir garde deux annees le fllence , que vous croiez en etre quitte pour un fimple baife-main 5 queje trouve dans la lettre de votre a- mi. A la veritt vous merit ez pour le moms des reprocbes. Sacbez que je fuis quajl en col ere gf que votre filence a penfe nfoffenfer cruellement. Je le pardonne pourtant a condition que vous ne foiez plus muette. A propos de votre taciturnite 5 jefuis tentee de vous clter les Pytbagoriciens 5 man a une ignorante comme vous > il n'en faut point parler\ c^ejl pourquoije nfen abftiens : de pcur aujji de paroitre une Fee 3 je ne veux pas dire toutes les belies cbofes que fat (*) La caufe en t^toit fans-doute, qu'on lui avoit 6t fa penfion apres la rnort du Cardinal. L'auteur de la vie de BenJ'erade dit: qu'il auroit pent -etre trouvu 1 la menie proteftion aupres de M^d. la Ducheue d'^iguilhn (i ccs quatre vers qu'il fit apres la wort du Cardinal, ne 1'euflent extremement Cy git: Old git par la wort-Wett Le Cardinal de Richelieu: Et ce qui canfe mon ennui Ma penjion avec lui. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 357 fat out dire de ces bons Barbons. Parlez done afin de rfetre pas foupfonnee d'etre de cette claffe. Et pour vous faire connoitre ce . que je veux de vous 5 mandez-moi des nouvelles de votre bonne Mai- trejje &'de votre jeune Prince, mandez-moi les entret'iens du Cer- cle, *p les badineries du petit coucbe. Je ne veux pas f avoir de vous les mifteres de fEtat ; quand la fantaifie me prendra d'en etre injormee , je m^adrejjerai a tout autre qtfa vous , parce que je crois que vous ne lesfavez pas. Car enfin fi f etois Roi en France, je vouscroirois plutot propre a toute autre cbo/e qtfa gouverner & je me fervirois de vous pour autres affaires que pour celles d'Etat. Nous autres femrnes ri*y entendons gueres , $P // r?y a que votre in- comparable Maitrejjequi s^enfoit melee bien a propos. Ceftlevrai moien pour vous raccornmoder avec moi ; je vous le recommande en dijant adieu. C H R i s T I.N E. .On voit dans plufieurs endroits des Memoires de Chanut (a) que le mari Mr. ie de cette Comtefle de Bregy etoit AmbalTadeur de la Cour de France encelle^ %Q de Pohgne. Avant cette miflion,la Reine de France le recommanda l'an dontje hi fan morns redevabk que de .-' 53 ' - celui de votre eftime. Etre aimee (Tune perjbnne fi eftimable com- me vous, c'eft une Jatisfaflion dont on ne fe pent paffer^ apres que r on eft entre en I a po/feffion , tyileft dorenavant neceffaire four mon contentement de conferver aiipres de vous tes fentimens dont vous itfavezdonnt des proteftationsfi ample s. Je ne pun avoir de rindijjereiue pour une perjbnne qui pojjede Famittt de la Reinc de Pologne , ? puifque la tendreffe avec laquslle faime cette Prin- ceffe 3 iif engage d'epoujer Jes pajfions avec ardeur , jugez quelles pourront etrc vos pretentious aupres de moi. Ces memes fentimens irfobligcnt d "accepter , fans repugnance k beau prefent que vous nfenvotez ; & je change de Jentimens en cette ticcafion , Jans itfef- forcer , puijque fai aprzs que let per/onnes de ma condition peuvent fans rougir etre redevables aux perfonne's illuflres comme vous etes. Je vous remercie de tout mon cceur de ce que vous nfavez voulu obliger de ft bonne grace^ & vous protefte que je ri* accept c votreli- btralite qtfa condition de rfoublier jamah les offices aux queh la re* connoijfance m* engage. J'aurai toujours lefoin de ne me r entire ja- mah indigne de votre ejlime par ingratitude. CHRISTINE. Particular!- Ce qu'il y a de plus particulier en Madame la Marechalle c'efl:, qu'a'ionc tes touchant etc cliargee de conduire a Uladiflas V1L Roi de Pologne la Princeffe Marie de Gonzague , qu'il avoit epoufee a Paris par Procureur , on la revetic d'un -cara6lere nouveau (a). Ce fat celui d'AmbafTadrice extraordinaire. Elle foutint dignement Ton cara6lere 5 quoique PFicqiiefort foit du fentiment, que fa pretenlion etoit ridicule , en ce qu'elle demandoit le meme rang & les memes honneurs qu'on avoit accordes a rArchiduchefred'/72/prad,lorfqu'el- 3e conduifit la fbeur de 1'Empereur Ferdinand III. fiancee au Roi de Pologne. Elle ne laiflli pas que de s'acquiter de fon nouvel emploi en habile femme (*). Elle etoit douee de grandes qualites & etoit femme d'intrigues. Rien n'eft plus proppe a faire connoitre fon ambition , que le coup qui lui reul- fit, de faire declarer fon engagement mil , fe croiant mefalliee par le ma- riage qu'on lui avoit fait contracler avec un homme qui avoit plus de bien que () Bayle ? Moreri /. f . art. Gudbriant. ('*) II y a tout un ouvrage publid fur cette miflion par Mr. le Laboweur. Le titre en eft, Relation du vo'iage de la Reine de Pologne &f du retour de Madame la Mar6- ,, civile de Guebrianc dmbafladrice Extraordinaire & Sur-Intendante de la conduiie &c *\ 4 I Vis 1648 in 40. CHRISTINE REINE DE SUfcDE. 359 gae de naiffknce. Elle fe maria avec le Comte de Gusbrlant , cadet d'une '-' air % ancienn-e familie de Bretagne : & elle lui fut fort uiiic; pour parvenir au ba-~ _ ton de Marechal. Nous avons dit quelque chofe de lui ci-de/Tus. La dignite de Marechal de France , dit Boyle & le Labour tw , aparcenoit a fon Epoufe a double titre , tant par participation avec Ton Mari , que par la part qu'elle cut au bon fucces de fes Armes , ai'ant obtenu de la tour par fes follicitations le neceffiire.a la fubililance des troupes qu'il cotnmandoit , a quoi lui-meme n'avoit pu reuflir. Une lettre de Ja Reine au Comte Magnus dc la Gar&e nous ouvre toute u- La (fi f graoe ne autre Scene. Nous la donnerons ici en Ton entier , avant que d'entrer d comte en aucun detail fur foa cootenu. La voici: eSSum? quce dan* la' lettre de TlAOnfleur. Puifque Vous deftrez me vofr encore une fois apres la u '"' difgrace qui vous eft arrivee , je fuis obligee de vous dire^ eombien ce dejlr eft contraire a votre fathfaLiion 5 & je vous ecrh eette lettre pour vous fair ejouvenir des raijons 3 quim ''etnpfcbent d\y entendre , ? qui vous doivent aufji perjttader 3 qite cet/e entrevue ejl inutile a votre repot. Ce rfejl pas a moi cTapporter des remMes a votre maJbeur : fejl de vous -fcul que vous devez attendrc la repa- ration de votre honneur. Que pouvez-vous efperer de moi ? Ou que puis-je fiiire i finon de vous plaindre p de vous btamer ?^ Uamitie que je vous ai portte nf oblige a Pun& a r autre , & quelque indul- gence que fate eu pour vous , je ne puis 5 Jans me dementir , vous fardonner le crime que vous avez commis contre vous - mem. Ne croieZ'pas que je fois offenfee. Je vous protejle que je ne le furs- point, ye lui$*deformais incapable (T avoir d^autres fcntimens pour vous que celui de la pitle ; kquel toute fois ne vous peut jervir de rien^ depuis-que vous vous etes rendu inutile k /entiment de bonte que favois pour vous. Fous en ties indtgne "par votre propre con- jefflon^ P vous avezvous-meme prononce Farret de votre bannif- fement 5 a la vue de plufleurs perfonnes de condition , qui sy iron- verent prdjentes. J'ai confirm^ cet arret > parce que je Tai trou- ve jujle 5 gp j nefuis pas ft prete a itfen dedire , que Fon vous le fait accroire. Apr e see que vous avezfait&fouj}ert)Ofcz-Fous vcu* montrer a mo ft Fous mefaites Iwite quand je penfe 5 a eombien de baflelfes Fous etes d&fcendu : eombien de foumijfions vous avezfat- tes a ceux meme^ a qui vous aviez tant rendu de mauvais offices. En cette maJbeureitfc rencontre^ on tfa rien vu de grand ' 3 de bem^ nl de genereux dans votre concfuite.. Si j'etois capable de repent ir 3 ye regreteroh d 'avoir contrafle amitie' avec une awe ft foible , que la v6tre\ mais cette fable fle eft indigne dc moi > 5? aiant toujours agl felon 36-0 MEMOIRES CONCERNANT k' an - felon la raifon^ je ne Ms pas blamer les apparences^ que fat don- 53 ' nees aux ocurrences du terns. Je les aurois gar cites toute ma Ji votre imprudence ne in" cut contraint de me declarer contre Fous. Vbonneur nf oblige de k falre bautement P la juftice me Pordonne. J'ai troj) fait pour vous depuis neufans 5 que fai toujours pris a- veuglement Votre parti contre tous. Mais a prefent que vous aban- donnezvos plus cbcrs inter ets , jefuis difpenfee (Pen avoir foin. FOUJ avez vous mme publie unfecrdt 5 que fttois refolu de taire toute ma vie , enfaifant voir , que vous etiez indigne de la fortune que vous teniez de moi. Si vous etes refolu d" entendre des reproches , Vous pouvez venir id. jfy confens a cette condition. Mais rfejpt- rez pas que les larmes^ ni lesjoumiffions puijjent jamais m*obliger h la moindre complaija nee. La feule dont jejuis capable pour vous , eft c-e/Ie de irfen fouvenir peu , gep d'en parler moms : etant refolue de tfen parler jamah , que pour vous blamer. Ceft ce que je dois vous fair e voir , que vous foes indigne demon eftime , apres une faute Jemblable a la votre. Foil a ce qui me reftoit a falre pour vous. Souvenez-vous pourtant que feft a vous-jeul a qui vous de- vez la dij grace qui vous eft arrivee , & que je fun equitable pour vous commeje lejerai toujours pour tout le monde. Upfal ce 5; De- cembre 16) 3 (*). ' r V ,^ CHRISTINE. * II eft aife de voir par cette lettre que le Comte Magnus etoit tombe en difgrace , & s'etoit flate , que fi la Reine lui vouloit accorder la permiffion de la voir encore une fois , il pourroit regagner fes bonnes graces. Mais cette reponfe que Chriftinehit a fa demande, eft une marque evidente qu'El- le etoit tres prevenue contre lui: & quoique cette haine ne fut pas immor- telle on remarque pourtant, dans la lettre de condoleance qu'Elle ecrivit le 20. Juillet 1686. a la Princefle, Epoufe du Comte fur la mort de Ton Ma- ri , qu'Elle reproche encore au fils du Comte Magnm y fon ingratitude , fans neanmoins dire en quoi elle confiftoit. Le Comte Pour etre mieux au fait de toute cette affaire, on fe rappellera ce que Favw-i dcT "nous, avons marque ci-devant au fujetde la grande affection qu'avoit Chrlf- cttijiine. tine pour ce Comte , a caufe des belles qualites qu'Elle lui connoiflbit. Par cette confideration non feulement Elle lui avoit fait epoufer fa Coufine , ma- (*) La traduftion de cette lettre en beau latin fe trouve dans un Code Mfc. de la belie Bibliotheque de Siralfund. II eft dit dans un autre Mfc. intitul^ de Motivi di Cbrif- V C f ) c , ntl tim ^ f rinunciar la Corona, que Nicolas Heinfius a traduit par ordre cette lettre de Cbnf- ' XL1> tine tn latin. Nous la donnons dans 1'Appendice. CHRISTINEREINE DE SUEDE. 361 maternelle, Soeur du Prince Char les- Guftave , mais Elle 1'avoit auffi envoie en ArnbiuTade en France, oil il fie une auffi belle figure , qu'aucun Miniftre . :6s3 ' ^ public de Suede cut fake avant lui (a). Apres fon retour Cbriftine continua toujoursde 1'honnorerde fa faveur , & lui fit avoir la haute charge deGrand- Treforier prefe'rablement a plufieurs autres Senateurs plus anciens que lui* 11 crut d'annee enannee tellement en credit , aupres d'elle, que memeElle le fit loger dans le Chateau Ro'ial comme Grand-Maitre de fa Maifon , & qu'en 1'an 1650. il etoit le feul a qui on s'adreflbk pour toutes les graces qu'on avoit a demander a Chrlfline (b). Nous avons dit auffi, que la Heine, a qui il plaifoit infiniment , e'toic ravie de trouver en lui une perfonne a op- pofer a la Maifon tfOxenflierna, qu'Elle ne pouvoitpas fouffriren ce terns- la : que cette preference caufa pourtant au Comte Magnus bien de 1'envie & de la jaloufie, & que le mechant Bourdelot 9 qui avoit trouve moi'en de s'in- finuer a un fi haut degre dans la confiance de Cbriftine , s'etoit porte le pre- mier a fupplanter ce Corate, & avoit infpire a la Reine de J'averfion pour la perfonne (c). Nous rapporterons prefentement les particularites qui d j c b e e c " occafionnerent 1'eclat de cette rupture, de lamaniere qu'on les trouve mar- l SW quees par des perfonnes qui etoient alors a fa Cour. On avoit perfuade fi for tern ent (dit le Sr. Picques Refident de France) au Comte Magnus, que Bourdelot etoit caufe de fa difgrace , & aux Grands , de la froideur que la Reine avoit pour eux , que le Comte s'en etant plaint a la Rei- ne, Sa Majefte lui dit , qu'Elle ne le croi'oit pas , & ^par hazard Bourde- yy lot s'etant rencontre alors aupres d'Elle, il dit a Sa Majefte, qu'ilfavoic bien qu'il avoit beaucoup d'ennemis en fa Cour, qui tachoient dele rui- ner aupres des plus puiflans, & qu'il ne fe trouveroit jamais , qu'il eftc parle de qui que ce fftt. Le Comte Magnus en aiant voulu citer deux te- moins, ils n'oferent en pre'fence de la Keine foutenir a Bourdelot cequ'ils lui impofoient , & la Reine les aiant traite d'impofleurs en prefence dn Comte , Elle leur defendit de fe plus prefenter devant Elle : ils etoienc tous Franfois & Creatures du Comte". Depuis ce terns - la 1'eftime & I'affeftion que Sa Majefte avoit pour ce Comte diminua toujours , & il refolut d'aller paffer fon chagrin dans une Maifon qu'il avoit a fept ou huit lieues de Stockholm. Mais Bourdelot apre- hendant qu'on ne lui attribuat encore cet eloignement , & qu'il ne fit en- core parler fes ennemis , porta la Reine a lui refufer la permiflion qu'il lui en demanda , & pretexta fon refus fur ce qu'apres les fetes , on lui devoid donner les lettres de provifion de Grand- Treforier , dont il n'avoit enco- re fait aucune fon&ion que par commiflion Bourdelot etant enfin par- ti de Suede au mois de Juin 1653. & la Reine faifant paroitre beaucoup de mepris pour ce Medecin, apres fon depart,- il y avoit apparence , que le Comte rentreroit bientot dans les bonnes graces de Cbnjtine. Mais voici le (a) Vnez ci-deffus pag. 88. 6f Pufend. (c) Chanut Mbn. T. III. pag. 93 94- lie R. S. Libr. XVIII . . 179. Voffius en parle dans ce mime Jens a Hein- (fc) Chanut T. II. p. 201. 416. 437. Bur- fius en fes denv lettres dans Burman I. c. man /. c. T. III. pag. 248. T. HI. pag. 659 Tome L Z z M E M O I R E S C O N C E R N A N T le cas qui fit eclater cette difgv'ace, fans qu'il ait jamais pit s'enrelever. Le coup-meme partoit du Sr. Pimentelli (*) , Miniftre d'Efpagne alors en Sue- de, qui s'etoit intrigue auffi avan't dans la confidence de Chriftine , qiie l'a- voic fait liourdelot , a ce'qu'on difoit alors tout haut (a). Void avec quel- les circonftances cette affaire eft raportee dans les depeches de Chanut 9 dont d'autres Ecrivains font affez d'accord (b). Le Comte Magnus ai'ant deffein de parler en particulier a la Reine de Suede & EHe a Lui, pour s'informer de 1'Etat de fes finances, dont.ile- toit le chef, Elle prit le terns un jour, apres le Confeil qu'elle avoit te- nu avec les Senateurs , q,a'Elle avoit affembles pour a viler aux affiiires publiques & aux interets du Ro'iaume: car les a'iant congedies, Elle ne retint aupres d'Elle que le Comte Magnus : & ce Comte fe voi'ant feul avec cette Princeffe , commenga a Lui faire de nouvelles proteftations de fon refpect & de fon devourment, lui reprefenta la fidelite inviolable . n qu'il avoit toujours cue pour Eile , & lui dit , qtf il s'etoit fait quamite d'ennemis pour s'etre attache entierement a fes interets. Mais qu'il a.- voit une feriGbJe douleur,. que Sa Majefte interpretat fi mal fon attache- ment & fon z.ele , & qu'Elle fe filt plaiiue qu'il lui avok fait vine trahl- J9 fon, dont Elle avoit dit qu'Elle ne vouloit pas fe venger Elle-meme, parce qu'Elle lui avoit prom is amit'ie , mais qu'Elle s'en feroit venger >, par le Prince ds Suede , & ne feroit pas auili fachee, que d'autres lui flf- j,. fent des affronts,. & qu'il avoir apris ce fecret d'un de ceux qui apro- w . choient i ... c jiorlji.r ,} .; T -,'v! __. . 0) Chanut /. c. pag. 271. 277. fcfc. Fellcri Qt. Hanov. J. 125 & 126. pag. ' (b) Chanut Tom. III. pag. 262-270. Ait- 201. Gundlings Staatr-Difcotirs Cap. IX, J. /. c. T. ILL Libr. XXXW. pag. 886. Will. pag. 3-15. &e.. (*) Mr. le Comte dela Gdr'diel'Q fit connoitre lui-mcme plus de vingt ans'ap'res, dans fa lettre au Sr. d' Adlercrona 1'an 1676 (r) dilantr ,, que pour 1'ainour de la France & j, par les intrigues de Pimentelli \\ s'etoit ruinti en 1653 dans 1'efprit de Cbri/line, & que depuisce terns-la, il hu avoit falu lutter centre touts fortes de perfccutions, oil il ne s'agidoit pas de moihs que de fa vie & de fon honneur". Pufendorf 3.\\- gue parmi les raifons de fa dlfgrace, celle, rf'avoir confeitld' a Chriftine de ne pas r6- figner la Couronne, ni d'^poufer Cbarks-Gitftavc (2). Un autre Auttur raporte, (3) que du teins que Mr. de Scbleppejibctcb. ^toit brouille avec Je Comte .Magnus,, il avoit infinu^ a la Reine, que ce Comte avoit donne" occasion au Roman que le Sr. Scudzri avoit ^crit 6c publi^ en France,, fpus le ttt.re de Grand Cyrus, oil' la Reine e"toit de"fig- ni5e fous le nom de Cleobuiine. ' Que le Comte avoit voulu donner par - hi a* connoitre a tout le monde, qu'il <5toit le premier favor!" de Cimjline & jouiiToit de fes plus gran- des faveurs. Get Auteur ajoutjer.que k denon.ciation de ,ce Roman avoit opcre 1 la dif- grace da Comte Magnus , qji:e la Reine fe trouvant choqu^e parle dit Roman, en avoit rait porter plainte d la Cour de France, q\\e par manierc de" "reparation le Sr. de Sen- dtri' s'etoit obligt^ de 'corrtporer -tin poe'me a-!a lotiange de la- Swde & de le^-dedier- a-Sn &4ajeft6: qu'il I'avoit fait dans fon /Marie ou Rome vaincue , oil Cbrijiine ell d^peinte comine un modelc digne de toute forte d'eloge. (i) Elle fe trouve d.ins les raims$Krana. tand pag. z6 ?c 3.7. cfr. auflfi Ik' lettre de|tf/zjr (i) Hifr. de Gt>arlts-Gufl. lib. I. $_ 4. item le a '.'hr-.^ine en; IGS6. inferec ci- delfoas ad-imu &(l.. Friar M les biens don,t Elie le combloit. .. . il repartit, qu'a la.verite ,. il etoic. infiniment oblige aux bontes de Sa Majefte , raais. que ce difcours que. ., Ton difoit qu'Klie avoit tenude lui, ie touchCit jufqu'au.vif, Sa Majeile, 11 a'ianx point de-Serviteur,, ni de Sujet plus . affeftionne , ni plus fidele,. ,-j-).que lui. . ii La R^ine kii demanda, qui avoit dit qu'elle avoit: ainfiparr. }j le de lui ? 11 dit , que c'etoit le fieiir de Steinberg , fon premier Ecui'er.. je ne .le pnis croire, re'pondit la Reine:* Steinberg eft trop hommed'hon-. neur pour controuver de tels menfonges ,. & qu'Eile en avoit {} bonne. opinion , 'que s 2 il 1'avouoit, Elle vouloit 1'avoir dit : qu'il faloit le faire. venir & quelques Senateurs , qui etoient dans 1'Antichambre , afin de. '1'entendre. La Reine les appella Elle-nreme, & etant entr^s , Elle. lui ,, recita le rapport que lui venoit de faire le Comte Magnus a fa charge, >? lui dit, qu'Eile le tenoit pour homme d'honneur, qu'il dit hardiment & r , franchement ce qui en etoit : s'il lui avoit entendu tenir detels difcours,, ,, & s'il en avoit jamais parle a quelqu'un , ainfi .que le difoit le Comte Ma-. gnus... . Le Sr- de Steinberg dit: qu'il etoit extrememe.nt furpris que Ie, i, Comte Magnus , pour lequel il. avoit toujours eu beau coup de refpeftdc. d'attachement, le calommat ainQ devant la Heine,. fa Maitrefle,& vou.'. kit miner fa fortune :, qu'ii juroit , qu'il n'avoit jamais oui tenir de tels, ,:, dilcours a Sa Majeile, & qu'il favoit auffi tres-bien la fidelite qu'ondoit a fon Souverain, pour lie rien reveler de ce- qu'Eile lui faifoit 1'honneur H de dire en fa pre'fence , & que perfonne ne lui pouvoit prouver , qu'ii eut fait jarnais aucun rapport. . . , ,, La lleine., fatisfaite du defaveu du Sr. Steinberg & ak'ant pitid du Com- te Magnus , ne voulut pas poufler 1'afiaire plus avant, voiant qu'Eile ne ,-, pouvoit reuffir qu'a fa confufion. . Mais Steinberg ne fe tint pas fatisfait, .& crut, qu'il y ailoit de fon honneur de favoir du Comte, qui lui avoit fait ce rapport. Jl en parla a la Reine, & lui-dit: qu'il cro'ioit , qu'el- ^ ie le tiendroit indigne de fe prefenter devant fes yeux, s'il n'en ufoitpis ainfi, pour faire dementir celui qui avoit fait de tels difcours de lui. Sa ,, Majeile, qui fait une elliine tres grande des ames genercufes & nobles, loua fa rcfolution ,. & com me ce n'etoit pas la premiere fois, ace qu'el- le dit , que le Comte lui avoit fait de femblables plaintes , funs-fonde- ment ,.& .qu'il avoit effaie de perdre plufieurs de ceux qui 1'apro- ,5 choient, Elle ne fut pas faehee, que le Sr. de Steinberg en vouloit venir, Zz 2 aVv j c 36*4 MEMOIRES CONCERNANT U avec lui a cette extre'mite , afin qu'Eile pfit etre une fois deiivree de fa 1645 ' mauvaife humeur, & ne fe plus voir importunee de toutes fes plaintes. Le Sr. Steinberg fut trouver des le meme jour le Comte Magnus chez lui, Je fupplia de lui nommer celui qui lui avoit fait ce raporc, que fon ,, honneur y etoit fi fort engage , qu'il croi'oit , qu'il ne lui refuferoit pas cetce grace , afin de faire connoitre a tout le monde , qu'il n'etoit pas indigne de la bonne opinion, done Sa Majefte 1'honnoroit. LeComte lui fit beaucoup de civilites : lui dit , qu'il 1'eftimoit auffi beaucoup , & que puifqu'il difoit n'avoir jamais parle de telles chofes , il le vouloit croire , & qu'il voioit bkn,que celui qui lui avoit fait ce rapport, n'etoit qu'un Coquin : qu'il etoit fatisfait de fon desaveu & le tenoit pour homme d'honneur. Le Sr. Steinberg ne fe contenta pas de cela , le prefla de le nommer, & allure de la protection de la Reine, lui dit, qu'autrement il 1'obligeroit a fortir du tefpecl qu'il lui devoit & a croire qu'il ne le fa- ,y voit de perfonne , & que le feul deflbin de le perdre , le lui avoit faic dire. Le Comte Magnus lui dit encore une fois , qu'il devoit tre entie- ,, rement perfuade qu'on le lui avoit dit, & qu'il lui repetoit encore, qu'il etoit fatisfait de fon desaveu , & qu'il n'en croi'oit rien du tout. Le Sr. Steinberg fut fe plaindre a la Reine du peu de fatisfaction qu'il avoit cue du Comte Magnus, & la fupplia d'interpofer fon autorite, pour 1'obliger a declarer celui , de qui il difoit avoir apris ces chofes. La Reine cruc ,, qu'Eile ne lui pouvoit refufer ce qu'il lui demandoit, outre qu'Eile jugea qu'il y alloit autfi de la reputation du Comte Magnus de nommer fon au- ,, teur; Elle lui envo'ia le Prince Adolphe^ qui pour la premiere fois nepQc rien obtenir, & fut prie par le Comte de porter la Reine aetouffertoute ,, cette affaire, & obliger le Sr. de Steinberg de fe contenter de la civilite qu'il lui avoit faite, fans defirer qu'il lui nommat un homme a qui ii a , avoit promis le fecret. La Reine lui envo'ia ce Prince pour la feconde fois, lui dire, qu'Eile ne pouvoit pas lui accorder fa demande : qu'Eile etoit obligee de proteger 1'innocence du Sr. Steinberg, qui lui avoit de- mande juftice: qu'Eile trouvoit, qu'il y alloit meme de 1'honneur du Comte de fortir de cette affaire, en nommant celui qui lui avoit fait ce faux rapport, & qu'Eile vouloit qu'il le declarat fous peine d'encourir fa difgrace & de ne plus paroitre a fes yeux. Ce Comte dit a Son Altefle, ,, qu'il etoit pret d'obe'ir & de nomrner celui qui lui avoit fait ce rapport, mais qu'ii avoit une grace a demander a Sa Majefte de lui promettre , qu'il ne lui feroit point fait de mal: il dit: que c'etoit le Sr. de Schlep- penbach Colonel & grand Echanfon qui etoit demeure a Stockholm. La Reine fit dire au Comte de lui e'crire, & qu'elie lui ecriroit auili devenir a UpfaL Le Comte lui ecrivit un galimatias, ou Ton ne comprenoit rien. ereiie L^ Sr. de Schkppenbach fe rendit aufli-tot a Upfal & le lendemain matin le ^ Comte lui envoi'a quaere de fes amis pour lui demander , s'il ne foutien- >5 droit pas . que Steinberg lui avoit dit telles chofes. II dit refolument , j} q ue non : qu'il voioit bien qu'on le vouloit perdre: mais qu'il ne laifleroit pas de dire la ve'rite devant Sa Majeite & feroit voir, qu'il etok homme d'honaeur. Le CHRISTINE REINE DE SUEDE. 305 Le Lundi fuivant, qui etoit le 18 du mois de Decembre, la Reinefit L ' an - venir dans fa chambre Je Sr. Schleppenbach, & fit appeller le Comte Ma- l653 ' gnus, le Sr. Steinberg, les Senateurs & autres Principaux de la Cour," qui avoient etc prefens a la premiere aftion. SaMajefte fit un tres-beati difcours fur le fujet d'affemblee & de 1'affaire dont il s'agifloit: die an Comte Magnus d'expofer encore les chofes, qu'il difoit favoir du Sieur Schkppe nbach , aupres duquel eile s'approcha, & le prenant par un bou- ton de fon pourpoint, lui dit , favez-vous bien que fi Steinberg l'a dit:je veux I'avoir dit: Schleppenbach dit: qu'il ne favoit point du tout ce que vouloit dire leComteMzgm^: qu'il ne lui avoit jamais tenu ces difcours, qu'il protefloit, que le Sr. Steinberg ne lui en avoit auffi jamais parle, ni lui au Comte du Sr. de Steinberg : fi non une fois qu'etant a table chez lui, parlant de la Cour, il avoit dit: qu'on voi'oit, que la Reine n'avoit plus pour lui I'eftimequ'elle avoit cue autrefois : & que le Sr. Steinberg etoit en grande faveunde quoi le Comte lui avoit parle fou vent, commed'une chofe qu'il ne pouvoit fouffrir. Le Comte la-deffus lui dit: qu'il repon- doit en Coquin & mentoit comme un Schelme , qui veut dire encore pis. Schleppenbach repondit : qu'il etoit homme d'honneur : mais que pour lui , il ne procedoit pas en honnete homme. Le Comte dit : qu'il e'toit vrai , ,, qu'il n'avoit point de temoins de ce qu'il lui avoit dit, parce que c'etoit dans le particulier que cela s'etoit pafle. Schleppenbach protefta, qu'il ne j, lui avoit jamais parle feul a feul : enfuite de quoi le Comte tomba en grande confufion. La Reine en a'iant pitie, dit, que c'etoit une affaire qui ne la regardoit point , & fe retira. Le Comte la fit prier, qu'il put faire citer Schleppenbach en juftice, qu'a la verite il ne pouvoit pas le convaincre par temoins , mais qu'il fe- ,, roit ferment qu'il le lui avoit dit. Sa Majefte, lui fit dire, par le Prin- ce : qu'Elle avoit encore aifez de bonte pour lui , pour ne lui pas accor- der une chofe, qui ne pourroit que tourner a fa confufion, que cette voi'e-la ne lui pouvoit etre avantageufe: qu'il y en avoit d'autres (Elle ,, entendoit celle des armes:) mais que fur tout il fe donnat de garde de ,, ne faire faire a Schleppenbach aucun traitement , qui ne ftit d'homme d'honneur. Apres diner du meme jour , le Comte fit prier la Reine de trois chofes par le Prince ddolphe, favoir: de lui permettre de faire un tour a fa Maifon de Campagne pour mettre ordre a fes affaires domefti- ,, ques: de ne point fouffrir Schleppenbach en fa Cour: & de ne point parler de cette affaire a fon defavantage ,, La Reine etonnee de ces demandes , dit au Prince de faire favoir de fa part au Comte , que non feulement Elle lui permettoit d'aller en fa Maifon de Campagne, mais meme le lui commandoit, & de fe retirer par tout ailleurs ou il voudroit, lui defendant feulement fa Cour, ou Elle ne vonloit point qu'il parut, qu'il ne fat ford a fon honneur de cette affai- re. Que pour chaffer Schleppenbach de fa Cour; c'etoit une demande injufle, qu'Elle ne lui pouvoit accorder jufqu'a ce qii'il lui eftt prouvc ce qu'il lui impofoit. Quant a ce qu'il defiroit d'Elle, qu'Elle parlat bien de lui par rapport a cette affaire, Elle ne pouvoit comprendre, comment Zz 3 * ii S 6<5 M E M O I R E S C O. N C E R N A N T l^ n il I'entendoit , qu'iV devoit avoir cette corifolation en fon hialheur , qu'Jl!e ^ avoit encore de la bonte pour lui , p.irce qu'autrement les chofes ne fe feroient pas paffe'es fi doucemenc a Ton egard , & que tout ce qu'Eile ,., pouvoit pour lui , etoit de le plaindre de Ton infortune , qu'il s'e'tok ,, lui me'me attiree. II devoit fe retirer , ajoute Chanut (a) des le foir me'me: mais il demeura encore tout le lendemain, efperant que 1'efprk ,, de la Reine pourroit changer , & qu'il obtiendroit quelque chofe deplus ,, favorable par i'entremife du Prince Adolphe fon Beaufrere, qui gardant Je refpect du a la Reine le fervk avec chaleur en toute cette affaire : 5, mais il n'y avanca rien. Le Comte defefperant de ion affaire , eicrivk line lettre a Sa Majeile , que le Prince lui prefenta apres Ton fouper. Kile la liic & dit, en fe promenant: Lepauvre Comte: puis la relut eri- core, repeiant les memes paroles; Le pauvre Comte,. hns rien dire da tout an Prince; & le Comte pardt Je lendemain pour aller en fa maifo'n $ d* Ekolfund a dix lieue's de Stockholm. Retire ainfi a la campagne & ai'aht apris que la Reineetoic d'opinion, que pour fortir de cetce affaire facheufe, il devoit fe battre avec Schlep- ,, penbach, il refolut de le faire apeller. Mais etant la cinquieme perlbnne du Senat, la pliipart des Grands, dit le memo Cbanut , ne lui confeille- rent pas de fe coramettre ainii avec un fnnple Gentilhomme , deforte, 3 , que 1'affaire en refla-la. En attendant Madame la Princefle Epoufe du Comte, & Madame la Connetable fa Mere, aiant etc fort bien recues ,, de la Reine, peu de terns , apres; il crut que Sa Majeile avoit oublie ,, ce qui s'etoit paffe, & qu'Elle lui accorderoit volontiers fon retour a la Cour, s'il le lui demandoit. Pour ceia il e'crivit une iettre a la Reine, ,, qui n'eut pas neanmoins 1'effet qu'il en efperoit, comme on 1'aura vu par la reponfe inferee ci-deflus. .^j LC chance- ^ n n ' eut P as pl-itoc remarque la froideur de Chrlftme a Tegard du Comte ijcr Oxen. Magnus 4 qu'on s'aper^ut du gracieux accueil qu'Elle fit au Chahcelier "'Sr/iue de Qxenfticrna & a fon fils Eric, .que le Pere fouhaitoit de voir fon Succefleur ia Reine. Jans i'unique charge qu'il avoit exercee fi longtems , com me cela arriva ef- feclivement en 1655. Cela fe voit aulfi par le billet que la Reine ecrivit en ce terns- la au Chancelier (b) a ou apres Jui avoir parle' d'une affaire en- tamee avec la Republique de Holiande, Eile lui fait ce compliment; ,, Au refte je fuis bien aife de vpus protefter a cette occafion, qu'il n'y aper- fonne au mpnde qui faffe plus de cas de vos grands Talens & de vps fervices , que moi , vous affurant que je ne parlerai ni ne penferai de ,, voi^s autrement que votre fidelite le merite. C'etoit auffi ces deux Senateurs qui faifoient alors les affaires & qui a- prochoient Je plus de la Reine. Le Sr. Picques Re'fident de France dk la- deffus : (c) que le venerable vieillard le Chancelier en avoit eu taut de fil i etoit rajeuni a vOe d'ocil. La Cour de France., qui n'aijnoit tiche tie le . pas gainer. (a) L. c. j>ag. 270 272. 291. Gabriel Oxeiiftierna. (I, II eft date c/'Upfal le 22. Nov. 1653 f (r) Chanut /. c. fag. 206. 235 & 271. tirt ds I'origliul fie Mr. k Comte Axel CHRISTINE REINE DE SUEDE. pcs le Chancelier par des raifon* que nous avons alleguees ailleurs, s'ap- L>an per^evant du changement qu'avoit produit la difgrace du Comte Magnus, r6 >>- qui etoit naturellement affe&ionne a la France, tacha de fe mettre autant bien avec la Maifon d' Oxen/lierna , qu'elle lui avoit etc jufques-la comraire. .Freuve de cela c'eft, que le Sr.Picqucs, en envoi'ant au Chancelier une let- tre du Cardinal Mctoarm, 1'accompagne de ces mots: je dois dire auifia Votre Excellence, que le Roi a tant de veneration pour fa vertu, & d'affeclion pour fa perfonne & pour route fa Maifon , qu'il auroit jo'ie , que V. E. lui donnat occafion de le lui temoigner. . .. Par la lettre de- ,, Mr. le 'Cardinal ,V. E. connoicra 1'eflime qu'il fait de votre amide & de votre recommandation (*) Cependant les amis du Comte Magnus firent tout au monde pour le re- *< -Ami* mettre bien dans 1'efprit de la Reine: & Chark-s-Guflave Be'aufrere du Com- SSftj225Sii te domicilie alors en OeJande , lui ecrivit auffi en fa faveur. Mais Cbriftine tcrchcnt ne temoigna pas en etre trop fatisfaite, ne s'imaginant pas que ce Prince fdc fort touche de fa difgrace & dut s'interefler pour lui, comrne il faifoit, le Comte n'aiant pas agi a fon egard de maniere a le meriter (a). La re- ponfe que Cbriftine fit a Cbarks-Qujlave , fait aflez connoltre de quelle fajon Sa Majefte recevoit les bons offices qu'on vouloit rendre au Comte de la Cardie aupres d'Elle. La voici ; Coujtn. TM part que vous prenez au maJbeur du Granct- Treforier augment e ma compafjion & la douleur de me votr rtdutie en etat de le plaindre feulement. Je vota envoi'ela relation de ce qui feftpafft dam la conference qtfileut avec Schleppenbactl, laquelle vousfcra croire, que ce qui eft arrive ejlincroiabk &q it'll tie/I pas en mon pouvoir $y remedier. J'ai porte toutc la confede- ration que fai due fur rinteret que nous avons ,en fa perfonne.: mats la jujlice nfordonnant de roublier , je lui ai obti aveuglement & Juis fathfaite de rna conduits. Jugez de mes Jentimeni par la 'lettre que je lui ai ecrite. fous avouerez mime quily va de votre inter et , que t 1 affair e fe paffe ainfi. Au rejle^ Mon Coujtn , jevous Juis obligee des Jentimensrejpctlucux que vous me temoignez dans vo- tre lettre. Contiimez-les^ je vous prie, &fo'iez certain , que vous rfaurez jamais fujet de regreter de les avoir eusfi confer mes a va- tre devoir, a Upfal/ 16 Dteetfibre 1653. CHRISTINE. Apres (a) CTianut /. c. p. 276. 283. 447. 'i^^'^X S>?\^EJ< ^^>^^<^^<^Xx^E>^^5< < <^~*. ^JA#~r-^^X^N- '^^k^ E f v ^^^5^^: A ^^ i ^5' ^^'"^-^ ,!&\>S^<^i<^*:^>-S^*s^-S&>*:^^3^f&v5^ (*) La Reine Cbriftine vouloit favoir ce que penfoit le Cardinnl Mazari,i de 1'eloig- nement du Gointe Magnus ? Le Cardinal aprouva fort ce qu'avoit fait la Reine ,. & elle temoigna beaucoup de fatisfaction dc font jugement (i) C'eft. le languge dcs Cour- tifans! (i) Cha.wt Tom. Ill png. 158. L'an. Apres cette reponfe , Charles-Guftavg , n'ofant plus s'adrefler difefte- [(553 '_ J ment a la Reine , en faveur de fon Beaufrere , ecrivit deux lettres (a) a 1'Eveque Jean Matthi* pour qui , furtout en qualite de fon ancien Precep- teur, Elle avoit todjours beaucoup de deference. Le Prince, en luiman- dant combien le malheur du Comte le touchoit , le prie tres-inftamment , de s'interefler pour lui aupres de la Reine , de tacher de 1'apaifer & de faire rentrer le Comte en grace, ou bien de I'emplo'ier autre part, difanta 1'apoflille . que 1'affaire en queflion pourroit fe terminer par 1'autorite de Sa Majefte, de fagon que ni le Comte, ni Schleppenbach n'en fut deshonnore, mais qu'il remarquoit que cette voi'e n'etoit pas agreabte a la Reine. LC Comte Le Comte Magnus avoit aufli ecrit une lettre fort humble au Chancelier i^ade'ia 6 " P our ^ e P r * er ^ e ^ donner confeil dans 1'etat prefent de fes affaires: lefai- proteotion fant reflouvenir de la priere que feu le Connetable fon Pere lui avoit faite iier? hance " en mourant de vouloir prendre foin de fa famille , de tenir lieu de Pere a fes enfans & de les affifter de fes bons confeils. Void fa lettre traduite du Suedois (b) : llluftre Comte, '* Tres-honore Seigneur , Grand-Chancelier du Roi'aume , Monfieur de Forbus, Senateur du Roi'aume, dira de bouche a Votre ,, Excellence, & les papiers ci-joints raporteront plus au long, quellesfonc les extremites qui me portent a l'incommoder par cette lettre. L'affec- tion fincere que V. E. a temoignee a feu mon Pere , & la fainte pro- ,, meffe qu'Elle lui fit a 1'heure de fa mort , de la continuer envers fes en- fans, m'infpirent la confiance avec laqtielle j'ai recours a vos fages con- feils & a v6tre gracieufe & fidele affiftance. Je fupplie done V. E. tres- humblement de ne pas me la refufer a 1'heure qu'il eft , mais de m'ap- ,, prendre de quelle maniere je dois confiderer cette affaire , & a quoi je dois prendre garde , de crainte , que par inadvertance ou par furprife, ,, je ne commette quelque chofe qui pourroit me prejudicier oua mesCon- freres du Senat , & que je puifle fortir d'embarras par des moi'ens con- venables. V. E. m'attachera par-la eiernellement a fon fervice , & j'en aurai pour les Siens toute forte de reconnoiffance. Si V. E. s'entremec- tant pour moi,me tire d' affaire, le bon Dieu rendra fftrement la pareille & a V. E. & aux Siens. Je recommande V. E. a la fainte garde du Tout-puiffant , & moi-meme a la faveur & a la protection de V. E. e- 3 , tant avec refpecl. &c. o- MAGNUS GABRIEL DE LA GARDIE. vcmbrt 1653. Le (a) Elks font dateei a Borckholm le 26. fal dam un Code MJc. num. u. & 12. Dec. 1653 &f le 6. Janv. 1654. Les Ori- (ft) Tiree de I" Original de Mr. le Cmte jrinauxje trauvent dans la Biblittbtque rf'Up- Ax. Gabr. Oxenflierna. CHRISTINE HEINE DE SUEDE. . Le Sr. Pkques rapporte la-deffus (a) qtie le Chancelier fe fouvenant que L>aft le Comte Magnus avoic autrefois dit de lui, 'qu'il radotoit , qu'il dtoil I(55 ^' rentre en enfance & qu'il n'etoit plus capable de donner aucun confeil, fe Le chance- fervit adroitement de ce meme langage dans fa reponfe, pour s'excufer de 1 ^ 8611 "' lui en donner. 11 lui fit neanmoins entendre, que s'll feut confulte avant cjue de rien faire, il lui auroit pu donner de falutaires avis, & qu'en J'etat ou etoient les chofes , il ne pouvoit que plaindre Ton malheur. Comme la correfpondance du Chancelier avec fon Fils Eric fur cememe C h""eife U r fujet, y repand beaucoup de lumiere, nous extrairons ce qui y a rapport, & defonfii de trois lettres (b) fauvees du naufrage ou bon nombre d'autres ont peri, '" ***&*> La premiere eft du ip.de De'cembre 1653 ou le Chancelier dit a fon Fils : Je fuis en peine que 1'afFaire du Comte Magnus , au lieu de fe remet- tre, va en empirant de jour en jour. Cela me fait compatir a fon ex- iravagance & a fon malheur. Des gens fenfes prevoient aflez 1'orage, & beaucoup de monde n'en fera pas furpris , quoi qu'en difent les Crea- ,, tures du Comte, qui ne parlent que de grace, d'accommodement & de la meme faveur que par le paflfe. ,, Le fils du Chancelier ecrivit au Pere d'Upfalle 22 de De'cembre en ces termes : ,, Mon cher Pere aprendra par les lettres ci-jointes combien Son Altefle Roi'ale (Charles Giiftavi) s'inLerefle dans Taffaire du Comte Magnus Le Comte jacob fon frere, en me les donnant, me fit entendre, qu'il dou- toit lui -meme que de pareilles recommandations pOlfent plus 1'aider, puifque la lettre de Son Alteffe aSaMajelle n'avoit produit d'autreeffet, que ce qui fe voit par la copie ci-jointe , qui m'a ete communiquee en grande confidence. Je la renferme ici avec la lectre que le Comte Ma- gnus a ecrite a mon cher Pere , & je le fupplie d'en faire part a mon frere Jean, qui me la renvoi'era en fon terns. J'efpere que mon cher Pe- re ne blamera pas , mais excufera paterneilement , la liberte que j'ai pri- fe d'ouvrir la lettre & le paquet , que S A. R. & le Comte Magnus lui ,, ont ecrits. Je ne 1'ai pas faic par pure curioflte , mais dans Tintention de regler d'autant mieux ma conduite en confequence, dans cette affai- re (1 delicate & fi compliquee. Dans la reponfe, deux jours apres , le 24. Decembre de la meme an- pee, le Chancelier ecritainfi a fon fils: (c] ,, 11 paroit par le precede du Comte Magnus , qu'il eft auffi peu capable de fupporter le malheur que Je bonheur. Non feulemcnt il fe fefl: attire fans (a) Mem. de Chanut /. c. pag. 290. cfr. Palmskoldiana. fag. 284.. (c) Cette lettre-ci efl tiree de I'Origind di* (b} Les deux lettres fs trouvant dans les Comte Ax. Gabr. O.xenft. Tome I. Aaa 37 MEMOIRES CONCERNANT L'an 1(553- fans necefihe , mais il s'y enfonce de plus en plus. Pour votre infor- mation particuliere , je vous envoie une copie de la lettre que Sa Ma- jefte la Reine m'a fait parvenir par Holmen & la reponfe que j'y ait fai- Je les ai tranfcrites moi - meme , pour qu'elles ne paflafTent pas par te. d'autres mains par ma faute ou celle des miens , afin que vous puifliez remarquer plus precifement, fi ma reponfe agreera ou non. J'ai eteen peine la-deifus: & de longtems je ne me fouviens pas d'avoir ete fi em- barraffe. Je ne puis pas approuver la conduite du Comte Magnus : & s'il lui eft arrive quelque chofe d'inopine, ce n'eft que fon audace&fon extravagance qui le lui ont attire. II fe pent que j'aie repondu trop ou trop peu ? deforte que cela ne plaira , ni a 1'un , ni a 1'autre. Mais je n'ai pit faire ni plus ni moins , avec honneur & en bonne conference. II s'agit ici , comme on voit , d'une lettre de la Reine au Chancelier, laquelle , pour faire connoitre qu'Elle ne s'etoit point precipitee , en ce qu'Elle avoit fait a 1'egard du Comte Magnus , avoit enjoint au Chancelier Oxenftierna de lui dire fon fentiment fur 1'affaire en queftion. La voici en Suedois , avec fa traduftion (). Jl/lOn Coujin. Safom tag altld *'* bafiver befit at mig om at dirigera alia mina affioner efter fa/I raifon ; Sa bar darndjl al- tjd war it mti upfat at eftertrak- ta , dem hos hwararlig Man at juftificera. Hwad med GrefMa- gno dr puffer at 5 dr Eder alla- redan kunnogt 3 ja at mig alkna igenftar at communicera Eder co- pie of mit bref til honom , dar utur J mage domma mit precede- re. Jag aflundar intet bogre an at na Eder approbation 3 eller ock at fa weta 5 uti hwad Jag kan bafwa mig forjedt , at Jag matte hafiua den fatisfaHion^ qf Eder at juftificeras. Jag be- fatter Eder Gudi. Cbriftina (n) Tirie de I' Original du Comte Axel Gabr. Oxenftierna. Feu ie Cbancelier a mar- , qu'il I'avoit re$u le 2i.Decembre Mon Coufin. Comme de tout tems j'ai fait mes plus grands efforts pour diriger toutes mes aftions felon des raifons folides , de-meme j'ai toft- jours pris a tache de les pouvoir juf- tifier devant tout homme raifonna- ble. Vous favez deja ce qui eft ar- rive au Comte Magnus , & il ne me refte qu'a vous communiquer la co- pie de la lettre que je lui ai ecrite ? pour que vous puitfiez juger de la ma- niere dont j'ai agi envers lui. Je ne fouhaite rien de plus , que d'avoir la- deffus votre approbation , ou bien d'aprendre en cjuoi je puis avoir man- que afin d'avoir la fatisfa&ion d'etre juftifiee de vous ; fur cela je prie Dieu qu'il vous ait en fa fainte gar- de. CHRISTINE. La 1653. h Stockholm. V. wjp Chanut /. c . 273. 290 & 446. CHRISTINE REINE DE SUEDE, 371 , La queftion propofe'e au Chancelier etoit aflez delicate , comme il 1'a- L ' an v voit lui- meme marque dans fa lettre ci-deflus a fon fils. Auffi n'eut-il gar- l653 ' de de defaprouver la refolution de Chrljline. Mais en donnant a 1'affaire un tour naturel, ou il paroit incliner pour la voi'e la plus moderee ^inrpi- rer a la Reine de relacher de fon reflentiment , il ne touche pas pourtant duconuc trop cette corde, de peur de la choquer , & peut-etre d'occalionner par* la le promt retour du Comte Magnus , ou qu'il ne femblat que le tort n'e- toit pas du cote de ce Comte. Void done la reponfe , que le Chancelier fit a la lettre de Chri/line traduite du Suedois: ' **' '.t Tres-puiflantQ & tres-gracieufe Reine. La tres-gracieufe lettre de votre Majefle Ro'iale m'a bien ete remife : de laquelle auffi bien que de la copie de fa lettre au Comte Magnus dela Gardie, j'ai compris en toute humilite le contenu. La grace , que V. M. m'a fait de m'avoir communique cette affaire par un e lettre de fa pro- pre main , augmente les grandes obligations qui m'attachent felon mon devoir tres-refpectueufement a V. M. furtout lui ai'ant plti d'apprendre v mes petites penfees la-deflus , quelle que foit mon incapacite. Mais pour obeir aux ordres gracieux de V. M. en manquant pltitdt de jugement, que de volonte & a mon devoir, je ne puis m'empecher de compatir au ,, malheur du Comte , de n'avoir pas fait plus d'attention a la faveur & a la grace de V.M. & de n'avoir pas fu en jouir plus prudemmentala fa- tis faction, au fervice & a la gloire de V.M. auffi bien qu'a fon bonheur ,, propre & permanent. Et s'il m'etoit permis , fans encourir le deplaifir & la difgracede V. M. de 1'affifler & ceuxqui lui appartiennent , dema foible interceflion , je le ferois fans contrainte & volontairement , tant en confideration de 1'amitie & de la correfpondance conflante & non in- terrompue , que moi & les miens avons eue avec les Parens & Ayeux du Comte Magnus depuis tres-longtems , qu'a 1'egard du fervice & du bien de V. M. & du Seigneur fon Pere de bien heureufe & glorieufe ,, memoire. Mais quant a 1'affaire meme , autant que je 1'ai pit comprendre non feulement par un bruit commun & par une lettre qu'il m'en a e'crite lui- meme , mais particulierement par la copie de la propre lettre que V. M. lui a e'crite , & en comparant tout cela avec d'autres circonftances ; ,, je ne trouve rien dans ces fentimens Roiaux & ces actions genereufes de ,, V. M. qui en put etre diminue ou y etre ajoute. Je fouhaiterois feule- ,, ment de tout mon coeur, que le Comte Magnus de fon cote s'en fut fer- vi &: en eut joui avec autant de modeflie & de prudence pour Je fervice de V. M. & du Roi'aume , que de raifon ; vft furtout que non feulemenc la faveur & la grace de V. M. envers lui , lui e'toient connues , mais ,, pas meme ignore'es a la Cour de qui que ce fut; deforte , que tout de- 5 , pend de !a gracieufe determination de Votre Majeite entre la grace oula difgrace, & a faire pre'valoir 1'une ou 1'autre. Pour moi, je panche vo- lontiers pour la grace par pluileurs raifons, & je prierai toujours Dieu, i\aa 2 ,, qu'il 9? 372 M E M O I R E S C O N C E R N A N T L'an. yy q u 'ii yeuille diriger les confeils & les refolutions de V. M. a la gloire de I<553> fon faint nom, a la reputation & a 1'honneur immortel de V. M. & au bonheur de fes fideles Sujets. ,, Au refte je fupplie V. M. de vouloir bien m'excufer de ce que je ne puis pas e'crire fur cette affaire autrement que je ne 1'envifage : & au cas que j'ai'e manque la-deffus en quoi que ce fok , de le vouloir attribuer a ,j mon peu de penetration & a ma vieillefle , en interpretant le tout gra- cieufement. Je recommande V. M. a la protection Divine en toute humilite , & je fuis, avec le plus profond refpeft & la plus parfaitefou- million. AXEL OXENSTIERNA. Cbriftine refta neanmoins ferme & ne changea point de fentiment a 1'e- gard du Comte Magnus (a). Mais comme Elle reprit la refolution d'abdi- quer la Couronne, qu'Eile executa fix mois apres; le Senat de Suede, fans doute de 1'avis du Prince Charles -Guftave , lui parla du re'tabliflement da Comte , & le Chancelier lui remontra , qu'il etoit Grand-Officier du Roi'au- me, & que la Reine n'ai'ant point fait connoitre de raifons fuffifontes pour ]e bannir du Senat , il etoit de la grandeur de Sa Majefte de lui pardonner les fautes , ou il pouvoit etre tombe & c!e le retablir avant fon abdication ; de quoi ils la fupplioient tres-inftamment La Reine leur dit : que c'e- toit une aiFaire faite qu'EUe etoit fur le point de quitter: qifElle avoit d'au- tres chofes en tete: que quand Elle feroit dehors , le Prince feroit ce qu'il lui plairoit, & qu'Eile les prioit de ne lui en plus parler. . . . Elle refta ain- fi inebranlable en ce fentiment , & quoiqu'avant que de quitter la Suede , Elle prit conge de la Princeffe Marie, Epoufe du Comte Magnus, Elle ne lui dit pas un mot du Comte. . . . Celui-ci en revanche temoigna publiquement fa jo'ie de la refolution que la Reine avoit prife de refigner le gouvernement , efperant que le Prince Palatin, etant monte fur le Trone, le rappelieroit a la Cour: mais le Prin- ce (b) , a'iant apris de la Reine comment il 1'avoit defend , tant qu'il a- voit ete en favour aupres d'Elle, & qu'il avoit cte la caufeque Chriftinena- voit pas voulu 1'epoufer : ce Prince , dis - je , dit hautement , qu'il avoic todjours pour la Reine fa Bienfaitrice tant de reconnoiifance & de deferen- ce a fes volontds , qu'il ne fouffriroit aupres de lui aucune perfonne qui lui fut fufpefte , & qui ne fut pas en fes bonnes graces. Cependant le Chancelier Oxenfticrna fut tofijours en grandeconfideration aupres de la Reine (c) tant qu'Eile refta en Suede 9 & meme apres fon de- part aupres du Roi Cb$rles-Guftave t qui 1'appelloit SON PER E, & lui fai- foit de grands honneurs , fous ce titre , dont ce venerable vieillard etoit tout charme. Apres la mort tiOxenftlerna qui arriva peu de terns apres , le Comte Magnus rcvint a la Cour, & eut lieu d'etre fatisfait dc 1'accueil gra* (.1) Chanut 1. c. fag, ^50 ? 379. ds Rel. Brandenb. Lllr. II . 49. & Libr. (!>} Idem /. c. pag. 312 5* 313. Pufencl. III. . 17. fie Rzy. Car. Guftavi Lior. /;*. If. idem (c) Cbamit /. c. pag. 446. 447. f 473. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 373 gracieux que le Roi lui fit, furtout en confideration de Ton Epoufe, Soear de Sa Majeile , que ce Prince aimoit tendrement. Mais il ne regagna jamais la faveur de Cbriftim quoiqu'Elle tachat d'etre bien avec tout le monde, careflant meme ceux qu'Elle avoit autrefois peine a- foufFrir. De plus grands troubles & qui auroient pu avoir de plus longues fuites occnperenc cette Heine , qui penfa autfitot aux moi'ens d'y couper court. Telle fut Taffaire avec la ville de Breme, laquelle, fi Ton en croit le Sr. Picques (a) , alors Refident de France a la Cour de Suede , 1'Empereur & plulieurs Ktats de 1'Empire, jaloux de la Suede, n'avoient garde de vouloir accommoder. II dit: que Mrs. Montecucutti & Pimentelli 9 Ambafladeurs de YEmpereur & d'Efpagne ne fongeoient qu'aux moi'ens de mettre la Sitedi en defordre & en troubles , pour avoir occaiion de reprendre plus aifement en Allemagm les belles Provinces que la Suede y pofledoit : que dans cette vfle, ils avoient difpofe la Reine a attaquer les Bremois , a I'lnf^u du Senat, (*) afin que 1'Empereur pCit executer Ton deflein avec plus d'apparence de juftice,-le procedti de la Suede ecant contre le Traite de paix de fl^eftphaHe, I654> qui auffi permettoit aux interefles de courir fus aux Suedois & de leur faire la guerre , comme a des perturbateurs du repos de 1'Empire : & que la Reine apres la declaration contre le Portugal (dont nous parlerons ci-apres) n'avoit diffcre jufqu' alors a prendre 1'invettiture des Duches de Breme & de Pome- raniff (a) Ibid. T. III. pag. 371. 375. 386. 399 & 4'-'3- (*) Le Sr. Picques affure pofuivement (i) que le S^natn'en avoit rien ffl &quequand LeSe'natde bn avoit demande raifon de cette entreprife an Fek-Mareclral Konigsmarck, il avoit dit, sy^neTait quand voient point e"te" propofe'es ni reTolues au Senat. Mr. Heinftus paroit s'accorder avec Mr. Picques dans ce qu'il mande a Mr. Gronovius au mois d'Aoiit 1654 (2) en difant: pofl difcejfum ChrifUna? optime de rebus msis incipiebam Jperare. Nam aniwiad-veritlam curas Procerum potifflmas occupari in are alieno , quod conflafjet Dornina , eyfungendo. Nee nefciebam effe me baud main aptid ray Kulo^cijo^x loco : cum ecce funefttis advolavit nuntius de bello apud B/emenfes exorto prater exjpe&&tiont. Quo impulfore faba Ixc , fit cufa nefcitur. Rege certe & Senatu invitis ad anna veniendum conftat Jatis , qui nunc tali junt in cogendo exercitii. Si glifcit b(cc tempeftas, de qua componendafpem vix nil am opinor fupcrejje , ego ceterique cr editor es jubebimur plorare. Facile enim intelligis, fumtus ad beLlum maximos ejfe fcxiendos , qui in noftros ujus convtrti potuijfent ". Si cela eft ainfi, il faut que ce jeu cut etc jou bien fineinent de la part de ces Am- bafladeurs. II etl vrai que la Sue~de s'^toit rc'ferve, dans le Trait^ de Weftpkalie, fon droit fur la ville de Breme , & qu'en confluence de cela, elle clevoit s'abitenir d'en- To'ier aucun Depute a la Di^te de 1'Empire jufqu'a la fin du Siecle palfe". Mr. Conring avoit aulTi produit les preuves de ce droit de la Suede , (3) comiue fa lettre a Cbriftine en fait foi. Si done ces AmbafTadeurs ont port6 la Reine a cette entreprife dans un v. ci-dcfHn terns fi peu favorable, pour la meftre en Execution, il femble, qu'ils n'ont eu en vfle'pag. iv. ad que de rcndre par-la les Suedois odieux aux Allemands & dedonner pretexte a I'Empe- Append; reur de recommencer la guerre. (1) Cb/tnttt 1. c. pag. 371. 339 & 34<>' me droit de la Suede plus au long, voi'cz fes O- (2) Burman \. c. Tom. III. p.tg. 333- pafcnla pag. 126. 5cc. (j) Lc Proi". J^erelias (1'Uffal louticnt cc me- Aaa q 37 4 MEMOIRES CONCERNANT L'an ranie, & ne s'etoit defifte de demander en fouverainete & enproprelesifles de Gottlande & d'0elande,h Ville & le Chateau de Wolgafl, comme auflj de faire equiper les douze vaifleaux de guerre, que dans 1'intention de fe faire maintenir par 1'Empereur dans la pofleffion des terres que la Sue~de lui don- noit en Alkmagm , pour enfuite echanger ces biens contre d'autres dans le Ro'iaume de Naples ou en Efpagne , & donner moi'en a la Maifon dAutriche de s'emparer du Duche de Breme & du refte de la Pomeranie. . . Soit que tout ceci & d'autres circonftances que le Sr. Picques rapporte (a) au fujet de 1'afFaire de Breme, fuflent fonde'es ou non, toutefois elle fut terminee amia- blement par la prudence & la-moderation du Succefleur de la Reine. pretenfion L'autre difficulte , mais d'une plus grande confequence , que Chriftine au- du Roi de ro j t vou i u vo i r applanie avant que d'abdiquer etoit avec la Pologne. II n'y Polnvne fur . ff o i n v 7 ^ > i i f ia coaronne avoit entre cet Etat ex la suede qu une treve , qui devoit encore dtirer neur de Sutie. ^ ^j x ans & q ue Chriftine vouloit convertir en une paix perpetuelle, au Congres de Lubec. II s'agiflbit de la ceffion entiere de la Livonie a la Suede & que le Roi de Pologne renoncat a toutes fes pretenfionsfurJa$M<^fe. Nous avons remarque ci-deflus () , que le Roi Jean - Cafimir avoit donne a Chnjl'me des alfurances pofltives , de bouche & par e'crit , qu'en cas qu'elle voulut appui'er fon election pour le Trone de Pologne , les deux points conteftes ne fouffriroient plus aucune difficulte. La Reine y concourut reel- lement. Mais Jean-Cafimlr etant afFermi dans la pofleifion paifible de la Couronne, oublia fes promefles. Le bruit qui s'etoit repandu, que Chri- Jline pourroit bientot abdiquer , reveilla fon attention & celle de tons les Lowliftes^dQ la fociete desquels le Roi Jean-Cafimir avoit e'ce autrefois mem- bre. La Republique meme de Pologne fe nourriflbit de 1'efpe'rance non feulement de revendiquer fes provinces perdues , mais auffi de faire revivre les pretenfiohs de la famille Jagellonique fur tout le Ro'iaume de Suede ^ com- me la plus proche de la pofterite male du Roi Guftave I. A cet egard fon droit etoit fonde. Mais a caufe des decrets des Etats du Ro'iaume tant de fois reiteres , ce n'etoit au fond qu'un droit imaginaire. Ces Decrets ex- cluoient pour jamais du Trone de Suede la pofterite de Sigifmond, parce qu'il avoit voulu fubjuguer la Suede & y introduire la Religion Catholique a force ouverte , contre les Loix fondamentales. . . 11 ne fut pas poffible de rien obtenir des Polonois fur ces deux chefs (c),tant a caufe deleurfierte naturelle,&de celle que leur infpiroit lavidtoire qu'ils venoient derempor- ter fur les Tartares , que parce qu'ils fe voi'oient appui'es de rEmpereur , de Y Efpagne, & de la Republique de Hollands > (*) trois Puiflances, qui les con- fir- (a) C/r. auffi Pufend. de R. S. Libr. Libr. I. g. 8. &c. it. Hifl. de Suede T. II. XXVI. g. 10-17. P- 4i5 425. (fr) Ibid. Libr. XXIII. g. 18-25. ^f libr. (c) LudolfsScbaub.ad. mm. 1652. p. 244. XX.IV. , 25-34. Idem de Reb. Car. Guft. Relat. hiftor. adann. 1651. pag. 68. 6fc. (*) Quelques Politiques ont remar qua", que 1' Etat de cette Republique s'eft r^gle par- IMlandois. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 375 firmoient dans leur refolution de ne rien ceder aux Suddois afin que cette L ' an epine leur demeurac toujours au pie. C'eft par-la qu'echoua la negotiation _ de Lubec-, oil les Polonois perdirent 1'occafion de prevenir la guerre fatale * qui s'enfuivit (a). A {'abdication de Chriftine , ils vouloient faire valoir leurs anciens titres qu' ils n'ecoient pas en etat de pourfuivre. Dans cette vue ils firent incervenir Jeurs proteftations centre I'eleftion de Charks-Gu- fiave, par Mr. de Canaziles, Envoie de Pologne. Mais la Reine repondit aux AmbaiTadeurs , que fon Coufin prouveroic par le temoignage de trente mille hommes, qu'il avoit le droit le plus inconteftable, a la Couronne de Suede. II venfia cette prediction peu de terns apres en fe rendant Maitre de la meilleure partie de la Pologne^ & a la fin, cette difpute fe termina par le Traite de paix d'Ota en 1660. (*) ou le Roi & la Republique de Polo- (a) Pufend. de R. S. Libr. XXIIL g. 18- Tom. II. pag. 415 fcf 425. item Jon bijt. 45. p XXiy. . 25-34 item Libr. XXF. J. Brand. Libr. f. $. i.fc? 9- Mr. Mabiy Droit I. 23. Idem de Car. Guft. Libr. I. $. 8. fcpc. Publ. Tom. 2. pag. 90 6f 91. jfo item J. 43. fcftr. 5* Ejufdem Hift. de Suede faitement fur Fintt^ret des N^gocians, (i) qui fondent leurs maximes dans 1'efp^rance dugain, quand meme la bonne-foi en fouffriroit quelques fois. Enfuite de cette ma- xime, ils regard^renc, meme avant que leur Republique fut de'claree libre, de tres-* mauvais ceil la ceffion de la Pome'ranie a la Suede, apprt^hendant, qu'elle ne fe ren- dit MaitrefTe du commerce de la Mer Baltique, comme en (^crivirent les Miiiitlres de France a leur Cour. Mr. Cbanut dit aufli quelque part (2) qu'on n'ignoroit pas en Sue- de, que les Etats des Provinces-U/iies n'auroient pas t& facht^s que toutes les autres nations n'euflent point trouv^ de furet^s dans la navigation, afin que tout le commerce leur fut demeure" qu'il courut un bruit en Suede que les Hollandois avoient fait offrir fecretementa I'Eledleur de Brandenbourg une grofle fomme en pret,s'illeur vouloitdon- ner pour aflurance & nantiflement la ville de Colberg fur la mer Baltique , cequi ncplai- foit point a la Suede, qui avoit tout-a-fait inte'ret, que les Hollandois ne pofi'edaffent au- cune place fur cette mer. (*) Par ce qu'on vient de dire on aura remarqu^, que la proteftation interjette'e a- voit proprement donn^ occafion a cette guerre entre la Suede & la Pologne , & non la caufe feule d't cetera, par rapport aux titres & courtoifies entre les deux Romanes. C'eft done a tort que Mr. Koebler en prend fujet de s'emporter tant contre Mr. Pufen- Mr. dorf & meme contre la Nation Suedoije (3). Mais pour qu'on fache dequoi il s'agit dans note, eette claufe, voici ce qu'en dit Mr. Herman Conring cach fousle nomde Cyriacns Tbra- jymacbus d'oii Ton verra qu'elle tiroit a grande confluence. Advenit Holmiam Morftenius, non inftruftus facilitate componendce pacts, fed quan- tum pros fe ferebat , paraturut tantum Praliminaria , quce dicuntur , circa locum & tern- pus futurorum de pace tra&atuum, Direfte boc adverfabatur illi per Canazilium dato refponfo Regio Juj[]us ex more , antequam admitteretur Morftenius, apographam fidu- cialium liter arum exbibere , produxit tabulas , in quibus etfi utriusque Regis titulis folito re&ius fuerit cautum , fub finem tamen numerati Junt Poloni Regis Regnorum anni : va- naquidem, ecculta nibilominus juris in Suecia? Regnum, ex more conj'ueto, commemors- tione* (\) VoYez fur cela une ample D^duftion chez VII. $.25 8c ztf, item de Reb. Suec. L. XXV. $. Palmikatdzd ann : 16*8 pag'. 831- cfr. One Pri- 39- mx Linex Ret. publ : Cap. VI, $. XVI & XXII fa) Mem Tom. I. pag. 300 & 363. item Ne- & quos ibi citat Autores p. 397 & 405 item Pa- goc. Secret. Tom. III. pag. $y. fendorf de Reb. Car. Gull. Libr. III. $ P?. 96 (3) Dans fes Remarques hiftor. furies Medail- Libr. IV. . S3. 96> Lib. V. $ 66. 71. &c. ScLibr. ks Tom. X. pag. 266, item pag. 355 & 35$. 376 M E M O I R E S CONCERNANT Pologne non feulement firent tine enticre cefTion de la Livonie a la mais renoncercnt aufii a toutcs leurs pre'tenfions fur ce Roiaume. Quant a la Cour de Damiemarck , pen s'en falut qu'il n'y efti encore quel- e brouillerie entr'elle & celle de Suede a caufe de Cprvttz Ulf eld Grand- au fu-Maitre de la premiere. A'iant eu le malheur de deplaire a Ton Roi, dans c G "" d 'la diffention qui avdit divife la Cour & la Noblefle, il s'etoit retire avec uifeid. fon Epoufe la Comtefle Eleonore , riile du Roi Chretien IF. aupres de la Reine Chriftinc Tan 1651. & lui avoit demanje fa protection (*). Elle leur fut acordee a la fin & on en donna pour raifon ,que lorfque le Roi Sigifinond fut oblige de fe retirer en Pologne, plufieurs Seigneurs Suedois s'etoient re- fugies en Dannemarck, oil ils avoient etc parfaitement bien recus, non ob- ftant les Traites entre Jes deux Couronnes (#). II y eut neanmoins quelque conteftation entre les deux Cours a 1'egard de Corvitz U-feld qui a'ianttrouve moi'en de s'infinuer dans les bonnes graces de la Reine (f) dans le terns que Pimen- to) Pufend. de R. S. Libr. XXIII. $. 43. ^ 363 &c. Roches Hifl. ^Danoemarck. 6f XKW. g. 5. y 6. Chanut /. c. T. II. T. VI. pag. 12. &c. Baylc Dift. Hifi. art. $ag. 215. 288. 315. & Tom. III. p. 9. 292. UifelU. lit. G. &c. tione. Cumque fludiofe fuiffet inter Reges pa&um do vecu'.a & castcra, quibusdam tituli ,, regii vocibus objicienda , omiflam illam ejje deprebe aj'um efl, Mlnutias dixeris : at in il- ,, Us latent grandia, & tolerates adfolidas injurias munhint viam. Pofteriusfane conjunc- turn efl cum tacito Regis Sueciae free Polono vilipendio, quaji ille hoc Jit inferior. Privs ,, arcanam jurium in Suecise Regnum vindicationem continet, rem &f Regi p ordinibus ,, Regni Sueciae neutiquam tolerandam. Si minutite funt , quare per illas Polonias Rexpun- ,, gere Regem Suecias voluit. Certe etiam bccc arguunt , quam ille fit animo a iiera concor- dia alieno. Morltenius culpam exciifare conatus efl, incuria fcribar-u-in Regiorum. Sal quis non videt hoc quam Jit frigidum? Qiiajifcribis Polonicis Jolenne jit err are In foils lite- v ris ad Reges Suecice Jcribendis ? Et vero incuria Jcribenliwn,ab Us, quibus relegere [crip- it ta in qfficio efl , quare emsndata non efl ? Lnimuero ipj'amet ^f tali s incuria conjun&a efl cum contemptu. Nee enim per in curiamtractari folent res granules & major-is momen- ,, ti : quales utiquefunt qu^ pad aut bello pojjunt anfam aut fomntum dare fcfc. &c. (i)". La re"ponfe tiAndrece Nicanoris , fur cette lettre de Cyr. Tbrafymachi de la meme an- n^e eft trop foible pour difculper ces fautes commifes de la part des Polonois , aulli ne s'appui'a-t il que fur la petitefle de 1'affaire en queftion fans difconvenir pourtant qu'il y en avoit de plus graves. G>'0tius dit que les mnindres difputes qui doivient occajion a des proces entre des particuliers , peuvent occafionnsr des gusrres entre des Nations inde'psndan- tes. Mr. de Comings rapporte qu'un chariot de peaux de Mouton qu'un Seigneur Lor- rain prit a un Suiffe en nalfunt par fa terrc , fut la caufe de la guerre fanglante entre les Suijjes & le Due Charles le Hardi, ou celui-ci perdit la vie. DuComte (*) Qn trouvoit fort Strange en 5i^rftf , dit Mr. Cbanut , (2) le deguifement de Ma- ndela com- dame Uifeid en habit d'homme , encore plus qu'elle fe promenat tons les jours par la teJTe d'Ul- ville en cet habit. C'^toit en cet Equipage que la Reine lui avoit permis de la voir & feld. j e i u i baifer la main. (j) II femble que la Religion Chretienne n'ein'jarafToit pas beaucoup ceCointe Cbrif- tine lui demandant un jour pourquoi il n'avoit pas e"te" au feruion? 11 r^pondit: je ne ccn- (i) V. Cyr. 77>rafyrnackus de juftiti.i Ariuorum item Libr. II $. i & 4. ut dcMa/ers Staars Gram- Suecic. pag. it & u in PaQorii Liuro & cfr. madk pap;. I'iy-z'ip. & Mem. dc Conuaes TQU). Ani Nicino'is R.efp : 1. c png 14. vid. omniiio 1. pa?. 177. ad ann. i47<5. Pufend Ue Keb, Cmli Gxjlavi Lib. I. $. 44-^. (z) Mem. 1. c, T. 11- P- *S7- C H : R-i S t-'l N E R E"I& E' (D ^&/ en grace pourvfl qu'il voulut refuter par ecrit fon libelle, avouer fa faute & Jai en demander pardon , ainfi qu'il convenoit a un fujet qui avoit offenfd fon Souverain. Mais UJfeld en appellant totijours a fon innocence & pro- duifant des quittances d'une fomme d'argent qu'il etoit accufe d'avoir diver- tie, il s'en falut pen que cette affaire ne ftit;poulTee plus loin qu'elle ne le meritoit (*). Nous aurons ci-apres occafion de raporter quelques autres particularites de ce Corvitz Ulfeld. Quoique la Hollande fut alors en guerre avec VAngkterre , elle ne fe me"-. Aatre &f- naffea pas trop bien avec la Suede. Car emr'autres fuiets de plaintes qu'elle^ 01 ! 1 ," de ! ? 1-1 i 1% i TL v A n. i r -r - * i i o / T Saide avec U lui donna , le Magittrat d Amjierdam tit empnlonner un Marchand Syedok Hoiia*d f . en faveur d'un Negociant de Lubec, fans avoir examine preallablement leur ditFerend. Ce precede, qui offenca d'autant plus la Reineque malgre ies remontrances reiterees on retint toujours le fujet S^VozVenprifondurant deux ans, ce qui lui fit prendre la resolution d'arreter aufli tous Ies Mar- chands Hollandois & leurs eiFets qui fe trouvoient a -Stockholm (f). On jugea par ce coup que la Sue.de avoit deffein de fe declarer pour YAnglcterre (a) , d'ou (a) Pufend. de R. S. K6r. XXF. . 39-43. Hift. des Prov. Unies T. II. P. II. pag. 415. Chanut Tom. III. pag. 257. 339. Wicquef. cfr. pag. 559 f 562. eonnois point d'autre divinit que Votre Majefl^, qui puiffe me tirer de mes defa- ftres (i). yojjius ^crivit en 1653 a Heinjiut (2) celebratwn eft nuper convivium Deonrn in Suedia, ubi Ulfeldius Jovem egic , Procancellarius Polonia Bacchum. Hispania Legatus Martem. Comes Magnus Apollinem. Valde omnia magnificat & Jumtuofa fuiffe inquiunt. (*) Mr. de Hulberg tache de donner tout un antre tour a cette affaire d'Ulfelcl (3) & le dfkhairie la-deilus furieufement centre la Reine & Mr. de Pufendorf. Cependant Mr. flolberg avoue lui-meme, (4) quU.feld avoit pai^ Ies vingt quatre mille ecus au Mr. de Hd- General Montroze en Ecoffe , & que le Roi Charles II. Tavoit atrefti lui-menie. C'etoit ter s not e- juftement le point conteftd entre Cbrifline & Uifeld d'une part & la Coar de Dannemarck & fon Miniftre de 1'autre. Car poar la protedion que Cbrijline accorda a Ulfeld & a fon Epoufe , Mr. Holbsrg ne difconvient pas (5) qu'Elle la put donner en vertu du Trait^ de Stettin art. 24. & de la Loi de Suede. (j) Ce ne fut pas 1'unique fufet de me'contentemcnt qui porta Cbrijline a frapper ce Vexations coup. Lcs venations que Ies Hollandois faifoient au Sand aux N^gocians de Suede en des ilollan- furent un autre (6). Its avoient conclu un Trait^, appellt^ Redemption, avec le Roi de^ Dannemarck, en vertu duquel ils lui pa'ioient trois cent cinquante mille florins par an pour tous Ies droits au S-md, & ^xigfeoient des marchandifes de Susde tel.'e retribution que bon leur fembloit. lis continuc^rent de le faire depuis 1'an 1640. jufqu'a 1655. au grand prejudice du commerce de la Suede, nonobihint lesTraites d'Amiti &d'Alliances entre Elle & la Republique, & les remontrances qui en furent fakes. Cbrijline voulant y remedier une fois pour toutes, trouva bon d'en ufer comme elie fit avec les Mar- diands Hollandois demeurant en Susds, & par ce mo'ien les rendit tous plus traitables. (i) PalmskoU tire des Regitres de 1'an 16(14. (4) Hift. de Danr.. 1. c. pag. 127. pag. 774. (s) L. c. paj. gi. cc. (z) Burman Syll. Ep. T. Ill- pag. 664. (6) 11 y a pluheurs pieces curieu r cs la-defTus dins (3,1 Son Hift. de Dar.r.:m.irck T- III. pag. 81. les Patmtkoldiana. cfr. Rymcri Afta publ. T. IX. &:. -.135. no 117. P. II. pag. 241. Tme L Bbb 378 MEMOIRES CONCERNANT L ' atl d'ou le Refident de France prit occafion de remoncrer a Chrifl'me de quelle* J S3> impnrranre. il ^coic aux Couronnes, que les Etats Generaux fuflent con- fer vds. Elle en convint, avec le Refident, mais lui die en meme terns, qu'iis avoient agi jufqu'alors avec fi peu de refpecl: & de bonne-foi avec les Couronnes , qu'iis ne leur avoienc pas donne grand fujet de fe mettre beau- coup en peine de leurs affaires (ce dont le Refident demeura aufli d'accord) & que ce n'etoit que 1'interet commun des autres Etats , qui pouvoit les porter a ailifter cette Republique dans les extremites , pour que cette Puis- fance ne fut point entierement abatue. Par ces confiderations cette affaire s'accommoda,& ledit arret fuc leve fitdt que Mr. van Bemingen , Envo'ie de Hollands (*), cut promis par e'crit qu'on donneroit fatisfaclion du tort qui avoit ete fait au dit Suedois. Chiijline en avertit eile-meme le Chancelier Qxenftierna dans une letcre ecrite d'Upfal(a). Sur ces entrefaites I'Ambaffadeur d'^ngleterre arriva en Suede avec tine grande fuite & fut fort bien rec-u.(^). L'Envoie des Ecats Generauxenprit allarme. Mais la Reine lui dit, qu'Elle n'avoit point de mauvaife .inten- tion contr'eux. Au contraire qu'Elle s'emploieroit de tout fon pouvoir par des negotiations & autres bons offices de ce genre a leur procurer la paix avec les Anghis , qu'elle croi'oit fes Maicres fi raifonnables que leur ai'ant declare des le commencement de cette guerre, qu'elle vouloit demeurer neutre, ils ne trouveroient pas mauvais,fi elle recevoit bien les Anglolszfa Cour, (a) Elle eft du 22. Nov. 1653 &? I'Ori- XXFI. J. 3. &c Chanut /. c. pag. 261. &f ginal eft entre les mains de Mr. le Comte A&a publ. Ryiacri T. IX. P. 11. pag. 251. Ax. Gabr. Oxenftierna. 257. (&) Pufend. libr. cit. $. 44-47. f libr. Phifante ( :ic ) C'eft apparemment ce mSme Mr. van Beuningen, homme d'un grand m^rite dans Scene de les lettres, qui donna une plaifante Scene, lorfqu'il t^toit aupres de la Reine Cbrijline. |*Ambafla- ^ r> Baudelot de Dairval la rapporte en ces termes : (i). Un jour que cette Princefle avoit fait une partie dechafTe, elle y convince Mimftre, & commanda en mSme terns. . . ,'. i/- -,\ J , ^ i c < i / qu on Uu preparat un de fes meilleurs chcvaux. Get ordre fut execute trop ponc- tuellement: on lui apreta auffitot un Courfier des plus vites & des plus fringans. L'E- cu'ier qui Papersut , ne crut pas qu'un homme de lettres, comme cet Ambafladeur, dut fe nazarder fans fcrupule fur un tel cheval. 11 ne put s'empecher de lui temoigner fa penfee, & le conjura enfuite avec beaucoup d'inilancc d'en prendre un autre d'unde fes Gens. Mais ce favantnomme ne le crut point: il eilimn qu'il y alloit de fon hon- neur & de fa reputation, a fuivre le confell qu'on !ui donnoit. J'ai lu, temoigna-t-il fur !e champ, tons les Trails de Re Equeftri, ne croi'ez pas que je fois Apprenti fur quelque cheval que ce foit. Tout fa fcience nt^anmoins ne lui fervit de rien lorfqu'il fut monte. Le Cheval ne la fentant point ni dans les mains , ni dans Jes talons du Cavalier, il mit la Th^orie Equeftre fort au dcfarroi, & penfadonner un fpeftacle tra- . gique a la compagnie, apres une tres-longue & tres-burlefque Scene... Si cet accident ou quelque autre ratfon lui aura donn du dugout pour la Sue'de , c'eft ce qu'on nefau- roitdire: mais Tan 1656, il fit tout au monde pour porter les Etats Gene'rnux a de"- clarer la guerre centre le Roi Cburles-Guftave , & c'eft pourquoi Pufendorf 1'appelle prcecipuus turbarum incentor contra Suecos. (j) D2 1'utilite des Vo'nges Tom. I. pag. z-4- Afti publica Rjmeri T. IX. I*. II. ad ann. iCjj.p, fc Pufend. Hiftor. Brandtnb. Libr. VI. $ fi4..cfi. 216. 12 j. CHRISTINE REINE DE SUEDE. Cour , & leur donnoit les memes alTurances de fa part pour leur Re'publique, done elle n'avoit jufqu'alors aucun fujet de fe plaindre (*). A la premiere audience, FAmbairadeur d'dngleteire, Mr. Whitlock s'ef- Ne ' gocia forca de juflifier les armes & la conduice du Parlement dans la more deleur tion Roi & dans le changemenc de la Monarchic en Re'publique (a). II fit cela pour appaifer les efprits qui avoient etc extremement furpris de la fin tra- gique qu'avoit eu peu d'annees auparavant le Roi Charles- Stuart: car, a ce que dit Mr. Chanut, quoique plufieurs en Sutde (f) ne trouvaflent pas alors mauvais , qu'il y cut un exemple public d'un Roi depouille de fon autorite pour n'en avoir pas bien ufe au gre de fes fujets; 1'exces deteftable ou s'e- toient portes les Angkls^ detruifoit les confluences qu'on en vouloit tirer , & faifoit voir , qu'il n'y avoit rien de mediocre, ni dans la fureur des fujets revokes , ni dans fabaiflement des Souverains. La Nation de Suede n'en etoit pas encore bien revenue ,.& rAmbalTadeur flAngkterre avoit etc contraint d'entendre beaucoup de durete's centre fa nation. Cela fut en partie, peut-etre la caufe, qu'il refta quelques mois fans rien faire a la Cour de Cbriftine (j). Le Prote&eur Cramwel 1'y avoit en- (a) Chanut /. c. pag. 278 fcp Tom. I. pag. 407. (*) Le Minifte're de France etoit bien intrigue'e en cetems la d'un Depute* de Suede en. Angleterre , \i) qui, felon les rapports qu'on lui avoit fait, y e'toit pour donner dc uiauvaifes impreffions centre le Roi & la Roi'aut^ & qu'il cro'ioit partir du Conleil des R^gens de Suede, qui auroient voulu que la jonclton des deux Ro'iaumes ft A&^leterre , & (jCEcoffe fe fit. Les Miniftres Francois s'appaif^rent a la fin apres la declaration faite de la part de la Suede. (f) 11 ne feroit pas fi ^tonnant qu'il y eut en Suede des Perfonnes a qui cette trame du Parlement d' Angleterre contre leur Rot ne de"plaifoit pas, parle ddgout qu'ellespou- voient avoir pour un gouvernement despotique. Mais il auroit etc" bien plus Strange, ne que la Reine Cbriftine n'eut pas blame' cot exces des Anglois: voict ce qui eft rapport^ i a de'colla de cette aftion funefte dans le Cbeweana^i} ,,. Qaand les Anglois eurent fait couper la tionde ,, tete au Roi Charles, la Reine Cbriftine en fut inform^e par des lettres , & les a'iant Charles I, ,, lues, dit publiquement: Les Anglais ont fait trancher la tete a leur Roi, qui n'en faifoit rien, & ils ont bien fait ", Cette Reine, ajoute Cbevreau, dit cela dans un terns oil elle n^gligeoit toutes les affaires , oil elle avoit perdu Famour de fes peuples par fes lib5ralit^s mal menage'es, ou les Pretres n'^pargnoient, dans leur fermons, ni fon irreligion, ni fon caraftere. 11 y a pouriant toute raifon de douter de ce que Mr. Cbevreau impute ici a la Reine, 1'onachronifme eft trop vifible. On d^colla Charles Stuart Tan 1649, qui eft Pe"poque oil Cbriftine etoit tres-applique'e tant aux affaires de fon Ro'iaume, qu'a 1'^tude des belles-Lettres. Et comment accorder le difton de Cbe- vreau, avec la re"ponfe pleine d'indignation que Cbriftine e"crivit auflitot apres au His de ce Roi infortune, oil elle abhorre & defrproave hautement cette action d'un Parle- ment fanutique? Nous en donnerons 1'extrait ci-defTous. (|) II fc plaignoit, dit Cbanut (3) a tout le monde qu'on ne lui parloit a fes audien- ces que de Philofophie, de divertiiTemen? 6c de Ballets, fans lui dire ni oui, ni non, fur ce qu'il avoit propof, & qu'on ne le prioit que d'avoir patience. Wbitlock dit lui- meme dans fa lettre a Cromvel en 1653. Nous deviendrons ici favans dans les hngues en (i) V. les Negoc. Seer, de la Paix de Wtjtph. 1700. pag. 673. T. II. pag. 8. 46. 66. Si. O) JMein. 1. c. Tom. III. pag. 330. & Rymtri (z) Bernard Nouv. dc la Rep. des Jetties Juin afta publ. Tom. IX. f. IL 2j$. Bbb 2 38b M E M O I R E S C O N C E R. N A N T L'au envoie pour s'afllirer de 1'amitie de la Suede. II craignoit, que ce Roi'aume ne fe refolut a affifter les Ro'ialiftes en leur envoiant du fecours du Port tic Gothembmirg , de la meme maniere que la France avoit fouvetit feconde les EcoJJbis centre les Angkis. Le Roi Charles II. en avoit ecr.it a la Rcir.e, corame auffi au Chancelier Oxenftiema (*). Un Hiftorien lone grandemtnt la reponfe genereufe que Chriftine lui avoit faite la-defliis (f) (a) , quoiquc 1'interet d'Etat I'emponat pen apres fur les fentimens, qu'eile Hu avoit temoignes. Cependant on fit languir rAmbafiadeur tKbitwdt qui fe plaignoic , qifil n'avanc-oit rien en fes negociations (#). II difoit , que quoique les Ambaf- fadeurs des autres Rois & des Princes , & entr'autres ceux de France , fe fuilent rendus aupres du Prote&eur , pour rechercher fon amide, la Suede ne lui en avoit envoie aucun , ni fait etat de celui , qu'il avoit envoie a la Cour de Suede... Neanmoins la Reine diffe'roit de jour a autre de s'ex- pli- 0) Huber tnjlitut. Hift. Civ. Tom. III. 52 f 53. Parival ' Hift. du Siecle Tom. II. f. 5<53- p. 226. Chanut /. c. pag. 322. 323 g 368. (b) Hollandfe Mercur. ad aim. 1654. $ en parlant continuellement Francois & Latin: ce qui ne peut s'eViter toutes les fois qi>c nous nous, rencontrons avec des perfonaes d'ici. Le Chancelier parle bon Latin. L:i Reine ne pnrle que Francois, & Elle m'entend aufll bL-n quand je parle Francois , comme fi je parlois Suedois. (*) Voici cette lettre du Roi Charles II. au Chancelier Oxenfticrna . Carolus M*. Brit*. Princeps, Dux Coinubits ? Albania. III***. & Excel!"". D. jixelio Oxenflie rnce , Coiniti Sudermannix Auftralis , Baroni in Kytnitbo, &c. Sena,' 1 ,, tori regni, SuscieeCnncellario &c.J'al. ,, Ill*>e Dne psrqnam fideltm & perdilettttm nobis Confanguineum nojlrum, Cemitem de Hainceford ad Ser<"'-Sueci(c Reginam, mandutis nojiris infiruStuin mittimus, euin in ,, finem ut quo in loco res Anglice Jifce funt , apud fitain M. exponat, & nojlro nomine au- xilium, in bifce quibus circinnfepti Jumns angnftiis , imploret, ut populi inbnmana rebel- Hone ferocicntis minas coercere ^f con/ilia in Sermi Pairis nojlri coronam & caput inten- ,, tata, fun benigna interpofitione dirimere dignetur , hanc infuper pradi&o Consanguine o no- ,, flro provinciam demandsvimus , ut Veftram conveniat Excellam & per amice roget, ut ,, qua valet ipj'a apud Ser^i" Reginam gratia , eadem uti velit in promovendis rebus quas ,, noftra vice a M*t fua pctiiurus eft. Sic enim Excel* V* mentis maxima condigna, & ,, ea confpicua virtute , Jingulari prudentia fef bumanitate prejt&bitis, quorum fa de dire, qui cut pris 1'afcendant dans la fuite, fi la mort de Cromwcl pas mis le Cardinal a convert d'une dangercufe concurrence: que Richelieu crai- plus que la pefte & c'eft a cet ^gard que Pufendorf d:t (hift, Brandcnb. Libr. X. n'eut gnoit . 28) Cromwsllus Mazarino isnpenjius Cacodcemone reformidatus (r) (i) Voicz Clarendon bift. de Rebellion T. V. p. 334 M E iM O I R E S C O N C E R N A N T L'an 4 ' d Amarar. mftitue p i'erdmand W. Roi des Remains , (a) (*) & pour faire voir combien elle etoit portee pour Moutecuculi , elle 1'iionnora de 1'Ordre de fa Chevailerie d'AM A R ANTE qui lui fut donne avec beaucoup de ce'remonie. Et a cet- te occafion nous croions qu'on ne fera pas fache de voir comment cet or- dre fut inftitue , & les ceremonies qui s'y obferverent* L'Ordre de I'Amarante (f) , difent les Ecrivains (Z>) , fut inftitue' par la Reinfi ' (a) Ne"gociat. Secret. /. c. T. III. p 552. Chanut Mem. T. III. p. 315. 453. &c. P. f 614. Honorti Divert, jur. la Cbtval. p. 278. Gry- /7 - x V. Hid. des Ordres Monaft. Relig. phius von geiftl. u Welti. Ohfen/p. 3*51. 0V. & Milit. r. Vlll p. 297. U ill. des Ordr. Mil. ou des Cbeval. Tom. IF. p. 263. &c. Teasel Mon. Unterred. 1705. p. 431. V. I'Appen- dice num. XLII. D'oii 1'Ordre de I' Ami- i nommc, (*) La lettre que Cbriftine e"crivit la-deflus aux Ele&eurs efl datee du 23 Avri! 1655 (i). Elle s'y fert de ces exprellions : ,, Quod fi memoria revocamus & ob oculos nobi-f- ',, ponimus , iiiperium Romano-Germanicum aliquot jam Jeculis ab inclita Auitriaca doina , ex f , eatjue longajerie progeneratis Imperatwibut laudabiliter adminijlratum flyruiffi fc Mr. Ludolpbo fait la-deilus cette remarque (2) qu'on ctoit etonn que Cbrijtine fe fut explique"e en des termes fi favorables a la Mai Ton d'Autrlche, & Mr. Boreel Miniflre de Hollande alors 4 la Cour de France dit au Grand Peniionaire de Witt: (3) ,, que !a France s'^toit fiatee ci devant d'empecher les fils de TEmpereur d'etre ^lu Rois des Romains, fondle fur ce que la Reiae de SuHe vouloit auffi s'yoppofer, mais qu'on avoit vu avec ^tonnement, que cette Reine avoit ete la premiere a poufTer oc a fa- vorifer- cette eleftion. II y a ici , ajoatatil, quelques perfonnes qui pre*tendent fa- ,, voir que 1'Empereur a f^u changer en fa faveur les difpolitions de cette Reine, en 3, 1'affurant, qu'il ne s'oppoferoit pas, fi elle entreprenoit de r^duire Breme (ous fon ob^iltance . Ce qui feroit dangereux pour la Hollande. Cet appui de Cbtif. ,, tine en faveur du Roi des Remains eit plutdt dft aux Infinuations de Pimsnteili & de Montecucitli , qui en ce terns la faifoient accroire a Cbriftine qu'elle epouferoit le (its de 1'Empereur & deviendroit par-la Imp^ratrice. On n'a qu'a lire toute cette trame dans la d^p^che du S. Wbijller a Cromwel, dans Rymeri Fxdera f A&a Anglic. T. IX. P. II. pag. 284. (j) Quant au nom d'Amarante que Cbriftine donna cet Ordre, on 1'a de>iv^ dumot Grec d'une fleur appellee ainfi, parce qu'elle ne' fe fletrit pas, mais rerte toujours en vigueur. C'efl par cette raifon que'iColumclle 1'a appellti immortelle immortalcs Ainaran- ti (4). Cependant le celebre Mr. Gram m'en ecrivit de Coppenbagjte pen avant fa more (5) en ces termes: ,, il faut que je vous communi(}ue une penfee ou conjecture, vraie ,, oafaufTe, qui m'efl autrefois tomb^e dans 1'efprit, & do;it je n'ai point encore pu ,, me defaire entierement. Je fais fort bien , que tous les Auteurs , qui en parlenc, le d^rivent du nom d'Amarante , que la Reine avoit elle-meuie ported dans une Pafto- rale reprefentee peu de jours avant qu'elle initituat 1'ordre. SI .on I'a pris de quel- que fable de 1'nncienne Mythologie, ou des Romans, comme de YAJhee, d'l7r/J & femblabies, ce qui pent fort bien etre, puifque 'Apuaxrtos efl un nom Grec &fig- nifie immarcejfiiile , & fi de tels exempies fe renconrrent, je n'aurai pas le mot a di- , re. Mais fuppofe, que ce nom fut alors invent^ pour le theatre de Stockholm, neme , fera-t-il pas permis de foup^onner qu'il renferme un cutre miftere cache, & qu'on , a voulu honorer par-la, la petite ville d' Ainarante en Portugal, vu que c'e"toit de la , que Don Pimentel ou fes Ancetres tiruient leur origine ? Mais je puis fort bien me , tromper & de teilcs coincidences ne font pas fl rares, qu'clles doivent faire i!!ufion , aux gens un peu vcrfts dans les Belles-lettres & dans I'Hitloire. Feu (t) Luni* lit. Procer,um Europ. pag. 497. Sc joi. rar.tt & Merc, de Fr. Dec. 1749. r. vol p. 149, (z) Dans fa Schaub. ad h. ana p. 321. item Cur. Eucler u. Staats CHT. I. c. $. XVI. p. 84. f$) Lettrcs 5c Negoc. dc Witt Tom. I p. 211. (5) S.a lettre cii datee du 10. t'cvr. 1745. 5< M (4; V. Menage DictitMiaiie ttyuiol, art Am a- moiuur le jy. du meme mois- CHRISTINE REINE DE SUEDE. Reine Chrift'me un an avant qu'elle abdicat (*). II y avoit alors unecofJtu- t'an me etablie en Suede de faire tons Jes ans une fete que Ton nomme fFirtb- :<554 - fcbaffi (f) , c'eft a dire une aflemblee honnete, ou il y a toute forte de di- " vertiflemens & de jeux. Ces fortes d'aflemblees font compofees d'un cer- tain nombre de perfonnes qualifiers qui fe deguifent , & cette fete com- mence ordinairement le foir & ne finit qu'au jour. Le jour des Rois (j) ai'anc Feu Mr. Gram a bien fait d'ajouter ici qu'il peut fe tromper. II y a toute ap'parence qu'il I'a fait. Car les Savans de Suede font d'accord (i) que 1'Ordre d'4mardnte fut inftitue" par Cbriftine I'anidsr. & le Sr. Wbiftler dit pofitivement dans fa lettre au Pro- tefteur Cronwoel, que Cbriftine a'iant repreTente" dans une Come'diele role de la Bergerz Amaranis , dans la chanfon paftorale de laquelle il y avoit Viva dmaranta, la fantaifie lui prit d'inftituer fon Ordre fous ce nom d'Amarante. Cela pof< comme de fait , il ne fe peut pas qu'il y ait la quelquc rapport avec le nom & la faraille de Pimentelli, qui ne vint en Suede que 1'ann^e fuivante i652,eomme nous le prouverons biencd: par tt- ne lettre de Cbriftine mgme, & ainfi Gry]&;ar ? Ebert & Zeilerus fe trompent de meine , 1'un pre"tendant que cet Ordre fut inftitue Tan 1645. & 1'autre Tan 1653. (2). (*) Mr. Cbanut rapporte, (3) que la Reine avoit eu de'ja en 1647. I a penfe*e d'e"ta- blir un Ordre, mais qu'elle n'avoit pas voulu Pattacher a la Religion. C'aura apparem- ment e'te' 1'Ordre du Parmffe, que loifqu'el'e e"toit plus adonn^e a 1'dtude, elle avoit eu deflein d'inttituer. Le Sr. Wbifller en parle dans la meme lettre au Protedleur Cromwel. Mais Cbanut dit qu'il n'etoit pas bien facile d'en e"tablir aucun fans ce fondement, ni fans un rapport a la Religion & des ce're'monies attaches au culte de Dieu: qu'au- treraent ce feroit plut6t une galanterie de Cour, ou un jeu d'enfant, qu'un Ordre. Ce fera pour cette meme raifon qu'elle aura rcnonce" a 1'id^e qu'elle avoit d'inftituer un. autre Ordre fous le nom de Parnaffe , que le Sr. Wbifller, Miniftre de Cromwel a la Cour de Sutde, lui aprend que la Reine avoit defTein d'y introduire. Suede dre porteroit le nom de Cbriftine,, en mil-moire de fon Inftitutrice, que d'un cdte fe trouveroit le nom d'lmmamiel au milieu d'une Croix blaiache, entoure'e du Soleil & de 1'autre c6t le nom de la Reine eKpriiiiS par un double C. au milieu de la Croix. On ne trouve pas que cet Ordre ait eu lieu. Mais 1'an 1656. Charles Gujlave Sue- L'ordre de ceiTeur de Cbriftine e"tablit 1'Ordre du facre Nom de jfefus, & comme il eft dit dans les jefus inftitue ftatuts memes, il le fit en reconnoiflance pour la Reine qui lui avoit cede* la Couronne P a r Charles- de Suede. La guerre avec la Pologne & fa mort qui arriva quatre ans apres, en empe- Gft ft* v *' cha, felon toute apparence , re'tabliflement dans les formes. Cependant nous donnerons v 1>A $ le r(5glement & les ftatuts, tels qu'ils fe trouvent dans les PalmskSldiana : d'ou ils ont n ,j m< xLni! ^td nouvellement public's par Mr. Rofenftierna de Ordin. Equeftr. Suec. in Append. N". IV. (f) Le mot Winbfcbaft ou Wardskap eft Suddois & dllemand, & compote de deux qui fignifient Compagnie de rHote ou Fate de I'Htitellerie. On peut en lire la defcription dans le Mercure galant (5). (4) Le P. Honore aufli bien que Mr. Elie Asbmole fe trompent done fur I'anne'e de TiniHtution de cet Ordre (6) 1'undifant qu'elle fe fit vers 1'an 1640. & 1'autre vers 164.5. Mr. le Profefleur Lagerlof & Mr. d'Adlerfeldt qui I'ont aufli remarque, difent apres Mr. Brenner (7) que 1'Ordre d'Amarante a e"t inftitu^ 1'an 1651. comme nous venon* de le dire ci-dedus. (i) V. Lagerlof & Ailerfeh de Ordinibus E- Aifta publ: Angl: de Rymtr T. IX. P. II. p. 284. (]ueftr. p. 67. 8c Brenner ib. item Suecia ant. & Hod. (4) Palmsk. ad ann. 1648. p. 539 & ad aim. par le Comta Dalberg oil 1'annee de 1'inftitution 1650. p. jjg. 16 si. eft expreflement marquee dans 1'empreinte. (s) Du mois de May ifi-jy. pag. 75-77. it. Merc. (il Grypriius \. c. p. 351. &c. Ebert> Gel.- de France 1. c. pag. ijo. Frauenz. n, 91. Zeilershi&. Handb. P. II. p. 338. (6) Dans fes Oiff. fur la Chevalerie pag 27?. (j)Mem.'T. I- p. 213. & Whiflltr dans les (7) Difquifitio de Oidinib. Equeftr. Suecis'p. 67. Tome L Ccc 386 MEMOIRES CONCERNANT ai'ant etc choifi par la Reine Cbriftine pour ce divertiflement , au lieu du fffrthfchafft qui fembla trop commun a cette Princefle , elle voulut imiter le feftin des Dieux , ordonnant pour cet effet aux Seigneurs & aux Dames de fa Cour de paroitre fous des habits qui reprefentaflent les faufles Divini- te's. Les tables furent couvertes avec beaucoup de magnificence. Elles e- toient fervies par des jeunes perfonnes vetues en Bergers & en Nymphes , & felon ce qui fe pratiquoit en pareilles Ceremonies , la Reine prit le nom SAmaranle. Ceftj- a - dire Immortelle. Le divertiflement dura jufqu'au lendemain matin , que cette Princefle changeant tout d'un coup d'ha- bits , commanda aux Seigneurs & aux Dames de la compagnie de quit- ter aufli les ornemens de leurs faufles Divinites, & ce fut pour lors qu'el- le inftitua 1'Ordre de \Amarcmte , donnant a ceux qui etoientprefens une chijffre de Diamans compofes de deux A renverfes ainli Tun dans 1'autre au milieu d'une Couronne de lanrier , entouree d'un rouleau , fur le- quel il y a voit en ecrit ces paroles DOLCE NELL A MEMORIA (*). II y avoit quinze Chevaliers & autant de Dames (f) , qui avec la Reine faifoient le nombrede Trente&un, (j) & ceux qui avoient etc ainfi honores de cet- (*) Le P. Honori fe mdprend , comme nous le verrons ci-apres , quand il dit qu'on lifoit fur le ruban ces paroles Dolce nella Speranza. (I) Le Sr. Picqucs ou Vauclennes compilateur desMe"moires deCbanut fe trompe auf- fi en difant: (i) qu'il n'y avoit point eu dans cet Ordre de perfonnes du fcxe queC/jr//- tine. Le P. Honore eft la-defTus contre lui (2). (.).) Le Sr. Picques aflfure que Mr. Pimentelli avoit ^t^ faitle premier Chevalier apres la (i) Mem. 1. c. paj, aji, (*) Son Hift. des Ordres T- IV. p- afij. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 387 cette Amarante , avoient Je privilege de manger tous les famedis avec cette Princefle dans une Maifon de plaifance a un des fauxbourgs de Stockholm. Les ceremonies de cette inftitution fe firent de cette maniere (a) : la Reine s'etant affife fur un Tronefit aprocherd'elle les Chevaliers qui avoient ete choifis pour recevoir cet Ordre, accompagnes de leurs Parains. Lorf- qu'ils fe furent aproches du Trone & mis a genoux , elJe leur prit la main tour a tour , & leur fit faire ferment qu'ils lui feroient fideles & qu'ils fou~ tiendroient fes interets. Enfuite elle leur mit a chacun un manteau d'Ar- moifin , avec la marque de 1'Ordre, enrichie d'or & de pierreries. C'etoit une Guirlande de laurier entouree d'un ruban fur lequel on lifoit ces paro- les: DOLCE NELLA MEMORIA au dedans de cette guirlande il y avoit deux A. 1'un dans 1'autre travailles en or & enrichis de >iamans. Outre cela elle leur donna a chacun un joi'eau d'or & de Diamans pour le porter pendant au cou, avec un ruban cramoifi au bleu, & enfuite les Chevaliers prirent conge & fe retirerent. &c. Le Sr. Picques,. ajoute , qu'on donna aux Novices un papier, ouetoient les Conftitutions de J'Ordre & le ferment qu'ils devoient faire, qu'ils lurent a haute voix& enfuite preterent ferment entre les mains de Sa Majefte , favoir , que les Chevaliers $ Amarante qui ne font point maries , quand ils recoivent TOrdre , demeureroient toujours' gar^ons , & que ceux qui ont des femmes venant a etre veufs , n'en pren- droient point d'autres (*). Pour (a) P. Honor^ /. c. Tom. IV. p. 263. Chanut 1. c. p. 3 IS- la Relne , qui avoit aufli envoie" cet Ordre au Cornte de Ribolledo, Miniftre d'Efpagne, r^fidant a Coppenbague (i). Les difFtJrens Auteurs qui en ont e"crit, (2) comptent par- mi les premiers Chevaliers Uladiflas Roi de Pologne , Cbarles-Guftave , qui devint apres Roi deS&fe,fon frere le Due Adolpbe-Jean. Jean-George, Elefteur de Saxe,le Prince Frederic , Lantgrave de Heffe : outre d'autres Princes d'^llemagne , les Cointes de la Gardie, Wtttemberg , Douglas , Dobna, Tott, Scbleppenbacb ,le Felt-Mar^chnl yonder Linden , Sten- bergen,lts Comtes Caprara, Mrs. Strozzi , Baltjtr ode , Wlitlock , Morofini , Don Cueva &c. (*) Void un Poeme latin qui fut fait alors au fujet de cet Ordre: Qyid tibi cum flammis, flammasque imitante colors ,, Ordo? cut nomen Magna Amaranta dedit? Non Jatis eft tantum quod nomen pettore geftas ? Hi nc fatis eft famam nominis ire tut : At flammas remove , nunquam bene fiditur igni Mille necis caufas, milk doloris habet. Nee quiafwt diva, qua fers , injignia minus ,. Tuta fore , in mediis ignibus ilia puta. Omniaflamma vorat, nulli eft innoxius ignis Non parcit magnis ille vel ilia Deis. Arferunt flammis fatalia mania Trojeg Et tamen auftores ifta babuere Deos. At bene quod vefter flammis melioribus ignis ,, Ardet, nee quidquam cur timeatur frabet. ,, Nempe illi Auguftce eft peftus fua fpbtzra locufque In proprlo Icedunt nulla elementa loco. In (i) 1. c. T III. p. zjz & ji(J. 'cfr. pag. 4J?. Mfc. ad Coraitem Dalberg de Ordinibus Equcftf. (z) Htnure \. c. Asbweltli c. Oirnbielnt Epift. Suecias- CCC 2 388 MEMOIRES CONCERNANT Pour revenir maintenant a Mr. Pimentelli & a la faveur dont il jouiflbit aupres de Chrljline , nous produirons ici une lettre de cette Reine du 14 d'Aotit 1652 au Chancelier Oxenflierna , laquelle en marquant le terns de 1'arrivee de cet Ambafladeur d'Efpagne a Stockholm, fait voir auffi 1'empref- . . Mr - fement de Chriftine a le bien recevoir (*J. Mais nous ne favons rien du malheur dont elle y parle , en quoi il confiftoit , & quel en etoit le fujet. Voici la lettre: Ulffund den 14 Aug. i<5?2. Ulffund ce 14 Aoui 1652. TTOgt tirade Herr Riks CantZ- Tres-honnore Sieur Chancelier. *^ ler.Jbafwegiortmycket wdl Vous avez fort bien fait de m'avoir at j mig bafwen avi/erat om den aver , d e l^mve'e de 1' Ambafladeur J e fuis & feral H**f tigt barifran ocb hem igen. Jag bar bdrfedt fa ftor yncka, at iag bar baft bebof al min conftance til at intet troubler a mlg. Gud- wet bwad bar ivil blijwa af; v affeffiolin& dock ske bans willm i alt. Mera kan iag intct skrifwa. Nor Gud wil jag kommer bem> skal jag ah referera. Farer wdL Jag ar ocb blifwer Eder altid Jfteffionerade. CHRISTINE. CHRISTINA. Un auteur rapporte (a] que le Sr. Plmentelli fe fervit d'unflratagemepour Dc i i i i J r>i /! o f T maniere s'y s mtroduire dans les bonnes graces de Chnftine. Savoir, que fe prefentant pl i t p,- w . a la premiere audience devant la Reine , qui etoit affife fur le Trone , il fe ""^^ retira auffit6t avec une profonde reverence fans lui dire le mot, & que lefeSade ia kndemain il demanda une autre audience & tint a la Reine un difcours Reine ' bien flateur & tres-etudie. Sur quoi Chriftine lui aiant demande la raifon pourqaoi il s'etoic retire la premiere fois fans lui parler ? II lui repondh :. qu'il avoit ete fi frappe de 1'eclat de Sa Majefle , qu'il lui avoit fain tout ce terns pour fe remettre & prendre courage pour ofer paroitre devant elle. Cet auteur ajoute: que comme cette reponfe avoit extremement flatte la Reine , elle 1'avoit auflitot pris en affection plus qu'aucun autre Miniftre des (a) Dans les Staats-Gefcb. von Riga und Liefland pag* 24. Ccc 3 po MEMOIRES CONCERNANT L ' att des Cours etrangeres (*). Cela s'accorde aflez avec ce qu'un autre Ecrivain $2 ' dit au fujet de Pimentelli (a) qu'il connut d'abord le genie de Chriftine & en- tra aifement dans fa confidence: qu'il demela que la nouveaute avoit de puiflans charmes pour elle : Que de cette foule d'etrangers qu'elle attiroit a fa Cour, le dernier venu etoit le plus favorife: Enfin qu'il gagna fi bien fes bonnes graces qu'il etoit informe par elle des chofes les plus fecretes & qu'elle devoit le moins lui dire. Le Sr. Picques en parle de meme (Z>) ; mais les particularites qu'il en donne font fujettes a caution, comme forties de la plume d'un Miniflre, dont la Cour etoit alors en guerre ouverte avec YEfpagne, & qui etoit fache que Chrifline ne temoignat plus tant d'attache- chrijiine ment pour la France que par le pafle. II regarde la declaration de la Reine P ouV'r Efp a - centre le Portugal (qui fe fit au mois de Mai 1654) comme 1'epoque, ou 2 : que pour il avoit tTouve la Reine fort changee a Tegard de h France. Ill'accufe d'etre donfftFran. devende entierement partiale pour les Efpagnols & i'Empereur,jufqu'aleur a s'inquiete avoir voulu facrifier les propres Etats & la reputation meme de la Cou- :oup- ronne de Suede: Qu'elle avoit voulCi faire la guerre au gre des Efpagnols: Qu'elle s'etoit laiflee feduire par les artifices de Pimentel, qui avoit trouve LC cabinet moien de faire fortir de Suede le Cabinet de Prague (f) qui leur avoit coute de Prague. (a) Vo'iage d'Efpagne Tom. II. p. 9. fc. 370. 372. 408 &f 438. cfr. Wicquef. Hift. (b) Chanut /. c. p. 242. 250. 352. 365. des Prov. Un. ad h. a. p. 413. fc. ^^^ > ^^ > *^ v ^^'^^^^'^^*^^^5 < ^S^ v ^^ v ^C< v ^^^^ x ^^ < ^^^^^^ ^^ > ^^^i ( ^? <> ^? ^>^>^>5y>i^s>^^>5s> ; j^^>Ss>^>^>^>^>^ : i>^>>^>^^^>^^>^ (*) Le Mr. Chanut f$ut ufer d'une autre adreffe pour s'infinuer dans Jes bonnes gra- ces de Cbriftine. Car dans la premiere Audience qu'il prit de la Reine en qualite* d'Am- baflTadeur, elle le voulut obliger d fe couvrir & Ten preffa. II dit, qu'il ne feroit point de difficult^ de fe couvrir , quand il ne feroit que pour faire voir que le Roi de Fran- ce vouloit. bien entretenir un Miniflre du premier rang aupres de Sa Majeft< : Mais que le Roi fon Maitre, e"toit un Prince fi civil & fi bien ^Iev6, que fans doute il ne voudroit pas fe couvrir lui-meme, s'il avoit 1'honneur de parler a !a Reine, c'e(l-a-di- re, a laPrincefle du monde qui me"ritoit de plus d'etre fervie Sire've're'e, & ainfi qu'elle lui permettroit de demeurer dans le refpeft (i). (f) Mr. de la Motraye dit la-deffus (2): Konigsmark rernporta du palais Imperial de Prague, entre quantite" de pre'cieufes d^pouilles, ce beau & rare Cabinet que Don An- toine Pimentel del Prado Hjut enfuite tirer des mains de Chrifline auffi Iibe"rale &g^n5reu- fe des d^pouilles remport^es fur les ennemis du Ro'iaume, pour les diltribuer ^ fes a- mis , que fon Pere & fes Officiers Suedois 1'avoient t& de leur fang pour les emporter. Tout cela ne laifle aucun doute que ce Cabinet ne foit forti de SuJde. Cependant il s'en trouve un autre chez S. E. Mr. le Baron Loiioen Se"nateur de Suede, qu'on appel- le aufli le Cabinet de Prague. II lui eft venu de la famille de Fiemming. 11 eft fait a'un Autre Ca- bois brun boife" en bas reliefs & de pieces rapporte"es: portant les Armes de laMaifon Imp^riale ftAutricbe. Autrefois il a renferm^ plufieurs chofes pr6cieufes, en M^dail- les . antiques. 11 y a un autre Cabinet a Bruxelles chez le Sr. de Grieck , qu'on nomme le Ca- binet de Cbriftine, a caufe d'une grande pi^ce toute garnie de pierres precieufes, qui repreTente le veftibule du Palais Farnefe a Rome , &qui, a ce qu'on dit, a autrefois appar- tenu a cette Reine. Iln'y agu^resde Vo'iageursqui nel'aitvft, comme tel, fur la Place de laMonnoic, chez cecurieux Libraire, qui, dansladerniereinvafiondes Franpis , aeule bonheur de le fauver des Mains d'un autre Konigsmarck, eft la depuis (en 1751) vendu plus de 100 mille flor. a-S. A. R. le Due Charles de Lorraine autant curieux que Pro- tJcleur des Beaux- Arts. De cette maniere ce fameux Cabinet retourne en quelque ma- niere ^ la maifon tiAutricbe. fi) Wicqwf. Ambaff. Liv. I. Sed. XIX png. (z) Dans fes Voi'ages Tom. II. p. jji cfr 2j? ?c Lib. II. Soft. XVII. pag 2ij. 5c fon Hift. Meiern Afta P. W. T. II. p. *2j. ties Prov. Uuies T. II. p. n. p. 413. 414- CHRISTINE RE1NE DE SUEDE. 391 tant de fang, & de le rendre & Ja Maifon d'Jutriche, en quoi les Swdois, a L ' an ce que die le Sr. Picques, avoient avoue franchement, que la prefence&le l653 '^ fejour de Pimentel en Su&de 1'avoit plus ruinee , que fl I'Empereur y avoit " envoie une Armee de cinquante mille horames pour ravoir fbn Cabinet : Que Pimentel s'etoit vante a 1'Epoufe du Comte Jacob , frere du Corate Magnus de la Gardie, que deux mois apres que h Reine feroic fortie horsdu Roiaume, on aprendroit CQ que ce Mini/Ire d'Efpagne avoit fait pendant fon fejour en Suede ^ ou Chriftine 1'avoit diftingue par-deflus tous les autres Miniflres , en lui faifant prefent non feulement d'un magnifique carofle , mais auffi d'une bague de grand prix a fon depart de Stockholm. Mais quoique tous ces faits & plufieurs autres, dont le Sr. Picques a fait le recit, fe trouvent un peu exageres en eux-memes & dans leurs circon- flances,' il faut cependant convenir , que Pimentel avoit eu 1'adrefle de s'infinuer fi bien aupres de la Reine, qu'en ce terns-la elle n'etoit environ- nee que de lui, du Comte Ulfeld& de Radziejowski (*) Vice-Chancelierde Pologne, & que ces trois perfonnes, comme le dit le Sr. Picques, s'effor- oient par leurs intrigues , de 1'aliener de Ja France. Cela inquieta cette Cour au dernier point & la fit mal penfer des di/poiltions de Chriftine a fon egard (a). Ce fut aufli la raifon pour quoi Chanut eut ordre de retourner en Sutde pour connoitre les impreiFions que Pimentel avoit pu donner a la Reine touchant la Maifon tiAutriche. Y etant arrive , on lui fit entendre que cela ne devout point donner d'ombrage a la France , & que la Suede ne fe departiroit pas de fon amitie pour elle. Mais k la fin la Reine voiant elle-meme que tant les marques d'eflime qu'elle donnoit a Pimentel revoltoit Le s , r - pi - . memelf3.it de Suede, (a) Chanut T. III. p. 20. 77. 96. 112. Liv. I. Se&. XXV. p. 366. fcf L. II. SeS. 191. 299. 334, 365. 375. Wicquef. Amb. IL p. 20. (*) Sa vie eft rapportde plus au long dans le Diftionnaire de Moreri (i) & ne lui fait VeR gueres d'honneur. Arriv6 a Stockholm au mois de Mai 1652, il demanda la proteftion ^'^' de la Reine & publia hautement que fa difgrace ne provenoit que d'un commerce fe- cret du Roi de Pologne avec fa femme. Chriftine envola le Sr. Roc, Franfois de nation a la Cour de Pologne avec une interceffion en faveur du vice-Chancelier. Mais le Roi a'iant intercept^ les lettres de Radziejowski au General des Cofaques , qu'il animoit a une nouvelle guerre centre fa Patrie, n'en fut que plus irn'tci & demanda'qu'il fut chaf- fe de Suede. Sa faveur aupres de la Reine baiffa un peu dans la fuite. Mais Charles- Giiftave tant inont^ fur le Tr6ne & a'iant rompu avec la Pologne , Radziejoivski com- manda dans fes troupes conjointeinent avec les autres Ge"ne"raux & fervit ainfi centre fa patrie. Le Roi de Suede eut enfin quelque foupgon centre lui , le fit arreter a Elbing vers la fin de Tan 1656, lui reprocha fes diverfes trahifons, & le fit conduire en Suede, d'ou il ne fortit de prifon qu'apres la mort du Roi & la paix conclue en 1660. Apres bien des peines, il fe reconcilia avec fa Patrie, & on le chargea en 1665 d'une Am- baflade a la Porte Ottomanne, oil il mourut deux ans apres. Nous cbnnerons dansl'Ap- pendice une lettre de Jean-Cajimir Roi de Pologne & la Reine Cbriftine , au fujet de ce V.l'Append. Radziejowski , quand il tkoit a la Gourde Suede. Elle ticlaircira en partie ce qui a &e" N - dit ci-deffus de lui. (i) Art. Radziejcwiki. item Pufer.d. Hift. Car. Units T. II. P. II. p. 481. 452, Gujl. Lib. III. $. 41. 5c Wuq*tf. Hift. des frtv. 392 MEMOIRES CONCERNANT L'an i es efprits, elle prit la refolution de le congedier, reconnoiflant auffi,qu'un l653 ' plus long fejour de ce Miniftre, qui etoit generalement hai des Suedois,fe- roit doucer fes allies de la fermete de fon alliance. II partic done de Go- thembourg: mais ai'ant etc accueilli d'une grande tempete en pleine mer, & fon vaiffeau faifant beaucoup d'eau , (*) il relacha au meme port & pafla encore fix mois a la Cour de Suede > loge meme au Chateau Roi'al (f). Avant fon premier depart , il avoit demande au Cardinal Mazarin un pafleport pour traverfer la France en allant a Madrid (a). Le Cardinal etoit fur le point de le lui faire expe'dier. Mais Pimentel Jui ai'ant apris fon re- tour en Suede , void la reponfe que Mazarin lui fit en batten, & dont nous donnons la traduction d'autant plus volontiers , qu'elle a etc fake de la propre main de S. M. la Reine de Suede, Ulriqiie Eleonore de bien-heureule & glorieufe memoire. Illuftr. Sign. Monfieur Vi icevci una lettera di y. S. illujlnjjt- J'ai recu votre lettre de Stockholm ma di Stockholm delle igd'dgofto, de 1'onzieme d'Aout, par laquelle con laquale mi dava auvifo dellafua par- vousme donnez avis de votre depart tenza da cotejla Corte , a quella di Spagna de cette Cour-la pour celle d'Efpagnc. & mijigmficava ildefiderio, che haveva Comme vous rn'avez marque le defir d'un pajjaporto per ilfuo ritorno di Ma- que vous avez de trouver a Bruxelles drid un, f (a) Chanut /. c. pag. 237. (*) Void ce qu'en dcrivit le 2 d'Oftobre 1653 le Grand -Penfionaire Mr. de Witt d Mr. Boreel Miniftre de Hollande en France, (i) Mr. de Pimentel, Envoi dCEfpagne a la Cour de Suede , e"tant parti de Gotbembourg & a'iant ^t^deux a trois jours en mer, a- voit ^tti contraint par une fente qui s'e'toit faite a fon vaifleau, a ce qu'on difoit, de retourner fur fes pas, & a'iant d^barque", il s'e'toit d'abord rendu aupres de la Reine (Cbriftine} au lieu d'attendre que fon vaiffeau fut radoube 1 , ou de prendre quelque au- tre commodity pour s'en retourner. Sa Majefte" ^toit alors a Norkoping , & cet Envo- ie" avoit dit, qu'il avoit ordre de patter 1'hiver en Suede. (f) Voici ce qu'un Auteur d'une hifloire de Hollande dit du fe"jour de Pimentel en Sue- de (2). Pimentel devint un favori odieux a toute la nation Suedoife. II e"toit Efpagnol & d'une Religion qu'on ne tol^re point en Sudde. Cbrifline ne gardoit aucune meTure avec le public pour lui , & non feulement il ^toit de tous fes plaifirs , mais il la fui- voit a pi^ ^ la portiere de fon caroffe, quand elle alloit a quelque enterrement. II fe logea dans le Palais fi pres de la Reine, que lorfqu'il eut fon audience de conge", le caroffe de Sa Maj'efte", qui alia le prendre chez lui, au bas de fon de"gre", e"toit encore a fa porte , lorfque les chevaux ^toient devant le grand efcalier de 1'Appartement de cet- te Princeffe. Le peuple ne pouvoit fouffrir les complaifances de la Reine, qui, au- lieu de le laiffer partir, le retint longtems pour des Fadaifes. C'eft ainfi qu'on appel- loit un Ballet, qu'elle vouloit danfer devant lui, & dans lequel elle lui fit prefent d'u- ne bague de grand prix, qui tenoit fon mafque... 11 la faifoit pancher du cote" du Papc & de 1'Eglife Romaine &c. &c. f i) Dans fes lettres & Ntgac. T. I. p. ij. i- (2) Bafr.agt Annalcs dcs Prov. Units ad ann. tern dans les A&a publ. Ryntri T. IX. P. II. p. I6H- P- 35- CHRISTINE REINE DE SUEDE. 393 drld a Bruxelles, per la cui fpeditione un pafleport pour votre retour de diedi fubito Fordine neceffario : Quando Madrid , j'ai donne auffitot 1'ordre poi mifopraveme un j altra fua fcritta di neceflaire pour 1'expedier ; mais vo- Vaftena , ricevuta di me con infimtopia- tre lettre pofterieure ecrite de Wad cere, per che avifandomi V. S. Illuftrifft- ftena^ que j'ai rejue avec bien du madella rifolutiom c' havevaprefa difare plaifir, m'a'iant marque la refutation ilviaggioperterra , havevo concepitafpe- que vous avezprife, Monfieur, de ranza, dipoterla vedere e godere in quc- faire le voiage par terre; mon efpe- fta Corte , e di renderk tutti quei fegni ranee s'eft evanoui'e de vous voir ici d'affetto e diftima che io hbverfo la fua & de jouir de vous en cette Cour, perfona, e che richiedonlemie obligatio- pour vous temoigner I'affeftion & ni 9 delle quali non perderb mai la memo- 1'eftime, que j'ai pour vocre perfon- rla 9 e mentre ero fu I punto d'inviarleil ne & que je conferverai to uj ours pajjaporto, che per quefto effetto mi cbiede- pour vous. Cependant comme j'etois va 9 mijfb'fefa una nuova lettera di V. S. fur le point de vous envoi'er le paile- Illujlriffima per laquale Ella mi raguaglia port demande il m'elt parvenu une I' ordine da Lei ricevuto di fermarji in autre de vos lettres par laquelie vous totefta Corte : il che benche fegua con m'apprenez 1'ordre , que vous ave milo pregiudizio , foffriro non dimenow* reju , de vous arreter encore a la lontieriper la perfeveranza che devepor- Cour ou vous etes. Bienque cette t are a Lei la conti nuat lone di cotefto wbif refolution foit a mon prejudice, j.e impiego. M'imagino che poteffi maijuc- la fupporte neanmoins avec refigna- cedere a V~ S. Illujlr, borafca piufaw- tion a caufe de la fatisfaftion qui rewle della prefente, laquale havendola vous doit revenir de la continuation Jpinta dalle cofte di Noroegia alpono di d'une fi noble charge, &j'eftimeque Gothenburgo , hahaiMtalafortunadipo- jamais aucune bourafque ne vous a tere reflare appreffb una Regina d*un va- pu etre plus heureufe que celle qui lore cofi fmgolare e di cofi alte virt u , che vous a poufle des cotes de Norvegc ciafcuno deveftimarfuo grand vantaggio, au pore de Gothembourg, puifquefans il poterlafervire. I Jo che fua Maejla cela vous n'auriez peut-etre paseule c' informata de-' rivsrenti fentimenti e hb bonheur de refter plus de terns aupres verfo ilftiofublime mcrito, e non dubito d'une Reine d'un merite fi extraor- puntOy che non mifacciagmjliziaincre- dinaire, & d'une fi haute verm, que dermi il piit divoto e partiak de fuoi chacun doit eftimer pour un grand Jeroitori, efe 7. S. illuftr. mi far a fa- avantage de pouvoir la fervir. Je far vore di confirmar la Maejla f win quejio que Sa Majefte eft inform ee des fen- concetto, accrefcera le mie obligation, timens refpeclueux que j'ai pour fon ame in mes'accrcfcefempre ildefiderio di fublime merite, & je ne doute nul- lement qu'elle ne mefafTelajufficede me regarder comme le plus devoue - * & le plus impartial de fes ferviteurs : fi vous voulez , Monfieur, me faire la faveur de la confirmer dans ces idees, je vous en atirai de grandes obligations qui augmenteront tou jours mon defir de pouvoir vous fervir. Tme I. >- L'an I653- 394 MEMOIRES CONCERNANT L'M fcroirla e k baccio k mani dl 1<553 ' V. S. illuflr. & Parifalli Sett. 1653- ]e vous baife les mains & je fuis. Monfieur. Jffeft. c attcnt. per.fenfrla Votre affeftionne & acquis Serviteur n r-f m f re i * T Le Cardinal Mazarln. 11 Cardinal Mazanni. prend la penfee de quitter la Couronne. Par cette lettre du premier Miniflre de France on remarquera les traits de la fine politiqne qu'il iache a Pimentel & la jaloude fecrete qu'il lui porte. Mais il ne laiffi pas pour cela d'etre toujours bien aupres de Chriftine & il ne quitta la Suede que peu de terns avant le depart de la Reine mme(*). Par toutes ces menees & d'autres pareilles il n'etoit pas bien difficile aux clairvoians de s'apper^evoir que la Reine avoit repris fa premiere penfe'e de fe demettre du gouvernemenn(). De plus , on remarqua qu'elle affecloit , depuis quelque terns , une conduite qui faifoit connoicre qu'elle en etoit prefque laffe (f) & que les heures qu'elle emploToit aux affaires lui duroient des an- nees. Des a6lions particulieres de fa part faifoient voir qu'elle fe degoti- toit de la vie qu'elle menoit. Elle difoit nettement je n'entens toujours que la meme chofe : je vois bien qu'il faut que je me remette a 1'etude & a la converfation des Savans. Erifin on remarqua chez elle une certaine melancolie, qui fit aprehender qu'elle ne lui affoiblit 1'efprit. Ainfi le bruit recommenja a courir partout , que Chriftine vouloit fe depouiller du gou- vernement&en revetir le Prince d&Su&de (/;). Le Re'lident Picqiies rapporte qu'il (a) Chanut /. c. p. 212. 242. 280. 318. 328. it. Hoffmans Starus-Kunft. L. V. c. IX. p. 309. Akzema ad. ann. 1653. p. 789. (&) Pufend. de R. S. Libr. XXFI. J. 18. Chanut /. c. p. 280. Mercure - Anglois en 1654. p. 90. Felleri Monum. Trimeft. I. p. 66. (*) II y a des preuves que Cbriftine a entretenu commerce de lettres avec Pimsntel a- pres qu'il fut parti de Suede. Mr. Boreel en e"crit a Mr. de Wilt de Paris le 23 oft. 1654. & lui dit (i). 11 y a une lettre ici de la Reine Cbriftine de Suede 3 Dom Pi- mentel, qui eft con^ue d'une maniere fi plaifante & fi ambigue & en des termes fi paflionne's de I'affection de S. M. pour Pimentel, que ceux qui ne connoitroient pas la vertu de cette Reine, pourroient s'imaginer fautlement, que cette lettre partd'un amour tout charnel. Cependant on ne doit la regarder que comme une preuve de la grande eftime & de 1'affeftion que S. M. te'moigne pour 1'efprit & ia capacite* que S. M. che"rit en Pimentel. Cette lettre eft remplie des plus fortes expreflions dont fe puifle fervir 1'ainour le plus violent"... Comme on n'a pas pii trouver cette lettre, il vaut mieux fufpendre le jugement qu'a port^ l-deflus Mr. Boreel , ennemi alors com- me fes Maitres du Minifte"re d'Efpagne. (f) II y a dans les Regitres du S^nat (2) un pafTage fort remarquable qui confirme ce dugout de Cbriftine pour les affaires. Le Comte Magnus en fait le rtkit, & dit en- tr'autres chofes : Que la Reine a'iant vil deux de fes Secretaires entrer avec ties pa- piers pour les faire figner, elle avoit dit en pr E vous ai rendu compte autrefoh des ratfons.qui itfont ob/igt de perftverer dans le dejjein de mon abdication : Vous favez que cctte fantaifie m'a dure long-terns '-, & que ce n'e/l qi^apresy^ooir pcnje bult ans, queje me fuis rejolue de Texecuter. 11 yen a pour k mains cinq que je vous al communique cette refolutlon , gp je vis vlorf, que c" etoit votre pure qffettion & Tint fret feul que vous pre-- niez en ma fortune , qui vous obligeoient a me refijler malgre le's raifons que vous nepouviez condamner ^ que I que peine que vous pr if- Jiezpour nfen dijjuader. J'avois plaifir de mir que vous ne trou- viez (*) L'imprefllon de cette lettre que Mr. le ProfefTeur Kosbler a prociirde, porte la date du 27 FeVrier : (i) raais la plus jufte eft du dernier da meme mois, vieux ftir Je, qui eft celle de rimpriin^ de Paris & de b copie de feu Mr. d'Ujfenbacb (2). Comme aufli ctl'.ffqu'a 6crite feu Mr. le Prof. Srhtffer , (qui e^ok alors fur le lieu) de fa propre main , que je gnrde moi-meine. La copie de Mr. Koebier~c\ii'il croit avoir t tir^e de 1'original, mais qai n'e't faite que fur celle de Mr. IVicquefort , n'eft pas e"xemptede toute faute. 1! auroit p.u confulter d'autres ddttious excepte" celle de Fellsrus, (qui e'i tres fautive) & celle de Cbannt. Cette lettre fe trouve dans le Ilecueil de Harangues, (3) dans les M^moires de literature (4). Dans le Recueil de pieces d'hifloire & de li terature (5), dans lesAnnales des Prov. Units par Bajnage (6), dans Londorp. Atta Pull. (7) & en latin dans Mr. Forftner a la fin de fon judicium de Moderno imperil ftatu; M d'tion d'Upfal. La copie qu'on en donne ici vient des Archives de Suede & a e'te'con- ixontcc ayec une autre de feu Mr. le Baron R-'iamb, Pre"fident an Confeil des m!ncs a Stockholm. (i) Dans les M'lntz-Bcl. Tom. XVI. pag- 357. (}) Pag.- 111. (i) V. le Catalogue de fes Manufcr. in 8. p. (4; P.' II. p. 157 ifij- J4i. n. 6. item Mem. Ac Chanut T- HI. p. 301. (<) T III: p. iog-iii. it 1'elleri Mo;itun. incd. p. 6p-/i. dont la copie (6) T. I. r,. jf, pas cunc&e^ (7; T. VII. p. so.- CHRISTINA REI^E DE SUEDE. 347 viez rien dans cette pen fee qui fut indigne .de moi. Feus favez ce queje vous ai ditjlirce fujet la dcrnierefiis que j^euslafatisfattion de vous entretenir. Dans f efface d'un fl long-terns tous les incidens ne m'ont jamais fait changer : fai regie toutes mes attionsjur ce but 5 P je les ai conduit es a cette fin , Jam balancer a cette beure , que je juis prete cTacbever mon ralle pour me retire r derriere le theatre. Je ne ntinquiete point du Plaudice. Je fais que lajcene que fai reprefentte n'a pu etre compojee felon les loix communes du theatre. 11 eft malaife que ce qtfil y a de fort , de male 5? de vi- gour eux ptiiffe pin ire. Je per met s a cbacun a"* en juger felon Jon gt- nie\ je ne leur puis oter cette liberty & je ne le voudrois pas me- we quand il feroit en monpo-uvoir. Jefais qtiily en aura peu qui en juger ont favor abkment ) & je rn'offure^ que vous etes de ce nombre. Le rejle des hommes ignore mes raijons 5? mon hunuur , puifque je ne me juis jamais dedaree a perjonne qu'a vous & a un autre ami 3 qui a Fame ajfez grande & belle pour en juger de meme que vous. Suffkit unus, fufEcit nullus (*). Je meprile le rejle 3 5? jeferois honneur a celui de la troupe quejJeflimerois afiez ridicu- le pour irfen divert ir. Ceux qui examineront cette (iffion felon ks maximes-) qui font etablies commune'ment parmi les homines , labld- meront fans doute ? Mais je ne prendrai jamais la peine de leur fair e mon apologie. Et dans k grand loifir que je me prepare^ je ne je- rai jamais ajfez oifive pour me jouvcnir d'eux. Je Tempkierai a examiner ma vie pajjee 5? a corriger mes erreurs fans m'en eton^- ner ni m'en repent ir. Que j^aw^ai de plaifir a iw fouvenir d? avoir fait du bien aux bommes avec joie^ p d- avoir puni Jans pit ie ceux ^ qui le meritoientl faurai de la conjblation de tf avoir rendu perfon- ne criminel , qui ne k fut 5 $p d" avoir epargne meme ceux qui ff- toient ; J'ai prefere la conjervation de rEtat a toute autre conflde- rationi fai tout Jacri fie avec jo'ie a les inter e*ts , $fje ri*ai rien li me reprocber dans Jon adminijlration. J^ai poffede Jans jajle 5 je quitte avec facility. Apres tout cela , ne craignezpas pour moL Je fuis en jurete , 5? mm bien ne/l pas au pouvoir de la fortune > Je'juis heureufe, quoiqtfil puijje arriver. (*} Dans ['Edition de cette lettre dans le nouveau Recueil de harangues pag. ii(5. fl a: Satis eft unus , fai* cfl nullus , au lieu ds fujficit u-tus , fujjicit nullu-s. Ddd q 39S MEMOIRES CONCERNANT Sum tamen, 6 fiiperi , felix nullique poteflas, Hoc auferre Deo (*). Ouije JefuispJus que perfonne, sp je Je ferois toujours ; je rfa- prtbende point cette providcnce^dont vous me parlez. Omnia funt propitia. Soit qtfelle veuille pr entire la peine de rtgler mes affai- reS) je mefoumets avec le refpeft & la resignation que je dois afes volontes ; jolt qtfelle me laijfe la conduit e de moi-meme^ femploi'erai ce qu'elle itfa dome de facultes dans Tame & dans Tentendement pour me rendre beureuje. Et je le ferai tant que je ferai perfua- dee que jc ne dois rien craindre ni des bommes ni de Dieu. J'em- ploierai ce qui me refte de vie a me familiarifer avec ces penftes 5 b me fortifier Tame 3 / h regarder du port le tourment de ceux qui font agit6s dans la vie par les or ages qtfonyjouffre , faute d" avoir applique Tefprit a cespenfees. Nefuu-je pas digne (Tenvie dans /V- tat ou je luis ; fauroisjans doute trop d^envieux fi mon bonbeur e- toit connu. Vous wfaimez pour tant a/fez pour ne me Tenvier pas 9 & je le me 1 rite , puifque fai Ting6nutte de confeffer, que je tiens u- nc par tie de cesjentimens de vous ; ye les ai appris dans vos entre- tiens , & fejpere de les cultiver un jour avec vous dans mon loi/ir. Je m^affure que vous ne pouviez manquer de parole & que vous ne cefferez pas dans ce cbangement d'etre mon ami , puifque je ne quit- te rien de ce qui eft digne de votre ejlime. Je vous conferverai^ en quelque etat que jejois , mon amitie 1 , ? vous verrez qtfaucun cbangement ne peut furvenir 5 qui puijje alte"rer lesfentimens dont je fais gloire. Fousfavez tout cela^ &? vous croiezfans doute que la plusgrande ajjurence que je vous puiffe donner de moi eft celle de vous dire que jejerai toujours (f). Weflerahs le 28. P H n T c 'r T TM r C f IE ' Le Sr. Chanut , qui comme de raifon tenoit pour un grand honneur d'a- voir etc des premiers du fecret du deflein , que la Reine avoic forme de fe Le Sr. Cha- . , , r r LT-'JI-'- c r r.;yrepond. dcmettre du gouvemement, le crut oblige de lui ecnre encore une rois les ' fentimens la-deffus,' mais ce fut plutot un applaudiflement de la refolution, que (*) Ce font les paroles queLwcammet dans la bouche de Pompee mourant^dans faPbar- Jalia Libr. VIII. v. 130. 131. (f) Par la traduftion qui fut faitede cettelettre incontinent apres en plufieurs langues , on peut juger qu'elle avoitgngn^ 1'approbation de nombre de Perfounes , an moins quant au v. I'Apiend. fcns&aux fentimens qu'elle renferme. Nous en infererons la traduflion latine dans 1'Ap- n. XL V. pend ice , en remarquant qu'on lui a donn^ gratuitement le litre dc ValediStio Cbriftina Upj'a- iice ditto, , daos un impriic^. CHRISTINE REINE DE SUEDE. toit deja trop avancee pour pouvoir reculer. Void cette reponfe de Chanut. ' Madame La lettre que Votre Majefte s'eft donnee la peine de m'ecrire de Fefterahs ,, m'a furpris a une telie admiration , que de long terns je ne ferai capable d'y repondre avec la liberte que V. Majefte a toujours permife a fes Ser- viteurs, Tout y eft grand & Majeftueux , il n'y a rien en particulier qui ne force mon efprit a y donner fon confentement ; mais quand je me j, trouve a la fin tranfporte II loin de la route ordinaire des fentimens communs , je retournerois volontiers fur mes pas , pour reconnoitre fi je ne me fuis point detourne. C'eft ma foiblefle, Madame, que V. M. n'a pas feulement eu la bonte de diflimuler en cette lettre dont il lui a plu m'honnorer; mais elle m'a voulu rendre complice de la hauteur de fes penfees. Je parle ainfi , pource que le monde tient pour des defauts les vertus qu'il ne connoit pas , comme pour des offenfes les bienfaits qu'il ne peut reconnoitre. Je ne refuferois point d'etre charge de quelque part de cette illuftre accufation en la plus celebre caufe que le monde aic jamais examinee , s'il etoit vrai que je meritafTe cette gloire: mais V. M. fait que je n'ai etc que le fpeciateur ; Elle reconnoit que j'ai bien ofe de- vant elle foutenir le parti des opinions vulgaires, & que je lui ai fouvent avoue que fa pretence & fes difcours me faifoient voir la vertu d'un air que je n'avois jamais connu. Mon feul partage dans le grand deflein de V. M. qui exerce lejugement de toutes les Nations, puifqu'elle veut bien que Ton fache qu'elle a eu la bonte de me le communiquer , eft de temoi- , , gner partout , ou je ferai , que la premiere & plus forte confideration , qui a porte V. M. a former cette penfee, a ete le bien de fes Sujets & la furete de fon Etat, en prevenant les confufions & Jes partialites diffi- ciles a eviter apres les deces des Princes fouverains , qui font confideres comme les derniers de la Maifon Roi'ale. C'eft le motif qu'il plut a Vo- tre Majefte de me de'couyrir il y a pres de fix ans , a'iant 1'honneur de fervir le Roi, aupres d'Elle, & de cette premiere caufe font venues en- fuite les refolutions que V. M. a fait prendre a fes Etats, pour 1'etablis- fement de Monfieur le Prince de Suede , dont la Prudence & la Valeur etoient a V. M. des cautions du bonheur avenir de fon Roi'aume , & faifoient voir a tout le monde qu'un choix fi judicieux ne pouvoit partir que de 1'amour de V. M. pour ies peuples, de forte que s'il arrive qu'Eile veuille maintenant jouir elle-meme du plaifir d'avoirefFeftivementdonne une Couronne a Monfieur le Prince & un digne Roi a fes bons Sujets , etabliflant en prefence un Trone qui ne fe pouvoit mieux affermir que par fa propre main; il n'y a perfonne qui ne pinOe appercev 7 oir la fuite de tout ce grand projet, & qui ne doive admirer que Votre Majefte, aiant voulu que le bien public regnat plus abfolument fur elle, qu'elle n'a defire de regner fur fes Sujets. Ce coup neanmoins eft fi hardi, qu'il etonnera tous ceux qui ne fa vent pas que la retraite, que V. M. fe prc- pare, 400 M E M O I R E S C O & C E R N A N T L'an pare, eft plus grande que tons les Roi'aumes de la Terre, & qu'ette a 16 54 ' ,, dans Ton ame des trefors inepuifables de bonheur & dejoi'e. C'eft cc que je voudrois lew pouvoir expliquer, avec cette force & cette lumiere qui eclate en la lettre de V. M. puifque je ne la puis donner a perfonne par communication , pour ce qu'elle m'y a traite plus honorablement que ,., je ne merite en verice.: mais bien qne je ne me puifle pas faire entendre M avec cetce vigueur, 1'eiFpt n'en fera pas moindre, car la connouTance de ces chofes routes Divines eft un feu que chacun ne prend pas felon la grandeur du flambeau qui rembrafle; mais a mefure qu'ii ell capable lui-meme de le con9evoir ; deforce qu'avec cette petite etincelle , que Dieu m'a fait la grace de mettrc dans mon ame, & que V. M. a reveil- lee, je puis allumer de grandes flammes dans les efprits de ceux qui font lies a bruler de ce beau feu. Et pour les autres, la lettre merae de V. ,, M. qui eft tout dire, ne le.s echaufferoit pas. Je ne prends pas garde- en ecrivant ceci, que Votre Majefte ne defire point de nous ces iervi- ces, & qu'elle s'eil mife au-defllis de tons nos jugemens ,* mais fi ellene les agree pas pour el!e, je la fupplie tres-humblement qu'elle me lesper^- ,, mette pour ma fatisfaclion , car je me condamnerois comme un ingrat, 39 & je me tiendrois pour un malheureux , s'il fe paflbit un moment dema vie ou je ne fiuTe pas dilpofe de faire tout ce qui fera en mon pouvoir , pour etre en erlet. Madame de Votre Majefte -0 la Jrlays ce 2. Mars 1654. Le tres-humble , tres-obeiflant & tres-fidele Serviteur CHANUT. Quoique ce commerce de lettres n'eclatat pas (hot, ily cut pourtantdes indices, qui developerent ce que Chriftme avoit dans le coeur. II eft vrai, comme le dit le Sr. Picques (a) que tout le monde avoit une jo'ie inexpri- mable de la refolution magnanime de la Reine de Suede de fe priver en me- me terns de la prefence de Pimentel & de Bourdelot. Celui-ci partit vers 1'e- te de 1654 & cela faifoit bien efperer de fon- gouvernement & qu'elle re- prendroit fes premieres inclinations , que ces deux hommes , & particulie- rement ^ e dernier , avoient beaucoup changees. Mais quand on s'apper- yut, quelque terns apres, qu'elle faifoit embarquer la meilleure partiede fa ie$ Bibliotheque & fes metibles les plus precieux , dont on avoit fait plus de plus pre- cent ballots, (*) pour les envoi'er a Gothembourg , ou elle fe preparoit d'al- ler elle-meme, on recommenfa a craindre que tout cela ne fe fit , que dans la (a) Chanut /. c. p. 199. Fellerus /. c. pag. 69. leschofes (*) Voict en quo! confiftoient particuliercment leschofes pr^cieufes <]nc Chriftine ein- i>icrieufes porta de Suede i. Une grande quantite de jo'iaux & de bijouteries, dont une pnrtie, tmporte'es de la valeur dc quarante mille ^cus, fut mife apres en gage en Hollande, 20. PJufieurs te Suede par vafes & nutrcs grofTes pieces d'or & d'argciit inaifif 30. Deux Cabinets de mediilles anti- Wrijlinf. ^ ues ^ QT & d'argent des plus rurcs & dcs plus complcttes 4. La Bibliuihit]ue la plu cu- CHRISTINE R E I N E D E S U E D E. 4ot la penfee de quitter le gouvernement (Z>). On fit aufti des reflexions fur L>an ce qu'elle crea plufieurs Senateurs , fi bien qu'ils fe trouverent jufqu'a tren- _J. te huit, nombre qu'elle augmenta apres jufqu'au de-la de quaranie , parce qu'elle avoit appris que le Senac de Suede avoit etc autrefois compofe de ce nombre. On difoit , qa'elle les faifoit entrer dans le Senat , afin que par reconnoiflance ils ne s'oppoflaflent pas a fes demandes , & ne traverfaiTent pas fon deflein , qui commen^oit deja a eclater partout (*). Tout le monde attendoitavec impatience ce que deviendroit la convoca- tion que Ton avoit faite du Senat vers la fin du mois de Janvier , 1654 , dont en peu de fours le miftere fe developpa (a). Comme cette Prince/Te Rai v r ns dit il', (i) de la propofition, q-ue la Reine Cbriftine a fait faire au Prince Gufla"rBt Charles P'alatin, qui doit hit fucc^der , & de la r^ponfe qu'elle en a regue. les'reponfes " ^'' e veuc P^miereuient fe rdferver la plus grande partie du Roiaume avec !es re- de- ce Prin- venus. & 2* Elle ne vcut point etre fujette : mais elle pretend etre entidremcnt inde'pendan- te &,libre. ,, 3. Eile veut avoir la liberte" de vorager dans les pai's Strangers, ou en quelqueen- droit de Suede qu'il lui plaira. ,, Enfin, elle ne veut pas que fon SuccefTeur falTe aucun changeineht dans les char- ges in>portantes qu'eli'e aura donn^cs a fes favoris , ni qu'il rt^voque aucun des dous qu'elle leur aura fair. Le Prince Charles a r^pondu. i. Qu'il ne veut pas etreunRoi titulaire, fans Roi'au-me, & revenu qui puifTefour- ,, nir tant en paix qu'en guerre aux d{5penfes necefifaires. 2. Qu'il ne veut fouffrir aucun Cbmp^titeur, ^gal au Souverain dans fon> Ro- 'iaume. 3. Qu'il ne veut point ^'expofer a fes intrigues dans les Cours thrangeres. Et. qu'enfin , s'il ell Roi, il pretend difpofer de toutes les charges comme il Fe jugera a propos , qu'il ne veut point etre I'oinbre d'un Roi, & n'avoir point des pri- vilt^ges efTentiels a la fouverainete'. On dit, que quand Ta Reine apprit fa rt^ponfe, elle dit tout haut. Je n'ai fair ces propofitions que pour connoitre fon efprit. Je crois a pr^fcnt, qu'il m^rite de rtg- ncr, puifqu'il connoit H bien les in com muni cab les droits de la RoTaut<^. Cette nouvelle, dit I'Auteur, vient d'un Stkr^taire envo'i^ a rAmba^.deur d'Ef- l )(l S n - ^ nouvellement envoTe en cette Cour , (de Paris') pour y ne"gocier une tn}\s M de dix ans tnrre la Francs & VEfpagne. 0) C'cft' le Sr Marana d> s Ton Efpion Tire. kttr lo.y. Tom. Ill- p. \iy. cb 1'etlitida tic 17 jj c'clt li CHRISTINE REINE0E SUEDE. e?. Pour obvier a cet inconvenient, elk- propofa a quelques-uns du Senat V. atT ime fubftitution a Cbarles-Gitftave , en cas que ce Prince vint a mourirfans - ' 54 ' enfans Jegitimes. Mais autant qu'on la remercia des foins qu'elle prcnoit pour afllirer le repos du Roiaume , autant Ja pria-t-on de ne pas trouver mauvais ft on ne confentoit pas a fa demande. On lui reprefenta, que puifqu'elle e'toit refolue d'abdiquer la Couronne, ils confentoient a une chofe qu'ils ne pouvoient pas empecher , fans pourtant 1'approuver : mais qu'a 1'egard de la fubftitution, ils trouvo : eat, qu'il ne convenoit pasdecon- traindre le Prince de Suede a recevoir & a reconnoitre un Colle^ue ou un he'ritier neceflaire a la Couronne , puifque eela ne pouvoit que caufer de tion , demandoit qu'elle renon^at pour jamais a la Couronne , tant pour elle que pour fes Defcendans, en cas qu'il lui prit quelque jour envie de fe marier; car ils vouloient, qu'elle renoncat auffi pour jamais a toute pre'teri* fion au Trone , quand nieme le Prince hereditaire viendroit a mourir aVarit elle, fans laifler d'Enfans. Dans cette fubftitution que demandoit Ckrijlini, E'le veut iut elle avoit jette tes yeux fur k Comte Toft 9 qui a la verke tiroit fon ongme du J:loi Eric XIV (*}. Pour faciliter fon delfein elle vou'oit lui confererfe litre de Due, & elever en me me terns a cette dignite les Comtes, jfteffe Brake premier Stnateur , & le Chancelier Axel Oxenftierna y comme deux M & o xe r.- perfonnes les plus diilinguees du Roiaume. Mais Tun & 1'autre remerciei-f r I e "'^ jj e uc tr " rent tres-humblement Sa Majefte de 1'honneur qu'elle leur vouloit faire&a L , un & 1>aTN leur famille: & la fupplierent de con(iderer,que tons ces tkres-'a etoient fitre refufent fort a charge a I'Etac r qu'ils croioienc qu'au lieu de les multiplier, il con- cet honneiK - viendroit plutot de les fupprimer tous , c'efl-a- dire & ceux de Comtes & ceux de Barons, en remettant 1'Ordre de ]a Noblefle fur le pie oil il etoit lorfque le Roiaume etoit eleftif; qu'i! n'y avoit que la feule vcrtu & lefenl mente perfonnel, qui mit de la difference dans les hommes : qu'on n 'en pouvoit abfolument point trouver dans de vains titres inconnus : qu'i is eroi'oient, que !es fervices, qu'ils tachoient de rendre a 1'Etat, leur acque- loient aflez d'honneur, & qu'ils efpe'roient que Jeurs Enfans tiicheroient de fe rendre utiles a leur Patrie, fans avoir befoin d'y etre excites pard'autres recompenfes , que par la gloire de remplir leur devoir. Sur (*) Le Cointe Magnus de la Gar die dit dans iU lettre au Confeil de la R^duflion (i) au fujet du Comte Tott ,,. A l-'nbdicadon de la Reine Cbriftine ,. elle vouloit abfolu- ,, ment que le Comte Tott eut Ekiolmfund ", foit par propre affeftion gracieufe de ia Reine pour le dit Comte, foit par afliilance aflidue des autres. Et quoique feu le Koi Cbarles-Gttftaw , alors Prince HJr^ditaire du Roiaume, n'y futnu-llement porte, d^for te qu'il fit tout fon pofllble pour en detourner la Reine, neanmoins elle repondit : r , que le Prince, pour lui faire plaifir, pouvoit bien accordcr une belle Terre auCona- te Tott, quand elle lui cedoit une belle Couronne. Ctte lettre dt du aj. Janvier 167;. dans Eee 3 4 o6 MEMOIRESCONCERNANT Sur ces entrefaites le terme fixe pour la Diete etant echu, I'Aflfemblee S4 V des Etats du Roi'aume fe tint dans la ville d'Upfal le 21 de Mai. Tousles chrifiine ei- Miniftres Strangers , qui fe trouvoient a la Cour , y furent invites. La tfarTaUif E- U ^^ ne en ^ c 1'ouvcrture par im difcours qu'elle prononja elle-meme , Elle tats de Suede dit \ ,, Qiie le fujet, pour lequel elle avoit convoque les Etats , leur pa- 16 roitroit fans doute furprenant , attendu qu'il e'toit fans exemple : mais que s'ils vouloient jetter les yeux fur tout ce qui s'etoit fait depuis Jong- tcms , ils s'apper^evroient qu'il ne s'agiflbit pas d'une chofe nouvelle , ni d'une refolution prife a la hate : mais d'une affaire preparee de longue 5, main & fur laquelle elle avoit fait de mCires reflexions. Qu'ils devoient fe reflbuvenir de ce qui avoit etearrete depuis quelques annees par rapport a la fuccelTion a la Couronne & au Gotivernement de 1'Etat : & qu'elle ,, fe portoit d'autant plus volontiers a cette demarche , qu'elle en voioit un grand avantage pour le Roi'aume. Elle reprefenta, que comme les Etats avoient deja reconnu le Prince pourfonSuccefleur,&qu'ilse'toient perfuades de fes grandes qualites & de fa capacite pour bien re'gir, elle ne doutoit nullement , qu'un chacun ne fut ravi de le voir monter fur le ,, Tr6ne : qu'il y avoit dix ans qu'elle gouvernoit, qu'elle avoit toutfacrifie aux interets de la Nation : qu'elle n'avoit epargne ni veilles ni foins pour leur procurer leur repos : qu'ils en jouiffoient par la grace de I^ieu , tant au dedans qu'au dehors du Roi'aume : que pour toute reconnois- fance de fes peines & de fes travaux elle ne defiroit d'eux autre chofe, one leur confentement a fon abdication : Confentement fur lequel elle 3, tfaifoit d'autant plus de fond, que fon abdication e'toit une chofe ferme- ment refolue, & fi affuree, que nulle conflde'ration, nulle repreienta- don & nulle puiflance ne fen pourroit detourner. Elle ajouta , qu'elle fouhaitoit que fon voulut pourvoir a fa fubfiftance , qu'elle en e'toit deja convenue avec le Prince , mais qu'elle vouloit que les Etats en demeu- ,, raflent pareillement d'accord. Chrijlme ai'ant ainfi parle devant 1'Affemblee des Etats, Schenng Rofenbane i- lut par fon ordre un Ecrit qui contenoit les memes chofes que la Reine ve- a inclement no ^ ^ e ^ rQ > i^ais ou elles etoient beaucoup plus etenducs & plus particu- au nom de la larifees ; & fon donna une copie de cet Ecrit a chacun des Ordres du Roi'aume. Rofenhane avoit etc charge de faire la lecture de ce Papier , parce que le Chancelier Oxenftierna avoit refufe de faire cette fon&ion de peur de paroitre approuver 1'abdication de Chrifline (*). Ce Seigneur s'etoit op- pofe C*) Lc Rdfident Picques donne a entendre, (i) ,, que les deux Maifons de Brdbi & LCJ Comtes S,> n- j r i i j p i r~> Lr.-.he & > ^ Oxenjtierna defiroient le moms ce chnngement de gouvernement, & que le Comte nxcnfiirrna. Magnus en t^moignoit fa jo'i'e publiquement : que le Comte Brabe a'iant demande a foiihnitcnc M Sa MajelW qu'il lui plut leur dire les raifons qui la portoient pour la feconde fois a -/?' M vonloir les quitter, il n'avoit pu tirer autre rt^ponfe d'elle, (i non, que telle ^toit e S? PaS " fa volonte, a laquelle il faloit qu'ils fe conformaflent, & qu'ils fe difpofaflent a re- ,, ccvoir (i; CLanut 1. c. jmg. 312. jip. 320. 349. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 407 pofe autant qu'il avoic pfl , a cette demarche de la Reine, & auroit bien fouhaite qu'elle fut demeuree dans le Gouvernement. II difoit que lorfque les Etats s'etoient aflembles a Norkoping fous Charles IX. en 1 604. (Etats aux quels il fefouvenoit d'avoir aflifte;)on ne s'etoit pas determine a affu- rer la Couronne dans la Maifon de ce Prince, & a la faire pafler furlatete de fes defcendans , pour etre abandonnes de leurs Rois quand il leur plai- roit ; mais pour s'aflurer qu'ils gouverneroient leurs Pai's , & qu'ils demeu- reroient avec eux , tant qu'il plairoit a Dieu de leur conferver la vie ; & que comme il s'etoit autrefois oblige par ferment envers Guftave-ddolphe, a tout emploi'er pour conferver le Roi'aume de Suede a fa fille Chriftine , il re- garderoit comme un crime, il on pouvoit jamais lui reprocher d'avoir concouru , en quelque fajon que ce fut , a un afte qui alloit 1'exclure du Roi'aume. Les Etats, ai'ant deliberd fur cette grande affaire , (a) furent d'avis que quoiqu'il ne reftat aucune efperance de voir Chriftine changer derefolution, ils devoient neanmoins , pour leur honneur & par bienfeance , lui faire de nouvelles fupplications & la prier de vouloir continuer fon gouvernement. Ils deputerent a cet effet quelques membres de leurs Corps aupres de Sa Majeite. Mais lorfqu'elle eut repondu , que quand on auroit encore une Couronne a lui prefenter , elle ne continueroit pas fon adminiftration un moment au de-la du terns qu'elle avoit fixe , on confentit enfin qu'elle abdi- quat la Couronne, & qu'elle refignat le Sceptre a Charles-Gujlave , qui fe- roit en confequence reconnu, pour Roi de Suede , conformement a la pro- melfe qui lui avoit ete faite de fucceder a la Couronne. Mais taut le mon- de rejetta la propofition de laiifer en pleine fouverainete a Chriftine les Do- maines, dont les revenus leroierit aiTignes pour fon entretien ; Savoir les liles d'Oelande, de Gothlande & d'0efel y Wollm, Ufedom, la Ville & ie Cha- teau de Wolgaft avec quelques autres terres en Pomeranie ; ce qui tout en- femble pouvoit produire deux cens quarante mille Riksdalers de revenu. La Reine (a) Pufend. /. c. . 23 & 24, Chanut /. c. p. 383. 6fr L ' an Les revcmw n entie ^ cevoir fa d6niflion en faveur du Prince qu'elle leur donnoic pour Roi d fa place ", Dans les M^moires de la famille de Brabe(i') il eftpourfant parl^ plus pardcuiierement de cet entretien entre la Reine & le Comte de ce nom: Ce S^nateur difant, quec'^- ,, toit un m^chant homme & coquin qui lui avoit infpir^ le deiFein de les abandon- ner, elle lui avoit re"pondu, que c'etoft trop dire, & qu'il y avoit plufieurs perfon- nes (dont elle avoit nomm6 quelques-uns) qui la verroient abdiquer avec plaifir : & que quoiqu'elle ne put pas de"couvrir encore fes raifons pour cela , on ne manqueroit pas de les apprendre dans la fuite. Le Sr. Picques rapporte auffi que le Comte O- xenftierna lui avoit dit, que Dieu lui etoit tdmoin, s'il n'avoit pas fait fon poffible pour dthourner la Reine de fa Rtfolution, mais qu'il Tr.voit trouvt^e inflexible, fur quoi il n'avoit point feint de lui dire, qu'elle s'en repentiroit, & qu'il &oit afTure, qu'il ne fe pafleroit pas trois mois.que cela n'arrivat, mais qu'il ne feroit plus tems: qu'il avoit cette confolation, de lui avoir par!6 franchement , & queia poit^ritd n'y auroit rien a lui reprocher en cela. (ij Mfc. ad ana. 1554. ^ 16. de Pcviier 5c Cbanut 1. c. M E M O I R E $ C O N C R N A N T " an Reine fut obligee de fe contenter de pofTeder ces Terres a titre d'appana- It5:>4 ' ge. Comme il reftoic pourtant encore une difficulte , par rapport a ceux qui fe trouvoient en pofTeffion de que-lques-uns de ces Domaines , & qui pretendoient avoir fait de grands frais pour les mettre en valeur, le Prince promit que d'abord qu'il feroic fur le Trone , il les dedommageroit , on en ouc! i urgent, ou en terres , des depenfes utiles cju'ils auroient faites. II fe trou- ns fa ?ou!u. va quelqucs perfonnes qui propoferent de reitraindre la liberte de la Reine wnt genet par certames Loix. Us vouloient qu'elle promic de fixer fon fejour dans le par des cer- *L .. . f , v i > tames lot*. Roiaume, de ne pome demeurer dans un Etat etranger, & de n entretemr aucune correfpondance avec les Ennemis de la Nation , faute de quoi , on feroit en droit de faifir fes revenus. Mais elle regardoit comme peu ho- cfar/j.G.norable pour elle , de fe foumettre a de pareilles conditions : & le Prince ci" Charles-Guftave , qui avoit de fi grandes obligations a cette PrincefTe , bien loin de vouioir la gener par aucune claufe qui ne fCit pas de fon goftt , cherchoit a la contenter dans tout ee qu'elle pouvoit defirer. II fentit bien , qu'il etoit important a 1'Etat que 1'argent deftine a 1'entretien de cet- te Princefle , demeurat dans le Roiaume & ne paflac point chez 1'Etranger ; cependant , il croioit qu'il etoit plus expedient pour fes interets , que Chrifline demeurat hors du Roiaume. H craknoit , fi elle demeuroit en Suede, que la paflion de regner ne lui revint& que fes Creatures fe tour- riant de fon cote , il ne fut contraint de gouverner a fa volonte. C'eft pourquoi il reprefenta , que fi la Reine renoncoit fimplement au Roi'au- ine, -fans fe referver la faculte de remonterdans la fuite fur le Trone, e'en etoit afTez : que toutes les autres precautions , qu'on vouloit prendre , e- toient abfolument inutiles , & que puifqu'elle vouloit mener une vie pri- vee, il convenoit de lui laiffer la liberte d'aller ou elle jugeoit-a propos; furtout apres qu'elle auroit promis de ne jamais rien faire contre les inte- rets du Roiaume. Demarche Quoique Cbrijline n'cut plus que quelques jours a regner, elle ne laiflapas vioicnte de de fe porter a une demarche violente , qui etonna tout le Roiaume (a). venie > j" Elle manda I'lntroducleur des Ambafladeurs ; elle lui dit,. qu'elle vouloit, m&tt de 1'envo'ier a la Campaene fans lui defiener le lieu , & lui enioisnit de reve- Purtutal. - , / i i \ i- r f\ i T >i nir la trouver fur les onze heures du loir, pour recevoir fes Ordres. L in- trodudttur etant revenu , elle lui donna un papier fur lequel elle avoit e- crit ces mots : Pour r Introducteur Linde , qu'il n'ouyrira , que qitand life m en preface du Refident de Portugal. Elle lui ordonna d'aller en diligence a Stockholm, de ne parler a perfonne , de ne s'arreter nulle part , qu'il ne fut arrive chez ce Refident , en prefence de qui il de'cacheteroit ce pa- pier, & le lui liroit fans le lui lahTer, mais leulement une copie qu'il fe- roit de fa main. Dans ce papier, la Reine difoit , qu'elle avoit ordon- ne a Lmde de faire favoir de fa part au pre'tendu Refident de Portugal ^ ,, que fon Emploi en cette Cour etoit inutile , depuis qu'elle avoit refolu de ne plus reconnoitre pour Roi de Portugal 'le Due deBraganct, puifque c'e- ('0 Pufcnd. /. r. $. 26^ fon blfl. deSut. Prov. Unics ad b. ann. fag. 462 fc? 463. xie r. IL p. 4.4.1. ti-ni VVicqucf. Hift. des CHRISTINE REINE DE SUEDE. 409 c'ecoit une qualite qui n'appartenoit qu'a Philippe IF. Roi d'Efpagne & a L ' an ,, fes SuccefTeurs ; qu'elle confideroh toftjours le Due de Bragance , com- l654 ' me un Ufurpateur du Roiaume de Portugal ; qu'elle avoit voulu avertir "" fon Reiident de cette refolution , atin qu'il eut le loifir de fe preparer a fortir d'un lieu ou il ne feroit plus recu dans la qualite qu'il prenoit, que le Prince fon SuccefTeur le traiteroit de la meme facori , qu elle le laille- 3t roit li bien informede fes intentions, qu'il agiroit toujours avec le Due de Bragance felon cette declaration j & qu'au refte comme le dit JReii- dent etoit venu fur la foi publique, il jouiroit d'une protection inviolable 5, jufqu'a fon depart (*)". Chrijlme n'avoit communique cette affaire a aucun des Senateurs (a). Us i* senate* en furent extremement choqiies ; perfonne n'ofa neanmoins lui en. parler. rf^cS" * On crut qu'il valoit mieux diflimuler jufqu'a fon abdication , qui devoit fe " inc faire dans huit jours. Tout le monde jugea qu'elle avoit cherche par-la a fll faire plaiilr au Hoi d'Efpagne , dans les Etats duquel elle fe propofoit d'a bord de faire fa .demeure , & que pour qu'une pareille declaration ne fut pas prejudiciable a la Stride, elle avoit attendu aux derniers jours de fa re- gence a la faire , bien perfuadee , que le nouveau Roi y apporteroit un promt remede , pour ne pas troubler le commerce que les Suedois faifoient en Portugal. En effet , le Prince & les Senateurs firent dire fecretement au Reiident de Portugal , qu'il ne devoit pas s'allarmer de la declaration -de la Reine, qu'il pouvoit demeurer a Stockholm , jufqu'a fon abdication, & qu'a- lors toute.s chofes fe retabliroient a la fatisfaclion du Roi de Portugal. Com- me cela fe fit auffitot apres. Le jour que Cbrijline fouhaitoit avec tant d'impatience arriva enfin (b): . tuee, (a) Pufend. /. c. & Chanut p. 379. 385. Die. 1749. il eft dit que le Roi de Danne- 397. 430. 439 ? 442. inarck avoit fait tranfporter de Gottorp quel- (b) Pufend. ib. . 27-30. item /on bifl. ques tableaux d'une gra 4e ccne >b- me revctirent la Reine de fes Habits Roiaux & lui mirent la Couronne fur la tete. Elle prit en fa main droite le Sceptre, & en fa main gau- che le Globe d'or ; deux Se'nateurs , qui reprefentoient le Grand- Mare- chal & le Grand - Treforier , portoient devant Sa Majefte 1'Epee & la Clef d'or. De cette maniere elle entra dans la grande Salle du Chateau, ou tous les Ordres du Roiaume , les Miniftres des Princes etrangers & les Dames (*) Cette reTerve d'une enti^re indtfpendance quant z fa perfonne & a fes actions,. Comme auffi de fon pouvoir &'de fa jurisdiction ple'niere fur les Officiers & Domelti*- de fa Maifon, dcliircira I'aiTaire dc Mj);ialdeski dont il fera paflii ci-ddlouf* ^CHRISTINE REINE DE SUEDE. Dames de la Cour etoient aflemble'es. E!le monta fur une Eftrade eJevee de trois degre's & s'afTit fur un fiege d'argent maffif. Son Grand Cham- bellan & fon Capitaine des Gardes etoient derriere elle , Je Prince He'redi- taire e'toit a main droite , mais hors de 1'Ellrade , & il avoit un fauteuil derriere lui.^ Tout etant ainfi difpofe, Schering Rofenhaw Kit a haute voix 1'AcTie, par lequel Chriftine abdiquoit la Couronne , & dechargeoit les Peuples du fer- inent de fidelite qu'ils lui avoient fait. 11 porta cet A6le an Prince , a qui il le remit. Enfuite etant retourne a fa place , il lut aufll a haute voix I'Afte par lequel le Prince s'engageoit de maintenir la Reine dans la poflef- iion & la jouiflance des Domaines qu'elle avoit voulu retenir pour fon en- tretien; & il remit cet A6te entre les mains de la Reine. Alors Cbriftine Eiie fe de, donna le fignal aux Grands Officiers du Roi'aume de s'approcher du Tro- , fai ' L fle tous o . .. .r r , _ JcsOrneraens ne , pour recevoir d elle tous les Ornemens Roiaux , ,5i. ad Caff. Puteum />. Magliab. p. 201-207. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 413 Mere (*)., & augmenter pltltat fes revenus, que de les diminuer, & prendre en confideration fes amis, fes ferviteurs, & ceux qu'elleluiavoit particulierement recommandes. De fon cote , le Prince la pria de vouloir remonter fur le Trone; mais elle s'en defendit & voulut le prendre par la main pour 1'y faire monter lui meme, de quoi il s'excufa. Apres bien des Civilites de part & d'autre, le Prince lui temoigna, en fermes fort foumis & fort obligeans , ,, com- t* bien il etoit reconnoiflant des bontes qu'elle avoit eu pour lui: il 1'aflhra S qu'il chercheroit avec foin les occafions de lui en donner des marques & fait - il la pria de croire qu'il ne manqueroit jamais au refpeft, ni aux devoirs, niauxfoins, aux quels il etoit tenu envers elle, & envers les fiens. 11 adrefla enfuite la parole au Senat & aux differens Ordres du Roiaume qui lui repondirent par la bouche de Rofenbane, & 1'aiFurerent de leur fide- lite & de leur obehTance. Quand les quatre Chefs des Ordres du Roiaume lui eurent baife la main, le Roi prit celle de la Reine, & malgre la refiftance que fit cette Princeffe a prendre la droite ,.& la conduiilt ainfi a fon appartement. II paifa en- fuite dans le fien. II y chaagea d'habit pour aller a 1'Eglife , ou toutes cho- fes fe preparoient pour fon couronnement (J-). La ceremonie s'en fit fur C ^ e r/ Frince i Guflave eft couronne. (*) II y avoit de"ja quelques femaines que Cbrifline e*toit alle"e a Nykoping pour pren- chriftire dre congt^ de la Reine fa Mere, qui en fut fenfiblement toucht^e, mais done Cbrifline prend conge fit tout fon poflible pour adoucir le chagrin (i). Pen avant que de retourner a Stock- ^ e l^Reine holm Sa Majetl^ tit venir le Prrnce de Suede, & en fa prefence & celle de fa Cotir , ^ * lere & !f dit ^ fa Mere, que le terns etoit venu de la quitter & de prendre cong d'elle. Qu'e!-^ ec cj"^" le lui demandoit pardon (i elle ne lui avoit pas rendu tous les refpefts & tons les Gujfavc, foins qu'elle lui devoit. Qu'elle la fupplioit de croire, que ce n'avoit pas et& man- que de bonne volonte" , mais que certaines occurences ne lui avoient pas permis de faire autrement. Qu'elle feroit deTormais encore moins en e"tat de lui pouvoir ren- dre aucune afliftance. Qu'elle alloit fe de"mettre duGouvernement, mais que SaMe- re devoit fe confoier, & que fi elle perdoit une fille, elle recouvroit un fils , qui fe- roit bientdt Roi , & qui aaroit pour el!e tout le refpeft & tous les foins qu'elle pour- roit defirer. En meme terns , la Reine appella le Prince , qui s'tkoit un pen retire" , le preTenta a fa Mere, & repe"ta ce qu'elle venoit de dire de lui. Le Prince le ra- tifia a la Reine-Mere avec des paroles auiH refpeftueufes que foumifes; & enfin, la Reine dit adieu a la Reine fa Mere, avec aflez de fermet^ & fans pleurer. II n'en fut pas de meme de la Reine-Mere: car elle fondoit en tonnes. Ce dernier adieu toucha toute la Cour, & comme la Reine Mere ne fit que pleurer toute la nuit, on. en avertit Chriftine , qui fe leva auflitot & fut au lit de fa Mere pour tacher de la con- foler. Sur les cinqheures, elle partit pour Stockholm, & le lendemain, elle retour- na a Upfal. (t) Q'le'^ues femaines auparavant Chriftine dcrivit des Lettres circulaires (2) a tons les Gouverneurs des Provinces de Suede pour leur ordonner de relachcr tous les pri- fonniers & crimincls, meme ceux qui auroient nitrite la mort: & cela en confid^ratiort de fon Abdication, comine attffi du Couronnement de fon Succeffeur, ana, difo it el- le dans fes lettres , que ces pauvres malheureux a'ient lieu de fc r^joair de ces hcuteux dv^nemens : fans prejudice pourtanc du droit d'autrui. Voici fr) Chanut 1. c. pag. j<5 & 3f Pa1msk.x'd t (zj Ces letues font datees le 23 Mai 1654 dans Fff 5 4 i 4 MEMOIRES CONCERNANT t/an les quatre heures apres-midi , mais avec beaucoup moins de pompe qu'au J 654 '_ cou- Voici des vers que Mr. Hunjius fit a cette occafion: auxquels nous joignons ceuxde Mr. Bergenbielm & de Mr. Loccenius: V 1'AppencL Nous donnerons dans 1'Appendtce la pice intitule Arcus triumpbalis per quern foleiu- N. XLVI. ni pompa exivit Chriftina, fubivit Carolus-Guftavus &c. Habes bic verfus t dit HemCms , quos nuper luji &?c. Mittam illosad Reginam proxime:(i). Sereniff. Princeps Carol us-Guftavus /ce/tfro $ttwiw foMttu a Chriftina dugufta Majori Meritorum quam Cognationis jure Sceptra triumphati fatalia cornibus Iflri Sarmatico toties tin&a cruore prius , InviEtis ge ft amen avis , cape prcemia , Princtps Inclyte , Wrtuti jure dicanda Tuce. Nil genitore minor Guftavi^/m Magni Hxc dedit, btec voluit, muneris effe fui. Sceptra quidem perfe nttfquam Jpernenda quibusque Donatrix pretium non teve tantafacif, Maxima fed laus eft , & laude fuperior owni , (Si cui danda forent) danda fuijje Tibi. I)onafubire manus, exoratura rogandas Slanda recufantes donafubire manus: Teutonii memoranda Soli Chriftina Tropeeis Munus ad bceredem vos jubet ire fuum. ixpugnet Diadema Ducem fubire coaftum : FleQe reluttantem , fponte petendus honor. slmolita decus regale virentibus annis , LaJJaque fortune ferrefaventis onus , Et Sceptrum meditatafiti Chriftina regendi "Jura negat populis , ut Sibi jura paret. Crudelis nimium fapientia , ni foret orbs Regibus Imperio qui bene ferret opem. Nee confanguineus partem favor occupat illam Hinc Sibi, Lausmcriti, Rex, ea tota tui eft, Cedite jura procul naturce , cedite leges. Regia , Rex ejlo , qui gerit afta , meus. Frenando par nullus erat Tibi, Carole Sceptro: Gloria natales preterit ifta Tuos. Tejlis Hyperboreo fpolium Germania Marti Et qua; Danubius , Te Ducc , bella gemit. Crede mibi , virtus eft proximo Regibus hares : Libera cognati Sanguinis illajugo eft. In abdicationem Regina? Chriftins 1654. Cedant Mortales, quotqttot prior extulit (Etas, Laudibus ob largas munificasque manus. Nil donis aquale tuis , Chriftina, dederunt, Exuperas veteres , exuperasque novos. Jffon auri cumulus, non eft argent ea tanti Majfa, nee Eoum quas mare promit opes. Qua populos , qua Regna dedit ternasque Coronas, ). Le Comte Pierre Brake Drotfet du Roiaume , l pria inftamment de ne pas fe prefler tant : mais elle lui re'pondit confidem ment : (a\ Pufend de R.S. lib. XXI. $. 109-115. 5^7. &c. Gundlings Difeows p. 316. Allg. libr XXII S. 41. Libr. XX IK , /. Libr. Wclt-Chron. T. XI. p. 643. &c. Kohlers XXFI S W u Idem de Reb. Car. Guft. Muntz-Bel. T. Vlll. pag. 17. &c. Heinf, Lib J \ 5 Idem. bift. de Suede /. c. p. Epift. 1. c. p. 206. Brenner /. c. p. 201. AA* fiP*. Chanut /. c. p. 39'. 425- 43i- i- (*) Palmsk. Extraits. des Reg. du Swat temp 437- & 448. Ludolfs Scbaub. p. ad. arm. 1 666. p. 795- Summa dare in terris qua potuere , Audit. Job. Bergenhielm Ad Chriftinam Regnum Suetise abdicantem. Exonerare cupit dumfe Chriftina/tterwwi Imperio , atque alii munia tanta dare' Dat Succeffurem Carolum regnoque fuisque Reddere poft fete quo meliora nequit, Jo'h. Loccenit Poem. Compofuit quoque Jac. Muflenrus e Soc. JsJ. carmen in abdications Chriftinat Stupent t mundo , Suecia rcfragante &c. fcfc. Sotbos Sopbtrum Primipwnque Regina eft. Chriftina Chrifto dignior &c. de. en L ' an ment : ,, comment voulez-vous que je rede ici , ou peu auparavant j'ai 54> ,, regne en fouveraine, & ou je verrois un autre avoir tout le pouvoir en ,, main?" Elle fut cependant obligee de feindre qu'elle ne quittoit le Ro'iau- me que pour aller boire les eaux de Spa , & qu'elle reviendroit immediate- nt * Stockholm. II lui falut amufer le peuple par de pareils difcours fimu- les. Car 1'Odre des PaiTans du Roiaume difoit af!c:z hautement , qu'on ne l a devoit pas laifTer partir , & qu'il faloit qu'elle demeurat dans le pai's , pour y confumer les revenus qu'on lui avoit affignes. Une autre chofe faifoit encore craindre a Chrljlme qu'on ne s'oppofat a fa fortie du Roi'au- i Lc C!e Xi me * ^ C' er ^ avoit fait courir le bruit parmi le peuple , qu'elle ne eicfci/iine Isuflbit la Su&de que dans le delfein de fe faire Catholique Romaine, & il en pread crioit qu'il faloit la rctenir dans le RoTaume '(*). Ainfi pour prevenir tout allarrae. r , rt. - 2 < n 777 - it facheux accident elle ne relta que cinq jours a Stockholm. Mais avant que ses demie-de partir. elle ecrivit au Prince de Conde po'ur lui donner avis de fon abdi- rcs lettres f o \ r /.L\ IT ' i i avant quede cation & de fon voiage (f). Voici la letcre. partir. KAOnfieur won Coujin. jTaurois tort de quitter le pofte que fai + ** occupt jujqtfici Jans vous donner part de la refolution que fai prife de rabandonner: je crois vous devoir cette civilite par Tejli- me , P Tamtiie que fai toujours eu pour vj)us^ & par celle que vous itfavez temoignee durant le terns que fai eu Pbonneur de gou- verner cet Etat. A present que 'fai cbangt de fortune & de con- dition^ je veux vous protejler que quclque changement que le terns ait Chri/llne^ foupfonnle de vouloir changer de Religion. (*) Galeazo Gualdo avoue lui-meme, (i) ,, qu'on avoit intercept^ quelques lettres: n d'oii 1'on pouvoit juger du deffein de Cbriftine , & Cbanut dit: quece qui la touchoic le plus parmi tousces bruits, etott que Ton difoit, qu'elle avoit defiein de fe'rendre Catholique. Elle aprehendoitt, ajoute Cbanut, (2) que les Suedois fur cette crean- ce ne la vouluffent arreter, ou lui faifir tons les revenus qu'elle s'e"toit r^ferv^s: & cela ^tant, elle craignoit que ne pouvant rien tirer de la Suede, elle ne fe trouvat embarraflee dans les pa'is Grangers ". C'eft fans doute a ces bruits que Mr. Leib- nitz s'en rapporte, quand il dit (3). ,, At fenior Oxenftiernius &f alii magni virij'pre- ti in aula lafci vient e , pleriqueinpradiafuaruftica receffere. Regina lata voluptatibus indulget. Interim fpreti Senatores ParocLos locorum tola provinciafibi familiares reddunt eorum condones vifetant , convlviis eorum adbibent : Regina cum Pont'ficiis , imprimis vero cum Pimentello Legato Hijpanico, Bourdelotto, Medico Gallo , ^ JohanneBap- tifta Dominicano , fob fpecice lingua docendx familiaritatem ad Religionis verce contem- tumfpettantem exaggerant ^fc ". (f) Le Sr. Picques s'exprime ainfi: (4). Le Roi de Suede, vo'jfant la Reine Cbriftine ecrit avant fon depart. (i) Hill, di Cbrijlina pag. 14. (z; 1. c. T- III. pag. 301.. (j) Felleri otia Han. pag. 125. (4j Chanut Mem. T. III. p. 444. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 417 ait apporte a notre fortune 5 je conferverai toujours pour vous les m^mes fentimens que je crois devoir a votre merite ; jefais ma plus - 1 - g54 ' J haute gloire de votre approbation, & je me tiens autant honor Je par votre cftime que par la Couronne que fai port^e, Ji aprds Fa* voir quitted) vousnewfenjugezmoins digne, favouerai quc iere~ pos que fai tant foubaite me coute cber> mais je ne me repentirai pourtantpas de F avoir achete a ceprix, g? je ne noircirai jamais mon allion qui m'afembU ft belle, par un /ache repent ir. ' Quelques fentimens que vous puilfiez avoir fur ce Juj^t^je conferverai toujours pour vous Feftime, dont vous ties ft digne > / s^il arrive que vous condamniez cette attion> je me content erai de vous dire pour toute excufe, que je riaurois pas quitte Favantage que la fortune m* a donne<) ft je Feujfe cru neceffaire a ma f elicit e ^ & que fauroisfam doute prttendu a F Empire du monde> ft feujft ete aujfi ajfure'e de reuffir , ou de mourir dans unejl haute entreprife,que Feftle Grand Prime de Conde. CHRISTINE. La veille de Ton depart elle fit aufll reponfe a TAcademie Fratifoife de Paris , qui lui avoit demande fon portrait , qu'elle leur avoit envoie. Voici la lettre (*). ]\Ae/fieur$ 3 comme fai fu que Fbus defiriez mon Portrait , fat **'* command&-qu'on vous le donnat ; P ceprefent ejl doublement reconnu , 5? par la wanie're dont vous Favex re$u dans votre cel$- ire Academic-) &par }es Eloquent es paroles que vous avez employes a nfen rendre graces. jTai toujours eu pour vous une ejlime party- culiere^ parce que 'fen ai toujours eupour la vertu ; & je ne doute point que vous ne m*aimiez dans lafolitude, comme vous m*avez ai- mee fur le Trone. Les belles lettres, que je prt tends y cultivere, repos (|) 5 &P avec le loiftr que je me riferve 3 n(obligen. meme de croire (*) Mr. 1'x^bb^ d' Olivet en parle ainli : (i). La Reine de Suede, cette famufe ,, Cbriftine , qui fe plaifoit fi fort au commerce des Savans, & qui prefqu'a la fleurde I'age pr^fera un loifir philofophique aux embarras de la Rolaute* , avoit envo'i^ fon portrait a 1' Academic avant que de quitter la Couronne. On eut 1'honneur de Ten remercier 6c voici la re'ponfe , dont I'original eft heureufement venu jufqu'a nous. (t) Cbriftitie pour mteux marquer, qu'en qulttant le Tr6ne elle pre'tendoit cultiver les (i) Hift I'Acad. Pianc. pag. j. Tame L G croire % u * vous riy firez part quelqus fois de vos outrages , puij- qu 1 Us font dignes dela reputation ou vous ties , ? qifilsfont pref- que tous Merits dans votre tongue , qui f era la princlpale de monde- Jcrt. Je ne manqueraipas de vous en temoigner ma reconnoijjan- ce, 6? de vous fairs voir quand je pourrai vous etre utile , que je feral to&jours. Mejjieurs. Tr$s-aJ}ettionnte a vousfervir Juin 1654. CHRISTINE. ie l?"K lendemain elle partit : & comme elle avoit fait accroire qu'elle vou- _it pafler en Allemagne par mer , on avoit fait armer douze des plus gros . pat vaiffeaux de la flotte pour 1'efcorter , qui 1'attendoient a Calmar. Mais peu apres le Roi Charles-Guftave rejut unelettre par laquelle cette PrincefTe Ifti donnoit avis qu'elle prendroit la route du Sond & pafleroit par le Danne- rwnk. A cette nouvelle le Roi envoi'a en toute diligence apres Elle pour la prier de fe rendre dans 1'Ifle d'Oeland , ou 1'Amiral Wrangel rattendoit avec la flotte pour la faire paflbr a Wifmar. Mais elle s'excufa fur 1'inconf- tance des vents (*). Elle prit done la route de Halmftad, ville fituee dans pro- les Belles-Lettres , fit frapper une grande M^daille, dont lereversrepr^fente I'Olympe-, & au fommet Ptgafe avec ces mots: Sedes bxc Solio potior: cette demeure eft prtfera- ble au Tr6ne. Chnfllne (*) On e'toit a la v^rltd fach^ en Suecle de la depenfe inutile qui s'e'toit faite 3 1'dqui- fait faire une pement de ces douze vaiiTeaux de guerre & de ce que Cbrifline vouloitpaffer par le Dan- depenfe inu- hjnjarj. ^ f ans en donner avis prs^alablement au Roi de Dannemark (i). Mais on s'en tileala "confola facilement , dit le Sr. Picquss , parce qu'on foup^onna , qu'elle auroit p6 les tanc on fc ernmener avec elle pour les vendre au Roi d'Efpagng, cominc le bruit en avoit dec Tan- conible. e auparavant. (ij C/&Jtibid p. 37^441- 5C4;o, cfi. p. 3*7. CHRISTINE REINE DE SUEDE. qu'elle ecrivit en latin une lettre a Mr. Gaf- fendi, ou elle lui conflicuoit un falaire annuel, outre une chained'or, done elle lui faifoit prefent. n/lEmini me , Upfafi in compenfationemfin- gularis tua erga me pie tat is & ob- Jervantite , jalarium tibi promi- Jiffe, quofretus reliquapiiinme animi fludia atque propofita pro- movere fep effetfui dare pojjes: Quod equidem jam prteftitura , Tpfum falarii inftrumentum tibi initto , quodvclip/um vel exem- plar ejusdem Domino Hermanno Hemming oflendere potes 3 qui cur am babebit , ut illo rite &? quotannis potiri queas. Deftina- vi tibi prteterea catenam our earn cum appenfo numifmate^ quaabs Oeconomia me) qu'elle defcendit de Carofle & fauta de 1'atitre cote avec une joi'e incroiable , difant: Me voila enfinen w liberte & hors de Suede , ou j M efpere de ne retoiirner jamais".. Avant que d^arriver a Helfingcer , Elle n'avoit retenu a fon fervice que quatre Gentils-hommes ; Les Comtes Dohna & Steinberg , le Baron Soop ,. - & un autre , dont pas un ne favoit ou elle alloit (c). Le Roi Charles-Gufta- - ve av i c ordonne au Sr. Lindc de la conduire jufqu'aux limites de la Suede ,. oie en ma- & de lui offrir encore, une fois fori coeur & fa. main , afin qu'il ne parut (a) Ltttres Galantes n. LIX. p. 212. g'c. (0 Theatr. Europ. ad 5. ann. p. 640. Chanut /. c. p. 450. Pufend. de R. S. Libr. XKW. g. 34. Idem. (b) Chanut /. c. p. 453. de Car. Guft. Lib. I. . 6. Chanut /. c. (*) Helmfladia , dit le Sr. Sprenger (i) data licentia, & officialibus &f Brodino Free- ilicatori Lutberaiio, inde Colmknn adit, ubi arrepta mafcula facie , tondsr i fibi capillos juf- fit, tit incognita Daniamfub nomine Comitis de Dahna tranfiret &c. (f) Galeazo Gualdo pretend (2) queni !e Roi, nt la Reine de Dannemarck ne rencon- trdrent pas la Reine Cbriftine, qui toit partie avant leur arrived a Coldinguen. Les. Hiftoriens Danois en conviennent pourtant etix-memes (3). Mais fur ce que Mr. de- Holberg dTt a ce -fiijet,, que Cbrijline quitta la 5z d'afTurer par de bonnes loix & par de fages re"glemens le repos des peu- pies, & de leur procurer le moi'en de s'enrichir & de vivre heureux. ,, Par les foins & les exhortations de Cbriftine, & par les encouragemens qu'eile y attacha, le commerce de la mer, qui jufques-la avoit etc fipeu ,, confiderable en Suede, commenja a devenir fi floriflant, qu'il donna de la jaioufie aux autres Nations. Non feulement ce commerce s'etendit ,, dans Jes differens Ports de I 1 Europe. On le poufla encore dans Ydfrique, ,, & meme jufques dans I'Atnerique. Les arts mecaniques eurent auffi un ,, pareil fucces. Tons ces avantages firent regarder alors le regne de Cbrijilne> comme le plus heureux qu'eut vQ la Suede. La pofterite en a ,, porte le meme jugement (*). Mais avant que de fuivre cette grande Reine hors de Suede, trois carac- teres ditTerens, que des perfonnes judicieufes ont faits d'elle, ne feront peut etre pas mal places ici. Us lerviront a la faire connoitre tant pour Ion exte'rieur, que pour fes qualites interieures (f). Nous trouverons ci- apres occalion de raporter encore d'autres portraits, que des perfonnes , qui ont cru la connoitre aflez , dans les differens terns de fon fejour hors de Suede y ont publics de cette Princefle. de Voici le premier que fon Confident Mr. Chanut Ambafladeur de France Cbrijlir.e par Alt. Chanut. (*) C'eft le fentiment par oil le judicieux Pufendorf finit fon Hiftoire de 1'abdication de la Reine Cbriftine dans ces Commentaires de Rebus Suecids & dans fon hiftoire de Sue- de (i). Nous ne pouvons pas nous difpenfer de faire ici une remarque fur les deux e"- Lcsdeux ditions de ces Commentaires de Pufendorf, de qui, entr'autres , Mr. Bayle dit (2) que eft 4 comme dcbeaucoup. fortie des propres mains de 1'Auteur. L'autre fe lit i Francfort en 1705 environs dix ans apres fa mort. Des Curieux aiant confronte les deux editions y ont trouve" une fi grande quantit de diffe'rentes lecons , meme dans le re"cit des circonftances des affai- res importantes, qu'on en a rempli des feuilles entieres (3). L'Auteur de la feconde Edition retranche quelquefois de cette premiere & ajoute a la fienne ce que bon lut femble, en donnant c,& & la aux Sue'dois le coup de dents. On n'eri citera ici pour preuve que le dernier paragraphe de cette feconde Edition, duquel il ne fe trouve pas une fyllabe dans la pre'mie're. Bien plus fi on lit un ou deux paragraphes pr^cedens Remarque d ans cette pre'mie're Edition, cenfte venir de Pufendorf lui-meme, on verra, que ce fur Mr. dernier paragraphe eft afiez contraire a ce qui eft dit de Cbriftine dans ceux-la. Mr.Kob- KMir. ler , qui s'eft prdvalu de cette feconde Edition, apparemment par inadvertence, tom- be ainfi dans les memes contradiftions, faute de n'avoir pas pris garde aux Editions differentes. Sans cela il auroit pu s'epargner la peine, de declamer, comme il fait, (4) centre cette Reine, furtout puifque Pufendorf lui-meine n'a rien dit du femblable de cette PrinceflTe, dans fon hiftoire de Brandcnbourg , qui eft fon dernier ouvrage hiftorique, & ou d'ailieurs il n'epargne pas la Suede, lorfque 1'occafion s'en prefente. v. 1'Append. (|) Nous ajouterons dans 1'Appendice une pi^ce fort curietife e"crite par un halien , N. XLVII. qvii (Jtoi!; en ce terns-la pr^fent en Suede & qui paroit avoir e"te" bien inform^ & de 1'ti- tat de la Cour & du Caraftere de la Reine Cbriftine. (i) Lib. XXVI. $. jj Sedans fon Hift : T. II. (3) Elles font infe're'esdans Harbour*: Beitra- p. 451 &c. ge zur Gelahrheit. II. th: p- 2&^^>^^^^^<>^>o&^^^^^^>^^^^>^^^i^^^^^^^^^j^^^^^>,;^i^)^^^ (*) L'anne"e pre'cedente le Sr. Rangouze adrefia a Cbrifline une lettre pane"gyrique, (i) laquelle nous infererons ici pour faire voir la haute idee qu'on avoit deja en ce tems-la en France de cette jeune Princefle. Madame L'ttrop ne voit point aufourd'hui de Reine plus triomphante que Votre Majefte*. M L'hiftoire de TAntiquite ne nous en ajamais decrit qui puifle eucherir fur votre gloi- re. II ne s'eft rien fait d'hero'ique depuis quatorze ans , que vous n'y a'iez eu la meilfeure part; On n'efltpas cru qu'il fe put trouver une Princefle fi jeune, capa- ble de feconder fes defleins d'un des plus grands & des plus vaillans Rois du monde. Cette fuperbe Maifon qui vouloit abattre toutes les autres, aiant el!e-meme et6 (5- branl^e par la force de 1'incomparable Guftave , fembloit s'^tre ratfuree pnr fa mort. Ses ennemis fe promettoient que cecoup inopind devoit rompre toutes les hautes en- treprifes de la Suede en dllemagne. Mais le bonheur de Votre Majefte" leur fit con- ,-, noitre en peu de jours, qu'il avoit laitfe" dana votre Berceau de quoi relever foa parti abattu. Six ou fept batailles g.ngn^es fous les aufpices de votre Nom , en un terns que vous n'^tiez pas prefque fortie de votre premiere Enfance, rendent un glo- rieux temoignage de ce qu'il y a d'Augufte en votre Perfonne. Mais la prudence & la g&ie'rofite' , avec lefquelles vous en avez accru les fucces , auffitdt que I'age vous a permis de prendre vous-m6me le foin de votre Etat, font beaucoup plus dignes d'admiration, que tout ce qui s'^toit fait de plus glorieux auparavant. La France a cet avantnge, Madame, qu'elle a toujours appul^ la gloire de votre Couronne, quand vos mains ^toient encore trop tendres, pour en foutenir le faix. Et fi vous avez fervi depuis pour accroitre la reputation de lafienne, c'eft un deftin que nous a- vons de commun avec Votre Majefte, par la fid<51it de nos Alliances, qui ont rendu ce lien indiffoluble. Dans cette mutuelle intelligence, nous nouspourrons au moins vanter enfemble, que nous avons fait faire joug a toutes les autres Puifiances, & ,, prepar^ a la Chrtient6 la plus difficile Paix qui ait jamais & entreprife. Jlnenous refte qu'un feul deplaifir, Madame, que I'age de notre jeune Monarque, & la loi de Votre Roi'aume, ne nouspuifTentpertnettre de faire une auffi ^troite union defang >, que d'interet, pour le parfait accompliflement des VCBUX. Madame Votre tres-humble , tres-obeiffant & tres-fide!e Serviteur Rangouze. (i) A(^. ann- 1^47, ebns fesletttes aux Reincs pag. 13, 3tc MEMOIRES CONCERNANT L ' an pourroient remarquer plufieurs defauts, qui n'dtoient point dans 1'origi- nal, il dit pour s'excufer qu'il n'avoit jamais pris la liberte de regarder fixement, ni attentivement la beaute de cette Princeffe, toutefois que s'il lui etoit permis de fe fier fur le rapport d'autrui, il pouvoit aflurer que la premiere fois qu'on la vo'ioit on n'y trouvoit pas d'abord tant de merveilles que quand on la confideroit plus a loifir, il difoit qu'un feul Portrait ne fuffifoit pas pour reprefenter fon vifage , & qu'il changeoit fi fubitement felon les divers mouvemens de fon efprit , que d'un moment a J'autre elle n'dtoit plus connoiflable; qu'ordinairement elle paroiflbit ,, un peu penfive, qu'elle paflbit fort aifement, & fort fouvent, a d'autres mouvemens : que fon vifage , quelque revolution qui fe fit en fon efprit, ,, confervoit toujours quelque chofe de ferein & d'agreable: qu'il eft vrai ,, que fi quelquefois elle defapprouvoit ce qu'on lui difoit, ce qui lui ar- ,, rivoit tres - rarement , on vo'ioit fon vifage fe couvrir comme d'un cer- tain nuage, qui fans le defigurer, donnoit de la terreur a ceux, qui la regardoient; qu'elle avoit pour 1'ordinaire le fon de la voix fort doux, & que de quelque fermete dont elle prononsat fes mots, on jugeoitbien clairement que c'etoit le langage d'une fille; quelque fois neanmoinselle changeoit ce fon, mais fans affectation , ou caufe apparente, pour en prendre un plus robufte, & plus fort que celui de fon fexe, qui reve- noit petit-a-petit & infenfiblement a fa mefure ordinaire, fa taille e'toit un peu au-deflbus de la mediocre, ce qui auroit pen paru (1 cette Prin- cefle eut voulu fe fervir de la chauffure dont les Dames le fervent ordi- nairement ; mais pour etre plus commodement dans fon Palais , marcher a pie ou a cheval a la campagne , elle ne portoit que des fouliers a fim- pie femelle d'un petit marroquin noir femblables a ceux des hommes. ,, S'il eft permis de juger de Tinterieur par les fignes qui nous paroiflent au dehors, elle avoit de grands fentimens de la Divinite & un attache- ment fidele au Chriftianifme , elle n'approuvoit pas que dans les entre- ,, dens ordinairesde faiences, on quittat la doctrine de la Grace pourphi- lofopher a la paienne ; ce qui n'etoit pas conforme a 1'Evangile pafToit aupres d'elle pour reverie, Elle n'avoit nulle aigreur parmi la difpute qu'elle faifoit fur les differends qui font entre les Evangeliques & les Ca- tholiques Remains, il fembloit qu'elle prit moins de foin de s'informer ,, de ces diffictiltes que de celles que nous font en general Jes Philofophes, les Gentils & les Juifs. Sa devotion envers Dieu paroiflbit en la con- ,, fiance qu'elle temoignoit avoir en fa protection, plus qu'en toute autre ,, chofe, au refte elle n'eft point fcrupuleufe, & elle n'affe&e point lesde- monftratipns d'une devotion ceremonieufe. Elle n'a rien de plus prefent ,, en Tefprit" que 1'amour incroi'able d'une haute vertu, dont elle fait toute fa joi'e , & fes delices , a quoi elle joint une paflion extreme pour la ,, gloire, & a ce qu'on en peut juger, elle fouhaite la vertu accompagnee de 1'honneur. Elle fe plait quelquefois a parler, comme les Sto'iciens, de cette eminence de la vertu , qui fait notre fouverain bien en cette vie , elle eft merveilleufement forte fur ce fujet & quand elle en parle avec des perfonnes , qui lui font familieres & qu'elle entre fur 1'eftime verita- ble '[CHRISTINE REINE DE SUEDIE. 425 j, ble que Ton doit faire des chofes humaines": c'efVun plaifir extreme de lui voir mettre fa Couronne fous les pieds '& publier que la vertu eft i'u- l6 - nique bien, auquel tous les hommes doivent s'attacher indifpenfablement " fans tirer avantage de leurs conditions ; mais parmi cet aveu elle n'ou- blie pas longtems qu'elle eft Reine , elle reprend incontinent fa Couron- ne, elle en reconnoit le poids & met le premier degre pour aller a la vertu, a bien s'acquiter de fa profeffion , auffi a-t'elle de grands avantages de la nature pour y reuffir dignement: car elle a une Facilite" merveilleufe a comprendre & a penetrer les affaires : une ;memoire qui la fert fi fi- delement , qu'on peut dire que fouvent elle en abufe ; elle parle Latin, .,, Francois, Attemand, Flamand, Suedols^ & elle etudie la langue Grtque; .,, elle a des perfonnes favantes qui 1'entretiennent a fes heures perdues de .,, tout ce qu'it y a de plus curieux dans les fiences; & cet efprit, avide ^, de connoitre toutes chofes , s'informe de tout ; il ne fe paffe jour qu'el- .,, le ne life quelque chofe de Thiftoire de Tacit e qu'elle appelle un jeu d'e'- . chec : Cet auteur , qui . donne a penfer aux favans , lui eft tres-intelligi- fl , ble dans les endroits les plus difficiles, & ou les plus doftes s'arretent, .,, comme hefitans fur le fens des paroles, Elle les exprime meme en notre langue avec une facilite merveilleufe , mais elle fuit, ou du moins elle neglige de paroitre avoir Id , & favoir ; elle prend un extreme plaifir a ouir traiter des queftions problematiques , particulierement parmi des .,, perfonnes favantes qui font de fentiniens differens, fur lefquelles elle ne .,, dit jamais fbn fentiment que tout le monde n'ait parle , & encore en peu de paroles , & le tout fl bien raifonne qu'il pent paffer pour une decifion formelle & pofitive; cela vient de ce qu'elle penetre les chofes a fond .,, avec lumiere & fans precipitation , & quand el'e parle de quelque chofe elle y reflechit plufieurs fois avant que de dire fon avis: fa retenue pa- roit plus dans les affaires que dans les entretiens des fjiences: fes. Mi- niftres, quand elle eft dans fon Confeil, ont peine a decouvrir de quel cote elle panche , elle fe garde a elle-meme le fecret avec fideiite , & comme elle ne fe laiffe ; pas prevenir fur les raports qu'on lui fait; Elle paroit defiante , ou difficile a perfuader, a ceux qui Tabordent, avec 3 , quelque proportion qu'ils affeclionnent,parce qu'ils veulent auffi promp- tement qu'ils fouhaitent. II eft vrai qu'elle panche un peu vers 1'humeur 3y foupconneufe , & que par fois elle eft un peu trop lente a s'e'claircir de ,, la verite ck trop facile a prefumer de la fineffe en autrui. Cette refer ve y} a former ce qu'elle veut croire & refoudre , n'empeche pas qu'elle ne foit raifonnable principalement dans 1'expedition des affaires. Elle ne 3 , fait part a perfonne de celles de fa Maifon, ni de celles qui dependent 3 , privativement de fon autorite abfolue; mais elle delibe're dans fon Senat de toutes celles qui concernent le Gouvernement de 1'Etat. lleftincroi'a- ble combien elle eft puiflante dans fon Confeil, car elle ajoute a la qua- lite de Reine, la grace, le credit, les bienfaits & la force de perfuader, ,, jufques-la que fouvent les Senateurs memes s'etonnent du pouvoir qu'elje a fur leurs fentimens , lorfqu'ils font aifembles. Quelques-uns attribuenc cette grande foumiilion que fes Miniftres ont pour elle, a fa qualite de TmeL Hhh fille 42(5 MEMOIRES CONCERNANT fille, s'imaginant que la fecrete inclination de la nature & la deference [654t que Ton a pour ce fexe les fait plier infenfiblement ; mais a en parler " veritablement , cette grande autorite , qu'elle a , nait des bonnes quali- tes qui font en fa perfonne , & on dit qu'un Roi qui auroit les rnemes vertus, feroit auffi abfolu dans fon Senat: cela toutefois feroit moins furpre'nant, que de voir une fille tourner, comme il lui plait, lesefprits de tant de vieux & de fages Confeillers. Ce n'eft pas merveille qu'elle fafle paroitre une prudence male dans fon Senat , vu que dans les ac- tions exterieures , qui femblent plus attachees a la difference du fexe , que celle de 1'efprit, la nature ne lui refufe aucime des qualites, dontun jeune Cavalier feroit gloire ; Elle eft infatigable au travail de la campa- gne, jufqu'a demeurer a cheval dix heures a la chafTe; le froid ni le chaud ne 1'incommodent point , fon manger eft fimple , neglige & fans de'lices ; il n'y a perfonne en Su&de , qui fache mieux qu'elle arreter un lievre en courant d'un coup defudl avec une balle feule: Elle fait faire a un cheval toutes fortes de maneges fans aucune affectation , bien loin d'en vouloir tirer de la gloire;' Elle parle rarement aux Dames de fa Cour> parce que les exercices qu'elle pratique a la campagne, ou les foins des affaires de fon Etat qui la retiennent . leur otent fa converfation , & elles ne la frequentent point, fi ce n'eft en que Ique forte devifite, & encore les laifle-t'elle en un cote de la chambre apres la civilite pour s'entretenir avec les hommes. Quand elle eft avec des perfonnes dequi ,, elle ne croit pas pouvoir apprendre quelque chofe, elle tranche court & ne s'etend en difcours qu'autant que la neceffite le demande; auffi tous fes domeftiques lui parlent peu , mais ils ne laiflent pas de 1'aimer , par- ce que pour peu qu'elle leur parle , c'eft avec douceur, & elle leur eft tres-bonne Maitrefle , liberale meme au de-la de la puiflance de fon Etat. ,, Elle fe divertit quelquefois a railler avec eux & elle le fait de fort bonne grace & fans aigreur, il feroit peut-etre mieux qu'elle s'en abftint; parce ,, qu'il refte toujours quelque apprehenfion de mepris en ceux qui ont ete ,, rallies; mais cela ne lui arrive que rarement , parce que les affaires & ,, 1'etude ne lui laiffent prefqu'aucun terns; elle le menage auffi avec ava- ,, rice, car elle dort peu & ne demeure ordinairement au lit que cinq j, heures, ainfi ce terns n'e'tant pas fuffifant pour re'tablir fes forces , elle eft quelque fois obligee, principalement en Ete, de dormir une heure ,, apres qu'elle a dine. Elle s'attache peu a fon habillement & a fa parure. II n'en faut pas faire e'tat dans la diftribution de fa journee. En un ,, quart d'heure de terns elle eft habillee, & fi vous en exceptez les jours des grandes folemnites, le peigne feul & un bout de ruban fait toute fa ,, coeffure. Cependant fes cheveux ainfi negliges accompagnent fort bien ,, fon vifage, mais elle en a fi peu de foin, que ni au foleil , ni au vent, 3 , ni a la pluie, ni dans la ville, ni a la campagne, elle neporte ni coef- fe ni mafque. Lorfqu'elle marche a cheval, elle n'a pour toute dcfenfe contre les injures de 1'air qu'un chapeau avec des plumes , deforte qu'un ,, etranger qui 1'a vue a la chaffe avec fa hongreline & un petit collet a la ., maniere des hommes , ne Ja prendroit jamais pour la Reine. II y a fans ,, doute CHRISTINE REINEDE SUEDE. 427 doute de 1'exces dans cette negligence qu'elle a pour fa perfonne , vft L ' an * principalement qu'il s'y peut rencontrer des occafions ou il eft a appre- I<554 ' bender que cela ne fafle tort a fa^fante; mais toutes chofes ne lui font " rien aupres de cet amour ardent qu'elle a pour 1'honneur & pour la yer- tu, & Ton peut dire, que fon ambition efl plus a rendre fon nom ecla- tant par un merite extraordinaire, que par desconquetes, & qu'elle aime mieux devoir fa reputation a elie-meme, qu'a la valeur de fes Sujets (*). Le fecond portrait qui vient du Pere Mannerfchied t ConfefTeur du Sr.Pf- Lefecond mentetti Arnbafladeur d'Efpagne a la Cour de Suede , fut fait en 1653. e n la- rt .i tde tin & va paroitre ici traduit en Franpois (f). Je crois vous faire plaifir de vous~ mander quelque chofe de la Reine de Suede, que je refpecte & que je revere tous les jours avec juftice, comme un Prodige & comme une merveille incomparable de notre Sie- cle. Je n'en dirai rien , dont je n'ai'e ete temoin oculaire. J'ai eu 1'hon- (*) Voici le beau parallele que fit le favant Freinsbem (i) en 1649 des deux Guftaves p ara i le!ef Rois de Suede & de Cbriftine Duos Guftavos f eorum immortalia beneficia , quis Cn tre les calamus, aut qua oratio J'atis celebret? Quorum uterque tantusfuit, utji cum aliis con- deux Gu/l*- tendas, facile -praf eras : Jin compares inter Je , facilius dicas f bunc & ilium fuijje ma- v \ s & Chri ~ ximum , quam uter major fuerit definlas. JNeque enim parum fallax ? obnoxium errori^' ne ' efl , amplitudinem Regum ex rerum geflarum externt fplendore arbitrari. Nam Ions qui folas rejpiciunt , ens ad vera judicia excutere necejje eft. Evenit enim interdum in bis qui terrain illuftrant Jideribus , nonjecus atque in cceleftibus, ut alia majorajint, alia videdntur. Hoc tamen apparet , per duos maxime Principes omnem hujus regni gloriam extollere Deum conftituije , Guftavum Magnum f Chriftinam Guftavi filiam. Sed il~ li quidem bellicas magis vittutes tribuerat , tit tamen , quoties per bella pojjet , domejlicas quoque res accuratijjime peritijjlmeque traftaret. Te vero, Domina, quoniam ad majus o- pus , pacem videlicet reducendam , ftabiliendam , perornandam fervabat , fie inftruxit , ut bis tantis rel/us effes modis omnibus aptifflma ; f nibilominus donee bellandum fuit , ni- bil etiam in iflo negotio ad jummam laudem defiderari in Te paterere. Quum enim in cor- pore fit minimum , omnes eas virtutes , quibus fummorum Imperatorum animi cenfentur t Tibi juperfuere : con/ilium in dubiis , conftantia in adverfis , moderatio in profperis , la- bor, prudentia, fides, in omnibus. Itafaftumejl, ut per multas ac illujlres vittorias , primo regni tui anno , cum Danice.Rege, quarto, cum Imperatore Romano pacem longs gloriofam f utilifflmam Tibi Tufsque compares. Quam quibus exornare modis inftitue- ris, quis queat in transcurju dicere. Nominabo tamen Urbem crefcentem, Oppidn conjli- t uta , juflitiam firmatam , levatum oneribus populum , mores emendatos , ftudiorum bono- rem & fruttus au&os y locupletatas Academias , ere&a Gymnafia , Mercaturam invalef- centem, opificia multa recens introdufta, agrum fupra veterem jtmplicitatem excultum , cu- ram Tuam adcommoditatemitinerum , dimenjiontm viarum, conflitutionem diver [or iorum , denique ad ea omnia qua videmus , quce jentimus , quorum utilitate fruimur , prolatum ; ut merito beatos dicere pofflm populares illos meos Germanics qui Tuafub tutela in pofte- rum adquiejcent. (f) L'original copi^ fe trouve imprint dans la preface du cinquieme Tome des Ac- tes de la Paix de Weftphalie (2). La tradiiftionimpriniL'e feparthnent me fut envo'idepar 1'Auteur meme peu de terns avant fa mort. 11 rapporte plufieurs particularity 1. c. tant fur le contenu de ce Caraftere de Chrifline , que fur les prthnieres Editions en latin, qui en ont t& faites , & dont nous donnons ia meillcure dans 1'Appendice. V- 1'Appcntl. N.XLVHI. (i) Dans la dedicace cle fes SuppUmenta. Livi*- (2) Par Mr.lc Confr. clc^f/frn 1, c. pag. g. 8cc> r.a pag. g. &c. Hhh 2 4 s8 ME MO IRES CONCERN ANT L ' dn - 1'honneur de 1'entretenir tres-fre'quemment , & elle m'a meme fait pr- 165 4 ' .- fent d'une chaine d'or avec une Me'daille du meme metal ; qui repre'fen- ,j te fon image. Sa ftature eft au-deflbus de la mediocre. Elle a le front large ; des yeux bien fendus & vifs , mais d'un regard fort doux , le nez aquilin , la bouche modique & jolie. Elle n'a rien de feminin que le fexe. Sa voix & fa maniere de parler, fa demarche, fon air & fes manieres n'ont rien que de male. Je la vois prefque tous les jours aller a cheval. Ouoiqu'el- le fe mette a la maniere des Dames , elle tourne & gouverne fon corps avec tant de fouplefle & d'agilite, qu'a moins que d'enetre fort proche, ,, on la prendroit pour un Cavalier. Quand elle monte a cheval , elle porte un chapeau fur la tete , & un jufte-au-corps par-defTus les autres habits , a la maniere des Dames d'Efpagne. On ne voit de fon habille- ment ordinaire que la jupe. Eile n'appui'e qu'un pie fur 1'Etrier. Cepen- dant elle pique fi bien fon cheval , que perfonne ne la peut fuivre. On diroit qu'elle vole plutot qu'elle ne court a cheval. Notre Roi a voulu, qu'on lui envoiat le Portrait de cette Princefle a cheval. L'habit qu'el- le porte a cheval , eft (1 peu de chofe , que je ne fais s'il vaudroit bien ,,435 Ducats. Et a la Cour elle eft auffi totijours habillee fort modef- tement. Jamais je n'ai vft ni or ni argent , ni dans les ornemens de fa tete , ni fur fes habits , ni a fon cou. Tout ce qu'elle a d'or fur fon corps , c'eft une bague. Elle n'a nui foin de fa parure. On ne pel- ,, gne fes cbeveux qu'une fois parfemaine. Quelque fois elle fera jufqu'a quinze jours fans fe faire peigner. Le dimanche elle met une .demie heure a s'habiller; les autres jours elle ne prend pour cet ouvrage qu'un quart d'heure. J'ai remarque quelque fois en lui parlatnt, que la manche de fa chemife e'toit pleine de taches d'encre qu'elle s'e'toit faites en ecri- vant. Je lui ai auffi vu du linge dechire. Quand on veut la faire fou- venir de ne pas fe negliger comme elle fait , elle re'pond , qu'il faut laif- fer ce foin aux perfonnes de'foeuvrees. Elle n'emploie an fommeil que 3 a ,, 4 heures, fe couchant fort tard & fe levant de grand matin. On fait ,, que pendant dixhuit mois a peine s'eft elle permife trois heures par nuit a dormir. A fon reveil elle donne 5. heures a diverfes Ie6lures.- C'eft ,, un fupplice pour elle que de manger en public. Lorfqu'elle mange feu- le, elle demeure a peine une demie heure a table. Elle ne boit que de 1'eau. Jamais on ne hi a entendu dire le moindre mot des viandes, qu'elles fufTent bien ou mal aprette'es. Elle ne commande jamais la Cui- fine. Je 1'ai vu manger plufieurs fois , & j'ai vu qu'elle ne touchoit ,, qu'aux mets les plus communs qu'on lui prefentoit , en renvoi'ant le ref- ,, te. Je lui ai fouvent oui dire , qu'elle vivoit fans chagrin & fans in- quietude, & qu'elle ne connoiflbit rien au monde d'aflsz grand, d'aflez ., nuifible, ou d'aflez rude, pour pouvoir troubler la tranquilite de fon ef- 5 , prit. Elle fe vante de n'avoir pas plus de peur de la mort que du fom- meil. Au fort de 1'hiver , lorfque la mer eft toute glacee , elle fe pro- mcne en traineau par les Campagnes & meme jufqu'a 4. 5. ou 6 heures } , de nuit. Elle deftine la matinee aux affaires politicoes , & affifte regti- lie- CH&ISTIN-E REINE DE SUEDE. 459 lierement a Ton Confeil. J'ai vfi qu'un jour qu'elle s'etoit fait faigner, L ' an - " elle tint Confeil avec fes Miniftres & qu'elle y demeura pres de 5 heu- i654 ' >, res. Incommodee d'une fievre qui dura 28 jours , elle ne fe difpenfoit " jamais du foin des affaires d'Etat. Elle dit , que Dieu lui a confie le j, gouvernement de fon Roiaume ; qu'elle s'en acquittera de fon mieux ,, pofftble , & qu'en cas qu'elle ne reuffiffe pas jtoujours , elle aura *lu moins la confolation de n'avoir rien a fe reprocher. ,, Les affaires publiques paffent toutes par fes - mains. Elle en difpofe & les acheve toute feule. Les Ambaffadeurs & les Miniftres etrangers ne ,, traitent de leurs negotiations qu'avec elle feule , fans etre jamais ren- voies a aucun Secretaire ni Miniftre d'Etat. Quand les Ambaffadeurs la haranguent dans les audiences publiques , elle repond toute feule. ,, C'efl un phenomene prefque incroiable , mais dont mes yeux font tous ? , les jours temoins, de voir ces grands Generaux d'Arme'e , ces Suedois, dont le nom & les armes ont cant fait trembler \Attemagne , qui fe tien- nent comme muets & tremblans en la prefence de leur Reine. Elle a perdu fon Pere avant qu'elle eut accompli fa feptieme anne'e. Qui au- roit crfi que dans un Etat auffi libre que l'eft la Suede , une Princeffe de ,, fept ans dut acquerir cette autorite & ce pouvoir, de gouverner feule, ,, fans de'pendre des Confeils de qui que ce foit , fans etre gouvernee el- ,, le- meme par qui que ce foit? Qu'elle feule expedieroit tout & difpofe- ,, roit tout? Elle veut avoir la connoiffance de tout ce qui regarde leGou- vernement du Roiaume. Elle a Id tous les Traitez qui concernent ces ,, affaires domeitiques, quoiqu'il y en ait beaucoup & de fort amples. Je fai qu'ai'ant re^u un de ces Traitez de 28- feuilles , elle le lut & 1'expli- qua en latin a un certain AmbaiTadeur , dans un fort petit efpace de ,, tems. Elle aime toutes les. Nations , en eflimant la vercu partout ou ,, elle fe trouve. C'eft-la 1'unique objet de fon attention. Elle dit, que le monde n'eft compofe que de deux Nations ; 1'une celle des honnetes gens, 1'autre, celle des medians ; qu'elle aime la premiere en deteftant - 1'autre, fans avoir aucun egard aux differens noms, par lefquels on dif- ,, tingue autrement les divers peuples, dont la terre eft habitee. Elle ne , , pent pas fouffrir 1'idee "du mariage , & perfonne ne fauroit lui perfuader de fe donner a un Epoux , parce , die elle , qu'e'tant nee libre , elle veut mourir libre. Dans la converfation ordinaire , elle eft fi familie- ,, re, qu'on ne la prendroit pas meme pour une Dame de grande qualite, bien loin de la croire Reine. Elle aborde la premiere les perfonnes avec lefquelles elle veut s'entretenir ; elle les prend paries mains, elle les agace , el'e rit ; elle badine avec une franchise extreme. Cependant elie infpire en meme tems nn refpe6t qui fait que Ton eft aufli timide en fa prefence que le feroient des enfans. Quand elle traite des affaires fe- ;, rieufes , comme par exemple , quand elle donne audience aux Ambafla- deurs , elle fait prendre un air Majeftueux qui en impoferoit a 1'homme ,, le plus hardi. Je Tai vCi palfer dans un inftant d'un entretien familier a ,, la gravite qui convient a la Majefle Roi'ale , c'eft-a-dire , d'une extre- ,> mite a 1'autre, que je me defiois de mes propres yeux. J'en prens a tc- Hhh 3 mom 430 MEMOIRES CONCERNANT ^' an moin Mr. Pimentelli , Ambafladeur d'Efpagne , pour qui la Reine a tant t654 ' d'egards & tanc de graces , que tout le monde eft perfuade , qu'il n'y aperfonne a qui cettePrinceffe ait fait tant d'honneurs. Jl eft toujours a- vec elle. 11 raifonne avec elle tous les jours , & nonobftant cela, quand il eft queftion de lui parler d'affaires , il avoue , qu'il trouve alors , ? la Reine fi difference d'elle-merae , a caufe de 1'air MajefJueiiK qu'elle ,, fait prendre par un don particulier de Dieu , qu'a peine la peut-il recon- noitre. Elle a des Dames d'honneur a fa Cour , pour la pompe plutoc que pour fon fervice. II femble qu'elle en fait fort peu de cas. Elle ne converfe qu'avec les hommes. Elle n'eft ni difficile ni delicate. Elle ne craint ni le froid, ni la plui'e, ni le foleil, ni les veilles, ni rien de fem- blable. Si elle etoit en guerre centre quelque autre Puiffance, il eft fur qu'elle feroit la Campagne a la tete de fes Troupes. Elle fait 10. ou ii. langues: le Latin, le Grec , I'ltalien, le Franfois , I'Efpagnol, leHaut- Allematid, le Flamand , le Suedois , le Finhndois 9 & fi je ne me trompe , encore le Danois. Pour YHebreu & VArabe, elle le fait lire, & du moins elle enentend un peu. Elle lit & poffede tres-bien les anciens Poetes. Pour les Poe'tes modernes , ItaKens & Frangois , elle les fait auffi prefque par coeur. Elle a parcouru tous les anciens philofophes. Elle a lu un grand nombre des Saints Peres, tels, que S. Auguflin 9 S. Ambroife , S. ,, Jerome , Tertullien , S. Cyprien. Mais ceux-la ne font pas trop de fon gout. Elle eftime beaucoup plus Laftance, S. Clement d* AUxandrie , Ar- nobe , Minutius Felix , quelques ouvrages de S. Jerfrme , & quelques uns ,, de ceux de S. Cyprien. Celui qu'elle prefere a tons les autres c'eft S. Gregoire de Nazmnze. On ne fauroit fe faire honneur devant elle d'une penftie de quelque ancien Poete qu'elle ne s'apper^oive d'abord de la fu- percherie. Elle a une memoire d'Ange. On diroit qu'elle fait tout , & ,, qu'elle n'ignore ni n'oublie rien. Elle fait paroitre la force de fon juge- ,, meat dans les expeditions qu'elle fournit , & pour lefquelles elle eft fi ,, jaloufe de fon autorite, qu'elle ne fe fert d'aucun aide. Elle occupe je ,, ne fai combien de Secretaires , qui fuffifent a peine a ecrire les Lettres qu'elle dicle , & qu'elle repafle & cdrrige toute feule. Elle eft fi libe'- rale , que fi Ton ofe dire qu'en quelque chofe-elle ne garde point de me- ,, fure, c'eft a 1'egard des prefens qu'elle prodigue. Elle a attire en Sutde ,, les plus grands Savans & les Artifans les plus excellens, qu'elle a pu de'- terrer tant en Italic qu'en France & en Allemagne. II n'y en a aucun qui ,, ait ete renvoi'e fans quelque marque infigne de fa liberalite. Elle obfer- ve religieufement les Joix de la Juftice. Aufli dit elle , qu'elle n'a par- donne que tres-rarement des Criminels qui avoient merite la mort,quoi- ,, qu'elle n'ait jamais condarnne perfonne au dernier fupplice , qui ne lui ait fait verfer des larmes. Elle dent inviolablement ce qu'elle promet. II n'y a rien de plus beau que les raifonnemens qu'elle fait fur toutes for- tes de fujet. Sa benignite egale toutes fes autres vertus , comme tons n les etrangers 1'eprouvent , parce qu'il n'y en a point qui vienne voir fa ,, Cour, a qui elle ne fafle 1'accueil le plus gracieux. Un Comte Italkn, ,, qui etoit venu ici de la Cour Imperials , dit encore un de ces jours: Quand CHRISTINE REINE DE SUEDE. 431 Quand je raconterai a Vienm aue j'ai eu 1'honneur de me promener a- L ' an vec la Reine dans Ton Carofle , on ne m'en croira pas dans h ville de 1<5s4 ' Vienne. Cependant je 1'ai vfl de mes yeux , non feulement aller en Ca- " roffe avec la Reine, mais^auffi manger plus d'une fois a fa table. Mais encore que cette Princefle fafle des carefles a tout le monde , il n'y a ,, neanmoins perfonne a quielle en fafle tant qu'a Mr. Antoine Pimentelli, lequel elle diftingue, dit-elle, tant a 1'intention de notre Roi ,pour qui elle a une affe6tion & une veneration fmguliere , qu'a caufe des merites perfonnels de Mr. TAmbafladeur lui-meme. 11 ne manque a cette admi- ,, rable Reine que la bonne Religion, & quoique j'aie eu plufieursconver- ' fations avec elle , il ne m'a pas etc poflibie de la mettre fur ce chapitre. 5> Elle eft liee par les Conftitutions du Roi'aume , dont elle ne pourroit plus 6tre Reine , fi elle venoit a changer de Religion. J'ai pourtant de >} frequentes conferences fur ce fujet avec un Pretre Francois & avec les Gatholiques qui font ici en aflez grand nombre. Mais on a fait accroire a tous les Strangers, que fi un Suedois change de Religion, il y va de fa tete. Dans le moment que j'ecris ceci , le Baron de Steinberg , Grand- ,, Ecui'er de la Reine , vient de prefenter de la part de S. M. un Carofle 5, tres-magnifique a Mr. Pimentelli. Ce Carofle efl double de velours rouge & par feme de galons d'or & d'argent. La ferraille de la Caifle eft toute ,, de 1'or. Et ce Carofle eft attele de fix Chevaux noirs , tous grands & vigoureux, que Ton a tires de 1'Ecurie Roi'ale , ou ils etoient venus du Haras Roial. Mr. Pimentelli , pour en temoigner fa reconnoiflance , ,, m'a charge de porter a la femme du dit Baron de Steinbwg un bijou de brillans , qui vaut 1200. ecus. Je fuis aflure.que ce Prefent que notre Ambafladeur vient de recevoir , fera bien mal au coeur a I'Ambafladeur de France & a d'autres ennemis de notre Roi. &c. a. Stockholm le 10 Odobre 1653 (*) , Le troifieme Cara&ere de Chriftine fut fait en. Flamand en 1654. & fe noifiemc trouve imprime en cette langue dans le Mercure Hollatidois (a). n voiciP ltraitde la tradudion. Chriftine , fille du Grand Guftave-Adolphe avoit atteint Tage de 27 a 28 ans lorfqu'elle abdiqua la Couronne de Suede. Cette Princefle , avec un coeur plus ouvert qu'on ne 1'a ordinairement , favoit neanmoins dansl'oc- cafion fi bien retenir fes paflions , qu'elle en devint maitrefle abfolue. L'air, 1'efprit, 1'application , les manieres qu'on vit en elle des 1'enfan- ce , font au-deflus cfe toute admiration. Lorfqu'elle fut montee fur le Trone , elle fit bien connoitre que ce n'etoit pas envain que la Nature 1'a- (o) Ad ann. 1654. inois de Mars pag. 27- landfe Mercurius : Nous le citerons Jouvent 29. Le litre de cet, Outrage in 40. eft Hoi- dans lafuite. (*) Ce meme portrait de Cbrijline eft traduit en Italien fous le titrc de Qualita, in- clinationi i coftumi della Regina dl Sueiia. Mr. de Blome , Confeiller de Guerre a Caf- Y: Jelj m'en a communiqu6 le Manufcrit. A JLti j\> 43* ME MOIRES CO NCERNANT ' an - ,, 1'avoit ornee de qualkes fi cminentes ; car elle n'eut d'autre foin , ; qoe l654 ' .. celui de procurer le bien public. . Exa6ie dans I'adminiftration dela juf- tice, elle etoit en meme cems touchee d'une companion telle qu'elle di- foit fouvent n'avoir jamais condamne de criminel a more, qu'il ne luien coutat des larmes. Jamais perfonne ne fortit d'aupres d'elle , fans avoir recu des marques de fa protection : & ce qui merkoit d'etre raporte d'a- bord , fingulierement affectionne'e pour les gens de lettres , elle honnora non feulement les Savans de fon Roi'aume, mais encore elle invita les etran- gers de tout pa'is a la venir trouver. L'experience confommee de Grptius, 1'eloquence judicieufe de Saumaife , la philofophie admirable de Defcartes ne furent rien pour ces favans, qu'ils n'euflent etc voir cette Etoile.du Nord , & ils ne la qukterent pas fans avoir appris par eux-memes la verite de ce qu'on en difoit ; auffi s'en retournerent-ils avec une fatis- ,, faction & une admiration auffi grande, qu'avoit ete le defir qui les avoit portes a la venir voir. Ce que cette Princefle a forme de Poetes, de ,, Peintres & d'autres beaux Efprks , eft aflez qonnu de tous Jes Hoi- landois. Quant a fa perfonne elle e'toit d'une taille mediocre ai'ant les, epaules hauts, les yeux vifs, le nez un pen courbe vers le milieu. Elle n'avoit 3, de femme que le fexe ; fa preflance, fes manieres, fa voix meme etoit tout a fait male, Elle fe tenoit a cheval auffi bien qu'aucun .Cavalier , quoiqu'elle s'y affit de cote. Cherchant peu fes aifes, elle- etoit fi eloi- gnee de fe delicater, que dans le plus rude de 1'hiver elle fe faifoit trai- ner fur la glace par des Elans ou des Rennes qui lui faifoient faire quel- .,, ques milles SAllemagne en une heure de terns. Jamais on ne 1'entendk fe plaindre de la nourriture, mais elle mangeoit la viande la plus com- mune & la plus dure avec autant d'appetit que le gibier fe plus exquis. Jamais on ne la vit oifive, cinq heures qu'elle mettok a dormir, luipa- .roiiloient encore trop. Elle favoit dix langues, & paffok cinq ou.fix heures le matin a lire & a ecrire; en quoi elle etok (i expeditive, qu'il ne lui venoit aucune lettre des autres Etafs, qu'elle ne lut fur le champ; elle en diftoit tout de fuite la reponfe, & donnoit en meme terns tous les ordres neceflaires pour 1'Etat. Avant midi apliquee a tout ce qui concernoit 1'interieur & i'exterieur du Roi'aume, elle donnoit des audien- ces, conferoit avec les Amballadeurs etrangers, & regloit les afFuireg de la Couronne. ,, Le refpect, que fa grande retenue lui attiroit des Courtifans, etoit au- deflus de celui qu'on porte a tout Potentat Chretien. Quoique quelque- fois elle s'ega'iat dans fes difcours, cependant fon autorite n'en etoit nullement diminuee, vu qu'elle favoit faire tout avec mode'ratioji; & c'etoit une merveille de voir, qu'a peine ouvroit-elle la bouche, que ,, chacun trembloit en fa prefence, jufques-la meme que le Grand 'General ,, Wrcmgel, qui a fait trembler toute \Alkmagne ^ e'toic lui-meme devant ,, cette Princefle aufli foumis qu'un enfant. Elle ne parloic ordinairement que Franpois , qupique bien verfee dans les autres lungaes ; . mais elle ne put bannir la jaloufie de fa Cour. Les CHRISTINE REINE DE SUEDE. 433 Les Franfois ne purent voir d'un bon ceil la familiarite qu'elle temoignoit L ' an a Dom Antonio Pimentelli, AmbafFadeur d'Efpagne, auffi repandirent- I<554 ' ils que cet Ambafladeur traitoit d'un manage entr'elle & le Roi des Ro~ mains y & que par-la I'Efpagne cherchoit a s'aflurer une etennelle amide avec la Suede. Les Anglois n'etoient pas moins attentifs fur la Reine, parce qu'elle s'etoit toujours liee etroitement avec la France , & qu'elle avoic. etc (i familiere avec Mr. Chanut Ambafladeur de cette Cour, qu'elle lui avoit decouvert fes defleins les plus fecrets. Ceux de Hollande & de Dannemarck qui etoient encore en guerre , yoioient avec peine Mr. Whiilock avancer fl fort dans fon Traite. Quant aux Anglois Roi'aliftes qui crevoient de jaloufie, les uns allerent porter leur chagrin en Alk* magne , & d'autres en Pologne. Toutefois comme nous avons parle de la fagefle & de la prudence de cette Reine , elle la fit voir aux Ambafladeurs des differentes Cours , en travaillant a les fatisfaire tons. Elle renvoi'a en Efpagne Pimentelli dans un vaifleau fort orne de dorures: Chanut , fon Confident, ai'anc exe- cute tout le fujet de fa commiflion , Vint de Suede a la Hate avec la repu- tation qu'il s'etoit juftement acquife. L' Ambafladeur Anglois obtint un nouveau Traite d' Alliance. La Hollande & le Dannemarck en obtinrent pareillement avec toute forte de bons offices j & la Reine fit a tous des prefens dignes de la magnificence Roiale. La nouvelle de 1'abdication de la Reine Chriftine (*) ne fut pasplutotre- pandue, que tout le monde en fut furpris. Mais les jugemens qu'on en porta , etoient bien djffe'rens. Qiielques-uns eftimoient infiniment cette action & croioient que cette Princefle en quittant la Couronne de Suede 3 meritoit celle du monde entier. D'autres 1'accufoient d'avoir quitte fon Roi'aume par force ou par legerete (a). On Ten loua beaucoup & on Ten blama de meme. Pour ce qui eft de la Reine elle-meme, elle previt les divers jugemens qu'on en feroit & s'en expliqua avec une grande fermete d'ame dans fa lettre au Sr. Chanut ci-deflus inferee. ,, Je permets a cha- cun, dit-elle, de juger de toute cette affaire ielon fon genie. Je ne fau- rois oter cette liberte a perfonne , & quand je le pourrois , je ne vou- drois pas le faire. Je n'ignore pas que peu de gens en juger ont en ma faveur, & je me flate meme que vous etes de ce petit nombre. Pourle refle (a) Mtm. de Mad. de Motteville Tom. IV. p. 429. (*) Le Sr. Picques a remarque", (i) que depuis que Cbrifline abdiqua, on 1'appelloit {implement la Reine Cbrifline. Quelques-uns en Suede pr^tendoient meme, quepuif- qu'elle avoit quitt^ la Couronne & y avoit renonce" entierement, elle devoit auffi re- noncer au nom & aux armes de Suede : & Gal. Gualdo dit (2) qu'a fon entree a Rome el- le ne fe fervit que des Armes de fa famille de Wafa. On trouve pourtant que fes Ca- chets portent indifferemment les trois Couronnes ou les Armes de Waja. Pent etre re- prit elle les trois Couronnes quand elle m^ditoit de remonter fur le Tr6ne de Suede. Nous en parlerons dans fon lieu. (i) Chanut Mem, T. III. p, 43 J & 3f$. . . (2) IJift. di Gkr'ftina ?. T&me L lii 434 MEMOIRES CONCERNANT L' an refte du monde, il ne fait pas mes raifons & ne connoit pas mon genie m & mon humeur , ne rn'en etant expliquee a perfonne qu'a vous & a ua grand homme de mes amis (a) , aufli capable d'en juger que vous pou- -vez L'etre". Comme on s'eft donne le loifir de confulter divers Auteurs qui ont dit leurs fentimens fur un evenement fi extraordinaire, & que le Pyrronifme hiftorique a trouve un grand appui dans le partage des Hiftorieas & da Public fur 1'e'xemple memorable de fon abdication , le Lefteur voudra bien permettre qu'on faffe ici mention de ce que les principaux en ont juge (*). Quant (a) Ce fut apparemment le Sr. Pimentelli. (*) L'abdication de Cbriftine tenoit tout le monde en fufpens, chacun en raifonnoit de fa fa$on. Entr'autres pieces -il en parut alors une en latin, que nous mettrons icL Je la tiens de Mr. le Confeiller Warmboliz, qui m'a dit, qu'elle pourroit etre du Sr. Trifcbman, Confr. du Roi de France & fon Resident a Strasbourg, qui fe plaifoit a fai- re ces fortes de compofitions & qui a meme ^crit plufieurs livres en ce (lile-la. Ce- pendant le titre de la Copie qui s'en trouve dans les Palmskoldiana indique, que quel- que Jefuite en Stirie a ^t^ Auteur de cet ^crit. La voici : Videns politicus in exftafi. De Sereniffima Chriftina Regina Suecia videns fum & vocor At in bac Regina , quo video plura , eo video minus t Video molientem rara,. nee capio, jjgentem mira , nee penetro , Loquentem Jublimia , nee attingo. Curiofus Orbis eft , JEt quia Orbis eft rotundus Jnde rerum inconftantia Rotundus currit , inde f difcurrit , Fatigantur ingenia , fedfuccumbunt , ExercenUir lingua , fed aberrant. Neque oculus eft tarn acute widens Ut bic videat , Niji cui ipfa cortinam removerit. Una mulier Regina Regibus fecit confujionem, Opinionem magnam in populo. . .. Vert novum Orbis Miraculwn ! 'Eoque majus, quod infoemina Chriftina , Magno Regs genita , Magnos uti que , id eft , Regios fpiritus accepit Et Regno diuturno pares. Nunc repentinum Sceptro di&ura vale , Licet videam ego , non credo , Credat orbis ? Ego miror Nifi forte Regnum dejerat Ut tutius ad Regnum adjpiret , Corona Regla quantum eft animorum magnorum illicium t Ut ilia caput unum exornet , Quanta Capita fatigantur ^ cadunti Et tamen fe vera video Coronam a fe &p purpuram abjiciet ? Vel ex hoc ipfo. Filia Magno Majer Parents; Illttft CHRIST I,N E REINE Dan tent le Sceptre & la vie a leurs Rois: & des Reines s'en depouillent vo- m tontairement , pour fe donner a une vie privee & aux Mufes. Charles- ' Quint s'en repentit le meme jour qu'il fe demit du gouvernement. Mais ' ce n'eft pas a moi , ajoute-t-il , de penetrer dans leurs fecrets". Malheur a nos Mufes, dit Medoniur , () fi nous ne tranfmettons pas a la pofterite cette action inouie d'une Reine incomparable , dont la magnanimite furpafle tout ce que les hiftoires nous difent des plus grands Heros. Get exemple de moderation dans la Reine Cbriftme-, dit Bizot, (c) " d'avoir fait une abdication volontaire de fa Couronne , a etc rare dans les fiecles pafTes, mais doit etre appelle un miracle en celui-ci, ou Tin- teret & 1'ambition font les paffions dominantes de Tun & de 1'autre fexe". II y en eut pourtant d'autres qui regarderent cette affaire d'un tout autre Leg fe . ceil , entre ceux - ci Nicolas Heinftus en faifant 1'eloge de cette action de la mens de '' Reine; ne laifTe pas de lui ecrire ceci : (d) Croi'ez-moi , Madame , yifl^J2#& quoique quantite de gens vous aient adrefle leurs louanges , la plupart Fcr/?r ii- ont plut6t revere votre etat que Votre Perfonne : plufieurs ont loue l a ,, Reine , mais peu de gens Cbriftine : rien ne vous importe tant en ce- monde ici prefentement , que d'avoir des. egards pour ce qu'on appelle , ? Fortune , puifque vous 1'eloignez de vous , quoiqu'elle foit le plus grand, ,, bien que les Regnans puifient fouhaiter. ....... Les defauts d'un Gou- ,-, vernement ne peuvent pas fe cacher : on les diffimule feulement , & on ne les manifefte pas , par le refpeft qu'on porte a 1'eminente qualite de Roi. Mais penfez qu'en quittant le Trone, tout le monde ofera cenfu- rer vos aclions avec la derniere rigueur , depuis que vous vous etes de- ,i pouillee de la prerogative Roi'ale qui vous mettoit a, cou\ r ert de toute ac- cufation & de- toute pourfuite (*) ". Bocbart en ecrivit auffi fort femement a Fafjius en ces termes : (e) Pour ,, Sa Majefte , par qiii je devois commencer , je fuis fi etonne d'apprendre ce que j'en apprend , que je n'y penfe , que comme a un fonge. Ce n'eft pas que je n'approuve fort qu'elle meprife fi fort les grandeurs du 5> monde , auxquelles tant d'autres afpirent avec tant d'efforts , que la plu- part (a) Barman SylL Ep. T. II p. 78^. Marville T. III. p. 309. (fc) Idem T. V. p. 631. (e) T. I. Epift Mjc, Ribliotfaca Remonjlr. (c) Hifl. Metall. de Roll. p. 230. Amftelajd. 72. 395. Cette lettre eft de Caen (d) Burrnan. /. c. T. HI. p. 330. Huet du i. Juin 1654. comment, de Reb.fuis p. 112. ^ 113. Vign. (*) Nous intererons dans 1'Anpendice cette belle lettre de Ifeinjius , dans fa propre v langue qui eft la latine. C'eft dommage que le Public ne puifle pas la lire toute entie- N, re. II y a apparence que le Sr. P. Barman 1'a eue en entier. (i) quoiqu'il ne 1'ait pas Toulu ainfi communiquer, par le de'pit qu'il avoit centre Chrijline. (i) V, Son, SyU, Epift. T. V- pag. 772. & 775. 44 MEMOIRES CONCERNANT n part fe rompent le col , pour y parvenir : & que je ne fois ravi de favoir , que s'etant depouillee , elle (era peut-etre en etat de s'approcher plus " ,> pres de nous & de venir peut-tre en des lieux , ou je pourrois avoir 1'honneur de la voir encore fllus d'une fois, ce que je n'euflepu efpe"rer, (i elle fut demeuree en Suede. Mais le coeur me faigne quand je penfe qu'elle fe prive volontairement de tant de moi'ens de faire du bien , lef- quels etant une fois hors de fes mains n'y reviendront plus. Elle s'en repentira mille fois quand il n'en fera plus terns & lorfque le mal fera fans remdde : ne fut-ce que pour le deplaiiir qu'elle aura de voir les juge- mens defavantageux qu'en fera la plupart du monde. Car on fe plait na- turellement a mordre fur les plus grands , furtout quand on en penfe a- v. PAppen- v i r quelque fpecieux pretexte. II y en a qui vous foupgonnent , ajou- dke N. LI. te Bochart a J^oJJlus, d'etre du nombre de ceux qui lui one donne ce con- v.i'Appen- fei' > ce 9 ue J e ne P u * s me P e rf ua der". Le favant Forjlner en die plus li- dice N. LII. brement fes penfees , & pour mettre d'autant mieux le Lefteur au fait de ce qu'on jugeoit en ce terns -la de 1'abdication de Cbrijline , on infererar v. rAppen- dans 1'appendice Tune & 1'autre lettre de ces deux favans en y ajoutant ce dice N.LIII. qu'en dit le favant homme deguife fous le nom de Franfois Irenicus, A ces temoignages nous ajouterons brievement ce que d'autres ont penfe & eerie de cette aftion de Chriftine , en indiquant les endroits oil on le peut lire tout au long (*). II y cut des perfonnes qui crurent qu'il y avoit un miftere cache dans cette abdication , & la Comtefle D 1 -Annoy pretendit Favoir decouvert , (a) en piffe'rcntes QQ que les Etats du Roi'aume de Suede avoient declare , que li Chriftine vou- "abdkatlon loit fe maricr , elle devoit choifir pour Epoux le Prince Palatin Charles-Gu- de Chrijlim.Jlafte fon Coufin : mais qu'ai'ant pour lui une grande averfion , le depit 1'a- voit prife a un point , qu'elle avoit mieux aime renon^er a la Couronne, que de fe marier contre fon gre (f). Avec cela s'accorde aflez ce qu'un autre Auteur plus moderne en a marque, difant (): 1'abdication de Chri- ftine de Sugdc vient apres celle de Charles -Quint. Elle n'eft pas moins cer- tame (a) roiage d'Efpagne T. II. p. 8- fff. //. p. 35o. Vign. Marville /. c. T. III. />. 309. Aitzema (fc) Bierling de Pyrrbon. Hifl. p, 41. ^fr. I. c. T. L p. 886. Mem. dc la Houflaye T. Bibl. Germ. T. X. p. 20-23. (*) Outre les Auteurs que nous aliens infe"rer au fujet de {'abdication de Cbriftine, nous citerons ici d'autres plus ou moins e"xafts lesquels ont de meuie parle! de cette af- faire (i). (t) Nous avons inf^r^ la lettre de Wbifller au Protefteur Cromwel ou il eft parl^ tout au long d'un Manage entre Cbrijline 6c le Roi des Romains pour dcvenir dans la fuite Imptratrice. (i) BecmMnni Hift. Civ. Cap. VI. $. VII. nag. a. p. ii. qui eft pourtant peu conforms a ce ' Voi'ez ' par. 56. Le Clerc. Hift. de Holl. ad ann. i<5;4. p. 3J3- qu'il dit de cette abdication ad ann. 1660. p. 512. Vigneul Marv. Melanges T. III. p. jpz. Je. Faes Ko'iier Miintz-Bel. T. XVI. p. 3J9- & 3<\ Re iff in not. ad. Invit. paneg. p. 24. Gundl Staats- Jlefcbreib. nach Span\en pag. 231. Ikre Difiert. de Difc. C. IX. $. is. p. 313. Ludolff Schauh. ad. abclicat. Regia p. j- & i Burgoldenfu Difcutf. b. ann. p. jzj. not. Httttrg D*nn, Hift. ad k, aU Ioftrm, fans Cfaieo-Siiec, pag. 143, ficc, CHRISTINE REINEDE SUEDE, 441 taine que 1'autre , mais les raifons en font encore plus douteufes. Dans L>au 3'affemblee des Etats de Suede que cette Princefle convoqua a Upfal, pour .J abdiquer folemnellement , elJe en allegua pour raifons, la charge < lepoids " du Gouvernement , 1'inclination qu'elle avoit pour le repos & pour la re- traice & le foin de fa fante (*) : elJe n'eut garde d'alleguer celui de fon fa- lut : car quoique peu de terns apres" elle quittat fa religion pour embrafler celle de Rotne , ce n'eut pas etc une raifon a dire en StSde y ou on la con- noilToit bien. Elle paifoit dans 1'efprit de tout le monde pour regarder les Religions avec beaucoup d'indiffe'rence, & li elle embrafTa la Religion Ro- maine, c'efl qu'elle la trouva la plus belle & la plus propre a lui faire hon- neur dans le monde. Get Auteur ajoute : ni le changement de Religion de Chriftine, ni les raifons qu'elle allegua n'aiant pu perfuader les gensedai- jes qu'aucun de ces motifs ait eu part a fon abdication , voici comme ils ont concu la chofe : Je 1'exprimerai dans les termes de 1'Auteur : Les reve- ims du Roiaume etoient tout- a- fait epuifes par les profuflons de Chriftine, D'ailleurs Cbarks-Guftave , Prince hereditaire & qui devoit.lui fucceder, en cas qu'elle mourut fans enfans , avoit le commandement de* 1'Armee. En J'epoufant (comme ce Prince & les Etats de Su&de 1'auroient fouhaite) elle epoufoit fon Maitre & fon Roi , ce qui ne 1'accommodoit pas. Elle ne pouvoit non plus prendre un autre mari, fans ofFenfer Charks-Guftave , qui avoit la force en main & la faveur des Etats. II n'y avoit pas moins d'in- convenient a ne fe point marier. Charles- Gitftave , magnanime & anibi- tieux, comme il etoit, n'auroit pas fouffert fans impatience , le delai d'n- ne fortune a laquelle il afpiroit (& qu'il avoit bien merite (f ) ). De-la mille mecontentemens fecrets & des troubles inevitables dans 1'Etat , dont Chriftine auroit pu ecre la vi6lime. Dans cette fituation des chofes , elle prit le parti de renoncer a un Roi'aume qu'elle ne pouvoit pas gouverner a fa (*) Ces raifons ne s'^cartent pas beaucoup de celles qu'elle allegua an Stfnat de Sue- de 1'an 1651. quand elle voulut quitter le gouvernement la premiere fois. Tout cela eft dtkluit plus au long dans les Regttres du Se"nat en ce terns-la (i). (f ) L'Hiftoricn Nani lui donne ce caraftere : (2) Andcwano in queflo Principe dal Portrait de , pari gran penficri e profondo fegreto : Ambitione di gloria e fagacitb di condotta valor Charln-Gi^ , neirarmie prudenza civile: onde Ji revolgevano a lui, come ad un aftro nafcente i defeg-^ avf ' , ni de Proteftanti edi voti de Malctnttnti: ed cgli fubito per non mancare nelle premitie , della fama a fe pejjo , raccoltd un ejjercito conpretejto di domare la contumacia di Brema , , lafciava in J-ojpefo quali fujj'ero i fuoi fini e defegni. La guerre qui fe tramoit alors centre la ville de Breme ou la Pologne , ne pouvoitpas fe traiter fi fecrt^tement, qu'on n'en foupconnat quelque chofe. Entr'autres ii y a une. lettre de Mr. de Saumaife de"ja du 30. Sept. 1652 qu'il e'crivit a quelqu'un de fes Amis en Angleterre ^ oil il lui dit: que fes nouvelles de Suede parloient de guerre en ce pais-la , mais qu'on ne s'expliquoit pas contre qui ou comment (3) (i) Dans Pa.link.iild ad h. aim. pag. 589. f?) C'eft Mr. Bernard, Doi^eur en Medecine bift. Brand. (6) lbld.pag. 312. L. VI. J. i. item Chanut T. I. p. 130 ? (c) Ib. p. 433. fc? Pufend. de Car. Guft. 214. T. II. p.8i fif aoo.^T. IIL^ag. 351. Kkk 2 444 MEMOIRES CONCERNANT manquer d'e'puifer le Roi'aume autant d'hommes que d'argent & I654> d'endetter la Couronne (*). Cependant on n'a qu'a fe rappelier , que dans y. ci-deffusle difcours que nous avons rapporte ci - deflus que le Chancelier Oxenflierna 2- *7. t j n t a Chriftine au nom du Senat & des Ecats du Ro'iauroe , 1'an 1651: quand ils prierent la Reine de ne point fe demettre du Gouvernement & de continuer radminiftration ; il lui declara an nom des Etats qu'ils n'epar- gneroient rien pour maintenir fa grandeur , fes droits & fon autorite , & qu'ils lui offroient tous de nouveau pour cela leurs vies & Jeurs biens : & que quoique la Couronne fut fort endettee, ils etoient pourtant prets d'ac- quitter de leurs bourfes routes les dettes , & de faire un fond ft confidera- ble pour 1'entretien de fa Maifon , qu'elle auroit moien de 1'entretenir plus magnifiquement qu'aucun Roi du Nord. Celui done de tous l es Ecrivains qui merite le moins d'attention a eel egard , c'elt I'Auteur des Memoires pour fervir a 1'Hiftoire Univerfelle, q U and il dit (a) que Chriftine quitta le gouvernement lafle de commander, apparemment parce qu'elle commandoit a desfujetsqu'ellecro'ioitpeudignes d'elle. (f). Car on defie cet Ecrivain dans toute 1'epoque, ou il renferme fon hiftoire, de nomrner une feule nation, qui plus que la Suedoife fe foit diftinguee tout ce tems-la , par fon amour & fon refpeft pour fes Souve- rains , auffi bien que par fes belles a&ions , tant civiles que militaires : ait lieu que les Compatriotes de cet Ecrivain (b). s'y font rendus plus d'une fois, criminels, non feuJement par les meurtres de leur legitimes Rois, maia auffi par des revokes centre leurs Souverains, ou. dans les guerres civiles des milliers de Concitoi'ens ont etc facrifies & fe font entretues inhumaine- ment (j). Quant a ce que ce meme Auteur dit, que fon abdication ne fur pas. (a) L. c. Tom. TIL p. 30. N^goc. Seer, de Munfter T. I. dbf. 21. p. (&) F. rHift. de Mr. de Thou ad ann. 260. 262. 264. ?c. item Wicquefort Ani- 1571. Mezerai Hifl. de France ad E. A. bajfadeur Livr. IL Se&. VI. pag. 63. jcfuite. L'etat des (*) ^e Sr. Picques dit ceci la-deffus (i). Apres 1'abdication de la Reinc Chriftine le dettes de Chancelier Oxenflierna, fit faire un e"tat des dettes de la Couronne. On difoit qu'elles Suede en ce montoient a dix millions d'or , & que la Reine Cbriftine n'avoit laifl^ au Roi que huit teras-la. cens m jn e cas fa re venu: dequoi le Roi fut fi ^tonn^ & fi toucht^, qu'il dit: que s'il avoit fu les chofes comme elles Etoient, il n'auroit jamats accept*^ la Couronne. Pitfen- dorf dit a ce fujet(2) Redimitus fuit ZJ/a^em.^eCarolus-Guftavuspompa mediocri f lon- 8 s ifr& fplendorem , exhaufto tumarario, f quia ipfe per inania / p, 3^2 eft. des JoiUIWlU ]). 12.9, CHRISTINE REINE DE SUEDE. 445 pas fi generalement applaudie, que beaucoup de gens ne la regardafTent comme 1'effet de fa legerete & de fon inconftance qui la portoit a voir du I pai's. On ne niera pas que cela ne foit une des raifons qui 1'avoient pft difpofer a prendre cette refolution. Mais il ne fied pas bien a cet Auteur de parler fi mal de 1'ouvrage de fes Compatriotes & de fes Confreres. Car c'eft deux de fes Compatriotes qui fervirent de principaux inftrumens pour infpirer cette legerete a la Reine Chriftine , comme nous 1'avons remarqtie ci-defTus,& nous ferons encore voir ci-apres que les Confreres decememe v - *ag 242- Hiftorien furent les premiers a la confirmer dans fon deflein , dememe^. e,, trop de ce qu'elle avoit facrifie dans un age encore tendre , les apas de la grandeur aux charmes de la Philofophie. Cependant fi elle avoic etc 1 54 3, vraiement Philofophe , ni le meurtre de Monaldetki 9 to. les regrets (2; V, CHlcfibns la Icttre tie Ckryline dw if. ad 1), ana. p. H. & ^r^old. I c- p. HJ. CHRISTINE REINE DE SUEDE. promefTes qa'il lui avoit faites, de la maintenir dans la pofleflion des terres qui lui avoient etc aflignees pour fon entretien: car je fuis m perfuadee , difoit Chriftine , que Ton ne s'informera gueres en Sul- " de , ni de ce que je ferai , ni de ce que je deviendrai. Elle finif- foit en 1'affurant , que quelque chofe, qui lui arrivat , elle ne feroic jamais rien centre les interets de la Su&de (a) f ' On remarqua, que cette lettre avoit donne beaucoup a penfer au lloi. II avoit juge, que Chriftine avoit forme le deflein de ne plus revenir clans le Roiaume. 11 com- (a) Chanut Mem. T. III. p. 464 f 4'<58. chaine d'or. II ajoute, que la Heine e'tant forde de 1'Eglife, unHuifller du Magiftrat avoit trouve" dans la tribune, oil elle avoir e"te" affife, un livre relic & dp re fur tranche, Lieee n)?iHx buc allegabuntur. Rextamen, qua eft prudentia , ejus exiftimationem autz- ritate fin tuitur co'ifti-uij/iin? , nee qiucquani fert iniquius, quain Ji quis de ilia minus bonejle aut Jentiat aut loquatur. (I) Gal. Gualtlo Hift di Cbri/li.w pag. 4j, (z) Epift. Magliabesh* ciltn. Tarpon, T. I. p- 1^7- CHRISTINE REINE DE SUEDE. 453 lottrg vers la fin de Juillet (*). Paflant par Munfter le 31. du meme mois, L ' an elle alia voir le College des Jefuites, en habit d'homme , accompagnee du I<547 ' Comte Steinberg & du Baron Soop* Un des Peres Jefuites en a &c un re- college des cit detaille dans fa lettre ecrite peu de jours apres, a quelqu'un de fes amis. II y dit que Chriftine deguifee en homme , a vifite tout le College , leur Bi- bliotheque & leur Eglife : qu'elle s'y eft donnee a connoitre pour ce qu'elle etoit: qu'elle a aflifte a leur fervice divin, & a fait un prefent de cent du- cats a leur College : mais que le bruit venant de fe repandre dans la ville que cet etranger etoit la Reine de Suede > elle s'en etoit allee le lendemain pour ne pas etre cbnnue (f). Les Etats-Generaux des Provinces - Unics 9 ai'ant ete avertis qu'elle vouloit faire route par les Pai's-Bas, avoient donne ordre de la recevoir par toutes les villes de leur domination avec les honneurs diis a fa haute qualite. Mais elle vouloit vo'iager fans etre connue , comme elle le fit en paflant par Deventer , Amersfort & Utrecht. Elle arriva le 12 d'Aout a Amers & logea chez Gerard Salian , riche Negociant de cette ville. Ce fut-la que Chrijline reprit les habits de femme & fut complimentee de tout ce qu'il y avoit de gens diftingues. Peu apres , 1' Archiduc Leopold vint lui faire vifite , & le Prince de Con- de , voulant etre re9u avec les memes ceremonies, elle les lui refufa. Ce- de la le choqua un peu : mais on trouva cet expedient , qu'il verroit Chriftine S en qualite de Cavalier particulier (|). On dit , que dans un des premiers ' en- (*) On trouve le journal du vo'iage de Cbriftine de Hambourg en Brabant dans Gal. Gualdo (I). (t) Comme cette lettre e"crite en latin contient plufieurs particularit^s fort curieufes & fort remarquables , nous ne balangons pas a la donner dans 1'Appendice, telie , que v feu Mr. Grain nous 1'a communiqude. n. LIV! (j) Voici comment la Comtefle d'dunoy rapporte cetfe entrevue qui fe fit a Bruxelles (2) La Reine Cbriftine difoit a tout le monde qu'elle fouhaitott paflionnthnentde voir le Prince de Conde , qu'il ^toit devenu fon Hdros : que fes grandes actions 1'avoient charm^: qu'elle avoit t envie d'aller apprendre le me'tier de la guerre fous lui. Le Prince n'avoit pas moins de curiofit^ de la voir qu'elle en temoignoit pour lui. Au milieu de cette commune impatience la Keine s'arreta tout d'un coup fur quelques entre formalit' ; i entretiens, la Reine lui parla ainfi; Mon Coufin,, qui auroit cru, il ya dix ans , que nous nous ferions rencontres , Tun 1'autre dans cet e'tat amufc- ici?" (a) II feroit fuperflu de rapporter les autres vifites que la Reine n Cbrift** 9 re ut * dnvsrs de plufieurs Ambafladeurs qui y vinrenc pour la " complimenter & d'autres perfonnes de diftin&ion , pendant qu'on faifoit des preparatifs a Bruxellcs pour fa reception publique. Elle fe divertiflbit en attendant a voir les diffe'rens Monafteres & Cloitres , avec d'autres cu- riofhes qui meritoient Ton attention. es remon- - Sur ces entrefaites le Senat de Suede de'puta le Comte Tott avec 1'expe- nccs que fa\ on dreflee en confcquence des inftances qui feroient faites a Cbriftine de mi tatt-la le , , _ .. ^ , ,, A ft. J . .,. e du Ja part de tout le Roiaume pour qu elle ne changeat point de religion (b) : de car P lir ce '-I 11 * cncernoit fes voi'ages , on ne s'y oppofoit pas : on la fupplioit feulement de vouloir , apres qu'ils feroient finis , revenir dans la patrk 0) Aitzema /. c. (&) Pufend. /. c..$. 6. f Chanut /. c. p. 471, iisdem , quibus Atclmuy, honor ibris adfici cupiebat : id quod recufavit Regina , itaque v.falemc ,,'Jjoli Hifpahi bic aulicantur " Cbrifline ^crivit aufll a la Comtefle Ebba Sparre, q u 'ejle n'^toit pas bien av r ec le Prince de Conde La frotdeur que Cbrifline lui t6- moigna, provenoit de la jaloufie qu'ayoient centre lui les Efoagnds, qui fansdoute vi- rent avec plaifir qu'il cut cette petite mortification. C'eft ici que le Sr. Cofle qui a fidellemeut copi<^ le r^citde Mde. la Comteffe d'^unoy rapporte" .ci-deffus fur cette eiitrevue trouve fort a redire a la conduite que Cbrifline tint a 1'egard du Prince de Conde. II pretend ,, que ce Prince avoit du etre trait^ d'eile, ,, quant au c^remoniel, de pair avec 1'Archiduc Leopold, Gouverneur G^n^ral des Pais-Bas Efpagnols, & que s'il ne 1'a pas e"te", on n'cn doit attribuer la caufe qu'a la bizarrerie de la Reine ".... Mais qu'il n'en deplaife an Sr.-Cofte, on fera iciquelque remarque la-dcflfus. Kn portant le jugement qu'il fait, il femble qu'il eut dCl reflechir un pen plus inurement au terns & aux circonftances, oil le Prince fe trouvoit. Car qui eft ce qui ignore, qu'en fe retirant de France & portant iesarmes centre elle, laCour & le Miniftere le regardoient comme rebelle a fa Patrie. 11 fe refugia en Flandre & fe jetta cnfrc les bras des Efpagnols qui e'toient alors en guerre ouverte avec la France. Cbriftine s'y trouvant aufli ^trangere que lui., Mr. Cofte auroit-il voulu qu'elle allkpren- dre avis chez le Prince comment il feroit rec.u d'elle? Ou voudroit-il qu'elle renverfat pour 1'amour de Jui , le c^r^moniel dtabli de la preTeVance de 1'Empereur fur le Roi de France & de eelle de 1'Archiduc, alors Gouverneur G(hie"ral des Pais-Bas Efpagnols & plus proche des Couronnes de Bolwne & de Hongrie, fi non de celle de 1'Empire, qu'il obtint apres, que ne 1'^toit le Prince de Conde de celle de France. Mr. Cofte at- tribue la principale caufe de la diftin&ion que fit la Reine entre ces deux Princes aux Efpagnals qui voulurent Jouer ce tour au Prince de Conde. Mais fi cela eft pourquoi done dcclamcr tant contr'clle? II eft vrai que lui, aufli bien que Mde. d'^unoy, fait dire au Prince apres des civilite's que Cbriftint vouloit lui t^moigner, quaml il fe re- tira, Madame, tout ou rien. Mais d'autres diront que cette re'ponfe ne renferme pas un fi grand fens, comme la premiere idee le pourra faire paroitre ,,. Le Prince dit le Sr. Cofte , fe glifla dans la chambre de la Reine & 1'aborda comme Tun de ,, ccux qui hi faluoient de fa part" II y vint done incognito & fans aucun c^- remoniel. Ainfi il ne pouvoit pretendre a aucun, encore moins le pouvoit-il a tout. Au rcfte on remarquera que le Sr. Cofte fe trompe en difant que Cbriftine fortit de Suede .& vint en Flandre, fuivie de Don Antmio Pimentel. Cor cet Ambafladcurpartit, quel- ques mois avr.nt la fortie de la Reine de Suede, pour la Cour de Madrid & lie retour- na a liruxelles que quelque terns apres qu'elle y avoit &t&, CHRISTINE REINE DE SUEDE. 455 patrie. Le Comte Tott etoit meme charge de lettres du Roi de Suede pour r/an - h Roi de France- & d'Efpagne , pour 1'Archiduc Leopold & GuiUaume Prin- _ ce d' Orange , alors Stadhouder des Provinces Unles ; Charles - Guftave leur y " marquoit en termes fort polls , qu'il regarderoit tous les honneurs & les bons offices qu'il leur plairoit de rendre a la Reine , comme rendus a lui meme. Chrifline temoigna la-defTus, combien-' elle etoit fenfible a toutes cesmar- , ques de tendreffe de la part de la Suede : mais que comme tout etoit tran- }r ' J "' quille dans ce Roiaume , & que par la fage adminiltration du Roi tout al- loit de mieux en mieux: elle ne vo'ioit pas en quoi elle pourroit etre utile a la patrie : ou elle efperoit , qu'il n'y auroit perfonne , qui lui enviat la liberte, qu'elle s'etoit acquife au prix de fa Couronne. Quant aux lettres de faveur , elle ne trouva pas a propos qu'elles fuflent produites , fe flatant que fon propre merite & la gloire des grands explois de fon regne lui e- toient des garants afiurds qu'elle feroit bien recue par tout, ou elle ir.oit(*). La Reine avoit deja palfe quelques jours incognito a Bruxefles- 9 ou elle cbfijiine avoit vu le Palais , le College des Jefuites & autres chofes curieufes. Ce " fut furtout dans la Bibliotheque de ces Peres , comme le marque Galeazo * Gualdo,.(a) qu'elle fit paroitre la grande connoiflance , qu'elle avoit des meilleurs livres , & qu'elle etoit bien verfee dans les plus graves faiences. Pen apres elle temoigna de fenvie de s'entretenir avec le Sr. Chanut", , autrefois Ambafladeur de France a fa Cour en Suede , & alors emploie avec le meme caractere aupres des Etats-Gene'raux a la Haye. II CUE I'agre'ment de fon Roi pour aller trouver la Reine a Amers fous un pafleport de 1'Ar- chiduc , limite a trois ou quatre jours , comme 11 le marque lui-meme dans fa lettre au Sr, de la Bank , (/*) a fon retour a la Haye. S'il en fuut croire le Sr. Picques , (c) la Reine n'entrednt Chanut que du defir qu'elle a- voit de le voir & de lui temoigner 1'afFeclion qu'elle avoit cue de tout terns pour lui.' mais e'tant reto^ne a la Haye , avec grande fatisfaclion des bon- tes, dont la Heine i'avorr honnore , il s'etoit repandu des bruits fort defa- vantageux a la reputation de la France- & de fon Miniflere, en ce qu'on a- Sr6u} voit public qu'il avoit fait ce voi'age pour prier la Reine Chr'iflme de s'en- cimcc tremettre aupres des Efpagnols pour accommoder la France & YEfpagnc. Jt^ Comme (a) L. c. pag.$t>.item Crameri mnd.nom. confr. Aitzema T. 7. p. 901. fVi Hift. dc Vtnift Lir. VI. p. HHL des Prov. Units T. II. P, II.p.4 faufle, & fi prejudiciable , & de me garantir meme dans le Confeil du Roi mon Maitre du fcrupule que ce bruit a repandu en tant de lieux , lui pourroit donner ; que je me ferois avance fans ordre a requerir Votre Majefte de quelques diligences pour la paix ,* ce n'eft pas que je ne fois tres-certain , que Sa M. n'en eft pas eloignee , & qu'elle confentira pour le repos des peuples , de donner quelque chofe.de fes juftes efperances; mais le Roi fe connoit foi-meme, fes forces , & fa fortune , il fait ce qu'il doit a fa propre reputation , & ne demandera point ce qu'il eft en etat de donner; je conjure V. M. avec tout relpe6t de fe fouvenir, que cefont les termes dont je lui ai toujours parle , lorfqu'il lui a plu d'entrer d'elle- meme fur le difcours de la paix , & je la fupplie tres - humblement que Tiflue de fes dernieres Audiences qu'elle m'a fait 1'honneur de me don- ner, les rende lemblables a mille autres que j'ai cues en Suede , dont je ne fuis jamais forti , que rempli d'admiration pour fa vertu , fatisfait pour les interets du Roi , & de plus en plus engage a etre Madame de Votre Majefte de la Haye 13 No- le tres- humble , tres-obeiflant vembre 1654. & tres-oblige ferviteur CHANUT. Le Sr. Ptiques continue la-defllis fon recit , en difant : qu'au lieu de fa- tisfaire le Sr. Chanut fur fes juftes plaintes , Chriftine ne lui avoit repondu que par des injures, qu'a caufe de cela Chanut envoi'a les originaux des let- tres qu'il avoit ecrites & regue's la-deflus , afin de les faire voir an Roi dc Suede & juftifier fon precede aupres de lui , afin que Sa Majefte ne lui iin- putat point le mauvais effet c[ue produiroient ces lettres , fi une fois elles devenoient publiques. Voici la reponfe que Chrijline avoit faite a la lettre de Chanut (a) qui lui aura etc d'autant plus fenfible , qu'elle y dit , que ni les fanfaronades ni les finefles des Franfois ne prevaudroient poinc centre les Efpagnols. pOur toute rtponfe a mtre lettre , que vousfaites vakir enpu- * bliant des Copies 9 je vous dirai que tout ceqtfelle contient^ tfa au- (a) Chr.nut /. c. pag. 488. Tme L Mm in 45* M E M O IRES C O IST C E R N A N T aucun fondemcnt 5 voiis n'avez qu'a mm fouvenir de ce qui s*eft pajje 3 &P ks proctdts de votre Cour , pour dtfavouer le bruit que vous croiez fl fort au defavantage de votre JMaitre. Pour ks Ef- pagnols, je vous puis affurer , quails font in formes des inter ets de ceux qui empecbent la Paix 5 $? que blen loin de fe vanter eT&re folU cites y Us jugent , qtfon la defire mo ins que jama is en France. Quoiqu'il en Joit, je crois que les fanfaronades nc font pas capable *s de leur fa ire peur 5 nl les finejfes de les-tromper. Us deftrent la Paix , mais fans impatience , gcp peut-tre attendront-ils pour la donner que fonfoit plus modefte en France. Uinconftance de !a for tu- ne; 5? celle de Pbumeur de France me fait croire^ que les affaires ne demeureront pas longtems en meme etat , sp je penfe que s^il ar-- rive jamah au Roi votre Maltre de juger par lui-meme defes int6- re*tS) II connoitra que la paix eft le plus grand blen qtfilpuijje don~ ner afes Sujdts , gp que jejuis vtritablementjon amie 5 puifque je Pai/oubaitde a la France d'Anvers ce 4 De- s* - . _ , v p cembre., 1654. CHRIST [NE.- Le Sr. Chanut fit a cette lettre une replique qyi doit avoir e'galement pja^- ee ici (a). M ADAM E ]'ai grand fujet en mon parciculier de remercier tres-humblement V,- M. de ce que par la reponfe qu'il lui a plQ de me donner , elle a detruit ,, 1'opinion , dont les ennemis du Roi mon Maitre avoient voulu perftia-- der le monde, fur la caufe d.u vo'iage que j'ai fait a -drivers, pour avoir Thonneur d'y faluer Votre Majefte & d'y recevoir fes commandemens ; ,, mais fi j'avois penfe, que ce que je lui ecrivois pour 1'interet du Roi & , , pour juftifier ma conduite , eut pd exciter en elle cette indignation qui paroit en toute fa reponfe; le profond refpe6t que je lui porte, & qui 3 , ne diminuera jamais, m'auroit empeche- de lui donner lieu de s'expli- quer de la maniere qu'elle a fait de fes jugemens, & de fes inclinations 3 , entre la France & YEfpagne. Je dirai meme fans crainte d'etre defavoue,. qu'il y auroit eu moins d'inconveniem de. laifler croire au monde une recherche de paix de la part du Roi, que d'etre occafion a V^ M. de ,, traiter ces chofes en termes fi apres , que 1'on n'a point de coutume de s'en fervir entre les ennemis meme. Je fouhaite , Madame , que tous ceux qui verront cette lettre de V. M. , foient autant informes que je le fuis des lumieres incomparables de fon-efprit, afin qu'ils cpunoiflenc ,, comme moi , qtie fi la France lui paroit autre qu'elle n'eft en efFet , & qu'elte ne lui a paru autrefois, c'eft qu'elle la voit de Bruxelles & au ,, tra*- (>v) ChiQut /. c. p. 489. i^j.Londorp. A&a-Pull:- Tom. VIL pag. 974* CHRISTINE JIE1NE D SUEDE. travers d'un nuage fort e'pais. que ,, de les foumettre a 1'arbitrage d'un Prince ami commun ; Meffieurs les AmbalTadeurs de V. M. preflant ce grand ouvrage par leurs offices , ii .,, fut propofe par les Miniftres d' Efpagne ., de remettre la decifion de ces cinq points au jugement de V. M. Monfieur de Scrvien , AmbafTadeur Pienipotentiaire du Roi , recut la propofition , & ne doutant point de la ,, reponfe qu'il auroit de la Reine Regente fur cette ouverture , m'envoi'a ,, a Stockholm tous les memoires ; tSc toutes les inftruclions neceflaires pour me preparer a informer V. M. de nos raifons & elle fe peut fouvenir ,, que je lui rendis compte alors de tout ce qui fe paffoit en cela , & de ,, 1'efperance que nous avions , que fon jugement feroit la paix des deux ,, Couronnes. Monfleur de Servien ^ ai'ant incontinent regu les ordres de la Reine , declara folemnellement a Meflieurs les Mediateurs , que la y y France acceptoit 1'arbitrage de Votre Majefte ; ils le denoncerent aux Miniftres d'Efpagne , & Monfieur Bnm repondit pen ferieufement pour .,, une affaire de cette importance , que 1'offre qu'ils avoient faite de la ,, part du Roi leur Maitre , de foumettre fes interets a Tarbitrage de V, M. n'avoit etc qu'un Compliment, qui ne portoit point d'obligation. V. ,, M. connut alors laquelle des deux Couronnes la refpecl:oit davantage, qui d'elles defiroit en effet la* paix , & fi ce n'etoit pas 1' Efpagne , qui feignoit feulement de la defirer,- de notre part, il n'y a rien de change , le Roi fuit les memes maximes , il fe fert du meme Conieil , il a le me- j, me premier Miniftre, que Votre Majefte honnoroit alors par des mar- ques de fa bienveillance, & qui ne lui a donne aticune caufe de fufpen- dre fes graces envers lui ; mais comme en ce terns-la les faifeurs de Li- 3 , belles lui imputoient malicieufement re'loignement de la Paix, ainli nos Ennemis tachent de donner encore cette fauffe impreffion a V. M , pen- 3, dant qu'elle eft chez eux , ou n'entendant qu'une des parties , il eft im- poffible qu'elle juge fainement, comme elle a fait, quand le foin de fon propre Etat 1'obligeoit d'examiner de plus pres la conduite des autres Souverains, & comme elle fera toujours quand el[e fera bien informee. Ce n'eft point de V. M. , mais de la bouche des Efpagmh, que nousre- w cevons le reproche, qu'elle nous a fait, en fa Jettre, de n'etre pas mo- Mmra 2 def- 460 MEMOIRES CONCERNANT defies , il le faut confefler , Madame , notre Nation eft brufque & an- dacieufe , I'epe'e a la main , cela eft incommode & deplaifant a ceux , dont le temperament a plus de flegme & qui gardent la gravite jufques dans les combats. Nous tenons la modeftie pour une vertu de Cabinet 9 qui ne fied pas bien au Soldat , c'eft pourquoi nous gardens toute la moderation pour nos Confeils , qui ne font ni vaftes , ni violens , & a la Campagne nous fuivons la ferveur de notre genie , deforte que les Ef- j> fagnoh ne pouvoient mieux decouvrir qu'ils ne veulent point la paix qu'en ce qu'ils ont fait entendre a V. M. qu'ils n'y confentiront point , que nous ne foi'ons devenus plus modeftes, c'eft a dire, felon leur fens, moins braves & vaillans : car nous ne changerons point , & il n'eft pas croiable , que les Francois degenerent de la vertu de leurs Peres , fous un Roi qui feroit capable de Jeur infnirer de la Ge'neroiite , fi la nature ne 1'avoit point fait. Aufll V. M. expliquant les fentimens d'Efpagne ne nous a point menaces de fes armes, auxqtielles nous refiftons , graces a Dieu , fans nous epouvanter , mais feulement de 1'inconftance de la fortune & de celle de notre nation. Pour la pre- miere , fi elle eft a craindre , cette crainte eft egale pour tous , les autres n'en font pas plus maitres que nous ; mais pour 1'humeur de la Nation, il fe peut dire , qu'il n'y a perfonne au monde , qui ait moins de fujet de 1'accufer d'inconftance que V. M. qui en a e- prouve la fermete pendant dix huit annees d'alliance, conftamment, en la bonne & mauvaife fortune de la guerre, avec une fidelite, dont au- cune Hiftoire des Siecles paffe's ne peut fournir d'exemple. La gloire nous en eft commune avec V. M, , fon Senat, & fes Sujets, & comme ,,. nous ne retranchons rien de la part qui eft due a la Suede en la noble perfeverance d'une foi inebranlable , nous pouvons avec juftice deman- der a Votre Majefte qu'elle neveuille point oter auffi , a fon premier Mi- niftre & a fes peuples, la part qui leur revient au me'rite d'une fi rare conftance. Vous eprouverez, Madame, a la fuite du terns, que la France n'eft point inconftante , & le refpecl: que nous continuerons de vous rendre, detruifantles opinions que Ton vous a donnees, vousver- rez un jour nos affaires d'un ceil plus favorable. Pour moi , je ne dois pas attendre des louanges de ce que je demeurerai toute ma vie ferme dans mon devoir , aupres de Votre Majefte , puifque fes bontes m'onc fait une neceflite d'etre autant que je refpirerai. De Votre Majefte. de la Haye, ce 4 le tres-humble, tres-obe'i'flant & tres- Janwer 1655. oblige Service ur CHANUT. Charles- Guftave & le Minifte're de Subtle aiant lu ces lettres, comme le Sr. Picques le die, ils ne favoient qu'y repondre fi non, qu'ils feroient con- noitre qu'ils n'avoieni^nulle part a ce precede , qui funs doute avoir etc in- fpire a Chrifilne par le's Efpagnols, mais que la Reine n'etant plus en place, les ennemis de la France n'en tireroient aucun avantage, Dans CHRISTINE REINE DE StJEDE. 461 Dans ce terns -la arriva 1'Archiduc Leopold pour la feconde fois a Amers L ' au - pour inviter la Reine a venir a Bruxelles , ou tout avoit etc prepare pour S4 ' fa reception. Son entree fe fit le 23. Decembre avec beaucoup de cere- CMjiinef monies & de magnificence (*). Mais le lendemain fur le foir , la Reine p u buque ^ accompagnee de 1'Archiduc entra dans fon cabinet , ou , en fa prefence & en celle du Comte de Fuenfaldagna , de I'Ambafladeur Pimentel, du Comte Montecuculi & de Dom Jgojlino Boreno^Navarra Secretaire d'Etat , eite-ftt lecretement profeffion de la foi Catholique Romaine entre les mains du P. protcfiion de Querns Dominicain (f). Ce Moine qui avoit fuivi 1'Ambaffadeur Pimentel{f en qualite de fon Secretaire en Suede , fut choifi pour cette fonftion > com- nc. me aiant deja eu part de cette affaire en Suede. Le Comte Galeazo Gualdo que nous fuivons en ce recit, remarque (a) comme une efpece de mira- cle, que quand la Reine cut fini fa confeffion, & pendant que le P. Guemes recita les paroles abfolvo &c. on tira toute 1'Artillerie de la ville , fans que les Officiers en fuflent avertis, a'iant eu feulement ordre de tirer environ & indeterminement vers ce tems-la. Mais on lui dira qu'il n'etoit pas im- poffible qu'on fut convenu d'avance precifement de 1'heure & de la minute meme ou qu'on les eut avertis fous main par quelque fignal , qui pouvoit fe remarquer facilement furtout dans la nuit , comme il etoit alors , deforte que cette decharge d'Artillerie pouvoit s'etre faite fort naturellement, fans qu'on eut befoin de crier la-defliis au miracle. Mais comme nous venons de parler de la profeffion de la Religion Ca- caufes tholique , que Chriftine fit a Bruxelles y il ne fera pas hors de propos de re- prendre cette affaire d'un peu plus haut. On ne s'arretera pas aux infpira- lions divines aux quelles le panegyrifte Galeazo Gualdo (\.) a recours , & qui , ie- (a) L. c. pag. 53 ? 57- (*) Gal. Gualdo en fait la d^fcription & nomme plufieurs Suedois qui dtoient de la fuite de la Reine dans cette entree publique (i). (f) Us figne"renttous, apres Cbriftine, comme tdmoins de 1'Acte qu'on drefla de la profeffion de cette foi, duquel 1'original fe conferve encore a Rome, dans le Couvent della Minerva deW ordine de Predicanti : (2). (|) L'Hiftorien Nani appu'ie aufli fur les lumieres internes, comme a'iant optSre' fa converfion de meme que Fornicetto Carini (3), Tbulderius , &d'autres. Quant a cette envie de changer de Religion Mr. Weber 1'all^gue (4) comme le Principal motif de {'abdication de fa Couronne , de mdme que Mr. de Holberg , (s^jqui femble pourtant fe contredi- re. Mais ce qui a fait illufion au Sr. Weber, c'eft apparemment lap^riode de la haran- gue d'adieu de Cbriftine aux Etats de Suede , qu'il a emprunte"e de Tbulderius , (6) & laquelle celui-ci a tir^e de fa tete enbon Catholique Remain, Chanoine, comme il d- toit, a Cologne. Cela n'eut pas e"t non plus une raifon a all^guer aux Etats de Suede, qu'ellc (i) L. c. p. n, 57- &c. item Bulifnt, 1. c. pag. pirn aMieati. item JWcqttef. Hift. des Prov.U- 24 j. item Reyfe van Chrifline pag. 7. &c. met. T. II. P. II. p 561. (z) Bulifon 1. c. pag. 24f. Mmm 3 M E M O I R E S CONCERNANT f/an felon lui, dccouvrirent a la Reine les erreurs de la Religion Proteftante 1654. (#): on paffera auffi fous filence les raifons qu'il tire en faveur de la croian- ce Catholique-Romaine, de la fucceflion non interrompue des Papes,-piuf- qua cet egard il a .centre lui les hiftoires des fiecles paffes, & quant al'an- tiquite de la Religion, on pent lui repondre, que celle des Juifs & celle des Paiens 1'emportent en cela fur toutes les fecles Chretiennes & parmi celles-ci, 1'Eglife Greque-Chretienne I'emporte deja fur la Latine Catholi- que-Romaine, les Catholiques Remains memes appellent en Hongrie & au- :tre pare les Chretiens- Grecs die Altghubige c. ad. ks ancicns Croians , en com- paraifon d'eux-memes. On peut done etre aflure qu'aucune de ces raifons n'a opere en Cbriftine le changement de Religion. Elle avoit 1'efprit aflez -eclaire pour voir par elle-meme de quel cote etoit le fort ou le foible : & on n'a qu'a fe fouvenir de ces deux lettres a Mr. Godeau Eveque de Grajfc & au Lantgrave Frederic de HeJJe (/;) , pour etre convaincu , qu'elle etoit encore alors bien affermie dans les principes de la Religion de fes Peres. An moins en peut-on conclure, qu'elle ne s'e'toit pas encore determrneeea ce tems-la. Malgre tout cela & autant qu'on pent (e fier au-x rapports , que des Ecrivains Catholiques ont fait de cette converfion (car notisnepouvons point en citer d'autres) ils paroit etre hors de doute, que c'eft environ le terns, qu'elle reprit Tidee de fe de'mettre du gouvernement , qu'on lui avoit fuggere celle de fe faire Catholique, afin que fi tout autre moien venoit a lui manquer pour un entretien convenable a fa qualite , le Pape & les au- tres Etats Catholiques apres le facrifice qu'elle auroit fait de fa Couronne & de la Religion de fes ancetres , lui fouraifTent fuffifarnment de quoi fubfifter- II ne faut pas non plus douter, qu'on ne lui ait reprefente toutes fortes de pkifirs qu'elle gouteroit en voiageant dans les pai's etrangers : quels char- mes elle auroit a voir, furtout en Italic 9 Jes reites des belles antiquices, dont elie n'avoit que des idees confufes par ce qu'elle en avoit Id dans les livres , ou appris par les recits qu'on lui en avoit faits. Si on fe fouvient de ce qui a ece dit ci-deflus du caraclere de ceux qui etoient alors dans fes . confidences, & principalement de celui de Bourdelot, il ne fera pas difficile inftrumens . f. re- i > i> - -i ' pcrvet- a croire, que comme il aura cru le laire un grand mente d avoir contnbue ^jg fy p art (ji e fl. certain qu'il 1'a fait) au grand ouvrage de la converfion de Chrlfline: il ne fe fera pas fait une affaire de confcience, pour la gagner& ]a determiner, de lui infpirer autant d'indifference pour une Religion que pour 1'autre. Nous avons deja rapporte , que lui-meme , pendant Je fejour qu'il fit a la Cour de Chriflile > profefla , pour ainfi dire , publiquement 1'Athe- (a) L. c. pag. il & 13. (i) Voiez ci-dejjus pag. 215. & pag. 217. qu'elle voudroit embraflfer la Religion Romaime. Car des lors non feulement ils ne lui auroient point affign^ fa penfibn, mais ils ne lui auroient pas ineme permis de fortir J.u Rouiuine. Noss verrons ci-apres ce qui lui arriva au fujet de fa Religion, quancl i r T i ' n i mentefycotA (|). Joignez a cela la belle pemture qu on lui failoit des precieux reftes destribucntd* anciens monumens, laquelle doit avoir fait d'autant plus d'impreffion fur mSmev 1'efprit de Chriflme', que fort portee pour les Auteurs anciens 9 elle avoit beaucoup de veneration pour la belle antiquite. C'eft ce qui n'aura pas peu facilite le travail de fes Pervertifleurs , & les aura aides a lui groilir les agre- mens qu'ils lui promettoient dans fes voi'ages ,- & qu'elle devoroit deja dans fon imagination (); Soit que la Reine fe foit ouverte en premier lieu aiv JeTuite Antoine Macedo, du deflein qu'elle avoit forme de changer de Reli- gion , foit que Bourdeht ait et6 le premier a qui elle en fit confidence (J) , toutefois on peut affurer , qu'on ne lui avoit remarque aucun penchant tant foit peu- declare pour le Catholicifme , avant le milieu de 1'annee 1653. quand le Sr. Chanut partit de Suede pour la feconde fois. A ce propos on ; f apportera aufli ce que le Sr. Altzema (a} dit d ! un entreden qu'il avoit eu enj ^55' (a) Saaken van Staat en Obrlogb. Tom. T. p. (*) Par la vie, que mena If. Voflius, qui dtoit I'a litre Pre"cepteur de Cbriftine, & j)ar la fin qu'il fit, on aura vti ci-dellus que fa Morale n'^toit gu^res meilleure quecel- Je de Bourdelot. (j) L'Hiftoire d' AngleWrre entr'autres nous en fournit deux Exemples dans les Per- fbnnes des Rois Charles II. & Jacques II. L'Eveque Burnet & le Sr. Larrey en parlent en plus d'un endroit (i). Celui-ci dit: ,, que ce fut par les maximes de ces Rev. Pe- res, que le peu de religion de Charles II. le conduifit par degr6 de 1'iudifF^rence ,^ pour la Proteftante au Papifme "... que le Roi Jacques fon frere le' publia le lendc- main de la mort de Charles IT. & fit apporter fa cafiette, d'ou il tira fa confeffion pa- pifte ^crite & fign^e de fa main , quoiqu'il cut, difoit il , diflimult* fa Religion, pendant fa vie. Belle confeffion de foi, du gout & du ge"nie du Papifme, mais dont le vdrita- ble Chriftianifme a horreur! Burnet dit la-meme chofe 1. c. en donnant le caraftere de Charles II. (j) Voici ce que dit Manage (2) de ce gout de Cbriftine pour 1'antiquit^:' La Rei- ,,- ne de Suede n'auroit pas ^t6 du parti de ceux qui prttfe'rent aujourd'hui lesModernes toitpourle?' aux Anciens. Elle tort pour les Anciens. II y a de bons morceaux dans nos Mo- An " er(t * }y dernes, mais il faut revenir aux Anciens. E* Patin dit qtielque part (3). La Rei- ne de Suedes, une grande prefence & une fine penetration d'efprit. Elle n'eft ni be- ,, te,.ni bigbtte; Elle n'aime ni femme, ni lille. Elle entend bien'le latin & en fait j, plus que beaucoup de gens qui en font profeffion. A vingt trois ans elle favoit tout Martial par coeur. On dit qu'elle fait grand etat de Catulle, de Stniqiie le tragique, ,, encore plus de Lucien. Je ferois fort de fon avis ". (g) Marana dit pofitivement, (4),, que Pimentel Ambafiadeur d'Efpagne Kit' donner a Chrijline une fi belle id^e du Pape & de la Religion Catholique, qu'elle abandon 51 na fa Couronne, & ne fit depuis qu'errer par-ci par-la dans V Europe, r^folue d'^prou- ver la g6nerofit^ des Princes Catholiques, dont Pimentel lui avoit fort vante" les vertus". (i) Larrey Hift. d'Angl. T. IV. p 404. 4<>y. fz) V. STtnagiana T. f. png. 3^0. j29. 580 6iz. & Burntt Mem. ad. ann. i68j.& (jj L'efprit de Patin p. tg. 3687- item L'Hiftoire des intr. de trance T II. [4)"Sfi>ion Turc T. IV. r. 113. eft. Bafnagr- jf>. 83-107. T III. fin. p. 4ij. ScMemoires de Suede, ou il aVoic ,, ete comble de graces & de liberalites de cette Reine , Ton fit leconte,que quelqu'un lui aiant demande fon fentiment du Perfonnage , elle avoit repondu, qu'elle le tenoit pour bon Grammairien. Un jour en admirant la parfaite connoiffance de cette Princefle en toute forte de fciences, Ton vint a difcourir la-defTus dans la Maifon de Mr. le Comte de Rebol- ledo, & on fut^'avis, que fi quelque bon Theologien pouvoit commu- a , niquer avec elle , il feroit aife d'introduire dans un entendement e'claire de rant de fciences , la veritable lumiere de la foi : a quoi fe difpofa in- continent le Pere Geofroy Francken de la Compagnie de Jefus Predicateur en la langue Flamande dans la Chapelle de Mr. le Comte, Perfonnage vraiment apoftolique, comme non feulement toutes les actions defavie, mais famort-meme font fuffifamment fait paroitre. Etant arrive, il eut audience favorable de la Reine , qui peut-etre , n'avoit jamais com- munique a loifir avec autres Religieux. Elle lui fit commandement de de- (a) V. Bayle Dia. Hifl. ? Crit. art* (o) Elle eft du 10. T)ic. 1655. & Copen- Macedo. hague & feu Mr. Gram me I'a communiques. , (*) C'eft ce. RcMledo que Chrijline fit yn des premiers Chevaliers de fon Ordre maranle. Tome I. Nnn 4 <5<5 M E M O I R E S CONCERNANT ,, demeurer la deguife, comme il ecoit: mais illui demanda permiflion de* s'en retourner, pour en dormer avis a Mr. le Comte, & dit, qu'ellelui repondit: allez, je fai que ce bon Cavalier ne vous en empechera pas. De tout ce qu'il rapporta, Ton rendk compteen Efpagne de point en point avec tout le foin & circonfpeclion , que demandoit 1'importance del'af- ,, faire: & le Pere s'en retourna incontinent apres , avec une lettre du Comte a la Reine & une autre qu'il avoit re$ue du Roi, datee a Madrid du XXII. de Novembre 1649.. ou< il y avoit ces paroles: ,, Pour ce qui concerne le Commerce des Siiedois en rnes Roi'aumes 3 j'ai donne ordres aux ports de mer, que s'il y arrive de leurs vaifleaux, Ton leur faiTebon rv traitement & accueil, dont vous devez- etre averti. " L'Ambaffadeur envoia auifi a la Reine un petit ouvrage , fur quelques fujets de Mora- le & de Devotion (*) , & regut en reponfe la lettre fuivante ecrite de la ^ main propre de la Reine, a Stockholm le 10, de Decembre 1651* Les civilith 3 dont vous etes HMral en mon egardme Jurprendroient 5 ft je pouvois ignorer la veneration que votre nation porte aceux qui font de ma condition ? de monfexe. Jene fait) Monjieur 5 fije dots plutot vanter mon bonbeur^ ou ft fai plus defujet de me plaindre de mon malheur , Pun itfa nouvellement pro- cure" le Inen de vow temoigner Teflime que jefaisde votre merit e^ & r autre a voulu que jujqu'ici jc vous fols inutile. Neanmoins je ne veux plus me plaindre d?un mat pajjd 3 je veux me fervir d^un bien (*) On ne fauroit dire pre'cife'ment lequel fut cet ouvrage du w Comte RcbMedo , par- jrii plufieurs autres qu'il a compofes, qu'il envoia a la Reine. J'en ai trouve" un d''im- prime environ ce terns -la, portant le titre de Selva Militar y Politico, in 16. Mais eomme le livre en queftion devoit contenir des fujets de Morale & de Devotion; il fe peut, qu'il a communique a Cbriftine en Manufcrit un de fes Cuvrages plus e"tendus., qu'il fit publier apres Tan 1660 in 4*. fous le titre d'Ocios del Conde de Rebolledo & dont hi cinquieme & derniere partie confifte en diverfes pieces de Morale & de Pi^te". Co Seigneur compofa & fit imprimer plufieurs ouvragcs pendant fon fe"jour a Copenbagu<; : & quoique les titres de quelques-uns portent, qu'ils ont e"te" imprimis a Cologne &d'au- tres a Stivers , ils ont tous e'te' imprimis a Copenbague , & en 1655. ^ d(=dia a la Reine Cbriftine celui de !a Conftantfa. Fiftoriofa y de los Trenos, qui eft une paraphrafe envers du livre de Job & de lamentations de J&imic.... Nicolas Antonio parle auffi de ce Com- te en ces tenses : ,, Dom Bernard de Rebolledo, de Leon, Seigneur d'/rzan, Chevalier de 5. Jacques, apres avoir donn6 des preuves de fa valctir dans les Armes, & coir- mand<; en chef les Troupes dans le Palatinat du Rhin, fut envoie" par le Roi Phi- lippe, en qualite* d'Amba'Jadeur dans la Cour du Roi de Dannemarck, S'e"tant acquit t6 longtems de cet emploi & avec beaucoup de gloire il futappell<5 a la Cour de M&- dr'ul pour affifter au Confeil de guerre. Ceftun Seigneur d'une belle Erudition, or- , n^ ds la connoillance de touCes les fgiences: c'eft ce qu'il a bien montre" par fes ou^ vrages en vers Efpagnols rcinplis de favoir & d'une grande e"ie"gance (i) ". () V. Me. Antonit Btbl. Hif|>. vouspriant de croire, que fcflime^ tomme je dais , h Hvre que vous nfavez envo'w fep encore que je ne Tentende pas affez pour lui donner kjujle prix; neanmoins je juh ft 'perjuadte de T excellen- ce de votre ejprit , que je ne puts ufimaginer , que Fouvrage 5 qifil & produit) foit indigne de lui. Au refte , Monfleur , je. me jer vi- ral de roccajion que vous nfavez fait naitre , pour vous protejlef que je ferai monpo/fiblea Pavenir pourni'acquerir le bicndepoffe'der Tamitie tfunfi grand Monar que qu 1 eft /eRoi Fotre Maltre. J'ejpe- re^qu'il ne refujerapoint cette Jatufa&'wn a une Princeffe , qui pre- tend d'etre en quelque facon dlgne de cette gkrieuje poffefflon^ 5? je vous ferois beaucoup obligee , fi vous vouliez me rendre auprh de lui cebon office, de Faffurer de lafincirite de mes feniimem, Cette lettre fut incontinent envoiee a Sa Majefte Catholique , & il ^ femble , que fur ce fondement fut eleve cet edifice , deforce , que felon .,, ma penfee la principale calomnie fe trouve par-la refutee. Le terns de- couvrira les autres. La Reine ai'ant eiivoi'e le Si'. Palbhzki , un de fes Gentils- hommes , en E/pagne y envoi'a apres le Pere Francken en Flandres 9 ^ encore que fous des pretextes bien differens , avec la meme fid nean- ^, moins de cultiver une amitie qu'elle confdToit tant fouhaiter, Sur ces avis, il lui arriva de Rome deux autres Religieux de la Compagnie de Jcfus , la modeftie de fun 1'a'iant rendu fufpeft, ii fut oblige de s'en re- tourner incontinent & 1'autre quelque terns apres par la mechanceted'ua j, Calvinifte Franfois , auquel dans 1'cxtrernite de la vie il avoit donne Tab- folution, & qui du depuis, aiant recouvre fa fame du corps, pour per- .,, dre le falut de fon ame , le decouvrk. Le Pere Geofroy y retourna aprei & fe conferva en la grace de la Reine, communiquant toujours avec el- 5 , le fans etre reconnu; & ecrivit fur 1'inflance qu'elle lui en fit , le Traite ,., de Flminonalrte de YAme , qu'il dedia a Mr. Joachim Gendorf , grand- 5 , Maitre d'Hotel de ce Roiaume. L'on lui envoi'a auffi de Flandres le Pe- re Philippe Nucio , The'ologien & Mathematicien , lequel fous la qualite 5 , d'un ingenieur, qui alloitcherchant fervice, portoit une lettre du Com- te a la Reine , mais celui-la fut aufli decouvert par des avis donnes de ,, Hollande. Mr. Don Antoim Pimcntel arriva apres a Stockholm au mois 9) d'Aout de Fannee 1652. & avec lui le Pere Louis de Moulin, & enfuite de cela le Pere Francken revint ici , d'ou il partit 1'annee apres avec le 3 , Pere Michel de la Fuente , pour aller precher 1'Evangile en Guinee , ou ils acheverent leur peregrination & fe rejouilfent imintenant dans un repos eternel des fruits de leurs travaux. Le Pere Moulin , a qui Dieu faf- fe paix, ne pouvant a caufe de fon age fouffrir 1'aprete du climac , s'en 3 , retourna aux Pai's-Bas , d'ou revint en fa place le Pere Manncrfchret , qui 9) fe mit fort bien dans 1'efprit de la Reine. Mr. Doa Anto'me Pimcntel Nnn 2 458 MEMOIRES CONCERNANT ' an 5, ai'ant a s'en retourner par mer, Mr. le Comte de Rebolledo envoi'a le Pe- 165 r * re Mdtre , Frere Jean Baptifta Guemes de 1'Ordre des Predicateurs, grand Religieux & Theologien Scholaftique , afin que pafTant avec lui en Efpagne ils follichaflent fa demiffion : mais le voiage s'etant pour lors fufpendu, le Pere , durant le fejour qu'il fit en Sulde , cut beaucoup de communication avec la Reine , & a fon inflance , le Roi lui commands par apres d'y retourner, & fous pretexte de Secretaire de I'Ambaflade, 3, lui fervir de Confefleur : ce qu'il fit , & a Bruxelles , en grand fecret , la reconcilia avec 1'Kglife , y ai'ant pour temoins 1'Archiduc , le Comte de Fuenfaldagne , Don Antoine Pimentel, le Comte de Montecuculi , & Augu- Jlin Navarre du Confeil d'Arragon & Secretaire d'Etat de Guerre ()." Quoique 1'execution de ce paffage de Chrijline a la Religion Romaine aic pd commencer & fe poufTer de la maniere qu'on vient de le rapporter (*) , & cela VLI la lettre de Chriftim a 1'AmbafTadeur Rebolledo, laquelle, malgre les expreffions enveloppees , qui s'y trouvent fur 1'afFaire en queftion , ne lailTe pourtant pas de faire entrevoir quelque deflein premedite de la part de la Reine , il y a neanmoins des raiibns tres-fortes pour croire , que les e jefuite premieres infinuations la-deflus lui ont etc fakes par le fusdit Pere Antome Macedo. Car non feulement il fe trouva deja 1'an 1650. a Stockholm avec -. I'AmbaiTadeur de Portugal , ou au Couronnement de Chriftine il publia fon t. Panegyrique en vers & en profe (b) d'ou il eft a prefumer , qu'il etoit deja alors en quelque liaifon avec la Reine : mais auffi tant Jui-meme , que fon Frere Francois Macedo & d'autres favans de fon Ordre (f) , ont rappor- ' te (a) La fuite de cette relation fera donnee (&) Bayle Difbionnaire art. Macedo. dans fon lieu ci-dejjous. (*) Ce qu'il y a de particulier dans cette Relation, c'eft, que 1'Auteur n'y dit pas tm feul mot du Pere Antoine Macedo, qu'on ne fauroit nier avoir eu beaucoup de part a cette affaire. Le jugement le plus favorable qu'on en puifle porter, c'eft, que no- tre Gentilhomme engage fans doute au fervice de Mr. le Comte Rebolledo Ambaffadeur d'Ej'fiagne a Copenhagus , aura dcrif cette lettre par ordre de fon Maitre, pour prdvenir le Public, comme li tout 1'honneur de la Converfion de Chrijline n'en devoit revenir qu'aux foins de fa Cour. On fera porte" d'autant plus a fe le perfuader, que la jaloufie contre la Cour de Portugal a'lie"e de celles de Suede & de France, qui quinze ansaupa- ravant s'dtoit mife en liberte", en fecouant le Joug d'Ejpagne, etoit encore alors trop iccente & trop grande, pour que les Miniftres d'Ejpagne ne tachaflent pas , par tousles moi'ens unaginables , de diminuer la gloire, que la Cour de Portugal pouvoit s'attri- b'.u-M- u lefuite ^ ''" O1 ' c ' comment le P. Antoine Macedo en parle lui-meme (i) ,, Hamburgi certe ad premier > urbem Romain miffus ego a Ser. Regina Suecia: Chriltina an. 1651. per aliquot diesfub- Conve-is- ,, fllti : nee mibi per tempus licuit gravifiimis negotiis impedito facrum illud templum anti- ii.- d; Cbri- )t qua Religionis monimzntum infyicere &c. In hac nos urbe (Stockholm iae) uniuf f am- ,, pliui anni fpa'io verfatifuMUf cum Lufitani Regis Ltgato, cui eramus a confeffionibus : ,, nbiqw omnium Jel'iiitarumprimi cum Seren. Regina SuecicB Chriftina de Us rebus agere ,, ca^imus , quas po/lea vidit ^f miratus eft orbis Catbolicus. Ab eadem Romam mijfictim literis Regies fidei ad Generalem jej'uitarum Francifcuin Ficolomineum Gallica lingua i: (0 Dans fes Divi Tutelarcs Orbis Chnfliani pag. jotf. cette aiFaire avec tant de particularites , d'accord avec d'autres Ecri- vains ,,Jcriptis, exeunte menfe Auguflo, anno a Cbrifto nato MDCLI. quiz cum effent Catholi- cisjimul f Hcereticis notijfima , nun defuerunt tamen in Flandria p Gallia, gwi o/tor fcribere aujifuerint , non fine gram injuria veritatis ". Sotuel, Bibliothecaire de la Compagnie des Jefuites, dit Mr. Sayle. (i) eft centre Henfchenius & Papenbrocb, qui donnent au P. Jef. Godefroy Francken I'honneur de la converfion de Chrifline , & le P. Francois Macedo les a refut folidement. La chofe lui tenoit fi fort a cceur , a caufedes int^rets de fon Frere, qu'il fit un Appendix pour les. foutenir dans un ouvrage qui n'a- voit aucun rapport a cela (2). Nous remarquerons ici en paffant, au fujet de Macedo, que felon Niceron , (3) ce Pere e"toit un des plus grands Charlatans parmi les Savans. 11 a auffi fait deux Pane'gyriques de Cbriftine. L'Auteur du Diarium Europ&um (4) par- le d'un Pere Macedo Jef. Portugais mis en ce terns aux arrts 3 Rome , a caufe d'un lar- cin trouve" dans fa chambre. 11 fembie que ce foit un de ces deux Freres. Cela n'etn- peche pas pourtant que notre Antoine ne foit le premier Convertifleur de Cbriftine , fe- lon le r f uc choifi par Jean 17. Roi de Portage/ pour accompagner fon AmbafTa- deur Don Guffeppe Pinto Pereira , qui fut envoi'e en Suede aupres de la Reine Chriftitie* Cet AmbafTadeur , ne fachant pas la langue latine & ne poti- varrt parler a h Reine que par truchement fe fervit de fon Secretaire dans cette fonftion. 11 arriva que ce Secretaire etant tombe malade , 1'Ambaf- fadeur fut contraint de fe fervir de fon Confetreur , qui e'toit ce Macedo , & qui felon la eofitume des Cours Proteftantes alloit habille en feculier & fai- mit la figure d'un autre Gentilhomme de la fuite de rAmbafladeur. La Reine, informee de la qualite du nouvel interprete , prit 1'occafion qu'il 1'entretenoic un jour au nom & en prefence de 1 Ambafladeur, pour lui di- re ivets au- ^ e n' e ftpas- la les feuls livres qu'on a faits fur ce changement de*Religion de la Rei- es Ouvra- ne. On a trouve' encore dins la Bibliotheque des Minufcrits de feu Mr. <\'Uffe,\bach , gcs fur cette (3). une Synopfis vel bijloria Converjionis Regime Chriflince a Patre Guemes. DC cette taincufe con- f orte d'Ecrits eit audl celui que publia Don France/if de la Cirrera y Santos fous le titre VgyvOB. ^ e p ara \ji sn a ii a Tgltjia Catbolico Romano, en la Converfion ds Chrillina Reyna de Suecia fc. O.] voit au frontispice deux Anges tenant une Couronne fur un plat avec cette Legendc manet ultima Gzlo & deflbus : Si tibi Alexander ternas, Chriftina, Coronas Offert , in each ultima certa manet. On peut encore lire fur Paffaire de la Converfion de Cbriftine la lettre de Fornicetto Ck- rini & Cyriaci Trajymacbi Bebauptung &c. (4.) item Vttalis Tberoni , Narbonenfis Galli , Wttum Lauretanum Sereniffi. Principi Chriftins Suecorum Regince. Tbolofac, 1655. in 4. (i) 1. c. T. I. pag. 90. ( 3) 1. c. pag;. oi. in fol: ) V. B (z) V. Brachelii & Thuiderii Hift. tO* Kift. (4j Da Anton. Bulifon Tom. II. p. ITel: P. II. f. 79, &c< pud Cyriacum Tbrajyivatbum, pag. . CHRISTINE REINE DE SUEDE. 471 re a demi mots latins aflez cachet , pour que celui-ci nc put le deviner, ^n qu'elle foahakeroit de parler avec liberte a quelqu'un de fa profefiion , pour- vft que cela fe put faire fans qu'il ecrivit pour en faire venir , ne voulant pbinc abfolument, qu'il put eonfler par aucune iettre, ou ecriture, qu'elle cut define un tel entretien* Le Confefleur , ravi de cette ouverture , feignit de ne pouvoir s'accom- moder de fair de Suede , pour avoir occafion de demander fon conge , ce que 1'Ambafiadeur ne lui ai'ant pas voulu accorder,il prit la fuite: & 1'Am- bafladeur aiant voulu demander la permiflion a la Reine de faire courk a- pres lui & de 1'arreter; Elle, qui penetroitle motif de cette fuite, s'excu- ia fur ce qu'elle ne pouvoit pas permettre qu'on format de refter dans fes Etats un homme qui croioit que 1'interet de fa fame ne lui permettoit pas d'y demeurer, pourvQ qu'il n'eut point commis d'autre crime. Le Confefleur etant ainfi. forti de Suede an mois d'Aout en 1657. f" ut a tesy^ Rome a la fin d'O6lobre de la meme annee , ou aiant execute fa commif ' e ^ fion de bouche (*) , le General de la Compagnie expedia tout auflitdtdeux vtues en Jefuites fort zeles, favoir Francois Mdines 9 qui enfeignoit la Theologie a 5a '" : ' Turin & Paul Cq/Jati (f) , qui profelfoit les Mathematiques a Rome. Etant arrivez a Stockholm au mois de Mars 1652. ils fe produifirent a la Cour. Mais comme on y voi'oit tons les jours aborder des Etrangers , & que la delicatefle de la Reine etoit extreme , ils ne favoient comment faire pour y decouvrir le fujet de leur venue, Leurs entretiens cependant , etant des perfonnes habiles , la Reine eut quelque foupyon de leur qualite , & com- me elle aifeCtoit de leur parler fur toutes fortes de rnatieres , elle prit oc- cafion un jour qu'elle fortit de les appartemens & que felon la coutume, toute Ja Cour paflbit devant , de leur demander au paffage d'uiie porte , ou (*) Gualdo dit, (i) cue Chrifline envoi'a ce Macedo avec des lettrcs au G^n^ral des efuius. Macedo en convient lui-meme comme nous 1'avons vuci-delTus, dc que lapag. . 4*9 M, jkeine kii avoit recommande 1 farteinent, le fecret comme de raifon. (|) C'eftfans doute de ce Caffat.i, queparle Pierre //wet , Eveque d'Avrancbes, dans fa Du Jefutte Iettre a Pierre Mambrun, datee de Caen le i Mai 1653. (2) apres lui avoir fait recit deCaJJati. fon fejour a Stockholm il dit: Narrabo Tibi, mi Mambrunc, vir/wzi in bac aula, nations ,. lialus, inftituto, ut vulgo ferebatur, Jejuita, pietate eximia f doctrina. Is in aula y y frequent crat, praterea nullibi, prceterquam domi, vijebatur. Sex menfes illic moratus eft i li nullo accitus, a nullo retentus. Cum frimum venit, ementita utebatur ciefaris , qua deinde abjefta turn vsre effe eum dixyjes qui effe credebatur. Les auteurs des M^- moires de Trevoux (3) rapportcnt a fon fujet , qu'il avoit r^gente" les Mathematiques a Rome, & qu'il y regentoit la Theologie , quand te P. Gos-iuin Nickel, General de fa Compagnie, le choifit pour aller en Sidde d^guifii conf^rer avec la Reine de Suede, Cfjrijtine. Ge en parlent comine ils font. Cepen- '' de Cbrijlir.e. ^ ant ^ rcinarquera, que la premiere fois qu'on trouve, que la Reine s'eft inte'reffe'e en Suede pour la Religion Catholique, eft en Juin 1653 (i). Quand elle demanda au Sr. Picques qu'il fit dire fa melTe ^ une tel!e heure, que les Muficiens Italiens de fa Cour, la puflent aufll entendre, puifqu'il n'y avoit point d'autre Pretre Catholique a- lors a Stockholm. Mais la Reine pria en meme terns le Sr. Picques que Ton ne futpoint qu'elle fe meloit de cette affaire, pour ne point dormer , dit-clle, fujet au Clerge" de Suedf d'en declamer. Perfonne ne trouvera rien de blamable en cette aftion de Chri- Jline. Mais s'il eft vrai, comme le dit un autre Jefuite anonyme (2), Eourdslot avoit fait d'elle une libertine & qu'il lui avoit apris a parler mal de la Religion , en lui en- feignant certain fecret de fon art , on dira par cette meme raifon , que c'eft autant lui que fes autres Pre'cepteurs les R. P. Jefnites , qui avoient enfeigne* a la Reine des ^opinions fi e'tranges fur le Chriftianifme (3;. Nous avons rapporte" un cas fort remarqua- % -ble, qui arriva en Fvrier 1653 , dont tout le inonde accufa Bourdelot d'etre la caufe & il n'y a nul doute que 1'autre diffe'rend que Cbriftine cut avec la Reine fa Mc^re fur la Religion , au mois de Mars de I'anne'e fuivante ne tirat fon origine de cette meme ^cole. Ce difF^rend eft rapport^ plus au long dans les dits Mchnoires , fi fouvent Che's oil il eft dit (4) : que la Reine <;vpit avarice* , que grand nombre de gens croioient que tout le monde fera fauv, le Pa'ien auffi bien que le Chretien.... Mais qu'elle avoit prie Sa Mere de changer de difcours & de laifler ceux-la aux Pretres. Mr. Menage parle(s) d'un autre trait de la Religion de Bourdelot, favoir qu'il fe fit envoxer de la part de Cbriftine chez la veuve du Se'nateur Salvius pour lui demander le pretendu livre de TriKts Lnpoftoribus qu'on avoit dit fe trouver dans la Bibliothe'que du DeTunft. Mais que la veuve lui avoit re'pondu , que le rnalade faifi des remords de la Conference , la veille do fa mort, avoit, dans fa chambre, fait jetter le livre au feu (6). Ces traits fuffiront pour faire voir entre les mains de quels Direfteurs de confcience la bonne Reine Cbriftine (koit malheureufement tomb^e : & la-deflus on ne peut fe dif- penfer de rc-Sdver le jugement frivole que ledit JeTuite anonyme (7) porte fur cette affai- re, quand entr'autres chofes il dit de cette Princeffe , que fa devotion Luth^rienne s'^- clipfa tout a coup & qu'elle parloit de la Religion en ge'ne'ral d'une maniere qui fcan- dr.lifoit la Cour. Peut-etre, ajoute-t-il, penfa-t-on qu'elle ne croioit plus en Dieu , parce qu'elle croioit peu a Luther. II fe peut faire auffi , que revenue de fes erreurs & encore peu affermie dans les ve*rite*s catholiques, dont elle s'e'toit fait inftruire fe*- cretement par trois Jdfuites , elle ne fut pas trop alors a quoi s'en tenir &c. Mais Maximesli- q U j e ft-ce qui ne lent pas, comment notre LoMifle trahit les myfteres de fa fociiite' , Teases ; vo- de pervertir au lieu de convertir les gens, en mettant leurs Cat^chume*nes dans un e^at iez ci - defTus a pag. 463 & lyc ' (i) Mem. crites a Malms , d'oii on pouvoit comprendre que tous les deux etoient emplo'ies dans une meme affaire & avoient des interets communs. Caffati fut envoie a Rome pour s'informer precifement a combien pourroient mon- ter les depenfes de la Reine , en cas qu'elle fixat dans la fuite fa demeure en cette ville , & pour faire part au Pape de toute 1'affaire. Gualdo ajoute (a) , que Bwrdelot fut de meme envoie apres en France , ou fans s'ouvrir en aucune fafon du changement de Religion , il devoit fonder la Cour fi, en cas que la Reine vint a fe demettre de la Couronne , elle pourroit faire fon fejour en France (*). De plus , la Reine avoit en meme terns decouvert fes penfees a Pimen- chri/Hn, tely Miniftre d'Efpagne , qui avoit grandement applaudi a fon deflein : & m au p a . en attendant le terns de 1'executer elle avoit ecrit des lettres tant au Pape If B f af alors fiegeant (t) qu'au Cardinal Cbigi , Secretaire d'Etat & depuis Pape * j fous le nom ftAkxmdre VII que le P. Malines leur avoit portees. Elle a- & voit auffi ecrit au Roi d'Efpagne par ce meme P. Guemes Dominicain qui J'annee fuivante affifta a Bruxelles a la profeffion de la Religion Catholique- Romaine, que la Reine y fit, comme nous 1'avons marque ci-deflus. Apres cette ceremonie , quoique fecrete , ii n'y cut forte d'agremens, , 0n procure f a Bruxtlln que tonnes forte* de p!aifit a (a) L. C. pag. 20. CJ C. Chrijlint. a ne favoir pas quoi s'en tenir , dans une affaire aufli importante que 1'eft celle de la Religion? Les Auteurs des Aftes lite'raires de Leipzig (i) jugent done bien quand ils difent de lui: Exbibet Lojolita nofter T. II. p. 288. & 291. imaginem Innocentii X. ,, P. JR. f abjurationem Lutberanifmi & Chriftina Suecias Regina fattam , quam glor iofam ,, vocat converjionem : neque tamen audet affirmare , Chriftinam cum bac Religionis muta- tione mores quoque emendajje vitamque. " Ce n'efl pas moins centre la v^rit^ que ce JeTuite avance (2) que Cbriftine avoit impof^ fllence a fa Mere & lui avoh dit, qu'unde fes plus grands chagrins e"toit d'etre n^e d'une auffi pauvre creature. II s'en rapporte aux M^moires de Cbanut : mais de pareilles expreffions ne s'ytrouventabfolument point: & ce n'eft qu'une calomnie J^fuitique , que de vouloir attribuer a une PrinceiFe fi bien n^e des fentiinens fi denatures. (*) Fellerus dit (3) au fujet de cet envoi de Bourdelot en France Bourde!otius/- Comment ,, cnltatem difcedendi a Regina obtinet atque obtinet ter centum mills tbalcros praparandis Uourdelot animis Miniftrorum Gallice , noEtu ingredient navem atque effugiens deftinata plebis odia P artit Pur la fcf certam nectm. France. (t) Mr. Ah Eggs n parle ainfi (4): quia -vero Jub finem fui Pmtificatus (Innocentii Comment X.) a P. Francifco Piccolominso Societatis Jefu Prapofito Generali literas excepit Regina innocent X. Suecia; Chriftinae, quibus ipfi Jignificabat , fe quam primum abdicatis fuis regnis ad fidem rejutlalcttre Catbolicam publice profitendam Romam accejjuram, did non poteft quanta cum gaudio tan- dc Chrijlinc, , turn ipje negotium fujceperit , quantoque eum favore illud ipfum memorato focietatis Pra- poftto L-ommendaverit. Sane cum paulo poft morti proximus ipfe effet , duabus tantum de rationibus immaturam Jibi mortem widen diceba* : nimirum , quod nee ) Dans foa Poatificiam dodura pag. ;. Tome /. Ooo 474 M E M O I R E S CONCERNANT k' an que la Cour de Bruxelks ne tachat de procurer a une Hotefle fi agreable, _ 3 S5 ' Le bal , la comedie , les tournois , les parties de chafle , les promenades , tous ces plaifirs fe fuccederent Tun a 1'autre, & meme le Cardinal Mazarin (malgre la guerre ouverte qu'il y avoit alors entre la France & \'Efpagne) y donna une efpece de relief, en envoiant de Paris a Bruxelks une bande en- tiere de Comediens, qui reprefenterent leurs Pieces aiternadvement en Ef- pagnol, en Franfois & en Italicn (a). Phncjitet, que Chriftine avoit tant ef- time en Suede & qui venoit d'etre envoie pour la complimenter , en qua- lite d'Ambafladeur du Roi d'Efpagne, etoit de toutes ces parties de plaifirs (). La Reine en fait part a la belle Comtefle Ebba Sparre par une lettre qu'elle lui ecrivit a Stockholm (*). Elle fouhaite de pouvoir partager fa feli- cite , comme elle 1'appelle , avec la Comtefle , qu'elle honnoroit tod- jours de fon eftime & de fon amide'. Voici cette lettre , dont la fin de i'Apoftille ne femble pas etre un fort bel echandllon des fentimens de Chri- ftine , en ce terns-la, en fuite de fa converfion , que Mrs. les Jefuites difent faire tant de gloire a leur Religion. \Ue mon bonbeur feroit fans jecond > s*il itf etoit permit de lepar- tager avec vous^ & Ji vous etiez temoin de ma ft licit 6 ! Je vous jure quejeferois digne dePenvie des Dieux , fije pouvois jouir ' - du bien de vous voir ; mais puifque je defefptre fi jujlejnent ce bon- beur , /'/ faut que vous me donniez au moins cette Jatisfattion 3 de croire qtfen quelque endroit du monde que je me trouve , je confer- verai eternelkment Jefouvenir de votre merite , / que femporte- rai 5 au de~la des monts , la paffion & la tendrejje que je vous ai tou jours port fa. Confer vez - moi du moins votre cberfouvenir , =p nc troubles pas la douceur de la f Elicit , dont je jouis , par un in- jufte oubli de la perfonne du monde qui vous bonnore le plus. A- dieU) Belle , fouvenez-vous de votre Chriftine. P. S. ye Vous fupplie de faire mes amities a tous ceux qui font de mes amis &amies , =? meme a ceux qui rfontpas envie de Tetre", je leur pardonne de tout mon c&ur 5 au/Ji bien que je ne nfen trou- ve pas pire pour eel a. jToub/iois de vous dire> que je me porte par- faitement bien^ que je repots id milk bonneurs , & que jejuis bien avec tout le monde 3 except e 1 le Prince de Conde , que je ne vois jamah (a) V. Blackltadii Biograpb. Chriftinse ./>. 8. fefff. &f Mem. pour VHifl. Univerf. tn Mfc. Sut^dois. T. III. p. 29. f 523. (fc) V. d'Aunoy voir.ge d'Efpagne T. II. (*) C'ctl la meme ComtefTe Sparre , fille d'honneur de Cbrijline, a qui elle avoit joue V. a-deflus i c pet j t tour J ^ M - -' IT- CHRISTINE RE INK DE SUEDE. 475- jamais qrfa la Commie & au Cours. Mes occupations font de bien L 'f; manger & de bien dorm'tr, etudier un peu , caujer ^ rire *p voirks Comedies Frar^oifes, Italiennes / Efpagnoles ? apajfer le terns agreablement, Enfinje n't cvyte plus des jermons > je mtprije tous ks Oratcurs-) apres ce qua dit Salomon , tout le rifle n'efl que fo^ tife , car cbacun doit vivre content > en mangeant , - buvant & ibantant. Bruxelles Les Savans , les plus a porte'e de cette ville , ne manquerent pas d'y venif ** pour rendre a Cbrift'me par vieille habitude leurs homages. Elle in vita elle lllw meme Manage a y venir lui faire viflte. Elle lui e'crivit , qu'elle avoit fait lllnt 4 Br *~ la plus grande partie du chemin & que 1'afFection qu'elle avoit pour lui va- *' loit bien la peine qu'iljfit le refte. Mais Mhmge s'en excufa (a). Mr. GaJJendi avoit felicite Chrijline fur fun arrivee en Brabant par la belle Lettre que nous playons ci-deflbus dans 1'Appendice avec celle que le Sr. de Picques lui ecrivit a ce fujet (*) & void la reponfe qu'Elle lui fit. dicen E Picques vous dira combien f ejiime les ttmoignages de votre efprit 5 vous nfavez oblige 1 e infiniment en me temoignant que nonobftant le cbangement que fai fait de ma condition vous ejlimez encore maperfonne. Votre ejiime me jujlifiera con.tr e ceux quibld- ment won aftion & votre approbation me juffira pour me confirmer dans r opinion que fai d' avoir bien fait. Confer vez-moi votre ami- ti-> &Joi'ez certain 5 que dans r indifference-) que fai pour la p/u- part des cbofes, je ne pun itfempecber de nfintereffer fort pour les fentimens que vous awez de moi ; & je vous puis dire avec verite que votre amitie 5? ejiime font au nombre des chojcs dont je mepaj~ Jerois avec peine. a Bruxelles ce CHRIST! KF Janv. 1655- II ne manqua pas d'y re'pondre bientot apres , en lui faifant comprendre particulie'rement combien il lui importoit de foutenir la grande reputation qu'elle s'e'toit acquife. Cette lettre ne merite pas moins d'avoir place dans ce Recueil dans la langue ou elle a ete e'crite. Y A ' A i. r Quant aux autres Savans qui e'toient alors a Bruxelles , FoJJlus e'crivit a dlccn ' Lvn< Helnfius , que fes Camarades & lui s'y divertiflbient fort bien , mais que Cbri- (a) Menagiana T. I. p. 88. (*) La i. lettre de GaJJendi a Cbriftine eft du X. Kal. Sept. 1654. & la ae. e ft Paris, pojlridie Idib, feu. 1655. OOO 2 476 MEMOIRES CONCERNANT L'an Chrifline avoit renvoie Bourdelot , lui difant qu'elle n'avoit plus befoin de _ 16S2 --, Medecin (). La Reine etoit logee au Palais Archiducal (a) , dont elle occupoit les meilleurs appartemens , pendant que 1'Archiduc meme s'etoit retire dans Jes chambres des filles de la Cour. C'eft mr ce fujet qu'on jfit une efpece de Satire , que le Sr. Hitius communiqua au Sr. Heinjius (f). Chrifline fetranfporta au mois de Fevrier 1655. dans le palais du Due d'Egmond , ou elle entretint fa Cour a fes propres depens , tofljours en fe donnant toutes fortes de divertifTemens & de libertes. On en parle plus au long dans les notes felon les bruits qui en ont couru alors & qui fe font confervas dans les ecrits des Gens de lettres & d'autres Auteurs (|), II (a) V, Gal. Gualdo /. c. p. 58. Bruits dcs- avantageux touchant Chrijline, (*) VoJJlus dit (i) Bourdelotio Jignificavit Regina fe non egere Medico. Wullenius jam bine in Suediam difceffit... Regina in ferviti urn Juum adjcivit Dominant Donneau &Jororem Jannetoniara : Harum f rater poft Antonium prtecipua nunc floret gratia a- pud Reginain. Wolffius , Wrangelius &* Lilliencronius Sued ad fuos quam primum re- vertentur. Itaque nos fupraditti Heroes jf Heroines vacua dominabimur aula , Ji Diis placet. HaEtenus in aula Arcbidueis vivimus, qui nosfplendide excipit. Poft fepteni aut otto dies ad Domum Egmondianam tranfibimus. Pulcre omnes curamus cuticulam. Mufici, Hiftriones, Cborauli & Crotaliftria ad naujeam pene nos compellunt. (j) Vliiiu! lui marque (2) Ne pagella bcec vacet, addam Epigrammation a daudicantc a- inter navigandum elapfum : Aulam, Guilelmus quam Arcbidux Leopoldus Habitavit olim, fertur ipfi Chriftinse ntiper Fecijje vacuum , Jeque jam in Gynacceum Qtiod Ifabellas dicitur , recepijje : Effeminatum nunc utrum magis dicas? Q) P. e. Heinjius dcrivit a Gronovius en ce terns - Id (3) , , Miros ut audio ludos in i- tinere Noflra ilia Herois dedit. Doleo tarn inconfulte rem geri. Sed quid agas ? fuo re- linquenda eft ingenio. Sapiet aliquajido & ad fe redibit , ut fpero , utinam ne fero fa- piat.... Nos avidi exfpettamus quid errabunda Ifidi fit futurum. Quo con/ilia ejus Jpec- tent. Etfe arduum non Jit conjetturare. Di-vinos bonores vita ifta defultoria mirumjicon- fequatur " ? Janus Witius ^crivit a Heinjius au mois de Nov. 1654. (4) Varii in: vulgus fparfe funt rumores de ipjius Regime turn animi turn morum inftabilitate. Hispa- nicas faftioni addiEtiJ/imam : muliebrem Jexum prorfus averfari , neque opera neque confortio muliebri baQenus in Belgio ujam. Miniftros etiam Evangelicos a fe dimijijfe pridem , tanquam inutiles f fuperfluos comites. Gejlus fane non obfervari nimis decoros aut bene compojitos. Arcbidux Leopoldus palatii fui partem excipiendce Regince paravit , uoi hibernatura dicitur, a Legato Pimentello Regis nomine colenda. Reditus etiam a Sue- corum Rege negari fama eft : fcf nefcio quce non. Bohemia Regina illam jam recenter invijit Antverpiae: pi&itris fpeftandis intenjijjlmam , afacris omnibus alienifflmam , infce- nicos lufuf, aliafque nugas nimis propenjhm ^f plura ejusmodi convitia jam dudum etiam apud bonos Jldem invenere ". Ce meme Vlitius e'crivit a Heinjius au mois de Fevrier 1655. en ces termes (5) Chriflina Augufta Bruxellas migravit aulaque in parte recepta. eft ab Arcbiduce Leopoldo. Parum abfuit quin addiderim Odce meat : Et nunc ille Pa- ris cum femiviro comitatu. Cantorwn Puta, quibus imprimis deleftatur : fama, cul (i) Carman Syll. Epift. T. III. p. 677. (zj Idem 1. c. pag. 759 (3) Jiurman 1. c pag. 334- (4) Idem ibidem p. 757. (i) Ideai ibidem p. 7;*' CHRISTINE REINE DE SUEDE. 477 II fe peut bien que 1'humeur libre& enjouee de la Reine Chriftine, places L ' an alors parmi des Gens accotitumes a la gravite Efpagnole , furtout dans des _ Perfonnes de fa qualite , dont ils croioient que tous les pas devoient etre mefures , ait donne quelque fujet aux bruits peu avantageux , q,ui coil- ' rurent fur fon chapitre. Cela paroitra d'autant moins etrange a ceux qui voudront reflechir fur les conjonftures du terns de fon fejour en Brabant , _ ou la plus grande partie de ['Europe etoit partagee en deux factions, favoirHr$r." Y Efpagnole & la Francoife (*). Celle -ci piquee de ne trouver plus en elle ctri/nne prcvenue ^^ plus pour i'Efpagne France. ludibrium nimis ilia debet , nuper Regi Hifpaniarum , deinde ejus fpurio Johanni , nunc ipji Arcbiduci nupturam tulit. Quod luculento ifti cbirograpboj'uo , quo te do- navit , detraxit , id nunc in biftriones &p pantomimos larga manu effundit. Non au- deo tibi vel in aurem committere qua bic vulgo de ea narrantur , ne injuriam faciam fcp tuts ? mece tarn recenti de Auguftae laudibus f virtutibus opinioni. Hoc unum animo injedit atque inbceret : S. M. e*tant demanded , Ji elle n'avoit point de Minif- ,. tres ou Prtlcbeurs dans fon train 1 ? Elle repondit que non: d'autant que partant de Suede, ,, elle s'etoit defaite de tout ce qui lui etoit inutile.... A ce-ci revient ce que le Sr. Aitze- ma rapporte d'un entretien qu'il avoit eu avec le Sr. Cbanut, qui avoit entendu dire qu'elle s'e'toit explique"e tres-librement fur toutes les Religions en difant: S'il y aim ,, Dieu, jeferois bien attrappee. Que de meme elle avoit dit aux JeTuir.es de Louvain, qui par flatterie lui promettoient , que quand elle feroit catholique, on la placeroit a cdt^de S. Brigitte de Suede: a quoi Cbriftine avoit rpondu : j'aime bien mieux qu'on ,, me mette entre les Sages : voulant faire entendre, que les devotions Romaines n'e"- toient que desfottifes. Qu'ri tout cela.dit Aitzema, le Sr. Cbanutlui avoit re"pondu: ,, Comment il faloit qu'elle fit fon careme - prenant : faifant allufion a la coutume des Catholiques chez qui , quand quelqu'un doit prendre 1'habit de Religion , il lui eft permis la veille de faire toute forte d'extravagances , comme au jour du Mardi gras (i). Nous ajouterons a tous ces traits le conte que Mr. Bayle dit (2) avoir oui faire du fe"jour de Mr. Bucbart a Stockholm, ou on lui fit un jour fort brufquement cette queftion dans la Bibliotheque de la Reine. Que penfez-vous d'un certain livre qu'on. nomme la Bible? On pretend , dit Bayle, qu'il prit la chofe d'un ton aufl! fe>ieux qu'ille devoit, & qu'il fit un grand difcours fur les carafteres de divinite" qui brilltnt dans 1'Ecriture : mais que les affiftans ne firent que s'en mocquer Sur quoi Mr. Bayle porte ce jugement: j'ai oui dire ces chofes & quelques autres de ineme nature ,, a une infinite de Gens: mais quand j'ai voulu les Examiner de pres, jen'ai rientrou- vd qui les doive rendre croi'ables. J'en parle n^anmoins ici, afin d'empecher au- ,, tant qu'il me fera poffible, que ceux qui entendent parler de ces fornettes, y ajou- tent foi "... Voila l'6xemple qu'auroient du fuivre tant d'autres Savans & perfonnes port^es a croire & a dire du mal de Cbriftine. (*) C'eft auffi par cet efprit de parti qu'on trouve dans les Me"moires des Mi- niftres publics de notre terns que le fe"jour de Cbriftine en Flandrcs intrigua les Ca- binets des Etats de {'Europe. Voici le rapport que le Mr. Boreel Miniftre des Etats- Gent^raux a Paris en fit au Grand Penfionaire de Witt le 23 Avril 1655 (3) . J'ai auffi oui dire, que les levies de Konigsmarck e"toient a la difpofition de la Rtine ,, Cbriftine : que Konigsmarck avoit e"t depuis peu a Bruxelles aupres de cette Reine , ou il n'e'toit refl^ que tres-peu de terns. Je ne puis croire que cette Princefle aitob- tenu de la Cour d'Ejpagne, que celle de Bruxelles vo'fe & fouffre que Kt-iigsmwck s'empare de la ville & des autres places du Duch^ de Julliers fans donner le inoin- dre (i) In Saaken van Staat en Oorlogh T. I. p. ft) Dift. hift. & crit. art. Sam. Bochart izis.item Bafna^e Ann. ad h. an p. 365. cfr. Ar- lit. D. r.olJs Kitch u. Ketz. Hift. T. II. Libr. XV'II. 5 r?j V. fcs leftres 5c Ne'poc. T. I. png 3:3. 12. p. s\6- Kobien Muniz-Uel. T. V. p. 145, cfr. Holl. Mere. Septerabre I6j;. p 91. Ooo 3 47 8 M E M O I R E S T N C E R N A N T L'?m ce grand panchant, qu'elle lui avoit connu autre fois pour tout ce qui etoit ?s ' Fraiifois , fe fera mife pen en peine d'empecher qu'on Fe'pargnat. Les /" pagnols & les Autrichkns au contraire, naturellement portes pour les devo- tions Romaines & pour fe faire un me'rite atipres du Pape , auront cru a- voir fait une grande acquifkion en la rendant Cacholique , & en 1'entrete- nant toujours dans fes fentimens contruires a ceux de France. Pour les Proteilans, & parmi ceux-la les Savans furtout, comme ils la foupsonne'rent capable de franchir le pas de la Religion , apres avoir fait celui d'abdiquer une Couronne, ils la regarderent alors d'un tout autre oeil, que dans le terns qu'ils 1'adoroient , comme leur Ange tutelaire envo'ie da Ciel. C'eft fans doute par-la que Chrlft'me eut le malheur d'etre _en bute a la cenfure de Tun & de 1'autre parti. C'e'toit auffi ce que le Chancelier Oxen- flierna & tant d'autres perfonnes fenfees lui avoient pre'dit: & c'etoit jufte- ment en de fi delicates circonftances , qu'elle auroit du fe me'nager plus que jamais , & prendre garde aux moindres pas qu'elle faifoit , des Gens clair- voians obfervant jufques a fes plus petits mouvemens. Mais , comme nous 1'avons die 1'humeur vive & enjoue'e de Cbrijline ne pouvoit foufFrir aucu- ne gene. cMjimt Cependant comme les echos des bruits de tout ce qui fe paflbit dans le truire ces "'Brabant retentirent jufques en Suede , d'ou fans doute ils revinrent a fes bruits en e- oreilles i & qu'il importok a fa reputation qu'ils fuflent detruits , voici cnvant au , , > n j T> 7? n n T- /->T t ROL Charles, deux Jettres qu elle ecrivit de Bruxelles 1 une apres 1 autre au Roi Charles- Cu/iave. Guftave. Elle y donne aflez a entendre qu'elle n'ignoroit pas ce qu'on di- foit d'elle: Onfieur Mon Fr$re. Le Comte Steinberg 3 qui s*en retournc auprds de Fotre Majeft4 9 vousfera r6cit de la grande paffion que fai pour les inter ets de votre Perfonne p votre Couronne. Je confer verai toujours ces jentimens >> / me croirois indigne de la vie , fifetoh capable de changer P amour , que fai pour ma patrie 3 5? Pamitle que fai pour Fotre Majejle. Ce font des fentimens qui me dureront autant que ma vie. Efje vous prie de croire que jem^ej- timerois heureuje d'etre capable de rendre queJque fervice a mon pal's , qui me put acquitter de r obligation de ma naiffance. Cepen- dre fecours au Due de Neubourg. Cette politique me paroit trop rafine & pafifema portt^e. J'ai apris par un canal-tres-certain, que cette Reine fait faire pour elle-mS- me en Brabant un train Roi'al, auquel on travaille en diligence, & f Ton preiFe fort les Ouvriers qu'il foit acheve au plCitot. Je vous avoue, que ces agitations extra- vagantes ne me plaifent pas. Elles me paroiiTent trop eloign^es de la maniere d'agir ordinaire: je dis qu'elles paroifTent ainfi. II n'y a pas defi bonsmattres en fait d'ar- mes a qui un lourd pa'ifan nc foit en droit de dire : pmu's garde a f^ous. CHRIS T,INE REINE DE SUEDE. 47P dant je vousfupplie de me continuer Votre amltie , p de croire que J 1 - f{in * je vivra mourra de Bruxelles !e 30 Mars i(555. rtormdcktigfte Konungi Hog- & tdrade Kdre Herr Bro- der. Jag bafwer for detta i wanligbet Eders Kong/. Majt. in- finuerat del upjatjagfattat baf- wer-> mm Itfflid utom Lands at tilbringa : Ocbjafom de skdljag tier til bafiver^ icke kunna vara mindre fdrjkvarlige , an min ab- Jence E. K. Mt. ocb Sweriges Crono nyttig , ndr man alia fa- ker 117/7 betdnckia ; Altja twiflar iag fuller intet> at EdersKongl Mt, fielfjadant ickcibtifta mat to uttydandes warder , men Jajom Jag derbos wal kan tanckla , at Sweriges RikesSt tinder , ocb far- deles de i Join intct kunna begrun- da^ at lag merafdrRikfens btif- ta an mit egtt contentement baf- wer mig ur landet begifivit >f ko- la utofwer fadantftilljammatanc- kar bafaa y ocb derdfiver atskil- liga dilcourjer fora 5 Altjo, tir min kdr-wtinlige begdran 3 at E- ders Kongh Mayt.jomfakens be- skaffenhet bdttre bekant tir^tdc- kes i fadant fall taga mit partie an 5 ocb fig j LI wdlfom alia Rik- Jens St Under , derom fulikomligen ocb wiftfdrftikra , at eburmvdl Jag utom Riket /ladder dr , dock icke mindrc skat bolla bvoad Jag munteligen ocb skrifteligen tillagt haf- Tres - puiflfant Roi, mon tres ho nore & cher Frere. J'ai ci-devant infinue amiablement a Votre Maje- fte le deflein que j'ai forme de palter ma vie dans les pai's etrangers. EC comme les raifons qui rn'ont porte a prendre cette refolution , ne peuvenc etre moins valables , que mon abfen- ce fera utile a Votre Majefle & a la Couronne de Sutde', je ne doute nul lement que V. M. n'y donne une in- terpretation favorable. Mais comme je m'imagine en meme terns, que les Etats du Roi'aume de Suede, & fur- tout ceux , qui ne fa vent pas appro- fondir, que je me fuis retiree du pai's plutot pour le bien du Roi'aume que pour mon propre contentement, s'en formeront des idees etranges & en tiendront des difcours differens. Ain- fi je prie amiablement V. M. qui con- noit mieux cette affaire , de vouloir en ce cas - la plaider en ma faveur , & de fe tenir Elle-mme , auffi bien que tous les Erats du Roi'au- me , pleinement aflurez : que bienque je me trouve hors du Roi'aume , je ne m'en tiendrai pas moins obligee a ce que j'ai promis de bouche & par ecrit, que fi je me trouvois dans le pai's; & que Ton n'emendra jamais, que j'ai'e entrepris quoique ce foit, qui piiifie porter a V. M., a la Cou- ronne de Suede, on a fes habitans, du prejudice , du dommage ou du deshonneur ; mais que je tacherai en toute rencontre & de tout mon pof- fible de me conduire envers V. M. & eus, de fagon, apouvoir to'ujours per- ME MOIRES CONCERNANT I/an. 1655- bafiver 5 an om Jag uti Landet . wore 3 ocb aldrig skal forfporias at Jag nagot foretaga skal fom kanldnda Eders KongL Mt.Swe- riges Crona eller deJJ ' Inbyggare til prtfjudtiz, skada eller wand- ra>> utan mig ialla mat to ocbef- ter moyettgbeten beflita Ja emot Eders Kong/. Mt. ocb Tyatcom- portera ocbfo'rballa , at Jag al- tid med dran skal kunna bdradet namnet , at bafwa warit Sweri- ges Drotning. Ocb fir dettajom Jag beder Eders KongL Mayt. \dcktes dem remonftrerafom an- nat tdnckia ocb ddmaommitntir- warande lefwerne 5 tin fom Jag fortient bafiver 3 eller de giora borde. Sedan at Eders KongL Mayt. Saledes om mm Perfon wdl forfakrad ) mile mig franwa- rande wtil maintinera ocb band hafiva wid de under holds medel^ fom mig efter Receffen deputera- de ocb inrymde dre> ocb skal Jag for ladan ocb annor E K. M. b'6- ga omwc^rdnad^finnas ialla mat- to tackfam 3 forblifiuandesfttidfe porter avec honneur Je nom d'avoir ete Reine de Suede. C'eft ce que je prie V. M. qu'il lui plaife de vouloir remontrer a ceuxquipourroientpen- fer ou juger de la vie que je mene a prefent , autrement , que je ne 1'ai me'rite , ou qu'ils ne devroient faire. Je prie au furplus , V. M. qu'aflu- re'e de ma perfonne , comme je viens de le lui marquer , il lui plaife de me maintenir, en mon abfence, les Do* maines & les revenus pour mon en- tretien , qui me font aflignez & de'- partis , en vertu du Reces & de la Convention arretee. Je temoignerai a V. M. de toute maniere ma gratitu- de de fes hauts foins & je ferai pour jamais Bruxelles den 5 Aprilis 1655. de Votre Majefle a Bruxelles le 5 Awl 1654- Eders KongL Mayts. ajjettionerade Syfter ocg trogne Wann CHRISTINA. l'arFe6lionnee Soeur & 1'amie fidelle CHRISTINE. On voit la , qu'outre les nouvelles aflurances qu'elle donne au Roi , que fon fejour hors de Suede n'apportera aucun prejudice, ni deshonneur au Roi'aume, ni aux Suedois, elle protefte qu'elle fe conduira de maniere a ne point deshonorer fa qualite de Reine. Elle fait encore les m ernes protef- tations CHRISTINE REINE DE SUEDE. 481 tations dans la belle lettre qu'elle e'crivit au Comte Pierre Brake, premier Se'nateur de Suede , que void : (*). I<5 55 ]\AOn Coufin. V. E. eft Punique perfonne de tous ceux> que fhono- * ** re infiniment en Suede , qui fe foit fouvenue de moi depuis que jefuhpartie. Vous avez voulu me le temoignerpar une lettre obli- geante que Mr. le Comte Tott me donna de votre part, llfera temoin de la joi'e que feus en voiant ks fentimens avantageux que vous avez pour moi & je rial pas voulu attendre fon retour pour vous en remercier. I? impatience de vous conjurer de me continuer votre bienveillance > w? oblige de me procurer plutdtlafatisfattionde vous entretenir. Je vous conjure done d'etre perjuadt qtfil tfy a perfonne qui vous ejlime a Tegal de moi> & fi mon amitie peut ob- tenir de F~. E. quelque confideration 5? merit e , je ferai trop re**- compenjee-t fi vous mepermettez de vous donner la commiffion d*af- furer le Roi de Suede, Meffieurs les Collegues de V. E., / enfin touie la Suede de la paffion que fai ? que fauraipour leur com- mun bien. Je conferverai autant que ma vie les fentimens d 'amour ? de refpell que je leur porte 3 ^ quoiqtfil me puifje arriver 3 je perdrai plutot la vie , que de permettre qu 'aucune penfee contraire me rendc coupable envers eux , quoique puijjent drre & faire ceux qui me veulent du mal , jp que je plains fans les bair 5 nikuren- vier aucune forte de fortune. Je perftfterai jujqtfa la mort dans lafidelite que je doh a lapatrie*> & F. E, verra? qtfen quel lieu du monde que je me trouverai, je tfy fer oh jamah aucune attionqui puiffe dementir cette proteftation. Je vousjupplie de mcmaintenir en cette opinion en Suede 5? dene pas permettre 3 que ceux qui pren- nent la peine de s^riger en cnnemi contre moi , puijfent me rendre mauvais office en interpretant mal mon abjence. Quelque longue qtfelle puijje etre^ elk ne me fer a jamah oublier ks devoirs deTbon- neur 5? de la naiffance , & je la finiroh auffitot 5 que je pourrois juger que ma pre' fence pourroit etre utik a ma patrie. Dans ret at oil font les chafes , je crois qu'il eft de la bienjeance j> du bien de mon pats , que je fois abfente^ & je fff imagine , qtfil eft necejjaire pour k commun repos de tous^ que je nemefajje pasvoir enunlieu^ oil fai gouverne autrefois. Que F. E. ne ^imagine point que fai du (*; Je 1'ai tire de 1'original, qui fe trouve chez Madame la ComtefTc de Gyllenftier- nee Comtefle de Brabi. Tome I. 482 MEMO IRES CQNCERNANT ^655'. d u wgffo d'y voir commander un autre. Je vous protefte que cettr ' ralfon ne rtfen elolgne pas. Au contralre fai cet unique deplaifir dans Tetat beureux ou jefuh 3 de me voir privee de contempkr de prs lafeule affion qui itfa dome unplaifirinconcevable^ &depou- votr, en volant Jous mes yeux mon outrage 3 renouvelkr ce plaijir Jans 6gal. Maisje itfen prive puifque la ralfon k veut alnfi , & la mtfme ralfon > qui impofe cet ex'il volontaire , itfordonne auffi en meme terns , que fi quelque cbangement des affaires du monde 3 qui font fifujettes a des revolutions 5 faifoit prendre aux affaires de la Suede une autre Jape 3 g$? qtfalors la Suede jugeat , que mapr^ fence luijerott uttte , je vole aujfltot , quand me*me ce feroit pour leur facrlfier ma vie. Je mourrois trop gkrieufe 5? trop fatisfal- te de pouvoir perdre le jour dans k meme lieu , ou je Tai trouv^ pourvu que ma mort fut utik a ma patrie. Jefoubaite neanmoins 9 que je vous demeure inutile , comme jefuis , g? qiCaucune necejjitt ne vomfaffe fouvenir de moi^que par de conimueh fucch & triom- pbes : Que Fotre Etat flmriffe ; Que vous aiez partout la vittoire. Que la Suede dansfes confins ne recoive que la joie ? le repos 5? qtfelle donne aurejle de la terre fep de la jaloujie & de la crainte, ep qtfaucun ma/beur ne vous arrive qui pui/Je troubler Tobjcurlts ? le repos dont je jouis ! Dans Tetat ouje /uis ilrty a que vosfuc- cds qui puijjent augment er ma f elicit e , ^p vos feuls malbeurs font cap able 3 de troubler mon repos. Je tfai de dejlr ni de crainte que pour la Suede, & je puts fans bonterejjentirpour e/Iedesfoib/effes, puifque tout le rejle de la Terre m'efl prefque indifferent, ^iprds eel a jugez, fi je nefuispas la plus beureuje per forme du monde 3 ^ fije nedois pas conferver avecfoin cesfentimens. qui font une par tie de ma fell cite. Out ^ Mon Coufin 5 je les confer verai- cberement, 5? fen feral gloire partout 3 comme auffide la reconnoiffance que fai pour Fous. Confer vez - moi Fotre amitie $? obligez-moi de me faire connoitre telle que je Juh , &foiez certain , quefaurai pour F. E. toute la gratitude 3 que vous pourriez foubaiter, de Bruxclks le p 30 Mars 1655. C KRISTIN E.- Parmi- grand nombre d'ennemis & de cenfeurs, CJmJline s'e'toit pourtans conferve par tout quantite d'amis & de partifans, meme entre les Savans, Nous avons produit ci-deiTus une lettre du Sr. Forftner an Sr. Portner. Ce- lui-ci en homme de bien , ne vouloit pas pre'cipiter Ton jugement au defa- vantage de Chriftlne , fans connoifTance de caufe. 11 ecrivit done au Sr. Beech- , qui avoit pafle quelques annees aupres d'elle , pour lui demandes ce CHRISTINE HEINE D-E-SUlfi't' ce qu'il penfoit de tous ces bruits vagues , qui s'etoient repandus fur fon L'zn compte en ce terns-la. Et comme la lettre de Portner aufli-bien que la re- ponfe de Boeder juftifie Cbriftine enquelque maniere, & donne fujetde rou- gir a plufieurs autres Savans , alors aufli prets a la blamer , que peu aupa- ravant ils avoient ete emprefles a la louer; on ne peut fe difpenfer de don- ner ci-deflbus ces deux lettres (*) , comme des modeles que tant d'autres perfonnes auroient du fuivre , en penfant comme Guy Patin qui dit a Ton a- m i (B) : Que quoique la Reine de Suede par fon changement de Religion ait bien aiguife les langues contre fon honneur, il vaut mieux ne point dire du mal d'elle , & n'en croire que du bien. Pour revenir aux divertiflemens de la Cour de Bruxelles , ils furent fuf- *-> Reine pendus pour quelque terns par la nouvelle de la mort de la Reine Douairie- ? e S^ re re, Mere de Cbriftine , qui lui fut apportee par le Baron Spane , Refident M e de ' de Suede a la Cour de France (b). Ghriftine fe retira auflitot a la campagne , 2!*'' ou elle fe priva pendant trois femaines de toute compagnie publique (f_). Ce fut le meme jour du mois de Mars , que I'illuftre Grand- Chancelier La mortd de Suede, Axel Oxenftierna , fut enterre a Stockholm & transfporte de-la a fa^o terre de Tyholm. II mourut fur la fin du mois d'Aout de 1'annee pre'ceden-^'"" < - te 1654 (<;) Sa fin fut douce & paifible, & pareille a fa vie. II fut regret- te de tout le Roiaume , & particulierement du Roi , qui favoit mieux que perfonne la perte qu'il faifoit en la mort de ce grand homme. II le temoi- .gna aufli dans fa lettre de condoleance au fils , qui devint apres lui Grand- Chancelier de Suede (j). Les dernieres paroles que le Pere prononpa en mourant furent fur la Reine Cbriftine : car ai'ant demande a ceux , qui etoient autour de lui, quelles nouvelles on en avoit, il repondit fur cequ'on lui en dit : je lui ai predit qu'elle fe repentiroit de ce qu'elle faifoit (J): mas. (a} Dans fa lettre a Charles SpOn T. IL cur. I. c. p. 25 fc? 57. > 227. (0 Mem. de Chanut T. III. .p. 472. ' (fc) Gal. Gualdo /. c. p. 59. Holl. Mer- C*) La lettre de Portner a Boeder eft date"e V. Jd. Mati 1655 & la r^ponfe de celui-ci v. 1'Append. a Portner d. 7. >m E. A. N.LVHIfc (f) D'un cote de fa m^datlle funcbre fe llfent ces mots: Maria ELEONORA RE- LIX ' GIN A SUECI^E obiit 1 8 Martii MDCLV. & autour: TERRA COELOQUE BEATA dB de 1'autre cot6. G. A. R. S. C. R. c. a d. Gujtavi Adolpbi Regis Suecia; Conjwix Regia & autour: CONJUCE ET KATA SINE PARI(I). (I) Cette lettre en Suedois du Roi Cbzrles-Guftave eft du 2. Sept. 1654. () A ceci revient ce que le Sr. Ditbmar (2) dit a ce fujet fur le rapport d'une per- Conjeftures fonne qui lui avoit afford de le tenir de la propre bouche de la Reine a Rome. ' 6 " le Baron $ Obetfenski , Grand-Maitre de feu la Reine ; de Pruffe. La Reine tant (i) V. Ertnneri'i Thcf. Num. png. 146 & T c i f " (i) Comment ds Reb. fuis pag. xo it. Gruberi Conunerc. Epift. Leibnltii T. 1. p. jss- C H R I S T I N E R E I N E DE SUEDE. 435 Chriftine pafTa encore quelques mois en Fkndres, en attendant que TafFai- re L'aii 1655- Chri/linefe difpofe d'al- \Qia.Rome t egregia prudentia , ingenii dexteritate f magnanimitate celebritatem nominis adeptur. dontl .e Pa pe || Q# CMWI revocarem ad animum, refque ab ipjo prceclare geflas recordor, mirabar in bac- ^ rao Excellentia tantam inejfe modeftiam p facilitatem morum , gwa par 0Jr vldcbatur infi- ; c . wiw, comitatemque, qua nos exteros exciperejolebat' 1 Mr. de Boinebourg e"crivit en i<56pa Mr. Cowing: Mibi gratulor in omni vita mea, quod antebac fc? Axelium O- xenftiernam, feniorem, Suedix Cancellarium , Magnum utique in re civili Heroa, non modo viderim , fed in Suedia cum illo ultra ipfum annum egerim " (i). " Mr. KSbler rapporte deux Me"dailles de ce Grand-Chancelier (z\ L'une eft un Ecu Mc fort rare , ou Ton voit un Lion rampant & couronne" , tenant a la patte droite une 1'hcTnneur du ^p^e nue & a la gauche une Couronne Roiale. Au deffbus eft le nom de Dieu entoure" de rai'ons & pour legende. ROBORE DIVINO CORONATUS VINCIT LEO: autour lie 1'autre Me"daille on lit ces paroles , AXELIUS OXENSTIERNA RERUM SUECO GERMANIC ARUM ATLAS, & au revers on voit la Liberte fous la figure d'une fem- me, couverte d'un chapeau, aiant pour foutien a fes cdte"s la Prudence & la Valeur. On y voit encore Guftave-Adolpbe fortant des nues, avec cette infcription: Sic OE- CUIT MEA FATA SEQUi. c. ad, C'eft ainfi qu'il convenoit de fuivre mes deftin^es. Pour legende: PRUDENTIA ET FORTITUDINE POST GUSTAVUM MAGNUM LIBERTATIS VINDEX. c.ad. Le d^fenfeur de la liberte", apres le Grand-Guftave > par fa prudence & par fon courage. Les empreintes de ces Medailles fe trouvent auffi dans la Bibliotheque de Mr. de Stiernman (3) & il y produit des preuves, que les dices Medailles ont ete frappe"es a 1'honneur d'OxenJiierna apres la conclufion du Traite de Confederation 4 Heilbron, ou les Etats Evangeliques d'AUemagne lui en confererent la direction & lui ofFrirent meme 1'Eledlorat de Maience, ce dont nous avnns parie ci des- fus. Le Chancellier de P-ologne , le Prince Lubomirski, lui fit une magnifique Epitaphe (4) dont voici une partie : Unum eculum trcsfummos vidit Politico* Quorum duo interdum , ultimus wix femel peccavit. Gallia fuum (*), Po Ionia fuum (f), 5uecia fuum jaftabant &c. Tandem foris domique pate belloque rebus egregie parti f , Qui quondam Militia Re&or $ in caflris Miles fuit Oxenftiernius Q). Nunc Tbeologus in Aula, Pater in Regno , Rex , fed fine titulo : (Ouia major erat omnibus titulis} Lt ejje talis quam widen maluit. Verio : Tetius Septentrionalis inconcujjus Atlas Merito vocabatur. Fitam autem ipfi Sebrietas fanam , integritas vivo longam., Pietas mortuo cetertiam dedit. Abi Viator Et nune per Orbem fimilem quaere Cancellarium. phed-e cet 11- luftre Chan- celier. (*) LcCard. dc Richelieu. ( t ) Le Sr. OJJoltnsk.i. (|) Oxen- ftierna com- mandoit nuf- a 1'aunee. (i) On fwutvair ce qu'ont dit d'autres Etiarr- gcrs de ce grand Homme dans les Mem. de Cha- nut T. Ill- {>ag. 472. Lomenii Coinitis Brienrnt, Itinei. p. 28. Wicquef. AmbafT L. II. S- II p. 20. 8cc. Parival. Hift. de Fer. T. II. p. 250. Meicrn preface des aftesExe'cut. Norimb. T. II. p. 34. Manes Grotii pag. 344. &c. Allgetn. Cbronik. Tom, XI. p. 6*8. 8tc. Bteskri hill. Belli Sueco-Dan. Dans p. 3SI. *fc. (i) Dans fes Miintz-JBel. T. III. p. 137- & 423- item Meiern Ada Pac. Weflphal. T. III. preface pag. 6. &c. (3) V. Sa Biblioth. Sueogoth. T. II. p. 35 & 36. it. Kohltr \. c. p. 145. (4J V. Stiernman 1. c. p. 31. 32 &34- item Epifcop. S* Cleii SHC.- Cenf. de inft. Io. Uur&i pag. z nsr. L'an 1-655 486 MEMOIRES CONCERNANT da fon voi'age d'ltaKe & de Ton fejour a Rome s'ajuftat. Le Pape Inno- cent X. etoit more alors & le Cardinal Cbigi avoir, ete eiu a fa place le 7 A- vril 1655. fous le nom d'JIexandre VII. A'iant apris la refolution de Chrifti- ne , il temoigna par fes paroles la grande joi'e qu'il en avoic (a). Nous donnerons la lettre meme de ce Pape dans TAppendice. I] (a) Gal. Gualdo /. c. p. 59-<5r. re Grand hon ueurquelut font ks let- tres c]ue lui ecrivit un cc- Jebce Patriat che de Cou- ftantinople. V.l'Appen- diceN.LXI V. PAppend N. LXII. 8c LXUI. Dans 1'Epitaphe que lui drefla Mr. Lagerfelt, Vice-Pre"fident au College des mines (i). il eft appelie : Dei Organum , Amor Regum , Anima fcf Oraculum Patrice , Delicice Suecorum , terror Hoftium On feroit en tat de produire nombre de Monumens inte'refians au fujet de ce Grand- Chancelier. Mais on choifira feulement deux lettres que lui 6cnvilCyrilleLucar .ceMebre Patriarche de Conftantinople. Celles-la aufli bien qu'une troifieme du mSine Patriarche au Roi Guftave-Adoipbe , moment d'autant plus d'etre connues, qu'elles renferment des faits '. memo-rabies qui ferviront de refutation des reproches frivoles que des Ecrivains Ca- tholiques ont faits aux Protelians, touchant ce Patriarche (2), & convaincront meme les incrddules que ce vthie"rable Homme e"toit ve"ritablement rempli & pe"ne"tr de fenti- mens de la vraie Religion Chre"tienne, dont il fut la viftime. Ces lettres de Cyrille au- ' ront place dans 1'appendice (3). Nous ajouterons ici quelques autres partkularite's au 'fujet des affaires d 1 Or lent en ce terns-la, tiroes des Palmskdldiana. II y a une lettre de Roftock du XII. De"c. 1631. apparemment a Mr. Salvius accompa- gne'e d'une autre, e"crite au Roi Guftave-Adolpbe par un Grec nomm Romanus Nicepbori aupnravant Pafteur a Corintbe & envoie* par le Patriarche de Conftantinople & le Clerge" Grec pour avifer aux moiens de fe fouftraire au joug des Turcs. Apres de vaines efp^rances que la France & d'autres Puiflances lui avoient donne"es , il s'adrefla au Roi de Suede , & c'eft a cette occafion que Salvius en envo'iant ces lettres au Secretaire Grubbe lui e"crit le \\ Janvier 1632. Dieu foit lou qui fait profp^rer Sa Majefte au point que la Grece meme commence a 1'adorer ". Le Sr. Cornells Hagen e"crivit en ce tems au Cbancelier Oxenftierna d. 22. Sept. 1633. Officii mei ejj'e putavi F'eftram Excellm. certiorem reddere de optima bujus excelfa Ports erga Regnum Suecias ? Con- " foederatos Germanics Principes ac Status adfeftu Potentifflmits Orientis Imperator '' perilluftrem Suecise Legatum Dm. Strasburgiiim , per fpettabilem Osmanem Cbiaugium, publicis expenfis, fruftra frementibus adverfariis , uf que ad fines dominii Veneti conduct curavit, quo bonore maximis Ccefarum Legatis majir exbiberi nonfolet." Mr. Megius ou Miege Auteur du Recueil cite" ci-dcfjus dit dans la preface : Ad Pnnli Stnsburgi iter Byzantinum multa ex Scbedis ejus aadi petuiffent, non licuit tamen Nobis 1, prolixioribus effe. Unum bic addere & notare liceat. Refert in illis , Patriarcbam ,, Hierojolymitanum, eundem qui Magnum Mofcovias Pucem cornnatum ? Patriarcbam illius Imperil ere avit, Virum pium , ernditum f fenio, ftatura atque autoritcite gravem ipjum invifijje , & cum Suecorum atque earnm rerum , quiz pro Rsligione vera pneftitis- fent , mentionem fecijfet^ proiixe differuif/e, quod Dei Ecclefue a feptentrionalibus popu- lis liberatio promijfa Jit , in quern finem primum caput Jcremia; allega>jit,ubi Deus inquit ab aquilone Regr.orum Cognationes convocabo , & zsnient f ponent quisque folium Juum in porta Jerufalem & fuper muros ejus ? fuper omnes nrbes Judere. " Dans la meme ColleStion de Miege fe trouve (4). PauR Strasburgi Suecits Regis quondam Confiliarii Secretions Aulici fef ad Amurathem IVtmn. Legati Relatio de Byzantino itinere ac ne- P'otiis in aula Ottomannica pera&is , nee non dejlatu a facie Qrientalis imperil, qualis ", 'ent circa annum MDCXXXill. Cette relation, qui eft fort curieufc Je f,nit ainji: Mul- tut (1) V. Stiirnmanr. i Biblioth. Sueo-Goth. p. 727. _ MonumentaPictatis fclirerar. put Miege, Part. II. (2) V. 1'abrege de ces reproches dans Camnfni p. :^s-:44& la troifie'mt a e 7 te tirc'efepareinentde Gymnas. Patavm. T. II. p. 317. &c. Voi'ez au Jaliibliotheque d'Oxexftierna ,copiee par rEve<]e conrraire les Col'.eclanea que Thorn. Smith, a p- Kerrm.in. bliss de cc; I'atriarchc. (4) Mon. Pict. & lit. P. II. p. is;, cfr. Tbcatr. (?) Diux de ces iettres font imprimees dans les Lurop. ad nn. i6)+-p- 300. CHRISTINE HEINE DE SUEDE. 487 II fe felicitade Ton Pontificat, qui ameneroit au fein de I'Eglife Romaine L ' an une Reine par des motifs fi dignes d'admiration & fans example : mais on I655> jugea a propos, que Sa Majelte, avant que d'entrer en Italic , an moins v. avant que de mettre le pie dans 1'Etat Ecclefiaftique , fit profeffion publi- N que de la foi Catholique , afin qu'elle y put etre rejue avec toutes les de- . monftrations d'honneur que le Pape lui deftinoit (*}, pour faire accroire au monde, que cette converfion etok fon ouvrage. On convint de tout cela fans difficuke (a) &la Reine aianc tout feit pre'- parer pour fon voi'age & regie fes affaires domefliques en Suede (f) , fait prefent a 1'Archiduc Leopold d'un Cheval Suedois fuperbement harnache dir prix de trente mille ecus : au Comte de Fuenfaldagne d'un autre Cheval auffi tres bien equipe, valant dix mille ecus , & aux autres Officiers a propor- Sruxellet 3c rirconftanc; s- (a) Gal. Gualdo /. c. p. 62. &c. Merc. p. 79. Aitzema /. c. p. 1217. Sprengeri Ro> fiderabfcsd<- Holl. l.c.p.97.&c. Thuld./#/?.-Eur.L./r. ma N.p. i/o.Burm. Syll.Ep. r. ///. p. 683. fonvoiage. M tus illo die (nempe 24. Junii cum Sultano valediceret Strasburgius) fermo Conftantino* poll fuit de extraordinario apparatu & qflentatione Aula Ottomannicce , deque infolito boncris ^f benevolentia declarandce modo ac genere , Sacrce Reg. Majeftatis malevolis ac , f inimicis palani frcndentibus , caterorum Regum legatis amitlatione ac invidia accenjis', omnibus inujitata ret canjas fcrutantibus. (t*) > Voici ce qu'en dit le Cardinal de Retz qni debit alors i la Rome (i) Rien nefit Vani'tecVpc plus paroitre a mon fens le peu de folidite du Pape ^lexandre, que le faux honneur titcfle d'ef- qu'ii fe vouloit donner de la converfion de la Reine Cbr'iftine de Suede. II y avoit P rit () u fjp ,, plus de dix huit mois (iln'y avoit que neuf jtuns paces') qu'elle avoit ahjur^ fonh^r5fie, quand elle prit la penfe"e de venir a Rome. Auflhot que le Pape Alexandre 1'eutapris, . fl en donna part au facre" College en plein Confiftoire par un difcours tres-e'tudie'. II n'oublia rien pour nous faire entendre, qu'il avoit dte" 1'unique inftrument, dont Dieu s'(*toit fervi pour cette converfion. II n'f eut perfonne qui ne fut tres-bien in- forme 1 du contraire: & jugez, s'il vous plait, de 1'efFet qu'une vanite" aufli mal en- tendue y put produire. II ne vous fera pas difficile de concevoir, ajoute le Car- dinal de Retz , que cette maniere de fa faintete" ne me devoit pas donner une gxande idt^e de ce que je pouvois efp^rer de fa protefhion, & je reconnus de plus en peu de jours , que fa foiblefle pour de grandes chofes augmentoit a mefure de fon attachement aux petites. ".... Mr. de Joly remarque que Cbriftine en jugea de ineme. La Reine Chriftine, dit il (2) (qua in corpore foemineo animum virilem gerebai) fe moqua de la pompe & de la vanite" d'Alexaxdre Vll. qui fe ero'ioit le principal Auteur de fa converfion. Nous remarquerons en pallant ce que le Card, de Retz & le Sr. Jolydiknt au fujet des Conclaves en ge'ne'ral & de celui de r5Ieftion du Pnpe Alcxctndre VII. en particulier: ., que ceux qui n'ont pas vu le Conclave ne fe peuvent figurer les illtifiona , T des homines en ce qui regarde la Papaute": & on a raifon de 1'appeller Rabbia Papule, dit ce Cardinal qui afllfta lui meme a 1'eMeftion de ce Pape. (|) Elle dcrivit pour cela le 4. Janvier 1655. a Mr. le Baron Herman Flemming , Gou* verneur G^n^ral de fes Domaines en 5w^e(3), en lui enjoignant de tenir une fomme raifonnable prete a fa difpofition: faifant entendre, qu'elle vouloit fe rendre vers le inois de Mai de Britxelles aux eaux de Spci, pour lefquelles elle e*toit venue trop (ard I'ann^e pr^cddente, & lui difant qu'elle s'attendait a I'y trouver & qu'au refte elietire- roit compte de tome fon nrgenrerie , pour en faire battre des monnois. D'oa Ton pour- roit conclure , qu'elle s'e"toit auffi referve ce droit de fouverainete. (i) V. fes MemoiresT. III. p-4*7 &4U.&T. (i) Mem. T. II. pag. itfj. IV. P; si-item Mem. dc JolyT. II. pag, 120.14*. (j ) J'en ai I'original que j'.it reju de Mr. I conf. 1'Hili, des Papes T. V. p. 3*J. Dr. Kutfcniui Evcquc dc Wejtaifa* 4 88 M E M O I R E S C O N C E R N.A N T tion, de divers bijouteries de plus de dix mille piftdles d'Efpagnt. Apres cela, elie remercia 1'Archiduc & les Miniftres du Roi Catholique des hon- neurs qu'ils lui avoient faits & a fa fuite , durant fon fe'jour dans ce pai's-la. 11 feroit fuperflu de nous arreter a chaque endroit par ou elle pafTa. Nous ne marquerons que les circonftances les plus notables de fon vo'iage (a). Elle partit le 22 Septembre 1655 de Bruxelles. Entre les perfonnes qui compofoient fa Cour etoit Pjmentel , comrae AmbaiTadeur extraordinaire $Efpagnc; le Comte de Cueva avec fon Epoufe, & deux Dames d'honneur de ia Reine, les Comtes Buquoi , Trajfirio & plufieurs autres perfonnes de diftinftion , le P. Guemes Dominicain & deux Je'fuites , dont Tun e'toit le P. Manmrfchiedt. De Suedtis , il y avoit Silfwercrona , Lilliecrona , Appel- gren & Appelman. Enfin le nombre en tout faifoit deux cent perfonnes , y compris vingt-cinq ou trente gardes du corps : tous nourris au de'pens de la Reine , a 1'exception de 1'Ambafladeur d'Efpagne qui fit le voiage fe'pare- ment & a fes propres depens. L'Archiduc Leopold, avec un grand cortege de Dames & de Seigneurs, conduifit la Reine jufqu'a deux lieue's de Bruxelles. En paflant par Cologne, elle ne vit pas le Roi d'Anglerem, a ce que dit Altzcma, pour ne pas don- ner de la jaloufie a Cromwel. Gal: Gualdo & d'autres Auteurs difent nean- moins, que tant le Roi d'Angletetre que le Due de Gkcefler lui firent vifite a Franckfort le 5. d'Odtobre , outre les Princes Palatins , l'Elecl:eur de Ma'ionce & quantite d'autres perfonnes 3e grande di(lin6lion (*). Etant (a) Le Dttail s^entrouve dans Gualdo p. Holl. Sept. 1655. /. c. item Aitzema ^ Thuld. 62. &c. item Tiieatr. Eur. ad b. an. Merc. f Burman. /. c. ' (*) Le Savant Mr. de Boinebourg cut occafion de s'entretenir alors avec Chrifline. Ce que Mr. H t.' 11 ^crivit A fon ami Mr. Prujcbenck & lui dit: (i) Jis , qui Catbolicam ficlem amplexi deUoine- funt , max, (it ajunt, accedet , nonjui modo, fed tf noftrifexus Regina ChridinaSueda. en- n Etji enim ego ex nupera cum mon/tro illo beminum collocutione , Jatis longa in id non po- Chri- ^ t uer i m indicia nimis evidentia colligere , fpero tamen magis , quam illius prudentia diffi- " ^ am qua diu vanitatem Jeftarumjuarum afpernata tandem veritati cedet. Ceterum eg* mihi nondum vim iftam infer re pojfum , ut credam de Chriltina, quam mox Cbriftianaw. futuram quidem prccfidentes Catbolici autumant , quod pronis quidem auribus hauriunt f ultro augent nullo pane certitudinis pignore alio , quam quod novitatis avidi talia bono ad" , feftu dejiderant. Notum eft quantum laboris Henricus IV. Gallic Rex antebac exhauferit, ut Curia Romanes perfuaderet, convertifi ferio velle. Nunc Hifpanis vacillantibus pan~ ditur Regince aditus ad Pontificis gratiarH, licet baSenus vix levia apparuerint Jigna mu- tati in melius animi. Currus ex holtfcricis ccerulei coloris cum lemnijcis f clams argen- teis , f bijuges equi generojijfimi , turn leQica cum mulis , aliaque fellte geftatilis orna- menta pro Regina Roms apparantur. Quam primiwi ad urbem approquinquaverit , Car- dinalis meus Haffus e Farnefiorum cedibus degredietur , ut ipfa , quam vix duo regna ca- . pient t totam aulam fola impleat " Nous remarqucrons ici, en pafTant, que ce raeme Mr. Boinelourg avoit que je dois a la Suede, ni les fentimens d'amiti^ que fai eu pour vous, a qui je Jerai toil- jours d'Jnfpruck Ic 4 No- r vembre 1655. L, PI R I S 1 I N E. Le jour d'apres , elle ecrivit une lettre au Pape Alexandre VII. pleine d'expreflions de la plus parfahe obe'iirance, & que voici. Beatiilimo Padre. Tres-Saint Phe. arrivata Etan efin arriy ee au but que j'ai T?Sfendo jofinalmente arrivata tan ^ e P n arry ee au ut que a altanto da me defideratofeg- 'ant defire de me voir regue an fein ,. 7 / J ^ de Notre famte Mere . 1 Eshfe Ca- no di vedcrmi nceuuta nel grem- tho]ique . Romaine je n ' ai p f s voulll ^ man- (a) HolL Merc. /. c. p. 105. (fc) L. c. p. 90. 105. &c. (*) Mr. Cbevreau dit a cette occafion (i) Onrdgala Cbriftinc d'une Comddie 1'apres- rnidi du jour qu'elle avoit abjure* la Religion Lutherienne a Infpruck. Elle dit alors a des perfonnes du premier ordrc. Mejfieurs , il efl bien jujte que vous me donniez la Comedie , apres vous avoir donnc la farce : " Mr. Leibnitz en porte ce jugement : o C 2 ) " QUC ^ cette hiftoire eft veritable , la Heine Cbrifline n'a point gard le decorum." (i) Bernard Nouvell. liter. Juin 1700 p. 673. Pyrrhon. hift. p. 42. not. Itil; Cirmtm. T. X. f. zi. ea 172;, Sitrlint, (zj V. FtUawl t c. $, 14^ P. 2X1. Qqq 2 492 MEMOIRES CONCERNANT L'an J655- bo dclla no/Ira Santa Madre Ja Cbiefa Catbolica Romana , non ho voluto mancare di darne par- te a Foflra Santita , ringrazi- andola umilmente deWbonore , cbe mi bdfatto de^Juoi benigniffi- mi commandamenti , // quali /ono ojjeruati da me col rijpetto douu- to alia Santita voftra. Ho manifeflato al mondo , cbe j / 'per obedire a Fojlra Santita bo lafciato con fomma allegrezza quel Regno doue ilriuerirla pofto frd i peccati irremiffibili > fep ho meffb da parte ogni rijpetto huma- no, per far conofccre^ ctf iofti- mo ajjaipiu la gloria a* obedire a Foftra Santita , che quella del pin degno trono. Supplico Voftra San- tita di riceuermi coji Jpogliata^ come fono , cTogni grandezza con la paterna & ujata benignita , cbe iV degnata di moflrarmi Jin bora. Jo cbe non bo a/fro da fa- crificare a ifanti piedi di Voftra Santita-) cbe la mia perfona infte- me coljangue^e con la vita^ I 'of- fer -ijco tutta a Vojlra Santita con quella cieca ubedienza 5 cbe s* $ douuta, fupplicandola a voter difporre di me conforme giudicbe- rd piu convenirft al publico bene della no/Ira fanta Cbiefa 5 alia quale 3 5? alia Santita Foftra , co- me afuo unico , e vero capo, bo dedicato tut to quefto cbe mi refta di vita con ardentlffimo dejtderio d'impiegarla e jpenderla tutta al- ia maggior gloria di Dio. Da quefto auguro a Vojlra Santita quei manquer d'en faire part a Votre Saiiutte, en laremercianttres-hum- blement de m'avoir honnoree de ies favorables commandemens, quej'ai obftrves avec touc le refpeft du a Vocre Saintete. J'ai faic voira toutle monde, que pour obeir a V. S. j'avois abandon- ne avec la plus grande joie ce Roi'au- me , ou la veneration pour V. S. eft comptee parmi Ies peches irremidij- b!es, & j'ai mis a part tout refpedl humain , pour faire connoitre , que je prefere de beaucoup la gloire d'o- btiir a V. S. a celle du plus beau Trone. Je fupplie V. S. de me re- cevoir , depouillee , comme je fuis de toute grandeur , avec la meme afFeclion paternelle, qu'elle a daigne me montrer jufqu'ici. N'ai'ant rien de plus a facrifier aux faints pies de V. S que ma perfonne avec mon fang & ma vie , je la lui offre toute entiere , avec cette aveugle obeiflan- cequi lui eft due, & je la fupplie en meme terns de vouloir difpofer de moi, comme ellejugera le plus con- venable au bien public de notre fain- te Eglile , a laquelle , auffi bien qu'a V 7 . S. , comme a fon unique & veritable Chef, j'ai devo lie tout ce qui meref- te devie, defirant ardemment, qu'il foit tout emploie & voue a la plus grande gloire de Dieu. Au refte je fouhaite a V. S. une longue fuite d'annees& Ies plusheu- reufes, qui font fi neceflairesau bien & au repos commun dela Chretien- nete , priant Notre Seigneur , de con- ferver en la perfonne de V. S. ces grands talens qu'il lui a donnes , & que CHRISTINE REINE DE S 0EDE. 493 quei Iungbi<> e felicifjimi anni , que je puifle fitre fi heureufe, que Vffn ebefono tanto nece/arh al bene> d'atteindre au jour apres lequel je I655 y e ripolo commune del/a Cbrtjlia- iou P ire > ^ l \ "l e . fera P ern ? is ^e me ..x j i\~n~.> c*.~, mettre aux tres-famts pies de V. S. . /M , pregando Ao/lro ^Signore kf , f je bajfe hum g lemen u ' dtconfervarenellaSantttaVo/tra f upp j ianc de m'accorder fa fainte & queigrarfdoni) chelebadati, e paterneHe b^n^di6lion, $c.Inftwk difar me cofi fortunata , eft to It 5. Nov. 1655. po^tf arrivare al defiderato gior- no , net quale mi fia permejjo tfin- cbinar mi a i SantiJJimipiedi di Fo- de Votre Saintetd Jira Santita-) li qualilownilmente le bacio , pregandola di partici- par mi lajua Janta, e paterna be- i# p] us beifTante Fille nedittione fc. Inipruehli 5, Nov. 16$$. di Vojlra Santita Obedientiffima Figlia CHRJ STINE. CHRISTINA Voici encore deux autres de fes lettres fur le mme fujet a la Duchefle $ Havre & a Ja Comtefle de Erienne du 7. Novembre 1655. ma Coufme. Comme je fai que ma fathfattion contri- bue beaucoup a la Votre , fai voulu vous donner avis que fai /ait Profeffion publique de fa Religion Romaine. jTat cru que je tfavois rien a wander de plus agreablea unede mesmeilleure sarnies que ma converfton^ & que je ne poievois vous obliger davantagt qu'en vousfaifantfa voir , que fai Jo/emneUement renonce 1 a mes er- reurs pour embrajfer la verit. towtne jefuh perjuadee que prendrez part a won bonheur: vous dcvez croire que je me rai de vos profperittS) 8? Madame ma Couftne d'Infpruck le 7, Votre tres-affeftionnee Coif I6 55- fine 6P amie. je fai que la part que vous avez toujours prife a M qui me toucbc , vous a fait joubaiter il y a longtemsde memoir dans le cbemin clu /a tut. Vous ne pouviez pas faire unfouhait qui me fut plus avantageuX) ni qui me put mieux ttnoigner la grandeur de votre amitit. Comme faijalt projeflion publique en cette 3 494 MEMOIRES CONCERNANT de la Religion Catboliqiie , Apqflolique ^Romaine, je rfaipasvou- lu> differ er a vous le faire f avoir , etant fort pcrfuadee^ que vous en aurez une double jo'ie .> ? comme mon amie> & comme.bonne Ca- 'tbolique. Je vous feral fort obligee de lafatisfattion que vous te- moignerez de mon bonbeur^ & Jerai ravie lor f que je vous pourrai Conner des marques de marec'onnoijjance^ p que jefuis &c. Elle partit a quatre heures apres-midi dlnfpruck conduite par l'Archiduc& fjsp- fa Cour, & defrai'ee jufqu'aux limites de fes Etats. Sur 1'invitation reiteree que le Prince & Eveque de Trent e lui fit faire , elle fe rehdit a fa Refiden- ce, oil elle fut fomtueufement regalee. Enfuite fur fa route la Reine lui MM- cr j v i t ] a lettre de remerciemens ci-jointe. M \Qn Coufin, Je me fens ft obligee de vos civttithj 5? du bon que vous itfavezfait, que je rfaipasvoulu laijferre-. tourner les gens de Monfieur T Arcbiduc fans vous en faire encore- mes remerciemens , & fans vous affurer^ que je foubaiterois fort de trouver le moien de pouvoir vous temoigner ma reconnoiffance , ^ vous donner des marques de lafmcerite^ avec laquelle jefuis Mon Coufm 17 WWWJ?T . Fotre affettionnee Coufme ^ f* f* :-..., .-; ... - > . c\ >/'.' r Amie , r CHRISTINE .- -\, ., , - Cbr'ijl'me avoit intention de gaffer par le territoire de Vcmfe (a}\ m'ais la Republique ai'ant-fait quelque difficulte d'accorder jpaflage iibre a toute fa fuite , a caufe de la pefte ou de quelque maladie dontagieufe dont le pais, d'o'u elle venoit , etoit fufpeft ; 'elle ne traverfa qu'un bout de la domina- tion Wrtitietme, & s'arretant a-un village appelle Dolie 9 ou elle fut com-? plimentee par les Deputes du Doge & .du v -Sfenat de Venife, ) 11 eft imprime dans Gnaldi \. c. p. ijj, (2} Hift. du Siecle de Fer. T. II. p. ;?4 MEMOIRES CONCERNANT L * an ronne & un Sceptre enrichis de plufieurs pierres prdcieufes d'une grandeur I65S V & valeur aflez confiderable, & qu'elle n'avoit pourtant pas voulu voir , le jour d'apres , 1'endroit ou on les avoit places , difant que des bagatelles comme celles la ne meritoient pas d'etre vQe's (*). Elle partit de Lorette le u.de Decembre & qontinua fa route par Recana- ti , Macerata , Tolentino , Cammno , Foligno , Affifi , Spoleto , Terni , Of ri- coli, Gallifcy Caprarola, ou le Due de Terranoua , Ambafladeur du Roi d'/*- pagne, lui vint taire la reverence. Outre les receptions magnifiques qu'on Eiie eft com- j u j avo jt f a ites dans prefque toutes les villes & tons les endroits mention- phmentee . .. . , r \ .. ^ * , /-. o r- > par des Da- nes , il y eut ccci de particuher qu a Macerata , Camenno & rwgno , une des Dames des plus difbinguees de chaque endroit lui porta la parole , au nom de toutes les autres , la felicitant fur fon heureufe arrivee & qu'une entr'autres lui fit un difcours fort eloquent (a). Voici une infcription que v. r Append. j es habitans de Terni lui dreflerent. JX. LAI V. CHRISTINA Suecorum, Gothomm, Fandahmm, REGIN/E Zelo Fidei Catholics Romam petenti Univerfum Orbem moderante Alexandra 7IL P. O. M. Urbem ham gubernantc Horatio Maria Eonfilio 9 P. S. R. Deux Legats a Latere du Pape fe trouve'rent le 19. Decembre a Olgiata a (a) On le lit dans Gualdo /. c. p. 199-201. Infcript. Jingular. p. 73. . Oidoini vita Pontif. p. 710. &P Nemeitz dans Rome ic 'nn diftique fur le don de Sa Couronne a I-iSte Vierge. (*) Le Mercure Htll. & Mr. Wagenfeil marquent (i) ,, que cette Couronne & ce ,, Sceptre ^toient enrichis de 368. Diamans & de 160, perles fines, fur 1'une defquelles s , dit-on, 1'image de la Vierge fe trouvoit figured naturellement. " Mr. Heidegger (2) parlanc ties VCEUS que Cbriftine avoit faits a la fainte Vierge, dit au fujet de la Cou- ronne preTente par la Reine: Die 8. Decembris 1655 Lauretum venit ? cum Rcgi- na ilia mimerafua in thejaurum illata B. Firginis Jequenti carmine Hanc Tibi facravit SP RETAM Regina COUONAM In Coelo tribuas ut meliore frui: ,, Infcripta vidiffet\ infulfum Poetam falfe rifit f . delli 21. Decemb. 1655. (i)". Cependant Angela Corraro Ambafladeur de Venij'e i Rome, desaprouve entierement toutes ces profufions du Pape & de fa Cour , comme n'aboutiiTant a rien moins qu'a I'avantage qu'on cro'ioit tirer de la converfion de la Reine Chrifline (2). (*) Portam bane, dit Bonnani (3), Flaminiam dicunt d via" Flaminia, feu Poputi, ab cede , quam Populus Romanus beatz Virgini condiditpojitiuain Pafcalis II. locum re- purgavit , quern funeflare credebantur cineres Neronis. (|) La Medaille que le Pape fit frapper d cette occafion, y rdpond tout a fait. Sur la face fe voit le bufte du Pape avec cette infcription autour, ALEX. VII. PONT. MAX. A IL MDCLVI. G M. & fur le reversedrepreTente" la Porte DEL POP OLO avec tons fes embelliiTemens , par laquelle la Reine entre en Rome a cheval , entouree & (i) Communiquce par le meme Mr. de Bloat. (3) L, C. paj. 4. (z) Daus fa Relation 1. c. pag. p. 'CHRISTINE REINE DE SUEDE. 499 mes de Cbriftine & du Pape (*). Plufieurs compagnies de Soldats dtoient L ' an ' fous les armes , & , fans compter les decharges de la moufqueterie on tira 55> J plus de deux cens coups de Canon. La Reine habillee en Amazom , avec des plumes au chapeau & montant un Cheval blanc a la maniere des hom- mes & en cavalier (f) , pafla au milieu des troupes rangees en hai'e&mon- ta 1'efcalier de 1'Eglife de St. Pierre, dontle dedans etoit tendu des plus bel- les tapifleries & orne de plufieurs emblemes faifant allufion au Norn , aux aftions & aux armes de la Reine (a). Le haut Clerge la rejut a la porte & la conduiiic devant le grand Autel & de-la a la Chapelle du Pape , a qui elle rendit les honneurs accoutumes , & fit connoitre la joie qu'elle avoic d'etre paflee a la croi'ance Catholique & de fe voir honnoree de la bien- veillance du S. Pere. II repondit , que fa converfion etoit d'un fi grand prix , que dans le Ciel il fe celebroit la-deflus de plus grandes fetes , qu'el- le n'en voioit fur la terre. Apres quelques autres ceremonies Chrijline fut reconduite devant le Pape , des mains de qui elle re9ut la Confirmation , & joignit a fon nom de Cbriftine celui SAleffandra : apres quoi elle communia avant les Cardinaux Diacres (j)- Le (a) Gualdo /. c. p. 154- 157' &c- Theatr. Eur: /. c. & fuivie d'une grande cavalcade. Au-deflus fe lifent ;ces mots abr^s: FEL. FAVS. Q. INGRES, que nous venons d'expliquer (i). (*) Sub montibus, dit Bonnani, I. c. pendet contextus ex quercinis fr ondibttr & fru* mentifpicis, quibus f flemmata exprimuntur Pontificis f Chriftinae Suecorum Regina." lllam cum Regina Saba contulit Joannes Baptifta Palatius bis verbis. Regina Saba , quit ad audiendamfapientiam S^lomonis, Chriflina eft , Regina Suecorum ad Alexandrum VII. fe contulit , ut fidem audiret Catholicam. II y avoit d^ja quelques ann^es que le favant V. Bocbart a\ r oit compart Cbriftine a la Reine de Saba, dans fa belle Epigramme. P a g- ({) Les Dames Itaiiennes" dit G. Lilliecrona, dans la Relation qu'il envoi'a au Roi Charles - Guftave fur Tentr^e de Cbriftine a Rome e'toienc furprifes de voir la Reine aflife a cheval comme un Cavalier, portant des Culottes chamare'es: inais a'j'ant apris qu'elle avoit le cosur d'un H^ros & qu'elle avoit fait la guerre au Roi de Dannemarck, elles revinrent de leur furprife (2). (|) On en peut lire encore d'autres Circonftances dans lEfemeride Vatic : par 1'Abb^ Piazza pag. 747. II y dit entr'autres que par un flrivilege fp^cial & par un Bref Apoftolique on y auroit fait voir a Cbriftine en meme tms le 5t. Suqire. CO V. 5nwjNum. Pontif. Tom. II. pag. 647. ?. ci-deflus pag. 6i 8cj;<. not, cfic. S^ren^tri Rt* fc Brenntri Thes : Sneo-Goth. pag 191. ma. Neva pag. 171^ (z) Dansle Mfc. du Comte de Bitlkt pag- 204. Rrr 2 MEMOIRES CONCERNANT Le lendemain le Pape la retint a diner. II y avoit deux tables a la dif- l65 *' tance d'un pie Tune de 1'autre (*). Celle ou fe pla^a le Pontife etoitde qua- tre doigtsplus elevee que 1'autre. II s'aflh an milieu fur tin Siege de velours rouge plus eleve de trois pouces. La Reine fe mitfurun Siege Roial fait ex- pres pour elle, aucote droit fous un Baldaquin. Don Antonio della Cueva don- na a Sa Majefte la ferviette , le Marquis Bentiwglio lui prefenta la couppe & le Comte Francois Maria Santinelli les autres fervices. Le feftin , dit Gual- do (a) , fut proportione a la grandeur d'un grand Prince & d'une grande Princefle. Le P. Je'fuite Oliva fit un fermon durant le repas , & Chrlfline ai'ant fait une remarque fur un Paflage de S. Paid , quOHva avoit allegue , la propofa au Pape, qui fut fort edifie de la promtitude, de la vivacite de Fefprit & de 1'erudition de cette Princefle. Apres diner on donna a Sa Majefte le divertiflement d'une piece Dramatique recitee en mufique : & la Reine s'etant entretenue Je jour fuivant afTez longtems , avec le Pape , t va pafla vers le foir , du Vatican dans le Palais Farmfe , qui avoit e'te prepare P our & denture, & ou le Due Ranuce de Farm avoit fait mettre cette in- fcription au-delfus de la faadet CHRISTINA SUECORUM }) Ob depofitwn pro religions Regni fajligium Regiafortuna majori glories Monumentum hoc erigit )f Ragnucius Farnefkts Parma & Placcntice Dux. Elle fut fort contente de la belle ordonnance de ces appartemens, eonr- me aufli des magnifiques equipages , dont le Pape & les Princes Remains * voirlui avoient fait prefent (t). Bientot apres elle commenoaa recevoir les vi- IcsEglifesSc fit les plus celc- bres Com- munaiucs, (a) L, c. pag. 252. 263. 270. 275. 279. ?. (*) Selon le C^r^monial de la Gout de Rome , aucune perfonne du fexe ne dine a une mme table avec le Pape, ni n'eft admtfe a lui baifer la joue, raais feulement la main& Ja mule. Le J^fuite Gamier dit la-deffus (i) adverfendum quod nunquam in convivio Pontificis admittuntur Mulieres, etiamji Imperatrix, Regina vel Pontificis Consanguine & ejjet. item: Si aliq-ua Regina venerit Romam, bonoraretur , ^f in ejus adventu omniafer' ,, varentur qua difta funt de Rege in omnibus f per omnia: fed non recipietur a-Pontifice ad ofculum oris, fed ad pedis & manus. Prefent du (t) L'Auteur du Tbeatr. Europ. ajoute (2) : que le Pape lui avoit aulfi envo'i ua ae i billec de Banque de Norrante mille Couronnes d'Efpagne, que Chrifline lui renvo'ia . avec bien des remerciemens. Dans le Cabinet de raret^s a Gotba en Saxe fe trouvent entr'autres chofes precieufes , quelques pieces enchaffees en deux quadres , dont 1 334^< 5-48. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 501 Cites des Cardinaux , & a aller voir les Eglifes & les plus ce*lebres Commu- L comment 5 o2 M E M O I R E S CONCERN A N T Sciences reprit tellement Chriftine 9 (a) qu'elle invita les plus favans de toutes ]es Academies de Rome a s'alfembler , une fois par femaine , chez elle. Us obei'rent auffitot & les premiers Membres de cette Compagnie furent Don Pompeo Colonna , Principe de Gallicano , le Prince de St. GregoHo , le Mar- quis Scipione Santa Croce , le Marquis Federico Mir oil , le Comte Louis Senti* nelli y le Comte Ulric Fiumi , le Comte Francefco Maria Sentinelli , le Seig- neur Carlo Roppacioli, le Seigneur Ottavio Fakorimi , le Marquis Francefco Ric- ci, 1'Abbe Francefco Cefis, le Seigneur Giovanni Lotti, le Seigneur Sebaftian Baldini, le Seigneur Gio. Franc. Melojio, le Seigneur Antonio Abbati , le Seig- neur Camillo Rubiera, le Seigneur Tiber h Cevoli, 1'Abbe Vincenzo Maculani 9 le Chevalier Marc Antonio Meniconi, Don Cefare Colonna & le Seigneur Gfo. Francefco CinibaldL La premiere feance de 1* Academic fe tint le 24. Janvier 1656. ou, auf- fi bien que dans les fuivantes , on traita des fujets de Morale & on lut quel- ques pieces de poe'fie, elles fe terminoient ordinairement par des concerts, ce qui dura jufqu'a la fin du Carnaval. A ces diverthTemens fucce'derent lesacles de devotion en ufage, pendant " le Car erne, dans ce pai's-la. Us etoient meles de pieces de muflque & de reprefentations dramatiques faifant la plupart alluflon aufacrifice, qu'avoic fait la Reine du Roi'aume de Su&de , outre plufieurs autres recreations & pafletems , que les Cardinaux & d'autres Seigneurs de diftinftion donne- rent durant le Carnaval, a Tenvi Tun de Tautre, a cette Princefle. Voila en peu de mots de quelle maniere Cbrlftine pafla les premiers mois a P r ^ s ^ on arr i v ^ e ^ Rome* Depuis qu'elle avoit quitte Bruxelles , tout lemon- de etoit en fufpens ou elle vouloit aller , car il y avoit pen de perfonnes qui fuffent bien informees de fes defleins. Mais fa profeflion publique de la Religion Catholique-Romaine, a Infpruck, & foil voi'age du cotede Rome > ai'ant eclate par tout, il n'etoit plus difficile d'en conclure, a quoi toutce- la aboutiroit. Autant que les Catholiques exalterent cette refolution de la Reine, (*)autant lesProteftans &furtout leurs Miniilres & les Savans aigui- fe- (a) Gualdo /. c. p. 290. 316. 318. &f*- (*) Voici quelques poemes de Catholiques-Romains fur cette converfion de Cbriftiue. ,.'- SONNET- Pour la Reine de Suede : Admirez arrogans, qui dans la Politique ,, Pretendez pe"ne"trer tous les fecrets des Dieux, Que panni tant de Rois Cbriftine foit 1'unique, Qui laifTe pour la foi le Trdne glorieux. Et comme le foleil , cet afire magnifique , Commen^a de rouler des qu'il fut luinineux, De regler les faifons marchant par PEcliptique, , D'illuminer les airs & parcourir les deux; Lorf- 503 fe'rent leur langue centre elle. Dans Tune & dans 1'autre Religion il s'en trou- va Lorfque le feu divin renferme* dans fon ame, Malgr les froids du Nord, lui fait fentir fa flamme. Ce foleil des Efprits , fait pour les e"clairer, Epandit fes raions , commen^a fa carrie>e, Remplit les coeurs d'ardeur , les efprits de lumie're, Vifita 1'Univers, & s'y fit adorer (i). In CHRISTINAM Sereniffimam Suecorum Reginam poflquam depofito fponte imperio Catholicae fidei dogmata profefla eft, EPIGRAM MA (2). Multa quidem de te cecinit mibijcepe vocata Aonii Princeps Calliopcea Cbori : Plura lumen diftis quin & majora fuperfunt Mollibus id Cytbara non referenda modis. Depofita! fafces ob Religionis amsrern, QJJ niji divino percitus igne canat ? Scilicet id tantis deerat virtutibus unum , ,, Subdere Romano regia colla Patri: Difcite quos Regni Jitis infatiabilis urget Effe aliquid Jceptris majus f imperio. GABR. MADELENETI. Sereniflnnse Suecorum, Gothorum, & Vtndalorum Reginae CHRISTINA relifto ob pietatern Regao , Romam adeunti : Roma triumpbales feftivior inftrue pampas, Et novus antiquo certet in urbe decor Non bic Regnorum Domitrix Bellona triumpbtt ,, Orbis ab excidio nulla tropbcea petit. Arte nova Pietas vincit, quiafcepira recufat, Regnaque non pugnans , Jed fugitiva domat. Jnclyta Majonnn , Virgo , dum fceptra relinquis , Sceptra ttti viEtrix nobiliora capis. Subdere regnafibi magnum eft, Jua linquere majus: Vincere CHRISTINAM, non niji fola potes. Ergo turn germinas Vi&rix ? vifta triumpbum, ,, Prcedaque Vittricis duceris ipf tui : Tute tibi palma es ViQrix f Vi&a tropbceum, Etfpolium regno majus es ipfa tuo. 5> Quanta eft Fincentis , fi tanta eft gloria FiEtce ? At jimul $ Vinci f Sincere quanta fuit. JOANNES BAPTISSA GIATTINUS e Soc: Jela Legitur quoque PoJJlni Carmen ad Urbem Romam quando in earn triumphali Pompa m- fi) Mr. de Moncenjt dans fcs Voiages P. IV. (a) Daa* - 504 MEMOIRES CONCERNANT L'an va pen du fentiment de Wagcnfell & de GUI Pat in que nous avons cites ci- deffus 0). Jl arriva a Chrljlim , dit Ma m e du Noyer (b) a cette occafion, ce qui ar " ve ordinuirement a ceux que la fortune abandonne, car fans e'xatni- ,, ner que c'etoit elle qui avoit abandonne la fortune, on e'toit paflefurfon chapitre de 1'admiration au blame & du blame au me'pris, fans autrerai- fon que celle qui engage les peuples a facrifier a leurs interets & a n'of- ,, frir leurs encens qu'a des Divinices utiles. Chriftine laifla fon me'rite fur le Trone, qu'elle voulut bien ce'der de fon mouvement a fon Coufm, & I'a&ion la plus grande& la plus he'roique, qui fe foitjamais faite, fut empoifonnee par ceux, qui la voi'antdepouillee de fesEtats, ne crurent ,, plus etre obliges d'avoir aucun management pour elle, parce qu'ils n'en attendoient plus de graces, & comptantpour riencelles qu'ils en avoient ,, deja regues, ils ne firent pas de fcrupule d'etre ingrats , & en verite les ,, Proteftans gene'ralement ne pouvoient pas concilier les contraditions qu'il paroiilbit y avoir dans ce fait. Qu'une Reine, fille du Grand Guftave-Adotyhe, lequel avoit facrifie fa vie pour la Religion Proteftan- te, allat fe jetter aux pie's du Pape & chercher une afile in Rome, au lieu, qu'avec toutes les qualites d'une grande Reine, qui avoit gouver- ne fi glorieufement fon Roi'aume, elle en avoit pu jouir paifiblement, fa vie durant aupres de fes Sujets, qui la cheriflbient jufqu'a 1'adora- >i tion (*). D'autres (a) r. Wagens. /. c. P. II. p. 821. eft. (&) Lettres Gal. ? hift. n. LIX. $ag, Piazza Efemeride Faticana p. 748 ? 749. 198. invecta eft Cbriftina (i). Aliud de cadem materia legitur Carmen inter poemata Apollonii Florentis (2). 11 y a encore deux Odes de di Pers fur le meme fujet (3) cornme auffi un Poeme du famcux Vondel , ce Virgile des Hollandois , fous le titre de Blyde Inkomjle van Koninginne Chriftina Maria Alexandra te Rome. Jugementde (*) Tel eft le jugement que prefque les Proteftans en porterent (4): Fuit bcec jfLi.Jtger abjuratio Religionis verce & Evange licce , dit le Sr. Jaeger, f amplexus Jttperftitionis & fur cette if falfe dottrince Pontifica: indigna imprimis Regina Suecorum Guflavi Adolphi fill a , qui tonveaion. ^ gloriofe fangtiinem fuum pro puritate Evangelica fudit , propudiofa, turn pro triumpho qua- Ji a Jatellitibus Romanis per Belgium &p Germaniam fuperiorem du&a , tandem indigni alicujus Bibliotbecarii Romani pedibusjefubjecit. Sed iftud deliquium infcemina , quorum vix ulla diu pondus babet , tolerari potuiffet , nifi cum fummo fcandalo, quod Chriftiano orbi puriori dedit, aternam Jimul jafturam fecijjet . . . . niji mature & per mills lacbrymas refipifcat Equidemjd certum eft , quod nulla Religio plus ad indolem foeminarum Jit faha quam Religio Pontificia. Sed quod Chriftina, qnce fupra virosfaperet 5* fpiritum beroicum prce fe ferrc vifa eft, fuperftitioni per Je ftolida ac vans fejubjece- n't, cum difpendio animx , id plane abominandum eft . . . . Verum admodum difficile vel imliojpbile etiamfuit tot intricatos Religions Pontificia; articulos fuperftitionis , fapientis* fine fi) Nicephor. Czfaris Bryenni Comment, de Persy. 4Z&84- Reb. Byzant. opera P. PnJJini (4) Jtgeri Hift. Libr. V. cap. XL pag:- ioz- (2) Edita junftim cum aliis fex illuftr. Viror. 104. clir. Thulderii hilt. Eur. L. IV. p. 79. &c. Pocmat. a Balthaf. Mortto. & Traftatus de ejus apoftaliaa fide ficprofeflio &~ (i) Fatmt les Poefies del Cavalier Fr* Giro di del Cztholico. Roman* in 4. 1615. tTH&lSTINE RE-INE DE STTEDE. 50$ 'D'autres remarquoient en -cette a&ion tin example bien contraire a celui L ' aft - 3e Henri W ' , Roi de France, qui avoit embrafle Je Catholicifme pour pou- voir jouir en repos de fon Roiaume: an lieu que cette Princeflefedepouil- Joit de trois Couronnes pour une MelTe , & pour aller vivre a Rome pref- que a la difcretion du Pape, au cas que les revenus qu'elle s'etoit referves, vinfTent a lui manquer (*). Les Franfois, en guerre ouverte alors avec les Efpagnols , fe fachoient, Direrj feft de.ce que ceux-ci leur avcient joue le tour d'avoir alie'ne 1'efprit & les in* time* clinations de Chriftine , lefquelles autrefois etoient tout-a-fait franfotfes , & & d en attribuoient la caufe aux Je-fuites (f ). d*h a Pour les Suedois , qui la Reine appartenoit par la naiflknce , il leur e- toit d'autant plus fenfible qu'elle cut quitte la Religion de fes Peres , que ,1'afFaire leur paroifToit etre fans retour. La Regence trouvoit inutile de lui en faire des remontrances ulterieures , depuis que celles qu'elle lui a- voit fait infinuera^naW^j,n'avoient fait aucune impreftion fur fon efprit. Le Clerge'j furtout en temoigna fa douleur , & fon premier reflentiment L>Eva ^ tomrja fur le Precepteur de Chriftme y Jean Matthia , qui s'etoit de'ja ren-7 M*'~ ieurement celle des Catholi- g; olu ques Remains ". (*) 'Gregorio Leti fe trompe done quand il croit (2) qu'elle ne renonqa a la Couronne Errcur de que pour fe faire Catholique Romaine. Eflempio, dit-il, motto contrario a quello di Plen- Gngorio /.: 4 , rico'lV. il quel abbraccio il Catholicifmo per haver intuon ripofo un regno, dove cbe tutto la-deffus. ,, al contrario quejla Principeffa fe Jcarica dell'bonore di tre Corone per una mejja & per ., audare vivere a Roma con la difcrezione di qualcbe ajfiftenza di Papa, bencbe baveffc rifervata per la fua rendita qnelle be proveniva della Poiuerania &c". . . Mr. Conring Penfeesde ajoute (3) ,., Regince ChrifHnse cafum doleo-: non iniror tamen. Si illam non babuiffem Dominant, equidem illam Alexandro non inviderem. Gaudeofane in ejns bonsrem im- ,, pendi tbejauruta ex indulgenliis coUettum, & proindt ab ea quidem pecunia nibil Reipu- ,, blica pericuH immincre ", . . . (j) Void comment Guy Patin en e"cnvit en ce terns-la a Mr, Span (4.). ,, La Reine de Suede eft en chemin pour Rome, cum multis Hijpanis , quibusje commifit. N'yfera- t-elle pas quelque miracle? Si elle avoit bien de Fargent, les Jefuites la feroient pafTer pour une fainte..... & apres. La Reine de Suede eft entre'e dans Rome avec beaucoup de fimagre'es d Vltalienne & a la Principefque. El!e a (5t6 fort pompeufe- ment icgue par le Pape & par les Cardinn.ux On lui a fait une grande entre'e & grands feftins. Le Pape a donne" aux Peres Loiolijles vingt mille ^cus pour faire aprd- ter des Comedies en diverfes langues , a repr^fenter dcvant la Reine, afin de la di- vertir. N'a-t-il pas raifon de s'adrefTer a eux? Ne font-ce pas de plaifans Come"- dieris cc Baladias fpirituels ? " O) Wagmfeil 1- c. pag. 321. Stc. fa) Oper. Cenring, T. VI. p. jrtg. (i) Theatro Belgico T. I- p. izi. (4) Dans fi lettres T. II. p. 64. 65 & j^r, Tome I. 3 o 506- MEMOIRESCONCERNANT L'an garder par le Clerge du Roi'aume , non feuleraent comme un fincretifte, m mais le fit auffi foup$onner d'avoir pfi par de tels principes , contribuer en " quelque chofe a 1'apoftafie de la Reine. Quoiqu'il en foic , les livres , ou etoient contenus fes confeils pour la reunion des Eglifes , fiirerit prohibes en 1662. par toute la Sutde , & lui-meme depofe de fon Eveche en 1664. par les Etats du Roiaume (*). En 1670 , peu avant que de mourir , il protefta hautement qu'il n'avoit donne nulle occafion a 1'apoftafie de Chri- ftine (a), & fi on en doit juger par la lettre qu'il ecrivit a la Reine , ficot que le bruit de fon changement de Religion fut repandu en Suede , il n'ap- prouva nullement ce delfein de Chriftine quoiqu'il y fafle aflez connoitre Ton eet'tJIque a defir de voir tous les Chretiens reunis. Void cette lettre traduite du la- fond! c C * n 9 ui m( ^ rite Une P laCG iCi (t) lent de Re-' ' Tres-Se'reniflime Reine, tres-gracieufe Dame. II y a un bruit repandu jufques a nous , comme fi cette Augufle Chri- Jiine , cette benigne Heroine , cette incomparable fille de Guft&ve It Grand , cette Reine refpectee comme Mere par Cbarles-Guftavc , avoit aban- (a) F. Preus. Zehenden... Tom. Ill art. ad Schefferutn p. 387. & 388. VL p. 367. fc. item Mollevi Hypomn. ?nchantdc (*) ,, Le Corps des EccMfiaftiques de Suede dit Cbanut , (i) fe trouva trouble* en ce et Eveque ?j tems-la (1647) pour quelques propofitions de 1'Eveque de Strengncis, autrefois PreS r i reu ' ccpteur de la Reine , qui fembloU favorifer les opinions des Calvinijles. On appre'hen- fe&eVciuc- do ' t c i ue ^ a ^ aveur de ^ a R CUIC ne lui donnat de la protection en ces nouveaute's, & tienn.es. ,, toutes ces difputes d'Ecole e*toient tres-confide"rables & tres-dangereufes vu la con- jonifUire des affaires. Car il faloit, ou que la Reine fouffrlt, que Ton cenfurat aveC aigreur fon Pre"cepteur , qu'elle aimoit & de qui elle tenoit fa Religion , ou qu'elle s'expofat la haine de tout fon Clerge* fort aniine' contre ces propofitions, & felon toutes les apparences f^cretement maintenu par des perfonnespuiflantes dans 1'Etat...." Mr. Bayle parle d'une lettre que cet Eveque avoit e"crite au Roi Cbarles-Guftave en 1656 (2), fur la reunion des Chretiens ,, oil il fe fart de deux raifons i. queJefus-Cbrift ,, ne nous recommande rien tant que la paix & la charite". 2. Que 1'Ecriture pre'dit pour ces derniers terns tine grandc concorde a 1'Eglife: Mr. Bayle rapporte en meme tetus le trait6 de Moebius de Torigine des oracles, ou celui-ci refute ces deux raifons ,, Surquoi Bayle dit : c'eft appareminent 1'endroit de fon livre qui fera le plus approuve". Car combien. de gens y a-t-il qui rcnvoient au pa'is des Vifionaires , ou a cclui des . . - Efpions du Pape, tous ces Pacificateurs du Chriftianifme".. . Nous avons rapport^ IK zo " P' u fi eurs autres particularitt^s au fujet de Jean Matthice. (f) Ce m^me Eveque lui Ecrivit encore une lettre pleine de tendrefle, I'anne'e d'a- pres fa ddpofition & lui dt^dia fon traite 1 intitul^ Formula 'Catbolica prifoa: ^f ortbodoxa d (Ts Fidei &c. ou la formule de 1'ancienne foi Catholique. 11 la prie de s'y tenir, comme a nag. 3^0'. ^ regie qu'il lui a inculque'e des fon enfance. Nous 1'avons inf^rd ci-deflus & nous inft^rerons dans 1'Appendice cclle-ci en latin que nous tenons de Mr. Jac Sertnius, n. LXVirT. Do ' icn du Ghapitre de A^koping. Ks TV IV (i) Dins fes M.?m. T. I. p. 97. item 'Er. Ben- 1688- art. VI. p. 8o. Scbtfftr en juge dc mease zelii Diflott. de DurAO p. 128. 139. 8c 176. v. v. fa Suec. lit. p. izj. item Lnt Ep. ftoc> aulil I'.i-i. dc Camenius ci-defl'us pag. 291 6c 293. iu, T. 1. p, tfl-j. cc< (*) V. les Neuv. de la R^p. des lettccs Juin CHRISTINE REINE DE SUEDE. 507 abandonne la Religion de fes ancetres , dans laquelle Elle a etc batifee, a laquelle Elle s'eft de nouveau lie'e par un ferment folemnel a fon cou- l65 ronnement & dans Ton afiurance donnee aux Etats du Ro'iaume , & que * le 24. d'O&obre pafle Elle cut abjure la croi'ance orthodoxe dans 1'E- glife des Francifcains les genoux plies , les doigts eleves & en pleine af- femblee du Clerge Catholique-Romain , dont Elle auroit folemnellement embrafle la Religion. A cette nouvelle , tout le monde a e'te ici ge- neralernent furpris & tous les coeurs one etc faifis d'angoifles & de dou leurs inexprimables, & en particulier ceux qui refpedlent en Votre Per- fonne vos excellentes vertus, vostalens fuperieurs & vos bienfaits figna- les envers notre patrie commune , & qui par ces raifons cheriflent V. M. au de-la de tout ce qu'on pourroit dire. Tous les gens de bien font faifis d'horreur au feul foupgon de chofes pareilles de la part d'une fi grande Princefle. D'autres ddplorent ce trifte e'venemenc & pouflenc des fanglots & des gemiflemens. La plus grande partie porte des plain- tes au Ciel & a la Terre eontre ceux qui ont abufe de la bonte de V. M. , & ont feduit une fj grande Reine par leurs infinuations & fuggef- j, tions captieufes , pour lui faire commettre Tenorine crime de Lefe Ma- jefle Divine j & ceux qui poufTent ces trifles plaintes fe perfuadent d'a- voir de puifTantes raifons de le faire ; car la Religion n'a pas en vue des biens periflables , mais^estiens eternels: Elle lie la confjience , lacho- fe la plus delicate qu'il y ait dans un Chretien : De tout terns auffi , tant chez les Chretiens que chez les Paiens (qui , comme Epicure', n'avoienc pas etoufFe tout fendment religieux) on a regarde comme une marque d'une inconflance blamabfe d'abandonner felon les occurences la religion )y qu'on avoit reconnu pour folidement bonne & dont on avoit fait en con- fequence une profeftion ouverte. C'eft de meme fans doute un crime horrible que de faufler la foi qu'on a une fois donnee a Dieu , dans le bateme; & il ne peut pasetre excufe par le malheur des terns: nonplus que par 1'efperance d'une fortune brillante , ou par la grandeur de quel- que defaftre dont on e'toit menace" ; Le moindre foup^on d'apoftafie nuit a la reputation , laquelle pourtant tous les grands coeurs , & tous les gens de bien ont de tout terns tache de conferver faine & fauve & en , v Ion en tier; oui , feulement des bruits fourds de cette nature quoiquemal- fondes , ne laiflent pas d'etre d^favantageux a ceux fur le compte def- quels ils fe repandent. Pour moi, Madame, le plus petit ferviteur de Votre Majefte , qui, par ordre de feu votre Pere de glorieufe Me'moire , fus nomme votre Precepteur, & Dire6leurde vos etudes prelque des le berceau;qui Vous ,, a fervi comme Chapelain & Confeiller Eccledaflique pendant une lon- gne fuite d'annees, & qui par confequent connois 1'etendue de votre fu- blime efprit & de votre divin genie , je n'ai pas pft encore ajouter foi a ce bruit repandu au fujet de V. M., favoir, que la plus fage des Rei- nes , qui s'e'tojt acquis par toute la Terre , avec la reputation d'une grande piete, la*renommee des plus glorieufes aftions , pofledant un fi J3 grand trefor des plus belles faiences & la connoiflance de plufieurs Ian- Sss 2 gues, 50* MEMOIRES CONCERN ANT ^ >an j> g ues > ait pu fe laifler perfuader d'abandonner la foi a laquelie Elie avok m ,, ete initiee dans fon bateme. Car je me fouviens encore fort bien des fages entretiens dont V. M. m'a honnore fouvent fur la nature & 1'etat des differentes Religions : Je rappelle encore en ma memoire fon juge- ment penetrant pour guerir les plai'es de 1'Eglife Chretienne. Je n'ai pas oublie non plus votre defTein vraiment Roi'al d'abroger quelques ce- remonies fuperftitieufes- , qui fervent plutot a defigurer qu'a decorer la Religion. Tant que tout ceci me roule dans 1'efprit, j'ai toutes Jes pei- nes du monde a me laifler perfuader , qu'une etoile aufli brillante fe puif- fe ternir de la moindre tache d'inconftance. Qued'autres invententdes fictions & debitent tout ce qu'ils voudront pour attrifter & eonfterner les coeurs de vos fideles ferviteurs, eertes pour moi, je me fuis propo- fe de ne pas donner creance aux bruits fourds & aux clameurs par lefc quelles quelques bouches tachent de percer & blefler votre ame divine ; oui r je me ferois plutot dechirer en mille pieces , que de douter , que V. M. ne veuille fe tenir coaftamment attachee a la parole de Dieu & a la confeflion de la pure doftrine Chretienne. Je prendraiidonc, autant ,, qu'il dependra de moi , la defenfe de i'innocence d'une fi grande Princef^ fe , centre toutes les calomnies de fes envieux , & je ferai connoitre ai tons, que je fuis pret a la laver de toutes les taches d'inconftance & d'a- poftalie , que. les. langues. des malintentionn.es. ont ofe jetter fur une ft }1 haute Dame. Cependant, je nepuis nier, qu'aulTi fouvent, que le bruit s'eft repan- y , du , que V. M. avoit intention de faire un voi'age en Italic , il m'ef venu en penfee y que cette Augufle Chrifline meditoit peut-etre quelque. projet pour immortalifer fon nom & qu'aiant abandonne un Roiaume terreftre, elle vouloit mettre tous fes foins a etendre le Roiaume deje- fus- Cbrtft : que Jes bienfaits , dont la Fatrie lui etoit redevable jufques ici , etoient peu de chofe en comparaifon des hautes idees qu'elle s'etoic formees pour fe rendre le Ciel meme propice , en fe vouant a la piete ,. & que pour en venir a bout , Elle vouloit aller voir le Pape , (dont le nom s'eft rendu celebre jufques dans les pai's du Nord^ tantpar fa.gran- de erudition que par la moderation de fon efprit) pour s'entretenir & a- vifer avec lui & d'autres. Monarques & Princes Catholiques , aux moiens , quelajo'ie, a laquelie , a fon election , 1'Empire Romain & les Roi'aumes voiilns ont participe pour le retabliifement de la paix civi- le, ne foit pas interrompue ou rendue imparfaite par la continuation d'une malheureufe guerre de. Religion- Si V. M. s'eft propofe ce but- la, favoir de concilier les differens fen- timens de Religion & de tranfmettre a la pofterite 1'unite de la foi & de >, 1'Eglife Chretienne , en donnant tous fes foins & emploi'ant tous les moiens convenables pour guerir les pla'ies de 1'Eglife ,, par 1'autorite des } , fouverains , qui apres celle de Dieu eft la plus haute fur la terre , afin qu'on voi'e cefler une fois les deplorables diflfenfions qai regnent dans la Chriftianifme, en levant de part & d'autre les fcandales , pour que 1'E- , glife s'accroifle en paix us avez en vue , nous le refpeftons tous & un chacun , & " nous y applaudiffons d'une commune voix , en foehaitant que , par la- M grace de Dieu , apres qu'on fera convenu que le fond de la Religion Chretienne confifte dam Ja verite & la purete , ce fchifme fatal foic abo- li, la communion des Saints etablie , les inimities , les inveclives , les ^ anathemes & les autres obftacles difparoiflenc , & , qu'en s'uniffant. d'a- vis & de forces , on prenne a coeur la defenfe de la bonne caufe centre w 1'ennemi commun du nom Chretien, arm que la gloire de Dieu, lacon- corde & Ja paix fleuriflent parmi les Chretiens , & que tous ceux , qui fouhaitent de devenir un jour conckoi'ens du Ciel & dornefliques de f t Dieu, s'efforcent del'etre aufli fur la terre. Si cela , dis-je encore une fois , Madame , eft le veritable defiein qui vous tient an coeur , & que V. M, par refpecl: pour la Majefte & 1'auto^ rite de Dieu, qui a tanc recommande a tous les Chretiens & en particu- lier aux nourrifTons de 1'Eglife de chercher la verite & la paix , fe foic yf propofe d'y amener les Catholiques-Ro mains & les autres , auxquels if j, appartient , en les portant a un accommodement pacifique ; certaine- ment V. M. brillera par -la d'une gloire nouvelle & extraordinaire qui 1'emportera fur tout ce qu'Elle a fait jufqu'ici. Ce feroit un grand & 5 , & glorieux ouvrage , qui convient fort non feulement a la dignite mais auffi a la divinite de la fontion des Rois , & que la parole de Dieu , comme \\ a ete dit , le-tir attribue. Je fais que les yeux de plufieurs per- fonnes font tournes fur V. M. Tous les amateurs de la fimple verite fe promettent beaucoup d'Elle , par la eonfideration qu'eile efl a prefent debarrafle'e de quantite d'autres foins, Tous les gens de bien admirenC fa grande piete & 1'aimable harmonic de toutes fes vertus heroi'ques, qui font connues dans tout le monde , & ils trouvent en Elle J'exemple 5 , que doivent fuivre tous les Grands. Ceux, Madame, qui vous connoiflent plus intlmement , favent, que >? vous n'etes jamais plus occupee que quand vous paroiffez 1'etre moins, & c'eft pourquoi ils fouhaitent , que votre loifir foit emploie a quelque occupation falutaire. Toutes les grandes Ames ne fe laifleront pas em- porter par 1'efprit de la guerre. Les plus moderes concourront , felon ,, 1'ordre de Dieu & a J'exemple de notre Augufle Reine , de tous les co- K tes de la terre , pour eteindre un incendie aufli pernicieux a toute la Chretiennete, en pretant la main& fecondant Chriflim dans un defTein fi beau qui tend fi fouverainement au falut de 1'Eglife. C'eft ainfi que les ^, cceurs des Chretiens r unis mutuellement par le lien de la charite ; &de la verite , ouvriront des avis falutaires. Ainfi leurs forces plus etroite- ment unies enfemble fe tourneront avec plus de bonheur & de fucces que jufqu'ici, contre 1'ennemi commun : ainfi tous en general & chacun en particulier en remporteront pour recompenfe avec plus de joi'e , la beatitude eternelle , qui a ete promife aux amateurs de la s verite & db n la paix. Sss 3, Enfir) 5 io ME MOIRES CONCERNANT Enfin je vous conjure, Tres- Sereniffime Reine, par les entrailles & s6 - _ les companions de notre Seigneur Jefus- Chrift, que s'il y a quelque dou- te dans votre coeur , quelque fcrupule dans votre conjfience , s'il fe trouve quelque obflacle dans votre ancienne Religion ; vous demandiez a Dieu , a qui vous vous etes confacree des votre plus tendre enfance , des confeiis falutaires , qu'il daigne diriger vos pies dans le fender de la verite & de la paix celefte. Tres-benigne Chriftine , ii vous avez a ,, coeur ce qui peut edifier le public & procurer votre propre falut , je vous fomme devant Chrift , qui jugera en fon terns les vivans & les morts; je vous prie tres-inftamment , & je vous conjure devant leDieu vivant , qui connoit le fecret des cceurs & qui manifeftera ce qui aura ete cache , de retirer votre coeur de toute penfee defordonnee : afinqu'e- tant appellee a la fainte communion dans le Roi'aume de Chrift , vous ne regardiez pas au monde. Et fi vous aimez 1'Evangile de la verite & de la paix, je fais que vous 1'aimez , fl vous brulez d'un faint zele pour la Maifon de Dieu, vous en brulez j'efpere , au moins en deplorant fon trifle etat ; je vous fupplie de vouloir affifter les foibles de vos confeiis falutaires , & d'eclairer ceux qui fe trouvent encore dans les tenebres de 1'ignorance par la lumiere , que I'efprit de Dieu a allumee dans votre a- ,, me: je vous exhorte a ne pas cacher cette lumiere, mais a en commu- niquer fidellement, promtement & fmcerement , les raifons aux autres, ^, foit par des voi'es publiques , foit par des voi'es cachees & fecretes , com- me felon les occurences vous jugerez les plus a propos. C'eft de cette ;, maniere , tres-clemente Reine , que vous donnerez fujet a plufieurs de rendre a Dieu de publiques adtions de graces , a la gloire de la verite , ,, de la paix & de fa mifericorde, afin, que le talent qui vous a eteconfie pour le bien de TEglife Chretienne, ne foit pas vain , & inutile au Sei- gneur, & qu'il vous foit a vous-meme glorieux & avantageux, au der- nier jour. Je vous dis adieu, tres-benigne Chriftine ' 9 ne dedaignez pas de refle'- chir fur ce que je vous dis ici , d'un coeur fincere & dans la crainte de Dieu. Je prie ardemment ce Dofteur de la verite, qui feul eft capable de Vous conduire (de meme que nous tous) dans la verite, qu'il Vous affifte. Je vous dis adieu, tres-clemente Reine, & je Vous prie d'etre gracieufement perfuadee , qu'il ne fe paffe point de jour que je n'adreffe pour Vous des prieres au Ciel. Pardonnez ma liberte , qui ne part que ,, de la franchife & fmcerite de mon coeur, & d'amour & de zele pour ,, Votre Perfonne. Je vous recommande a Dieu & a 1'Efprit de la grace, qui peut vous faire pafler , & moi & tous les hommes , de quelques te- nebres d'imperfeftions dont nous fo'ions environnes , a fon admirable lumiere. Je fuis. de Votre Sacree Majefte .' Le tres-de'voue & tres-fidele Serviteur Strengnds ce 7. JEANMATTHI^ Decembre 1655. A Lveque de Strmgnas Mai- CHRISTINE REINE DE SUEDE. 511 Malgre tout ce qne pouvoient dire tant les Prpteftans queles Catholiques L ' a * de ce changement de Religion , Chrljiine ne laifla pas pour cela de paffer t 6s6 ' agreablement Ton terns a Rome, oti elle paroiflbit fort contente. Mais pour qu'il ne fut pas dit dans le monde que Chriftine cut abandonne la Religion de fes Peres, fans aucuns motifs, void les raiibns de fa converfion qui furent rendues ptibliques en ce tems-la (a). CHACUN fait que la Reine Chrijiine de Sulde eft douee d'un efprit ad- mirable, qu'Elie poflede les belles-lettres , qu'elle parle plufieurs langues , qu'elle a 1'intelligence de toutes les faiences, & qu'elle a toujours pris grand foin d'avoir pres de fa perfonne des gens d'eminente do&rine , tant de fon Roi'aume , que des autres pa'is. Cette Reine nourrie & ele- vee des fon enfance dans la fefte des Lutheriens etant un peu plus avancee en &ge , n'y trouva pas toute la fatisfaftion d'efprit qu'elie cut bien defi- re , ce qui lui donna la curiofite d'ecouter quelquefois les raifonnemens de ceux qui profeffoient une autre Religion que la flenne , auquel terns ,, I'Ambaffadeur du Roi Tres- Chretien, qui etoit pres de fa Perfonne a Stockholm , & qui s'etoit acquis une grande eftime atipres d'Elle , apres j, les audiences publiques , difcouroit fouvent avec elle en particulier , & ,i jamais le difcours ne fe terminoit fans parler de Religion. Les Confe- 5> rences de cet Ambaffadeur firent naitre dans 1'efprit de la Reine beau- coup de doutes fur celle qu'elie profeilbit , & lui donnerent un grand defir de parler fur ce fujet avec des Do6leurs Catholiques, & de confi- derer attentivement leurs raifons,- enfuite de quoi la Reine voulant s'e- claircir de fes doutes, les propofa aux plus favans Miniftres Lutheriens & pour ce meme fujet lut tous leurs livres: mais ni leurs reponfes, ni la Ie6lure ne la purent jamais contenter (*). Elle voulut apres cela exa- miner curieufement toutes les Religions qui ont jamais etc an monde , ,j & celles qui font a prefent connues. Elle fit venir pres de fa Perfonne les plus favans de ce flecle, dont elle put avoir connoiflance , par re- putation, pour conferer avec eux. Elle demeura cinq ans a faire cet examen, au bout desquels^elle ne trouva pas de quoi fe fatisfaire, en- forte qu'elle fit refolution de vivre dans la Religion dans laquelle el!e avoit ete elevee, le perfuadant qu'elle y pourroit faire fon falut, &que ,, fa confience feroit en repos, y vivant felon la droite raifon, fans faire tort a perfonne, elle demeura deux ans en cet etat. Mais Dieu, qui la ,, vouloit tirer a foi, renouvella fes premieres inquietudes touchant la ve- rite de -la Religion. Un Ambaffadeur de Portugal vint a Stockholm ac- com- i (a) Ellesfe trouvent dans le Nouveau Recueil de Harangues pag : 93. &c. (*) C'eft gratuitement qa'on d^bite ici, comme fi la Reine cut propofe fes doutts fur la Religion aux Eccl^fiaft-iques de Sutde & qu'ils n'y euffent pu fuffifamment r- pondre. L'Hiftoire & les Archives de Suede ignorent ce trait & d'autres pareils abfolti- nient. Us ne font inverse's par 1'auteur de cet Ecrit, que pour coloier une mauvaife ctiife. on ir.e, 5 i2 MEMOIRES CONCERNANT k'an compagne de deux Peres Jefuites : 1'un d'iceux , appelle Antolne Macedo , lui fervoit d'interprete aupres de la Reine , laquelle 1'aiant reconnu homme prudent: <& lidele, lui confia fon fecret & le conjura de partir promtement fans parler a perfonne, & d'aller a Rome pour porter une lettre au Fere Picobmini, General de fon Ordre, par laquelle il etoitprie d'envoi'er a Stockholm deux Peres battens, avec lefquels elle put conferee des chofes de ia Religion , donnant aflurance de fe faire Catholique , au cas qu'on lui tic connoitre la verite. Cette negotiation fut ft fecrete, que I'Ambafladeur de Portugal meme n'en fik rien. Le Pere Macedo fe rendit a Rome fur la fin du mois d'Oclobrs 1651. ou le Pere Picolomini etant mort , il prefenta fes lettres au Vicaire nomme Gosvimis Nickel, main- tenant General de ladite Compagnie. Ces lettres etant ecrites en Fran- ftis, furent confiees au Pere Anal Affiftant de France, avec lequel on confuka fur le choix des perfonnes qui devoient etre envo'iees en Su&dc, Le Pere Paul Cafati, & le Pere Francois de Malines furent choifis pour cet efFet, & fans beaucoup tarder feVendirent tous deux a Stockholm le ,, 24. Fevrier 1652. Les conferences de la Reine avec ces deux Peres ,, furent tres-frequentes , & de plufieurs heures a chaque fois , II fecrete- ment, que perfonne ne s'en apperjut. La Reine avoit deja tant de connoiflance des points principaux de la vraie Religion , qu'apres qucl- ,, ques eclairciffemens de quelques difficultes particulieres , il fe vit claire- ment que Dieu avoit touche fon coeur. Ce fut a la fin d'Avril 1652. qu'elle fe refolut d'etre Catholique, elle fe refolut auffi de renoncer a fun ,, Roi'aume, ai'ant auparavant reconnu i'impoffibilite de pouvoir jamais introduire la Religion Catholique dans fes Etats , & juge qu'elle ne pou- voit en continuer le gouvernement , fans fe mettre en peril de faire beau- coup de chofes centre la vrai'e Foi , qu'elle vouloit embraffer. Enfuice j, la Reine , avec le confeil des deux Peres JeTuites , drefla un projet 3 , de tout ce qu'elle defiroit faire , & deputa le Pere Paul Cafatl pour aller ,, a Rome reprefenter au Pape Innocent X. par I'entremife du General de 1' Ordre, le deflein qu'elle avoit de quitter fon Roi'aume pour fe faire Ca- tholique , comme auifi pour prendre certaines inflrudtions pour en facili- ter 1'execution. Ledit Pere Cafatl partit de Suede pour Rome , au com- mencement de Mai de la meme annee 1652. & le Pere Malines lequel quinze jours apres le devoit fuivre, demeura pres de Sa Majelle, aianc ete detourne par diverfes rencontres de faire le meme voi'age. L'Emi- nentiffime Cardinal Chigi^prefQntAlexandref 7 !!. avoit eu la connoiflance 3 , de ce grand deflein des le commencement , & ce fut cette Eminence qui donna au Pere Cajati toutes les inftruftions neceflaires , dont il avoit be- foin, & qui etoient en partie caufe de fon voi'age a Rome. Cela fait, ledit Pere Cafati fe mit en chemin pour retourner en Suede: divers acci- dens 1'empecherent d'arriver a Hambourg avant la fin de ladite annee 1652. Y etant arrive , il trouva des lettres de la Reine qui lui don- noient ordre , fans paffer outre jufqu'a Stockholm , de lui envoi'cr les ,, inflructions qu'il lui apportoit de Rome. Ce qui fut execute, & ledic Pere s'en retourna en Italic, 1'hiver ^tant pafle, & arriva a Rome le 9. Juiii ? > CHRISTINE REINE DE SUEDE. 513 Juin 1653. Cependant la Reine travailloit a 1'execution de fes defTeins, ^' aft qu'elle conclut ecrivant au Pape , au Cardinal Chigi & au General des * 5 ' Jefuites , auquel elle donna avis de fa derniere refoJution d'aller faire fon abjuration dans Rome ad limina Apoftolorum, & commit pour donneror* dre a fes affaires le Sr. Bourdeht , fon premier Medecin , auquel elle a- voit communique fon deiTein ; & bien qu'il y cut beaucoup de difficultes a furmonter pour une affaire fi delicate ; c'eft ou cette Reine fit paroi- tre une fermete incroi'able. Enfin par des lettres ecrites dUpfal du 6 Fevrier 1654. e ^ e temoigna aux dits Peres & autres Confidens de ce grand Projet , la joi'e qu'elle avoit d'avoir entierement termine 1'affaire de 1'abdication de fon Roi'aume , & que fous pretexte des eaux de Spa, elle iroit en Flandres & de - la a Anoers 9 & a Bruxelks , Pai's Catholique le plus proche de fes Etats , ou elle fit en particulier profeffion de la Re- ligion Catholique la nuit de Noel 1654. en prefence de 1'Archiduc Leo- pold, du Comte Montecuculi, que cette Reine fit venir expres de Vunne^ & d'autres Seigneurs de cette Cour. Et comme Ton defiroit , pour des raifons tres-importantes , que 1'affaire demeurat fecrete , elle choifit un Jacobin pour recevoir entre fes mains fa Profeffion de foi , lequel depuis 1'a lervi en qualite de Chapelain & de ConfeiTeur. Quelque terns apres , la Reine ai'ant fu 1'elevation de N. S. P. le Pape Alexandre VII. elle lui donna avis du deflein qu'elle avoit de venir a Rome. Sa Saintete trouva a propos qu'auffitot , qu'elle auroit paffe les Pai's ou il y avoit des Here- tiques , elle fit fon Abjuration , & Profeffion de la Foi Catholique en public. Ce qui a ete execute a Infpruck le 3. Novembre 1655. Cet e'crit date d'Infpmck le 3 Novembre 1655. fut fuivi d'un autre en Itafien , quoique plus politique & fatirique en meme terns (*). Dans le fond ils reviennent Tun & 1'autre au meme. Quoiqu'il en foit , le Pape Alexandre VII ', qui fe promettoit de grandes chofes de cette Reine nouvel- lement convertie, ne pfit pas empecher, que fon SuccefTeur Charles-Gufta- w , qui avoit ete force d'entrer en guerre centre le Roi de Pohgne , ne remportat fur lui des vicloires decifives. Cela alarma d'autant plus ce Pa- pe, qu'il voioit bien, que fi le Roi Cbarles-Guftave fubjuguoit la Pohgne, la Religion Catholique en pouroit fouffrir confiderablement. Pour pre venir iln coup fi fatal , le Pontife ecrivit une lettre paftorale (a) a tous les Pa- triarches , Archeveques , Eveques , & a tous les vrais Croi'ans , ou il fe plai- '. fcV " ' ; ." , ''-.''' (a) Elle fe trouve dans Thulderius /. c. j>, 77. fcf 78. Lettre d< (*) Le titre en eft (i) Disco RSO P o L i T i c o ffrmato fopr<\. 1'arrivo delta R eal V. l'Appe Maefla della Regina Chriftina di Suetia nella Corte di Roma, c circa gli affari cbejua dite Maefla haver a nella medifima Corte, efopra le razioni per lequali s'tft mofla la Medi/ima v Maejla ad abbracciare lajanta fede Catbolica". ( i ) Comrmmiciiee en Mfc, pai le fusdit Mr, de Toms L Ttt L'an. 514 MEMOIR E.S CONCEHNANT plaignoit: de ce que des Nations qu'il auroit voulu conduire au fein dfi m la vrai'e croiance & embrafler tendrement en vrai Pere commun ces nar " tions, dic-il , en rompant les digues de la mer&les barrieres des terres tachoient de dechirer ce meme fein , & attaquoient le troupeau de Chrifi ,, (*). I>e Pape ajoutoit ,. qu'il avoit exhorte les deux Rois belligerans a la paix : & fur la fin il appelloit le Roi de Suede un adverfaire tres-im- ,, portun ". Charles- Guftave- ne s'arreta pas a ces termes fl peu convena* bles. II pouffa fes conquetes plus avant en ..Pohgtie , & obligea meme le Roi Jean Cafimir d'abandonner fon Ro'iaume & de fe fauver en Silefie: per- fuade que de pareils explois tiendroient lieu de la meilleure reponfe a la kttre du Pape (f.).. Raifon des dcpenfes enormes da Pape a It reception de CbriHint, Railleries de Clmrln-Gu> ftavt fin !' pthece d' import unit' fimus que le Pant lui a *o:t doune. (*) Voici fes propres termes:*,, Gentes, quas pro Pontificia caritate, in noftrum , boc eft in vercs fidei Jinum traducere , ar&ijfimeque complefti voluijjemits , bunc ipfum jinunt dilaniare conantur, f ruptis maris atque ultimis terrarum clauftris , in Chrifti gregem Jt effundtmtur...." Dans le traite. appdle* le Syndicat du Pape. Alexandre VII, dans Tbulderius & le T-beatr. Europ. il eft dit (i): qu'une des raifons pourquoi le Pape avoit fait des depenfes fi enormes a la reception de la Reine Cbriftine dans fes Etats,. ,, & furtout a Rome; c'dtoit les adurances qu'on lui avoit donne"es, que plufieurs gran- des Families en Sutds & en slllemagne fuivroient l^xemple de Cbriftine & fe feroienC- Cathoiiques. Le Cardinal Erancaccio le doiine aufll a entendre dans la lettre a la Reine ,, en difant (2): ,., Exempla a Te jumta fortius urgent plures ex Germanis Principibus qid R'omanam meditantur fidem &c. . . Le bon Cur de Creft en France poulFa plus loin en- core fes vifions & fe laiflant emporter a un efprit propWtique pr^dit (3), que tous les? Suedois & 4 leur ^xemple tous les autres h^r^tiques fuivroient celui. de Cbriftine & fe feroient Catholiques-Romains. Voici fa harangue. . Madame, nous ne. faurions affez louer 1'honneur que nous recevons aujourd'hui de ,, voir en Votre Malefic* la fille du Graf id- Guftave, & la merveille des Reines, 1'orne- ment de notre fie"c!e, & le plus grand Genie cte la nature, qui ait jamais triomphe" de^ grandeurs de TUnivers. Vous avez triomph^,-quand Vous avez gagne" des Ba- tnillcs pour couronner les viftoires de- cet invincible Monarque r & que Voas avez- M afTur^ fes Conquetes an Traite" de Munfter, & Vous avez triomphe des Couronnes. , Roi'ales, & de Vous-me'ine, quand Vous les avez devotees. C'eft ici, Madame, le faite de toutes les grandeurs de Votre Majeit^-, & nous ne faurions plus y ajouter de lounn^es apres celles qu'elle s'eft acquifes & Rome. Toute la Chretrennetti en a' iclevd fes efpe'nnces, & eJle fe promet qu'A 1'dxemple de Mavia , cette fameufe Reine, qui , apres fa con-verfion, donna la Paix a 1'Empire Romain, de meme apres la v6tre, Vous donnerez la paix ^ tons les Empires Chretiens , & ferez que tous vos peuples fe convertiront , & a feur 6xemple tous les mures Il^rt^tiques. Ce fer>r lors, Madame, que toutes les armes communes de la Chretiennett^ Feront une fainte union pour abbatre le Turban des infideles, & que Votre nom pnrmi ces triomphes ^clatera dans le Ciel, & fera radmiradpn de toute la terre. Ce font les prophe'ti- ques fentimens 1 , Madame ,, de. vos trcs - humbles , tres - obeiffans & tres- fiddles r ,,, ferviteurs. Q) Cbarlet-Guftave ne laiflTa pas de r^lever 1'exprefllon de impor tunijjlmus Adverfariur, par ou le Pape 1'avoit voulu de'figner, en remarquant que le Pape n 'auroit pu donner une e'pithece plus propre a un Ennemi que de 1'appeJltr impoptun, Car.jainais on n'aura eni f i) Vofez le Syndicat de ce Pane p. 134- Thuld. 1 c. p. 102 c Tbeatr. JSar, ad h. ' p. &j>j. cfr. DiTcorfo Polit. cite ci-<" Ti) Elle eft d.u<-e non. Jan. i6$6.d?.nsOidfini vita Pcmif. p. fpz. & 710. (3) V. A'v. Jieftteil de Jia^Uignes p. 241,. CHRISTINE' REINE DE SUEDE, yt$ Cependant les Catholiques & principalement les Jefuites exalterent par- L ' an tout la grande acquifition qu'avoit faite 1'Eglife Romaine dans la perfonne de Cbriftine , & voici un commerce de lettres en vers , qu'on fuppofa, ^u'il y avoit eu la-deflus entre Cbriftine & le Pape Alexandre PlI. (a). CHRISTINA ALEXANSRO PAP/E, S. D. Reddita nunc Sacris emits , ovis ama , Rom Sedfub Alexandro, Te Duce , -viEta cado. Viribus baud vincor , fuperor pletate libentei'^ Ante tuos fletto fubdita collapedes. O/ EgofipoJJem Tibifubdere colla meorumj Cum grege vent/Jem , prceda opulent a meo ! Quodpotiti, feciy venio ! v Paftor Alexander, Cbrifti fed munere Paftor .. >3 Excipio ad Chriftum , , quam Pater egit ovem. Hue Chriftina veriis, Reginaque verius aftris Texitur in jitperis digna corona Tibi. j, Lih'a profceptris capies , fpondeberis Agno , } Et ftola tinfta fuo Jangume veftis erit. ' Me Duce Alexandro , fcandes Capitolia viflrix, w Cinget & Auguftum Laureaparta caput. . 35 (a) V. to Palmskoldiana, * entendu dire, qu'un ennemi fut opportune. Tous res ennernis, dit-il, font importuns, fi on en excepte le Roi de Dannemdrck, puifque fon invafion venoit & propose & qu'il toit boftis opportunijjimus , parce qu'it avoit "attire 1 les Sutdois de la Pologne & de la Pruffe (qui ^toient d6s. (i) L, c. Tom. I, A'.l ii, ahn, p. in?, Ttt 2 S i6 MEMOIRES CONCERNANT Jl,'an Non Tu vifta cades , per Te cadet hterefis onmis : Siftitur h&c dextrae viftimafatta tux. Nee Tufola venis , qua vifto Acheronti Tyranni Tartarei tecum raptatrophaa vehis. Pondere non numero ducor y Chriftina , caputquc Unum pro cunftis hoc mihi pondus habet. Hoc referes nojlris pia dum das ofcula plantis (*) Ut meafit pedilms Jubdita Roma tuis. Mais de bonnes plumes ne manquerent pas pour cela de critiquer & gramme le fens & le ftile guinde tant de la lettre paftprale du Pape gue des vers mhe du ( l u ' on ^ attribuoit. Entr'autres on y re'pondit par une jolie Epigram- fur iac- me latine, qui faifoit alluilon aux triomphes du Roi de Suede, en Pologne & aux rejouhTances qu'on fit en meme terns a Rome, pour la Reine Chriftine. L'Auteur y dit , que le Pape en gagnant en la perfonne de Cbriftine , unc feule brebis, perd en Pologne tout ie troupeau. La voici () : Sarmatlcos Getico dum compos milits vaftat Carolus, & rupto fosdere regna quatit: Dum pietas & avita fides his exulat oris ) Orbis & opprejja Religione gemit. Chriftina ipfa truci qua tradidit arma.Tyranm Ad veneranda Petri liniina tendit ovans. Et nunc barbarlcos minaris Roma triumphos, Gaudefque invent a jam , bone Pa/lor, ove. At nimium vanis exuhas Roma triumpbis, Qu Un. I. c. y. 822. Bibl. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 519 duite a cet egard doit avoir etc atifii ridicule que peu convenable au carac- L>aB ' fere qu'il portoit. Le Pape qui en fut informe , iui ordonna de fe retirer m de Rome,- Iui difant , que la Reine n'y etoit pas venue pour etre fcandali- * fee (*). Ce fut pour plaire au Pape, que comme on le rapporte, elleprit a fon lervice plufieurs Domeftiques Italiens, en cbngediant quelques Ejper- gnols, deforte que ceux-ci en etant irrites & parlatit mal d'elle , Iui firent perdre ce grand attachement qu'elle avoit jufques-la fait paroitre pour tout ce qui etoit Efpagnol (f) ,- & qu'elle commenca a temoigner plus de pan- f ckr ^ ; ' 1 . jr o A > 11 i' i i //* i temoigne uw chant pour la Ertmct* Apparemment quelle aura des-lors pns la refolution gout pour ia d'alitr faire un tour en France , & qu'avant que d'y aller , elle aura voulu tre biew avec cette Cour-la (fy Elle engagea meme quelques Francois a fon fervice ,- dont les Efpagnoh fe trouverent ft furieufement piques , ace que dit 1'Auteur da Mercure- Hollandois , qu'ils firent imprimer deux pieces en Efpagnol de la vie de la Reine Chriftine. Le- contenu ne doit pas en avoir ct'i bien mefure , puifque deux Caftlllam , qu'on en croi'oit les Au- teurs , /furent mis en prifon, & que de plus la Reine envoi'a un de fesGen- tilshommes a la Cour de Madrid ,. pour fe plaindre des injures que fes Mi- niftres tachoient de Iui faire a Rome (a). Si on ajoute foi aux Anecdotes de ce terns-la , Chriftine ne doit pas non plus avoir fort menage les grandes Families de Rome, qui Jfirent des plaintes 5i? m Chrijlint, (o) L. c.p. 3. & 4. item Reife'van Chri- ces pieces Efpngnolesonneftiifroit dire cequel- pag. 38. ^fc. riaiant pas pu dtceuvrir les contiennent. .(*) Miv Arnold le dif dans fon hiftoire (i) ajoutant que le Pape avoit ordonn i tous So { n fes Domeftiques en particulier de fe coinpor ter honneteinent & en bons Chretiens , en pour que vifitant les Eglifes frequeinment tout le terns que Cbriftine demeurcroit a Rome, afinque Chrrfine ia Reine ne fut point fcandalife'e mais plut6t afFennte dans fa nouvelle croi:ince. On 'a foit feandaii donc de la perne a croire ce que Tentzel dit fur le rapport de Wagenj'eil (2), que. la Heine nouveilement arriv^e a Rome avoic demande" au Pape la permiffioa de lire tons les livres d^fendus : & qu'ilTa Iui avoit accord^e, a 1'exception de la. Bible & de I'^done dii Cavalier Marin: & que I'lnquifiteur dc Siene avoit dit la-defTus a Wagenj'eil: que Ton avoit eu de bonnes raifons d'interdire a Cbriftine la lefture de la Bible, mais qa'on avoit bien pa Iui perraettre de lire YAdone. On mettra auffi au nombre de tantd'autres abfurdites , celle qu'a debitt; un Auteur Franf ois (3) que le Pape Alexandre VII. avoit convi6 la Reine de venir a Rome & Iui avoit otFerc une penfionconfide'rableparleuio'.ten de laquelle il 1'avoit fait refoudre a un mariage de confijience avec lui. (f) L' Auteur du Difcorfo Politico, citt^ ci-deflu5, reaiarque de mSme, que la fine po- 'litique de la Cour d'Efpagne , en s'attachant Chriftine & la faifanc venir i Rtme , avoir pour but, d'y fixer forr fejour, pour entretenir toiljours le Pap^ dans les inte'rets de Y'Efyagne & de la Maifon tiAutrkbe. ({) Voici ce qu'en a dit un Hiftoriea Italien (4). La Regfna di Sudtia difguftata dT Don Antonio dslla Cueva & d'altri Miniftri Spagnuoli venne dal fignor l.ionne Ambafcia- tore de Re Chriftianiffimo a quelle Corte guadagnata novamente alia Francia. Dove af pretefto di paflfare in Potnsrania ad aguirtare i fuoi interefli col Re Carolo Guftavo trasfe- rifli la Regina , e ricevuti grandiffimi honort tornefl! parimente in Italia & a Koma qiutft anno, non filaments come confidente, r,ta come confedsrata con quella Corona. (*) V. Arnolds Kirch. uKctz. Hift. 1. c. J.XIII. O ) Hift. dti P. la Cbaizt T. II. p. I^T. Cgj. Mooatl. Uut, Apt. I6p7- p- 374* (A) knfini hill, d'halif vi h, ann. p> 35'*,* 520 ME MOIRES CONCERNANT L' an ameres de fa conduite envers elles. On Jes lit dans un Manufcrit Italien, [656 ' oil toutes ks fetes & divertiflemens donnes a la Reine , font decrits (*). L'Auteur en en donnant le detail fait furtout valoir le magnifique Amphi- theatre de trois cent brafles de longueur , fur quarante de largeur , que le Prince Pamphili & fon Epoufe la Princefle di RoJJano avoient fait batir de- vant leur Palais afin d'y placer commodement la Reine & la haute Noblefle Romaine , pour le fpeclacle de la Courfe des chevaux & des Mafcarades: que ce batiment leur avoit coute douze mille ecus Remains & que les au- tres fraix en fetes, collations, foupers, &c:devoient aller au de-lade qua- rante mille ecus : que la Maifon de Barberini & le Prince de Palcjlrim de voient donner a cette Reine le divertiflement d'un Tournois, aiant fait ou- tre cela drefler pour les Opera & les Comedies une place pour fix mille perfonnes , ou on repre'fenteroit entr'autres un Opera intitule la vita hu- mana , le plus beau & le plus magnifique qui fe foit fait en Italie , puiG- que , a chaque demi quart d'heure , il devoit y avoir changement de decorations & que de veri tables hommes a cheval , des Elefans , des Boeufs , des Taureaux , des fontaines vives & d'autres ehofes merveilleufes devoient y paroitre en nature : que malgre toutes ces demonftrations de refpecl: & de veneration pour la Reine Chriftine, & malgre les grands fraix que fon arrivee a Rome avoit caufes a la haute Nobleffe; cel!e-ci s'aperce- voit avec chagrin que cette Princefle lui en temoignoit fi pen dereconnoif- fance; qu'elle trakoit les bonnes families de Rome avec hauteur & avectrop d'indifFerence : qu'elle devoit neanmoins confiderer, que toutes ces depen- fes avoient ete faites & toutes ces ftes preparees felon le defir du Pape , qui avoit voulu qu'on s'efFor^at de procurer toutes fortes de divertiflemens a Sa Majefte. Mais que fi elle perfifloit dans fon opinion & fon orgueil ordinaire envers les hautes families de Rome , elle pourroit a fon tour e- proiiver leur reflentiment & leur hardiefle , comme Mgra Colonna entr'au- tres avoit deja donne a entendre, qu'il y auroit des perfonnes mafqueesqui mortifieroient la Reine par des mots piquants , quand elle pafleroit en pu- blic dans le cours , pour fe venger des affronts qu'elle lui avoit faits & aux autres Princes Remains (f). cbriflmtt* Chrifline etant informee de ce complot& deces menaces qu'on lui fit, raoique fon j es v. 1'Appen- (*) Le litre en eft: Fidelifflma defcrit ione delie fejls , Mafchere, Giqflre a Comeclie, N " a PP arecc ^ ate ne ^ a C r * e M Roma in bonore della Real Maejia della Regina di Suetia nel prefente Carnevale deir anno 1656 (i)". (f) Mr. Sprenger femble en d^couvrir la raifon, quand il dit (2) Incommodum id ac* cedebat,quod Chriftina adhuc ignara morum Romanorum nonillicbfellainponijuberetmiflis a Papa Camcrariis , imo quod tenax adbuc viderctur generis vivendi quod Galli habent ^f Romani oderunt, Sed omnia ilia trattu temporis in melius redierunt. . . ? demum a Roma- nis nibil magis optari , quain lit Regina, Jive quod feme I in Galliam abierat, five i?i Sueciam fuam . quo pluries r emigraver at , falva redux cjfet, f contcnta in fuo Palatio fuos tranfigeret dies in multos annos. (0 Commiiniqu^e pat Mr. dc Sltme. (i) V. fa Roma Nora p. 174. CHRISTINE HEINE DE SUEDE. 521 les prevint addroitement. Et touchant la trame des Efpagnols , elle en mar- .qua fon reflentiment comme on le voit dans une efpece de Manifefle qu'el- le fit oublier en It alien, que void avec la tradu&ion en Franpis (f). Ntrata cbefu/a Regina netto La Reine e'tant entree dans 1'Etat flato Ecclefiaftico, edavendo Ecclefiaflique & aiant trouve de F * e trwato da Ferrara -a Roma alcu- * e a , quelques^uns des ^ ;. ( TT: W ;I ; ,. /? j Cardmaux de 1 Efcadron Volant , favoir Cardmah dello Iquadrpne vo- ks Cardinaux Lomelino , Dongi , Jqua- Jante , do , // Cardinal* Loxneli- ^ & /^/ MW fe/ 1 no, ce qu'ils croioient capable de 1'cloi- mancarono di quando in quando gner d'e'tablirqueiquecorrefpondance dir le tutto quello , cbe poteffero avec les autres. Mais Sa Majefte leur per rimvverla dajlMlireti'kuna fit connoitre que tons ces averdffe- CorrijpondenzaconquellL Majua mens n aboutiroaent a nen. Maejlhfice lororiconnojcere ^ cbe tali avertimentl no gli riujtiva- no grati. Giunta ftta Macjla a Roma , ilfanore di Lione Ambafdatorc a^K f j j / di Irancia bavendo havuto fre- quent e lona udienza , // Majefte etant arrivee a Rome & ^ e Dmne Amba ! }^urde^^ aiant fau vent aupres d Elle delono-ues audienceSi les / fpagno!s $ . en p]a] | ni . rent & luidirent, qu'ilfembloitqu'el- le voulQt , au prejudice de famitie differo cbe pareua voleffe loro in qu'ElleavoitpromifeauRoileurMai' pregiudizio del? amicizia promjfa tre, en lier une plus etroite avech al R loro padrone ftringere una piii fort? con la Francia : rifpofe JU(1 France SpagnuoHfene dolfero jeco , e,gli dans fon Diclionnnire hid. & critique en fait mention dans un article expres, oil il cite qnelques autres ouvrages curieux qu'il avoir, public's, mais il ne par'e point de ces Bizarrerie politicle , non plus que de fa Roma Triumi>bans. On a tach^ d'dter le no;n trc de fautes d'impreffion qui fe trouvent dans la premiere Edition de ce M$nife(b. Tome L Vvv 522 MEMOIR E S CO N C E R N A N T L'an 1656- fua Maejla eft ella terrebbe ami- , cizia con chi a M far Me a pro- pojito , e cbe non dovevano haver per jlrana la Corrijpondenza , elf ellavolevabavcr con la Fran- cia , con laquale haveva bavufo legge in tuiti i tempi 5 cbe do non era fare una amidzia , ma con- tinuar unaantica^e cbe fijialmen- te ella non era fogetta al R$ di Spagna<> per fecondar decamente il loro configlio' >>e conforwarji al- ia lor intentione. Havendo poi gli JleJJi SpagmioU prefo Jofpetto delle frequenti vifitc cbe li face, vano i Cardinali Barbarini, Im- perial! , Borromeo, ed Affolino, fecero dire diverfe coje al Pa- pa 5 crcdendo di poter la Con- tinuata delle vifite , di ciafcbc- duno di quejli Cardinali impe- dlre , ma do non bavendo parto- rito Feffetto cbe s'erano miagma- //, fecero diverfe radumanze frh di loro^ bora in Cafa del Sfgnore Cardinak de Medici , bora in Cafa del Duca di Terranuova , nelle quali intervenero il Cardi- nal? Landgravio. D. Antonio Pierae.ntelli , e'D. Antonio della Cueva e cfualcbe altro della faz- zlone di Spagna 3 dove furono fatti difcorfi di poco rijpetto verfo la Maejla fua , df erano publicati per Roma : il Cueva , era principale di quelli , di cbiji fervivano li Spagnuoh per Semi- nar e di cafain cafale loro Calum- nie eontro la Regina 3 la quale a- verttiajlimdnelprendpiofprezza- re France. A quoi Sa Majefte repondit: qu'El'e culciveroit 1'amitie avec qui bon Itii fembleroit; & qu'ils ne de- voient point trouver etrange la cor- refpondance qu'dle vouloitentretenir avec kv France, a laquelle elle avoit ete liee de tout terns :que cela n'etoit point faire une nouveflearaitiejmais feulement cultiver une ancienne, & qu'au refte Elle n'etoit pas fujette du Roi d'Efpagne pour feconder aveugle- ment leurs avis & fe conformer a leurs intentions. Ces memes aiant pris enfuite des foupjons des frequentes vifites que faifoient a. la Reine Jes Cardinaux, Barbei ini , Imperial! , Borromeo & Az- zolino,i\s firent dire auPapeplufieurs chofes la-deflus , croi'ant pouvoir ar- reter par-la la continuation des vifites de ces Cardinaux: mais tout cela n'ai'ant pas produit Teffet qu'ils s'en etoient imagine , ils firent plufieurs complots entr'eux , tantot dans la Maifon du Cardinal de Medicis , tantot dans celle du Due de Terramiova , ou fe trouverent le Cardinal Landgrave , D. Sfatonio Pimcntel, D. Antonio della Cueva & quelques autres de Iafa6tion Efpagnole. C'eft-la qu'on tenoit des difcours pen refpeclueux de Sa Ma- jeft^ , qui furent publics dans Rome. Della Cueva fut le premier de ceux dont fe fervirent les Efpagnoh pour portar de maifon en maifon leurs ca- lomnies contre la Reine , qui en a'iant ete avertie , eftima d'abord que le mieux etoit de meprifer tout ce qui CHRISTINE HEINE DE= S U'E D E. 523 re tutte le voci, ediffimulo piudi fe difoit comr'ellc. Elle diffimula L ' a ire mcfi^e trattando Hdettodelfa to t pendant plus de trois mois, & I(5s<5 - Cueva nella maniera confueta, tra j tta d f lla ^ a de la maniere ac- " mafinalmentevedendo, che quef- t co ? tume f: Mais voiantenfin que ce J _cr - *- / i / tram contmuoit , & que de diffimu er tiaffari conttnuavano , e che V plus , , tems n ' e ^rok W dijfimulare non giovava , qu'illui feroit beaucoupde prendere che gli haver ebbe fat- ?!, /' defolll ^ er fonretourpourja tn Fran biarerp i! fallpritarp il Flandre: lurquonlrepondit,qu'ilefpe- to gran placet e ilJoUecitars it ro it de partir dans huk jours. Lekm- fUO ntorno verfo Fiandra, e gh demain Sa Majefle declara le Comte rijpoje che fperava partire fra Sentinel!} fon premier Chambellan , Otto giorni ; Doppo la matmafe' della Cueva prit cela pour une marque guente fua Maejla dublarb fuo de raepris &^le meme f9ir etant de Camerier maggiore il Conte San- ^ ? r dans , I ' il tel de ^-Ambafl^deur tinelli do prejofi dalla Cueva per 3 f^f ^' , lui & ^ E P ou ^ e fir . e nc Wtore&todim la CerampflpLn ^^ la Permifli on de fe rearer aijprezzo at im, lajerameaejma d'aupres de Sa Majefle. ju di ntorno in Cafa delAmbafcia- tore di Spagna , richieftone da M) e dalla magJie licenza a fua Maejla. Don Antonio Pimentelli ft D. Antonio Pimentel fe trouva aufli picco parimente di quejlo Jlato 3 P^9 u f au J eu . & quoiqu'il eut accoii- e fe bene era folito di vcnir ^ um edevenirreglement tousles jours ogni giorno a Farnefe , a veder \ ia^^^-^^ r pverence laRegina^Lafciofcorrerecmque & V enant enfin au fixieme il tS giorm Jenza farlo : rivennc pero d'ajufter 1'affaire Mia Cueva. ilfefto giorno , e cerco agghiftare w \\\ Taffare della Cueva , ma fi a- doprbfenza effetto. Akuni giorni doppo il Signore Ouelques jours apres D. -&.. _ Antonio della Cueva, e fua mo- ^ * uem & Ton Epaufe etaut venus venutiper licenziarfi P^r prendre conge de Sa Majefle, t ^ - >^ _*^ H I l/^k Tl t" otAt^ol l/^> icirt <*-w*i *-> >-k^*- . _1 _ /*_ , rnare i * JM el/a fece chia- " e fi j. a PP elIer . le , s principaux de fes j& qffinche '^\ Comte (*) C'^tok aa Talais Farnefe que logeoit la'Reine. V V V 2 ,$34 M E M O I R E S C N C E R N A N T affinebe fofftro teftimoni (Tuna a&- Comte Francifco Maria Sentmelli zione cbe pajjo nella maniera cbe mier Chambellan ou Major Domede feme. Erano auefli II Cavafar Reine > afin qu'ils fiiflent temoins Baldefibri, it Capitano Ma d^me aftion qjii fe paffa de> ma, -, r, T. - r mere fuivante. Don Jlntomo etant rfltfrtf* , // Cdwff Francifco entrd dans , a chambre d . Audience de Mam Santinelli Cameneremag- ] a Reine fit une profonde reverence gwre dijua Macfla^ Don Anto- a S. M. lui baifa la main , comme nio entrato nella Camera deW celaeft d'ufage en Efpagne, &iuidh udienza delta Retina s-mspnocbw en gemiflant, que c'etoit un grand de c diepiangeno.. ebcaveva gr&n don . S a Majefte Juirepondit: que ramarico di non baverla fervita c'etoit a fa conf^ience a juger s'i! oft benc come conveniva , e ha- avoit fervi bien ou mal , mais qu'il verebbe voluto ; cbe a let ne cbie pouvoit etre aflurequ'ellefauroittoa- devapardono. Sua Maeflarifpo/e jours recorapenfer le galant homme cbe circa Imie 6 male lervita.do- S, cha a " e n r J e n c ^ uln i. & ^ <* Jpnai. ann . apprenoit qu il cut parle mal f p fans ^ ]e ref ^ , uf Ctensb , fna cbe poteva atficurarfi ^ to it dfr, F lie le feroit traittercommc? cbe fcmpre JaprMe compenfar i il le meriteroit en quelque lieu que ce gfttantbltomini , cajllgar J far fan fut. La-deOiis il fe mit encore a genou //, e cbe le el la bavcffe mat fapu- & pouflant de nouveaux foupirs il lui dlt > a et0ltfon tres-humble fervi- hjarebbe ir attar net modo cbe Epou f e jui ditj ^^ lui - merit arebbe in qualunque Ittogo ge 'e de la peine qu'elle avoit prife de fijoffc. Si poje Cgli di nuovo in la-fuivre de Bruxelles a ^o?;;?, & que gmoccblo 5 e di nouvo. piane^endo fi e " e s'etoit melee de dire quelque F// ^, ^V;v/ // /ao bum'inffimo ^v S^^. 110 " 10 " P as le re ^n"r lervitnre p o 7; tirthhe tterna- P uif q u ell e etoit femme. Us fortirent yautre wz//. 5wr7 J/^^y?^ / riw/tf temenc de s . K M> qui ne verjo Madam* della Cue va , e gli entendre leurs juftifications* dijje ctfa lei era obligatadelmcom- modo cbe fierapreja 5 dife^uitarfa di Bruxelles a Roma , e cbcfe et/a ffjojp mefcolata in dir qualcbe cofa, non fabadava punto^ per cbe era Donna. Ufcirono in Con- tmente uno dtitro Faltro , dalla, fianza di fua Maefla quail non CHRISTINE REJNE DE SUEDE. 525 volfero afeoltare k kro giuftifi- cationi. 11 medejimo giorno la Regina inVid ttConte Fiene al Cardinale di Medici per dlrgll cbe come ?rottettorelcUa Corona di.,.- gna-, baveva voluto participar- g//' cbe potefle haver e fatto , ofaceffe per ravenire, e ' cV ella baverebbe rtoerito. il carrattere di Cardi- nale^ e ilpofto, cbe teneva in una Religione per la quak bave- va abandonata ogni eoja-^ il Car- dinak rijbofe al Conte di Fiene cV era fervitore della Regma^ t cbe Tavea Jcritto al Rt di Spa- gna. La Le meme jour, la Reine envoiale Comte Fiene au Cardinal de Medirit P" r lul dire commeauProtefteurde fe pairer> totlt ^ rheure . que Don Anttnio dclla Cueva etoit venu pour prendre conge d'EHe : qu'Elle le prwit d'ecrireau Roi d'Ffpagne&fe ] " i fairefavoir, quefi ktiiMlaCueva ? a ^ ic ? as eu ^T" 1 " d etr , e " n de fes Generaux,Elle luiauroitfaitdon- ner des de bacon . mai cec . te f eBte eonfideration I'en avoic em- pechee, & quant a ce qui regardoit fon Emiaence, Elle aurok toujours un grand refpeft pour la pourprequ'il P ortoir ' P r n .^Jt toutcequilpou- ^ Cardinal & le rang qu'il tenoit dans une Religion , pour Jaquelle Elle avoit abandonne routes chofes(*). LeCar- dinal repondit au Comte Fiene qu'it ctok ferviteurde la Reine, <& qu'il ecrirolt au (*) II fe pent pourtant que ChHjlitic ait t^moigrt^ quelque relfentiment centre ceCaY- dinal. Au moins en voft-on encore a la villa Medicis pres de Rente quelques marque? exte; .'cures p;r des coups de boulets c!e Canons que la Reine elle-mcme, demeurant a 1'autre bout de Ja ville, avoit tire's centre la grande porte de ce Palais, en s'amufant i cet exercice militaire (i). (.t) V- Is* Voiagcs d' Italic de Mr. d'UfierJaeh Mfc. Tom. II. p. 171 qui err pattern. V vv 5 2<5 M.EMO-IRES CONCERNANT L ' an La matina fequente , la Regi- Le lendemain matin la Reine en- I6s6 ' na mando il Signore de Lilien- voia le Sieur Lilliewrona a D. Antonio crona,* Don Antonio Pimentel- ^^ pour Je prjer de dire en fon 1 j ^ r brwnrln /? //tfY ;V? /rt tin- nom au DllC de Terninm , qu il par- h , /w />/ ^/ lo_a am mju ^ d , jle avec ]e refpea qui ]ui ^ du, qu'il ne dit rien qui put ofFenfer fes Domefliques , & que clepuis , que D. Antonio della Cueva n'etoit plus de fa Maifon , Elle n'avoit que des Gen- tilshommes braves & d'honneur & me al Duca di Terrantiova , cbe parla/e di lei col rijpetto dovu- togli) ne dkejfe niente chepotef- Je offender e i fuoi domeftici^ ecbe doppo , c]be Don Antonio della Cueva, mnera incafajua^ non baveva je no Gentilbuomini bra- vi , ed bonorati , e pronti a tejli- vwnlarglilo , Je non comport affe al carattere clfaveva prets a le lui temoigner, s'il ne fe comportoit pas d'une maniere con- venable a fon caraclere d'AmbaiTa- deur $Ejj>agrie. tore di Spagna. 11 glorno fegumte "Don AntO- Le jour apres D. Antonio Pimcntel nio Pimentelli cffendo , d fingen- e'tanc ou feignant d'etre indifpofe, fit do * di.efTere inthjpofio\ mando ,J jf ft ' * /A */ ' a dire alia Regina cbe V Duca di Terranuova non baveva mat par- Jato contro il rijpetto dovuto d fua Maefta , ne cbe meno baveva parlato contro i fuoi doimflid , e eft era fuo bumiliffimo Jervitore. Ai 22.dimaggio la Regina ando a vifitar il Papa 5 cbe ^Igior- no avanti era ritornato da Caf- tel Gondolfo, e gli diede conto di ciuanto era Juccejfo alP bora^ cbe Don Antonio della Cueva baveva prefo licenza da lei 3 e dido eft baveva fatto dire al Cardinal Medici , Ambafdatore di Spagna 3 e Don Antonio Pi- mentelli , afficuro pofciafuafan- dire a la Reine que le Due de n'avoit jamais parle contre le ^fle , ni contre qu'il etoit fon tres-humble ferviteur. 'A i fce 22 de Mai la Reine allarendre vifite au Pape , qui- la veille etoit re- venu du Caftel Gandolfo , & lui fit ra- de ce qui s'etoit pafle jufques-la que D. Antoi\io della Cueva avoit pris fon conge d'Eile & decequ'elle avoit fait dire au Cardinal Medicis , a 1' Am- bafladeur ftEfpaghe & a D. Antonio Pimentel Elle affura enfuite S. Sain- tete , qu'en toutes les chofes qui con- cernoient fa confgience , Elle n'en entreprendroitaucune fans dernander & fuivre* 1'avis de S. S. mais qu'EUe .,. is> j. ** i r , ut JUivic i avis u^ o. o. metis uu r>nc tit a cb in tutte le cofecorrenti croioic chacun dok avoir ? oinde allajua ton/cienza , el la non ne farebbe alcuna , fenza pigliar il Conflglio della fua jantita efeg- ma cbe credevaclf ogni uno fon CHRISTINE REINE DE SUEDE 527 dovefle pfgUare cur a at pro- fon propre honneur , & qu'elle avoit prio bonore , ed bavwafatto in fait en I'abfence de fa .Beatitude, ce WOTSU * Ecatitudine do queile avoi^juge-convenable- pot/r r / rr j j- a fa a j;*,+ a conierver le fierc. Le Pape repondic cbe bawffe gwdicato efpdiente quTJ i e avoit b}en . fait en^,^^ per conjervar il juo. 11 fapa r ap prouvoit entierement. Le jour rijpofe cbe "I tutto bavevajatto fuivant le Pape envoi'a le Cardinal de bene & intieramente P appro- Lugo pour faire entendre au Due de tvava Terranuova , que fon precede envers // \krno doppo il Papa mando ^Reine paroiflbit fort iM^i fa 7 r> j> 7 r T , , ?** I*, Beatitude .& qu il prenoic les ofFen- // Cardinal Ai Lugo, a far ^n- fcg , 6n ^ ^ g P ^ ^ /mM ^ ^ * Terranuo me fe ites ^ f a propre perfonae. va , <:ib^ a jua Beatttudme pare- va molto ftrano il fuo prvcedere"' 1 ; - vy& la Regina e cbe Toffefe, cbe fi facevano a qudla li pren- deva come J'e fuffero fatte alia fua perfona. ;; i * f . . - a ( rr M a A '*? Peut-etre que le chagrin qu'elle en eut ne contribua pas peu a la maladie , dont elle fut attaquee au mois d'Avril de cette memeannee, .& qu'on at- tribua a ce qu'elle mangeoit trop de fruit , qui lui avoit refroidi feftomac. Quoiqu'il en foit, le Pape eut tous les foins imaginables de fon retabliflb- rnent, qui s'enfiiivit aufli bientot apres, plus, peut-etre par la force defon temperament ^ que par 1'aide des Medecins (*). Au mois de Juin elle alia voir le Gapitole, oil elle fut reyueavecbeaticonp de' ceremonies: void I'infcription qu'on y ink a ce fujet fur un grand maj> bre & qu'on y voit encore aujourd'hui. ^ J J i \\\* - i^Jfe v<--v'<^ M-- '^r U"'A^K' I; "- '- /v^./Vvk'ii^vVv.N.^/A^ * '-, ,to* ^^\VAi f> \jdk~\i. ,- --V* M\^V> -. \"&'\ ,Vv, v. "* ^3 .^U*^*:- . C H R I & \ '/ \\ >H-V4 ' ' (*) Heinjius ^crivit alors aGronovins,q\ieLangermann lui marquoit: Holftenium orfaf/f drrbiepifcopatu Ravennati donatum a Papa. Auguftant noftram graviter Rom cegrotare j> e J u f r { ue valetudinem effe conclamatam fert rumor ^ AdduM alii, conntam Romania elabi , Jed nullo cum fuccejlu. Qiddquid Jit periit ilia pridem fibi et nolis. De regis.etiam morte ;, nil certi ba&enus aJ nos pcrfertur. Res Suecorwn projperas damnare Fortuna incepit, Inde /afitMw, ut Oratores Jint dimijft , quibus manum injecerant contra jus geitiium p Septentrionis fiiii. (i) ". (i; V. JBuraanni Syll. Epift. Tom, III. p, 3*^ MEMOIRES CONCERNANT CHRISTIN^E GOTHORUM SUECORUM ET VANDALORUM QUOD INSTINCTU DIVINITATIS CATHOLICAM FIDEM REGNO AVITO PRAFERENS POST ADORATA S, S. A POSTOLO RUM LIMINA ET SUBMISSAM VENERATIONEM ALEXANDRO VII. SUMMO RELISIONIS ANTISTITI EXHIBITAM D SB IPSA TRIUMPHANS IN CAPITOLIUM ASCENDERIT MAJESTATISQJJE ROMANCE MONUMENTA VETUSTIS IN RUDERIBUS ADMIRATA III. VlROS CONSVLARI POTESTATE ET SfiNATUM TECTO CAPITE CONSIDENTES REGIO HONORE FUERIT PROSECUTA VIII. EID. OUINCTIL, AN. MDCLVL S. P. Q. R. STEPHANO PETRUCCIO JOSEPHO DE ANNIBALDENSIBUS X DMNIS CASTRI ZAN CATI FABRITIO DE MAXIMIS EX DMNIS CASTRI ARSULI CONSERVATORIBUS JOANNE CAROLO DE PICCOLOMINIBUS EX DMNIS CASTRI BALZER ANI CAPITUM REGIONUM PRIORE (*) (a). Chnfl'me ecrivit dans le meme mois une lettre fort tendre a la belle Com- tefle Ebba Sparre que nous joignons ici : T Je je ferois heureufe s*il nfetoit permit He vous voir, Belle, ais je Juis condamnee du fort a vous aimer *p vous ejlimer toujoursjans vous vvir jamais; p cette envie que les aftres portent auxfelicitts humaines^ empecbe que je ne /bis entierement heureufe ^ puijque je ne la puts etre^ ttant eloignee de vous. Ne doutez pasde ettte verite 1 ) 3? crot'ez qu'en quelque lieu du monde que je me trou- ve-> vousy avez une perjonne quivous eft entierement acquije^ com- me je Tai toujours tte. Mah eft-il poffible 3 Belle , que vous vous fouvenlez encore de moi ? POUS fuis-je encore auffi mrt que je vous rttoisautrefois? Ne me fuis-je pas trompee, lorjque je me Juis per '- fua- (a) V. Ncmeitz Infer. Jingul. pag. 202. & Its fringes els Keifier 7". //. p. 73. (*) Capita Regionum font !es Chefs des XIV. quartiers dans lefquets la ville de ROH& e"toit pauag'e. Dion libr. 55. fait aufll mention que Rente e"toit partag^e in quatuor- Regioncs. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 529 fuadee que 'fetois la performs du monde que vousaimiez Jeplus? Ha, ft cela eft, neme detrompez pas: laijjez-moi pJutot man erreur, 5? ne tjfenviez point lafelicite imaginaire que me donne T opinion d'etre cberie de la plus amiable perjonne du monde. Confer vez- moi 5 s^il Je peut 3 ce Men , fep ne Jouffrez pas que le terns ni Vabjence me privent de la fatisfaftion d'etre aimee de vous , &? cro'iez que quoi- qtfil puijje arriver, je ne cefferai d^tre a vous. Adieu , Belle, adieu. Je vous embrajje un million defois. CHRISTINE ALESSANDRE. Le Lecteur remarquera fans doute dans cette lettre , quelque chofe qui fait juger que Chrifline n'etoit pas alors fi contente, ni fi heureufe, qu'elle s'imaginoit de 1'etre quand elle ecrivit 1'anne'e precedente deBruxeUesv, cette belle Comteffe. Une maladie contagieufe s'etant manifeftee a Rome, elle fervit au moins de pre'texte a la Reine pour s'en retirer. Mais il eft vraifemblable,qu'outrepo r ur fa " 1'envie qu'elle avoit de s'en eloigner a caufe des chagrins qu'elle v avoit eus, Fr<2w " & T *"* r> o /v i n jt-n t comment elle vouloit faire un tour en France & paiier de-la en Alkmagne, pour s ap- Eiie y eft procher de hSutde, & cela dans 1'intention de fe faire paier plus reguliere- resuc> ment les arre'rages des rentes viage'res qu'elle s'etoit referve'es en quktant la Couronne, mais qu'elle ne recevoit pas fi exa&ement a caufe de la guerre qui etoit alors entre la Su&de & la Pologne. Pour faire ce vo'iage , Chrifline fut obligee d'engager fes joi'aux pour dix mille Ducats. Le Pape , en lui donnant fa benediction, 1'invita a revenlr a Rome apres fon vo'iage (*). La Reine le lui promit & s'en alia a cheral a Civita Vecchla accompagnee de plufieurs Cardinaux & autres perfonnes de diftinftion. Elle s'embarqua fur une galere du Pape accompagnee de trois autres pour fa fuite & fon e- quipage. Sur mer on apper^ut quelques galeres Turques , qui ne s'enga- ge'rent pourtant pas. A Genes on ne voulftt pas permettre qu'elle mit pie a terre avec fon monde, a caufe de 1'endroit d'ou elle venoit, qu'on foup- gonnoit etre infecle de la pefte. Elle rejut en paflant de magnifiques pre- fens de cette Re'publique, dit Maram (a). Mais un autre auteur ne parle cue de Confitures , pour la valeur de cinq cent Couronnes d'or. A Mar- jeille on ne fit pas cette difficulte , quant a la Galere ou etoit la Reine. El- Je s'etoit pourvue d'avance d'un paffeport de la Cour de France , qui avoit choifi le Due de Guife pour aller au devant d'elle. On ne pouvoit pas fai- re (a) Efpion Turc T. IV. p. 153. fcp Theatr. Europ. ad b. arm. p. 895. (*) Marana dit: au fujet de ce vo'iage de Cbrifline (i), qu'un pen avant fon depart de Rome, les Efpagnols avoient form6 le deflein de fe faifir de fa perfonne & de celle du Pape , d'e"gorger rAinbaflfadeur de Portugal & de mettre le feu a la ville. Mais que la confpiration avoit tte de"couverte & les Confpirateurs arrete"s. . .. (0 Efp: Turc T. IV. pag. 154. Tome L X x x 53* MEMOIRES CONCERNANT L'an. re un choix plus judicieux , die Boyle (a) , car jamais homme ne fut plus propre que lui pour de femblables commilfions & pour toutes les chofes oil ilfaloit de la pompe&de la magnificence. Chriftine ne fut pas moins ravie, a ce que diiFerrault(b) 9 du choix qu'avok fait le Cardinal Grimaldi, Arche- veque d'Aix du Sr. dllerb'elot, fi univerfellement favant & par confdquentj fi capable de 1'entretenir felon fon goCit & Ton genie. Le Roi de France avoit ordonne qu'elle fut regue partout avec les hon-- neurs dus a fon rang, & comme fi c'etoit lui-meme (*). On ne manqua pas de le faire , & par toutes les villes, qu'elle traverfoit, elle fut haran^ gue'e & traitee magnifiquement. Plufieurs de ces harangues fe trouv r ent dans un recueil imprime (c). On raconte a cette occafion , que Chriftme paflant par Ftenne en Daupfiint ,.]es principaux de la ville avoient prie le Siv BoiJJat, qui lui etoit connu par fes poefies , de marcher a leur tete pour lui faire compliment : & que s'etant prefente devant elle , il lui avoit fait un fermon pathetique fur les jugemens de Dieu & fur le mepris du monde. Chriftine, dit le Sr. tf Olivet (d) , rentree depuis peu dans le fein de 1'Eglife Catholique , mais toujours femme & Princefle , fouffrit impatiemment y qu'au lieu de lui donner des louanges, 1'Orateur fe jettat fur une matiere fi lugubre. Quand il fe fut retire ce n'eft point-la, dit-elle, ce BoiJJat que je connois : c'eft un precheur qui emprunte fon nom : apres qnoi, tout le terns qu'elle fut a Flenne f . elle ne voulut pas le revoir (f). Ce fut an mois d'Aoftt 1656. que la Reine traverfa pour la premiere fois une partie de la France. Le Sr. Marana dit (e) , que les clefs des villes r par lefquelles elle pafTa, lui furent prefentees (car c'ecoit 1'ordre duRoi) & quand elle entroit dans une ville , & qu'elle recevoit les complimens du- Gouverneur , des Prelats , & d'autres perfonnes d'autorite , cela fe faifoit fous un Daix de parade qu'on portoit fur fa tete. De Marfeille elle paffa par Aix, Montelimart, Orgon, Avignon y & Lion; elle refla neuf jours dans cette derniere ville. De Mafcon , elle arriva le 27 d'Aout a Dijon, & SAuxerey le 4 Septembre a Fontainebleau (jj. Ce (a) Dans fon Dift. art. Guife lit. E. deffus. (fc) Hommes illufires T. IL p. 155. item (d) Hiftoire de V4cad. Fran^. p.. 92, 93, Reyfe van Chriftine p. 39. fcff. & Mem, de Niceron T. XllI, p. 390. (c) Nouv. Recueil de harangues citt ci- ( tant pour faire -connoitre la perfonne dont elle parle , que celle meme, qui ? parle. Ai'ant eu , dit-elle , quoiqu'exilee , ia permiilion du Roi d'aller a faluer la Reine de Suede , je me rendis a EJJbne Elle etoit chez An* * e film pour y voir un baiet j'avois tant oui parler de la maniere bizar- re de fon habillement, que je mourrois de peur de rire , lorfque je la ver- rois. Comme on cria gare, & que Ton me fit place, je I'appercus ; elle me furprit , & ce ne fut pas d'une maniere a me faire rire. Eile avoic une Juppe grife avec des dentelles d'or & d'argent , un jufte-au-corps de Camelot, couleur de feu avec des dentelles de meme que la Juppe , au col un mouchoir de point de 'Genes , noue avec un ruban de couleur de feu , une peruque blonde & derriere un rond , comme les femmes en portent & un chapeau avec des plumes noires qu'elle tenoit, Elle eft 5 , bianche , a les yeux bleux , dans des momens elle les a doux , & dans _,, d'autres fort rudes , la bouche aiTez agreable , quoique grande , les dents belles, le nez grand & acquilin : elle eft fort petite, fon jufte-au-corps cache fa mauvaife taille: a tout prendre, elle me parut un joii petit gar- 5 on * Quand je lui prefentai le Comte de Bcthune, elie lui parla de fes manufcrits. Elle etoit bien aife de lui fuire paroitre qu'elle connoiflbic .,, tout le monde & qu'elle en favoit des nouvelles. Apres ce balet Nous allames a la Comedie. La elle me furprit; pour louer les endroits qui lui plaifoient , elle juroit Dieu (*), fe couchoit dans fa chaife , jettoit fes jambes d'un cote & d'autre , & faifoit des poftures peu decentes (|), Elle (a) Tom. HI. pag. 148. 153- re t^, enforte qu'il y a apparence, qu'en comparaifon des honneurs qu'on lui prpa- ici, elle n'en recevra nulle part de pareils. QJI die qu'elle veut s'embarquer z Calais pour paffer en Hollands ou A Bremen (i) (*) C'eft Mad. de Montpenjier, qui dit ici que Cbriftine juroit: inais dans un autre s; portrait qu'une autre Dame fit de cette Reine durant fon fejour en France &quiferaall^- j luo it gu^ ci-apres, il eft dit expreff^ment qu'elle ne 1'avoit point oui jurer, & qu'elle fequi elle en ,, perfuadoit, que ce qu'on en difoit, e"toit une impofture de fes enneinis". Ces deux et|t =&- Dames fe contredifent done 1'une 1'autre: mais fuppof^ que Pimputation foit vra'ie , on vat>le- remarquera ce que dit la-deffus Mr. Cbarpentier (2) que c^toit Pierre Bourdelot, Doc- teur en Medecine qui avoit appris a la Reine de Suede & jurer, parce qu'il pafToit pour un des meilleurs jureiws de fon terns. C'eft done a ce mt^chant homme a qui il enfaut attribuer la caufe, fi elle avoit ce deTaut. (f) Mad. de Motteville critique aufli ces gefles de Cbriftine (3). Si elle vivoit encore elle n'en feroit peut-e'tre pas fi choque"e, puifqu'ils font fi confonues aux maniercs de vivre des Francois & des Franfoijes d'aujourdhui. Mais ni 1'une ni 1'autre ne dit rien du bon mot de Cbriftine que Mr. Menage nous a conferv (4). Lorfque la Reine dc Suede vint a Fontainebleau, plufieurs Dames de la Cour, en 1'allant faluer, s'avanc^rent pour r?nf la bailer. Elle y trouva un peu a redire, toute fois fans en rien t^moigner, elle fe con- i' e baif tenta Dames (i) V. Mdm.de de IVln pag. 481, la Houjfcyt T. II. p. jjr. tranf^i {-3.) V. Carpentcriana pag. 51. (4) V. Men^iann T. I. p. \j6. cfr. it>I:etl elle trouva la Bourgeoifie de Paris fous les armes , au nombre de plus de quinze mille hommes , en cent trente deux Compagnies , fortis pour honnorer fon entree pompeufe en cette ville. Outre cette nombreufe ef- corte, le Sr. de Berlije Introducleur des AmbafTadeurs & des Princes etran- fsrs, dans un fort bel equipage , accompagnok auffi Sa Majefte Suedoife. lie etoit environnee de cinquante gardes du Corps , des Valets de pie du Roi & de plufieurs Officiers de fa Maifon. Le Marechal de FHdpital, Gou- verneur de Paris & le Prevot des Marchans , avec le Corps de ville , qui 1'attendoient a la porte St. A0w,defcendirentde cheval des qu'ils 1'apper- urent, & la faluerent (*). Comme la grande foule du peuple laiflbit au Marechal peu de loiflr & de repos pour faire fa harangue a la Reihe , il lui dit avec grace: Qu'encore que les affeftions & les devoirs des Hubi- tans de la ville de Paris duflent etre portes par fa bouche, il la fupplioit qu'elle f6 contentat alors de voir comment ils lui temoignoient leur zele eux-memes, par leur foule extraordinaire & leur defir ardent de la voir, & qu'il lui confirmeroit en un autre lieu ce qu'elle voi'oit de la joi'e pu- blique & du confentement general a lui rendre fervice & obeifTance" La-detfus le Marechaf^ Hldpital & le Prevot des Marchans lui prefen- terent le daix, qu'elle ne vouloit pas accepter. II fut porte devant elle par les quatre Echevins & fucceffivement par le corps des Marchans. Les trois cent Archers de la ville marcherent -fes premiers , puis les gardes du Gpuverneur , <& les Officiers du Corps de ville. Les fix corps des Marchans fuivoient , & apres eux venoient les Quarteniers & Confeillers de la ville , le Procureur du Roi , le Greffier , le Receveur , les Echevins , le Prevot . des Marchans & le Gouverneur qui precedoit immediatement la Reine. Le Due de Guife marchoit a cote , un peu au-deflbus d'Elle (f). Quand elle fut arrivee a Notre-Dame, le Chapitre la complimenta par la bouche du Doien , la conduifit au Choeur , ou 1'on chanta le Te Deum , & raccom- pagna enfuite jufqu'a la porte de 1'Eglife. En fortant elle monta dans une caleche decouverte & fe rendit au Louvre^ ou Ton avoit prepare fon loge- ment, dans rappartement-meme du Roi, orne des plus beaux meubles de la Couronne. En arrivant au Louvre , elle fut complimentee par la Marechale de I'Hopital , qui Tattendoit avec un grand nombre de Dames de la premiere distinction. Le foir \\Univerfite en corps la complimen- ta , le Re6leur portant la parole* Le lendemain elle recut les civilites du (*) Aitzema & un autre Auteur difent (i) ,, que la Reine avoit prie" ce Marechal de ,, remonter auffi-tot a cheval de crainte qu'il ne lui arrivat quelque inalheur , puifque les Aftrologues de Rome lui avoient pre"dit , qu'elle mourroic dans une grande aflein- bl^e de peuple ". (f) Cfela eft exprime" en pnrtie fur la Me"daille qui fut frappde a Paris fur cette eutrde de Cbriftine. Les paroles de la L^gende REGINA SUJECORUM IN UJRBE REGIE EX- (j) ditztma 1. c, fi Keyfc van CbriftinA p- 49. i Xxx t'an d u Qerge de France en corps par la bouche tidntoinf Godeau 1656. EXCEPT A fignifient. La Reine de Suede rtfue d Paris d'une magnificence RoJaif. L'togue marque la date MDCLVL 1723 in fol. en y fubftituant une autre, moins flateufe. qui repreTente le Roi de France en manteau recevant la Reine de Sutde avec ces mots : HOSPITALITAS AUGUSTA & dans l'e*xergue CHRISTINA SUECORUM REGINA IN GALLIA EXCEPTA MDCLVI. On a de la peine ^ deviner la raifon de cette duplicit^ & on voudroit que la devife du Mercurc & 1'infcription RERUMGESTARUM FIDES que cette Academic a adoptee pour fa Devife, n'en fouffrit point. Toutcfois avons-nous donn6 id la pre'mie're & la veritable M^daille. Parmi plufieurs autres infcriptions on lifok fur trois arcs de triomphe dreffe's alors (2^ i. CHBISTIN^ AUGUSTS Antique Gallorwn foederate N:mc now Religionis nexufanftius conjunfta : Regime regna largienti Jfygini doftrinarum Matrt Lutetia Paris. L. M. D. Littrarwn Prcefedi foni & doftte, 2. CHRISTINJB Suecorum Rtgince G, F. A. Heroines Linguis omnibus erudita , omnibus commendata , Maxima pcmpa &? Ordintm omnium confeHju Plaufuquf ingredienli. 3. CHRISTINA ALEXANDRJE Suecorum , Gotborwn & Fandalorwn Regime Catbolica, Gnftavi (0 V. Ifis M^daillw fut les ptinc. rfv^nemens c&. Bernard Nouv. dc la Rep- des Lettrcs ad ann, de Louis It Grand, p. 4} & ?}. item 6ruttn-Mar~ 1701 pag. 517. Jjl. 5J4- 537. tiniire Hift. de Louis XlV, T. II. p, }6j. item (i) Dans Palmt/tVUiava Sc Seldttiti 4.3* Eruslit, L(\f< ad ann. 1704. p. isy & 570, p. d^. CHRISTINE REINE DE StfEDE, $$5 de fence (*). Le m6me jour, apres la vifite de la Reine d'dngkttrrt, El- I/al * Je fut haranguee par Pempone de BeIMm, premier Preildent du Psrlementa }a tete des OfHciers de ce Corps en robes rouges , & de ceux de la Chambre des Comptes, de la Cour des Aides (f) & de J'Acad^mie Franfoife, aunorn de laquelle le eelebre Patru porta la parole par un beau diicours , que nousi' inferons ici (a) en ajoticant a 1'appendice la harangue que lui fie une Society c qui prennoit le titre d* Elite des plus beaux Efprits de Paris (b) , comme aufli v . i'A PP endv la demande en vers , que le drdle SAffmi fit a la Reine pour entrer en fa N - comedie en mufique, MA- (c) n fe trouve dans fes Oeuvres diverfes () V. It Trefor des Harangues faites aux ? 389-393. & dans le Re cucil des Harangues Rots, Rein?s, Princes &c,T. I. pag. de I'Acad. Frang. T. I. p. 78. &c. &e. Guftavi Parentis fortuna Mogna> fua virtute Majori. Quajuis venerat ioni fuit populis, cum arma f fceptra tra Orbi terrafum , cum eadem abjecit, Roma , quo Religionis ergo profe&a erat , redeunti venerati facrum iter Prues. J$dil. Ter felic em^ue adventum omni aiacritatis gewre Gratulati latitia Mon. P. P. Sur unautre ornement fe lifoit cette REGNAS IN CHAR1TATE JESU Qut fait allufion au changement de Religion de Cbrijline , done le nom en changeanfi les lettres de place, retourne naturellement a ce fens: CHRISTINA SUETIJE REG1&4 (*) C'etoit le mSme avec lequel Cbrijline avoit entretenu un commerce de !ettre?.comnlirnen Nous remarquerons auffi, qu'un Dofteur en Tbe'ologie fuivi deplufieursEccle'fiafUques,br<:f fair k barangua Cbrijline, en lui difant(l) je n'ennuierai pas VdtreMajefte* d'rni long difcours. &*&***. Je me contenterai de lui dire: Suecia te Cbrijlinam fecit: Roma Cbrijiiancati : faciat te Gallia Cbrijlianifflmam : ou comme un autre Ecrivain le marque : Suecia te Chrijlt&nam fecit : Roma Catbolicam : Gallia vero, Deo favente, Te Cbrijlianijfimam faciet: c. a. d. La Suede Vous a vu naitre Cbrijline. Rome Vous a rendu Cbretienne : Diea veuille que la France Vous faffe (Reine) Trss-Cbre'tienne. Surquoi Mr. Bafnage porte ce jugement (2) que quelque hardis que fuflent les projets & les defleins de cette Princefle, on a de la peine acroire, qu'elle ofat fe flater de plaire fans beaut^, & a fon age, a un Prince 3e dix huit ans. Mr. Kabler a emprnnt^ cette re'fle'xion de -Mr. BaJ'nage (3) , mais tl s'^gare en donnant ^ entendre que la Reine avoit fait ce fcnihait clle-meme. Mr. Ait- %ema, cit ci-deflus,"dit dans un autre endroit: que ce compliment a e'te' fait a Cbrijline $ fon paflage par Lion (4). (f) Toutes les harangues de part & d'autre, dont il eft fait mention ici, fe trouvent V. i imprim^es dans le nouveau Reeueil de Harangues cite ci-deffus (5^). Savoir de la part P a ' du C!erg(5 de France par Mr. VEv&que Godeau: de la ville de Paris: de la milice de Paris: de 1'Univerfite de Paris: de la Sorbonne;- des Cures de Paris: de plufieurs Pr/S.- tres: de la Chambre ds Comptes: de 1' Academic Frarfoije. Les r^ponfes que Clrijline fit aux harangues du Parlement de Paris & a la Cour des Aides, font auffi inf^re"fs dans ce Reeueil pag. 63. & 71. (i) V. ffouv. Ret. de Harangues p ^4. Altzt- (j) Muntz-Beluft T. XIII. p. 189. ma 1. c. Libr. XXX. p. 16;. & le Trifar de Ha- (4) L. c. L-br. XXXVII- y. ifij. rogues p. 457. (j; L. c. pjg. 25, jv- 44- -V J3-JJ- 64. 5c7^ ti> Annales de fall- i- c. 53 6 MEMOIRES CONCERNANT L'an MADAME, I65<5> - Si 1' Academic Frangotfe prend la hardiefle de faluer Votre Majefte , & de lui offrir fes refpefts tres-humbles , c'eft votre feule bonte qui 1'a pft rendre fi bardie. Cette lettre e'galement belle & obligeante , votre ta- bleau dont Vous 1'avez honore'e, font de fi hautes faveurs qu'elle a cru qu'en cette rencontre rien ne feroit moins pardonnable , qu'un ingrat, qu'un lache filence. En effet , quand nous penfons qu'une grande Reine n'a pas dedaigne de jetter les yeux fur nous , & de nous envo'ier des ex- tremites du Septentrion d'illuftre^ marques de fon eflime , nous ne pou- j, vons aujourdhui moins faire que d'adorer les divines mains qui nous ont fait tant de graces. ,, C'eft Madame , un devoir fi jufte , qui nous amene en ce lieu , ou, nous venons pour contempler Votre Majefle , & lui rendre ce culte re- ligieux que le monde entier doit a fa vertu. Et certainement , fi on confidere les actions de votre vie , on y trouvera je ne fai quoi de fi eleve , qu'il obfcurcit toute la gloire des Monarques les plus fameux. Ja- mais naiflance ne fut plus heureufe que la votje. II n'y a rien que de merveilleux en votre Perfonne facree. Tout votre regne n'eft qu'une fuite de triomphes & de fucces etonnans. La nature & la fortune Vous ont donne tout ce qu'elles ont de plus precieux. Toutefois , Madame , ce n'eft point-la le tre'for de votre coeur & marchant dans ce fender epi- neux ou on ne voit que les traces des He'ros , Vous avez cherche quel- 3 , que chofe de plus rare encore que tous les dons de la nature & delafor- tune. Votre Majefte a done pft dans fa plus tendre jeunefle , envirohne'e 5, de tout ce qui peut feduire 1'ame ou I'amollir , Elle a pu , dis-je , refifter an chant de Sirenes , & s'appliquer a 1'etude de la fagefTe. (^ue je trouve ,, de grandeur dans cette premiere demarche! Combien de Reines , mais combien de Rois comptera-t-on depuis la fondadon du monde, qui a'ient brule d'une ardeur fi noble ? Qu'une Princefle , pour congevoir un fi 9 ) beau feu, doit tre eclairee, qu'elle doit etre au-deffus de tous les vains faftes des Diademes ! Mais quelle rapidite', quel progres fi prodigieux! SoufFrez, Madame, que je le dife, fi ce n'eft pour votre gloire, que ce foit pourrornement de notre fiecle. La connoifTance des langues , ou nous confumons les jours & les nuits & le plus beau de notre age , n'a etc que le divertifle- ment de votre enfance. Les lettres humaines n'ont point de fruit, n'ont point de fleur que vos mains Roi'ales ri'ai'ent cueilli. II n'y a rien dans tout le cercle des faiences, que votre efprit fi vafte n'ait penetre. Vous avez fait ce que tres-peu d'hommes ont pu faire , ce que jamais fille ni :,, femme n'ofa tenter ; & tout cela prefqu'a 1'entree de votre vie , tout cela, Madame, au milieu des pompes de votre Cour,au milieu de tous les empechemens de la Roi'aute. Qu'on cherche , qu'on remue toute 1'hiftoire , qu'on fouille dans toute 1'antiquite : on ne trouvera rien de femblable: on ne trouvera ni cette afliduite , ni cette vigueur d'efprit, ,, & moins encore cet amour de la vertu , que rien ne peut ni lafler ni vaincre. Voila, Madame, voila cet or tout divin , voila les rubis , les ,, diamans CHRISTINE REINE DE SUEDE. 537 diamans & les perles dont Vous faites tout votre trefor. C'eft de ces ri- L ' an cheffes immortelles que votre foif ne peut s'etancher : ce font les biens I6s< ^ que vos veilles , que vos travaux cherchent tous les jours & qui ont fait tout le bonheur de votre regne. ti 3, Vous avez , aux yeux de toute Y Europe, donne la paix a vosennemis, ,, & couronne par une fin fi triomphante & vos vi&oires & les viftoires du Grand Guftave. Le vulgaire pourra peut - etre s'en irnaginer d'autres caufes: mais a dire vrai, un evenement fi memorable, n'eft dti qu'a la force de vos Confeils. Ce n'eft ni 1'experience de vos Capitaines , ni la valeur de vos Soldats c'eft votre faglfle feule qui a donne de la ter- reur a 1'Aigle Romaine : c'eft cette invincible fermete : ce font toutes ces magnanimes habitudes que Vous Vous etes formees dans votre favant Cabinet. Ainfi , Madame , tandis que dans le fecret de ces retraites il- luminees , Votre Majefte confultoit les morts , & s'inftruifoit avec eux en la faience de regner, elle faifoit plus toute leule quenefaifoient tou* >, tes fes armees : elle achevoit en effet la guerre , & travailloit d'une ma- niere inouie a 1'exaltation de fon Trone , au falut & au repos de fes w peuples. Je ne dirai point combien Vous avez embelli votre Roi'aume , 3, apres 1'avoir fi glorieufement aggrandi. Je ne dirai point que Stockholm & la Suede ont change de face ; que 1'air , que Je Ciel y eft plus doux; & que Vous avez inlpire a vos fujets,a cette belliqueufe nation, i'amour des beaux Arts , & des connouTances honnetes. Toutes ces chofes font ,, grandes fans doute : mais qui ne fait , que toutes ces chofes font des fruits de ces belles heures fi utilement confumees , font des fruits de cet 3, arbre fi precieux , dont les racines font ameres a la verite , mais les bran- ches font toutes couvertes de pommes d ? or ? Cependant ce n'eft pas-la ,> tout ce que V. M. doit, elle-meme a la faience. ,. .Car enffn , Madame , c'eft cette divine fille du Ciel , qui a comme commence le grand ceuvre de votre fanftification. C'eft par fes lumie- 3, res que , foulant aux. pies toutes les grandeurs humaines , Vous etes fi heureufement venue a la fource des lumieres. C'eft dans cette voi'e que le faint-Efprit Vous a prife pour Vous conduire au Tabernacle, & a la ,, gloire du Saint des Saints. Une Princefle qui toute fa vie n'a travaille qu'a cultiver fa raifon , qu'a enrichir , qu'a purifier fon ame , meritoit, ,, fi je 1'ofe dire, que le Ciel s'ouvrit pour elle, & que la grace du Dieu vivant vint confacrer une vertu toute celefte. Quel vaifleau plus prd- ,, cieux, quelle fleur plus pure cm plus belle pouvok recevoir une eternelle rofee? Et la fplendeur duTres-Haut pouvoit-elle habiter un Temple plus magnifique, plus augufte? Heureufe la Suede fi elle regarde comme elle doit , un fpe6lacle qui a rejoui le Ciel & la Terre ! Heureufe, fi elle ecoute ,, le Pere des mifericordes , qui 1'appelle par la voi'e d'un fi grand exemple! Je finis, Madame , aulfi bien je crains d'abufer de votre bonte. Mais avant que de finir, fouffrez, s'il vous plait, que 1'Academie FranfOifelQ ,, plaigne ds fa fortune. Elle n'a rien fi ardemtncnt defire, que cette cele- brejournee; elle n'a rien tant foahaite , que de contempler cette divine ,, Princefle, done la vie toute pleine de mer veilles , fait tout rembellifTement Tome I. Yyy 3 , de 538 MEMOIRES CONCERN A NT L'an. de nos jours. EHeVous voit veritablement , elle Vous contemple. Mai$ r bon Dieu, que d'amertume parmi cette joi'e, quand eile penfe que dans un moment elle va perdre , & peut-etre pour jamais , votre adorable perfonne. Dans cette dure extremite , trouvez-bon , Madame , qu'elle Vous conjure de 1'aimer toujours, pardonnez ce mot a fon tranlport, a fa douleur. Elle ne Vous dira point que fes en fans fa vent donner Tim- mortalite aux actions heroi'ques ; que fes en fans , foit qu'ils parlent le. langage ou des hommes ou des Dieux , fe font entendre dans tous les Climats de 1'univers : en 1'e'tat ou fon malheur , qu'elle voit fl proche,, 1'a reduite, tout ce qui peut^a flater, 1'offenfe. Votre Majefte fe fou- viendra pourtant, s'il lui plait , qu'une Compagnie qui doit fanaiflance. a un triomphant Monarque , qui fut e'levee , qui fut nourrie , comme ,, dans le fein d'un illuftre Cardinal dont la memoire durera autant que les fiecles , qu'une Compagnie ft che're autrefois a ces grandes ames , n'eft. indigne , ni des penfe'es , ni peut-etre de 1'amour de 1'incomparable Chri- ftine. Cependant, Madame , votre tableau nous confolera , ft rien nous peut confoler dans notre infortune. Votre image en votre abfence fera. le plus cher objet de nos yeux : nous lui rendrons nos hommages , nos refpefts : nous lui ferons nos facrifices. Elle regnera a jamais dans nos aflemblees : & (1 les Mufes Franfoifes fe peuvent promettre quelque cho- fe de 1'equitable pofte'rite , la gloire de ce portrait paflera dans tout 1'avenir, & le fameux Palladium de viendra jalouxde votre augufle peia- ture" comma- Le lendcmain elle alia entendre la MefTe a N. D. ou elle communia par ^ S mams ^ e j'Archeveque de Bourges (*) & 1'apres-midi les autres Compa- gnies de la ville vinrent lui rendre leurs devoirs , aufli bien que le Nonce du Pape & les Ambafladeurs des Courts etrangeres. Le jour fuivant elle al- ia voir les Eglifes des Feuillans , de Sorbonne , des Jefultes de la rue St. An* toine, & rendit vifite au Chancelier de Francs , apres quoi elle partit pour aller trauver le Roi a Coinpiegne (f). Voici Delade- votion de v I'Append N. txxin. (*) Mad. de Montpenfier remarque (i): que Cbrifline alia communier i Notre-Damc , ou ceux qui !a virent , furent mal ddifi^s de fa devotion pour une nouvelle Catholique^ q u [ devoit etre encore dans le premier zele. Ellecaufa, dit-elle, tout Is tems de la MetTe avec des EvSques & fut toujours de bout. L'Eveque d 1 Amiens, qui la confeffa , m'a conti, que 1'Abb^ Camus Aum6nier du Roi, qui la fervoit, lui avoit demand^, a qui elle vouloit fe confeflfer. Elle lui dit, 4 un Eveque: choififlez m'en un. II alia querir Mr. d'dmiens. 11 ^toit dans fon. Cabinet avec fon bonnet quarre" & fon rochet- Elle y entra, & fe mit a genoux & le regarda toujours entre deux yeux: ce qui eftaflez extraordinaire. II faloit au moins un exte"rieur aufll penitent que le coeur pour appro- chcr de ce facrcment. Mr. d'd-mens dir, qu'elle fe confelHi fort bien & avec beaucoup dc- devotion, & qu'il fut plus ddiae" de fes fentimens que de fa mine. (t) Nous donnerons dans 1'Appendice une lettre de Mr. Gallois (2) for I'entr^e de la. Rei:ie a Paris, que Mr. le Comte de Brienns envo'ia dans ce tems-la a Mr. IVexioivus?- Gyllenjlolpe Profetreor d rUniverfit^ d'dbo. (t; Daiu fes Mem. 1. c . p. ics. (i) Tir^c de /"-//* s/vild. CHRISTINE RE1NE DE SUEDE. Voici ce qu'en difent Mad le . de Montpenfier & Mad. de Motteville (a). L ' a "- Nous vimes alors arriver a Compiegne la Heine de Suede , dont on avoit * 5 ' oui center tant de chofes extraordinaires. . . . Elie connoiflbit parfaite- Marion ment toute la Cour , elle n'ignoroit rien de toutes les grandes chofes & de toutes les petites. Elle dit en quelques occafions, qu'elle favoit qu'on avoit dit d'elle beaucoup de bien & de mal, & qu'on connoitroit, en la voi'ant, qu'il n'y avoit ni 1'un ni 1'autre. Elle ne diibit pas la verite: car Made - en effet on y trouva un melange de beaucoup de grandes vertus & de grands defauts* En arrivant an Louvre, elle demanda a boire. Prince de Conti, qui 1'etoit alle vifiter & recevoir , lui donna la ferviet-xlonsfurcet- . te, qu'elle prit apres quelques complimens repetes Elle trouva que teReine i n* > ' i ii u o i 1-1 i r>ii cette occa- la France etoit belle , ricne <& bien remplie de petiples. Elle voulut qu on fion. ,, crut que Rome 1'emportoit dans fon inclination & fon eftime fur Paris., & difoit que YItalie avoit de grands charmes : mais , a ce qui parut de- puis , les plaifirs de Paris ne lui deplurent pas , & je penfe , qu'elle au- 3 , roit volontiers quitte tout autre pai's pour le notre , fl elle avoit pti y demeurer. A ce premier abord , elle parut aimable a tous les honnetes gens. Son habit fl extravagant , a 1'entendre d'ecrire , ne 1'etoit point trop a le ,, voir, ou du moins on s'y accouturnoit facilement. Son vifage parut af- 3, fez beau, & chacun adrnira la vivacite de fon efprit , & les chofes par- ticulieres qu'elle favoit de la France. Elle connoiflbit non feulement les Maifons & leurs Armes, mais elle favoit les intrigues & les galanteries , 3 , & n'ignoroit pas-meme les noms de ceux qui aimoient la peinture ou la Mufique. Elle dit au Marquis de Sourdis les tableaux de prix qu'il avoit dans ion Cabinet , & favoit que le Due de Liancourt en avoit de fort beaux , jufques la meme qu'elle apprenoit aux Francois ce qu'ils ne fa- 3 , voient pas de leur Patrie. Elle difputa centre quelques-uns , qu'il y avok ', dans la Sainte Chapelle une agathe de grand prix , qu'elle voulut voir & ', qui enfin fe trouva a Saint Denis (*). Elle parut civile, particulierement ^ aux homrnes. Mais brufque & emportee , fans donner aucun fujet ef- fedlif de croire les mauvais contes qu'on avoit fait d'elle. 11s s'etoient 5 , repandus dans toute Y Europe a fon defavantage , & 1'avoient fait paffer dans 1'opinion de tous les fages, pour une perfonne qui ne 1'etoit gueres* No- ^o) V.fes Mtm. TOM. HI. p. 165. fr. & 435. fcf<% item Bruzen de Martini^re /. t. ceux de Mad. de Mottev. 2'. IP. p. 429. p. 365. fc. (*) Cette agathe & une onyx de la Ste. Chapelle s'y trouvent encore, & le Fere Montfaucon en a fait une ample defcription (i) en en donnant la jufte figure. Elle a pr^s d'un pie dans fa plus grande longueur. L'ignorance de ces terns 1'avoit pris pour une hiltoire fainte & on 1'appelloit le Triompbe^de Jofepb, au lieu de V^potheofe d'Augufle qu'elle rcprefente. En la premiere cjualit^ on les baifoit tous les ans en certains jours d"e 1'ann^e. (t) Dans fes Antiquitc's expliquc'es T. V. T. I. p. ij-i-ifo, &dansle Suppleipent T, I.Pil. . Yyy 2 540 MEMOIRES CONCERNANT t*an. ,, r Notre Amazone Suedoife gngna tous les coeurs a Paris , qu'elle aurok peut - etre perdus bientot apres , fi elle y fut demeuree plus longtems. Apres y avoir vfl tout ce qu'elle crut digne de fa curiofite , cite quitta cette grande ville , ou elle avoit toujours etc environnee d'une furieufe prefle, pour venir voir Leurs Majeftes a Compiegne, Elle y fut recue non feulement en Reine , mais en Reine bien-aimee du Miniftre. Le Cardinal Mazarin partit le meme jour de Compiegne pour etre a Chantil* 1y , quand elle y arriveroit pour y diner. Deux heures apres ce repas, le Roi & Monfieur y arriverent comme des particuliers. Le Roi entra 3 , par une porte , qui etoit au coin du Baluftre du lit , & fe montra avec 9> toute la foule , qui etoit autour d'Elle & du Cardinal. Auflitot qu'ils furent apper^us par lui, il les prefenta a la Reine de Su&de , & lui dit,. que c'etoit deux Gentilshommes des plus qualifies de la France (*). Elle les connut en les regardant pour avoir vd leurs portraits au Louvre 9 & lui repondit , qu'elle le croioit ainfi , & qu'ils paroiflbient etre nes pour porter des Couronnes* Le Cardinal Mazarin lui repondit , qu'il voi'oit bien qu'il etoit difficile a la tromper, & qu'il etoit vrai que c'etoit le Roi & Monfieur. Le Roi lui dit de bonne grace , qu'il etoit fache de ce qu'el- le avoit ete fi mal re5ue dans fes Etats , qu'il n'avoit pas manque de donner fes ordres pour la traiter felon ce qui lui etoit dCi;mais que fave- j, nue fi precipitee avoit empeche ceux a qui il les avoit donnes, de luiren- dre le refpe6t qu'il avoit defire de lui faire rendre. Elle repartit a ces ci- vilites avec reconnoiflance de ce qu'on avoit fait pour elle , & ne man- qua pas d'exagerer en de beaux terrnes, h fatisfaftion qu'elle avoit recue en France. LeRoi, quoique timide en ce tems-la , & nullementfavant, ,., s'accommoda fi bien avec cette Princefle bardie, favante, & fiere, que des ce premier inftant , ils demeurerent- enfemble avec liberte & agre- ment , de part & d'autre. Apres cette conversion il la quitta, & revint trouver la Reine, qui le lendemain alia la recevoir , accompagnee du Roi & de toute la fuite Roiale. Ce fut a trois lieues de Compiegne, au Fayet Maifon appartenant au Marechal de la Mot t e - Houdencourt , ou fe fit cette celebre entrevue. r , Les Chevaux - Legers , les Gendarmes , & les Gardes alloient devant le Carofle de Leurs Majefles par gros Efquadrons, & comme ils etoient pares, cet accompagnement etoit veritablement Roi'al. II y avoit avec le Roi & la Reine , Monfieur , Frere unique du Roi , Madame la Com- ,, teiTe de Lorraine, Madame de Mercosur & Madame la Comtefle du Fkx 9 Jr Dame d'honneur de la Reine. Quand la Reine fut arrivee, elle nevou- ^ (*) Madle. de Mor.tpenjier ajoute (i) ,, qu'ils lui baiterent la robe: que Cbrijline les relcva, les baifa & dit: ils font de bonne Maifon & elle les entretint. Elle appel- . la le Roi, mon Frere & Monfieur aufli , lefquels apres avoir fait leurviliie rent toute la nuit au galop a Compiegns. (j) L. c. pag. i$? a la Reine faJVlere, qu'elle eut tort d'avoir cede chez elle a cette Reine, & a celle de Pologne, vu la grandeur de fa naiflance & le haut rang que " lui donnoit la Couronne de France (*). J'etois une de celles qui me trou- vai le plus pres de ces deux Ro'iales Perfonnes, & quoique les defcrip- ,, tions fi particulieres , que Ton avoit faites de la Reine de Suede, me 1'euilent figuree dans mon imagination , j'avoue neanmoin? que d'abord ,, fa vile me furprit. Les cheveux de fa peruque etoient ce jour-!a defrifes, le vent en defcendant de carofle les enleva & comme Je peu de foin qu'elle avoit de fon teint lui en faifoit perdre la blancheur, elle me parut d'abord comme une Egyptienne devergondee , qui par hazard ne feroit pas trop brune. En regardant cette Princefle, tout ce qui dans cet in- ftant remplit mes yeux,me parut extraordinairement etrange,&plusca- pable d'effraier que de plaire. Son habit etoit compofe d'un petit corps qui avoit a moitie la figure d'un Pourpoint d'homme, & 1'autre moitie, celle (*) Ce-ci n'eft pas 1'unlque preuve qu'a donne* Madame de Motteville de fa grande la l Reinc*<1e prevention en fayeur de fa nation. Mais plus elle parott pointilleufe fur le chapitre de France don- la Reine de Suede , plus elle decouvre combien peu elle e'toit inftruite en fait du c^r6- na le Pas fur menial des Cours & des Etats inde'pendans : elle qui vivoit pourtant fi pres du terns que -elle a Chn- ces fortes de ce're'monies furent debattues& re'gleesct qui n'aura pas ignor6 l'hifloirede la prevention mal fonde'e de Mr. de Cbarnaze (i), Ambafladeur de France qui pre"tendoit .... pour fon Roi le pas fur Guftave-4dolpbe. Nous avons rapport^ cette hiftoire ci-deffus & paz.^u^ ^c nous a J uterons ' c i > 9 ue depuis ce terns-la les Couronnes de Suede & dc France fe font **7. not. *" trait^ r^ciproquement al part. Nous ajouterons encore , que ce ne fut que longtems apres que les Rois de Suede & de Dannemarck donnerent le titre de Majeft^ au Roi de France* Car on trouve que le Roi Cbarles-Cnflave & la Reine-Mere R^gnante de Suede donn^- rent encore 1'an 1654 & 1661. a Louis XIV. le titre de SerenM (2). II ne paroit done pas cro'iable que Louis XIV. ait pu reprocher a la Reine fa Mere d'avoir oSde' le Pas , chez elle, i la Reine Cbrijline. Qui elfc-ce qui ignore que le rang entre les Tetes Cou- ronn^es eft encore inde"cis ? Les Proteftans riroicnt fi les Catholiques s'en rapportoient au Pape, comme au Jugc compe"tant comme ils rient encore aujourd'hui du partageque Je St. Pere fit des Pa'is & des Mers des Indes entre les Rois Catholiques-Romains. C'eft auffi en vain que Mad. de Motteville fait entrevoir ici la grande naiflance de fa Reine. Les Maifons de Wafa & de Brandebourg ne cedent en rien a celles de Navarre & d'Efpa- gne, & tout le monde fait 1'origine de la Maifon de Medicis. C'eft a cet ^gard, que 1'Auteur, qui dcrivit ^ Mr. Bayle au fujet du rang, qui appartenoit a Cbriftine parmi Jes autres Reines, avoit raifon de dire (3), qu'elle n'avoit point d'e^ale, parce que les. autres Reines, a proprement parler , ne font que les premieres fujettes de leurs man's ou de leurs Fils, mais que la grande Cbrijline e'toit Reine d'une maniere fi noble & fi relevt^e qu'elle ne connoiflbit que Dieu au-defllis d'Elle. Jl auroit done ete peupoli, fi la Reine de France , qui n'avoit e'te' que Reine Regente (4) & jamais Reine Regnante comme Cbrijline, & qui avoit okte le pas a la Reine de Pologne, laqtielle etoit ne'e fa fujette ; eut feulement voulu tenter de prendre chez elle le Pas fur Cbrijline. ' On laifle le haut bout chez foi aux Grangers meme inf^rieurs , a plus forte raifon a fes 5gaux & c'eft tout au plus fi la Reine de France e'toit e"gale a Cbriftine. (i) V. tlu. Mont Corps Diploirat. T. V. P. II. Caroli-GuJlavl Libr. V. $. ij. cfr. ibidem Libr. p- 615- & Vittor. Siri Mem. Recoml. T. VIII. p. I. $. 45. ip3' cfr. Afeiern afta P. W. T. I. p. 413. (3 ) V. des Maiztaux vie de Bayle pag. XLI. (z) V la lettte de Recreance pour leSr. Picqxes cfr. Wagerfeil hift. Univ. p. 824- & 815. ent a hater fon depart. A la Cour on n'aime pas les Gens qui entrant en matie"re fans qu'on les en prie Larrcy die nour- tant que cenefut pas fans peine qu'on perfuada le Roiamoureux de cette Mancini Niece, du Cardinal Mazarin,de renonccr a" fa paflion pour epoufer 1'Jnfante (i) L C pag. I 544 MEMOIRESCONCERNANT An fortir de-la ,.le. Roi, les Reines, Monfieur & le Cardinal Mazarln , 1 5 ' fe mirent dans le carotfe de la Reine, avec le refte de la Compagnie, que j'ai nominee, & la converfation y fut agreable. Quand la Reine fut arrivee a Compicgne, apres avoir conduit fon HotefTe dans Ton apparte- ment, elle nous fit 1'honneur de nous dire, qu'elle etoit charmee de cette Reine, & nous .avoua que le premier quart d'heure, elle en avoit.ete effraiee comme les autres: mais qu'apres mvoir vue,& 1'avoir entendue. parler, cette furprife s'etoit changee en inclination. Elle nous dit, que cette PrincefTe, faifant femblant de vouloir voir le Portrait du Roi & de Monfieur, que la Reine portoit au bras, elle lui avoit fait oter fon gant & qu'elle lui avoit dit les chofesdumondelesplus ,, jolies fur la beaute de fes mains , la.Jouant de les avoir fu louer fans 1'embarafTer. Auffi-tot (jue la Reine de Sutde fe fut un peu repofee dans fa chambre , elle vint faire vifite a la Reine , d'ou on la mena a la Co- j, medie Italienne. Elle la trouva fort mauvaife & le dit librement. On ,, 1'aflura que les Comediens avoient accoutume de mieux faire. Elle re- pondit froidement , qu'elle n'en doutoit pas , puifqu'on les gardoit. A- pres cela , on la mena dans fa chambre , ou elle fut fervie par les Offi- ,, ciers du Roi. II falut qu'on lui donnat jufqu'a des valets de chambre pour la fervir & pour la deshabiller , car elle etoit feule. Elle n'avoit ni Dames, ni Officiers , ni Equipage, ni argent. Elle compofoic elle feule toute fa Cour. Chanut qui avoit etc Refident pendant fon Regne, etoit aupres d'elle, & deux ou trois hommes malbatis ; a qui par hon- neur elle donnoit le nom de Comtes : on pourroit dire avec verite qu'el- le n'avoit perfonne , car outre ces mediocres Seigneurs , nous ne vimes que deux femmes qui reflembloient plOtot a des Revendeufes qu'a des JDames de quelque condition. Enfin, je ferois tentee, en faifant la de- fcription de cette Princefle , de la comparer aux Heroines des Amadis , dont les avantures etoient belles , dont le train etoit prefque pareil au ,, fien, & de qui la fierte avoit du rapport acelle qui paroiflbit en elle. Je penfe meme, vu fon equipage & fa pauvrete, qu'elle ne faifoit pas plus de repas que Marfife ou Bardamante, & qu'a moins d'arriver par hazard chez quelque grand Roi , comme le notre , elle ne faifoit pas fouvent bonne chaire. Le premier jour elle obferva de parler peu, ce qui paroiflbit marquer en elle de la difcretion. Le Comte de Nogent , felon fa coutume s'em- ,, preflant devant elle de dire des vieux contes , elle lui dit gravement, qu'il etoit fort heureux d'avoir beaucoup de memoire. Le Cardinal Ma- zar'm le lendemain 1'alla vifiter en Camail , & tous les Eveques la falue- rent en Cerdmonie. Ce jour elle parut avec un jufle-au-corps de Came- lot de couleur de feu & une Juppe grife, Tun & 1'autre chamares depaf- femens d'or & d'argent : fa peruque etoit frifee & poudree, fon teint, par le repos de la nuit , avoit quelque beaute, fes mains decraflees, & fi elle eut ete capable de fe foucier de louanges, je crois qu'on lui en au- roit pd donner en ce moment avec juftice, car elle parut a tons plusai- mable qu'elle ne le vouloit etre. Elle vint voir la Reine le matin , & CHRISTINEREINEDESUEDE. 545 la Reine lui rendit fa vifite auflitoc apres diner. La converfation y fut L '* n gai'e & dans plufieurs rencontres cette Reine e'trangere fit voir qu'elle e- 5<5 ' toit fpirituelle & de bonne Compagnie. Elle railla Je Chevalier de Gram." mont fur la paflion qu'il avoit alors pour Madame de Mercceur, & nel'e- pargna nullement fur le peu de reconnoifTance qu'il en pouvoit efperer. 3 , De-la elle fut a la chafle du fanglier ou ie Roi la convia d'aller. Elle lui avoit dit ne'anmoins , quand il lui propofa d'y a Her , qu'elle ne 1'aimoit point, parce qu'elle etoit perilleule, qu'elle ne pouvoit fouffrir qu'on s'expofat aquelque peril, que pour acquerirde la gioire. Le foir,a laCo- medie Franfoife , elle montra d'avoir Tame paflionee. Elle s'e'cria fou- 3, vent fur les beaux endroits , paroiflant lentir de la joi'e ou de la douleur , felon les diffe'rens fentimens qtii etoient exprime's par les vers qui fe re- citoient devant elle : puis , comme fi elle eut ete toute feule dans fon ca- binet , fe lailfant aller fur ]e dos de fa chaife , apres fes exclamations , elle demeura dans une reverie profonde. La Reine-meme ne Ten pou- voit tirer , quoique fouvent Elle voulut lui parler. Le jour , e'tant reti- ree avecquelques hommes de la Cour, entr'autres Cominges, qui n'e'toit 3, pas ignorant, ils parlerent de beaucoup de chofes, & enfuite de la fide'- 3, lite qu'on devoit aux Rois, & quelqu'un lui difant, que tons les horme- 3, tesgens en avoient; elle re'pondit, qu'en tous les pai's c'etoit vrai, mais qu'elie avoit remarque qu'en France ce n'e'toit pas un defaut d'y man- quer , & qu'il etoit commun parmi les perfonnes de me'rite & de qualite. 3, Enfin, cette journe'e lui attira beaucoup d'approbation , & chez la Rei- ,j ne, ce meme foir on ne parla que d'Elle. Plufieurs de nos rudes Rail- leurs avoient eu Je deflein de la tourner en ridicule , & d'accabler par-la ceux qui fi legerement 1'avoient encenfee , mais ils ne purent alors en trouver les moi'ens , foit par fon me'rite , ou par la hauteur qu'elle eut 3, pour eux , ou foit enfin , parce qu'elle fut foutenue par 1'eflime que le Miniflre temoigna d'en faire, & par la bonne reception du Roi & dela Reine. Le peu de terns qu'elle demeura a la Cour , lui fut favorable : 3, car fes defauts , qui etoient grands , furent offufques par les belles & brillantes qualites qui etoient en elle , & par le plaifir de la nouveaute j, qui eft d'un grand prix dans lecceurdes hommes. Nous luiverronsbientot perdre tous ces avantages : car , comme les Rois font expofes au public & que ce qu'ils ont de bon les rend ce'lebres , de meme leurs defauts fa- vent en peu de terns detruire ou diminuer leur reputation. ,3 Le 1 8 Septembre , les Reines furent a une Tragedie des Jefuites , dont ,, celle de Suede fe mocqua hardiment. Le lendemain le Roi lui donna un feflin Roi'al, qui fut, comme de tels repas ont accoutume d'etre, ou la profufion fatigue plus 1'efprit , qu'elie ne nourrit le corps. Peu apres cette incommode ce're'monie , il arriva un Courier , qui aprit au Roi & a la Reine la prife de Faience par le Due de Mercosur. La Reine e'tran- ,, ge're vint auflitot fe rejoui'r avec la notre, 'd'ime maniere fi libre, qu'ii fembloit qu'elle y prit une grande part. Elle trouva la Reine jouant aux cartes. Elles'affit aupres d'elle & s'appuiant nonchalemment fur la table, il parut qu'elle s'occupoit agre'ablement , a regarder les belles mains de Tome I. Zzz , la t' an ,, la Rcine. Elle les loua , & lui dit d'un air galant , qu'elle eftimeroit ,, fon voi'age de Rome en France bitn emplo'ie , quand elle n'auroit point ,, ea d'autre avantage que celui de voir en cela feulement la plus belle cho- ,, fe du monde. Nogent , qui parloit toujours , voulut lui dire , qu'on avoit remarquc ,, dans I'Hiftoire, qu'il y avoit cent ans que Valenciennes & faience avoient ete ailieges par les Francois , que Tune n'avoit pu etre prife , & que 1'autre 1'avoit ete : apres 1'avoir ecoute , elle fouhaita , que dans ce me- me terme les memes perfonnes en puflent faire autant , & fe tournanc vers Nogent, lui dit : Et que vous, Monfieur de Nogent y eufliez encore ,, votre Cazaque feuille morte & fiifiez les memes contes que vous faites a ,, prefent ; car , a vous dire le vrai , j'aimerois mieux les entendre dans ,, cent ans d'ici, qu'a cette heure. Ce qui fit qu'elle le poufla toujours de ,, meme force, fut, qu'on lui avoit dit, qu'il 1'avoit voulu meler dans fes railleries. Le lendemain le Pere Arnaut, ConfefTeur du Roi, fut parler a la Rei j, ne de Suede ,, fur quelques plaintes qu'elle avoit faites fur leur Ordre- L'une etoit que le Pere General des Jefukes ne 1'avoit point ete falqer & " Rome: je ne me fouviens pas des autres. Apres les excufes que lui fie le Reverend Pere, elle lui dit d'un ton mocqueur & avec cette brufque ,, maniere qui lui ecoit naturelle , qu'elle leroit fache'e de les avoir pour ,, ennemis , fachanr leurs forces , & qu'elle choifiroit plutot d'avoir que- ,, relle avec un Prince fouverain , qu'avec eux : que par cette raifon elle ,, vouioic bien etre fatisfaite : mais qu'elle 1'afluroit , qu'en'cas de Confef- fion & de'i'ragedie,e!le ne les choifiroit jamais : voulant leur reprocher par-la, qu'ils etoient accufes d'avoir une morale trop indulgente, & fe ,, mocquer de la mauvaife Tragedie, ou elle avoit ete le jour precedent: melant aufTi le burlefque avec le ferieux , afin de fe venger de 1'ofFeafe 3J qu'elle croioit avoir re5u de leur Compagnie (*)-. Cette Princefle Gothique temoignoit eftimer 1'efprit & la capacite da ,, Cardinal, & lui de meme paroiflbit avoir beaucoup de veneration pour elle. Son exterieur , a qui en eut voulu juger a fon defavantage, etoit digne de rifee,& de mocquerie: quafi toutes fes a6tions avoient quelque chofe d'extravagant , & on pouvoit avec juflice la blamer , comme on pouvoit avec fujet la louer extremement. Elle ne reffembloit en rien a une femme : Elle n'en avoit pas meme la modeftie neceflaire : Elle fe faifoit fervir par des hommes dans Jes heures les plus particulieres : Elle afFtftoit de paroitre homme en toutes fes a6lions (f). Elle rioit deme- fu- (*) Mail, de Montpenfier parle de meme de la bonne fa<;on dont la Rcine fe mocqua de cette trag(5die des JeTuhes (i)'. (t) A ce que rap^orte Mad. la Comtefle d'^wnoy (2) La Heine Cbriftinc difoit ordi- naircment: qu'elle n'aimoit pas les homines parce qu'ils Etoient homines , mais qu'elle les aimoit, parce qu'ils n'5totcnt pas fcnimcs. (; Daasfes Mscu 1. c. p. igg. (i) r>ans fon voiage d'&fpw 1 T< H- P- lz > CHRISTINE REINE DE SUED& S4.7 furement quand quelqtie chofe la touchoit, & particuUerement a la Co- ^' a j medie Italienne 9 iorfque par hazard les boufrbnneries en Etoient bonnes. _ 3y Elle eclatoit de meme en louanges & en foupirs, comme je 1'ai dejadic, quand les ferieufes lui plaifoient. Elle chantoit fouvent en Compagnie, elle revoit , & fa reverie alloit jufqu'a raflbupiilement. Elle paroiffok inegale, brufque & libertine en toutes fes paroles, tant fur la Religion, que fur les chofes a quoi la bienfeance de fon fexe 1'obligeoit d'etre rete- nue. Elle juroit le nom de Dieu (a), & fon libertinage s'etoit repandu de fon eiprit dans fes adlions. Elle pouvoit demeurer longtems dans la meme place. En prefence du Roi , de la Reine & de toute la Cour , Elle appuioit les jambes fur des lieges auffi hauts, que celui ou elle etoit . affife & les laiifoit voir trop librement. Elle faifoit profeflion de meprifer toutes les femmes , a caufe de leur ignorance, & prcnoit plaifir de converfer avec les hommes , furies . mauvaifes matieres, de meme que fur les bonnes. Elle n'obfervoit nul- le regie de toutes celles que les Rois ont accoutume de garder , a Tegard du refpe6l .qu'on leur porte. Ses deux femmes , toutes hideufes & mife- rabies qu'elles etoient, fe couchoient fur fon lit familierement & faifoient avec elle a moitie de tout 3es Dames Tom. II. p. Z4i- (3) D.ins les lettres choifi's pat Ma.rcha.ni du 29. Oft. \6'j6 Sc du 3." Janvier 165*7. pag. 5:2, & J2J. C+) Le ComtefTe de Soi/J/ms ceda fon Ainant ^a Madame par un tranfport dans les formes, dlt Burmt dans fes Mem. T. I. pag. 6^- (<;) V. le Recueildes pieces gal. de cette Com.- tefli c de celles de Ptltftn T. JV. pag. i. CHRISTINE REINE DE SUEDE. 549 ;, caufe , par les louanges qu'ils donnerent a cette Courtifanne de notre WMra*> De-la cette Amazone Suedolfe prit des Carofles de louages que le Roi lui fit donner, & de 1'argent pour les pouvoir pai'er. Elle s'en alia fui- vie feulement de fa chetive troupe, fans train, fans grandeur, fans lit, fans vaiflelle d'argent ni aucune marque Roiale (*)". On snfe'es, qu'il n'en vienne quelqu'une de favorable jufqu'4 nous. Ce que^ fuis aflu < jee que Votre Majeft ne nous pourroit refufer, fi elle favoit combien fa perfonne m'eft devenue une chofe che're. Ce mot eft tin peu libre, mais j'en efpe"re le par- ' don , puifque tout le devoir ne vaut pas une faute qui s'eft faite par tendrefle , & celle que j'ai pour Votre Majefte" e"tant fi grande, qu'elle me rend capable de tout, s , hors de pouvoir fupporter fon oubli avec patience. (*) C'eft prefque fur le meme ton que s'en explique Madle de Montpenjier (i) a. qui, de meine qu'a Mad. de Motteville , la Reine Cbriftine n'avoit pas eu 1'honneur de plaire autant qu'au Roi Louis XIV. a la Reine Mere de France , au premier Miniftre & d tant d'autres perfonnes des plus diftingue"es par leur rang & par leur me"rite. Comme ce qui choque le plus ici ces deux Dames d 1'^gard de Cbriftine , c'eft le deTaut d'un train Roi'al, fa chetive fuite , fon manque d'argent , & chofes femblables ; nous ne faurions pafler cela fans remarquer: qu'a la ve'rite' , cette Reine, malgre" le peu de cas qu'elle faifoit de ce fafte exte"rieur, aura pourtant eu alors occafion de re"fle"chir plus d'une fois fur fone'tat preTent, en comparaifon de celui ou elle e"toit en Suede, environne*e d'un e"tat convena- ble a fa haute dignit^ & de fujets fideles qui la cht^rilFoient. Mais enfm ce terns ^toic palfe". Le pas ^toit fait. Elle devoit le foutenir de fon mieux. Mais d'un autre cot, il paroit peu fe"ant ^ ces Dames de rele'ver la chofe de cette maniere. L'Hiftoire de France fournit des e"xemples des Reines & des Princefles plus de*chues encore de leur premiere pompe. Le Cardinal de Retz rapporte de la PrincefTe , petite fille de Usury IV. qu'elle manqua d'un fa^ot pour fe lever en hiver dans le Louvre (2) On n'a qu'a fe fouvenir de I'tkat oil <5toit r^duite la Reine Marie de Medicif, Mere de Louis XI IT. Roi de France, &. des Reines d'^ngleterre & d'Efpagne. Cette PrinftiTe courut les pai's en e'xile'e par les caprices d'un premier Miniftre & de fujets peu fideles. Le Cardinal de Richelieu a bien tach de s'en laver, en proteftant vers la fin de fon teflament, (3) qu'il n'avoit jamais manqu au refpecl du a la Reine-Mere,non obftant les calomnies dontla- deffus on avoit voulu le noircir. Mais il a en cela contre lui des Hiftoriens dignes de foi. Mr. le Clerc par e'xemple dit (4) que la Reine- Mere e'crivoit en ce terns-la au Pre*- vot des Marchands de Paris ! qu'elle auroit recours au dehors & appelleroit toute la ,, ChretientsS au fecours de fon innocence... Ce ne fera pas, dit-elle, avec des armes: je n'y veux que des offices, mais fi puifTans, qu'il faudroit renoncer auxloix de la nature & de la juftice, fi je n'en viens a bout. . ." Dans le Manifefte du Prince Louis de Bourbon, pour la juftice des armes des Princes de la Paix, il eft dit entr'au- tres au fujet du Cardinal de Richelieu: que ceux qu'il s'eft imagine pouvoir arreter par quelque action de ge"n<::rofit 1'infolence de fon pouvoir, ont ^te mis entre les mains des Bourreaux , en fortant de celles des CommifTaires corrompus, ou font prifonniers, parce que leur courage eft redout^, ou font chaflez de la Cour, ou font emplo'i(:s dans Jes armies pour les faire p^rir, en foutenant la fortune de celui, qui ne s'en fert que pour s'en d^faire. 11 y en a aufll qu'il engage dans le fervice pour les ob'.iger a manger tout leur bien, afin qu'il ne refte rien de grand dans la France que la Maifonde Richelieu qui n'tkoit au commencement du credit, que le Cardinal acquit aupres dela Reinc-Mere, qu'un des plus petits Fiefs de Poitou. Toute {'Europe a eu horreur de la detenfion dc cette (i) Mi-m. 1. c pag. tfip. & 170. p. 24?. d) V. Mem. de Rctz T. 1. p. 226. (4) V. la vie du C?.rd At Riehdieu T. II. p. (ij du Mtr.t Corps Diplom. T. VI, Tart. I. 2. 3. Zzz q 55 o M M . O I R E S C O N C E R N A N T L ' nn On auroit tort de vouloir rcvoquer en doute le gros des recits que ces 5<5> deux Dames de Cour ont faits du premier ftijour de la Heine Chrljlme en ce que i' courir a propos des e'xercices, mais non pas les mettre en pratique: El- Je a neanmoins tire cet avantage de la genereufe & volontaire privation de fon opulence Roi'ale , qu'elle a montre & montre qu'ellc fait e'gale- ment bien pofleder les richefles, & s'empecher d'en etre pofledee. El- le fe dit etre de temperament melancolique , ce qu'elle perfuade mieux par fes ingenieufes & profondes meditations, que par la vivacite de fon teint vermeil , par fes cheveux chaftains clairs , & par fa converfation enjoude & ambulante. Elle eft fobre , ne mangeant quafi que des fruits , n'ufant gueres plus de viande & de poiflbn que fi un Pythagori- cien e'toit fon Maitre d'Hotel , & buvant non plus de vin que fi elle ve- noit d'abjurer fon He're'fie entre les mains du Muphti. Elle aime a par- ler & etre entretenue d'un ilile aigu , ferre & fuccint , qui dife en peu de mots beaucoup de bonnes chofes. Les livres, les excel'ens tableaux, 3y les ftatues antiques & modernes des bons Maitres , font les perles , les diamans & autres precieux bijoux de fon Cabinet ; & Ton pent dire a- vec verite' que la charge de Maitre de fa Garde-robe , eft la moins lu- crative & la plus inutile de faMaifon. Son affection pour le manage en general , eft egale a celle que le Pape Calixte cut pour celui des Ecclefia- ftiques. Ce que j'ai pft remarquer en fa Religion , c'eft qu'elle eft fore ,, eloigne'e de la fuperftition , fi detefte'e par les plus grands Chretiens & les ,, plus grands Philofophes. Elle admire ceux qui difputent de la The'olo- ,, gie avec opiniatrete , difant , que quand on eft une fois perfuade , il ,, faut demeurer dans un refpeft profond , & une entiere foumiffion pour ,, les points que les Papes ont de'cernes. Sa pfefence n'a point diminue ,, le bruit de fes bonnes qualites, au contraire elle 1'a augmente. La con- ,, noiffance des langues vives & mortes , le beau favoir , 1'urbanite , la ^, converfation rafinee , plus rare au Nord que les Elephans , la prompti- ,, tude des reparties, les termes exquis dans les langues Franpoife & Italien- ne, ont parfl abonder dans fes difcours ; Elle prononce la notre fans au- -cun terme ni accent provincial , ce qui eft fi rare qu'il n'y a que fort peu de Frartfois naturels exempts de quelque prononciation municipale. J'ai fouvent dit a la Reine notre Maitrelfe, qu'elle etoit la feule Perfon- ne que j'eufle etudiee , de qui je n'euffe jamais oui paroles ni accent qui ne fuflent dans la juftefle, & que je donnois 1'avantage de cette purete, qu'elle a par-deflus tous les autres, a ce que Sa Majefte n'avoit appris le Francois que dans la Cour , ou les termes & la prononciation font les plus chatie's. Mais la Reine de Suede en a pris la premiere inftitution a Stockholm , d'un Precepteur Lie'geois , qui avoit fidellement confer ve ,, la diftion & la prononciation de fa Patrie , qui 1'emporte fur toutes les 3, pernicieufes elocutions des provinces F'ahnes. Je ne lui ai point oui ,, parler d'autres : mais bien repondre tres-pertinemment f &montrer qu'el- le a 1'intelligence tres-complette. Elle evite fort foigneufement de pa- roitre favante , & j'ai opinion qu'elle a peur qu'on 1'ait depeinte pour une Pedante. Mais fon favoir & fa capacite paroiflent au travers des nuages , dont elle veut obfcurcir fes belles lumie'res : Par e'xemple quel- qu'un ai'ant nomme Homere & Virgile, elle ne put s'empecher de dauber (c'eft CHRISTINE REINE DE SUEDE. 553 (c'efl fon mot) fur les Heros de Tun & de J'autre , du premier , fur ce I/:m ,, qu'il fe confole incontinent avec fa flute ^ de la grande affliction qu'il a- _ voit d'avoir perdu fa LVJaitrelTe , & 1'autre de ce qu'ai'auc quarante ans fur la tete , il eft aufli infe'parable de fa Nourrice, que s'il tetoic encore. Je ne 1'ai point oui jurer , & je me perfuade que ce qu'on en dit * ell ,, une impofture de fes ennemis. Quint aux paroles oblccnes , je n'ai vii .,, aucun qui m'ait afforc lui en avoir oui' proferer. 11 ne faut pas juger de 4i cette ame rclevce au-deflus des autres , par les regies preicrites a cellet du commun > c'efl line Philofophe qui n'a rien de femme que le fcxe, ,, fon Efprit etant teilement pone a la franchife , qu'elle n'ajamais fu le foumettre aux grimaces ncccllaires pour jouer la farce feminine , ni .,, meme porter les habits pour iu repre'fcnttr ; Elle a envifa^e !e monde ,> avec une reibiution male ok virile, qui iui a fait meprifer effcciivement ,, les Sceptres & les riciiefics, & mettre en pratique cette haute Philpfo- phie,dont les plus rigides ProfeiTeurs & plus aulteres Anachoretes n'ont . pli avoir que la iheorie. li ne faut done pas s'etonner fi die eft eloi- ,, gne'e du grand chemin , le crount , avec tous les plus fages de tous les i, iiecles , & de toutes les Nations , trop long & trop Fangeux pour arri- ,, ver au fouverain bien, auquel on ne parvient que par les lenders diffici- tes & pen battus , par ou la vertu debaralfee chemine & fait fa route. -,, Parmi tout ce mepris des ornemens exterieurs , il eft merveilleux de ,, voir cette Princefle faite de telle forte , qu'a moins d'une chaflete cano nizable, la Reine de Saba auroit trouve fon Salomon* Itoifieme Portrait Monfieur Ce n'efl pas ici tout a fait une peinture de la Reine de Suede. Je ne veux rien entreprendre fur Monfieur de Botru , mais je vous dirai en ,, gros que c'efl la plus extraordinaire perfonne que j'ai'e jamais vue , fon ,, habit, fa coefFure differente de la notre , & fon petit equipage font un pen furprenants , & font bien connoitre qu'efle dent 1'ufage & les bien- 3, feances fort au defTous d'eile. En 1'e'tat que je vous la depeins, elle fe trouve fi peu embaraflee qu'apparemment elie fe croit etre MaitrefTe ,, par tout, & c'efl une merveille qu'ai'ant quitte fon Roi'aume, elle fache fi bien faire la Reine dans celui des autres ; au refte rien ne lui eft in- connu ; fa curiofite eft fi grande qu'elle eft informee de 1'efprit , des moeurs , & de 1'interet de tous les honnetes gens. Elle entre aufli galam- ment en converfation , que pourroit faire Mr. le Marechal de Clerem- bault 9 & parle avec tant de juftefle, qu'on diroit qu'elle a pratique Mr. le Marquis toute fa vie. Beaucoup de lumie'res & de vivacite avec les ,, beaux naturels, de connoifTance avec les favans, d'un efprit facile & u- niverfel avec tout le monde ; enfin qui peut feparer fon merite de fon- fexe, & la juger comme un honnete homme, ne fatiroit s'empecher de 3, 1'admirer. Pour vous dire mon fentiment , je m'etonne qu'eile fait tant ,, delangues & tant de chofes j mais que darrs ia Cour la plus polie & la. Tome L -Aaaa plus 554 MEMO T RES C O N C E R N A N T > ^ , '* *' plus delicate du monde , line Suedoife n'ait pas moins de delicatefle que , , nous , c'efl ce, qui pafle mon imagination. Pour fes de'fauts , ils fon& quali tons fur la bienfe'ance de fon fexe, & doivent plutot etre attribuea a fon education, qu'a fon efprit, d'ailleurs il y auroit de la rigueur a ne ,, pardonner pas quelques irregularite's aux perfonnes tout- a -fait extraordi-* naires : ce qu'elle perd avec peu d'inte'ret d'un cote , elle le gagne avec }t de grands avantages de 1'autre , & peut-etre que fi elle etoit d'un tern- perament fort regie , elle n'auroit qu'un genie commun , & feroitd'un me'rite fort mediocre. Pour les fentimens de la Religion , je ne vous en dirai rien, il faudroit 1'avoir obfervee plus longtems que jen'ai fait pour en parler ; & fi 1'on en a dit qu'elle jure quelque fois par habitude , & fans y penfer , je vous puis affurer que je ne Tai pas oui , & je crois qu'il faut imputer ce reproche a fes ennemis. En voila aflez , encore ai* je pouffe la chofe plus loin que je ne m'etois propofe , je demande par- don a Monfieur Eotm de mon entreprife. Nous ajouterons , qu'a Paris, comme ailleurs, Chrifline s'acquit la vene- ration non feulement de tous les favans , les Poe'tes furtout lui adrefTe'renE a 1'envi leurs ouvrages (*) , mais encore elle s'attira celle des aucresper- (*) Vo'iez le Nouveau Recueil de Harangues (i) outre nombre de Sonnets faits b louange de Cbriftine (2) par Mrs. du Teil, Cbeweaii, le Gere, Bourddot, Trijlan I' Her* mite. Pour la rarete" du fait on joindra ici les Sonnets & les Epigrammes du petit de Bsaxcbdteau d(ja Poete dans i'onzicme anne"e de fon age (3). A la Siriniflime Reine de Suede Surfon arrives a Paris Nos voeux font ^xauc^s, nous vo'ions cette Reine, . Qui re"gnoit autrefois fur les Peuples du Nort: Sur ces Coeurs belliqueux, qui par un jufte effort Firent trembler le Rtrin en faveur de la Seine, Que fon Pere Gujlave avoit Tame Romaine Qu'au milieu des Combats il me"prifa le Sort, Non, jamais les Cejars n'afFront^rent la move, Avec plus de fierte' que ce grand Capitaine. , y Mais enfin il n'eft plus, & TAugufte Cbriftine t . Qui d'un fi noble fang tire fon origine , A nos yeux ^blouis paroit avec e"clat. Accourez a 1'envie, Peuples, rendez hommage, A fr) L- c. par. 136-148. jcime Apollcm ou la Mufe naifllmte da Petit -de (i) Ibid-'tu. pag. o-84& p. 14^-17*. Meaucb*ttt:u Paris 1657 & 4- (3) Ils fe tiouvetu impuaie's dans Ja Lyre du CHRISTINE REINE DE SUEJDE. 555 A-Vr,K\nn aui s'empreflerent tous de lui rendre leurs refpeds. * ftnnes de diffanftion qui sera ^ ^ ^^.^ dlntroduteur genera i ^ Menage , qui etpit aupres a , j en ]e lui . m ^ me jww i* SK??S^SSS!ftS3S^ luer la Rene. i j^ m ^j te ^ perfonnes que je connoiflbis. Celt, le Prefident un tel , Mr. le Confeiller un tel &c. gens ut, que je ne lui difois pas vrai, ou u it pas faire,que je ne mentifle fouvent, ces Meffieurs. Mais je lui entendis Menage-la, connoit bien des gens de , - - . de.merite elle s" Je / merite ., C0 mme nous venons de le voir, aiant, 8S3J5 ' (a) r. Menagiana Tom. " A ce channant objet qui prfftre a foji i ge, Les maximes du Ciel a celles de 1 fctafc Powr /a Serfoifflme Reine de Suede EPIORAMME I 'on dit que cette grande Reine, Des beaux efprits la fouveraine, Veut bien-tdt partir de ces heux, pour voirce Prince gloneux , Ce Puiflunt Monarque de France, Oui brule , & meurt d'lmpatience^ Se confid^rera fon tour, L'objet d'envre & d'araour , Oue cette Princeffe admirable Pour lui nous veuille abandonner, II ne faut point s'en e"tonner Car chacun cherche fon Semblable (i). A la Sertniffime Reine de Suede Une Heine la plus favante , t Que le Nort ait jamais produit , '! A voulu protdger le fruit ' De ma Mufe foible & naiflante, Difant au plus Puiffant des Rois, Ou'il faut que fa main Hb6rale M'exempte des fe"veres loix, Que le Parnafle nous 6tale. Ainfi cette grande Princefle En follicitant pour mon bien Veut imiter la divine Sagefle Faifant (juelque chofe de rien. te P de Unteui fans en tcc 55 6 M M O I R E S C O N C E 11 N A N T I/an avo jt f a it (*). Voiei tin paflage de Mr. le Gewfo , qui fe rapporte au fe- 57 ' __ jour que Cbnjtme fit en France (a). ,, Cette heroine , fille unique dc Guftave ddotyhe , qui conquit-en deux ans deux cent Jieues de pai's, & fie trembler par Ton gc'nie, atitant que ,, par fes vittoires, jufqu'a fes amis. Cette PrincefTe, dis-je, avoit regne ,, 7 ou 8 ans , avec d'autant plus d'eclat , qu'elle n'avoit rien a defirer de ,, ce qui peut contribuer a faire une grande Reine ; de 1'efprit , du coura- ,, ge, J'ame eleve'e, une eloquence vive , qui couloit de fource : elle ai- moit ]es faiences & les lettres. Elle parlojt parfaitement toutes les lan- ,, gues de I' Europe. Ces avantages joints au fecours de fes Miniftres, gens habiles & de reputation , devoit , ce femble , lui faire croire , qu'elle ,, feroit toute fa vie aimee de fes peuples , reveree de fes ennemis & efti- ,, me'e de tout le monde. Ccs efperances aufli folides que pompeufes, a- ,, voient cje quoi la fatisfaire: cependant elle avoit mieux aime briHer par- ,, mi les Savans dans 1'Empire du bel efprit , que de tenir parmi les Rois ui> rang diftingue. II eft rare de rencomrer dans les perfonnes de fon j, fcxe ce que les Princes les plus celebres ont eu d'extraordinaire & defu- perieur: lafle de commander elle avoit quitte la Couronne, non par le- ,, gerete & par inquietude , comme difoient fes envieux, ou parce que le ,, Senat de Suede la preflbit de fe marier a un l^rince qu'elle n'aimoit pas: ,, mais pour avoir la liberte d'aller par toute Y Europe, recueillir les louanges ,, & ce tribut d'adniiration que les peuples les plus polis ne pouvoient r&- fufer, du moins a ce qu'elle croioit, a un merite comme le fien : enfui- te elle ctoit puflee de Suede en Flandre, de Flandre en Alkmagne; de-la a ,, Rome , cl'ou la reputation du Roi 1'avoit attiree en France. 11 n'eft point de refpe6ts qu'il ne lui fit rendre, point de regal qu'il ne lui donna. Les plaifirs fe fuccederent les uns aux autres , c'ctoient des fetes continuel- les, dont ce Prince faifoit les honneurs , autant par fa bonne mine que par fa magnificence. II avoit alors dix neuf a vingt ans: la taille gran- de , 1'air augufte, une phifiono.mie marquee de tous les traits de 1'hon- ,, neur & de h vertu , un melange agre^ble de Majefte & de douceur. ,, Quand la Reine de Su&de le vit la premiere fois, elle eut les yeux colles } , fur lui pendant toute 1'cntrevOe : c'etoit un hommage qu'elle rendoit a fa ,, bonne mine. Elle conjut dans la fuite tant d'eftime pour lui qu'elle ne pouvoit fe lafler , meme apres fon recour a Rme , de temoigner a tout le (a) V.fon Hift. du Rtgne de Lours le Grand Livr. I. p. 10. pr. (*) Mr. le Comte de Brienne, qut 1'annde auparavant avoit fait un voi'age en Suede, mande la meme chofe dans fa lettre a Mr. Gyllenftolpe Profeffeur a Abo , datt^e de Paris le ir Janvier 1657. Cbriflinam lui dit-i! , qua me prius in ultimum fere Orbem no- minis & virtutum fama jtertraxerat , bic taiidem vidifle feliciter cotitigit, felicius fane ,, fi di.ntius , maximum enim J'ui dcjiderium dilcedens reliquit. Plura alias Jcribam , fac valeas (i)". (ij Dans les Plmik.nldian*. C I{ R J ST. I & R g IN D E SUEDE, 557 le monde , que la y($ -de-ce jeune Prince avoit paid avec nfure toutes J/ les peines du vo'iage* $ que fon merhc furpafibit fa reputation _. I6y '' En partant , elle avoit dtf a Mad. de Mcnt$enfier , qui i'ctoic allJe trou- Reception ver a Mckin, qu'elle paffoic a Turin (*). Le Due de Savoye en etoit aver- ^^'^ ti, & fe faifoit un grand plaifir de la recevoir dignement. II avoit fait fai- * re un magnifique arc de triomphe a Turin , fur les ide'es du celebre Emamtel Thefaums. Celui-ci avoit eu ordre de haranguer la Reine au nom de la vil- le. Sa harangue rouloit fur la joi'e , qu'avoit temoignee la Republique Romaine , quand , fous le regne de 1'Empereur Claude , on apporta de V Arabic un Phoenix. Que fi ce jour fe trouvoit marque dans les fafles des Remains., comme un jour heureux : a plus forte raifon devoit- on celebrer Je jour, dans lequel fous les aufpices du Pape Alcxandre, le Phoenix desRei- nes etoit venu rejouir toute 1'Eglife Romaine par la profeflion de la Reli- gion Catholique &c. L'une des infcriptions de cet arc de triomphe etoit du meme Emanuel Thefaums 9 qui y condnuoit fes allufions aux Phoenix , & elles nous paroif- fcnc merger plaice ici (a). Phceniccm videre quifque avet Hut cat. Hanc TiiolU in Arabia nidulari , Fafyda eft. Rcgnante Claudio Roma vifam n$ crefys* .Akxandro Scptimo. Aufpicante Romam priimmi adventavit. Unatn %/Je tatidein qui put at Male computat. Regnantum , Sapientum , Bellatorum , Vrraginum Phosnix Quadrupkx , & unica eft Pbosnix Chriftina Alexandra Magni Guflavi Film. Ada- (a) F. Kman. Thefauri Infcriptionss pag. eftropies. On donnera dans r^ppsndice les v j^^ cn< | 94. &fcj C5 5 Boldonii Epigrapbica pag. 48. explications quafaitesle Sr. Thefaurus de cet N. LXXJiv. * c $c. Mr. de Bukish les rapporte avjji dansfon Arc de Triomphe. * r 'eo biflor. part. II. pag. 96. &c. mats (*) Voici ce que Madle de Montpenjier rapporte (i). ,, La Reine me dit je paiTe a Turin, que voulez-vous que je dife li on m'y parle de vous ? je lui repondis, 1 queje ne doutoi? pas, qu'elle n'en parlat de la bonne man fere parco que Mauarnode fewye, ^toit ma Tante & m'avoit toiljours t6noignebeaucoup d'amiti^: a quoi elle rcpliqua: fon fils vous aime plus qu'elle. II vous defire fort: pour elle, elle vous craint, par- ce qu'elle veut gouvcrner". (i) V. Ses Mem. 1. c pag. 170. Aaaa 3 55* ME MOIRES CONCERNANT Adamantinum depange Govern ^ Taurinomm Augufta: Diemque meinorabikm JEternis infige Faftis Chriflina Alexandra Snccorum, Gotborum, Vandakrum Regim ter Augufta , Triumphak hoc mgrejja limen , Tria Regna in Triumphum repudiavft Aft abdicando. Magno Alexandra Major ALEXANDRA. Ilk alicna occupans Regna , Coskftium Regnorum Dcfperatione flevit. Hur oc 1 Amballadeur de rrance lui firenc la reverence. Puis elle fejourna dans villes de rEtat Ecclefiaflique , & la plfipart du terns a Pefaro ( (0) F. Reife van de Koninginne Chriflina p. 57. (&) Diar. Europ. ad b, am. p. 78. (*) A mon palTage d Pefaro, je trouvat fur ua cot6 du grand Autel de 1'Eelife Ca- thedrale une infcription qui indique que Cbrijliw s'y ^toit engag^e dans la Confraterni- de St. stntoine: La voici: CHRISTINA MARIAS ALEXANDRA Suecorum Regine Qii ubi Regnwn paternis fuisque viftoriis slmplificatum Sua Sapientia , Juflitia & fortitudinf auftum Catlolica fidei poftbabuit : Ubi Romam virtute ac prcefentia implevit Et AI.EXANDRO VII Pontif. Opt. Maxima Regale obfequium prceftitit Pifaurenfem Civitatem Diuturni bofpitii Majeflate illujlravit EC novo Pietatis cxemplo D. Antonii Sodalitati Sicitt olim Malatefta ac Sfortia Pifauri Principes fyfa quaya Regalius tamen fcf Augujlius No- CHRISTINE REINE DE SUEDE. 55? jufqu'a ce que la maladie contagieufe eut cefTe a Rome , pour y retourner L ' air fans crainte (*) Celt de-la qu'elle ecrivic a la belle Elba Sparre (f) la lettre 57 " que void: lUlAdame , Vous avez trop de connotffance de Fous-wtme pour V- *** tre pas perjuadee , qifen qucJque endroit du monde que jefois^ fousyfaitestoujoursune partie de monfouvenir, ? que k terns da pas de pouvoir fur Tamil ie que je vous ai juree Celul qui vous rendra ce billet? me f era temoin auprds de Pous-> que jefais tou- jours juflke a votre meritc / a votre beauts'. Apre's amir vu dans leplus beau ? lepJus polipais du monde^ tout ce qtfil y a de charmant & de beau en notre J'exe Je Joutiens avec plus de bar die s- fe , qtfil tfy a perfonne qui ojat vous difputer T advantage que vous emportezfur toutce qtfily a de phis a imable au monde. Dites-nous aprds cela , ft Tonfe peut conjoler, quand one/I condamne a uneab- Jence eternelle. Maisfijejuis affwree de tie vous voir jawais, je fuis Nomen dedit. Sodalitas eadem Chriltinse Magnet nomine aii&iof Procurante ex Sodalibus Aiace Hondedeo Nob. Pifauren. Monumcntum P. A, MUCLVIIL (*) Cuy Patin crivit en ce terns- 1& fon ami Span (r). La Reine de Sutde n'eft i->lnc -j Turin ni :i CaXal. lllle Tie fait nlns A nnfl S.iinr C<* unnpf 1711^ 'l\rrl^ wtitn'a r)i es vota- ges dc Chr-.'*- receptans bojpitem, atque orbi fuas opes vicijpm non avara impertiens , comme dit quel- que part Buchanan Le Pape lui donne dix huit mille dcus par an mutant cunfta vices. Voila la viciffitude des chofes huinaines. Le feu Roi fon P^re a autrefois ruin^ & pill^ \'4llemagne t & elle aujoord'hai pille & mange le Pape, qui a coutume de manger les autres. Le feu Roi fon Pere n'y a proc^d6 que de force ouverte & ,, eellc-ci y va plus finement. Sa pr&endue Converfion lui fert d couverture & do ,y pretexte a faire la pelerine & a fe promener par tout la terre, comme e!le a deja faic par une bonne partie, par les confeils des EJpagnols & des JeTuites. Oh! les bonnes gens ! (f) Voici le Madrigal que le Si. Gilbert lui adreffa : Belle & charmante ComtefTe . Une g^n^reufe Princeffe Die que vous l'avez-f. 317. lif. p 137&3I8. 33 i - 4 cit. col. 2de p. 815. lif. 805. , 337 - 28. ii n'y pai, lif. ^ n'y a PM- - i cit. col. ire. faltenius. lif. Vulteius. 341 -- i cit. col. ire apres item add. Ncrrelii jlriftum in Celjiibift... 342 -- 3 cit. fup. col. 2d. p. 262. lifez p. 255. 344 - 2 cit. fup. col. ire. apres Cbriftine ajou- tez par Mannerfcbied. 348 --pen. cit. inf. col. 2de an. 1693. lif. an. (653. 352 - 28 co!. ic. Atbiopum. lif. JEtbiapum. 359 - 4 ajoutcz apres Laboureur (a) & la cit. au bas dutexte (a) V. /e Laboureur bift.du Marecbaide Guebriuntpag, 12. 37 5 - u!t. cit. inf. col. 2de T. X. lif. Tom. XF. 395 - 8 icrit. lif. icriiilt. 400 - 3 1 de N554- lif. 1653. 413 - 17 fcjMo' eonduijit. \tf.il.la coitduifit. 434 4 not. Trijcbmun. lif. Frifchmnn. : - 441 * 5" n6t. condotta -valor, lif. condotta : valor. 441 - 6 . . or/we, lifez arwi e. . .- 8 . . conpretefts. lif. con pretefto. 444^- lonot. o 1617. lif. a 1717. 451 -ii. not. chime, lif. ofo'me. 461 - 7 & li. not. Tbidderius. lif. Tbuldenus. - 3.cit. inf.col. ire. TbulderiiAii.Tbuldeni. 464 dans le fommaire p.226.a]out. f p. 24 1 . jwt 470 lig. 7 not. Templa Ptenitentiarum.Yit. Tem- plo Poiniteniiarum. Ltflc dcs Errata & Addenda. Page 470 lig. 21 n. Francejis. lifez Francefco. - 28 not. Tjoloje. lif. Tboloja. - - 2 cit. ir.Lcol.ircTbulderii. lif. Tbulden 471 -- 14 en 1657. lif. 1651. 473 -- 20 not. em. lif. cum. 474 -- 2 n. au fommaire p. 454.. lif. p. 232. 475 -- 16 & 17 Picques. lif, Picquet. 483 -- 13 Baron Spans, lif. liarun' - 1 8 Tyaolm. lif. Fyboim. 485 - 2(5 n. eculum. !if. Secnlum. 488 ~ 9 TraJJlrio. lif. Traffino ou Traffigny. 493 - 7 co'- ire farm* lif. f'arme. - 10.. incbinar mi. lif. incbinarmi, 13 .. participar mi. lif. particiyarmi. 494 - 26 /)//;>. !i~. Dolce. 501 -- 3not.adaltril4cogbi.lif. ad altriluogbi, 504 -- 5 n. prelate les. iif. prejque tous le*. - 3 cit. inf. col. 2ttc TLuiderii. lif. TiaW#- i. item p. 513. 514. 505 -- 4. n. Fiemmming. Iif. Fleming. - 12 . . Mtdars. lif. andare. 512 - 13 ^72rt/. !if. ^fjflf. 513 3 n. Medifima. lif. wedejima* 514 -- ii n. O-f/^. lif. Crete/. 520 - 18 iWgra lif. Mgr. 521;- 2 not. Braitco. lif. Banco. 3 n. Franucbera. Iif, Franecbera . 522 -- 24COJ. ire radumewza. lif. radnnanza. 523 -- 21 col. ire mag lie. iif. moglie. 535 - 8 ajjonci. lif. ajjoucy. -- 8 not. Epigramme. lif. 4 na gramme. 542 .- ii not. Rtgnunt'e. lif. Regente. - 3 cit. inf. col. ire p. 193. lif. p. 192. 555 " u 't- apres Putin ajoutcz (ft) & au bas d,u Texte dans la cit. fup. (i) F. _/a Lettre a Charles Spoil Tom. II. p. 228. du premier Tome des Memoires pour fervzr a THijlolre de CHRISTINE /te/* ^ 5w charg^es extraorciinairunent 'a- etits Caracleres, Additions Ci- / 4 - 15 / 4,0. 76 Feuiiles (y compris le Titre Rouge) charg^es extraorciinairunent 'a- vec diverfes notes de diffc 4 rens & -petits Caracleres, Additions, Ci- tations & Sonimaires a dix dutes la feuille , fait la fomme de 1 Magninque Portrait de la. Reine CHRISTINE grav^ par P. Tanje gra- v'eur cliltingui - - -. T 2 Vinettts , favoir au Titre , & a la Tte de PO image - o Medailies dans le Corps de 1'Ouvrage a un demi fois fa.it enfemble / o - IO - o / Q - 4 o / O - 8 - / 5-17-0 / 9- o-o 3 - 8 bons gros 5 - o Et pour Je Grand Papier Ce qui fait en urgent d'Allemagne - -, r Rixd, Pour le Grand papier .-. - - - - Ceux qui acheteront en argent comptant le premier Volume de cet Ouvrage pen dant ics premieres femaines apree le jour de la publication , & prmiculierement du- rant la Foire de Piques 1751. a Leipzig, ne paieront pour le petit papier en Hollan- de que - / 5 - o - o & en Allemagne - Rixd. 2 - 1 6 bons gros Et pour le grand papier / 7 - 10 - o - 4-0 De plus on leur donnera un billet pour pouvoir faire recevotr contre fe'pa'iement au Mcis 4'0ctobre pr^ochain le T^mejccthd a un piix qui ferapareilleinejit diminuc au proraio. N University of California SOUTHERN REGIONAL LIBRARY FACILITY 405 Hilgard Avenue, Los Angeles, CA 90024-1388 Return this material to the library from which it was borrowed. QUARTER L0r\f OCT 1 4 15 - FES o e eoos 2 W