key: cord-1052666-rrtbqwya authors: Roumagnac, Alix; De Carvalho, Eurico; Bertrand, Raphaël; Banchereau, Anne-Kim; Lahache., Guillaume title: Étude de l’influence potentielle de l’humidité et de la température dans la propagation de la pandémie COVID-19 date: 2021-01-16 journal: nan DOI: 10.1016/j.pxur.2021.01.002 sha: 64cadee6168c9ea41ae63e4e8a76fcc7be28d674 doc_id: 1052666 cord_uid: rrtbqwya La pandémie COVID-19, qui a débuté au début de l’année 2020, paralyse la planète depuis de nombreux mois. Plusieurs pays qui ont été durement touchés par une première vague ont connu une accalmie avant de faire face à un nouveau pic épidémique. Le climat joue potentiellement un rôle dans la propagation de nombreux virus respiratoires. Il est apparu important de savoir si cela pouvait être aussi le cas pour le nouveau coronavirus, le SARS-CoV-2. Si le rôle du climat dans la transmission est encore difficilement quantifiable, il est clair que d’autres facteurs rentrent en compte dans la transmission de la COVID-19 à savoir principalement le respect des règles de distanciation physique et des gestes barrières. The COVID-19 pandemic that began in early 2020 has been paralyzing the planet for several months. Several countries, who were hardly hit by a first wave, experienced a lull period before facing a second epidemic peak. Climate potentially plays a role in the spread of many respiratory viruses. Thus, it is vital to know whether this could also be the case for the new coronavirus. While the role of climate in transmission is still difficult to infer, it is clear that other factors matter in the transmission of COVID-19, notably the respect of physical distancing rules and barrier gestures. En décembre 2019, une épidémie de pneumonies a vu le jour dans la ville de Wuhan en Chine. Par la suite, cette épidémie a évolué au niveau mondial. Le 11 février 2020, l'OMS a nommé officiellement la maladie : « maladie à coronavirus 2019 (COVID-19) » et le 11 mars 2020, l'OMS a annoncé que la COVID-19 pouvait être qualifiée de pandémie, la première déclenchée par un coronavirus, le SARS-CoV-2. PREDICT Services accompagne plus de 25 000 communes françaises, des entreprises, des citoyens et des sociétés d'assurances dans la gestion des risques majeurs en France et dans le monde. A l'occasion de la crise causée par la COVID-19, PREDICT Services a déployé une assistance spécifique sur ce sujet auprès de ses usagers : document synthétique de gestion de la pandémie dans le cadre du plan communal de sauvegarde et des plans de continuité d'activité, main courante numérique, appui téléphonique, etc. Face à l'hétérogénéité temporelle et géographique de la propagation de la COVID-19, la question d'une corrélation potentielle entre la propagation du virus et des facteurs climatiques s'est posée. De façon à mieux comprendre, anticiper et accompagner ses usagers dans leur prise de décision, PREDICT Services a souhaité approfondir le sujet, en lien avec son corps de métier. Une étude a été ainsi menée, durant cette épidémie, dont les résultats sont présentés dans ce présent document. De nombreux virus ne peuvent vivre seuls dans l'air. Ils se propagent grâce aux particules en suspension dans l'air (vapeur d'eau, particules fines, etc.) puis se déposent sur les surfaces. Les aérosols qui peuvent contenir ces virus sont susceptibles de rester jusqu'à plusieurs heures en suspension dans l'air. Ils sont alors météo-dépendant :  Lorsque la température est inférieure à 3°C, l'air ne contient pas assez de vapeur d'eau pour favoriser la propagation. A contrario, lorsqu'il fait trop chaud, les gouttelettes s'évaporent plus rapidement et sont donc contaminantes moins longtemps.  Lorsque l'air est très humide, les gouttelettes qui contiennent la charge virale s'agrègent à l'humidité ambiante, elles deviennent plus lourdes et chutent plus rapidement. Lorsque l'air est très sec, il y a moins de gouttelettes susceptibles de supporter la charge virale. Lorsque l'air est en zone intermédiaire, les gouttelettes restent en suspension et elles se propagent mieux.  Les rayons ultra-violets sont particulièrement délétères sur le matériel génétique (ARN) des virus à l'air libre, ils les détruisent. Cette étude s'est plus particulièrement s'intéressée aux effets de la température et de l'humidité absolue. Une étude réalisée par le Massachusetts Institute of Technology (MIT) au mois de mars 2020 montre que 90% des infections se seraient produites dans des régions où la température se situe entre 3 Le nombre des contaminations au nouveau coronavirus a fortement augmenté en France à partir du mois de mars 2020, conduisant à un confinement généralisé de toute la population entre le 16 mars 2020 et le 10 mai 2020. Afin de vérifier la pertinence de l'IPTCC, son évolution au cours du temps a été comparée au nombre de décès liés à la COVID-19 par million d'habitant [5] . L'IPTCC moyen en France entre le 1 er janvier 2020 et le 31 mars 2020 a été calculé ( figure 4 ). Un délai de 10 jours, entre la fin de la période de calcul de l'IPTCC et les données de mortalité, a été choisi afin de prendre en compte le temps d'incubation de la maladie à partir de conditions climatiques lors d'un jour donné (personnes ayant contracté la maladie lors de la deuxième quinzaine du mois de mars). Enfin, on observe surtout que le nombre de nouvelles hospitalisations est resté très faible dans toute la France durant les trois mois qui ont suivi la fin du confinement (10 mai -10 août). L'IPTCC était alors au vert durant cette période, signifiant des conditions climatiques limitant potentiellement la circulation du virus. Après les premiers résultats sur l'étude entre la COVID-19 et le climat en France, les recherches ont été étendues à l'ensemble du monde. Les données de température et d'humidité moyenne sur l'ensemble de la planète sont issues de la base de données ERA5, du programme d'observation COPERNICUS de la Terre de l'Union Européenne qui permet 8 d'avoir accès aux réanalyses climatiques à l'échelle mondiale avec des données de température et d'humidité horaires [6] . L'IPTCC a ainsi pu être calculé en base mensuelle à partir des données climatiques observées, et également à partir des normales, moyennes mensuelles de la période . Les données d'IPTCC calculées à partir des données observées ont été croisées avec le nombre de cas confirmés de COVID-19 par million d'habitants [7] . Les cartes ont été créées sous QGIS [8] . L'IPTCC mondial du mois de février 2020 montre que la région du Wuhan en Chine présente un indice élevé tout comme en Europe de l'Ouest (figure 7). Pour le mois de mars 2020 durant lequel la pandémie de coronavirus s'est déclarée dans le monde, l'IPTCC est fort sur une bande centrale des États-Unis et reste très élevé sur une grande partie de l'Europe (notamment entre l'Espagne, l'Italie, la France, le Bénélux et le Royaume-Uni) (figure 8). Or, le nombre de cas de COVID-19 et d'hospitalisations a grimpé de manière exponentielle dans ces régions du monde entre les mois de mars et d'avril 2020. Inversement, l'IPTCC est globalement faible voire nul dans les pays de l'hémisphère sud. Ces pays-là n'ont en effet pas connu de vague épidémique majeure durant le premier trimestre 2020. Il ressort que les pays dont les conditions de température et d'humidité sont plus favorables à la propagation de la COVID-19 (i.e. IPTCC plus proche de 100) présentent souvent le nombre de cas confirmés les plus élevés. C'est le cas en Europe où le nombre de cas a explosé durant le mois de mars 2020 (Italie, Espagne, France). A l'inverse, ceux présentant les conditions les plus défavorables à la circulation du virus (i.e. IPTCC plus proche de 0), présentent un nombre cas confirmés plus faible à cette période (Russie, Afrique du Sud, etc.). Concernant le mois de mai 2020, le calcul de l'IPTCC mondial indique une sensible diminution de l'indice sur l'Europe du Sud (Péninsule Ibérique, Italie, France), la Chine et le Japon ( figure 9 ). Dans ces pays qui se sont déconfinés au cours de ce mois de mai, le nombre de nouveaux cas par jour a sensiblement diminué et n'est pas reparti à la hausse dans les semaines suivantes. A l'inverse, l'IPTCC commence à augmenter dans des pays de l'hémisphère sud comme en Australie, Afrique du Sud ainsi qu'en Argentine où les cas se développent. En Australie, une première vague a eu lieu au mois de mars 2020, mais l'IPTCC était au vert. Néanmoins on constate que la vague a duré moins longtemps qu'en Europe. Mais une reprise a lieu depuis le début du mois de juillet 2020 alors que la température et l'humidité sont rentrées dans des valeurs propices à la propagation du virus. Le Brésil fait face à un nombre de nouveaux cas élevé depuis le mois de mai 2020 et cela ne semble pas cesser. Pourtant, l'IPTCC est vert : cela nécessite un approfondissement de l'étude afin d'en déterminer les limites. Durant les mois de septembre-octobre 2020, l'étude a particulièrement porté sur la reprise de l'épidémie en Europe. Une hausse de l'IPTCC est constatée sur la majeure partie du continent européen au cours du mois d'octobre 2020. Une reprise intense et assez homogène de l'épidémie a été parallèlement observée [8] . Au cours du mois de novembre, l'IPTCC est élevé sur l'ensemble du Vieux Continent et plus particulièrement entre l'Est de la France, l'Allemagne et l'Ukraine ( figure 13 ). Ces pays connaissent actuellement une deuxième vague épidémique marquée. 12 Figure 13 . IPTCC mondial pour le mois de novembre 2020. Après une accalmie durant l'été, le nombre de contaminations à la COVID-19 a de nouveau augmenté en France à partir du mois du mois de septembre 2020. De nouvelles mesures ont été prises par le Gouvernement (port du masque obligatoire dans les villes, protocoles sanitaires renforcés). Mais face à une reprise trop virulente de l'épidémie à partir de la mioctobre, plusieurs agglomérations ont été placées sous couvre-feu avant qu'un nouveau confinement national ne soit prononcé à partir du 30 octobre 2020. L'indicateur thermique national développé par Météo-France a été utilisé pour suivre l'évolution des températures à l'échelle nationale [9] . Cet indicateur repose sur le calcul de la température moyenne de 30 stations réparties régulièrement sur le territoire métropolitain. Le mois de septembre a connu globalement des températures au-dessus des moyennes saisonnières ( figure 14 ). Une vague de chaleur exceptionnelle a notamment touché le pays autour de la mi-septembre. La fin du mois ainsi que le début du mois d'octobre ont été plus frais. Un refroidissement a touché le pays durant la deuxième décade d'octobre, avec des températures parfois assez largement sous les normales de saison dans certaines régions. Les données climatiques (température, humidité) des 63 stations du réseau de Météo-France réparties sur l'ensemble du territoire métropolitain ont été récupérées afin de calculer l'IPTCC sur l'ensemble du territoire métropolitain (tableau I) [4] . Durant la troisième décade du mois de septembre, l'IPTCC reste globalement faible en France, mais une hausse est constatée en région Auvergne-Rhône-Alpes qui est soumise à des températures moins élevées que sur le reste du pays. Avec l'entrée dans la saison automnale, un temps plus humide et frais se met en place en France à partir du début du mois d'octobre. 14 L'IPTCC est en augmentation sur la moitié nord du pays, mais reste assez peu élevé ( figure 16 ). Il croît plus rapidement dans le Centre-Est. Le nombre d'hospitalisations quotidiennes en France reste stable mais on constate alors que nous sommes au début d'une reprise intense de l'activité épidémique. . Le rôle de l'immunité collective n'est pas totalement écarté car 10 à 15% de la population de cette région disposerait d'une immunité, ce qui est supérieur à la moyenne nationale, mais largement insuffisant pour contenir le virus (il faudrait une immunité collective de 60 à 70%). Les conditions climatiques de ce début d'automne semblent avoir eu un impact sur une reprise intense de l'activité épidémie en France à partir de la deuxième quinzaine du mois d'octobre. La deuxième vague a été intense dans plusieurs régions au cours de ce mois de novembre 2020 avec un pic atteint autour du 15. Les indicateurs de suivi de l'épidémie (taux de reproduction du virus, nombre de nouveaux cas quotidiens, taux d'incidence) se sont améliorés durant la deuxième partie du mois. Il est évident que le confinement généralisé 16 décrété fin octobre a permis de diminuer les contaminations et par conséquent la tension hospitalière. En Savoie, département de la région Rhône-Alpes, le taux d'incidence de la COVID-19 était le plus élevé de France au début du mois de novembre avec un pic à 1 200 cas pour 100 000 habitants. Ce taux est passé sous les 1 000 à la mi-novembre, mais la tension hospitalière restait très élevée dans le département avec un taux d'occupation des lits en réanimation de 150%. Les En mai 2020, plusieurs foyers ont été recensés dans des abattoirs en France, notamment l'abattoir de Kermené, à Saint-Jacut-du-Mené dans les Côtes-d'Armor où 109 cas d'infection par la COVID-19 ont été détectés sur 1 027 testés, et 56 employés de l'établissement Tradival de Fleury-les-Aubrais (Loiret) ont été contaminés sur 397 dépistés. La France n'est pas la seule touchée : en Irlande, en Allemagne, en Australie ou aux États-Unis, des centaines de cas avérés sont recensés dans les abattoirs ou les usines de transformation de viande. Selon le Centre pour le contrôle et la prévention des maladies (Centers for Disease Control and Prevention : CDC), près de 4% des salariés de cette industrie auraient été contaminés par la COVID-19 aux États-Unis depuis le début de l'épidémie [12] . Pour expliquer cela dans une industrie où les règles d'hygiène sont très strictes, la difficulté de respecter les règles de distanciations sociales et gestes barrières dans ces espaces confinés, ont été évoquées. Par ailleurs, dans les abattoirs l'environnement froid et humide est propice à la propagation du virus. Les températures se situent entre 4 et 12°C. Les salles sont en permanence nettoyées au jet d'eau, ce qui peut disséminer les particules infectées. Avec l'humidité, les masques peuvent perdent de leur capacité de filtration. Ces nombreux foyers au sein des abattoirs pourraient confirmer l'influence de la température et de l'humidité sur la propagation du virus avec un IPTCC très propice. La propagation du nouveau coronavirus a été observée dans plusieurs pays de l'hémisphère Sud. Les pays qui présentaient un IPTCC élevé entre les mois de juillet et d'août ont connu une nette augmentation du nombre de nouveaux cas de COVID-19. C'est notamment le cas en Argentine, en Afrique du Sud et dans une partie de l'Australie (région de Melbourne) ( figure 12 ). Sur le continent Africain, l'Afrique du Sud est le pays de loin le plus touché avec plus de 600 000 cas et 13 000 décès à la fin du mois d'août [13] . Cette étude a pour seul objectif d'apporter des éléments de réflexion. Elle est très dépendante de la fiabilité et la disponibilité des données, notamment sur le nombre de cas et de décès recensés ainsi que sur les campagnes de test qui diffèrent selon les pays. D'autres facteurs climatiques peuvent être influençant, tels que :  les données sur les rayonnements UV ;  le taux de particules fines en suspension dans l'air, autre vecteur de propagation du virus ;  la stabilité de l'air et des turbulences de basses couches. Les paramètres météorologiques ne constituent pas à eux seuls des facteurs premiers de propagation du virus. D'autres facteurs sont à prendre en compte dans l'analyse globale tels que :  le facteur anthropique lié aux déplacements des personnes ;  le niveau des mesures engagées et la chronologie dans la réponse par rapport à la crise COVID-19 hétérogènes d'un pays à l'autre (confinement, fermetures des frontières, moyens de santé, etc.) ;  le comportement et le respect des mesures engagées par les populations ;  les conditions d'hygiène, d'accès aux soins, de qualité et de ressources des services de santé ;  l'hétérogénéité des densités de population ;  l'état de santé de la population (autres maladies, âge de la population, groupes sanguins etc.) ;  les us et coutumes pouvant jouer sur la non prise en compte de la distanciation physique. La pandémie de coronavirus sévit aussi dans des pays dont l'IPTCC est pourtant vert, c'est-àdire que les conditions climatiques limitent la propagation aérienne du virus. C'est notamment le cas du Brésil et l'Inde qui font face à une forte progression des cas de coronavirus depuis le mois de mai 2020. Les conditions climatiques ne sont évidemment pas le seul facteur jouant un rôle dans la propagation du COVID-19. Le respect des gestes barrières et des mesures de confinement lorsque cela le nécessite sont un frein majeur à la diffusion de l'épidémie. L'Inde et le Brésil font partie des pays émergents où les inégalités restent encore importantes, notamment entres les zones rurales et urbaines [14] . Cette étude montre l'intérêt potentiel de l'intégration des facteurs climatiques dans les stratégies de gestion de la crise de la COVID-19. Le calcul de l'IPTCC dans chaque département à partir des prévisions de température et d'humidité fournis par les différentes stations de Météo-France devrait permettre de suivre son évolution à court terme à l'échelle de la France. Par exemple pour la journée du 19 novembre 2020, l'IPTCC est globalement modéré sur l'ensemble du pays, plus élevé entre le Massif-Central et les Alpes ainsi que près des côtes de la Manche (figure 21). Mesures de confinement ou de couvre-feu décrétées par le Gouvernement. De nombreuses études ont été publiées sur les liens entre la COVID-19 et le climat, confirmant l'intérêt porté à ce sujet par les scientifiques du monde entier. L'étude menée par Predict Services fait apparaître le rôle potentiel de la température et l'humidité dans la propagation de la COVID-19. Les facteurs anthropiques à travers le respect des gestes barrières conservent un impact essentiel sur la transmission du coronavirus. Il est maintenant nécessaire de valider les analyses, de tester la robustesse de cet index, pour réfléchir à l'intérêt de l'utilisation potentielle de ces éléments. C'est pourquoi il nous a semblé important de porter à la connaissance des autorités le résultat de ces travaux. Will Coronavirus Pandemic Diminish by Summer ? Catastrophe évolutive, quelle pourrait-être l'influence des conditions météorologiques sur l'évolution de la pandémie CoViD-19 ? Médecine de Catastrophe -Urgences Collectives 2020 sept The Computation of Equivalent Potential Temperature" (PDF) Coronavirus : chiffres clés et évolution de la COVID-19 en France et dans le monde Climate Reanalysis COVID-19 Coronavirus Pandemic Avis du Conseil scientifique -Une deuxième vague entraînant une situation sanitaire critique COVID-19 Among Workers in Meat and Poultry Processing Facilities -19 States Coronavirus disease 2019 Croissance, inégalités et pauvreté au sein des pays émergents : le cas des BRICS. Revue de la régulation Coronavirus : au Brésil, Jair Bolsonaro rejette le confinement qui menace, selon lui, de ruiner le pays