key: cord-0998408-3wvx782c authors: Holzapfel, Laurent title: Covid-19 chez les personnes âgées : rédiger les directives anticipées dès l’admission à l’hôpital date: 2021-08-27 journal: La Presse Médicale Formation DOI: 10.1016/j.lpmfor.2021.08.004 sha: 7eae5f99487f3d4bd74a53e0c0f2e59b8c9f37fb doc_id: 998408 cord_uid: 3wvx782c nan Opinion Covid-19 chez les personnes âgées : rédiger les directives anticipées dès l'admission à l'hôpital Les personnes âgées hospitalisées en réanimation suite à une atteinte par le Covid-19, en plus de leur handicap dû à l'âge, peuvent avoir des pathologies associées et une perte d'autonomie. Dans un entretien publié dans Le Monde le 7 novembre 2020 (1), le Pr Bertrand Guidet, chef de service de réanimation de l'hôpital Saint Antoine à Paris, dit utiliser pour ces patients un score de fragilité qui est le reflet de l'âge, de l'état de santé, du niveau d'autonomie et de la forme physique. Dans une étude paru en février 2021, réalisée chez des patients de réanimation, il précise que le taux de survie à trois mois pour les patients de plus de 75 ans fragiles était de 30% (2). Il serait intéressant de connaitre leur survie à un an et dans quelles conditions. Le Pr Guidet insistait dans cet entretien sur l'intérêt d'une pédagogie précisant ce qu'est la réanimation, sur ce que cela signifie d'être ventilé artificiellement et placé dans un coma artificiel pendant une longue période, et éventuellement sur la possibilité de décéder en réanimation. Il est important que le patient puisse donner son avis sur l'éventualité d'une admission en réanimation. Mais quand l'état du malade s'aggrave, que la famille n'est pas là, que le médecin de famille n'est pas joignable, il est difficile de tenir compte de l'avis du patient et/ou de ses proches. Il est important d'établir un document à l'avance abordant clairement ce sujet, comme le préconise la loi Léonetti, et qui correspond aux directives anticipées. Pour rappel, la loi Leonetti n° 2005-370 du 22 avril 2005 précise que « Lorsque la personne est hors d'état d'exprimer sa volonté, la limitation ou l'arrêt de traitement susceptible de mettre sa vie en danger ne peut être réalisé sans avoir respecté la procédure collégiale, définie par le code de déontologie médicale et sans que la personne de confiance ou la famille ou, à défaut, un de ses proches et le cas échéant, les directives anticipées de la personne, aient été consultés » (3). Dans un autre article publié dans Le Monde le 25 novembre 2020 (4), un magistrat et deux médecins posaient les termes d'un débat éthique au cas où la pandémie obligerait à opérer un « tri » entre les malades, en particulier pour l'admission en réanimation. Les auteurs insistaient sur l'importance d'une décision prise de manière collégiale : par exemple, par au moins deux professionnels de la même spécialité s'adjoignant un avis extérieur ; et en cas de doute et dans les situations complexes ou conflictuelles, élargir encore le collège. Pour la majorité des patients hospitalisés, l'intérêt d'une admission en réanimation en cas d'aggravation ne se discute pas ; mais pour un certain nombre, l'âge avancé et/ou des pathologies associées importantes, font discuter une telle option. L'alternative est une admission en soins palliatifs. Ces deux articles du Monde insistent sur l'importance d'établir des directives anticipées pour tout malade hospitalisé, et en particulier pour ceux atteint de Covid en période de pandémie, et d'une discussion collégiale sur l'intérêt d'une admission en réanimation. Mais en pratique, la réalisation de ces éléments se heurte à des problèmes pratiques liés au fonctionnement de l'institution hospitalière. Pour ce qui concerne les équipes médicales, il faut différencier les heures « normales » de la période « de garde ». Les heures « normales » correspondent aux jours de semaine, du lundi au vendredi, de 9 à 12 heures et de 13 à 17 heures. Les effectifs médicaux sont alors en général bien corrects. Une réunion collégiale et l'aide à la rédaction des directives anticipées ne posent pas de problème dans leur réalisation. Les médecins des services sont présents à l'hôpital bien plus longtemps que cela, mais en dehors des horaires définis plus haut, ils sont moins disponibles pour réaliser une discussion éthique. Ils sont souvent accaparés par de nombreuses activités (tâches administratives, consultations, gestes techniques, enseignement, recherche…). Les plages pendant lesquelles les équipes médicales sont vraiment disponibles pour une procédure collégiale ne totalisent que 35 heures par semaine …. et la semaine compte 168 heures (24 heures x 7 jours) ! Ces 35 heures ne représentent que 20% du temps hebdomadaire alors que la période de garde en recouvre 80%. L'aggravation d'un patient survient la plupart du temps en période de garde. Les effectifs médicaux sont alors très réduits. Le médecin de garde du service de réanimation est souvent seul pour faire face à une multitude de problèmes. Il doit gérer les patients de son service, celui-ci étant souvent surchargé en période de pandémie, et donner des avis pour des patients des services d'urgence et d'hospitalisation. En présence d'un patient qui s'aggrave, il n'a pas le temps ni les moyens de réaliser une discussion collégiale. Il est alors plus facile et plus rapide d'intuber le patient, sauf s'il est évident qu'il ne faut pas le faire en raison de l'âge et/ou de la pathologie associée, ou que des directives anticipées donnent une conduite à tenir claire. Le Pr Guidet parle alors d'intubations réalisées pour une « réanimation d'attente ». Il précise que cela permet de décaler l'heure du choix, de se donner quelques jours pour mieux évaluer les chances d'un patient, de discuter avec la famille, de voir si les traitements marchent. Mais pour faire cela, il faut assez de lits, ce qui n'est malheureusement pas le cas en situation de crise. Il serait beaucoup plus logique d'établir un document dès l'admission du patient précisant ses directives anticipées, avec l'aide éventuelle d'une discussion collégiale. Mais, actuellement, il s'agit d'un « voeux pieux » Ce document est rarement disponible lorsqu'un patient s'aggrave. Il faudrait mettre au point une procédure, sous forme de protocole, qui rappellerait à toute l'équipe soignante l'importance de rédiger les directives anticipées dès l'admission du patient ; et de se faire aider dans les cas difficiles par une réunion collégiale. La mise au point d'un tel protocole impliquerait les mais aussi les infirmières et les aides-soignantes qui sont toujours très proches du patient et de sa famille. Liens d'intérêt : aucun Références