key: cord-0990133-fhp3fnjr authors: Aubry, Régis title: Quels enjeux de nature Ethique l’épidémie de COVID 19 a-t-elle soulevé? date: 2020-06-25 journal: Ethique Sante DOI: 10.1016/j.etiqe.2020.06.003 sha: 57ec5d80e2408da6b2b248c1eb0bdff18eee53b6 doc_id: 990133 cord_uid: fhp3fnjr The COVID-19 epidemic has highlighted or revealed real ethical issues, revealing the limits of knowledge, the limits of life, the limits of our health care system, the limits of our society. Questioning these limits and therefore these ethical issues can be interesting to advance our health system and our society. In this article, we have chosen to address a few ethical questions concerning more particularly the function of care, the relationship to death, the relationship to uncertainty, questions more related to containment measures than to COVID itself and finally a more political questioning on what this epidemic reveals about the fragility of our societies and our economies. We arbitrarily set aside, given the constrained format of the article, some extremely important issues such as research ethics issues, issues related to the notion of patient selection or triage, issues related to the ethics of managing the shortage, and finally issues related to the tracing of contacts or patients. L'épidémie de COVID 19 a mis en lumière ou révélé de véritables questions de nature éthique, révélatrices des limites du savoir, des limites de la vie, des limites de notre système de santé, des limites de notre société. S'interroger sur ces limites et donc sur ces questionnements de nature éthique peut être intéressant pour faire progresser notre système de santé, notre société. Nous faisons le choix dans cet article d'aborder quelques questionnements éthiques en ce qui concerne plus particulièrement la fonction du soin, le rapport à la mort, le rapport à l'incertitude, les questions plus en rapport avec les mesures de confinement qu'avec la COVID à proprement parler et enfin un questionnement plus politique sur ce que cette épidémie révèle de la fragilité de nos sociétés, de nos économies. Nous mettons de côté arbitrairement, compte-tenu du format contraint de l'article, certaines questions pourtant extrêmement importantes comme les questions relatives à l'éthique de la recherche, les questions relatives à la notion de sélection ou de tri des malades, des questions liées à l'éthique de la gestion de la pénurie, et enfin des questions liées au traçage des personnes contacts ou malades. The COVID 19 epidemic has highlighted or revealed real ethical issues, revealing the limits of knowledge, the limits of life, the limits of our health care system, the limits of our society. Questioning these limits and therefore these ethical issues can be interesting to advance our health system and our society. In this article, we have chosen to address a few ethical questions concerning more particularly the function of care, the relationship to death, the relationship to uncertainty, questions more related to containment measures than to COVID itself and finally a more political questioning on what this epidemic reveals about the fragility of our societies and our economies. We arbitrarily set aside, given the constrained format of the article, some extremely important issues such as research ethics issues, issues related to the notion of patient selection or triage, issues related to the ethics of managing the shortage, and finally issues related to the tracing of contacts or patients. Cette épidémie a rappelé le fondement éthique de ce que soigner veut dire. Alors qu'avant l'épidémie les professionnels de santé manifestaient pour se plaindre des conditions de leur travail, des insuffisances du système de santé, ils ont su se mobiliser de façon exceptionnelle et exemplaire, montrant leur abnégation quand la cause ou l'objet du soin est clair. Nous verrons dans le chapitre « perspectives » combien ceci doit être analysé pour repenser le fonctionnement même du système de santé mais au-delà de cette question le soin en période d'épidémie relative à un virus potentiellement mortel a posé la question de ce que soigner peut signifier lorsque soigner est se mettre en danger soi-même, s'exposer au risque contagieux. Soigner est un altruisme. Qu'est-ce que soigner signifie lorsque l'on n'a pas de traitement ? En effet, nous n'avons pas de thérapeutique curative de cette infection virale comme nous n'en n'avons pas pour de très nombreuses atteintes virales. Soigner n'est donc pas guérir. Soigner est d'abord accompagner, traiter les inconforts générés par l'infection, … Soigner est donc faire face à la dimension de l'incertitude. Cette épidémie nous rappelle donc que le soubassement du soin, et l'histoire de la médecine en témoigne, est avant tout l'accompagnement des personnes et le soin palliatif et le tout dans un environnement plus marqué par l'incertitude. Nous verrons que cela est important pour penser la réforme du système de santé : accompagner la détresse des hommes nécessite une compétence spécifique, du temps et une forme de disponibilité qui sont aux antipodes de ce qui caractérise l'environnement du soin à ce jour. Il y a tout d'abord eu une augmentation considérable du nombre de décès : plus de 30 000 décès sont imputés directement au COVID et bien d'autres dont la comptabilité sera probablement impossible à connaître sont en lien avec le COVID ; on peut en particulier penser aux décès qui sont la conséquence, non pas du COVID mais de mesures de confinement et d'isolement qui ont induit chez certaines personnes âgées par exemple un syndrome de désadaptation entrainant la mort assez rapidement. Le nombre important de ces morts qui était quotidiennement égrené dans les médias par la Direction Générale de la Santé, cette litanie a probablement augmenté l'angoisse que peut susciter cette maladie. Mais elle a peut-être augmenté quelque peu la conscience pour chacun de sa propre finitude. Or, la prise de conscience de la mort possible de soi peut conduire à interroger non pas la mort mais la vie, ses limites et donc son sens. Les questions les plus difficiles en rapport avec la mort ont été en réalité des questions dues « au mesure de confinement ». Ces mesures ont entrainé l'impossibilité pour les proches d'accompagner un être cher lorsque celui-ci entrait dans la phase ultime de sa vie. Ne pas pouvoir accompagner une personne à ce point proche qu'elle était un élément de l'équilibre de la vie est une source de déséquilibre évident. Ce déséquilibre a été aggravé par l'impossibilité de voir le corps même des défunts. En effet, du fait de l'épidémie et de la virulence de l'agent viral, une obligation de mise en bière immédiate a été demandée par oie de texte réglementaire. Si, sur le plan sanitaire, une telle mesure pouvait se discuter (elle était d'ailleurs tout à fait discutable et probablement en partie disproportionnée), elle a et aura des effets catastrophiques sur ce que l'on appelle le processus de deuil. N'avoir pas pu voir son proche mort est un facteur évident de deuil compliqué et donc de souffrance et de déséquilibre. On sait en particulier que les rites de séparation entre les vivants et les morts sont une forme de codification culturelle qui est d'une part essentielle pour permettre d'assumer la perte individuellement et qui participe de l'organisation du vivre ensemble. L'absence de place pour l'accompagnement et l'absence de place donnée au mort peut rendre difficile la possibilité de continuer à vivre pour ceux dont le détachement n'a pas pu ou s'est opéré de façon très difficile. On peut ajouter qu'effectivement le respect des personnes, le respect de leur identité, de leur dignité, va jusqu'aux mesures d'humanité en toute fin de vie et après le décès. A ce titre les toilettes mortuaires sont probablement des temps extrêmement importants ; lorsque ces temps ont été empêchés ce sont autant de difficultés à venir qui s'amoncellent. Le virus a précipité la mort de personnes qui étaient déjà fragiles. Mais il a fait mourir également des personnes indemnes de toute pathologie, dans la force de l'âge. De nombreuses personnes sont mortes seules, éloignées de leurs proches, sans ce qui peut faire sens aux uns et aux autres, l'accompagnement. Qu'il s'agisse de personnes isolées dans leur appartement en EHPAD ou qu'il s'agisse de personnes transférées d'un service de réanimation en zone rouge à un autre service de réanimation dans les zones moins impactées, les décès à distance ou les décès sans accompagnement sont une forme de brutalisation pour ceux qui survivent à ces décès. Comment décider lorsqu'on ne sait pas, comment parler de ce que l'on ne maitrise pas ? En effet cette épidémie aura mis en avant de façon parfois paradoxale, l'importance de la place qu'occupe l'incertitude dans le domaine de la santé alors même que nos sociétés imaginaient, ou espéraient, de plus en plus, la médecine comme une science exacte. L'incertitude s'est manifestée à plusieurs niveaux. L'incertitude concernant les manifestations de la maladie dont on a découvert la diversité des symptômes à mesure que l'épidémie se développait. Ainsi le diagnostic n'a pas été et n'est pas toujours aidé. Nombreuses ont été et sont encore semble-t-il des formes asymptomatiques ; nombreuses ont été les formes différentes du syndrome grippal assez courant liées aux infections virales : forme digestive avec des diarrhées, forme cardiaque, forme neurologique avec en particulier la fréquence de céphalées, l'existence de surdité, d'anosmie et d'agueusie… Le tropisme respiratoire et en particulier les syndromes de détresse respiratoire aiguë dont l'origine semble être en rapport avec un emballement immunitaire n'est pas simple à comprendre... L'incertitude concerne également le pronostic de cette maladie qui pouvait débuter de façon banale et se terminer de façon dramatique. L'incertitude a porté aussi sur les personnes à risque puisque certes, l'on avait bien notion que les personnes âgées, les personnes dont l'immunité était perturbée du fait d'une pathologie, de l'âge ou d'un traitement, étaient fragilisées mais les services de réanimation qui accueillaient les cas les plus graves ont admis de nombreuses personnes sans aucun facteur de risque et qui présentaient des complications respiratoires aiguës, gravissimes. Enfin, en secteur d'incertitude, et plus exactement de non-savoir : nous ne savons pas traiter cette maladie, les complications, les symptômes ont été traités mais le traitement de la maladie et de sa cause ne sont aujourd'hui pas connus. Pour terminer sur l'incertitude autour de cette maladie, à ce jour on ne connait pas l'importance et la réalité de l'immunité conférée par l'infection. Et pourtant, en situation d'incertitude il fallait décider et agir. Politiquement, l'inaction aurait pu conduire au développement d'une infection et d'une létalité en masse avec un risque évident de submersion de nos capacités à accueillir et à soigner les personnes malades. L'action mêlée des politiques et des représentants sanitaires était donc nécessaire et les décisions étaient à prendre alors même que l'on n'arrivait pas à comprendre totalement cette maladie. Qui plus est, en France en particulier, il a fallu déterminer une politique efficiente de lutte contre la circulation du virus alors même que le pays était confronté à une situation de pénurie des éléments de protection, essentiellement des masques. En situation de pénurie de masques, la décision a été prise de les réserver aux professionnels de santé exposés afin de maintenir leur capacité à soigner… Ce qui est revenu à décider de ne pas offrir de protections à la majorité des personnes susceptibles de contaminer d'autres personnes ou d'être contaminées ; ceci en contradiction donc avec les mesures utiles de prévention du développement de l'épidémie. C'est ainsi par exemple que les aides à domicile, des personnes dont le métier est essentiel au maintien dans le lieu de vie des personnes très vulnérables, n'ont pas été prioritaires au début de l'épidémie pour l'attribution de masques. Ces personnes ont été très touchées par l'épidémie. Elles ont pu contaminer des personnes fragiles… Comment communiquer utilement en situation d'incertitude ? On peut être surpris de l'envahissement de l'ensemble des médias pour des informations incessantes autour de l'épidémie alors même que l'on ne savait pas grand-chose. Cette hégémonie de l'information n'est-elle pas plus le révélateur d'une angoisse généralisée que d'une véritable action d'information ? Autrement dit est ce que cette permanence de l'information, parfois même sa dilution, n'est pas génératrice ellemême d'angoisse plus que d'information. On peut en effet s'étonner qu'alors qu'il y avait si peu de savoirs on ait tant parlé. On peut s'étonner qu'il y ait eu une sollicitation de tant d'experts alors que l'on manquait d'expertise. On peut interroger le sens de l'information lorsque l'expertise d'un jour était infirmée le lendemain. Est-ce que finalement cette information n'a pas décrédibilisée précisément la notion même d'expertise. N'eut-il pas été possible de communiquer sur l'incertitude ? N'aurait-on pas gagné la confiance et la solidarité en exprimant les limites du savoir ? A l'inverse, l'absence ou l'insuffisance d'humilité dans la plupart des propos desdits experts a été probablement de nature à limiter la confiance des citoyens dans l'information et dans les experts, que ceux-ci s'expriment en tant que experts sanitaires ou experts politiques. L'élément peut-être le plus frappant en cette période d'incertitude et d'angoisse mêlées a été la disparition de la retenue et de la prudence scientifique. Voici que quelques résultats d'études préliminaires (en particulier sur l'HYDROXYCHLOROQUINE) ont été interprétés par des médecins et des scientifiques sans précaution, voire annoncés comme la découverte d'une panacée. Voici que les voix de certains politiques se sont jointes à celles de prétendus scientifiques qui ne l'étaient plus vraiment pour affirmer qu'un espoir équivalait à un savoir. Voici que cet espoir était devenu espérance et qu'il a conduit certaines personnes se sentant autorisées par de telles autorités à franchir le Rubicon de la prudence et à s'exposer à la iatrogénie de ces médicaments. Les médias ont joué paradoxalement un rôle d'amplificateur de la désinformation dans ce contexte transformant des recherches en cours ou des hypothèses en vérité. Les mesures de confinement qui ont été adoptées par le gouvernement sur avis du Conseil Scientifique COVID avaient une double visée, la protection des personnes les plus vulnérables et le ralentissement de la vitesse de propagation du virus afin de limiter la contagion d'une part et d'éviter surtout la submersion de notre système de santé. Si ce confinement généralisé était une mesure justifiée dans la logique de santé publique, une mesure d'intérêt collectif, il n'en reste pas moins vrai qu'elle a pu s'imposer et parfois s'opposer aux intérêts individuels. Autrement dit, il s'est agi d'une privation assumée de la liberté individuelle. Cette tension entre l'intérêt collectif ou les risques individuels, était particulièrement importante concernant les populations vulnérables. -Il y a eu en effet, parfois, une survulnérabilisation des personnes lorsque le confinement a précisément confiné à l'isolement voire à la mort sociale. L'absence de relations sociales peut faire mourir les personnes. On a pu le constater chez des personnes institutionnalisées ou isolées à leur domicile, chez qui le confinement a signifié la privation de relations et en particulier des relations avec des personnes signifiantes, leurs proches. Or, la relation en telle situation peut tout simplement être vitale en ce sens qu'elle donne du sens à la vie (une vie sans aucune relation serait une vie absurde). Pour ces personnes, et en particulier les personnes institutionnalisées qui se sont trouvées confinées dans leur chambre ou dans leur appartement, la question de l'intérêt du confinement par rapport à son risque s'est posée particulièrement à mesure que les consignes de confinement étaient prolongées. Un confinement s'il se prolonge peut aboutir et a abouti dans certains cas, via parfois un taux important de dépression, à des syndromes de désadaptation ou de glissement, conduisant à une mortalité importante liée non pas au COVID mais au confinement et cela alors même que toutes ces mesures étaient prises pour protéger les personnes du risque mortel lié au virus. au moment même où l'accès aux soins et à la santé était en quelque sorte « embolisé » par une organisation tournée quasi exclusivement dans le sens de la prise en charge des personnes atteintes de la COVID. C'est ainsi que certains patients atteints de cancer ont vu leur intervention chirurgicale repoussée ; c'est ainsi également que certaines personnes âgées, fragiles, polypathologiques, n'ont pas été soignées ou n'ont pas osé aller se faire soigner comme il aurait fallu qu'il soit, du fait même de la perturbation du système de santé et du risque de COVID. En d'autres termes, COVID ou pas, certaines personnes vulnérables ont été sur vulnérabilisées du fait des mesures de confinement et de la réorientation du système de santé dans le sens de la prise en charge des personnes atteintes de COVID. Chez ces personnes, le confinement a confiné à l'isolement, voire à la contrainte. Cela est particulièrement vrai pour les personnes qui présentaient des troubles cognitifs sévères, en particulier dans les EHPAD. Nombreuses ont été les personnes qui, du fait de leurs troubles cognitifs sévères, n'ont pas compris ou n'ont pas pu comprendre les mesures de confinement. Ces mesures leur ont été, en quelque sorte, imposées au nom d'un intérêt collectif qu'elles ne percevaient pas. Au minimum, elles ont été ressenties comme telles, comme une entrave à leur autonomie restante, voire comme une agression pouvant conduire à l'effet inverse de celui qui était attendu, à savoir des déambulations, des fugues, une augmentation de la confusion et de l'agitation, qui ont donc augmenté le risque pour ces personnes. Fallait-il considérer dans certains cas que le confinement pouvait être une contrainte ? Et jusqu'où pouvait aller cette contrainte ? Jusqu'à la contention physique ou chimique ? Force a été de constater que le glissement était possible entre confinement, contrainte et maltraitance. L'essentiel est, comme cela a été précisé dans un bulletin de veille éthique du CCNE 1 , en réponse à une saisine du ministère de la Santé, que toute mesure de confinement qui serait une mesure de contrainte soit considérée comme une mesure individuelle, exceptionnelle, devant être considérée comme temporaire et devant donc être interrogée régulièrement. On a peu parlé des personnes handicapées institutionnalisées. On a peu parlé des personnes incarcérées, chez qui le confinement lié à l'incarcération s'est doublé de l'interdiction des visites. On a peu parlé de la santé des malades atteints de certaines pathologies psychiatriques comme les psychoses, les troubles dissociatifs chez qui le confinement a pu majorer l'angoisse, le délire. On a finalement assez peu parlé d'autres formes de populations vulnérables que sont les migrants alors que ces personnes, souvent concentrées dans des centres de rétention, du fait même de la concentration en un lieu contraint, présentaient un risque épidémique majeur. Enfin et peut-être surtout une dimension de la vulnérabilité est celle de la précarité, de la pauvreté. On a peu parlé des personnes vivant des situations de concentration liées à la promiscuité consubstantielle, à la précarité et à la pauvreté : les logements insalubres loués par des marchands de sommeil, les campements ou les bidonvilles en périphérie des villes, ces zones de non-droit qui sont pourtant des réalités, des lieux de vie et de souffrance ont été des lieux à haut risque en pareille circonstance dont il eut été utile de parler. Certes, de nombreuses personnes, sans domicile fixe, ont été suivies ou secourues par les maraudes, elles ont été parfois hébergées, logées, nourries du fait d'authentiques organisations solidaires mais les médias qui pourtant ont beaucoup investi la communication ont très peu saisi cette opportunité de montrer la vulnérabilité de ces hommes et de ces femmes pour parler de leur détresse, de leur souffrance existentielle, ce qui aurait permis de réfléchir sur la question de la vulnérabilité de l'homme en général, sur la nécessité de développer ou de renforcer des formes de solidarité vis-à-vis de ces personnes qui sont des membres de notre société. -Enfin, une autre forme de vulnérabilisation générée par le confinement et la promiscuité ou renforcée par le confinement et la promiscuité s'est traduit par l'augmentation des violences aux personnes pendant cette période de confinement. Les violences dans les couples, les violences aux enfants ont augmenté pendant cette période, comme cela a été pointé par les associations qui s'occupent de maltraitance. Là encore, la question du bénéfice relatif du confinement par rapport aux risques de ces violences, est une réalité que l'on a assez peu questionnée. On peut s'étonner que les politiques d'accompagnement des vulnérabilités (la politique d'accompagnement du vieillissement, politique concernant les migrants, politique concernant les personnes handicapées, les personnes en situation de pauvreté ou de précarité…) n'aient pas été interrogées en tant que telles : en effet, pourquoi, la concentration de ces personnes vulnérables, dans un même lieu, n'a pas été interrogée alors même que cette concentration est un véritable démultiplicateur du risque de diffusion des épidémies en l'occurrence… alors même que le risque épidémique est connu. En d'autres termes, il est vraiment dommage que l'on n'ait pas, à la faveur du confinement, interrogé le sens de ces politiques dans la mesure où il est apparu assez évident que le confinement avait un effet révélateur des vulnérabilités, des inégalités… L'épidémie de COVID a révélé les limites de notre société contemporaine. La question du libéralisme, de la mondialisation a été soulevée à plusieurs moments et à plusieurs niveaux. Par ailleurs, dans notre société mondialisée où la course aux gains se marie à la course au temps, les déplacements ont été facilités avec des temps de déplacements de plus en plus limités par le développement de la rapidité des moyens de transport. Il semble évident que la diffusion du virus SARS/COV2 a été facilitée voire accélérée vers une logique de pandémisation dans ce contexte de facilitation et de mondialisation des déplacements. Nous avons vu, dans un paragraphe précédent, combien cette épidémie a été un révélateur des injustices de nos sociétés contemporaines. Nos sociétés mondialisées, organisées dans une visée de la course à la rentabilité et à la performance génèrent, de façon paradoxale, un nombre important de situations de pauvreté, de précarité et de vulnérabilité. La façon dont nos sociétés modernes traitent ces populations, ces personnes vulnérables en les concentrant dans des lieux ou des établissements a montré ses limites puisque ce sont de véritables poudrières concernant le risque épidémique. On voit bien que l'effet révélateur des limites de ce modèle libéral du fait d'une pandémie comme celle de la COVID devrait nous conduire à repenser nos modèles de sociétés. Qu'en sera-t-il ? A l'extrême, une telle épidémie pose la question du vivre ensemble. Dès lors que, du fait de l'épidémie, l'homme peut devenir peut-être une source de contamination mortelle, on imagine combien les rapports humains qui sont pourtant fondamentaux, constitutifs du « vivre ensemble » d'une société peuvent-être perturbés. C'est toute la question de la confiance et de la relation qui est posée lorsque l'on peut regarder autrui comme une personne dont il faut se méfier au motif qu'elle peut être porteuse du virus. En miroir de cette méfiance c'est finalement un questionnement sur ce que vivre La méfiance d'autrui conduit à l'isolement, à l'exclusion. Les épidémies interrogent la notion de rapport humain, la notion de proximité, la notion de solidarité. Là encore, que ferons-nous de ce que nous aura enseigné cette épidémie ?