key: cord-0959664-jjbctg96 authors: Piraux, Arthur; Mosnier, Anne; Barthelmé, Thierry title: Covigie, une plateforme pour les soignants et les coordonnateurs d’équipes de soins date: 2020-10-20 journal: Actual Pharm DOI: 10.1016/j.actpha.2020.08.014 sha: c16b3aee9abba63c41076010654fcf610a131061 doc_id: 959664 cord_uid: jjbctg96 Covigie is a free online platform set up in response to the COVID-19 global pandemic. It has enabled all caregivers and coordinators of primary care teams to report in real time the initiatives, observations, questions and problems encountered in the fight against the new coronavirus. The Covigie team summarised the information from the various contributions received, individual or collective, sent them to the health authorities and shared them with the caregivers. Dispositif mis en place face à la pandémie mondiale de la Covid-19, Covigie est une plateforme accessible en ligne gratuitement. Elle a permis à tous les soignants et coordonnateurs d'équipes de soins de premier recours de faire remonter en temps réel les initiatives, les observations, les question nements et les problèmes rencontrés dans la lutte contre le nouveau coronavirus. L'équipe Covigie résumait les informations issues des différentes contributions reçues, individuelles ou collectives, les adressait aux autorités sanitaires et les partageait avec les soignants. Covigie is a free online platform set up in response to the COVID-19 global pandemic. It has enabled all caregivers and coordinators of primary care teams to report in real time the initiatives, observations, questions and problems encountered in the fight against the new coronavirus. The Covigie team summarised the information from the various contributions received, individual or collective, sent them to the health authorities and shared them with the caregivers. A u début du mois d'avril 2020, quelques semaines seulement après l'instauration de l'état d'urgence sanitaire en France, la plateforme Covigie a été déployée sous l'égide de la Société française de médecine générale, de la Société francophone des sciences pharmaceutiques officinales et du Collège de la médecine générale 1 . F Le projet Covigie est né d'un constat simple : les autorités sanitaires ne disposaient pas de relais d'infor mation structurés leur permettant d'avoir une vision agrégée et actualisée des retours d'expérience des profes sionnels de santé de premier recours, en première ligne de la lutte contre la Covid-19. La plateforme Covigie a été conçue autour de quatre principes pour combler ce manque : retour d'information, pluriprofessionnalité, simplicité et rapidité. F Au plus fort de la crise, le rôle de Covigie était renforcé lorsque les soignants de premier recours, toutes professions confondues, constituaient des groupes ou des communautés (forums, mailings, WhatsApp, etc.), pour échanger librement sur les difficultés rencontrées, les outils et les solutions mis en place, ainsi que les questions restées en suspens. Un membre de chaque communauté était alors désigné rapporteur et avait pour mission de transmettre les informations de son groupe directement à la plateforme en ligne sur le site www.covigie.org . Des contributions individuelles étaient également possibles. F Les données collectée par Covigie étaient analysées régulièrement pour mettre en lumière les problématiques rencontrées par les professionnels de santé sur le terrain (infirmiers, médecins et pharmaciens principalement), les initiatives ou réponses développées et les signaux qui, pris individuel lement, pouvaient être considérés comme faibles, mais qui, par regroupement avec d'autres équipes, faisaient sens 2 . Des résumés réguliers synthétisaient les principaux enseignements remontés à la plateforme ; ils étaient immédiatement partagés avec les professionnels et transmis aux autorités de tutelle ( ministère des Solidarités et de la Santé, Direction générale de la santé [DGS], agences sanitaires, agences régionales de santé, conseil scientifique Covid-19, etc.) ainsi qu'aux différentes organisations professionnelles (ordres professionnels, unions régionales des professionnels de santé, collèges, académies, etc.). Une communication plus large, via des commu niqués de presse et les réseaux sociaux, s'est peu à peu développée. F Covigie a donc constitué un véritable relais de l'infor mation, fonctionnant à la fois de manière ascendante et descendante. Il importe de souligner que les résumés n'étaient que le reflet de témoignages issus du terrain et ne préjugeaient en rien des Covid-19, faire face à une crise sanitaire inédite dossier messages délivrés par les autorités de santé. Ils ne faisaient pas l'objet de validation préalable par des comités scientifiques. F Le traitement de la Covid-19, affection respiratoire émergente, a eu un retentissement important sur la prise en charge des patients, atteints ou non, tant à l'hôpital qu'en ville. Il a fallu repenser toute l'organisation des soins sur le territoire français et l'adapter en un temps record. F Mi-juin, après deux mois de fonctionnement, Covigie avait reçu plus de 250 contributions, colligées dans quatorze résumés et un bilan. Leur contenu a évolué au cours de l'épidémie. F Dans un premier temps, l'un des éléments qui a préoccupé les soignants, avant même leur propre sécurité et donc l'accès à des équipements de protection individuelle, a été la diminution du recours aux soins des patients atteints d'une pathologie aiguë, autre que la Covid-19, ou chronique. En effet, bon nombre de personnes refusaient de se rendre chez leur médecin généraliste ou dans un service d'accueil des urgences, par crainte d'y être contaminées par la Covid-19. Les pharmaciens d'officine et les infirmiers libéraux étaient en première ligne pour en témoigner, y faire face, mais aussi user de pédagogie envers leurs patients pour les inciter à consulter un médecin sans plus attendre [1] . F L'un des enjeux majeurs de la gestion de cette pandémie a été l'approvisionnement en dispositifs de protection pour les soignants et pour l'entourage des patients traités à domicile. Covigie a fait remonter le manque considérable de matériel, les difficultés d'accès et proposé des solutions pratiques sur le terrain. F Les questionnements concernant les moyens et les règles du diagnostic ont été nombreux, évoluant au fil de l'émergence et de la mise à disposition de nouveaux outils et des connaissances. F Enfin, la problématique de l'accès rapide des soignants aux informations utiles et nécessaires a été soulevée à de nombreuses reprises. Les pharmaciens ont pu profiter d'un canal de communication simple et opérationnel : les alertes sanitaires communiquées par le dossier pharmaceutique (DP-Alertes). Via cet outil, la DGS a diffusé des messages de santé publique et expliqué les modalités d'application des diffé rentes mesures pratiquement quotidiennement pendant plusieurs semaines. Cependant, les nombreuses informations sont parfois venues se contredire, en parti culier celles concernant la distribution des masques. Au-delà des renseignements fournis par les autorités françaises, les professionnels de santé étaient en quête de données validées scientifiquement, utiles pour leur pratique et sur lesquelles ils pouvaient s'appuyer sans crainte. Cette situation inédite a exigé des rééva luations quoti diennes, compliquant les réponses à apporter à l'angoisse grandissante de la population. Les multi ples initiatives qui ont tenté de collecter, trier, résumer, puis donner libre accès aux nombreuses informations n'ont pas toujours permis d'en simplifier l'abord. F Certains médicaments ont joué un rôle important dans cette crise. En dehors des principaux produits utilisés dans le cadre de recherches cliniques au sein des hôpitaux, des soignants ont évoqué précocement (dès le premier résumé [2] ) les possibles bienfaits de la vitamine D3, des inhibiteurs calciques ou des sartans. Par ailleurs, les pharmacies d'officine ont dû faire face à un afflux important de patients désireux d'obtenir du paracétamol dans les dernières heures précédant l'entrée en vigueur du confinement. C'est la raison pour laquelle un arrêté en date du 23 mars a limité à deux le nombre de boîtes de paracétamol délivrables à un patient symptomatique sans ordonnance [3] (une seule boîte en l'absence de symptômes). Quelques jours plus tard, nous apprenions que la prise d'anti-inflammatoires non stéroï diens serait un facteur de gravité de l'affection au coronavirus. Là encore, les équipes officinales ont dû expliquer, rassurer et parfois contre-indiquer l'utilisation de ces molécules. Covid-19, faire face à une crise sanitaire inédite dossier les conseils à diffuser pour l'entre tien des masques grand public. Les affirmations sur l'intérêt ou le danger du port des gants ont été récurrentes et non consensuelles. F D'autres propositions, parfois anecdotiques mais toujours à visée pratique, ont été faites dans des domaines variés, comme celle concernant le lecteur Sesam-Vitale. Afin de limiter les contacts, il a été conseillé de demander au patient d'introduire lui-même sa carte Vitale, et donc d'utiliser des rallonges de câbles USB à cette fin. F Dès le lancement de la plateforme Covigie, les soignants ont souhaité partager et échanger sur les formes cliniques rencontrées, aussi diverses que variées. Les tableaux dits typiques, tels que la toux sèche ou la fièvre et les complications respiratoires nécessitant une hospitalisation, ont été rapidement complétés par la notion de troubles digestifs à type d'épisodes diarrhéiques (notamment chez le patient âgé), mais également de perte de goût et d'odorat [4] . F Les soignants ont également dû faire face à des symptômes moins évo cateurs, du moins dans les premiers temps, tels que : • des formes dermatologiques à type d'engelure [5] ; • des atteintes nerveuses à type de névralgie ; • la présence d'une urticaire fébrile pendant une période de quinze jours ; • une fatigue extrême, persistant plusieurs semaines après l'infection initiale. Mais c'est la problématique des formes prolongées, voire évocatrices de rechute, qui a surtout généré de nombreuses remontées [6] . À la demande de viro logues hospitaliers, les contributeurs Covigie ont été incités à décrire ces tableaux et à les explorer par sérologie et réaction en chaîne par polymérase. Une note de synthèse a été partagée. F Parmi les autres signaux faibles transmis, plusieurs praticiens ont soulevé l'hypothèse d'un effet protecteur de la prise d'antihistaminiques avec, notamment, une réduction des symptômes post-infection. Un médecin exerçant dans le Grand-Est a, par exemple, décrit une absence de cas de Covid-19 chez 89 de ses patients qui prenaient cette thérapeutique au long cours. F De même, certains établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes ont témoigné d'une moindre atteinte des patients souffrant de la maladie d'Alzheimer, sans pour autant pouvoir l'expliquer (séparation du patient des espaces de vie ou effet intimement lié à la maladie elle-même). F Enfin, plusieurs cas de thrombose veineuse à type d'embolie pulmonaire ou de phlébite, survenues à distance de l'infection (six à huit semaines après J0) ont été rapportés. Mise en place très rapidement, au coeur de la crise sanitaire de la Covid-19, la plateforme Covigie avait pour vocation d'être l'outil de tous les professionnels de santé de premier recours, permettant une remontée rapide d'informations pertinentes depuis le terrain jusqu'aux autorités de tutelle, en charge des décisions. Alors que l'épidémie semblait marquer le pas, un premier bilan a montré que Covigie a permis de mettre en lumière certains problèmes liés à la Covid-19, reconnus (difficultés diagnostiques, problèmes d'accès à des équipements de protection) ou non (arbres décisionnels pour des prises en charge parti culières). Des propositions ont été faites, notamment pour communiquer auprès du grand public sur la mise en oeuvre des gestes barrière. Enfin, des hypothèses ont émané de l'observation de signaux faibles, permettant de sensibiliser les autorités sanitaires à une investi gation plus poussée de ces derniers. Le déploiement d'algorithmes à travers les ressources de l'intel lignence artificielle participera à une analyse plus fine de ces signaux. Au-delà des réseaux locaux déjà constitués, Covigie a aussi permis de communiquer de manière pluriprofessionnelle et à l'échelon national. Covigie avait vocation à évoluer après la crise sanitaire. L'objectif était de pérenniser l'outil, d'augmenter sa notoriété et son utilisation, tant par les soignants que par les autorités, et de contribuer plus largement à l'amélioration du système de santé. Des pistes sont déjà en cours d'exploration, comme l'extension au champ de la qualité et de l'organisation des soins, un outil de mise en commun et de signalement orienté sur les communautés professionnelles territoriales de santé et un outil d'enquête à l'initiative des promoteurs, des parte naires ou des autorités. ◗ Ministère des Solidarités et de la Santé Signalons les problèmes, partageons les solutions état d'urgence sanitaire. www.legifrance.gouv.fr/ affi chTexte.do?cidTexte=JOR Signes cliniques d'orientation diagnostique du Covid-19. 1 er mai 2020 Ce que l'on sait des signes dermatologiques liés au Covid Communiqué de l'Académie. Suivi des patients convalescents de la Covid-19 par le médecin généraliste Déclaration de liens d'intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d'intérêts • Covigie est une plateforme numérique, aujourd'hui centrée sur la Covid-19 et destinée à tous les soignants de première ligne.• Ce dispositif est simple d'accès.• C'est un espace de remontée d'informations (problèmes, solutions et signaux faibles) entre soignants et vers les autorités sanitaires.• Les contributions sont compilées par la plateforme, analysées par une équipe dédiée, puis adressées aux autorités sanitaires et partagées entre soignants.• Pendant la crise, la prévention a été au coeur des échanges.