key: cord-0929018-23pgqpei authors: Haas, Laurent title: Avis palliatifs aux urgences durant la première vague covid-19 : quels bénéfices?Une étude auprès des urgentistes date: 2022-04-29 journal: Médecine Palliative DOI: 10.1016/j.medpal.2022.03.003 sha: 270870c1d320fa7ba13365195fed6afbf58c3f3a doc_id: 929018 cord_uid: 23pgqpei En matière de collaboration entre les équipes d’urgences et celles de soins palliatifs de l’hôpital Saint-Louis (AP-HP, Paris), l’irruption brutale du SARS-CoV-2 et ses conséquences sur l’afflux de patients et l’organisation des soins ont, pour un temps au moins, changé la donne. Contraints par la nécessité du moment, et sous l’impulsion de l’équipe mobile de soins palliatifs, l’absence d’échanges structurés a fait place à un échange quotidien au sein de l’unité d’hospitalisation des urgences afin d’anticiper un éventuel appel, de recenser sur place les patients pouvant bénéficier d’un avis et d’une prise en charge palliatifs, mais également d’accompagner les urgentistes et les soignants présents. Au-delà de la description des patients ainsi pris en charge et du bénéfice en termes de prise en charge palliative, une étude qualitative réalisée auprès des urgentistes nous permet d’évaluer le bénéfice réel et ressenti et d’affirmer qu’une présence renforcée de l’EMASP aux urgences permet une meilleure utilisation de ces ressources et une modification subséquente du parcours de certains patients. Ce travail met en évidence la contribution fondamentale que peut apporter une équipe mobile de soins palliatifs à la prise en charge des patients aux urgences et au mieux-être d’équipes quotidiennement confrontées à la fin de vie. Il fait néanmoins apparaitre un défaut patent de culture palliative aux urgences ainsi qu’un manque de réflexe de recours à ce type d’expertise alors que les bénéfices en sont unanimement reconnus, et ouvre ainsi la porte au développement conjoint d’une véritable médecine palliative de l’aigu. At Paris' Saint-Louis hospital, the collaboration and organisation of the ER teams and those from the palliative care units was completely transformed, at least for a time, by the brutal arrival of SARS-CoV-2. Faced with the necessity of the moment, and initiated by the mobile palliative care team, the absence of structured exchanges of information was replaced with a daily briefing within the ER hospitalisation unit, with the aim of anticipating a possible request to quantify any patients requiring evaluation and palliative care on-site, as well as accompanying the ER doctors and other medical staff present. Beyond describing the patients taken into care under this system, and the benefits in terms of palliative care, a qualitative study conducted with ER doctors allowed us to evaluate the real and perceived benefits, and to conclude that a greater presence of the mobile accompaniment and palliative care team at ER allows for better use of their resources and a subsequent modification of the care pipeline for certain patients. This work shows the fundamental contribution that a mobile palliative care team can make in receiving and treating ER patients, while also improving the experience of the teams faced daily with individuals at the end of their lives. However, it also brings to light a patent lack of palliative care culture in ER services, as well as the absence of a reflex to make use of this type of expertise systematically, despite the benefits being universally acknowledged, opening the way for the joint development of veritable palliative care for acute cases. At Paris' Saint-Louis hospital, the collaboration and organisation of the ER teams and those from the palliative care units was completely transformed, at least for a time, by the brutal arrival of SARS-CoV-2. Faced with the necessity of the moment, and initiated by the mobile palliative care team, the absence of structured exchanges of information was replaced with a daily briefing within the ER hospitalisation unit, with the aim of anticipating a possible request to quantify any patients requiring evaluation and palliative care on-site, as well as accompanying the ER doctors and other medical staff present. Beyond describing the patients taken into care under this system, and the benefits in terms of palliative care, a qualitative study conducted with ER doctors allowed us to evaluate the real and perceived benefits, and to conclude that a greater presence of the mobile accompaniment and palliative care team at ER allows for better use of their resources and a subsequent modification of the care pipeline for certain patients. This work shows the fundamental contribution that a mobile palliative care team can make in receiving and treating ER patients, while also improving the experience of the teams faced daily with individuals at the end of their lives. However, it also brings to light a patent lack of palliative care culture in ER services, as well as the absence of a reflex to make use of this type of expertise systematically, despite the benefits being universally acknowledged, opening the way for the joint development of veritable palliative care for acute cases. Conçus il y a plus de cinquante ans, les premiers services d'urgence avaient pour objet de « réguler l'accès à l'hôpital, en fonction du caractère plus ou moins urgent des problèmes posés par les patients dont la prise en charge ne pouvait être programmée par les services de spécialité. » i Au service initialement de l'aval -plus d'ailleurs que structurées pour répondre aux besoins directs des patients-, les urgences sont devenues un (le ?) recours efficace dans de nombreuses situations réellement urgentes ou seulement non programmées. Rançon de leur professionnalisation, l'inexorable accroissement de leur activité a tout à la fois perturbé et soulagé le rythme du reste de l'hôpital, contraint à la rationalisation imposés par les nouveaux outils de pilotage du système de santé. ii Comme souligné dans le rapport de 2017 de la commission des affaires sociales du A l'entrée aux urgences, 3 patients étudiés sur 4 ne présentaient qu'un type de défaillance, au premier rang desquelles une défaillance respiratoire pour 11 des patients au total, alors que 2 patients sur les 12 étaient confus ou agités et qu'un était également pris en charge pour crise convulsive et un dernier pour syndrome infectieux fébrile. Reflet de la symptomatologie respiratoire, la SpO2 était inférieure à 95% dans quasiment les 2/3 des cas, dont la moitié en dessous de 90% en air ambiant (médiane 90,5%). Des constantes hémodynamiques préoccupantes étaient d'emblées notées pour 1/4 et un score de Glasgow abaissé pour 1/3 des patients. La PCR SARS-CoV-2 réalisée aux urgences (résultats obtenus en 8 à 12 heures sur cette période) était positive dans 10 cas sur 12. La facilité à contacter l'EMASP a été cotée en moyenne à 6,8 pour une médiane à 7/10. L'appel à l'EMASP aura permis une aide à la décision ou une modification de la prise en charge initiale dans 10 cas sur 12. Cinq urgentistes sur les neuf ayant répondu ont considéré que l'apport de l'EMASP leur avait permis de gagner du temps. Cet apport a également permis à 8 urgentistes consultés sur 9 de se sentir soulagés par le partage de la prise de décision. Sept d'entre eux ont considéré que la collégialité avec l'EMASP permettait une meilleure communication avec les proches ou la famille des patients. les commentaires associés aux réponses témoignaient plutôt d'un temps long mais nécessaire, inconstamment pris dans la routine des urgences et ici appréhendé (« mécanisme d'interaction chronophage », « je ne considère pas que l'on puisse « gagner du temps » mais plutôt prendre le temps de discuter du dossier »). Nous retrouvons là cette « surcharge d'exigences inscrites dans la seule immédiateté́ » soulignée par Zaki Laïdi et évoquée plus haut xiii , qui fait ce temps particulier de l'urgence derrière lequel il pourrait être si tentant de s'abriter : « l'urgence est trop proche de la mort imminente pour qu'on ait envie de s'y préparer » xiv . S'y préparer justement… Une courte majorité des médecins interrogés a considéré que l'interaction avec l'EMASP telle que pratiquée au quotidien durant la période du premier confinement avait un retentissement sur la culture ou les compétences de 15 l'équipe soignante. Cela a été tout à la fois noté dans les résultats quantitatifs et dans les commentaires ajoutés, lesquels relèvent avant tout une augmentation du réflexe d'appel de l'EMASP (« je n'avais que très peu de contact avec l'EMASP aux urgences et n'avais donc plus le réflexe de les appeler en cas de besoin ») plus qu'une acculturation profonde (« je suis déjà sensibilisée au sujet, malheureusement le reste de l'équipe ne participe pas à ces discussions »). Il est probable à ce stade qu'une étude qualitative plus élaborée aurait permis une analyse plus fine et précise des modalités d'interaction entre équipes de soins palliatifs et des urgences ainsi que de la perception de cette collaboration par les urgentistes, mais également par les professionnels des soins palliatifs. La pandémie en cours a renforcé le besoin d'équipes et d'unités de soins palliatifs dédiées aux patients en fin de vie. Malgré toutes ses limites, ce travail met en évidence la contribution fondamentale que peut apporter une équipe mobile de soins palliatifs à la prise en charge des patients aux urgences et au mieux-être d'équipes quotidiennement confrontées à la fin de vie. Car au-delà d'une spécialité d'organe justement, la médecine d'urgence est d'abord une médecine des circonstances auxquelles l'adaptation prend une place centrale. Les Urgences. Questions au système de santé Intervention retranscrite dans les actes du séminaire sur les urgences hospitalières (« Les urgences : un symptôme des changements de la société ? »), organisé en 2015 par la chaire santé de Sciences Po, sous la direction des Drs Mathias Wargon et Romain Hellmann La tyrannie de l'urgence. Les grandes conférences. Montréal : Éditions Fides viii Stefan Timmermans, Sudden Death and the Myth of CPR Early Intervention of Palliative Care in the Emergency Department During the COVID-19 Pandemic Palliative Care Consultation in Hospitalized Patients With COVID-19: A Retrospective Study of Characteristics, Outcomes, and Unmet Needs The Impact of Integrating Palliative Medicine Into COVID-19 Critical Care The Experience of Emergency Department Providers With Embedded Palliative Care During COVID Urgence et mort : le refus vital de ces questions Palliative care in the emergency department: an educational investigation and intervention The Evolution and Dissemination of the Education in Palliative and End-of-Life Care Program Quest TE; Improving Palliative Care in Emergency Medicine Board. Integration of palliative care into emergency medicine: the Improving Palliative Care in Emergency Medicine (IPAL-EM) collaboration Does palliative care have a future in the emergency department? Discussions with attending emergency physicians Perceptions and utilization of palliative care services in acute care hospitals Intérêt d'une équipe mobile gériatrique aux urgences : retour sur dix ans d'expérience Interventions aux urgences d'une équipe mobile de gériatrie et articulation avec un suivi psychologique en gériatrie aiguë lors de la première vague de COVID-19 « Le travail du médecin aux urgences : reniement, adaptation ou transformation ? », Nouvelle revue de psychosociologie Palliative care in the emergency department: A systematic literature qualitative review and thematic synthesis Development of Hospice and Palliative Medicine Knowledge and Skills for Emergency Medicine Residents: Using the Accreditation Council for Graduate Medical Education Milestone Framework Au final, comment jugez-vous la collaboration urg/SP durant le premier confinement : 0 à 10 PerspectivesSouhaitez-vous poursuivre l'interaction établie durant le premier confinement : 0 à 10 Comment l'améliorer ? (texte libre)