key: cord-0922310-zlkd2v3s authors: Morau, Estelle; Bouvet, Lionel; Dewandre, Pierre Yves; Vial, Florence; Bonnin, Martine; Chassard, Dominique; Julliac, Benjamin; Bouthors, Anne Sophie; Bonnet, Marie Pïerre; Fisher, Catherine; Gonzalez, Max; Keita, Hawa; Gouez, Agnès Le; Rackelboom, Thibault; Benhamou, Dan; Mercier, Frédéric J. title: COVID- 19 GROSSESSE et ANESTHESIE REANIMATION OBSTETRICALE: Bilan et perspectives date: 2022-02-02 journal: Prat Anesth Reanim DOI: 10.1016/j.pratan.2022.01.007 sha: 8e2e8f975a15aab0c0d1ad3a03660fd3d8f1016d doc_id: 922310 cord_uid: zlkd2v3s nan J o u r n a l P r e -p r o o f Bilan et perspectives pregnancy , anaesthesia and intensive care : report and prospect Par le groupe d'experts du CARO* La crise sanitaire et le confinement, liés à la Covid-19, maladie du SARS-CoV2, ont eu entre autres conséquences une forte diminution des naissances lors de l'hiver 2020-2021, d'après les statistiques nationales de INSEE. Les inquiétudes liées à la pandémie de Covid-19 ont conduit un certain nombre de femmes à reporter voir à abandonner leur projet de maternité. Après plusieurs vagues épidémiques et plusieurs mois de recul les messages concernant les femmes enceintes et leur prise en charge se sont enrichis et ont évolués. Si l'incidence de la maladie ne semble pas être plus élevée que dans une population du même âge hors grossesse, la population obstétricale semble plus à risque de développer une forme grave de la Covid-19. Selon les études, le risque de séjour en soins critiques semble 3 à 5 fois plus fréquent chez les patientes enceintes infectées par le SARS-CoV2 que chez des patientes infectées non enceintes ; chez les patientes infectées et symptomatiques les pathologies obstétricales de type pré éclampsie, prématurité, retard de croissance intra utérin ou mort foetale in utero apparaissent également plus fréquentes (1, 2, 3) . Il semble que le type de variant joue sur le risque de sévérité du tableau clinique avec une severité augmentée pour le variant delta. Les femmes enceintes ont dès le début de l'épidémie, été suspectées de constituer un groupe à risque de forme graves par le Haut Conseil de la Santé Publique et la Haute Autorité de Santé. Elles ont été prioritairement été encouragées à la vaccination par un vaccin à ARNm (et non par un vaccin à virus atténué). En effet, la vaccination est recommandée pour les femmes enceintes et ce quel que soit le trimestre de la grossesse ou la période du post partum, y compris pendant l'allaitement, aux vues des bénéfices qu'elle présente pour la femme et son nouveau-né. Il est désormais prouvé que la vaccination est efficace chez la femme enceinte comme dans la population générale en réduisant l'incidence des infections, des hospitalisations et des formes sévères (4) . Les études en population ne mettent pas en évidence d'augmentation du risque d'effet indésirable suite à l'injection, que ce soit sur le plan général ou obstétrical (5). Vue la baisse physiologique de l'immunité en cours de grossesse et la vulnérabilité particulière du système cardio-respiratoire de la femme enceinte, le CNOGF (Collège National des Obstétriciens et Gynécologues Francais), le GRIG ( Groupe de Recherche sur les Infections pendant la Grossesse), en France, et l'ACOG (American College of Obstetricians and Gynecologists) considèrent qu'une 3 ème dose de vaccin doit être proposée aux femmes enceintes ou ayant un désir de grossesse lorsque le schéma initial date de plus de 6 mois (6,7). Comme dans la population générale, les modalités de la prise en charge des femmes enceintes présentant une infection à SARS-CoV2 se discutent selon les paramètres cliniques de fréquence respiratoire (FR) et de saturation en oxygène (SpO2). Il est recommandé de surveiller en milieu hospitaliser les patientes présentant une pneumopathie hypoxémiante oxygéno-requérante lorsque ces paramètres cliniques sont observés : SpO2<98 % en air ambiant et FR>22/min, particulièrement si cet état est associé à des comorbidités (diabète, insuffisance cardiaque, rénale, respiratoire, hépatique, immunodépression, greffe, néoplasie). Le 3 ème trimestre de la grossesse ainsi qu'un surpoids, voire une obésité constituent également une comorbidité et ce même en l'absence de signe de gravité initial (8) . En raison de l'impact de la grossesse sur le système respiratoire et cardio-vasculaire et du risque de prématurité, un suivi attentif doit être réalisé entre J6 et J12 d'évolution de l'infection, correspondant à la période pendant laquelle une aggravation rapide est susceptible de survenir comme en population générale. Les critères de gravité impliquant une hospitalisation en soins critiques restent la présence d'une pneumopathie hypoxémiante oxygéno-requérante associée à des comorbidités, ou des paramètres en air ambiant comme suit: PaO2 ≤70mmHg, SpO2 < 94%, FR > 30/min (9). L'indication d'un transfert vers un établissement de référence de niveau 3 avec une réanimation adulte est à envisager selon la gravité clinique, le terme et la situation obstétricale. Le confinement appliqué en début de pandémie a vu émerger de nouveaux modes de communication entre professionnels de santé et parturientes. La téléconsultation (consultation médicale grâce à un système de visioconférence) s'est développée et a permis de réaliser à distance des évaluations pré anesthésiques. Une page internet (www.preanesthesie.fr) a été lancée pour informer et guider les patientes dans la préparation de leur consultation. Dès le début de la pandémie, la compréhension de l'atteinte préférentiellement respiratoire du virus, a conduit à renforcer la prédilection pour l'anesthésie locorégionale lors de la prise en charge des accouchements et ce quel que soit la voie d'accouchement. La mise en place précoce d'un cathéter péridural permettant une analgésie efficace, limite l'effort ventilatoire lié au travail et à la douleur obstétricale. Elle permet également d'éviter une anesthésie générale en urgence sur poumon lésé en cas de complication obstétricale. De même en situation de sauvetage maternel, la césarienne est réalisée préférentiellement sous anesthésie loco régionale. L'utilisation de la technique de péri-rachianesthésie combinée permet de limiter le retentissement hémodynamique du bloc sympathique. Associé au maintien de l'oxygénation nasale (même à haut débit) et à une position proclive de la table d'intervention la césarienne peut être réalisée sans avoir recours à une intubation/ventilation chez une patiente qui n'en aurait pas eu l'indication hors césarienne. Des anomalies de la coagulation ont été rapportées sporadiquement chez les parturientes infectées, il ne semble néanmoins pas justifié de réaliser systématiquement à l'entrée en salle d'accouchement, un contrôle de bilan de coagulation avec numération plaquettaire pour la réalisation d'une anesthésie périmédullaire en l'absence de signes hémorragiques ou d'atteinte COVID sévère. Si les protocoles d'anesthésie sont restés globalement identiques durant les vagues successives, les organisations se sont adaptées au fur et à mesure des connaissances sur les risques de transmission. Ainsi l'isolement strict des femmes enceintes a pu être progressivement modulé notamment grâce à la réalisation facilitée des tests afin de permettre la présence du père en salle d'accouchement et en suites de couches. De même la prudence envers certaines molécules comme les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et les corticoïdes n'a plus lieu d'être et ces médicaments ont repris leur place dans la pharmacopée de l'analgésie multimodale et de la prévention des nausées et vomissements. La grossesse induit un état d'hypercoagulabilité avec un risque de thrombose veineuse profonde 6 fois plus élevé qu'en dehors de la grossesse [10] . L'infection COVID-19 étant ellemême associée à une majoration du risque thrombotique en lien avec l'état inflammatoire systémique induit et la sévérité de la maladie, la crainte d'une augmentation du risque thrombo-embolique chez les femmes enceintes malades de la COVID-19, a été soulevée dès le début de la pandémie. Cette crainte a induit des pratiques très hétérogènes tandis que les préconisations étaient basées sur des analyses d'une littérature composée essentiellement d'études rétrospectives ou de cas cliniques, et seulement de quelques séries prospectives [11, 12] . Il ressort de ces études des données plutôt rassurantes indiquant que le risque thrombotique semble modérément majoré par la COVID-19 chez la femme enceinte [13, 14] . Il est ainsi schématiquement possible de distinguer quatre situations pour la prise en charge du risque thrombotique : patientes asymptomatiques ou pauci-symptomatiques, patientes hospitalisées pour une prise en charge de la COVID-19, patiente présentant des signes de gravité liés à la COVID-19, et patientes ayant une thrombose veineuse profonde documentée [15] . Pour les femmes enceintes atteintes d'une forme asymptomatique ou pauci-symptomatique, la prise en charge est ambulatoire, avec l'utilisation d'une contention veineuse élastique et une prévention médicamenteuse du risque thrombo-embolique suivant la présence ou non d'autres facteurs de risque et de comorbidités [11, 16] . Chez les femmes enceintes hospitalisées et atteintes de COVID-19, une thromboprophylaxie par héparines de bas poids moléculaire (HBPM) a été suggérée pour une durée de 10 à 14 jours [11] , après quoi la nécessité de l'anticoagulation devait être réévaluée en fonction de la balance risques-bénéfices, qui dépend de la sévérité de la maladie et des comorbidités. Pour les femmes souffrant de formes sévères de la COVID-19 (notamment celles qui ont un besoin élevé et continu d'oxygène), la thromboprophylaxie par HBPM devrait probablement être poursuivie pendant toute la durée de la grossesse et jusqu'à 6 semaines après l'accouchement, ce qui peut cependant interférer avec la pose d'un cathéter péridural ou la gestion urgente d'une complication obstétricale [17] . La dose optimale d'HBPM lors de ces prises en charge reste à déterminer. Si l'utilisation de doses intermédiaires est plus fréquente lors des formes sévères [18] , le niveau de preuve reste insuffisant pour recommander cette pratique qui doit être contrebalancée par la majoration du risque hémorragique qui l'accompagne [13, 15] . Quant aux femmes enceintes atteintes de la COVID-19 qui présentent une thrombose veineuse profonde documentée, la prise en charge thérapeutique est comparable à celle d'une thrombose veineuse profonde en cours de grossesse qui repose sur un traitement anticoagulant par HBPM poursuivi jusqu'à six semaines en post-partum pour une durée totale d'au moins trois mois [14, 19] . Les vagues successives d'infections dues aux différents variants du SARS-CoV-2 nous ont permis d'appréhender le risque accru de formes graves au sein de la population obstétricale et de développer des stratégies plus adaptées en matière de prévention, surveillance et traitement de cette pathologie y compris dans ses formes sévères relevant d'une prise en charge en réanimation. Cependant, l'histoire ne semble pas terminée, de nouveaux variants plus ou moins sévères et contagieux émergent et continueront d'émerger, questionnant et re-questionnant nos pratiques et la prise en charge des femmes enceintes atteintes du COVID-19. Maternal and Neonatal Morbidity and Mortality Among Pregnant Women With and Without COVID-19 Infection: The INTERCOVID Multinational Cohort Study The impact of COVID-19 on pregnancy outcomes: a systematic review and metaanalysis Systematic Review and Meta-Analysis of COVID Maternal and Neonatal Clinical Features and Pregnancy Outcomes to Effectiveness of the BNT162b2 mRNA COVID-19 vaccine in pregnancy Meaney-Delman DM, CDC v-safe COVID-19 Pregnancy Registry Team Infection par le SARS-CoV-2 chez les femmes enceintes : état des connaissances et proposition de prise en charge par CNGOF [SARS-CoV-2 infection during pregnancy Benhamou D; Obstetric Anaesthesia and Critical Care Club Working Group. Anaesthesia and intensive care in obstetrics during the COVID-19 pandemic Ante-and postnatal risk factors of venous thrombosis: a hospital-based case-control study COVID-19 coagulopathy in pregnancy: Critical review, preliminary recommendations, and ISTH registry-Communication from the ISTH SSC for Women's Health Critical Care Club Working G. Coagulation changes and thromboembolic risk in COVID-19 obstetric patients A critical review of the pathophysiology of thrombotic complications and clinical practice recommendations for thromboprophylaxis in pregnant patients with COVID-19 Haemostatic and thrombo-embolic complications in pregnant women with COVID-19: a systematic review and critical analysis Anticoagulation for COVID-19 Patients: A Bird's-Eye View Reducing the Risk of Venous Thromboembolism during Pregnancy and the Puerperium Neuraxial Anesthesia in Obstetric Patients Receiving Thromboprophylaxis With Unfractionated or Low-Molecular-Weight Heparin: A Systematic Review of Spinal Epidural Hematoma Physician experiences in management of COVID-19-associated coagulopathy in pregnancy: Communication from the ISTH SSC Subcommittee on Women's Health Issues in Thrombosis and Haemostasis Antithrombotic Therapy for VTE Disease: CHEST Guideline and Expert Panel Report Club Anesthésie Réanimation Obstétricale Site internet Département d'anesthésie réanimation et médecine périoperatoire