key: cord-0900510-w6zsh1sn authors: Lamblin, G; Golfier, F; Peron, J; Moret, S; Chene, G; Nohuz, E; Lebon, M; Dubernard, G; Cortet, M title: Impact de la pandémie de COVID-19 sur les modifications thérapeutiques des patientes atteintes de cancers gynécologiques date: 2020-09-30 journal: Gynecol Obstet Fertil Senol DOI: 10.1016/j.gofs.2020.09.011 sha: 1a2648d315a968bf297c22914c8fa7c65aa1adc8 doc_id: 900510 cord_uid: w6zsh1sn Objectif: La situation sanitaire exceptionnelle lié à la pandémie au coronavirus SARS-CoV-2 (COVID-19) a nécessité une profonde et rapide adaptation des pratiques de prise en charge en cancérologie gynécologique. L’objectif principal était d’estimer la proportion de patientes avec modification de traitement. Méthode: Etude prospective multicentrique menée dans 3 services universitaires de gynécologie obstétrique (Hospices Civils de Lyon, France) durant la période de confinement (16 mars au 11 mai 2020). Toutes les patientes présentant un cancer du sein non métastatique ou un cancer gynécologique ont été inclues. Les traitements prévus, réellement réalisés, reportés, les délais du report et les modifications organisationnelles (RCP, téléconsultations) ont été étudiés. Résultats: 205 patientes consécutives ont été inclues, âge moyen de 60,5 +-1,0. Sept patientes (3,4%) ont présenté une infection au SARS-CoV-2, dont 2 sont décédées. Le traitement prévu a été maintenu pour 122 patientes (59,5%), reporté pour 72 patientes (35,1%), annulé pour 11 patientes (5,4%). Parmi les 115 interventions chirurgicales prévues, 40 (34.8%) ont été reportées, 7 annulées (6,1%) et 9 patientes (7,8%) ont eu une modification du geste chirurgical. Parmi les 59 (28,8%) traitements par radiothérapie prévus, 24 (40,7%) reportée et 2 (3,4%) annulés. Parmi les 56 (27,3%) traitements par chimiothérapie prévus, 8 (14,3%) ont été reportés et 2 (3,6%) annulés. Les dossiers de 145 patientes (70,7%) ont été discutées en RCP. Cent cinquante-huit patientes (77%) ont bénéficié d’un système de téléconsultation. Conclusion: Notre étude a permis d’évaluer l’impact de la pandémie de COVID-19 sur la prise en charge thérapeutique des patientes atteintes de cancers gynécologiques durant la période de confinement. Cela améliorera notre prise en charge en cas de rebond épidémique ou de crise sanitaire future. Objective: The exceptional health situation related to the SARS-Cov2 coronavirus pandemic (COVID-19) required a deep and very quickly adaptation of management practices in gynecological cancer. The main objective is to estimate the proportion of patients with treatment modifications. Method: This is a multicenter prospective study conducted in 3 university gynecological cancer departments (HCLyon, France) during the period of confinement (march 16 to may 11, 2020). All patients with non-metastatic breast cancer or gynecological cancer were included. The planned treatment, postponement, delay and organizational modifications (RCP, teleconsultations) were studied. Results: 205 consecutive patients were included, average age 60.5 +- 1.0. 7 patients (3.4%) had SARS-Cov-2 infection, 2 patients died. 122 patients (59.5%) had a treatment maintained, 72 patients (35.1%) postponed, 11 patients (5.4%) cancelled. Of the 115 (56.1%) planned surgeries, 40 (34.8%) postponed, 7 cancelled (6.1%). 9 patients (7.8%) had a surgical modification. Of the 59 (28.8%) radiotherapy treatments scheduled, 24 (40.7%) postponed and 2 (3.4%) cancelled. Of the 56 (27.3%) chemotherapy treatment planned, 8 (14.3%) postponed and 2 (3.6%) cancelled. 145 patientes (70.7%) have been discussed in multidisciplinary meeting. One hundred and fifty-eight patients (77%) had a teleconsultation system. Conclusion: Our study assessed the impact of the COVID-19 pandemic on therapeutic management of patients with gynecological cancer during the period of confinement. This will probably improve our management of an eventual epidemic rebound or future health crisis. La pandémie à coronavirus SARS-CoV-2 (COVID-19) a provoqué une crise sanitaire exceptionnelle dans la plupart des pays du monde au cours du premier semestre 2020. L'organisation mondiale de la santé a évoqué une « crise sanitaire mondiale majeure de notre époque » le 16 mars 2020 [1] . Le plus souvent à l'origine d'un syndrome infectieux sans gravité, l'infection au SARS-CoV-2 peut être grave chez les sujets fragiles notamment atteints de cancer, avec un risque de forme grave qui serait 5 fois plus élevé que celui de la population sans cancer et un risque de décès multiplié par 8 [2] [3] [4] . De plus, le risque d'infection au SARS-CoV-2 serait 3 fois plus important en cas de cancer [2, 3, 5] . En France, pour faire face à cette pandémie, le confinement de la population s'est appliqué du 16 mars 2020 au 11 mai 2020 en s'inscrivant dans un ensemble de politiques de restrictions de contacts humains et de déplacements [6] . L'état d'urgence sanitaire a également été déclaré au journal officiel à partir du 24 mars 2020, avec une suspension de toutes les activités médicales et chirurgicales non urgentes [7] . L'objectif était de pouvoir d'une part assurer la prise en charge des patients atteints de COVID-19 mais également de pouvoir proposer une prise en charge sans perte de chance à toutes les personnes nécessitant des soins durant cette période. Le contexte pandémique et la saturation des services de réanimation a provoqué une réorganisation en urgence de l'offre de soins et une adaptation de nos pratiques de prise en charge des patientes présentant un cancer gynécologique ou un cancer du sein. L'objectif du Haut Conseil de Santé Publique était de pouvoir assurer une prise en charge oncologique adéquate en limitant le risque de perte de chance concernant la prise en charge du cancer. Pour cela, les propositions étaient de sanctuariser les filières de soins oncologiques, de privilégier les alternatives thérapeutiques limitant les contacts humains, et de prioriser la prise en charge des patients les plus à risque de perte de chance oncologique en cas de déport ou d'annulation de leurs traitements [8] . Les sociétés savantes ont alors émis des recommandations de prise en charge pour guider les praticiens dans leurs décisions [9] [10] [11] [12] . L'hypothèse de notre étude est que la situation sanitaire exceptionnelle liée à cette pandémie aurait entrainé une modification de prise en charge des patientes atteintes de cancer gynécologique et cancer du sein. L'objectif principal était d'estimer la proportion de patientes qui ont vu leur prise en charge thérapeutique modifiée pendant la période de confinement lié à la pandémie de COVID-19. L'objectif secondaire était d'évaluer les modifications organisationnelles (modification d'organisation des RCP, nombre de téléconsultations) pour la prise en charge des patientes atteintes de cancers gynécologiques durant cette période. Les données concernant les prises en charges thérapeutiques (chirurgie, radiothérapie, chimiothérapie, hormonothérapie) prévues et celles réellement réalisées ont été recueillies. Les dates de prise en charge initialement prévues, le report éventuel de la prise en charge à une date ultérieure et le délai en jours du report ont été recueillis. Les raisons de report de chaque traitement étaient également recueillies pour chaque patiente. Le critère de jugement principal de notre étude est le pourcentage de patientes avec une modification de la prise en charge thérapeutique prévue (chirurgie, chimiothérapie, radiothérapie, hormonothérapie) durant la période d'inclusion. Les tumeurs étaient classées en fonction de leur type histologique définis par la classification internationale de l'OMS [13, 14] . Parmi les 59 (28,8%) traitements par radiothérapie initialement prévus, 24 (40,7%) ont été reportés et 2 (3,4%) ont été annulés. Le délai moyen de report de radiothérapie était de 36 jours. Concernant les motifs de report de radiothérapie, 15 (65,2%) ont été reportées en raison de l'organisation du service, 6 pour un motif médical (cholécystite, 3 patientes suspectes de COVID-19, 1 fistule urinaire, co-morbidités de la patiente) et 2 (8,7%) par demande personnelle de la patiente. Parmi les 56 (27,3%) traitements par chimiothérapie initialement prévus, 8 (14,3%) ont été reportés et 2 (3,6%) ont été annulés. Le délai moyen de report de chimiothérapie était de 21 jours. Concernant les motifs de report de chimiothérapie, 3 (37,5%) pour organisation de service, 1 demande de la patiente (12,5%) et 4 (50%) pour raison médicale (âge, infection COVID-19 pour 2 patientes, 1 pyélonéphrite aigue sur sonde JJ) Parmi les 12 (5,8%) traitements par hormonothérapie initialement prévus, 2 (16,7%) ont été reportés avec un délai moyen de report de 24 jours (tableau 3), la 1ère patiente en raison d'un report de radiothérapie, la 2ème pour une infection au COVID-19. Parmi les 205 patientes, 145 patientes (70,7%) ont été discutées en RCP de cancérologie gynécologique durant la période de confinement. 28 patientes (13,6%) ont eu une RCP supplémentaire pour valider un changement de prise en charge thérapeutique (tableau 5). Quatre-vingt patientes (39%) ont eu 1 téléconsultation, 41 (20%) patientes ont eu 2 téléconsultations (tableau 5). La situation sanitaire exceptionnelle lié à la pandémie au COVID-19 a nécessité une profonde adaptation de nos pratiques de prise en charge en oncologie gynécologique. Après une campagne sanitaire de recommandation des gestes barrières et de distanciation sociale, la décision d'un confinement avec restriction des déplacements au strict nécessaire au niveau national est annoncée le lundi 16 mars par le président de la république puis d'un état d'urgence sanitaire le 23 mars 2020 [6, 7] . Actuellement, très peu de données existantes permettent de définir l'impact réel de la pandémie au COVID-19 sur la prise en charge des patientes atteintes de cancers gynécologique ce qui justifie notre travail. importantes rendant le risque de complications plus élevé (sujets âgés, pathologie respiratoire chronique, pathologie cardiaque, immunodépression, antécédent personnel de cancer) [5] . Selon les données chinoises, le taux de mortalité à 30 jours concernant les patients infectés par un coronavirus était significativement supérieur en cas de cancer (24,4% versus 3,0%, p<0,001) [5] . Dans cette étude les facteurs de risque de mortalité à 30 jours en analyse multiparamétrique étaient l'âge supérieur à 65 ans ( Concernant l'organisation des réunions de concertation pluridisciplinaire en cancérologie, l'INCA a émis le 18 mars 2020 puis le 16 avril 2020 des conseils et préconisations [15] . Il était recommandé de maintenir les RCP sous forme de réunions dématérialisées, en s'appuyant sur la visioconférence ou téléconférence. Dans notre étude, toutes les RCP durant cette période ont été réalisées en visioconférence à l'aide du logiciel Skype pro. Le nombre moyen de patientes présentées en RCP durant la période de confinement sur les 3 services était de 145, soit une baisse de 70% de patientes présentées en comparaison avec l'année 2019 (491 patientes) sur la même période. La suspension des programmes de dépistage organisé pendant la pandémie et la baisse du nombre de cancers diagnostiqués expliquent probablement cette baisse significative de dossiers discutés en RCP durant la période. Il est également intéressant de noter que 13% des patientes ont eu une RCP supplémentaire pour un changement de thérapeutique. La RCP permettait d'assurer que toute décision de suspension ou d'arrêt d'un traitement faisait suite à un examen de la balance bénéfices/risques appréciée au cas par cas, dans le contexte de déprogrammation provisoire d'actes médicaux ou chirurgicaux ou de mise en place de traitement d'attente. Concernant la prise en charge chirurgicale des cancers gynécologiques en période de pandémie COVID-19, le groupe FrancoGyn pour le Collège National des Gynécologues-Obstétriciens Français a également émis des recommandations le 23 mars 2020 [10, 11] . Si l'objectif primaire restait la prise en charge thérapeutique des patientes, toutes les alternatives à la chirurgie devaient être considérées. L'objectif prioritaire était d'éviter les complications post-opératoires, le recours aux soins intensifs et l'occupation des lits de réanimation [10, 11] Concernant la prise en charge des patientes en radiothérapie, la Société Française de Radiothérapie Oncologique (SFRO) et la French Breast Cancer Intergroup-Unicancer ont établi des recommandations pour l'organisation des soins [12] . Le schéma hypofractionné devait être privilégié pour la prise en charge des cancers du sein lorsqu'il était possible et adapté selon les dernières recommandations [17] [18] [19] [20] . Le schéma hypofractionné était proposé pour les patientes de plus de 50 ans de stade T1-T2 NO et pour les patientes de plus de 60 ans avec envahissement ganglionnaire. Concernant la pris en charge des cancers du sein, il était recommandé une chirurgie peu invasive, en ambulatoire, peu risquée. L'intervention était maintenue sauf pour les patientes avec co-morbidités importantes et tumeur hormonosensible. En cas de mastectomie avec indication de reconstruction mammaire immédiate, il était recommandé de différer le geste de reconstruction. Dans notre étude, parmi les 9 patientes avec un geste de RMI proposé, 5 patientes (55,5%) n'ont pas bénéficié d'une reconstruction mammaire immédiate durant la chirurgie mammaire. Il était également recommandé de reporter toutes les chirurgies de reconstruction mammaire secondaire après la pandémie. Aucun geste de reconstruction mammaire secondaire n'a été réalisé dans notre population. Concernant le cancer de l'ovaire, les recommandations préconisaient de distinguer les stades précoces des stades avancés [21] . Pour les cancers de l'ovaire au stade précoce, il était proposé de différer toute chirurgie de stadification de 1 à 2 mois. Parmi les 6 patientes au stade I-II, il y a 1 report (16,7%) et aucune annulation. Pour les stades III, il était recommandé de privilégier la chimiothérapie néo adjuvante, d'éviter l'utilisation de chimiothérapie avec hyperthermie intra-péritonéale et de différer le geste chirurgical après 6 cures de chimiothérapie néo-adjuvante [21] . Parmi les 18 patientes au stade III-IV, il y a 6 reports (33,3%) et 1 annulation (5,56%). Parmi les 11 cytoréductions prévues, 4 ont été reportées après la fin du confinement. Pour les cancers de l'endomètre au stade précoce, la chirurgie mini invasive coelioscopique +/-robot assistée était privilégiée [22] . Parmi les 16 hystérectomies, 7 ont été réalisées par laparotomie, 6 par L'un des aspects qui nous semble aussi crucial mais qui n'a pas pu être étudié ici seraient les conséquences indirectes du confinement avec la forte diminution de l'activité de dépistage du cancer, l'augmentation du délai diagnostique après le premier symptôme du cancer, et la suspension de nombreux soins de support durant la période avec un impact probablement négatif sur les patientes. Notre étude n'a pas étudié ces facteurs déterminants pour l'accès à la prise en charge et la qualité de la prise en charge des patientes. Concernant les points forts de notre étude, il s'agit de la première étude prospective permettant d'évaluer l'impact de la pandémie de COVID-19 sur la prise en charge des patientes atteintes de cancers gynécologiques et mammaires. Elle a également permis de mesurer avec précision les adaptations organisationnelles rapides (RCP, téléconsultations) mises en place durant la période de confinement et d'évaluer la proportion de patientes concernées par ces modifications. De plus, l'effectif de la population permet également une bonne représentation de l'ensemble des cancers gynécologiques et mammaires. La situation sanitaire exceptionnelle lié à la pandémie au COVID-19 a nécessité une profonde et rapide adaptation de nos pratiques de prise en charge en oncologie gynécologique et nous a obligé à modifier nos organisations de travail. Notre étude a permis d'évaluer l'impact de la pandémie de COVID-19 sur la prise en charge des patientes atteintes de cancers gynécologiques et de mesurer la proportion de patientes concernées par ces modifications. Au total, pour 60% des patientes le traitement a été maintenu, pour 35% des patientes la prise en charge thérapeutique a été reportée et pour 5% des Résultats exprimés en n (%) ou moyenne (±écart-type) Allocution liminaire du Directeur général de l'OMS lors du point presse sur la COVID-19 -16 mars 2020 Risk Factors Associated With Acute Respiratory Distress Syndrome and Death in Patients With Coronavirus Disease Cancer patients in SARS-CoV-2 infection: a nationwide analysis in China Clinical Characteristics of Coronavirus Disease 2019 in China High mortality from viral pneumonia in patients with cancer Décret n° 2020-260 du 16 mars 2020 portant réglementation des déplacements dans le cadre de la lutte contre la propagation du virus covid-19 LOI n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 Avis provisoire Recommandations relatives à la prévention et à la prise en charge du COVID-19 chez les patients à risque de formes sévères COVID-19 pandemic: perspectives on an unfolding crisis Recommendations for the surgical management of gynecological cancers during the COVID-19 pandemic -FRANCOGYN group for the CNGOF Prise en charge chirurgicale des cancers gynécologiques en période de pandémie COVID-19 -Recommandations du Groupe FRANCOGYN pour le CNGOF COVID-19 et personnes suivies pour un cancer du sein : recommandations françaises pour la pratique clinique de Nice-St Paul de Vence, en collaboration avec le Collège Nationale des Gynécologues et Obstétriciens Français (CNGOF), la Société d'Imagerie de la Femme (SIFEM), la Société Française de Chirurgie Oncologique (SFCO), la Société Française de Sénologie et Pathologie Mammaire (SFSPM) et le French Breast Cancer Intergroup-UNICANCER (UCBG) WHO Classification of Tumours of Female Reproductive Organs Classification of Tumours of the Breast Conseils sur l'organisation des réunions de concertation pluridisciplinaire (RCP) en cancérologie dans le contexte de l Infection à SARS-CoV-2/COVID 19 et cancers solides : synthèse des recommandations à l'attention des professionnels de santé The UK Standardisation of Breast Radiotherapy (START) trials of radiotherapy hypofractionation for treatment of early breast cancer: 10-year follow-up results of two randomised controlled trials Acute skin toxicity associated the UK FAST-Forward Trial Accelerated partial breast irradiation using intensity-modulated radiotherapy versus whole breast irradiation: 5-year survival analysis of a phase 3 randomised controlled trial Intervals longer than 20 weeks from breast-conserving surgery to radiation therapy are associated with inferior outcome for women with early-stage breast cancer who are not receiving chemotherapy Management of epithelial cancer of the ovary, fallopian tube Part 2: systemic, intraperitoneal treatment, elderly patients, fertility preservation, follow-up) Robot assisted surgery during the COVID-19 pandemic, especially for gynecological cancer: a statement of the Society of European Robotic Gynaecological Surgery (SERGS)