key: cord-0810037-smzx9ahi authors: Ceruti, Charlotte; Carry, Pierre Yves; Ferrier, Clémence; Friggeri, Arnaud; Piriou, Vincent title: Télémédecine, téléconsultation en médécine périopératoire date: 2020-09-18 journal: Prat Anesth Reanim DOI: 10.1016/j.pratan.2020.08.001 sha: de59602147839657dd921d13bdce30ae8c9feca4 doc_id: 810037 cord_uid: smzx9ahi Telemedicine is booming in every medical sector. Besides being one of the WHO's priorities to deal with health cost and accessibility issues in both industrial and developing countries, recent COVID-19 sanitary crisis showed that it could be precious to ensure continuity of care in conditions of crisis. Telehealth is developing in anaesthesia in the whole perioperative period. This review focuses on recent data from literature on anaesthetic preoperative assessment. Four main issues are discussed: (1) eligibility and feasibility of telemedicine for anaesthetic preoperative assessment; (2) its effectiveness regarding time of consultation, surgery cancellation rate and concordance of physical examination; (3) patients’ satisfaction and; (4) its potential economic impact. Telemedicine; Telehealth; Teleconsultation; Anaesthesia Summary Telemedicine is booming in every medical sector. Besides being one of the WHO's priorities to deal with health cost and accessibility issues in both industrial and developing countries, recent COVID-19 sanitary crisis showed that it could be precious to ensure continuity of care in conditions of crisis. Telehealth is developing in anaesthesia in the whole perioperative period. This review focuses on recent data from literature on anaesthetic preoperative assessment. Four main issues are discussed: (1) eligibility and feasibility of telemedicine for anaesthetic preoperative assessment; (2) its effectiveness regarding time of consultation, surgery cancellation rate and concordance of physical examination; (3) patients' satisfaction and; (4) its potential economic impact. © 2020 Published by Elsevier Masson SAS. La télémédecine se développe rapidement en France du fait de la démédicalisation de certaines régions, de l'éloignement des populations, du regroupement des centres d'hyper compétence et de l'évolution de la société. La télémédecine est encadrée sur le plan législatif ; et l'anesthésie, notamment de par l'obligation de réaliser la consultation d'anesthésie au moins 48 heures avant une intervention chirurgicale selon le décret de décembre 1994, est impliquée dans l'évolution des modalités de réalisation de ces consultations. En 2017, le comité analyse et maîtrise du risque de la Société française d'anesthésie réanimation (SFAR) a publié un texte proposant des modalités de téléconsultation dans le cadre de consultations délocalisées, de consultations itératives ou de parcours de soins coordonnés et de consultations dématérialisées [1] . Cette mise au point vise donc à aborder la place actuelle de la télémédecine et plus particulièrement de la téléconsultation dans notre spécialité. La télémédecine est une forme de pratique médicale à distance, utilisant des technologies de l'information et de communication. Elle met en rapport entre eux, ou avec un patient, un ou plusieurs professionnels de santé. L'article 78 de la loi 2009-879 du 21 juillet 2009, dite loi HPST (article L6316-1 du Code de santé publique), en a, pour la première fois, donné une définition ; puis cinq actes de télémédecine, ainsi que leurs conditions de mise en oeuvre et de prise en charge financière, ont été définis dans le décret 2010-1229 du 19 octobre 2010 [2, 3] . D'autres textes et guides de bonnes pratiques viennent encadrer cette pratique médicale pour assurer la qualité et la sécurité des soins et des échanges [4] . Elle a également été mise en avant par l'OMS comme une priorité pour répondre aux problèmes des coûts et de l'accessibilité à des soins de qualité que ce soit dans les pays développés ou en voie de développement [5] . La télémédecine ne se substitue pas aux pratiques médicales actuelles, mais constitue une réponse aux défis et contraintes auxquels est confrontée l'offre de soins. Elle doit reposer sur un projet médical répondant aux priorités et aux besoins de la population d'un territoire et des professionnels de santé. Elle a donc de nombreux objectifs (améliorer l'accès aux soins, améliorer la qualité de prise en charge, diminuer les évènements graves et améliorer la qualité de vie), mais elle se doit également d'apporter plusieurs garanties aux patients (sécurité optimale, confidentialité des données, intégration volontaire dans un nouveau circuit de soins, respect absolu de la liberté de choix du patient. Jusqu'en 2018, la télémédecine était conçue et déployée dans un cadre expérimental avec des financements portés par des fonds d'intervention régionaux (FIR) qui ont permis de préparer un financement de droit commun. La convention médicale signée en août 2016 a constitué la première étape qui a permis les premiers remboursements d'actes de télémédecine par l'assurance maladie en créant deux actes de suivis des patients en établissement d'hébergement pour personnes dépendantes : la téléconsultation et la télé-expertise [6] . Un accord conventionnel a été conclu le 14 juin 2018 entre l'assurance maladie et les représentants des médecins libéraux, permettant le remboursement par l'assurance maladie des actes de téléconsultation s'inscrivant dans un parcours de soins coordonnés à partir de septembre 2018 et des actes de téléexpertise à partir de février 2019. Cinq actes sont actuellement réalisables en télémédecine : • la téléconsultation : consultation à distance. Le patient vient seul ou accompagné d'un professionnel de santé et le médecin réalise le diagnostic par la consultation à distance ; • la télé-expertise : le patient vient consulter un médecin qui a besoin d'un avis spécialisé. Ce médecin demande un avis d'expert à distance ; • la télésurveillance : il existe un recueil automatique ou par le patient lui-même de données sur son état de santé, ses données sont transmises à distance à un médecin ou un(e) infirmier(e) qui interprète les données et met en place une prise en charge adaptée ; • la télé-assistance : un médecin réalise un acte technique avec l'aide de son confrère qui est à distance ; • la régulation médicale : après appel d'un centre spécialisé, un premier diagnostic de l'état du patient est réalisé, et le patient est orienté vers une prise en charge la plus adaptée possible. Télémédecine, téléconsultation en médécine périopératoire 3 recueil du consentement du patient sont réalisés avant la téléconsultation. Les actes réalisés sont un entretien avec le patient, éventuellement un examen clinique si le patient est accompagné d'un professionnel de santé ou si les technologies de communication le permettent, ainsi que l'examen de documents transmis par le patient ou son représentant. Une prescription éventuelle, télétransmise par messagerie sécurisée, peut également être réalisée. La téléconsultation est tarifée au barème des consultations présentielles, ainsi que les majorations associées. Elle constitue donc une voie nouvelle pour faciliter l'accès des citoyens aux soins sur l'ensemble du territoire, y compris dans les zones où les professionnels de santé sont peu nombreux ; et présente donc un attrait tout particulier dans notre spécialité où la démographie anesthésique impose parfois des délais longs pour la consultation pré-anesthésique. La consultation pré-anesthésique est une obligation réglementaire en France au moins 48 h avant une chirurgie programmée. Elle a pour but : C'est également un moment privilégié d'information du patient qui contribue à la sécurité des soins et l'occasion de créer un lien privilégié entre médecin anesthésiste et patient. Elle permet d'améliorer la globalité de la prise en charge péri-opératoire et constitue un facteur d'efficience économique en permettant de réduire des annulations, des retards et des reports opératoires, ainsi que la durée de séjour [7] . Réalisée le plus souvent en présentiel, elle pose cependant un problème d'accessibilité au vu de la démographie anesthésique de notre territoire ; elle est également pourvoyeuse de coûts de déplacements et de frais annexes pour les patients et les organismes de santé. Parmi les objectifs de cette consultation, certains peuvent être réalisés lors d'une consultation à distance (évaluation, information, synthèse, recueil du consentement, stratégie d'arrêt ou de maintien des traitements préopératoires. . .) et seul l'examen clinique pourrait nécessiter une consultation présentielle. Cependant, la littérature internationale montre que l'avancée des technologies permet de recueillir une partie des éléments de l'examen clinique (évaluation du score de Mallampati, stéthoscope virtuel. . .) et que l'examen clinique peut aussi être réalisé par un professionnel de santé à distance, présent aux côtés du patient. La Société française d'anesthésie réanimation a ainsi proposé un texte, validé par le conseil d'administration de la SFAR le 29 juin 2017, mettant en avant trois situations fréquemment rencontrées dans notre pratique quotidienne : les consultations d'anesthésie présentielles délocalisées, les consultations itératives ou parcours de soins coordonnés et les consultations d'anesthésie dématérialisées ou télémédecine [1] . Il s'agit d'un cas fréquemment rencontré où la consultation pré-anesthésique est réalisée par un médecin anesthésiste réanimateur en vue d'un acte opératoire dans un établissement de santé différent de celui où va se dérouler l'acte. Il s'agit dans la plupart des cas de patients ayant un domicile éloigné de l'établissement de santé où se déroulera l'acte opératoire avec une impossibilité de coupler la consultation de chirurgie à la consultation pré-anesthésique. On se trouve face à un médecin délégué qui effectue la consultation et à une équipe délégataire qui effectuera l'acte d'anesthésie. Il doit exister un accord entre les deux équipes des deux établissements de santé différents : le médecin qui effectue la consultation pré-anesthésique est responsable de sa consultation et l'équipe délégataire est responsable de la visite pré-anesthésique, de l'acte peropératoire et du suivi postopératoire. Le consentement du patient est nécessaire à cette prise en charge partagée. Afin de délivrer une information la plus complète au patient concernant la prise en charge périopératoire, deux cas de figures sont envisageables. Soit l'équipe d'anesthésie déléguée a une bonne connaissance de l'intervention chirurgicale et du parcours du patient opéré : en ce cas, celle-ci réalise l'information du patient et l'examen clinique et recueille le consentement du patient avant de transmettre le dossier ainsi que les consignes données au patient. Soit l'équipe d'anesthésie déléguée ne pratique pas le type d'intervention chirurgicale, ou n'est pas en mesure de délivrer une information précise et suffisante au patient : en ce cas, la consultation préanesthésique est réalisée en apportant une information générale sur l'anesthésie, en réalisant l'interrogatoire et l'examen clinique ; puis la consultation préanesthésique est complétée à distance par la délivrance d'une information précise par un contact téléphonique ou par une visioconférence mettant en relation le patient et l'équipe qui réalisera l'acte. Dans les deux cas, la visite préanesthésique est bien entendu essentielle et réalisée par l'équipe prenant en charge le patient en per-et postopératoire. Une information devra de nouveau être apportée au patient et tracée, et la bonne compréhension de l'information donnée au patient devra être vérifiée. Il arrive fréquemment que plusieurs actes interventionnels identiques soient programmés dans un délai court (coloscopies itératives, extractions dentaires itératives. . .), ou que la prise en charge d'une pathologie nécessite plusieurs actes interventionnels différents rapprochés, dans le cadre d'un parcours de soins coordonnés (par exemple coloscopie, puis colectomie). On peut alors considérer qu'il est possible de dissocier l'examen clinique du patient et l'information réalisée au patient. En ce cas, une première consultation d'anesthésie présentielle est réalisée, informant le patient sur les différentes prises en charge anesthésiques nécessaires à la prise en charge de son parcours de soins, et permettant un examen complet. Il est alors possible de se passer d'une nouvelle consultation physique pour les autres anesthésies itératives, et un contact par une conversation orale à distance par téléphone, ou par télémédecine, est possible pour informer le patient et affiner la prise en charge anesthésique pour chacune des interventions à venir. Ceci est possible pour les patients à faible risque pour une chirurgie à risque mineur ou intermédiaire. La consultation se déroule alors sur rendez-vous téléphonique préétabli : l'appel téléphonique ou la visioconférence permet de vérifier l'absence d'évènement intercurrent ou de modification du traitement depuis la dernière intervention et de redonner au patient toutes les informations nécessaires. La visite pré-anesthésique demeure ici aussi essentielle. Comparativement à la consultation d'anesthésie par téléphone, la téléconsultation permet, via des outils de vidéocommunication et des stéthoscopes électroniques lorsqu'elle est réalisée dans un centre dédié, d'évaluer les voies aériennes supérieures, de réaliser une auscultation cardiopulmonaire, de réaliser des examens basiques tels que l'électrocardiogramme et d'avoir une interaction en face à face avec l'anesthésiste bien que médiée par des écrans [8] . Conformément aux quatre principales catégories définies en 2017 par le National Quality Forum pour mesurer la qualité des soins en télémédecine [9] , nous présentons ici les données récentes de la littérature concernant la place de la télémédecine en anesthésie pour l'évaluation préopératoire : • éligibilité et faisabilité de la téléconsultation d'anesthésie ; • efficacité de la téléconsultation en termes de temps passé en consultation d'anesthésie, taux d'annulation d'intervention et concordance de l'examen physique ; • satisfaction des patients pour la téléconsultation, et enfin ; • potentiel impact économique de la téléconsultation. Réaliser une téléconsultation d'anesthésie implique des moyens humains et matériels liés au patient et au type de téléconsultation prévue (plateforme de télémédecine ou téléconsultation à domicile). Les patients éligibles aux études portant sur la téléconsultation d'anesthésie ont le plus souvent des scores ASA < 3. Si la téléconsultation prévue était réalisée à domicile, ils devaient pouvoir avec accès à un smartphone, une tablette ou un ordinateur avec accès internet, caméra et microphone, excluant de fait une partie de la population, certes moins importante avec l'essor toujours plus important des nouvelles technologies. Concernant les types de chirurgies éligibles à la téléconsultation, alors que plusieurs études portaient uniquement sur des chirurgies maxillo-faciales pour la plupart, une étude américaine rétrospective de 2019 portant sur 361 téléconsultations incluait des chirurgies variées, notam-ment de la neurochirurgie, de la chirurgie cardiothoracique et des chirurgies de transplantation [10] . À notre connaissance, aucune étude ne s'est intéressée à l'impact de la téléconsultation en anesthésie obstétricale. Duarte et al. ont cependant souligné dans une revue de la littérature récente l'importance de développer également la téléconsultation pour ce champ spécifique de notre spécialité [11] . Il existe deux types de téléconsultation : soit la téléconsultation dans un établissement dédié à la télémédecine, c'est-à-dire nécessitant du personnel dédié et du matériel permettant de réaliser un examen physique approfondi (stéthoscope électronique, caméra pour les voies aériennes supérieures, électrocardiogramme. . .) ; soit une consultation au domicile du patient via une application mobile ou un site internet sécurisé [10] . À notre connaissance, ces deux types de téléconsultation n'ont pas encore été comparés. Les critères d'efficacité de la téléconsultation comparée à la consultation classique d'anesthésie, sont souvent la qualité de l'examen physique par télémédecine, le taux d'annulation chirurgicale et le temps total passé en consultation. Les outils de télémédecine tels que le stéthoscope électronique et la caméra pour voies aériennes supérieures permettent de réaliser un examen physique à distance. Applegate et al. n'ont retrouvé aucune différence significative en ce qui concerne la prédiction d'une intubation difficile entre une consultation en face à face et une téléconsultation. À noter toutefois que dans les deux groupes la valeur prédictive positive du score prédictif d'intubation difficile était faible. Les auteurs avaient également retrouvé que l'auscultation cardio-pulmonaire était concordante dans 98 % des cas entre la téléconsultation et l'auscultation le jour de la chirurgie [12] . Deux études rétrospectives, l'une américaine l'autre australienne, menées respectivement en 2015 et en 2019 ne retrouvaient pas d'augmentation significative du taux d'annulation des procédures chirurgicales avec la téléconsultation d'anesthésie comparé à la consultation classique [10, 13] . Ces résultats étaient concordants avec celui d'un essai contrôlé randomisé portant sur 155 patients en 2013 [12] . Concernant le temps passé en consultation, Mullen-Fortino et al. ont retrouvé une différence de 24 minutes de temps total passé en évaluation pré-anesthésique. Il faut toutefois noter que cette différence de temps ne prenait en compte ni les temps de transport pour les patients ainsi que le temps d'inscription sur l'application de télémédecine [10] . La satisfaction des patients lors d'une téléconsultation est un élément majeur à prendre en compte, puisqu'aucun développement de ce type de consultation ne peut être envisageable sans l'adhésion des patients. Une étude d'acceptabilité française menée par le CHRU de Nancy a retrouvé en 2017 que sur 382 patients, près de la moitié seulement était favorable a priori à une téléconsultation d'anesthésie à domicile. L'opposition à la téléconsultation était principalement due à une préférence pour une rencontre en face à face ; et secondairement à un manque d'équipement et de connaissances informatiques [14] . Cependant, plusieurs études, nord-américaines pour la plupart, ont évalué la satisfaction a posteriori des patients après une téléconsultation d'anesthésie et ont retrouvé des taux de satisfaction des patients globalement élevés, et ceci que ce soit en téléconsultation ou en consultation en face à face. Ainsi, Mullen-Fortino et al. ont retrouvé un fort taux de satisfaction des patients, pour l'utilisation de leur application de téléconsultation, avec 97,5 % des patients déclarant qu'ils réutiliseraient cette application si nécessaire, et ceci malgré des problèmes d'utilisation (temps d'activation du programme, téléchargement, connectivité. . .) [10] . Une autre étude notait toutefois une satisfaction moindre en terme de clarté des instructions préopératoires lors de la téléconsultation par rapport à la consultation classique, avec des taux globaux de satisfaction élevés et similaires entre la téléconsultation et la consultation classique [12] . La faisabilité et la sécurité des consultations par téléphone pour chirurgie itérative ont été évaluées en 2018 par une équipe française expérimentée chez plus de 200 patients. Ceux-ci rapportaient une satisfaction excellente (> 90 % des patients). Plus de 90 % des patients déclaraient être satisfaits et en sécurité, de même plus de 95 % des IADEs et 87 % des anesthésistes rapportaient un excellent indice de satisfaction [15] . De façon intéressante, une étude descriptive non comparative menée en pédiatrie a également retrouvé un fort taux de satisfaction pour les parents, les enfants et les praticiens concernant la téléconsultation préopératoire chez des patients sélectionnés [16] . L'un des intérêts de la téléconsultation est de limiter les déplacements pour les patients, et de diminuer ainsi les frais de santé qui y sont associés (coût du trajet, la nécessité de poser un jour de congé voire le coût d'une garde d'enfants. . .). Il est intéressant de noter que Fishman et al. ont rapporté de façon contre-intuitive, qu'il n'y avait aucune association statistique entre la volonté des patients d'avoir une consultation pré-anesthésique par télémédecine et les coûts attendus de leur déplacement pour une consultation en face à face [17] . Wood et al. ont estimé l'économie réalisée pour 255 patients évalués en téléconsultation par rapport à une consultation classique, à près de 135 000 dollars USD [18] . Il faut toutefois rappeler que les particularités géographiques des différents pays sont un facteur majeur d'évaluation de ces coûts selon la densité des structures de soins et que les études de coût nord-américaines ne peuvent être directement extrapolées au système de santé français. Ces coûts sont également variables selon le type de téléconsultation choisi (application mobile au domicile ou téléconsultation en centre dédié) du fait de la variabilité des déplacements et du coût d'installation et de fonctionnement des établissements de télémédecine. Comme le souligne une méta-analyse datant de 2019, il semblerait au vu de la littérature récente, que la téléconsultation d'anesthésie présente comme avantages de satisfaire à la fois les patients et les professionnels de santé et d'être plus accessible que la consultation classique, sans impact négatif ni sur l'évaluation préopératoire des patients sélectionnés ni sur les taux de report ou annulation de chirurgie [19] . Cependant, si des bénéfices financiers ont été mis en évidence aux États-Unis, aucune étude ne s'est encore attachée à étudier les économies de santé qu'elle pourrait engendrer comparativement à une consultation classique dans le système de santé français actuel ; le problème de facturation de ces téléconsultations auprès des caisses primaires d'assurance maladie n'est pas encore totalement résolu malgré des expériences de téléconsultation débutées en juillet 2019 en CHU et en établissement privé. D'autres domaines nécessitent également de nouvelles investigations concernant la téléconsultation d'anesthésie comme la sécurité de connexion, le stockage des données et les licences médicales d'exploitation [8] . Pour l'instant, peu d'études concernant la télémédecine et la consultation pré-anesthésique ont été publiées par des équipes françaises. L'étude TELECAM, menée par le CHRU de Nancy et déclarée sur CLinicalTrials, proposera d'évaluer la qualité de téléconsultations d'anesthésie au domicile du patient par rapport aux consultations en face à face. Pour l'instant, une solution intermédiaire est actuellement mise en place dans de nombreux établissements : la consultation d'anesthésie dématérialisée avec la présence conjointe d'un auxiliaire de santé ou d'un médecin et du patient à distance. Des expériences de téléconsultaiton en anesthésie au sein des UHSI (unité hospitalière sécurisée inter-régionale) existent depuis de nombreuses années certains établissements de santé : au lieu de faire venir les patients incarcérés dans des services hospitaliers non adaptés, avec les problèmes de sécurité, les coûts importants engendrés, et les difficultés générées pour les autres patients, la consultation d'anesthésie est effectuée avec un médecin anesthésiste et un médecin de l'UHSI accompagnant le patient. Ce dernier peut réaliser l'examen clinique à distance, répondre à toutes les questions du médecin anesthésiste, et le médecin anesthésiste peut ainsi informer le patient. Il existe donc un gain de temps, un gain en sécurité, et un gain en qualité des soins pour tout le personnel et les patients de l'établissement. Des expériences similaires existent aussi dans les EHPAD, avec des patients âgés qui ont un dossier médical dans ces établissements de santé : le patient est assisté par un auxiliaire de santé et le médecin anesthésiste réalise sa consultation pré-anesthésique par visioconférence. L'information, l'examen clinique, et les stratégies périopératoires peuvent ainsi être facilement dispensés. L'anesthésie, du fait des difficultés inhérentes à sa pratique quotidienne dans la situation actuelle, va pouvoir bénéficier des techniques modernes de consultation à distance. Trois problématiques différentes ont été envisagées par la Société française d'anesthésie réanimation concernant la consultation pré-anesthésique et l'évaluation préopératoire : les consultations d'anesthésie présentielles délocalisées, les consultations itératives au parcours de soins coordonnées et les consultations d'anesthésie dématérialisées ou télémédecine. Dans tous les cas, la visite préanesthésique joue un rôle majeur pour assurer la sécurité du patient. Il est clair que les autorités de santé souhaitent développer rapidement la télémédecine et notre spécialité doit profiter de cette aubaine pour améliorer les parcours de soins des patients. Si nous avons vu le rôle important que peut jouer la télémédecine dans l'évaluation anesthésique préopératoire, elle se développe pour l'ensemble de la prise en charge anesthésique périopératoire. Ainsi, la gestion peropératoire de l'anesthésie par télémédecine a été étudiée de façon prometteuse par plusieurs équipes. Elle comprend notamment les « tours de contrôle d'anesthésie » qui visent à gérer la sédation, l'analgésie et la curarisation de façon automatisée ou à distance, parfois même d'un continent à l'autre [20] [21] [22] . Des robots ont même été mis au point et testés à la fois sur mannequin et sur humains pour les gestes techniques de type intubation et anesthésie locorégionale [22] . De même, des équipes s'intéressent au suivi postopératoire en télémédecine, que ce soit en chirurgie ambulatoire via des applications pour smartphones ou en hospitalisation en soins critiques [23, 24] . Aussi, la télémédecine pourrait à terme connaître un essor majeur dans la gestion anesthésique périopératoire des patients et pourrait bien bouleverser rapidement bousculer nos pratiques actuelles. Enfin, et de façon très actuelle, la crise sanitaire déclenchée par la pandémie COVID-19 majore l'intérêt porté à la télémédecine. En effet, la téléconsultation est envisagée dans deux cas de figures face à cette pandémie : pour maintenir les consultations prévues sans lien avec le COVID-19 et diminuer les contacts journaliers des patients et des soignants ; et pour réaliser des consultations en lien avec le COVID-19 afin d'évaluer de la gravité du patient [25, 26] . Si cette dernière situation intéresse plus particulièrement les médecins généralistes et la régulation des SAMU, notre spécialité est tout particulièrement concernée par le premier cas de figure. Cependant le déplacement en centre de téléconsultation pour avoir accès à un stéthoscope électronique ou une caméra pour les voies aériennes supérieures ne semblent pas être la solution optimale en situation de confinement. Dans notre centre, nous réalisons actuellement les consultations pré-anesthésiques qui étaient prévues avant le déclenchement de la pandémie par consultation téléphonique. Pour les chirurgies non urgentes sans date opératoire à ce jour, l'anesthésiste en charge de la consultation doit décider de l'opportunité de réévaluer physiquement le patient à distance de la pandémie ou non. Là encore, il est important de souligner que la visite pré-anesthésique joue un rôle primordial pour assurer une sécurité maximale au patient pour l'ensemble de sa prise en charge. Il y aura probablement un avant et un après COVID-19 qui va développer la télémédecine, et l'anesthésie devrait en bénéficier. . . Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d'intérêts. Consultations d'anesthésies délocalisées, itératives ou en télémédecine : propositions du comité analyse et maîtrise du risque -879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires. JORF no 0167 du 22 juillet Loi n o 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. Guide pour la qualité et la sécurité des actes de téléconsultation et de téléexpertise WHO Library Cataloguing. Telemedicine: opportunities and developments in Member States: report on the second global survey on eHealth Convention nationale organisant les rapports entre les médecins libéraux et l'assurance maladie signée le 25 août 2016 Preoperative consultations by anesthesiologists To infinity and beyond: the past, present, and future of tele-anesthesia Creating a framework to support measure development for telehealth Presurgical assessment using telemedicine technology: impact on efficiency, effectiveness, and patient experience of care Remote obstetric anesthesia: leveraging telemedicine to improve fetal and maternal outcomes Telemedicine pre-anesthesia evaluation: a randomized pilot trial Role of telehealth in perioperative medicine for regional and rural patients in Queensland: telehealth in perioperative medicine Téléconsultation d'anesthésie au domicile : une enquête d'acceptabilité. Canadian Consultation d'anesthésie pour chirurgies itératives : bonnes pratiques et sécurité du patient. Paris: Congrès national de la Société Française d'Anesthésie et de Réanimation Using telemedicine for pediatric preanesthesia evaluation: a pilot project Patient preferences on telemedicine for preanesthesia evaluation Telemedicine consultations in oral and maxillofacial surgery: a follow-up study Role of Telehealth in Pre-anesthetic Evaluations A pilot study of tele-anaesthesia by virtual private network between an island hospital and a mainland hospital in Japan Anesthesiology control tower-feasibility assessment to support translation (ACTFAST): mixed-methods study of a novel telemedicine-based support system for the operating room Robotic anesthesia: not the realm of science fiction any more Athome monitoring after surgery/anaesthesia-a challenge: athome monitoring Telemedicine coverage for postoperative ICU patients Video consultations for covid-19. An opportunity in a crisis? Telehealth for global emergencies: implications for coronavirus disease 2019 (COVID-19)