key: cord-0794228-s2soynpl authors: de Truchis, Pierre; de Truchis, Anne title: Diarrhées aiguës infectieuses date: 2008-01-03 journal: Presse Med DOI: 10.1016/j.lpm.2006.11.023 sha: 6f9221bfb7b5be59ab48053f355c2d9d85ed545c doc_id: 794228 cord_uid: s2soynpl Acute infectious diarrhea has various causes: bacterial diarrhea with invasive or toxigenic mechanisms, especially frequent in hot regions and in travelers; viral diarrheas, frequent and cosmopolitan in children but also adults; and parasitic diarrhea, less frequent, and generally in subtropical areas. The major concerns involve the risk of complications, essentially dehydration and malnutrition, especially in vulnerable patients: young children, the elderly, and patients with immunosuppression, for whom rehydration is urgent. Diagnosis of diarrhea requires clinical assessment and history: underlying illnesses, severity of symptoms, presence and extent of dehydration and other clinical symptoms, travel history, known outbreaks, and pathogenic mechanism (invasive or toxigenic). Initial therapy should always include oral or parenteral rehydration; antimotility agents are generally not indicated; specific antibiotic treatment is not systematically indicated, except for invasive or dysenteric diarrhea and in immunosuppressed patients. Les diarrhées aiguës infectieuses ont de multiples causes : bactériennes avec un mécanisme invasif ou toxinique, particulièrement fréquentes dans les régions chaudes, chez les voyageurs ; virales, fréquentes et cosmopolites, chez l'enfant, mais également chez l'adulte ; parasitaires, plus rarement, et généralement dans les zones intertropicales. Le problème majeur est celui du risque de déshydratation et de dénutrition, en particulier sur les terrains fragilisés : jeunes enfants, vieillards, immunodéprimés, qui feront l'objet d'une prise en charge spécifique pour assurer rapidement la réhydratation. L'évaluation diagnostique repose sur l'analyse épidémiologique et clinique des patients : terrain pathologique, zone géographique d'exposition, signes de gravité et de déshydratation, mécanisme invasif ou toxinique, ce qui conditionne l'approche thérapeutique. Le traitement est d'abord symptomatique, reposant essentiellement sur la réhydratation orale ou parentérale ; les ralentisseurs du transit ne sont généralement pas indiqués ; l'antibiothérapie spécifique n'est pas systématique, indiquée en cas de diarrhée invasive, de syndrome dysentérique, et sur des terrains fragilisés (immunodéprimés). Lesdi arrhées aiguës sont un motif extrêmement fréquent de consultation, encore plus fréquentes dans les pays tropicaux et subtropicaux que dans les pays riches tempérés, représentant par exemple 73 millions de consultations par an, 152 millions d'hospitalisations, et contribuant à environ 3 000 décès par an aux États-Unis [1] . Si elles sont habituellement bénignes et souvent spontanément résolutives, les diarrhées d'origine bactérienne peuvent être associées à des complications digestives ou générales sévères, notamment sur des terrains fragilisés (jeunes enfants, vieillards, immunodéprimés, etc.). Les diarrhées virales, bénignes, sont associées à une morbidité importante (symptômes marqués, arrêts de travail, etc.), et à des hospitalisations fréquentes pour déshydratation chez les nourrissons et jeunes enfants. Les diarrhées subaiguës (ou chroniques) après séjour en zone tropicale sont plus souvent rapportées à une origine parasitaire (protozooses, helminthiases), mais peuvent également être d'origine bactérienne, notamment à germes intracellulaires. La définition de la diarrhée repose sur l'existence d'une modification des émissions intestinales habituelles avec augmentation de la quantité, de la fréquence, et/ou du volume des selles qui sont de consistance liquide ou semi-liquide. On s'accord à retenir comme pathologique l'émission d'au moins 3 selles (ou émissions intestinales) de consistance modifiée par jour. On parle de diarrhée aiguë quand l'épisode dure moins de 10 à 14 jours, et de diarrhée persistante (ou chronique) quand elle persiste plus de 14 jours [2] . Le risque de diarrhée après voyage ou séjour en zone d'exposition infectieuse, en particulier bactérienne (bactéries à transmission digestive) est variable en fonction de l'hygiène du pays considéré, et de l'exposition au risque de transmission orofécale directe (interhumaine) ou indirecte (par le biais d'un vecteur : animaux, insectes, etc.). L'importance du risque de diarrhée du voyageur est résumée schématiquement dans le tableau I. Les agents infectieux responsables de diarrhée sont considérés comme pathogènes dans la mesure où ils modifient l'équilibre de la flore intestinale et où ils interagissent sur les cellules de la muqueuse digestive en provoquant des symptômes digestifs inhabituels. On distingue classiquement les germes pathogènes, capables de provoquer une infection symptomatique chez les sujets bien portants, des germes saprophytes censés être tolérés dans l'organisme. Certains germes saprophytes peuvent cependant être à l'origine de maladie digestive, soit s'ils ont pu pénétrer la muqueuse digestive, soit si le terrain fragilisé (par exemple dans le cas d'une immunodépression) permet leur expression. Ces germes sont alors considérés comme des germes opportunistes [3] . Le pouvoir pathogène des germes, en dehors des facteurs liés au terrain de l'hôte infecté, fait appel à plusieurs mécanismes plus ou moins associés : • intoxication par une toxine présente dans l'aliment ; • mobilité et chimiotactisme du germe ; • adhésion microbienne à la paroi cellulaire ; • toxinogenèse (entérotoxines, cytotoxines) ; • invasion cellulaire (entérocytes, macrophages). Dans les infections bactériennes, on distingue donc les mécanismes essentiellement toxiniques (production de toxines par un germe restant dans la lumière intestinale) des mécanismes d'invasion (pénétration et multiplication bactérienne dans la muqueuse intestinale). Les principaux pathogènes sont listés dans l'encadré 1. Le mécanisme des diarrhées bactériennes permet de distinguer [3] : Le traitement reposait sur le cotrimoxazole, l'ampicilline, le chloramphénicol mais les résistances sont maintenant fréquentes, faisant préférer actuellement les quinolones (résistances en augmentation) ou les céphalosporines de 3 e génération. La fièvre typhoïde (Salmonella typhi, S. paratyphi A-B-C) est responsable d'une diarrhée fébrile à la phase d'état, mais réalise un modèle d'infection systémique qui s'écarte du tableau de gastro-entérite aiguë fébrile. Sa transmission est strictement interhumaine. La phase initiale associe une fièvre progressivement croissante, des céphalées, des douleurs abdominales avec constipation, souvent une toux sèche, parfois une épistaxis. À partir de la 2 e semaine, apparaît la diarrhée ("jus de melon"), associée à une fièvre élevée en plateau, une obnubilation (tuphos), une dissociation du pouls, parfois des taches rosées lenticulaires (macules sur les flancs), une ulcération amygdalienne (angine de Duguet Il faut éliminer une origine non infectieuse de la diarrhée : diarrhée médicamenteuse en particulier antibiothérapie, diarrhées chroniques, maladies digestives sous-jacentes, etc. Le problème majeur posé par la diarrhée aiguë du jeune enfant est celui de la déshydratation, pouvant s'installer rapidement et être responsable de collapsus, surtout si les vomissements y sont associés [11] . Après l'évaluation diagnostique initiale tenant compte de l'importance de la diarrhée (± vomissements), du terrain, et de l'existence de signes de déshydratation, le traitement comprend les thérapeutiques symptomatiques avec réhydratation éventuelle, puis la discussion du traitement étiologique (figure 1) [6, 12] . Le but de la réhydratation est d'apporter, préventivement ou secondairement, de l'eau et surtout les électrolytes perdus par la diarrhée à l'étage iléocaecal, le soluté de réhydratation restant absorbé efficacement au niveau duodénojéjunal. La réhydradation initiale est fonction de l'importance de la déperdition : • déshydratation légère (< 5 % perte de poids) : 50 mL/kg en 4 heures ; • déshydratation modérée (5 à 10 % de perte de poids) : 100 mL/kg en 4 heures ; • déshydratation sévère (> 10 % perte de poids) : perfusion intraveineuse avec 70 mg/kg en 3 heures puis relais avec 20 mL/kg en 4 heures par voie orale ou 100 mL/kg en 4 heures par voie intraveineuse, jusqu'à arrêt de la diarrhée. La réhydratation orale se fait avec un soluté type OMS (tableau V), ou avec les préparations artisanales (eau propre + sucre + sel + potassium + bicarbonates). Le sucre peut être remplacé par des farines de blé, de banane, ou surtout de riz qui réduit nettement le volume des excreta. La diète alimentaire et hydrique n'est pas indiquée, au contraire l'apport de solutés et d'électrolytes par voie digestive est un facteur essentiel de la correction ou de la prévention de la déshydratation. Il faut cependant éviter les laits et produits riches en lactose dont l'absorption est perturbée au cours des diarrhées infectieuses aiguës. Démarche diagnostique et thérapeutique [13, 14] . C'est pourquoi on utilise de plus en plus des antibiotiques de deuxième ligne, comme les céphalosporines de 3 e génération, et les nouveaux macrolides (azithromycine). En l'absence d'isolement initial d'un germe pathogène à l'origine de la diarrhée, la conduite à tenir, souvent probabi-liste, est résumée dans la figure 1, et reprend les étapes sus-décrites : évaluation de la gravité, orientation étiologique (mécanisme toxinique ou invasif), discussion sur l'examen des selles, puis discussion thérapeutique en fonction du contexte ou du terrain. L'existence de signes de gravité, d'une immunodépression sous-jacente ou de signes invasifs peut faire discuter une antibiothérapie empirique, en l'absence d'isolement de pathogène spécifique. L'objectif du traitement est avant tout de lutter contre la déshydratation et la dénutrition [15] . Le traitement repose donc essentiellement sur les solutés de réhydratation orale et la réalimentation précoce [16] . Il existe maintenant un consensus sur l'intérêt majeur de maintenir une alimentation enté- Conduite à tenir devant une diarrhée prolongée ou chronique après séjour en zone tropicale rale lors d'une diarrhée aiguë de l'enfant ; il n'y a pas lieu d'arrêter l'allaitement maternel, ce qui serait à l'origine d'un risque élevé de déshydratation ; les ralentisseurs du transit (lopéramide) ne sont pas recommandés, et formellement contre-indiqués avant l'âge de 2 ans. Les silicates (diosmectite), probiotiques (Lactobacillus acidophilus, Saccharomyces boulardii), et antisecrétoires (racécadotril) ont démontré une efficacité sur la durée de la diarrhée. Le traitement antibiotique n'est indiqué, comme chez l'adulte, que dans les diarrhées invasives, après coproculture, ou sur des terrains particuliers. Conduite à tenir devant une diarrhée prolongée ou chronique au retour d'un voyage en zone tropicale Dans les diarrhées persistant plus de 15 jours après le séjour en zone d'endémie, le problème n'est plus celui de l'urgence ni de risque de déshydratation mais plutôt du diagnostic étiologique. L'examen capital est l'examen des selles pour cultures spécifiques et examen parasitologique direct avec enrichissement, sur des selles fraîches, émises au mieux au laboratoire (figure 2). Si les examens des selles trouvent un agent causal, le traitement spécifique est bien sûr indiqué. Dans ces circonstances, il convient en premier lieu de rechercher une étiologie parasitaire à protozoaires (amibes, Giardia, sporidies) ou une helminthiase, généralement plus tardive (2 à 3 mois après séjour à risque). Certaines infections bactériennes peuvent également avoir une évolution prolongée : salmonelles, Yersinia, Campylobacter, E. coli entéroadhérent, par exemple. En cas de négativité des examens des selles, il faut rechercher des signes associés (amaigrissement, fébricule, altération de l'état général, signes articulaires, cutanés, etc.), surtout chez les patients âgés, et envisager la pratique d'une coloscopie à la recherche de pathologie tumorale ou inflammatoire du côlon. Dans les autres cas, pourra se discuter un traitement antiparasitaire d'épreuve (albendazole, métronidazole, etc.) après répétition des examens de selles. Les explorations endoscopiques seront programmées en l'absence de réponse clinique. Références Acute diarrhea: a practical review Diarrhées aiguës d'origine infectieuse Diarrhées infectieuses aiguës Les diarrhées du voyageur Traveller's diarrhea Acute Infectious Diarrhea Acute gastroenteritis associated with rotavirus in adults Human caliciviruses in Europe Viral causes of diarrhea Practice guidelines for the management of infectious diarrhea An evidence and consensus based guideline for acute diarrheal disease management Current concepts in travelers' diarrhea : epidemiology, antimicrobial resistance and treatment A nosocomial outbreak of fluoroquinolone-resistant salmonella infection Antimicrobial drug resistance in salmonella enterica. Current Opinion Inf Diseases Traitement médicamenteux des diarrhées aigues infectieuses du nourrisson et de l'enfant Société Canadienne de Pédiatrie. Prise en charge des diarrhées aiguës chez l'enfant et le nourrisson. Paediatrics Child Health