key: cord-0753335-emtvig8a authors: Guilhot, François title: Cellules humaines à usage thérapeutique : état de la question date: 2020-07-21 journal: Bull Acad Natl Med DOI: 10.1016/j.banm.2020.07.051 sha: 31e79c4f47cd457922bfd694e72e11072884a2c2 doc_id: 753335 cord_uid: emtvig8a Résumé Les cellules souches humaines pluripotentes induites et les cellules souches embryonnaires humaines ont des caractéristiques de pluripotence et de dérivation permettant aussi l’étude des maladies. Ces cellules sont utilisées actuellement pour le traitement de maladies neurologiques comme la maladie de Parkinson ou dans les pathologies cardiaques. La thérapie génique a été un succès pour le traitement des hémophilies A et B, les hémoglobinopathies et les déficits immunitaires. La greffe de cellules souches hématopoïétiques est un traitement standard des leucémies, cependant que les CAR T représentent un nouveau traitement prometteur y compris dans les lymphomes et le myélome. Summary Patient-derived induced pluripotent stem cells as well as human embryonic stem cells are pluripotent and their derivation has been used for the understanding of numerous diseases. Currently they are also used for the treatment of neurologic disorders such as Parkinson disease or cardiac disorders. Gene therapy has been successful for the treatment of hemophilia A and B, hemoglobinopathies and immunodeficiencies. Hemopoietic stem cell transplantation is a well-accepted therapeutic strategy for Leukemias, whereas CAR T cells is a new promising approach even for lymphomas and myeloma Les cellules souches induites comme les cellules souches embryonnaires constituent des outils particulièrement utiles pour l'étude de certaines pathologies, tester des nouveaux médicaments voire même s'en servir en tant que traitement et des progrès dans ce domaine ont été réalisés ces dernières années. Tout comme la thérapie génique qui, se servant des cellules souches hématopoïétiques, introduit dans l'organisme les gènes déficitaires : hémophilies, hémoglobinopathies et déficit immunitaires sont les pathologies qui semblent bien en bénéficier de manière spectaculaire. Enfin les greffes de cellules souches hématopoïétiques et les cellules CAR T complètent un arsenal thérapeutique qui a fait émerger en quelques années le nouveau concept de cellule médicament. Les cellules souches pluripotentes induites, dites iPS (induced pluripotent stem cells), sont des cellules issues d'une reprogrammation génétique à partir de cellules adultes somatiques différenciées. Il peut s'agir de fibroblastes, de la peau ou de cellules épithéliales ou mésenchymateuses ou de cellules sanguines. Leur grand intérêt réside dans l'étude de cellules obtenues à partir de tissus pathologiques de patients permettant de comprendre la physiopathologie de la maladie et éventuellement des tester les molécules thérapeutiques d'intérêt. Initialement la reprogrammation consistait à réactiver 4 gènes, Oct3/4, Sox2, c-Myc et KLF4 [1] . Les premiers vecteurs utilisés comportaient un risque de transformation tumorale de la cible, les gènes intégrés pouvant aussi être placés dans une région oncogénique. On utilise donc maintenant des vecteurs non intégratifs (épisomes) et la reprogrammation s'effectue selon des règles rigoureuses [2] et sans c-myc, lequel comportait un risque oncogène avéré [3, 4] . L'utilisation des iPS est théoriquement double : comprendre la pathologie et réparer les tissus. Ainsi une étude française récente a permis de mieux comprendre la physiopathologie du syndrome d'ataxie et de tremblement lié à l'X fragile (FXTAS). Cette maladie neurodégénérative, incurable, comporte un déclin cognitif et des troubles de la motricité chez l'homme généralement de plus de 50 ans. On a découvert que la pathologie était liée à la répétition anormale de 3 nucléotides dans le gène FMR1. En utilisant des souris génétiquement modifiées et des cellules neuronales dérivées par technique iPS de fibroblastes de 3 patients, on a montré que la maladie résultait de l'expression des nucléotides en une protéine pathogène, la FMRpolyG, différente de celle normale codée par FMR1 [5] . Il s'ouvre donc la possibilité d'utiliser cette protéine comme marqueur et de tester des molécules à visée thérapeutique. De nombreuses lignées de cellules iPS ont été constituées, particulièrement pour des maladies rares, mais aussi pour des maladies plus fréquentes (Tableau 1) [6] [7] [8] La réparation tissulaire a été initialement proposée dans des pathologies neurologiques utilisant des modèles animaux. Des neurones dopaminergiques dérivés de fibroblastes ont améliorés les symptômes de rats parkinsoniens [11] . Toujours dans un modèle animal de lésions de la moelle épinière, la greffe de cellules humaines différenciées a stimulé la régénération neuronale et amélioré la locomotion [12] . Mais l'utilisation de cellules iPS pour traiter des patients avec atteinte médullaire traumatique nécessite encore de nombreuses expérimentations animales car les défis restent nombreux et les résultats dans les modèles animaux sont assez variables [13] . Les greffes nécessitent souvent une immunosuppression chez le receveur ; les Page 5 of 25 J o u r n a l P r e -p r o o f 5 cellules transplantées peuvent être un mélange de cellules neuronales mais parfois un seul type cellulaire a été transplanté (astrocytes). Dans de nombreuses situations les cellules transplantées disparaissent après quelques semaines. Une première tentative de greffes d'iPS a été effectuée chez une femme japonaise atteint d'une dégénérescence maculaire liée à l'âge (DMLA). Les cellules d'épithélium pigmentaire de la rétine ont été obtenues à partir de fibroblastes de la patiente et ont persisté au moins 4 ans après la greffe [14, 15] . Toujours au Japon, un patient de 50 ans, atteint d'une maladie de Parkinson a été traité par l'injection de 2,4 millions de cellules neuronales dopaminergiques immatures dérivées de cellules iPS dans la moitié gauche du cerveau [16] , début d'un essai qui devait inclure 6 autres patients. Les équipes japonaises ont dû interrompre la recherche du fait de la survenue de mutations de p53 avec un risque de cancérisation des cellules transplantées. Des essais sont en cours pour la prévention de la réaction du greffon contre l'hôte au cours des greffes de cellules souches et dans les pathologies cardiaques (tableau 2). Dès 1998, des cellules embryonnaires humaines (CSEH) ont pu être isolées et cultivées dans un état de pluripotence [17] , le caractère de pluripotence étant démontré par leur capacité à donner naissance aux trois feuillets fondamentaux, endoderme, ectoderme et mésoderme. Ces lignées de CSEH ont donné des cellules spécialisées comme des neurones [18] , des cardiomyocytes [19] ou des cellules bêta du pancréas [20] . Depuis ces travaux pionniers, des milliers de lignées pluripotentielles ont été produites ; bon nombre d'entre elles non utilisables en clinique car les techniques de culture utilisent des [21] . La différenciation dirigée des cellules souches permet d'obtenir des cellules d'intérêt pour une réparation tissulaire spécifique, par exemple cardiomyocytes, cellules dopaminergiques, cellules bêta du pancréas. Néanmoins, le niveau de différenciation de ces cellules peut n'être que partiel. Le tableau 2 décrit les essais cliniques en cours dans les traumatismes de la moelle épinière, des pathologies oculaires, la maladie de Parkinson, des affections cardiovasculaires et le diabète de type I [22] . Les résultats de ces essais ne sont que partiellement publiés ; les informations complémentaires proviennent du congrès annuel de l'ISSCR (International Society for Stem Cell Research) et des industriels. Le premier essai de traitement des traumatismes de la moelle épinière date de 2010 ; il utilisait des oligodendrocytes, lesquels ont stimulé une néovascularisation, la sécrétion de facteur de croissance neurologique et ceci en l'absence d'effets secondaires. Plusieurs essais concernent des pathologies oculaires traitées par la transplantation d'épithélium pigmentaire rétinien avec, dans une série, l'amélioration de la vision de 17 des 18 patients inclus, là aussi sans effets secondaires [23] . Sur une autre série de patients il n'a pas été observé de phénomènes inflammatoires ou de signes de prolifération tumorale, l'amélioration de la vision étant minime [24] . En 2013 a été débuté le premier essai de phase I pour le traitement de l'insuffisance cardiaque utilisant un patch de fibrine supportant des progéniteurs cardiaques issus de CSEH [25] . Parmi les 6 patients, 2 sont décédés, une amélioration de la fonction cardiaque a 7 été observée chez les 4 autres lesquels n'ont eu aucuns effets secondaires. Ces patients recevaient aussi de la cyclosporine en tant que traitement immunosuppresseur. Dans cette étude, l'activité des cellules transplantées aurait pu se faire par l'intermédiaire de vésicules extracellulaires. Ces vésicules extracellulaires des cellules progénitrices cardiaques n'entrainent pas de réactions immunitaires, diminuent l'inflammation et pourraient, elles-mêmes, devenir une thérapeutique acellulaire de l'insuffisance cardiaque [26] . En 2014 a été débuté un essai de phase I/II chez 65 diabétiques de type I qui utilisait une membrane semi-perméable encapsulant des cellules bêta du pancréas dérivant de CSEH (essai Viacyte). Il n'y a pas pour l'instant pas de données d'efficacité, mais les capsules implantées sous la peau n'ont pas entrainé d'effets secondaires et n'ont pas été rejetées. En 2017, une étude australienne (Cyto Therapeutics) a inclus 12 patients avec une maladie de Parkinson pour un traitement par progéniteurs neuronaux issus de CSEH. Après 6 mois, il y a eu une amélioration de la motricité et des fonctions cognitives. Des équipes japonaises utilisent actuellement des cellules induites d'épithélium pigmentaire rétinien allogéniques (iPS allo) provenant d'une banque de cellules sanguines ; elle permet la sélection des caractéristiques HLA correspondant aux haplotypes les plus fréquents de la population japonaise (études RIKEN). Les cellules souches mésenchymateuses (iPS allogéniques) sont utilisées pour le traitement de la maladie du greffon contre l'hôte après greffe de cellules souches hématopoïétiques avec, selon Cynata Therapeutics, une amélioration nette chez les 8 premiers patients traités. Outre cette recherche thérapeutique cellulaire, les CSEH peuvent être utilisée pour tester des médicaments. C'est ce qui a été fait pour la maladie de Steinert avec la metformine, médicament anti diabétique qui a corrigé la dérégulation de l'épissage des ARN de cette maladie [27] . Cependant la metformine n'a pas montré d'effet réellement [41, 42] . Le déficit immunitaire combiné sévère par déficit en adénosine désaminase (DICS ADA) a été traité avec succès par greffes de cellules transfectées ; il s'agissait d'abord d'un gamma retro virus contenant le gène ADA, puis ensuite par un vecteur SIN (self inactivating dans lequel les séquences « enhancers » du L TR 3' sont délétées), lequel a été approuvé par l'EMA (Strimvelis) [43, 44] . Cette seconde génération de vecteurs sécurisés a aussi bénéficié à des maladies comme le syndrome de Wiskott-Aldrich, la Granulomatose Septique Chronique liée à l'X (X-CGD) ou la maladie de Fanconi [45] [46] [47] [48] . Des essais sont en cours pour l'Immunodéficience Sévère Combinée Radiosensible liée au déficit d'Artémis (RS-SCID), la myopathie myotubulaire, la maladie de Crigler-cellules souches transduites avec le gène d'intérêt sont aussi programmées dans la Dystrophie musculaire de Duchenne, l'amyotrophie spinale infantile, la myopathie des ceintures avec déficit en FKRP (Fukutin-Related Protein) et la glycogénose de type II ou déficit en α-glucosidase acide. Si l'allogreffe de cellules souches est indiquée dans certaines maladies métaboliques, les approches par thérapie génique se développent avec succès. Ainsi la leucodystrophie métachromatique et l'adrenoleucodystrophie liée à l'X ont fait l'objet de tentative de traitement par thérapie génique [49, 50] [53, 54] . Elle est aussi indiquée dans les leucémies aigües lymphoblastiques de l'adulte avec anomalies cytogénétiques défavorables, en cas de phénotype pré-B et chez les patients avec un taux de leucocytes élevés au diagnostic. Les cellules utilisées peuvent être d'origine familiale ou extrafamiliale, à partir de fichier nationaux ou internationaux ; les cellules de sang de cordon peuvent aussi être utilisées [55] . Les CSH sont aussi testés dans des essais thérapeutiques pour des pathologies non tumorales, inflammatoires ou dysimmunitaires [56] . Les cellules CAR- Strategies and new developments in the generation of patient-specific pluripotent stem cells Setting Global Standards for Stem Cell Research and Clinical Translation: The 2016 ISSCR Guidelines Harnessing the potential of induced pluripotent stem cells for regenerative medicine Pluripotent stem cells progressing to the clinic Translation of Expanded CGG Repeats into FMRpolyG Is Pathogenic and May Contribute to Fragile X Tremor Ataxia Syndrome Harnessing the potential of stem cells for disease modelling: progress and promises Generation of a human induced pluripotent stem cell line from a patient with Leber congenital amaurosis Disease-Specific Induced Pluripotent Stem Cells A comparison of non-integrating reprogramming methods Genomic landscape analyses of reprogrammed cells using integrative and non-integrative methods reveal variable cancer-associated alterations Neurons derived from reprogrammed fibroblasts functionally integrate into the fetal brain and improve symptoms of rats with Parkinson's disease Grafted human-induced pluripotent stem-cell-derived neurospheres promote motor functional recovery after spinal cord injury in mice iPS cell transplantation for traumatic spinal cord injury Base-Resolution Methylome of Retinal Pigment Epithelial Cells Used in the First Trial of Human Induced Pluripotent Stem Cell-Based Autologous Transplantation Autologous Induced Stem-Cell-Derived Retinal Cells for Macular Degeneration Reprogrammed' stem cells implanted into patient with Parkinson's disease Embryonic stem cell lines derived from human blastocysts Neural progenitors from human embryonic stem cells Human embryonic stem cells can differentiate into myocytes with structural and functional properties of cardiomyocytes Insulin production by human embryonic stem cells Chemically defined conditions for human iPSC derivation and culture Two decades of embryonic stem cells: a historical overview Human embryonic stem cellderived retinal pigment epithelium in patients with age-related macular degeneration and Stargardt's macular dystrophy: follow-up of two open-label phase 1/2 studies Transplantation of human embryonic stem cell-derived retinal pigment epithelial cells in macular degeneration Transplantation of Human Embryonic Stem Cell-Derived Cardiovascular Progenitors for Severe Ischemic Left Ventricular Dysfunction Extracellular Vesicles from Human Cardiovascular Progenitors Trigger a Reparative Immune Response in Infarcted Hearts In Vitro and In Vivo modulation of alternative splicing by the biguanide metformin Improved mobility with metformin in patients with myotonic dystrophy type 1: a randomized controlled trial Gene therapy for haemophilia Adenovirusassociated virus vector-mediated gene transfer in haemophilia B Long-Term Safety and Efficacy of Factor IX Gene Therapy in Hemophilia B Hemophilia B gene therapy with a high-specific-activity factor IX variant AAV5-Factor VIII Gene Transfer in Severe Hemophilia A Multiyear Follow-up of AAV5-hFVIII-SQ Gene Therapy for Hemophilia A Transfusion independence and HMGA2 activation after gene therapy of human b-thalassaemia Gene Therapy in Patients with Transfusion-Dependent β-Thalassemia Hemopoietic stem cell transplantation in thalassemia: a report from the European Society for Blood and Bone Marrow Transplantation Hemoglobinopathy Registry Effect of donor type and conditioning regimen intensity on allogeneic transplantation outcomes in patients with sickle cell disease: a retrospective multicentre, cohort study Gene Therapy in a Patient with Sickle Cell Disease Gene Therapy of Human Severe Combined Immunodeficiency (SCID)-X1 Disease A modified γ-retrovirus vector for X-linked severe combined immunodeficiency Lentiviral Gene Therapy Combined with Low-Dose Busulfan in Infants with SCID-X1 Update on the safety and efficacy of retroviral gene therapy for immunodeficiency due to adenosine deaminase deficiency Gene therapy for ADA-SCID, the first marketing approval of an ex vivo gene therapy in Europe: paving the road for the next generation of advanced therapy medicinal products Outcomes following gene therapy in patients with severe Wiskott-Aldrich syndrome Lentiviral haemopoietic stem/progenitor cell gene therapy for treatment of Wiskott-Aldrich syndrome: interim results of a non-randomised, open-label, phase 1/2 clinical study Lentiviral gene therapy for X-linked chronic granulomatous disease Successful engraftment of gene-corrected hematopoietic stem cells in non-conditioned patients with Fanconi anemia Lentiviral haemopoietic stem-cell gene therapy in early-onset metachromatic leukodystrophy: an ad-hoc analysis of a non-randomised, open-label, phase 1/2 trial Hematopoietic stem-cell gene therapy for cerebral adrenoleukodystrophy Historique de l'autogreffe de cellules souches hématopoïétiques : rôle actuel en hématologie. 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