key: cord-0748547-fwhhsnmq authors: Agut, H; Fillet, A. M; Gautheret-Dejean, A; Boutolleau, D title: Détection, quantification et analyse des génomes viraux dans les infections à herpèsvirus humains 6 et 7 (HHV-6, HHV-7) date: 2003-09-30 journal: Immuno-analyse & Biologie Spécialisée DOI: 10.1016/s0923-2532(03)00065-6 sha: 0878e50ff505c6cd58a7f835f36be4ea62dd42f7 doc_id: 748547 cord_uid: fwhhsnmq Résumé La détection, la quantification et l’analyse génétique des génomes viraux ont été progressivement introduites dans la pratique quotidienne de la virologie médicale. Dans le cas des infections à herpèsvirus humains 6 et 7 (HHV-6, HHV-7), la détection de l’ADN viral a permis d’impliquer ces infections dans des maladies au-delà de ce qui avait été mis en évidence par les méthodes conventionnelles (culture, sérologie) notamment chez les sujets immunodéprimés. La quantification, en particulier grâce à l’apport récent de la PCR en temps réel, est susceptible d’établir la distinction entre latence et réactivation virales, de prédire la survenue d’évènements cliniques, de suivre les effets d’une thérapeutique spécifique. L’analyse génétique a conduit à l’identification de variants et contribué à caractériser les mutations associées à la résistance aux antiviraux. Comme le montre l’étude des herpèsvirus, ces techniques moléculaires ont aussi des limites qu’il faut connaître mais constituent indiscutablement un progrès décisif en virologie clinique. Abstract The detection, quantification and genetic analysis of viral genomes have become a common practice in clinical virology. This is exemplified by the study of human herpesviruses 6 and 7. The detection of viral DNA has led to implicate theses viruses in human diseases far beyond the evidence obtained by conventional approaches such as virus culture and serology. This is specially the case for immunocompromised subjects. The quantitation of DNA, in particular by means of real-time PCR, is now susceptible to differenciate reactivation from latency, predict the occurrence of clinical events, and monitor the efficacy of antiviral therapy. Genetic analyses have permitted the characterization of variant-specific polymorphisms and mutations responsible for resistance to antivirals. Despite some limitations that users have to be aware of, the study of viral genomes is an outstanding progress in medical virology. L'utilisation des techniques de biologie moléculaire en virologie médicale a bouleversé la compréhension et le suivi des infections virales humaines. Ce progrès méthodologique a permis de s'affranchir des limites des approches diagnostiques conventionnelles telles que l'isolement viral en culture cellulaire ou le diagnostic indirect fondé sur la détection des anticorps spécifiques dans le sérum. L'avènement de l'étude des génomes viraux a de plus coïncidé avec la prise en charge médicale de 2 infections virales chroniques, exceptionnelles par leur gravité et leur explosion épidémique, les infections par le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) et par le virus de l'hépatite C (VHC). Fort logiquement, c'est dans ces 2 domaines que la contribution des analyses moléculaires apparaît actuellement la plus déterminante. Cependant, l'étude des génomes viraux a été appliquée avec succès à d'autres infections. Une illustration spectaculaire et récente est la caractérisation du coronavirus responsable du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) en avril 2003. Une autre illustration est l'application de cette approche moléculaire aux herpèsvirus, notamment les nouveaux herpèsvirus lymphotropes humains : les herpèsvirus humains 6 (HHV-6), 7 (HHV-7) et 8 (HHV-8), découverts respectivement en 1986, 1990 et 1994. La contribution de l'analyse des génomes viraux a été là encore décisive comme on va le voir pour le HHV-6 et le HHV-7 à travers l'expérience de notre laboratoire, après quelques rappels généraux sur l'analyse des acides nucléiques. L'analyse des acides nucléiques viraux bénéficie d'un ensemble de techniques élémentaires qui, associées entre elles, permettent de répondre aux différentes questions avec la meilleure spécificité et la meilleure sensibilité (Tableau 1). Ces techniques, apparues et régulièrement perfectionnées au cours des dernières décennies, sont passées du domaine de la recherche à celui de l'analyse biologique quotidienne. Des trousses de réactifs commerciaux et, pour de nombreuses étapes, des appareils automatiques sont maintenant largement disponibles. Au centre du dispositif les techniques d'amplification génique, dont la plus connue est la PCR (polymerase chain reaction), permettent d'obtenir un fragment d'ADN donné en quantité suffisante pour son analyse. Une variante, la PCR en temps réel, associe en une étape l'amplification de l'ADN et la détection des produits amplifiés. La détection effectuée en continu au cours de l'amplification, d'où la dénomination de « temps réel », autorise de plus une quantification précise et reproductible de la quantité initiale d'ADN introduit dans la réaction. Autour de l'amplification génique, s'agrègent les autres techniques d'analyse de l'ADN. Une caractérisation rapide est possible par hybridation avec une sonde spécifique, migration électrophorétique et/ou digestion par des enzymes de restriction. Ces approches élémentaires se combinent entre elles selon diverses modalités, l'association la plus classique étant l'hybridation après transfert décrite par Southern [22] dont l'élégance et les multiples contributions méritent d'être soulignées une fois de plus. La caractérisation la plus précise repose sur la détermination de la séquence nucléotidique (définie de façon abrégée sous le terme de séquençage), de plus en plus accessible grâce à l'apparition d'automates performants. En marge du dispositif, le clonage moléculaire consiste à insérer l'ADN d'intérêt dans un vecteur moléculaire et à le faire amplifier par un micro-organisme. Cette approche révolutionnaire a permis l'essor du génie génétique il y a 2 décennies mais Elles exigent un incontestable savoir-faire qui va bien au-delà de l'application des procédures décrites dans les trousses commerciales de biologie moléculaire. Même si des automates fermés sont capables, dans l'avenir, d'effectuer une séquence complète d'analyses moléculaires, en partant du prélèvement pour aboutir à un résultat biologique, il est peu probable que ces machines soient conçues pour répondre aux exigences d'une caractérisation fine et adaptée des acides nucléiques. Quand bien même l'automatisation serait complète dans certains domaines, les compétences en biologie moléculaire des biologistes et techniciens seront indispensables pour comparer les équipements, interpréter les résultats, évaluer de façon critique leur qualité et s'adapter à l'évolution constante des connaissances en virologie. Les techniques moléculaires ont aussi un coût financier non négligeable qui peut conduire à restreindre leurs développements et leurs applications dans des thématiques considérées comme non prioritaires. Enfin, des limites techniques sont à évoquer. Si les techniques moléculaires sont de réalisation plus aisée que l'isolement et la propagation des virus en culture cellulaire, elles ne peuvent se substituer à ces dernières en ce qui concerne les questions d'infectiosité, de virulence et d'analyse phénotypique d'une façon générale. Lors de la synthèse d'ADN in vitro, des erreurs de séquence peuvent être introduites et amplifiées par l'ADN polymérase utilisée, nécessitant une analyse critique des mutations détectées ensuite lors du séquençage (ceci est particulièrement vrai pour l'analyse de clones moléculaires) [17] . La sensibilité extrême de l'amplification génique, une de ses principales qualités, est parfois en échec. L'amplification peut être impossible du fait de la présence d'inhibiteurs non spécifiques (hémoglobine, héparine par exemple) ou d'une mauvaise qualité des acides nucléiques extraits du prélèvement. À l'opposé, elle peut donner un résultat faussement positif, la cause principale étant la contamination du milieu réactionnel par les produits amplifiés d'une réaction précédente. Ce risque de contamination reste un souci constant malgré les mesures de prévention développées dans les laboratoires au cours des ans ; il semble moindre pour la PCR en temps réel au cours de laquelle l'analyse des produits amplifiés s'effectue « à tube fermé ». Le HHV-6 et le HHV-7 sont des virus ubiquitaires, infectant de façon chronique la très grande majorité de la population adulte à partir d'une primo-infection survenant dans les premières années de la vie. Ils partagent un tropisme pour les lymphocytes CD4-positifs ainsi que les monocytes-macrophages et les cellules épithéliales glandulaires, ces 2 derniers types cellulaires étant probablement des sites électifs de l'infection latente. Des réactivations sont observées marquées par une virémie et la présence du virus dans la salive. Leur pouvoir pathogène apparaît actuellement moins marqué que celui du cytomégalovirus (CMV) qui appartient à la même sous-famille des Betaherpesvirinae. Cependant, la pathogénicité de ces 2 virus n'est pas encore parfaitement connue. La majorité des primo-infections sont asymptomatiques mais certaines primo-infections à HHV-6 se manifestent par un exanthème subit (ou sixième maladie), voire une hépatite, un syndrome mononucléosique [23] . Lors des états d'immunodépression, le HHV-6 est l'agent d'infections opportunistes telles qu'une pneumopathie, une encéphalite, une hépatite, une rétinite [8] ; dans ce contexte, le HHV-7 favoriserait la survenue d'infections opportunistes à CMV et à HHV-6. La gravité de certaines infections à HHV-6 est une incitation à les traiter par le ganciclovir, le foscarnet ou le cidofovir, molécules antivirales auxquelles le virus est sensible dans les tests de susceptibilité in vitro. C'est aussi un encouragement à effectuer le diagnostic des infections aiguës à HHV-6 et HHV-7 de façon aussi sensible et spécifique que possible. L'isolement du HHV-6 en culture de lymphocytes primaires est possible à partir des cellules mononucléées du sang périphérique (PBMC) et de divers tissus ou fluides biologiques tels que la salive, le liquide céphalorachidien. Cette technique de référence est lourde, imposant autant que possible le recours aux lymphocytes de sang de cordon, et manque de sensibilité car de nombreuses souches de HHV-6 n'induisent pas d'effet cytopathique ou ne peuvent être propagées en culture au laboratoire. Le recours aux lignées lymphocytaires continues pour isoler le HHV-6 est techniquement plus facile mais ces cellules sont encore moins permissives que les lymphocytes primaires. Quant au HHV-7, sa culture se révèle encore plus difficile que celle du HHV-6 [20] . Pour les 2 virus, la quantification du pouvoir infectieux en culture cellulaire est effectuée en dilution limite, une technique exigeante nécessitant plusieurs répliques pour chaque dilution pour atteindre une précision suffisante. La détection des antigènes viraux par immunofluorescence ou immunohistochimie utilise des anticorps monoclonaux ou des sérums d'animaux immunisés spécifiquement. Les performances de cette approche dépendent étroitement de la spécificité antigénique des anticorps, de leur affinité pour leurs cibles protéiques, du maintien de la structure des épitopes après fixation cellulaire. En particulier, la capacité des anticorps anti-HHV-6 à reconnaître 1 seul ou les 2 variants du virus (voir plus loin) doit être connue avant leur utilisation. La détection antigénique a le mérite de permettre de distinguer une infection active d'une infection latente par la mise en évidence de protéines virales impliquées dans le cycle productif du virus. En revanche, sa sensibilité reste modeste et la batterie d'anticorps anti-HHV-6 et anti-HHV-7 disponibles commercialement est actuellement insuffisante. Le diagnostic indirect (sérodiagnostic) des infections à HHV-6 et HHV-7, pratiqué essentiellement par immunofluorescence, présente de nombreux écueils. Des réactivités croisées vis-à-vis de ces 2 virus, entre eux 2 et chacun vis-à-vis du CMV, ont été décrites. Pour augmenter la spécificité de la réaction, on peut imposer des critères de positivité plus stricts mais cela tend à diminuer notablement la sensibilité. À l'opposé, on ne dispose pas d'une technique sérologique spécifique de chacun des variants du HHV-6. Les principales réserves concernent l'interprétation des résultats. Si la séroconversion éventuellement associée à la présence d'IgM est révélatrice d'une primo-infection, en particulier chez l'enfant, l'interprétation du titre des anticorps chez un sujet séropositif est d'une extrême difficulté : aucun titre dans l'absolu ne permet de conclure au caractère récent ou ancien d'une infection ou d'une réactivation ; les variations à court terme de ce titre chez les sujets immunodéprimés ne sont guère plus évocatrices, pas plus que la détection des IgM. Il faut rappeler que plus de 90 % de la population adulte est séropositive pour les 2 virus d'où la très faible information attendue de la sérologie pour l'étude des maladies qui leur sont imputées. Au total, les méthodes diagnostiques qualifiées de conventionnelles ont permis l'identification du HHV-6 et du HHV-7, la caractérisation initiale de leur épidémiologie et de leur physiopathologie, notamment lors de la primo-infection. Audelà, elles n'ont pas connu de développements suffisants pour étudier les phénomènes pathogènes associés aux infections chroniques, préciser l'épidémiologie et la distribution géographique des variants, définir les indications et le suivi des traitements antiviraux. À ces questions, la quantification et l'analyse des génomes viraux ont fourni des réponses au moins partielles, ce qui permet d'envisager des progrès décisifs dans la prise en charge des infections à HHV-6 et HHV-7. La PCR a permis de rechercher la présence de ces 2 virus dans de nombreuses maladies aiguës, chroniques et/ou associées à des états d'immunodépression. La grande sensibilité de cette technique et sa propension à engendrer des résultats faussement positifs par contamination ont malheureusement conduit, dans certains cas, à des déclarations fracassantes qui n'ont pas été confirmées par la suite. Ainsi, le rôle causal supposé du HHV-6 dans la sarcoïdose, le syndrome de Sjögren, les lymphomes non hodgkiniens, le syndrome de fatigue chronique a été oublié. En revanche, la présence du HHV-6 dans le sang au cours de l'exanthème subit ainsi qu'au cours d'autres syndromes associés à la primo-infection (fièvre sans éruption, syndrome mononucléosique, hépatite, méningo-encéphalite) a été amplement confirmée par la PCR. Il en est de même pour les réactivations du HHV-6 au cours des états d'immunodépression et les maladies qui leur sont associées : pneumopathie, rétinite, encéphalite, éruption cutanée, retard de prise de greffe [6] . Cependant, dans ce contexte, il importe de faire la différence entre une réactivation purement virologique et celle induisant un état pathologique. Les pneumopathies interstitielles imputables au HHV-6 illustrent cette complexité : si effectivement le virus apparaît comme l'agent causal de pneumopathies interstitielles chez les greffés de moelle osseuse en l'absence du CMV, une étude bien conduite a permis de montrer qu'il était aussi présent dans les poumons de sujets immunodéprimés ne présentant pas une telle maladie [5] . L'étude histolologique permettrait peut-être de distinguer les 2 situations en montrant la présence importante du virus dans les pneumocytes en cas de pneumopathie alors qu'il serait préférentiellement dans les macrophages septaux en cas de simple réactivation. Les rétinites observées au cours du sida sont un autre exemple où la responsabilité du HHV-6 est évoquée mais ne peut pas toujours être formellement établie : dans une étude post mortem de 10 cas de rétinite et de 3 prélèvements témoins, le HHV-6 était effectivement détecté dans le tissu rétinien de 3 malades mais il y était toujours associé au CMV (Tableau 2) [12] . En l'absence d'immunodépression, les réactivations pourraient aussi s'associer à des symptômes cliniques mais les preuves sont encore fragiles : ainsi, le HHV-7 a été trouvé par PCR dans les lésions cutanées de pityriasis rosé de Gibert plus souvent qu'en peau saine [9] mais le lien de causalité est controversé, la réactivation virale pouvant être la conséquence de l'inflammation locale et non sa cause. Le problème de la causalité paraît encore plus difficile à résoudre pour les maladies de système en relation avec un dysfonctionnement immunitaire, pour lesquelles la PCR a mis objectivement en évidence la présence du HHV-6. Dans une publication très remarquée, une méthode dérivée de la PCR appelée RDA (representational difference analysis), permettant d'amplifier sélectivement des acides nucléiques présents dans les tissus lésés et absents des tissus sains, a montré la présence de HHV-6 dans des lésions de sclérose en plaques (SEP) [4] . Ce résultat a été le début d'une controverse qui n'est pas encore close sur le rôle du virus dans les poussées de cette grave maladie démyélinisante. Les résultats souvent contradictoires s'accumulent mais il semble acquis que de nombreuses poussées sont indépendantes d'une réactivation intrathécale du virus comme le montre l'analyse par PCR du liquide céphalorachidien de sujets en poussée et de sujets témoins (Tableau 3) : la présence du virus est loin d'être une constante au cours de la maladie [13] . Une approche pour évoquer plus solidement la participation d'un virus à un processus pathologique est sa quantification. Elle permet en théorie de distinguer clairement la latence virale d'une réactivation. Elle peut permettre de définir des seuils de charge virale et/ou des variations de ce paramètre susceptibles de prédire la survenue d'un évènement clinique. Enfin, après l'institution d'un traitement antiviral spécifique, elle peut montrer le parallélisme entre la régression des signes cliniques et la diminution de la charge virale par inhibition de la réplication du virus. La PCR en temps réel, dans ce contexte, a permis de réels progrès [10, 16] . Ainsi, dans l'étude de 78 greffés de cellules souches hématopoïétiques, la charge virale médiane de HHV-6 dans la période post-greffe était de 1357 copies de génome par million de PBMC (CGM) avec des valeurs extrêmes de 71 et 17 × 10 6 CGM alors qu'elle était de 640 CGM et inférieure à 100 CGM pour les mêmes sujets avant la greffe et pour des témoins sains respectivement [3] . Ce résultat témoignait d'une réactivation de la réplication du HHV-6 après la greffe alors que, dans le cas du HHV-7, ce phénomène n'avait pas lieu, la charge médiane étant similaire avant et après la greffe ainsi que chez les témoins sains. De plus, la survenue après la greffe, de symptômes cliniques tels qu'une fièvre, un rash cutané, une pneumopathie ou de signes biologiques tels qu'une anémie, une leucopénie, une thrombopénie était significativement associée à une charge virale HHV-6 supérieure à 1000 CGM et indépendante de la charge virale HHV-7. Le suivi des charges virales HHV-6 et HHV-7 montrait d'ailleurs bien, pour certains sujets, la contemporanéité des manifestations cliniques avec la réactivation du HHV-6 ( Fig. 1) . Ces résultats illustrent bien le risque lié spécifiquement au HHV-6 après une greffe de cellules souches hématopoïétiques ; ils permettent d'envisager un suivi séquentiel de la charge virale HHV-6 en post-greffe afin d'anticiper et, si possible, prévenir, par un traitement antiviral spécifique, certaines complications cliniques. Les études phénotypiques avaient permis de reconnaître 2 ensembles distincts parmi les isolats de HHV-6 : ces 2 ensembles différaient par leur tropisme cellulaire, en particulier leur capacité à se multiplier dans certaines lignées lymphocytaires continues, et leur réactivité vis-à-vis de certains anticorps monoclonaux. L'approche moléculaire, hybridation par la méthode de Southern puis séquençage après amplification, a identifié les différences génétiques entre les 2 groupes désignés ensuite comme les variants A et B du HHV-6. L'homologie des séquences protéiques reste très élevée, supérieure à 90 % pour l'ensemble du génome, ce qui montre bien qu'il s'agit de variants d'une même espèce virale. Cependant, l'identité des acides aminés des produits de certains gènes peut être seulement de l'ordre de 62 % entre variants A et B, ce qui explique leurs différences antigéniques et fonctionnelles. La mise en évidence de séquences nucléotidiques particulières à chacun des variants a permis de mettre au point des PCR spécifiques : la spécificité est liée à la reconnaissance du produit amplifié par une sonde d'hybridation (PCR avec hybridation spécifique) ou à l'appariement d'une amorce qui conditionne le succès de l'amplification (PCR avec amorce spécifique) [2] . Ainsi, a été analysée la nature du variant impliqué dans les maladies imputées au HHV-6 : le variant B paraît le plus fréquemment en cause, notamment au cours de l'exanthème subit ; cependant, il pourrait s'agir souvent d'un biais de détection lié au fait que le variant B semble plus fréquemment présent dans le sang périphérique que le variant A, indépendamment du processus pathogène en cours. Un autre intérêt de la PCR spécifique de variant a été de montrer la très haute fréquence des coinfections par les 2 variants [11] . On ignore encore si cette co-infection chronique résulte d'une primo-infection simul- Contrairement au HHV-6, la variabilité génétique des souches de HHV-7 est très réduite [14] . Ainsi, la comparaison de la séquence nucléotidique de 2 souches JI et RK, n'ayant aucun lien épidémiologique entre elles, a montré une identité génétique supérieure à 99,9 %. Cependant, des sites ponctuels de polymorphisme génétique, la plupart des changements n'entraînant aucune modification de la séquence protéique associée, ont été identifiés et ont permis de définir des variants réunis dans 2 groupes principaux désignés Co1 et Co2. La répartition des 2 groupes au niveau mondial a été étudiée sur un ensemble de 274 individus distincts, représentatifs de différentes populations humaines [15] . Le groupe Co1 est apparu comme un ensemble de virus très largement répandus alors que le groupe Co2 avait une diffusion beaucoup plus restreinte (Fig. 2) . La question des conditions environnementales ou des migrations de populations humaines qui ont abouti à l'émergence de ces 2 groupes viraux et à leur distribution actuelle est ouverte. Même si des biais [15] ). L'histogramme de gauche (grisé) représente le groupe Co1, l'histogramme de droite (noir) le groupe Co2. La hauteur de chaque histogramme est proportionnelle au nombre de sujets classés dans chacun des groupes. d'interprétation du polymorphisme restreint du HHV-7 sont possibles, on pourrait envisager d'utiliser ces groupes de variants comme marqueurs de populations, de façon similaire à ce qui est fait pour les virus JC et HTLV-I. Le HHV-6 et le HHV-7 sont sensibles in vitro à l'action inhibitrice de certains antiviraux tels que le ganciclovir (GCV), le foscarnet et le cidofovir [1, 7, 18] . Ces molécules, déjà largement administrées à l'homme pour le traitement des infections à CMV, sont utilisables pour le traitement des infections à HHV-6 mais les indications de tels traitements sont encore imprécises, faute de connaître suffisamment bien le pouvoir pathogène du virus. Des résultats très encourageants ont été obtenus, par exemple dans le traitement d'encéphalites à HHV-6 chez les sujets immunodéprimés [21] , et ce type de thérapeutique est appelé à se développer parallèlement au progrès dans la détection et la quantification du virus. Le risque est l'émergence d'une résistance du HHV-6 aux antiviraux, facilitée par les états d'immunodépression et l'exposition prolongée du virus aux antiherpétiques dans le contexte de la prévention et/ou du traitement des infections à CMV. Cette résistance a déjà été bien étudiée pour le CMV lui-même et l'on s'attend à ce que les mécanismes de résistance des 2 virus soient proches. Cela semble bien être le cas. Une souche de HHV-6 résistante au GCV a été isolée au laboratoire et l'analyse génétique indique la présence d'un changement de méthonine en valine pour l'acide aminé en position 318 (M318V) de la protéine kinase codée par le gène U69 [19] . Cette protéine est homologue de la protéine kinase codée par le gène UL97 du CMV, protéine qui est impliquée dans la phosphorylation du GCV et dont certaines mutations sont responsables d'une résistance du CMV au GCV. Fait remarquable, la mutation M318V du HHV-6 est homologue d'une mutation M460I/V du CMV, impliquée dans la résistance au GCV et localisée dans un motif protéique très conservé que l'on pense être un des éléments du site catalytique de l'enzyme (Tableau 4). Il est donc logique de supposer que la mutation M318V du HHV-6 est responsable de la résistance au GCV. Cette mutation a d'ailleurs été identifiée in vivo chez un sujet sidéen qui était traité de façon prolongée par le GCV pour une rétinite à CMV et présentait en parallèle une virémie à HHV-6. Cette souche de HHV-6 n'a pu être isolée au laboratoire, ce qui n'a pas permis de vérifier le phénotype de résistance et souligne une fois encore les difficultés d'isolement du HHV-6 en culture cellulaire. On espère que l'analyse génétique directe après amplification génique pourra se substituer bientôt à l'analyse phénotypique de la résistance, à l'image de ce qui a été développé pour le VIH-1. Il importe auparavant d'avoir dressé un inventaire des mutations du HHV-6 responsables de résistance en étudiant en parallèle le phénotype et le génotype de souches de référence sensibles et résistantes. Dans cette démarche, des tests de sensibilité in vitro fondés sur l'inhibition de la réplication de l'ADN viral sous différentes concentrations d'antiviral sont particulièrement utiles. La PCR en temps réel a démontré récemment qu'elle pouvait fournir une mesure particulièrement sensible et rapide de cette inhibition (M. Macé, soumis pour publication), ce qui indique encore une fois l'étendue des applications possibles des méthodes d'étude des acides nucléiques. Au-delà des prouesses technologiques et d'une nouvelle approche des phénomènes infectieux, l'étude des acides nucléiques viraux a entraîné un changement profond de la pratique quotidienne de la virologie médicale. Ce changement atteint tous les domaines d'activité, qu'il s'agisse de la prévention avec l'irruption du dépistage génomique des donneurs en virologie transfusionnelle, du diagnostic d'une infection débutante ou établie, ou de la thérapeutique avec le suivi de la charge virale et de la résistance sous traitement par des antiviraux. Il s'agit d'un progrès indiscutable, qui ne doit pas faire oublier cependant la complexité des infections virales humaines et les acquis de la virologie conventionnelle tels que la multiplication des virus en culture cellulaire ou la détection des anticorps sériques. Le maintien d'une diversité méthodologique apparaît indispensable pour continuer à accroître notre compréhension et notre maîtrise des maladies virales. 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Ils expriment également leur reconnaissance au ministère de la recherche et de la technologie, à l'association pour la recherche contre le cancer, l'agence nationale de recherche sur le sida, l'association Claude Bernard pour leur soutien dans la recherche sur les infections à HHV-6 et HHV-7.