key: cord-0072483-8plw7ps9 authors: Jaffal, K.; Mascitti, H. title: Grippe et Covid-19: Influenza and Covid-19 date: 2021-12-24 journal: Infect Dis Now DOI: 10.1016/s2666-9919(21)00555-8 sha: a5ab81cc9f07fc9b0f4091949a6849124d7eb26b doc_id: 72483 cord_uid: 8plw7ps9 nan D'après la communication de P. Crépey (Rennes) -Symposium Sanofi Pasteur « Que faut-il faire ? » dit le Petit Prince. « Il faut être très patient », répondit le renard. « Tu t'assoiras d'abord un peu loin de moi, comme ça, dans l'herbe… Mais, chaque jour, tu pourras t'asseoir un peu plus près » [1] . En pleine pandémie de coronavirus, on pouvait craindre que d'autres infections hivernales viennent un peu plus encombrer les services hospitaliers. Ça n'a pas été le cas en 2020. Selon les dernières données de Santé publique France, le confinement et le respect des gestes barrières ont permis de freiner gastroentérites, varicelle, grippes et autres bronchites. La Coronavirus Disease 2019 (COVID-19) prend toute la lumière et ne laisse que des miettes aux maladies de saison en comparaison aux années précédentes [2] . L'European Centre for Disease Prevention and Control (ECDC) rapporte sur la saison 2020-2021 plus de 900 000 tests de grippe effectués pour moins de 1 000 tests positifs ! En comparaison à la saison 2019-2020 où pour quasi le même nombre de tests effectués, on recensait plus de 160 000 tests positifs ! [3] . On peut donc conclure à une quasi-absence de circulation de virus grippaux en 2020-2021 en Europe. L'histoire se répète, en effet, un siècle avant la pandémie de COVID-19, un autre virus respiratoire décimait la planète entière, infectant près d'un milliard de personnes (environ la moitié de la population mondiale), responsable du décès de 25 à 50 millions de personnes à travers le monde. Comme un air de déjà-vu… L'épidémie de grippe espagnole est riche d'enseignements. Aujourd'hui comme il y a 100 ans, les mesures de prévention sont les mêmes, à savoir distanciation sociale, mise en quarantaine, port de masques, lavage des mains, avec les mêmes débats dans la presse. On pouvait déjà constater que la mortalité due à la tuberculose avait fortement chuté pendant la pandémie de grippe espagnole en 1918-1920 [4] sans jamais revenir au niveau prépandémique une fois la crise passée, liée à l'amélioration de l'hygiène générale. Plus récemment, lors de la pandémie de grippe H1N1, En 2009, le pic épidémique des gastroentérites a été retardé de plusieurs semaines par rapport aux années précédentes et suivantes [5] . Une des hypothèses serait un phénomène de compétition virale. Cependant, les taux de prévalence d'infections au Severe Acute Respiratory Syndrome -Coronavirus 2 (SARS-CoV-2) restent sur des niveaux relativement faibles notamment lors de la première vague ne permettant pas d'expliquer une absence de circulation des autres virus hivernaux épidémiques. L'hypothèse la plus convaincante reste l'impact des interventions non pharmaceutiques. Plusieurs études de modélisation tendent à démontrer que l'usage des masques en population semble avoir un impact sur la transmission virale en fonction de l'étendue de l'usage et de la qualité du type de masque [6] . D'autres études ont essayé de démontrer l'impact des mesures d'isolement sociales retrouvant une réduction significative du risque de transmission du SARS-CoV-2 et donc des autres pathogènes partageant le même mode de transmission [7, 8] . D'autres pays n'ont pourtant pas adopté une stratégie de confinement comme en France et des applications très hétérogènes sur leur territoire, avec pour autant les mêmes constatations épidémiologiques [9] . La réponse à cette question reste complexe et multifactorielle. L'équation suivante permet de mettre en perspective l'ensemble des éléments de réponses permettant de réduire le risque effectif de transmission virale ( fig. 1 ). L'avancée de la campagne de vaccination devrait permettre à terme une transition complète d'une stratégie reposant exclusivement sur la réduction des contacts vers une stratégie reposant sur l'immunité. Les mesures non pharmaceutiques sont à « large spectre ». Le R0 de la grippe étant plus faible que celui du SARS-CoV-2, lorsque l'épidémie de SARS-CoV-2 est freinée par des mesures de réduction de contact, le R effectif de la grippe va mécaniquement être sous le seuil de 1 ! Mais quelle adhésion sur le long terme si l'épidémie de COVID-19 est contrôlée ? Quant à l'immunité de la population générale contre la grippe, plusieurs inconnus restent au jour. Deux questions se posent : 1) La moindre circulation, à l'origine d'un moindre « drift génétique », permettrait-elle de conserver une immunité croisée plus importante ? 2) L'absence de stimulation de l'immunité antigrippale, du fait de l'absence d'épidémie au cours de la saison 2020-2021, pourrait-elle faire craindre une plus grande susceptibilité de la population aux virus grippaux et donc favoriser une circulation particulièrement intense ? On ne peut répondre à ces questions aujourd'hui. L'immunité résiduelle contre la grippe reste incertaine et la transition d'une stratégie de réduction des contacts vers une stratégie de contrôle par la vaccination pourrait rendre le risque de circulation grippal non négligeable et la nécessité de maintenir les mesures barrières. L'absence d'épidémie de grippe saisonnière en France en 2020-2021 ne permet pas d'anticiper sur la circulation des virus grippaux au cours des prochaines saisons. Comme le rappelle la Haute Autorité de Santé (HAS), atteindre de forts taux de vaccination contre la grippe reste un enjeu majeur de santé publique [11] . La nécessité d'une campagne de rappels de vaccination anti-COVID-19 à l'automne pour prolonger la durée de protection ou améliorer la protection contre certains variants est déjà envisagée. Dans ce contexte, la HAS recommande, pour éviter tout retard à la vaccination antigrippale et simplifier le parcours vaccinal, de proposer l'administration concomitante des vaccins contre la COVID-19 et contre la grippe saisonnière dès lors qu'une personne est éligible aux deux vaccinations. Si on peut mettre en relief en matière sanitaire un enseignement de l'épidémie de COVID-19, c'est de nous rappeler l'importance de la culture épidémiologique et la nécessité de poursuivre, enseigner et promouvoir des piliers d'action complémentaires de la prévention sanitaire : le respect des gestes barrières et la vaccination. Plusieurs autres candidats vaccins sont en cours d'évaluation par l'Agence européenne des médicaments avec des technologies vaccinales différentes (tableau 1). À ce jour, environ 49,4 millions de personnes ont reçu au moins une injection (soit 73,2 % de la population totale) et 46 millions ont désormais un schéma vaccinal complet (soit 68,3 % de la population totale) soit 85,2 % (une dose) et 79,6 % (vaccination complète) de la population éligible (12 ans et plus) [13] . Les résultats des essais cliniques de phase 2/3 concernant la sécurité et l'efficacité du vaccin Pfizer BioNtech 6 mois après la seconde dose ont été publiés [14] . L'efficacité vaccinale a été calculée sur la base des cas de Covid- 19 Quand on s'intéresse à la persistance de la protection vaccinale au cours du temps, la plupart des études montrent une baisse de protection significative contre l'infection asymptomatique ou symptomatique au cours du temps [19] . Cette baisse peut en partie être expliquée par l'émergence du variant Delta dans la population [20] mais le constat est également le même peu importe le variant considéré permettant d'évaluer l'efficacité intrinsèque des vaccins notamment sur le variant Delta [21] . Un élément majeur est à noter des publications : la corrélation entre les titres en anticorps neutralisants et l'ineffectivité même si à ce jour on ne dispose pas encore de corrélat clinique permettant d'affirmer quel est le taux d'anticorps protecteur et pour quelle durée de temps [22] . Ces résultats renforcent les arguments en faveur d'une dose de rappel [23] . Si l'efficacité vaccinale baisse avec le temps, on peut s'attendre à une majoration du risque de survenue de formes graves… mais il n'est en rien. Les études démontrent une baisse de protection vaccinale significative contre l'infection asymptomatique ou symptomatique au cours du temps tandis que le niveau de protection contre les formes sévères reste excellent [18, [24] [25] [26] [27] [28] [29] . Ces données justifient aujourd'hui de poursuivre la vaccination. Enfin, les données immunologiques font penser que le maintien de la protection est meilleur pour les personnes qui ont été infectées puis vaccinées (1 ou 2 doses) [30] . Les données actualisées de pharmacovigilance rapportent de très rares cas de myocardite et de péricardite, signalés après administration des vaccins à ARNm, survenus, le plus souvent, dans les 7 jours suivant la vaccination, après la deuxième dose et chez des hommes jeunes [31] . L'évolution est le plus souvent rapidement favorable. D'où l'importance d'être attentif aux signes et symptômes de myocardite et de péricardite et d'informer les personnes vaccinées sur la nécessité de consulter en cas de douleurs thoraciques, d'essoufflement ou de palpitations. Ce risque est à comparer à celui du myocardite chez les patients infectés par COVID-19 qui est près de 16 fois plus important (IC 95 % : 14,1-17,2) que chez les patients non infectés, y compris dans la catégorie des 16-39 ans [32, 33] . Les bénéfices de ces vaccins demeurent bien supérieurs à leurs risques en population générale. Les dernières recommandations de la Haute Autorité de Santé (HAS) préconisent au vu des dernières publications l'administration d'une dose de rappel 6 mois après la seconde dose de vaccin, ou 3 à 6 mois après la dernière dose de vaccin chez les immunodéprimés, ou 1 mois après une dose de vaccin Janssen. Pour le rappel, seul un vaccin ARN doit être utilisé quel que soit le vaccin utilisé en primovaccination (concept de prime-boost hétérologue). La coadministration avec le vaccin grippal sera possible. Face à une crise sanitaire majeure on ne peut que saluer la mise au point, en un temps record, des vaccins efficaces et bien tolérés. La vaccination reste avec l'hygiène le meilleur outil pour la prévention des maladies infectieuses. Il nous faut garder un discours de transparence et d'honnêteté vis-à-vis de ce que l'on sait déjà et de ce qu'il reste encore à apprendre. La dynamique propre de la pandémie, le rythme d'évolution rapide des données épidémiologiques et scientifiques créent une situation d'incertitude imposant de reprendre la réflexion régulièrement pour adapter nos recommandations. Les inégalités vaccinales sont dangereuses, nous devons vacciner l'ensemble de la planète pour vaincre la pandémie de COVID-19 car ce virus ne connaît aucune frontière. En laissant des régions entières faiblement vaccinées, nous laissons le virus se propager, favorisant l'émergence de nouveaux variants potentiellement résistants aux vaccins actuels. C'est le défi de la vaccination mondiale sur un plan éthique, logistique, et sanitaire. D'après la communication de J. Gaillat (Annecy) -Symposium Sanofi Pasteur Prévenir le risque de contracter la grippe reste une question de santé publique. Chaque année, entre la fin de l'automne et la fin de l'hiver, la grippe touche entre 2 et 6 millions de personnes en France. Elle est responsable de 10 000 décès par an en moyenne et peut entraîner de sévères complications chez les personnes âgées, obèses, avec des comorbidités (cardiopulmonaires, immunodépression, diabètes…), mais également chez la femme enceinte et le jeune enfant. En considérant toutes les hospitalisations avec un diagnostic de grippe, la proportion de décès augmente avec l'âge, passant de 0,5 % dans la tranche d'âge des moins de 20 ans à 10 % dans la tranche d'âge des plus de 80 ans [34, 35] . Bien que permettant d'éviter en moyenne 2 000 décès par an, les vaccins grippaux actuels inactivés (15 µg hémagglutinine/souche et sans adjuvant) procurent une réponse immunitaire sous optimale chez les personnes de plus de 65 ans et les immunodéprimés en comparaison à celle observée chez les adultes jeunes. • D'une part, l'intérêt possible d'un vaccin quadrivalent à haute dose (HD) par rapport à un vaccin quadrivalent à dose standard (SD). En effet, les résultats des études ont démontré la supériorité clinique du vaccin haute dose trivalent (Fluzone trivalent HD, non disponible en France) par rapport aux vaccins trivalents à dose standard chez les personnes âgées de plus de 65 ans avec une réduction relative de l'incidence des cas de grippes virologiquement confirmés ( [36, 37] . Un quart des grippes non prévenues par le vaccin SD pourrait être évité par le vaccin HD. • D'autre part, les études objectivent une immunogénicité induite par Efluelda non inférieure à celle du vaccin trivalent « haute dose » contre les trois souches communes aux deux vaccins, avec une meilleure réponse immunitaire vis-à-vis de la souche B additionnelle et un profil de tolérance satisfaisant [38] . Le vaccin quadrivalent HD est considéré aussi efficace que le trivalent HD pour les souches virales communes et de fait les résultats d'efficacité clinique et en vie réelle devraient être extrapolables au vaccin Efluelda. Une étude multicentrique associant plusieurs pays européens a comparé le vaccin Quadrivalent Influenza Vaccine-HD (QIV-HD) au vaccin QIV-SD. Elle a confirmé que le vaccin QIV-HD induisait des réponses immunitaires supérieures et bénéficiait d'un profil de tolérance satisfaisant chez les sujets de plus de 60 ans [39] . L'European Centre for Disease Prevention and Control (ECDC) confirme, dans sa revue sur les vaccins dits « améliorés » (revue effectuée le 7 février 2020 incluant 110 études), la qualité des données d'efficacité et d'immunogénicité du vaccin haute dose, confortant ainsi ce fort niveau de preuve. [40] . Ce vaccin induit une réactogénicité accrue par rapport aux vaccins trivalents (érythèmes, douleur au point d'injection, myalgies) sans toutefois observer une augmentation des effets indésirables graves. Cependant, aucune donnée n'est disponible dans les autres populations à risque de grippe grave. Pour augmenter l'efficacité de la vaccination grippe, il faut travailler deux ojectifs, 1) avoir un taux de couverture le plus haut possible et au moins remplir les objectifs de 75 % fixés par l'OMS, continuer à vacciner tous les professionnels de santé en contact avec les personnes à risque de complications et de décès, 2) prescrire des vaccins plus efficaces en fonction des résultats d'essais cliniques et de tolérance dont nous disposons. En conclusion, le vaccin HD répond à un besoin médial important avec une meilleure immunogénicité, une meilleure efficacité clinique chez les seniors (y compris après 75 ans et en institutions) avec un gain de l'ordre de 24 % sur le vaccin SD (l'efficacité passe de 30 % à 47 %). La tolérance reste satisfaisante. N'oublions pas que l'efficacité vaccinale dépend non seulement de celle propre au vaccin mais aussi de la couverture vaccinale. K. Jaffal déclare ne pas avoir de liens d'intérêts. H. Mascitti déclare des liens d'intérêts pour des conférences : (invitation en qualité d'intervenant) avec Galia ; invitation en qualité d'auditeur (pris en charge de frais de déplacement et d'hébergement) avec Pfizer. Cet article fait partie du numéro supplément Actualités des 22 èmes Journées Nationales d'Infectiologie (JNI) réalisé avec le soutien institutionnel de Sanofi Pasteur. Surveillance sanitaire de la mortalité toutes causes confondues Influenza virus characterization -Summary Europe The 1918 influenza pandemic hastened the decline of tuberculosis in the United States: An age, period, cohort analysis Potential Impact of Influenza A/H1N1 Pandemic and Hand-Gels on Acute Diarrhea Epidemic in France An evidence review of face masks against COVID-19 Inferring the effectiveness of government interventions against COVID-19 Using Population Based Kalman Estimator to Model COVID-19 Epidemic in France: Estimating the Effects of Non-Pharmaceutical Interventions on the Dynamics of Epidemic The missing season: The impacts of the COVID-19 pandemic on influenza mai 2021 du collège de la Haute Autorité de santé relatif au lancement de la campagne de vaccination 2021/2022 contre la grippe saisonnière en France dans l'hémisphère État des lieux et actualités Six Month Safety and Efficacy of the BNT162b2 mRNA COVID-19 Vaccine Three Doses of an mRNA Covid-19 Vaccine in Solid-Organ Transplant Recipients Efficacy of the ChAdOx1 nCoV-19 Covid-19 Vaccine against the B.1.351 Variant Effectiveness of Covid-19 Vaccines against the B.1.617.2 (Delta) Variant Durability of mRNA-1273 vaccineinduced antibodies against SARS-CoV-2 variants Vaccine Breakthrough Infections with SARS-CoV-2 Variants Correlation of SARS-CoV-2 Breakthrough Infections to Time-from-vaccine; Preliminary Study Covid-19 Breakthrough Infections in Vaccinated Health Care Workers BNT162b2 COVID-19 Vaccine Third Dose Initial Immunogenicity Data SARS-CoV-2 Delta VOC in Scotland: demographics, risk of hospital admission, and vaccine effectiveness Effectiveness of COVID-19 vaccines against hospital admission with the Delta (B.1.617.2) variant Effectiveness of COVID-19 vaccines against variants of concern in Ontario Impact and effectiveness of mRNA BNT162b2 vaccine against SARS-CoV-2 infections and COVID-19 cases, hospitalisations, and deaths following a nationwide vaccination campaign in Israel: an observational study using national surveillance data Effectiveness of the BNT162b2 Covid-19 Vaccine against the B.1.1.7 and B.1.351 Variants mRNA-1273 COVID-19 vaccine effectiveness against the B.1.1.7 and B.1.351 variants and severe COVID-19 disease in Qatar mRNA vaccination boosts crossvariant neutralizing antibodies elicited by SARS-CoV-2 infection Patients with Acute Myocarditis following mRNA COVID-19 Vaccination Safety of the BNT162b2 mRNA Covid-19 Vaccine in a Nationwide Setting Myocarditis with COVID-19 mRNA Vaccines Caractéristiques des hospitalisations avec diagnostic de grippe Efficacy of High-Dose versus Standard-Dose Influenza Vaccine in Older Adults Comparative effectiveness of high-dose versus standard-dose influenza vaccination on numbers of US nursing home residents admitted to hospital: a cluster-randomised trial Safety and immunogenicity of high-dose quadrivalent influenza vaccine in adults ≥ 65 years of age: A phase 3 randomized clinical trial Study to Assess the Immune Response and the Safety Profile of a High-Dose Quadrivalent Influenza Vaccine (QIV-HD) Compared to a Standard-Dose Quadrivalent Influenza Vaccine (QIV-SD) in Europeans Adults 60 Years of Age and Older Systematic review of the efficacy, effectiveness and safety of newer and enhanced seasonal influenza vaccines for the prevention of laboratory-confirmed influenza in individuals aged 18 years and over