key: cord-0008833-bxz71zp4 authors: Bourrillon, A. title: La maladie de Kawasaki sous toutes ses facettes date: 2008-06-24 journal: Arch Pediatr DOI: 10.1016/s0929-693x(08)71928-6 sha: faafd633e4e30a960f7f15416f37e513a5a82d7d doc_id: 8833 cord_uid: bxz71zp4 nan L a maladie de Kawasaki est une vascularite aiguë multisystémique atteignant avec prédilection le jeune enfant et le nourrisson. Elle a été décrite pour la première fois au Japon en 1967 par Tomisaku Kawasaki à propos d'une série de 50 enfants atteints d'un « nouveau syndrome » : le syndrome « adéno-cutanéo-muqueux aigu fébrile » [1, 2] . La gravité de ce syndrome était attribuée dès l'origine, en l'absence de diagnostic et de traitement, à des complications cardiovasculaires essentiellement coronariennes [3] . Syndrome-Maladie… autant de termes qui expriment les multiples facettes et les inconnues persistantes étio-pathogéniques et cliniques du Kawasaki de l'enfant. La maladie de Kawasaki a été décrite dans le monde entier mais elle demeure la plus fréquente dans les populations asiatiques et en particulier au Japon. Le Japan Mucocutaneous Lymph Node Syndrome Research Commitee dénombre environ 8000 nouveaux cas par an, soit une incidence de 112/100 000 enfants (soit 170 000 cas décrits depuis la description initiale de Kawasaki en 1967) [4]. L'incidence est estimée plus réduite à 8,1/100 000 cas au Royaume Uni et 17,1/100 000 cas aux États-Unis. En France, l'épidémiologie de la maladie de Kawasaki n'est pas évaluée de façon systématique mais on estimait en 1998, environ à 200, le nombre de nouveaux cas décrits annuellement [5] . La majorité des patients (80 %) est âgée de moins de 5 ans avec un pic d'incidence de la maladie vers l'âge d'un an. Celle-ci est plus rare avant l'âge de 3 mois et très rare chez les adolescents et les adultes. Elle est plus fréquente chez les garçons (rapport garçons/ fi lles de 1,5 aux États-Unis ; 1/3 au Japon L'identifi cation de ces agents pathogènes, la prédominance saisonnière, les formes épidémiques et la résolution fréquemment spontanée de la maladie ont suggéré une étiologie infectieuse. Le mécanisme immunitaire est probablement impliqué avec activation du système immunitaire et de l'endothélium vasculaire comme en témoignent : l'activation des monocytes/macrophages avec production d'interleukines (IL)-1 β, de Tumor Necrosis Factor (TNF), et des IL-6 ; l'activation des lymphocytes T et des lymphocytes B ; l'activation des cellules endothéliales et l'adhésion leucocytaire (nécrose et dépôts de fi brine). La maladie de Kawasaki évoque ainsi une pathologie médiée par les toxines. Des superantigènes pourraient ainsi se lier directement aux récepteurs de la cellule T sans restriction HLA [6] . Ils interagiraient de façon restreinte avec les V βdu récepteur de la cellule T et entraîneraient une large activation T lymphocytaire [7] . Les données physiopathologiques sont cependant controversées. D'autres hypothèses ont évoqué une réponse oligo-clonale à immunoglobulines A dans les parois vasculaires lors de la phase aiguë de la maladie suggérant ainsi une possible réponse médiée par un antigène conventionnel [8] . L'intervention de facteurs génétiques a également été suggérée [9]. En l'absence de marqueurs biologiques spécifi ques, le diagnostic de maladie de Kawasaki Des manifestations atypiques de la maladie ont été également décrites par Kawasaki dès sa description princeps [1] . Elles méritent d'être recherchées et reconnues car elles sont des éléments d'appoint utiles au diagnostic. Ces manifestations sont diverses : arthrites ou arthralgies de topographies diverses selon le stade de la maladie ; atteintes digestives et/ou hépatiques : vomissements, diarrhée, douleurs abdominales ; hydrocholescyste attribuée à une vascularite des muscles de la paroi de la vésicule biliaire [3, 11] ; ictère avec augmentation des transaminases hépatiques ; atteintes pulmonaires avec nodules et infi ltrats voire atteintes pleurales [11] ; atteintes neurologiques diverses [11] : troubles du comportement (irritabilité ; agitation ; pleurs incessants) ; méningite lymphocytaire ou méningo-encéphalite avec convulsions ; troubles de la conscience voire coma ; exceptionnellement atteintes vasculaires cérébrales (hémiplégie) ; paralysie faciale unilatérale périphérique transitoire mais aussi pertes auditives sur les hautes fréquences (20-35 db). Ces atteintes, parfois au premier plan, peuvent être intégrées au sein des formes atypiques de la maladie. À l'inverse les formes incomplètes du Kawasaki associent à une fi èvre inexpliquée et constante de durée ≥ 5 jours, 2 ou 3 des critères majeurs de la maladie. Ce tableau concerne surtout les jeunes nourrissons (< 6 mois) ayant une fi èvre durable (volontiers supérieure à 8 jours) qui sont aussi à haut risque de développer une atteinte coronarienne. Un schéma a été proposé par L'AHA pour préciser le diagnostic des formes incomplètes et atypiques de la maladie [11] (fi g. 1). Deux arguments permettront souvent de réintégrer ces formes atypiques et incomplètes dans les contours de la maladie de Kawasaki : dans l'immédiat des arguments biologiques ; dans l'immédiat et surtout en cours d'évolution, les complications cardiovasculaires (anévrismes coronariens). Il n'existe aucun marqueur biologique spécifi que de la maladie [11] . Le syndrome infl ammatoire (augmentation de la VS et de la CRP) est constant. Il existe aussi d'autres anomalies décrites selon les résultats des numérations formules sanguines : hyperleucocytose initiale > 15 000/mm 3 ; anémie de type infl ammatoire ; hyperplaquettose volontiers tardive (chiffre moyen de 700 000/mm 3 ). On peut observer aussi une pyurie amicrobienne au stade initial de même qu'une protéinurie modérée. Pour mémoire, elles sont initialement constituées de myocardites (plus rarement de péricardites ou d'endocardites) ; secondairement, elles sont essentiellement constituées par les anévrismes coronariens dont les risques de survenue ont pu être précisés par le score d 'Harada [12] , utilisé au Japon. Ce score évalue un risque élevé d'atteintes coronariennes, sur la coexistence de 4 des 7 critères suivants : sexe masculin ; âge inférieur à 1 an ; CRp > 200 mg/l ; plaquettes > 350 000/mm 3 ; globules blancs > 12 000/mm 3 ; hématocrite < 30 % ; albumine < 3,5 g/dl ; Le score d'Asai plus ancien ajoutait à ces critères : une fi èvre prolongée > 15 jours. Face à tous ces tableaux cliniques évoquant le diagnostic de maladie de Kawasaki, les échographies bidimensionnelles seront systématiques à la recherche la plus habituelle d'une dilatation de la partie proximale des artères coronaires ; cet aspect d'imagerie est beaucoup plus fréquent que les anévrismes véritables uniques ou multiples, susceptibles de régression si traités mais aussi de thromboses, d'infarctus, de rupture, de myocardiopathie ischémique, ou de mort subite, et à plus long terme de certaines pathologies cardiovasculaires du sujet jeune. La frontière est souvent ambiguë entre diagnostic différentiel et diagnostic étiologique de certaines pathologies parfois causales ou associées à la maladie : infections bactériennes : scarlatine ou infection sévère à streptocoque A bêta-hémolytique ; syndrome du choc toxique staphylococcique ; infections virales telles que primo-infection à EBV, à entérovirus ou adénovirus ; réactions d'hyper-sensibilités médicamenteuses (carbamazépines) ; voire frontière nosologique incertaine avec la périartérite noueuse du nourrisson dont la forme sévère induit également des atteintes coronariennes. Il a deux buts : prévenir les atteintes cardiaques par les immunoglobulines humaines par voie intraveineuse ; réduire l'infl ammation. Les chapitres thérapeutiques seront développés dans d'autres interventions de cette table ronde. Pour rappel le schéma thérapeutique classique conduit à l'administration d'une première cure d'immunoglobulines (2 g/kg en 1 ou 2 jours) [13] associées • à un traitement par l'aspirine à doses anti-infl ammatoires (80-100 mg/kg/j en 4 prises pendant 14 jours) avec au moins 48 heures d'apyrexie au décours de ce traitement. En cas d'échec du traitement par les immunoglobulines (persistance ou récidive de la fi èvre 36 heures après le terme de la perfusion), un deuxième voire un troisième cycle thérapeutique sont possibles [7] . L'indication de la corticothérapie sera discutée dans une autre intervention de cette table ronde. L'aspirine sera prescrite au cours de la phase subaiguë d'apyrexie aux doses anti-plaquettaires (3 à 5 mg/kg/j) pendant une durée minimale de 6 à 8 semaines en l'absence de complications cardiaques. Chez l'enfant atteint d'anomalies des artères coronaires, le traitement est poursuivi jusqu'à la régression complète des anévrismes et à vie, en l'absence de régressions de ceux-ci [7]. La maladie de Kawasaki doit être considérée sous toutes les « facettes » de critères diagnostiques variés, souvent atypiques ou incomplets voire parfois mono-symptomatiques [13] . Elle est une pathologie vasculaire infl ammatoire dont la complexité étiopathogénique et diagnostique demeure riche de voies de recherches pour le futur. Acute febril Mucocutaneous Lymph Node Syndrome: clinical observations of 50 cases A new infantile acute fébrile Mucocutaneous Lymph Node Syndrome (MLNS) American Heart Association Commitee on Rhumatic fever endocarditis and Kawasaki disease Incidence survey of Kawasaki disease en 1997 and 1998 in Japan Enquête rétrospective sur 5 ans Prevalence of superantigen-secreting bacteria in patients with Kawasaki disease Kawasaki syndrome Forme familiale de la maladie de Kawasaki. A propos de 2 cas dans une fratrie Treatment and long-Term Management of Kawasaki Disease. A statement for health professionals from the Committee on Reumatic fever. Endocarditis and Kawasaki Disease in the Young American Heart Association Intravenous gamma-globulin treatment in Kawasaki disease actor