key: cord-278816-l92lkj69 authors: Brouard, J.; Vabret, A.; Bach, N.; Toutain, F.; Duhamel, J. F.; Freymuth, F. title: Prise en charge des pathologies respiratoires à adénovirus chez l’enfant immunocompétent À propos d’une étude rétrospective de 116 enfants hospitalisés date: 2004-05-31 journal: Antibiotiques DOI: 10.1016/s1294-5501(04)94248-3 sha: doc_id: 278816 cord_uid: l92lkj69 Résumé Les adénovirus sont une cause commune d’atteinte respiratoire ; bien que dépendant du sérotype, ils peuvent également être la cause d’atteintes extrarespiratoires. Le diagnostic positif peut en être difficile. Les résultats cliniques chez 116 enfants hospitalisés en raison d’une infection adénovirale ont été repris rétrospectivement. Chez 71 enfants, le diagnostic virologique a été obtenu par immunofluorescence directe sur les aspirations nasales, 71 par culture virale de ces mêmes prélèvements. Le tableau clinique de l’infection adénovirale est caractérisé par une fièvre élevée (moyenne 39°1C) et prolongée (durée moyenne 4,3 jours). L’atteinte des voies aériennes supérieures (rhinopharyngite, angine, otite) et des voies aériennes inférieures (bronchite, bronchiolite, pneumopathie) sont les plus fréquentes. Douze enfants ont présenté des convulsions hyperpyrétiques, 6 avaient une méningite lymphocytaire. Les examens complémentaires ont objectivé des valeurs allant de la normalité à celles évocatrices d’infection bactérienne. Cinquante-neuf enfants furent adressés pour fièvre résistante à une antibiothérapie. Les symptômes de l’atteinte respiratoire dues aux infections adénovirales s’étendent de la rhinite à la pneumopathie et la bronchiolite. Les adénovirus peuvent entraîner des séquelles graves même chez l’enfant sain. Les recherches sur les mécanismes moléculaires de l’infection virale sur les voies aériennes amèneront d’importantes voies de réflexion sur la nature des processus inflammatoires participant à l’asthme et à la bronchite chronique obstructive. La plupart des infections sont modérées et ne nécessitent qu’un traitement symptomatique. Il n’existe pas actuellement de traitement antiviral efficace pour les infections adénovirales graves. Le diagnostic virologique rapide par l’étude des sécrétions nasopharyngées est d’une grande utilité clinique. Abstract Adenoviruses most commonly cause respiratory illness; however, depending on the infecting serotype, they may also cause various other diseases. Diagnosis may be difficult to achieve. The clinical findings for 116 children hospitalised with adenoviral infection were studied retrospectively. In 71 children, the diagnosis was based on detection of adenovirus antigen in the nasopharyngeal specimens and in 71 children on viral culture. The clinical picture of adenoviral infection was characterised by high-grade (mean 39°1C) and prolonged fever (mean duration 4,3 days). Upper respiratory and lower respiratory symptoms were the most common infections. Twelve had been admitted to the hospital due to febrile convulsions, 6 had meningitis. Laboratory findings varied from normal values to values seen in bacterial infections. Thus it was difficult to distinguish adenoviral disease from a bacterial disease. Fifty-nine children were referred to the hospital due to infection unresponsive to antimicrobial therapy. Symptoms of respiratory infection caused by adenovirus may range from the common cold syndrome to pneumonia, croup and bronchiolitis. Adenoviruses can be responsible for severe consequences, even in previously healthy children. Studies of the molecular mechanisms of viral infections of the airways could provide important insights into the nature of the inflammatory process involved in asthma and chronic obstructive pulmonary disease. Most infections are mild and require no therapy or only symptomatic treatment. There are at present time no recognised antiviral agents that are effective in treating serious adenovirus disease. The rapid detection of adenovirus antigen in nasopharygeal specimens proved to have a great clinical value in the diagnosis. Prise en charge des pathologies respiratoires à adénovirus chez l'enfant immunocompétent J. Brouard, A. Vabret, N. Bach, F. Toutain, J.F. Duhamel, F. Freymuth Les adénovirus sont une cause commune d'atteinte respiratoire ; bien que dépendant du sérotype, ils peuvent également être la cause d'atteintes extrarespiratoires. Le diagnostic positif peut en être difficile. Les résultats cliniques chez 116 enfants hospitalisés en raison d'une infection adénovirale ont été repris rétrospectivement. Chez 71 enfants, le diagnostic virologique a été obtenu par immunofluorescence directe sur les aspirations nasales, 71 par culture virale de ces mêmes prélèvements. Le tableau clinique de l'infection adénovirale est caractérisé par une fièvre élevée (moyenne 39 °1C) et prolongée (durée moyenne 4,3 jours). L'atteinte des voies aériennes supérieures (rhinopharyngite, angine, otite) et des voies aériennes inférieures (bronchite, bronchiolite, pneumopathie) sont les plus fréquentes. Douze enfants ont présenté des convulsions hyperpyrétiques, 6 avaient une méningite lymphocytaire. Les examens complémentaires ont objectivé des valeurs allant de la normalité à celles évocatrices d'infection bactérienne. Cinquante-neuf enfants furent adressés pour fièvre résistante à une antibiothérapie. Les symptômes de l'atteinte respiratoire dues aux infections adénovirales s'étendent de la rhinite à la pneumopathie et la bronchiolite. Les adénovirus peuvent entraîner des séquelles graves même chez l'enfant sain. Les recherches sur les mécanismes moléculaires de l'infection virale sur les voies aériennes amèneront d'importantes voies de réflexion sur la nature des processus inflammatoires participant à l'asthme et à la bronchite chronique obstructive. La plupart des infections sont modérées et ne nécessitent qu'un traitement symptomatique. Il n'existe pas actuellement de traitement antiviral efficace pour les infections adénovirales graves. Le diagnostic virologique rapide par l'étude des sécrétions nasopharyngées est d'une grande utilité clinique. Adenoviruses most commonly cause respiratory illness; however, depending on the infecting serotype, they may also cause various other diseases. Diagnosis may be difficult to achieve. The clinical findings for 116 children hospitalised with adenoviral infection were studied retrospectively. In 71 children, the diagnosis was based on detection of adenovirus antigen in the nasopharyngeal specimens and in 71 children on viral culture. The clinical picture of adenoviral infection was characterised by high-grade (mean 39 °1C) and prolonged fever (mean duration 4,3 days). Upper respiratory and lower respiratory symptoms were the most common infections. Twelve had been admitted to the hospital due to febrile convulsions, 6 had meningitis. Laboratory findings varied from normal values to values seen in bacterial infections. Thus it was difficult to distinguish adenoviral disease from a bacterial disease. Fifty-nine children were referred to the hospital due to infection unresponsive to antimicrobial therapy. Plus de 200 virus antigéniquement distincts, appartenant à 8 genres différents, atteignent en général tout l'arbre respiratoire. Leur diagnostic est souvent retardé par l'aspect peu spécifique de leur expression. Les adénovirus (AdV) humains comprennent 51 sérotypes, ils sont ubiquitaires et responsables d'un large éventail de syndrômes cliniques. Quelques sérotypes sont particulièrement en cause dans la gravité de la maladie en phase aiguë même chez l'enfant immunocompétent. La littérature est relativement importante sur les atteintes adénovirales du sujet fragilisé, immunodéprimé ou porteur d'une cardiopathie. Elle est par contre plus restreinte pour les enfants a priori sains : or chez eux des altérations bronchiolaires et bronchiques peuvent être à l'origine de lésions définitives parfois d'expression retardée. À partir d'une étude rétrospective personnelle cet article se focalise sur la pathologie respiratoire à AdV chez l'enfant immunocompétent. Les pneumopathies virales se définissent par l'existence d'une atteinte parenchymateuse : elles ne représentent qu'une faible part des infections respiratoires basses, environ 5 %. L'épidémiologie de Quelques repères épidémiologiques syncytial (VRS), 10 à 15 % par les adénovirus (AdV), 5 à 10 % par les virus parainfluenza (VPI), 5 % par les virus influenza [2] . La biologie moléculaire amène des modifications de l'épidémiologie descriptive en raison de sa plus grande sensibilité [3] . Ces techniques permettent également la mise en évidence de co-infection virale [4] . Les atteintes respiratoires à AdV les plus fréquentes sont essentiellement endémiques, observées régulièrement d'octobre à mai et liées aux sérotypes 1, 2, 5, et 6. Il s'agit de rhinopharyngites, de conjonctivites, de syndrômes APC (adénopharyngo-conjonctivites), de bronchites et de pneumonies, rarement de détresse respiratoire d'évolution sévère. Cependant d'autres sérotypes évoluent seulement sous forme d'épidémies, plutôt hivernales, irrégulières dans le temps, au sein de collectivités de nourrissons, parfois d'enfants plus agés : ils sont parfois marqués par l'apparition de formes graves pour certains sérotypes (3, 5, 6, 7) . Un aspect particulier est représenté par les épidémies d'atteintes respiratoires aiguës chez les recrues militaires, bien décrites aux USA, dont les principaux sérotypes sont le 4 et le 7 [5] . La prédominance de quelques sérotypes a été soulignée dans certaines zones géographiques [6, 7] . La circulation du sousgroupe B avec le génotype 7 h a été documentée lors de bronchiolites et de pneumopathies sévères en Argentine [8] . Ce même type a provoqué de redoutables infections nosocomiales avec une létalité approchant 30 % et la présence de séquelles chroniques chez 20 % des survivants [7, 8] . Récemment ce sous-type a émergé au Japon [9] . Il est peut-être important d'être vigilant sur cette épidémiologie car cela pourrait annoncer un glissement du génotype circulant et les AdV 7 comptent pour environ 20 % de tous les AdV rapportés par l'OMS [10] . Caractères des AdV : les AdV sont des virus à capside nue très résistants dans le milieu extérieur ; il sont présents dans les voies aériennes et dans les selles des sujets infectés. Les modes de contamination sont donc soit directs, se faisant par les sécrétions respiratoires, soit indirects par la contamination d'objets ou d'aliments responsables de transmissions nosocomiales. Le portage d'AdV latents est possible, la contamination peut s'effectuer par des sujets asymptomatiques. Une étude a été récemment menée par notre équipe [11] . Cent seize enfants Manifestations respiratoires aiguës ches issues de la culture (63/71) a révélé que 6 sérotypes représentent 85 % des isolements : ce sont les sérotypes 1 (12 %), 2 (40 %), 3 (10 %), 5 (12 %), 6 (3 %), 7 (8 %). Donc dans cette cohorte près d'un enfant sur cinq présente un sérotype potentiellent grave. Une coinfection virale respiratoire est présente 14 fois (6 VRS, 3 VPI, 2 rhinovirus, 3 coronavirus), digestive 12 fois (9 rotavirus, 3 entérovirus). Le motif principal ou le motif associé pour l'admission hospitalière a été le suivant : 52 % fièvre réfractaire à une antibiothérapie ambulatoire (n = 59), 23 % toux persistante de plus de trois jours (26), 12 % malaise ou convulsion (14), 9 % troubles digestifs (10), 3 % otite moyenne aiguë (3) et une cystite hémorragique. Lorsqu'elle était présente, la fièvre était élevée (médiane 39 °1) et prolongée (moyenne 4,3 jours). La durée de l'hospitalisation a été en moyenne de 5,1 jours (+/-4,7 j). Au cours de l'hospitalisation les diagnostics cliniques isolés ou associés ont été : atteinte des voies aériennes supérieures chez 86 % des enfants, atteinte respiratoire basse chez 76 %, gastro-entérites aiguës chez 30 %. Douze enfants ont présenté des convulsions, parmi eux 6 avaient une méningite lymphocytaire mais l'identification virale dans le LCR est restée négative. Le plus souvent les examens paracliniques peuvent orienter faussement vers une infection bactérienne, par l'élévation modérée des polynucléaires neutrophiles (moyenne = 10 100/mm 3 ) et de la C-reactive protein (moyenne = 32,8 mg/l), par la mise en évidence d'une bactérie potentiellement pathogène dans 17 des 23 examens de crachats effectués : l'orientation erronée a aussi été liée à la présence d'anomalies radiologiques au sein de 60 % des clichés thoraciques pratiqués. Aucune différence significative n'a été mise en évidence entre sérotypes et signes cliniques, gravité (oxygénodépendance), durée de l'hospitalisation. Douze enfants ont été réhospitalisés pour atteinte respiratoire, mais les enquêtes virologiques sont restées vaines, aucun de ceux-ci n'avaient initialement un sérotype à risque. Les affections respiratoires aiguës furent à l'origine de la découverte des AdV et restent la manifestation la plus connue Symptoms of respiratory infection caused by adenovirus may range from the common cold syndrome to pneumonia, croup and bronchiolitis. Adenoviruses can be responsible for severe consequences, even in previously healthy children. Studies of the molecular mechanisms of viral infections of the airways could provide important insights into the nature of the inflammatory process involved in asthma and chronic obstructive pulmonary disease. Most infections are mild and require no therapy or only symptomatic treatment. There are at present time no recognised antiviral agents that are effective in treating serious adenovirus disease. The rapid detection of adenovirus antigen in nasopharygeal specimens proved to have a great clinical value in the diagnosis. de l'infection chez l'enfant. La plupart d'entre elles restent modérées et focales, elles ne peuvent être cliniquement distinguées des infections dues à d'autres virus [1] . Le spectre clinique peut être : une pharyngite, une angine, une otite moyenne aiguë, une laryngite, une bronchiolite, une pneumopathie. Chez les sujets hospitalisés la fièvre est habituelle (94 %), prolongée, en moyenne : 5,4 jours (extrêmes de 2 à 13 jours) [12] . En l'absence d'enquête étiologique spécifique, il est impossible cliniquement ou biologiquement de distinguer une atteinte respiratoire secondaire à un AdV d'une autre cause infectieuse [12, 13] . Les pharyngites et les angines constituent un syndrome clinique fréquent, et les AdV peuvent être identifiés chez 15 à 20 % des enfants porteurs d'une pharyngite isolée. Elle peut être exsudative et souvent fébrile. La plupart des cas sont dus aux types 1, 2, 3 et 5 [12] . Il est difficile de distinguer une amygdalite bactérienne d'une amygdalite virale. L'infection à AdV reste une cause fréquente d'angines ou d'otites moyennes aiguës résistantes à l'antibiothérapie, fréquemment adressées alors aux admissions hospitalières [12, 13] . Les fièvres pharyngo-conjonctivales sont parmi les manifestations cliniques les plus typiques et fréquentes de l'infection à AdV [12, 14] particulièrement avec les sous-types 3 et 7. Elles associent des signes non spécifique : un syndrome pseudogrippal (fièvre, malaise, myalgies), une toux, une congestion nasale, une angine érythémateuse, des adénopathies cervicales, à une conjonctivite uni ou bilatérale. Les AdV du sous-groupe C (AdV 1, 2, 5, 6) rendent compte d'environ 5 à 10 % des infections respiratoires de l'enfant de moins de 6 ans. L'AdV est une cause peu fréquente de laryngite. Les atteintes par les AdV peuvent parfois s'exprimer par une bronchiolite mais également par une maladie plus sévère. Formes graves d'infections à AdV : les pneumopathies à AdV intéressent principalement le nourrisson, l'enfant en bas-âge, le sujet immunodéprimé, le transplanté rénal, médullaire ou pulmonaire et le patient porteur d'une cardiopathie ou d'une atteinte respiratoire chronique [15] [16] [17] . En dehors de ce contexte ces infections respiratoires sont le plus souvent bénignes, mais par-fois cette symptomatologie peut être marquée même chez l'enfant sain [18] . Les sérotypes 3, 7 et 21 en particulier peuvent être responsables des atteintes respiratoires les plus graves [8, 19] . Le début est alors brutal avec fièvre élevée, la symptomatologie pulmonaire comporte une toux rebelle, une dyspnée avec tachypnée et tirage, des râles bronchiques et parfois alvéolaires. Les signes radiologiques sont souvent évocateurs, associant des infiltrats, une atteinte interstitielle et des adénopathies hilaires ; les épanchements pleuraux ont été décrits dans 15 à 25 % des cas [16, 20] . De telles atteintes ont une mortalité d'environ 10 %. Après une régression initiale elles font place à une forme plus chronique de bronchiolite définissant la bronchiolite oblitérante. C'est un syndrome relativement rare caractérisé cliniquement par une pneumonie ou une bronchiolite sévère, avec une évolution chron i q u e c o n d u i s a n t s o u v e n t à d e s séquelles permanentes [21, 22] . L'histologie du tissu pulmonaire révèle alors des lésions nécrotiques des bronches et de l'épithélium bronchiolaire avec atteinte des glandes bronchiques. Une atteinte pulmonaire persistante après une pneumopathie adénovirale à AdV 7 est rapportée chez un tiers à deux tiers des sujets [23] . Les lésions les plus graves sont représentées par : les dilatations des bronches, la bronchiolite oblitérante, le poumon clair unilatéral (syndrome de McLeod) ou, rarement, la fibrose pulmonaire [24] . Infections disséminées : les pneumonies adénovirales s'accompagnent parfois d'une infection disséminée redoutable avec atteintes cardiaques (myocardite aiguë, péricardite aiguë), hépatiques, pancréatiques, rénales (glomérulonéphrite aiguë), et quelques signes encéphalitiques s'y associent souvent. La létalité est alors élevée, de l'ordre de 30 % [8] . Absorbé à la surface des cellules de l'épithélium respiratoire, l'AdV pénètre dans les cellules et s'y réplique. L'atteinte de l'ensemble de l'arbre respiratoire se réalise surtout de proche en proche, la plupart des infections restent locales dans les voies respiratoires supérieures voire asymptomatiques. Plus rarement l'atteinte tissulaire se fait par voie lymphatique et sanguine. Les lésions tissulaires résultent soit directement de l'infection par cytotoxicité, soit indirectement par la réponse inflammatoire et immunitaire. Cette dernière est essentielle. Les séquelles pulmonaires graves surviennent avec une particulière fréquence dans certaines populations homogènes, chez qui un facteur génétique pourrait intervenir mais le sous-type adénoviral garde un rôle essentiel [25, 26] . Le site préférentiel de réplication des AdV est l'épithélium respiratoire, la réplication semblant limitée au tissu lymphoïde, qui représente par contre un lieu essentiel de persistance virale [27] . Les mécanismes pathogéniques de l'infection à AdV sont peu connus. L'épithélium respiratoire est modérément atteint (vacuolisation, atteinte de l'épithélium cilié), sans réelle cytolyse mais avec des infiltrats péri-bronchiolaires et péri-vasculaires à prédominance lymphocytaire (T cytotoxique) ainsi que péri-alvéolaires (lymphocytes, macrophages, polynucléaires neutrophiles). Il a été démontré que le facteur alpha de nécrose tumorale (TNF-α), l'interleukine (IL)-1 et l'IL-6 sont élaborés durant les deux à trois premiers jours de l'infection mais seul le TNF-α a un rôle majeur dans la phase précoce de la pathogénie. Chez l'enfant une élévation des IgG contenant des complexes immuns circulants spécifiques ou des valeurs sériques élevées d'IL-6, d'IL-8 et de TNF-α sont associées significativement aux adénoviroses graves [28] . À long terme l'infection à VRS est plutôt corrélée avec l'apparition d'un asthme [29] alors que l'atteinte adénovirale, surtout pour le 7 h, est corrélée avec des séquelles pulmonaires lourdes, dilatations des bronches et poumon hyperclair unilatéral. Une équipe a étudié les différences de réponses immunitaires entre ces deux virus chez l'enfant. Les cellules mononuclées périphériques (PBMC) produisent davantage d'IL-10 lorsqu'elles ont été infectées par le VRS versus l'AdV, alors qu'elles sécrètent plus d'interféron (IFN)-γ lorsqu'elles ont été infectées par l'AdV versus le VRS. Le ratio IL-10/IFN-γ est significativement plus bas lors des infections par l'AdV, ce qui suggère que l'AdV induit une réponse de type Th1 [30] . L'étude des mécanismes moléculaires par les mutants thermosensibles d'AdV 5, par mutation des gènes des ADN-binding protein ou de l'ADN polymérase, révèle que la synthèse des protéines structurales et des virions ne sont pas nécessaires au développement des lésions pulmonaires. Les pneumopathies à AdV sont certainement plus liées à l'expression de certains gènes de ce virus qu'à la réplication virale [31, 32] . La réplication de l'AdV se déroule en deux étapes successives : phase précoce survenant avant la réplication de l'ADN génomique et phase tardive débutant en même temps que cette dernière. Les gènes précoces sont lus dès le début de l'infection (E1A, E1B, E2A, E2B, E3, E4). Le gène E1A est le premier transcrit et les protéines correspondantes contrôlent la transcription des autres gènes précoces. Les protéines des gènes E1 et E3 jouent un rôle important dans l'établissement de l'infection lymphocytaire latente à AdV et l'échappement des AdV aux réponses inflammatoires et immunitaires de l'hôte. Ces protéines agissent en inhibant les deux actions antivirales du TNF-α, sur le blocage de la réplication virale et la mort des cellules infectées. L'ADN adénoviral peut persister plusieurs années dans le poumon après l'infection aiguë. La protéine adénovirale E1A (Early region 1A) est exprimée dans le poumon et est capable d'assurer une dysrégulation majeure de l'expression des cytokines, avec une augmentation de l'expression de l'ARN messager de la molécule d'adhésion ICAM-1, de la cytokine inflammatoire IL-8 et ceci implique le facteur de transcription NF-κB [33] . Les infections subaiguës des voies respiratoires par les AdV pourraient être impliquées dans la genèse de certaines formes de bronchopathies chroniques obstructives chez l'enfant et chez l'adulte. Macek et al. ont rapporté une étude chez des enfants ayant développé un asthme corticorésistant après une bronchiolite [34] . Dans des biopsies bronchiques par bronchoscopie, il a été révélé dans la majorité de ces cas la présence d'une protéine adénovirale de la capside, et l'isolement d'un AdV sur culture de cellules a été positive dans certains de ces échantillons. Hegele et al. trouvent de plus grandes quantités d'ADN adénoviral chez les patients souffrant de bronchopathie chronique obstructive, suggérant le rôle possible de l'AdV dans cette maladie [35] . Les observations in vivo et in vitro qui démontrent que l'infection adénovirale latente puisse être associée avec la persistance d'une inflammation à bas bruit dans le parenchyme pulmonaire périphérique, suggèrent un lien causal dans l'installation de la bronchite chronique obstructive [36] . Parallèlement l'inflammation induite par la fumée de tabac est amplifiée chez les sujets emphysèmateux par l'expression latente de la protéine adénovirale E1A exprimée par les cellules épithéliales alvéolaires [37] . Récemment, une étude rapporte l'implication possible de l'AdV dans le développement de la dysplasie bronchopulmonaire du prématuré [38] . Les aléas du diagnostic étiologique d'une pneumonie chez le jeune enfant conduit quasi systématiquement à l'indication de l'antibiothérapie en raison des risques potentiels de l'abstention thérapeutique [39] : celle-ci pourra être interrompue en fonction des résultats des examens complémentaires. La disponibilité des outils de diagnostic virologique de lecture rapide, fiables et réalisables au lit du malade, actuellement possible pour le VRS et la grippe, pourrait dans l'avenir modifier cette attitude [40] . L'abstention d'une antibiothérapie pourrait en effet être justifiée comptetenu des enquêtes épidémiologiques, mais à condition que soit assuré un suivi clinique rapproché et rigoureux. La bronchite aiguë n'associe par définition aucune atteinte du parenchyme pulmonaire. Plus encore que les pneumopathies, l'origine virale prédomine, et l'abstention de toute prescription d'antibiotiques est justifiée en l'absence de risque vital de laisser une bactérie se développer. Les critères d'hospitalisation lors d'une pneumopathie supposée virale sont communs avec ceux des infections bactériennes. En l'absence de score validé en pédiatrie, ils se fondent sur l'âge (inférieur à 6 mois), l'aspect général (syn-drome toxi-infectieux), une mauvaise tolérance respiratoire (tachypnée, signes de lutte respiratoire), l'existence d'une hypoxie estimée par la détection de la saturation en oxygène par l'oxymétrie de pouls. D'autres indicateurs sont à retenir : les difficultés à s'alimenter (dyspnée lors de la prise des biberons chez le nourrisson), une aggravation rapide de la maladie, les risques liés au terrain (cardiopathie, bronchopathie chronique, déficits immunitaires…), des conditions socio-économiques précaires ou les difficultés d'accès aux soins. En raison de leur persistance durant une à plusieurs semaines dans les sécrétions nasopharyngées des sujets infectés et de leur capacité de survie de plusieurs heures sur des surfaces inertes, les virus à tropisme respiratoire peuvent se transmettre plus particulièrement aux nourrissons immunologiquement naïfs [41] . Il est essentiel de limiter ce risque au cours des hospitalisations, notamment dans les services d'immunodéprimés. La meilleure mesure de prévention reste le lavage des mains. Il est recommandé le lavage régulier des surfaces susceptibles d'être contaminées (jouets, table à langer, outre le stéthoscope, otoscope etc) [42] . L'hydratation, le contrôle thermique, l'oxygénothérapie, la kinésithérapie respiratoire restent la base de la prise en charge des infections bronchopulmonaires virales [43] . Le retentissement sur l'alimentation est directement fonction de l'intensité de la détresse respiratoire (dyspnée, essoufflement) ou secondaire aux vomissements provoqués par la toux. Les risques de déshydratation sont présents chez le nourrisson et une perfusion initiale semble préférable à la mise en place d'une nutrition entérale à débit continu lors de la phase aiguë [44] . L'oxygénothérapie sera initiée lors d'une hypoxémie ; l'oxygène doit être humidifié et administré par lunettes nasales ; son débit sera adapté afin d'obtenir une saturation pulsée en oxygène transcutanée proche de 95 %. C'est une réelle prescription médicale dont les modalités doivent être clairement définies [45] . L'intensité de la détresse respiratoire, l'hypercapnie, conduit parfois à la réalisation d'une intubation endotrachéale avant mise sous ventilation mécanique. La kinésithérapie respiratoire nous semble justifiée lors de la phase sécrétante, sa technique exige une compétence obtenue par une grande pratique pédiatrique. L'accélération du flux expiratoire avec expectoration provoquée est la technique la plus utilisée. Peu de références étayent l'efficacité de cet acte en dehors de la mucoviscidose [46] . Malgré une prescription très large tant ambulatoire qu'hospitalière, il faut bien reconnaître la faiblesse des preuves cliniques concernant les mucomodificateurs [47] . La toux est un phénomène réflexe protégeant les voies respiratoires basses dont le respect doit être la première attitude. Comme pour les mucomodificateurs, peu de preuves existent quant à l'efficacité des antitussifs [48] . En cas de persistance de la toux, le diagnostic d'infection bronchopulmonaire virale devra être révisé. L'inflammation bronchopulmonaire est particulièrement intense lors d'une infection virale, et elle a un double visage : d'une part, il s'agit d'une réaction normale de l'hôte contre l'infection, d'autre part l'amplification de cette réaction peut conduire à la constitution de lésions cicatricielles. Peu d'études pédiatriques randomisées sont disponibles, à l'exception de quelques références concernant la corticothérapie inhalée lors des sifflements associés aux infections virales [49] mais dont on connaît les relations étroites avec l'asthme [50] . Des vaccins inactivés et vivants expérimentaux ont été développés aux USA pour prévenir les épidémies de pneumonie par les sérotypes 4 et 7 chez les recrues militaires mais n'ont pas été utilisés chez l'enfant, et certaines interrogations sur un éventuel potentiel oncogène exigent de futures recherches [51] . Ces vaccins ne sont pas disponibles en France. On possède peu d'informations sur l'éventuelle efficacité de l'utilisation préventive d'immunoglobulines intraveineuses. Elle semble être une aide comme traitement adjuvant lors des infections disséminées du nouveau-né ou de l'immunodéprimé. Chez le sujet immunodéprimé les infections adénovirales résultent de la réactivation d'infections latentes du tissu lymphoïde (AdV 1,2,5) ou du rein ( AdV 11, 34, 35) . La ribavirine semble avoir une efficacité en aérosol et surtout par voie intraveineuse. Les protocoles thérapeutiques ne sont pas fixés [52, 53] . Quelques essais d'utilisation réussis ont porté sur le cidofovir (HPMC ou CDV) parentéral [54] . Les données chez l'enfant sont encore très fragmentaires. Aucune thérapeutique n'a fait ses preuves après le diagnostic de bronchiolite constrictive. Les seuls arguments expérimentaux concernent la corticothérapie si celle-ci pouvait être prescrite la veille de l'agression virale [55] . L'absence d'effet clinique des corticoïdes par voie systémique ou inhalée pourrait être due à une prescription trop tardive, les anomalies anatomiques étant fixées. Les bronchodilatateurs inhalés sont également le plus souvent inefficaces [34] . On ne peut que limiter les rechutes infectieuses, qui aggravent la situation respiratoire, grâce à des mesures de prévention. Le diagnostic d'infection respiratoire à AdV repose sur la mise en évidence directe du virus ou de ses constituants dans les voies aériennes. La détection de cellules spécifiquement infectées par immunofluorescence signe l'atteinte virale de l'épithélium. Mais cette méthode manque de sensibilité. Les méthodes d'amplification moléculaire permettent une amélioration de la détection virale mais la détection de séquences d'AdV ne traduit pas toujours une infection virale active, sachant cependant, que celle-ci n'est pas indispensable pour initier et entretenir une inflammation persistante des voies respiratoires inférieures. Bilan de 3 480 aspirations nasales réalisées chez l'enfant en une période de six ans Viral etiology in acute lower respiratory infections in children from a closed community Diagnostic moléculaire des infections virales respiratoires communautaires Les co-infections virales lors des bronchiolites du nourrisson immunocompétent Strain variation in adenovirus serotypes 4 and 7a causing acute respiratory disease Analysis of 15 different genome types of adenovirus type 7 isolated on five continents Adenovirus type 7 associated with severe and fatal acute lower respiratory infections in Argentina children Adenovirus type 7 h respiratory infections : a report of 29 cases of acute lower respiratory disease Molecular and serological characterization of adenovirus genome type 7 h isolated in Japan Worldwide epidemiology of human adenovirus infections Pathologie respiratoire de l'enfant immunocompétent à adénovirus : étude de 116 sujets hospitalisés Adenoviral diseases in children : a study of 105 hospital cases Comparison of clinical characteristics of adenovirus and non-adenovirus pneumonia in children Adenovirus infections in young children Adenovirus infection in the immunocompromised patient Viral pneumonia Adenovirus pneumonia in lung transplant recepients Severe adenovirus bronchiolitis in children Adenovirus 7a: a community-acquired outbreak in a children's hospital Adenovirus pneumonia Adenovirus type 7b in children's hospital Lung function in infants with chronic pulmonary disease after severe adenoviral illness Chronic lung damage caused by adenovirus type 7 : a ten-year follow-up study Factors predisposing to abnormal pulmonary function after adenovirus 7 pneumonia Bronchiolitis obliterans, bronchiectasis, and other sequelae of adenovirus type 21 infection in young children Pneumopathie sévère à adénovirus type 7 chez un adulte immunocompétent Group C adenovirus DNA sequences in human lymphoid cells Cytokines in adenoviral diseases in children: association of interleukine-6, interleukine-8 and tumor necrosis factor alpha levels with clinical outcome Respiratory syncytial virus in early life and risk of wheeze and allergy by age 13 years Differential effects of respiratory syncytial virus and adenovirus on mononuclear cell cytokine responses The molecular basis of adenovirus pathogenesis Les pneumonies à adénovirus Identification of glucocorticoid-and adenovirus E1A-regulated genes in lung epithelial cells by differential display Persistent adenoviral infection and chronic airway obstruction in children Mechanisms of airway narrowing and hyperresponsiveness in viral respiratory tract infections Role of latent viral infections in chronic obstructive pulmonary disease and asthma Amplification of inflammation in emphysema and its association with latent adenoviral infection Detection of microorganisms in the tracheal aspirates of preterm infants by polymerase chain reaction: association of adenovirus infection with bronchopulmonary dysplasia Current management of community-acquired pneumonia in children: an algorithmic guideline recommendation Rationalised prescribing for community acquired pneumonia: a closed loop audit Nosocomial adenovirus infection in a paediatric respiratory unit L'isolement en pédiatrie Les traitements non antibiotiques des pneumopathies communautaires de l'enfant Why block a small hole ABC of oxygen. 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